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Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 3 - Témoignages du 2 juin 2010


OTTAWA, le mercredi 2 juin 2010

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 18 h 45, pour étudier le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur la sécurité automobile et la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999).

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications ouverte. Je vous remercie tous d'être ici présents.

Ce soir, nous allons continuer notre étude sur le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur la sécurité automobile et la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) dont notre comité a été saisi.

Nous sommes heureux d'accueillir M. Dale Leier, directeur général de la Canadian Association of Vehicle Importers et M. Mark Nantais, président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules.

[Traduction]

Monsieur Leier, la parole est à vous. Ensuite, nous écouterons M. Nantais et nous passerons aux questions.

Dale Leier, directeur général, Canadian Association of Vehicle Importers : Honorables sénateurs, je suis heureux d'avoir été invité à comparaître devant vous pour vous faire part des commentaires de la Canadian Association of Vehicle Importers, un organisme sans but lucratif qui représente les intérêts de centaines d'entreprises et de milliers de personnes qui importent des véhicules au Canada, tant dans un but lucratif que pour le plaisir. J'ai fait part de mes commentaires à la Imported Vehicle Owners Association of Canada, qui est d'accord avec ce que je vais vous dire aujourd'hui.

Pendant un trop grand nombre d'années, la Loi sur la sécurité automobile n'a pas permis, en dépit des meilleures intentions, d'atteindre les objectifs visés, soit de faire en sorte que les Canadiens disposent des véhicules les plus sécuritaires, les moins coûteux et les plus efficaces parmi les pays développés. Au lieu de cela, nous avons vécu avec les conséquences imprévues auxquelles vont remédier, dans une certaine mesure, les modifications proposées dans ce projet de loi. Nous pourrions aller beaucoup plus loin pour faire en sorte que les Canadiens aient le genre de véhicules nécessaires pour remplir les différents rôles requis pour satisfaire aux besoins de nos vies et de nos entreprises.

Selon le Groupe international sur les données de sécurité routière et leur analyse de l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques, le Canada se classe derrière la France, l'Autriche, l'Allemagne, la Norvège, la Finlande, la Grande-Bretagne, la Suède et la Suisse pour le taux de mortalité par milliard de véhicules- kilomètres. Aussi, dans une étude récente de la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe, ou CEE- ONU, le Canada se classe au onzième rang et les États-Unis au douzième rang pour le nombre de collisions par tranche de 100 000 kilomètres parcourus.

Fait intéressant, les pays qui ont des taux de collision, de collision avec blessures et de collisions mortelles plus bas que le Canada ont aussi des autoroutes à haute vitesse et une plus large combinaison de véhicules avec conduite à gauche et de véhicules avec conduite à droite.

En l'occurrence, il apparaît évident que plutôt que d'avoir permis d'augmenter la sécurité des véhicules automobiles, la loi actuelle n'a réussi qu'à créer une barrière au commerce international derrière laquelle les manufacturiers du pays ont travaillé pendant des décennies. L'industrie automobile est responsable des problèmes actuels auxquels elle fait face. Malheureusement, si l'industrie automobile avait fait preuve de plus d'innovation et de créativité et avait construit des véhicules mieux adaptés aux besoins des particuliers et des entreprises, elle aurait pu absorber une bonne partie du choc du ralentissement économique engendré par l'effondrement du secteur immobilier. Au lieu de cela, ils ont dû faire la file pour demander de l'aide sociale, et leurs échecs sont devenus un autre fardeau à porter pour les contribuables.

En diminuant les restrictions sur les véhicules importés, nous faisons un pas de plus vers un vrai libre-échange. Nous permettons ainsi aux marchés de déterminer ce que les constructeurs devraient construire plutôt que de voir les constructeurs décider de ce que les consommateurs devraient conduire. Si jamais vous doutez des effets bénéfiques de la présence de véhicules importés sur le marché, imaginez ce que vous conduiriez aujourd'hui si Volkswagen n'avait pas mis sur le marché de petits véhicules à haut rendement énergétique dans les années 1960, si Honda n'avait pas lancé des véhicules à haut rendement énergétique abordables ou si Toyota n'avait pas établi la norme en matière de fiabilité pour les véhicules à haut rendement énergétique.

Si vous avez de la difficulté à imaginer un tel monde, vous pourriez consulter l'édition d'aujourd'hui du quotidien The Globe and Mail, qui rapporte qu'au moment où, pour la première fois, Hyundai se classe parmi les six premiers pour les ventes au Canada, ce sont les ventes de camions qui stimulent les gains de Ford et de Chrysler. Sans aucun doute, de nombreuses raisons expliquent cela, mais l'ouverture des marchés aux véhicules importés devrait encourager les constructeurs à répondre davantage aux besoins des marchés.

L'amélioration du bilan en matière de sécurité routière est facile à réaliser. Cependant, notre attention ne doit plus être centrée sur ce que nous conduisons, mais plutôt sur les endroits où nous conduisons et sur notre façon de conduire. Des routes mieux balisées, mieux éclairées et mieux entretenues et dotées d'une signalisation adéquate aideront les conducteurs et les passagers à être plus en sécurité, peu importe le type de véhicule qu'ils conduisent. Pendant ce temps, une meilleure formation des conducteurs leur permettra de conduire de façon plus sécuritaire en fonction des conditions routières et de la circulation. Une plus grande diversification des moyens de transport par la séparation des différents types de véhicules peut favoriser — en toute sécurité — le partage de notre infrastructure routière. Cela permettrait d'augmenter l'efficacité, de réduire la consommation d'essence, de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et d'augmenter la sécurité. Enfin, si les différents ordres de gouvernement du Canada prenaient vraiment au sérieux la question de la sécurité routière, ils adopteraient des politiques que l'on retrouve dans de nombreux autres pays du G8, qui imposent des inspections régulières des véhicules.

Accorder une plus grande latitude aux importateurs quant aux types de véhicules qu'ils importent au Canada inciterait certainement les constructeurs du pays à satisfaire aux besoins du marché. Tout le monde est préoccupé par l'environnement et notre dépendance aux combustibles fossiles dans le domaine du transport. Il y a une relation très étroite entre la taille d'un véhicule, la consommation d'essence et les émissions. Les pays européens l'ont reconnu depuis des années, ce qui a eu pour résultat d'en faire des chefs de file à l'échelle mondiale en matière de conception de véhicules à la fois petits, attrayants, confortables, sécuritaires, écoénergétiques, pratiques et agréables qui occupent moins d'espace sur les routes et qui émettent moins de polluants.

Si les Canadiens sont obligés d'acheter le pétrole au prix qui a cours sur le marché international, pourquoi les empêche-t-on d'avoir accès à des véhicules de classe mondiale?

Il ne fait aucun doute que le projet de loi S-5 est un pas très attendu dans la bonne direction. Cependant, les membres de la Canadian Association of Vehicle Importers sont d'avis que ces modifications ne vont pas assez loin en ce qui concerne la satisfaction des besoins des automobilistes canadiens : il faut leur permettre d'exercer les droits et les libertés qu'on devrait leur accorder. On devrait permettre aux Canadiens d'importer tout véhicule fabriqué dans le monde pourvu qu'il soit conforme aux normes établies par le Forum mondial de l'harmonisation des Règlements concernant les véhicules de la CEE-ONU. Il est temps d'arrêter d'imposer des produits indésirables aux contribuables tout en protégeant du monde réel des entreprises qui ont échoué. Mettons en œuvre ce programme et faisons confiance aux consommateurs canadiens qui désirent s'éloigner de produits médiocres et sans attrait. Permettons aux Canadiens d'avoir les véhicules qu'ils désirent conduire plutôt que ceux que des gens bien intentionnés, mais surprotecteurs préfèreraient pour eux.

Parlons précisément des éléments inclus dans le projet de loi S-5. S'il est adopté, le projet de loi règlera une injustice actuelle qui empêche les Canadiens d'importer des véhicules tout à fait sécuritaires et conformes aux normes américaines. Un de nos membres a récemment essayé d'acheter un Mustang Cobra modifié par Roush. Pour ceux qui ne le savent pas, Roush est un fabricant détenteur d'une licence qui modifie les performances et l'apparence des véhicules après les avoir reçus directement de l'usine Ford. Les modifications apportées par Roush n'annulent pas la garantie du constructeur et ne contreviennent pas aux normes établies par l'U.S. Motor Vehicle Safety Act, avec laquelle la Loi sur la sécurité automobile canadienne est en voie d'être harmonisée. Tandis que les détaillants canadiens peuvent acheter et importer ces véhicules Roush pour les revendre aux Canadiens, notre membre s'est vu interdire de le faire lui-même en dépit du fait qu'aucune modification n'avait été apportée au véhicule après sa sortie de l'usine.

À cet égard, il est agréable de constater que cette loi accorderait enfin les mêmes droits aux citoyens canadiens que ceux dont jouissent les entreprises canadiennes.

En ce qui concerne la loi, s'il existe une préoccupation autre que celles qui ont été soulevées plus tôt, c'est qu'elle ne va pas assez loin. Le projet de loi S-5 prévoit que cela ne s'appliquera qu'aux véhicules vendus au détail. Que cela signifie-t-il? Sans une définition de ce qu'est le « détail », il est possible que les importateurs soient de nouveau pris dans des dédales administratifs lorsqu'ils achètent des véhicules lors de transactions d'ordre privé, au cours d'un encan, ou encore auprès d'un grossiste ou d'un autre fabricant.

En effet, il n'y a pas de bonnes raisons pour limiter l'importation aux véhicules vendus au détail. Si un importateur canadien prévoit acheter des véhicules en gros puis qu'il prévoit les faire modifier pour satisfaire aux exigences de la réglementation canadienne — avec des pièces canadiennes et en faisant appel aux services de travailleurs et d'inspecteurs canadiens —, il me semble que les dispositions de la Loi sur la sécurité automobile sont respectées et que les profits canadiens imposables sont maintenus aussi.

En conclusion, j'aimerais féliciter le comité pour son travail. Cependant, que ceci ne soit pas un aboutissement, mais un nouveau départ. Que ceci soit le premier pas en vue d'affranchir les Canadiens et de les libérer pour qu'ils puissent exercer pleinement les droits et les privilèges auxquels ils ont droit à titre de citoyens de notre merveilleux pays. Accordons aux Canadiens le même respect et les mêmes privilèges que ceux qui sont accordés aux personnes qui vivent dans les pays démocratiques du monde entier : celui de pouvoir être propriétaire et de pouvoir conduire le type de véhicule qui répond le mieux à leurs besoins, tel qu'ils l'auront décidé eux-mêmes.

Mark Nantais, président, Association canadienne des constructeurs de véhicules : Merci de me fournir l'occasion de comparaître devant vous. Ma déclaration préliminaire portera sur le projet de loi S-5 et les questions qui y sont associées en ce qui concerne la satisfaction de nos obligations contractées dans le cadre de l'ALENA, l'Accord de libre- échange nord-américain. L'Association canadienne des constructeurs de véhicules, ou ACCV, est un organisme national qui représente, depuis plus de 40 ans, les intérêts des plus importants constructeurs et grossistes de camions de petit et de gros tonnage du Canada. Chrysler, Ford, General Motors et Navistar International Corporation sont quelques-uns de nos membres actuels. Ensemble, ces entreprises fabriquent 74 p. 100 des véhicules produits au Canada et 45 p. 100 des véhicules vendus aux consommateurs canadiens, et comptent plus de 100 000 employés en service ou retraités.

Ces entreprises font aussi partie de sociétés multinationales. Pour la discussion de ce soir, il importe de noter que ces entreprises exercent aussi des activités de fabrication et de ventes partout en Amérique du Nord, y compris au Mexique.

Dans le cadre de l'ALENA, le Canada, le Mexique et les États-Unis ont adopté des mesures pour limiter les restrictions à l'importation des véhicules d'occasion. Comme les États-Unis et le Mexique ont déjà modifié leur réglementation en conséquence, le Canada doit remplir ses obligations contractées en vertu de l'ALENA. Bien que l'ACCV appuie cette étape, nous devons nous pencher sur quelques préoccupations et sur certains aspects pratiques.

Premièrement, l'ACCV et les sociétés qui en sont membres sont des partisans à la fois du commerce loyal et de la libre entreprise. Même si nous sommes favorables à l'idée de permettre l'importation de véhicules d'occasion des États- Unis et du Mexique, nous n'appuyons pas les modifications radicales aux exigences qui permettraient d'importer au Canada des véhicules presque neufs d'autres pays.

L'allégement des restrictions du Canada en matière d'importation de véhicules d'occasion a commencé dans le cadre de l'accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Graduellement, on a vu le Canada permettre graduellement l'importation de véhicules d'occasion en provenance des États-Unis, à partir de 1989 environ, jusqu'à la levée des restrictions en 1993. L'industrie et les gouvernements, tant au Canada qu'aux États-Unis, étaient d'accord pour agir en raison du fait que l'industrie est hautement intégrée, ce qui avait pour résultat que des véhicules presque identiques étaient vendus dans les deux pays. De plus — et c'est très important —, ces deux pays collaboraient étroitement et avaient harmonisé la réglementation en matière de sécurité automobile et d'environnement, ce qui voulait dire, encore une fois, que les véhicules qui se trouvaient sur les routes étaient en grande partie identiques.

Il faut noter que l'harmonisation de la réglementation canadienne en matière de sécurité automobile avec celle des États-Unis a fait en sorte que les Canadiens reçoivent des véhicules qui satisfont à la réglementation en matière de sécurité automobile et d'environnement la plus stricte du monde. Cela nous a amené au plus haut dénominateur commun plutôt qu'au plus bas dénominateur commun et cela, d'une façon qui a été peu coûteuse pour les Canadiens.

En raison du haut niveau d'intégration atteint en matière de fabrication de véhicules dans la zone de l'ALENA, nous nous retrouvons actuellement, avec le Mexique, dans une situation semblable — mais pas identique — à celle dans laquelle nous étions avec les États-Unis il y a 20 ans. Tandis que les véhicules produits dans chaque pays sont aussi largement offerts partout dans la zone de l'ALENA, la demande des consommateurs du Mexique et les différences en matière de réglementation font en sorte que le parc de véhicules présente une apparence légèrement différente.

Comme il est indiqué dans le projet de loi S-5, nous devons nous assurer que les véhicules d'occasion importés au Canada en provenance du Mexique sont entièrement conformes à la réglementation canadienne, tant pour des raisons environnementales que de sécurité.

On ne devrait pas permettre l'importation de véhicules presque neufs de pays qui se trouvent à l'extérieur de la zone de l'ALENA en raison des différences significatives en matière de réglementation sur la sécurité automobile et les émissions de gaz à effet de serre que l'on retrouve ailleurs dans le monde.

Les véhicules plus vieux sont beaucoup moins écologiques que les modèles récents. En fait, un véhicule de 1993 pollue 17 fois plus que le modèle de cette année. Bien que le Canada ait introduit des mesures dites « légères », comme les rabais aux consommateurs pour l'échange de vieux véhicules, certains pays ont mis en œuvre des programmes ambitieux pour retirer les vieux véhicules des routes plus tôt dans leur vie utile parce que les nouveaux véhicules sont beaucoup plus écologiques et moins énergivores. Par exemple, au Japon, dès qu'un véhicule atteint sa cinquième année d'utilisation, les consommateurs sont obligés de faire des mises à niveau et des réparations coûteuses. De plus, les frais d'immatriculation des véhicules augmentent de façon spectaculaire, au point où maintenir un vieux véhicule sur la route coûte trop cher aux consommateurs.

Ce genre de politique exige l'élimination d'une grande quantité de véhicules et, en conséquence, un nombre important de ces véhicules d'occasion à bas prix sont exportés vers divers pays du monde entier.

Si le Canada lève ses restrictions actuelles sur les importations de véhicules d'occasion, il deviendra une cible d'exportation pour ces vieux véhicules, moins écologiques et dotés d'équipements de sécurité désuets. En soi, l'importation de voitures d'occasion pourrait constituer une forme grave de dumping environnemental. Quand un pays est en mesure d'expédier des millions de véhicules d'occasion dans un autre pays, l'élimination des véhicules à la fin de leur vie utile et un parc de véhicules peu performant en matière d'environnement et de sécurité deviennent le problème de l'autre pays. C'est une politique qui semble être intenable, surtout en fonction de l'orientation et de l'intention actuelle du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux. Cela aura un effet important sur l'industrie intérieure du Canada et au bout du compte, les consommateurs en payeront le prix.

Ainsi, bien que l'ACCV soit favorable à ce que le Canada s'acquitte de ses obligations en vertu de l'ALENA en raison des similitudes qui existent principalement entre les marchés canadien et américain, nous sommes fermement opposés à l'idée d'étendre cette politique pour inclure, à l'avenir, d'autres pays dans tout accord commercial bilatéral auquel le Canada pourrait songer à adhérer.

Le deuxième sujet de préoccupation, c'est que tandis que les fabricants certifient les véhicules qui sont assemblés au Mexique et importés pour être vendus au Canada — comme le Dodge Journey, la Ford Fusion ou la Chevrolet Avalanche —, les constructeurs automobiles ne peuvent en aucun cas être tenus responsables de certifier que les véhicules d'occasion vendus à l'origine dans un autre pays sont conformes aux normes canadiennes en matière de sécurité et de protection de l'environnement nécessaires à leur importation, tout comme ils ne sont pas en mesure de fournir des informations sur les modifications subies par les véhicules importés pour les rendre conformes aux exigences canadiennes en matière de sécurité et d'émissions. La responsabilité de la certification doit être laissée à l'individu ou la société qui importe le véhicule.

Troisièmement, après l'adoption du projet de loi, les organismes de réglementation doivent travailler en étroite collaboration avec l'industrie pour s'assurer que toutes les modifications à la réglementation n'imposent pas inutilement aux constructeurs automobiles le fardeau des obligations ou des exigences qui incombent aux importateurs des véhicules d'occasion. De même, le gouvernement doit faire savoir efficacement et publiquement quels véhicules sont admissibles à l'importation.

Nous tenons à insister sur la nécessité pour le Canada de modifier ses restrictions en matière d'importation de véhicules d'occasion, pour qu'elles s'harmonisent avec celles des États-Unis. Nous croyons savoir que Transports Canada a envisagé de prendre des mesures pour harmoniser une partie du traitement des importations de véhicules d'occasion avec les États-Unis. Tandis que les véhicules de 15 ans et plus n'ont pas à satisfaire aux normes réglementaires en vigueur au Canada au moment de la fabrication, aux États-Unis, les véhicules doivent être âgés de plus de 25 ans pour éviter d'avoir à être conformes aux normes relatives à la sécurité automobile et à l'environnement.

Cette politique du Canada a été mise en place à l'époque où bien peu de véhicules restaient sur les routes pendant plus de 15 ans, et cela a été fait principalement pour faciliter l'importation de véhicules de collection et antiques. L'amélioration de la durabilité des véhicules a sensiblement augmenté la disponibilité des véhicules âgés de plus de 15 ans sur le marché mondial. Ne pas s'occuper de l'afflux potentiel de véhicules qui n'ont pas été conçus pour un marché comme celui du Canada — les véhicules à conduite à droite et ceux qui sont conformes à peu de normes de sécurité ou à des normes très différentes, par exemple — n'est pas une bonne politique publique. Comme c'est le cas pour toute la réglementation sur la sécurité automobile et l'environnement qui existe entre le Canada et les États-Unis, nous sommes de fervents partisans de l'harmonisation de ces exigences.

Voilà qui conclut ma déclaration. Je serais heureux de répondre à toutes vos questions.

Le président : Merci aux deux témoins.

Avant de céder la parole aux sénateurs pour qu'ils posent leurs questions, je voudrais dire ceci : comme je l'ai dit hier au comité, nous devrions normalement — après la période de questions — procéder à l'étude article par article du projet de loi. Ensuite, nous irons à huis clos pour notre rapport sur les télécommunications.

Le sénateur Mercer : Merci, messieurs, d'être ici. À vous écouter, cela semble plus compliqué que nous l'avions pensé.

Monsieur Leier, je suis un peu mêlé. Bien que nous modifions les règles afin qu'elles soient conformes aux dispositions de l'ALENA et de notre entente avec notre partenaire, le Mexique, d'autres nous ont dit que peu de véhicules entreraient dans cette catégorie. On a suggéré que les Canadiens qui passent l'hiver au Mexique voudraient peut-être rapporter un véhicule acheté là-bas, et, bien entendu, selon les règles prévues par le projet de loi — je suis maintenant en train de le défendre —, les véhicules doivent respecter les normes en vigueur à l'endroit où ils sont importés. Par exemple, s'ils sont importés en Ontario, ils doivent suivre les règles de l'Ontario; même chose en Nouvelle-Écosse et ainsi de suite.

À votre avis, de combien de véhicules ou d'automobiles est-il question?

M. Leier : Je ne crois pas que des véhicules seront importés en masse du Mexique. La discussion porte sur la qualité, et non sur la quantité. Mon estimé collègue donne l'impression que d'énormes quantités de véhicules défectueux et pollueurs traverseront la frontière.

En réalité, il y a seulement deux raisons d'importer un véhicule : des motifs économiques et d'autres caractéristiques. Les gens ont tendance à importer des automobiles uniques ou de collection, des véhicules que les Canadiens ne peuvent pas généralement se procurer. Certains modèles européens vendus sur le marché mexicain pourraient attirer un petit nombre de Canadiens. Or, le réseau routier du Mexique est dur pour les véhicules; je ne crois donc pas que les nombres soient très élevés. On parle probablement d'un total de quelques milliers par année, ce qui ne représente qu'une infime partie de l'ensemble du parc automobile canadien.

Le sénateur Mercer : Vous avez opposé nos produits médiocres aux véhicules importés du Mexique. J'ai de la difficulté à comparer les véhicules du Mexique à ceux qui peuvent être fabriqués ici, non seulement par les trois grands, mais aussi par Toyota, Honda et Hyundai.

Mise à part la Mustang dont vous avez parlé, y a-t-il d'autres véhicules au Mexique que le Canada et les États-Unis ne peuvent pas importer à l'heure actuelle?

M. Leier : Certainement. Il y a les Alfa Romeo, les Fiat, les Peugeot, les Citroën, ainsi que nombre d'autres véhicules européens vendus au Mexique. Je parlais plus généralement de véhicules qui sont offerts sur le marché mondial, mais que les Canadiens ne peuvent pas se procurer.

Le sénateur Mercer : Il est possible d'acheter des Fiat et des Alfa Romeo ici.

M. Leier : On en offre peut-être un ou deux modèles, mais on ne vend pas du tout de Peugeot ou de Citroën.

Le sénateur Mercer : Monsieur Nantais, vous avez parlé du dumping environnemental.

Évidemment, la première fois que j'ai lu la mesure législative, j'ai eu la même préoccupation. Or, en répondant à mes questions hier, le ministre nous a assurés que les règles énoncent clairement que les véhicules doivent respecter les normes fixées par l'organisme de réglementation local, c'est-à-dire la province dans le contexte canadien. Compte tenu du fait qu'en Nouvelle-Écosse et en Ontario, les normes environnementales sont assez sévères, pourquoi le dumping environnemental vous préoccupe-t-il?

M. Nantais : En ce qui a trait au dumping environnemental, je parle des véhicules qui proviennent en grande quantité de pays dans lesquels les normes environnementales sont moins sévères que les nôtres.

Par exemple, fait peu connu : en Amérique du Nord — au Canada et aux États-Unis —, nous avons adopté les normes nationales en matière de smog les plus rigides au monde.

L'Europe n'est pas rendue là. En fait, elle a deux ou trois générations de retard, et elle ne nous rattrapera probablement pas à tout le moins avant 2016. D'ici ce temps-là, nous aurons instauré des normes encore plus sévères. J'ai tout à fait raison de dire que nos normes sont les plus rigides au monde, et ce, même en matière de sécurité, d'équipement lié à la sûreté et de performance.

Dans de nombreux cas, il est vrai que les gens aimeraient que davantage de véhicules européens soient importés au Canada. Or, le fait est que, à de nombreux égards et en ce qui a trait à la sûreté, les normes établies là-bas diffèrent des nôtres ou ne leur ressemblent pas.

Je vous donne un exemple : les normes relatives aux collisions arrière à haute vitesse, ce qu'on appelle les normes d'étanchéité du circuit d'alimentation en carburant, comptent parmi les plus cruciales. Or, ces pays n'en ont pas. Il en va de même pour ce qui est de la résistance du pavillon à la pénétration. De plus, les normes relatives aux collisions latérales sont moins sévères que les nôtres. Nous sommes d'accord qu'il est favorable que les consommateurs aient de nombreuses options, mais une politique publique qui permet l'importation de véhicules conformes à des normes inférieures n'est pas une bonne politique. Voilà ce que je veux dire lorsque je parle de dumping.

À titre d'exemple, le Japon a exporté littéralement des centaines de milliers de véhicules presque neufs à d'autres marchés, notamment en Nouvelle-Zélande, ce qui a eu pour résultat de détruire complètement le marché de l'industrie de ce pays.

Cet exemple illustre ce qui pourrait se produire. Ce que nous disons, c'est qu'il faut agir prudemment; lorsque nous cherchons à conclure des accords de libre-échange, veillons à ce qu'ils soient équilibrés et soyons conscients de ce que nous pourrions avoir à affronter. Nous savons que les gouvernements adoptent des mesures portant sur la responsabilité élargie des producteurs pour les véhicules en fin de vie utile et tout cela, mais ces véhicules viennent ajouter au problème que nous avons déjà.

Cette réponse concerne mes remarques.

Le sénateur Mercer : Prenons un instant pour approfondir la question de la Nouvelle-Zélande. Voulez-vous dire que, parce que la Nouvelle-Zélande a signé un accord de libre-échange avec cinq autres pays d'Asie, y compris la Chine, l'Australie évidemment, le Vietnam je crois et le Japon peut-être, sa production nationale a été anéantie?

M. Nantais : Elle n'est plus. Cela s'est passé il y a quelques années.

Le sénateur Mercer : Monsieur le président, ma dernière question s'adresse à M. Leier. Je sais qui M. Nantais représente. Il a mentionné un certain nombre d'entreprises. Je n'ai pas entendu; vous l'avez peut-être dit, mais je n'ai pas entendu.

Combien de personnes votre association représente-elle, et qui sont-elles?

M. Leier : Je représente approximativement 40 entreprises qui importent des véhicules au Canada, des véhicules spéciaux qui répondent à des besoins que les constructeurs nationaux ont choisi de ne pas satisfaire, pour quelque raison que ce soit. Elles emploient à leur tour des centaines de mécaniciens et de vendeurs. Il s'agit d'une micro- industrie et, je le répète, d'un créneau commercial spécialisé.

Le sénateur Mercer : Où êtes-vous situé?

M. Leier : Je suis à Victoria.

Le sénateur Zimmer : Merci de vos déclarations.

Pouvez-vous voir mes notes? Vous avez répondu à ma première question et vous avez posé ma deuxième, ce qui veut dire, monsieur le président, que je n'ai rien à demander.

Le sénateur Merchant : J'ai un peu d'expérience dans le domaine : il y a quelques années, je conduisais une vieille Jaguar, et personne ne voulait me procurer de pièces ou la réviser. Je vis à Regina; ma voiture était donc presque tout le temps dans le garage. Sera-t-il difficile de faire réviser ces véhicules ou d'avoir les bonnes pièces?

M. Leier : Sauf le respect que je vous dois, la réparation de Jaguar pose aussi problème en Europe. En ce qui concerne les pièces, il est facile de les acquérir. Un des faits intéressants par rapport aux véhicules japonais, c'est que les techniques et les outils utilisés pour les modèles vendus ici fonctionnent tout aussi bien avec les véhicules importés. Nous n'avons aucune difficulté à entretenir nos parcs de véhicules spéciaux.

Le sénateur Merchant : Vous n'avez pas parlé de véhicules japonais, vous parliez de véhicules européens, comme les Fiat, pour lesquels vous obtenez toutes les pièces et que vous pouvez réviser.

M. Leier : C'est exact. Il y a aussi des véhicules japonais qui sont vendus au Mexique, mais pas ici. Je le répète, en général, les Canadiens s'intéressent surtout à l'importation de véhicules spéciaux. J'ajouterais simplement qu'un grand nombre des véhicules étrangers en question sont petits et ont un haut rendement énergétique. Or, il y a une corrélation entre la consommation de carburant et les émissions, et ce sont là les besoins que les Canadiens cherchent à combler.

Le sénateur Merchant : Faudra-t-il former les inspecteurs qui travaillent à la frontière?

M. Leier : Je ne crois pas, non. La procédure en place semble très bien fonctionner; les entreprises privées font les inspections au nom des différents organismes de réglementation.

Le sénateur Housakos : Ma question sera plus simple et précise que celles — bien plus compliquées — de mon collègue, le sénateur Mercer.

D'abord, je tiens à vous remercier d'appuyer le projet de loi et de reconnaître qu'il s'agit du premier pas dans la bonne direction.

Ma question est la suivante : une fois que le projet de loi sera adopté, quelles en seront les répercussions sur votre industrie? Le nombre de voitures qui entrent au Canada en provenance du Mexique augmentera-t-il, diminuera-t-il ou restera-t-il le même? De façon générale, quelles seront les conséquences de l'adoption du projet de loi sur votre industrie?

M. Leier : Nous prévoyons une légère augmentation. Je le répète, il s'agit en petite partie de véhicules qui n'ont jamais été vendus au Canada et qui ont des caractéristiques uniques sur le plan de l'esthétique, de la performance et de la maniabilité. Ce sont là les détails auxquels nos membres ont tendance à attacher du prix, et il y aura donc une modeste augmentation à cet égard. Toutefois, en ce qui concerne l'ensemble du parc automobile canadien, les répercussions seront minimes.

Le sénateur Fox : Si je comprends bien votre déclaration, monsieur Nantais, vous ne vous opposez pas au projet de loi — en gros, il devrait donc être adopté tel quel —, mais les règlements qui suivront vous préoccupent; par conséquent, je présume que vous allez jouer un rôle actif dans les discussions avec le gouvernement sur le type de règlements qui devraient être établis à partir de la mesure.

M. Nantais : Nous allons jouer un rôle très actif dans l'élaboration des règlements, mais nous n'avons absolument rien à redire au projet de loi. Nous prévoyons un processus qui ressemblera beaucoup à celui relatif aux véhicules américains usagés en place à l'heure actuelle. Non, nous n'avons aucune objection au projet de loi sous sa forme actuelle.

Toutefois, si vous me permettez de le souligner, en ce qui concerne les normes et celles que les véhicules en question auraient à satisfaire, ce sont plutôt les normes fédérales que celles de la province qui entreraient en ligne de compte. En effet, du point de vue de la sûreté et de l'environnement, ce sont les normes fédérales qui régissent presque tous les aspects du véhicule. Dans les provinces, la plupart des normes touchent des détails d'après-vente, si l'on veut. Je voulais juste apporter cette précision au cas où elle soit utile.

Le sénateur Zimmer : Monsieur Leier, vous avez parlé de l'importation de Mustang.

Le président : Désolé de vous interrompre; c'est une alerte d'incendie. On nous dira dans 30 secondes si nous devons évacuer. Si tel est le cas, voulez-vous fixer un délai relativement à l'heure où nous rentrons? Disons que nous sommes dehors jusqu'à 20 heures, est-ce que nous continuons ou est-ce que nous arrêtons et nous revenons la semaine prochaine? Je suis à votre disposition.

Des voix : Nous arrêtons et nous revenons.

Le sénateur Comeau : Puis-je suggérer, s'il s'agit bien d'une alerte d'incendie et que nous devons évacuer, je pense que nous avons probablement posé la plupart de nos questions, si ces messieurs sont d'accord; ainsi, si nous revenons, nous pourrions passer tout de suite à...

Le président : L'étude article par article?

Le sénateur Comeau : Oui.

Le président : Posez vos questions, sénateurs Comeau et Zimmer, et nous demanderons aux témoins de finir sur ce.

Le sénateur Comeau : Monsieur Nantais, êtes-vous d'accord avec M. Leier que vous ne vous attendriez pas à ce que les véhicules importés à l'avenir soient plus ou moins des véhicules spéciaux?

M. Nantais : Comme il l'a dit, il y a une certaine demande pour certains véhicules et, par conséquent, certains profits y sont associés, mais nous ne prévoyons pas une entrée très importante de véhicules.

Le sénateur Comeau : Merci. Cela répond à ma question.

Le sénateur Zimmer : Monsieur Leier, vous avez parlé des Mustang; or, si je ne m'abuse, ces véhicules sont construits à Détroit, comme les GM sont fabriqués à Oshawa. Si les voitures entrent au Canada, vous pouvez obtenir les pièces de Détroit, n'est-ce pas?

Le président : Désolé, sénateur Zimmer, parlez-leur en sortant. J'aimerais remercier les témoins. Nous reviendrons après pour l'étude article par article. Si tous sont d'accord, nous nous rendrons à la pièce 257 de l'édifice de l'Est pour poursuivre.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

Le président : Est-il convenu de procéder à l'étude article par article du projet de loi S-5?

Des voix : D'accord.

Le président : Êtes-vous d'accord de suspendre l'adoption du titre?

Des voix : D'accord.

Le président : Êtes-vous d'accord de suspendre l'adoption de l'article 1, qui contient le titre abrégé?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 3 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 4 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 5 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 6 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Le titre est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Est-ce que le comité veut annexer des observations au rapport?

Des voix : Non.

Le président : Est-il convenu que je fasse rapport de ce projet de loi au Sénat?

Des voix : D'accord.

Le président : Nous allons maintenant poursuivre à huis clos.

(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)


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