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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 28 mai 2019

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui à 17 heures pour étudier la teneur des éléments des sections 23 et 24 de la partie 4 du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures et, à huis clos, pour l’étude d’un rapport préliminaire.

La sénatrice Rosa Galvez (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Bonsoir et bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je m’appelle Rosa Galvez, sénatrice du Québec, et je préside ce comité. Je demanderais maintenant aux sénateurs qui sont autour de la table de se présenter.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Frum : Linda Frum, de l’Ontario.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, Québec.

[Français]

Le sénateur Carignan : Claude Carignan, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.

La sénatrice Simons : Paula Simons de l’Alberta, territoire du Traité no 6.

La sénatrice McCallum : Mary Jane McCallum, région du Traité no 10, Manitoba.

La présidente : Chers collègues, ce soir, nous commençons notre étude de la teneur des éléments des sections 23 et 24 de la partie 4 du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures présentées à la Chambre des communes le 8 avril 2019.

Pour l’occasion, nous accueillons, de Parcs Canada, M. Michael Nadler, directeur général par intérim, et M. Kevin McNamee, directeur, Direction de l’établissement des aires protégées. Merci beaucoup de vous joindre à nous. Je vous invite dès maintenant à nous livrer votre déclaration liminaire. Nous passerons ensuite aux questions des membres du comité.

[Français]

Michael Nadler, directeur général par intérim, Parcs Canada : Nous sommes heureux d’être parmi vous ce soir. Nous tenons à remercier le comité de l’invitation.

[Traduction]

Merci beaucoup, madame la présidente, de m’avoir invité à témoigner ici ce soir. Je suis accompagné de Kevin McNamee, notre directeur de la Direction de l’établissement des aires protégées. Je suis le directeur général par intérim de Parcs Canada. Je m’en voudrais de ne pas souligner que Paul Graner et Bonnie Corriveau de Parcs Canada se sont également joints à nous pour cette réunion.

Mme Corriveau appuie le personnel de Parcs Canada dans les réunions des comités depuis des années. Il s’agit en fait de sa dernière présence à une séance de comité avant d’entrer dans de nouvelles fonctions, alors nous sommes heureux de l’avoir avec nous ce soir.

Comme vous l’avez mentionné, madame la présidente, la Loi d’exécution du budget de 2019 contient trois éléments qui ont trait au travail de notre ministère. Deux d’entre eux concernent des modifications à la Loi sur les parcs nationaux du Canada, et le troisième implique la modification de la Loi sur l’Agence Parcs Canada.

La première modification à la Loi sur les parcs nationaux du Canada concerne la création du parc national Thaidene Nëné. Il s’agit d’un parc situé dans les Territoires du Nord-Ouest, à l’extrémité est du Grand lac des Esclaves. Si vous vous représentez la situation géographique de Yellowknife et que vous faites un saut vers l’est, vous allez tomber très rapidement sur une collectivité appelée Lutsël K’e. La carte que nous sommes en train de vous distribuer vous donnera une idée du parc projeté. C’est l’un des plus beaux endroits au pays.

Les modifications législatives ont trait à la création du parc, certes, mais elles serviront également à cautionner l’utilisation dudit parc à des fins particulières par les peuples autochtones et les résidants du Nord, de manière à leur permettre d’y pratiquer leurs modes de vie.

La deuxième modification à la Loi sur les parcs nationaux concerne les limites de deux stations de ski du parc national Banff, nommément la station Lake Louise et la station Mount Norquay. Ces modifications visent à faciliter l’exploitation de ces deux stations et la planification les concernant. L’établissement de ces limites s’est fait en négociation avec les exploitants, mais il a aussi fait l’objet d’une vaste consultation publique et d’une étude d’impact environnemental.

Le troisième élément, qui a été annoncé initialement dans le budget de 2014, est une modification du cycle des crédits de l’Agence Parcs Canada. Bien qu’il ait été annoncé dans le budget de 2014, ce changement n’avait pas été intégré à la loi d’exécution de ce budget. Or, on l’a repris cette année et la mesure a été annoncée dans le budget de 2019. Des modifications législatives à la Loi sur l’Agence Parcs Canada figurent également dans la Loi d’exécution du budget.

Ce changement vise à harmoniser Parcs Canada avec un certain nombre d’autres ministères et organismes qui détiennent des biens importants. Mon collègue Kevin parlera un peu plus en détail de la création de Thaidene Nëné. Ensuite, je parlerai des stations de ski et de l’affectation d’un an.

Kevin McNamee, directeur, Direction de l’établissement des aires protégées, Parcs Canada : Mesdames et messieurs, bonsoir. Les articles 328 à 331 et 333 de la Loi d’exécution du budget ont pour objet de modifier la Loi sur les parcs nationaux du Canada afin de créer la réserve de parc national Thaidene Nëné. L’objectif est de protéger légalement 14 000 km2 de forêt boréale, d’écosystèmes d’eau douce, et d’habitats fauniques. L’aire ainsi créée — ce 47e parc national du Canada — comprendra aussi une partie du territoire traditionnel de plusieurs organisations et collectivités autochtones.

Le gouvernement s’est engagé à créer cette réserve de parc dans le budget de 2016, où l’on détaillait le financement à long terme nécessaire pour établir, développer et exploiter Thaidene Nëné.

Lors des consultations menées à cet égard en 2016 et 2017, 90 p. 100 des participants ont donné leur appui à cette réserve de parc national. Or, ce qui est plus important encore, c’est que les modifications proposées dans le projet de loi C-97 répondent aussi aux questions et aux préoccupations soulevées au cours de ces consultations, notamment par les habitants du Nord.

Parcs Canada procède actuellement à la négociation d’ententes sur le transfert des terres avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le GTNO, la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e — le principal promoteur de ce parc — et la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest, ainsi qu’avec plusieurs autres organisations autochtones. L’entente sur le transfert des terres que nous sommes sur le point de conclure avec le GTNO est essentielle, car elle établit les modalités selon lesquelles le gouvernement territorial transférera au Canada les terres de cette réserve de parc national.

En ce qui concerne les modifications proposées, l’article 331 ajoute une description des limites définitives du parc à l’annexe 2 de la Loi sur les parcs nationaux du Canada. Nous avons fourni au comité une carte qui vous donne une idée de ces frontières. Dans le projet de loi, la description des latitudes et des longitudes des limites de la réserve s’étend sur plus de huit pages.

Ces limites renferment une représentation remarquable de la région naturelle des Bas-Plateaux boréaux du Nord-Ouest. Elles permettront d’assurer la préservation de l’intégrité écologique, et les visiteurs pourront y vivre des expériences iconiques. S’y trouvent également des zones qui revêtent une importance particulière pour les collectivités autochtones. Enfin, toutes les zones à potentiel minier élevé et presque toutes les zones à potentiel minier « modéré à élevé » en ont été exclues.

Les articles 328 à 330 font en sorte que les activités et les utilisations des terres non autochtones qui sont habituellement interdites dans les parcs nationaux pourront se poursuivent dans la réserve de parc national Thaidene Nëné. Ces activités comprennent la cueillette de baies et de plantes médicinales et curatives, la coupe et le ramassage de bois pour les feux de camp, l’établissement d’abris temporaires et la chasse de subsistance, le tout pour usage personnel. Lors de nos consultations auprès des résidants du Nord, il a été établi que ces activités étaient celles qu’ils souhaitaient poursuivre.

Les modifications garantissent également le maintien des permis existants à l’intérieur des limites proposées et le droit de renouveler ces baux, par exemple pour un gîte touristique et une propriété récréative dans le secteur Reliance du parc. Ils confèrent également à Parcs Canada le pouvoir d’autoriser des activités comme l’accès par avion — un moyen important d’accéder à cette région — ainsi que la pêche récréative. Les caches à carburant seront également autorisées, ce qui est important pour les utilisateurs. Les modifications permettent au directeur général de la réserve de parc de restreindre ou d’interdire certaines activités pour des raisons de santé publique, de sécurité publique ou de conservation des ressources naturelles.

Ces dispositions sont conformes à l’entente de transfert des terres négociée à ce jour entre Parcs Canada et le GTNO. La Loi sur les parcs nationaux du Canada prévoit que de telles activités peuvent se poursuivre si elles sont incluses dans une entente de création d’un parc national négociée avec un gouvernement territorial.

Les modifications n’entreront en vigueur qu’après la signature de l’accord de transfert des terres avec le GTNO, ce qui pourrait être cet été. Les modifications stipulent que l’accord de transfert des terres sera rendu public.

En conclusion, l’adoption de ces modifications législatives sera l’aboutissement de décennies d’efforts visant à protéger Thaidene Nëné, une réalisation qui aura été rendue possible grâce à une solide collaboration entre le gouvernement fédéral, les gouvernements territoriaux et les collectivités autochtones.

Plus particulièrement, cette nouvelle réserve de parc national témoignera de la vision et du dévouement du chef, du conseil, des aînés et des membres de la collectivité de la Première Nation des Dénés de LutsëlK’e.

Merci.

M. Nadler : Avec votre permission, madame la présidente, je vais parler brièvement des stations de ski ainsi que des éléments de la Loi d’exécution du budget portant sur les crédits d’un an.

Dans les parcs des Rocheuses canadiennes, le ski alpin fait partie de l’expérience des visiteurs depuis les années 1930. Jasper et le parc national Banff abritent quatre stations de ski. Celle de Jasper est aménagée autour d’un bassin. Les trois autres sont situées dans le parc national Banff.

Au cours de la dernière décennie, Parcs Canada a collaboré avec les stations de ski à l’élaboration de lignes directrices qui les aident à encadrer leurs activités, à faire progresser leur entreprise et à faire des avancées sur le plan environnemental. Une partie de ce dialogue et de cette négociation a consisté à redéfinir les limites des pistes de chacune de ces stations.

Il en reste deux à intégrer à la Loi sur les parcs nationaux, soit Norquay et Lake Louise. Les lignes directrices pour Norquay ont été conclues en 2013; celles pour Lake Louise, en 2015. Nous avons travaillé avec chacun de ces exploitants pour renouveler les baux qui leur permettront de profiter pleinement des changements et des limites.

L’intégration des nouvelles limites à la Loi sur les parcs nationaux leur donnera une certitude opérationnelle et commerciale quant à la prochaine saison hivernale. Cela peut paraître loin, mais c’est le temps dont ils auront besoin pour mettre en œuvre leur plan d’affaires. Leurs efforts de planification et leurs préparatifs — ainsi que les nôtres — bénéficieront de ces ententes. Étant donné que Parcs Canada et les stations de ski dépendent tous deux des revenus générés par la fréquentation de ces endroits, il existe un lien direct entre les modifications apportées à ces limites et le budget de fonctionnement de notre ministère.

En ce qui concerne le crédit parlementaire d’un an, comme je l’ai mentionné, cela faisait partie de l’annonce du budget en 2014, mais la mise en œuvre n’a jamais suivi. Les dispositions relatives à ce crédit ont été annoncées de nouveau dans le budget de 2019. Cela s’inscrit dans une vaste initiative du gouvernement visant à assujettir un plus grand nombre de ministères et d’organismes à ce type de crédit. Mais en ce qui concerne Parcs Canada, il y a un autre aspect qui le différencie légèrement des autres ministères et organismes. Lorsque les gens pensent à Parcs Canada, la plupart nous connaissent pour la gestion des parcs nationaux et des aires marines nationales de conservation, mais ils ne se rendent peut-être pas compte que nous sommes en fait parmi les trois principaux détenteurs de biens au gouvernement fédéral. À cet égard, la somme de nos actifs est évaluée à environ 24 milliards de dollars.

Le gouvernement fédéral fait passer les grands détenteurs d’actifs à un modèle de comptabilité d’exercice pour la gestion de leurs actifs. La Défense nationale, Services publics et Approvisionnements Canada et Services Canada ont adopté ce régime. On demande maintenant à Parcs Canada de faire de même. Le passage à un crédit parlementaire d’un an facilitera la comparaison avec les autres gestionnaires d’actifs. À certains égards, ce sont des modifications de nature administrative, mais elles sont importantes sur le plan du fonctionnement.

[Français]

Je vous remercie beaucoup de votre patience et de votre attention.

La présidente : Merci à vous. Je suis désolée de notre retard. Nous passons maintenant à la période des questions.

Le sénateur Massicotte : Merci à vous deux d’être parmi nous. J’ai plusieurs questions. Je comprends que tout le monde, y compris les Dénés, est d’accord en ce qui concerne la création du parc. Toutefois, il y a 20 ans, quand on a ciblé cet endroit pour créer un parc, la communauté dénée n’était pas d’accord. Qu’est-ce qui a changé, et pourquoi les Dénés sont-ils maintenant d’accord avec la création du parc?

M. Nadler : C’est une histoire intéressante. Kevin va répondre en anglais et je pourrai ajouter des éléments à sa réponse en français, si vous voulez.

[Traduction]

M. McNamee : Merci de votre question. Cette proposition remonte en fait à 50 ans. Le gouvernement du Canada avait alors approché la collectivité de Snowdrift pour lui proposer de créer un parc national. Toutefois, à l’époque, la politique du gouvernement était que les Autochtones n’allaient pas y avoir le droit de chasser, de mettre des pièges, de pêcher ou d’entreprendre les activités qu’ils associaient au territoire. Alors, on nous a dit de partir, et c’est ce que nous avons fait.

Ce qui a changé, d’abord, c’est que nous avons modifié nos lois et nos politiques. En outre, il y a eu la Constitution de 1982, où l’on affirmait les droits des peuples autochtones. Ainsi, les peuples autochtones ont maintenant le droit — pas le privilège, mais bien le droit — de poursuivre leurs activités dans les parcs nationaux et les réserves de parc national.

La deuxième chose qui a changé, c’est qu’en 2006, les aînés de Lutsël K’e étaient préoccupés par la quantité de jalonnements miniers pratiqués dans leur communauté, sur leur territoire traditionnel et aux alentours. Ils ont cherché des moyens de protéger leurs terres et ils en sont venus à la conclusion que la réserve de parc national était la solution appropriée.

La troisième chose qui a changé, c’est qu’en 2014, le gouvernement du Canada a conclu une entente avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest au sujet du transfert des responsabilités. Ainsi, la responsabilité de l’administration des terres et des ressources dans les Territoires du Nord-Ouest a été transférée au gouvernement territorial. Or, en 2015, le gouvernement territorial nous a invités, selon ses conditions, à discuter de cette réserve de parc national. C’est le premier parc national à être établi dans les territoires depuis ce transfert des responsabilités. Voilà les trois grandes choses qui ont changé.

J’ajouterais, monsieur le sénateur, que tout le monde n’est peut-être pas tout à fait d’accord. Au cours de nos consultations, certaines parties ont exprimé des réserves quant à ce projet.

Le sénateur Massicotte : Pourquoi?

M. McNamee : En particulier, l’industrie minière s’inquiète du fait que nous fermons des zones à l’exploration et à l’exploitation minières. Je signale que la zone envisagée à l’origine s’étendait sur 33 000 km2. Il s’agit maintenant d’un parc national d’une superficie de 14 000 km2. Il y a 12 000 km2 supplémentaires qui seront protégés et conservés dans une perspective territoriale, ce qui laisse environ 7 000 km2 — dont des zones à potentiel minier élevé — susceptibles d’être exploités une fois que l’ensemble de l’aspect conservation aura été mené à bien.

[Français]

Le sénateur Massicotte : J’ai une question au sujet de la station de ski. L’exploitant est une compagnie privée, je présume? C’est une compagnie qui gère le centre de ski?

M. Nadler : Oui, les deux sont des entreprises privées.

Le sénateur Massicotte : Elles souscrivent à la résolution? Dans ce cas, étant donné que la station de ski se trouvera sur le territoire d’un parc national, le loyer va-t-il diminuer en conséquence? Y a-t-il un avantage financier pour cet exploitant en ce qui a trait à la réduction de la superficie?

M. Nadler : On a réduit la taille de chaque piste de ski. En même temps, on a échangé des terres, pour des raisons écologiques, qui seraient peut-être plus avantageuses pour les entreprises qui exploitent les pistes de ski. Chacun est donc satisfait des changements.

Le sénateur Massicotte : Il n’y a pas d’impact sur le bail? Ils paient le même montant, sauf que l’on désigne un différent territoire?

M. Nadler : Il n’y a pas d’impact financier.

Le sénateur Massicotte : La dernière partie — je crois que c’est à la section 24 — concerne les crédits. En d’autres mots, les crédits deviennent annuels, comme c’est le cas généralement au gouvernement. Je crains que cela n’encourage les entreprises à dépenser davantage chaque année, car si les fonds prévus au budget ne sont pas dépensés, ils sont perdus. On ne peut les reporter de manière prospective, et on n’allonge pas les années qui ont précédé. Le désavantage économique n’est pas assez important pour s’assurer que les fonds sont dépensés chaque année. Les fonds ne reviennent pas d’une année à l’autre. La perspective qui consiste à gérer les propriétés pour une période d’un an seulement est une vision à très court terme. Dans un sens, n’est-ce pas une erreur de procéder de cette façon?

M. Nadler : Vous posez une très bonne question. C’est la première fois qu’on nous la pose relativement à cet aspect du projet de loi, et je vous en remercie. Vous avez bien raison, on sera obligé de dépenser l’argent chaque année. Toutefois, nous disposons d’une certaine marge de manœuvre pour un report prospectif qui est de l’ordre de 5 p. 100 pour nos opérations et de 25 p. 100 pour les biens. En fait, depuis quelques années, notre report prospectif se chiffre environ ainsi. Il n’y a pas grand risque pour Parcs Canada, étant donné que notre gestion des finances est comparable maintenant à ce que nous serions obligés de faire dans le cycle annuel de nos appropriations.

Le sénateur Massicotte : Merci.

M. Nadler : C’est une bonne question.

[Traduction]

La sénatrice Simons : J’aimerais revenir directement sur les questions du sénateur Massicotte. Je viens de l’Alberta, alors je sais à quel point ces stations de ski sont populaires. J’aimerais connaître la superficie de la terre qui est reprise. Est-ce que ces zones étaient en partie déjà aménagées en pistes ou étaient-elles restées dans un état relativement naturel?

M. Nadler : Dans le cas de Lake Louise, la superficie de leur concession était assez grande et comprenait, au sud-est, un certain nombre de zones qu’ils n’avaient pas l’intention d’aménager. Nous avons retranché une partie de cela et nous leur avons permis d’ajouter un secteur appelé Hidden Bowl, qui était l’un des secteurs qu’ils prévoyaient développer depuis un certain temps, mais qui ne faisait pas partie de leur bail. Cela a bien fonctionné pour Parcs Canada parce qu’il y a des avantages écologiques pour nous dans cet échange. En quelque sorte, c’est une transaction avantageuse pour les deux parties.

La sénatrice Simons : Et qu’en est-il de Norquay?

M. Nadler : Les changements sont plus modestes à la station de ski Norquay. Nous avons exclu du bail des zones de déclenchement préventif d’avalanche en échange d’un permis d’occupation. Ainsi, nous avons un peu plus de contrôle sur la façon dont l’entreprise effectue le déclenchement préventif d’avalanches, tandis qu’elle obtient des terres qui lui permettent de relier plus de pistes à la traversée. Il y a donc des avantages commerciaux pour elle aussi.

La sénatrice Simons : Cela n’affecte pas le secteur déjà aménagé pour le ski?

M. Nadler : Non. Une partie des terres que nous avons retirées se trouve dans un secteur qui facilite la migration de la faune, ce qui est un autre avantage des changements à Mont Norquay.

La sénatrice Simons : C’est important. Est-ce que l’entreprise a été dédommagée de quelque façon que ce soit? Est-ce que le montant inscrit au bail a été réduit? Quel est le résultat final d’un point de vue financier?

M. Nadler : Vous avez raison : les lignes directrices vont au-delà des limites des installations. Nous avons négocié différents aspects commerciaux. Les entreprises ont toutes obtenu davantage d’espace commercial, ce qui leur permet de construire de nouveaux actifs. Chacune a reçu une liste des ajouts permis à ses activités, et les quatre stations de ski profitent d’une augmentation du nombre quotidien de visiteurs autorisés.

La sénatrice Simons : Vous semblez avoir réussi l’impossible ou presque en matière de politique environnementale. Tout le monde paraît satisfait.

M. Nadler : Eh bien, il aura fallu 10 ans pour y arriver, mais nous sommes heureux des résultats.

[Français]

Le sénateur Carignan : Je regarde la carte en vue de la création de la réserve à vocation de parc national de Thaidene Nëné. J’essaie de la superposer avec l’étude du potentiel géologique qui a été menée en 2013.

Je vois qu’il y a du potentiel pour aménager une mine de diamant. Je crois comprendre que certaines zones à haut potentiel qui se trouvaient dans la zone rouge sur la carte de 2013 ont été épargnées de la découpe. Par contre, d’autres zones, comme celle de Reliance Lake, semblent avoir été incluses dans le parc.

Avez-vous une carte où on superpose le potentiel géologique qui a été évalué par rapport à ce que vous nous avez donné comme version du parc? Je comprends que, dans l’étude de 1993, il y a une zone d’intérêt qui a été fixée dans laquelle vous avez évalué le potentiel géologique, mais que vous avez ajusté les descriptions du parc en fonction de ce potentiel. Est-ce bien ce qui a été fait, et avez-vous une carte qui permet de superposer les limites du parc et le potentiel géologique, particulièrement le potentiel d’extraction de diamants? Je vois qu’il y a un grand potentiel de gisements de diamants dans la partie sud, qui se situe autour des chiffres 58, 57 ou 56 sur la carte dans les limites proposées.

M. McNamee : Nous avons quelques cartes qui présentent cette information, et il est possible que je la remette à la greffière. J’en ai seulement une copie, mais on peut y voir les terrains qui ont un potentiel en minerai. La délimitation de la frontière ne relève pas uniquement de Parcs Canada. La frontière est le résultat de négociations entre Parcs Canada, le gouvernement territorial et les Autochtones de Łutsël K’e et d’autres nations. C’est le résultat d’un effort de collaboration entre quelques gouvernements.

Le sénateur Carignan : Est-ce qu’il y a des concessions minières qui ont été désignées dans la zone visée pour la création du parc, qui appartiendraient à des tiers ou à des entreprises et qui seraient touchées par la délimitation du parc?

M. McNamee : Il n’existe pas de licences dans le territoire délimité par la frontière, parce que, en 1970, des mesures de protection intérimaires ont été mises en œuvre par le gouvernement fédéral. De plus, en 2008, le gouvernement fédéral a mis en place d’autres mesures de protection intérimaires. Ainsi, depuis cette période, il n’est pas possible pour des industries de mettre en place des droits de licences d’exploration minière. Il n’y en a aucune.

Le sénateur Carignan : Parfait. Toutefois, qu’est-ce qui se produirait si on découvrait qu’une partie d’une mine de diamant se trouve dans la zone sud? Je comprends que le rapport qui a été rédigé dans le cadre de l’évaluation géologique de 2013 l’a été avec les outils de 2013, que les choses peuvent évoluer dans le temps, que des zones à haut potentiel pourraient être moins intéressantes qu’on le pense, et que des zones à potentiel moyen pourraient devenir des zones à haut potentiel. Est-ce que cela signifie que la désignation de la vocation de parc national empêchera cette exploitation à tout jamais? Ou bien, étant donné que l’on parle d’une réserve à vocation de parc national et qu’il y a des négociations qui sont toujours en cours avec les peuples autochtones, est-ce que, d’ici à ce que ce territoire soit désigné comme un parc national, un tiers pourrait négocier des droits ou des licences en ce qui a trait à certaines zones du parc?

M. McNamee : Je suis désolé, mais je vais répondre à votre question en anglais, parce qu’il y a quelques aspects importants dans tout cela.

[Traduction]

Le sénateur Carignan : C’est votre droit constitutionnel; vous pouvez parler en anglais tout comme je peux m’exprimer en français.

M. McNamee : D’abord, vous soulevez un point très important. Qu’est-ce qu’une réserve à vocation de parc national? Elle est créée lorsqu’un peuple autochtone revendique des droits ancestraux et que le gouvernement fédéral accepte d’engager des négociations à cet égard. Bien qu’il y ait un traité en vigueur qui date des années 1900, le gouvernement du Canada poursuit actuellement des négociations relativement à diverses revendications territoriales.

Il est impossible de créer un parc national avant d’avoir réglé la question de ces revendications territoriales. Cela dit, la Loi sur les parcs nationaux du Canada indique clairement qu’une réserve à vocation de parc national équivaut à un parc national. La protection dont elle bénéficie n’est donc pas moindre.

Un parc national pourrait être créé à l’issue des négociations sur les revendications territoriales si on décidait de modifier les limites du parc. Cela dit, d’ici à ce qu’elles aboutissent, il n’est pas permis de faire de l’exploration de ressources minérales ni de les exploiter dans les limites illustrées sur cette carte parce que ce secteur fait l’objet d’une protection provisoire. Une fois la région dûment protégée par un accord avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, il n’y aura ni exploration ni exploitation minière dans ces limites.

Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest s’est donné beaucoup de mal pour négocier avec nous des limites qui excluent, comme je l’ai dit, tous les secteurs ayant un grand potentiel minier ainsi que la majeure partie des secteurs ayant un potentiel jugé de modéré à élevé.

La sénatrice Frum : J’aimerais poser une question plus générale sur Parcs Canada et le traitement que lui a réservé le gouvernement dans son budget. Ce gouvernement affirme se soucier beaucoup d’environnement, mais un article publié en mars dernier par la CBC a cité un rapport commandé par Parcs Canada selon lequel 40 p. 100 des immobilisations contrôlées par Parcs Canada sont soit en mauvais ou en très mauvais état. Le rapport souligne par ailleurs que le dernier influx monétaire majeur à Parcs Canada date de 2014, quand l’agence a reçu 3 milliards de dollars.

Croyez-vous que, dans son budget, ce gouvernement a mis suffisamment l’accent sur Parcs Canada et lui a accordé les ressources adéquates?

M. Nadler : Vous soulevez plusieurs questions. Vous avez tout à fait raison de souligner que le budget de 2014 prévoyait un apport important en capital pour Parcs Canada en raison des retards accumulés au chapitre de l’entretien et de l’amélioration de ses immobilisations. Cet entretien est différé depuis 20 à 30 ans, d’où l’état assez mauvais de nos actifs en 2014.

Il est aussi tout à fait juste de dire que l’article de la CBC est fondé sur un rapport réalisé par Parcs Canada, dans lequel nous évaluons nos actifs, mais d’après une étude effectuée en 2016. L’apport en capital de 2014 a pris la forme d’un programme quinquennal. Au moment de l’étude, nous n’avions profité que d’une partie des investissements prévus dans le cadre du programme. Nous ne pouvions donc pas y inscrire des immobilisations en cours de rénovation comme étant des actifs améliorés, puisque les travaux n’étaient pas terminés. Aujourd’hui, un nombre important des actifs dont il est question dans le rapport sont en bon état ou dans un état acceptable, ce qui était le but de ce financement.

Il y a aussi eu d’autres dépenses en capital dans les budgets subséquents. Le budget de 2019 prévoit 366 millions de dollars sur 2 ans pour Parcs Canada afin que l’agence continue d’investir dans l’amélioration de ses actifs.

Je rappelle aux honorables sénateurs que les gens ne savent pas toujours que Parcs Canada est responsable de 200 barrages en Ontario, d’une importante infrastructure maritime dans cette province, de même que de divers tronçons de la route transcanadienne. Nos actifs englobent bien plus que les lieux historiques et les biens associés à l’expérience des visiteurs que la majorité de la population connaît.

La sénatrice Frum : Vous avez aussi commencé à percevoir des droits d’entrée à certains endroits, mais pas à d’autres. De quelle façon la décision de percevoir des droits d’entrée ou non est-elle prise? Prenons le projet dont il est question aujourd’hui. De quelle façon prendrez-vous votre décision dans ce cas?

M. Nadler : C’est une excellente question. Parcs Canada vient de terminer une consultation publique sur les changements aux droits d’entrée. Mesdames et messieurs, vous connaissez probablement la Loi sur les frais de service adoptée en 2016 et qui a obligé les agences comme la nôtre, qui perçoivent des droits d’entrée, à modifier leurs activités. L’application d’un indice des prix annuel ou stable afin de tenir compte de l’incidence de l’inflation sur le pouvoir d’achat est un bon exemple. Nous avons tenu des consultations sur ces changements. La Loi sur les frais de service exige également d’autres changements liés au recouvrement des coûts. Nous avons mené à bien ces consultations et étudions actuellement les réponses des Canadiens. Nous allons publier un rapport sur leurs commentaires très bientôt.

Nous avons une structure qui nous permet d’évaluer le niveau de service offert dans nos installations. Comme vous pouvez l’imaginer, cela signifie l’évaluation de nos 221 sites partout au pays. Certains sont très petits et isolés, et l’offre faite aux visiteurs y est négligeable. Ailleurs, toutefois, nous leur proposons des offres élaborées. À certains endroits, nous avons amélioré ou augmenté l’offre, ce qui fait que le classement du site peut changer dans notre structure tarifaire. Les renseignements que vous avez reçus sont à l’image des sites où nous avons amélioré l’offre aux visiteurs et, donc, augmenté les droits d’entrée.

M. McNamee : Je peux comprendre votre question dans le dossier de la réserve à vocation de parc national Thaidene Nëné. Si vous pouvez situer les numéros 76 et 77 sur la carte devant vous, dans la baie McLeod, vous verrez que plusieurs parcs territoriaux seront adjacents à ce secteur, ce qui permettra de créer un complexe de conservation d’environ 26 000 kilomètres carrés.

Avant d’entamer nos négociations avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, nous avons pris l’engagement de ne pas percevoir de droits d’entrée. Comme vous le voyez, si quelqu’un se promène en embarcation sur le lac et franchit soudainement les limites de Parcs Canada, nous n’aurons pas de gardes de parc répartis le long de cette limite pour percevoir des droits d’entrée.

Nous sommes conscients qu’il s’agit d’un secteur très important pour les gens de Yellowknife. Beaucoup d’embarcations de plaisance y circulent, d’où notre engagement à ne pas percevoir de droits d’entrée. Cela dit, si nous construisons des installations dans les terres à l’intention des visiteurs, des droits seront perçus conformément à notre structure tarifaire. Cela faisait partie des négociations avec le gouvernement ténois.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup à tous les deux pour vos exposés. J’aimerais poser une question sur le changement apporté au crédit parlementaire. J’essaie de comprendre l’incidence pour Parcs Canada de l’annulation de sa capacité à reporter à l’exercice suivant les fonds non utilisés.

Je ne sais pas si cela m’a échappé dans votre exposé, mais quelle est la somme usuelle, par exemple? Quel était le solde des fonds non utilisés qui aurait pu être reporté à l’exercice suivant?

M. Nadler : C’est une excellente question. Nous avons porté beaucoup d’attention aux possibles répercussions de ce changement. Parcs Canada est devenu une agence en 1999, ce qui fait que nous fonctionnons depuis 20 ans selon un cycle de crédits de 2 ans, ce qui nous procure une certaine souplesse.

Je vais répondre directement à votre question, puis vous fournir une explication. Nous avons également à notre disposition quelques options liées au système des crédits. Les ministères centraux qui fonctionnent selon des crédits annuels ont trois crédits distincts, soit un pour le fonctionnement et les salaires, un pour les subventions et les contributions, puis un autre pour les dépenses en capital.

Comme nous l’avons dit, Parcs Canada détient et gère un imposant portefeuille d’actifs au nom du gouvernement fédéral. Heureusement, dans le système fédéral, les ministères ont le droit de reporter 25 p. 100 de leurs dépenses en capital chaque année. Nous pouvons même négocier une augmentation de ce pourcentage avec Finances Canada si des circonstances exceptionnelles l’exigent.

Le report de Parcs Canada dans le cadre d’un exercice usuel — nous effectuons des investissements importants à l’heure actuelle, ce qui fait que cet exercice est exceptionnel — serait inférieur au plafond de 25 p. 100. Les subventions et contributions sont distinctes parce qu’il faut demander la permission de reporter ces fonds à l’exercice suivant, mais le report usuel pour le crédit de fonctionnement est de 5 p. 100. Habituellement, Parcs Canada respecte cette limite, quoiqu’il arrive que nous la dépassions légèrement; cela dit, la majorité du temps, le report pour le crédit de fonctionnement est légèrement inférieur à 5 p. 100.

La transition ne nous inquiète donc pas vraiment quand on l’aborde sous cet angle. Nous souhaiterons négocier notre structure de crédits avec Finances Canada. Actuellement, nous avons un seul crédit qui couvre tout et nous donne énormément de souplesse pour déplacer les fonds d’un poste budgétaire à un autre.

Nous garderions probablement un crédit distinct pour les dépenses en capital, mais nous pourrions demander la fusion du crédit des subventions et des contributions avec celui du fonctionnement, tout simplement parce que nous faisons appel à beaucoup de collaborateurs dans la prestation de nos services et que la possibilité d’allouer des fonds de fonctionnement aux subventions est une décision judicieuse dans notre secteur.

La sénatrice Seidman : Donc, vous n’êtes pas inquiet du fardeau particulier que cela pourrait représenter pour vous?

M. Nadler : Je ne crois pas, non. Nous devrons nous adapter. Nous avons deux ans pour mettre en œuvre les changements, et nous aurons besoin de ce temps pour revoir notre structure financière et former notre personnel. Nous devrons aller au bout du processus, ce qui n’est pas une mince affaire, mais les risques financiers associés à la transition sont minimes, voire inexistants. Merci. C’était une excellente question.

Le sénateur Patterson : C’est agréable de vous voir tous les deux parmi nous aujourd’hui. Je souhaite seulement déclarer que je suis allé dans le parc. Je suis allé à la pêche au Trophy Lodge, près de Reliance. Je présume que ce magnifique camp de pêche bénéficie d’une clause de préservation des droits acquis, puisqu’on y pratique la pêche avec remise à l’eau et que c’est un des meilleurs endroits au pays pour la pêche à la truite. Ce camp de pêche va rester dans le parc, c’est exact?

M. McNamee : Oui, et permettez-moi d’élaborer un peu. Oui, le camp de pêche va rester dans le parc. Une partie des modifications proposées ici stipule que les baux actuels concernant des terres domaniales situées dans la réserve à vocation de parc national demeurent en vigueur conformément à leurs modalités, et qu’ils seraient renouvelés. En outre, pour revenir à une question précédente, le bail demeure en vigueur dans le cadre de la transition de réserve à vocation de parc national à parc national en bonne et due forme. Un certain nombre d’articles le confirment dans les modifications à l’étude.

Le sénateur Patterson : C’est bien. Je souhaite préciser que mon ami de longue date, Bob Gamble, a travaillé toute sa vie à la création de ce parc. Il est aujourd’hui à la retraite, et je tiens à saluer ses efforts.

Vous n’avez pas délimité les parcs territoriaux proposés conformément aux lois ténoises sur votre carte. Vous avez parlé de 12 000 kilomètres carrés supplémentaires, puis de 26 000, si je vous ai bien compris. Est-ce que la législation territoriale va permettre l’exploration et l’exploitation minières?

M. McNamee : Veuillez m’excuser si je n’ai pas été clair.

Le sénateur Patterson : C’est peut-être moi qui ai mal compris.

M. McNamee : Disons que c’est de ma faute. En 2005, les aînés de Lutsël K’e ont proposé la création d’un parc national de 33 000 kilomètres carrés. Après le transfert des responsabilités au gouvernement territorial, puis la tenue de négociations, nous avons divisé ces 33 000 kilomètres carrés en différentes parties : une réserve à vocation de parc national de 14 000 kilomètres carrés, des aires protégées de 12 000 kilomètres carrés qui relèvent du gouvernement territorial et, si mes calculs sont bons, 7 000 kilomètres carrés de terres inaliénables qui pourraient un jour être ouvertes à de l’exploration et à de l’exploitation minières.

Quelle était la seconde partie de votre question?

Le sénateur Patterson : Vous y avez répondu, je crois. Est-ce que l’exploration minière serait permise?

M. McNamee : Le gouvernement territorial espère adopter, d’ici la fin du processus législatif en cours, des modifications qui lui permettront d’abord d’avoir l’autorité nécessaire pour conclure une entente avec le gouvernement du Canada pour la création d’une réserve à vocation de parc national, puis d’établir un cadre législatif pour les aires protégées territoriales.

De ce que j’en sais, l’exploration et l’exploitation minières seront interdites, mais des couloirs d’accès aux ressources minérales pourraient être autorisés dans ces aires protégées. Si le comité souhaite obtenir des détails, je crois que l’idéal serait de communiquer avec le gouvernement ténois.

Le sénateur Patterson : Il y a une importante mine de diamants, la mine Gahcho Kué, à proximité du parc; elle appartient à De Beers. L’évaluation des ressources minérales et énergétiques menée dans le cadre de la création de cette réserve à vocation de parc national indique la présence d’un gisement de diamants dans des kimberlites au grand potentiel dans le secteur de la réserve. Est-ce exact? De quelle façon cette question a-t-elle été abordée avec la Chambre des mines des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut?

M. McNamee : Je dois consulter la carte à nouveau pour ce qui est des cheminées kimberlitiques.

Le sénateur Patterson : On peut seulement lire « gisement de diamants dans des kimberlites au grand potentiel ». C’est ce que dit le résumé du rapport de l’Évaluation des ressources minérales et énergétiques, l’ERME.

M. McNamee : Nous sommes arrivés à établir une limite avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, ce qui est le point clé ici. Il est évident que le gouvernement ténois à tout intérêt à vérifier le potentiel minier des secteurs visés et à s’assurer que la limite n’a pas de fortes répercussions sur son industrie minière.

En fait, comme l’ont dit les représentants de la nation dénée de Lutsël K’e devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui a étudié ces modifications il y a quelques semaines, leur nation a déjà conclu divers accords avec au moins trois sociétés minières dans la région. Ils ont été on ne peut plus clairs dans leur proposition : sans nécessairement s’inscrire dans une démarche anti-développement, ils cherchent à bâtir une économie de la conservation qui permet parfois d’éviter l’alternance de forte expansion et de récession qui caractérise l’exploitation minière. Ils sont conscients que c’est très important, mais ils veulent accéder à une économie qui repose à la fois sur la conservation et le développement. Pour ce qui est de la kimberlite, je vais vous revenir là-dessus.

Le sénateur Patterson : Pouvez-vous nous dire où en est rendue la négociation des ententes sur les répercussions et les avantages avec la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest et la Première Nation des Dénés Lutsël K’e?

M. McNamee : Oui. Parcs Canada négocie non seulement une entente de transfert de terres avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, mais aussi un accord d’établissement avec la Première Nation des Dénés Lutsël K’e. Les négociateurs ont terminé leur travail et ont paraphé le texte de l’entente. Dans un référendum tenu il y a quelques mois, 88 p. 100 des membres de la communauté se sont prononcés en faveur de la création de cette réserve à vocation de parc national.

Dans le cas de la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest, nous avons négocié une entente sur les répercussions et les avantages. Nous avons encore une ou deux questions à régler avec eux, mais nous ne croyons pas que cela sera problématique. Encore là, les négociateurs pour le Canada et la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest ont paraphé cette entente sur les répercussions et les avantages.

Le sénateur Patterson : Est-ce que cette entente est confidentielle?

M. McNamee : Elle l’est pour le moment, sénateur.

Le sénateur Woo : Si ces amendements sont approuvés, il en résultera un don pour la création d’un fonds en fiducie avec contribution équivalente de la part du gouvernement. Pouvez-vous nous en dire plus long au sujet des bailleurs externes qui vont contribuer à ce fonds et de ceux qui vont l’utiliser?

M. McNamee : Merci pour la question, sénateur. Vous avez traité de l’un des éléments qui font en sorte que cette proposition pourrait servir de modèle nous permettant d’explorer de nouvelles avenues. L’idée d’un fonds en fiducie vient de la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e. Je pourrais vous donner l’exemple de la réserve de parc national Gwaii Haanas avec le Site du patrimoine haïda. Ils ont instauré là-bas un programme qui voit des gardiens haïdas parcourir le parc, accueillir les visiteurs, surveiller l’écosystème, évaluer les impacts des visites et offrir aux visiteurs une expérience intéressante et dynamique qui est tout à fait particulière. Chaque année, nous négocions un accord de contribution pour leur fournir le financement nécessaire à cette fin.

C’est donc la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e qui a proposé l’idée de créer un fonds en fiducie pour le parc Thaidene Nëné. Ce fonds exigera un investissement total de 30 millions de dollars, donc 15 millions de dollars en provenance du gouvernement fédéral. Un montant équivalent de 15 millions de dollars a été recueilli par la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e en collaboration avec une organisation que l’on appelait autrefois « The Nature Trust » et qui est devenue Nature United — à ne pas confondre avec Conservation de la nature Canada. C’est ainsi que l’on a alimenté ce fonds en fiducie dont la responsabilité incombe à la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e. Ils vont mettre sur pied un conseil d’administration en plus, d’après ce que j’ai pu comprendre, de faire appel à un comptable agréé d’une firme reconnue pour superviser le tout. Les intérêts produits par cet investissement vont permettre à la Première Nation d’embaucher ses propres gardiens et gestionnaires. Elle n’aura dès lors plus besoin de négocier avec nous, à Parcs Canada, une entente annuelle de contribution.

Je ne veux pas vous fournir de plus amples détails, car tout cela relève en fait de la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e. C’est toutefois un bon aperçu du modèle que la Première Nation a déjà rendu public.

Le sénateur Woo : Est-ce que le gouvernement sera représenté au sein du conseil d’administration de ce fonds en fiducie?

M. McNamee : Je crois que ce sera le cas, mais si madame la présidente me le permet, j’aimerais vous confirmer par écrit la forme exacte que cela prendra. Je pense qu’il y a encore des détails à régler.

La sénatrice McCallum : Merci pour vos exposés. J’étais heureuse de vous entendre dire que l’on compte protéger la forêt boréale et la toundra, car je crois que l’on ne va pas s’arrêter à l’extraction des ressources. À titre de membre de ce comité, j’ai déjà pu prendre connaissance des répercussions néfastes qui se font ressentir partout au Canada. Des vies s’en trouvent dévastées. Je me réjouis donc que des mesures soient prises.

Vous avez indiqué que la négociation d’une entente sur les revendications territoriales peut être l’occasion de redéfinir les limites de ces parcs?

M. McNamee : C’est effectivement une possibilité. C’est à cela que peut servir la désignation d’une réserve à vocation de parc national. La zone visée est essentiellement gérée comme un parc national, mais sa désignation à titre de réserve indique qu’il y a encore une revendication territoriale finale à négocier et plusieurs accords à conclure dans le cas qui nous intéresse. Je peux vous donner l’exemple du parc national Auyuittuq sur l’île de Baffin dont vous avez sans doute entendu parler. Des limites avaient été établies pour ce parc avant la conclusion de l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Une fois ces revendications réglées et une entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits négociée, une zone a été retirée de ce parc. Elle revêtait une importance culturelle particulière pour les Inuits. Cela montre bien que les limites peuvent être appelées à changer, mais tout cela doit être négocié. Dans cet exemple, c’était vraiment important pour les Inuits pour des raisons culturelles.

M. Nadler : Il est important de souligner que cela remonte au milieu des années 1990 et que le parc Thaidene Nëné a été créé suivant des modalités quelque peu différentes, comme M. McNamee vient de vous l’expliquer. Par le passé, lorsqu’un parc était créé dans le contexte des négociations d’une revendication territoriale, les groupes autochtones choisissaient des terres ayant pour eux une importance culturelle particulière parce qu’ils souhaitaient en garder le contrôle. M. McNamee vient toutefois de vous parler des mesures prises par les Dénés pour la création de leur fonds en fiducie qui leur permettra de jouer un rôle beaucoup plus important dans la gestion du parc et des activités qui s’y déroulent. Il est donc possible que les Premières Nations aient dorénavant moins de raisons de s’inquiéter de ces questions de contrôle dans la plupart des circonstances.

La sénatrice McCallum : Y a-t-il encore des revendications territoriales ou des demandes de désignation de sites patrimoniaux qui ne sont pas réglées dans cette région?

M. McNamee : Il n’y a pas à ma connaissance de demandes pour la désignation de sites patrimoniaux, mais les Dénés de Lutsël K’e font partie de la Première Nation des Dénés de l’Akaitcho, si bien que nous travaillons avec les Dénés yellowknives et la Première Nation Deninu K’ue. C’est une revendication territoriale que nous devons régler. Il y a également des négociations qui se poursuivent avec la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest relativement à un accord sur la gestion des terres et des ressources. J’espère n’avoir oublié personne, mais ce sont les deux principaux.

La sénatrice McCallum : Les Dénés de Déline ont une entente d’autonomie gouvernementale.

M. Nadler : C’était au nord de la région de Sahtu, et cette revendication territoriale a été réglée. L’entente conclue avec les Tlichos porte aussi sur une zone à proximité du parc, mais vers le nord. Il y a près de Déline un magnifique lieu patrimonial appelé Saoyú-ʔehdacho où nous aimerions bien pouvoir vous accueillir, si vous prévoyez visiter la région.

La sénatrice McCallum : Vous nous avez également indiqué que le gouvernement territorial allait conclure une entente avec le Canada dans un avenir rapproché. Sur quoi porterait cette entente?

M. McNamee : C’est justement cette entente que nous sommes en train de négocier et sur le point de conclure. Avant la dévolution, ces terres étaient fédérales. En vertu de l’accord de dévolution, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest est responsable de la gestion et du contrôle des terres et des ressources. La Loi sur les parcs nationaux du Canada exige que le Canada soit propriétaire des terres en surface et en sous-sol pour pouvoir créer une réserve à vocation de parc national. C’est en fonction de cela que nous gérons le tout.

Nous négocions ainsi un accord avec le gouvernement territorial pour établir les modalités suivant lesquelles les terres seront transférées du territoire au Canada. C’est en partie grâce à ces négociations que l’on a pu en arriver à cette carte que vous avez sous les yeux avec certaines des modifications qui ont été apportées. Nos consultations ont révélé un soutien important en faveur du maintien d’un certain nombre d’activités locales non autochtones. Cela fait partie de l’entente que nous avons négociée avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. C’est une entente clé que nous espérons pouvoir signer cet été en même temps que les autres ententes évoquées par le sénateur Patterson.

La sénatrice McCallum : Merci.

La sénatrice McCoy : J’ai une très brève question. Vous avez capté mon attention en disant qu’il fallait éviter la confusion dans le cas de l’organisme The Nature Conservancy. J’ai sous les yeux la première page du document concernant la réserve de parc national. N’avez-vous pas indiqué que les bailleurs de fonds vont être représentés par Nature United?

M. McNamee : Précisons qu’il y a d’abord Conservation de la nature Canada qui s’emploie à acquérir des terres privées. Pour la présente proposition, nous avons d’ailleurs aussi obtenu la collaboration de cette organisation qui nous a aidés à acquérir une propriété en fief simple. Il y a aussi une autre organisation qui avait pour nom The Nature Conservancy. Il semblerait toutefois qu’elle ait adopté récemment un nouveau nom : Nature United.

La sénatrice McCoy : Nous devrions peut-être faire le changement ici pour indiquer plutôt Nature United?

M. McNamee : Je suis désolé, madame la sénatrice, mais je suppose que c’est un document qui a été rédigé à l’intention des sénateurs, mais qui n’a pas été porté à notre connaissance. Je crois que ce changement vient tout juste d’être apporté. Il faut surtout retenir que The Nature Conservancy, qui s’appelle maintenant Nature United, est l’organisation avec laquelle la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e a collaboré pour recueillir le financement de contrepartie aux fins du fonds en fiducie dont j’ai parlé tout à l’heure.

La sénatrice McCoy : Mais ce n’est pas Nature United qui va administrer ce fonds?

M. McNamee : Non. Il sera administré par un conseil d’administration et par la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e.

La sénatrice McCoy : Merci.

[Français]

Le sénateur Mockler : J’aimerais parler de deux sujets en particulier. Il faut certainement applaudir cette initiative. Au cours des trois derniers mois, j’ai eu l’occasion de participer à des tables rondes avec les Premières Nations du Nouveau-Brunswick. Elles sont préoccupées par la possibilité d’un recours collectif, par exemple, pour les parcs nationaux. Je n’ai pas besoin de vous raconter l’histoire du parc national de Kouchibouguac. Dans ce dossier, les Autochtones estimaient qu’ils n’avaient pas été traités équitablement. Les Premières Nations devraient toujours se trouver à la table de négociations. J’aurais une question à poser sur le parc de Kouchibouguac.

[Traduction]

J’aurai aussi une question concernant la prise en compte du savoir autochtone avant toute décision concernant la création, la modification ou l’agrandissement d’un parc. Les Autochtones ont-ils été suffisamment consultés? Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est? Qui exactement est venu vous conseiller de procéder de cette manière avec le projet de loi C-97?

[Français]

En même temps, j’aimerais que vous nous informiez de l’état actuel du recours collectif ayant trait à Kouchibouguac, au Nouveau-Brunswick.

M. Nadler : L’histoire du parc de Kouchibouguac est compliquée. Bien évidemment, certaines personnes dans la région ont dû faire face à de réels défis par rapport à la création de ce parc.

On devrait probablement vous préparer une réponse écrite, parce que je ne sais pas exactement ce qui se passe avec leur demande en ce moment. Je vous confirme que je comprends bien l’histoire du parc et les difficultés éprouvées par les gens de la région.

La présidente : Je vous signale que cette partie déborde du cadre de l’étude du projet de loi que nous étudions.

M. Nadler : Ce n’est pas lié, mais...

La présidente : Vous pourrez nous envoyer quelque chose que nous partagerons plus tard?

M. Nadler : C’est exact. C’est avec plaisir que je vous ferai parvenir une réponse écrite à cette question. M. McNamee peut vous répondre en ce qui a trait aux engagements qui ont été pris vis-à-vis des groupes autochtones.

Le sénateur Mockler : S’il vous plaît.

[Traduction]

M. McNamee : Comme je l’indiquais précédemment, nous avons pu constater au cours des dernières décennies que certains de nos parcs nationaux sont en fait issus de propositions mises de l’avant par des groupes autochtones. C’est le cas notamment du parc national Tuktut Nogait dans les Territoires du Nord-Ouest. Bien que, comme je l’ai mentionné, Parcs Canada s’intéresse depuis déjà 50 ans à ce projet, ce sont en fait les gens de la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e qui, pressés par leurs aînés, ont mis de l’avant en 2006 la proposition qui a déclenché le travail accompli pour en arriver au résultat que vous avez sous les yeux. Ils ont été les fers de lance de ce projet. Les Lutsël K’e ont reçu de leur chef et de leur conseil de bande le mandat de travailler avec le gouvernement du Canada puis, après la dévolution, avec celui des Territoires du Nord-Ouest. Ils ont joué un rôle actif depuis le début.

Nous ne nous contentons pas de visiter une communauté pour lui dire : « Nous sommes ici pour vous consulter. Vous avez 30 jours pour répondre. Merci beaucoup. » Ce n’est pas notre façon de procéder. Nous négocions avec eux depuis 2006. Nous travaillons avec les négociateurs de la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest depuis 2015, et des travaux avaient même été entrepris auparavant.

Ce n’est pas seulement une consultation. C’est une démarche de négociation continue qui nous amène à nous rencontrer régulièrement afin de conclure des ententes pour l’établissement d’un conseil de cogestion aux fins de l’examen des différentes possibilités d’investissement avec les communautés touchées. C’est bien davantage qu’une simple négociation, car les deux parties ont leur mot à dire depuis l’amorce du processus. J’espère avoir répondu à votre question, madame la sénatrice.

[Français]

M. Nadler : Bien entendu, nous avons appris des leçons du passé. Nous avons vraiment changé notre approche relativement à l’établissement des parcs. Les groupes autochtones sont maintenant bien impliqués dans le processus de création, mais aussi directement dans la gestion des parcs.

Le sénateur Mockler : C’est précisément là où veut aller le comité par rapport à ce que vous venez de dire. Vous dites que vous avez tiré des leçons du passé. Pouvez-vous me donner trois leçons du passé que vous appliquez maintenant, avec l’expérience que vous avez acquise?

M. Nadler : Bien sûr. En fait, nous avons appris une leçon vraiment pertinente, qui est la suivante. Pour ce qui est des parcs, on utilise maintenant deux systèmes de sciences ou de connaissances pour la gestion de l’écologie. On utilise la science occidentale, mais également la science basée sur les connaissances traditionnelles des peuples autochtones. Les deux sont traitées également. Plutôt que d’en subordonner une à l’autre, les deux sont traitées de manière égale. Nous avons beaucoup appris, par exemple, sur l’utilisation du feu dans nos parcs, donc sur le terrain, pour gérer l’écologie. Voilà un exemple.

La deuxième leçon que nous avons tirée est la suivante. On a parlé précédemment de Gwaii Haanas et de Haida Gwaii dans une réponse à une question qui nous a été posée. Cette expérience a probablement transformé l’approche de Parcs Canada en ce qui a trait à la cogestion d’un parc national et à l’intégration des peuples autochtones dans la prise de décisions liées aux parcs nationaux. Cette gestion se fait réellement en partenariat avec les groupes autochtones.

La troisième leçon que nous avons apprise est la suivante. M. McNamee a parlé, dans une de ses réponses, d’une chose qu’il a appelée l’« économie de conservation » dans un endroit comme Thaidene Nëné. On parle maintenant, avec les Autochtones de Łutsël K’e, d’un monde où on peut avoir des intérêts dans une mine ou dans un développement économique traditionnel. En même temps, ces Autochtones peuvent développer une économie locale basée sur la conservation, comme les récoltes ou même l’écotourisme. Cette économie pourrait permettre d’atténuer les hauts et les bas liés au développement d’une mine ou de ressources naturelles.

La présidente : Il nous reste du temps pour deux dernières questions.

[Traduction]

Le sénateur Patterson : Il y a quelques-unes de mes questions auxquelles vous avez déjà répondu, ce qui est formidable.

J’ai noté que tous les grands parcs du Canada sont situés dans le Nord. Il y a Wood Buffalo qui a une superficie de 44 000 kilomètres carrés, Ukkusiksalik à 21 000 kilomètres carrés, Sirmilik à 22 000 et Quttinirpaaq à 37 000. Ces parcs sont tous situés au Nunavut. Il y a aussi celui de Nahanni qui s’étend sur 30 000 kilomètres carrés. Le parc Kluane au Yukon a une superficie de 22 000 kilomètres carrés, alors qu’elle est de 19 000 kilomètres carrés pour le parc Auyuittuq au Nunavut.

Bien des gens m’ont fait remarquer que ces parcs n’attirent pas un très grand nombre de visiteurs, du moins pour l’instant. Les installations touristiques et les pourvoiries sont plutôt rares. J’aimerais que vous nous disiez si vous voyez un potentiel écotouristique pour le parc Thaidene Nëné et que vous puissiez transmettre au comité les statistiques sur le nombre de visiteurs dans tous nos parcs nationaux.

D’après les recherches que j’ai faites il y a quelques années déjà, les visiteurs se présentent en nombre très restreint dans ces immenses parcs. Ils seraient encore moins nombreux si quelques passagers d’un navire de croisière ne s’y étaient pas rendus en canot pneumatique.

Croyez-vous qu’il y ait lieu de s’inquiéter quant aux retombées économiques pour ces communautés dans le secteur touristique?

M. McNamee : Nous allons répondre à cette question en tandem, si vous le permettez.

Nous estimons que le parc national Thaidene Nëné pourrait être celui qui sera le plus visité dans le Nord. Étant donné qu’il est situé à proximité de Yellowknife — environ 50 minutes d’avion — et compte tenu des efforts déployés tout particulièrement par la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e pour préparer le terrain en vue de la création de cette réserve à vocation de parc national, nous pensons que celle-ci a d’excellentes chances d’attirer un nombre important de visiteurs.

Lorsque vient le temps de créer un nouveau parc national, nous ne considérons pas uniquement l’aspect protection de l’environnement. À nos yeux, ces parcs contribuent grandement à la prospérité des communautés locales. Nous sommes présents dans quelque 300 collectivités éloignées de tout le pays. Dans certains parcs du Nunavut, tous les employés sont inuits. Nous avons d’ailleurs pu constater que la participation des Autochtones à nos conseils de cogestion leur permet d’acquérir des compétences en gouvernance qui ont aidé certains d’entre eux à devenir chefs ou grands chefs au sein de leur Première Nation.

Je peux vous assurer, sénateur, que nous ne considérons pas qu’il s’agit simplement de projets de protection de l’environnement. Nous anticipons bel et bien des retombées économiques importantes. C’est d’ailleurs l’une des principales raisons pour lesquelles les Lutsël K’e ont réclamé la création de ce parc national.

M. Nadler : Il y a certains chiffres que je pourrai vous communiquer après la séance pour votre gouverne.

Comme Parcs Canada est en plein cœur d’un important programme d’investissement dans ses infrastructures, notre budget est plus élevé qu’il le serait normalement. Pour l’exercice 2017-2018, il était de 1,25 milliard de dollars. En collaboration avec Statistique Canada, nous avons cherché à évaluer les répercussions économiques de nos activités dans les parcs de toutes les régions du pays. Cet investissement gouvernemental a généré des retombées économiques de 4 milliards de dollars pour les collectivités, principalement dans le secteur touristique; des revenus de 2,5 milliards de dollars pour les travailleurs; et la création de près de 40 000 emplois au pays.

Dans un endroit comme le Nunavut dont nous pouvons suivre l’évolution depuis la création du territoire, il importe de ne pas envisager les choses uniquement dans une perspective à court terme. Il faut également voir ce que l’avenir peut nous réserver. Le parc Auyuittuq est plus populaire que les parcs Sirmilik et Quttinirpaaq parce qu’il est situé à proximité d’un aéroport-carrefour et donc plus facile d’accès. Toutefois au fil de l’évolution et de la croissance du Nunavut, et à la faveur du développement de localités comme celle de Pond Inlet, on peut s’imaginer une situation où le parc Sirmilik serait tout aussi populaire.

Vous avez parlé des navires de croisière. Nous avons discuté avec les gens de cette industrie afin de voir comment nous pourrions tirer davantage profit de leurs activités. Comme plus de gens s’intéressent à l’Arctique, nous voulons collaborer avec les croisiéristes pour assurer des retombées supplémentaires aux communautés grâce à la visite d’endroits comme le parc Sirmilik et les épaves du HMS Erebus et du Terror à proximité de Gjoa Haven. Même si le nombre de visiteurs est actuellement très restreint, il est important de nous tourner vers l’avenir de telle sorte que le Nunavut puisse un jour récolter les fruits véritables de cette collaboration avec l’industrie touristique.

Le sénateur Patterson : Allez-vous nous transmettre le nombre de visiteurs dans les différents parcs?

M. Nadler : Oui, ces chiffres sont accessibles sur notre site web, et nous allons vous fournir le lien dès maintenant.

Le sénateur Patterson : Madame la présidente, puis-je prendre un instant pour dire à quel point nous sommes honorés de recevoir parmi nous aujourd’hui M. Michael McLeod, député des Territoires du Nord-Ouest.

La présidente : Bienvenue et merci d’être des nôtres.

Nous avons déjà dépassé le temps prévu, mais comme il s’agit d’un sujet important et que les sénateurs ont des questions, nous pouvons poursuivre.

La sénatrice McCallum : Merci, madame la présidente. Je veux revenir à vos ententes sur les répercussions et les avantages. On vous a demandé si elles étaient confidentielles. Il y a une tendance un peu préoccupante que l’on peut observer. On semble vouloir éviter à tout prix d’éventuelles poursuites judiciaires, et les ententes comportent des dispositions en ce sens. À votre connaissance, est-ce le cas de ces ententes avec les Autochtones?

M. Nadler : Il y a des dispositions pour le règlement des différends, mais les poursuites ne sont pas interdites.

M. McNamee : Il faudrait que je vérifie, mais il n’y a pas à ma connaissance de dispositions concernant d’éventuelles poursuites dans les ententes que nous avons négociées. Cependant, comme mon collègue le soulignait, il faut notamment s’assurer lorsqu’on négocie des ententes semblables que l’autorité conférée au ministre par la loi n’est aucunement diluée. C’est le ministre qui est responsable et qui prend la décision finale.

Nous avons toutefois établi dans nos ententes une approche fondée en quelque sorte sur le consensus. Nous avons mis en place un conseil de cogestion de telle sorte que Parcs Canada n’avise pas immédiatement le ministre en cas de différend pour lui présenter les deux points de vue et lui demander de trancher en sa faveur. Les ententes sont structurées de manière à ce que cela ne soit pas possible. En cas de différend, les deux parties doivent convenir que le ministre doit en être saisi à un moment déterminé.

C’est un constat qui n’a pas de valeur statistique, mais je crois qu’il n’y a eu au cours des 25 dernières années à Parcs Canada qu’une seule situation où l’on s’est adressé à un ministre en pareil cas pour se faire répondre qu’il n’allait pas prendre une décision et qu’il fallait revenir à la table pour régler le tout. C’est l’approche qui a été adoptée. C’est celle que nous avons utilisée pendant 25 ans avec les Haïdas. C’est une des leçons que nous avons tirées : il ne faut pas se précipiter vers un ministre pour lui demander de prendre une décision en notre faveur ou quoi que ce soit de semblable. Sans prétention aucune, nous jugeons que cette recherche d’un consensus produit de bons résultats en obligeant les membres du conseil de cogestion et les Autochtones à travailler ensemble à la recherche de solutions efficaces. J’espère vous avoir aidée à y voir un peu plus clair.

La sénatrice McCallum : Merci.

Le sénateur Massicotte : Vous nous avez fourni de nombreux chiffres. Je crois que vous avez indiqué que le gouvernement vous finance à hauteur de 1,25 milliard de dollars par année et que vous avez des revenus de 5 milliards de dollars?

M. Nadler : En 2017-2018, notre budget était de 1,25 milliard de dollars. En collaboration avec Statistique Canada, nous avons établi un modèle pour évaluer les répercussions de ces investissements sur l’industrie touristique et l’économie locales.

Le sénateur Massicotte : Alors, vous avez dépensé 1,25 milliard de dollars?

M. Nadler : Et cela a généré des retombées de 4 milliards de dollars.

Le sénateur Massicotte : Mais vous n’avez encaissé aucun revenu?

M. Nadler : Non, nos revenus sont inclus dans le montant de 1,25 milliard de dollars.

Le sénateur Massicotte : Ces 4 milliards de dollars ne se sont pas retrouvés dans vos coffres.

M. Nadler : Ce sont des retombées pour les différentes communautés.

Le sénateur Massicotte : C’est un outil comptable vous permettant d’affirmer que vous êtes à l’origine de ces retombées économiques.

M. Nadler : Oui. C’est un modèle économique.

Le sénateur Massicotte : Certains pourraient faire valoir que ces retombées devraient être encore plus élevées. Je présume par ailleurs que vous n’êtes pas des experts en marketing ou en promotion. Avez-vous envisagé la possibilité de faire appel à des tiers dans le cadre d’un mandat de 5 ou 10 ans pour faire la promotion de ces parcs et attirer des touristes? Est-ce une avenue que vous avez considérée?

M. Nadler : Non. C’est une excellente question. Vous avez raison de dire que nous ne sommes pas des experts en marketing et en promotion. Nous nous débrouillons bien, mais nous ne sommes pas des experts. Nous collaborons avec les différents offices touristiques provinciaux et régionaux de même qu’avec Destination Canada, l’organisation qui fait la promotion de notre pays comme destination touristique à l’échelle internationale. Nous nous en remettons en grande partie à eux pour la promotion. Si vous regardez les publicités visant à attirer à Terre-Neuve des touristes canadiens et étrangers, vous verrez que Parcs Canada y occupe une place de choix.

Le sénateur Massicotte : Je vous recommanderais d’envisager cette possibilité. Ce n’est pas que je manque de confiance à votre endroit, mais une entreprise privée peut se montrer vraiment créative lorsque la motivation est au rendez-vous.

La présidente : Merci.

Monsieur McLeod, souhaiteriez-vous faire une observation ou poser une question?

Michael V. McLeod, député des Territoires du Nord-Ouest : Je vous remercie. Je suis simplement là pour entendre tout ce que les participants ont à dire.

La présidente : Le moment est donc venu de remercier nos témoins. J’invite toutefois les sénateurs à ne pas trop s’éloigner, car nous devons discuter de notre rapport à huis clos.

M. Nadler : Ce fut un privilège pour nous d’être des vôtres. Merci à tous.

La présidente : Honorables sénateurs, nous allons nous arrêter quelques instants avant de poursuivre à huis clos.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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