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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 30

Le jeudi 12 décembre 2002
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 12 décembre 2002

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

LA SANCTION ROYALE

AVIS

Son Honneur le Président informe le Sénat qu'il a reçu la communication suivante:

RIDEAU HALL

Le 12 décembre 2002

Monsieur le Président,

J'ai l'honneur de vous aviser que la Très honorable Adrienne Clarkson, Gouverneure générale du Canada, se rendra à la Chambre du Sénat aujourd'hui, le 12 décembre 2002, à 17 heures, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

Le secrétaire de la Gouverneure générale,
Barbara Uteck

L'honorable
        Le Président du Sénat
                 Ottawa


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

QUESTION DE PRIVILÈGE

AVIS

L'honorable E. Leo Kolber: Honorables sénateurs, conformément à l'article 43 du Règlement, je donne verbalement avis de mon intention de poser la question de privilège. J'ai déposé un avis écrit à cet effet au bureau du greffier ce matin.

[Français]

LES JEUX DU COMMONWEALTH

NATATION CANADA—RÉPRIMANDE À UNE ATHLÈTE POUR AVOIR BRANDI LE FLEURDELISÉ

L'honorable Jean Lapointe: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui parce que je suis indigné devant le tollé qu'a provoqué Natation Canada lorsque la nageuse montréalaise Jennifer Carroll a brandi le fleurdelisé aux derniers Jeux du Commonwealth. Je me réjouis du fait que plusieurs ministres aient souligné le ridicule de la situation en témoignant en faveur de la nageuse. Il est évident que les intentions de Jennifer Carroll n'étaient pas du tout politiques, mais tout simplement un geste de gratitude envers ses commanditaires, ses amis, sa famille et tous ceux et celles qui l'ont appuyée.

Pour ce qui est de l'entraîneur de l'équipe canadienne de natation, M. Dave Johnson, il s'avère qu'il devait souffrir d'une crise aiguë de zèle lorsqu'il a demandé que la jeune athlète soit suspendue pour une période de six mois à cause de son geste. Jennifer Carroll n'est-elle pas une Canadienne du Québec après tout?

D'autre part, nous ne nous sommes jamais insurgés lorsque Mme Catriona LeMay-Doan a brandi le drapeau de la Saskatchewan aux Jeux olympiques d'hiver de Salt Lake City. Pourquoi devrions-nous attacher autant d'importance pour le geste de cette athlète du Québec? Je pose simplement la question.

Selon moi, honorables sénateurs, trois options s'offrent à M. Dave Johnson. La première, il devrait démissionner et faire place à un entraîneur qui s'occuperait de la bonne performance de ses athlètes plutôt que de propagande politique; la seconde, il devrait peut-être se présenter comme candidat et se pavaner sous la bannière de l'Alliance canadienne; ou encore la troisième, il pourrait simplement aller noyer son embarras dans une piscine, de préférence olympique!

[Traduction]

LE CONSEIL DES ARTS DU CANADA

LE DÉPART À LA RETRAITE DE LA DIRECTRICE, MME SHIRLEY THOMSON

L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, à la fin de ce mois, Mme Shirley Thomson, directrice du Conseil des arts du Canada, partira à la retraite, quittant le poste qu'elle a occupé pendant les cinq dernières années. Cinq années remarquables!

Mme Thomson reconnaît qu'il lui a fallu longtemps trouver sa voie. Ainsi, sa carrière a commencé en 1980 quant elle a reçu son doctorat en histoire de l'art de l'Université McGill. Après avoir présidé aux destinées du Musée McCord à Montréal, de la Commission canadienne pour l'UNESCO et du Musée des Beaux-Arts, elle est finalement arrivée au Conseil des arts du Canada.

Dès le début de sa carrière, elle a consacré son temps à aider les Canadiens — et le monde aussi — à se rendre compte de la valeur et des possibilités de l'art dans la vie d'un pays et d'un individu. Avec dynamisme et enthousiasme, elle a poursuivi l'objectif difficile mais réalisable de l'excellence, tout en favorisant la création de nouvelles institutions vouées à la créativité. Elle a su gérer son portefeuille avec une grande compétence, demandant aux autres le meilleur d'eux-mêmes, ce qu'elle ne manquait pas elle-même de donner chaque jour.

(1340)

Elle est la principale fondatrice de la Fédération internationale des conseils des arts et agences culturelles, où elle continuera à jouer son rôle. Nous nous en félicitons.

Le grand comédien et président du Conseil des arts du Canada, M. Jean-Louis Roux, a dit d'elle:

Elle est dévouée, convaincue, généreuse et, qui plus est, elle a la foi [...]. Elle croit à ce qu'elle fait et à l'importance des arts et de la culture dans notre société, et combat constamment pour que les politiciens soient persuadés de cette importance.

On nous dit que c'est John Hobday, actuellement directeur exécutif de la Fondation de la famille Samuel et Saidye Bronfman de Montréal, qui prendra sa succession. Si c'est le cas, ce sera un magnifique cadeau pour Mme Thomson.

En ce qui nous concerne, honorables sénateurs, le Sénat devrait lui offrir un cadeau en établissant un comité permanent des arts et de la culture et en le lui dédiant.

Je ne sais pas si cela est possible, mais je crois aux miracles.

LE NUNAVUT

LA DÉCISION JUDICIAIRE ACCORDANT UNE INJONCTION PROVISOIRE SUSPENDANT L'APPLICATION DE CERTAINES DISPOSITIONS DE LA LOI SUR LES ARMES À FEU

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je voudrais donner quelques détails au sujet de ce que j'ai dit hier concernant la décision de la Cour de justice du Nunavut sur les armes à feu. Il convient, je crois, que je donne lecture d'un extrait d'un communiqué publié au sujet de cette décision.

La décision du juge Browne accordant une injonction provisoire jusqu'à l'audition de la requête en sursis exempte temporairement les Inuits du Nunavut de l'application de ce qui suit:

Paragraphe 112(1) de la Loi sur les armes à feu selon lequel commet une infraction quiconque n'enregistre pas une arme à feu.

Articles 91 et 92 du Code criminel selon lesquels commet une infraction quiconque utilise une arme à feu non enregistrée.

Les Nunavummiuts ont donc obtenu une injonction provisoire. Autrement dit, l'enregistrement ne s'appliquera pas tant que l'affaire n'aura pas été entendue.

Des voix: Bravo!


AFFAIRES COURANTES

LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE EN RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA VISITE DU 13 AU 18 OCTOBRE 2001

L'honorable Dan Hays: Honorables sénateurs, je souhaite déposer les rapports des délégations qu'en qualité de Président, j'ai dirigées en Chine, l'automne dernier, ainsi qu'en France, en Italie et au Vatican, ce printemps.

Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et conformément au paragraphe 28(4) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport d'une délégation parlementaire mixte qui a visité la République populaire de Chine du 13 au 18 octobre 2001, dans le cadre des échanges parlementaires courants entre la Chine et le Canada.

LA DÉLÉGATION SÉNATORIALEEN FRANCE, EN ITALIE AUVATICAN

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA VISITE DU 5 AU 7 MARS 2002

L'honorable Dan Hays: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et conformément au paragraphe 28(4) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la délégation parlementaire du Sénat que j'ai dirigée et qui a visité la France, l'Italie et le Vatican du 5 au 7 mars et au-delà en 2002.

[Français]

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

PRÉSENTATION DU SEPTIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Lise Bacon, présidente du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 12 décembre 2002

Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre Comité recommande que les fonds suivants soient débloqués pour l'année fiscale 2002-2003.

Affaires juridiques et constitutionnelles (Législation)

Services professionnels et autres    11 600 $
Transports et communications    3 270 $
Autres dépenses           1 000 $
Total    15 870 $

La présidente,
LISE BACON

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Bacon, nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

[Traduction]

L'ÉTUDE DES INCIDENCES SUR L'INTÉRÊT PUBLIC DES FUSIONS DE BANQUES

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ DES BANQUES ET DU COMMERCE

L'honorable E. Leo Kolber: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le sixième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce concernant son étude spéciale des incidences sur l'intérêt public des fusions de grandes banques.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Kolber, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

DROITS DE LA PERSONNE

BUDGET—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Shirley Maheu, présidente du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, présente le rapport suivant:

Le jeudi 12 décembre 2002

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre Comité, autorisé par le Sénat le jeudi 21 novembre 2002 à étudier, afin d'en faire rapport, l'adhésion possible du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l'homme, demande respectueusement qu'il soit, aux fins de ses travaux, autorisé à embaucher tout conseiller juridique et personnel technique, de bureau ou autre dont il pourrait avoir besoin.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,
SHIRLEY MAHEU

(Le texte du budget figure à l'annexe A, à la page 437, des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Maheu, avec la permission du Sénat et par dérogation à l'alinéa 58(1)g) du Règlement, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.)

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

BUDGET—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool, présidente du Comité sénatorial permanent des langues officielles, présente le rapport suivant:Le jeudi 12 décembre 2002

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles a l'honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Votre Comité, autorisé par le Sénat le 5 décembre 2002 à étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la Loi, ainsi que les rapports de la commissaire aux langues officielles, de la présidente du Conseil du Trésor et de la ministre du Patrimoine canadien, demande respectueusement qu'il soit, aux fins de ses travaux, autorisé à embaucher tout conseiller juridique et personnel technique, de bureau ou autre dont il pourrait avoir besoin.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,
ROSE-MARIE LOSIER-COOL

(Le texte du budget figure à l'annexe B, à la page 443, des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Losier-Cool, nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

L'ÉTUDE SUR LA SANTÉ EN FRANÇAIS—POUR UN MEILLEUR ACCÈS À DES SERVICES DE SANTÉ EN FRANÇAIS

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le septième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, portant sur le document intitulé «Santé en français—Pour un meilleur accès à des services de santé en français».

(Sur la motion du sénateur Morin, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1350)

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

L'ÉTUDE DE LA PROPOSITION DU GROUPE DES VALEUREUX

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ DE LA SÉCURITÉ NATIONALE ET DE LA DÉFENSE

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le quatrième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, qui porte sur la proposition du Groupe des valeureux d'ériger des statues dans le centre-ville d'Ottawa.

Honorables sénateurs, je propose que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance et qu'un exemplaire en soit transmis à la ministre du Patrimoine canadien.

(La motion est adoptée.)

LA GRÈCE

AVIS DE MOTION VISANT À ENCOURAGER LE ROYAUME-UNI À RETOURNER LES MARBRES DU PARTHÉNON

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance, je proposerai:

Que le Sénat demande au gouvernement du Canada d'encourager le gouvernement du Royaume-Uni à prendre les mesures nécessaires pour que soient retournés en Grèce les marbres du Parthénon d'ici le jour de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de 2004 à Athènes.

LA FAMINE ET LE GÉNOCIDE UKRAINIENS

AVIS DE MOTION VISANT À DEMANDER AU GOUVERNEMENT DE LES RECONNAÎTRE

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que la Chambre demande au gouvernement du Canada:

a) de reconnaître la famine et le génocide ukrainiens de 1932-1933 et de condamner tout effort visant à renier et à déformer cette vérité historique en la faisant passer pour moins qu'un génocide;

b) de désigner le quatrième samedi de novembre de chaque année Jour du Souvenir en mémoire des plus de sept millions d'Ukrainiens qui ont été victimes de la famine et du génocide ukrainiens de 1932-1933;

c) d'inviter tous les Canadiens, surtout les historiens, les enseignants et les parlementaires, à exposer les faits réels de la famine et du génocide ukrainiens de 1932-1933 dans les annales du Canada et le futur matériel didactique;

Étant donné que le génocide ukrainien (communément appelé maintenant la famine et le génocide ukrainiens de 1932- 1933 et ainsi appelé dans la présente motion) ourdi et exécuté par le régime soviétique sous Staline afin d'éliminer toute opposition à ses politiques impérialistes, a causé la mort de plus de sept millions d'Ukrainiens en 1932 et 1933;

Que le 26 novembre 1998, le président d'Ukraine a pris un décret présidentiel établissant que le quatrième samedi de novembre est un Jour national du Souvenir en mémoire des victimes de cette atrocité collective;

Que le quatrième samedi de novembre a été reconnu par les communautés ukrainiennes partout dans le monde comme le jour choisi pour se souvenir des victimes de la famine et du génocide ukrainiens de 1932-1933 et pour promouvoir les libertés fondamentales d'une société démocratique;

Qu'il est reconnu que les autorités soviétiques ont fait disparaître, déformé ou anéanti de l'information sur la famine et le génocide ukrainiens de 1932-1933;

Que ce n'est que maintenant que parvient de l'ancienne Union soviétique un peu d'information utile et exacte sur la famine et le génocide ukrainiens de 1932-1933;

Que nombre de survivants de la famine et du génocide ukrainiens de 1932-1933 ont immigré au Canada et contribué à sa prospérité;

Que le Canada condamne tous les crimes de guerre, tous les crimes contre l'humanité et tous les génocides;

Et que les Canadiens chérissent et défendent les droits de la personne, et qu'ils apprécient la diversité et la nature multiculturelle de la société canadienne.

[Français]

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION VISANT À CRÉER UN COMITÉ SPÉCIAL POUR SURVEILLER L'APPLICATION DE LA RÉSOLUTION SUR LA DIFFUSION

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 17 décembre 2002, je proposerai que:

Le Sénat approuve la radiodiffusion et la télédiffusion de ses délibérations, de celles de ses comités, avec sous-titres en temps réel, selon les principes analogues à ceux qui régissent la publication des compte rendus officiels des débats; et

Qu'un comité spécial composé de cinq sénateurs soit constitué pour surveiller l'application de cette résolution.

LE RÔLE DE LA CULTURE AU CANADA

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 17 décembre 2002:

J'attirerai l'attention du Sénat sur le rôle important de la culture au Canada et de l'image que nous projetons à l'extérieur du pays.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

L'INSCRIPTION DU HEZBOLLAH SUR LA LISTE DES ORGANISATIONS TERRORISTES

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question à madame le leader du gouvernement au Sénat au sujet de la position actuelle du gouvernement sur l'interdiction du Hezbollah. Une annonce officielle a été faite. Toutefois, je crois comprendre — et c'est à ce sujet que j'aimerais obtenir des précisions — qu'en dépit du fait que l'organisation paramilitaire et l'organisation sociale et culturelle du parti ont été inscrites sur la liste des organisations terroristes, il est toujours légal d'être membre du Hezbollah au Canada.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Comme il le sait, la désignation a été faite selon le processus prévu dans le projet de loi C-36, devenu maintenant la Loi antiterroriste. Si je comprends bien les dispositions de cette loi, il est en fait illégal d'être membre du Hezbollah.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, cette affaire a mis beaucoup de temps à se régler. Le gouvernement libéral semble être pris dans une situation semblable à celle de Paul Martin quand il avait assisté à un dîner-bénéfice au profit des Tigres tamouls. Je voudrais savoir si c'est la raison du retard, ou bien est-ce parce que les États-Unis ont demandé au Canada de continuer d'être un refuge pour les terroristes connus, donnant ainsi aux organismes de renseignement l'occasion de les surveiller?

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire si, comme l'ont suggéré certains rapports de presse, il s'agit d'un problème politique? On prétend qu'il y aurait des liens entre le Hezbollah et certaines organisations du Parti libéral, liens qui auraient causé ce retard.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, absolument pas.

(1400)

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, est-ce que le Cabinet ou des personnes responsables ont cherché à tenir compte du fait que le Hezbollah a de l'influence sur certains sièges que le gouvernement souhaite conserver? Est-ce cela qui a causé le retard?

Le sénateur Carstairs: Absolument pas.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

L'INSCRIPTION DU HEZBOLLAH SUR LA LISTE DES ORGANISATIONS TERRORISTES—LES EFFETS SUR LES RELATIONS AVEC LE LIBAN

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, maintenant que le Hezbollah a été classé parmi les organisations terroristes au Canada — soit dit en passant, je crois qu'il est opportun que cette mesure ait été prise, compte tenu des déclarations faites par le chef du Hezbollah —, quelle sera la politique du Canada à l'égard du Liban? Continuerons-nous à commercer avec ce pays exactement comme maintenant? Continuerons-nous à fournir de l'aide au Liban de la même façon, alors que le Hezbollah est représenté au Parlement du Liban et fait partie du système gouvernemental libanais? Enfin, comment allons- nous maintenant évaluer les demandeurs du statut de réfugié qui viennent au Canada et déclarent avoir des liens avec le Hezbollah? Allons-nous dire que l'élément de l'organisation avec lequel la personne a des liens importe peu? Ces demandeurs seront-ils écartés s'ils appartiennent au Hezbollah ou sont au courant de ses activités?

Je me rends compte que madame le leader pourrait ne pas avoir de réponses à ces questions aujourd'hui, mais j'aimerais recevoir ces réponses à un moment donné.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de ces questions. Nous continuerons à appliquer la même politique à l'égard du Liban pour ce qui est des demandeurs du statut de réfugié qui ont des liens avec le Hezbollah, puisqu'il est illégal d'être membre de cette organisation. De toute évidence, ces demandeurs seraient écartés.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES LA DÉFENSE NATIONALE

LES EXAMENS DES POLITIQUES

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, comme c'est la dernière occasion que nous avons de parler à madame le leader du gouvernement au Sénat pour un certain temps, je voudrais lui présenter mes meilleurs voeux à l'occasion des Fêtes et lui souhaiter, ainsi qu'à sa famille, beaucoup de bonnes choses. C'est dans cet esprit des Fêtes que je voudrais lui poser une question facile, qui ne sera sans doute pas suivie d'une question complémentaire.

Qu'est-il advenu des fameux examens de la politique étrangère et de la politique de défense que nous a promis le discours du Trône il y a près de 12 semaines et qui ont fait l'objet de plusieurs échanges au cours de la session d'automne? Peut-être madame le ministre préférerait-elle que je cesse de poser des questions sur cet examen si rien ne doit se produire.

Madame le ministre convient-elle que le monde passe par un moment déterminant au chapitre de la sécurité, ce qui a des répercussions sur chaque personne dans le monde et, à plus forte raison, sur chaque Canadien? Les questions du contrôle des armements, du développement, des droits de la personne et de la protection de l'environnement occupent une place centrale dans la sécurité de chaque Canadien et doivent être examinées d'une façon organisée, approfondie et publique. Je me contente pour le moment de demander à madame le ministre si elle peut informer le Sénat de ce qu'il advient des examens promis de la politique étrangère et de la politique de défense.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne peux malheureusement pas donner au sénateur plus de renseignements que je ne lui en ai fournis dans le passé. Je crois savoir que la question fait actuellement l'objet de discussions, mais je ne sais rien de plus.

L'honorable sénateur Roche a tout à fait raison. Le monde traverse une période très difficile, je crois, sur un certain nombre de fronts. Je vais transmettre ses observations ainsi que les miennes pour voir s'il est possible d'obtenir plus de détails sur cette question. Je tiens en même temps à lui présenter, moi aussi, mes meilleurs voeux à l'occasion des Fêtes.

LA JUSTICE

L'APPLICATION DE LA LOI SUR LES ARMES À FEU

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, hier, j'ai posé une question à madame le leader du gouvernement au sujet des porte-parole du gouvernement fédéral qui envisageraient, selon toute apparence, de mettre en place un système disparate d'application des lois concernant le registre des armes à feu dans notre pays. En réponse à cette question, la ministre nous a rappelé que les lois réprimant la possession de la marijuana sont elles aussi appliquées de manière disparate au Canada.

Cette réponse m'a intrigué. Depuis hier, je n'ai cessé d'y réfléchir et j'en suis aujourd'hui venu à la conclusion suivante: l'application disparate des lois réprimant la possession de la marijuana au Canada est attribuable à deux raisons qui sont liées. La première, c'est que la loi est pratiquement impossible à appliquer, à moins que l'on n'envisage de mettre en place une armée de policiers qui utiliseraient les méthodes les plus intrusives que l'on puisse imaginer. La deuxième, c'est que les lois réprimant la possession de marijuana ne font pas l'objet d'un consensus au Canada. L'opinion publique est divisée à ce sujet. C'est peut-être une question de région ou de génération, mais, quoi qu'il en soit, l'opinion publique est partagée au sujet des lois réprimant la possession de marijuana.

Comme c'est madame le leader du gouvernement qui a amené le sujet sur le tapis, je me permets de lui demander si ces deux raisons s'appliquent aussi aux lois concernant le registre des armes à feu.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la Loi sur les armes à feu est tout ce qu'il y a de plus applicable. Je suis d'accord avec le sénateur Murray quand il dit que l'opinion publique est si clairement partagée au sujet de la marijuana que le consensus serait difficile à obtenir. Quoi qu'il en soit, si l'on doit se fier aux sondages pour se faire une opinion, et Dieu sait que ces sondages ne sont pas des plus précis, il y a consensus au sujet du contrôle et de l'enregistrement des armes à feu.

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

L'ARRESTATION D'UN PRÉSUMÉ TERRORISTE

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je voudrais en revenir à la question du terrorisme et aux questions qui ont été posées un peu plus tôt à ce sujet. Ma question s'appuie sur un article paru dans le Ottawa Sun d'aujourd'hui au sujet de l'arrestation d'un présumé terroriste. Madame le ministre peut-elle nous dire si elle a été informée de cette affaire et si une menace a pesé sur la région de la capitale nationale?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je peux confirmer à l'honorable sénateur qu'il y a bel et bien eu une arrestation, ce qu'il sait déjà, j'en suis certaine. Toutefois, comme le système judiciaire est déjà saisi de l'affaire et que des poursuites seront intentées en temps et lieu, je ne peux faire davantage de commentaires.

Le sénateur Forrestall: Madame le ministre a-t-elle dit qu'il y aura une poursuite ou un renvoi?

Le sénateur Carstairs: Une attestation de sécurité a été signée dans ce cas particulier parce que le gouvernement estime que l'individu en question n'était pas admissible au Canada. Toutefois, il faut faire la preuve en justice de cette inadmissibilité.

LA JUSTICE

LES MODIFICATIONS APPORTÉES AU RÈGLEMENT SUR LES ARMES À FEU—LA PROLONGATION DES DROITS ACQUIS

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. Voici, en quelque sorte, une question facile pour conclure. Au fil des ans, madame le leader du gouvernement a fait un excellent travail pour répondre à nos questions.

Des voix: Bravo!

Le sénateur St. Germain: Madame le leader du gouvernement ne nous a pas toujours donné les réponses que nous voulions, mais elle a néanmoins été directe et a fait un excellent travail.

Hier, au sujet du projet de loi C-10A, madame le leader du gouvernement au Sénat a déclaré:

De toute évidence, si cette loi n'est pas adoptée, cette clause [des droits acquis] n'existera pas.

A-t-elle eu le temps de vérifier auprès du ministre de la Justice pour savoir s'il y aura une amnistie comme à d'autres égards concernant l'enregistrement?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je dois dire que je ne peux donner à l'honorable sénateur d'autres informations que celles que j'ai données hier au sujet de cette situation particulière. Il est encore possible, même si j'en doute, que la Chambre des communes se penche sur cette question. La question ne figure pas au Feuilleton d'aujourd'hui de l'autre endroit, mais il est possible qu'on la trouve dans celui de demain. Pour le reste, je ne peux donner aucune information additionnelle à l'honorable sénateur.

(1410)

Le sénateur St. Germain: Ma question n'est pas de savoir s'ils aborderont ces points. Je crois que le ministre lui-même a accordé l'amnistie relativement au délai établi pour l'enregistrement. Ma question est la suivante: le ministre accordera-t-il l'amnistie relativement à la disposition du projet de loi C-10A sur les droits acquis, disposition qui partagera le sort du projet de loi C-10A si celui-ci n'est pas adopté par la Chambre des communes?

Le sénateur Carstairs: J'ai l'impression qu'aucune décision à cet égard ne sera prise tant qu'il ne sera pas clair que la Chambre des communes n'adoptera pas le projet de loi.

[Français]

L'APPLICATION UNIFORME DE LA LOI SUR LES ARMES À FEU

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, suite aux questions du sénateur Murray, j'aimerais explorer avec madame le leader du gouvernement au Sénat la mise en application de la Loi sur les armes à feu, et le parallèle qu'elle fait avec la Loi sur les drogues et autres substances.

Comme vous le savez, le comité spécial du Sénat qui a examiné la question des drogues illicites a découvert que l'application de la Loi sur les drogues était inégale entre les provinces. Pire, à l'intérieur d'une même province, elle s'appliquait inégalement entre les régions. Le comité a découvert, entre autres, que les policiers, qui sont eux- mêmes des citoyens, ont une perception inégale de leur rôle face à la mise en application d'une loi pénale.

La Loi sur les armes à feu est également une loi pénale du Parlement fédéral et ce sont les autorités provinciales et policières qui veillent à sa mise en application. C'est ainsi que notre Constitution est faite. Que fait le gouvernement pour s'assurer qu'une loi, qui correspond à la volonté du Parlement, est appliquée de façon uniforme à travers le pays? Une application inégale amène le non-respect de cette loi par les policiers et, par le fait même, par la population.

[Traduction]

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Le sénateur utilise les mots «de façon respectueuse, égale et uniforme». Tous les Canadiens désirent que le Code criminel soit appliqué de façon respectueuse, égale et uniforme.

Cela dit, les autorités policières sont en quelque sorte les maîtres de leurs propres politiques, et le gouvernement du Canada n'exerce pas de contrôle direct sur leurs procédures. Il est évident que le gouvernement espère que la mesure sera mise en vigueur et appliquée de la façon dont le sénateur l'a décrite, c'est-à-dire de façon respectueuse, égale et uniforme.

[Français]

Le sénateur Nolin: Ne serait-il pas approprié que le gouvernement fédéral, en plus de légiférer, élabore avec ses partenaires provinciaux et municipaux des stratégies qui tiennent compte de la loi et qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs d'uniformisation et de respect de la loi?

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je m'entends avec le sénateur pour dire qu'il est valable d'avoir des stratégies et des objectifs. Il sait bien que certaines provinces, dont la sienne, appuient cette mesure législative. D'autres provinces, malheureusement, selon moi, ne donnent pas un tel appui à la mesure. Pour avoir une incidence sur les stratégies et les objectifs, il faudra que les ministres de la Justice du pays se réunissent, de manière à ce que tous finissent par chanter à l'unisson, si je puis dire.

[Français]

Le sénateur Nolin: Les partenaires provinciaux ne comptent pas que les gouvernements. À ce que je sache, il y a des intervenants sociaux, économiques et médicaux qui, dans le dossier des armes à feu, ont souvent défendu les objectifs du gouvernement. Est-ce que le gouvernement ne croirait pas utile d'aller au-delà des politiciens — non par manque de respect pour les partenaires provinciaux — et de tenter de rejoindre les intervenants qui ont à coeur le respect de ces lois? Il s'assurerait ainsi que les lois fédérales reçoivent un traitement le plus uniforme possible et le plus respectueux possible de l'intention du Parlement qui a adopté ces mêmes lois.

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, les citoyens canadiens sont les principaux intéressés et la grande majorité d'entre eux appuient le système de permis de port d'arme et d'enregistrement des armes à feu. Il est important d'assurer la participation de tous les Canadiens sur cette question.

L'une des critiques concernant l'enregistrement des armes à feu porte sur ses coûts exorbitants, notamment ceux de la campagne de publicité pour aider les Canadiens à mieux comprendre la loi. Il se pourrait que d'autres campagnes de relations publiques de ce genre soient nécessaires. Je crois également que nous devons y faire participer des gens comme les médecins urgentistes. Je dirais franchement qu'ils ont chaudement appuyé cette mesure législative.

Le sénateur, comme moi, siège au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. Je me souviens du témoignage d'un médecin qui nous avait dit: «Lorsqu'on m'amène un jeune qui a tenté de se suicider par tout autre moyen qu'une arme à feu, j'ai de bonnes chances de pouvoir le sauver. Malheureusement, s'il a eu recours à une arme à feu, je n'y arriverai probablement pas.»


AFFAIRES ÉTRANGÈRES

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion:

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et par dérogation à l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit habilité, en vertu de l'article 95(3) du Règlement, à tenir des réunions au cours de la dernière semaine de janvier 2003.

Son Honneur le Président: Permission accordée?

Des voix: D'accord.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): J'ai une question à poser au président du comité. Pour la gouverne de ceux d'entre nous qui seraient à Ottawa et qui aimeraient y assister, peut- il nous dire si ces réunions auront lieu à Ottawa?

Le sénateur Stollery: Les réunions se tiendront à Ottawa, honorables sénateurs. Nous n'en sommes qu'à l'étape de la planification.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(1420)

QUESTION DE PRIVILÈGE

Permission ayant été accordée de passer aux questions de privilège:

L'honorable E. Leo Kolber: Honorables sénateurs, je prends la parole pour demander à Son Honneur le Président de reconnaître une atteinte flagrante au privilège du Sénat.

Si Son Honneur rend une décision en ce sens, je proposerai que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit saisi de l'affaire de la divulgation prématurée du rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce sur les conséquences des fusions de grandes banques pour l'intérêt public.

Je suis au courant des dispositions de l'annexe IV de notre Règlement qui prévoient que notre comité doit mener sa propre enquête. J'ai consulté les autres membres de mon comité de direction, soit le vice-président, le sénateur David Tkachuk, et le sénateur Richard Kroft. Étant donné qu'il appert qu'il y a eu divulgation prématurée dans au moins deux cas, et probablement trois, nous sommes d'avis qu'il vaudrait mieux que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement s'occupe directement de cette affaire.

Voici les faits: à environ 15 h 48 hier, mercredi 11 décembre 2002, une dépêche a été diffusée par l'agence de presse Reuters. Elle portait sur le rapport du Comité des banques sur les conséquences des fusions de grandes banques pour l'intérêt public, rapport déposé plus tôt aujourd'hui, le 12 décembre 2002.

La dépêche révélait les détails du rapport et incluait les commentaires d'un sénateur siégeant au Comité des banques. D'après l'article, le sénateur aurait dit: «C'est un rapport unanime disant que les fusions constituent une stratégie commerciale légitime pour les banques.»

La dépêche poursuit en citant un autre commentaire du sénateur au sujet du rapport. Elle dit ceci:

«Il a été beaucoup atténué [...]. Nous (les conservateurs) insisterions pour qu'on apporte plus de précision» [...] sans compter que les membres du comité étaient «absolument» unanimes à propos de l'importance des économies d'échelle qu'il y aurait à faire des banques de plus gros joueurs mondiaux.

Honorables sénateurs, je crois que cette dépêche constitue une atteinte au privilège du Sénat, dans la mesure où elle expose publiquement les conclusions du rapport du comité avant que ce rapport n'ait été déposé ici.

Outre cette dépêche, on trouve en première page du Globe and Mail et du National Post des articles — qui me paraissent tout à fait salutaires et qui constituent une bonne publicité, quoique cette information se soit indûment retrouvée là — qui reproduisent de façon très détaillée le contenu du rapport du comité et reprennent souvent le même langage.

Je crois, comme d'autres membres du comité, que seule une personne ayant eu connaissance d'une ébauche ou de la version finale du rapport du comité aurait pu fournir l'information détaillée qui a servi à rédiger ces articles.

Honorables sénateurs, je tiens à souligner que ce rapport n'a à aucun moment été rendu public avant que je ne le dépose, plus tôt aujourd'hui. Le comité s'est réuni à huis clos à deux reprises pour examiner des projets de rapport. Le rapport n'a jamais été discuté en public avant la parution des articles en question.

Cette situation préoccupe grandement les membres du Comité des banques et moi-même. Lorsqu'il a obtenu son ordre de renvoi du Sénat, le comité est convenu de déposer son rapport au Sénat d'abord. Notre ordre de renvoi ne nous autorise pas à déposer un rapport lorsque le Sénat ne siège pas.

Trop souvent, les rapports des comités du Sénat ou de l'autre endroit ont fait l'objet de fuites partielles ou intégrales. Cela constitue un affront au Sénat et aux membres du comité qui ont consacré à ce rapport de nombreuses heures de travail pendant cinq jours d'audiences pour entendre 39 témoins.

Aussi, je demande à Son Honneur le Président de statuer qu'il y a matière à question de privilège.

Le sénateur Lynch-Staunton: Bravo!

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le sénateur nous a dit que le rapport en question, déposé plus tôt aujourd'hui, était une ébauche et qu'il a déjà été étudié pendant deux séances. Le sénateur peut-il nous dire quand ces séances ont eu lieu?

Pendant que le sénateur est debout, il pourrait peut-être nous dire combien de copies du projet de rapport ont été diffusées, qui était présent aux séances, et où ces séances ont eu lieu. Cela m'aiderait à mieux comprendre la situation.

D'autre part, l'honorable sénateur nous a parlé d'une dépêche diffusée hier par l'agence Reuters. J'en ai une copie. Au deuxième paragraphe, on peut lire ce qui suit:

[...] Selon des sources du gouvernement et du Parti libéral, le rapport, qui doit être rendu public aujourd'hui, sera probablement bien accueilli par le caucus du parti, et peut- être par le ministre des Finances, John Manley, et le ministre des Finances de second rang, Maurizio Bevilacqua, mais cela dépendra du bien-fondé de propositions précises.

Le sénateur voudrait-il faire des observations au sujet de ces sources du gouvernement et du Parti libéral qui ont parlé du rapport?

L'autre question que je voudrais soulever auprès des sénateurs est la question de procédure. Je crois que cette procédure est peut-être prématurée à ce stade-ci. L'article 43 de notre Règlement permet de soulever la question de privilège, comme le sénateur l'a fait. Il incombe à Son Honneur de déterminer si la question de privilège est fondée à première vue.

Il y a environ 15 ou 18 mois, notre Comité du Règlement a apporté des modifications importantes que les sénateurs trouveront à l'annexe IV du Règlement du Sénat. Il serait utile aux sénateurs que nous comprenions tous le processus.

Je crois savoir que, si Son Honneur estime qu'il n'y a pas eu atteinte au privilège à première vue, la question est réglée. Cependant, si Son Honneur estime qu'il semble y avoir manquement, alors, en ce qui concerne la motion dont le sénateur a parlé et qu'il était disposé à présenter dans les circonstances, le paragraphe c) de l'annexe IV prévoit que la motion est reportée d'office et que la question doit être examinée par le comité en question. Le comité doit examiner les circonstances de la fuite.

Honorables sénateurs, de toute évidence, la question de privilège nous touche tous. Tous les sénateurs doivent veiller au maintien des privilèges du Sénat. Le sénateurs doivent comprendre le processus qu'ils suivent. J'estime qu'il ne serait pas convenable d'aborder le problème en suspendant le processus ou en ne le respectant pas.

Le sénater Kolber: Le sénateur a posé bien des questions.

Les séances à huis clos ont eu lieu mercredi dernier et ce mardi. À chaque occasion, une copie de l'ébauche du rapport a été distribuée à chaque sénateur. Des membres du personnel étaient présents pour aider les sénateurs. À part cela, je ne sais pas ce que je pourrais ajouter.

N'importe qui aurait pu se procurer un exemplaire de l'ébauche du rapport et le diffuser. La question de privilège mérite d'être soulevée seulement dans le cas de la dépêche de l'agence Reuters, puisque le nom d'un sénateur y est mentionné. Cela me semble évident.

L'honorable sénateur a posé de nombreuses questions. J'ai la dépêche devant moi. On y cite des sources au sein du gouvernement et du Parti libéral. Je n'ai aucune idée à qui on veut faire allusion.

Je n'ai aucune raison de dire que le ministre des Finances, John Manley, ou le secrétaire d'État Maurizio Bevilacqua, liront notre rapport. Peut-être qu'ils le feront, peut-être qu'ils ne le feront pas. Nous recommandons dans notre rapport que le gouvernement se retire le plus possible de ce processus. Nous comprenons qu'il y a une dimension politique à toutes ces choses. Nous suggérons de la contenir le plus possible.

Il m'est impossible de répondre à la question concernant le Comité du Règlement, car je ne suis pas assez au courant de la situation. J'ai bien dit dans mon intervention que le comité et moi connaissons la teneur de l'annexe IV de notre Règlement. J'en ai discuté avec le vice-président, le sénateur Tkachuk, et l'autre membre du comité directeur, le sénateur Kroft. Nous croyons qu'il serait préférable que cette question soit examinée par le Comité du Règlement. S'il y a une forte opposition à cette démarche, je plierai. Si le Sénat veut que notre comité examine la question, nous le ferons. Par contre, je ne crois pas que nous trouverons des réponses à nos questions.

(1430)

L'honorable Richard H. Kroft: Honorables sénateurs, j'aborderai quelques aspects de cette question de privilège. Premièrement, si l'on se reporte à la dépêche de l'agence Reuters, le leader adjoint de l'opposition a dit de façon hypothétique que l'on peut trouver un auditoire réceptif, en fonction de la teneur du document. S'il voulait dire que quelqu'un d'autre est peut-être au courant de ce rapport, rien dans cette dépêche ne le laisse supposer.

Je traiterai expressément de la question de privilège, en particulier dans le contexte de l'annexe IV. Il incombe toujours à la présidence de déterminer si la question de privilège semble fondée à première vue. Dans ma présentation, le fait qu'un sénateur mentionné nommément ait accordé une entrevue à l'agence de presse Reuters et qu'il ait cité des éléments essentiels du rapport, et le fait que ce rapport soit unanime, élément qui est en soi important, montrent que la question de privilège semble très bien fondée.

Comme les honorables sénateurs pourront s'en rendre compte lorsqu'ils auront le rapport en main, les détails mentionnés aujourd'hui dans les médias donnent fortement à penser que quelqu'un était en possession du rapport. Compte tenu de l'exactitude et du caractère exhaustif du rapport, il est impossible de concevoir que des personnes n'aient pas eu ce rapport devant elles. Toutefois, cela sera à établir dans le cadre d'une enquête menée par l'un ou l'autre comité.

Il semble manifeste qu'une personne était en possession de l'information lorsqu'un membre du comité a, en son nom personnel, accordé une entrevue.

Enfin, j'aborde maintenant le Règlement et l'annexe IV, et je suis particulièrement sensible à ces aspects, car j'ai participé aux discussions au cours desquelles ce Règlement a été examiné avec soin. Nous avons envisagé exactement ce genre de situation et ce qui constituerait pour un comité la façon la plus efficace d'y réagir. Ayant participé à cette discussion, je suis maintenant dans l'obligation d'expliquer pourquoi j'appuie la motion prévoyant le renvoi de cette affaire au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

L'historique et le contexte inhabituel de cette affaire sont ce qui me forcent à intervenir. J'aime bien les dispositions de l'annexe IV, car j'ai contribué à certains égards à leur établissement. En ce qui concerne l'entrevue accordée à Reuters, nous n'avons pas là un grand mystère à résoudre, à moins que l'agence Reuters ait gravement induit le monde en erreur. Nous avons en main les déclarations d'un sénateur mentionné nommément; cela n'exige pas une grande implication. Cela mettrait directement cet élément du dossier entre les mains du Comité du Règlement, car l'annexe IV précise que c'est l'organisme le plus efficace pour recueillir l'information et les détails de l'affaire. Il n'y a pas grand chose à recueillir dans ce cas particulier. Par conséquent, la dépêche de l'agence Reuters devrait clairement être abordée par le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Le deuxième point, c'est qu'il existe des antécédents au Comité des banques. Ce n'est pas la première fois qu'un tel événement se produit. Le rapport concernant les impôts sur les gains en capital a aussi été divulgué prématurément. Nous avons fait enquête. Nous n'avons pas pu déterminer hors de tout doute ce qui s'était produit. C'est donc en me souvenant de la frustration causée par cette situation et en constatant la similitude des circonstances que je soutiens qu'il serait peut-être utile de plutôt renvoyer le dossier au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Durant le débat sur le rapport sur les gains en capital, et le recours au Règlement à ce sujet, nous avons eu une discussion au Sénat. À ce moment-là, le rapport du comité à l'origine de l'annexe IV avait été présenté à la Chambre, mais n'avait pas encore été approuvé. En prenant la parole à ce sujet, tenant pour acquis que le rapport serait approuvé, le sénateur Murray avait observé que, selon son interprétation des recommandations du Comité du Règlement, celui-ci pouvait étudier la question de privilège pendant que le Comité des banques menait sa propre enquête pour trouver le responsable de la fuite.

Je suis d'accord avec le sénateur Murray. Nous agirions ainsi de toute façon, mais si le Sénat le désire, et comme le Président l'a déclaré, le Comité des banques peut faire enquête et fera effectivement de son mieux pour découvrir ce qui s'est passé. Par ailleurs, comme l'avait proposé le sénateur Murray, et dans le contexte particulier que je viens de décrire, nous devrions certainement soumettre cette affaire au Comité du Règlement, par souci d'efficacité.

Son Honneur le Président: Madame le sénateur Cools est debout et je sais qu'elle trouve important qu'on lui donne la parole quand elle se lève.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'étais sortie et j'ai essayé de mettre la main sur les articles en question. J'y travaille encore. Je suppose que je vais devoir déclarer forfait pour le moment.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'aimerais dire un mot sur la question de savoir s'il y a, de prime abord, matière à privilège. Je n'ai pas moi non plus, lu la dépêche de Reuters. Toutefois, le président du comité affirme qu'il y a eu communication, sans autorisation, d'un rapport avant que celui-ci n'ait été déposé au Sénat. J'espère que, quel que soit le processus auquel nous aurons recours et quelle que soit la conclusion à laquelle nous parviendrons, Son Honneur déclarera, en premier lieu, que la communication d'un rapport, sans autorisation, avant qu'il ne soit déposé au Sénat est clairement, de prime abord, une atteinte au privilège.

Cette habitude de divulguer prématurément des rapports et des avant-projets de rapports et de tenir, à l'intention des journalistes, des séances d'information au sujet de rapports n'est que trop courante, notamment, je dirais, à l'autre endroit. Les fuites portant sur des rapports de comité sont non seulement courantes, mais elles sont malheureusement devenues la norme; je dirais même qu'elles constituent une stratégie délibérée de communication de la part des ministres et de leurs conseillers, qui divulguent des rapports ou des décisions du gouvernement qui devraient être annoncés en premier au Parlement.

L'honorable Jack Austin: Il s'agit d'un rapport de comité.

Le sénateur Murray: J'indiquerais au sénateur Austin que je comprends qu'il s'agit d'un rapport de comité. Je suis en train de dire qu'il arrive trop souvent ici et à l'autre endroit que des rapports de comité soient communiqués avant d'être déposés. Il est également trop fréquent que les ministres et leurs conseillers divulguent à des journalistes de leur choix des décisions et des politiques qui devraient être annoncées en premier au Parlement. C'est également une atteinte aux privilèges du Parlement, et pas seulement aux privilèges de la Chambre des communes.

De telles pratiques portent atteinte à nos privilèges ainsi qu'à ceux de la Chambre des communes. J'attends la prochaine occasion, ce qui ne saurait manquer, pour soulever la question de privilège.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, la première question qui se pose dans cette affaire est de savoir si oui ou non il y a eu, de prime abord, atteinte au privilège. Il n'est pas nécessaire de lier cette question directement à la responsabilité d'un individu en particulier; elle est distincte et séparée: les faits attestent-ils qu'il y a eu atteinte au privilège?

Dans la question qu'il a soulevée à titre de président du Comité des banques, le sénateur Kolber a parlé d'un certain document et dit qu'un sénateur y était expressément nommé. Je voudrais demander au sénateur Kolber d'établir le lien essentiel de cause à effet, sans toutefois l'inciter à révéler le nom du sénateur en cause, mais seulement à dire au Sénat si, à sa connaissance, le sénateur avait reçu copie de ce rapport.

Le sénateur Kolber: Absolument.

(1440)

Le sénateur Austin: Dans ce cas, je passerai à la question que le sénateur Kinsella a soulevée, c'est-à-dire l'alinéa c) de l'annexe IV, qui dit:

[...] le Sénat ne débattrait du fond de la question de privilège qu'après la fin de l'enquête.

En l'occurrence, il s'agirait du Comité des banques.

Lorsque je présidais le Comité du Règlement, celui-ci était unanimement d'avis que, en cas d'allégation d'atteinte au privilège, le comité dont le rapport était en cause avait la priorité pour examiner les faits.

Cela s'est produit dans le cas du rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, et la question de privilège a été soulevée par le sénateur Bacon, qui a également témoigné devant le Comité du Règlement de l'époque.

La question, dont nous ne sommes peut-être pas directement saisis en ce moment, mais que le sénateur Kinsella a effleurée, est celle de savoir si des circonstances extraordinaires justifient que la question soit renvoyée au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Je voudrais demander au sénateur Kolber si, pour une raison particulière, il serait dans l'intérêt de la procédure que le Comité du Règlement se saisisse de la question, au lieu du Comité des banques, qui, selon nos règles, connaît le mieux les faits et les circonstances, par définition, qu'un comité qui ne s'est occupé d'aucune de ces questions.

Le sénateur Kolber: Honorables sénateurs, j'en ai discuté avec les membres de notre comité, et nous avons conclu que le Comité du Règlement était beaucoup plus en mesure que nous de faire enquête.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, lorsque j'ai reçu copie de la question de privilège du sénateur Kolber, j'étais très contrarié, parce que le mot «divulgation» était employé et que, de toute évidence, la divulgation porte atteinte aux privilèges du Sénat. Toutefois, après avoir écouté l'échange et lu l'article cité, je ne vois nulle part qu'une partie du rapport aurait été divulguée. Tout ce que je vois c'est une citation du sénateur Angus, qui dit qu'il s'agit d'un rapport unanime et que les fusions sont une stratégie d'affaires légitimes pour les banques. Il n'y a rien de nouveau dans cette observation. Si je me souviens bien, même avant le début des audiences, le sénateur Kolber s'est dit en faveur des fusions de banques. La loi permet les fusions. Comme le sénateur Angus l'aurait mentionné, les fusions de toutes sortes sont une mesure légitime de n'importe quel secteur d'activité, pourvu qu'elles respectent certaines règles.

Si quelqu'un pouvait me montrer des citations tirées directement de l'ébauche de rapport, je serais plus impressionné. Tout ce que je vois ici c'est, peut-être, une petite indiscrétion dans laquelle on a fait état d'une conclusion à laquelle arriverait quiconque a suivi les audiences du comité. La tâche du comité ne consistait pas à examiner les fusions de banques, mais plutôt à définir l'expression «intérêt public», à la demande du ministre des Finances.

Ce que le sénateur Angus aurait dit n'équivaut pas à une divulgation. Il aurait aussi déclaré que le rapport avait été considérablement dilué et que l'on voulait une plus grande clarté. Je n'appelle pas cela une divulgation. C'est une remarque ou, peut- être, une légère indiscrétion. À moins que des citations tirées directement du rapport ne soit publiées dans la presse avant le dépôt du rapport, je ne suis pas convaincu qu'il y a là matière à soulever la question de privilège.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, il est plutôt difficile de suivre le débat. On fait souvent référence à une dépêche de l'agence Reuters. Nous avons pour la plupart du mal à suivre le débat parce que nous ne disposons pas de cette dépêche. Comment tenir un débat intelligent sans avoir lu la dépêche en question?

On pourrait peut-être interrompre le débat le temps de la distribuer à tous les sénateurs. Il n'est pas raisonnable de poursuivre sans savoir de quoi il est question, surtout que cela intéresse un sénateur qui n'est pas ici présent. Il me semble que cela rend les choses encore plus difficiles. Nous devrions au moins disposer des faits.

Je ne sais pas très bien ce que vous devriez faire, Votre Honneur, car votre rôle en la matière se résume à déterminer s'il y a apparence de violation de privilège. C'est au Sénat qu'il revient de régler la question de savoir s'il y a bel et bien violation de privilège.

En outre, on cite beaucoup le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Toutefois, si Votre Honneur trouve qu'il y a à première vue violation de privilège, le paragraphe 44(1) du Règlement permet de proposer une motion et d'en débattre.

Les sénateurs croient pour la plupart qu'ils sont obligés, quoi qu'il arrive, de présenter une motion pour renvoyer l'affaire au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. En fait, la motion peut renvoyer l'affaire à n'importe quel comité que choisit son auteur, ou même dire que l'auteur a une solution à l'esprit.

Toutefois, comme cette affaire intéresse un sénateur en particulier, nous nous devons d'être extrêmement prudents. Je ne veux pas dire que nous ne le sommes pas d'habitude; je veux seulement dire que nous devons nous y attacher encore plus.

Quant à moi, je voudrais avoir une copie de la dépêche en question afin de pouvoir la lire et en parler plus intelligemment. Comme ne l'ignorent pas les sénateurs, je suis souvent disposée à dire si, à mon avis, il y a ou non violation de privilège. Je trouve très difficile, toutefois, de me faire une opinion sans avoir lu la dépêche en question.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, d'autres sénateurs veulent prendre la parole et je vais la leur accorder, mais je tiens à vous faire remarquer que le temps passe. J'en ai assez entendu pour être en mesure de rendre une décision. Je ne veux bâillonner personne, mais je demande aux sénateurs d'être plutôt brefs.

Le sénateur Kroft: À mon avis, le fait qu'on ait divulgué qu'il s'agit d'un rapport adopté à l'unanimité est un aspect fondamental. Ce qui est encore plus pertinent et important par rapport à cet argument, c'est le fait que cette entrevue de l'agence Reuters sur laquelle la plupart des observations ont porté n'est qu'un aspect de la situation. On trouve à la une des journaux d'aujourd'hui de longs articles qui n'ont pu être produits que par quelqu'un en possession du rapport. Compte tenu de tout cela, il y a matière à soulever la question de privilège. À mon avis, il est inconcevable que quelqu'un ait pu rédiger ces articles sans avoir le rapport ou sans bien en connaître la teneur.

Ne nous laissons pas entraîner sur une tangente par rapport à cette entrevue.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, c'est à Son Honneur qu'il appartient de déterminer s'il en a assez entendu pour décider si la question de privilège est fondée à première vue ou non. Je veux toutefois simplement signaler à Son Honneur le fait qu'un sénateur a été nommé dans le cours de cette discussion.

(1450)

Je puis informer Son Honneur qu'un certain nombre des honorables sénateurs, dont le sénateur en question, assistent actuellement à un service commémoratif en l'honneur du sénateur Molson, à Montréal. Dans le passé, lorsque ce genre de situation s'est présentée, on a donné au sénateur visé qui était absent à ce moment-là l'occasion de s'expliquer. Je veux simplement rappeler la situation à Son Honneur.

Le sénateur Kolber: Honorables sénateurs, il ne me reste plus grand- chose à ajouter, si ce n'est que je partage l'avis du sénateur Kroft. Deux immenses articles à la une des journaux citent essentiellement notre rapport. Comment ces informations se sont retrouvées là, je n'en ai pas la moindre idée. Le leader de l'opposition dit que l'article de l'agence Reuters est une indiscrétion mineure. Je ne sais pas si elle est mineure ou majeure. Je suppose que si on dévalise une grande banque, on va en prison. Si on en dévalise une petite, on se fait taper sur les doigts. Je suis perplexe. Quoi qu'il en soit, des parties du rapport ont été divulguées. Je ne vois pas comment quelqu'un peut trouver à redire là-dessus.

Je laisse au Sénat le soin de décider ce qu'il convient de faire en l'occurrence.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Son Honneur le Président: Je vous remercie, honorables sénateurs. Je suis prêt à rendre ma décision sur cette question de privilège.

J'ai écouté attentivement. Au cours des interventions, j'en suis venu à la conclusion que je devais traiter en premier lieu de la procédure parce que c'est important que je le fasse. La question a été soulevée. Un certain nombre d'interventions ont mis en évidence l'importance de cette nouvelle procédure et quelques-unes d'entre elles ont porté sur la question de savoir s'il y avait non pas seulement apparence d'atteinte au privilège, mais vraiment atteinte au privilège. La nouvelle disposition du Règlement du Sénat, qui n'a jamais été invoquée auparavant dans des circonstances semblables, présente beaucoup d'intérêt, compte tenu de la tendance à entrer dans les détails avant d'avoir déterminé la façon dont une décision sera prise.

Aux termes du Règlement actuel et de l'annexe citée par le sénateur Austin, l'annexe C, le Sénat ne se penche sur la question de la teneur d'une question de privilège qu'après que le comité a terminé son étude. Cela répond à la préoccupation des sénateurs Lynch-Staunton et Cools. Si nous observons le Règlement, le Comité des banques présentera son rapport au Sénat et ce rapport fera partie de nos délibérations parce que la motion de renvoi est une motion qui peut être débattue par tous les sénateurs avant que la question soit renvoyée au Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Il me semble que c'est une sage procédure à observer.

L'objet de la question de privilège est une dépêche de l'agence Reuters qui, si je ne m'abuse, est diffusée aujourd'hui. Si le comité directeur a un avis là-dessus, il se peut que la discussion au comité se traduise par la production d'un rapport qui sera important pour la décision du Sénat dans son ensemble, décision qui doit être prise sur une motion pouvant être débattue, laquelle, si la présidence détermine qu'il y a atteinte au privilège à première vue, est étudiée par le Sénat tout entier, puis renvoyée, par un vote, au Comité du Règlement.

Je pense qu'il y a de la sagesse dans cette approche. Je ne sais pas avec certitude quel est le rôle de la présidence à cet égard. Les mots «[...] le Sénat ne débattrait» qui se trouvent au paragraphe c) de l'annexe IV sont intéressants. Quoi qu'il en soit, je pensais devoir traiter de cela en premier.

Il me semble que la pratique observée au Sénat est assez claire: une fuite de document constitue une question de privilège à première vue. En conséquence, telle est ma décision. Si nous observons la procédure prévue à l'annexe IV du Règlement du Sénat, ce serait ensuite au Comité des banques de faire une enquête et de présenter un rapport, qui ferait l'objet du débat dans le cadre de la motion renvoyée au Sénat, le débat étant ajourné jusqu'à ce que le Comité des banques produise son rapport. Elle serait présentée à tous les sénateurs, qui seraient alors appelés à prendre la décision de la renvoyer ou non au Comité du Règlement.


ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI SUR LES PRODUITS ANTIPARASITAIRES

TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Morin, appuyée par l'honorable sénateur Hubley, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-8, Loi visant à protéger la santé et la sécurité humaines et l'environnement en réglementant les produits utilisés pour la lutte antiparasitaire,

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Keon, appuyée par l'honorable sénateur Buchanan, c.p., voulant que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié:

a) à l'article 2, à la page 6, par substitution, à la ligne 43, de ce qui suit:

«visés au paragraphe 43(4).»

b) à l'article 43, à la page 35:

(i) par substitution, aux lignes 22 à 29, de ce qui suit:

«(5) Ne sont pas des renseignements commerciaux confidentiels pour l'application de la présente loi les renseignements qui font état de l'identité ou de la concentration du principe actif, des formulants ou des contaminants d'un produit parasitaire.»,

(ii) par substitution, à la ligne 43, de ce qui suit:

«exigences du paragraphe (4)»;

c) à l'article 67:

(i) à la page 53, par suppression des lignes 44 à 46,

(ii) aux pages 53 à 55, par le changement de la désignation littérale des alinéas o) à z.5) à celle d'alinéas n) à z.4) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, comme l'a fait hier mon collègue, le Dr Keon, j'aimerais féliciter notre collègue, le Dr Morin, d'avoir piloté ce projet de loi.

Le projet de loi C-8 remplace l'ancienne Loi sur les produits antiparasitaires, qui existe depuis 33 ans. Vu les nouvelles technologies et les nouvelles données dont on dispose, on a besoin de toute urgence de telles mesures législatives.

La Loi sur les produits antiparasitaires est la principale mesure législative fédérale permettant de contrôler l'importation, la fabrication, la vente et l'utilisation de tous les pesticides, y compris les insecticides, les herbicides et les fongicides, au Canada. Certains groupes de revendication ont critiqué le gouvernement parce qu'il semblait manquer de fermeté dans son intention de moderniser la législation canadienne en matière de pesticides, qui était vieille de 33 ans.

La commissaire fédérale à l'environnement et au développement durable a également critiqué le gouvernement pour son approche à l'égard de la réglementation des substances toxiques, y compris les pesticides, dans une section intitulée «La gestion des substances toxiques», comprenant les chapitres 3 et 4 de son rapport de 1999.

Ce projet de loi a été présenté sous le numéro C-53 lors de la première session de la 37e législature. Il est mort au Feuilleton, après avoir été modifié et adopté par la Chambre des communes, au moment de la prorogation en septembre.

Entre autre choses, le projet de loi décrit le rôle du ministre de la Santé relativement à l'administration de cette loi, y compris l'objectif premier de prévenir les risques inacceptables pour les personnes et l'environnement que présente l'utilisation des produits antiparasitaires. Il autorise le ministre à créer un comité consultatif pour l'aider à remplir son mandat. Il précise un certain nombre d'interdictions en ce qui concerne la fabrication, la possession, la manipulation, l'entreposage, le transport, l'importation, l'exportation, l'emballage et la distribution des produits antiparasitaires, ainsi que la publicité à cet égard. Il précise aussi les infractions et les peines pour ceux qui sont reconnus coupables de ne pas avoir respecté ces interdictions.

Le projet de loi C-8 établit un régime assez détaillé d'homologation et d'évaluation des produits antiparasitaires. La partie évaluation du processus sera régie par trois critères: premièrement, les risques sanitaires que présente le produit; deuxièmement, les risques environnementaux qu'il présente; troisièmement, la valeur du produit, c'est-à-dire son apport réel ou potentiel à la lutte antiparasitaire.

Honorables sénateurs, lorsque notre comité a examiné ce projet de loi, j'étais particulièrement préoccupée par le fait que le projet de loi ne traitait pas suffisamment des effets néfastes et de la connaissance de ces effets par le public. Je trouvais que ces renseignements devaient être beaucoup plus accessibles.

Je suis d'avis que le public en général ou les consommateurs, et je fais certainement partie de ce groupe car je ne suis pas une experte, ne sont pas suffisamment renseignés au sujet des ingrédients actifs, des produits de formulation ou des contaminants présents dans ces produits et qu'il n'y a pas suffisamment de garanties que le public peut avoir facilement accès à ces renseignements, comme c'est le cas dans les autres pays de l'OCDE. J'ai été particulièrement frappée par les paroles de Mme Jan Kasperski, directrice exécutive du Ontario College of Family Physicians, qui a dit ceci devant le comité:

Je n'irai pas par quatre chemins: l'objectif des pesticides est de tuer. Pour ce faire, ils perturbent les fonctions des cellules. S'ils peuvent perturber les fonctions cellulaires des animaux et des végétaux, ils peuvent aussi dérégler les fonctions cellulaires des humains.

Voilà pourquoi j'estime qu'il serait dans notre intérêt de renforcer la loi de manière à rendre obligatoire le signalement des effets nocifs des pesticides.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, je propose:

Que le projet de loi C-8 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié:

a) à l'article 13, à la page 16, par substitution, aux lignes 24 à 32, de ce qui suit:

«13. (1) Le demandeur de l'homologation d'un produit antiparasitaire et le titulaire sont tenus de communiquer au ministre, dans le délai réglementaire et selon les modalités que ce dernier prévoit, tout nouveau renseignement qui émerge, après l'homologation du produit, au sujet de...

(1500)

Son Honneur le Président: Je comprends pourquoi le sénateur Robichaud demande la parole.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur LeBreton est en train de proposer un deuxième amendement, alors que nous sommes à discuter d'un autre amendement dont nous devrions disposer, ceci afin de lui permettre de proposer son amendement de la façon dont nous procédons habituellement.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Le sénateur Robichaud a raison. Nous ne pouvons accepter d'amendement que s'il s'agit d'un sous- amendement pour modifier l'amendement proposé par le sénateur Keon.

Avant d'accepter tout autre amendement, nous devons nous prononcer sur celui présenté par le sénateur Keon, à moins que l'on n'accorde la permission de regrouper les amendements. Je ne crois pas que nous en ayons la permission.

Le sénateur Carstairs: Non, il n'y a pas de permission.

Son Honneur le Président: La Chambre souhaite-t-elle se prononcer maintenant sur l'amendement proposé par le sénateur Keon?

Le sénateur Carstairs: Le vote.

Son Honneur le Président: Si nous votons maintenant, nous pourrions ensuite revenir à l'amendement présenté par madame le sénateur LeBreton.

Je n'ai entendu aucune voix dissidente concernant la suggestion que nous votions maintenant sur l'amendement du sénateur Keon. Si nous procédons de la sorte, nous reprendrons ensuite le débat sur la motion principale. Madame le sénateur LeBreton, si elle en a le temps, pourra alors proposer son amendement.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

Des voix: Non.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion d'amendement veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Aucun sénateur ne s'étant levé, je déclare la motion d'amendement rejetée.

Retournons à la motion principale. L'honorable sénateur LeBreton a la parole.

Le sénateur LeBreton: Vous m'avez demandé d'aller de l'avant, je m'exécute donc. Je propose:

Que le projet de loi C-8 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié:

a) à l'article 13, à la page 16, par substitution, aux lignes 24 à 32, de ce qui suit:

«13. (1) Le demandeur de l'homologation d'un produit antiparasitaire et le titulaire sont tenus de communiquer au ministre, dans le délai réglementaire et selon les modalités que ce dernier prévoit, tout nouveau renseignement qui émerge, après l'homologation du produit, au sujet de l'un ou l'autre des éléments suivants:

a) les effets du produit sur la santé ou l'environnement;

b) les dommages à la santé humaine ou à l'environnement effectivement causés par le produit;

c) les limites maximales de résidus pour le produit ou ses composants ou dérivés;

d) la présence de résidus dans l'environnement.

(2) Le demandeur en vertu du paragraphe 10(2) est tenu de communiquer au ministre, dans le délai réglementaire et selon les modalités que ce dernier prévoit, tout nouveau renseignement qui émerge, après que les limites maximales de résidus ont été fixées conformément au paragraphe 10(1) par suite de la demande, au sujet de l'un ou l'autre des éléments suivants:

a) les risques sanitaires que présentent le produit antiparasitaire visé ou ses composants ou dérivés;

b) les limites maximales de résidus pour le produit ou ses composants ou dérivés;

c) la présence de résidus dans l'environnement.

(3) En plus des renseignements exigés aux paragraphes (1) ou (2), selon le cas, le demandeur de l'homologation d'un produit antiparasitaire, le titulaire et le demandeur en vertu du paragraphe 10(2) sont tenus de communiquer au ministre, dans le délai réglementaire et selon les modalités que ce dernier prévoit:

a) chaque année, des renseignements sur l'utilisation du produit antiparasitaire, y compris les cultures pour lesquelles il a été employé, le nombre moyen de traitements par culture à un taux d'épandage déterminé et la quantité totale utilisée pour chaque culture;

b) des renseignements sur les effets du produit antiparasitaire sur les espèces ou les groupes d'espèces énumérés aux annexes 1 et 2 de la Loi sur les espèces en péril, ou les effets sur les espèces indicatrices, s'il y a des motifs raisonnables de soupçonner la présence ou le risque d'effets nuisibles;

c) tout renseignement prévu par règlement qui touche à la valeur du produit antiparasitaire ou à ses effets sur la santé ou l'environnement.

(4) Lorsqu'il évalue ou détermine si les effets d'un produit antiparasitaire sur la santé et l'environnement ou les risques sanitaires liés aux limites maximales de résidus fixées par lui en vertu des articles 9 ou 10 sont acceptables, le ministre prend en considération:

a) d'une part, les renseignements communiqués en application des paragraphes (1) à (3);

b) d'autre part, tout autre renseignement qui lui est communiqué par quiconque au sujet de ces effets sur la santé ou l'environnement ou de la présence dans l'environnement de résidus de produits antiparasitaires homologués.

(5) À la suite de l'étude des renseignements visés au paragraphe (4), le ministre les met à la disposition du public.»;

b) à l'article 29, à la page 26, par substitution, à la ligne 2, de ce qui suit:

«ne respecte pas les paragraphes 13(1), (2) ou (3).».

Son Honneur le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de l'intérêt qu'elle manifeste à l'égard de cette importante mesure législative et de l'exposé détaillé qu'elle a fait sur l'obligation d'informer le public et sur la procédure de communication des effets négatifs.

Je souligne à l'honorable sénateur qu'en fait, le projet de loi C-8 prévoit bel et bien la communication, mais de façon moins détaillée, de tout renseignement concernant les effets négatifs et que les règlements ont pour objet de fournir des détails sur ces rapports.

L'article 13 du projet de loi, par exemple, sous la rubrique «Renseignements supplémentaires», exige que les entreprises communiquent immédiatement toute information sur les effets négatifs. Les détails exacts de cette communication et le moment auquel elle doit avoir lieu seront prévus par règlement.

L'article 14 exige que le ministre doit examine, dans les meilleurs délais, les effets négatifs qui lui ont été communiqués et décide s'il procède ou non à l'examen complémentaire en vue de l'homologation du produit antiparasitaire.

Enfin, en ce qui concerne l'obligation d'informer le public, les effets négatifs signalés et les autres renseignements relatifs à l'examen doivent être inscrits au registre. Le public pourra consulter ce registre en tout temps. En fait, si un effet négatif est considéré sérieux, le ministre rendra immédiatement cette information publique, en émettant, par exemple, un communiqué de presse.

Honorables sénateurs, pour ce qui est de l'obligation d'informer le public des effets négatifs et de communiquer d'autres renseignements, et pour ce qui est de faire participer le public à la décision, cette mesure législative est avant-gardiste par rapport aux lois en vigueur dans les autres pays de l'OCDE et je vous recommande fortement de l'appuyer.

Son Honneur le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le sénateur Robichaud: Sur l'amendement.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion d'amendement du sénateur LeBreton?

Des voix: Non.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Je crois que les non l'emportent.

L'honorable Lowell Murray: Avec dissidence.

Son Honneur le Président: La motion d'amendement est rejetée avec dissidence. Le vote porte maintenant sur la motion principale.

(1510)

Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

LA LOI SUR LA SÛRETÉ ET LA RÉGLEMENTATION NUCLÉAIRES

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE

L'honorable Yves Morin propose: Que le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, le projet de loi C-4, qui ne renferme qu'un article, a pour objet de clarifier le libellé du paragraphe 46(3) de la loi. Le libellé actuel a pour conséquence d'obliger les établissements prêteurs à assumer eux aussi la responsabilité de la remise en état d'un site contaminé, tout comme les propriétaires et les administrateurs. La mesure a eu pour effet de dissuader le secteur privé de consentir des prêts à l'industrie nucléaire. Cette formulation est une anomalie qui doit être corrigée.

Selon la formulation actuelle du paragraphe 46(3), la Commission canadienne de la sécurité nucléaire peut ordonner au propriétaire ou au responsable du lieu ou à toute autre personne ayant un intérêt reconnu en droit dans ce lieu de prendre les mesures réglementaires pour le décontaminer. La modification proposée clarifie le sens du paragraphe 46(3) en supprimant les termes «toute autre personne ayant un intérêt reconnu en droit dans ce lieu» et en les remplaçant par la nouvelle formulation qui se lit comme suit: «en ayant l'administration et la responsabilité».

Honorables sénateurs, l'amendement définit aussi le risque pour les établissements qui accordent des prêts à des sociétés dans l'industrie nucléaire. Cependant, un prêteur qui assume la gestion et la responsabilité d'une installation nucléaire serait tenu de prendre les mesures nécessaires pour décontaminer un site particulier.

[Français]

Le changement envisagé mettra simplement l'industrie nucléaire sur un pied d'égalité avec les autres secteurs industriels, notamment l'industrie énergétique. En effet, aucun autre secteur n'est grevé par une disposition légale fédérale qui réduit l'accès aux prêts bancaires. L'industrie nucléaire doit avoir accès au crédit commercial pour financer ses besoins comme tout autre secteur. Sans cet amendement, elle sera incapable de lever des capitaux pour renouveler et moderniser les centrales et ainsi en prolonger la vie utile.

Le régime de réglementation nucléaire du Canada a été conçu afin de protéger les gens de l'environnement contre les rayonnements des matières nucléaires ou des sources d'énergie nucléaire utilisées à des fins humaines.

[Traduction]

Tous les mécanismes stricts prévus dans la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires et les règlements pertinents, qui sont conçus pour veiller à ce que les installations nucléaires soient gérées de manière sécuritaire et écologique, sont toujours en place et ne seront pas touchés par cette disposition. La Commission canadienne de sûreté nucléaire surveille et inspecte les activités reliées à l'émission de licences, et le processus de délivrance de licences exige que les détenteurs de licences prouvent que leurs activités sont sûres. La commission continue d'avoir le pouvoir de suspendre la licence pour toute activité lorsqu'elle conclut que les activités menées posent un risque déraisonnable pour l'environnement, la santé et la sécurité. Ces exemples montrent que le mandat permettant à la commission de prévenir des risques déraisonnables pour l'environnement continuera de s'appliquer.

L'industrie nucléaire canadienne offre de nombreux avantages sur les plans de l'environnement, de la santé et de l'économie. L'énergie nucléaire fournit 13 p. 100 de l'électricité du Canada — une électricité qui est produite sans l'émission de dioxyde de carbone, d'anhydride sulfureux ni d'oxydes nitreux, lesquels contribuent tous énormément à la pollution de l'air, au smog et aux pluies acides. Les centrales canadiennes utilisant le réacteur CANDU sont sûres, car elles sont munies de systèmes de sécurité indépendants multiples pour faire cesser les activités de la centrale et assurer sa sécurité en cas de défaillance ou d'événements externes. Au Canada, le gouvernement encourage une participation accrue du secteur privé pour ce qui est du contrôle et de la gestion des installations dans tous les secteurs énergétiques. Les entreprises qui ont des activités nucléaires doivent avoir accès aux mêmes instruments financiers que les autres entreprises.

[Français]

Chaque année, la médecine nucléaire améliore des millions de vies. Des procédures sûres et sans douleur d'irradiation par radio-isotope donnent aux médecins des données essentielles à de rapides diagnostics et à la mise en œuvre de moyens pour combattre la maladie.

Sans la technologie nucléaire, de toutes nouvelles procédures de lutte contre le cancer et de recherches sur le sida seraient carrément impossibles. D'après les estimations, le nombre de procédures d'imagerie et de thérapies médicales effectuées partout au monde se situe entre 15 et 20 millions par année.

Chaque jour, quelque 45 000 thérapies anticancer sont effectuées à l'aide de machines canadiennes de télé-thérapie au cobalt-60. Le Canada produit facilement 60 p. 100 des stocks mondiaux de cobalt- 60 qui sert à stériliser une vaste gamme de fournitures médicales à utilisation unique et de produits grand public qui servent tous les jours. Enfin, ce radio-isotope a de nombreux usages dans l'industrie et en agriculture.

[Traduction]

Le Canada a joué un rôle essentiel dans la production et le commerce du molybdène-99, un radio-isotope polyvalent et important utilisé dans le monde entier en médecine nucléaire. Il est largement utilisé pour diagnostiquer des maladies comme le cancer, les maladies du coeur et les troubles du cerveau. À l'échelle mondiale, on estime que 50 000 personnes profitent chaque jour des procédures de diagnostic faisant appel à des isotopes médicaux comme le molybdène-99. Les radio-isotopes sont également utilisés en médecine nucléaire pour trouver des caillots dans les poumons et diagnostiquer des problèmes cardiaques. Les isotopes médicaux canadiens sont exportés dans plus de 60 pays. En Amérique du Nord seulement, quelque 5 000 hôpitaux comptent sur le Canada pour leurs isotopes médicaux. Les radio-isotopes ont également une application importante dans le domaine de la biologie moléculaire, y compris la conception de nouveaux médicaments efficaces. De plus, la science nucléaire a eu un rôle important à jouer dans le programme scientifique et technologique du Canada.

Honorables sénateurs, en conclusion, ce projet de loi va améliorer la façon dont l'industrie nucléaire fonctionnera au Canada et je vous exhorte fortement à appuyer le projet de loi C-4.

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, comme vous l'aurez entendu, le projet de loi C-4 est assez simple et il a pour but de remédier à un oubli dans une mesure précédente, adoptée en 1997. En effet, le projet de loi C-4 modifie la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires en dégageant les établissements prêteurs de la responsabilité de prendre des mesures correctives, mesures que les entreprises qui exploitent des installations nucléaires doivent prendre en cas de contamination radioactive.

Il convient de noter qu'il y a quelque 3 500 installations du genre au Canada; elles englobent, outre les réacteurs nucléaires, les centrales, les raffineries, des centaines de laboratoires et la plupart des hôpitaux. Le prédécesseur du projet de loi C-4, le C-57, a été présenté en mai 2002, mais le gouvernement ne l'a manifestement pas jugé prioritaire, puisqu'il ne l'a pas fait adopter avant la prorogation. Le projet de loi a été présenté de nouveau à la Chambre des communes le 3 octobre 2002, sous le numéro C-4, et il a été adopté par la Chambre des communes le 10 décembre 2002.

Je saisis la raison d'être du projet de loi, mais j'ai des réserves à l'égard ce que le gouvernement prévoit en matière de gestion des déchets nucléaires et du processus parlementaire proprement dit. Je me méfie toujours quand on me dit: «C'est un petit projet de loi de rien du tout. On veut juste remédier à un oubli. Adoptez-le, et tout le monde sera content.»

(1520)

Aux termes de l'article 46 de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, la responsabilité en matière de décontamination incombe non seulement aux propriétaires, aux occupants et aux administrateurs du lieu, mais également aux établissements prêteurs tels que les banques et autres organisations financières. Voilà ce que le projet de loi C-4 vise à corriger. Le gouvernement soutient que le fait de rendre les prêteurs responsables de la décontamination nucléaire crée une responsabilité qui occasionne des obligations financières sans commune mesure avec les intérêts commerciaux de ces prêteurs. Par conséquent, le gouvernement estime que cet élément du projet de loi empêche les entreprises agréées par la Commission canadienne de la sûreté nucléaire d'obtenir des prêts et du capital pour financer des activités en cours ou à venir.

Je crois que nous devrions utiliser cette loi modificatrice à nos propres fins. Traditionnellement, le Sénat est la chambre de second examen objectif de tous les projets de loi gouvernementaux, en particulier ceux qui émanent de la Chambre des communes. Le projet de loi modifiant la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires nous donne l'occasion d'insister auprès du gouvernement sur la nécessité d'avoir une stratégie à long terme plus efficace, compte tenu que l'utilisation de l'énergie nucléaire continue de proliférer. Jusqu'à maintenant, le gouvernement n'a toujours pas trouvé de solution adéquate au problème de l'entreposage à long terme des déchets nucléaires.

J'appuie le projet de loi C-4 qui vise à abolir, en principe, la responsabilité des institutions prêteuses. Toutefois, j'invite le comité sénatorial qui étudiera le projet de loi à poser un certain nombre de questions. Quels sont les projets du gouvernement en ce qui concerne l'entreposage à long terme des déchets nucléaires? Lorsque la loi initiale a été rédigée et adoptée en 1997, savait-on que les centrales nucléaires seraient privatisées? Je crois savoir que la loi a fait l'objet d'une étude extrêmement poussée et de vastes consultations publiques. Pourquoi la question de la responsabilité ne posait-elle pas de problème avant la privatisation des centrales nucléaires? Plus de cinq ans se sont écoulés depuis l'adoption de la loi et, s'il s'agissait d'une erreur technique, pourquoi a-t-on attendu jusqu'à maintenant pour la corriger? Qui voulons-nous protéger par l'abolition de la responsabilité des institutions financières? Quels seraient les risques financiers en cas de problème, et qui les supporterait?

Le gouvernement semble avoir accordé une aide considérable à cette industrie. Selon un rapport que j'ai lu, le gouvernement fédéral aurait à lui seul versé plus de 5,1 milliards de dollars au secteur nucléaire, sous forme de subventions publiques. Je crois que ce projet de loi est un signe annonciateur et il y aurait peut-être lieu qu'un comité sénatorial compétent entreprenne une étude spéciale sur l'avenir de l'énergie nucléaire au Canada et examine la privatisation, les risques encourus par le gouvernement et la question du financement privé.

Je crois que l'énergie nucléaire offre une bonne solution aux besoins énergétiques du Canada, mais je sais qu'il subsiste encore des craintes dans l'opinion publique, en ce qui concerne la sécurité et la fiabilité de cette forme d'énergie. Il incombe au gouvernement, c'est-à-dire à nous, de répondre aux questions que se posent nos concitoyens. Je ne connais pas les réponses à mes questions, et j'espère que le comité sénatorial auquel le projet de loi sera renvoyé examinera attentivement les questions plus vastes liées à l'énergie nucléaire.

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool (Son Honneur la Présidente suppléante): Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur la Présidente suppléante: Quand ce projet de loi sera-t- il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Morin, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.)

PROJET DE LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyée par l'honorable sénateur Corbin, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-5, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai exprimé hier de la déception devant certains des sentiments exprimés par le sénateur Watt. Après une lecture attentive des propos tenus ultérieurement par le sénateur Carstairs, je me sens quelque peu rassuré de savoir que la question de la disposition de non-dérogation est en voie d'être corrigée et que nous aurons en mars, faut-il l'espérer, un débat concernant une formulation précise qui s'appliquerait sans modification de la mesure législative. C'est ainsi que j'ai interprété l'assurance ferme donnée par le sénateur Carstairs.

Je pose pour la forme la question suivante: Une fois la formulation acceptée et confirmée, pourrait-elle avoir un effet rétroactif? J'espère que cette possibilité sera envisagée lorsque nous étudierons cette question.

Son Honneur la Présidente suppléante: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

LE CODE DE DÉONTOLOGIE ET LES LIGNES DIRECTRICES EN MATIÈRE D'ÉTHIQUE

MOTION VISANT À RENVOYER LES DOCUMENTS AU COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Robichaud, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Carstairs, c.p.:

Que les documents intitulés «Propositions de modification de la Loi sur le Parlement du Canada (Commissaire à l'éthique) et de certaines lois en conséquence» et «Propositions de modification du Règlement du Sénat et du Règlement de la Chambre des communes visant à mettre en oeuvre le rapport Milliken-Oliver de 1997» déposés au Sénat le 23 octobre 2002, soient renvoyés au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Joyal, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Losier-Cool, que la motion soit modifiée par l'adjonction de ce qui suit:

«Que, dans le cadre de son étude, le Comité examine également au même moment, d'une part, le code de déontologie en vigueur au Parlement du Royaume-Uni à Westminster et, d'autre part, des règles établissant des normes auxquelles pourraient être soumis les membres d'une chambre du Parlement qui sont nommés, et qui ne peuvent être révoqués que pour cause; et

Que le Comité formule, s'il y a lieu, des recommandations visant l'adoption et la mise en oeuvre d'un code de déontologie à l'intention des sénateurs, et les ressources nécessaires à sa mise en application, ainsi que les modifications législatives qu'il serait opportun d'apporter pour y donner effet.»

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, la motion dont nous sommes saisis nous demande d'examiner diverses questions qui s'inscrivent toutes sous la rubrique générale de code de déontologie pour les parlementaires. Pour mieux comprendre le dossier, j'ai décidé de résumer les principaux éléments de ce code. Je les énumère dans l'ordre où je les ai vus. Les éléments sont donc les suivants: définir un code de déontologie, nommer un commissaire à l'éthique et lui octroyer le pouvoir de faire enquête sur toute allégation d'infraction au code de déontologie; créer un registre d'information où seront consignées les informations personnelles et financières des parlementaires et des membres de leurs familles et nommer un fonctionnaire responsable de la tenue du registre; et finalement, assurer la communication publique des renseignements contenus dans le registre. Voilà donc les principaux ingrédients.

Je me suis ensuite demandé pourquoi nous prenions cette mesure. Je me suis intéressé à la question parce que j'essayais de comprendre l'objectif de la motion et du projet de loi. Autrement dit, quel est le problème? La première règle que j'observe lorsqu'il faut régler un problème est de ne jamais chercher une solution sans d'abord faire un diagnostic, sans d'abord déterminer la source du problème et l'ampleur de celui-ci. Avant de proposer une solution, il faut savoir ce qui ne va pas.

On pourrait s'attendre à ce qu'un nouveau code serve à régler certains cas d'abus et de conflits d'intérêts que les contrôles déjà en place ne parviennent pas à prévenir. J'ai lu les documents accompagnant la motion et j'ai compris les arguments des défenseurs des propositions. J'en conclus qu'il n'existe aucun exemple d'abus de la part des députés d'arrière-ban et des sénateurs. Le seul problème vient du fait que la population perçoit un problème. On nous dit que le public souhaite nous voir adopter de telles mesures et que nous répondons aux attentes de la population, qui demande que l'on instaure un code de déontologie et l'obligation de communiquer les informations sur les députés d'arrière-ban et les parlementaires, au lieu de régler le véritable problème.

Permettez-moi de revoir certains des discours. Le sénateur Carstairs n'a cité aucun cas de conflit ou d'abus de la part des parlementaires et elle n'a fait état d'aucun problème causé directement par les règles en vigueur régissant la conduite des parlementaires.

Le sénateur Oliver a prononcé son discours le 20 novembre. J'ai écouté attentivement. Il était fermement en faveur de ce nouveau code de déontologie. Il a dit ceci:

Depuis des années, j'estime qu'un code de déontologie pour les deux Chambres du Parlement contribuerait à assurer au public que tous les parlementaires sont tenus de respecter des normes qui font passer l'intérêt public avant leurs intérêts privés. Cela donnerait aussi un système transparent qui permettrait au public de voir qu'il en est ainsi.

Autrement dit, c'est le public qui serait juge.

À l'instar du sénateur Carstairs toutefois, le sénateur Oliver n'a pas présenté de problèmes précis portant sur les lois et règlements sur les conflits d'intérêts, et il n'a pas non plus fourni d'exemple d'abus dans ce domaine. En fait, avant de poser une question directe, le sénateur Sparrow a parlé des lois et règlements actuels, mentionnant la Loi sur le Parlement, le Règlement du Sénat, le Code criminel et la Constitution. Je cite ses paroles:

Le sénateur Oliver pourrait peut-être me dire maintenant quels aspects de la conduite des sénateurs échappent à ces paramètres.

Ce à quoi le sénateur Oliver a répondu: «... l'affaire Sinclair Stevens serait un bon exemple.»

Le problème avec cette réponse, c'est que M. Stevens était un ministre de la Couronne et non un député d'arrière-ban ou un sénateur. J'aurai d'autres choses à ajouter plus tard sur les différences entre les parlementaires et les ministres.

Le sénateur Sparrow est allé plus loin en disant:

Le sénateur peut-il me fournir un exemple d'une situation que le Sénat n'a pas été en mesure de régler de façon appropriée?

Le sénateur Oliver a répondu: «Je n'ai pas d'exemple.»

(1530)

J'ai ensuite parlé de la divulgation. En réponse à une question du sénateur Kroft sur la divulgation, le sénateur Oliver a dit, et je cite:

Ma principale source d'information a été le rapport du juge W.D. Parker, qui a présidé la commission d'enquête sur les allégations de conflit d'intérêts dans l'affaire Sinclair Stevens, dans lequel il faisait référence au rapport Starr-Sharp, au rapport Aird et à beaucoup d'autres rapports importants au Canada qui ont tenté de définir, sous un angle parlementaire, en quoi consiste un conflit d'intérêts et comment y remédier. Toutes leurs conclusions étaient unanimes. Dans tous les cas, ils ont dit que, pour avoir un régime approprié pour les titulaires de charges publiques...

Honorables sénateurs, j'insiste tout particulièrement sur le passage qui suit:

... dont les ministres, il fallait un régime de divulgation.

Le sénateur LaPierre est un autre fervent défenseur de la motion, mais il n'a été d'aucun secours lui non plus. Je cite l'honorable sénateur:

La confiance des Canadiens dans les institutions parlementaires est ébranlée...

Par conséquent, les Canadiens ne souhaitent pas deux, mais bien un seul code d'éthique pour le Parlement du Canada. Nous avons des responsabilités à leur endroit. Il est faux de dire que nous évoluons ici sans aucune partialité politique. Nous appartenons à des partis politiques. Nous faisons partie de caucus. Il n'est pas exagéré de dire que nous sommes assujettis au sectarisme politique.

La population ne sait pas qui nous sommes et n'a pas vraiment d'idée de ce que nous faisons exactement au Sénat.

Si le sénateur LaPierre a raison, je ne réussis pas à comprendre comment un régime de déontologie différent remédie au problème qu'il identifie. Le sénateur LaPierre a refusé de répondre aux questions sur le sujet. Cela ne nous aidait guère.

On nous a fourni un document de la Bibliothèque du Parlement, daté du 8 octobre 2002, dans lequel un recherchiste exposait les arguments en faveur d'une obligation de divulgation applicable aux conjoints. Je cite:

Les incidents impliquant Sinclair Stevens et son épouse dans les années 1980 viennent à l'esprit comme un exemple où les activités du conjoint du député avaient une incidence très importante sur sa conduite en tant que député.

Cela n'a été d'aucun secours non plus. Si vous vous rappelez, Sinclair Stevens était un ministre, et il constitue le seul exemple invoqué. Il n'était pas un simple député ou un humble sénateur comme nous.

Le recherchiste parlementaire a fait état de l'exposé de l'Association des conjoints des parlementaires devant le comité Oliver. C'est Judith Manley, qui est incidemment l'épouse d'un ministre, qui a témoigné.

Mme Manley a fait remarquer qu'il existait une grande divergence d'opinions entre les gens avec qui elle s'était entretenue et les deux juristes membres de son association. Même si l'Association des conjoints des parlementaires n'a pas pris position, je doute que cette association et l'épouse d'un ministre soient mandatés pour faire des déclarations politiques au nom de nos conjoints. Mais c'est une autre histoire. Quoi qu'il en soit, le témoignage de Mme Manley n'était pas favorable à la divulgation des affaires privées de nos conjoints.

Le comité du sénateur Oliver a demandé les conseils de M. Howard Wilson, le conseiller en éthique choisi par le premier ministre lui-même. Bien que je ne veuille pas paraître insolent, le bilan de M. Wilson dans ce dossier n'inspire pas beaucoup confiance parmi de nombreux sénateurs de ce côté-ci ni, j'en suis sûr, de l'autre côté, s'ils y réfléchissaient bien. Je ne crois pas qu'il inspire beaucoup confiance au sein de la population. Comme le sénateur Lynch-Staunton en avait plus long à dire sur le sujet, je ne m'y attarderai pas.

Une des observations de M. Wilson est digne de mention. M. Wilson a proposé que le greffier du Sénat soit nommé administrateur du registre, ce qui m'amène à la question des nominations. Je voudrais citer directement les propos du sénateur Oliver à ce sujet:

Il semble que certaines des suggestions du sénateur Cools concordent avec celles que le sénateur Joyal a exprimées précédemment avec éloquence, notamment en ce qui concerne la présence dans cette Chambre de fonctionnaires, tels que le greffier du Sénat, qui pourraient accomplir le travail envisagé dans le code.

Je serai honnête et franc. J'éprouve le plus grand respect pour le titulaire actuel du poste de greffier du Sénat. Cependant, nous devons faire une distinction entre le titulaire et le poste. C'est le gouverneur en conseil qui doit nommer le greffier du Sénat, qui occupe son poste à titre amovible. Nous n'aurons peut-être pas toujours la chance d'avoir un greffier compétent et intègre comme le titulaire actuel.

La perspective de fournir tous mes renseignements personnels, ainsi que ceux de ma conjointe et des personnes à ma charge, à une personne nommée par le Cabinet, me préoccupe. Nous pouvons faire preuve de collégialité et de respect; cependant, comme le sénateur LaPierre l'a souligné ici, la politique règne en maître au Sénat.

Les sénateurs des deux côtés devraient songer sérieusement aux conséquences qu'il y aurait à obliger les parlementaires et leurs conjoints à fournir des renseignements personnels à des personnes nommées par le Cabinet. Les sénateurs du parti ministériel devraient comprendre qu'ils risquent un jour de se retrouver dans l'opposition et d'être tenus de fournir des renseignements à des fonctionnaires nommés par le parti opposé. Comme on dit, la position qu'on adopte dépend de l'endroit où l'on siège.

En ce qui concerne les dossiers de renseignements confidentiels, ce qui m'inquiète quelque peu, c'est la sécurité de ces dossiers. Cela peut être délicat. De nos jours, les ordinateurs sont reliés entre eux. Il est facile pour un commis programmeur d'appuyer sur le mauvais bouton. Ce genre d'erreur humaine m'est arrivée au Sénat pas une fois, pas deux fois, mais trois fois, au téléphone et dans des courriels. Cela ne veut pas dire que les entorses étaient mal intentionnées. Toutes sortes d'excuses ont été données à ce moment-là; cependant, il s'agissait d'une erreur humaine. «Et voilà!» Cela s'est produit.

Si nous allons de l'avant, nous devons être conscients qu'il peut coûter cher d'établir un registre sécuritaire contenant des renseignements privés, personnels, sur les familles des sénateurs et que, comme on l'a déjà dit, aucun système n'est à l'abri de l'erreur humaine.

Nous sommes également au courant des estimations notoirement incorrectes des dépenses de programme et des lacunes dans la reddition des comptes qui ont été révélées ces dernières semaines. Le registre des armes à feu, qui devait coûter 2 millions de dollars avec l'imposition de frais, frôle maintenant le milliard, et ce n'est pas terminé.

Quant à la question de la nomination d'un conseiller en éthique et d'un dépositaire des dossiers privés, il nous reste à savoir qui nommera ces personnes. Le bilan de M. Wilson ne nous incite pas vraiment à nous en remettre au premier ministre du Canada.

Le processus de nomination par décret fait également problème. Les sénateurs doivent se méfier du pouvoir exécutif, lorsqu'il s'agit de la gestion des dossiers privés et des enquêtes sur les sénateurs. Ce serait une grave dérogation aux principes de la séparation entre le législatif et l'exécutif.

La plupart des sénateurs se souviendront également de l'abus de pouvoir dont s'est rendu coupable de l'ancien ministre de la Justice, Allan Rock. Il a utilisé les pouvoirs considérables de l'État à l'égard de la force de police fédérale pour mener une vendetta personnelle contre l'ancien premier ministre. Heureusement, l'ancien premier ministre Mulroney n'a pas bronché. Le contribuable a fini par payer le prix de cet abus de pouvoir éhonté du ministre de la Justice. Cependant, je me demande si la plupart d'entre nous auraient eu le courage et le cran voulus pour résister à cet abus du pouvoir de l'État, par le plus haut représentant de la justice au Canada.

Cet abus vient s'ajouter au projet de loi sur l'aéroport Lester B. Pearson, par lequel le ministre Rock a essayé de priver des citoyens de leur droit de se faire entendre par les tribunaux. Et il y a encore d'autres transgressions dont ce ministre n'a toujours pas rendu compte. Il s'en est pourtant tiré, tandis que nous, au Sénat, discutons d'un code de conduite pour les parlementaires, qui n'ont aucun pouvoir exécutif et aucune information privilégiée. Dépendant de l'issue de ce débat, je me demande si je devrais oser faire des déclarations comme celle-ci.

Le Sénat lui-même pourrait nommer le titulaire de ce poste. Le problème, c'est que les libéraux disposent d'une écrasante majorité et qu'ils pourraient être tentés de nommer l'un des leurs. Je ne trouve guère séduisante l'idée qu'une personne nommée par les libéraux tienne un registre de mes dossiers personnels et soient autorisés à faire enquête sur moi et sur ma femme. Les sénateurs d'en face ne devraient pas oublier qu'ils n'auront peut-être pas toujours la majorité.

(1540)

La question qui se pose alors est la suivante: comment nommer un administrateur réellement indépendant, capable d'inspirer confiance aux deux côtés du Sénat? Cela pourrait être tout un défi. Il pourrait s'écouler beaucoup de temps avant qu'on voie la fumée blanche sortir des cheminées du Parlement.

Pour en revenir à la question des renseignements personnels, la nouvelle loi devra, d'une certaine manière, obliger les sénateurs, leurs conjoints et leurs personnes à charge à dévoiler des renseignements personnels de nature financière au commissaire responsable du registre. De toute évidence, il faudra adopter des règles d'application sévères. Les rédacteurs devront prévoir des peines pour obliger les conjoints, conjoints de fait ou colocataires qui hésitent à le faire à dévoiler ce genre de renseignement. Quelles peines sont envisagées? Pareilles peines devraient-elles être assujetties au Code criminel? Que se passe-t-il si des parlementaires vivent une situation assimilable à une union conjugale qu'ils ne souhaitent pas dévoiler? Comment leur soutirer ces renseignements? L'État commencera-t-il à espionner les parlementaires dans leur chambre à coucher, pour reprendre les paroles d'un ex-premier ministre?

On nous dit que le commissaire à l'éthique doit être indépendant, objectif, neutre et qu'il doit être un modèle d'intégrité. Comme pour la nomination du commissaire à la protection de la vie privée, il pourrait être difficile, en l'occurrence, de trouver un mode de nomination à la satisfaction de toutes les parties.

Quoi qu'il en soit, je ne vois rien de rassurant dans un processus permettant au premier ministre en fonction de nommer ces titulaires même s'il le fait après consultation des chefs de partis à la Chambre des communes. Nous savons tous que ces consultations se résument à un appel téléphonique symbolique se limitant à ceci: «Je vous remercie, j'ai décidé de nommer telle personne. J'espère que vous êtes satisfait. Il ne vous reste plus qu'à encaisser cela sans rien dire.»

Pour ce qui est du mandat concernant les enquêtes, nous devrions réfléchir à la façon dont les enquêtes sur les allégations devront être confiées et menées. Quel genre de compétences et de formation exigera-t-on des enquêteurs? Devraient-ils avoir une formation policière? Quel genre de pouvoirs leur conférera-t-on?

Son Honneur le Président: Sénateur Comeau, j'ai le regret de vous annoncer que vos 15 minutes sont écoulées.

Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, je demande la permission de continuer.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est- elle accordée?

Des voix: D'accord.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis heureux d'accorder le consentement pour que l'honorable sénateur Comeau puisse compléter ses remarques, mais pour une durée maximale de cinq minutes.

[Traduction]

Le sénateur Comeau: Le code proposé laisse entendre que le commissaire à l'éthique serait autorisé à envoyer chercher des personnes, des documents et des dossiers.

Qu'en est-il des fouilles et des saisies, des pouvoirs d'arrestation ou de l'écoute électronique? Comment fonctionnera le processus de décision? Y a-t-il un processus d'appel? Les accusés auront-ils droit aux services d'un avocat? Les procédures judiciaires seront-elles rendues publiques? Le commissaire à l'éthique aura-t-il le droit de consulter les dossiers privés sur un sénateur qui sont conservés au bureau du greffier? Où aboutiront ces dossiers une fois que le jugement aura été rendu?

Honorables sénateurs, nous devons faire face à certaines réalités. Contrairement aux ministres et aux bureaucrates, les sénateurs et les députés d'arrière-ban n'ont pas accès à des renseignements d'initiés. Nous ne détenons aucun pouvoir exécutif. Nous n'avons pas le pouvoir de nommer ou de récompenser des amis. Nous ne supervisons pas des services de police fédéraux. Chacune de nos paroles et chacun des discours que nous prononçons au Parlement sont consignés dans les deux langues officielles dans des documents publics, et n'importe qui peut les scruter à la loupe. Les sénateurs et les députés d'arrière-ban font l'objet d'une surveillance constante et étroite de la part des médias, des citoyens et de leurs adversaires politiques.

Nous nous flagellons les uns les autres et nous nous autoflagellons couramment en défendant les positions respectives de nos partis. Pendant qu'on discute de la valeur du code proposé, on omet de parler des véritables sources d'influence, où les possibilités d'abus sont bien réelles.

Qu'on compare notre pouvoir à celui des puissants bureaucrates occupant des postes élevés qui exercent leurs fonctions à l'abri des regards. Les honorables sénateurs ont-ils une idée du nombre de bureaucrates qui font la navette entre des postes supérieurs dans la fonction publique et des postes importants au sein de grosses entreprises? Celles-ci sont souvent les mêmes que celles avec qui ils ont fait affaire pendant qu'ils travaillaient au gouvernement. Qu'on compare nos pouvoirs à ceux des ministres. Qu'on compare nos pouvoirs et les renseignements d'initiés que nous possédons à ceux dont dispose le personnel des ministres. On saurait alors où orienter les vérifications.

Quand surviennent des problèmes, il faut regarder du côté des véritables sources d'influence. Quand un sénateur a-t-il reçu la visite d'un démarcheur grassement payé pour la dernière fois? En remontant la piste du démarcheur, on arrivera à une source d'influence. Je ne reçois même pas de carte de Noël de la plupart de ces gens.

Le code qu'on nous propose est une habile diversion. Il a pour but de détourner l'attention des gens des abus de plus en plus nombreux commis par les ministres d'un gouvernement qui a affaire à une opposition divisée à la Chambre des communes. Essayons de régler les vrais problèmes.

Le sénateur Joyal a recommandé la prudence. Il a dit que, si nous essayions de rassembler en un seul document tous les ouvrages, y compris le Règlement du Sénat et toutes les lois, cela règlerait probablement la majorité de nos problèmes. Toutefois, c'est une chose que nous ferions en comité. Comme il l'a dit, nous passerions en revue tout ce qui s'est produit au cours des cent dernières années environ et nous en tirerions les leçons. Je suis entièrement d'accord avec lui.

L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, je souhaite ajourner le débat. Auparavant, toutefois, je voudrais que tous aient la possibilité de poser une question. Il se peut que je pose moi-même une question avant d'ajourner le débat.

Le sénateur a parlé du pouvoir des ministres, et plus particulièrement de l'ancien ministre de la Justice, M. Rock. Il a également parlé du fiasco de l'aéroport Pearson. Je ne suis pas certain que ce soit le terme qu'il a employé, mais il a mentionné ces incidents. La justice a fini par triompher en dépit du ministre de la Justice, et ce, grâce à l'intervention du Sénat. Je tenais à le dire publiquement. Voilà ce qui s'est passé. Est-ce à cela que le sénateur faisait allusion?

Le sénateur Comeau: En effet, honorables sénateurs. Je faisais allusion à la transaction concernant l'aéroport Pearson, à propos de laquelle le Sénat a mené une enquête approfondie, qui lui a permis de conclure qu'il n'y avait aucune raison pour que le ministre de la Justice empêche les gens d'avoir leur mot à dire au tribunal, comme le proposait le projet de loi.

J'essayais de me rappeler si nous avions rejeté le projet de loi. Je ne le crois pas. Je crois que son adoption a été retardée. On me dit que le projet de loi a été rejeté. Le Sénat a fait son travail. Absolument. C'est notre rôle d'empêcher les abus de pouvoir.

Son Honneur le Président: Sénateur Comeau, je regrette de devoir vous informer que le temps additionnel mis à votre disposition est désormais écoulé.

L'honorable Anne C. Cools: Je voulais poser aussi une question. Puis-je poser une question au sénateur Comeau?

Le sénateur Robichaud: Non.

Le sénateur Sparrow: Je propose personnellement que le débat soit ajourné.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion d'ajournement veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Je vais poser la question de nouveau. Je crois que les sénateurs s'opposent à leur propre motion.

La motion dont nous sommes saisis — qui ne peut être débattue, et c'est pourquoi je ne donne la parole à aucun sénateur — vise l'ajournement du débat. Le sénateur Sparrow a proposé une motion d'ajournement du débat, et le sénateur Cools l'a appuyée. Il s'agit de la motion sur la proposition de code d'éthique.

Pour plus de certitude, je vais poser la question de manière officielle. Que tous les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'ajournement du débat veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Le sénateur Cools: Non.

Son Honneur le Président: La motion est adoptée.

(Sur la motion du sénateur Sparrow, le débat est ajourné.)

(1550)

LE PROTOCOLE DE KYOTO SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

MOTION DE RATIFICATION—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Banks:

Que le Sénat demande au gouvernement de ratifier le protocole de Kyoto sur les changements climatiques;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur Murray, c.p., que la motion soit amendée par l'ajout de ce qui suit avant le point placé après le mot «climatiques»:

«, mais seulement si, après que le Sénat aura recueilli les témoignages en Comité plénier de tous les représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui souhaitent témoigner, le Sénat détermine qu'il existe un accord substantiel entre le fédéral et les provinces au sujet d'un plan de mise en œuvre.»

L'honorable John Buchanan: Honorables sénateurs, je trouve qu'il est nécessaire que je dise quelques mots au sujet du Protocole de Kyoto. Il n'y a aucun doute dans l'esprit de qui que ce soit ici que cette motion sera adoptée. Je le sais, d'autres sénateurs de ce côté-ci le savent, et les sénateurs d'en face le savent aussi. Cependant, il est important que nous fassions quelques remarques au sujet de la ratification du Protocole de Kyoto.

Mes remarques porteront sur l'économie, l'emploi et les relations fédérales-provinciales dans ce pays. Je ne me lancerai pas dans un exposé scientifique sur les changements climatiques. Nous savons tous qu'il y a des scientifiques dans les deux camps relativement à cette question. Certains disent qu'ils sont plus nombreux d'un côté que de l'autre. Je ne sais pas. Nous avons tous entendu les arguments, mais nous n'avons peut-être pas entendu autant d'arguments de la part des climatologues, qui disent que le problème n'est pas tel qu'il est décrit par les environnementalistes, qui soutiennent que les changements climatiques sont attribuables aux émissions de CO2.

Sans m'engager dans un débat sur l'aspect scientifique de cette question, je veux citer un homme très connu à Dartmouth, M. M.R. Morgan, B. Sc., Ph.D., membre de la Société royale des météorologues. Il a dit qu'en tant que climatologue professionnel ayant une formation en chimie, il estimait que la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto à ce moment-ci était illogique. Il a dit qu'elle pourrait être coûteuse et inefficace. Il a ajouté que ce n'est pas le CO2 et ses effets douteux sur le climat qui devraient être nos objectifs premiers, mais bien l'élimination des émissions qui sont nuisibles pour la santé. Il a également dit qu'il n'est pas logique à ce moment-ci de mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto, particulièrement en se fondant sur l'hypothèse du réchauffement de la planète, sujet qu'il a étudié de façon assez approfondie au cours de la dernière décennie. À son avis, la probabilité d'un cycle de refroidissement est beaucoup plus grande que celle de changements climatiques attribuables aux émissions.

C'est tout ce que je dirai au sujet de la science. Nous pourrions en discuter longuement sans que cela ne nous mène nulle part.

Ce qui est, à juste titre, une grande préoccupation pour les législateurs et les gens qui ont suivi notre Constitution, c'est le processus qui se déroule actuellement. En septembre de cette année, le premier ministre a dit soudainement qu'il allait ratifier le Protocole de Kyoto avant la fin de l'année. Pourquoi les plans de mise en oeuvre n'ont-ils pas fait l'objet de discussions avec les provinces au cours des dernières années? Je ne connais pas la réponse à cette question, sinon que le premier ministre a décidé qu'il voulait en finir au plus vite avec cela.

Le premier ministre et le gouvernement fédéral nous disent de leur faire confiance, qu'il n'y aura pas de problème. Le gouvernement fédéral dit que les coûts de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto ne seront pas élevés. Le gouvernement fédéral et le premier ministre disent qu'il pourrait y avoir certaines pertes d'emplois, mais que l'impact net sera une augmentation des emplois.

Qui devons-nous croire? Devons-nous croire ceux qui nous prédisent la perte de plus de 400 000 emplois ou le gouvernement qui parle de la création d'environ 2 millions d'emplois?

Parlons de la confiance que nous pouvons avoir dans le gouvernement. Le Sénat a étudié la mesure législative sur le contrôle des armes à feu.

Le sénateur Milne: Le dioxyde de carbone est également un sujet brûlant.

Le sénateur Buchanan: Je ne dis pas le contraire. Je le répète, je ne me lancerai pas dans une discussion sur les données scientifiques dans ce domaine. Je parlerai plutôt de la constitutionnalité de cette mesure et de ses répercussions économiques, qui seront, à mon avis, assez importantes.

Le gouvernement fédéral nous a dit: «Faites-nous confiance. Le contrôle des armes à feu ne coûtera en tout que 2 millions de dollars.» Nous découvrons aujourd'hui qu'il en coûtera plus de 1 milliard de dollars.

Le sénateur LaPierre: Cela en vaut la peine.

Le sénateur Buchanan: Cela en vaut la peine? Je vois. Sauf le respect que je dois à mes honorables collègues, j'ai appris il y a longtemps à ne pas me laisser distraire lorsque je chasse le gros gibier, et le gros gibier que je chasse aujourd'hui, c'est le gouvernement fédéral.

Le sénateur Graham: Diefenbaker a déjà dit cela.

Le sénateur Buchanan: J'ai souvent cité les paroles de John Diefenbaker, comme le sait très bien le sénateur Graham.

Le gouvernement nous dit de ne pas nous inquiéter, que cela ne coûtera pas tellement cher. Pourtant, le contrôle des armes à feu, lui, nous coûte très cher.

Quel impact le Protocole de Kyoto aura-t-il sur les provinces? Depuis deux décennies, nous travaillons très fort en Nouvelle- Écosse et à Terre-Neuve pour fonder notre avenir sur l'exploration et l'exploitation de nos sources de pétrole et de gaz. Notre travail a commencé à porter fruit ces dernières années. Il y a du pétrole au large de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse et du gaz au large des côtes de la Nouvelle-Écosse. Le transport se fait par pipelines et pétroliers et nous commençons à en retirer des avantages. Le sénateur Rompkey n'est pas sans savoir toutefois que nous sommes censés toucher l'ensemble des recettes provenant de l'exploitation pétrolière et gazière dans nos provinces. Ce n'est pas le cas pour l'instant, mais nous espérons que cela viendra un jour, dans un proche avenir. Nous profiterons davantage du programme de péréquation grâce aux efforts de gens comme le sénateur Murray et d'autres qui ont diffusé un excellent rapport à ce sujet.

Le sénateur Rompkey et certains autres savent de quoi je parle. Dans nos deux petites provinces, nous apercevons enfin la lumière au bout du tunnel.

Les sénateurs de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse devraient être très préoccupés au sujet du Protocole de Kyoto.

Examinons la situation du point de vue des provinces. Les honorables sénateurs entendent le gouvernement clamer qu'il a une obligation morale d'aller de l'avant. C'est peut-être le cas, mais qu'en est-il de l'économie, des emplois et de nos provinces? Les rapports fédéraux indiquent clairement que l'économie de nos provinces, notamment les provinces productrices d'énergie, nous sommes heureux de pouvoir le dire, peut maintenant être menacée.

Les provinces n'ont pas participé à ce processus. Les ministres fédéraux et provinciaux intéressés ont eu des discussions, mais les premiers ministres non. Il y a dans cette enceinte d'anciens députés de la Chambre des communes et des assemblées législatives provinciales. Je leur demande s'ils se souviennent de questions de compétence fédérale-provinciale qui, au cours des deux dernières décennies, n'auraient pas été réglées lors de conférences fédérales- provinciales.

La seule affaire du genre dont je me rappelle est survenue entre 1978 et 1981. C'est à l'époque où le premier ministre Trudeau avait décidé que les provinces n'avaient pas de rôle à jouer. M. Trudeau a dit que c'était comme d'aller à une séance de discussion ouverte avec ses homologues provinciaux. Il voulait simplement régler la question rapidement. M. Trudeau a affirmé que le gouvernement fédéral n'avait pas besoin du consentement des provinces pour changer la Constitution. Or, il a constaté que c'était une erreur. Il s'en est rendu compte parce que huit provinces ont poursuivi le gouvernement fédéral devant la Cour suprême du Canada qui a tranché en disant que les provinces ont bel et bien leur mot à dire à ce chapitre. Le gouvernement fédéral ne peut pas modifier la Constitution ou intervenir dans les champs de compétence fédéraux-provinciaux sans le consentement des provinces.

(1600)

En 1982, la Loi constitutionnelle a été adoptée avec le consentement des provinces.

En ce qui concerne le libre-échange, certains avaient dit à l'époque qu'il était tout à fait inutile de s'occuper des provinces à ce sujet. Ils avaient ajouté qu'on n'avait pas besoin des provinces. En fait, nous en avions besoin. De nombreuses réunions ont eu lieu ici, au Centre des conférences ainsi qu'à l'édifice Langevin, pour veiller à faire participer les provinces aux discussions et à l'élaboration du texte final de l'Accord de libre-échange, dont une partie est en fait de nature provinciale.

L'Accord du lac Meech est un autre exemple. Si l'on considère n'importe quelle question touchant les relations fédérales- provinciales, les provinces y ont participé. En septembre dernier ou plus tôt, le premier ministre a dit: «Ah, oui, nous inviterons les premiers ministres provinciaux à toutes les discussions portant sur Kyoto. Je convoquerai des conférences fédérales-provinciales.» Il ne l'a pas fait. Il n'y a pas eu de conférence fédérale-provinciale des premiers ministres sur l'accord de Kyoto.

Écoutons ce que certains disent. J'ai parlé des ressources au large de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve. Nous en sommes aux premiers stades de l'aide à nos provinces. Au cours d'une conférence de presse assez orageuse tenue à Halifax, le chef de la direction d'EnCana, Gwyn Morgan, a dit que le projet envisagé de Deep Panuke au large de la Nouvelle-Écosse — c'est le deuxième en importance — ne peut pas absorber une hausse quelconque des structures de coûts.

L'accord vise à empêcher la pollution qui retient la chaleur, dont certains scientifiques disent qu'elle cause une élévation de la température moyenne. Les études fédérales préliminaires révèlent que les grandes provinces productrices d'énergie, soit l'Alberta, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve, subiraient un préjudice économique important aux termes de l'accord. M. Morgan a dit que si Ottawa ratifiait le traité avant la fin de l'année, certains projets de pétrole et de gaz naturel pourraient être menacés.

Je ne suis pas le seul à le dire. Le chef de la direction d'EnCana a affirmé que nos projets, au large de Terre-Neuve et de la Nouvelle- Écosse, pourraient être menacés si l'accord était ratifié.

Écoutez ce que des gens comme le premier ministre John Hamm, le ministre de l'Énergie de la Nouvelle-Écosse Gordon Balser, le premier ministre de Terre-Neuve et, bien sûr, le premier ministre de l'Alberta déclarent. La ratification de Kyoto pourrait freiner la prospection et la production au large de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve.

C'est un recul du développement dans les deux provinces, aussi bien qu'au Nouveau-Brunswick. Cette province tire parti actuellement du gaz naturel extrait au large de la Nouvelle-Écosse. Le gaz naturel néo-écossais est consommé par un plus grand nombre de clients du Nouveau-Brunswick que de la Nouvelle-Écosse même. Le deuxième projet en importance de la Nouvelle-Écosse, celui de Deep Panuke, donnera encore plus de gaz naturel et peut-être même des centrales électriques au Nouveau-Brunswick.

Pourquoi voteriez-vous en faveur d'une résolution concernant le Protocole de Kyoto quand vous savez pertinemment que l'accord peut freiner la prospection et la production au large de la Nouvelle- Écosse et peut, par conséquent, nuire à la population du Nouveau- Brunswick, de même qu'à celles de la Nouvelle-Écosse et de Terre- Neuve?

Le sénateur Cordy sait ce qu'il en est. Le sénateur Phalen aussi. Voilà pourquoi ils vont voter contre la résolution parce que, venant du Cap-Breton, ils ne veulent pas que leur région souffre.

Son Honneur le Président: Sénateur Buchanan, je suis désolé de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.

Le sénateur Buchanan: Puis-je avoir deux minutes de plus?

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, puisque nous sommes dans l'esprit des Fêtes, nous pouvons certainement accorder cinq minutes à l'honorable sénateur Buchanan afin qu'il termine ses remarques.

[Traduction]

Le sénateur Buchanan: Le sénateur Carstairs sait, elle aussi, ce qu'il en est. Si son cher père était encore parmi nous, il dirait: «Vas-y, John. Aide la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve, le Nouveau- Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard.»

Et que dire du secteur de Laurentian Trench, au large du Cap- Breton? Que dire de Sydport? Nous avons bâti les voies reliant la route 125 à Sydport pour qu'il devienne la base de la prospection pétrolière et gazière au Cap-Breton. Que va-t-il se passer maintenant? Que va-t-il se passer quand l'accord de Kyoto arrêtera la prospection? Glace Bay en souffrira.

Le regretté Hugh MacLennan m'a corrigé une fois tandis que je lui présentais un prix littéraire de la Nouvelle-Écosse. J'ai pour deuxième prénom MacLennan. Comme ma mère, il était né à Glace Bay. Après avoir reçu son prix, Hugh MacLennan s'est levé et, de sa voix magnifique, a dit: «Je dois corriger le premier ministre. J'accepte le prix, mais il s'est lourdement trompé sur nos relations.» Je me suis dit: «Ah, mon Dieu, qu'est-ce que j'ai pu dire?» Il a ajouté alors: «Quiconque dit Glace Bay n'est pas un vrai MacLennan de Glace Bay, parce que c'est ``Glâce Bay'' qu'il faut dire.» C'était en effet la prononciation historique du nom de cette ville.

Il est important de se tenir au courant, non pas des arguments scientifiques pour ou contre l'accord de Kyoto, mais de ses répercussions sur l'économie.

Les responsables du ministère de l'Énergie de la Nouvelle-Écosse, qui sont des gens intelligents — je le sais bien puisque j'ai nommé moi-même la plupart d'entre eux —, ont affirmé que les consommateurs de la province auront probablement à payer de plus grosses factures d'électricité une fois le Protocole de Kyoto ratifié.

Allan Parker, qui est gestionnaire de l'utilisation de l'énergie dans la province, a dit au comité qu'une hausse du tarif de l'électricité aurait un effet en chaîne qui amènerait les grands utilisateurs, comme les sociétés de pâtes et papiers, à quitter le Cap-Breton et la province.

Terre-Neuve a exprimé des préoccupations au sujet de l'incertitude. Il y a encore trop d'incertitude et trop d'inconnues dans le projet de plan d'action fédéral sur le changement climatique pour que nous appuyions la ratification du Protocole de Kyoto.

Est-ce que tous ces gens se trompent?

Est-ce que l'Association des manufacturiers canadiens se trompe? L'incertitude, le manque de détails, l'absence d'un vrai consensus sur la proposition du gouvernement fédéral relative au changement climatique ne permettent pas encore de prendre une décision éclairée sur la ratification.

(1610)

L'Association des manufacturiers du Canada et le Conseil canadien de l'énergie ont déclaré que, à leur avis, le Canada ne pourra, en pratique, atteindre à temps l'objectif initial qu'il a accepté en principe à Kyoto, à moins de tomber dans une crise économique de l'ampleur de celle qu'à connue l'Europe de l'Est après la chute du bloc soviétique.

Le Conseil canadien de l'énergie a déclaré qu'il faut au Canada une stratégie qui tienne compte du fait que les États-Unis, notre principal partenaire commercial, ont expressément renoncé aux objectifs initialement acceptés en principe à Kyoto. Leur décision sera lourde de conséquences pour la compétitivité du Canada et sa stabilité économique, et compromettra sa capacité à échanger des droits d'émission, sans parler du pronostic du changement climatique. Le Canada est le seul pays signataire du monde occidental.

Est-ce que cela est sensé?

On peut s'interroger à propos des emplois, de ce qui arrivera ensuite.

Au vu de l'évolution de la situation mondiale, il nous faut élaborer une stratégie qui soit particulièrement adaptée au Canada, une stratégie qui témoigne de nos engagements internationaux, qui tienne compte de nos priorités socio-économiques et qui s'appuie sur nos capacités et nos forces collectives.

Il y a aussi la Chambre de commerce du Canada.

Son Honneur le Président: Sénateur Buchanan, le temps supplémentaire qui vous a été accordé est écoulé.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Buchanan: Je tiens à ce que tout le monde sache que je voterai contre cette résolution.

Je voterai en faveur de l'amendement proposant la participation des premiers ministres provinciaux.

L'honorable Tommy Banks: Honorables sénateurs, il est difficile de suivre le sénateur Buchanan sur quelque sujet que ce soit. J'ai le grand plaisir de pouvoir apaiser les craintes du sénateur à l'égard des questions dont il vient de nous faire part, car il n'est qu'un seul domaine dans lequel j'ai plus d'expérience que le sénateur et cela tient au fait que j'habite dans une province où la production d'énergie à partir du pétrole est un secteur d'activité important depuis 1905. Si je devais m'inspirer de la célèbre scène du film Casablanca, je dirais que je suis scandalisé d'entendre le président d'une société pétrolière dire qu'il ramasserait ses billes et qu'il rentrerait chez lui. Cela ne se passera pas ainsi, honorable sénateur, je vous le promets.

La première fois que j'ai compris cela, c'est lorsque mon cousin, Don Hanson, d'Oklahoma, qui travaille dans le secteur pétrolier et gazier, m'a rendu visite dans les années 70. Il a expliqué que sa société gazière participait à cette époque-là à un projet dans lequel elle tentait de convaincre ses clients d'utiliser moins son produit. Je n'avais jamais entendu pareille histoire. Il a dit: «Le problème, c'est que la demande est beaucoup plus forte que l'offre. Je peux répondre aux besoins de mes clients de trois façons. Premièrement, je peux forer de nouveaux puits, ce qui est coûteux, dangereux et risqué. Deuxièmement, je peux construire un nouveau pipeline et importer du gaz. Ce n'est pas une bonne idée, car c'est trop coûteux et l'approvisionnement n'est pas garanti. Troisièmement, je peux aller voir mes clients et leur trouver des façons d'utiliser l'énergie avec efficacité, ce qu'ils ne feraient jamais eux-mêmes.» C'est ce qu'il a fait. Il a dit: «Je vais le faire parce que c'est le moyen le moins coûteux dont je dispose pour atteindre mon objectif. J'aurai de meilleurs résultats financiers.» Ainsi, sa société a doublé son chiffre d'affaires, et ses clients ont tous économisé beaucoup d'argent. Il avait des idées non conventionnelles.

Honorables sénateurs, les idées non conventionnelles ne sont pas toujours justes, mais elles le sont souvent. Par contre, les idées reçues ne sont décidément pas toujours justes. L'innovation infirme souvent les idées reçues. Qu'on le demande à Galilée, à Colomb et qu'on se le demande. On se souvient de l'époque où l'idée que le tabac puisse causer le cancer nous semblait absurde. En l'occurence, ce que l'on avait toujours cru était faux.

Le monde change. L'environnement aussi. Nos habitudes de vie doivent changer. Notre volonté d'envisager le changement doit changer. Nous devons, honorables sénateurs, faire un acte de foi.

Sauf votre respect, la plupart des arguments que nous avons entendus de tous les côtés au sujet de l'accord de Kyoto sont, selon moi, les mauvais. Il est toujours question de chiffres. Je ne les crois pas. Je ne crois pas ceux qui disent que la mise en oeuvre qui doit suivre la ratification du Protocole de Kyoto ne va pas coûter un sou. Je n'en crois rien. Je ne crois pas ceux qui affirment qu'elle entraînera un bouleversement total de notre vie. Dans les deux cas, ce sont des arguments insensés.

On devrait commencer par ce qui a conduit au Protocole de Kyoto.

Y a-t-il de quoi s'inquiéter des changements climatiques et des émissions de dioxyde de carbone? Si la réponse à ces questions est non, nous devrions cesser d'en parler et nous occuper de choses importantes. Cependant, personne ne croit que la réponse à cette question est non.

La prochaine question est celle-ci: s'il y a de quoi s'inquiéter, le problème est-il urgent? Comme le sénateur Buchanan l'a déclaré, c'est peut-être le cas. La plupart des gens pensent qu'il y a une certaine urgence. D'aucuns en sont moins certains. D'autres en doutent.

Étant donné ce que nous savons, en doutant de l'urgence de la situation, nous nous comportons comme le patient qui vient d'apprendre qu'il fait de l'hypertension et que son taux de cholestérol est trop élevé. Deux réactions sont possibles: se dire, eh bien, je vais réduire ma consommation de tabac et peut-être commencer un programme d'exercice. C'est la réaction prudente. L'autre réaction serait de se dire, bon, ma tension est de 190 sur 95, mais est-ce que 175 sur 95 serait acceptable? Si je n'arrive pas à cette valeur, quand est-ce que je ferai une crise cardiaque? Sera-t-elle grave? Plus important encore, qui va payer? Combien cela va-t-il coûter? Je ne ferai rien tant qu'on n'aura pas répondu à mes questions.

Ainsi, certains affirment qu'à moins que le médecin puisse nous dire avec une certitude absolue que la crise cardiaque se produira dans les deux prochaines semaines, nous ne devrions rien faire. Nous pouvons continuer de fumer et remettre de quelques mois notre intention de faire de l'exercice. Personne ne prend plus ces gens au sérieux, même pas les farouches adversaires des mesures prévues dans le Protocole de Kyoto. Même eux affirment qu'il y a de quoi s'inquiéter et que nous devons faire quelque chose.

Nous devons prendre la bonne décision, honorables sénateurs, car si nous ne prenons pas la bonne décision, nous prendrons la mauvaise. Nous serons partie du problème plutôt que de la solution. En fin de compte, nous prenons souvent la bonne décision dans notre pays, même s'il arrive souvent que cela nécessite un acte de foi. Nous avons fait moult actes de foi, d'ailleurs.

Qu'on pense aux débats passionnés qui ont eu lieu au Parlement lorsque le premier ministre a proposé que nous ayons un chemin de fer national qui traverserait le pays. Nous pouvons voir aujourd'hui que des parlementaires bien intentionnés contestaient le bien-fondé de ce chemin de fer et que de bonnes gens se demandaient si, en tant que nation, nous avions les moyens de payer ce qu'il en coûterait pour le construire. L'histoire a montré que l'impératif déterminant était plus important que toute autre considération, et cela a porté fruit.

D'aucuns ont dit qu'on nous avait demandé de faire cet acte de foi trop rapidement, sans avis, sans délibérations ou examen suffisants.

En ce qui concerne l'urgence et le court préavis, je renvoie les honorables sénateurs au rapport que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, présidé alors par le sénateur Hays, a présenté en 1993. Ce rapport s'intitulait: Une solution efficace au fléau de la pollution énergétique. Une de ses principales recommandations était que le gouvernement, en collaboration avec les intervenants du secteur de l'énergie, entreprenne une analyse détaillée de la possibilité d'instaurer des échanges de droits d'émission pour le dioxyde de carbone et les autres gaz à effet de serre et publie cette analyse.

On en parle depuis un certain temps.

Je serai ravi d'envoyer au sénateur Buchanan les coordonnées des neuf réunions conjointes que les premiers ministres provinciaux ont demandé aux ministres provinciaux de tenir à ce sujet dans les années 1990. Nous nous intéressons à cette question depuis plus longtemps que se déroulent les consultations évoquées hier ici par les honorables sénateurs. Le Canada a raison au sujet de cette question. Nous avons bon nombre des réponses, comme c'est si souvent le cas.

(1620)

À cet égard, j'attire l'attention des honorables sénateurs sur un best-seller de Satya Das intitulé The Best Country, titre par lequel il fait référence au Canada. Dans son livre, cet éminent Albertain prétend que nous pouvons en apprendre beaucoup au reste du monde et qu'il est temps que nous commencions à le faire, à jouer un rôle de chef de file et à cesser de camoufler notre savoir-faire collectif. Comme il le souligne, nous avons non seulement la possibilité mais le devoir de montrer la voie à suivre lorsque nous avons raison. Dans ce dossier, honorables sénateurs, le Canada a raison.

Au Canada, il arrive souvent que nous réussissions à faire des choses dont on avait toujours cru qu'elles étaient impossibles. Prenons le cas des pluies acides, par exemple. En dépit des arguments à courte vue selon lesquels les coûts seraient trop élevés, les entreprises partiraient ou fermeraient leurs portes, nous avons remporté la bataille et ce, à une fraction des coûts prévus par les plus optimistes. Pensons également à l'ALE et à l'ALENA. Je me rappelle qu'on prédisait que l'ALENA entraînerait un chaos économique sans précédent, mais il n'en a rien été. Les résultats sont éloquents.

Les honorables sénateurs se rappellent-ils du moment où nous avons décidé de retirer le plomb de l'essence? Nous étions censés perdre des milliards de dollars en capital ainsi que des milliers d'emplois. Cela ne s'est pas concrétisé. Aux dernières nouvelles, il se vend toujours de l'essence, et j'espère qu'on en tire un gros bénéfice.

Lorsque nous avons décidé de retirer le soufre de l'essence, toutes les sociétés pétrolières ont dit: «C'est la fin. Nous allons boucher les puits, puis rentrer chez nous. C'est la fin de nos travaux d'exploration et vous ne reverrez jamais ce niveau d'investissement. Dites adieu à tous ces emplois.» Honorables sénateurs, ces sociétés sont encore là, elles extraient toujours du pétrole du sol et elles font toujours de l'argent. Certaines d'entre elles tirent désormais plus de revenus de la vente du soufre que de la vente de l'essence. Soit dit en passant, et il ne s'agit pas d'un résultat, il n'y a pas dans l'air une masse d'anhydride sulfureux polluant nos lacs et nos rivières.

En bout de piste, et c'est arrivé fort souvent, nous avons toujours fait le bon choix en dernière analyse. C'est exactement ce trait de caractère du Canada qui fait que nous suscitons de l'admiration et de l'envie dans le monde.

Nous avons accompli la même chose avec les accords internationaux. Lorsque les CFC menaçaient la couche d'ozone, nous avons signé le Protocole de Montréal, et quand il a fallu combattre les pluies acides, nous avons signé l'Accord Canada- États-Unis sur la qualité de l'air. Nous sommes encore là et nous nous tirons très bien d'affaire, mieux que quiconque pour l'instant. Certains avaient annoncé que ces deux mesures entraîneraient une fuite massive de capitaux, des coûts énormes et ingérables pour les entreprises et les consommateurs et la perte d'innombrables emplois. Or, les deux mesures ont atteint leurs objectifs plus tôt que prévu, et à des coûts bien moindres qu'on ne s'y attendait.

Examinons l'accord de Kyoto. Il n'a pas pour objet d'inverser le processus de réchauffement climatique ni de résoudre le problème. Il n'apportera pas la solution. Personne n'a d'ailleurs jamais prétendu que ce serait le cas. Les détracteurs du protocole ont fait valoir qu'il ne résoudrait pas le problème. Personne ne l'a jamais prétendu. Ils ont soutenu qu'il ne réduirait pas sensiblement les émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Personne n'a jamais dit que ce serait le cas. Ce ne sont pas là les objectifs de Kyoto. Pour paraphraser le grand homme, Kyoto n'est pas le commencement de la fin, mais peut-être la fin du commencement. C'est un premier tout petit pas vers un changement des mentalités collectives, non seulement au Canada mais partout dans le monde, concernant la façon dont nous produisons et consommons l'énergie.

Nous pouvons changer notre façon de penser. Il y a 15 ans seulement, les gens fumaient encore sur leur lit d'hôpital. À peine plus loin dans le passé, les femmes n'avaient pas le droit de vote et elles n'étaient certainement pas autorisées à siéger au Sénat. Cela correspondait aux idées de l'époque. Aujourd'hui, on a peine à croire qu'on ait pu agir de la sorte. Nous devons changer nos mentalités, notre façon de penser.

Je devrais réfléchir un peu plus au type de carburant que j'utilise dans mon auto; peut-être devrais-je même changer de voiture. Je pourrais aussi faire les choses différemment dans ma maison. Il y a toutes sortes de choses auxquelles nous devrions songer collectivement. Mettons-nous au travail, car Kyoto ne nous dit rien sur la façon de faire les choses, sur la mise en oeuvre du protocole, sur son application ou sur la méthodologie à utiliser. Kyoto fixe un objectif et une date.

Les Japonais trouveront leur propre façon d'atteindre leurs objectifs et de respecter l'échéance prévue. L'Allemagne et la Grande-Bretagne en feront autant: elles concevront leur propre plan d'action. Et lorsque nous aurons trouvé la façon d'atteindre nos objectifs, nous aurons doté le Canada de son propre plan d'action.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, nous sommes assez avancés, car les provinces en discutent avec le fédéral depuis les années 90. Le sénateur Kinsella nous rappelait justement que les provinces et les territoires lui avaient soumis, à Halifax, une liste de 12 principes dont devrait s'inspirer un plan national. Le gouvernement du Canada a maintenant approuvé neuf de ces principes. Cela fait 50 ans que je négocie des marchés. Quand on parvient à s'entendre sur neuf points sur douze, on peut parler d'un accord important, ce qui m'amène à parler de l'amendement à l'étude.

J'aimerais entrer dans les détails avec les honorables sénateurs, car on s'est posé des questions au sujet des trois autres points, à savoir les points 2, 3 et 7. Je vais les citer, car ce sont les provinces et les territoires qui en sont les auteurs. Le gouvernement fédéral a approuvé les points 1, 3, 4, 5, 8, 9, 10, 11 et 12.

Le point 2 tient en trois phrases. La première se lit comme suit:

Le plan doit faire en sorte qu'aucune région ou qu'aucun gouvernement n'ait à assumer une part déraisonnable du fardeau et qu'aucun secteur ou aucune région ne soit traité de façon injuste.

Le gouvernement du Canada est d'accord avec cet énoncé. La deuxième phrase se lit comme suit:

Les coûts et les impacts pour les particuliers, les entreprises et les industries doivent être clairs, raisonnables, réalisables et viables sur le plan économique.

Le gouvernement du Canada est d'accord avec cet énoncé. La troisième phrase du deuxième point se lit comme suit:

Le plan doit prévoir un financement fédéral pour les impacts négatifs liés aux initiatives sur les changements climatiques.

Le gouvernement fédéral estime qu'il s'agit là d'une question qui devrait faire l'objet de discussions, car on semble dire: «À vous de payer; nous ne paierons pas.»

L'honorable Elizabeth Hubley (Son Honneur la Présidente suppléante): Je suis désolée de vous interrompre, sénateur Banks, mais je dois vous informer que votre temps de parole est écoulé.

Le sénateur Banks: Je demande qu'on m'accorde cinq minutes de plus.

Son Honneur la Présidente suppléante: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, je vais maintenant lire les points 6 et 7. Le point 6 dit ce qui suit:

Le plan doit prévoir que les provinces et les territoires n'auront pas à assumer le risque financier des engagements pris par le fédéral en matière de changement climatique

Encore là, c'est le même principe: «C'est vous qui payez, pas nous.»

Le point 7 dit ceci:

Le plan doit reconnaître que les bénéfices provenant d'actifs tels que les puits forestiers et agricoles reviendront aux provinces ou aux territoires qui sont propriétaires de ces ressources.

«Vous payez, on dilue les risques, et nous gardons les bénéfices», tel est le point de vue des provinces et des territoires. En fait, le premier ministre Eves, de l'Ontario, croit — et en cela il a raison, je pense — que tout ça se résume à une seule question, la question de l'argent. Lors d'une interview à ce sujet à la télévision de la CBC, M. Eves a dit:

La seule restriction est que le gouvernement fédéral devrait être responsable du fardeau économique créé par les coûts, ou l'assumer...

Je suppose que cela résume l'idée que se fait le gouvernement de l'Ontario du fédéralisme coopératif.

On nous dit que la décision des États-Unis de ne pas ratifier le Protocole de Kyoto, bien qu'ils en soient signataires — nous fera tomber le ciel sur la tête. Plusieurs États des États-Unis, et de nombreuses entreprises américaines, ont un point de vue différent. En 1997, l'Oregon a adopté une loi qui a fait date. Son programme de compensation destiné aux centrales électriques permettra de réduire les émissions de CO2 de 844 000 tonnes. À New York, l'utilisation de carburant propre pour les autobus résout le problème de la consommation de près de 5 millions de gallons de diesel par an et de la production de plus de 19 000 tonnes de CO2 par an.

Comme nous l'avons vu, en août 2001, les États de la Nouvelle- Angleterre et les premiers ministres des provinces de l'Est ont déjà signé un accord par lequel ils s'engagent à réduire conjointement leurs émissions régionales de gaz à effet de serre de 10 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990, et ce, d'ici 2010. La société Dupont a réduit ses émissions de GES de 63 p. 100. Cette entreprise a augmenté sa production de 35 p. 100 depuis 1990, mais sa consommation d'énergie est demeurée au même niveau qu'en 1990. IBM a réduit sa consommation d'énergie de 6,92 p. 100, ce qui représente une diminution de CO2 de 220 000 tonnes et une économie de 22,5 millions de dollars en frais d'énergie. Il en va de même des firmes British Petroleum et Eastman Kodak.

Je suis très fier d'une importante entreprise albertaine de production d'électricité appelée TransAlta Utilities. Elle a déjà ramené ses émissions de GES aux niveaux de 1990 et compte, d'ici 2024, réduire à zéro les émissions provenant de ses activités au Canada, ce qu'elle fera certainement. Les entreprises peuvent le faire, elles le feront et elles feront de l'argent. Toutefois, le gouvernement du Canada doit veiller à ce qu'il y ait des mesures pour récompenser l'innovation, les nouvelles attitudes et les nouvelles technologies.

(1630)

En mettant en oeuvre notre plan canadien visant à atteindre les objectifs du Canada, nous devons nous assurer, et le gouvernement a déjà fait part de son accord à ce sujet, qu'aucune province, aucun secteur industriel ni aucune partie du pays n'aura à subir une plus grande part que les autres des coûts engagés. Nous devons nous assurer que les entreprises qui ont déjà réalisé d'importantes réductions de leurs émissions reçoivent le crédit qui correspond à leurs réalisations démontrables. Nous ne pouvons pas leur dire «À partir de maintenant, nous attendons ce que vous allez faire de bon.» Les bons gestionnaires qui ont su prévoir pour l'avenir ne doivent pas être punis.

Honorables sénateurs, j'ai confiance que nous ferons ce qui convient, que les Canadiens sauront faire ce qui convient, que les entreprises canadiennes et les industries feront ce qui convient et que, comme il l'a déjà fait dans des dossiers écologiques aussi importants, le gouvernement du Canada fera ce qui convient. J'ai confiance en l'innovation et en la résilience des Canadiens, et en notre aptitude à montrer au monde ce qu'il convient de faire. Nous ne pouvons nous défiler devant cette responsabilité. Nous ne devons pas laisser passer cette occasion. Nous devons dès maintenant exhorter le gouvernement à ratifier l'accord de Kyoto et à l'appliquer.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai proposé l'amendement. Comme je n'en ai pas parlé encore, je prendrai quelques minutes pour le faire et pour faire part à mes collègues de messages que j'ai reçus de certains premiers ministres provinciaux.

Mais d'abord, j'aimerais souligner que j'ai trouvé le discours du sénateur Banks très intéressant, surtout lorsqu'il a parlé des interventions pessimistes qui ont été faites avant la signature du traité sur les pluies acides et tout au cours des discussions sur l'ALE et l'ALENA, et de toutes les catastrophes qui devaient s'abattre sur le pays après la signature de l'entente. J'aimerais rappeler au sénateur que la plupart de ces rumeurs alarmistes, si ce n'est la totalité, provenaient de son parti. Je présume qu'en attirant notre attention sur ce fait, il nous présente en quelque sorte des excuses et c'est ainsi que je le vois.

Le sénateur Carstairs: C'est un peu exagéré.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je signale au sénateur qu'il a aussi oublié de nous dire que l'ALE allait entraîner la fin du régime d'assurance-maladie. Cela non plus ne s'est pas produit.

Si j'ai abordé cette question en plaisantant, ce que j'ai à dire maintenant est sérieux: jusqu'à maintenant, personne n'a contesté ni l'objectif ni le principe ni l'intention du Protocole de Kyoto. Pour autant que je sache, personne n'a tenu de tels propos alarmistes. Évidemment, certains craignent des pertes d'emplois, la possibilité que des usines soient incapables de se conformer aux exigences, etc. C'est normal. Toutefois, ce ne sont pas nos arguments. Ces arguments n'ont certainement rien à voir avec cet amendement.

Si nous sommes tous d'accord qu'il faut un plan d'action commun pour faire face aux changements climatiques, ce plan ne peut être élaboré qu'avec l'appui du plus grand nombre de provinces possible. Je ne parle pas d'unanimité, puisque c'est une chose pratiquement impossible, mais à tout le moins d'un accord substantiel.

Madame le sénateur Spivak n'est pas ici. Son engagement envers Kyoto est aussi fort que celui de n'importe qui d'autre. Toutefois, le 10 décembre, elle a fait la déclaration suivante qui paraît à la page 639 des Débats du Sénat:

J'aurais sincèrement espéré que davantage de provinces appuient la ratification du protocole. Ces derniers mois, les appuis à cet égard se sont affaiblis.

Madame le sénateur Spivak a tout à fait raison à cet égard. Elle a mentionné ensuite les provinces et territoires qui appuient la ratification, ceux qui sont contre, et ceux qui, comme l'Alberta, menacent d'aller devant les tribunaux.

Si vous me le permettez — et c'est ce que je veux corriger — elle a dit:

En toute humilité, dire que nous ne devrions pas ratifier le protocole jusqu'à ce que toutes les provinces soient d'accord équivaut à dire que nous ne le ratifierons peut-être jamais.

L'amendement ne parle pas d'unanimité; il parle seulement d'«accord substantiel».

Le sénateur Buchanan: Il s'agit d'un consensus.

Le sénateur Lynch-Staunton: D'un consensus, c'est exact.

Il y avait unanimité dans le cas du traité sur les pluies acides. Lorsque le premier ministre Mulroney et le président Reagan ont signé cet accord, M. Mulroney a pu dire avec fierté que tous les territoires et toutes les provinces l'appuyaient. Comme le sénateur Murray nous l'a rappelé, lorsque l'ALENA a été signé, lorsque l'ALE a été signé, deux provinces, l'Ontario étant la plus importante, s'opposaient à cet accord. Toutefois, ces deux provinces sont par la suite rentrées dans le rang et les lois ont été modifiées en conséquence.

Il y a eu unanimité dans un cas et accord substantiel dans l'autre. Cependant, il n'y a pas d'entente et certainement pas d'accord substantiel à l'heure actuelle. Des consultations ont eu lieu, ainsi que des réunions et celles-ci se poursuivront. Cependant, rien ne laisse entrevoir la possibilité d'une entente après la ratification. S'il n'y a pas d'entente après la ratification, alors celle-ci n'a pas de sens. La ratification représente un engagement formel envers la communauté internationale à l'effet que le Canada veillera à la mise en oeuvre du traité qu'il a ratifié. Or, s'il ratifie le traité avant la fin de l'année en cours, le Canada ne pourra pas dire «tout est en place, nous allons tenir nos engagements pour l'année 2010». Nous ne pouvons faire une telle déclaration pour l'instant.

Il n'est pas nécessaire que le Canada ratifie le Protocole de Kyoto avant la fin de l'année. Cela ne servirait qu'à respecter un engagement pris par le premier ministre dans un moment de grand enthousiasme, à Johannesburg, en septembre. C'est seulement une fois rentré chez lui qu'il a pris conscience du fait que bon nombre de ses députés et ministres, dont deux de l'Alberta, n'étaient pas de son avis. Il a vu que les provinces et territoires avaient ces 12 principes, qui font encore l'objet de discussions, et il a constaté que plusieurs provinces craignent encore énormément l'impact du traité sur leur territoire.

Nous sommes trop pressés. On ne nous demande de remplir l'engagement d'une seule personne. Cette personne a sûrement compris qu'elle devrait changer d'idée, compte tenu de tous les débats qui ont eu lieu en cette enceinte et ailleurs au pays, et surtout de la part de ses partenaires, dans la mise en oeuvre de ce traité.

Je ne comprends pas comment le premier ministre, dans le discours du Trône de septembre, a pu dire qu'il convoquerait une réunion des premiers ministres pour discuter du rapport Romanow, avant même d'avoir vu le rapport. Il a confirmé la rencontre après la publication du rapport. Pourtant, dans le cas de Kyoto, les Canadiens sont saisis du projet depuis cinq ans et nous n'avons fait aucun progrès réel vers une entente généralisée, vers un accord substantiel. Le premier ministre soutient qu'il ne veut pas rencontrer les premiers ministres des provinces et des territoires. Il a déjà pris sa décision. Ce n'est pas ainsi qu'on remplit des obligations internationales.

J'invite instamment les honorables sénateurs à appuyer l'amendement.

Dans le passé, les honorables sénateurs m'ont déjà accordé la permission de déposer de la correspondance venant de bureaux de premiers ministres et j'espère que j'obtiendrai la même permission aujourd'hui. Je vais tout d'abord vous donner une idée du contenu de la correspondance que j'ai reçue.

Les représentants de l'Île-du-Prince-Édouard seraient heureux de comparaître devant le Sénat si l'amendement est adopté, mais ils ne désirent pas se présenter au Sénat pour l'instant.

Quant au premier ministre Campbell de la Colombie-Britannique, il n'a ni accepté ni refusé l'invitation. Il nous a toutefois fait parvenir une copie de la lettre qu'il a envoyée à tous les sénateurs et députés de la Colombie-Britannique, dans laquelle il décrit les grandes préoccupations de sa province. Permettez-moi d'en citer une seule phrase qui donnera aux honorables sénateurs une bonne idée de la teneur de cette lettre:

Le plan fédéral qui a été présenté aux provinces et aux territoires est non seulement incomplet, mais il est inéquitable.

Finalement, le premier ministre Grimes de Terre-Neuve applaudit à la proposition d'un amendement et signale que son gouvernement étudiera toute invitation à comparaître, si le Sénat prend une telle décision.

Les provinces et territoires n'ont pris aucun engagement ferme, mais ont manifesté beaucoup d'intérêt. Je demande aux honorables sénateurs la permission de déposer cette lettre.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Lynch-Staunton: Cela marque la fin de mon intervention. J'espère avoir réussi à convaincre certains sénateurs d'en face de réfléchir au moins à la situation et de se rendre compte que la ratification rapide du protocole pourrait susciter de la dissension au lieu de susciter chez le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires le consensus auquel nous aspirons.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question du sénateur Banks?

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.

Le sénateur Banks: Je pense qu'il est probable que des premiers ministres provinciaux acceptent de comparaître devant le Sénat.

(1640)

L'honorable sénateur pourrait-il nous dire combien, parmi tous les premiers ministres qui ont été invités, ont indiqué qu'ils viendraient nous rencontrer?

Deuxièmement, si un accord sur 9 des 12 points, et aux deux tiers sur le dixième point, n'est pas substantiel, qu'est-ce qui le serait? Un accord sur 10 des 12 points représenterait-il un accord substantiel?

Troisièmement, l'honorable sénateur ne croit-il pas que, si on a fixé une échéance, disons 2010, il y aurait tout lieu de nous atteler immédiatement à la tâche afin de respecter cette échéance, et que chaque jour qui passe sans que nous ayons déterminé ce que nous allons faire pour atteindre nos objectifs est une journée perdue?

Nous avons déjà perdu cinq ou six mois depuis l'annonce faite par le premier ministre. Nous avons besoin de temps pour mettre en oeuvre les moyens qui nous permettront d'atteindre nos objectifs d'ici 2010. Ne voit-on pas l'urgence d'agir?

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, la seule façon d'atteindre les objectifs fixés pour l'an 2010 est d'amener les provinces et les territoires à conclure une entente générale avec le gouvernement fédéral. Ce dernier a perdu du temps en négligeant de réunir les hauts fonctionnaires de chaque province et territoire afin d'essayer de concocter un plan. S'il s'avérait impossible d'obtenir un accord unanime, alors je prendrais le parti du premier ministre qui, je le ferais remarquer, aurait sérieusement tenté, en assemblée, de dégager un accord. S'il y avait un ou deux récalcitrants, tant pis.

La même situation s'est produite pendant les discussions sur le libre-échange. Il y avait des tables sectorielles et des discussions constantes entre les fonctionnaires à tous les niveaux, y compris entre les ministres compétents. Les discussions se sont poursuivies pendant des années. Je n'exagère pas. Cependant, dans le cas présent, nous avons gaspillé cinq ans.

Le gouvernement canadien n'a pas pris au sérieux le point de vue des provinces et des territoires. C'est un retour à 1981-1982 et au débat sur la Constitution. Tout ce à quoi on pensait à l'époque, c'était de rapatrier la Constitution. Qu'est-il arrivé? Certaines provinces se sont adressées à la Cour suprême. Et qu'a dit la Cour suprême? Que M. Trudeau agissait de façon légale, mais qu'il violait une convention. Qu'est-ce que M. Trudeau a été contraint de faire dans les circonstances? Il s'est vu forcé d'obtenir l'accord des provinces et des territoires, ce qu'il aurait dû faire avant d'entreprendre le rapatriement de la Constitution. Je vois la même action unilatérale se répéter.

Deux premiers ministres provinciaux ont accepté de nous rencontrer, le premier ministre Hamm et le premier ministre de l'Alberta. L'invitation a été lancée aux premiers ministres provinciaux ou à leurs représentants. Selon le ministre des Relations internationales et intergouvernementales, M. Halvar Johnson, «le gouvernement albertain serait disposé à permettre à un de ses membres de s'entretenir avec les sénateurs afin de leur fournir de pareils renseignements».

On pourrait dire qu'il s'agit seulement d'une rencontre informelle autour d'une tasse de café. Le gouvernement albertain veut comparaître devant le Sénat, du moins devant des sénateurs. J'en déduis qu'il appuie sans réserves la démarche exposée dans l'amendement.

Supposons que les 12 principes seront approuvés. Ils ne le seront pas, comme le dit le sénateur, parce que deux d'entre eux portent sur le financement, les provinces étant d'avis que le gouvernement fédéral devrait tout payer. Je conviens que c'est un peu excessif, mais c'est certes négociable. Tout est négociable. Prenons le temps de négocier. Faites venir les premiers ministres provinciaux pour négocier. Ce n'est pas ce qu'on fait à l'heure actuelle. Le gouvernement se contente de dire non.

Des voix: Le vote.

Son Honneur le Président: Le Sénat est-il prêt à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

Des voix: Non.

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés:

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Y a-t-il une entente au sujet du moment où se tiendra le vote?

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, il y a une entente pour que le vote ait lieu après la sanction royale, avec une sonnerie d'appel de 15 minutes.

L'honorable Terry Stratton: Je suis d'accord.

Son Honneur le Président: On est d'accord. Je voudrais être plus précis, parce qu'il est important de savoir exactement quand le timbre commencera à sonner et quand le vote aura lieu.

La sanction royale doit avoir lieu à 17 heures selon les lettres. Son Excellence sera ici à ce moment-là. La sanction royale prendra peut- être 15 minutes.

Par conséquent, honorables sénateurs, je vais demander aux whips encore une fois à quelle heure le timbre devrait commencer à sonner.

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, le timbre devrait commencer à sonner lorsque Son Excellence la Gouverneure générale aura quitté la salle du Sénat.

Son Honneur le Président: Quand le vote aura-t-il lieu?

Le sénateur Rompkey: Le vote aura lieu après la sonnerie d'appel de 15 minutes.

Son Honneur le Président: Avez-vous une observation à faire à ce sujet, sénateur Stratton?

Le sénateur Stratton: Est-ce que Son Honneur est en train de dire qu'il faut savoir avec certitude à quelle heure cela se déroulera?

Son Honneur le Président: Le timbre commencera à sonner lorsque la Gouverneure générale franchira la barre du Sénat, et le vote aura lieu 15 minutes plus tard.

[Français]

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

ADOPTION DU SIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bacon, appuyée par l'honorable sénateur Maheu, tendant à l'adoption du sixième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (prévisions budgétaires du Sénat pour 2003-2004), présenté au Sénat le 10 décembre 2002.—(L'honorable sénateur LaPierre).

L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, je ne parlerai pas. Madame la présidente a donc tout le loisir de dépenser l'argent qu'on lui a octroyé et à l'avenir, je lui demanderai d'en trouver d'autre. Je propose l'adoption de ce rapport. C'est mon cadeau de Noël.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

PÊCHES ET OCÉANS

BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DES STOCKS CHEVAUCHANTS ET DE L'HABITAT DU POISSON

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans (budget—étude relativement aux stocks chevauchants et à l'habitat du poisson), présenté au Sénat le 10 décembre 2002.—(L'honorable sénateur Comeau).

L'honorable Gerald J. Comeau propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

L'ÉTUDE DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ

LE RAPPORT FINAL DU COMITÉ DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE—SUSPENSION DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kirby, appuyée par l'honorable sénateur Cook, tendant à l'adoption du troisième rapport (final) du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie intitulé «La santé des Canadiens—Le rôle du gouvernement fédéral, Volume six: Recommandations en vue d'une réforme», déposé au Sénat le 25 octobre 2002.—(L'honorable sénateur Keon).

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, il me fait plaisir de vous livrer quelques remarques sur le dernier rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

En tant que membre du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, je profite de l'occasion pour féliciter les membres du comité des efforts assidus qu'ils ont déployés depuis deux ans afin de mener cette étude à bien. Cela n'aurait pas pu être possible non plus sans le travail formidable accompli par le personnel et les recherchistes du comité. Il faut adresser des félicitations spéciales au sénateur Kirby, qui a fait montre d'un formidable leadership tout au long de cette entreprise, ainsi qu'au sénateur LeBreton, la coprésidente. Je dois dire que c'était un plaisir de travailler avec tous les membres du comité.

Je voudrais maintenant signaler les principales conclusions et recommandations du rapport rendu public à la fin d'octobre. Malgré la nature idéologique et politique complexe du système de santé, les onze membres du comité sénatorial ont réussi à parvenir à un consensus sur une série de recommandations visant à réformer, renouveler et élargir le système de santé du Canada financé par l'État.

Les recommandations du comité sénatorial peuvent être regroupées en six catégories: premièrement, restructurer le système hospitalier et la profession médicale; deuxièmement, mettre en oeuvre la garantie de soins de santé; troisièmement, élargir la couverture du régime public d'assurance-santé; quatrièmement, renforcer le rôle du gouvernement fédéral dans l'infrastructure de soins de santé; cinquièmement, encourager l'investissement fédéral dans la recherche en santé, la promotion de la santé et la prévention des maladies; et sixièmement, générer des recettes fédérales additionnelles pour les soins de santé.

Dès le départ, je tiens à souligner que toutes les recommandations du comité sénatorial peuvent être appliquées sans qu'il soit nécessaire de modifier la Loi canadienne sur la santé. Dans son rapport, le comité a exprimé un solide appui aux cinq principes de la loi. Le rapport fait cependant une observation importante en insistant sur la nécessité de clarifier le principe d'administration publique. Il est important de comprendre que ce principe a trait au financement des services hospitaliers et médicaux, non à la prestation de ces services financés par l'État.

Quant à la restructuration du système hospitalier et de la profession médicale, le comité sénatorial a fait plusieurs recommandations. Premièrement, nous recommandons de réviser les mécanismes actuels de financement des hôpitaux, lesquels reposent sur les intrants financiers et non sur les résultats finaux, pour adopter un financement fondé sur les services, une méthode mettant l'accent sur le rendement au niveau de la prestation de services hospitaliers qui répondent à des critères précis.

Deuxièmement, nous avons recommandé que les régies régionales de la santé puissent exercer un plus grand contrôle sur tout l'éventail des dépenses de santé dans leur région, y compris le coût des services médicaux.

Troisièmement, nous avons formulé une série de recommandations pour réformer les soins de santé primaires. Nous croyons qu'il faut créer des équipes de soins de santé primaires. Ces équipes devraient être pluridisciplinaires et offrir des soins 24 heures sur 24, 7 jours par semaine. De telles réformes des soins de santé primaires exigent d'adopter d'autres modes de rémunération que les honoraires à l'acte pour les médecins ou d'adopter une formule de rémunération mixte. La réforme des soins de santé primaires exige également de réexaminer les règles relatives au champ de pratique pour faire en sorte qu'on utilise pleinement les compétences des divers professionnels de la santé.

L'un des besoins les plus pressants dans le domaine de la santé porte sur les ressources humaines. Il y a une pénurie de professionnels de la santé dans tout le pays. Le comité sénatorial croit que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle plus important que ce qu'il a fait jusqu'à maintenant pour ce qui est de coordonner les efforts pour faire face aux pénuries de personnel de la santé. Cela devrait comprendre des investissements pour accroître les inscriptions dans les écoles de médecine et de sciences infirmières ainsi que les inscriptions dans d'autres professions médicales.

Il est intéressant de noter qu'il y a 10 ou 15 ans, quelqu'un a eu la brillante idée de contrôler les coûts de santé en contrôlant le nombre de médecins et d'infirmières. Si on ne pouvait voir un médecin ou une infirmière, on ne pourrait utiliser le système. Nous en sommes maintenant rendus là. Nous avons besoin de plus de médecins et d'infirmières.

Une recommandation importante pour améliorer la prestation des soins hospitaliers et médicaux porte sur la garantie de soins de santé. Je crois que c'est le talon d'Achille de notre rapport. Je vais faire en sorte que cette recommandation soit mise en oeuvre. Après tout, si nous ne pouvons garantir les soins de santé, nous n'avons vraiment rien accompli.

Je dois dire aux honorables sénateurs qu'il y a environ 15 ans, il y a eu une crise en Ontario pour ce qui est des soins cardiaques. La ministre de l'époque, Elinor Caplan, m'a demandé de présider un comité pour s'occuper de la question. J'ai recommandé une garantie de soins de santé pour les soins cardiaques en Ontario. Je dois dire que ce système, le Réseau de soins cardiaques de l'Ontario, fonctionne encore. Il marche très bien. Les gens sur la liste d'attente devraient être sur cette liste en fonction des critères établis par un processus d'examen par les pairs. Je crois que cette formule pourrait être appliquée dans l'ensemble du pays. Elle pourrait s'appliquer, en particulier, aux soins primaires.

Le comité du Sénat craint fort que, si on n'arrive pas à régler efficacement le problème d'accès à des soins rapides, on n'en vienne, par suite de décisions judiciaires, à la mise en place d'hôpitaux et de services médicaux privés. Il ne faut pas sous-estimer ce risque. Des juristes très sérieux disent maintenant qu'un système de santé à une vitesse peut être inconstitutionnel, si on n'y a pas accès.

Le comité a recommandé également que le régime d'assurance publique couvre les médicaments d'ordonnance extrêmement coûteux, les soins au foyer immédiatement après l'hospitalisation et le coût des soins palliatifs dispensés aux patients qui préfèrent passer les dernières semaines de leur vie chez eux.

La couverture des médicaments d'ordonnance extrêmement coûteux ferait en sorte qu'aucun Canadien ne soit obligé de payer de sa poche plus de 3 p. 100 du total du revenu familial pour des médicaments d'ordonnance. Il y a actuellement au Canada des endroits où les malades risquent la faillite et doivent utiliser toutes leurs ressources financières, y compris leurs économies en vue de leur retraite, avant d'obtenir de l'aide de l'État pour payer de tels médicaments. Ce n'est sûrement pas acceptable au Canada.

Le plan proposé par le comité complète au lieu de remplacer les actuels régimes d'assurance privés et publics, de façon à assurer une couverture uniforme dans tout le pays et à désigner les médicaments couverts par le programme. Il faudra établir une liste nationale des médicaments admissibles, bien sûr, pour que le régime soit fonctionnel.

Le programme de soins actifs à domicile recommandé par le comité sénatorial serait administré par les hôpitaux et couvrirait les coûts de la prestation de soins au foyer pendant un maximum de trois mois après la sortie de l'hôpital. Le programme de soins palliatifs au foyer mettrait ce type de soins à la disposition des Canadiens, chez eux. Nous avons également recommandé que le gouvernement fédéral examine la possibilité d'offrir des prestations d'assurance-emploi pendant six semaines aux Canadiens qui décident de quitter leur travail pour offrir des soins palliatifs à des êtres chers. Nous croyons que ce serait un atout extraordinaire.

Les recommandations du comité sénatorial sur l'infrastructure des soins de santé concernent la technologie des soins, les dossiers électroniques et un poste de commissaire national aux soins de santé. Le comité s'inquiète vivement, car de nombreuses technologies nouvelles sont trop peu disponibles au Canada, comparativement à d'autres pays de l'OCDE. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait octroyer des fonds à des centres universitaires consacrés aux sciences de la santé et à des hôpitaux communautaires dans le but exprès d'acheter et d'évaluer les nouvelles technologies en matière de soins de santé.

Le comité sénatorial a aussi conclu que les Canadiens et leur système de soins de santé financé publiquement bénéficieront grandement de la mise en place d'un système national de dossiers de santé électroniques. Par conséquent, nous recommandons que le gouvernement fédéral accorde du financement à Inforoute pour permettre à cette entreprise de créer, de concert avec les provinces et les territoires, un système national de dossiers de santé électroniques.

Le comité sénatorial propose aussi la création d'un poste de commissaire national aux soins de santé et, parallèlement à cela, la création d'un conseil national des soins de santé pour améliorer la gouvernance du système de soins de santé au Canada. C'est un sujet très intéressant, honorables sénateurs. Je me souviens que lorsque j'étais jeune, il y a un certain temps, à l'occasion d'une rencontre nationale, nous déplorions les problèmes du système en disant ceci: «Ce dont notre pays a besoin, c'est d'un directeur du service de santé publique qui peut présenter un rapport annuel sur l'état de santé des Canadiens et sur les lacunes ainsi que les forces et les faiblesses du système, et qui peut revenir l'année suivante et dire à la population ce que nous avons fait à cet égard.» Eh bien, cela n'a pas été accepté. Ce qui s'approche le plus de cela, à notre avis, c'est un poste de commissaire national aux soins de santé. Sincèrement, quand on pense au nombre de commissaires qui existent dans d'autres domaines, cette idée n'a rien de déraisonnable.

Son Honneur le Président: Je suis désolé de vous interrompre, sénateur Keon, mais il est maintenant 17 heures.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, que le Sénat s'ajourne maintenant à loisir en attendant l'arrivée de Son Excellence la Gouverneure générale?

Des voix: D'accord.

(Le débat est suspendu.)

(Le Sénat s'ajourne à loisir.)


(1720)

[Français]

SANCTION ROYALE

Son Excellence la Gouverneure générale du Canada arrive et prend place au Trône. La Chambre des communes, priée de se présenter, arrive avec son Président. Il plaît à Son Excellence la Gouverneure générale de donner la sanction royale aux projets de loi suivants:

Loi mettant en œuvre un accord, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et le Koweït, la Mongolie, les Émirats Arabes Unis, la Moldova, la Norvège, la Belgique et l'Italie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale et modifiant le texte édicté de trois traités fiscaux. (Projet de loi S-2, chapitre 24, 2002)

Loi concernant le contrôle de l'exportation, de l'importation et du transit au Canada des diamants bruts et établissant un processus de certification pour leur exportation en vue de l'exécution par le Canada de ses obligations découlant du Processus de Kimberley (Projet de loi C-14, chapitre 25, 2002)

Loi modifiant la Loi sur le droit d'auteur (Projet de loi C- 11, chapitre 26, 2002)

Loi visant à protéger la santé et la sécurité humaines et l'environnement en réglementant les produits utilisés pour la lutte antiparasitaire (Projet de loi C-8, chapitre 28, 2002)

Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada (Projet de loi C-5, chapitre 29, 2002)

L'honorable Peter Milliken, Président de la Chambre des communes, adresse la parole à Son Excellence la Gouverneure générale en ces termes:

Qu'il plaise à Votre Honneur.

La Chambre des communes du Canada a voté certains crédits requis pour permettre au gouvernement de pourvoir aux dépenses du service public.

Au nom de la Chambre des communes, je présente à Votre Excellence le projet de loi suivant:

Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2003 (Projet de loi C-21, chapitre 27, 2002)

À ce projet de loi, je prie humblement Votre Excellence de donner la sanction royale.

Il plaît à Son Excellence la Gouverneure générale de donner la sanction royale au projet de loi.

La Chambre des communes se retire.

Il plaît à Son Excellence la Gouverneure générale de se retirer.


(Le Sénat reprend sa séance.)

[Traduction]

LE PROTOCOLE DE KYOTO SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

ADOPTION DE LA MOTION DE RATIFICATION

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Banks,

Que le Sénat demande au gouvernement de ratifier le protocole de Kyoto sur les changements climatiques;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur Murray, c.p., que la motion soit amendée par l'ajout de ce qui suit avant le point placé après le mot «climatiques»:

«, mais seulement si, après que le Sénat aura recueilli les témoignages en Comité plénier de tous les représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui souhaitent témoigner, le Sénat détermine qu'il existe un accord substantiel entre le fédéral et les provinces au sujet d'un plan de mise en œuvre.»

La motion d'amendement, mise aux voix, est rejetée.

LES HONORABLES SÉNATEURSPOUR

Andreychuk LeBreton
Atkins Lynch-Staunton
Beaudoin Murray
Buchanan Rivest
Cochrane Roche
Comeau Rossiter
Di Nino St. Germain
Keon Stratton
Kinsella Tkachuk—18

LES HONORABLES SÉNATEURSCONTRE

Adams Jaffer
Bacon Joyal
Banks Kroft
Biron LaPierre
Callbeck Lapointe
Carstairs Léger
Christensen Losier-Cool
Cook Maheu
Corbin Milne
Cordy Morin
De Bané Pearson
Ferretti Barth Phalen
Finnerty Poulin
Fitzpatrick Poy
Fraser Robichaud
Furey Rompkey
Gauthier Setlakwe
Gill Sibbeston
Graham Smith
Hervieux-Payette Watt—41
Hubley

ABSTENTIONSLES HONORABLES SÉNATEURS

Cools Spivak—2

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, revenons maintenant à la motion principale.

(1740)

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, c'est un plaisir pour moi de participer au débat sur la motion proposant que le Sénat demande au gouvernement de ratifier le Protocole de Kyoto.

Il est malheureux que l'amendement du sénateur Lynch-Staunton n'ait pas été adopté. L'approbation de l'amendement aurait permis aux provinces et aux territoires de comparaître devant le Sénat, de présenter leur point de vue et leurs préoccupations et d'œuvrer en vue d'un consensus sur le plan de mise en œuvre. Il y aurait eu un effort visant une entente pratique avec les provinces avant la ratification, qui imposera au Canada de respecter des engagements auxquels nous pourrons ou ne pourrons pas nous conformer.

Dans le contexte des consultations avec les provinces, je note que, peu de temps avant les réunions de 1997 à Kyoto, le gouvernement du Canada avait organisé une réunion avec les gouvernements provinciaux, ce qui a permis d'en arriver à un point de vue commun sur la position à prendre. Toutefois, le gouvernement a décidé de jouer à défier les États-Unis au sujet de Kyoto en affirmant que quoi que les États-Unis puissent promettre, le Canada ferait mieux. Le résultat final, c'est que le Canada s'est fait prendre. Les États-Unis ont annoncé leur position et, bien sûr, le Canada a surenchéri. Maintenant, les États-Unis ont décidé de ne pas ratifier le Protocole de Kyoto.

Honorables sénateurs, il n'y a pas de doute que les Canadiens se soucient de l'environnement et souhaitent une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous voulons veiller à ce que notre environnement soit respecté et à ce que le développement soit favorisé.

Les objectifs sont tout à fait louables. Le Canada devrait travailler pour s'en rapprocher, mais n'oublions pas, tandis que nous progressons vers l'important objectif de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qu'il est important de travailler de concert avec nos homologues provinciaux et d'autres intervenants clés. Cela est évident depuis quelques semaines aussi bien dans le débat sur la motion à l'étude que dans l'amendement.

Il est également important, tandis que nous élaborons nos plans de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de savoir ce qu'il nous en coûtera ainsi que ce que les particuliers et les provinces devront faire pour atteindre cet objectif. Le sénateur Lynch- Staunton, le sénateur Beaudoin, le sénateur Murray et le sénateur Spivak ont tous mentionné l'absence d'accord de la part de la part des provinces sur la mise en œuvre du Protocole de Kyoto.

Le sénateur Lynch-Staunton a noté que la ratification du protocole sans l'accord des provinces lui rappelait le rapatriement unilatéral de la Constitution canadienne par l'ancien premier ministre Trudeau. Le sénateur a dit qu'à l'époque, un certain nombre de provinces avaient, chacune de son côté, intenté une action en justice auprès de leurs cours d'appel respectives. Par la suite, la Nouvelle-Écosse, la Colombie-Britannique, l'Île-du-Prince- Édouard, la Saskatchewan, l'Alberta et la Four Nations Confederacy Inc. se sont jointes au Manitoba, à Terre-Neuve et au Québec pour appuyer l'appel de ces dernières à la Cour suprême du Canada. Tous les intervenants soutenaient que le consentement des provinces était nécessaire.

Nous savons ce que la Cour suprême a décidé en la matière. Les juges ont déclaré qu'un accord majoritaire était nécessaire et que l'adoption de la résolution en l'absence d'un tel accord serait contraire aux conventions et serait donc jugée inconstitutionnelle.

Le sénateur Beaudoin a signalé avec beaucoup d'à propos que la ratification du Protocole de Kyoto sur le changement climatique ne réglerait rien. Il a dit que c'est la mise en œuvre qui entraînera des conséquences juridiques et que nous devons nous conformer à la répartition des pouvoirs prévus dans la Loi constitutionnelle de 1867. Par conséquent, le gouvernement fédéral et les assemblées législatives provinciales doivent légiférer dans leur champ de compétence pour mettre en œuvre le Protocole de Kyoto.

Nous ne savons pas comment le gouvernement mettra en œuvre le protocole en l'absence d'un consensus provincial. Nous savons, comme le sénateur Beaudoin l'a dit, que cette mise en œuvre touchera de nombreux champs de compétence provinciaux, y compris les ressources naturelles, l'environnement, les transports, les municipalités, le logement, l'agriculture, la gestion des terres, la formation de la main-d'œuvre et, plus généralement, le droit à la propriété et les droits civils.

Le sénateur Murray a rapporté une conversation qu'il a eue avec Elisabeth May, du Club Sierra, qui a dit que le gouvernement fédéral, agissant seul, peut atteindre les objectifs de Kyoto en usant des leviers fédéraux. Le sénateur Murray a ajouté:

Elle n'a pas convenu avec moi qu'il faudrait exercer le pouvoir relatif à la paix, l'ordre et le bon gouvernement ou appliquer une taxe sur les combustibles fossiles. Elle n'a pas reconnu qu'il faudrait se servir de la Loi sur la protection de l'environnement pour que le gouvernement fédéral puisse simplement déclarer une substance toxique et dicter ensuite aux provinces la ligne de conduite à suivre.

Le sénateur Eyton a également évoqué l'incertitude entourant la mise en œuvre de Kyoto. Il a noté qu'il y avait un grand malaise dans le monde des affaires à cause du manque de précision du gouvernement fédéral dans les déclarations faites et les mesures prises jusqu'ici.

Il a dit:

Il ne semble y avoir aucun engagement à suivre une ligne de conduite précise, à part les objectifs eux-mêmes, qui, pour l'essentiel, ont été négociés par d'autres, sans égard pour les besoins et les problèmes canadiens et, en particulier, sans égard pour l'immense territoire très faiblement peuplé que représente le Canada et pour les importantes quantités d'énergie propre exportées par le Canada aux États-Unis comme contribution à leur programme de réduction des émissions des gaz à effet de serre.

Le sénateur Eyton a ajouté:

Nous avons besoin d'un plan de mise en œuvre généralement acceptable pour les provinces et l'industrie, dans l'intérêt du bien-être politique et économique du Canada et des Canadiens.

Le sénateur Lynch-Staunton, le sénateur Kinsella et le sénateur Murray ont parlé avec éloquence de la manière dont les traités internationaux précédents avaient été traités avant leur ratification. Le sénateur Andreychuk a passé en revue les processus de mise en œuvre des traités d'autres pays.

Rappelons-nous l'accord sur les pluies acides, quand le premier ministre Mulroney avait pu dire au président des États-Unis que toutes les provinces et tous les territoires l'appuyaient.

Le sénateur Kinsella a parlé du processus qui a mené à la ratification de deux traités internationaux dans le domaine des droits de la personne, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec son protocole facultatif, et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Voici ce qu'il a dit:

Le premier ministre de l'époque, M. Pearson, a reconnu la nécessité de respecter les champs de compétence des provinces et a dit que le Canada ne pourrait tenir ses obligations qu'avec l'accord des provinces. Il s'est écoulé dix ans, au cours desquels ont eu lieu de nombreuses rencontres fédérales- provinciales de fonctionnaires et de ministres responsables des droits de la personne.

Honorables sénateurs, nous sommes tous conscients des progrès notables accomplis par le Canada dans le domaine de la justice sociale depuis la mise en oeuvre de ces traités internationaux dans toutes les administrations canadiennes. Nous savons tous la haute estime dans laquelle la communauté internationale tient le Canada pour ce qui concerne les droits de l'homme.

(1750)

Le sénateur Murray a signalé que, avant la ratification de l'Accord de libre-échange, il y avait eu 11 conférences des premiers ministres provinciaux. Il se souvenait que d'innombrables réunions avaient eu lieu entre les ministres provinciaux du Commerce et leur homologue fédéral, et qu'après chacune des séances de négociations avec les Américains, on avait organisé des conférences téléphoniques entre les fonctionnaires aux niveaux fédéral et provinciaux.

En fin de compte, le gouvernement s'est senti suffisamment sûr de lui pour ratifier cet accord. Les provinces, y compris celles qui s'opposaient au libre-échange, ont entrepris de mettre en place des programmes leur permettant de se conformer aux dispositions prévues dans l'Accord de libre-échange.

Dans ses observations, madame le sénateur Andreychuk a fait remarquer que le Canada n'avait pas fait grand-chose pour moderniser et démocratiser le système de mise en oeuvre des traités, alors que d'autres pays comme le Royaume-Uni et surtout l'Australie avaient procédé à une refonte complète du leur. L'Australie maintient dans sa structure constitutionnelle le droit exclusif de signer et de ratifier des traités. Les textes doivent cependant en être déposés au Parlement pendant au moins 15 jours avant que le gouvernement ne prenne des dispositions définitives, en les signant ou en les ratifiant. Cela permet au Parlement de se pencher sur les effets socio-économiques et culturels que le traité en cause est susceptible d'imposer au pays. L'Australie s'est également pourvue d'un comité permanent mixte parlementaire chargé d'étudier les traités, et d'un conseil chargé des traités. Ce dernier lui sert de mécanisme consultatif auprès des États sur des questions particulièrement délicates ou importantes du point de vue des ces États.

Voyons quelle est la différence à cet égard entre le Canada et l'Australie, honorables sénateurs. Aucune des deux Chambres du Parlement n'a entendu de témoins; aucune n'a reçu les représentants des gouvernements provinciaux pour entendre leurs préoccupations au sujet du Protocole de Kyoto.

Comme le sénateur Spivak l'a fait remarquer à juste titre, nous ne pouvons pas nous permettre de ne rien faire au sujet des émissions de gaz à effet de serre. Madame le sénateur déclarait:

De toute façon, si nous ne faisons rien, il est certain que les émissions de gaz à effet de serre doubleront. Nous ne pouvons pas arrêter ce phénomène, et c'est regrettable. Toutefois, si nous ne faisons rien, le niveau actuel des émissions de gaz à effet de serre finira par tripler, ce qui serait un véritable désastre.

Pour revenir aux objectifs du Protocole de Kyoto, les objectifs que le Canada s'est engagé à atteindre à Kyoto en décembre 1997, et qu'il a officiellement ratifié en mars 1998, quelles mesures ont été prises pour nous rapprocher de ces objectifs? C'est une bonne question. En quoi consistent exactement les mesures fiscales visant à encourager l'utilisation de technologies écologiques et de nouvelles sources d'énergie? Pourquoi les municipalités et les provinces débattent-elles encore de la question de l'affectation des fonds fédéraux aux transports publics? Pourquoi ne sait-on toujours pas qui obtiendra les crédits pour les puits agricoles, si nous ratifions le Protocole de Kyoto? Il y a toute une liste de questions qui demeurent sans réponse, mais auxquelles il faudra répondre avant la ratification.

Honorables sénateurs, nous devons réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les objectifs du Protocole de Kyoto sont valables. Toutefois, les méthodes utilisées par le gouvernement pour élaborer le plan de mise en oeuvre sont douteuses. Chaque province est déterminée à réduire les gaz à effet de serre, mais toutes remettent en question le soi-disant plan de mise en oeuvre du gouvernement fédéral. Elles veulent savoir qui en supportera les coûts.

Il est indispensable, pour notre environnement et notre avenir, d'aborder cette question de façon responsable et en tenant compte des besoins de nos partenaires provinciaux; cela suppose leur pleine participation. Nous devons faire notre travail, et nous devons bien le faire. Si nous voulons vraiment progresser dans la réalisation des objectifs du Protocole de Kyoto, nous devrons avoir un plan de mise en oeuvre fédéral-provincial qui nous permette d'atteindre les objectifs auxquels nous avons adhéré à Kyoto.

Nous avons vécu un moment historique lorsque le premier ministre a annoncé, à Johannesburg, qu'il demanderait au Parlement de se prononcer sur la ratification du Protocole de Kyoto. Comme le sénateur Lynch-Staunton le faisait remarquer, bien que la ratification des traités internationaux soit la responsabilité exclusive de l'exécutif au Canada, les supporters du Protocole de Kyoto ont trouvé très encourageant d'entendre que le Parlement canadien serait appelé à voter sur la ratification. Cela a été interprété à l'unanimité comme un engagement non équivoque à demander au Parlement d'avaliser la ratification avant la fin de 2002. On avait l'espoir qu'il y aurait un plan sérieux, que l'on rallierait les gouvernements provinciaux et que le Parlement aurait un document de fond à analyser et à débattre.

Malheureusement, il est devenu apparent que le vote au Sénat sera essentiellement dépourvu de signification. Il en sera ainsi à moins que, en notre qualité de porte-parole historique des provinces et des régions au Parlement, nous pressions le gouvernement d'accroître ses efforts en vue d'aboutir à une méthode authentique et fondée sur la collaboration qui permettra d'élaborer un plan de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto sur les changements climatiques.

Je vais lire la motion qui figure au Feuilleton. Elle est ainsi libellée:

Que le Sénat demande au gouvernement de ratifier le Protocole de Kyoto sur les changements climatiques.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je désire proposer un amendement. Je propose, appuyé par l'honorable sénateur Kinsella:

Que la motion soit modifiée par la suppression des mots «Que le Sénat demande» et l'ajout de ce qui suit avant le mot «au»:

«Attendu que la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto au Canada ne peut se réaliser pleinement sans la collaboration des provinces, des territoires et du gouvernement fédéral, le Sénat exhorte les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral à multiplier leurs efforts en vue d'obtenir cette collaboration; et le Sénat demande»

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, nous sommes ravis d'appuyer cet amendement. Il réclame le genre de bon gouvernement qui, à notre avis, existe déjà. Il y a eu collaboration, du moins de la part du gouvernement fédéral avec les provinces et les territoires. Nous voulons que les provinces et les territoires se joignent à nous afin d'établir le meilleur accord possible pour le Canada. C'est pourquoi nous sommes ravis d'appuyer l'«attendu» proposé.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

(La motion d'amendement est adoptée.)

Son Honneur le Président: La Chambre passe maintenant à la motion principale. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, tout le processus débute avec la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.

(1800)

Cette convention a établi l'objectif et le cadre devant nous permettre de mieux gérer notre environnement. Le Protocole de Kyoto est un protocole lié à cette convention. Il énonce la façon d'appliquer la convention. Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner lorsque j'ai pris la parole relativement à l'amendement du sénateur Lynch-Staunton, j'appuie la convention et aussi les principes qui sous-tendent le Protocole de Kyoto.

Toutefois, afin que l'on sache très clairement quelle est la position du Sénat du Canada, parce que nous avons eu un bon débat et qu'il pourrait y avoir d'autres ententes...

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je regrette de vous interrompre. Il est maintenant 18 heures. Les honorables sénateurs souhaitent-ils que je ne voie pas l'horloge?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, on s'entend pour dire qu'en ce qui concerne la convention, celle-ci devrait être appuyée par cette Chambre. J'aimerais que notre position soit tout à fait claire et je suis d'avis que la motion que nous adopterons devrait énoncer exactement le point de vue de cette Chambre.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Par conséquent, je propose, appuyé par l'honorable sénateur Stratton, que la motion modifiée soit modifiée de nouveau par l'ajout de ce qui suit avant les mots «Attendu que»

«Attendu que le Sénat appuie la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques signée par le gouvernement du premier ministre Brian Mulroney le 12 juin 1992 et ratifiée par le Canada le 4 décembre 1992; et».

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement du sénateur Kinsella?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je tiens à ce qu'il soit clair que nous n'approuvons pas cet amendement.

Son Honneur le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Madame le leader du gouvernement serait-elle d'accord avec la motion si les mots «Brian Mulroney» étaient enlevés?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je ne crois pas que cela ait quoi que ce soit à voir avec le débat en cours. Ce qui est pertinent toutefois, c'est que le protocole de Kyoto est indépendant et qu'il devrait le rester dans la résolution du Sénat.

Le sénateur Kinsella: J'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Le gouvernement appuie-t-il, oui ou non, la convention à laquelle le Protocole renvoie, la convention qui a été signée par le Canada en 1992 et ratifiée?

Le sénateur Carstairs: C'est tout à fait implicite. Cet amendement est inutile.

[Français]

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, il s'agit du deuxième amendement proposé en anglais seulement. Son Honneur pourrait-il nous lire le texte français de l'amendement?

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la version française de la motion ne correspond pas à la version anglaise.

Le sénateur Corbin: Honorables sénateurs, je croyais que les amendements devaient être présentés dans les deux langues officielles. Il semble y avoir une pratique établie qui n'est pas toujours respectée et je le soulève maintenant. Je ne veux pas être le «Scrooge de Noël», mais c'est une question de respect de nos langues officielles. Si un amendement est proposé dans une langue, la présidence le soumet à la Chambre dans l'autre langue, c'est une tradition.

Depuis quelque temps, tous les amendements sont présentés en anglais. Il me semble que ce n'est pas respecter l'esprit de la Loi sur les langues officielles telle qu'elle s'applique au Sénat. C'est tout ce que je veux dire. La Chambre peut maintenant faire ce qu'elle désire.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, j'ai déposé auprès du greffier une version anglaise et une version française de l'amendement, sauf que j'ai changé certains mots au préambule. Cependant, le texte de la motion est écrit en français et je pense que Son Honneur le Président peut être en mesure de le lire.

Son Honneur le Président: Voici, honorables sénateurs, la version française de la motion:

En amendement, l'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Stratton, que la motion modifiée, soit modifiée de nouveau par l'ajout de ce qui suit avant les mots «Attendu que»

«Attendu que le Sénat appuie la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques signée par le gouvernement du premier ministre Brian Mulroney le 12 juin 1992 et ratifiée par le Canada le 4 décembre 1992; et».

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

(La motion est rejetée.)

(1810)

[Traduction]

Son Honneur le Président: Le Sénat est-il prêt à se prononcer sur la résolution?

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, nous avons entendu les prévisions apocalyptiques des sénateurs d'en face et du ministre de l'Environnement qui équivalent aux paroles du prophète Zacharie consignées dans le chapitre 14 de l'Ancien Testament. Et voici la plaie dont Yahvé frappera tous les peuples qui auront combattu contre Jérusalem: leur chair se décomposera alors qu'ils se tiendront sur leurs pieds, leurs yeux pourriront dans leurs orbites.

Comprenez-vous l'idée?

Zacharie prédisait la fin des temps. Bon nombre de ceux qui ont parlé de plaies, de sécheresses et d'incendies mettent tous les désastres naturels qui se produisent depuis des millions d'années sur le compte du réchauffement de la planète, pas seulement sur le réchauffement normal, mais sur le réchauffement attribuable à l'homme.

Croire en l'apocalypse n'est pas un crime en soi. Toutefois, on ne peut se permettre d'affirmer publiquement que le Protocole de Kyoto empêchera que cela se produise. Une telle politique publique est aussi scandaleuse que le fait de présenter le registre des armes à feu comme un système de contrôle des armes et d'essayer de convaincre les Canadiens qu'ils seront plus en sécurité parce qu'un agriculteur de Spiritwood en Saskatchewan aura enregistré son arme.

La bureaucratie nécessaire pour suivre toutes les industries polluantes et les mécanismes de compte rendu qui seront imposés aux entreprises canadiennes feront paraître l'enregistrement des armes à feu comme un simple projet pilote en vue de la mise en oeuvre d'un plus grand projet: le Protocole de Kyoto.

Dans l'ouest du Canada, trois provinces sur quatre, y compris la Saskatchewan que je représente, croient que Kyoto n'a pas été bien négocié. Trois provinces de l'Ouest croient que le gouvernement fédéral n'a pas vraiment réfléchi aux conséquences de l'accord. Elles pensent que ses conséquences nuiront à l'économie canadienne et que l'accord aura d'horribles effets sur l'investissement et les emplois. Le premier ministre Klein compare Kyoto au Programme énergétique national.

Je voudrais lire quelques extraits du passé que les honorables sénateurs trouveront sûrement intéressants. En 1930, l'Amérique du Nord a été frappée d'une sécheresse qui a sévi pendant dix ans. Il a fallu affronter les sauterelles et une mauvaise herbe appelée «soude kali». Il y avait tant de sauterelles qu'elles bloquaient les radiateurs des voitures et rendaient les routes glissantes. Poulets et dindons se régalaient des insectes, mais leur chair et leurs oeufs prenaient alors un goût très désagréable. La soude kali s'amoncelait contre les clôtures et les étables, parfois jusqu'à vingt pieds de haut.

Un climatologue de Virginie a décrit ce qui s'était produit dans la vallée de Shenandoah, qu'il a qualifié de «spectacle d'horreur des années 30». Le phénomène atteignait son apogée entre le 19 juillet et le 10 août. Les maximums de température enregistrés à l'observatoire Leander McCormick de Charlottesville étaient les suivants: 103, 107, 106, 105, 97, 92, 102, 104 et 98 degrés Fahrenheit. La canicule s'est poursuivie jusqu'au 17 août. Voilà un vrai réchauffement de la planète! Dans le parc national de Shenandoah, 300 000 acres de forêts sont parties en fumée. Le nombre des incendies avait atteint dix fois la normale. La température montait à 110 degrés jour après jour. Cette méga- sécheresse a coûté un milliard de dollars à la Virginie. Une horde de serpents assoiffés s'est attaquée à un élevage de dindons. Ce n'est donc pas la première fois que nous avons des aberrations météorologiques.

La concentration de gaz carbonique dans l'atmosphère a augmenté au cours du dernier demi-siècle. Le gaz carbonique a donc servi de bouc émissaire, et on l'a accusé d'avoir causé le réchauffement de la planète. Il semble que le moteur du Protocole de Kyoto soit en partie le suivant: pourquoi ne pas dépenser quelques milliards de dollars pour le cas où les prophètes de malheur auraient raison et que le monde soit en train de devenir l'enfer sur terre, comme l'a suggéré Andrew Coyne? Quelques sénateurs ont eu recours au même argument.

Si Andrew Coyne avait appliqué la même logique en 1900, c'est lui qui aurait ramassé à la pelle le crottin de cheval et qui aurait peut- être préconisé que le gouvernement taxe les propriétaires de chevaux, et particulièrement ceux qui en possédaient quatre plutôt que deux. Est-ce que cela vous semble familier? C'est de la bouillie pour les chats. À l'époque, il y avait des prédictions savantes qui annonçaient une grande catastrophe aux États-Unis, une ombre brune, direz-vous, puisque les calendriers actuariels prouvaient qu'en projetant le taux de propriété de chevaux de 1900 jusqu'à 1930, on en arrivait à la conclusion que l'Amérique serait enterrée par le crottin de cheval. Je me demande si on avait envisagé de taxer les voitures à quatre chevaux pour forcer les consommateurs à se limiter à deux ou même à un seul cheval.

Qui aurait pu imaginer que, 100 ans plus tard, on parlerait encore d'émissions, mais d'un genre différent? Les deux sortes sont naturelles et respectueuses de l'environnement, sauf qu'en grandes quantités, elles sont mortelles.

Je voudrais demander aux honorables sénateurs de réfléchir à l'approche envisagée dans le protocole.

Si nous avons appris quelque chose pendant ce siècle, c'est que la planification centralisée est une chose à éviter à tout prix. L'accord de Kyoto est une tentative d'établir un accord mondial que la majorité des pays du monde soit évitent en refusant de signer, comme c'est le cas des États-Unis et de l'Australie, soit adoptent, se joignant au groupe des signataires, mais sans assumer d'obligations étant donné leur situation de pays sous-développés. Je parle de pays comme l'Inde et la Chine.

L'Inde et la Chine croient que le coût sera élevé. Nous ne le pensons pas. En fait, tous les autres pays qui n'ont pas signé pensent que le coût de l'accord retardera leur développement. Ils pensent qu'ils peuvent échapper à cet accord, et aussi à d'autres responsabilités environnementales parce que les pays occidentaux ont eu le luxe de pouvoir se développer au début du siècle quand les considérations environnementales n'étaient pas encore un enjeu important de la politique publique. Ils prétendent qu'ils devraient pouvoir profiter du même avantage économique, et polluer la terre.

Je suis désolé de devoir dire que nous, au Canada, nous nous sommes laissés leurrer par cette illusion économique. C'est la principale raison qui a poussé le président Bush à rejeter le Protocole de Kyoto. Cette approche du cousin pauvre permet aux pays émergents d'esquiver leur responsabilité.

Ils ont déjà un énorme avantage économique par rapport aux économies occidentales qui se sont développées plus tôt. Ils ont tous des clients très riches, les pays occidentaux, qui achètent les produits qu'ils ont à offrir. Ils ont accès à des réserves de capitaux produits par l'Occident ainsi qu'à de formidables connaissances technologiques et à des technologies qui les aident dans leur développement comme l'avion, le téléphone et l'ordinateur. Ils n'ont pas besoin de polluer.

Ce n'est pas notre faute si la majorité d'entre eux ont perdu un siècle en jouant avec le socialisme, la dictature, tant militaire que communiste, et d'autres formes de planification centralisée, ce qui leur a fait prendre un siècle de retard; certains entrent à peine dans le XXe siècle.

Nous les aidons en adoptant une planification centralisée et en réduisant les émissions de CO2, ce qui nous appauvrit; nous aurons donc moins d'argent pour les aider à parvenir au même niveau de compétence technologique qu'en Amérique du Nord. Notre économie est de loin la plus propre au monde. Les États-Unis produisent moins de CO2 par rapport à leur PIB que tout autre pays au monde. Ce sont aussi les plus gros producteurs de CO2 parce qu'ils produisent la majorité de la richesse du monde, et nous serions tous plus pauvre sans eux.

Pour réduire leurs émissions de CO2, les États-Unis ont adopté un programme axé sur les forces du marché et l'ont combiné avec des plans de réduction des émissions de ce gaz et d'autres gaz nocifs. Leur programme repose sur des incitatifs fiscaux et des subventions à la recherche.

Le président Clinton n'a pas joint le geste à la parole. Il savait que presque tous les représentants élus des deux partis dans les deux chambres étaient farouchement opposés à l'accord de Kyoto. C'est pour ça qu'il ne l'a jamais soumis à un vote.

Les prévisions économiques du Protocole de Kyoto ont également fait l'objet d'une planification centralisée. Je peux donc vous prédire leur échec. À mesure que les pays réduiront les émissions de CO2, le prix des combustibles fossiles diminuera. Nous en sommes tous conscients. Quand nous déciderons d'augmenter le prix au Canada et dans d'autres pays, nous utiliserons moins de combustibles fossiles, ce qui fera chuter le prix de ce produit dans les pays qui n'auront pas ratifié le protocole. Cela les incitera à utiliser plus de combustibles fossiles et annulera du coup tous les gains réalisés par les États signataires. Voilà ce qui se produira. Pendant que nous taxerons les combustibles fossiles, les VLT, les mini-fourgonnettes et les autres véhicules de loisir, l'Asie et l'Inde seront incitées à les utiliser davantage et elles s'en réjouiront sûrement. Pendant que nous ferons grimper artificiellement le prix des combustibles fossiles en les taxant, les États non signataires profiteront de meilleurs avantages économiques grâce au coût peu élevé de l'énergie dans leur pays.

(1820)

On se fait avoir et ce sont nos travailleurs qui seront le plus durement touchés par cet exercice catastrophique de planification centralisée. Les pays en développement jubilent sûrement, et j'en ferais autant à leur place. L'Union européenne a assorti son appui au Protocole de Kyoto d'une condition: ses pays membres doivent s'entendre sur qui fait quoi. Ils ne peuvent même pas s'entendre sur la taille des bananes exemptes de droit et ils sont tellement préoccupés par la consommation d'alcool des Irlandais que je ne vois pas comment leur participation à leur Parlement de Bruxelles, fondé sur la planification centralisée, pourra être positive.

Par hasard, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts étudie les effets du réchauffement de la planète. En fait, c'est le seul comité du Parlement qui étudie la question. Nous avons tenu de nombreuses séances sous la direction éclairée du sénateur Donald Oliver, qui a succédé, à titre de président, au très compétent sénateur Leonard Gustafson. Le 21 novembre 2002, Henry Hengeveld, conseiller scientifique principal du Service météorologique du Canada d'Environnement Canada, a témoigné devant notre comité. Je lui ai posé la question suivante:

Si l'accord de Kyoto est ratifié et que le monde atteint ses objectifs, quels seront les effets sur le changement climatique?

M. Hengeveld a répondu comme suit à ma question:

Cela retarderait d'environ dix ans l'atteinte des seuils critiques. Par conséquent, le Protocole de Kyoto seul ne résoudra pas le problème. Il ne fera que retarder un peu l'échéance.

Or, dans ma langue de la Saskatchewan, au lieu de frire en 2100, nous allons frire en 2110.

Le sénateur Day a posé une question intéressante à M. Pearson de l'Université Laurentienne. Il lui a demandé:

Y a-t-il un modèle qui prédit une nouvelle ère glaciaire?

La discussion portait sur les modèles susceptibles d'entraîner un réchauffement de la planète. M. Pearson a répondu comme suit:

Si on examine les températures enregistrées dans l'hémisphère nord environ jusqu'aux années 60 — je parle bien de l'hémisphère nord, non de la planète en entier et pas uniquement du Canada, mais bien de l'hémisphère nord — on constate une tendance vers un refroidissement, soit une tendance à la baisse des températures moyennes annuelles de l'air. C'est cette même tendance qui est présentement à la hausse.

Par conséquent, les températures montent et descendent.

Lors d'une réunion de l'American Geophysical Union à San Francisco, le 11 décembre 2001, les scientifiques ont présenté des simulations informatisées indiquant que la hausse des niveaux de dioxyde de carbone prolongerait les systèmes dépressionnaires au- dessus du pôle Nord et les systèmes de haute pression au-dessus de l'Atlantique. Ces conditions tendent à capter de l'air chaud de l'Atlantique pour le diriger vers l'Europe, et risquent d'entraîner, au cours des prochaines décennies, des hivers plus pluvieux et plus doux. Toutefois, le passage graduel à des hivers plus doux et pluvieux risque aussi de provoquer un changement abrupt. Certains modèles climatiques prédisent que l'augmentation des précipitations risque d'affaiblir, voire de stopper les courants chauds de l'Atlantique qui se dirigent vers les tropiques, et de plonger l'Europe dans une ère glaciaire. D'autres modèles prédisent des effets nuls.

Samedi dernier, un article du Globe and Mail nous apprenait que la communauté scientifique était moins unanime qu'on pourrait le croire au sujet du réchauffement planétaire et que les données scientifiques s'appuyaient souvent sur des hypothèses. Ce n'est pas tant qu'on ait prouvé que le dioxyde de carbone causait le réchauffement planétaire, et je crois que la plupart des gens sont d'accord là-dessus, que le fait que personne n'ait prouvé le contraire. Coupable jusqu'à preuve du contraire. Honorables sénateurs, ce n'est pas de la science, c'est de l'idéologie. Dans nombre de cas, les scientifiques bénéficient de subventions à la recherche, selon le météorologiste qui est l'auteur de l'article du Globe and Mail. Naturellement, plusieurs sénateurs croient que les subventions que des entreprises accordent à des universités orientent la recherche. Or, nous n'avons pas encore vu les sommes faramineuses qui orienteront l'industrie du réchauffement planétaire.

Parallèlement à cela, il y une foule de théories concertées: les multinationales, les amis de George Bush dans l'industrie pétrolière qui veulent continuer d'exploiter tranquillement les ressources fossiles et empêcher l'apparition de technologies susceptibles de nous détourner de ces ressources.

Je crois que des milliers d'Américains, de Canadiens et d'autres gens sur la planète examinent les énergies de rechange. Je crois que les économies occidentales font et continueront de faire des recherches à cet égard. L'énergie représente des sommes d'argent faramineuses. En fait, cela est tellement vrai que le Québec, parmi toutes les autres provinces qui sont prêtes à défendre leurs droits jusqu'au bout, peut difficilement attendre les nouvelles taxes sur les combustibles au carbone qui susciteront une demande accrue d'énergie hydroélectrique. Nous avons appris une chose dans l'Ouest canadien — on peut acheter les centrales hydroélectriques.

Le gouvernement fédéral estime que la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto coûtera aux Canadiens 16,5 milliards de dollars chaque année. Ces estimations proviennent d'un document du gouvernement fédéral.

Son Honneur le Président: Je suis désolé de vous interrompre, sénateur Tkachuk, mais les 15 minutes qui vous étaient allouées sont écoulées.

Le sénateur Tkachuk: Il me reste une demi-page.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Une voix: Une minute.

Le sénateur Tkachuk: Selon les estimations du gouvernement fédéral, le Protocole de Kyoto coûtera 16,5 millions de dollars. Le gouvernement albertain estime qu'il coûtera 33 millions de dollars. Il coûtera — selon les estimations du gouvernement fédéral — entre 2 124 $ et 4 248 $ par famille et l'Association des manufacturiers canadiens perdra 200 000 $. Le gouvernement fédéral n'est pas dans une position lui permettant d'engager notre pays dans un accord aussi sérieux. On nous demande, au Sénat, de participer à cette comédie politique et, pour ma part, je n'y participerai pas. Je voterai contre la résolution, mais j'ai un amendement à présenter.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, je propose:

Que la motion modifiée soit modifiée de nouveau par l'ajout de ce qui suit avant les mots «Attendu que»:

«Attendu que le Sénat du Canada appuie les principes énoncés dans le protocole de Kyoto à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques; et».

[Français]

Son Honneur le Président: La motion en anglais diffère de la version française. Il faut s'assurer que les versions soient identiques dans les deux langues officielles.

En amendement, l'honorable sénateur Tkachuk propose, appuyé par l'honorable sénateur Stratton, que la motion modifiée soit modifiée de nouveau par l'ajout de ce qui suit avant les mots «Attendu que»:

«Attendu que le Sénat du Canada appuie les principes énoncés dans le protocole de Kyoto à la Convention- cadre des Nations Unies sur les changements climatiques; et»

[Traduction]

L'honorable sénateur Tkachuk propose, appuyé par l'honorable sénateur Stratton, que la motion modifiée soit modifiée de nouveau par l'ajout de ce qui suit avant les mots «Attendu que»:

«Attendu que le Sénat du Canada appuie les principes énoncés dans le protocole de Kyoto à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques; et»

(1830)

Plaît-il aux honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il est intéressant de constater qu'il s'agit là du dernier amendement de l'opposition, je l'espère, ou du moins c'est ce qu'on nous a donné à croire. Il a été présenté au moyen d'une intervention, chose que je rejette totalement, et avec des idées que j'estime complètement fausses. Par conséquent, il m'est impossible d'appuyer l'amendement.

Son Honneur le Président: Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix: Le vote!

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

[Français]

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion d'amendement veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

(La motion est rejetée.)

[Traduction]

Son Honneur le Président: Nous en sommes maintenant revenus à la motion principale, modifiée. Les honorables sénateurs désirent-ils que je lise la question?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion, modifiée, veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre la motion modifiée veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

L'honorable Norman K. Atkins: Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence.)

L'ÉTUDE DE L'ÉTAT DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ

LE RAPPORT FINAL DU COMITÉ DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kirby, appuyée par l'honorable sénateur Cook, tendant à l'adoption du troisième rapport (final) du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie intitulé «La santé des Canadiens — Le rôle du gouvernement fédéral, Volume six: Recommandations en vue d'une réforme», déposé au Sénat le 25 octobre 2002.—(L'honorable sénateur Keon).

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je voudrais proposer l'ajournement du débat dans lequel le sénateur Keon s'était engagé. Je demande que l'ajournement soit inscrit à son nom et qu'il soit autorisé à utiliser le reste du temps qui lui était alloué.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

ADOPTION DU SEPTÈME RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat à passe l'étude du septème rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budget du comité) présenté au Sénat plus tôt aujourd'hui—(L'honorable sénateur LaPierre).

L'honorable Lise Bacon propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

DROITS DE LA PERSONNE

BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (budget—étude sur l'adhérence possible du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l'homme), présenté au Sénat le 12 décembre 2002.

L'honorable Shirley Maheu propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du premier rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles (budget—étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles), présenté au Sénat le 12 décembre 2002.—(L'honorable sénateur Losier-Cool).

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Traduction]

LE SÉNAT

LE TEMPS ALLOUÉ AUX HOMMAGES—MOTION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Lapointe, appuyée par l'honorable sénateur Gill,

Que l'article 22 du Règlement du Sénat soit modifié par adjonction, après le paragraphe 9, de ce qui suit:

«Hommages

(10) À la demande du leader du gouvernement au Sénat ou du leader de l'opposition, la période des «déclarations de sénateurs» est prolongée d'au plus quinze minutes lors d'un jour donné afin de rendre hommage à un sénateur ou un ancien sénateur, ainsi que du temps supplémentaire que peut prendre la réponse visée au paragraphe (13).

Temps de parole

(11) Le Président informe le Sénat du temps accordé à chaque intervention d'un sénateur qui rend un hommage, laquelle ne peut dépasser trois minutes. Aucun sénateur ne peut parler plus d'une fois.

Aucune permission

(12) Si un sénateur demande la permission de prendre la parole après la période de quinze minutes réservée aux hommages, le Président ne peut mettre la question aux voix.

Réponse

(13) Lorsque tous les hommages ont été rendus, le sénateur qui est honoré peut y répondre.

Publications du Sénat

(14) Les hommages et la réponse visés aux paragraphes (10) à (13) apparaissent sous une rubrique distincte intitulée «Hommages» dans les Journaux du Sénat et les Débats du Sénat.

Précision

(15) Le présent article n'empêche pas un sénateur de rendre hommage à un autre sénateur ou un ancien sénateur à tout autre moment où le permet le présent règlement.

Autres hommages

(16) Le présent article n'empêche pas l'attribution de temps pour rendre hommage à des personnes autres que des sénateurs ou des anciens sénateurs.»—(L'honorable sénateur Sparrow).

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, cette motion en est à sa quinzième journée de débat. Je ne voudrais pas la voir disparaître du Feuilleton, car j'estime qu'elle traite d'un sujet auquel un certain nombre de sénateurs s'intéressent de près. Je sais qu'il y a des sénateurs qui s'y objectent. Je profite de l'occasion pour répéter ce que j'ai dit pendant la dernière session, à savoir que je suis en faveur de ce genre de rajustement apporté à notre Règlement, et cela pour toutes sortes de raisons. Je ne vais pas les énumérer toutes, afin de ne pas abuser de la patience des honorables sénateurs ce soir. J'espère cependant qu'à notre retour, nous pourrons poursuivre le débat sur cette motion qui est à la fois importante et pertinente.

(Sur la motion du sénateur Hubley, le débat est ajourné.)

LES TRANSPORTS

LA SITUATION DU TRANSPORT AÉRIEN AU CANADA—INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Ethel Cochrane, ayant donné avis le 3 décembre 2002:

Qu'elle attirerait l'attention du Sénat sur la situation du transport aérien au Canada.

— Honorables sénateurs, j'interviens pour parler d'un sujet qui importe énormément aux yeux des gens de tous les coins du pays et de toutes les régions que nous représentons, à savoir, la situation du transport aérien au Canada.

Je sais que je dispose de 15 minutes seulement alors qu'il y aurait beaucoup à dire. J'avoue humblement aux honorables sénateurs que je ne ferai qu'effleurer le sujet.

On a observé de nombreux problèmes dans le domaine de l'aviation au cours des derniers mois et même des dernières années. En fait, en cette Chambre, il y a à peine une ou deux semaines, des sénateurs ont exprimé des inquiétudes similaires relativement à l'industrie du transport aérien, aux aéroports, aux avions, à l'hygiène et à la santé publique.

Je voudrais attirer l'attention des honorables sénateurs sur ce qui me semble être un des principaux points de préoccupation, et je dois ajouter que les préoccupations en cause sont largement partagées. Aujourd'hui même, le Comité des transports de l'autre endroit a déposé un rapport sur son étude des droits de sécurité en aviation.

La question surgit à point nommé. J'espère sincèrement que d'autres sénateurs reprendront le flambeau et participeront à un dialogue fructueux sur cette question importante.

Honorables sénateurs, les journalistes n'ont pas tardé à nous rappeler que les transports aériens au Canada sont mauvais, très mauvais, et ne font qu'empirer. Je me rappelle avoir lu un article dans le Calgary Herald, l'hiver dernier, dans lequel un commentateur du monde des affaires déplorait les difficultés financières et opérationnelles constantes d'Air Canada. Ces difficultés, selon lui, mettent en évidence l'état déplorable d'une de nos industries essentielles, tant pour l'économie que pour les services, une industrie maintenant digne du tiers monde.

Comme les journalistes l'ont dit pendant toute l'année dernière, les preuves de la hausse vertigineuse des tarifs dépassent le niveau anecdotique. L'année dernière, en l'absence de concurrents comme Roots Air, Canada 3000 et Royal Aviation, les tarifs pour touristes ont bondi de 20 p. 100 et les tarifs affaires d'Air Canada pour les déplacements intérieurs ont subi une hausse de près de 13 p. 100. Ces augmentations sont appréciables, d'autant plus que l'achalandage a diminué après les attentats du 11 septembre.

Si on les compare à leurs voisins du Sud, les Canadiens paient beaucoup plus cher les services de transport intérieur. Aux États- Unis, ces tarifs moins élevés ont incité les Américains à emprunter les transports aériens souvent, à tout le moins plus souvent que les Canadiens. Les données révèlent que, ces dernières années, les Américains ont pris, en moyenne, deux fois plus de vols par habitant que les Canadiens. Cela s'est traduit par un soutien accru des passagers du réseau de transporteurs internationaux, régionaux et locaux bien établis dans ce pays.

(1840)

Actuellement, les Canadiens qui achètent un billet pour voyager dans notre pays paient un nombre incroyable de droits. Selon les données de l'Association du transport aérien du Canada, l'ATAC, les différents droits que les Canadiens paient sur leurs billets pour des vols intérieurs peuvent totaliser plus de 40 p. 100 du prix de base du billet.

Cela semble incroyable, n'est-ce pas? Je sais que c'est difficile à croire. Par conséquent, je voudrais donner aux honorables sénateurs un exemple type. Mon exemple concerne le prix annoncé par un de nos transporteurs à rabais. Les honorables sénateurs ont vu ce genre d'annonce, j'en suis certaine. Pour un aller simple de Halifax à Ottawa qui coûte 89 $, un passager ordinaire paierait 28 $ de droits à NAV CANADA, 10 $ de frais d'améliorations aéroportuaires, 11,22 $ de droits pour la sécurité des passagers du transport aérien et près de 21 $ en taxe de vente harmonisée. Au bout du compte, l'aller simple à 89 $ coûterait au voyageur ordinaire 158,95 $.

Dans cet exemple, les taxes et droits représentent environ 43 p. 100 du coût total du billet pour un aller simple. Un billet annoncé à seulement 89 $ pour un aller simple coûte près de 160 $ en réalité. Les nombreux droits et taxes imposés par le gouvernement ont haussé le prix du billet de près de 70 $.

Si un voyageur ordinaire voulait acheter un billet aller-retour, l'aller simple coûtant 89 $, voici à quoi ressemblerait la note totale: 56 $ en droits payés à NAV CANADA, 20 $ de frais d'améliorations aéroportuaires, 22,43 $ de supplément pour la sécurité et plus de 40 $ en taxe de vente harmonisée. Cela porterait le total du billet aller- retour à un peu moins de 320 $. Le prix de base du billet aller-retour serait de 178 $, mais notre voyageur devrait payer plus de 140 $ en frais additionnels.

Honorables sénateurs, c'est affreux. Parmi ces droits, il y a évidemment des droits importants et relativement nouveaux qui sont imposés aux voyageurs, dans certains cas en réponse aux attentats terroristes perpétrés contre les États-Unis.

Les transporteurs aériens ont été les premiers à agir. Ils ont introduit une nouvelle surtaxe pour couvrir les coûts croissants de l'assurance. Actuellement, cette surtaxe est de 3 $ pour un aller simple, et elle est ajoutée automatiquement au prix de tous les billets.

Dans le dernier budget, le gouvernement a agi en promettant de dépenser 2,2 milliards de dollars sur cinq ans pour rendre le transport aérien plus sécuritaire. Les nouvelles mesures de sécurité proposées comprenaient du personnel mieux formé pour contrôler les passagers et les bagages à main, de nouveaux systèmes de détection des explosifs, des agents armés à bord des avions canadiens et des modifications aux portes des postes de pilotage.

Pour financer ces mesures, le gouvernement a introduit une nouvelle taxe sur la sécurité aérienne le 1er avril de cette année, taxe qui est maintenant bien connue. Contrairement à la croyance populaire, la taxe n'est pas exactement de 12 $ pour l'aller et de 12 $ pour le retour, mais bien de 11,22 $ pour chaque embarquement assujetti. Selon la définition officielle, embarquement assujetti s'entend de l'embarquement d'un particulier, dans un aéroport désigné, à bord d'un aéronef exploité par un transporteur donné. En termes clairs, cela inclut les changements d'avion.

Honorables sénateurs, comme nous le savons, il n'est pas inhabituel pour un passager de faire plus d'un embarquement lors d'un aller simple. Selon les renseignements que j'ai reçus lorsque j'ai communiqué avec l'Agence des douanes et du revenu du Canada, si je faisais un aller simple mais que j'avais à faire une escale de plus de quatre heures ou si on m'avait vendu des billets distincts pour les différents vols composant mon aller simple, je devrais payer $24.

Certes, il se peut que des voyageurs faisant un aller simple doivent s'embarquer à plus d'une reprise et payer des frais à chaque fois. Il est aussi possible qu'ils doivent payer les frais de sécurité maximums, soit 24 $, pour un aller simple.

Même si les frais pour un aller simple devraient s'établir à 12 $, ce n'est pas la cas partout. Je pense ici au provinces de l'Atlantique, plus particulièrement à Terre-Neuve-et-Labrador, au Nouveau- Brunswick et à la Nouvelle-Écosse. Dans ces provinces, on impose une taxe de vente harmonisée de 15 p. 100, qui, une fois appliquée aux nouveaux frais de sécurité de 11,22 $, porte ceux-ci à 12,90 $. Comme l'a fait remarquer dernièrement l'Alliance of Canadian Travel Agents, les voyageurs aériens des provinces atlantiques payent des frais de sécurité supplémentaires de près de 13 $ pour un aller simple.

À 24 $ pour un aller-retour, la nouvelle taxe canadienne sur la sécurité est la plus élevée au monde. Elle est en moyenne 300 plus élevée que la taxe sur la sécurité payée par nos voisins du sud. En effet, les Américains payent en moyenne environ 7,65 $ CAN. En Australie, cette taxe dépasse à peine 8 $ CAN. Il est intéressant de noter qu'en Israël, l'une des zones les plus dangereuses au monde, les frais de sécurité ne sont que de 12,42 $. C'est pratiquement la moitié de ce que doivent débourser les Canadiens pour la nouvelle taxe sur la sécurité, honorables sénateurs.

Au mois de septembre, les voyageurs aériens avaient déjà payé plus de 160 millions de dollars en frais de sécurité seulement. Des prévisions antérieures rapportées dans les médias, tels que le Calgary Herald, faisaient état de revenus découlant de cette taxe pouvant atteindre entre 2,2 et 3 milliards de dollars par année.

Avant que ces frais supplémentaires ne soient imposés, les calculs faits par le ministère des Finances ont été cités dans les médias. On y disait que la nouvelle taxe soutirerait aux voyageurs canadiens jusqu'à un milliard de dollars de plus que le coût de toutes les mesures de sécurité prévues mises ensemble. Honorables sénateurs, selon un article paru dans le Toronto Sun du 8 mars 2002, la taxe, à la lumière des chiffres du ministère, serait plus élevée d'au moins 30 p. 100 que nécessaire.

Un article publié dans le London Free Press nous permet de mieux comprendre tous ces chiffres et d'avoir une bonne idée de la valeur des mesures proposées au plan de la sécurité. Pour ce qui a trait à la somme de 1 milliard de dollars consacrée à l'achat de détecteurs de bombes pour passer au peigne fin les bagages des passagers dans les aéroports canadiens, l'article explique que l'on pourrait acheter avec une telle somme 600 détecteurs de bombe haut de gamme, ce qui correspond à environ 10 fois le nombre de ces appareils actuellement en usage dans le monde entier.

Or, il semble que le Canada prévoyait acheter environ cinq appareils seulement. Les détecteurs coûtent autour de 1,6 million de dollars l'unité. Compte tenu du montant de départ de 1 milliard de dollars, il resterait donc, honorables sénateurs, plus de 992 500 000 $ dans le budget des achats.

J'espère que le gouvernement gardera cet excédent en lieu sûr. Après tout, les experts en sécurité nous préviennent que les nouvelles technologies risquent de rendre rapidement désuets les dispositifs actuels de détection de bombes.

Cependant, la détection de bombes n'est qu'un aspect des nouveaux dispositifs de sécurité.

L'autre dispositif de sécurité important et frappant est l'inspection des passagers. Nous sommes tous bien au courant de cette mesure. Nous sommes maintenant habitués à arriver tôt dans les aéroports, pour que nous puissions passer aux contrôles et être autorisés à prendre notre avion à temps. Ce que je trouve particulièrement intéressant à cet égard, cependant, c'est que l'inspection des passagers et de leurs bagages à main relevait autrefois exclusivement des compagnies aériennes. C'est seulement en raison du nouveau régime de sécurité que le gouvernement doit désormais débourser près de 130 millions de dollars pour se charger de l'inspection des passagers à la place des compagnies aériennes. On a signalé que le transfert de cette responsabilité permettra à Air Canada d'économiser 70 millions de dollars par année.

En ce qui a trait au contrôle des passagers, je signale que la semaine dernière les journaux mentionnaient que les préposés à la vérification des passagers dans les aéroports gagnent toujours aussi peu que 6,95 $ de l'heure. Cette nouvelle découlait de la rencontre qu'avait eu le Comité des transports de la Chambre des communes avec l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. L'ACSTA est l'organisme qui a été créé pour, entre autres tâches, assumer la responsabilité du contrat des préposés, responsabilité qui incombait auparavant aux compagnies aériennes. Ce transfert de responsabilité s'est effectué le 1er avril 2002, date à laquelle l'ACSTA a commencé à percevoir la taxe sur la sécurité aérienne. On se souviendra que, lorsque cette taxe avait fait l'objet d'un débat, l'un des principaux arguments invoqués en sa faveur était que les sommes perçues serviraient à mieux payer les préposés au contrôle des passagers.

Son Honneur le Président: Sénateur Cochrane, je regrette de vous informer que vos 15 minutes sont écoulées.

Le sénateur Cochrane: Honorables sénateurs, pourrais-je obtenir la permission de terminer mes observations?

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Cochrane: À cet égard, on nous avait dit qu'il était nécessaire de mieux rémunérer les préposés puisque cela permettrait de garder les employés les plus compétents. On nous avait dit qu'il existait un fort roulement de personnel chez les préposés, ce qui n'est pas surprenant, compte tenu que la rémunération annuelle de base de ces employés est de 14 400 $ par année.

Honorables sénateurs, je crains que ce dont je vous ai fait part aujourd'hui ne fait qu'effleurer les problèmes qui assaillent les transports aériens au Canada. Je n'ai fait qu'aborder la question, mais j'estime avoir exprimé certaines des préoccupations les plus pressantes. La question est maintenant entre nos mains. Nous devons travailler à l'amélioration de la situation dans toutes les régions du pays. Tel est notre mandat, honorables sénateurs. Nous devons agir rapidement.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): J'espère que d'ici notre retour, au mois de février, le gouvernement aura aboli la taxe sur la sécurité aérienne.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE AU PROCHE-ORIENT

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Marcel Prud'homme, ayant donné avis le 10 décembre 2002:

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur la politique étrangère du Canada concernant le Proche-Orient.

— Honorables sénateurs, permettez-moi de vous dire que le Sénat était bien représenté aux funérailles du sénateur Molson. Nous revenons tout juste du service funèbre.

Je regrette, mais je n'étais pas présent aujourd'hui pour poser une question complémentaire à la question sur le Hezbollah, parce que je suis convaincu que le gouvernement a fait une erreur.

Nous pouvons toujours dire «Noël», même si au Québec il est maintenant interdit de chanter Adeste Fideles, ainsi que d'autres chants sacrés et chants de Noël. Je m'oppose vivement à cela. C'est un crime contre la tradition et contre ce en quoi je crois.

Sauf le respect que je dois à la présidence et à tous les sénateurs, permettez-moi de dire quelque chose qui me tient à coeur — Joyeux Noël —, un voeu que nous souhaitons aux membres de toutes les nationalités et de toutes les religions de notre grand pays.

Je demande que cette motion reste inscrite en mon nom. Je vous remercie Son Honneur de sa grande patience. Je ne veux certainement pas prononcer mon discours aujourd'hui. Je le ferai en temps et lieu.

(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

[Français]

L'AJOURNEMENT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que lorsque le Sénat ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 4 février 2003, à 14 heures.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, avant que le Sénat ne s'ajourne ce soir, je tiens à souhaiter à chacun d'entre vous un merveilleux temps des Fêtes. Aux sénateurs de foi chrétienne, je souhaite un très Joyeux Noël et aux autres, je souhaite un bon congé.

Ces voeux s'adressent à toute la famille sénatoriale, c'est-à-dire à tous ceux qui travaillent avec nous, dont certains célèbrent déjà à l'extérieur et à qui nous nous joindrons dans un moment. Les sentiments qui devraient régner en cette saison sont la paix, l'amour et la joie.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, comme le dirait un juge de la Cour suprême enclin à la paresse et reconnu pour sa réticence à rédiger des opinions: «J'appuie la motion.»

(Le Sénat s'ajourne au mardi 4 février 2003, à 14 heures.)


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