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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 37e Législature,
Volume 141, Numéro 5

Le jeudi 5 février 2004
L'honorable Dan Hays, Président



LE SÉNAT

Le jeudi 5 février 2004

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

HOMMAGES

L'HONORABLE THELMA J. CHALIFOUX

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat m'a fait parvenir une lettre dans laquelle il demande, conformément au paragraphe 22(10) du Règlement, que la période réservée aux déclarations de sénateurs soit aujourd'hui prolongée afin de rendre hommage à l'honorable sénateur Chalifoux.

[Français]

Hommages à l'honorable sénateur Chalifoux, qui prendra sa retraite le 8 février 2004.

[Traduction]

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, c'est avec des sentiments partagés et même avec une émotion considérable que j'interviens pour dire au revoir à notre appréciée collègue le sénateur Thelma Chalifoux. Je me réjouis de savoir qu'elle aura plus de temps à consacrer à sa famille en Alberta, mais je dois néanmoins dire que le Sénat perd un élément unique qui sera difficile à remplacer.

Première Métisse et première femme autochtone à avoir été nommée au Sénat, madame le sénateur Chalifoux a fait une contribution considérable, à l'échelon fédéral, à l'égard des questions concernant les Premières nations. Sous sa présidence, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a publié un rapport fondamental sur les jeunes autochtones vivant en milieu urbain. Les auteurs de ce rapport ont fait oeuvre de pionnier en se penchant sur les problèmes que vivent les jeunes autochtones qui quittent leur réserve de plus en plus jeunes.

Madame le sénateur Chalifoux s'est montrée exemplaire dans sa défense du Sénat qu'elle considère comme une tribune où les voix régionales peuvent s'exprimer en matière de politique publique. Elle considère le Sénat comme le secret le mieux gardé au pays.

Qui plus est, le sénateur Chalifoux offre un argument de taille du Sénat. Elle illustre le fait qu'une personne qui a vraiment très peu de possibilités d'être élue dans sa province d'origine, peut néanmoins siéger dans cette enceinte, après y avoir été nommée, et représenter un élément très substantiel de la société canadienne.

[Français]

Peu après sa nomination au Sénat, elle a créé le bal annuel des sénateurs pour faire connaître le travail accompli au Sénat par ses collègues.

[Traduction]

Elle témoigne très bien elle-même de l'importance du Sénat pour la défense des intérêts des Canadiens qui ont de tout temps été sous-représentés au sein de notre gouvernement fédéral.

Madame le sénateur Chalifoux est un modèle pour plus de 50 enfants de trois générations dans sa famille et elle est aussi un modèle pour d'innombrables femmes métisses et autochtones. Sa vie de famille illustre clairement l'importance qu'elle accorde a la communauté, ce qui a guidé sa vie professionnelle.

Madame le sénateur Chalifoux est très connue en Alberta, mais surtout à Morinville où elle s'est toujours intéressée de près et personnellement aux membres de sa collectivité. Bien avant qu'elle soit nommée ici, elle encourageait et célébrait leurs réussites et elle a continué à travailler sans relâche en leur nom pour redresser les injustices.

Madame le sénateur Chalifoux est un membre très actif de la nation métisse de l'Alberta depuis plus de quatre décennies et elle a poursuivi ses efforts ici, à Ottawa, pour améliorer la vie des Métis, des jeunes autochtones et des mères célibataires. Elle est à la fois logique et sensible et le respect qu'elle porte à ses concitoyens se manifeste indubitablement dans ses actions et ses paroles.

Ses collègues disent de madame le sénateur Chalifoux qu'elle est sincère et amicale; ces qualités font qu'elle est facile d'accès non seulement pour ceux qu'elle représente, mais pour tous ceux qui ont le plaisir de la connaître.

Un des premiers discours du sénateur Chalifoux portait sur la modification de la Loi canadienne sur les droits de la personne visant à ajouter la condition sociale aux autres motifs de distinction illicite. Ses mots avaient résonné en cette enceinte car ils venaient du fond du coeur et découlaient de ses expériences personnelles en matière de discrimination. Elle a terminé ce discours en disant que la pauvreté subsisterait certainement pendant encore longtemps, mais qu'on pouvait faire de notre mieux pour veiller à ce que les pauvres de notre pays soient protégés. Voilà le mandat qu'elle s'est donné lors de sa nomination au Sénat et elle a certainement cherché à atteindre cet objectif louable pendant qu'elle a siégé ici.

Honorables sénateurs, madame le sénateur Chalifoux est l'une des collègues les plus dévouées que j'ai eu le plaisir de côtoyer. Je suis convaincu que nous entendrons parler d'elle, et que la population canadienne entendra parler d'elle, longtemps après son départ du Sénat. Poursuivez votre excellent travail, sénateur.

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui pour célébrer avec vous les années de présence de Thelma Chalifoux au Sénat. Permettez-moi de faire un commentaire quelque peu partisan: lorsque l'on fait un aussi grand nombre de nominations au Sénat que l'a fait l'ancien premier ministre Chrétien, on finit par nommer une personne compétente.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Kinsella: C'est la seule bonne nomination!

Le sénateur Lynch-Staunton: Il ne reste que le sénateur Grafstein.

Le sénateur Stratton: Cette femme remarquable a partagé son temps avec nous au cours des six dernières années. Il n'est pas étonnant que sa contribution la plus importante au cours de cette période ait été de faire valoir la cause des Autochtones du Canada et, plus précisément, de soulever la question du peuple métis du Canada.

Depuis mai 2000, elle a présidé le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et a traité avec impartialité des mesures législatives quelquefois très controversées. Le sénateur Johnson et elle ont entrepris une étude des problèmes que rencontrent les jeunes Autochtones au Canada, particulièrement ceux des villes.

Cette étude a permis au comité de se rendre dans des collectivités autochtones pour rencontrer des jeunes, les écouter et leur assurer que s'ils ont l'impression que personne ne les écoute, il y a au moins un comité de sénateurs attentifs, présidé par une grand-mère de 26 petits-enfants, qui les écoute.

La vie de Thelma Chalifoux est loin de se résumer à ses fonctions de sénateur. Elle compte tellement d'autres centres d'intérêt. L'hommage que nous lui rendons aujourd'hui devrait également porter sur le travail qu'elle a accompli à l'extérieur de cette enceinte et avant sa nomination au Sénat. Elle a, entre autres, agi à titre de négociatrice de revendications territoriales et elle est la fondatrice du Slave Lake Native Friendship Centre. Elle a également joué un rôle déterminant dans la création des services des terres défrichées et d'aide sociale de la Métis Association of Alberta. Son militantisme social remonte à l'époque de la Compagnie des Jeunes Canadiens, dont elle était membre. Son attachement à la cause des peuples autochtones du Canada a été reconnu puisqu'elle est devenue la première Métisse à être la lauréate du prix national d'excellence décerné aux Autochtones. Elle est en outre membre du Sénat de l'Université de l'Alberta. Cette femme aux multiples talents exploite également un cabinet conseil florissant à St. Albert, en Alberta.

(1340)

Comme nous le savons tous, l'actuel premier ministre a, dans le discours du Trône, fait des autochtones — les Métis en particulier — une des priorités du gouvernement. Je ne doute pas que cela est attribuable à l'influence que le sénateur Chalifoux a exercée au fil des ans.

Sur le plan personnel, même si mes racines sont orangistes, et que celles du sénateur Chalifoux sont catholiques, nous sommes devenus des amis avec le temps. Cependant, nous sommes en désaccord sur un père de la Confédération qui vient du Manitoba, Louis Riel.

Le sénateur Chalifoux: Notre héros.

Le sénateur Stratton: Il est un héros pour le Manitoba et pour moi.

Nous aurons toujours ce lien, Thelma. Je vous souhaite bonne chance dans l'avenir.

L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, plus tôt cette semaine, un article de fond paru dans l'Edmonton Journal a capté mon attention. Il avait pour titre «Un esprit indomptable exceptionnel». «La première Métisse nommée sénateur au Canada a élevé sept enfants toute seule.» Le brillant compte rendu de Chris Purdy sur la carrière de Thelma Chalifoux révèle une femme courageuse qu'il décrit chaleureusement comme une femme énergique à la parole facile ayant le cœur à la bonne place et de solides valeurs éthiques. Cette description sonne assez juste pour nous tous.

Honorables sénateurs, Thelma nous a donné bien des leçons de vie. En fait, toutes les fois que je la voyais porter un de ses chapeaux originaux, comme celui qui se trouve sur son pupitre aujourd'hui, et avec, à la main, une canne toujours sensationnelle, je me demandais, à l'instar d'autres sénateurs, ce qu'elle nous réservait ce jour-là.

Cet esprit indomptable et exceptionnel, une Albertaine, a passé sa vie à ajouter des chapitres à l'histoire de son peuple — ces braves aventuriers de notre histoire, qui ont tracé les tout débuts d'un jeune pays dans les vastes horizons de la prairie vierge. Cette femme de l'Ouest est une pionnière moderne de la quête d'une égalité complète entre les hommes et les femmes de notre pays.

Louis Riel a eu la réflexion suivante à propos des droits des humbles: «Ces droits doivent être les mêmes pour tous, les grands et les humbles.» Thelma a fait sienne cette conviction. S'il y a un fil conducteur dans sa vie merveilleuse, c'est sa passion pour la justice et des conditions égales pour tous, son rêve d'avoir des collectivités et des sociétés où les individus ont droit à l'espoir, la lutte quotidienne pour libérer les gens de la haine et de l'intolérance, partout où elle les a démasquées, la constitution d'un lieu spécial où tous nos enfants ont le droit de grandir dans l'égalité.

Thelma, il me semble que c'est hier que, alors leader du gouvernement au Sénat, je vous ai accueillie dans cette enceinte. Quel honneur ce fut alors. Notre assemblée s'en est trouvée meilleure, et nous sommes tous meilleurs parce que nous vous avons côtoyée, Thelma. Merci.

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, c'est un grand honneur pour moi, Métis canadien, de rendre hommage à une Métisse qui siège de l'autre côté.

Thelma, vous allez nous manquer. Au Sénat, le temps est notre pire ennemi, car nous n'avons jamais assez de temps pour mener à bien ce que nous entreprenons ou ce que nous voudrions faire pour nous attaquer aux difficultés de notre peuple.

Thelma, par votre présence au Sénat et à Ottawa, la capitale nationale, vous avez porté le débat sur la cause de notre peuple à un niveau sans précédent.

Comme le sénateur Austin et d'autres l'ont dit, le discours du Trône a fait mention des Métis. Je crois que votre travail et votre attitude, Thelma, ont rendu cela possible. Je tiens à vous en féliciter, car vous avez accompli un important travail et il faut le souligner.

Au fil des ans, j'ai travaillé avec vous au comité. Je m'en suis retiré parce que le sénateur Rompkey et moi avons décidé que nous nous disputerions un peu. En dehors de cela, le travail que nous avons accompli ensemble a bien servi notre peuple et tous les peuples autochtones. Le leadership que vous avez assuré au Comité des peuples autochtones a également bien servi les peuples autochtones, inuit et métis.

Nous avons suivi ensemble le comité dans certains de ses déplacements, lorsqu'il a étudié les Autochtones des villes et les jeunes autochtones. J'ai pu voir tout le respect dont vous jouissez auprès de notre peuple et des peuples autochtones.

Ce qui m'inquiète le plus, sénateur Chalifoux, c'est de savoir qui vous remplacera.

Le sénateur Austin peut-il nous assurer que madame le sénateur Chalifoux sera remplacée par une personne aussi compétente afin que nous puissions poursuivre le très grand projet qu'elle avait présenté au Sénat? Sans la présence d'une personne aussi compétente, la cause de Louis Riel, notre leader, et la situation déplorable de tous les peuples autochtones de ce pays ne seront pas pleinement défendues.

[Français]

J'aimerais vous dire de ne pas oublier vos amis, ici à Ottawa. Revenez souvent, chère Thelma, et merci encore pour votre humilité. Merci d'avoir été une si bonne amie.

[Traduction]

L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, c'est avec grande fierté que je me joins à mes collègues pour souligner la contribution du sénateur Thelma Chalifoux à l'avancement et à la reconnaissance du peuple métis à titre de nation autochtone possédant un statut et tous les droits constitutionnels ainsi qu'à la proclamation de Louis Riel à titre de héros canadien et métis.

L'histoire de la participation du peuple métis à l'édification du Canada doit encore être analysée et comprise. Les Métis sont d'abord issus de l'union de femmes amérindiennes et d'explorateurs, de chasseurs et de commerçants de fourrures d'origine française, fait qui a duré plus de 100 ans, puis de l'union de femmes autochtones avec des hommes d'origine britannique et écossaise après le changement d'allégeance du pays. Cette situation était unique. Une nouvelle nation autochtone venait d'être créée. Malheureusement, les Métis ont été privés d'un statut véritable et, en fait, bannis des limites de tout territoire reconnu. Ils n'étaient ni des Amérindiens de sang pur vivant sur des terres ancestrales ni, bien sûr, des descendants de souche exclusivement européenne. Pendant des années, ils ont connu une vie de nomade, se déplaçant avec leurs enfants et leurs maigres possessions.

[Français]

Sans territoire, les Métis ne pouvaient prendre racine, former une communauté stable, développer des institutions autonomes et profiter ainsi de leurs droits aux ressources de ce pays. C'est ce que comprit leur chef Louis Riel, un Métis, et il revendiqua en leur nom auprès du gouvernement, qui, sans égard à leur droit d'occupation, tenta de les déposséder. Ce combat divisa profondément le nouveau pays en opposant pour la première fois les francophones du Québec et la majorité anglophone de l'Ontario.

(1350)

[Traduction]

Riel a compris que les Métis faisaient face au défi singulier d'intégrer les langues et les influences françaises et anglaises tout en préservant leur mode de vie et leur culture traditionnels. Ils affrontaient également les difficultés d'une errance d'exilés dans leur propre pays. Ils avaient à revendiquer le strict minimum de droits pour vivre en paix. Par son leadership, Riel leur a rendu leur dignité, la fierté de leurs origines et leur identité unique, mais au prix des batailles et de la mort. C'est donc à juste titre que le sénateur Chalifoux a essayé, par deux projets de loi différents, de faire reconnaître la place qui revient à Riel dans l'histoire du Canada.

Après 112 ans, les Métis, un peuple sans voix, ont fini par être entendus. La Loi constitutionnelle de 1982, grâce à un amendement apporté à sa version initiale, a inclus les Métis en tant qu'un peuple autochtone reconnu et, 21 ans plus tard, dans l'affaire Powley, la Cour suprême a confirmé leur admissibilité au statut intégral de nation autochtone.

Le sénateur Chalifoux a saisi ses collègues sénateurs de la situation critique de son peuple: l'itinérance urbaine, le mauvais état de santé, la pauvreté infantile et le suicide des jeunes. Son départ du Sénat aujourd'hui nous amène à nous demander comment nous continuerons de nous préoccuper de ces questions dans nos travaux législatifs et dans nos études. Elles nous a rendus collectivement responsables de l'amélioration fondamentale à laquelle les Métis ont droit tant au chapitre des terres que de celui de la gouvernance. Comme elle a su nous sensibiliser à la situation de son peuple, j'aimerais lui assurer que, nous nous inspirerons de son dévouement pour rétablir les droits des Métis.

Je vous remercie, sénateur Chalifoux, avec toute notre considération, du sentiment de dignité et du sens profond de l'honneur que vous avez apportés à votre engagement.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, malheureusement, la période de 15 minutes allouée pour les hommages est écoulée. Cependant, j'entendrai quelques sénateurs pendant la période réservée aux déclarations des sénateurs si le temps le permet.

J'ai maintenant le plaisir de donner la parole au sénateur Chalifoux.

L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, je suis comblée par l'accueil et les hommages dont vous m'avez gratifiée, moi qui suis une servante du peuple. J'ai été élevée pour être au service de nos anciens et de nos communautés toute ma vie, car c'est l'héritage que m'ont laissé mon père, ma mère et ma communauté.

J'ai grandi à l'Armée du Salut. Là, on nous apprend à servir, et c'est ce que j'ai fait toute ma vie. C'est devenu ma nature. Lorsque je vois quelqu'un souffrir, comment pourrais-je lui tourner le dos? Lorsque quelqu'un me demande de l'aider, comment pourrais-je lui dire non? Je ne peux pas. J'ai appris à avoir une haute morale professionnelle, et je me suis efforcée de la faire progresser toute ma vie.

Depuis ma nomination à ce merveilleux endroit, je ne suis jamais entrée dans cette enceinte sans éprouver un sentiment d'admiration. Je me suis demandé bien souvent: qu'est-ce qu'une vieille petite dame métisse du Nord de l'Alberta peut bien faire ici? J'ai toujours cru que le Créateur m'y avait placée pour une raison très importante — qui est de faire connaître la situation difficile de tous les peuples autochtones du pays, afin que nous n'ayons plus besoins de parler des conditions propres au tiers monde, de manque de sentiment d'identité et de perte de culture. Si je réussis à toucher une seule personne, j'aurai fait mon travail.

J'aimerais remercier toute notre équipe, autant celle des gros travaux que de la sécurité et des débats, tous ceux qui travaillent ici parce que nous formons une équipe. Sans tous les gens qui travaillent pour nous, nous ne survivrions pas. Ce sont mes amis; ce sont aussi mes collègues.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Chalifoux: Je tiens à dire un merci tout spécial au personnel de mon bureau. Mon adjointe, Karen, est une personne autoritaire qui tient à tout contrôler, mais je n'aurais pu me passer d'elle. Elle m'a fait obtenir des choses dont aucun autre sénateur n'aurait pu rêver. Elle a fait preuve d'une loyauté et d'un dévouement impeccables, non seulement envers mon bureau mais envers l'ensemble du Sénat. J'ignore ce que je deviendrai sans elle. Nous nous disputons, mais nous sommes les meilleures amies du monde. C'est ce qui fait le charme de cet endroit: non seulement notre présence, mais la façon dont nous nous traitons les uns les autres. J'ai donné aux membres de l'équipe de nettoyage de nos bureaux un exemplaire de la publication intitulée Le Sénat aujourd'hui, afin de m'assurer qu'ils comprennent bien ce qu'est le Sénat. Je veux qu'ils soient fiers de travailler à notre remarquable Sénat.

Je ne vais pas prendre ma retraite. Il me reste encore des montagnes à escalader. Partir à la retraite, c'est mourir. J'ai parlé au Seigneur, et je ne partirai pas avant d'avoir 95 ans. Il me reste donc encore beaucoup à faire.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Chalifoux: Nous avons eu beaucoup de plaisir à travailler ici. Nous avons tenu beaucoup de débats. Je remercie le sénateur Lynch-Staunton, car lorsque je suis arrivée ici, il parlait. Quel parlementaire! Quel débatteur! Le sénateur Grafstein, lui, me fascine. Je raffole des débats, et ces messieurs me fascinent. J'ai eu grand plaisir à assister aux débats animés. Ils ne perdaient jamais de vue le sujet de la discussion. Les échanges ne prenaient jamais une tournure personnelle, mais se concentraient sur des sujets intéressants et clairs. J'en ai retiré un réel plaisir.

Quand je retourne chez moi, je parle du Sénat, de son importance et de son utilité, en particulier dans l'Ouest où nous ne comptons pas beaucoup de représentants dans les rangs ministériels. Le Sénat joue un rôle vital. Nous devons parler à nos concitoyens du travail que nous faisons ici. Cette institution est le secret le mieux gardé du pays, mais elle commence à être connue. Il nous appartient de veiller à ce que tous les Canadiens sachent quel merveilleux gouvernement et quel merveilleux système parlementaire nous avons.

Je vous remercie tous et chacun, depuis le personnel de l'équipe de nettoyage de nos bureaux jusqu'au Président du Sénat. Merci beaucoup pour les merveilleuses occasions qui m'ont été données. Je remercie également le Seigneur de m'avoir permis de représenter mes concitoyens et d'avoir défendu leurs intérêts. Une fois encore, je vous remercie du fond du coeur. Je reviendrai!

Des voix: Bravo!

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, pour continuer dans le même esprit, je tiens à dire quelques mots au sujet de Thelma.

Je suis à la fois fière et triste de dire au revoir à l'une des collègues les plus remarquables que j'aie connues ici en 20 ans, ma consoeur albertaine, Thelma Chalifoux.

Ayant survécu à de longues et terribles épreuves, accompli un service remarquable et relevé des défis qui rebuteraient d'autres personnes, Thelma a été non seulement un grand sénateur, mais aussi un modèle inflexible et aimant pour ses sept enfants, 30 petits-enfants et 26 arrière-petits-enfants. Elle est ressortie grandie de mariages où régnait la violence et de problèmes de santé qui ont menacé sa vie et, lorsqu'elle quittera le Sénat, elle continuera de défendre les causes qu'elle a embrassées, chaque fois que le besoin s'en fera sentir.

L'oeuvre que Thelma a accomplie au Sénat pour tous les Autochtones s'inscrira dans leur histoire et dans la nôtre. En tant que première femme autochtone et première femme métisse à devenir sénateur, elle a tracé une voie que notre assemblée suivra certainement au cours des années à venir. Ses réalisations sont tellement nombreuses qu'il est difficile de croire qu'elle n'a siégé ici qu'un peu plus de six ans.

(1400)

De sa propre initiative, Thelma s'est attaquée à la définition de Métis, un casse-tête effroyable et de longue date, tant pour les gouvernements que pour les non-autochtones, qui a désavantagé les collectivités métisses du pays en ce qui a trait aux responsabilités et aux droits ancestraux à l'égard de leurs familles et de leurs terres.

Elle a grandement influencé les travaux du Comité des peuples Autochtones et, grâce à ces travaux, elle lègue au Parlement et aux gouvernements un outil important pour qu'ils poursuivent leur action sur la stratégie à adopter au sujet des autochtones des régions urbaines, en mettant particulièrement l'accent sur les jeunes et sur tous les problèmes qu'ils éprouvent. Pour ses efforts infatigables de toute une vie, Thelma a reçu pratiquement toutes les récompenses possibles, dont le prestigieux prix national d'excellence décerné aux Autochtones, le National Aboriginal Achievement Award.

Honorables sénateurs, nous avons tous été honorés de sa nomination au Sénat. Sur le plan personnel, l'amitié de cette Albertaine, de ce chef Kainah et de cette femme est un don précieux, et son départ du Sénat est une lourde perte. Cependant, on peut se réconforter en sachant que Thelma ne cessera jamais de défendre les causes qu'elle embrasse et les rêves que caressent ses concitoyens. Elle travaille déjà à de nouveaux projets.

Vous êtes très appréciée, Thelma, et j'espère que vous prendrez bien soin de vous-même et que vous garderez un peu de temps pour bien jouir de la grande et merveilleuse famille élargie dans laquelle vous êtes une grande source d'affection. Puissiez-vous toujours voler sur les ailes d'un aigle.

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, Thelma Chalifoux siégeait au Sénat depuis à peine trois jours lorsqu'elle s'est levée, indignée, pour répondre à la remarque malvenue d'un sénateur qui ne s'y attendait pas. Elle nous a tous familiarisés avec la notion du «corridor médian du Canada», cette vaste étendue de notre forêt boréale s'étendant d'un océan à l'autre, qui renferme la plus grande partie des ressources naturelles de notre pays et qui est le territoire ancestral de ses proches, les Métis de la terre de Rupert. Comme elle l'a souligné hier en cette enceinte, ce sont eux les véritables Canadiens.

Tout au long de son séjour au Sénat, Thelma n'a eu de cesse de nous éduquer, de nous lancer des défis et de lutter en faveur des droits et du mieux-être de son peuple. D'autres ont énuméré les réalisations de Thelma au Sénat, je ne les répéterai pas; mais l'une de ses réalisations les plus extraordinaires a été le nombre incroyable d'amitiés durables qu'elle a su établir.

Honorables sénateurs, cette femme extraordinaire, originaire de Morinville, en Alberta, a laissé une marque historique et durable au Sénat et sur les lois régissant les peuples autochtones au Canada pour des années à venir.

Sénateur Chalifoux, comme vous l'avez dit hier, vous avez travaillé toute votre vie et vous n'êtes pas sur le point de cesser maintenant. Je prédis que nous n'avons pas fini de vous voir et de vous entendre sur la colline du Parlement.

Le sénateur Chalifoux: Vous avez raison!

Le sénateur Milne: L'honorable sénateur Thelma Chalifoux aura été: un sénateur, une matriarche, une combattante, une femme sage, une amie véritable et loyale, une soeur et une compagne de pupitre. Ma chère Thelma, vous n'avez aucune idée combien vous allez me manquer, tout comme les rires et les larmes que nous avons partagés durant six ans au Sénat.

L'honorable Ione Christensen: Honorables sénateurs, je formule mes meilleurs vœux au sénateur Chalifoux. Elle a été sénateur au sein de la nation métisse avant de venir au Sénat, de sorte que c'est dans une perspective particulière qu'elle a élaboré le rôle qu'elle devait jouer au cours des six brèves années durant lesquelles elle a siégé.

Vous avez joué un rôle remarquable, Thelma. Vous êtes connue d'un bout à l'autre du pays. Vous avez exercé, de mille et une façon, une influence favorable sur la vie d'un grand nombre de personnes et, comme l'impose notre devoir de sénateur, vous avez influé sur la vie de personnes faisant partie des minorités. Aucun sénateur, aucun député, aucun ministre et, même, aucun premier ministre, n'étaient à l'abri lorsque vous défendiez un dossier d'équité ou de justice, et vous en êtes sortie gagnante. Vous parveniez à vous en tenir à l'essentiel, à faire usage du bon vieux sens commun, à faire fi de la bureaucratie et à régler le problème. Votre philosophie, c'était: «Ne me dites pas ce que je ne peux pas faire, dites-moi seulement comment je peux faire ce que je veux faire». Que de fraîcheur et d'efficacité, même si des bureaucrates blêmissaient juste à l'idée de recourir à des méthodes aussi expéditives.

Comme des filles de la forêt nordique, vous et moi avons fraternisé dès ma première journée, et notre amitié a fleuri au cours des quatre dernières années. Vous allez me manquer. Soyez heureuse sur votre plantation. Je sais que la retraite est la dernière de votre préoccupations, mais prenez soin de vous et profitez de vos 26 arrière-petits-enfants. Je vous souhaite d'heureux parcours.

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, connaître l'histoire de Thelma Chalifoux, c'est apprendre une leçon de courage de la part d'une femme qui a vaincu l'adversité, fait preuve d'une force de caractère dans sa lutte pour le bien de sa famille et témoigné d'un profond engagement envers les Métis dans le but de les aider à éradiquer la discrimination dont ils ont toujours été victimes.

En cotoyant Thelma Chalifoux au Sénat, nous n'avons pu qu'être inspirés par sa détermination à aider tous les peuples autochtones à réclamer la place qui leur revient dans notre société.

Le discours — ou plutôt l'ardent plaidoyer en faveur de la justice sociale pour son peuple — que le sénateur Thelma Chalifoux a livré hier, nous a rappelés à notre devoir et nous a incités à se joindre à elle pour exiger du gouvernement qu'il soit à la hauteur de ses responsabilités.

L'amitié de Thelma Chalifoux — cette femme sympathique aux nombreux chapeaux magnifiques —, est une bénédiction du ciel et je ne l'oublierai jamais.

L'honorable Nick G. Sibbeston: Honorables sénateurs, au cours des quelques années pendant lesquelles Thelma Chalifoux a représenté l'Alberta au Sénat, elle y a assuré une forte présence métis, représentant les Métis, les Premières nations et tous les Albertains de façon très digne et respectueuse. Elle a eu à coeur d'améliorer le sort des peuples autochtones, particulièrement celui des laissés pour compte et des marginalisés. Les Métis font souvent partie de cette catégorie. Elle a souvent protesté contre le statisme du gouvernement en comité, dans les caucus et en cette enceinte.

Elle a fait preuve de beaucoup de rigueur, surtout à la tête du Comité sur les peuples autochtones et dans la préparation d'une étude sur les jeunes autochtones dans les centres urbains. Le rapport du comité, qui contenait 16 recommandations, fera partie de son héritage. Le défi que nous aurons tous à relever ici au Sénat sera de voir à ce que le gouvernement en prenne bonne note. Le rapport précise très clairement, dans les deux langues officielles, ce que le gouvernement devrait faire pour apaiser les problèmes au sein des peuples autochtones du pays.

Thelma a passé sa vie à aider les gens, assurant un lien entre les peuples autochtones et les non-autochtones. Elle a travaillé en Alberta pendant toute sa vie, aidant à mettre des organisations autochtones sur pied et à les rendre efficaces. Elle s'est occupée de revendications territoriales et a aidé à créer le premier centre d'amitié de Slave Lake. Sa vie a été très active, et comme je la connais, je suis persuadé qu'elle continuera d'être active jusqu'à son dernier jour.

Thelma a été reconnue et honorée par la Fondation nationale des réalisations autochtones. Encore l'an dernier, elle a obtenu le Circle of Honour Award d'un institut de l'Alberta qui fait la promotion des femmes. Je suis heureux d'annoncer à tous mes collègues qu'elle s'est vue offrir un doctorat honorifique en droit de l'Université de Toronto et qu'elle a bien l'intention de l'accepter. Elle ne sera peut-être plus sénateur, mais nous devrons maintenant l'appeler Son Éminence Mme Chalifoux.

Thelma nous quitte pour retourner à Morinville où elle retrouvera ses sept enfants, 30 petits-enfants et 26 arrière-petits-enfants. Bon voyage, chère amie.

(1410)

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, madame le sénateur Thelma Chalifoux est la femme la plus spirituelle et la plus pratique que j'ai jamais rencontrée. Elle a tenté de m'imprégner de cette spiritualité; cependant, Thelma, j'ai bien peur que cela ne prenne encore beaucoup de temps. Sa spiritualité est très réconfortante. J'ai eu l'occasion d'en faire l'expérience, et j'en remercie le sénateur Chalifoux.

Je me souviens clairement de Thelma en Finlande, marchant péniblement dans la forêt, avec deux cannes, à 20 degrés sous zéro, avec des soldats finlandais. Nous avons dû marcher deux ou trois milles, et Thelma ne voulait pas abandonner. Elle ne voulait pas se faire porter sur une civière; elle ne voulait aucune aide.

Thelma, je vous souhaite tout ce qu'il y a de mieux pour l'avenir. Vous m'avez dit qu'on découvrira peut-être des diamants dans votre région. Comme vous le savez, le diamant est le meilleur ami de la femme. J'espère qu'on découvrira toutes sortes de diamants. Je sais que vous ne les porterez pas. Je sais que vous les vendrez et utiliserez l'argent pour une de vos merveilleuses causes. Vous devriez tout de même en porter au moins un.

Bonne chance.

L'honorable Vivienne Poy: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à madame le sénateur Thelma Chalifoux.

Depuis mon arrivée au Sénat en 1998, elle a été une source d'inspiration pour moi et une bonne amie. Comme beaucoup d'entre nous, je suis toujours curieuse de voir ce que Thelma est en train de mijoter.

Je crois que nous partageons les mêmes croyances dans bien des cas et que nous accordons toutes deux beaucoup d'importance à la justice et aux droits de la personne. Nous partageons la même passion pour ce qui est d'honorer la diversité de notre pays et de défendre les droits des femmes.

Au nom des plus nécessiteux, je la félicite pour tout le travail qu'elle a accompli, tant ici, au Sénat, qu'auprès des membres de sa collectivité.

Durant le temps qu'elle a passé au Sénat, en particulier à titre de présidente du Comité permanent des peuples autochtones et dans le cadre de son travail récent sur les droits des femmes autochtones en ce qui concerne les biens matrimoniaux au sein du Comité permanent des droits de la personne, elle s'est fait la voix de ceux qui, autrement, n'auraient pas pu se faire entendre dans notre régime politique. Elle est devenue un modèle pour les Autochtones partout au Canada. Sa forte présence au Canada a aidé à faire des Métis une priorité nationale et à sensibiliser l'ensemble de la population aux questions touchant les Métis.

Depuis 1997, année où elle a été nommée au Sénat, Thelma se consacre à l'amélioration de la vie des Canadiens. Elle a beaucoup fait pour nous sensibiliser à la pauvreté et aux inégalités qui persistent au Canada.

Elle a également tenté de réhabiliter le héros métis Louis Riel au moyen d'un projet de loi qui est mort au Feuilleton à deux reprises. En soulevant cette question, Thelma a beaucoup contribué à stimuler le débat public sur le rôle de Louis Riel dans l'histoire du Canada.

L'an dernier, j'ai eu, en compagnie de quelques autres sénateurs, la grande chance d'assister au gala des prix Esquao à Edmonton, où le sénateur Chalifoux a reçu de l'Institute for the Advancement of Aboriginal Women le Circle of Honour Award, la plus prestigieuse distinction accordée par l'institut. Je sais que le sénateur Sibbeston a fait mention de ce prix, mais je tiens à en parler encore, car il est très important. Il apparaissait clairement qu'elle avait gagné le respect et l'affection de sa communauté, tant pour ses réalisations que pour le fait qu'elle n'a jamais oublié ses origines.

Thelma quitte officiellement le Sénat, mais son impact continuera de se faire sentir dans le pays. Comme elle vient de nous le confirmer, elle a parlé au Seigneur et elle a encore 20 ans devant elle. Donc, nous continuerons d'entendre parler de Thelma, qui continuera de faire progresser les questions qui ont des incidences sur le Canada.

Aujourd'hui, je perds une collègue appréciée, mais je conserverai une bonne amie. Thelma, vous allez me manquer, mais nos chemins se croiseront à nouveau très bientôt.


AFFAIRES COURANTES

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

DÉPÔT D'UN RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères. Ce rapport présente les dépenses engagées par le comité pendant la deuxième session de la trente-septième législature.

(Le texte du rapport figure à la p. 47 des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

PROJET DE LOI SUR LES MOTOMARINES

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Mira Spivak présente le projet de loi S-8, concernant les motomarines dans les voies navigables.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Spivak, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

PROJET DE LOI SUR LOUIS RIEL ET LE PEUPLE MÉTIS

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Thelma Chalifoux présente le projet de loi S-9, Loi visant à honorer Louis Riel et le peuple métis.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Chalifoux, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

L'ASSOCIATION PARLEMENTAIRE CANADA-EUROPE

LA RÉUNION DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE—DU 9 AU 11 OCTOBRE 2003—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation de l'Association parlementaire Canada-Europe, OSCE, aux réunions d'automne de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tenues du 9 au 11 octobre 2003 à Rome, en Italie, en marge desquelles nous avons eu l'honneur d'obtenir une audience avec Sa Sainteté le pape.

(1420)

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE NATIONALE SUR LA SÉCURITÉ

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)i) du Règlement, je propose que la motion suivante soit inscrite à l'ordre du jour de la présente séance:

Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé à mener une étude et à faire rapport sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada. Le comité sera en particulier autorisé à examiner:

a) la capacité du ministère de la Défense nationale de défendre et de protéger les intérêts, la population et le territoire du Canada et sa capacité de réagir à une urgence nationale ou à une attaque ou de prévenir ces situations, ainsi que la capacité du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile de remplir son mandat;

b) les relations de travail entre les divers organismes participant à la collecte de renseignements, comment ils recueillent, colligent, analysent et diffusent ces renseignements, et comment ces fonctions pourraient être améliorées;

c) les mécanismes d'examen de la performance et des activités des divers organismes participant à la collecte de renseignements;

d) la sécurité de nos frontières;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus dans les première et deuxième sessions de la trente-septième législature soient déférés au comité;

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 30 juin 2004 et qu'il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions jusqu'au 30 juillet 2004.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: La permission n'est pas accordée. Il s'agira donc d'un avis de motion.

(Sur la motion du sénateur Forrestall, l'étude de la motion est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR LES INDUSTRIES DES MÉDIAS

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, l'état actuel des industries de médias canadiennes; les tendances et les développements émergeants au sein de ces industries; le rôle, les droits, et les obligations des médias dans la société canadienne; et les politiques actuelles et futures appropriées par rapport à ces industries;

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le jeudi 31 mars 2005; et

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité au cours de la deuxième session de la trente-septième législature soient déférés au comité.

[Français]

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.

[Traduction]

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR LES RELATIONS COMMERCIALES AVEC LES ÉTATS-UNIS ET LE MEXIQUE

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à étudier et à faire rapport sur les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis d'Amérique et entre le Canada et le Mexique, portant une attention particulière à: a) l'Accord de libre-échange de 1988; b) l'Accord de libre-échange nord-américain de 1992; c) un accès sûr pour les produits et services canadiens aux États-Unis d'Amérique et au Mexique; et d) le développement de mécanismes efficaces de règlement des différends, tous dans le contexte des relations économiques du Canada avec les pays des Amériques et du cycle de Doha des négociations commerciales de l'Organisation mondiale du commerce;

Que les documents et les témoignages recueillis à ce sujet au cours de la deuxième session de la trente-septième législature soient renvoyés au comité; et

Que le comité présente son rapport final au plus tard le 30 juin 2004; et que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenus dans son rapport final et ce jusqu'au 31 juillet 2004.

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR LES QUESTIONS SE RAPPORTANT AUX RELATIONS ÉTRANGÈRES

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, en conformité avec l'article 86(1)h) du Règlement, soit autorisé à étudier les questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant aux relations étrangères en général; et

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 30 juin 2004.

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial des affaires étrangères soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit habilité à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux.

BANQUES ET COMMERCE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR LA SITUATION DU RÉGIME FINANCIER CANADIEN ET INTERNATIONAL

L'honorable Richard H. Kroft: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à examiner, afin d'en faire rapport, la situation actuelle du régime financier canadien et international;

Que les documents et témoignages recueillis à ce sujet au cours des première et deuxième sessions de la trente-septième législature et tout autre document parlementaire et témoignage pertinent concernant ledit sujet soient renvoyés à ce comité; et

Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 31 décembre 2004.

ÉNERGIE, ENVIRONNEMENT ET RESSOURCES NATURELLES

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR DES QUESTIONS CONCERNANT SON MANDAT

L'honorable Tommy Banks: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles soit autorisé à étudier et à faire rapport sur de nouvelles questions concernant son mandat:

a) la situation actuelle et l'orientation future des ressources énergétiques du Canada sur les plans de la production, de la distribution, de la consommation, du commerce, de la sécurité et de la durabilité;

b) des défis environnementaux du Canada, y compris ses décisions concernant le changement climatique mondial, la pollution atmosphérique, la biodiversité et l'intégrité écologique;

c) la gestion et l'exploitation durables des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables dont l'eau, les minéraux, les sols, la flore et la faune;

d) les obligations du Canada issues de traités internationaux touchant l'énergie, l'environnement et les ressources naturelles, et leur incidence sur le développement économique et social du Canada, et

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus durant la deuxième session de la trente-septième législature soient déférés au comité;

Que le comité fasse périodiquement rapport au Sénat, au plus tard le 28 février 2005, et qu'il conserve jusqu'au 31 mars 2005 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.

[Français]

BANQUES ET COMMERCE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LES TAUX DE CRÉDIT

L'honorable Madeleine Plamondon: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce inclue dans son agenda de la présente session l'étude des taux de crédit.

LES LANGUES OFFICIELLES

LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA—PRÉSENTATION DE PÉTITIONS

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, j'ai aujourd'hui quelque 1 000 pétitions à déposer. Cela fait un total de 21 834 pétitions demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, une ville bilingue reflétant la dualité linguistique du pays.

Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:

Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits de privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;

Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;

Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;

Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada — la seule mentionnée dans la Constitution —, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 et 1982.


(1430)

[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LE PREMIER MINISTRE

LES RENCONTRES AVEC LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE AU SUJET DE LA FIDUCIE SANS DROIT DE REGARD

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Je voudrais qu'il clarifie une des réponses qu'il nous a donnée hier. En réponse à la question du sénateur Nolin sur l'information transmise au premier ministre au sujet de ses avoirs, le leader du gouvernement a déclaré:

Le premier ministre n'a rien eu à voir dans la gestion de la CSL et il s'est abstenu d'intervenir dans toute question ayant trait à la gestion de la CSL.

Si le premier ministre s'est abstenu d'intervenir dans toute question ayant trait à la gestion de la CSL, pourquoi a-t-il rencontré, en 1996, Sam Hayes, président de la CSL, pour discuter d'un contrat avec la société Jawa Power?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas de renseignements à ce sujet. Je m'informerai et répondrai aux sénateurs à une date ultérieure.

Le sénateur Lynch-Staunton: Comme c'est commode.

Le sénateur LeBreton: Je peux peut-être vous être utile. Dans un article de l'Ottawa Citizen publié le 17 février 2003, le conseiller en éthique Wilson précise que M. Martin était «très conscient» du contrat intervenu entre Jawa Power et la CSL. L'ex-premier ministre Chrétien a également parlé de réunions entre M. Martin et des gestionnaires de sa fiducie «qui souhaitaient l'informer de la décision importante à prendre». Cela figure dans le hansard du 18 février 2003.

À la lumière de ces déclarations, comment le leader du gouvernement peut-il soutenir que M. Martin n'avait rien à voir avec les décisions de la CSL.

Le sénateur Austin: Cela dépend, honorables sénateurs, si «avoir quelque chose à voir» veut dire prendre des décisions. À mon avis, cela veut plutôt dire qu'il a été tenu informé, sans toutefois participer au processus décisionnel. Comme je l'ai dit hier, selon les règles actuellement en vigueur, les membres du Cabinet visés par le code d'éthique ont quand même le droit de connaître la valeur de leurs biens.

S'il y a d'autres questions sur le fond, je serai heureux de rechercher l'information.

Le sénateur Lynch-Staunton: Pas les questions embarrassantes.

Le sénateur LeBreton: Je suis porté à considérer les citations directes de Howard Wilson comme des questions de fond, ce que certains pourraient contester, je suppose.

J'ai une autre brève question. M. Martin a-t-il été informé des contrats que le gouvernement a accordés à CSL?

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui ou non.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, le fait est que M. Martin s'est conformé à toutes les règles qui s'appliquaient aux ministres lorsqu'il était ministre des Finances. Toutes les réunions qui ont eu lieu se sont tenues en présence du conseiller en éthique, qui veillait au respect de toutes ces règles. En conséquence, je pense avoir répondu à la question.

LA JUSTICE

L'ENQUÊTE SUR L'AFFAIRE MAHER ARAR—LA SAISIE DE DOCUMENTS D'UNE JOURNALISTE—LES PROPOS DU PREMIER MINISTRE

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, pendant que j'y suis, je voudrais répondre à une question que le sénateur Andreychuk a posée hier au sujet de Mme O'Neill de l'Ottawa Citizen. Le sénateur Andreychuk m'a demandé de faire d'autres recherches pour déterminer ce qu'a voulu dire le premier ministre.

J'ai été informé que le premier ministre a simplement dit qu'en l'absence d'accusations ou de condamnation, nous ne sommes pas fondés à affirmer que Mme O'Neill est une criminelle. Il y a la présomption d'innocence. Le premier ministre n'a pas laissé entendre que les journalistes, en tant que groupe, devraient être à l'abri d'une enquête judiciaire.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il n'a jamais dit cela; c'est après le fait. C'est une manœuvre de doreur d'image.

LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION

L'EXPULSION D'INDIVIDUS VERS LA CORÉE DU NORD

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, nous assistons actuellement à l'évolution du cas déchirant de M. Song Dae Ri et de son fils de six ans, tous deux réfugiés provenant de la Corée du Nord.

M. Ri s'est vu refuser le statut de réfugié, en dépit du fait que le représentant de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qui a pris la décision dans cette affaire admette que M. Ri sera vraisemblablement exécuté s'il rentre en Corée du Nord. Le motif du refus de la CISR est apparemment lié au travail qu'occupait M. Ri au gouvernement de la Corée du Nord. Voilà donc une déclaration de culpabilité par association. Pourtant, la section canadienne des crimes de guerre a confirmé par écrit à la CISR que M. Ri ne présentait aucun intérêt pour elle.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous fournir certaines précisions sur cette affaire? La position du Canada a-t-elle été modifiée en ce qui concerne l'expulsion d'individus vers des pays où ils risquent soit la peine capitale, soit l'exécution?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, cette question porte sur un sujet que j'estime moi aussi fort préoccupant. Le membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a pris une décision conforme aux règles en vigueur. Après avoir appris que M. Ri avait occupé un poste de haut fonctionnaire au gouvernement nord-coréen, il a appliqué la règle, compte tenu du fait que ce gouvernement a enfreint les règles et les valeurs humanitaires. Toutefois, M. Ri peut encore se prévaloir d'un recours additionnel. J'ai en effet reçu l'assurance qu'il peut encore demander qu'on procède à un examen des risques avant le renvoi. On m'a informé que M. Ri ne ferait face à l'expulsion que si cet examen révèle que la menace qu'il pose pour la société canadienne est supérieure au risque lié à son expulsion.

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, mon commentaire est absolument non partisan parce qu'il revient des années en arrière. Les gouvernements antérieurs ont admis au Canada certains des pires criminels du monde en demandant une intervention ministérielle spéciale. Simplement à titre d'information, je signale que Mme Ri se trouvait au Canada avec son mari et que, selon toute apparences, après avoir été persuadée de rentrer en Corée du Nord sous de faux prétextes, elle a été exécutée. À titre de mesure exemplaire, le père de M. Ri a également été exécuté, apparemment à cause des actes de son fils.

Honorables sénateurs, la situation justifie le recours au permis ministériel, après un examen approprié évidemment. Peu importe la validité des accusations non prouvées qui pèsent contre M. Ri, il est grand temps que le gouvernement du Canada agisse.

Je pose donc la question au ministre. Ne serons-nous pas complices, instruments d'une possible exécution? Ne contribuerons-nous pas à enlever son père à un garçon de six ans qui deviendra ainsi orphelin? Le ministre pourrait-il répondre?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, j'ajouterai mes propres observations à celles du sénateur Di Nino lorsque je parlerai de cette situation à mes collègues du Cabinet.

L'honorable Pierre Claude Nolin: J'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Nous reconnaissons tous qu'il faut trouver une solution à cette situation. Le problème est grave. Je crois que les collègues du ministre sauront prendre la décision adéquate.

(1440)

Cependant, tout cela soulève une question d'une autre ampleur: que se passait-il à la CISR pour qu'une telle décision soit prise? Il y a un problème à la commission et l'autorité appropriée doit le résoudre. Je ne sais pas comment, mais j'espère que le ministre pourra faire comprendre à ses collègues qu'il existe un problème et que la commission doit faire l'objet d'une réorganisation.

Je comprend parfaitement que la CISR est un organisme quasi judiciaire; néanmoins, si nous devons modifier la loi qui donne à la commission le pouvoir de prendre de telles décisions, nous allons le faire.

Honorables sénateurs, il y a quelque chose qui cloche ici car il est impossible qu'une telle histoire se déroule au Canada. Nous entendons des histoires du genre venant d'ailleurs, mais cela ne peut pas se passer au Canada. J'espère que le ministre est de mon avis.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je vais certainement tenir compte des propos de l'honorable sénateur Nolin. Du même souffle, et sans renoncer aucunement à mon engagement d'effectuer ces démarches, j'indique simplement que cette affaire a été décidée selon les règles existantes. Ces règles pourraient très bien s'appliquer à une autre personne dont on découvrirait qu'elle appartenait à un gouvernement, à une administration ou à une junte responsable de crimes de guerre ou d'actes inhumains. En procédure judiciaire, le principe consiste à appliquer une règle générale; mais, dans le système actuel, si la règle générale avait été mal appliquée, cela me préoccuperait certainement. Si elle a été appliquée correctement, il existe des voies de recours pour faire valoir des considérations humanitaires.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, j'espère que dans cette affaire les garanties procédurales ont été respectées. Dans la négative, évidemment, l'honorable leader s'est engagé à intervenir.

Il me semble y avoir ici un parallèle. La loi fonctionne, mais il y a parfois ces aberrations. C'est la raison pour laquelle il existe une échappatoire, soit le permis ministériel. Dans le jugement Burns et Rafay portant sur l'extradition d'un criminel, il était question du pouvoir discrétionnaire du ministre et du refus de celui-ci d'indiquer de quelle manière il entendait l'exercer. Le tribunal a dit clairement qu'en aucun cas le ministre ne pouvait exercer son pouvoir discrétionnaire si une mort devait s'ensuivre, puisque nous avons aboli la peine de mort au Canada.

Le même raisonnement s'applique sûrement à la présente affaire. Le ministre devrait exercer immédiatement son pouvoir discrétionnaire afin que nous ne nous retrouvions pas dans la même position que celle où nous nous sommes trouvés en matière d'extradition de criminels.

Je ne vois pas pourquoi le ministre a tardé à agir. Je pense que la procédure a été respectée et est parvenue à sa conclusion; or il existe une échappatoire pour faire en sorte que nos décisions n'entraînent pas une peine de mort. Il ne reste plus au gouvernement du ministre qu'à agir.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, j'apprécie l'apport du sénateur Andreychuk à cette série de questions. Je vais également étudier le jugement Burns et Rafay pour voir précisément ce qu'il dit. Si, à mes yeux, il conforte l'argument que j'aimerais invoquer, je garantis aux honorables sénateurs que je ferai valoir cet argument.

Le sénateur Andreychuk: Selon moi, le ministre jouissait peut-être d'un plus grand pouvoir discrétionnaire en raison de l'intérêt national, de la sûreté et de la sécurité. Dans le jugement Burns et Rafy, ces considérations ont été écartées et le tribunal a statué que le ministre était tenu d'exercer son pouvoir discrétionnaire de manière à empêcher le renvoi d'une personne dans un pays où elle risquerait d'être exécutée. Dans la présente affaire, il n'est nullement question de la sûreté et de la sécurité de notre pays. Personne n'a soulevé ce point.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, en fait, il a été soulevé. C'est une question qui, je le répète, doit être étudiée, mais le point de l'honorable sénateur est tout à fait pertinent.

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LES PROPOS DÉSOBLIGEANTS DU COMMENTATEUR SPORTIF DON CHERRY

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

J'ai déposé une plainte auprès de la commissaire aux langues officielles aujourd'hui au sujet de certains propos tenus récemment par le commentateur sportif du réseau anglais de Radio-Canada, M. Don Cherry. Ce n'est pas la première fois que M. Cherry tient des propos désobligeants à l'endroit des francophones.

Dans son commentaire, entre deux périodes de l'émission Hockey Night in Canada, M. Cherry a laissé entendre que l'usage de drogues chez les joueurs juniors se limitait à la Ligue de hockey junior majeur du Québec. Ces propos sont sans fondement parce que l'usage de drogues dans le monde sportif devient un problème mondial. Prenons l'exemple des Jeux olympiques. Plusieurs médaillés ont perdu leur médaille après un test antidopage positif.

De plus, au cours de l'émission du 24 janvier, M. Cherry a sévèrement critiqué ceux qui réclamaient le port obligatoire de la visière de protection par les joueurs de la Ligue nationale de hockey en raison des nombreuses blessures infligées par des bâtons élevés. M. Cherry a ajouté que les seuls joueurs à porter des visières étaient les Européens et les francophones. Une fois encore, Don Cherry ne s'est pas fondé sur des faits. Près de 40 p. 100 des joueurs de la Ligue nationale portent la visière, et ils ont raison.

Peut-être que Don Cherry devrait se concentrer davantage sur ce qui ce passe sur la glace au lieu d'insulter des joueurs parce qu'ils ont un nom francophone ou viennent du Québec. Le réseau anglais de la SRC devrait sanctionner M. Cherry en raison de ses propos. De tels propos ne reflètent pas les valeurs canadiennes, alors que la SRC a le mandat de le faire.

Je demanderais au leader du gouvernement au Sénat de bien vouloir soulever cette question auprès du président de la SRC, M. Robert Rabinovitch. Le ministre pourrait-il lui dire que certains des sénateurs ne sont pas d'accord avec les propos de M. Cherry, qu'ils désapprouvent totalement ses méthodes et, par la même occasion, lui demander de se taire?

Des voix: Bravo!

Le sénateur Gauthier: Le ministre pourrait-il ajouter que, tenant ce genre de propos, M. Cherry ne contribue nullement à l'unité canadienne? Il sème plutôt la division.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme nous le savons tous, la SRC est une société d'État indépendante qui est responsable de sa programmation et de ses opérations. Je crois que la SRC s'est déjà formellement dissociée des propos de M. Cherry. Je suggère à l'honorable sénateur d'adresser ses commentaires à la SRC et à son ombudsman. Ils se sont engagés à enquêter immédiatement sur cet incident.

Plus particulièrement, je me ferai un plaisir d'appeler le président de la SRC pour lui faire part des observations de l'honorable sénateur, que j'appuie d'ailleurs.

L'AGRICULTURE ET L'AGROALIMENTAIRE

L'ENCÉPHALOPATHIE SPONGIFORME BOVINE—LES INCIDENCES SUR LE COMMERCE DU BÉTAIL

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je veux poser une question au sujet du problème très grave de la maladie de la vache folle. J'ai informé le leader du gouvernement à la Chambre que je poserais cette question qui, j'en suis certain, intéresse tous les sénateurs. La gravité de la situation s'amplifie chaque jour.

Une nouvelle génération de veaux voit le jour au moment même où nous sommes réunis ici. Dans un mois et demi, il y aura environ 50 p. 100 plus de bétail dans ce pays qu'il n'y en a maintenant. Cela va accentuer le problème des éleveurs qui doivent nourrir ce bétail. Que feront-ils au sujet du fourrage et de tout le reste? La situation est très grave. Je sais que tous les honorables sénateurs en sont conscients.

Ma question est très simple: le ministre pourrait-il faire le point pour nous sur la façon dont le gouvernement évalue la situation? Les éleveurs ont déjà perdu environ 3 milliards de dollars. Nous devons examiner toutes les façons possibles de régler ce problème.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne puis qu'abonder dans le sens de la dernière phrase de l'honorable sénateur. Il faut avoir recours à tous les moyens possibles pour régler cette question.

(1450)

J'ai appris que la consommation de bœuf canadien avait augmenté dans une proportion appréciable. Je crois que nous sommes tous les deux d'accord pour admettre que les consommateurs canadiens font tout ce qu'ils peuvent pour soutenir l'élevage de bovins. Je pourrais ajouter que, ces derniers temps, je suis allé bien plus souvent chez Hy's que je n'en avais l'habitude.

On traite de cette question dans le cadre de réunions avec les représentants des provinces, car, comme le sénateur Gustafson le sait, il s'agit d'un programme fédéral-provincial. Bien que les divers gouvernements aient injecté 700 millions de dollars, le milieu de l'élevage bovin ne sait pas comment évaluer son marché potentiel et il pourrait produire des surplus, ce qui entraînerait donc des pertes. En revanche, si le producteur n'est pas en mesure de fournir un produit neuf au marché en temps opportun et que les Américains ouvrent la frontière aux bovins sur pied — ce en quoi consiste, comme le sénateur Gustafson le sait, l'objectif du gouvernement fédéral et des provinces touchées — le marché pourrait bien ouvrir sans que l'on puisse l'approvisionner en produits canadiens avant l'expiration d'un nouveau cycle.

Je suis très conscient du problème et j'informerai le sénateur Gustafson dès que possible.

Le sénateur Gustafson: Je remercie le sénateur Austin pour sa réponse.

Honorables sénateurs, je me suis entretenu par téléphone avec des agriculteurs depuis un jour ou deux. L'un des plus graves problèmes auxquels ils font face tient au fait que, comme on les a encouragés à agrandir leurs troupeaux, un grand nombre d'entre eux ont emprunté de l'argent dans ce but. Or, le prix actuel des bêtes qu'ils ont achetées est beaucoup moins élevé. Selon ce qu'on me dit, il varie de 1,20 $ à 60 ¢ la livre.

La situation continue de se détériorer. Un éleveur m'a dit que l'élevage, c'en est vraiment fini pour lui, ce qui est très grave. On ne peut en blâmer personne. Je crois que le gouvernement canadien a fait un très bon travail et que le ministère de la Santé a fait lui aussi un très bon travail en vue de rassurer la population que la viande de bœuf est aussi sûre que possible. Je crois que l'ensemble de la situation est exagéré à l'excès.

Plusieurs réunions de haut niveau se sont tenues entre les représentants des gouvernements, dont le ministre de l'Agriculture. Le premier ministre a rencontré le président des États-Unis. À la suite de ces réunions, l'ambassadeur du Canada aux État-Unis, Michael Kergan, a tenu une séance d'information à Washington pour indiquer que, malgré l'opposition de certains éleveurs de bovins américains à la reprise du commerce des bovins sur pied, le Canada ne rencontre pas vraiment d'obstacles insurmontables à Washington pour obtenir la levée de l'interdiction actuelle.

Cela semble bien encourageant. L'ambassadeur parlait-il de quelque chose que nous ignorons?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, tout comme le sénateur Gustafson, je n'ai aucune idée des circonstances auxquelles l'ambassadeur Kergan faisait référence. Je vais tenter d'obtenir des précisions à cet égard sans délai.

Le sénateur Gustafson: Il y a certaines solutions possibles à ce problème et elles ont probablement fait l'objet d'une étude. Comme nous le savons bien, la solution la plus importante vise l'ouverture de la frontière. Si les frontières restent fermées, le marché du boeuf pourrait bien changer à jamais. Une autre solution pourrait consister à assurer le traitement du boeuf au pays et à trouver de nouveaux marchés à l'échelle internationale.

Le ministre pourrait-il tenter de savoir si ces options sont prises en compte?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je m'informerai personnellement de ces questions auprès du ministre de l'Agriculture dès qu'il me sera possible de le faire.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LES RELATIONS ENTRE LE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS—LES COMMENTAIRES DANS LES MÉDIAS

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse également au leader du gouvernement au Sénat.

Le sénateur Gauthier a parlé des torts que certains propos désobligeants ont causé. Notre revue nationale Maclean's a publié ce qui suit en page couverture: «Les Canadiens font savoir à Bush qu'ils aimeraient bien qu'il soit défait», en plus d'un article destructeur sur nos relations avec les Américains.

Je voulais faire une déclaration officielle à ce sujet aujourd'hui, mais les Déclarations de sénateurs étaient réservées au sénateur Chalifoux. À mon avis, les médias doivent assumer une plus grande part de responsabilité. Tout cela est très préjudiciable. Nous devons traiter avec les Américains dans le dossier du bois d'oeuvre, de l'ESB et autres, mais nous publions dans le Maclean's une déclaration qui dit: «Nous espérons que vous serez défait.» Je ne suis pas certain de vouloir entraver la liberté de la presse, mais si les Canadiens ne deviennent pas plus responsables, les relations entre le Canada et les États-Unis continueront de se détériorer.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous proposer des façons d'influencer les Canadiens qui ont une certaine responsabilité à l'égard du bien-être de ce pays pour garantir qu'une telle situation ne se représentera jamais?

C'est tellement étrange que je ne suis pas certain qu'on puisse trouver une réponse à tout cela.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis impressionné par le fait que le sénateur St. Germain soit arrivé à lire le numéro de cette semaine de Maclean's aussi tôt. Je le réserve habituellement pour le vol de retour à Vancouver, que j'espère prendre ce soir ou demain.

Bien évidemment, les médias sont libres d'exprimer leurs opinions, même si elles ne concordent pas avec celles du gouvernement, de l'opposition, ou avec l'intérêt du Canada. Nous ici et la population canadienne avons le droit de ne pas être d'accord et d'exprimer ce désaccord publiquement.

Le sénateur St. Germain a commencé à faire connaître ses préoccupations. Si d'autres les partagent, ils devraient participer au processus.

LA DÉFENSE NATIONALE

L'AFGHANISTAN—L'UTILISATION DE LA JEEP ILTIS

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai une question pour le leader du gouvernement au Sénat. Dans le cadre de la rotation des effectifs, nous envoyons en ce moment de nouvelles troupes en Afghanistan et le premier ministre a indiqué que nous allons laisser dans ce pays 500 membres des Forces canadiennes. Sont-ils appelés à connaître le même sort que ceux que nous avons laissés à Hong Kong et sur les côtes de l'Europe à Dieppe? J'espère que le gouvernement ne laissera pas ces troupes là-bas.

Le leader du gouvernement peut-il nous préciser l'état actuel des troupes canadiennes en Afghanistan? Utilisent-elles la jeep Iltis à l'extérieur des limites de leur camp à Kaboul? Quand le véhicule blindé léger Wolf arrivera-t-il là-bas? En raison de l'importance de la deuxième partie de cette question, j'apprécierais, outre la réponse verbale du ministre, le dépôt d'une réponse écrite.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas en ce moment l'information qui me permettrait de répondre à la question de l'honorable sénateur. Je me ferai un plaisir de rechercher l'information qu'il a demandée et de lui donner une réponse écrite.

(1500)

Cependant, on me dit que le projet de VULR permet d'accélérer la livraison des 100 premiers véhicules du modèle militaire normalisé, dotés de systèmes blindés, qui remplaceront quelques-uns des véhicules Iltis actuellement utilisés en Afghanistan, et il est prévu que 60 G-Wagen seront en Afghanistan d'ici le début de mars.

Le sénateur Forrestall: J'en suis heureux, mais certainement pas autant que le seront les troupes en mission en Afghanistan. Dans un mois, nous serons au début de mars. Je sais gré au ministre de s'engager à déposer une réponse écrite à cette question.

L'AFGHANISTAN—L'ENQUÊTE SUR LA MORT DU CAPORAL JAMIE MURPHY

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous renseigner sur l'évolution de l'enquête concernant la mort du caporal Jamie Murphy — plus précisément nous dire si des échantillons d'ADN ou d'autres éléments de preuve judiciaires ont été prélevés sur le cadavre du kamikaze? A-t-il été identifié? S'agissait-il d'Abdullah Khadr? Les résultats de l'enquête seront-ils rendus publics? Dans l'affirmative, le leader a-t-il une idée du moment où ils seront rendus publics?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la meilleure façon de répondre à ces questions est de donner des réponses écrites lorsque nous aurons les renseignements.

[Français]

LE PROGRAMME D'ÉCHANGE DE PAGES AVEC LA CHAMBRE DES COMMUNES

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais vous présenter un page qui nous rend visite de la Chambre des communes Marie Chantal Thériault, de Frederiction, au Nouveau-Brunswick, est inscrite à la faculté des affaires publiques et de la gestion des politiques à l'Université Carleton et se spécialise en développement international. Bienvenue au Sénat du Canada.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

LE DISCOURS DU TRÔNE

MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Trenholme Counsell, appuyée par l'honorable sénateur Massicotte, tendant à l'adoption d'une Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la troisième session de la trente-septième législature.—(2e jour de la reprise du débat)

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, le discours du Trône renferme plusieurs promesses de programmes et d'initiatives à l'intention des Autochtones du Canada. On a fait grand cas de l'intérêt que le gouvernement s'est mis à montrer à l'égard des questions autochtones de même que de son engagement à améliorer le sort des membres des Premières nations. Toutefois, honorables sénateurs, d'autres discours du Trône renfermaient les mêmes promesses.

Trop souvent on a opposé aux Premières nations une attitude de confrontation au lieu de leur montrer un esprit de conciliation. La coopération avec les Premières nations et la nécessité de tenir compte de leur situation sont devenues des expressions à la mode qui se sont perdues dans les méandres de la rhétorique.

Le discours du Trône de 2001 renfermait des promesses afin d'aider les Autochtones à vivre dans les centres urbains, d'améliorer le logement et l'éducation des autochtones et d'accroître le soutien au développement des entreprises autochtones. Le dernier discours du Trône renferme plus ou moins les mêmes promesses, mais les vagues assurances du gouvernement donneront-elles lieu à des changements importants pour les Autochtones? À en juger par le discours de lundi, malheureusement pas.

Le chapitre du discours du Trône portant sur les Premières nations fait beaucoup ressortir la nécessité de rehausser la gouvernance au sein des communautés autochtones, particulièrement avec l'annonce de la création d'un centre indépendant sur le gouvernement des Premières nations.

Nous savons que le gouvernement fédéral compte présenter des projets de loi mettant en œuvre les deux accords sur l'autonomie gouvernementale qui ont été passés. Le projet de loi concernant l'accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank devra être présenté de nouveau alors qu'un projet de loi sur l'autonomie gouvernementale et les revendications territoriales de la première nation de Dogrib dans les Territoires du Nord-Ouest devra être présenté pour la première fois.

Le gouvernement avait déjà annoncé qu'un projet de loi controversé et très impopulaire sur la gouvernance des Premières nations ne reviendrait pas au Parlement au cours de la présente session. La décision du premier ministre de ne pas présenter de nouveau le projet de loi C-7, Loi sur la gouvernance des Premières nations, a été donnée comme preuve de la nouvelle volonté du gouvernement fédéral de consulter les groupes autochtones sur les mesures législatives qui les touchent. Même s'il n'a pas été adopté, l'animosité et la méfiance causées par la promotion de ce projet de loi ont eu un effet extrêmement néfaste sur la relation entre le gouvernement fédéral et nos Premières nations. Je crois aussi que cela a posé des problèmes à l'ancien chef de l'APN, le chef Matthew Coon Come.

Le nouveau gouvernement est impatient de montrer comment il est différent du gouvernement Chrétien en préconisant une approche axée sur la collaboration en ce qui concerne la législation touchant les Autochtones. En fait, cette approche n'a pas été constante jusqu'à maintenant.

Le discours du Trône ne faisait pas mention du fait que M. Martin présentera à nouveau le projet de loi C-19, Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations. Cette mesure est morte au Feuilleton l'automne dernier, ayant atteint l'étape de l'étude en comité à l'autre endroit. La majorité des Premières nations s'est clairement opposée à ce projet de loi, qui est censé régler les problèmes de gestion et de reddition de comptes au sein des bandes. Selon les Premières nations, le nouveau système prévu dans le projet de loi est imposé aux bandes et il empiète sur leurs droits tout en réduisant les obligations du gouvernement fédéral. Le nouveau ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a inclus ce projet de loi lorsqu'il a annoncé son programme législatif pour la nouvelle session parlementaire le mois dernier.

Compte tenu de la préoccupation du premier ministre à l'égard des Autochtones et de son désir avoué de collaborer avec eux et de les consulter, où donc est la recherche d'une véritable consultation avec les Autochtones sur cette question? Dans ce cas, comme dans bien d'autres, il semblerait que ce gouvernement libéral continue de faire les choses comme avant.

Honorables sénateurs, dans le discours du Trône, on qualifie les conditions de vie de nombreux Autochtones de «honteuses». C'est tout à fait exact. C'est triste à dire, mais peu de gens le nieraient. Il faut certainement prendre la crise du logement chez les Autochtones au sérieux et non la traiter à la légère. Toutefois, entre reconnaître l'existence d'un problème et trouver les moyens pour le corriger, l'écart est grand. Malheureusement, la crise du logement, l'un des plus grands défis des Autochtones, n'a pas été du tout mentionnée dans le discours du Trône.

L'an dernier, la vérificatrice générale a reproché au gouvernement fédéral la grave pénurie de maisons sur les réserves. Il en manquerait 8 500 même si le gouvernement fédéral a investi 3,8 milliards de dollars dans ce domaine au cours de la dernière décennie. La vérificatrice générale a également observé que 44 p. 100 des 89 000 nouvelles maisons sur les réserves du Canada ont besoin d'être rénovées.

L'Assemblée des Premières nations a exhorté le gouvernement fédéral à modifier en profondeur la façon dont il aborde la question du logement chez les Autochtones. Phil Fontaine, qui est à la tête de l'APN, a proposé la nomination d'une «autorité nationale en matière de logement qui serait chargée d'établir des normes, d'adopter des codes et d'élaborer les composantes régionales». Selon l'Assemblée des Premières nations, les Autochtones qui vivent dans les réserves devraient pouvoir devenir propriétaires de leur maison. Les Autochtones ne veulent pas se contenter d'un simple transfert de fonds, mais réclament une agence du logement dirigée par les Autochtones. De toute évidence, le gouvernement a fort mal géré la question du logement chez les Autochtones, et ce programme a désespérément besoin d'être réformé. Les nombreuses familles Autochtones qui vivent au quotidien dans ces conditions honteuses ont sûrement été amèrement déçues de constater que le discours du Trône n'a pas indiqué comment le gouvernement pourrait s'y prendre pour améliorer leur milieu et leur qualité de vie.

Le gouvernement s'est engagé à donner plus d'ampleur à la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain, de concert avec les provinces et les municipalités qui le désirent. Presque la moitié des Autochtones du Canada vivent de nos jours dans les centres urbains et on les oublie constamment. Dans le dernier budget, le gouvernement promettait d'investir 17 millions de dollars sur une période de deux ans dans des projets pilotes visant à combattre la pauvreté chez les Autochtones vivant en milieu urbain. Cette somme était nettement insuffisante et illustrait bien les vieux concepts que véhicule encore le gouvernement en ce qui a trait à la façon et aux lieux où les Autochtones devraient vivre au Canada. Reste à savoir à combien s'élèvera le soutien financier que le gouvernement accordera à cette initiative.

Le gouvernement a aussi promis de mettre un terme aux disputes juridiques qui ont pour effet de priver de services les Autochtones vivant en milieu urbain, mais il n'a pas expliqué comment il s'y prendrait.

Honorables sénateurs, il y a actuellement autant d'Autochtones qui vivent dans les grandes villes canadiennes qu'il y en a dans toutes les réserves partout au Canada. Une forte proportion de ces Autochtones n'ont jamais vécu dans des réserves. Le financement à court terme ne répondra pas aux besoins des Autochtones vivant en milieu urbain. La nouvelle stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain doit aller de pair avec une aide financière stable et à long terme si l'on veut vraiment que la situation change.

(1510)

Les Métis, mon peuple, sont un autre groupe souvent oublié dont il est fait mention dans le discours du Trône. En raison de la décision rendue l'an dernier dans l'affaire Powley, il était pratiquement impossible que le gouvernement passe sous silence les droits des Métis. Cependant, l'engagement du gouvernement à travailler avec les autres ordres de gouvernement et avec les dirigeants métis afin d'intégrer les Métis dans ses politiques est lui aussi très vague.

Le ministre des Finances a une responsabilité envers les Métis et il a dit que cette ligne du discours du Trône où il en est fait mention pourrait annoncer un soutien financier de la part du gouvernement fédéral. Nous devrons attendre le dépôt du budget pour vérifier si tel est le cas.

Dans le discours du Trône, le gouvernement a promis d'engager les ressources nécessaires afin d'assurer l'approvisionnement en eau potable des communautés des Premières nations. La plupart des 1 300 usines de traitement des eaux des réserves autochtones du Canada laissent à désirer. Certaines présentent des problèmes mineurs, d'autres, de graves menaces pour la santé. Robert Nault, l'ex-ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, a reconnu que le gouvernement fédéral avait d'importantes obligations et que le ministère n'avait jamais financé efficacement la formation des responsables des usines de traitement des eaux dans les réserves. Tous les Canadiens sont parfaitement au courant des conséquences que pourrait avoir pareille inaction, notamment depuis la tragédie qui a frappé Walkerton, en Ontario. On estime qu'il faudra un engagement substantiel d'environ 800 millions de dollars en matière de financement pour remplir cette promesse. Encore une fois, il faut attendre le budget pour voir le niveau d'engagement de la part du gouvernement en vue de véritablement régler ce problème.

Honorables sénateurs, je doute sérieusement qu'il y ait au Canada un groupe qui ait été plus calomnié et qui ait fait l'objet de plus de vaines promesses que nos Premières nations. Le discours du présent gouvernement ressemble fort à celui de son prédécesseur. Néanmoins, il a présenté sa propre série de promesses à nos peuples autochtones. J'ose espérer que ce nouveau gouvernement entend, en toute bonne foi, concrétiser ses promesses et ne pas laisser tomber encore une fois les Premières nations.

Honorables sénateurs, mon travail au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et mes déplacements d'un océan à l'autre, au Canada, y compris dans les principales villes de l'Ouest — je suis né au Manitoba, mais je vis actuellement en Colombie-Britannique — m'ont permis de constater que nous ne pouvons ignorer la condition lamentable de nos Autochtones. Nous intervenons pour venir en aide aux pays du tiers-monde alors que certains de nos concitoyens vivent dans des conditions dignes du tiers-monde. Pourquoi? Pourquoi fait-on des promesses qu'on ne tient pas? Ce n'est pas une question partisane. Cette situation dure depuis cent ans déjà.

[Français]

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, le discours du Trône contenait un message inspirant pour tous les Canadiens et les Canadiennes. Il établissait «un programme ambitieux pour un pays ambitieux».

Ce message ressemblait à la célèbre remarque de Wilfrid Laurier voulant que le XXe siècle appartiendrait au Canada. Dans ses propos, Son Excellence la Gouverneure générale a témoigné de la détermination du gouvernement à bâtir un Canada encore plus fort tant ici qu'à l'étranger.

Nous avons entendu ce discours décrire les objectifs sociaux, économiques, éducatifs, entrepreneuriaux et politiques qui devront être atteints pour accomplir cette destinée tracée pour notre pays. Comme Son Excellence l'a souligné: «Pour atteindre ses objectifs et mettre en valeur ses réalisations, il faut du temps.»

Honorables sénateurs, des objectifs ont été fixés pour faire progresser notre pays, qu'il s'agisse d'améliorer les services de santé, de prendre soin de nos enfants, d'aider les personnes handicapées à surmonter les obstacles auxquels elles doivent faire face ou d'adopter une nouvelle approche pour renforcer les peuples autochtones.

Sous le volet du progrès, ce discours a présenté un nouveau pacte pour les municipalités afin de les aider à résoudre leurs problèmes particuliers tout en établissant des relations de travail plus solides avec les provinces et les territoires. Ce discours a promis une gestion prudente des fonds publics, une transparence et la reddition de comptes.

Ce discours a assuré un soutien accru à nos militaires, à la recherche et au développement, à l'apprentissage continu, à l'environnement, au développement durable et à la sécurité nationale. Nous avons devant nous un plan pour jouer un rôle distinctif sur la scène internationale.

Honorables sénateurs, peu importe comment nous nous définissons, peu importe nos aspirations et nos réalisations, nous demeurons dans une grande mesure ce que les autres pensent de nous; oui, la perception devient très souvent la réalité. Le pouvoir des nouvelles communications instantanées fait en sorte qu'il nous faut, pour atteindre les objectifs identifiés dans le discours du Trône, exercer une plus grande influence sur la scène mondiale.

Pour exercer cette influence mondiale, nous devons répondre aux défis et aux possibilités qui s'ouvrent à nous à l'étranger, impliquer un plus grand nombre de Canadiens et de Canadiennes pour faire face à ces défis. En fait, je suis d'avis qu'il nous faut partager nos valeurs; souvent, la meilleure façon de les faire connaître, de les faire respecter et de les renforcer, c'est de déployer et de multiplier des efforts concertés afin d'expliquer aux autres qui nous sommes par nos réalisations, nos succès et notre souhait de vivre sur une planète paisible.

L'internationalisation de nos rapports prend diverses formes, comme les efforts pour la paix que nous déployons à l'échelle internationale, notre diplomatie, les échanges d'étudiants, les voyages d'affaires, les associations parlementaires, les exportations, les investissements à l'étranger, le tourisme, et j'en passe. Aucune occasion ne doit être perdue de promouvoir les intérêts de notre pays.

Lundi dernier, j'ai noté avec beaucoup d'intérêt que le discours du Trône reconnaissait la vitalité et l'excellence de notre vie culturelle et que celle-ci jouera un rôle clé dans nos relations internationales, qu'elle aide à asseoir notre réputation à l'étranger, à refléter qui nous sommes et à partager nos valeurs.

J'aimerais prendre un instant pour rappeler les commentaires de Son Excellence à cet égard:

Les artistes et les entreprises culturelles du Canada comptent parmi nos meilleurs ambassadeurs; ils constituent en outre un élément de plus en plus dynamique de l'économie du savoir. Leur travail est le miroir de notre société et accroît l'héritage que nous léguerons aux générations futures.

Pour les professionnels de la culture et des communications au Sénat — j'en aperçois quelques-uns aujourd'hui —, pour les champions du contenu canadien, il est donc réconfortant de constater que le gouvernement modernisera les politiques dans ce domaine et renforcera nos institutions culturelles fédérales. L'un des mécanismes qui s'offrent à nous pour ce faire sera certainement les possibilités technologiques ouvertes par l'ère du numérique, possibilités qui devraient nous permettre d'afficher plus souvent notre diversité régionale et notre mosaïque culturelle.

Honorables sénateurs, j'ai eu l'honneur de présider le comité qui a mené deux études, — l'une en 1997 et l'autre en 1999 —, et les rapports déposés faisaient mention des relations inévitables qui existent entre les technologies de communications, d'une part, et les arts et la culture, d'autre part.

Les rapports ont clairement montré l'impact que la technologie avait sur la culture, non seulement sur la conception et la production du produit, mais aussi sur sa diffusion. Les technologies ne connaissent pas de frontières et le Canada constitue l'un des pays les plus avancés de la planète sur le plan technologique. Il serait donc à notre avantage de tirer profit de cette situation pour augmenter la production de nos produits canadiens et la promotion de ces derniers dans les autres pays.

[Traduction]

Honorables sénateurs, aujourd'hui, lorsqu'on parle d'arts et de culture, on ne se limite pas uniquement à ce qui est présenté dans une galerie, un musée ou à une pièce de Shakespeare ou de Molière. En fait, Statistique Canada relève 43 professions distinctes qui entrent dans la catégorie des «travailleurs de la culture». Pour en donner une définition large, la culture canadienne est vaste et comprend la musique, la danse, la peinture, l'écriture, les sports, l'architecture, le cinéma, la radio et la télédiffusion, l'aménagement paysager, voire nos hivers longs et rigoureux. Voilà ce qui définit qui nous sommes et ce que nous représentons.

(1520)

Notre gouvernement adopte une approche à volets multiples pour amplifier la présence canadienne sur la scène mondiale et accroître ainsi la visibilité du Canada et, partant, son influence.

Premièrement, comme je l'ai mentionné, la technologie et les télécommunications ont créé de nouvelles avenues pour la production, la promotion et la diffusion des arts, de la culture et des spectacles. Nos écrivains, musiciens, comédiens, réalisateurs et producteurs se classent parmi les premiers dans leurs domaines respectifs, partout sur la planète, mais sans la diffusion à grande vitesse, on pourrait prendre du retard et rester inconnus pour le reste du monde.

Notre littérature n'est pas la moindre. Au panthéon des auteurs, Margaret Atwood, Carol Shields, Marie Laberge et Marie-Claire Blais brillent de tous leurs feux. Dans le domaine de la musique, Shania Twain et Céline Dion ont atteint les sommets de la gloire internationale.

La liste des talents professionnels des Canadiens est absolument prodigieuse. Les talents en émergence chez nos jeunes d'un océan à l'autre méritent qu'on investisse pour assurer leur plein développement.

C'est la convergence entre Internet et les autres médias qui fera connaître les noms des Canadiens dans tous les coins du globe et assurera le développement de la prochaine génération de vedettes canadiennes.

Deuxièmement, la culture fait partie de notre tissu social et notre tissu social fait souvent partie intégrante de nos produits culturels. Honorables sénateurs, permettez-moi de vous donner un exemple. L'Inukshuk est un outil qui sert à baliser les routes dans le Nord; maintenant, c'est devenu une oeuvre d'art, une sculpture. Notre tissu social comporte plusieurs strates et plusieurs dimensions, depuis les autochtones jusqu'aux immigrants venus de France, d'Angleterre et d'autres pays européens, qui ont ouvert notre pays grâce à leur courage, leur ardeur au travail et leurs sacrifices. Le Canada accueille de plus en plus d'immigrants venus de différentes régions du globe, notamment la Chine, l'Inde, le Proche-Orient et l'Afrique. À leur façon, ils contribuent à l'évolution du Canada et de son histoire, une histoire qui progresse sans cesse et qui mérite d'être racontée et répétée chez nous et partout à l'étranger.

Troisièmement, la culture est un moteur économique et un pilier des relations internationales. En nous révélant au monde, nous et nos valeurs, par nos artistes, notre art, notre littérature et notre cinéma, nous ouvrons des portes à nos entrepreneurs, à nos hommes et femmes d'affaires et à nos exportations.

Les États-Unis sont de loin notre plus important partenaire commercial. Nous savons que nos artistes y réussissent fort bien. Avez-vous vu combien de spectateurs se bousculent aux spectacles du Cirque du Soleil à Las Vegas? Il y a des débouchés partout. Je crois que nos ambassadeurs culturels peuvent jouer un rôle majeur pour multiplier les débouchés et ouvrir des marchés.

Le discours du Trône a insisté sur le rôle de l'exportation et de l'investissement, sur l'établissement de liens économiques plus étroits avec d'autres régions du monde. Fait significatif, une plus grande attention sera accordée aux puissances économiques qui sont en train de s'affirmer: la Chine, l'Inde, le Brésil.

Dans une allocution prononcée il y a près d'un an, l'ambassadeur du Canada en Chine, Joseph Caron, a bien situé l'importance croissante de la culture comme produit d'exportation:

Les artistes et les interprètes canadiens sont de plus en plus présents en Chine, en réponse aux changements de politiques et du marché culturels de ce pays. Ceux qui désirent s'engager dans la scène culturelle chinoise bénéficieront non seulement de nouvelles expériences auprès des artistes et du public chinois, mais se verront reconnus dans un environnement culturel qui occupe une importance grandissante en Asie et dans le monde.

Nos talents sont légendaires. Ils permettent à d'autres secteurs de profiter des percées qu'ils font à l'étranger. On peut même dire que le Canada dépend plus que tout autre pays industrialisé des marchés internationaux.

Honorables sénateurs, nous créons du contenu canadien de la plus haute qualité, mais en quantité insuffisante. Nous avons tout ce qu'il faut pour en faire la promotion, mais nous n'investissons pas autant que nous le devrions sur la commercialisation à l'étranger. Le discours du Trône prévoit un engagement à l'égard des productions canadiennes et du secteur des exportations culturelles. Nous savons tous que la culture n'a pas moins besoin que d'autres secteurs de l'économie de l'aide des ministères et organismes fédéraux. Nous avons un avantage concurrentiel. Ne le laissons pas se perdre.

Honorables sénateurs, en guise de conclusion, je voudrais souligner que, dans sa réponse au discours du Trône, le premier ministre a dit du Canada qu'il débordait de créativité artistique. Ce n'était pas des paroles en l'air. C'était une simple constatation de l'abondance de talents qu'on trouve dans les arts et la littérature au Canada, dans nos films, dans notre musique, dans nos théâtres et dans notre télévision. Nos produits culturels, qu'il s'agisse de sports ou de divertissement, d'architecture ou d'aménagement paysager, sont souvent les premières impressions que nous laissons de nous. Ils constituent la passerelle vers notre présence internationale, notamment dans les pays émergents.

Les créateurs de contenu culturel sont en fait nos ambassadeurs. Ce sont eux qui sont en mesure de paver la voie vers la paix et la liberté, le respect des droits de la personne et la primauté du droit, la diversité, le respect et la démocratie, toutes des valeurs qui, comme le premier ministre l'a dit, constituent les fondements de l'expérience du Canada et de notre succès. Ils peuvent donc être notre exportation la plus précieuse.

Honorables sénateurs, je vous remercie de votre attention et du soutien que vous accordez à nos artistes et à nos fournisseurs culturels.

[Français]

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, il y aura, dans quelques mois, 137 ans que notre pays existe dans la forme que nous lui connaissons aujourd'hui. J'entendais l'énumération que faisait le sénateur Poulin et, à bien des égards, il nous faut être fiers de nos réalisations.

Le discours du Trône de lundi dernier m'amène à me poser une question: abordons-nous une ère nouvelle de coopération réelle entre le pouvoir fédéral et les pouvoirs de nos partenaires provinciaux et territoriaux?

Ne perdons pas de vue qu'il y a 137 ans, un groupe de coloniaux britanniques ont décidé de mettre en commun leur espoir de construire et d'élaborer une vision. Cela a fonctionné. Pourquoi? Parce que plusieurs ont dit à ceux qui voulaient que cet État — ce nouveau pays — soit un pays unitaire que ce n'était pas la voie à suivre et que, compte tenu des droits — je pense entre autres aux Québécois — qui nous ont été accordés par la Couronne britannique après la guerre de la Conquête, un gouvernement unitaire est inacceptable pour nous; nous sommes prêts à adhérer à une fédération et voici quelles sont nos exigences.

Les Québécois n'étaient pas les seuls; les représentants des provinces atlantiques, voyant bien que la pluralité démographique de l'Ontario pourrait l'emporter dans un gouvernement unitaire, ont eux aussi appuyé les Québécois.

(1530)

Aujourd'hui, près de 137 ans plus tard, abordons-nous une nouvelle ère de coopération entre le pouvoir fédéral et les pouvoirs provinciaux?

Dans son discours du Trône, qui inaugurait le quatrième gouvernement de l'ère Chrétien — il faut bien l'appeler par son nom —, la Gouverneure générale du Canada a fait part de l'intention du nouveau premier ministre d'améliorer les relations avec les provinces.

Ainsi, on lit avec étonnement, dans ce texte hautement électoraliste:

Le renouveau démocratique n'existe que si Ottawa est à l'écoute de ce que disent les provinces et territoires — toutes les régions du pays — et s'il adopte de nouvelles façons de travailler avec l'ensemble, au nom de tous les Canadiens et Canadiennes.

Plus loin:

Les champs de compétence doivent être respectés. Toutefois, dans le quotidien, les Canadiens ne passent pas leur temps à se demander quel gouvernement fait ceci ou cela. Ils attendent à juste titre que leurs divers ordres de gouvernement collaborent et se concertent en vue du bien commun, chacun mettant à profit ce qui fait sa force.

Certains croient qu'il s'agit d'une ère nouvelle dans le domaine de la coopération entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Je vous avouerai que je ne suis pas en accord avec ces personnes. Je qualifierais plutôt ces phrases éloquentes de voeux pieux.

Le Parti conservateur du Canada a depuis longtemps adopté ce principe proposé par la Gouverneure générale. En 1867, c'est le Parti conservateur du Canada qui a favorisé et mis de côté ses appréhensions partisanes pour adhérer à une coalition qui a mené à la création de notre pays.

De 1984 à 1993, le premier ministre Mulroney a mis de côté plusieurs aspirations qui seraient normalement celles du premier ministre d'un gouvernement central fort pour améliorer les relations entre le gouvernement fédéral et ses partenaires provinciaux, et il en a payé le prix. En 1997, le Parti progressiste-conservateur du Canada avait, dans sa plate-forme, le Conseil de la fédération, ce concept auquel ont adhéré, il y a quelques mois, toutes les provinces du Canada.

Mon parti a démontré — et l'histoire nous appuie — que nous avons, tout au long de notre histoire, tenté de protéger l'esprit de l'accord qu'avaient en tête les Pères de la Confédération.

L'actuel premier ministre du Canada, à l'époque où il était ministre des Finances, n'a pas respecté les principes fondamentaux qui constituent pourtant les fondements du pacte canadien, qui sont, entre autres, la coopération entre les partenaires, le respect des partenaires, l'égalité des partenaires et le respect de la diversité régionale, notamment celle du Québec.

Rappelons-nous, honorables sénateurs, les compressions unilatérales des paiements de transferts aux provinces dans des secteurs aussi névralgiques que la santé et l'éducation postsecondaire, dans le but de réduire le déficit fédéral.

Rappelons-nous l'envahissement marqué des compétences provinciales dans les domaines de la santé, des politiques sociales — notamment au sujet des congés parentaux — et de l'éducation postsecondaire — pensons aux bourses du millénaire.

Rappelons-nous, honorables sénateurs, la négation de l'existence d'un déséquilibre fiscal avec les provinces, les retards importants dans les négociations visant la modernisation nécessaire de la formule de calcul de péréquation.

Enfin, rappelons-nous la forte possibilité du procureur général du Canada d'aller en appel de la récente décision de la Cour d'appel du Québec dans l'affaire des congés parentaux.

Grâce à Jean Chrétien et à Paul Martin, les relations entre le gouvernement fédéral et les provinces sont, aujourd'hui, dans un piètre état. Notre pays mérite-t-il d'aborder une nouvelle ère de coopération? La réponse est assurément oui. Abordons-nous, réellement, une ère de coopération? J'en doute.

Les frictions avec les provinces — et pas uniquement le Québec, mais avec toutes les provinces — furent l'élément dominant qui a marqué les relations entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux dans les années 90, si l'on considère la façon cavalière avec laquelle le gouvernement libéral a géré ses relations avec ses partenaires provinciaux. Les a-t-il traités en partenaires? Non.

À cet égard, il est troublant de constater l'arrogance dont fait preuve ce gouvernement, dans un but ultime de contrôle, afin de monter les provinces les unes contre les autres.

Après dix ans de régime libéral, peut-on vraiment blâmer les premiers ministres provinciaux de se méfier constamment d'Ottawa, qui utilise à outrance son pouvoir de dépenser pour imposer ses vues?

C'est un peu comme si la pérennité du système fédéral canadien reposait principalement sur une campagne de relations publiques visant à assurer une visibilité de plus en plus importante du gouvernemental fédéral, plus particulièrement au Québec.

Je refuse, honorables sénateurs, d'adhérer à cette approche qui va à l'encontre de l'esprit sur lequel reposait — et repose toujours — le pacte canadien.

Les Canadiennes et les Canadiens méritent un gouvernement fédéral qui comblera et, surtout, qui respectera les besoins des différentes régions du pays, tout en renforçant l'unité nationale.

Pourtant, une lecture attentive du discours du Trône confirme le vieux dicton québécois — repris hier par le sénateur Lynch-Staunton — à l'effet que «plus ça change, plus c'est pareil».

En effet, ce discours avance des projets d'investissements dans de nouveaux programmes de bourses pour les étudiants universitaires, de financement des municipalités, de nouvelles places en garderie.

Honorables sénateurs, même si ces objectifs sont louables, personne ne s'oppose à l'augmentation de l'aide aux universitaires, personne ne s'oppose à l'augmentation du financement des municipalités et, encore moins, personne ne s'oppose à l'augmentation des places en garderie.

Honorables sénateurs, vous le savez, ces responsabilités relèvent des provinces. Concernant les municipalités, le discours du Trône mentionne que:

[...] le gouvernement du Canada est déterminé à instaurer un nouveau pacte à l'intention des municipalités canadiennes.

C'est ce que le texte dit: «déterminé à instaurer un nouveau pacte à l'intention des municipalités canadiennes». Il s'agit de la partie du discours la plus spécifique, et il s'agit aussi, malheureusement, d'une belle illustration d'un mauvais usage du pouvoir de dépenser.

Dans le texte, on fait référence aux provinces 12 fois — vous excuserez la mathématique simple, mais je ne peux passer à côté —, alors que dans le cas des municipalités, des collectivités ou des villes, des termes qui signifient la même réalité, ce chiffre grimpe à 20 fois!

(1540)

À deux reprises, le discours énonce la nécessité d'offrir un financement fiable, prévisible et à long terme pour les municipalités. On avance le chiffre qu'on a établi à sept milliards de dollars sur une période de dix ans. Alors que pour la santé, le gouvernement, dans ses intentions, s'est toujours refusé à mettre en oeuvre de tels principes.

Enfin, le discours comporte une affirmation à la fois nébuleuse et inquiétante pour les provinces. On y mentionne que, je cite:

Le nouveau pacte donne aux responsables municipaux une place véritable à la table où se décidera le changement dans la vie nationale.

Oui, les municipalités sont confrontées à des défis importants: infrastructures, criminalité, santé publique, drogue — j'en sais quelque chose — logement social et j'en passe, pour assurer notre bien-être ainsi que celui de nos enfants.

Doit-on blâmer uniquement les provinces pour la situation budgétaire dans laquelle plusieurs d'entre elles se trouvent actuellement? La réduction des transferts fédéraux aux provinces orchestrée par le nouveau premier ministre du Canada, à l'époque où il était ministre des Finances, a fait en sorte que les administrations provinciales, elles-mêmes engagées dans la lutte contre les déficits, ont transféré une série de nouvelles responsabilités aux municipalités, sans toutefois prévoir l'allocation de fonds supplémentaires ni l'octroi d'une certaine autonomie politique. Dans ce contexte, ces décisions ont eu des effets désastreux dans plusieurs grandes villes canadiennes.

Cela — et là est la question — légitime-t-il pour autant le droit du gouvernement fédéral du Canada de recourir à son pouvoir de dépenser pour aider directement les municipalités?

Rappelez-vous cette philosophie que j'ai énoncée tout à l'heure. Est-ce qu'on assure la pérennité du pouvoir central fédéral par un programme de visibilité? Je ne suis pas d'accord. Cela dit, on sait maintenant, grâce au discours du Trône, qu'Ottawa a de l'argent à dépenser dans les juridictions provinciales, notamment au Québec. Est-ce là la meilleure façon de respecter la différence des Québécois? Je vous pose la question.

Un citoyen canadien illustre a dit:

Dès lors, si un gouvernement dispose d'une telle surabondance de revenus qu'il entreprend d'assurer la partie du bien commun qui n'est pas de sa juridiction, la présomption se crée qu'un tel gouvernement a pris plus que sa part de la capacité taxable.

Qui est ce Canadien illustre? Quand a-t-il dit cette phrase? Elle a été écrite en 1957, par Pierre Elliott Trudeau.

Cela dit, on ne sait toujours pas comment le gouvernement de M. Martin va améliorer ses relations avec les provinces, notamment dans le domaine du financement de la santé. Quelle est cette table où se décide le changement dans la vie nationale? Où est cette table où il convie les municipalités? Dans ce discours, il n'est aucunement fait mention du Conseil de la fédération, auquel tous les premiers ministre provinciaux ont convié le partenaire fédéral.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Nolin, votre temps de parole est écoulé.

Le sénateur Nolin: Je demande votre patience pour terminer la lecture de mon discours.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: Oui.

Le sénateur Nolin: Je vous remercie, honorables sénateurs. Il n'est fait aucune mention de ce nouveau Conseil de la fédération. Il s'agit d'une solution pragmatique et réaliste pour renforcer l'union économique et sociale du Canada. Il s'agit d'un lieu idéal pour résoudre les problèmes dans les domaines de la santé, de l'éducation postsecondaire, du déséquilibre fiscal, du financement des municipalités et du commerce interprovincial. Voilà une responsabilité, une vraie juridiction fédérale: le commerce interprovincial.

Ce Conseil de la fédération, si tous les partenaires sont de bonne foi, peut — je l'espère — assurer le respect de la diversité régionale, de la différence du Québec, tout en renforçant l'unité nationale et la coopération. Ce Conseil de la fédération est un outil formidable qui nous permet de retourner aux principes que les Pères fondateurs avaient en tête, il y a 137 ans, et de les animer.

Honorables sénateurs, de ce côté-ci de la Chambre et, j'en suis convaincu, de chaque côté du Sénat, nous avons en tête de respecter cet esprit. Il ne faut pas seulement croire au fédéralisme, il faut — et vous serez d'accord avec moi — le mettre en pratique.

Nous devons tous rejeter un fédéralisme centralisateur, voire dominateur. Il faut rejeter un fédéralisme qui malheureusement a été non partenarial et non respectueux des partenaires provinciaux depuis les dix dernières années.

Laissez-moi terminer en citant une phrase tirée d'un discours prononcé par Georges-Étienne Cartier en 1865, quelques mois avant la Conférence de Québec au cours de laquelle les Pères de la fédération se sont entendus sur l'existence du Sénat et sur le partage des responsabilités. Voici ce qu'il disait:

Nul autre projet n'est possible que le système fédéral. Quelques-uns ont prétendu qu'il était impossible de faire fonctionner la Confédération par suite de différence de race et de religion. Ceux qui partagent cette opinion sont dans l'erreur. C'est tout le contraire. C'est précisément en conséquence de cette variété de races, d'intérêts locaux, que le système fédéral doit être établit et qu'il fonctionnera bien.

[Traduction]

L'honorable Percy Downe: Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je réponds aujourd'hui au discours du Trône. Je trouve particulièrement satisfaisant que le discours du Trône puisse porter si clairement sur les besoins et les aspirations des Canadiens. Et cette liberté découle des durs efforts qui ont été consentis afin que le gouvernement fédéral n'ait plus à financer l'économie par le déficit. Il est clair que nous avons fait beaucoup de chemin en peu de temps.

Il y a moins de 10 ans, notre économie était en déclin, notre déficit et notre dette croissaient, l'unité nationale était menacée et notre confiance s'effritait. Aujourd'hui, grâce à nos efforts collectifs, les Canadiens observent fièrement le succès remporté par notre pays. Les déficits ont été remplacés par des investissements économiques et sociaux, des baisses d'impôt et le remboursement de la dette.

En nous libérant des contraintes de l'endettement, même lorsque notre économie nationale était prospère, ainsi que des pressions constantes exercées par les dépenses excessives, j'estime que le Canada est entré dans une nouvelle phase.

Depuis un certain nombre d'années, une transformation sociale remarquable s'est produite au Canada. Si nous pouvons prendre part à cette évolution sociale, c'est dans une large mesure grâce à la discipline financière sur laquelle nous avons pris l'habitude de nous appuyer. Voilà pourquoi j'approuve l'énoncé du discours du Trône qui se lit comme suit:

Les Canadiens et Canadiennes ont déjà relevé ce défi. Ils ont épousé le changement avec une confiance nouvelle. Ils savent qui ils sont, ils savent ce qu'ils veulent. Ils veulent un gouvernement qui contribue à ouvrir la voie qu'ils désirent emprunter, un gouvernement qui batte la marche et qui les incite en outre à bâtir leur avenir.

Nous voulons que les gouvernements reflètent nos valeurs dans les gestes qu'ils posent, notamment qu'ils respectent notre volonté de vivre selon nos moyens, d'investir dans la mesure de ces moyens, et de préparer l'avenir.

Les Canadiens ne veulent pas qu'on se satisfasse du statu quo: ils en attendent davantage de leur gouvernement. Ils veulent un gouvernement capable de susciter le changement et d'établir un consensus national autour d'objectifs communs, un gouvernement qui a la sagesse d'aider chacun de nous à réaliser ces objectifs.

(1550)

D'importants engagements ont été pris à l'égard du système de soins de santé et il semble maintenant que d'autres milliards devront y être investis à brève échéance. Des programmes comme la prestation nationale pour enfants ont aidé des milliers de familles canadiennes et d'enfants en leur facilitant l'accès à des services et, dans beaucoup de cas, à des sommes additionnelles, ce qui leur a évité de tomber dans les affres de la pauvreté.

Tout cela étant dit, honorables sénateurs, nous devons veiller à ce que les avantages de cette nouvelle prospérité atteignent chaque région, chaque province, chaque communauté et chaque citoyen. Voilà pourquoi j'appuie l'énoncé suivant contenu dans le discours du Trône:

Nous voulons un Canada avec des assises sociales solides, où les gens sont traités avec respect, où ils sont épaulés au besoin, où personne n'est laissé pour compte. Nous voulons un pays où les Canadiens — les familles et les collectivités — ont les outils nécessaires pour trouver des solutions locales aux problèmes locaux.

J'estime que nous devons rechercher ensemble notre réussite sociale et économique, puisque celle-ci constitue un élément essentiel de la fibre de la société canadienne. Bien qu'il faille applaudir à de nombreux éléments du discours, j'éprouve certaines préoccupations en ce qui a trait tout particulièrement aux grandes municipalités et aux régions.

Il est indubitable que le Canada s'urbanise rapidement. Cette tendance est manifeste depuis de nombreuses années, et des arguments convaincants militent en faveur d'investissements fédéraux dans les municipalités.

Toutefois, honorables sénateurs, je voudrais faire une mise en garde. Je crains que le programme d'aide aux municipalités ne soit trop concentré sur la demi-douzaine de grands centres urbains que compte notre pays. Il est important de reconnaître le phénomène d'urbanisation, mais si on investit des ressources considérables au détriment des petites communautés, cela risque de nuire à la réalisation de leurs aspirations et de rendre moins attirantes les provinces moins prospères. C'est pourquoi un programme d'aide aux municipalités doit inclure l'ensemble des régions urbaines, grandes et petites.

Il m'apparaît évident, honorables sénateurs, que nous avons aussi l'obligation de protéger les besoins des intérêts minoritaires. Dans ce cas précis, je crois que nous devons veiller à ce que les grands ne l'emportent pas sur les petits et à ce que ces derniers continuent de jouir de la protection des grands. Par conséquent, je me félicite de l'intention du gouvernement de collaborer avec les municipalités canadiennes, mais étant moi-même originaire d'une communauté urbaine modeste mais prospère, Charlottetown, j'espère que le programme proposé par le gouvernement inclura les intérêts urbains nombreux et diversifiés que compte notre pays.

De plus, en tant que sénateur des Maritimes, je voudrais faire une autre mise en garde au sujet d'un programme qui serait concentré sur les besoins des régions. Il ne faudrait pas que les préoccupations légitimes de l'Ouest fassent oublier celles, tout aussi légitimes, de l'Est.

Honorables sénateurs, je voudrais aussi accorder mon appui au dépôt du projet de loi C-34, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada. Je crois que le projet de loi qui a été déposé, débattu et adopté à la Chambre des communes était une excellente mesure qui s'imposait et qui permettrait d'améliorer l'obligation redditionnelle et l'obligation de transparence de cette institution envers les Canadiens.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Downe: À bien des égards, honorables sénateurs, nous avons à supporter un fardeau beaucoup plus lourd parce que nous sommes nommés et n'avons de comptes à rendre à personne en particulier. J'estime que cette liberté met en valeur le rôle du Sénat, parce qu'elle accorde à ses membres une plus grande liberté dans l'étude de la politique gouvernementale et dans la tenue des débats dont elle fait l'objet. Néanmoins, comme tous les sénateurs le savent bien, cette liberté comporte ses inconvénients.

Premièrement, la population canadienne ignore souvent le travail que nous abattons au Sénat et, par voie de conséquence, elle comprend mal notre rôle. Le travail précieux qu'accomplit le Sénat passe inaperçu à cause de l'incompréhension du public et de la critique médiatique. Ce sont des réalités, qui peuvent malheureusement fausser la perception du public sur la véritable portée du travail du Sénat. L'expérience m'a enseigné que tous les parlementaires, qu'ils travaillent dans les systèmes fédéral ou provinciaux, doivent être extrêmement prudents lorsqu'ils débattent de questions internes. Le code d'éthique vise à rehausser la confiance du public dans les affaires parlementaires, mais en raison de la nature de nos systèmes, il nous revient de faire le premier pas, et c'est là que le public peut interpréter nos interventions comme allant dans le sens de nos intérêts personnels. Nous sommes en terrain difficile, et les critiques dont le Sénat a fait l'objet dans le passé peuvent refaire surface et alimenter la méconnaissance que le public a de cette institution.

L'automne dernier, j'ai écouté parler des sénateurs qui s'opposent à certains aspects du code d'éthique. Ils ont soulevé des préoccupations relativement à l'indépendance, à la relation essentielle entre le Sénat et l'autre endroit et au rôle important que joue le Sénat au plan de l'élaboration des politiques publiques. Pour ma part, je crois qu'il nous incombe de faire tout en notre pouvoir afin de rehausser la confiance du public dans nos travaux.

Honorables sénateurs, selon moi, nous devons adopter le code d'éthique qui nous sera envoyé lorsqu'il aura été approuvé par la Chambre des communes, de manière à contribuer à assurer que les Canadiens ont entièrement confiance en notre capacité de régir nos affaires de façon ouverte, responsable et transparente.

Honorables sénateurs, avant de terminer, je tiens à saluer l'importante contribution apportée par le ministère des Anciens combattants. Dans ma province natale, l'Île-du-Prince-Édouard, le ministère des Anciens combattants joue un rôle social et économique fondamental et stable. On tient maintenant pour acquise la présence de l'administration centrale à Charlottetown. Toutefois, je crois que la décision de transplanter le ministère des Anciens combattants à l'Île-du-Prince-Édouard dans les années 70 a montré les effets positifs et profonds que le gouvernement fédéral peut avoir dans toutes les régions de notre pays. Cette décision a donné lieu au développement de presque tous les secteurs de la société de l'Île-du-Prince-Édouard.

Au plan social, la présence de l'administration centrale du ministère des Anciens combattants a attiré une multitude d'employés professionnels hautement qualifiés qui apportent leur contribution quotidienne aux affaires publiques et à la société de l'Île-du-Prince-Édouard. La manifestation la plus claire de cette contribution a peut-être été l'avancée remarquable dans l'utilisation du français. L'Île-du-Prince-Édouard a toujours abrité une communauté acadienne dynamique, mais l'arrivée du ministère des Anciens combattants a renforcé le rôle du français dans la communauté insulaire, à tel point que, selon Statistique Canada, l'Île-du-Prince-Édouard vient maintenant au troisième rang des provinces, derrière le Québec et le Nouveau-Brunswick, pour ce qui est de la connaissance des deux langues officielles. Il ne fait pas de doute que la force de la communauté acadienne y est pour quelque chose. Il est indiscutable que la tradition insulaire qui consiste à se tourner vers ses voisins du Québec et du Nouveau-Brunswick a aussi contribué à cette évolution, mais, dans mon esprit, le principal facteur expliquant le fait que les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard sont de plus en plus à l'aise dans les deux langues, c'est la présence du ministère des Anciens combattants et les politiques fédérales judicieuses qui encouragent les Canadiens à parler couramment les deux langues officielles.

Dans le même ordre d'idées, le poids du ministère des Anciens combattants dans l'économie de l'Île-du-Prince-Édouard a augmenté de manière remarquable.

Honorables sénateurs, il y a actuellement plus de 1 200 fonctionnaires à plein temps qui travaillent à l'administration centrale du ministère à Charlottetown. Permettez-moi de situer les choses dans leur juste perspective. En décembre, la population active de l'Île-du-Prince-Édouard était d'environ 78 000 personnes. Un habitant de l'Île-du-Prince-Édouard sur 65 était à l'emploi du ministère des Anciens combattants. Le budget salarial pour ces 1 200 employés dépassera 68 millions de dollars pour le présent exercice financier.

Qui plus est, de nombreux étudiants trouvent des emplois d'été dont ils ont grandement besoin au ministère des Anciens combattants, et le budget global du ministère, pour l'ensemble du Canada, pendant le présent exercice financier est de l'ordre de 2,5 milliards de dollars. Pour situer ces chiffres dans une meilleure perspective, notamment le budget total du ministère, disons que les dépenses de l'ensemble du gouvernement provincial de l'Île-du-Prince-Édouard seront de l'ordre de 1 milliard de dollars cette année.

Comme les honorables sénateurs peuvent le constater, sur le plan économique, le ministère des Anciens combattants joue un rôle capital dans ma province d'origine, et si l'on tient compte des considérations à la fois sociales et économiques, on voit bien que le ministère des Anciens combattants est un gage de prospérité. À l'Île-du-Prince-Édouard, le ministère des Affaires des anciens combattants est non seulement important du fait de sa taille et de sa contribution pour l'ensemble du Canada, mais il offre aussi les meilleurs emplois dans la province. Les postes des hauts fonctionnaires du ministère sont à l'Île-du-Prince-Édouard. Ils sont assortis de très importantes responsabilités et de salaires en conséquence. Ces postes intéressants et sûrs sont un atout important pour notre économie, mais, et c'est tout aussi important, le ministère des Anciens combattants offre également des perspectives de carrière aux futures générations d'insulaires qui souhaitent rester à l'Île-du-Prince-Édouard et exceller dans la fonction publique fédérale.

Tout cela étant dit, il importe de rappeler que la décision prise dans les années 70 de déménager le ministère des Anciens combattants à l'Île-du-Prince-Édouard n'a pas été sans susciter une controverse.

(1600)

Honorables sénateurs, permettez-moi de rappeler quelques faits. En 1976, le gouvernement a annoncé qu'il déménagerait le ministère à Charlettown. Le maire d'Ottawa à l'époque est allé jusqu'à qualifier ce déménagement «d'insensé». Même à l'Île-du-Prince-Édouard, on a formulé de nombreuses questions et critiques. Pourquoi ce ministère? Quel serait l'avenir du ministère après le décès des anciens combattants du pays.

Le président d'alors de la P.E.I. Real Estate Association a résumé l'opinion populaire. Dans une interview accordée à un journal,M. Keys a déclaré qu'il était d'un «optimisme prudent, mais, certainement, si cela se réalise, ce sera une bonne chose pour toute la province.» Puis, M. Keys a mis en doute l'avenir du ministère des Anciens combattants, en ces termes:

Je me demande simplement ce que sera l'effectif du ministère des Anciens combattants dans cinq ans. Est-ce que, au fait, ce sera un ministère distinct?

Évidemment, 27 ans plus tard, nous connaissons la réponse et, à l'Île-du-Prince-Édouard, nous reconnaissons la sagesse des décisions prises il y nombre d'années pour décentraliser le rôle du gouvernement fédéral d'une façon qui soit profitable à de nombreux Canadiens. Le ministère des Anciens combattants n'est pas uniquement un ministère indépendant, c'est également un ministère prospère et dynamique qui s'adapte aux besoins changeants de la population canadienne.

Le ministère a pour principale raison d'être de contribuer au bien-être financier, physique et social des anciens combattants et des personnes qui sont à leur charge. En outre, le ministère est chargé d'une grande partie de la responsabilité de garder vivace le souvenir des anciens combattants et les sacrifices qu'ils ont consentis au nom des Canadiens. D'autre part, le ministère se penche également sur son avenir qui le préoccupe depuis longtemps et procède actuellement à l'élargissement de sa clientèle. Au fil des ans, le ministère a évolué et s'occupe maintenant des pensions, des questions d'invalidité et des soins à domicile pour les membres des Forces canadiennes et ceux de la Gendarmerie royale du Canada. Les Canadiens qui contribuent à la paix mondiale en participant à des opérations des pays secoués par des conflits armés sont de futurs clients du ministère des Anciens combattants.

Au fur et à mesure que le ministère s'adapte à l'évolution de notre société, ses employés répondent avec un professionnalisme déterminé. D'après mon expérience, les employés du ministère des Anciens combattants figurent parmi les plus dévoués de l'ensemble de la fonction publique.

Cette année, le ministère des Anciens combattants doit s'attaquer à une lourde tâche. Comme les honorables sénateurs le savent certainement, cette année marque le 60e anniversaire de l'invasion du jour J. Il s'agit d'un important jalon historique et la capacité du ministère des Anciens combattants, entre autres chargé de la coordination de la planification des activités commémoratives, sera encore une fois mise à l'épreuve.

Je crois que les Canadiens s'intéressent de plus en plus à leur histoire et qu'ils tiennent énormément à ce que notre contribution d'envergure aux conflits survenus au cours des décennies passées soit reconnue et saluée dignement. Au fur et à mesure que le temps passe et que commence à s'estomper le souvenir des grands conflits armés survenus en Europe et en Asie, le ministère des Anciens combattants sera de plus en plus appelé à mettre en lumière les sacrifices consentis dans le passé et à reconnaître la contribution remarquable que font actuellement nos troupes, notamment en Afghanistan et au Proche-Orient.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

[Français]

LES LANGUES OFFICIELLES

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Jean-Robert Gauthier propose: Que le projet deloi S-4, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (promotion du français et de l'anglais), soit lu une deuxième fois.—(L'honorable sénateur Gauthier).

Honorables sénateurs, le projet de loi S-4 modifie la Loi sur les langues officielles afin de préciser l'article 41 de la partie VII de cette loi de façon à la rendre exécutoire.

Il s'agit du troisième projet de loi que je présente au Sénat à ce sujet dans les trois dernières sessions parlementaires. Le premier projet de loi, S-32, est mort au Feuilleton à la suite de la prorogation des Chambres survenue le 16 septembre 2002.

Cette prorogation m'a permis de consulter, de réfléchir et de préparer un deuxième projet de loi, soit S-11. Je me suis inspiré des nombreux commentaires et propositions faits lors de l'étude du projet de loi S-32. Le projet de loi S-11 visait le même objectif que le projet de loi S-32, c'est-à-dire clarifier et rendre exécutoire l'article 41 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Les honorables sénateurs se souviendront que le projet de loi S-32 avait été examiné par le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles. Nous avons tenu alors huit réunions et entendu 32 témoins. Le projet de loi est mort au Feuilleton à la prorogation des Chambres.

Le projet de loi S-11 a été inscrit au Feuilleton. Il a passé les étapes de la première et de la deuxième lectures et du renvoi au comité. Il a été adopté au comité puis retourné à la Chambre, mais encore là — je ne suis pas chanceux —, il est mort au Feuilleton alors que les Chambres ont encore été prorogées.

Je reviens donc à la charge pour une troisième fois avec un autre projet de loi. Je vous explique. D'abord, le projet de loi S-4 précise le caractère impératif de l'engagement énoncé à la partie VII de la loi. Ensuite, il impose des obligations aux institutions fédérales pour la mise en œuvre de cet engagement. Ce dernier est aussi assorti d'un pouvoir de réparation permettant aux tribunaux de surveiller l'application qu'en font les gouvernements.

Le projet de loi S-4 tient compte de la majorité des recommandations faites par la commissaire aux langues officielles et par plusieurs témoins. La commissaire avait recommandé de clarifier la partie VII de la Loi sur les langues officielles et de préciser le caractère impératif de l'engagement en imposant une obligation aux institutions fédérales. Elle avait soutenu que le projet de loi devait prévoir l'adoption de règlements d'application afin d'assurer la mise en œuvre d'un régime approprié. Il devait aussi prévoir un droit de recours devant les tribunaux en vertu de la partie X de la Loi sur les langues officielles. J'ai incorporé toutes ces recommandations dans le projet de loi S-4.

L'appareil fédéral, comme les honorables sénateurs le savent, est parfois lent, parce qu'il ne comprend pas ce que les Canadiens et les Canadiennes attendent d'eux. La volonté d'agir avec célérité a tendance à ralentir lorsque les lois sont ambiguës, vagues et sans portée juridique. C'est la raison pour laquelle les communautés de langues officielles demandent depuis longtemps que le gouvernement agisse, que son engagement soit ferme et qu'il favorise leur développement.

Je me souviens du débat au comité, en 1988, lorsque le ministre responsable de la loi m'avait dit que l'article 41 créait des obligations pour le gouvernement. Je l'avais cru, mais ce n'est pas ce qui est arrivé. Ensuite, on nous a dit que cet article n'était pas exécutoire mais déclaratoire. C'est un langage politique. Ce n'est pas un engagement juridique. Cette loi impose une obligation.

Les honorables sénateurs me diront peut-être que le gouvernement a agi positivement en présentant son Plan d'action il y a presque un an, le 12 mars 2003. Le ministre Dion présentait alors un Plan d'action sur les langues officielles au Parlement. Ce plan, que nous avons très bien accueilli, a été le résultat d'une très longue réflexion par plusieurs ministres du Cabinet fédéral. Le leadership du premier ministre Jean Chrétien est reconnu et la contribution exceptionnelle et importante du ministre Stéphane Dion a apporté énormément au succès de ce plan.

(1610)

Le Plan d'action est centré sur certaines institutions fédérales, je l'admets, mais il existe aussi plusieurs autres institutions fédérales, dans d'autres domaines tout aussi critiques, qui ont besoin de directives claires et précises concernant leurs obligations.

C'est la raison pour laquelle, je crois, la partie VII de la Loi sur les langues officielles doit être clarifiée. On ne peut pas accepter aujourd'hui les agences qui se disent au-dessus de la loi.

Le gouvernement a maintenant un plan crédible et très satisfaisant. Il faut le mettre en œuvre, éliminer toute ambiguïté qui pourrait réduire ou ralentir l'enthousiasme qui prévaut chez certains. Les communautés de langues officielles ont besoin de se sentir appuyées par les gouvernements et les tribunaux. Tous les gains difficilement gagnés, dans le domaine des langues officielles, ont été confirmés par les tribunaux, qu'il s'agisse d'éducation, de santé ou de services sociaux.

Vous vous souvenez, en éducation, de l'affaire Maher. Vous vous souvenez, en santé, de l'affaire de l'hôpital Montfort. On a fait des gains, oui, mais ce sont les tribunaux qui ont clarifié ces droits. C'est la surveillance juridique et la détermination des communautés de langues officielles qui ont apporté les changements nécessaires.

Récemment, la Cour fédérale de première instance a statué dans la cause du Forum des maires de la péninsule acadienne c. l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Il y a eu un recours en justice concernant des employés de l'agence qui travaillaient dans des usines comme inspecteurs, et dont les postes ont été abolis. Cela a eu un impact économique sur la communauté parce que l'agence n'avait pas consulté les communautés, comme la loi le prévoit. On avait déménagé, au sud de la péninsule, des postes qui, autrefois, étaient au nord. Cela a eu un impact économique, un impact sur le droit de travailler dans sa langue, un impact sur les services au public en français ou en anglais. Le juge de la Cour fédérale, en première instance, a trouvé que le forum avait une bonne cause et a rendu un jugement en sa faveur. Voilà que j'apprends que le gouvernement va en appeler de cette décision à la Cour d'appel fédérale. On verra ce qui arrivera.

Concernant la question des droits en éducation, Dieu sait qu'on a travaillé fort. L'article 23 nous donnait le droit d'éduquer nos enfants dans notre langue et même de gérer nos écoles. Cela a pris, en Ontario, 17 ans avant que la province accorde les droits de la gestion scolaire. Et c'est devant les tribunaux qu'on a gagné ces droits, avec l'aide des communautés et de leur détermination. En santé, pas besoin de vous raconter l'histoire de Montfort, vous la connaissez. Si vous êtes intéressés, on vient de publier un livre très intéressant intitulé Montfort. Tous ont confirmé le droit constitutionnel des communautés minoritaires à une éducation dans leur langue et à des soins de santé également dans leur langue.

Les gouvernements provinciaux se sont pendant longtemps montrés hésitants face à ces droits. Dans une décision rendue le 6 novembre dernier dans l'affaire Doucet-Boudreau, la Cour suprême a reconnu l'importance de favoriser activement l'épanouissement des communautés de langues officielles et de s'assurer que les gouvernements prennent les mesures nécessaires pour y parvenir.

Si les communautés de langues officielles n'avaient pas eu recours aux tribunaux, elles n'auraient pas, aujourd'hui, leurs écoles homogènes et la gestion de celles-ci.

Je termine sur une note positive. Je suis confiant que le Sénat respectera son mandat constitutionnel qui est de protéger, défendre et promouvoir, de façon ponctuelle, les droits de toutes les minorités et de représenter les régions.

Je demande aux honorables sénateurs d'être patients avec moi et d'adopter ce projet de loi en deuxième lecture puis passer à la troisième lecture, pour qu'on puisse voter sur ce projet de loi et l'envoyer à la Chambre des communes.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LA PROTECTION DES PHARES PATRIMONIAUX

DEUXIÈME LECTURE

L'honorable J. Michael Forrestall propose: Que le projet de loi S-5, Loi visant à protéger les phares patrimoniaux, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je demande aussi que ce projet de loi franchisse maintenant l'étape de la troisième lecture.

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, de ce côté nous accepterions volontiers. La question a fait l'objet d'un débat suffisant grâce à l'intervention du sénateur Forrestall. Nous voulons bien procéder aujourd'hui.

Son Honneur le Président: Je vais d'abord passer au vote à l'étape de la deuxième lecture.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

TROISIÈME LECTURE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois?

L'honorable J. Michael Forrestall: Avec la permission du Sénat, maintenant.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

[Français]

PROJET DE LOI SUR LES FRAIS D'UTILISATION

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Pierrette Ringuette propose: Que le projet de loi C-212, Loi concernant les frais d'utilisation, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, nous avons, en octobre et novembre derniers, discuté de ce projet de loi qui est inscrit dans les annales des parlementaires canadiens, puisqu'il a été adopté unanimement par la Chambre des communes puis nous a été référé. Ce projet de loi vise essentiellement à répondre à un besoin d'un processus transparent, imputable, comparable et établissant des standards de performance ainsi qu'un mécanisme impartial pour entendre les plaintes des utilisateurs qui doivent payer des frais pour ces services.

(1620)

En tant que membres du Comité des finances, nous avons entrepris, en novembre dernier, l'étude de ce projet de loi. Nous avons déjà entendu des intervenants. D'autres intervenants doivent faire aussi des propositions et des commentaires concernant le projet de loi.

Donc, par mesure d'efficacité, je propose dès aujourd'hui la deuxième lecture du projet de loi afin qu'il puisse être référé dans les plus brefs délais au Comité des finances nationales, afin que le comité puisse poursuivre son étude plus approfondie.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné)

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Serge Joyal propose: Que le projet de loi C-250, Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse), soit lu une deuxième fois. —(L'honorable sénateur Rompkey, c.p.)

— Honorables sénateurs, si mes collègues veulent bien me donner deux minutes, je vais rappeler rapidement où nous en étions dans l'étude du projet de loi C-250 lorsque le Parlement a été prorogé, en novembre.

Je rappelle aux honorables sénateurs que nous avons eu un long débat sur ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. Plus d'une quinzaine de sénateurs ont pris la parole. J'ai examiné cette participation. Sept sénateurs de l'opposition ont pris position et ont soulevé des problèmes dans le projet de loi et des questions importantes. Neuf sénateurs du parti ministériel sont intervenus. Selon moi, nous en étions arrivés au point où nous étions prêts à poursuivre notre étude au comité en accueillant des témoins, comme des spécialistes, des professeurs, des associations de chefs de police, etc.

Comme le projet de loi est identique à celui que nous avons étudié l'automne dernier, j'estime, honorables sénateurs, que nous serions prêts à renvoyer le projet de loi au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles pour poursuivre notre étude des points que nos collègues ont soulevés à l'époque. Voilà pourquoi, honorables sénateurs, je propose que le projet de loi soit renvoyé au comité pour plus ample étude.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que j'ai appuyé la motion portant deuxième lecture, et je l'ai fait parce que nous avons eu un débat complet sur le principe du projet de loi avant la prorogation. Je ne crois donc pas utile de reprendre ce débat. Nous devrions le renvoyer au comité pour qu'il puisse en faire l'étude qui convient.

Je profite de ce que j'ai la parole pour signaler que la criminalité inspirée par la haine, qu'elle s'exprime physiquement ou par la propagande, n'a pas sa place dans la société canadienne. Le projet de loi C-250 modifie le paragraphe 318(4) du Code criminel, qui interdit la propagande haineuse contre des groupes identifiables au Canada. Le projet de loi vise à ajouter l'orientation sexuelle aux motifs déjà prévus, comme la couleur, la race, la religion et l'origine ethnique.

J'estime qu'il est évident pour tous les Canadiens qu'en ajoutant l'orientation sexuelle, nous affirmons de manière explicite que la propagande haineuse contre des groupes identifiables de Canadiens à cause de leur race, de leur couleur de peau ou de leur orientation sexuelle n'a pas sa place dans notre société.

Je rappelle aux sénateurs que le fait de préconiser ou de promouvoir le génocide constitue, selon ces motifs de distinction illicite, une infraction dans le Code criminel; c'est une infraction que d'inciter à la haine contre de tels groupes identifiables; et c'est une infraction que de promouvoir sciemment la haine contre un groupe identifiable par la race ou la couleur. Le projet de loi C-250 ajoute «l'orientation sexuelle», ce qui est non seulement parfaitement raisonnable, mais encore socialement approprié pour tous ceux qui croient en les principes de justice sociale dans notre pays. Les préjugés contre des Canadiens fondés sur leur race ou leur orientation sexuelle n'ont pas de place dans notre société. Cette modification proposée au Code criminel se fait attendre depuis fort longtemps, et nous devrions renvoyer le projet de loi à un comité où les doutes, honorables sénateurs, s'il y en a, quant aux dispositions du projet de loi pourront être examinés en profondeur et de manière réfléchie.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

LES RAISONS POUR SIÉGER À TITRE DE SÉNATEUR PROGRESSISTE-CONSERVATEUR

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Norman K. Atkins, ayant donné avis le 3 février 2004:

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur les raisons qui sous-tendent sa décision de siéger à titre de sénateur progressiste-conservateur.

— Honorables sénateurs, je vais tenter d'être bref. Ce n'est pas à la légère que j'ai fait inscrire cette interpellation au Feuilleton. J'ai voulu avoir l'occasion d'expliquer ma décision de continuer à siéger comme sénateur progressiste-conservateur, de décrire l'évolution de ma pensée et les personnes qui ont le plus influencé celle-ci, puis de faire savoir à cette Chambre le cheminement qui a mené à ma décision, alors que la plupart de mes collègues du Sénat ont déclaré représenter le Parti conservateur du Canada.

Je tiens à exprimer mes sentiments à l'égard du parti — le Parti progressiste-conservateur — et de la décision de le dissoudre. J'ai été progressiste-conservateur depuis l'âge de 18 ans, au moment où je suis devenu militant, en 1952, lors de l'élection provinciale au Nouveau-Brunswick. Au cours des 52 dernières années, j'ai participé à 38 campagnes électorales d'une manière ou d'une autre, parfois des courses à la direction du parti, parfois des campagnes électorales aux niveaux tant fédéral que provincial. Toutes ont été tenues sous la bannière du Parti progressiste-conservateur.

Le parti a changé de nom plusieurs fois depuis 1850. Cependant, à mes yeux, la désignation «progressiste-conservateur» a fini par qualifier beaucoup plus qu'un parti politique. À mes yeux, elle représentait les valeurs défendues par ce parti. Elle alliait non pas deux partis, mais deux ensembles de valeurs, celles de la responsabilité économique et financière — vivre selon ses revenus, l'équilibre budgétaire, l'absence de dette ou, à défaut, une dette limitée, ainsi que l'intervention de l'État dans l'économie uniquement lorsque cela se révélait véritablement indispensable. Voilà les valeurs «conservatrices».

Par ailleurs, l'adjectif «progressiste» qualifiait, à mon avis, la politique sociale en faveur des moins bien nantis de notre société — ce qui signifiait l'accessibilité à des soins de santé adéquats financés par le gouvernement, un système d'éducation postsecondaire accessible à tous les étudiants admissibles, des politiques tenant compte du fait que les personnes et même les provinces ne sont pas créées égales et que nous devons, de temps à autre, leur venir en aide, fût-ce par des paiements d'assistance sociale ou de péréquation.

(1630)

C'est pour cela que je me bats depuis la première campagne que j'ai faite au cours des élections de 1952 au Nouveau-Brunswick, alors que le parti de Hugh John Flemming a remporté 36 des 52 sièges après avoir passé 17 années dans le champ. Cette élection a bien fait comprendre au jeune étudiant que j'étais l'importance du leadership, de la politique et de la démocratie.

Tout au cours des campagnes que j'ai menées auprès du très honorable Robert Stanfield, au fédéral comme en Nouvelle-Écosse, de Duff Roblin au Manitoba, de Walter Shaw à l'Île-du-Prince-Édouard, de Bill Davis en Ontario, de Richard Hatfield au Nouveau-Brunswick, du très honorable Joe Clark et du très honorable Brian Mulroney, j'ai toujours cru à la cause et je me suis battu pour la cause du Parti progressiste-conservateur et de sa direction qui a toujours cru à la fois à l'autonomie et à la répartition des richesses.

Je suis un conservateur modéré, tout comme mon ami Dalton Camp s'est toujours considéré comme un conservateur modéré. Il a dit un jour au cours d'une entrevue qu'il accordait à Pamela Wallin en 1995:

Je reconnais l'importance des gens et je tiens à ce qu'on tente de soulager les problèmes auxquels ils font face. À mon avis, cela fait partie des fonctions du gouvernement et je ne vois vraiment pas comment nous pourrions mettre ce rôle de côté.

Je ne voudrais pas que cela se produise non plus. Je préférerais de loin continuer à me battre pour ce à quoi je crois, plutôt que de me liguer à ceux qui ne partagent peut-être pas notre philosophie. À mon avis, Robert Stanfield a fixé la barre très haute et c'est là la norme que je tiens à maintenir.

Les gens que j'ai connus en politique, les gens que j'admire, n'ont jamais accepté de faire des compromis. Ils n'ont jamais abandonné la lutte pour le bien-être de notre pays et de ses citoyens. Il suffit de penser, entre autres, à Peter Lougheed qui a continué de se battre pour former un gouvernement et adopter en tout premier lieu une déclaration des droits, alors que les chances étaient contre lui. Richard Hatfield s'est battu pour assurer l'égalité des chances. Duff Roblin a fait preuve de courage et de détermination pour construire le canal de dérivation, malgré une très forte opposition, tout comme Bill Davis lorsqu'il a réussi à mettre un terme à l'expansion de la voie rapide Spadina. Robert Stanfield, à qui nous avons récemment rendu un dernier hommage, n'a pas renié ses principes au cours des élections générales de 1974 qui ont porté sur le «contrôle des prix et des salaires». Brian Mulroney et Joe Clark, suivant en cela les traces de John Diefenbaker, se sont opposés aux gouvernements de la Grande-Bretagne et des États-Unis en adoptant une position anti-apartheid au nom des Canadiens, à l'appui de Nelson Mandela. Au pays, le Parti progressiste-conservateur s'est fait le défenseur de l'unité nationale, et plus particulièrement de la place du Québec au sein du Canada. C'est pendant que Joe Clark était premier ministre, en 1979, que le Canada a tendu la main aux boat people vietnamiens fuyant l'oppression pour qu'ils puissent vivre en sécurité au Canada.

Tout cela a été fait par des gens qui estiment que le nom du parti, progressiste-conservateur, avait en réalité évolué et était devenu le symbole d'un ensemble commun de valeurs ou un centre commun, si vous voulez, pas seulement la juxtaposition d'étiquettes de partis politiques.

Les chefs que j'ai connus, que j'ai côtoyés de près, n'ont pas abandonné lorsqu'ils étaient confrontés à de grands défis ou à des obstacles qui paraissaient insurmontables. Ils sont restés pour combattre pour leurs convictions.

J'ai la ferme conviction que c'est ce que nous, qui nous appelions progressistes-conservateurs, aurions dû faire. Oui, il y a peut-être une possibilité de succès électoral, mais à quel prix? Qu'est-ce qu'il en coûtera aux Canadiens si un groupe de dirigeants politiques abandonnent les convictions centrales du parti qu'ils représentent pour remporter des gains électoraux? Avons-nous raison de sacrifier la cause des moins fortunés sur l'autel de l'opportunisme politique? Voilà ce qui me préoccupe.

Les chefs précédents du Parti progressiste-conservateur nous ont laissé un héritage. C'est un héritage à chérir, l'héritage de la persévérance constante, l'héritage du succès contre vents et marées. Stanfield, Lougheed, Hatfield, Clark et Mulroney l'ont fait. Ils partageaient un héritage de vision commune des questions financières, conjuguée à une compassion sociale. C'est un héritage dont je ne peux faire fi, un héritage que je n'abandonnerai pas.

Le Parti progressiste-conservateur avait une histoire et une tradition que je croyais éternelles, peu importe les circonstances. S'il doit y avoir un type de coopération entre les partis, celle-ci doit s'appuyer sur des principes et non pas sur l'opportunisme.

Par conséquent, je continuerai de défendre mes convictions en tant que sénateur progressiste-conservateur à la période des questions, dans les débats et au sein des comités. Je continuerai de défendre les valeurs que j'estime emblématiques pour un progressiste-conservateur. Je surveillerai avec intérêt tant la course à la direction que les politiques du nouveau parti de manière à voir si celui-ci répond à mes préoccupations. J'espère que ces politiques refléteront les valeurs et les convictions que les progressistes-conservateurs ont à cœur.

Je remercie les sénateurs de m'avoir fourni l'occasion de partager avec eux les pensées et les réflexions qui ont guidé ma décision de demeurer un sénateur progressiste-conservateur.

Des voix: Bravo!

(Sur la motion du sénateur Murray, le débat est ajourné.)

AJOURNEMENT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion:

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 10 février 2004, à 14 heures.

Son Honneur la Présidente intérimaire: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 10 février 2004, à 14 heures.)


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