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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 38e Législature,
Volume 142, Numéro 94

Le mardi 1er novembre 2005
L'honorable Daniel Hays, Président


 

LE SÉNAT

Le mardi 1er novembre 2005

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LES JEUX D'ÉTÉ DU CANADA DE 2005

FÉLICITATIONS À L'ÉQUIPE NOUVELLE-ÉCOSSE

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, cet été, les Jeux du Canada — notre événement sportif national mettant nos athlètes en vedette — ont eu lieu à Regina, en Saskatchewan.

Les Jeux du Canada, dont l'idée a jailli en 1924, continuent de ravir les auditoires par leur esprit de compétition et la fierté qu'ils inspirent pour notre pays. En fait, honorables sénateurs, il convient de noter que les premiers Jeux d'été du Canada se sont déroulés à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en 1969.

Les jeux offrent l'occasion à tous les Canadiens de faire connaître leurs collectivités, leur esprit de bénévolat, leur culture et le développement de futurs leaders.

Honorables sénateurs, les athlètes d'Équipe Nouvelle-Écosse ont remporté 46 médailles, établissant de nouveaux records lors de ces jeux. Notre équipe de la Nouvelle-Écosse a terminé les deux semaines de compétition au sixième rang, et obtenu des médailles en athlétisme, en basket-ball féminin, en voile, en aviron, en canoë/kayak, en rugby et en natation.

Les athlètes d'Équipe Nouvelle-Écosse ont été appuyés par 45 entraîneurs et 23 gérants, deux lamaneurs et 18 chargés de mission, ce qui a porté le total de l'équipe à plus de 400 Néo-Écossais.

Honorables sénateurs, la société de la ville hôtesse a choisi « No Limits/Sans Limites » comme thème des Jeux d'été du Canada de 2005 — un thème fort à propos.

Les sénateurs se joindront sûrement à moi pour féliciter sincèrement tous les athlètes, entraîneurs, employés et bénévoles d'Équipe Nouvelle- Écosse, ainsi que les milliers d'autres athlètes de toutes les régions du Canada, leurs entraîneurs, les bénévoles de leur équipe, les parents et les amis, qui ont tous travaillé ensemble pour que ces jeux soient un succès et un événement vraiment canadien.

LA SEMAINE DE LA SENSIBILISATION AU SYNDROME DE DOWN

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, par un étrange coup du sort, chaque année, un bébé sur 800 qui naît au Canada a un chromosome en trop sur la 21e paire. Ces bébés ont une différence génétique que l'on appelle trisomie 21, ou syndrome de Down.

Ces bébés ont peut-être des gènes différents, mais ils ont le même besoin d'amour et de nourriture que tous les bébés. Lorsqu'ils grandissent, ils ont besoin d'écoles, d'activités et d'encouragements tout comme tous les autres enfants et, lorsqu'ils arrivent à l'âge adulte, ils partagent les mêmes espoirs que tous les autres adultes, à savoir un mariage, un foyer et toutes les choses merveilleuses que la vie a à offrir.

Cependant, trop souvent, les personnes qui ont le syndrome de Down, bébés, enfants ou adultes, se voient nier un traitement médical adéquat qui améliorerait leur qualité de vie. On leur refuse le soutien scolaire qui leur permettrait de fréquenter l'école de leur quartier avec leurs amis. On leur nie la formation postsecondaire qui leur permettrait de faire carrière et de gagner un revenu décent. Trop souvent, on ne reconnaît pas qu'ils sont des gens qui ont quelque chose d'utile à apporter à la société.

La Semaine de sensibilisation au syndrome de Down nous donne la chance de mettre l'accent sur la recherche d'une cure, pas du syndrome de Down, mais de l'intolérance envers les gens qui ont le syndrome de Down ou d'autres différences.

J'exhorte les honorables sénateurs à se joindre à moi et à célébrer la Semaine de sensibilisation au syndrome de Down, du 1er au 7 novembre, pas parce que le syndrome de Down est une différence qu'il faut déplorer, mais parce qu'il est une différence qu'il faut apprendre à apprécier.

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de donner la parole au prochain sénateur sur ma liste, j'attire votre attention sur la présence à notre tribune de Son Excellence Paavo Lipponen, Président du Parlement de la République de Finlande.

M. Lipponen est accompagné par ses collègues députés suivants : Mati Väistö, du Parti du centre finnois, Arto Bryggare, du Groupe parlementaire social démocrate, Olli Nepponen, du Parti de la coalition nationale, Kari Uotila, de l'Alliance de gauche, Rosa Merlläinen, du Groupe parlementaire vert, Pehr Löv, du Groupe parlementaire suédois, Seppo Kalervo Tiitinen, secrétaire général du Parlement de Finlande, de même que par l'ambassadeur de Finlande au Canada, Pasi Patokallio.

Des voix : Bravo!

LE SÉMINAIRE PARLEMENTAIRE SUR L'AFRIQUE

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, le mois dernier, j'ai eu l'honneur d'assister à deux rencontres parlementaires en Europe. Dans un premier temps, j'ai assisté à la réunion automnale de l'Union interparlementaire, à la suite de laquelle un rapport complet sera présenté au Sénat au moment opportun. Dans un deuxième temps, j'ai assisté à un séminaire parlementaire sur l'Afrique, qui a eu lieu à Londres, et dont le thème était « Le rôle des parlementaires dans la mise en œuvre des engagements issus du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique ». Ce séminaire était parrainé par les Parlementaires européens pour l'Afrique, le British Council, la section britannique de l'Association parlementaire du Commonwealth et le groupe britannique de l'Union interparlementaire. Il a permis de réunir des parlementaires de presque tous les pays d'Afrique, de nombreux pays européens et certains parlementaires canadiens.

J'étais là au nom de l'UIP pour parler des questions liées à la sexospécificité, que j'estime faire partie inhérente de la politique, comme les sénateurs le savent; ces questions ont effectivement revêtu des facettes multiples lors de cette rencontre.

(1410)

Honorables sénateurs, ce fut une expérience inspirante et intense que d'écouter, pendant deux jours et demi, des parlementaires de partout en Afrique, aux prises avec d'immenses problèmes à surmonter, exprimer leur détermination à privilégier la saine gouvernance et à assumer la responsabilité des problèmes terribles auxquels font face leur population.

L'autre parlementaire canadien présent était M. John Williams, président du Comité des comptes publics de l'autre endroit. Il était l'un des deux conférenciers à l'atelier sur la saine gouvernance, la responsabilité et la corruption auquel j'ai assisté. L'autre conférencier dans le cadre de cet atelier a présenté une extraordinaire récapitulation des lois africaines en la matière. C'était fascinant. Nous avons entendu parler du sida, de l'environnement, des problèmes commerciaux, des regroupements régionaux et des difficultés tribales.

Comme je l'ai dit, honorables sénateurs, ces deux jours et demi ont été inspirants et ils influenceront mon travail pour longtemps encore.

L'ÉDUCATION DES AUTOCHTONES

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, je prends la parole pour traiter d'une importante question que j'ai déjà abordée dans cette enceinte, c'est-à-dire l'état de l'enseignement aux Autochtones au Canada.

Les jeunes Autochtones sont le groupe démographique qui augmente le plus rapidement au Canada, et il est impérieux que ces jeunes reçoivent la meilleure éducation possible. Trop souvent, malheureusement, ce n'a pas été le cas. Je suis persuadé que les honorables sénateurs connaissent bien les données statistiques sur l'état pitoyable des services d'enseignement offerts aux Autochtones. Plusieurs rapports de la vérificatrice générale, ces dernières années, ont mis en lumière les nombreux problèmes qui existent dans la prestation de ces services par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. La vérificatrice générale nous a dit également qu'il faudra 28 ans pour refermer l'écart entre le taux d'obtention de diplômes d'études secondaires chez les membres des Premières nations qui habitent dans les réserves et celui des élèves de l'ensemble de la population.

Un rapport publié l'an dernier par la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire nous a appris que, tandis que les Canadiens sont plus nombreux que par le passé à fréquenter le collège et l'université, les Autochtones sont toujours sous- représentés dans le système d'enseignement postsecondaire.

Nous devons multiplier les efforts pour que tous les étudiants autochtones qui veulent fréquenter l'université aient la possibilité de le faire. Aucun étudiant au Canada ne devrait être dans l'impossibilité de faire des études supérieures à cause de barrières d'ordre financier ou culturel.

Je suis fermement convaincu qu'il faut améliorer pour les étudiants autochtones non seulement l'accès aux études postsecondaires, mais aussi l'accès aux programmes de formation professionnelle. Si nous devons encourager les étudiants autochtones à s'inscrire à ces programmes, nous devons aussi veiller à ce qu'ils aient les ressources et le soutien nécessaires pour mener leur formation à bien. Les programmes de formation devraient être adaptés au mode de vie des étudiants et au marché du travail. Nous devons aussi promouvoir les partenariats avec les entreprises qui aideront les Autochtones à pousser plus loin leur formation professionnelle au moyen de stages d'apprentissage.

Je suis fier d'appartenir à un parti qui a jugé très important de faire augmenter le nombre de travailleurs qualifiés au Canada. Le plan du Parti conservateur prévoit une subvention pour les apprentis et un crédit d'impôt plus généreux pour l'achat d'outils, et il prévoit à l'intention des employeurs un crédit d'impôt pour la création d'un plus grand nombre de postes d'apprenti. Ces propositions pourraient certainement aider les jeunes Autochtones qui ont le talent nécessaire, mais des occasions limitées de se perfectionner.

Lorsque les jeunes Autochtones, hommes ou femmes, ont la possibilité d'exercer leurs talents et leur intelligence à fond, c'est tout notre pays qui en profite grandement. J'exhorte le gouvernement fédéral à travailler avec les provinces et les peuples autochtones du Canada pour mettre en place des programmes qui favorisent et renforcent le perfectionnement professionnel.

LA DÉFENSE NATIONALE

LA BFC GAGETOWN—LES ESSAIS DE L'AGENT ORANGE ET DE L'AGENT POURPRE

L'honorable Norman K. Atkins : Honorables sénateurs, le gouvernement fédéral s'est récemment intéressé d'une façon plus active aux effets de l'agent orange et d'autres produits chimiques cancérigènes utilisés à la BFC Gagetown dans les années 1950 et 1960. Certaines mesures ont été prises par la suite pour examiner les conclusions scientifiques et indemniser les personnes touchées.

La base de Gagetown se trouve dans une région du Nouveau- Brunswick que je connais bien. J'y passe un certain temps chaque année. Je suis démoralisé par l'étendue et les répercussions du problème. Je crains fort qu'un examen plus attentif ne révèle des problèmes plus complexes que nous ne l'avions prévu.

Je sais qu'un homme qui a été membre du régiment Black Watch à la BFC Gagetown lors de la pulvérisation des produits chimiques est mort d'un cancer depuis. Beaucoup des soldats qui ont servi avec lui dans ce régiment sont aussi décèdés du cancer. En fait, il y a tout un secteur le long de la rivière qu'on a appelé le « rang des veuves » pour des raisons évidentes.

Les dioxines sont persistantes dans l'environnement. Elles s'accumulent dans les organismes qui les absorbent et se concentrent à mesure qu'elles avancent dans la chaîne alimentaire. Cela signifie que les problèmes de santé sont réels quand des dioxines sont présentes à un niveau sensible.

Il est très encourageant de constater que le gouvernement se fonde sur les conclusions les plus complètes pour définir des points de repère scientifiques. Il serait également utile que d'autres recherches soient menées par un comité d'examen technique indépendant dirigé par un enquêteur indépendant.

Compte tenu des progrès scientifiques récents, il est utile de poursuivre l'étude des niveaux actuels de ce genre de produit cancérigène. D'autres essais sont nécessaires pour déterminer l'étendue de la contamination qui persiste aujourd'hui et qui sera encore présente à l'avenir. Des études de mortalité devraient être réalisées pour déterminer si on a constaté un nombre élevé de décès dans la région de la base de Gagetown et si ces décès peuvent être liés aux dioxines.

Des renseignements détaillés tirés de ces de l'étude, de même que des données concernant les sociétés qui ont fabriqué les produits chimiques utilisés, devraient être rendus publics. Cela permettrait peut-être à des chercheurs de tirer des conclusions fermes au sujet des personnes qui ont pu ou peuvent encore être contaminées.

À l'heure actuelle, les personnes touchées sont réparties entre différents groupes correspondant à différentes normes d'admissibilité et différents droits à des traitements médicaux et à des indemnités. En toute équité, toutes les personnes touchées devraient être traitées de façon juste, et il faudrait simplifier au maximum les modalités d'indemnisation pour permettre aux demandeurs de recevoir des prestations et des indemnités le plus tôt possible.

J'espère que le gouvernement fédéral prendra d'autres mesures dans l'intérêt de tous ceux qui ont été touchés et de ceux qui peuvent l'être à l'avenir. Je tiens à féliciter le député fédéral Greg Thompson et le député provincial Jody Carr pour les efforts qu'ils ont déployés afin d'obtenir une action rapide et équitable du gouvernement en faveur des victimes de cette contamination.


AFFAIRES COURANTES

LA COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LE PROGRAMME DE COMMANDITES ET LES ACTIVITÉS PUBLICITAIRES

DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport intitulé Commission d'enquête sur le programme de commandites et les activités publicitaires.

L'IMMIGRATION

DÉPÔT DU RAPPORT ANNUEL AU PARLEMENT SUR L'IMMIGRATION POUR 2005

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le Rapport annuel au Parlement sur l'immigration pour 2005.

[Français]

LE RENDEMENT DES MINISTÈRES ET ORGANISMES

DÉPÔT DES RAPPORTS ANNUELS POUR 2004-2005

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de rendement de 90 ministères et organismes pour la période se terminant le 31 mars 2005.

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Colin Kenny, président du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, présente le rapport suivant :

Le mardi 1er novembre 2005

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a l'honneur de présenter son

QUINZIÈME RAPPORT

Votre Comité, auquel a été déféré le projet de loi C-26, Loi constituant l'Agence des services frontaliers du Canada, a, conformément à l'ordre de renvoi du 20 octobre 2004, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
COLIN KENNY

OBSERVATIONS
Annexes au 15e rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense

Le Comité a adopté le projet de loi C-26, Loi constituant l'Agence des services frontaliers du Canada, tel quel. Toutefois, lors de l'examen du projet de loi, les membres du Comité ont exprimé des réserves quant aux paragraphes 15.1(1) et 15.1(2).

Le Comité questionne l'effet du paragraphe 15.1(2) sur le paragraphe 15.1(1) et sur l'objectif de la ministre d'améliorer la transparence et l'ouverture au sein du ministère et des agences de son portefeuille.

Le Comité appuie l'obligation de présenter un rapport annuel au Parlement sur les activités de l'Agence des services frontaliers du Canada et les résultats obtenus, comme le prévoit le paragraphe 15.1(1). Toutefois, le Comité se demande si le type de rapport que le Conseil du Trésor pourrait exiger qui, selon le paragraphe 15.1(2) doit satisfaire à l'obligation prévue au paragraphe 15.1(1), est un outil adéquat pour un tel rapport.

Plus précisément, le Comité se demande si le rapport exigé par le Conseil du Trésor comprendrait suffisamment de données sur des dossiers comme les incidents critiques auxquels sont confrontés les agents des services frontaliers, la quantité de postes à durée indéterminée par rapport aux postes temporaires par point d'entrée, ainsi que le débit par point d'entrée. Dans son rapport de juin 2005, À la limite de l'insécurité1, le Comité a recommandé à l'Agence des services frontaliers du Canada d'accroître les données rapportées au Parlement chaque année.

La ministre s'est dite ouverte à l'idée d'un rapport supplémentaire au Parlement, en plus de celui déjà exigé par le Conseil du Trésor. Le Comité s'attend à ce que la ministre envisage sérieusement cette option.

Le sénateur Michael Forrestall a posé des questions à la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Anne McLellan, à propos de la nécessité d'une meilleure transparence et de la pertinence des rapports présentés au Parlement actuellement. Voici la traduction non officielle de l'échange.

Le sénateur Forrestall : Madame la ministre, nous parlons beaucoup de transparence et d'ouverture aujourd'hui. Vous vous rappelez peut-être que, lors du débat au Sénat, certains d'entre nous ont exprimé des réserves quant à l'absence d'une disposition exigeant un rapport annuel. La proposition du gouvernement était que le rapport du Conseil du Trésor soit considéré comme le rapport annuel de l`Agence des services frontaliers. Je me demande si vous avez changé d'avis et, dans l'affirmative, si c'est pour les besoins d'une transparence apparente —

Mme McLellan : Me demandez-vous si, à titre de ministre, je présenterais un rapport annuel au Parlement?

Le sénateur Forrestall : Je pense que l'Agence devrait présenter un rapport annuel au Parlement par votre intermédiaire.

Mme McLellan : Nous le faisons déjà, d'après ce que me dit M. Jolicoeur.

M. Jolicoeur : Le projet de loi a été modifié de façon à ce que nous produisions un rapport au Parlement. Le tout se fait dans le cadre de l'initiative habituelle du Conseil du Trésor qui demande à chaque ministère de présenter un rapport sur le rendement ministériel.

Le sénateur Forrestall : Ce n'est pas suffisant. Votre rapport passe par d'autres mains avant d'être rendu public. Par souci d'équité, de transparence et d'ouverture, je pense que vous devriez montrer que vous parlez par vous-mêmes.

Mme McLellan : Puis-je y réfléchir quelques jours?

Le sénateur Forrestall : J'aimerais bien.

Mme McLellan : Je le ferai.

Source : Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, Témoignages non révisés (le 31 octobre 2005).

1 Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, À la limite de l'insécurité (juin 2005), p. 38.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Banks, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1420)

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION VISANT À EXHORTER LE GOUVERNEMENT À CONTRIBUER AU FINANCEMENT D'UNE STRATÉGIE SUR LES SOINS PALLIATIFS ET DE FIN DE VIE

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, conformément à l'alinéa 58(1)i) du Règlement, je donne avis que, après-demain, j'attirerai l'attention du Sénat sur :

Attendu que le gouvernement fédéral joue un rôle de premier plan et de coordination ainsi qu'un rôle de fournisseur de services auprès de certains groupes de citoyens en matière de soins palliatifs et de soins de fin de vie au Canada;

Attendu que seulement 15 p. 100 des Canadiens ont accès à des soins palliatifs et de fin de vie intégrés;

Le Sénat du Canada exhorte le gouvernement à contribuer au financement durable et à long terme d'une stratégie canadienne sur les soins palliatifs et de fin de vie interpellant les divers ministères et ordres de gouvernement, et à répondre aux besoins des Canadiens;

Un message soit envoyé à la Chambre des communes lui demandant d'unir ses efforts à ceux du Sénat aux fins de ce qui précède.

LE TRAITEMENT DE L'AUTISME

PRÉSENTATION D'UNE PÉTITION

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom de Joshua Bortolotti, âgé de 12 ans, et de sa sœur Sophia, âgée de 4 ans, pétition signée par 30 Canadiens qui attirent l'attention du Sénat sur le traitement de l'autisme. Plus particulièrement, les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier la Loi canadienne sur la santé et son règlement d'application pour que l'intervention comportementale intensive et l'analyse comportementale appliquée soient considérées comme un traitement médical essentiel pour les personnes atteintes d'autisme, puis de contribuer à la création d'une chaire dans des universités de toutes les provinces pour que des cours sur ces formes de traitement soient offerts.

LES RELATIONS CANADO-AMÉRICAINES

LE MAINE—LE PROJET D'ÉTABLISSEMENT DE TERMINAUX DE GAZ NATUREL LIQUÉFIÉ—PRÉSENTATION D'UNE PÉTITION

L'honorable Michael A. Meighen : Honorables sénateurs j'ai l'honneur de présenter des pétitions signées par 110 habitants du Nouveau-Brunswick et d'ailleurs au Canada et aux États-Unis d'Amérique qui demandent au gouvernement de refuser aux méthaniers le droit de traverser le passage de Head Harbour.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION

LE PROJET D'ADMISSION DE NOUVEAUX IMMIGRANTS—LA CAPACITÉ D'EXAMEN DES CAS

L'honorable Ethel Cochrane : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le premier ministre et le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, M. Volpe, ont récemment dit qu'ils envisageaient d'admettre 100 000 nouveaux immigrants et réfugiés au Canada au cours des cinq prochaines années. Cela augmenterait considérablement le nombre de dossiers en cours dans un système qui a déjà beaucoup de difficultés à examiner promptement les cas actuels.

L'arriéré actuel, dans le système, est estimé à près de 768 000 cas. D'après un article de l'Ottawa Citizen d'aujourd'hui, cet arriéré est dû au fait que le gouvernement n'a la capacité de traiter que 130 000 dossiers par an. À ce rythme, honorables sénateurs, il faudra près de six ans pour écouler l'arriéré actuel.

Le leader peut-il nous dire comment le gouvernement fédéral entend tenir sa promesse si l'arriéré du ministère se chiffre déjà en centaines de milliers de cas?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, madame le sénateur Cochrane a posé une question importante. La réponse la plus directe consiste à lui dire que nous devons concentrer nos efforts sur l'amélioration du système, l'amélioration du service à la clientèle et l'augmentation de la capacité du programme pour permettre l'intégration. Nous devons également faire des efforts dans le domaine de la reconnaissance des titres de compétence étrangers pour nous assurer que les nouveaux immigrants et les nouveaux citoyens que nous essayons d'attirer puissent s'intégrer dans l'économie canadienne d'une façon efficace et productive.

Toutefois, pour en revenir aux motifs de base du programme, il est clair que notre situation démographique, avec une population vieillissante et un taux de reproduction de 1,6 qui ne suffit pas au maintien du nombre actuel d'habitants, nous impose d'augmenter l'immigration pour assurer la croissance économique du pays et l'intégrité de nos programmes sociaux.

L'un des objectifs du programme consistera à encourager les nouveaux immigrants à s'établir en plus grand nombre dans les petites agglomérations du Canada pour favoriser leur relance économique.

Le sénateur Cochrane : Tout en remerciant le leader du gouvernement de sa réponse, je dois lui dire que je connaissais déjà le « pourquoi » et que je m'intéressais davantage au « comment ».

Le 18 avril 2005, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a annoncé des mesures destinées à accélérer le traitement des demandes de parrainage relatives aux parents et aux grands-parents qui viennent au Canada dans la catégorie de la famille. Voici ce que disait le communiqué publié alors : « Compte tenu de ces nouvelles mesures, le nombre de parents et de grands-parents immigrant au Canada en 2005 et en 2006 augmentera de 12 000 chaque année. »

L'été dernier, un membre de ma collectivité qui avait entrepris des démarches en novembre 2003 pour faire venir ses parents au Canada a pris contact avec mon bureau. Lorsque j'ai appelé le centre de traitement de Mississauga pour obtenir des renseignements, on m'a dit que le ministère n'avait pas encore commencé à examiner les demandes de parrainage de parents et grands-parents vivant à l'étranger qui avaient été présentées en juin 2003.

Au début du mois, un représentant du ministère m'a dit qu'il ne s'attendait pas à ce que la demande soit examinée avant le début de 2006, soit deux ans et demi après sa présentation.

Comme on m'a dit en août, alors que près de huit mois sur douze de 2005 étaient déjà écoulés, que les demandes de parrainage de parents et grands-parents datées de juin 2003 n'avaient pas encore été examinées, est-ce que le leader du gouvernement au Sénat peut me dire comment le gouvernement a l'intention d'atteindre les objectifs qu'il s'est fixés il y a seulement six mois?

Le sénateur Austin : Comme je l'ai dit en réponse à la première question de l'honorable sénateur, qui était très semblable à sa seconde question, il faudra améliorer l'efficacité des programmes du ministère. Il conviendrait d'engager plus d'employés et de mieux cibler les programmes destinés à intégrer les immigrants.

Tous les ministres provinciaux ont demandé au ministre fédéral de la Citoyenneté et de l'Immigration d'augmenter le nombre des immigrants. On me dit qu'on aurait besoin de 5 000 personnes pour remplir des postes actuellement vacants en Saskatchewan. Malheureusement, l'administration du programme est lourde et ne permet pas, comme l'a dit l'honorable sénateur, de traiter efficacement un nombre accru d'immigrants. C'est pourtant notre objectif.

Pour répondre au sénateur Cochrane qui demande à savoir comment nous l'atteindrons, le ministre a dit qu'il élaborait des programmes pour légaliser la situation au Canada de personnes qui ne devraient pas être ici légalement et pour faciliter leur intégration. Toutefois, il n'a pas encore annoncé les mesures qui seraient prises. Tant qu'il ne l'aura pas fait, je ne pourrai pas donner à l'honorable sénateur les détails de ces programmes.

Le sénateur Cochrane : Honorables sénateurs, est-ce que le leader du gouvernement peut nous dire quand ce programme sera mis en place? Je m'occupe d'un dossier particulier. Nous voulons que cet homme et sa femme puissent rester au Canada. Par conséquent, il est important que ses parents puissent venir pour qu'il puisse s'en occuper. Ce sont des gens qu'il importe de garder au Canada.

(1430)

Le sénateur Austin : Je ne peux pas me prononcer sur un cas particulier. Je ne peux pas non plus dire quand les nouvelles règles seront annoncées. Tout cela serait hautement hypothétique parce que je ne connais pas assez les détails du cas dont l'honorable sénateur a parlé pour déterminer si les nouvelles règles lui seraient utiles.

Par ailleurs, madame le sénateur Cochrane sait très bien qu'elle peut écrire directement au ministre Volpe. Si elle souhaite me laisser une copie de cette lettre, je m'efforcerai d'obtenir des renseignements.

L'INDUSTRIE

INVESTISSEMENT CANADA—LA PRISE DE CONTRÔLE DE TERASEN GAS PAR KINDER MORGAN

L'honorable Pat Carney : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le juge Gomery a exprimé sa préoccupation au sujet du secret entourant les activités du gouvernement libéral. On en voit un exemple dans le secret qui entoure l'examen par Investissement Canada de la prise de contrôle de Terasen Gas par l'entreprise texane Kinder Morgan.

La Loi sur Investissement Canada contient une disposition qui prévoit l'examen des acquisitions d'oléoducs et de gazoducs pour que nous sachions si elles présentent un avantage net pour le Canada. La disposition à laquelle je fais allusion est une modification conservatrice. Elle est donc bien connue de certains d'entre nous.

Nous savons que le gouvernement libéral soumet cette transaction de 6,9 milliards de dollars à un examen de cette nature, mais ni Industrie Canada ni le cabinet du ministre ne donnent de renseignements sur leurs négociations. Aux termes de la loi, le gouvernement peut négocier les avantages nets, mais nous n'arrivons tout simplement pas à savoir en quoi ils consistent. Pourquoi l'examen des avantages reste-t-il secret? Aucune disposition de la loi n'interdit la divulgation de ces renseignements.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateur, j'ai entendu une allusion au juge Gomery. Madame le sénateur établissait-elle un lien entre sa question et Terasen — Gomery et Terasen — ou bien est-ce que j'ai mal compris sa question?

Le sénateur Carney : J'ai établi un rapport entre ma question et le secret dont le gouvernement libéral entoure un si grand nombre de ses actions, ce à quoi le juge Gomery a fait allusion. Je dis que le secret entoure l'examen que le gouvernement est en train de faire de l'acquisition de Terasen Gas par Kinder Morgan, du Texas. Six mille Britanno-Colombiens ont écrit à la commission des services publics de leur province pour exprimer leurs inquiétudes. Pourquoi ne pouvons-nous pas connaître les résultats de l'examen ni savoir ce que le gouvernement du Canada tente d'obtenir de Kinder Morgan? Rien, dans la loi, n'empêche de rendre publiques les négociations sur les avantages nets.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je voulais qu'il soit clair pour les sénateurs et moi-même que l'allusion au juge Gomery n'avait rien à voir avec le dossier Terasen. Le juge Gomery n'a rien dit de Terasen, et je veux que ce soit parfaitement clair.

Pour répondre à la question, je dirai que madame le sénateur Carney est pleinement au courant du fait que, aux termes de la loi, il faut établir, pour les acquisitions de plus de 250 millions de dollars, qu'il existe un avantage net pour le Canada. Le gouvernement dont l'honorable sénateur a fait partie a modifié la loi pour y ajouter ce critère.

En général, les négociations doivent être menées entre des fonctionnaires fédéraux compétents et les membres d'une société donnée. Dans ce cas-ci, les actionnaires de Terasen ont signifié leur approbation du transfert du contrôle de l'entreprise à une société américaine, et c'est ainsi que le gouvernement est en train d'examiner la question de l'avantage net.

Je le répète, il s'agit d'une question de négociation et de l'établissement, par la négociation, d'un avantage net. Je ne vois pas comment quiconque pourrait demander que les négociations fassent l'objet d'un examen public pendant qu'elles se déroulent, avant qu'elles n'aient abouti.

INVESTISSEMENT CANADA—L'ACQUISITION PAR DUKE ENERGY DE WESTCOAST ENERGY

L'honorable Pat Carney : Étant donné la réponse du ministre, ma deuxième question porte sur l'acquisition de Westcoast Energy, en Colombie-Britannique, par Duke Energy, l'une des plus grandes entreprises de transport de produits énergétiques en Amérique du Nord, dont la valeur s'élevait à 8,5 milliards de dollars américains en 2001.

Cette acquisition n'en est qu'une parmi bien d'autres, évaluées à plusieurs milliards de dollars, qui devraient avoir lieu au Canada au cours des prochaines années, vu l'intérêt suscité par nos ressources en énergie et nos réseaux de transport de produits énergétiques.

Aux termes de la loi, ce marché est soumis à un examen d'Investissement Canada. Par conséquent, le leader du gouvernement peut-il donner des détails sur les avantages nets qui font l'objet de cet examen? Si je pose la question, c'est parce que nous n'avons pu obtenir ces renseignements du cabinet du ministre.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, il y a quatre ans que cette transaction a été approuvée par les actionnaires de Westcoast Energy. Quant aux avantages nets, je vais vérifier ce que le gouvernement a dit à ce moment-là et j'en informerai madame le sénateur Carney.

INVESTISSEMENT CANADA—LES AVIS SUR L'AVANTAGE NET—LA DIVULGATION DES DÉCISIONS

L'honorable Lowell Murray : Le leader du gouvernement n'est pas sans savoir que, aux termes de la Loi sur Investissement Canada, lorsque le gouvernement est convaincu qu'un investissement présente un avantage net pour le Canada, il doit transmettre un avis à cet effet à la société en cause ou, au contraire, s'il ne le fait pas, la demande est présumée complète.

En ce qui concerne l'affaire à laquelle madame le sénateur Carney a fait allusion tout à l'heure et celle dont le gouvernement est maintenant saisi, le leader du gouvernement nous dira-t-il si les avis ont été envoyés et quand, et si les décisions seront rendues publiques, avec l'analyse qui leur a servi de fondement?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je vais me pencher sur la question et m'attarder particulièrement aux précédents qui ont été établis depuis l'entrée en vigueur de cette loi, sous le gouvernement Mulroney.

LA DÉFENSE NATIONALE

LE NCSM WINDSOR—LA PANNE DE TRANSFORMATEUR

L'honorable J. Michael Forrestall : Honorables sénateurs, j'aimerais poser quelques questions au leader du gouvernement. L'une concerne le NCSM Windsor, le seul sous-marin en état de service dont dispose le Canada, et plus précisément l'incendie qui a éclaté à bord du bâtiment. Le ministre pourrait-il nous dire si, selon l'information dont il dispose, le sous-marin a subi des dommages importants au point de le rendre non opérationnel pendant un temps prolongé ou encore si les dommages sont sans gravité et peuvent être réparés rapidement?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Le ministère de la Défense nationale m'informe qu'il y a eu une panne de transformateur le week-end dernier à bord du NCSM Windsor. Des membres de l'équipage avaient remarqué que de la fumée blanche s'échappait de la partie avant de la salle des machines. Il n'y avait toutefois pas de flammes. L'équipage a découvert que la fumée provenait d'un transformateur situé dans la boîte de commande d'un circuit d'eau réfrigéré, l'un des trois circuits à bord alimentant en eau froide le système de climatisation. L'incident n'a causé aucun changement dans la situation opérationnelle du NCSM Windsor.

Le sénateur Forrestall : Je suppose que nous devrions en remercier le bon Dieu. Remercions-le donc.

L'EMPLACEMENT DU NOUVEAU QUARTIER GÉNÉRAL

L'honorable J. Michael Forrestall : Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous renseigner sur le déménagement, maintenant rapporté dans la presse, du Quartier général de la Défense nationale, le QGDN, vers l'est de la ville? Le pauvre QGDN a déjà été à l'est, à l'ouest, au nord, puis au sud. Voilà maintenant qu'on parlerait de le réinstaller à l'est, quelque part à proximité des anciens terrains d'essai de la GRC.

(1440)

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Lorsqu'il est question de l'emplacement du ministère de la Défense nationale, ou devrais-je dire de spéculations concernant un déménagement éventuel de son Quartier général, le sénateur Forrestall a toujours une longueur d'avance sur moi. On me dit, honorables sénateurs, que l'on ne prévoit pas déménager le QGDN pour le moment.

LES AFFAIRES INDIENNES ET LE NORD CANADIEN

LES PROBLÈMES SANITAIRES TOUCHANT CERTAINES COMMUNAUTÉS AUTOCHTONES

L'honorable Gerry St. Germain : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et elle porte que sur les problèmes des Autochtones, problèmes qui posent un défi à tout le pays. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un défi qui se pose uniquement aux libéraux, aux conservateurs ou aux néo-démocrates. Ce défi se pose aux Canadiens, mais ce sont les libéraux qui sont les mieux placés pour agir. Il y a une différence.

Les habitants de Kashechewan et un certain nombre des 95 autres communautés autochtones d'un bout à l'autre du pays qui éprouvent aussi des problèmes d'eau et d'égout doivent faire bouillir leur eau depuis 2003. Mon collègue, le sénateur Tkachuk, a posé cette question au leader du gouvernement jeudi dernier.

Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et ses fonctionnaires sont au courant des problèmes depuis des mois. Tout indique que, pour une raison quelconque, le gouvernement n'a rien fait.

Le ministre pourrait-il dire au Sénat quelles sont les mesures adoptées pour corriger les problèmes de santé d'une façon durable? Je sais qu'on a entrepris un programme d'urgence et qu'on est en train de déménager la population. Quel est le plan à long terme pour venir à bout de ces problèmes?

Cet incident n'est pas unique. Il y en a déjà eu d'autres. Les Canadiens, qui dépensent 8,8 milliards de dollars, je crois, pour s'attaquer aux problèmes de l'eau potable dans les collectivités autochtones, méritent qu'on réponde à leurs questions. Ces réponses devraient venir du ministre.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai répondu aux questions concernant la qualité de l'eau dans la réserve Kashechewan, la semaine dernière. Je tiens à redire clairement aux sénateurs que le problème qui s'est présenté sur cette réserve a été porté à l'attention du ministre Scott au début de l'été. Le ministre s'est rendu là-bas en août pour discuter avec les représentants de la collectivité. Le problème est lié à la gestion du réseau de distribution d'eau qui est en place. Ce réseau n'était pas exploité correctement, de telle sorte qu'au début d'octobre, le colibacille a été décelé pour la première fois. Le réseau a été fermé.

En moins de deux semaines, des techniciens étaient sur les lieux. Ils ont réparé les installations et les ont remises en état de fonctionnement. Le colibacille a été éliminé. Entre-temps, d'autres problèmes de santé ont été diagnostiqués dans la réserve Kashechewan. Par suite de discussions avec le ministre Scott, le gouvernement de l'Ontario a décidé d'évacuer un certain nombre d'habitants de la réserve afin d'améliorer leur état de santé.

Le réseau de distribution d'eau fonctionne maintenant correctement.

Cependant, le ministre Scott a également annoncé, avec l'accord de la collectivité de Kashechewan, l'évacuation organisée d'habitants de la collectivité vers un site qui se trouve à quelque 600 ou 700 mètres de distance et qui n'est pas susceptible d'être touché par la marée. Le site actuel peut être inondé lorsque le courant s'inverse dans la rivière au bord de laquelle se trouve la collectivité.

Pour répondre à la question dans son ensemble, je dirai que, en 2003, le gouvernement du Canada a annoncé un programme quinquennal de 1,6 milliard de dollars pour améliorer la qualité de l'eau dans les collectivités autochtones du Canada. Le programme est en cours. On annoncera sous peu un autre montant pour l'améliorer et l'accélérer.

En fait, la qualité de l'eau ne constitue pas un problème seulement pour les collectivités autochtones. Il y a bien des endroits, qui relèvent uniquement des provinces, où la qualité de l'eau fait problème et où on a ordonné de faire bouillir l'eau.

Cette situation est en partie attribuable au changement de l'environnement. Elle est en partie attribuable à l'absence d'équipement approprié. L'investissement n'a pas été fait. Elle s'explique aussi par le fait que les gens qui exploitent les installations ne possèdent pas la formation nécessaire.

Ce sont des questions graves. Le sénateur Grafstein a plus d'une fois porté le problème de la qualité de l'eau potable à l'attention du Sénat. La question préoccupe beaucoup le gouvernement actuellement.

L'EFFICACITÉ DU MINISTÈRE À RÉSOUDRE LES PROBLÈMES

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, j'accepte assurément ce que dit le sénateur en ce qui concerne le court terme. Mais il n'a pas répondu à ma question en ce qui a trait au long terme.

Honorables sénateurs, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est responsable, entre autres, de ce qui suit : le bien- être de nos Autochtones, leur développement économique, leurs soins de santé, leur logement, leur éducation et l'eau potable. De toute évidence, le ministère ne fait pas son travail.

Pendant cinq jours, la semaine dernière, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a tenu des audiences partout dans l'Ouest canadien. Dans la région que le sénateur Austin et moi représentons, soit le Nord de la Colombie-Britannique, un aîné nous a carrément déclaré ce qui suit : « Vous m'avez parqué dans une réserve. Puis, vous m'avez donné un numéro. Vous m'avez envoyé dans un pensionnat. Vous m'avez fait dépendre de l'aide sociale et vous m'avez donné une éducation inférieure. Vous voulez que je survive et vous vous demandez ce qui ne va pas? » Il nous a dit que le ministère était paternaliste, qu'il avait infantilisé les Autochtones sous la garde de l'État et que le gouvernement ne faisait rien.

Honorables sénateurs, le gouvernement est resté les bras croisés dans ce dossier. Nous n'irons nulle part à moins de sortir des sentiers battus. Nous allons sans cesse répéter les mêmes erreurs.

Il existe des rapports signalant des problèmes semblables d'approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées qui touchent plusieurs autres populations autochtones. Nous avons vécu la crise de Davis Inlet. Qu'adviendra-t-il des gens que nous faisons déménager à Sudbury ou ailleurs? Nous sommes en train de déplacer en milieu urbain des populations qui ont vécu traditionnellement sur leurs terres.

Les Canadiens sont en train de poser de sérieuses questions et méritent qu'on leur réponde. Pourquoi des Canadiens vivent-ils dans des conditions dignes du tiers monde? Nous avons des ministres qui se rendent au Darfour, en Israël, en Palestine et partout dans le monde pour prêcher l'évangile des droits de la personne et pourtant, nous ne sommes même pas capables de respecter les droits de la personne et de voir aux besoins fondamentaux de nos peuples autochtones. C'est une honte. Je ne blâme aucun parti politique en particulier. Je dis simplement que le ministre actuel est celui qui est aux commandes et que c'est aux personnes qui sont aux commandes que revient la responsabilité d'agir sans tarder. Qui seront les prochains à prendre les commandes? C'est à eux qu'incombera cette responsabilité.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, selon moi, personne ne voudrait se dissocier des sentiments du sénateur St. Germain. Nous voulons tous améliorer le sort des citoyens autochtones. De mon point de vue, le gouvernement actuel a fait davantage dans cette optique que tout gouvernement antérieur.

J'aimerais vous donner les dernières nouvelles au sujet de la table ronde autochtone. Le premier ministre, les premiers ministres des provinces et des territoires ainsi que les chefs autochtones des cinq grandes organisations et de nombreux chefs régionaux se réuniront à Kelowna les 24 et 25 novembre. Il s'agit de la troisième étape du cycle des consultations effectuées en partenariat par le gouvernement du Canada et les dirigeants autochtones du pays. Il est important qu'au moment de former la table ronde, on ait décidé de s'appuyer sur un partenariat.

(1450)

Le sénateur et moi étions membre du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Lui et moi avons étudié des projets de loi et pris connaissance des doléances de la communauté autochtone qui se plaignait de ce qu'on faisait abstraction d'elle et qu'on ne tenait pas compte des Autochtones comme partenaires égaux. La situation a changé. Nous avons des relations de collaboration avec la communauté autochtone. Nous travaillons avec elle dans six grands secteurs. La communauté autochtone a défini l'éducation comme étant sa première priorité parce qu'elle souhaite renforcer sa capacité d'autonomie gouvernementale. Elle a également défini comme prioritaires la santé, le logement, le développement économique, la gouvernance et la création de capacités.

Honorables sénateurs, comme le sénateur St. Germain l'a dit, le gouvernement du Canada a, au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, un programme permanent de 8,8 milliards de dollars, dont le budget de base augmente.

À la table ronde de Kelowna, le gouvernement du Canada envisage de renforcer ce programme en consacrant des dépenses de plus d'un milliard de dollars au logement dans les cinq prochaines années et en apportant d'importantes améliorations à l'éducation, ce qui doit se faire avec l'appui des provinces et des territoires, qui sont les experts dans ce domaine.

Je n'ajouterai rien à cela, mais j'exhorte le sénateur St. Germain à suivre le processus qui est actuellement en cours. Si son parti le désigne comme représentant à la conférence de Kelowna, je serais très heureux de le rencontrer là-bas.

Le sénateur St. Germain : Je vous remercie.

J'ai essayé d'éviter toute considération politique dans cette question qui, à mon avis, n'a rien de politique. Le sénateur Austin dit que son gouvernement en a fait davantage pour les Autochtones. Je crois que c'est un mythe, mais je ne tiens pas vraiment à en discuter.

Le sénateur Tkachuk a posé au leader du gouvernement une question au sujet du leadership. Où étaient les dirigeants dans cette équation, dans ce désastre? Ils ont une responsabilité à assumer. Pourquoi n'ont-ils pas proposé cette solution plus tôt?

Est-ce qu'Ottawa s'est assuré les services des dirigeants indiens? Je parle de l'Assemblée des Premières Nations. Pourquoi ses dirigeants n'étaient-ils pas au courant de ces problèmes s'ils se trouvaient sur place? Ils reçoivent de nous une aide considérable, à juste titre, pour s'acquitter de leurs fonctions de leadership.

Je vais rapporter au sénateur Austin ce que m'a dit un aîné du nord de la Colombie-Britannique. Il m'a dit : « C'est étrange. Je peux obtenir un million de dollars pour l'assistance sociale, ce qui détruit les jeunes et la collectivité, mais lorsque je présente une demande d'aide pour le développement économique, le maximum que je puisse obtenir, c'est 80 000 $. » Il y a donc un million de dollars pour l'assistance sociale et 80 000 $ pour le développement économique.

Honorables sénateurs, j'espère que la table ronde donnera des résultats. Honnêtement, je crois que nous devons songer à démanteler ce que les Autochtones de l'Ouest et des autres régions du Canada connaissent sous le nom de MAINC. C'est un vrai cauchemar. Le MAINC devrait être la base de l'aide aux Autochtones. Il semble que plus les choses changent, plus elles sont les mêmes.

Je vais accepter l'invitation du leader du gouvernement. Je serai là les 24 et 25 novembre. J'espère que nous ne serons pas traités d'une manière partisane et que nous aurons la possibilité de présenter nos arguments.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, l'invitation dépend de l'approbation de la direction du Parti conservateur, qui doit d'abord désigner le sénateur St. Germain comme l'un de ses représentants à la conférence. S'il souhaite être là, il voudra sûrement en parler à son whip.

Le sénateur St. Germain : Je représenterai le peuple autochtone.

Le sénateur Austin : Le sénateur St. Germain a soulevé plusieurs questions dans ses observations. Tout d'abord, au sujet de l'Assemblée des Premières Nations, Phil Fontaine et l'APN ont pleinement participé aux mesures prises pour réagir à la situation à Kashechewan ainsi qu'au dialogue avec la direction locale de cette collectivité. Ils ont joué un rôle important en favorisant une réaction rapide. Je demande au sénateur St. Germain de croire à la capacité de l'APN de faire preuve de leadership lorsqu'il s'agit de s'occuper des problèmes de la communauté autochtone.

En ce qui concerne le reste des vues de l'honorable sénateur, je sais que le temps prévu pour la période des questions est probablement écoulé, mais je tiens à dire que je serais très heureux si nous pouvions éviter toute considération partisane lorsque nous traitons des questions autochtones.

Le sénateur St. Germain m'a demandé ce que le gouvernement du Canada compte faire. Je dois répondre au nom du gouvernement du Canada. S'il veut bien regarder les bleus, je crois qu'il sera satisfait du reste de la réponse.

[Français]

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter une réponse différée à une question orale du sénateur Keon, posée le 20 octobre 2005, concernant les soins à domicile.

LA SANTÉ

LA RENCONTRE DE 2004 DES PREMIERS MINISTRES SUR LES SOINS DE LA SANTÉ—L'ÉCHÉANCIER FIXÉ POUR LES SOINS À DOMICILE

(Réponse à la question posée le 20 octobre 2005 par l'honorable Wilbert J. Keon)

Le plan décennal de 2004 précise les services de soins à domicile qui seront fournis dans l'ensemble des provinces et des territoires d'ici 2006, selon une couverture intégrale et en fonction de l'évaluation des besoins. Nous nous attendons à ce que les provinces et territoires respectent leur intention d'assurer que les services seront mis en place à la fin de 2006.

Tous les gouvernements se rendent compte que les soins à domicile sont une façon efficace et économique de dispenser les services et cherchent à les élargir afin de prévenir l'hospitalisation ou d'en abréger la durée.

L'ensemble des provinces et des territoires ont réalisé des progrès dans la prestation de services de soins à domicile, avec l'aide des investissements fédéraux dans les soins de santé, et continuent à travailler à la mise en œuvre du plan décennal.

Tel que convenu dans le plan décennal, le Conseil de santé du Canada surveille la mise en oeuvre des services des soins à domicile et devra faire état des progrès réalisés en 2006.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

LA LOI SUR LES ALIMENTS ET DROGUES

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mercer, appuyée par l'honorable sénateur Goldstein, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-28, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues.

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole relativement au projet de loi C-28. Ce projet de loi renferme des amendements qui auraient deux effets. Premièrement, le ministre de la Santé serait autorisé à délivrer des autorisations de mise en marché provisoire pour des aliments qui contiennent certaines substances en des quantités fixées. Ensuite, ces aliments seraient exemptés des exigences relatives à leur vente prévues dans la loi et ses règlements.

Même si ce projet de loi traite de la salubrité des aliments, il englobe aussi une autre question importante, à savoir l'élaboration et l'application de règlements qui ne s'appuient pas sur des mesures législatives.

Je vais commencer par un bref aperçu du processus réglementaire actuel régissant la concentration de pesticides dans les aliments que nous consommons au Canada. Avant qu'un pesticide ne soit homologué aux fins d'utilisation au Canada, une agence fédérale, à savoir l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, doit déterminer le niveau de résidus de pesticide dans un aliment qui est jugé sûr aux fins de consommation humaine. Cette quantité, établie de façon scientifique, est ce qu'on appelle la limite maximale des résidus. Ces limites sont déterminées tant pour les aliments domestiques que pour les aliments importés. Elles sont aussi établies dans le cas de pesticides qui ne sont pas homologués aux fins d'utilisation au Canada, mais qui sont utilisés dans d'autres pays.

Tout aliment dont la concentration de résidus dépasse la limite maximale est jugé être falsifié, ce qui signifie qu'il est rendu impur par la présence d'un ingrédient étranger. En vertu de la Loi sur les aliments et drogues, il est interdit de vendre un aliment falsifié au Canada.

Les fabricants de produits alimentaires qui veulent faire changer une limite maximale de résidus doivent présenter une demande à Santé Canada. Le ministère effectue alors une évaluation scientifique afin de s'assurer que le niveau des résidus de pesticide proposé par le fabricant est sûr aux fins de consommation humaine. Si le ministère accepte la demande, la limite existante des résidus est modifiée en vertu du Règlement sur les aliments et drogues, et elle est publiée dans la Gazette du Canada.

Honorables sénateurs, deux ans peuvent s'écouler entre la fin de l'évaluation scientifique et la publication de la nouvelle limite maximale de résidus dans la Gazette du Canada. C'est un problème grave. En 1997, par suite de modifications apportées au Règlement sur les aliments et drogues, un processus a été mis en place permettant aux fabricants et aux producteurs de réduire le laps de temps entre l'approbation de l'aliment et sa vente légale aux consommateurs. Depuis huit ans, on se sert d'avis d'autorisation de mise en marché provisoire afin de lancer les produits alimentaires sur le marché le plus rapidement possible après avoir déterminé que leur teneur en pesticides ne présentait aucun risque pour la santé humaine.

(1500)

En 1997, les changements apportés au Règlement sur les aliments et drogues ont aussi conféré au sous-ministre adjoint de la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada le pouvoir d'émettre ces autorisations. L'article 30 de la Loi sur les aliments et drogues réserve clairement ce genre de pouvoir administratif au gouverneur en conseil.

Deux ans plus tard, en 1999, le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation s'est penché sur la question. Ce comité, bien sûr, est chargé de voir à ce que tous les règlements s'appuient sur les lois. Son travail n'attire pas beaucoup l'attention, mais il est utile et essentiel, car la grande majorité des mesures législatives qui régissent les Canadiens ne se trouvent pas directement dans les lois, mais dans les règlements. Comme le sénateur Mercer nous l'a dit la semaine dernière, le comité permanent a déclaré que, à son avis, seul le gouverneur en conseil peut délivrer des autorisations de mise en marché provisoire, même si c'est pour peu de temps.

Le projet de loi maintenant à l'étude répond à ces préoccupations. Il propose de clarifier la situation en ajoutant un paragraphe à l'article 30 de la Loi sur les aliments et les drogues précisément pour conférer au ministre de la Santé le pouvoir d'accorder des autorisations de mise en marché provisoire.

Santé Canada signale que 82 autorisations de mise en marché provisoire ont été accordées depuis que les dispositions réglementaires ont été modifiées en 1997. Comme les dispositions réglementaires en vertu desquelles elles ont été accordées n'avaient aucun fondement législatif, techniquement, toutes ces autorisations étaient illégales. Je ne voudrais pas laisser entendre que d'une certaine façon, elles ont mené à l'entrée sur le marché d'aliments dangereux; je dis plutôt que, si l'on observe strictement la lettre de la loi, les autorisations n'étaient pas légales parce qu'elles ne reposaient sur aucune disposition législative.

Ce projet de loi renferme des modifications qui feront en sorte que les produits alimentaires seront mis sur le marché dans les plus brefs délais après qu'une évaluation scientifique aura confirmé la sécurité des résidus chimiques qu'ils contiennent. L'exemption serait prévue pour certains groupes de substances : les médicaments à usage vétérinaire, les vitamines, les minéraux et les aminoacides.

Si le projet de loi était approuvé par le Sénat, il avantagerait vraisemblablement les producteurs d'aliments et les fabricants de produits alimentaires du Canada qui seraient ainsi mieux en mesure de livrer concurrence à leurs homologues américains. À l'heure actuelle, aux États-Unis, la Food and Drug Administration autorise la mise en marché de produits alimentaires dans ce pays au cours de la période d'approbation dans la mesure où elle ne contrevient à aucune autre mesure législative. Si les producteurs canadiens avaient la même possibilité, cela égaliserait les chances.

Honorables sénateurs, il est heureux pour nous que les questions de salubrité des aliments ne soient pas toujours la toute première préoccupation des Canadiens. La salubrité de notre approvisionnement alimentaire est souvent tenue pour acquise; toutefois, sa protection exige une vigilance constante de la part de nombreux groupes, y compris des parlementaires. Ayant cela à l'esprit, je crois que ce projet de loi fera l'objet d'une étude exhaustive au comité.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Jaffer, appuyée par l'honorable sénateur Cordy, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-49, Loi modifiant le Code criminel (traite des personnes).

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, le projet de loi C-49 porte sur le problème de la traite des personnes. Selon Justice Canada, cette mesure législative vise à préciser la définition criminelle de trois activités liées à la traite des personnes, en l'occurrence le déplacement de personnes d'un pays à un autre ou à l'intérieur d'un pays; les menaces ou l'emploi de la force, de la contrainte et de la fraude, et l'exploitation, à savoir le travail forcé, la prostitution forcée ou d'autres formes d'asservissement.

Le projet de loi établit trois interdictions. La première prohibe de façon globale la traite des personnes, qu'il s'agisse de recruter, transporter, transférer, recevoir, détenir, cacher ou héberger une personne, ou d'exercer un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements d'une personne en vue de l'exploiter ou de faciliter son exploitation. La deuxième défend à une personne de tirer avantage économiquement de la traite des personnes. La troisième interdit de retenir ou de détruire tout document de voyage ou tout document pouvant établir l'identité d'une personne ou son statut d'immigrant en vue de faciliter la traite des personnes.

Il faut noter que cette mesure législative portera sur la traite à l'échelle internationale et sur l'entrée en territoire canadien, mais elle portera également sur la traite au Canada.

Je crois que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles devrait se pencher sur l'application du projet de loi C-49 dans le cadre de notre système de justice pénale, mais je ne crois pas que le cadre pénal soit suffisant pour régler la question de la traite des personnes.

Ceux qui travaillent avec les victimes de trafic, les autorités policières et les organismes internationaux savent que, lorsqu'on alourdit les peines et rend le droit pénal plus sévère, ce sont les victimes qui subissent les pires conséquences. Si on s'interroge sur l'effet de peines plus lourdes et d'un resserrement des mesures contre le trafic, on constatera d'abord que le trafic sévit toujours et que, deuxièmement, les victimes souffrent encore davantage. Il serait naïf de penser que les lois seules peuvent mettre un terme au trafic. Il se fait simplement encore plus discret et plus dangereux, et les victimes sont exposées à de plus grands risques de violence.

Si on veut que le projet de loi C-49 soit un moyen plus efficace de faire condamner les trafiquants, il faudra que les victimes participent au processus pénal. Dans la plupart des cas, les services de protection offerts aux victimes ne sont pas très convaincants pour elles. Elles font déjà partie d'un groupe de personnes vulnérables qui ont une confiance limitée, voire nulle, envers elles-mêmes et envers les systèmes. Elles ont été lourdement atteintes par le pouvoir et la brutalité des trafiquants, et il est peu probable qu'elles puissent résister aux pressions des poursuites au cours desquelles elles doivent soit témoigner, soit être le sujet de l'audience. Dans bien des cas, la peur de la vengeance qui pourrait s'exercer contre elles ou des membres de leur famille dans leur pays d'origine est un moyen efficace dont usent les trafiquants pour contrôler les témoins. Et puis, comme nous savons que les services dont ces victimes ont besoin sont rares et comme nous n'avons pas encore mis en place un système dont les conséquences sont intégrées entre elles, le projet de loi aura forcément un effet limité.

Je fais allusion au fait que les victimes de trafic elles-mêmes n'ont pas l'assurance qu'on les autorisera à rester au Canada, et les conséquences d'un retour dans le pays d'origine pour y connaître un avenir pitoyable et, dans bien des cas, la dérision de la collectivité, qui découvre inévitablement le genre de travail qu'elles faisaient, suffisent à susciter la peur chez elles. Les victimes n'ont pas l'assurance d'obtenir le statut de réfugié ou d'immigrant, par exemple, dont elles ont besoin.

(1510)

Il y a des exemples de besoins à long terme chez des femmes qui ont été amenées par des trafiquants en ex-Yougoslavie à l'époque de la guerre. Même si elles sont été secourues grâce à l'action des Nations Unies et à des organisations internationales, elles ont subi des préjudices psychologiques et physiques durables.

Je n'ai rien contre les procédures prévues par le projet de loi C-49, si je considère l'intention qui sous-tend cette mesure, mais je souhaiterais que nous ayons une stratégie globale pour aborder les victimes de trafic d'une manière plus holistique et dans une politique-cadre nationale, au lieu des efforts fragmentaires que nous faisons maintenant.

Nous devons décider si nous abordons les victimes sous l'angle pénal, sous l'angle de l'immigration ou sous celui d'une activité comme la production, le travail, et cetera. Par exemple, nous avons adopté le projet de loi C-27, en 1997 pour modifier le Code criminel en ce qui concerne la prostitution des enfants, le tourisme sexuel pratiqué aux dépens des enfants, le harcèlement criminel et les mutilations génitales des femmes. Nous devons voir si cette loi a eu un effet quelconque dans l'intérêt des enfants.

En 2001, c'est sous l'angle de l'immigration que nous avons abordé la question du trafic. Le projet de loi C-11 alors proposé visait à mettre un terme à l'immigration qui empruntait des voies détournées. Des peines sévères ont été adoptées, les droits de la personne ont été limités, et on a insisté davantage sur les mesures de sécurité. Le gouvernement a également fait une distinction entre les passeurs et les trafiquants. Nous devons savoir si cette distinction est valable dans les poursuites et si elle a un effet sur les résultats pour les victimes. Par exemple, dans le processus d'immigration, les victimes n'ont pas droit à un statut spécial de réfugié ou autre, malgré le lourd préjudice subi. Pourtant, nous abordons toujours cette question sous l'angle du droit pénal et de la sécurité, et non de la protection des victimes. En outre, les conventions internationales portant sur le trafic de personnes, même si elles sont intégrées aux lois du Canada, doivent être remises en question dans une optique internationale. Le trafic d'êtres humains peut être considéré comme un problème d'ordre national ou international. À mon avis, il est temps de retenir pour tous comme principe directeur la protection de la personne. Si nous croyons sincèrement à l'égalité des droits pour les êtres humains, il faut tenir compte des plus vulnérables.

Le problème du trafic, surtout dans le cas des femmes, n'a rien de neuf. Certains diront qu'il est aussi ancien que la civilisation. Le vieux terme d'« esclavage » a été remplacé par « trafic de personnes ». Les opinions de la société et les politiques d'intérêt public varient, notamment à l'égard des travailleuses du sexe qui immigrent au Canada. Voici ce qu'on lit dans un article de Leslie Ann Jeffrey paru récemment dans La politique étrangère du Canada, volume 12(1), édition du printemps 2005 :

La question des travailleurs du sexe migrants ou de la « traite des femmes », comme on l'appelle communément, retient l'attention de la communauté internationale depuis une vingtaine d'années. Le gouvernement du Canada est entré assez tardivement dans ce débat. Peu de gens au Canada étaient au courant de la question jusqu'au milieu des années 1990 lorsque l'arrestation d'un certain nombre de Thaïlandaises et de Malaises sous des chefs d'accusation de prostitution a propulsé la question à l'avant-scène nationale. Le gouvernement canadien a été forcé de reconnaître le problème et de prendre part au débat qui faisait alors rage au niveau international. Les féministes se demandent si ce phénomène est le prolongement de l'exploitation sexuelle des femmes dans le monde ou s'il n'est qu'une autre forme de travail migrant; les pouvoirs publics se demandent si c'est un acte criminel ou une question concernant les droits de la personne. Lentement, le gouvernement canadien a commencé à définir sa position sur la traite, mais cette position va bien au-delà des préoccupations relatives aux droits humains des femmes.

Mme Jeffrey ajoute :

C'est-à-dire qu'en considérant la « traite des femmes » comme une question de politique étrangère et d'immigration, le gouvernement canadien externalise le problème et tente de faire passer le Canada pour une nation bonne et généreuse — alors que le commerce du sexe canadien et les politiques d'immigration elles-mêmes font amplement partie du problème. D'autre part, si on parvenait à changer le comportement canadien — surtout par la décriminalisation du commerce sexuel au Canada et l'établissement de politiques créant de bonnes conditions de travail pour tous les travailleurs du sexe — cela réglerait en bonne partie le problème. Le traitement des travailleurs du sexe migrants simplement comme victimes de la traite fait gravement problème pour un certain nombre de raisons.

Rappelons-nous seulement le débat qui n'est pas encore terminé dans notre pays sur la position de la ministre Sgro dans l'affaire de la danse contact et sur la responsabilité que continue d'exercer le ministre Volpe sur cette question.

Une autre approche se trouve dans un livre fascinant de Victor Malarek intitulé The Natashas. L'auteur traite de l'achat et de la vente de chair fraîche pour l'industrie mondiale du sexe, qui est organisée et qui, de tous les secteurs criminels, est celui qui croît le plus rapidement. On estime qu'au moins 2 millions de personnes dans le monde, des femmes et des enfants surtout, font l'objet de la traite des personnes pour le commerce du sexe tous les ans. À la page 7, on lit :

Pour moi, les natachas sont une génération de filles perdues. Pratiquement sans exception, dans les villes, grandes et petites, et les villages de l'Europe centrale et de l'Europe de l'Est, des filles et des femmes ont disparu. Ce qui est incroyable, c'est que la cause de leur disparition n'était ni la maladie, ni la guerre, ni même la tragédie de la famine ou des catastrophes naturelles. Au contraire, elles sont devenues des pièces remplaçables sur l'échiquier florissant de l'argent, de la luxure et du sexe. Le plus troublant, c'est que ce trafic est une catastrophe causée par l'homme et qu'il pourrait être empêché. Pourtant, le monde continue d'être insensible au sort de ces femmes et des ces filles. Le temps est venu de mettre fin à ce trafic.

M. Malarek conclut en disant que ce phénomène de l'assujettissement des femmes et des enfants ne disparaîtra pas tant qu'il n'y aura pas une volonté politique suffisante, à l'échelle mondiale, pour s'attaquer à ce problème au-delà des limites du cadre pénal.

Pour ceux qui n'ont pas lu l'ouvrage de Victor Malarek, j'aimerais faire quelques observations. Malarek dit qu'il y a eu de nombreuses vagues d'immigration de l'Asie, de l'Amérique latine et de l'Afrique vers le Canada. Il décrit la dernière décennie qu'ont connue les immigrants plus vulnérables venus de l'Europe centrale et de l'Europe de l'Est. L'ancienne Union soviétique et ses républiques satellites formaient une société fermée. Certes, on y violait sans vergogne les droits de la personne et les libertés fondamentales. Toutefois, chaque citoyen disposait de moyens élémentaires de subsistance au cours des dernières années du communisme. Avec la chute du mur de Berlin et l'effondrement de l'Union soviétique se sont vite envolés les espoirs de liberté et de démocratie qu'entretenaient les habitants de ces pays. Bien que ces derniers soient davantage scolarisés que ne l'étaient, peut-être, les populations d'autres parties du monde en voie de transformation ou de développement, les perspectives d'emploi et autres ouvertures s'offrant à eux étaient très limitées, particulièrement dans les régions rurales.

Les femmes dont parle Malarek étaient, en général, de jeunes femmes à qui l'on avait fait miroiter la possibilité de devenir bonnes d'enfants, aides domestiques, mannequins, actrices et même épouses. Bon nombre d'entre elles étant sans emploi, elles ont voulu saisir la chance qui leur était offerte d'assurer leur survie et celle de leur famille en fuyant vers l'Europe de l'Ouest, la Turquie, Israël, les États-Unis et le Canada. En fait, elles sont ensuite devenues le type de femmes le plus prisé pour le commerce du sexe aux quatre coins du monde. Même pour celles qui n'étaient pas assez naïves pour croire à ces offres d'emploi et qui savaient probablement dans quoi elles s'embarquaient, la réalité s'est transformée en cauchemar. Les organisations, les gangs, les individus, n'ont pas tardé à en faire des marchandises que l'on achète, que l'on s'échange, que l'on maltraite et, dans certains cas, que l'on supprime.

La lecture des chapitres du livre de M. Malarek dans lesquels celui-ci raconte avec force détails l'histoire de certaines de ces « Natasha » devrait nous être imposée à tous.

(1520)

Malgré l'assistance fournie par les Nations Unies et le Canada en vue de libérer les victimes non consentantes en ex-Yougoslavie, il n'en demeure pas moins que le Canada a aussi une part sordide de responsabilité dans cette affaire pour avoir exploité ces travailleuses du sexe. Le personnel de l'ONU et de l'OTAN, les organisations de secours international et toutes les factions rivales ont profité de ces femmes dans la zone de conflit. Les chapitres du livre de Malarek portant sur l'agonie de ces jeunes femmes sont déchirants. Leur grande méfiance à l'égard des autorités, elles qui ont grandi sous un régime répressif, et leur incapacité, sans doute due à l'inconscience, de s'adapter à la vie dans cette nouvelle société concurrentielle et ouverte y sont expliquées en détails.

À la lecture de l'ouvrage de M. Malarek, on se demande si les protections envisagées dans projet de loi C-49 seront d'un secours quelconque à ces jeunes femmes. Elles ont peur d'être renvoyées dans leur pays. Elles ont peur de témoigner contre leurs ravisseurs. Elles ne parlent pas notre langue. Elles se méfient des autorités. Elles ont peur que leur secret soit dévoilé et qu'il ne soit plus possible pour elles de mener une vie normale une fois rentrées dans leur pays. Voilà le côté sordide des sociétés occidentales, qui accueillent actuellement des milliers de femmes d'Europe centrale et d'Europe de l'est dans le commerce du sexe.

Selon la conclusion de l'article de Leslie Ann Jeffrey, un grand nombre de nos dispositions législatives et de nos mesures en matière d'immigration pénalisent davantage ces femmes vulnérables. Un effort doit être déployé à l'échelle mondiale afin de mettre un terme à cette épouvantable violation des droits de la personne. Il n'existe pas de remède miracle et une mesure législative ne peut pas être la solution à ce problème humain.

Honorables sénateurs, je voudrais aussi aborder le problème de la traite des enfants. Pour moi, la traite des enfants viole non seulement les enfants, mais leurs droits aux termes de la Convention relative aux droits de l'enfant, qui est une promesse que nous avons faite aux enfants de ce monde. De toute évidence, le document le plus signé et ratifié en matière de loi sur les droits de la personne que le monde ait jamais vu n'a pas su rallier suffisamment la communauté internationale pour s'attaquer à ce problème mondial si pressant.

Le travail des enfants, l'esclavage des enfants, les enfants-soldats, la prostitution enfantine et les problèmes d'immigration des enfants ne sont que quelques-uns des problèmes auxquels nous devons nous attaquer. J'espère toutefois que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se penchera sur ces problèmes au cours de la prochaine étape de son étude sur la Convention relative aux droits de l'enfant. J'espère donc que nous adopterons un point de vue plus global et que nous ne chercherons pas seulement à exposer ces problèmes d'une manière plus systématique, mais que nous trouverons aussi quelques solutions sous la forme de politique d'intérêt général se situant dans le contexte canadien et international.

Honorables sénateurs, je suis d'avis que ce projet de loi devrait être étudié par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Il devrait être étudié en relation avec d'autres mesures législatives dont nous avons étudié la cohérence et la conformité avec la Constitution. Les sénateurs de ce côté-ci sont disposés à appuyer le projet de loi C-49. Nous tenons simplement à déclarer publiquement que parler du problème de la traite des personnes ne suffit pas.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Madame le sénateur me permettrait-elle de poser une question?

Le sénateur Andreychuk : Bien sûr.

Le sénateur Grafstein : Je suis d'accord avec madame le sénateur quand elle dit qu'il faudrait renvoyer sans délai le projet de loi au comité pour qu'il l'étudie. Comme elle le sait parfaitement, les résolutions des Nations Unies et de l'OSCE vont en parallèle depuis six ou sept ans. Une résolution qui a été adoptée à Washington en juin dernier renfermait deux parties. La première, qui visait à régler ou du moins à réduire cette horrible traite des esclaves, portait sur la nature criminelle de ceux qui se livrent à ce trafic. La deuxième visait à protéger les victimes.

Les Américains se sont penchés sur cette question. Dans un excellent discours qu'il a prononcé la semaine dernière en réponse au sénateur Jaffer, notre collègue, le sénateur Phalen, nous a tous renvoyés à la loi américaine sur la protection des victimes de la traite. Je suppose que cette loi représente réellement l'autre réponse à de nombreuses questions qui préoccupent madame le sénateur. Est-ce exact?

Le sénateur Andreychuk : Je voudrais rendre hommage à l'OSCE. À mon avis, le travail de cette organisation et celui des parlementaires ont permis d'exposer de nombreuses questions mettant en cause les femmes et les enfants d'Europe centrale et d'Europe de l'Est. Cependant, je ne crois pas que ce soit là toute la réponse. Il y a un aspect criminel au trafic des personnes et là aussi, il y a l'aspect de la protection des victimes.

L'argument de Leslie Ann Jeffrey est que nous devons aller plus au fond du problème. Nous devons prendre en considération la prostitution partout dans le monde et déterminer ce que sera notre politique générale à cet égard.

En ce moment même, la Chambre des communes se penche sur la question de la légalisation de la prostitution, et les débats sont vifs. Nous devons nous attaquer à toute cette notion de prostitution.

Plus important encore, les femmes qui quittent l'Europe centrale et l'Europe de l'Est — et je connais bien la situation des femmes qui quittent l'Ukraine — ne le font pas par manque d'attachement envers leur pays. Elles ne partent pas parce qu'elles cherchent du travail. Elles partent parce qu'il n'y a pas encore de stabilité dans leur pays. Elles vivent dans la pauvreté et voient l'avenir avec bien peu d'espoir.

Bien des personnes sont victimes de la traite en raison des conditions sociales dans lesquelles elles vivent et en raison du cadre juridique. Je crois qu'il nous faut nous attaquer à ce problème à tous les niveaux.

Je félicite l'OSCE d'avoir reconnu deux points, mais à mon avis il est tout aussi important que nous nous attaquions aux problèmes de la transformation et du développement de ces pays.

Un des dilemmes, c'est que nous devons collaborer avec les pays que quittent ces femmes et ces enfants, où les forces policières et les bureaucraties sont réticentes à dénoncer le problème ou à en parler parce que leur pays tente d'entrer dans le nouveau monde, comme on dit. Elles n'exposeront pas ce qu'elles perçoivent comme étant le mauvais côté de leurs propres structures. Nous devons travailler avec ces pays pour avoir un impact à l'échelle mondiale et reconnaître qu'il s'agit d'un problème en Russie, en Ukraine, au Canada, en Corée et partout où cela se produit. C'est un phénomène mondial.

Le sénateur Grafstein : Je remercie l'honorable sénateur de sa réponse.

J'ai peut-être cité la résolution de l'OSCE hors contexte. Je l'enverrai à l'honorable sénateur et je la ferai circuler parmi nos collègues. Je crois que c'est une solution ou une série de solutions plus complète.

Les Américains ont joué un rôle de premier plan en portant cette question à l'attention de l'OSCE. Je les appuie. Ils ont présenté cette importante mesure législative. Comme le sénateur Phalen l'a signalé, elle traite de la protection des victimes qui témoignent au sujet des aspects criminels, mais elle va encore plus loin. Elle les appuie comme réfugiés et leur accorde des avantages.

Madame le sénateur est-elle d'avis que si nous présentions un projet de loi d'initiative parlementaire comme mesure complémentaire, nous pourrions le renvoyer à son comité ou bien au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour que les deux questions soient examinées en même temps? Si elle y consent, je vais m'engager à le faire.

Le sénateur Andreychuk : Je conviens que nous pouvons en faire plus au chapitre de la protection des témoins et peut-être présenter un projet de loi semblable à celui des Américains. Toutefois, je sais également, d'après mon expérience des poursuites judiciaires, que dès l'instant où nous trouverons des solutions pour contrer des actes criminels, les criminels, eux, trouveront des moyens, des ressources et des technologies pour être en avance sur nous.

Les groupes féminins avec lesquels je suis en rapport disent : « Oui, absolument, faites-le — ce sera utile — mais ne vous arrêtez pas là. » Nous devons comprendre que lorsque des gens tombent entre les griffes des trafiquants, la répression ne fait qu'attiser la violence dont ces femmes sont victimes, malgré nos bonnes intentions.

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots au sujet de la motion principale, mais je ne retarderai pas l'adoption de cette très importante mesure législative.

Je suis tout à fait d'accord. Comme c'est le cas la plupart du temps, madame le sénateur Andreychuk a exprimé un point de vue qui est exactement le mien. Je ne répéterai donc pas ce qu'elle a dit.

(1530)

La situation actuelle est parfaitement répugnante. Si nous pouvons avancer d'un pas dans la bonne direction, comme Canadiens, nous montrerons au reste du monde que nous sommes sérieux. Quand ce projet de loi sera renvoyé au comité, cet après- midi, je l'espère, je souhaite que ce dernier dispose d'un temps suffisant pour examiner ses aspects pratiques. J'espère, au moins que, si les membres du comité ne le font pas, des membres du personnel iront dans des bars de Toronto, de Montréal et de Vancouver pour se rendre vraiment compte de ce qui se passe... C'est de l'esclavage. Le comité devrait parler à certaines de ces femmes qui, pour des motifs financiers ou autres, comme madame le sénateur Andreychuk l'a signalé, ont cru bon de faire ce qu'elles font aujourd'hui.

Je crois que nous devons poursuivre notre étude non seulement pour adopter le projet de loi, mais pour aller au-delà. Toutefois, si nous en demandons trop, nous n'obtiendrons rien. C'est un pas dans la bonne direction. Il est possible de l'améliorer. Le comité l'examinera.

Le quartier où je suis né et où je continue à vivre aujourd'hui n'est plus ce qu'il était. Tous les jours, je vois des exemples du désastre qui nous entoure. Je ne vis pas dans un des beaux quartiers de Montréal, comme je pourrais probablement le faire. Je vis toujours là où je suis né. Ce que je vois me dégoûte tellement... Il y a des tragédies de toutes sortes.

Je parle à des personnes qui vivent ces choses que nous trouvons inacceptables, mais qu'elles-mêmes trouvent peut-être acceptables parce qu'elles sont dans le besoin. Elles se rendent compte ensuite qu'une fois dans l'engrenage, on ne peut plus jamais sortir.

J'espère donc que le comité examinera ce sujet. S'il a besoin d'exemples pratiques, où trouvera-t-il ces gens? Ne nous faisons pas d'illusions. Il y a de bons contribuables canadiens qui profitent du trafic des personnes.

Chose étrange, ces gens sont connus, les autorités les connaissent. Chose très étrange, ils vivent bien et tirent de plus en plus d'argent de ces tragédies. J'espère que le comité étudiera la situation.

Je voudrais dire que lorsque le moment viendra, je serais très heureux de faire profiter le comité de ma modeste expérience — expérience humaine, politique, locale. Je voterai sûrement en faveur de cette mesure, qui est un pas dans la bonne direction.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : D'accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur la Présidente intérimaire : Quand ce projet de loi sera- t-il lu pour la troisième fois?

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Je propose que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

PROJET DE LOI SUR LES SYSTÈMES DE TÉLÉDÉTECTION SPATIALE

DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Peterson, appuyée par l'honorable sénateur Zimmer, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-25, Loi régissant l'exploitation des systèmes de télédétection spatiale.

L'honorable Consiglio Di Nino : Je suis heureux de prendre part à ce débat. Avant de parler du contenu du projet de loi, j'aimerais aborder la question soulevée par le sénateur Peterson dans le premier paragraphe de son discours fort exhaustif du 20 octobre dernier :

Je saisis cette occasion pour demander aux honorables sénateurs d'étudier cette mesure de toute urgence, étant donné qu'on a besoin du projet de loi rapidement, qu'il comprend des éléments qui répondent aux besoins aussi bien du gouvernement que du secteur privé et qu'on souhaite que le gouvernement, l'industrie et tous les Canadiens puissent profiter des avantages qu'il peut présenter pour eux.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-25 a été présenté à l'autre endroit le 23 novembre 2004 et adopté le 5 octobre 2005. Contrairement à ce que le sénateur Peterson voudrait nous faire croire, il n'y a pas vraiment d'urgence. S'il était vraiment impérieux d'adopter ce projet de loi, je crois que l'autre endroit a échoué.

Même si nous ne devrions pas retarder indûment les projet de loi, notre rôle et notre mandat consistent à analyser en profondeur et à débattre de façon efficace tous les projets de loi dont nous sommes saisis, surtout lorsqu'il est question de sujets hautement complexes, comme celui-ci, qui peuvent avoir de sérieuses incidences sur la vie privée, la sécurité et, oui, la prospérité des Canadiens.

Le projet de loi C-25 porte sur la création d'un régime d'attribution de licences et sur l'établissement de mesures de contrôle juridiques et réglementaires sur l'utilisation et de la diffusion des données recueillies. Ces systèmes sont des satellites de haute technologie qui peuvent prendre, à partir de l'espace et avec une précision stupéfiante, des photos de la surface de la Terre et de tout ce qui s'y trouve.

Honorables sénateurs, le Canada est à l'avant-garde de cet exploit technologique. Nous sommes devenus des chefs de file mondiaux en 1995, lorsque nous avons lancé RADARSAT-1, un satellite de pointe dont le gouvernement est le propriétaire et l'exploitant, un satellite connu pour sa fiabilité, son rendement élevé et son efficacité. Il fait appel à un système radar à micro-ondes, le « radar à synthèse d'ouverture », qui dirige vers la Terre un faisceau d'énergie et en capte la réflexion sous forme d'images extrêmement détaillées.

Le sénateur Peterson a déclaré que la clarté de perception du satellite correspondait à une de résolution de huit mètres. Le satellite est en mesure de capter des images indépendamment de la lumière, de la nébulosité, des précipitations ou d'autres phénomènes naturels.

Honorables sénateurs, ce satellite comporte de nombreux avantages. Il peut permettre de mieux composer avec les désastres naturels et même de les éviter ou tout au moins d'en réduire les répercussions. Sur le plan commercial, ses applications sont très avantageuses, notamment comme instrument d'exploration permettant de localiser certains sites et de contrôler les activités qui s'y déroulent. Le satellite sert également à surveiller les périmètres du Canada, ce qui permet de garantir notre sécurité, notamment dans l'Arctique. Par ailleurs, il a évidemment des applications militaires.

On lancera, vers la fin de 2006, le satellite RADARSAT-2. Contrairement à la situation pour son prédécesseur, ce sont des intérêts privés qui en seront les propriétaires et les exploitants. En raison des progrès technologiques, la nouvelle version du satellite a des capacités beaucoup plus considérables que n'en avait la version originale, exploitée depuis maintenant 10 ans.

Par exemple, le satellite pourra percevoir clairement à partir de l'espace avec une résolution de 3 mètres, contrairement à la résolution de 8 mètres de l'ancien satellite. Si j'ai bien compris, il est en mesure de détecter une figure humaine. Je ne saurais dire ce qu'en pensent mes collègues, mais pour moi, nous sommes en pleine science fiction.

Je suis en mesure de comprendre les avantages de tels systèmes, mais je dois dire que je m'inquiète des possibilités d'abus et de mauvaise utilisation de cette technologie. Nous devons nous interroger sur des aspects comme la protection de la vie privée, l'espionnage aussi bien militaire que commercial, le non-respect des compétences provinciales, par exemple. Nous devons également nous pencher sur le pouvoir absolu accordé au ministre dans le cadre de ce projet de loi.

Honorables sénateurs, il faut reconnaître que les auteurs du projet de loi se sont efforcés de régler certaines de ces questions. Permettez- moi de vous en énumérer quelques-unes.

(1540)

En premier lieu, le projet de loi prévoit des mesures restreignant la communication des données obtenues au moyen de systèmes de télédétection spatiale et il institue un régime de réglementation pour les installations servant à exploiter ces systèmes et pour leur personnel, ainsi que pour les données recueillies et les produits dérivés.

En deuxième lieu, le projet de loi prévoit l'attribution de licences aux exploitants de systèmes de télédétection par satellite au Canada, ainsi qu'aux Canadiens qui exploitent de tels systèmes à l'extérieur du Canada. De plus, il permet au gouvernement de déterminer qui doit être titulaire d'une licence, qui doit délivrer, approuver, modifier, renouveler, suspendre ou annuler les licences et de quelle façon, ainsi que dans quelles conditions le titulaire d'une licence peut être tenu d'interrompre le service ou de fournir le service au gouvernement du Canada.

En troisième lieu, le projet de loi vise à préserver les intérêts du Canada en matière de sécurité et de défense nationales en veillant à ce que les mesures nécessaires soient en place pour régir la diffusion des images saisies par les satellites canadiens. Il accordera au gouvernement du Canada des pouvoirs en matière d'accès prioritaire aux services de télédétection spatiale et d'interruption de services normaux pour assurer la sécurité et la défense nationales, la conduite des relations internationales et les intérêts du Canada, ainsi que pour lui permettre d'observer ses obligations internationales. En outre, ce projet de loi autorise les demandeurs à faire approuver promptement leur demande de licence dans le cycle de développement du satellite pour être en mesure d'obtenir les investissements privés nécessaires, de financer le système, et ainsi de suite.

Enfin, le projet de loi autorise le ministre à ordonner au titulaire de licence de fournir au gouvernement du Canada tout service jugé souhaitable en ce qui concerne la conduite des relations internationales du Canada, la défense, la protection des infrastructures essentielles ou la protection civile.

Voilà une question complexe qui relève du domaine de la science de pointe. Comme mes connaissances des sciences et des technologies sont assez limitées, je dois admettre que je ne suis pas très à l'aise avec les règles qui régiront cette industrie, d'autant plus que l'on propose de transférer le pouvoir d'exploiter et de contrôler les systèmes au secteur privé. Le cadre juridique et réglementaire servant à en assurer la gestion doit prévoir les protections nécessaires pour prémunir les Canadiens contre l'utilisation à mauvais escient ou de façon abusive des données recueillies. Il est de notre devoir d'y veiller. Les audiences en comité devront permettre de trouver des réponses à ces questions et, espérons-le, à bien d'autres encore.

En terminant, j'espère sincèrement que mes collègues n'interpréteront pas les observations faites par le sénateur Peterson concernant l'adoption rapide de ce projet de loi comme une invitation à précipiter l'étude de cette question de la plus haute importance.

Son Honneur le Président : Je ne vois aucun sénateur se lever pour prendre la parole ou pour ajourner le débat.

Une voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères.)

LE BUDGET DE 2005-2006

AUTORISATION AU COMITÉ DES FINANCES NATIONALES D'ÉTUDIER LE BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A)

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis donné le 27 octobre 2005, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses projetées dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2006.

Son Honneur le Président : Souhaitez-vous prendre la parole, sénateur Rompkey?

Le sénateur Rompkey : Je propose que nous passions au vote.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) propose : Que le projet de loi S-45, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, ce projet de loi vise à garantir aux peuples autochtones du Canada une protection législative contre la discrimination.

Comme vous le savez, la Loi canadienne sur les droits de la personne est la loi antidiscrimination du Canada. Cette loi a été adoptée par le Parlement en 1977. Le Parlement fédéral a été l'un des derniers organes législatifs canadiens à adopter une loi antidiscrimination.

Les loi nommées « Loi sur les droits de la personne » qui sont en vigueur dans chaque province et territoire, ainsi qu'à l'échelon fédéral depuis 1977, sont en fait des lois antidiscrimination. Elles ne concernent pas l'éventail complet des droits de la personne. Franchement, le titre suggère une portée plus vaste que ce que couvrent en réalité la loi antidiscrimination du Canada et les autres lois fédérales, provinciales et territoriales.

Quand la Loi canadienne sur les droits de la personne a été adoptée, elle contenait l'article 67. Ce dernier précisait que les membres des Premières nations assujettis à la Loi sur les Indiens ne pouvaient bénéficier des protections accordées par le système de la Loi canadiennes sur les droits de la personne. Ces membres ne pouvaient profiter ni de la Loi canadienne sur les droits de la personne ni des services de la Commission canadienne des droits de la personne. En quelque sorte, le Loi canadienne sur les droits de la personne contenait une disposition juridique discriminatoire, ce qui est quelque peu paradoxal. Nous avons dit que nous allions accorder le bénéfice de la loi, en l'occurrence un mécanisme fédéral de lutte contre la discrimination, à tous les Canadiens sauf aux membres des Premières nations qui sont assujettis à la Loi sur les Indiens.

À tout le moins, cet article est un accident de l'histoire. Il a été inclus en réponse à des préoccupations selon lesquelles le fait de permettre aux Autochtones de bénéficier de la Loi canadienne sur les droits de la personne aurait l'effet accessoire de modifier la Loi sur les Indiens. C'était ce qu'on disait à l'époque. D'immenses pressions ont été exercées afin d'éviter cette situation. Le gouvernement canadien a toujours promis aux communautés autochtones qu'il ne modifierait pas la Loi sur les Indiens sans les avoir pleinement consultées au préalable.

À l'époque, on pensait que la Loi sur les Indiens allait être remplacée sous peu. Les négociations et les consultations qui ont eu lieu depuis le livre blanc de 1969 ont toutes donné lieu à la conclusion selon laquelle il fallait remplacer la Loi sur les Indiens. Comme le savent tous les sénateurs et tous les Canadiens, le moins qu'on puisse dire est que ces discussions n'ont pas porté fruit. À l'époque où la Loi canadienne sur les droits de la personne a été présentée, on avait très clairement souligné que l'article 67 n'était qu'une disposition temporaire.

Le ministre de la Justice de l'époque, l'honorable Ron Basford, que de nombreux sénateurs connaissaient très bien, avait affirmé que le Parlement ne tolérerait pas bien longtemps le maintien de cette exemption. Malheureusement, le Parlement ne s'est pas montré à la hauteur des attentes du ministre Basford. Nous avons toléré qu'une partie de la collectivité autochtone languisse pendant quelque 28 ans dans les limbes, sur le plan des droits de la personne et de la protection contre la discrimination.

(1550)

La Loi canadienne sur les droits de la personne est tout à fait distincte de la Loi sur les Indiens. Nous parlons ici de la Loi canadienne sur les droits de la personne et non de la Loi sur les Indiens. Nous discutons des droits à l'égalité protégés par la loi. Nous savons tous que l'article 15 de la Charte accorde une protection constitutionnelle, mais le projet de loi à l'étude traite de la protection législative contre la discrimination, protection à laquelle, hélas, les membres des Premières nations n'ont pas eu droit depuis plus de 28 ans.

Les membres des Premières nations qui habitent dans les réserves attendent depuis 28 ans que cette disposition législative temporaire soit corrigée. Ils ont assez attendu. Les parlementaires peuvent modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne immédiatement, et je soutiens qu'ils doivent le faire.

Il pourrait être tentant de croire que le problème est passé inaperçu au cours des 28 dernières années, mais je rappelle à tous les honorables sénateurs que cela n'a pas été le cas. Il n'a pas manqué d'appels solennels et officiels à abroger cette disposition. Des défenseurs des droits de la personne, des dirigeants de collectivités autochtones, des universitaires et des représentants gouvernementaux ont tous exprimé avec insistance leur conviction que cette disposition devait être abrogée.

Avant même qu'il ne soit promulgué, l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne a suscité de graves préoccupations. Lorsque cette mesure a été débattue pour la première fois aux Communes, le député néo-démocrate de New Westminster, M. Leggatt, a affirmé à l'autre endroit :

Une loi sur les droits de la personne doit protéger tout le monde sans comporter toutes sortes d'exceptions... Une véritable législation sur les droits de la personne doit tenir compte des groupes qui sont victimes de discrimination. Le ministre en a oublié plusieurs.

Il est clair que la faiblesse de cet article n'a pas échappé aux députés il y a 28 ans. Un concitoyen du Nouveau-Brunswick qui fut été le premier président de la Commission canadienne des droits de la personne, Gordon Fairweather, et que de nombreux sénateurs connaissent, a également fait remarquer l'injustice de cette disposition au cours d'un témoignage devant un comité :

... nous perpétuons une grave injustice envers les Indiennes... nous maintenons précisément l'inégalité dont parle mon collègue...

Honorables sénateurs, l'impact négatif de l'article 68 n'a échappé à aucun de ceux qui ont participé à l'étude du projet de loi. Pourtant, les critiques, comme les parlementaires dont j'ai parlé, ont été rassurés par les propos du ministre de la Justice de l'époque, qui a dit :

Le gouvernement s'est engagé de bonne foi à ne pas modifier la Loi sur les Indiens sinon à l'issue de ce processus de consultation... il serait profondément regrettable de perturber en ce moment une relation de travail... qui permettra de réviser la Loi sur les Indiens. Je ne crois pas que nous voulions compromettre ce mécanisme et cette relation. Je souhaiterais une solution rapide, mais ce processus... est long... Le processus dont je parle a été entamé il y a deux ans, et j'espère qu'il donnera des résultats.

C'était il y a 28 ans. Il est maintenant flagrant que le processus de révision de la Loi sur les Indiens a échoué. Il est temps de reprendre directement la Loi canadienne sur les droits de la personne et de la modifier en fonction de la réalité, et non d'une situation hypothétique qui pourra exister ou non à un moment donné.

La réalité, c'est que les Autochtones du Canada n'ont pas accès aux protections des droits fondamentaux et aux recours que les autres Canadiens tiennent pour acquis. Il ne s'agit pas là d'un argument d'universitaire, ni d'une situation étrange ou hypothétique. Une collectivité autochtone a été évacuée de chez elle la semaine dernière parce qu'on ne répondait pas à un de ses besoins fondamentaux : de l'eau potable pure. Il est actuellement interdit à ces personnes, à cause de l'article 67, de se prévaloir de la protection offerte par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Sans cela, comment auraient-elles pu se servir de cette loi? L'un des domaines de ressort fédéral où la discrimination est interdite est celui de la prestation des services, et on peut fort bien convenir que cet incident aurait été interprété comme le refus d'un service fondamental relevant de l'autorité fédérale. Mais il a été impossible de faire une démarche semblable, à cause de l'article 67, qui interdit aux membres des Premières nations de présenter des plaintes en vertu de la Loi sur les droits de la personne.

Le lendemain de la première lecture du projet de loi S-45 au Sénat, la Commission canadienne des droits de la personne a publié un rapport intitulé Une question de droits — Rapport spécial de la Commission canadienne des droits de la personne sur l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Honorable sénateurs, dans ce rapport publié mercredi dernier, la Commission canadienne des droits de la personne nous dit qu'elle reçoit chaque année une vingtaine de plaintes de membres des Premières nations et qu'elle ne peut s'en saisir à cause du régime d'exception prévu par l'article 67. C'est dire qu'il y aura eu plus de 560 atteintes présumées aux droits de la personne que cette commission n'a jamais entendues et qui n'ont jamais donné lieu à des mesures correctives. Tout cela parce que l'article 67 refuse aux membres des Premières nations des droits dont jouissent les autres Canadiens. On ne peut pas dire combien d'autres plaintes ne sont jamais soumises à la commission parce que les victimes savent qu'elles ne peuvent y recourir et qu'elles ne se donnent pas la peine de faire des démarches pour se faire répondre qu'on ne peut rien pour elles.

Depuis que la loi fédérale a été adoptée, en 1977, les propositions et les exhortations se sont succédé pour qu'on abroge cet article. J'ai signalé l'opportun rapport de la Commission canadienne des droits de la personne. Cette commission qualifie l'article 67 de lacune inacceptable qui mine depuis longtemps le régime de protection des droits de la personne au Canada. La commission fédérale soutient aussi de façon convaincante que l'article 67 ne résisterait vraisemblablement pas à une contestation fondée sur la Charte. La Commission canadienne des droits de la personne réclame l'abrogation immédiate de cet article.

Il existe des précédents à pareille position. En 2000, l'ex-juge de la Cour suprême du Canada Gérard La Forest a participé à la rédaction du rapport du comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne intitulé La promotion de l'égalité : Une nouvelle vision. Soit dit en passant, le comité comprenait le professeur William Black, Me Renée Dupuis et le professeur Harish C. Jain, ainsi que le juge La Forest.

Dans leur rapport, les membres du comité ont examiné diverses possibilités afin de régler le problème du manque d'accès des Premières nations au cadre des droits de la personne. Je veux citer un bref extrait de ce rapport :

... la Loi doit refléter des valeurs universelles, qui ont été acceptées partout dans le monde. Nous estimons que tous les Canadiens, Autochtones et non-Autochtones, ont le même droit à l'égalité sans discrimination.

Le comité a conclu que priver les Autochtones de la protection contre les actes discriminatoires accordée par la loi à tous les autres Canadiens n'est pas approprié et il a donc recommandé l'abrogation de l'article 67 de la loi et l'inclusion dans celle-ci d'une disposition interprétative garantissant un juste équilibre entre les intérêts individuels des Autochtones et ceux des communautés autochtones. Voilà pourquoi cette disposition de fond est comprise dans le projet de loi S-45.

(1600)

L'argument veut simplement qu'il soit généralement reconnu que les collectivités autochtones partagent une conception fort différente des droits. Les valeurs autochtones mettent l'accent sur les droits collectifs, à la différence de la philosophie qui fait ressortir les droits individuels. Pour que les valeurs étrangères sociologiquement aux Premières Nations soient reconnues, il faut accepter cette perspective unique et s'engager à la respecter.

Cette disposition veille au bon équilibre des intérêts de l'individu et de ceux de la collectivité. Une telle disposition est tout à fait conforme au Projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies, qui invite les États à prendre des mesures pour aider les peuples autochtones à protéger leurs cultures, leurs langues et leurs traditions. La cause est importante et a trouvé l'expression mot pour mot dans une initiative gouvernementale qui est morte au Feuilleton.

Honorables sénateurs, l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne a aussi suscité de vives critiques à l'extérieur du Canada. Les Nations Unies ont souvent critiqué le Canada parce qu'il continuait à inclure un tel affront aux droits à l'égalité dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, par-dessus le marché. Sur la scène internationale, la réputation du Canada en tant que pays qui respecte et encourage la promotion des droits de la personne serait diminuée si nous refusions de corriger cette anomalie.

Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies doit veiller au respect du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, que le Canada a ratifié et qui est subordonné au droit international conventionnel depuis 1976. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies continue d'exprimer une grande inquiétude à l'égard du fait que la situation des peuples autochtones demeure une des questions les plus pressantes en matière de droits de la personne auxquelles les Canadiens doivent s'attaquer.

Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a traité directement du fait que les Autochtones n'ont pas accès au cadre régissant les droits de l'homme. Le comité des Nations Unies a recommandé que les lois pertinentes en matière de droits de l'homme soient modifiées pour garantir l'accès à un tribunal compétent et pour offrir une solution efficace à tous les cas de discrimination.

De plus, sur la scène internationale, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme et les libertés fondamentales des peuples autochtones, Rodolfo Stavenhagen, doit voir à la collecte et à l'échange de renseignements auprès de toutes les sources pertinentes, y compris les gouvernements, les peuples autochtones, leurs collectivités et leurs organisations, sur les violations de leurs droits et de leurs libertés fondamentales. Son mandat consiste à formuler des recommandations et des propositions à l'égard de mesures et d'activités appropriées visant à prévenir les violations des droits et des libertés fondamentales des peuples autochtones et à y remédier.

Dans son rapport de 2004 sur la situation des droits et des libertés fondamentales des peuples autochtones, à la suite d'une mission au Canada, M. Stavenhagen a souligné l'écart qui se maintient entre les Autochtones et les citoyens non autochtones quant aux normes de santé, aux conditions de logement et aux services de santé. Au nombre de ses recommandations, M. Stavenhagen a souhaité l'abrogation de l'article 67.

En 2005, le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de la Chambre des communes a aussi souhaité l'abrogation de l'article 67. Le comité de l'autre endroit s'est dit d'accord avec les témoins qui ont jugé nécessaire d'ouvrir une voie de recours pour les Autochtones dont les droits auraient été violés. Le comité a recommandé ce qui suit :

[...] le gouvernement entreprenne un examen immédiat de la Loi canadienne sur les droits de la personne dans le but de protéger les membres des Premières nations vivant dans les réserves contre la discrimination dont ils pourraient faire l'objet en vertu de la Loi sur les Indiens.

Honorables sénateurs, les 17 et 18 octobre derniers, j'ai eu le plaisir d'assister à une audience des Nations Unies, tenue à Genève. Au cours de cette réunion, le Canada a répondu à des demandes de renseignements ayant trait au cinquième rapport de notre pays au Comité des droits de l'homme des Nations Unies sur notre observation du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Six ans après que le Comité des droits de l'homme des Nations Unies ait recommandé pour la première fois que les peuples autochtones aient accès au cadre régissant les droits de la personne, le Canada n'avait pas encore fait le moindre progrès à cet égard. Le comité a donc interrogé le Canada sur le maintien de cette exemption prévue dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, qu'il avait trouvée inconcevable étant donné qu'elle était fondée sur la race. J'ai observé nos représentants tenter d'expliquer pourquoi cet article existait toujours après tant années alors qu'on en avait recommandé l'abrogation. J'étais mal à l'aise de les entendre défendre une disposition tellement dépassée et, une fois de plus, s'engager à agir à cet égard.

Honorables sénateurs, les conditions de vie dans lesquelles un grand nombre de nos Autochtones se trouvent retiennent l'attention du pays. Comme je l'ai mentionné la semaine dernière, la Commission des droits de la personne a rendu public son rapport demandant l'abrogation de l'article 67. Ainsi, il est à la fois opportun et correct de rectifier un raisonnement dépourvu de logique qui dure depuis 28 ans en matière de droits de la personne. Le Sénat du Canada est bien placé pour défendre et promouvoir les droits des groupes minoritaires.

Je ne vois pas de meilleure occasion pour que tous les membres de cette honorable enceinte appuient le projet de loi S-45 et abrogent l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ce projet de loi aurait dû être adopté il y a déjà longtemps. Chaque jour où l'article 67 demeure en vigueur, les droits fondamentaux des populations autochtones du Canada sont foulés aux pieds encore un peu plus.

J'encourage tous les sénateurs à appuyer ce projet de loi et à contribuer aux travaux du comité, qui démontreront le leadership du Sénat en vue de la réalisation de l'engagement du Canada envers ses populations autochtones.

Honorables sénateurs, en guise de conclusion, je rappelle les propos remarquables que la juge en chef de notre Cour suprême a tenus l'année dernière :

L'honneur de la Couronne est toujours en jeu lorsque cette dernière transige avec les peuples autochtones [...] Il ne s'agit pas simplement d'une belle formule, mais d'un précepte fondamental qui peut s'appliquer dans des situations concrètes.

Honorables sénateurs, je fais appel à votre concours afin que la prochaine fois que les représentants de notre programme relatif aux droits de la personne assisteront à une audience à Genève, ils puissent porter la tête haute et annoncer que nous avons enfin abrogé l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

L'honorable Serge Joyal : Le sénateur Kinsella accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Kinsella : Oui.

Le sénateur Joyal : Je souhaite saluer l'initiative du sénateur. Les sénateurs présents en cette enceinte savent qu'il connaît très bien la Loi canadienne sur les droits de la personne. Par le passé, le sénateur Kinsella a pris, pour modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne, des initiatives qui ont abouti, particulièrement en ce qui concerne l'orientation sexuelle. Il a agi en ce sens de manière persévérante et rationnelle. Les archives sont élogieuses à l'égard de l'honorable sénateur.

Le projet de loi du sénateur contient deux articles. Il s'est surtout exprimé à l'égard du deuxième, qui est libellé comme suit : « L'article 67 de la même loi est abrogé. » J'appuie cette disposition sans aucune restriction.

Toutefois, le sénateur propose également un amendement à l'article 16.1. Je lui demanderais de nous l'expliquer. Je l'ai écouté attentivement. L'article 16.1 qui est proposé est libellé comme suit :

Dans toute question pouvant faire, en vertu de la présente loi, l'objet d'une plainte contre une organisation gouvernementale autochtone, les besoins et les aspirations de la collectivité autochtone concernée qui sont compatibles avec les principes de l'égalité entre les sexes doivent être pris en considération pour l'interprétation et l'application des dispositions de la présente loi.

Cette disposition est importante, car le sénateur fait une exception conforme aux principes de l'égalité entre les sexes. La Loi canadienne sur les droits de la personne traite de motifs de discrimination illicite qui vont au-delà de l'inégalité entre les sexes, comme l'égalité entre les races, l'orientation sexuelle, ainsi de suite.

(1610)

Pourquoi l'honorable sénateur a-t-il qualifié d'exception cet aspect du projet de loi? Pourquoi pense-t-il que le paragraphe 16(1) proposé devrait être inclus dans le projet de loi?

Le sénateur Kinsella : Il est là notamment pour trois raisons. La première est que le projet de loi qui est mort au Feuilleton à l'autre endroit était un projet de loi d'initiative ministérielle et que le projet de loi S-45 en est virtuellement une copie conforme. Mon but est de faire modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne et peu m'importe qui en recevra le crédit. Il s'agit d'une loi sur les droits de la personne et non pas de la Loi sur les Indiens et c'est important de le comprendre. Il s'agit de la loi antidiscriminatoire fédérale. Si le ministre de la Justice appelait et qu'il disait qu'il va présenter un projet de loi dès demain, il aurait mon appui. Pour faire avancer les choses le plus rapidement possible, étant donné que le gouvernement appuyait de toute évidence ce genre de libellé dans le projet de loi qu'il a présenté, j'ai jugé opportun de ne pas faire excès de zèle créatif dans le libellé de mon propre projet.

Deuxièmement, ce qui est plus important, en examinant la Loi sur les droits de la personne, le juge La Forest et ses trois collègues ont fait une analyse assez détaillée de ce point. Ils ont formulé cette recommandation. Ils ont tenu des consultations poussées avec les autochtones. Mon réseau est très restreint en comparaison avec celui dont disposent le gouvernement et ce groupe de travail. J'ai donc voulu me baser sur leur expérience.

Troisièmement, le Sénat a examiné un certain nombre de projets de loi sur les gouvernements des Premières nations. Nous avons beaucoup appris sur l'autonomie gouvernementale et les objectifs sociaux des communautés. Cet article doit respecter les objectifs sociaux de cette communauté, comme elle-même les a définis.

Cependant, certaines choses ne sont pas négociables, notamment l'égalité des sexes. Il s'agit là bien entendu de l'affaire Lovelace, et notre distinguée collègue le sénateur Lovelace pourrait en parler longuement. Tout cela explique la présence de cet article.

Le comité qui examine le projet de loi s'arrêtera peut-être à ce libellé particulier ou peut-être modifiera-t-il le modèle — le gouvernement a peut-être changé d'idée. C'est pourquoi les projets de loi sont examinés en comité.

L'honorable Tommy Banks : L'honorable sénateur a mentionné que, dans le passé, le gouvernement ne voulait pas de cette modification parce qu'elle aurait éxigé une modification de la Loi sur les Indiens. Je me demande si l'honorable sénateur sait de mémoire quelles parties de la Loi sur les Indiens il aurait fallu modifier en conséquence.

Le sénateur Kinsella : Je remercie l'honorable sénateur Banks de sa question.

Lorsque la première version de la Loi canadienne sur les droits de la personne a été rédigée en 1976-1977 et présentée au Parlement, elle précédait la Charte des droits et libertés et la Loi constitutionnelle de 1982. Il y a eu énormément de discussions entre le gouvernement du Canada, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et le groupe qu'on appelait à l'époque la Fraternité des Indiens du Canada. C'était l'époque des premières tentatives pour faire reconnaître le droit des Autochtones à l'autonomie gouvernementale et il fallait pour cela définir, entre autres, qui était membre d'une Première nation. On a soutenu que le libellé de la Loi sur les Indiens était dépassé. Il y a eu de longues discussions au sujet de cette loi et de ce qu'il fallait en faire.

Toutefois, on n'a pas, à mon avis, suffisamment reconnu à l'époque les droits à l'égalité. En particulier, l'alinéa 12(1)b) de la Loi sur les Indiens était toujours en vigueur. En vertu de cet alinéa, si un Indien épousait une non-Indienne, cette dernière devenait Autochtone, mais si une Indienne épousait un non-Indien, elle perdait son statut d'Autochtone. On estimait que c'était acceptable.

En fait, les affaires Bédard et Lavell, qui traitaient de cette question, se sont rendues à la Cour suprême du Canada à une époque où cette dernière se servait de la Déclaration des droits de Diefenbaker comme norme. La norme était la même en ce qui a trait à l'égalité des sexes, et les juges de la Cour suprême ont rendu une décision partagée, à cinq voix contre quatre. L'opinion minoritaire a été rédigée par le juge en chef de l'époque, Bora Laskin, mais la cour a décidé que c'était ce que le Parlement voulait faire et que c'était acceptable. C'est pourquoi madame le sénateur Lovelace, s'étant trouvée dans la même situation, a cru bon de soumettre une communication aux Nations-Unies en vertu du protocole facultatif du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Je me souviens d'une conversation entre le premier ministre Trudeau et moi. Je lui ai dit : « Vous êtes probablement embêté par le fait que je fasse la promotion de cela. » Il m'a répondu : « Non, j'en suis heureux, car je ne fais pas vraiment de progrès auprès de la Fraternité des Indiens du Canada. »

Il est intéressant de souligner que, malgré le fait qu'un des membres du comité des droits de la personne, l'expert indépendant de la Tunisie, ait insisté sur la discrimination sexuelle présente dans la Loi sur les Indiens, la décision de la majorité ne portait pas sur la discrimination sexuelle, mais plutôt sur les effets de l'alinéa 12(1)b) qui portait sur le refus d'un droit culturel, c'est-à-dire le droit de vivre dans sa collectivité et de parler sa langue avec les membres de sa collectivité. C'est sur l'article 27, visant les droits culturels, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, que l'affaire Lovelace portait.

D'une certaine façon, c'était le tout début de la lutte pour l'autonomie gouvernementale des Indiens. C'était avant la Charte. Toutefois, le message était clair pour le gouvernement : si l'on souhaite présenter une loi sur les droits de la personne, il faut en exclure tout ce qui peut avoir rapport au fonctionnement de la Loi sur les Indiens. Comme en a convenu M. Basford à l'époque, il fallait agir de la sorte, tout en veillant à ce que ce soit une mesure à court terme. Le ministre de la Justice de l'époque a déclaré qu'il fallait faire preuve de compréhension et de bonne foi puisque des négociations étaient en cours, mais rien de concret n'a été fait et il convient maintenant de mettre de l'ordre dans ce dossier.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Pour faire suite à ce qu'a dit le sénateur Banks, l'honorable sénateur pourrait-il nous dire quelle est la position de M. Phil Fontaine, le chef national de l'Assemblée des Premières Nations, sur cette modification proposée?

Le sénateur Kinsella : Je devrai vérifier le compte rendu, mais je crois savoir qu'il appuyait le projet de loi du gouvernement, presque identique, qui est mort au Feuilleton.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

(1620)

[Français]

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Ferretti Barth, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-43, Loi modifiant le Code criminel (attentats suicides).

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, c'est avec plaisir et humilité que je me lève en cette Chambre pour exprimer mon appui et celui de mes collègues conservateurs au projet de loi S-43. Je souligne qu'il s'agit de mon premier discours en ce lieu. J'espère que vous me permettrez quelques instants pour dire quelques mots introductifs et de remerciement.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le vertige me saisit devant la perspective de collaborer au Sénat avec des personnes qui ont tant fait pour leur pays, aussi bien depuis leur nomination au Sénat qu'auparavant.

Tous les honorables sénateurs apportent au Sénat leur expérience de la politique, de la fonction publique, des affaires, de l'université, du service à la collectivité, du travail bénévole, du gouvernement, du monde des professions ou de celui de l'agriculture. Leur expérience donne du poids et de la profondeur à leur participation, tout comme elle enrichit le Sénat.

Cependant, ce n'est pas la raison précise qui explique qu'ils ont été invités à faire partie du Sénat. Si nous sommes ici, c'est parce que, à un moment donné de l'histoire, le premier ministre nous a appelés à siéger au Sénat et a avisé directement le gouverneur général de nous y convoquer. Dans mon cas, c'est au très honorable Paul Martin que je dois le privilège de servir au Sénat et il me semble que, avant de formuler toute autre observation digne de l'être, il serait dans l'ordre des choses d'exprimer mon appréciation à l'égard de celui qui, en me choisissant, a nommé au Sénat une personne d'une autre allégeance politique.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Segal : Honorables sénateurs, j'ai été aussi étonné de recevoir cet appel qu'il l'a probablement été de le faire.

J'ai été particulièrement ravi, le jour où j'ai prêté le serment d'allégeance à Sa Majesté, dans cette enceinte, que mon oncle Max, âgé de 80 ans, en pleine santé, et bardé de médailles et de décorations, puisse être présent à la tribune avec des membres de ma famille et des amis. Il est le frère cadet de ma défunte mère et a combattu dans les montagnes de l'Italie, pendant la Seconde Guerre mondiale, dans les rangs des Princess Louise Dragoon Guards. Il a été gravement blessé par des éclats d'obus à Montecassino, mais, à la suite d'une brève convalescence, il s'est joint à ceux qui ont libéré les Pays-Bas en arborant l'insigne canadien.

Le père de Max, mon grand-père Ben, a ouvert la première boulangerie casher à Montréal, sur le boulevard Saint-Laurent, peu après son arrivée de l'Empire austro-hongrois, dans les années 1890, comme immigrant économique. Je ne peux imaginer ce que lui ou mon défunt père, qui conduisait un taxi à Montréal pour joindre les deux bouts — il était lui-même arrivé au Canada comme immigrant politique en 1919, avec ses sœurs, son père et sa mère, fuyant la tyrannie de la révolution communiste en Russie — penseraient du sénateur qui prend la parole au Sénat en ce moment. Je suppose qu'ils concluraient, où qu'ils se trouvent en ce moment, qu'ils avaient bien fait de choisir le Canada, et que chacun de nous a le devoir, à sa façon, d'assurer que notre pays demeure fort, vivant, libre, accueillant, économiquement dynamique et empreint de compassion.

Le profond respect que j'éprouve pour mes collègues du Sénat et le superbe travail qu'ils accomplissent ici ne réduit en rien mon engagement, pris en 1998 lorsque je me suis présenté à la direction de mon parti, de voir la légitimité démocratique du Sénat renforcée par une réforme plus démocratique de l'attribution des sièges dans cette enceinte, comme le proposaient l'accord du lac Meech et l'accord de Charlottetown négociés entre les premiers ministres des provinces et le premier ministre Mulroney.

Je reconnais que le premier ministre Martin a dit que la réforme du Sénat devait attendre un consensus interprovincial, mais je serais certes ravi de donner ma démission si un projet de réforme du Sénat, appuyé par le gouvernement fédéral et les provinces, était mis de l'avant et que la démission du plus grand nombre possible de sénateurs devait en faciliter la réalisation. Sans être nullement sectaire, j'espère que si M. Harper forme un gouvernement, il donnera priorité à la réforme du Sénat pendant son premier mandat.

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur Segal : Honorables sénateurs, si vous m'y autorisez, je voudrais dire un mot au sujet de mon district, celui de Kingston—Frontenac—Leeds.

[Français]

Depuis 300 ans, le comté de Frontenac jouit d'une importante présence francophone. Ce comté est à l'image de notre pays : un regroupement de communautés anglophones et francophones qui cherchent à se tracer un destin commun. À plusieurs moments dans ma vie comme enfant à Montréal, étudiant à l'Université d'Ottawa, conseiller politique au bureau de M. Davis et de M. Mulroney et résident de Kingston, j'ai constaté combien cette dualité linguistique était une grande force pour le Canada. Je suis de ceux qui croient fermement que le plein essor du Canada dépend du succès de nos communautés francophones en milieu minoritaire. En tant que sénateur pour l'Est ontarien, je ferai de mon mieux pour contribuer à cet effort dans ma région, dans ma province et partout au Canada.

[Traduction]

Le district de Kingston—Frontenac—Leeds est aussi la région qui a été représentée dans le passé par deux MacDonald : l'honorable Flora MacDonald, qui continue, en tant que membre du Conseil privé, à faire honneur à bien des égards à la notion de service public désintéressé et, bien sûr, l'autre Macdonald, sir John A., comme nous l'appelons dans notre circonscription et dont nous célébrons la mémoire à Kinsgton, peut-être insuffisamment d'ailleurs.

J'appuierai la proposition du sénateur Joyal relativement à la maison de Louis-Hyppolyte Lafontaine à Montréal. Nous avons un immeuble, honorables sénateurs, à Kingston, qui abrite maintenant un snack-bar populaire, mais où sir Oliver Mowat, sir John A. Macdonald et sir Alexander Campbell, tous des Pères de la Confédération, pratiquaient le droit. Sir Alexander Campbell a fait partie de la plupart des Cabinets de sir John A. Macdonald en tant que premier sénateur de Cataraqui nommé par proclamation royale. J'ai dit l'autre jour au sénateur Champagne que le sénateur Campbell est né de parents écossais qui vivaient à Montréal, mais il a été envoyé très jeune au séminaire de Saint-Hyacinthe pour apprendre le français. C'est de cette façon que s'édifie un pays. Je suivrai l'évolution de la proposition du sénateur Joyal, cherchant avec empressement des précédents que nous pourrions appliquer à Kingston à la première occasion.

Nos collègues libéraux savent que le sénateur Alexander Campbell a été suivi par de distingués sénateurs comme Rupert Davies, éditeur respecté, le sénateur Francis Frost, industriel, le sénateur Arthur Hardy, avocat émérite et ancien Président de cette Chambre. En fait, John Meisel, célèbre professeur émérite de sciences politiques de l'Université Queen's, a été pendant plusieurs années titulaire de la chaire de sciences politiques Arthur Hardy. Les sénateurs conservateurs sont au courant que, de notre côté, nous avons eu le sénateur John Hamilton, armateur, le sénateur Henry Richardson, marchand de grain estimé, l'honorable Michael Sullivan, médecin et professeur à l'Université Queen's, l'honorable George Taylor, ancien député de Leeds et industriel, et l'honorable George White, avocat, député de Hastings—Peterborough, whip du gouvernement et Président de cette Chambre. Je suis honoré et comblé de me trouver dans cet endroit, où ils ont servi le pays.

[Français]

La division sénatoriale de Kingston-Frontenac-Leeds comprend des banlieues plus riches et prospères et des régions plus défavorisées. Dans mon travail de sénateur, je ferai de la lutte contre la pauvreté l'un de mes principaux combats, tout particulièrement du point de vue de la division urbaine et rurale qui menace le bien-être socio-économique de plusieurs de nos concitoyens. Donner aux communautés rurales la chance d'être participantes à part entière à la vie économique du XXIe siècle doit être une priorité de tous les gouvernements.

J'ai l'intention de travailler de tout mon cœur pour faciliter cette égalité des chances. J'ai noté avec beaucoup d'intérêt l'initiative de madame le sénateur Poulin à ce sujet.

[Traduction]

Je tiens aussi à féliciter madame le sénateur Pearson, madame le sénateur Johnson et l'ancien sénateur Erminie Cohen, du Nouveau- Brunswick, de leur travail, et, bien sûr, le sénateur David Kroll pour le travail remarquable qu'il a accompli il y a quelques décennies à cet égard.

(1630)

À Kingston, la présence vigoureuse et positive de la base des Forces canadiennes, l'envoi régulier de soldats, d'aviateurs et de marins dans des endroits névralgiques aux quatre coins de la planète, ainsi que l'important Collège militaire royal nous rappellent que les hommes et les femmes qui servent au sein des Forces canadiennes reflètent et défendent les valeurs canadiennes en s'exposant à de grands risques. À l'instar d'autres sénateurs comme les sénateurs Forrestall, Meighen, Kenny et Atkins, j'appuie les hommes et les femmes de nos forces armées. J'ajoute que cet appui sera une de mes priorités, au même titre que la lutte contre la pauvreté.

[Français]

Au nom des familles militaires qui résident dans la banlieue de Kingston, j'aimerais saluer le travail extraordinaire réalisé par madame le sénateur Pépin pour les conjointes et les époux militaires.

[Traduction]

Honorables sénateurs, j'en viens au projet de loi S-43. Dans une société, la civilité appelle l'ordre. Ma pensée conservatrice influence ma compréhension de ce projet de loi. La perpétration d'actes de terrorisme contre toute population civile, que ce soit dans les îles Britanniques, en Asie du Sud, en Oklahoma, au Proche-Orient, en Espagne ou dans le métro de Londres, vise l'ordre et la civilité qui définissent une société fondée sur la liberté et les possibilités à exploiter. Détruire la confiance du public, le sentiment de sécurité ou l'assurance des parents que leurs enfants peuvent fréquenter des cafés en toute sécurité avec leurs amis revient à détruire la confiance et la foi qui sont essentielles à la vie.

Le sénateur Grafstein a expliqué en détail l'appui officiel du Canada à la résolution sur les attentats suicides adoptée par l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. Il serait hypocrite de notre part de souscrire à cette résolution sans renforcer notre Code criminel pour interdire clairement et explicitement les attentats suicides.

Honorables sénateurs, pour justifier mon appui au projet de loi S- 43, je me permets de dire que le Code criminel n'est pas une simple loi-cadre pour la police et la poursuite, bien qu'il décrive les infractions qui doivent être punies. Le Code criminel est notre loi la plus coercitive, et il doit donc refléter notre volonté, en tant que nation et collectivité, d'avoir une position claire et d'honorer les résolutions que nous avons adoptées ou signées à l'échelle internationale. Le Code criminel doit interdire explicitement les activités qu'il vise à prévenir, surtout si ces activités et certaines sous-cultures sont valorisées par ceux qui seraient prêts à terroriser des populations civiles en posant un geste ultime contre ceux à qui ils s'opposent. Le Canada et les Canadiens doivent faire en sorte que le Code criminel, l'épine dorsale « de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement », réponde explicitement et clairement aux nouveaux instruments de terreur.

Nous exprimons ce que nous appuyons en mentionnant expressément et précisément ce à quoi nous nous opposons. À ceux qui font valoir qu'une définition précise est superflue, je dis que les généralités et le manque de clarté ne servent pas les intérêts liés à l'exécution, la présomption d'innocence, ou la capacité de surveillance. Des défendeurs innocents sont protégés par des renvois plus précis dans le Code criminel, qui visent à prévenir les complots en vue de commettre des crimes précis.

Le fait d'ajouter cette définition spéciale des « attentats suicides » à des fins de clarté n'a pas en soi pour but de poursuivre l'auteur d'un tel crime une fois que cet acte illégal et inhumain a été commis. Il est évident que le fait de leur accorder le pouvoir de poursuivre de façon préventive des individus impliqués dans des complots liés à d'éventuels attentats suicides chez nous ou à l'étranger donne un outil supplémentaire aux services de police et aux organismes d'exécution de la loi qui ont la responsabilité d'essayer de faire en sorte que notre société soit sûre. Notre société est sûre parce que le Sénat, en tant que partie intégrante du Parlement du Canada, a promulgué des lois, qu'il met régulièrement à jour au moyen de modifications, relativement au Code criminel, et que ces lois guident les services de police dans leurs activités d'exécution et de prévention. Ces lois forment le fondement des poursuites judiciaires dans notre système judiciaire transparent.

Honorables sénateurs, c'est une erreur dangereuse que de supposer, comme le font peut-être certains, que d'autres articles du Code criminel traitent des attentats suicides, et que cela suffit. Il n'est pas expressément fait mention de ces actes. Or, dans une société régie par des lois explicites et claires, le fait de faire expressément mention des attentats suicides à des fins de clarté renforce la loi, renforce les documents d'application qui peuvent à l'occasion être envoyés aux services de police par les autorités judiciaires, et renforce la clarté du mandat de ceux qui ont la responsabilité d'appliquer le Code criminel.

Être assujetti au Code criminel, c'est être assujetti à la pleine protection de la Charte des droits et libertés dans la Constitution du Canada. Je tiens ici à signaler l'excellent travail fait par madame le sénateur Fairbairn et ses collègues du Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste.

Je suis ravi de l'accueil favorable et du soutien que tous les sénateurs ont accordés à cette modification au Code criminel. Il s'agit d'un élément important de l'infrastructure de civilité que le Code criminel a été conçu pour protéger. Nous n'avons qu'à regarder ce qui se passe ailleurs dans le monde pour nous convaincre que nous ne voulons pas vivre l'horreur des attentats suicides sur notre territoire et que nous devons fournir aux autorités canadiennes les outils dont elles ont besoin pour empêcher les attentats suicides chez nous à l'étranger. Nous devons fournir à nos forces de police et à ceux qui les appuient tous les outils nécessaires à l'exécution de leur travail.

Je suis ravi d'exprimer l'appui que nous manifestons de ce côté-ci à l'égard du projet de loi du sénateur Grafstein. Je félicite le sénateur de son initiative. J'espère que cette question pourra rallier l'appui des deux côtés de cette Chambre, et peut-être aussi à l'autre endroit. Honorables sénateurs, je vous remercie de votre patience et de votre indulgence.

(Sur la motion du sénateur Eggleton, le débat est ajourné.)

AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE

AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER L'ÉTAT DES PRÉPARATIFS EN PRÉVISION D'UNE PANDÉMIE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Stratton, appuyée par l'honorable sénateur LeBreton,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner et faire rapport de l'état des mesures d'urgence que le gouvernement du Canada mettrait en œuvre en cas de pandémie et, en particulier, des mesures que la population, les entreprises et organismes du Canada peuvent prendre pour se préparer à une pandémie;

Que le Comité fasse rapport le 8 décembre 2005, au plus tard.—(L'honorable sénateur Rompkey, C.P.)

(La motion est adoptée.)

(1640)

[Français]

LE SÉNAT

MOTION VISANT LA CRÉATION D'UN COMITÉ SPÉCIAL CHARGÉ D'EXAMINER L'ÉCART ENTRE LES RÉGIONS ET LES CENTRES URBAINS—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Poulin, appuyée par l'honorable sénateur Poy,

Qu'il y ait création d'un comité spécial du Sénat chargé d'examiner l'écart entre les régions et les centres urbains du Canada;

Que des recherches soient effectuées pour étayer et mettre à jour les faits et les données concernant cet écart;

Que des témoignages soient recueillis afin d'obtenir un aperçu des problèmes que connaissent les régions dans des secteurs socio-économiques tels que le transport, les communications, l'emploi, l'environnement;

Que ce comité spécial soit autorisé à recueillir des témoignages à Ottawa et en régions;

Que ce comité spécial soit composé de cinq membres, dont trois constituent le quorum, et que deux membres suffisent pour l'audition de témoins;

Que le comité soit habilité à convoquer des personnes et à obtenir des documents et des dossiers, au besoin, et à faire imprimer au jour le jour documents et témoignages, selon ses instructions;

Que, conformément à l'article 95(3) du Règlement, le comité soit habilité à se réunir même si le Sénat est ajourné;

Que le comité soit habilité à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, d'une manière qui perturbe le moins possible ses travaux;

Que le comité présente son rapport final au plus tard le 30 juin 2006 et qu'il conserve jusqu'au 30 septembre 2006 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer ses rapports auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.—(L'honorable sénateur Stratton)

L'honorable Fernand Robichaud : Honorables sénateurs, cela fait 15 jours aujourd'hui que cette motion est inscrite au Feuilleton et madame le sénateur Callbeck m'a demandé de proposer l'ajournement du débat en son nom afin qu'elle puisse prendre la parole au sujet de cette motion lors d'une autre séance. Je propose donc l'ajournement du débat au nom du sénateur Callbeck.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, au nom du sénateur Callbeck, le débat est ajourné.)

[Traduction]

L'EFFICACITÉ DU GOUVERNEMENT DANS LA MISE EN OEUVRE DU PROTOCOLE DE KYOTO

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément à l'avis donné le 21 avril 2005 :

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur l'échec du gouvernement à agir de manière significative, efficace et immédiate dans le dossier des changements climatiques et, en particulier, sur son inaction à l'égard des objectifs fixés dans le Protocole de Kyoto.

Honorables sénateurs, je suis heureuse d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur l'interpellation concernant le plan du gouvernement libéral concernant le Protocole de Kyoto.

Comme vous le savez, le Protocole de Kyoto est un accord qui a été négocié par plus de 160 pays en décembre 1997, à Kyoto, au Japon. L'objectif de l'accord est d'amener les pays industrialisés à réduire collectivement leurs émissions de gaz à effet de serre de 5,2 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990 avant la période de 2008 à 2012. Le Canada s'est fixé pour objectif de réduire ses émissions de gaz à effet de serre d'une moyenne approximative de 5 p. 100 sous les niveaux de 1990.

La réduction des émissions de gaz à effet de serre n'est pas un sujet nouveau.

Il remonte à 1972, à la première Conférence des Nations Unies sur l'environnement humain, où on a accru la sensibilisation à l'environnement planétaire et où on a créé le Programme des Nations Unies pour l'environnement, le PNUE, dont le Canadien Maurice Strong a été le premier directeur. J'ai eu le bonheur d'être la représentante permanente du Canada auprès du PNUE pendant plusieurs années.

C'est au cours des années 1990 que le monde s'est réellement éveillé à la nécessité de tenir compte de notre environnement. Le Canada a joué un grand rôle dans ce réveil.

En 1987, le Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone a été signé par plus de 40 pays. Ce protocole mettait l'accent sur la réduction de 50 p. 100 des émissions de CFC avant 1999.

C'est aussi en 1987 que le premier ministre Brian Mulroney a rencontré la première ministre de la Norvège, Gro Harland Bruntland, pour accepter officiellement le rapport de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement. Ce rapport, intitulé Notre avenir à tous, a introduit l'expression « développement durable » dans notre vocabulaire.

Le premier ministre Brian Mulroney a adopté les recommandations du rapport en créant des institutions sur le développement durable dont la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie et l'Institut international du développement durable. Il a préludé à la création du Centre canadien de la modélisation et de l'analyse climatique, qui a par la suite été localisé à l'Université de Victoria. C'est également lui qui a nommé le premier ministre de l'Environnement du Canada.

En 1990, toujours sous la direction du premier ministre Brian Mulroney, nous avons déposé le Plan vert, qui devait être un fonds de cinq milliards de dollars sur cinq ans, renouvelé indéfiniment.

Ceux d'entre nous qui ont participé au Sommet de la Terre à Rio ou aux rencontres qui l'ont précédé en 1992 se souviennent de ces années et de cet engagement. Ce sommet réunissant 178 pays a conduit à l'établissement de la Convention-cadre sur les changements climatiques, un accord international sur la réduction des émissions de gaz associés au réchauffement de la planète, soit le dioxyde de carbone et le méthane. C'était la seule tentative mondiale pour s'attaquer aux changements climatiques. On n'a pas établi de cibles précises, mais on s'est entendu sur la nécessité de réduire les émissions aux niveaux de 1990 d'ici l'an 2000. C'était notre objectif national officiel.

On envisageait d'entreprendre immédiatement des négociations actives sur la scène internationale et de lancer un programme de sensibilisation. Les négociations et le développement faisaient également partie du plan canadien. Malheureusement, très peu de projets ont été entrepris.

L'accord contraignant est arrivé en 1997, à Kyoto, au Japon, lors de la troisième réunion de suivi des nations signataires de la convention. À cette occasion, le gouvernement du Canada a accepté d'adhérer au Protocole de Kyoto, aux termes duquel les pays industrialisés devaient ramener leurs émissions moyennes de gaz à effet de serre à quelque 5 p. 100 au-dessous des niveaux de 1990 entre 2008 et 2012, la première période visée par les engagements. Deux conditions étaient rattachées à cet accord. Tout d'abord, au moins 55 parties à la convention devaient ratifier le protocole. Ensuite, les pays industrialisés et ceux passant à une économie de marché qui avaient ratifié le protocole devaient être responsables d'au moins 55 p. 100 des émissions.

Ces deux conditions ont été respectées il y a un an lorsque la Russie a ratifié le protocole. Conformément à l'accord de 1997, en février 2005, le Protocole de Kyoto est entré dans le droit international.

Honorables sénateurs, tout cela pour dire que nous avons su pendant des années avant 1997 qu'il nous incombait de ramener nos émissions de gaz à effet de serre à un niveau inférieur de 5 p. 100 environ aux niveaux de 1990 et que nous savons depuis cette année- là que c'est une obligation légale. Nous savions tous depuis le Sommet de la Terre de Rio, en 1992, que nous allions essayer de réduire les émissions aux niveaux de 1990 d'ici l'an 2000. Lorsque nous avons fixé cet objectif, nous aurions dû avoir un plan réfléchi, bien compris par les Canadiens et bien accepté par les autorités fédérales et provinciales, ainsi que par les entreprises du Canada.

Au lieu d'essayer de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les années 1990, lorsque c'était encore réalisable, ce gouvernement a choisi d'attendre jusqu'à cette année, huit ans après la signature du Protocole de Kyoto initial, avant de présenter un plan concret.

Je ne comprends toujours pas pourquoi le gouvernement a tant attendu. Nous avions déjà un Plan vert, un bon stimulant, en 1990. Nous savions en 1992, alors que nous nous préparions pour des élections, que le monde entier s'intéressait à la question des émissions de gaz à effet de serre. En 1997, nous avions conclu une entente exécutoire. Toutefois, le gouvernement n'a rien fait pour empêcher l'augmentation de ces émissions. Entre 1995 et 1999, elles sont passées de 9 à 15 p. 100 au-dessus des niveaux de 1990.

En toute justice, je dois dire que le gouvernement a bien fait ses devoirs car il a préparé toute une série de documents expliquant ce qu'il comptait faire, mais il ne s'est jamais rendu jusque là. Il n'a jamais fait ce qu'il fallait pour adopter des mesures concrètes.

(1650)

Même la commissaire à l'environnement et au développement durable, Mme Johanne Gélinas, a parlé dans sa vérification de 1998 de la mauvaise planification et de la gestion inefficace qui avaient empêché le Canada de respecter les engagements qu'il avait pris en matière de changements climatiques. Dans la vérification qu'elle a effectuée en 2001, soit quatre ans avant la parution du plan de Kyoto, elle a de nouveau sonné l'alarme, affirmant que le Canada risquait de ne pas pouvoir atteindre les objectifs fixés. En fait, dans son rapport de cette année, qui a été rendu public le 29 septembre 2005, elle dit ce qui suit :

Au chapitre de la protection de l'environnement, le gouvernement fait d'audacieuses promesses, puis les oublie souvent aussitôt que le coup d'envoi est donné. Le gouvernement fédéral semble avoir du mal à croiser le fil d'arrivée.

D'autres ont aussi critiqué l'inaction du Canada dans ce dossier. À l'occasion de la récente conférence des parties, COP10, qui a eu lieu à Buenos Aires, on a accusé le Canada d'être l'un des pires pays en ce qui concerne la conformité. L'OCDE nous a classés derniers sur une liste de 24 pays dont elle évaluait l'intégrité environnementale. D'après le Conference Board du Canada, le Canada est passé de la douzième place en 2002 à la seizième place en 2003 sur une échelle de performance relative permettant de classer les 23 pays de l'OCDE en fonction de toute une gamme de questions environnementales. Même l'actuel premier ministre a critiqué notre lenteur lors d'une assemblée publique tenue à Toronto le 29 septembre 2003. Il a dit :

À mon avis, si vous décidez de mettre en œuvre une mesure comme l'accord de Kyoto, qui va nécessiter une énorme coopération nationale, vous devez présenter un plan précis aux Canadiens, pour qu'ils sachent ce qu'on attend d'eux. Malheureusement, nous avons ratifié Kyoto avant d'avoir établi un plan. Depuis, nous n'en avons pas beaucoup entendu parler.

À mon avis, les Canadiens se porteraient mieux si le premier ministre avait donné suite à ses propos.

Presque huit ans après la signature du Protocole de Kyoto, le gouvernement fédéral nous a enfin donné son plan. Il est critiqué de presque toutes parts. Seuls certains environnementalistes l'ont appuyé, et ce, avec réserves. Voici quelques exemples.

Tom Adams, directeur exécutif d'Enquête énergétique, organisme de surveillance national de l'énergie et de l'environnement, a dit au Calgary Herald qu'un réseau de transport d'énergie électrique à l'échelle du pays « présente de graves risques pour les Canadiens en ce qui concerne la fiabilité du service... Ce serait « tout à fait injuste » parce que cela coûterait des dizaines de milliards de dollars aux contribuables et bénéficierait presque entièrement à l'Ontario ». C'est pourquoi, d'après moi, ce n'est pas un plan national.

Thomas d'Aquino, président du Conseil canadien des chefs d'entreprises, a dit au National Post que le plan de Kyoto imposera « des coûts faramineux aux contribuables sans pour autant atteindre ses objectifs ».

Matthew Bramley, du Pembina Institute, un organisme de recherche en matière de politique environnementale, a dit à la CBC :

Les contribuables devront assumer un très lourd fardeau pour réduire les émissions aux termes du protocole de Kyoto, et la contribution de l'industrie sera économiquement insignifiante, dans l'ensemble.

Nancy Hughes Anthony, PDG de la Chambre de commerce du Canada a déclaré :

À cause de ce plan, les entreprises canadiennes auront plus de difficulté à être concurrentielles sur la scène internationale, puisque d'autres pays ont des objectifs moins difficiles à atteindre ou n'en ont pas du tout. Nous nous inquiétons beaucoup du fardeau que ce plan imposera à l'économie canadienne.

Greenpeace a critiqué le plan en disant qu'il ne permettra pas « d'atteindre l'objectif de réduction du Canada résultant de l'accord de Kyoto dans les délais imposés par le protocole ».

N'oublions pas que le ministre de l'Industrie lui-même, David Emerson, a déclaré au Toronto Star que la poursuite des objectifs du Canada résultant du Protocole de Kyoto risquait de causer l'effondrement de l'économie canadienne et qu'il ne croyait pas que les libéraux seraient capables de mettre en oeuvre un « plan équilibré » relativement au Protocole de Kyoto.

Jose A. Kusugak, président de l'Inuit Tapiriit Kanatami, a parlé dans le Hill Times du manque de consultations à propos du plan. Il a écrit :

Ce n'est qu'à la onzième heure, presque au moment où le plan allait être imprimé, que les Inuits ont pu être entendus.

Il a ajouté :

Les consultations avec les Inuits doivent jouer un rôle important dans la démarche du Canada concernant les changements climatiques. Le peu d'importance accordé à l'Arctique et aux autres écosystèmes vulnérables dans le plan du gouvernement montre bien pourquoi nous devrions prendre part à la démarche.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, les terres des Inuits constituent environ 40 p. 100 de la superficie terrestre de notre pays. C'est dans ce fragile écosystème que se produira le gros du réchauffement climatique de la planète. Le Nord est aux changements climatiques ce que le serin est à la mine, c'est-à-dire un système de détection à l'avance de ce qui risque d'arriver au reste d'entre nous.

Dans l'ensemble, le plan a été critiqué pour son manque de détails et pour le choix qu'on y a fait d'imposer aux particuliers le gros du fardeau de la réduction des gaz à effet de serre au Canada, plutôt qu'aux grands pollueurs. L'industrie automobile n'est astreinte qu'à des réductions volontaires des émissions. Voici ce que disait le premier ministre Paul Martin à la Chambre des communes en 2002 pour la convaincre que cette approche était mauvaise :

[...] nous devons rejeter d'emblée l'achat de crédits d'émissions à l'étranger. Les dollars canadiens seraient mieux investis dans des technologies de réductions viables ici même, au Canada.

Le 8 février 2005, alors qu'il se présentait devant le Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes, le ministre des Finances Ralph Goodale a déclaré ce qui suit :

Certains font des conjectures sur la valeur ou, au contraire, on pourrait dire sur l'inéquité d'investir dans ce que l'on a appelé cette masse d'air chaud. Il est clair que ce type de dépense internationale n'est pas au programme pour le Canada.

Apparemment, ce n'est que du vent. Le ministre de l'Industrie, M. David Emerson, a dit au Globe and Mail que, pour atteindre les objectifs de Kyoto, le gouvernement devrait en fait acheter des droits d'émission de pays qui ont atteint et même dépassé leurs objectifs. Le fait est que la notion abstraite d'échanges de droits de pollution ne permettra pas de nettoyer les sols contaminés, d'améliorer la qualité de l'eau potable ou de réduire le smog qui recouvre nos villes. Cela ne nous aidera certainement pas à trouver des solutions réelles pour nous tirer du bourbier où nous sommes actuellement. C'est clair que ce prétendu plan n'a pas les qualités requises.

Honorables sénateurs, nous avons besoin d'un véritable plan, et non d'un document politique. Le Canada doit avoir une économie forte, mais aussi de l'eau, de l'air et des sols qui soient sains. En faisant les bons choix, nous pouvons tenter d'arriver à rétablir l'équilibre entre ce qui semble être des intérêts contradictoires. C'est pourquoi j'appuie le plan du Parti conservateur du Canada, un plan bien canadien qui, je crois, fera beaucoup pour résoudre ces problèmes.

Notre priorité est la lutte contre la pollution au Canada. Nous ne luttons pas contre la pollution en échangeant des droits d'émission de carbone avec d'autres pays. Cela peut être une mesure complémentaire, mais non une mesure de remplacement. Une fois que nous aurons fait le ménage au pays, nous pourrons nous asseoir avec des pays qui nous ressemblent, par exemple les États-Unis, et négocier un accord raisonnable en matière de gaz à effet de serre.

Cette approche vise à prendre des fonds affectés actuellement au plan d'action visant le respect de Kyoto pour financer de véritables mesures de lutte contre la pollution, ici même au Canada. Ces fonds serviront à la recherche et au développement de nouvelles façons de réduire la pollution. Ils financeront des stratégies destinées à réduire les polluants atmosphériques. Bref, ils financeront de vraies solutions pour les Canadiens.

D'autres commentaires utiles sont au programme. Puis-je avoir une minute de plus, avec la permission des sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Andreychuk : Je crois que l'un des défauts du plan d'action de Kyoto est que, pour utiliser le jargon actuel, notre approche en matière de conclusion et d'application des traités internationaux laissait à désirer. Ce plan, qui touche si directement la population du Canada, nos provinces et nos entreprises, aurait dû découler d'un processus moderne de conclusion de traités qui suppose qu'il doit avoir été compris par tout le monde avant sa ratification. Il aurait dû y avoir une méthode systématique pour recueillir et débattre les suggestions afin d'aider le gouvernement à prendre sa décision finale. Jouerait un rôle important dans ce processus une évaluation par le gouvernement de l'impact sur l'environnement naturel, ainsi que sur les environnements politique et juridique. À la lumière de ce type d'évaluation, tous les acteurs sauraient ce qu'on attend d'eux et ils auraient l'occasion de rejeter le plan ou de l'approuver. Tous les acteurs sauraient que le plan a été choisi à l'issue d'un processus démocratique, ouvert et transparent. S'ils étaient informés de cette façon, les Canadiens ne demanderaient pas mieux que d'appuyer le plan du gouvernement.

(1700)

Le mode de ratification du Protocole de Kyoto a créé bon nombre des problèmes qui se posent actuellement et il a divisé les Canadiens plutôt que de les unir. Tout le monde se soucie de l'environnement, particulièrement en ce moment où la question de l'eau est devenue si importante. Nous devrions trouver des modalités de procéder qui nous rapprochent au lieu de nous dresser les uns contre les autres.

J'accueille avec plaisir la poursuite du débat sur le Protocole de Kyoto, de nouvelles manifestations d'intérêt pour un nouveau processus l'élaboration d'un traité et, surtout, de réelles initiatives pour remédier à nos problèmes environnementaux.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, au nom du sénateur McCoy, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 2 novembre 2005, à 13 h 30.)


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