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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 46

Le mardi 6 juillet 2010
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 6 juillet 2010

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Collège Holland

Coentreprise en enseignement avec l'Université normale d'Anyang

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, j'aimerais aujourd'hui féliciter le Collège Holland, le collège communautaire de l'Île-du-Prince-Édouard, pour la récente signature d'une entente de coentreprise dans le domaine de l'enseignement avec l'Université normale d'Anyang, située dans la province du Henan, en Chine. En vertu de cette entente, le Collège Holland offrira conjointement deux programmes aux étudiants chinois.

Il s'agit là d'une importante réalisation. Depuis 10 ans, le Collège Holland s'est engagé dans de nombreuses coentreprises de cette nature avec des collèges et des institutions partout en Chine. Le Collège Holland vise ainsi à partager des méthodes d'enseignement avec ses partenaires chinois et à créer des perspectives de carrière et d'éducation pour les étudiants, tant en Chine qu'au Canada.

En ce moment, environ 1 400 étudiants sont inscrits aux programmes du Collège Holland en Chine, lesquels portent sur la gestion d'hôtels et de restaurants, l'administration des affaires, le marketing et la publicité, la comptabilité, la gestion de clubs de golf et les systèmes informatiques. Ces programmes permettent aux étudiants d'obtenir des diplômes collégiaux canadiens sans quitter la Chine.

Depuis sa création, en 1969, le Collège Holland est devenu l'un des principaux collèges communautaires du Canada. Il offre 65 programmes à plus de 2 300 étudiants à temps plein et a acquis une réputation internationale pour la qualité de ses programmes et de ses méthodes d'enseignement.

Quant à l'Université normale d'Anyang, elle a été fondée en 1908 et est fréquentée par 24 000 étudiants à temps plein. Son président a dit voir cette entente avec le Collège Holland comme un partenariat à long terme qui permettra des échanges entre professeurs et offrira une formation de grande qualité.

Honorables sénateurs, j'applaudis les ententes de cette nature avec les économies émergentes. Elles renforcent les liens économiques et culturels, mènent à une plus grande compréhension entre les pays et créent des conditions qui permettront d'en arriver à une plus grande coopération.

Je félicite à nouveau le Collège Holland et souhaite à cet établissement le plus grand succès dans sa plus récente coentreprise en enseignement.

[Français]

Les lignes directrices des conseils d'administration

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, le Sénat a longtemps joué un rôle d'influence dans la régie corporative au Canada en y apportant d'importants changements.

Aujourd'hui, je veux attirer votre attention sur l'influence croissante de l'émancipation des actionnaires ou, en d'autres mots, sur la démocratie corporative. Cette nouvelle tendance dans le monde des affaires fut accélérée par la récente crise économique.

[Traduction]

Plus que jamais, les actionnaires jouent un rôle actif dans le choix des membres du conseil d'administration des entreprises dont ils détiennent des actions. Dans son rapport de 26 pages publié en mars, intitulé Building High Performance Boards, la Coalition canadienne pour une saine gestion des entreprises énumère 13 lignes directrices qui aideront les conseils d'administration des entreprises à améliorer leur rendement global.

La première ligne directrice consiste à faciliter la démocratie pour les actionnaires. Selon la coalition, les entreprises devraient permettre aux actionnaires de voter pour chacun des administrateurs et d'élire le conseil d'administration chaque année — les mandats des membres du conseil ne devraient pas se chevaucher — et elles devraient adopter une politique d'élection des administrateurs à la majorité des voix. Les entreprises pourraient ainsi créer de la valeur pour leurs actionnaires.

Les professeurs Richard Leblanc et Ed Waitzer, de l'Université York, ont parlé de cette nouvelle tendance dans un article d'opinion, qui a paru dans le Financial Post du 8 juin. Tout comme la coalition, ils croient qu'un ensemble de lignes directrices devraient être suivies au moment de choisir les administrateurs de sociétés, afin d'assurer une meilleure reddition de comptes. Ces lignes directrices auraient également pour effet de renforcer la démocratie des sociétés.

Il y a une dizaine d'années, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce s'est penché sur bon nombre de ces questions. Dans le but de préserver la prétendue « démocratie », MM. Leblanc et Waitzer suggèrent d'accorder à un certain nombre d'actionnaires remplissant

certains critères le privilège de nommer des administrateurs. Selon eux, ce processus contribuerait grandement à la véritable indépendance des administrateurs et garantirait que les actionnaires assument la responsabilité de générer des profits à long terme.

Le fait de permettre à des actionnaires fiduciaires de nommer des administrateurs aurait aussi l'avantage de mettre plus d'accent sur les compétences et l'efficacité des membres du conseil d'administration. Les administrateurs auraient également l'obligation de rendre des comptes aux actionnaires fiduciaires, ce qui devrait encourager les administrateurs à prendre des décisions impartiales.

Honorables sénateurs, en fin de compte, le fait de donner aux actionnaires fiduciaires la responsabilité de choisir les administrateurs contribuerait à harmoniser les intérêts et les incitatifs de l'ensemble des propriétaires. Comme MM. Leblanc et Waitzer l'ont écrit : « Les actionnaires fiduciaires devraient être ceux dont les intérêts et les capacités leur permettent le plus de bien choisir les membres du conseil d'administration et de bien exercer une surveillance. »

La situation d'Omar Khadr

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je veux parler aujourd'hui d'Omar Khadr. Omar Khadr avait 15 ans lorsqu'il a été capturé en Afghanistan. Il n'était qu'un enfant. Il n'était pas là par choix personnel, mais parce que son père l'y avait emmené. Après sa capture, il a été transféré à la tristement célèbre prison de Guantanamo Bay, où il est détenu depuis huit ans. Il a grandi dans un endroit terrible, où il est le dernier prisonnier occidental. Il a maintenant 23 ans.

Hier, le juge Russel Zinn, de la Cour fédérale du Canada, a donné au gouvernement sept jours pour produire une liste de réparations aux violations des droits d'Omar Khadr. En janvier dernier, la Cour suprême avait déclaré qu'il y avait eu atteinte aux droits constitutionnels d'Omar Khadr. En réponse à cette déclaration, le juge Zinn a statué qu'Omar Khadr avait droit « à l'équité procédurale et à la justice naturelle ».

Après avoir reconnu les fautes du gouvernement, la Cour suprême a demandé à celui-ci de prendre des mesures afin de corriger le mal qui avait été fait. Malheureusement, le gouvernement a fait peu de progrès dans ce dossier et a déclaré que le Canada devait laisser la justice suivre son cours aux États-Unis.

La Cour suprême du Canada a examiné la question à plusieurs reprises et a rendu progressivement ses décisions sur la question. Cependant, chaque fois, le gouvernement a trouvé le moyen de se soustraire à ses responsabilités. La décision rendue hier par le juge Zinn est un autre exemple des prouesses que font les tribunaux devant l'inaction du gouvernement.

Le juge Zinn a donné une semaine au gouvernement pour proposer des correctifs devant mettre fin aux violations des droits de M. Khadr. Le juge Zinn a déclaré que le rapatriement de M. Khadr au Canada constituait « la seule autre mesure de réparation à laquelle je puisse songer qui pourrait éventuellement remédier à la violation ».

Je prends donc la parole aujourd'hui pour demander à tous les sénateurs d'exhorter le gouvernement à faire ce que le juge Zinn a suggéré et à rapatrier M. Khadr au Canada. C'est la chose à faire. Comme je l'ai déjà fait à plusieurs reprises, j'exhorte le gouvernement à se soumettre aux décisions de la Cour suprême et de la Cour fédérale, y compris à la plus récente. Honorables sénateurs, exhortons le gouvernement à ramener Omar Khadr à la maison.

Le sommet du G20 à Toronto

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, le vendredi 25 juin 2010, Andrew Coyne a écrit ce qui suit dans le blogue qu'il tient sur www.macleans.ca :

J'ai maintenant eu la possibilité de voir le fameux « faux lac » caché dans un coin du caverneux centre de la presse internationale. Ayant été parmi les premiers à qui ce lac a fait perdre les pédales, sans même que j'aie vérifié les faits, je serai l'un des premiers à admettre que ce scandale n'en était pas un.

Ce n'est pas un lac intérieur, comme le premier reportage que j'ai lu l'avait laissé entendre. C'est un miroir d'eau qui a environ la taille d'une piscine extérieure et au plus 5 centimètres de profondeur. Il doit contenir à peine 10 gallons d'eau. Il est entouré d'une petite plateforme de bois, qui simule un quai. Des chaises de style Muskoka sont installées tout autour, et on peut voir des canots des deux côtés. On y trouve aussi un écran géant qui diffuse des images haute définition absolument époustouflantes des lacs canadiens. C'est tout.

Ce n'est rien d'extravagant. C'est même plutôt modeste. Selon le gouvernement, le lac a coûté environ 57 000 $, ce qui semble convenable. C'est l'équivalent de la somme qu'une personne débourserait pour rénover son sous-sol. Pour être plus précis, disons que cela représente un peu plus de 0,00002 p. 100 des dépenses fédérales. Le miroir d'eau est un endroit plutôt agréable. C'est une oasis de calme et de tranquillité, loin du chaos de la conférence. Les journalistes étrangers semblent beaucoup l'apprécier. De plus, les images montrées sur grand écran devraient en convaincre plus d'un de revenir au Canada ou de parler de notre pays aux gens de chez eux.

Bref, c'est une utilisation tout à fait acceptable, bien que non cruciale, des fonds publics et cela n'aurait jamais dû soulever une telle controverse. Ce sont les médias qui ont parti le bal, puis les partis de l'opposition s'en sont donné à cœur joie. Nous devrions avoir honte.

(1410)

D'autres représentants des médias devraient admettre ce que M. Coyne a reconnu. D'autres personnes aussi, mais, comme nous en sommes aux déclarations de sénateurs, j'exhorte tous les sénateurs de notre côté à résister à la tentation de faire preuve d'esprit partisan.

Le décès de l'honorable Harry Enns

L'honorable Terry Stratton : Honorables sénateurs, je tiens à rendre hommage à l'ancien doyen de l'Assemblée législative du Manitoba, notre ami Harry Enns, un type exceptionnel.

Notre amitié remonte à l'aube des temps. Harry et moi avons livré coude à coude des batailles électorales et nous nous sommes affrontés lors de certaines courses à la direction. Nous sommes allés à la pêche ensemble et nous sommes restés éveillés jusqu'à quatre heures du matin pour voir le soleil se coucher devant notre camp de pêche dans le Nord. C'était tout un numéro qui se plaisait à repousser les limites, en quelque sorte, mais, d'un autre côté, lorsque vous vouliez obtenir quelque chose pour votre région, il était toujours là pour vous aider.

Il a été ministre de l'Agriculture. Au total, il a servi pendant plus de 30 ans et il a géré un grand nombre de portefeuilles. Je crois qu'il a été élu pour la première fois en 1966. Il va nous manquer.

Il y a trois semaines, j'ai participé à un dîner à Woodlands, au Manitoba. Cet événement était, en soi, un défi. J'avais promis de m'y rendre à condition qu'Harry soit présent. Eh bien, il y est allé et j'ai dû faire de même. Ce fut une réunion merveilleuse. Cependant, personne ne se doutait de ce qui allait arriver. Il est parti comme l'éclair, mais il a tout de même eu le temps de faire ses adieux.

Je tiens à exprimer mes plus sincères condoléances à son épouse, Eleanor, et, surtout, à son fils Andrew, qui a travaillé pour John Lynch-Staunton dans le cabinet du leader, ici-même à Ottawa. Je suis persuadé que son absence se fera sentir pendant très, très longtemps.

L'honorable Sandra Lovelace Nicholas, C.M.

L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, le projet de loi C-31 a été adopté le 28 juin 1985. C'était un événement important. Grâce à ce projet de loi, par exemple, le sénateur Patrick Brazeau et moi avons pu obtenir le statut d'Indien. En vertu de la Loi sur les Indiens originale, les femmes faisaient l'objet de discrimination. En effet, lorsqu'une Indienne épousait un non-Indien, elle perdait son statut. Malgré de nombreuses protestations, y compris devant la Cour suprême, qui a été saisie de l'affaire, sans succès, l'inégalité fondamentale entre les sexes inhérente à la Loi sur les Indiens persistait.

Cependant, madame le sénateur Lovelace Nicholas s'est faite la championne de cette cause. Elle l'a portée devant l'ONU, qui a dit au Canada qu'il faisait effectivement de la discrimination à l'égard des Indiennes. Je crois que Son Honneur le Président Kinsella a participé à cette initiative en raison du rôle qu'il jouait à l'époque au sein de la Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswick.

Il est important pour moi de rendre aujourd'hui hommage à l'honorable sénateur Lovelace Nicholas pour le travail dont elle s'est acquittée il y a 25 ans. Nous examinerons ultérieurement un autre projet de loi qui a pour but de faire disparaître d'autres inégalités. Cependant, c'est grâce à son travail, en collaboration avec les femmes de la Première nation de Tobique, au Nouveau-Brunswick, que le projet de loi C-31 a été adopté.

À ma collègue et amie, chapeau bas!

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

Énergie, environnement et ressources naturelles

Avis de motion tendant à autoriser le comité à siéger pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable W. David Angus : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'alinéa 95(3)a), le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles soit autorisé à siéger durant l'été, à des dates qui seront fixées après consultation des membres du comité, afin d'examiner une ébauche de rapport, et ce, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.

Avis de motion Tendant à autoriser le comité à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable W. David Angus : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat un rapport sur les forages en mer, au plus tard le 20 août 2010, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

Le racisme au Canada

Avis d'interpellation

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, conformément à l'article 57(2) du Règlement, je donne avis que, dans deux jours :

J'attirerai l'attention du Sénat sur l'état du pluralisme, de la diversité et du racisme au Canada et, en particulier, sur comment nous pouvons développer de nouveaux outils adaptés au XXIe siècle pour lutter contre la haine et le racisme, réduire le nombre de crimes haineux et accroître la tolérance au Canada en matière de race et de religion.


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

L'industrie

Le recensement de 2011

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le gouvernement fédéral a annoncé, le samedi 26 juin 2010, que le recensement de 2011 sera constitué uniquement d'un formulaire abrégé, c'est-à-dire un questionnaire court et obligatoire comprenant huit questions. Dans ce court questionnaire obligatoire, une seule question portant sur les langues officielles sera posée : celle concernant la langue maternelle.

Ma question au leader du gouvernement au Sénat est la suivante : ne serait-il pas utile de maintenir, dans le recensement de 2011, la question sur la connaissance des langues officielles? N'est-il pas important de savoir, de façon précise, combien de Canadiens et de Canadiennes peuvent communiquer en français ou en anglais?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, comme vous le savez, le gouvernement a approuvé des modifications pour le recensement de 2011. Tous les Canadiens seront obligés de remplir le questionnaire abrégé de huit questions. C'est le questionnaire obligatoire standard qui permettra de recueillir des renseignements sur les personnes et les familles.

Aussi, à partir de 2011, il y aura des changements quant à l'Enquête auprès des ménages, soit le questionnaire détaillé auquel s'opposaient tant de Canadiens et qu'ils voyaient comme une intrusion dans leur vie privée du fait qu'il était obligatoire. Dorénavant, le questionnaire détaillé sera facultatif et les Canadiens seront libres de ne pas le remplir. On s'attend néanmoins à ce qu'ils le remplissent en grand nombre.

(1420)

Pour ce qui est de la question du sénateur, j'en prends note. Je ne suis pas au courant de changements qui concernent les questions au sujet des francophones, des anglophones et des langues, mais je prends note de la question et j'y répondrai dès que possible.

[Français]

Le sénateur Chaput : J'aimerais poser une question complémentaire, honorables sénateurs. Pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire, l'offre des services fédéraux tient compte de trois données tirées du recensement : la connaissance des langues officielles, la langue maternelle et la langue parlée à la maison. Deux des trois données requises ne seront plus disponibles au moment du recensement de 2011, puisque les questions nécessaires ne seront pas posées dans le formulaire abrégé et obligatoire.

De quelle façon le gouvernement fédéral entend-il mettre en œuvre ces obligations en vertu de la partie IV de la Loi sur les langues officielles?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je vais ajouter cette question à celle pour laquelle je demanderai une réponse écrite.

En ce qui a trait à la Loi sur les langues officielles et à son application, le sénateur sait fort bien que notre gouvernement tient à respecter la Loi sur les langues officielles et la dualité linguistique canadienne. Le gouvernement dispose d'une foule de moyens pour l'aider à appliquer la Loi sur les langues officielles. Quant aux renseignements fournis par le recensement, je vais certainement chercher à en savoir plus.

[Français]

Le sénateur Chaput : Je remercie le leader du gouvernement au Sénat de sa compréhension. J'aurais une question additionnelle. Est-il exact de dire que l'unique question portant sur les langues officielles qui figurera au recensement de 2011 exclut les nouveaux arrivants qui utilisent le français comme deuxième ou troisième langue, les enfants de couples exogames et les enfants qui fréquentent les écoles d'immersion, ainsi que les francophiles?

Enfin, est-il exact de dire que cette enquête, qui remplace le long questionnaire obligatoire, ne fait pas partie du recensement, puisqu'elle est effectuée sur une base volontaire, de sorte que les informations recueillies seront moins fiables?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Comme le savent les sénateurs, le formulaire obligatoire abrégé compte huit questions. Quant aux questions du sénateur, je tâcherai d'y trouver la réponse.

Ce que le gouvernement s'est fait dire, c'est que de nombreux Canadiens en avaient contre le formulaire détaillé. Pas tous, par contre, et c'est pourquoi les données qu'il nous permettra de recueillir seront très utiles, dans la mesure où les Canadiens qui ont déjà rempli ce formulaire sans aucun problème au moins une fois vont sans doute continuer de le faire. Plusieurs étaient d'avis que, en envoyant le formulaire détaillé aux gens et en leur précisant qu'ils n'étaient pas obligés de le remplir, nous obtiendrions des données plus précises, car les gens le rempliraient plus volontiers en sachant qu'on ne violait pas indûment leur vie privée. C'est ce qu'on verra en 2011, mais je crois que c'est une théorie qui va probablement se confirmer.

Par contre, en ce qui concerne les questions du sénateur à propos de la langue parlée à la maison et de la langue utilisée par les nouveaux arrivants, je vais certainement tenter de savoir comment on entend obtenir ces données pour aider le gouvernement à faire appliquer la Loi sur les langues officielles.

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, la réponse du leader du gouvernement aux questions du sénateur Chaput m'amène à poser une question complémentaire.

En effet, selon madame le leader, le gouvernement se serait fait dire que les gens rempliraient plus volontiers le formulaire long s'ils n'y étaient pas contraints. Madame le leader peut-elle nous dire de qui vient cet avis, au juste, et nous dire si elle pourra en transmettre une copie au Sénat?

Le sénateur LeBreton : Non, je ne pourrai pas vous en fournir une copie, car ce serait répéter ce qui s'est dit entre les membres du Cabinet.

Le sénateur sait très bien que ce problème se posait déjà sous l'ancien gouvernement. Partout au pays, les gens étaient consternés de devoir remplir un aussi long formulaire de recensement, estimant que c'était envahir leur vie privée que de leur demander combien de toilettes ou de portes comptait leur maison. Bien des gens étaient alors convaincus que ce n'était pas une bonne idée de faire reposer le recensement sur une mesure obligatoire comme celle-là. C'est pour cette raison qu'on a laissé le choix aux Canadiens. La question a été débattue en long et en large, et c'était l'avis des personnes et des groupes interrogés que, en procédant de la sorte, les données obtenues étaient aussi bonnes, sinon meilleures, que si le formulaire détaillé était demeuré obligatoire.

Le sénateur Cowan : Je n'ai pas demandé à madame le leader de divulguer la teneur des discussions tenues au Cabinet, mais elle a dit que le gouvernement avait reçu des conseils, et je suis parti du principe qu'il s'agissait de conseils professionnels, et qu'elle était en mesure de nous en parler.

Quoi qu'il en soit, je crois comprendre que la Fédération canadienne des municipalités, le Conseil canadien de développement social, l'Association canadienne d'économique et l'Association canadienne de science économique des affaires, entre autres, ont formellement contesté la décision du gouvernement de rendre facultatif le questionnaire détaillé du recensement.

L'ancien statisticien en chef, qui a travaillé pour Statistique Canada pendant 51 ans, a dit qu'il aurait démissionné si on lui avait demandé de faire une telle coupe, car, à son avis, le fait que le questionnaire soit facultatif amoindrit la qualité des données du recensement et de tout un éventail d'enquêtes, en plus de priver les décideurs locaux des principaux outils dont ils se servent pour prendre des décisions fondées sur des données probantes.

Le fait est qu'un certain nombre d'organismes, d'ordres de gouvernement et d'associations non gouvernementales sont tributaires de ces renseignements pour pouvoir prendre des décisions fondées sur des données probantes. Sans ces renseignements, ils devront faire des suppositions et, à mon avis, ce n'est pas la façon idéale de procéder, en tant que société, alors que la conjoncture nous commande de dépenser intelligemment l'argent des contribuables. On aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement fasse tout le contraire, afin que tous les gouvernements, à tous les niveaux, ainsi que les organisations non gouvernementales, aient accès aux meilleurs renseignements possibles avant d'engager des dépenses à même les fonds du secteur privé ou les fonds publics. C'est un enjeu beaucoup plus grave que le fait de compter le nombre de toilettes et de portes dans une résidence privée.

Le sénateur LeBreton : Je pourrais fournir au sénateur une longue liste de Canadiens qui n'appréciaient pas du tout que le gouvernement exige que les gens remplissent le formulaire détaillé du recensement. De l'avis de plusieurs Canadiens, cela constituait une intrusion dans leur vie privée.

Le formulaire obligatoire fournit des renseignements de base à Statistique Canada, et Statistique Canada et de nombreux autres organismes s'appuient sur ces renseignements.

Honorables sénateurs, quelle que soit la décision du gouvernement, il y aura toujours des gens qui l'appuieront et d'autres qui s'y opposeront. Nous avons des raisons de croire que le formulaire détaillé facultatif permettra de recueillir des renseignements tout aussi probants, puisqu'il est facultatif. Lorsqu'il en était question dans les journaux, j'ai lu que quelqu'un avait dit que les Canadiens, de par leur nature, semblent aimer remplir des questionnaires d'enquête.

(1430)

Avant de préjuger de l'efficacité de cette méthode, nous devrions, selon moi, donner une chance aux Canadiens. Manifestement, le questionnaire abrégé, qui est obligatoire, constitue la plus grande partie du recensement. Il comporte des questions élémentaires qui fournissent des renseignements essentiels au gouvernement et à un grand nombre de ses organismes ainsi qu'à plusieurs autres organisations.

L'ancien questionnaire complet obligatoire, qui était perçu comme une atteinte à la vie privée, est maintenant facultatif. Par conséquent, je crois que, après le recensement, les statisticiens estimeront où le questionnaire abrégé obligatoire et le questionnaire détaillé facultatif sont tous deux une source inestimable de renseignements.

Le sénateur Cowan : Madame le leader du gouvernement a-t-elle un plan d'urgence dans l'éventualité où on ne répond pas à ses attentes et où les Canadiens ne répondent pas comme elle l'avait prévu et espéré? Que se passera-t-il?

Le sénateur LeBreton : Aujourd'hui, il existe de nombreux outils pour recueillir des renseignements. Je ne suis pas pessimiste devant le taux de réponse. Au contraire, je suis optimiste. À mon avis, cette méthode constitue une grande amélioration puisque les Canadiens ne seront pas contraints, sous peine d'être pénalisés, de répondre au questionnaire complet.

Il y a quelques années, j'ai reçu un questionnaire complet. J'avais été déconcertée. J'avais eu l'impression qu'il s'agissait d'une grave atteinte à ma vie privée. Je crois que cette méthode est une amélioration. La plupart des Canadiens y sont favorables.

Je le répète. Le questionnaire abrégé comporte des questions — et je vais examiner ces questions, comme le sénateur Chaput l'a demandé — qui visent à recueillir des renseignements essentiels afin de fournir au gouvernement et aux personnes qui comptent sur Statistique Canada pour obtenir l'information dont ils ont besoin pour prendre des décisions.

Honorables sénateurs, à ce stade, je ne vais pas préjuger de la volonté des Canadiens de remplir le questionnaire facultatif, car je sais qu'ils le feront.

Les anciens combattants

La médaille pour le commandement des bombardiers lors de la Seconde Guerre mondiale

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle concerne les anciens combattants du commandement des bombardiers.

Je me demande si le leader pourrait s'informer de ce qu'il en est de la médaille qui serait décernée aux hommes et aux femmes qui ont fait partie d'équipages aériens et terrestres et qui ont agi à titre de pilotes pendant les bombardements contre l'ennemi lors de la Seconde Guerre mondiale, le théâtre de guerre qui a fait le plus de victimes chez les Alliés au cours de ce conflit. Le Sénat a adopté à l'unanimité une résolution qui avait été présentée en 2008 sur cette question par notre collègue, le sénateur Meighen. En outre, les ministres de la Défense nationale et des Anciens Combattants m'ont signalé qu'ils n'avaient aucune objection à ce que cette médaille soit créée.

J'ai appris que le Bureau du Conseil privé ne s'opposait pas officiellement à cette mesure et j'ai entendu des membres du corps diplomatique allemand dire que cette idée ne les offusquait pas du tout, car, comme un d'entre eux me l'a signalé, c'est l'Allemagne qui avait déclenché les hostilités et c'est le commandement des bombardiers qui avait aidé à y mettre un terme.

Malheureusement, un grand nombre des hommes qui ont survécu à cette guerre arrivent au crépuscule de la vie. Je suis persuadé que ma collègue conviendra avec moi que ce serait un affront terrible aux anciens combattants s'ils s'éteignaient avant que leurs efforts soient reconnus par leur gouvernement et leur monarque, surtout quand on connaît le rôle essentiel qu'ils ont joué dans ce théâtre de guerre en luttant contre l'ennemi avant les attaques menées par les Alliés sur le territoire européen.

J'espère que le leader du gouvernement au Sénat aura la bonté de s'informer au sujet de cette question — peut-être auprès de la Chancellerie de Rideau Hall — pour savoir pourquoi on tarde tant, sans raison valable, à mettre en œuvre cette mesure.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je serai très heureuse de m'informer à ce sujet.

Notre collègue, au sénateur Segal et à moi, a posé cette question il y a un certain temps au Sénat. Honorables sénateurs, je suis tout à fait consciente du fait que le temps presse, en raison de l'âge avancé de ces personnes. Je vais m'informer, car j'ai eu vent du même genre de renseignements que le sénateur Segal vient de communiquer au Sénat. Par conséquent, je serai heureuse de voir ce qu'il en est de cette question.

La défense nationale

Les médailles de reconnaissance destinées aux militaires

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Segal d'avoir posé une question sur les efforts déployés pour reconnaître le mérite des membres du commandement des bombardiers. Un nombre effarant de militaires ont perdu la vie alors qu'ils servaient au sein de cette unité. Cette reconnaissance devrait être octroyée aux militaires qui reviennent d'une campagne. On rehausse le morale de nos militaires en leur remettant des médailles qui reconnaissent leur expérience et leurs efforts.

En plus de la création de cette médaille, qui n'a que trop tardé, j'aimerais attirer l'attention du leader sur de nombreuses autres campagnes. Par exemple, il y a des militaires canadiens au Sierra Leone depuis six ans qui aident à former l'armée de ce pays pour en faire une armée respectueuse du processus démocratique et des droits de la personne. Nos militaires attendent toujours leurs médailles, qui devaient leur être remises après leur première affectation de six mois.

Il y a cette campagne, celle du Darfour et d'autres campagnes similaires. On m'a dit, tout comme on l'a dit au sénateur Segal, que la remise des médailles est retardée par le processus politique à partir du cabinet du premier ministre en descendant.

Y a-t-il beaucoup de médailles visant à reconnaître les efforts et les sacrifices que les militaires consentent à l'heure actuelle dont la remise est retardée?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je suis consciente du fait que la remise des médailles est un processus qui passe par Rideau Hall et d'autres organes consultatifs, comme le ministère de la Défense nationale. Je suis convaincue que de nombreuses médailles en sont à diverses étapes du processus.

Je vais prendre note des médailles mentionnées par le sénateur Dallaire, vérifier où en est le processus et demander quand nous pouvons espérer un dénouement à cette affaire.

La coopération internationale

La santé maternelle et infantile

L'honorable Rod A. A. Zimmer : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Dans la foulée du sommet du G8, le premier ministre Stephen Harper a annoncé vendredi dernier que le Canada consacrera, pour cinq ans, 1,1 milliard de dollars d'argent frais à l'initiative en faveur de la santé maternelle et infantile. Cette somme est légèrement inférieure à la somme de 1,2 milliard de dollars dépensée pour les mesures de sécurité pendant la fin de semaine des sommets du G8 et du G20. Au total, l'initiative de Muskoka représente un engagement financier de 7,3 milliards de dollars pour les cinq prochaines années, dont 5 milliards de dollars sont fournis par les pays du G8 et seulement 2,3 milliards de dollars viennent de pays ne faisant pas partie du G8, de la fondation Bill et Melinda Gates et de la fondation des Nations Unies. Ce financement ne répond pas aux attentes de divers organismes d'aide.

Ma question au leader du gouvernement au Sénat est la suivante : pourquoi le gouvernement s'engage-t-il à dépenser moins d'argent pour l'initiative en faveur de la santé maternelle et infantile que le montant total consacré aux mesures de sécurité pour les sommets du G8 et du G20?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, cette question me surprend, car nous parlons ici de deux initiatives dont les conséquences et les résultats sont différents.

Je suis déçue que le sénateur Zimmer voie l'initiative sur la santé maternelle et infantile de cette façon-là. Le premier ministre et le gouvernement ont en effet été encensés et loués par de nombreux organismes, notamment des organismes d'aide, pour avoir lancé cette initiative. Le sénateur Zimmer l'a signalé, nous nous sommes engagés à affecter, pour cinq ans, 1,1 milliard de dollars d'argent frais à l'initiative sur la santé maternelle et infantile. Cela fera une grande et tangible différence dans la vie des personnes les plus vulnérables de la planète.

La contribution du Canada s'inscrit dans le cadre de l'engagement des pays du G8, et d'autres pays et organismes, à verser 7,3 milliards de dollars en vue de développer des services et des programmes vitaux dans le but d'atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement et de réduire de manière significative le nombre de décès de mères et d'enfants dans les pays en développement.

(1440)

Honorables sénateurs, ces nouveaux fonds, combinés au programme que le gouvernement du Canada prévoit pour les cinq prochaines années, porteront notre investissement total à 2,85 milliards de dollars entre 2010 et 2015. C'est une somme substantielle. Elle fera une grande différence, comme de nombreux organismes d'aide l'ont affirmé.

Honorables sénateurs, cette initiative vise le long terme. Le gouvernement continuera de travailler avec ses partenaires pour accroître cette somme. C'est un net progrès, et personne ne peut reprocher au gouvernement d'avoir pris cette initiative.

En ce qui concerne le coût du sommet du G20, comme les honorables sénateurs le savent, le gouvernement a suivi les meilleurs conseils des experts en sécurité, et la rencontre du G20 a été une vraie réussite. Les dirigeants du monde entier ont tenu leurs réunions dans un environnement sûr, ce qui est exactement ce que le gouvernement s'était engagé à offrir. Nous devrions tous être reconnaissants du fait que ces réunions ont eu lieu et que les dirigeants du monde entier ont été protégés de cette manière.

Honorables sénateurs, le Canada est un pays de calibre mondial, tout comme Toronto est une ville de calibre mondial. C'était notre tour d'être le pays hôte. À mon avis, le gouvernement du Canada et tous les Canadiens devraient être fiers de nos efforts, de même que des résultats obtenus dans le cadre de ces deux sommets.

En ce qui concerne l'initiative en faveur de la santé maternelle et infantile du G8, c'est comme n'importe quoi d'autre. Tous les jours, il y aura quelqu'un pour me demander pourquoi nous dépensons notre argent pour aider les agriculteurs plutôt que de l'investir dans cette initiative. Les gouvernements doivent faire des choix. L'initiative en faveur de la santé maternelle et infantile était un excellent choix, on ne peut le nier. Des organismes d'aide internationale du monde entier ont félicité le Canada d'avoir joué un rôle de chef de file dans cette initiative, grâce à laquelle la vie d'un grand nombre de femmes et d'enfants sera sauvée.

Le sénateur Zimmer : Je remercie madame le sénateur des précisions qu'elle vient de fournir. Pourrait-elle nous dire quels mécanismes seront mis en place pour superviser la distribution appropriée de ces fonds?

Le sénateur LeBreton : Je vais fournir cette information au sénateur Zimmer. Un des aspects positifs de cette initiative, c'est qu'elle est réaliste. Le gouvernement et le premier ministre, qui devait composer avec ses partenaires du G8, ont dû déterminer le contenu raisonnable de ce fonds sans créer d'attentes auxquelles il serait impossible de répondre. Un mécanisme a été mis en place pour suivre cet argent et faire rapport sur la mise en œuvre du programme. C'est avec joie que je fournirai l'information pertinente aux honorables sénateurs.

Le sénateur Zimmer : Enfin, avec quels organismes d'aide internationale le gouvernement collaborera-t-il pour distribuer efficacement ces fonds dans le cadre de stratégies intégrées et d'interventions à faible coût?

Le sénateur LeBreton : Le gouvernement collabore avec un grand nombre d'organismes dont je fournirai la liste. Cette initiative est gérée par l'intermédiaire de l'ACDI. La directrice des programmes internationaux d'UNICEF Canada, Meg French, a déclaré que ce nouvel investissement aurait un impact important et qu'il permettrait de sauver la vie de femmes et d'enfants. Il va de soi que personne ne pourra nous reprocher de vouloir sauver la vie de femmes et d'enfants.

L'honorable Mobina S.B. Jaffer : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à poser au leader du gouvernement au Sénat au sujet de la santé maternelle. L'Association multipartite contre la malaria a entrepris des démarches auprès du premier ministre et celui-ci s'est intéressé personnellement à la possibilité que les femmes enceintes puissent recevoir une aide particulière pour faire face à la malaria.

Madame le leader sait-elle si une décision a été prise et si les femmes enceintes recevront effectivement les moustiquaires dont elles ont besoin pour se protéger des vecteurs de la malaria?

Le sénateur LeBreton : Je n'ai pas de réponse à donner à cette question précise, honorables sénateurs. Cependant, l'initiative inclut l'hygiène, les médicaments et des trousses pour l'accouchement. Cet argent paiera une large gamme de mesures. Je vérifierai pour ce qui est des dispositions concernant le paludisme. J'ai peine à imaginer qu'elles n'en fassent pas partie.

L'environnement

L'aide devant le déversement de pétrole dans le golfe du Mexique

L'honorable Francis William Mahovlich : Honorables sénateurs, j'ai une question qui fait suite à la question que j'ai posée le 3 juin, et je sais que le sénateur Mercer a posé une question semblable il y a quelques semaines.

Je suis très préoccupé par la situation dans le golfe du Mexique. Après deux tentatives infructueuses pour colmater la fuite, plus d'un million de gallons de pétrole se répandent encore dans les eaux chaque jour. Jusqu'à maintenant, plus de 95 millions de gallons de pétrole ont empoisonné l'environnement. Le fait que le problème pourrait bien ne pas être réglé avant le mois d'août tient du cauchemar.

Que la fuite soit colmatée ou non, il est certain que, au cours des prochains mois, les dommages aux écosystèmes du littoral du golfe du Mexique constitueront un problème à long terme dont nous verrons malheureusement les effets pendant de nombreuses années.

Plusieurs espèces d'oiseaux du Canada, y compris le huard, migrent dans cette région qui a été polluée pour les mois d'hiver.

Il y a de nombreuses années de cela, j'étais assis sur un quai de Muskoka, près de la marina de Port Sandfield, où je voulais acheter un bateau. Le propriétaire, Alf Mortimer, est venu me demander à quoi je pensais. Je lui ai répondu que je me demandais où les huards allaient passer l'hiver. Il m'a alors répondu qu'ils allaient en Floride, à Longboat Key, qui se trouve au cœur du golfe du Mexique. C'est là que vont les huards. Je crains que nous ne voyions pas revenir les huards l'an prochain, et peut-être même que tout ce que je pourrai contempler, ce sont mes canards de bois.

Honorables sénateurs, nous avons tous vu les images tragiques de ces oiseaux et d'autres animaux couverts de pétrole. Je crains que beaucoup ne meurent après être entrés en contact avec la pollution. Que fera le gouvernement du Canada pour aider nos voisins, les États-Unis, à nettoyer cet épouvantable gâchis afin d'empêcher nos oiseaux migrateurs de connaître un destin tragique?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, il est évident que nous sommes tous extrêmement troublés par les images d'oiseaux couverts de pétrole dans le golfe du Mexique. Je crois avoir déjà pris note d'une des questions du sénateur Mahovlich, qui veut savoir ce que fait le gouvernement du Canada pour aider nos voisins du Sud.

Bien d'autres oiseaux que le huard passent l'hiver dans le golfe du Mexique. Cela nous préoccupe tous, puisque ces oiseaux reviennent au Canada tous les étés. Cependant, il reste de l'espoir pour le golfe du Mexique. Un gros navire de Taïwan est en train d'y extraire du pétrole. J'ai lu dans les journaux que le puits de secours sera complété avant la date prévue. Il reste cependant beaucoup de pétrole à extraire, ce qui est alarmant. Les photos de la catastrophe suscitent de l'inquiétude, surtout chez quelqu'un comme moi, qui passe ses étés à nourrir des oiseaux qui migrent sûrement vers le golfe du Mexique.

Je prends note de la question du sénateur et je verrai s'il y a d'autres renseignements à communiquer.

Visiteur de marque à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer aux réponses différées, j'aimerais souligner la présence à la tribune nord de l'honorable Steven Fletcher, ministre d'État à la Réforme démocratique.

Au nom de tous les honorables sénateurs, bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

(1450)

[Français]

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer cinq réponses à des questions posées par l'honorable sénateur Banks, le 4 mars 2010, concernant la santé et l'approbation du bévacizumab — au sujet des médicaments; par l'honorable sénateur Cowan, le 24 mars 2010, concernant l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, la porte canadienne de l'Atlantique; par l'honorable sénateur Mercer, le 24 mars 2010, concernant l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, la porte canadienne de l'Atlantique; par l'honorable sénateur Munson, le 30 mars 2010, concernant la santé, la stratégie relative aux troubles du spectre autistique; et par l'honorable sénateur Peterson, les 22 et 29 juin 2010, concernant l'agriculture, l'aide accordée aux producteurs touchés par les inondations en Saskatchewan.

La santé

L'approbation du bévacizumab

(Réponse à la question posée le 4 mars 2010 par l'honorable Tommy Banks)

Le gouvernement du Canada reconnaît l'importance de donner aux patients un accès en temps utile aux médicaments dont ils ont besoin. Cependant, avant que toute indication d'usage puisse être autorisée, la compagnie doit déposer une présentation auprès de Santé Canada.

Il revient au gouvernement fédéral de déterminer si un médicament peut être vendu ou non au Canada. Si, après avoir examiné une nouvelle indication d'usage d'un médicament, la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada conclut que les avantages l'emportent sur les risques et que les risques peuvent être atténués et/ou gérés, un avis de conformité (AC) est délivré pour le produit, comme le prévoient la Loi sur les aliments et drogues et son Règlement. L'AC autorise le fabricant à vendre le produit au Canada. À ce stade, un numéro d'identification de médicament (DIN) est aussi attribué au médicament.

Santé Canada a autorisé Avastin pour le traitement des patients atteints d'un glioblastome le 24 mars 2010. Santé Canada avait déjà autorisé Avastin dans le traitement du cancer colorectal métastatique, le cancer du sein métastatique et le cancer du poumon.

En vertu de la Loi canadienne sur la santé, tous les médicaments nécessaires sur le plan médical qui sont administrés en milieu hospitalier doivent être assurés par le régime d'assurance-maladie de la province ou du territoire. Les médicaments sur ordonnance fournis à l'extérieur d'un établissement de santé ne sont pas visés par la Loi, et par conséquent, il appartient aux gouvernements provinciaux et territoriaux de déterminer, à leur discrétion, s'ils financent ou non les médicaments sur ordonnance et, le cas échéant, selon quelles modalités. Toutes les provinces et tous les territoires prennent en charge dans une certaine mesure le coût des médicaments, en particulier lorsque ces médicaments sont destinés aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux personnes bénéficiant de l'aide sociale. Une fois qu'un avis de conformité a été délivré pour un médicament, il revient à chaque province et territoire — qui gère son propre régime d'assurance-médicament — de décider si, et dans quelle mesure, le médicament en question sera financé par l'État ou remboursé.

Le gouvernement fédéral appuie les soins de santé dans les provinces et les territoires par l'intermédiaire du Transfert canadien en matière de santé, qui croît de 6 p. 100 annuellement et qui a atteint 24 milliards de dollars cette année. Cette aide soutenue du gouvernement a été soulignée dans le discours du Trône et le budget de 2010. Les provinces et les territoires décident de la manière dont ils utilisent ces fonds, mais ils peuvent s'en servir pour amortir le coût de leurs régimes d'assurance-médicaments, et de la couverture des médicaments onéreux.

Comme il est mentionné ci-dessus, l'avis de conformité initial d'un médicament est délivré pour des indications particulières. Les régimes d'assurance-médicaments déterminent si le médicament doit être remboursé en tenant compte de ces indications. Cependant, la pratique médicale peut juger utile d'administrer le médicament pour d'autres indications. On parle alors d'« utilisation non indiquée sur l'étiquette ». Au Canada comme dans d'autres pays, des médicaments sont utilisés de cette manière, c'est-à-dire à des fins médicales autres que l'indication pour laquelle ils ont d'abord été approuvés. Cette utilisation est du ressort des praticiens prescripteurs, y compris des médecins et des dentistes, et s'effectue sous leur contrôle professionnel. Il revient aux provinces et aux territoires uniquement de décider s'ils doivent payer pour les médicaments prescrits et utilisés à des fins autres que celles qui sont indiquées sur l'étiquette (dans le cas des régimes d'assurance privés, il appartient généralement à l'assureur privé de décider).

L'Agence de promotion économique du Canada atlantique

La stratégie sur la porte canadienne de l'Atlantique

(Réponse à la question posée le 24 mars 2010 par l'honorable James S. Cowan)

Notre gouvernement estime que le Canada atlantique est dans une position idéale pour jouer un rôle essentiel dans l'économie canadienne.

C'est pourquoi l'Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA), Transports Canada, les gouvernements des quatre provinces de l'Atlantique ainsi que des parties prenantes du secteur privé de la région travaillent ensemble à la mise en place de cette nouvelle porte d'entrée. Des représentants ont déjà participé à d'importantes missions commerciales à l'étranger pour promouvoir le Canada atlantique sur la scène internationale.

Ensemble, nous travaillons à l'établissement d'une porte de l'Atlantique efficace pour saisir les occasions qu'offre l'économie mondiale.

Voici des exemples précis d'investissements fédéraux à l'appui du développement de la porte de l'Atlantique au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à Terre-Neuve-et-Labrador et à l'Île-du-Prince-Édouard.

Nouveau-Brunswick

  • Une somme de 56,9 millions pour le point d'entrée de St. Stephen.
     
  • Une contribution pouvant représenter jusqu'à la moitié du coût d'un projet de 275 millions de dollars visant à élargir à quatre voies la route 1 entre St. Stephen et Saint John.
     
  • Une somme de 70 000 $ pour mettre sur pied la porte d'entrée de fret aérien de l'Est du Canada, un organisme sans but lucratif qui cherche à mettre en valeur les occasions d'exporter à partir de l'aéroport international du Grand Moncton.
     
  • Une somme de 26,4 millions de dollars pour le port de Belledune.
     
  • Une somme de 9 millions de dollars pour Chemin de fer du Sud, Nouveau-Brunswick.

Nouvelle-Écosse

  • Le gouvernement du Canada a réservé 86 millions de dollars afin d'appuyer six projets fédéraux-provinciaux en Nouvelle-Écosse qui contribueront à améliorer l'efficacité et la compétitivité de la Porte de l'Atlantique, notamment :
     
  • Une somme de 17,5 millions de dollars pour la phase 1 du projet de la voie de raccordement Burnside afin de relier la route 102 et la route 107 à un grand parc industriel et à une installation de transbordement.
     
  • Une somme de 17,5 millions de dollars pour l'agrandissement de la gare maritime sud du port de Halifax afin d'être en mesure d'accueillir la prochaine génération de bateaux pour le transport de conteneurs.
     
  • Une somme de 36,5 millions de dollars pour l'agrandissement de la porte à usages multiples des terminaux de Richmond du port de Halifax afin d'améliorer et de développer les services de traitement du cargo à valeur ajoutée.
     
  • Une somme de 4,5 millions de dollars pour l'échangeur à haute vitesse de Truro afin d'améliorer les voies des échangeurs à une jonction essentielle de la route qui représente un volume élevé de déplacements commerciaux en Nouvelle-Écosse.
     
  • Une somme de 7,5 millions de dollars pour apporter des améliorations à la route 344 afin de soutenir le développement et l'exploitation du terminal à conteneurs prévu à Melford.
     
  • Une somme de 2,5 millions de dollars pour des activités de développement des affaires et de marketing afin de promouvoir les ports de la porte de l'Atlantique et d'autres installations.

Terre-Neuve-et-Labrador

  • Plus de 70 millions de dollars pour appuyer d'importants projets d'infrastructure routière à Terre-Neuve-et-Labrador, dont 15 projets sur l'autoroute transcanadienne, ce qui vient appuyer la porte de l'Atlantique.
     
  • Une contribution conjointe de 2,7 millions de dollars du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial et du secteur privé pour améliorer considérablement les activités au port de Corner Brook. Les fonds ont servi à acheter de l'équipement et à rénover des installations portuaires pour charger et décharger de gros et volumineux conteneurs.

Île-du-Prince-Édouard

  • Une somme de 2 millions de dollars pour des travaux de remise en état du port de Charlottetown, notamment l'ajout d'une nouvelle jetée et d'un nouveau centre d'accueil des passagers des navires de croisière ainsi que l'agrandissement de 113 mètres du poste d'amarrage et l'ajout de bollards de 200 tonnes. Ces changements permettent à de gros navires de faire escale à Charlottetown, et le nombre de passagers triplera.
     
  • Une somme de 3,8 millions de dollars pour développer la route périphérique de Charlottetown ainsi qu'ajouter des voies de virage et réaménager certaines bretelles d'accès et sorties au besoin.

(Réponse à la question posée le 24 mars 2010 par l'honorable Terry M. Mercer)

Notre gouvernement estime que le Canada atlantique est dans une position idéale pour jouer un rôle essentiel dans l'économie canadienne.

C'est pourquoi l'Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA), Transports Canada, les gouvernements des quatre provinces de l'Atlantique ainsi que des parties prenantes du secteur privé de la région travaillent ensemble à la mise en place de cette nouvelle porte d'entrée. Des représentants ont déjà participé à d'importantes missions commerciales à l'étranger pour promouvoir le Canada atlantique sur la scène internationale.

Ensemble, nous travaillons à l'établissement d'une porte de l'Atlantique efficace pour profiter des occasions qu'offre l'économie mondiale.

La santé

La stratégie relative à l'autisme

(Réponse à la question posée le 30 mars 2010 par l'honorable Jim Munson)

À propos d'une stratégie nationale en matière d'autisme :

Le gouvernement fédéral appuie les personnes atteintes de troubles du spectre autistique (TSA) et leur famille grâce à la recherche, la surveillance et d'autres initiatives en collaboration avec une vaste gamme de partenaires, comme les provinces, les territoires et d'autres intervenants.

Pour qu'une stratégie nationale soit efficace, elle doit être fondée sur des données probantes, et il faut s'entendre sur son orientation et sur ses éléments.

Avant d'entreprendre une stratégie nationale pour lutter contre les TSA, il est essentiel que les gouvernements et les intervenants comprennent mieux ces troubles, leurs causes et les interventions pour y remédier. En effet, les intervenants s'entendent pour dire qu'il manque grandement de connaissances et de consensus au sujet des questions liées aux TSA.

Pour jouer son rôle dans l'amélioration de l'élaboration et de la diffusion de connaissances en matière d'autisme, le gouvernement fédéral continue de soutenir la recherche sur l'autisme. Entre 2006-2007 et 2009-2010, le gouvernement du Canada, par l'intermédiaire des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), a approuvé un investissement d'environ 14,3 millions de dollars dans des projets de recherche sur l'autisme, dont 10,3 millions de dollars ont été nouvellement affectés pour de nouveaux projets de recherche.

Le gouvernement fédéral continuera d'appuyer l'élaboration de données probantes afin de mieux aider les personnes atteintes et leur famille à faire face aux nombreux problèmes liés aux TSA.

À propos du financement de la chaire nationale de recherche :

L'Université Simon Fraser a fait de son mieux pour recruter un titulaire d'une chaire de recherche sur l'autisme. Cependant, il y a eu des difficultés dans le processus de recrutement en raison de circonstances imprévues, et donc l'université a été incapable de dépenser les fonds alloués à cette initiative. En août 2009, l'Université Simon Fraser a demandé que l'accord de contribution soit résilié.

Les fonctionnaires de Santé Canada sont en train d'élaborer des options pour examen par le ministre de la Santé.

Le gouvernement fédéral continuera à soutenir une panoplie d'activités et d'initiatives visant à améliorer le savoir et la sensibilisation à l'autisme. Par exemple, Santé Canada a fourni 50 000 $ en 2007-2008 au Offord Centre for Child Studies pour mettre à jour son site web du Réseau canadien de recherche d'intervention sur l'autisme (CAIRN) pour soutenir le développement de matériel mis à jour et la traduction de ses informations en français. Ce site est une ressource excellente, particulièrement pour les familles touchées par l'autisme. Par ailleurs, Santé Canada a fourni un montant supplémentaire de 75 000 $ sur deux ans (2008/ 2009 et 2009/2010) au Offord Centre for Child Studies pour continuer à mettre à jour le site CAIRN; pour faire une enquête auprès des intervenants de l'autisme pour identifier les priorités de recherche; et organiser une conférence (tenue le 2 octobre 2009) pour réunir les intervenants sur l'autisme, les chercheurs et les décideurs afin d'affiner les priorités de recherche identifiées.

Le gouvernement fédéral est convaincu que ces activités contribueront à améliorer la capacité au Canada de s'attaquer à ce problème important.

À propos des activités reliées à l'autisme à l'Agence de la santé publique du Canada :

Le gouvernement a répondu aux demandes pour de meilleures données de surveillance sur les TSA au Canada.

Le budget de 2008 annonçait une initiative portant sur les troubles de développement chez les enfants et les liens avec les contaminants environnementaux afin de mieux comprendre les répercussions de l'environnement sur la santé. Dans le cadre de cette initiative, le gouvernement investit dans un programme de surveillance des déficiences développementales qui cible, entre autres, l'autisme.

Les travaux sont en cours par rapport à ce système, et cet automne une réunion d'étape aura lieu avec les intervenants en matière d'autisme afin de partager des renseignements et favoriser une approche de surveillance qui répondra aux besoins des familles.

L'agriculture

La crise agricole en Saskatchewan

(Réponse aux questions posées les 22 et 29 juin 2010 par l'honorable Robert W. Peterson)

Le gouvernement fédéral reconnaît la situation difficile à laquelle font face bon nombre d'agriculteurs en Saskatchewan et dans les autres provinces des Prairies.

L'analyse effectuée en collaboration avec les provinces touchées montre que les programmes actuels de gestion des risques de l'entreprise (GRE) fourniront une aide appréciable à ces producteurs. L'aide en question comprend :

  • Agri-protection — Un paiement d'environ 50 $ l'acre pour les superficies non ensemencées et une indemnité d'assurance pour les pertes de récoltes sur les superficies ensemencées.
     
  • Agri-stabilité — Une aide substantielle pour les producteurs de céréales et d'oléagineux qui subissent de fortes baisses de revenu.
     
  • Agri-investissement — Environ 97 000 producteurs des Prairies ont plus de 428 millions de dollars dans leurs comptes Agri-investissement pour faire face aux pertes.

Les autorités fédérales et les provinces touchées conjuguent leurs efforts pour distribuer l'aide financière de ces programmes aux producteurs dans les plus brefs délais grâce à des mécanismes comme les paiements provisoires d'Agri-stabilité.

Les gouvernements ont repoussé la date limite d'ensemencement prévue par l'assurance-récolte en Saskatchewan et dans certaines régions de l'Alberta pour répondre aux besoins des agriculteurs touchés.

Les responsables du gouvernement fédéral et ceux de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba s'affairent à évaluer la situation le plus rapidement possible dans le cadre d'Agri-relance afin de déterminer ce qu'il y aurait peut-être lieu d'ajouter à l'aide de base des programmes de GRE pour atténuer les effets de cette catastrophe sur les exploitations des producteurs.

[Traduction]

Le Sénat

Hommage aux pages à l'occasion de leur départ

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer à l'ordre du jour, je vous invite à dire au revoir à trois de nos pages qui nous quittent.

Commençons par Marie-Michelle Jobin. Après avoir été page pendant deux ans, Marie-Michelle Jobin, originaire de Kingston, en Ontario, quitte le programme pour aller passer un an en Autriche, dans le cadre d'un programme d'échange, avant de terminer ses études en économie internationale et développement.

[Français]

Philippe Teisceira-Lessard, de Québec, quitte le programme après un an afin de poursuivre un certificat en journalisme à l'Université de Montréal.

[Traduction]

Hannah Wyile, qui a occupé le poste de premier page cette année, quitte le programme des pages du Sénat après trois ans. L'année prochaine, elle terminera sa dernière année d'études en sciences politiques et droits de la personne à l'Université Carleton.

Des voix : Bravo!


[Français]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux

Troisième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Nancy Ruth, appuyée par l'honorable sénateur Nolin, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-4, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves, tel que modifié.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, mon discours sera très court. Si j'ai bien compris, madame le sénateur McCoy aimerait prendre la parole sur ce projet de loi.

[Traduction]

Le sénateur McCoy se trouve au Comité des finances en ce moment et je crois comprendre que le sénateur Brazeau veut parler de ce projet de loi. Cela donnera au sénateur McCoy la possibilité de revenir du comité pour parler également de ce projet de loi. Nous pourrons ensuite poursuivre son étude.

Voilà qui conclut ce que j'avais à dire sur ce projet de loi. Je crois que le sénateur Brazeau veut prendre la parole maintenant.

L'honorable Patrick Brazeau : Honorables sénateurs, nous sommes maintenant saisis du projet de loi S-4, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves, dans sa forme amendée.

Cela n'est pas un secret qu'il n'y a jamais eu de régime en cas de rupture de mariage dans les réserves. Il est tout aussi inconcevable que, en 2010, alors que toutes les femmes sont protégées en cas de rupture de mariage, les femmes des Premières nations ne bénéficient pas de la même protection. Il est grand temps que nous adoptions cette mesure législative. Permettez-moi de vous dire pourquoi.

L'organisme qui représente les femmes autochtones de tout le Canada, l'Association des femmes autochtones du Canada, est allé à plusieurs reprises présenter des exposés aux Nations Unies pour amener le Canada à mettre sur pied un régime pour régir les biens immobiliers matrimoniaux. Nous sommes maintenant saisis d'un tel régime.

Comme n'importe quelle mesure législative, honorables sénateurs, celle-ci n'est pas parfaite, mais voici ce qu'elle ferait. Premièrement, elle protégerait tous les Autochtones en cas de rupture de mariage ou de séparation en ce qui a trait à leurs biens immobiliers matrimoniaux. Deuxièmement, elle permettrait la reconnaissance, par le ministre des Affaires indiennes, du régime ou du code dont se sont dotées certaines collectivités des Premières nations pour régir les biens matrimoniaux. Une collectivité des Premières nations peut déjà disposer de son code, mais, en raison de la Loi sur les Indiens, il ne peut pas être reconnu par le ministre. Ce serait un pas en avant dans la reconnaissance de ce pour quoi un grand nombre de collectivités des Premières nations ont travaillé fort, à savoir, pour créer leur propre régime régissant les biens immobiliers matrimoniaux en tenant compte de leurs traditions, de leurs valeurs et de leurs coutumes. C'est extrêmement important.

Parmi ceux qui semblent contre cette mesure législative, il y a bien des gens alarmistes qui disent que les femmes non autochtones, par exemple, dans le cas d'une rupture de mariage avec un homme autochtone, pourraient s'approprier les terres. Honorables sénateurs, cela n'a rien à voir avec les terres. Il s'agit des biens immobiliers matrimoniaux.

Le deuxième type de propos alarmistes que nous entendons, c'est que le projet de loi risque de pousser un plus grand nombre de femmes non autochtones à épouser des hommes autochtones. De plus, dans le cas d'un divorce ou d'une rupture, les femmes non autochtones auraient droit à la maison. Cela pourrait arriver dans certaines circonstances, mais qu'en est-il des enfants issus de ces mariages? Qu'en est-il des enfants des Premières nations? Qu'en est-il des chefs, des dirigeants et des Autochtones en général qui parlent de l'importance de transmettre aux enfants les traditions et la culture dans les réserves et d'aller à l'école dans les réserves? Qu'en est-il des droits de ces enfants? Même s'ils ont une mère non autochtone, ils ont le droit de faire partie de cette collectivité. Voilà ce que ce projet de loi accomplirait. Il protégerait les droits des hommes autochtones, mais il protégerait plus particulièrement les droits des femmes et des enfants autochtones.

Honorables sénateurs, nous entendons beaucoup parler de l'argent qui sera versé aux collectivités pour leur permettre d'élaborer leurs propres codes, mais cela n'exigera pas beaucoup d'argent. Permettez-moi d'être franc. Plusieurs des témoins qui ont comparu devant le comité pour s'opposer à ce projet de loi sont également les consultants qui travailleraient pour les collectivités des Premières nations à 500 $ ou 1 000 $ par jour. Ils ont tout intérêt à assurer leur propre sécurité financière.

Ce n'est pas une question d'argent, honorables sénateurs. Il est question ici des droits de la personne et de l'égalité des femmes des Premières nations.

Honorables sénateurs, comme je l'ai dit auparavant, comment est-il possible que, en 2010, les femmes autochtones ne bénéficient pas de cette protection? S'il s'agissait de femmes non autochtones, cela aurait soulevé un tollé de protestations dans cette enceinte, à la Chambre des communes et dans l'ensemble du pays.

Je suis évidemment un grand partisan du projet de loi proposé. J'encourage tous les sénateurs à voter en sa faveur. Pensez-y, honorables sénateurs. Qu'est-ce que vous diriez à une femme autochtone qui rentre chez elle tard un soir et découvre que les serrures ont été changées? Elle se trouve à la rue avec ses enfants et elle n'a nulle part où aller et personne vers qui se tourner parce qu'il n'existe pas de régime régissant les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves. Comment peut-on expliquer cela à une femme autochtone?

Nous parlons des plus de 500 femmes autochtones qui ont disparu et qui ont été tuées au Canada, trop souvent dans les centres urbains. Imaginez combien de vies auraient pu être sauvées s'il y avait eu un régime régissant les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves, qui aurait protégé leurs droits et leurs intérêts. Songez à cela, honorables sénateurs.

Des voix : Bravo!

L'honorable Joan Fraser : Le sénateur Brazeau accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Brazeau : Certainement.

Le sénateur Fraser : Je n'ai pas assisté aux réunions du comité, mais j'ai cru comprendre, comme je crois que le sénateur Brazeau l'a plus ou moins admis dans son intervention, qu'un grand nombre de témoins étaient opposés au projet de loi. Qui appuie ce projet de loi, à part le ministre, et pour quelles raisons?

Le sénateur Brazeau : Comme je l'ai mentionné il y a plusieurs semaines, la présidente actuelle de l'Association des femmes autochtones du Canada a déclaré que son organisme appuyait la mesure législative sous sa forme actuelle. Elle aurait toutefois préféré obtenir davantage de garanties en dehors du cadre de la loi afin de régler la pénurie de logements dans les réserves, par exemple.

(1500)

J'espère que le sénateur se rend compte que de nombreux chefs sont venus témoigner au comité. Ils s'opposaient également au projet de loi C-21, qui prévoyait l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Les deux projets de loi concernent les droits de la personne et la protection des femmes autochtones, en particulier dans les cas de discrimination.

Je suis persuadé que madame le sénateur est consciente du fait que de nombreuses femmes autochtones ont souffert de l'absence d'un régime régissant les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves. Elles en appuient le concept, mais il leur est difficile de venir témoigner au comité. Elles ne veulent pas revivre leur pénible expérience en devant raconter devant un comité parlementaire les abus dont elles ont été victimes. Selon mon expérience et diverses séances de partage d'information sur cette question et sur d'autres sujets, les femmes autochtones d'un bout à l'autre du pays appuient généralement cette idée.

Le sénateur Fraser : Honorables sénateurs, je sais parfaitement que de nombreuses femmes autochtones souhaitent ardemment et légitimement voir cette situation réglée sans tarder, mais les chefs s'y opposent. Que devons-nous faire? Les chefs sont les représentants démocratiques et légitimes des personnes touchées. Devrions-nous dire tant pis? Le sénateur est-il en train de dire que nous devrions tout simplement ignorer ce que souhaitent les chefs?

Le sénateur Brazeau : Honorables sénateurs, nous pouvons certainement écouter ce que les chefs ont à dire. Je ne suis pas prêt à dire qu'ils sont les représentants démocratiquement élus du peuple, à cause des problèmes liés à la Loi sur les Indiens et aux codes des us et coutumes, selon lesquels des membres des Premières nations n'ont toujours pas le droit de voter dans les réserves en raison de certains us et coutumes, quels qu'ils soient. Je trouve plutôt antidémocratique de refuser le droit de vote à certaines personnes. Non, nous ne devrions pas ignorer les demandes des chefs. Par contre, les parlementaires des deux côtés du Sénat devraient porter plus d'attention aux gens de la base de ce pays.

L'honorable Sandra Lovelace Nicholas : Honorables sénateurs, les chefs s'opposent à ce projet de loi parce qu'il va causer davantage de problèmes aux femmes et aux enfants en aggravant la pénurie de logements. Que croyez-vous que les gens vont faire, alors?

Le sénateur Brazeau : Honorables sénateurs, je ne suis pas certain s'il y avait là une question, mais je ne vois pas ce qu'un régime de partage des biens immobiliers matrimoniaux visant à protéger les intérêts des femmes et de leurs enfants en cas d'échec du mariage a à voir avec le logement. Actuellement, dans la plupart des cas, lorsqu'un mariage échoue, les femmes et les enfants se font jeter hors de la maison familiale. Je ne sais pas comment les choses se passent dans votre réserve, mais dans la mienne, bien des femmes sont contraintes de quitter leur domicile. Elles ne se retrouvent pas à la rue à cause d'une pénurie de logements, bien que ce puisse être le cas, mais parce qu'il n'existe aucun régime pour protéger leurs intérêts.

L'honorable Lillian Eva Dyck : Le sénateur a-t-il lu le rapport du Cercle national autochtone pour la lutte contre la violence familiale, qui a été commandé par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien lorsqu'un projet de loi à cet égard a été présenté il y a plusieurs années? Ces femmes, même si elles avaient été maltraitées et jetées hors de leur maison, se sont opposées à une réforme législative. Elles n'ont pas hésité à venir dire le fond de leur pensée.

Certaines de ces femmes hésitent à parler parce qu'elles sortent d'une relation abusive, mais toutes les femmes ne sont pas dans la situation lamentable que le sénateur décrit comme généralisée. Certaines de ces femmes sont incroyablement fortes. Ce n'est pas noir ou blanc.

Et qu'a pensé la présidente du Centre pour l'étude de la gouvernance autochtone de l'Université Ryerson, Pamela Palmater, de ce projet de loi? Que vous a-t-elle dit lorsqu'elle a comparu devant le comité? Était-elle d'avis que nous devrions l'adopter?

Le sénateur Brazeau : Je vais commencer par répondre à la dernière question du sénateur. Mme Palmater est une avocate et une consultante qui travaille aussi pour le compte de chefs. Il va donc sans dire qu'elle était directement intéressée par la question. Elle a également travaillé pour le Congrès des Peuples Autochtones, que j'ai déjà dirigé. Dans les nombreux refuges pour femmes dont s'occupaient nos filiales provinciales, j'ai souvent rencontré des femmes qui étaient pénalisées parce qu'elles n'étaient visées par aucun régime de détermination du patrimoine familial. Je ne comprends toujours pas comment on peut envisager de ne pas adopter cette mesure législative, qui permettrait aux communautés des Premières nations qui ont déjà un régime de le faire reconnaître, ce que ne peut pas faire le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien à l'heure actuelle. Qu'est-ce qu'on peut bien trouver à redire à ça?

S'il s'agissait de non-Autochtones, nous assisterions à une immense levée de boucliers. J'ai presque honte de devoir aujourd'hui défendre une mesure législative aussi juste. Les consultations auprès des femmes autochtones et des autres parties intéressées se sont étirées sur plusieurs années. Wendy Grant-John, qui a été nommée représentante ministérielle pour les biens immobiliers dans les réserves par l'ancien ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Jim Prentice, a publié un rapport sur le sujet. Si ma mémoire est bonne, 30 de ses 33 recommandations se retrouvent dans ce projet de loi. Cela ne doit pas être si mauvais que ça.

Le sénateur Dyck : Qu'ont dit les témoins à propos des problèmes associés à la reconnaissance des codes déjà en vigueur? Ne vous ont-ils pas dit qu'ils s'opposaient à ce que ce soit le ministre qui ait le pouvoir de les reconnaître, une façon de faire qu'ils jugeaient par trop paternaliste et coloniale, et que l'article 35 de la Constitution leur donne le droit d'adopter leurs propres lois? Ils ont dit que le ministre ne devrait pas être celui qui assume cette responsabilité. N'est-ce pas ce que les témoins vous ont dit?

Le sénateur Brazeau : Honorables sénateurs, c'est exactement ce qu'ils ont dit. Permettez-moi cependant d'être franc : j'espère bien être encore vivant quand on aura réussi à véritablement comprendre les droits conférés par l'article 35. N'importe qui peut se lever et affirmer qu'il a droit à ceci ou à cela, mais tant que rien n'est négocié ou reconnu par les tribunaux, cela ne change rien. Or, moi, je propose de changer les choses, et c'est ce projet de loi qui va nous permettre de le faire.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, à moins qu'il ne demande une prolongation, je devrai interrompre le sénateur Brazeau, car son temps de parole est écoulé. Poursuivons-nous le débat?

L'honorable Elaine McCoy : Je remercie les honorables sénateurs d'avoir eu l'obligeance de m'accorder quelques minutes de plus pour me donner le temps d'arriver ici après avoir quitté la séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Je ne sais plus où donner de la tête. Des témoins du secteur de l'environnement comparaissent devant le comité et votre estimé ministre de l'Environnement, Jim Prentice, comparaît en ce moment même. Je suis certaine que je ne lui manquerai pas, mais moi je vais manquer son témoignage. Quoi qu'il en soit, je dois prendre la parole à propos de ce projet de loi aujourd'hui, car je crois comprendre que c'est ma dernière chance. Pardonnez-moi si je suis un peu désorganisée, mais ça va aller.

La semaine dernière, j'ai demandé l'ajournement du débat sur le projet de loi car je craignais que le Sénat n'abandonne son étude et qu'il soit adopté hâtivement, ce qui ne serait pas la chose à faire en l'occurrence.

Ce n'est pas une question qui me touche personnellement, même si j'ai travaillé avec les Premières nations au fil des années. Honorables sénateurs, je vais vous parler de la première fois où j'ai été exposée aux coutumes des Premières nations, que je chéris toujours. Les sénateurs ont pour mandat de défendre les minorités et de permettre à tous les Canadiens d'avoir leur mot à dire sur leur avenir. C'est pourquoi j'interviens.

(1510)

Nous venons d'entendre un bon échange de points de vue entre les sénateurs Brazeau, Dyck, Lovelace Nicholas et Fraser, entre autres. Quelle que soit l'interprétation que l'on fasse des témoignages entendus, nous savons à tout le moins qu'un nombre considérable de personnes qui parlent au nom des femmes autochtones disent que cette mesure législative est inappropriée. Tous s'entendent pour dire qu'il y a des problèmes et qu'il faut les régler. Néanmoins, personne ne s'entend quant aux solutions.

Ce qui me frappe, c'est que nous essayons d'imposer une solution qui pourrait me convenir à moi, qui suis une femme de la classe moyenne et d'âge mûr qui a vécu toute sa vie durant dans des régions urbaines, qui est diplômée en droit et qui comprend et connaît bien la procédure judiciaire anglo-saxonne. Cette solution me convient parfaitement, même si je dois admettre, puisque j'ai déjà été ministre responsable des questions relatives aux femmes et puisque je travaille sur ces questions depuis plusieurs décennies, que, même dans ma société, les femmes quittent leur domicile lorsqu'elles sont victimes de violence. À Calgary, par exemple, il y a deux ou trois refuges bien connus. Or, chaque année, ces refuges refusent en moyenne trois femmes et 10 enfants pour chaque femme et enfant qu'ils accueillent. Ils sont vraiment sous-financés. Je ferais mieux de ne pas me lancer dans cette diatribe.

Je suis consciente de ces problèmes que je comprends dans une certaine mesure et je pense que nous nous efforçons tous de trouver une façon d'aider les femmes qui ont été maltraitées, et ce, peu importe où elles vivent, que ce soit dans des collectivités éloignées ou au centre-ville de Calgary. Toutefois, la solution ne convient pas du tout à bien des personnes qui habitent dans les réserves parce qu'elle leur est imposée et qu'elle est contraire à leur culture.

Au cours de cette session, nous avons participé à des débats captivants — j'y ai aussi pris part — sur la culture d'une autre minorité, soit la francophonie. Dans ce cas, le projet de loi concernait les compétences que doivent posséder les juges avant d'être nommés à la Cour suprême. De nouveau, nous parlions de la protection d'une culture, du fait de veiller à ce qu'un groupe minoritaire soit respecté le plus possible, à condition que les autres cultures qui composent la mosaïque canadienne n'en souffrent pas trop.

La situation est un peu la même maintenant, car nous ne comprenons pas forcément la culture en question puisque nous n'avons pas été élevés dans celle-ci et qu'elle n'imprègne pas nos vies.

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous raconter une histoire amusante. Lorsque j'ai fait campagne pour la première fois à Calgary en 1985 — mon Dieu, il y a bien longtemps; cela vous donne un bon indice de mon âge —, on ne me donnait pas beaucoup de chances de l'emporter. Toutefois, je pouvais compter sur une merveilleuse équipe de six personnes, dont Ron Scrimshaw, détenteur d'un doctorat en éducation. C'était un membre d'une Première nation visée par l'article 31. M. Scrimshaw était le premier ou le deuxième membre d'une Première nation albertaine à recevoir un doctorat. Soit dit en passant, il avait le même âge que moi.

Ron nous a beaucoup aidés. Il travaillait pour une grande entreprise. Il avait beaucoup d'énergie et d'entregent, et son arrivée faisait toujours apparaître des sourires sur nos visages. Il a aussi commencé à me faire connaître sa culture. Il avait un pied dans les deux cultures, mais il assumait tout à fait la sienne.

Un jour, il est venu dans notre local et a vu le désordre. Il y avait des morceaux de papier et des messages un peu partout. Dans un bureau de campagne, on fonctionne avec les moyens du bord. Ron a dit qu'il apporterait un pigeonnier, dans lequel on mettrait les messages pour qu'ils ne se perdent plus. Nous avons trouvé cette idée extraordinaire; il l'a donc apporté. Ce modeste mais extraordinaire présent nous a fait très plaisir et, alors qu'il me le donnait, il a dit : « Bien sûr, je veux le récupérer après. » Il avait un grand sens de l'humour. J'ai répondu, en riant : « Oh, un cadeau à l'indienne, hein? » Je me suis alors dit que j'aurais mieux fait de me taire, car mon commentaire était un peu limite. Pourtant, il a ri et dit : « Tout à fait. »

Ron m'a demandé si je savais d'où l'expression venait. J'ai répondu que j'en avais une petite idée, mais lui ai demandé de m'expliquer. Il m'a alors dit que la culture autochtone est de nature communautaire, et qu'on donne toujours un objet à celui qui en a le plus besoin quand il en a besoin. Mais, dès que quelqu'un d'autre en a davantage besoin, on reprend l'objet en question et on le donne à la personne suivante qui en le plus besoin. Il s'agit toujours d'un bien mis en commun. En tant que collectivité, on s'occupe les uns des autres, mais les plus vulnérables passent en premier. Ils changent de temps en temps. Par conséquent, ce qui est donné à une personne peut être repris, mais seulement parce que quelqu'un d'autre en a plus besoin. C'est pour cela qu'il a dit qu'il voulait reprendre son pigeonnier, parce que nous n'en aurions pas besoin après la campagne.

Ce fut mon premier contact avec la culture des Premières nations. Lorsque j'écoute les débats qui se déroulent ici à propos de la solution à ce problème, je me dis que, si je n'avais pas eu la chance de travailler avec Ron, qui a commencé à m'initier à ce principe des Premières nations qui m'était inconnu, je n'aurais jamais compris les choses dans leur contexte. J'ai l'impression d'entendre sans cesse des échos des discussions sur la question de la langue ou sur le manque compréhension.

Honorables sénateurs, je crois que nous devrions reporter le débat sur ce projet de loi à l'automne. J'apprécierais énormément que le gouvernement le retarde jusque-là, car ceux qui travaillent à ce dossier m'ont dit que des pourparlers ont lieu entre des représentants des Premières nations et des décideurs de haut niveau des Affaires indiennes et du Nord canadien afin de trouver un arrangement à l'amiable que les gens comprennent et qui soit adapté à la façon dont ils vivent et interprètent leur culture, ce qui peut varier selon les collectivités. Je crois que, à titre de protecteurs des minorités, nous devons leur donner cette chance.

Cependant, même si nous adoptons ce projet de loi aujourd'hui, ce qui constituerait, à mon sens, un manquement à notre devoir de sénateurs, il ne sera pas étudié à la Chambre des communes avant l'automne puisqu'il s'agit d'un projet de loi qui émane du Sénat. Il faut espérer que les représentants du ministère pourront poursuivre leurs discussions avant que la Chambre des communes ne soit saisie du projet de loi et que les députés liront la transcription de nos débats. Il est à espérer que les sénateurs parleront aux députés et leur feront part des difficultés dont nous avons pris connaissance. Il est à espérer que, au cours du processus, entre gens de bonne volonté, nous trouverons une solution appropriée qui réparera les torts d'une façon acceptable sur le plan culturel.

L'honorable Francis William Mahovlich : Combien des 650 bandes autochtones souscrivent au projet de loi?

Le sénateur McCoy : Je ne connais pas le chiffre exact, mais je sais que l'Assemblée des Premières Nations, qui représente la quasi-totalité des nations indiennes du pays, s'y oppose.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L'honorable sénateur Nancy Ruth, avec l'appui de l'honorable sénateur Nolin, propose que le projet de loi modifié soit lu pour la troisième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les oui l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés :

Son Honneur le Président : Convoquez les sénateurs.

Avons-nous l'avis des whips?

L'honorable Stephen Greene : Que la sonnerie retentisse pendant une heure.

Son Honneur le Président : Le vote aura lieu à 16 h 20.

Ai-je la permission de quitter le fauteuil?

Des voix : D'accord.

(1620)

(La motion est adoptée et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk

MacDonald

Angus Manning
Boisvenu Marshall
Braley Martin
Brazeau Meighen
Brown Mockler
Carignan Neufeld
Cochrane Ogilvie
Comeau Oliver
Dickson Patterson
Duffy Plett
Eaton Poirier
Finley Raine
Fortin-Duplessis Rivest
Frum Runciman
Gerstein Segal
Greene Seidman
Housakos Stewart Olsen
Johnson Stratton
Kinsella Tkachuk
Kochhar Wallace
Lang Wallin—45
LeBreton

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Baker Lovelace Nicholas
Banks Mahovlich
Callbeck Massicotte
Campbell McCoy
Chaput Merchant
Cowan Mitchell
Dallaire Moore
Day Munson
Downe Pépin
Dyck Ringuette
Fairbairn Robichaud
Fraser Rompkey
Furey Sibbeston
Harb Smith
Hubley Stollery
Jaffer Zimmer—32

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucun.

Le Sénat

Motion tendant à prolonger la séance du mercredi—Retrait de la motion

À l'appel de la motion no 17 de l'honorable sénateur Comeau :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat du 15 avril 2010, lorsque le Sénat siégera le mercredi 30 juin 2010, il poursuive ses travaux après 16 heures et qu'il suive la procédure normale d'ajournement conformément à l'article 6(1) du Règlement;

Que l'application de l'article 13(1) du Règlement soit suspendue le mercredi 30 juin 2010.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je retire la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(La motion est retirée.)

Projet de loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux

Attribution de temps pour le débat—Retrait de la motion

À l'appel de la motion no 18 de l'honorable sénateur Comeau :

Que, conformément à l'article 39 du Règlement, pas plus de six heures de délibérations ne soient attribuées à l'étude de l'étape de la troisième lecture du projet de loi S-4, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves, tel que modifié;

Que, lorsque les délibérations seront terminées ou que le temps prévu pour le débat sera écoulé, le Président interrompe, au besoin, les délibérations en cours au Sénat et mette aux voix immédiatement et successivement toute question nécessaire pour terminer l'étude à l'étape de la troisième lecture dudit projet de loi;

Que tout vote par appel nominal sur lesdites questions soit tenu conformément au paragraphe 39(4) du Règlement.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je retire la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(La motion est retirée.)

(1630)

[Français]

La Loi sur la Cour suprême

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Tardif, appuyée par l'honorable sénateur Rivest, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-232, Loi modifiant la Loi sur la Cour suprême (compréhension des langues officielles).

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je remercie tout d'abord le sénateur Fraser d'avoir rendu hommage à tous les sénateurs qui sont intervenus dans le débat sur la motion du sénateur Tardif, le projet de loi C-232, au sujet de la Loi sur la Cour suprême.

Ce projet de loi prévoit que les juges soient choisis :

[...] parmi les personnes visées au paragraphe 1 qui comprennent le français et l'anglais sans l'aide [...]

Je me permets de souligner qu'il n'est aucunement question de bilinguisme dans ce projet de loi, contrairement à ce qu'ont dit de nombreux médias. Je me suis posé, comme un bon nombre de mes collègues, la même question au sujet de ce projet de loi dans un contexte bien connu par nous tous. Le premier ministre doit parler les deux langues officielles et les leaders de l'opposition doivent aussi parler les deux langues. À nous, parlementaires, on conseille de nous approcher le plus possible du bilinguisme. Les employés de la fonction publique n'ont aucune chance de promotion s'ils ne sont pas bilingues.

Donc, ma question est la suivante : pourquoi ferait-on une exception pour les juges de la Cour suprême? La crème de la crème de la crème de notre société n'est-elle pas obligée de se soumettre aux mêmes règles de fonctionnement que toute autre personne qui vise à faire partie du service public? Il ne faut pas oublier qu'il y a une importante différence entre le fait d'être bilingue et celui de comprendre une langue. Ce projet de loi exige que les juges comprennent une seconde langue sans être nécessairement bilingues.

[Traduction]

Honorables sénateurs, neuf juges sont nommés à la Cour suprême du Canada parmi les milliers d'avocats du pays et les 34 millions de Canadiens. Aux termes de la loi, trois juges de la Cour suprême proviennent du Québec et, par convention, trois juges viennent de l'Ontario, un, d'une province de l'Atlantique et deux, d'une province de l'Ouest.

Honorables sénateurs, remarquez qu'il n'y a que deux juges qui viennent de l'Ouest. Beaucoup craignent que les juges de l'Ouest ne soient pas en mesure de comprendre le français.

Je suis convaincu qu'il y a des juristes au Manitoba, en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique qui comprennent le français, ou qu'il y en aura. Dans le monde d'aujourd'hui, nous ne pouvons pas prétendre qu'il n'est pas possible de trouver, dans les quatre provinces de l'Ouest, deux juges tout à fait compétents qui comprennent les deux langues officielles. Ce serait déconsidérer les juges.

Pour aspirer au poste de juge, les candidats doivent être très compétents en droit. J'estime qu'ils peuvent avoir les compétences nécessaires dans les deux langues officielles du Canada. Ces aptitudes sont compatibles. Honorables sénateurs, prétendre qu'on ne peut pas trouver dans l'Ouest deux juges qui répondent à ces critères, c'est ne pas considérer ma région à sa juste valeur.

[Français]

La Loi sur les langues officielles de 1969 dit que, en vertu de l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, quiconque peut utiliser l'une ou l'autre des langues officielles et que la loi accorde aux juges des tribunaux la liberté de choisir leur langue. Combien de temps cette exemption sera-t-elle tolérée par une société, notre société dite bilingue?

Il est bien connu que, dans toutes — je souligne, toutes — les provinces canadiennes, les deux langues officielles se retrouvent au quotidien et sans exception. Des millions d'anglophones à travers le pays ont des voisins francophones et francophiles. Ces personnes se côtoient quotidiennement et mènent des activités communes, partagent leur existence, vivent tout simplement ensemble depuis des siècles. Nous ne pouvons plus être comme des silos isolés, gardant chacun ses origines pures, comme les graines dans les silos.

Nous devons, tout simplement, reconnaître et admettre que nous formons un tout, une entité, tout en partageant ce que nous avons de mieux, et ce, à travers nos deux langues, le français et l'anglais. De nombreuses personnes ont tendance à croire que, dans l'Ouest du Canada, il est difficile de trouver des services juridiques francophones. Sachez, honorables sénateurs, que, dans la province que je représente fièrement ici, la Colombie-Britannique, il y a une cour francophone et des juristes qui offrent des services en français. Voici ce que le président de l'association des juristes francophones de la Colombie-Britannique, M. Francis Lamer, a dit :

Il sera salutaire que tous les juges de la Cour suprême du Canada comprennent les deux langues officielles. Non seulement parce qu'ils doivent écouter des plaidoiries en français, mais également parce qu'ils doivent lire et comprendre les soumissions écrites des parties qui choisissent de plaider en français. Même avec l'assistance de la traduction simultanée, plaider en français devant un juge qui ne comprend pas et ne lit pas le français, c'est se priver de l'opportunité de se faire comprendre à son meilleur.

[Traduction]

Honorables sénateurs, après avoir entendu divers témoignages contre le projet de loi C-232, j'ai l'impression que les gens pensent que les provinces vivent en vase clos, que leurs tribunaux fonctionnent soit en anglais, soit en français. Toutes les provinces ont leur langue dominante, c'est vrai, mais on y trouve des tribunaux qui fonctionnent dans les deux langues. En vertu de l'article 530 du Code criminel, un accusé dont la langue est l'une des langues officielles peut demander d'être entendu dans cette langue-là.

Dans ma province, il arrive que des procès se déroulent en français. Certains juges ont présidé de nombreux procès en français dans ma province, comme le juge Paris, par exemple. Il l'a fait pendant de nombreuses années. Qui plus est, beaucoup de juges ont passé de nombreuses années à apprendre le français et le parlent maintenant couramment. Le juge Cohen en est un exemple. De plus, bien des juges de la cour provinciale connaissent le français.

[Français]

Nous, les Canadiens, nous identifions à ce qui nous est si spécifique, notre identité nationale, notre fierté et notre bilinguisme. Nous ne sommes pas les seuls au monde à avoir ces choses spécifiques. Il y a bien d'autres peuples qui les ont, mais la différence entre nous et les autres, c'est la mise en pratique de ces valeurs.

Pensons par exemple aux Suisses, que le sénateur Champagne a mentionnés dans son discours il n'y a pas longtemps. Je ne parlerai pas de l'éducation, mais des aspects linguistiques et juridiques qui convergent vers la même voie : la connaissance des langues. Les trois cantons bilingues de la Suisse — Berne, Fribourg et le Valais — ont beaucoup légiféré en matière linguistique.

Dans le canton de Berne, à l'heure actuelle, selon l'article 17.a, qui régit l'utilisation des langues devant les instances judiciaires :

(1640)

Les autorités judiciaires compétentes pour l'ensemble du canton emploient en règle générale la langue du district compétent. D'entente avec les parties, le juge peut autoriser l'autre langue nationale.

Nous pouvons en déduire que les juges, qu'ils le veuillent ou non, doivent comprendre l'autre langue et, donc, être bilingues.

Dans le même canton de Berne, l'article 12 de la Constitution de 1907, modifié le 9 juin 1985, proclame la langue française et la langue allemande comme langues nationales. L'égalité de ces deux langues doit être observée dans la législation et l'administration. De plus, le texte constitutionnel, à l'article 62, dit que les juges du tribunal cantonal doivent connaître les deux langues nationales.

Si les juges de ce pays peuvent le faire, honorables sénateurs, pourquoi la crème de la crème de la crème, les personnes qui sont des exemples de notre société, ne pourraient-elles pas en faire autant? En tant qu'avocate et sénateur, je vous exprime mon point de vue aujourd'hui.

[Traduction]

En tant qu'avocate, je veux que les juges comprennent exactement ce que mes clients disent dans les deux langues officielles. Quand j'ai comparu devant la Cour suprême du Canada, j'étais rassurée de savoir que les neuf juges comprenaient l'anglais. Je suis sûre que les avocats qui présentent leur plaidoyer en français veulent aussi que les juges comprennent ce qu'ils disent. Les juges rendent des jugements pour tout le pays, et ils devraient connaître nos deux langues. Le projet de loi demande seulement qu'ils comprennent les deux langues.

Depuis mon plus jeune âge, j'ai appris l'importance d'apprendre la langue parlée par les personnes avec lesquelles on travaille. Cela permet de mieux comprendre la façon dont elles pensent. Quand j'étais petite, je me souviens qu'une amie de ma famille voulait aller au Japon et apprendre le japonais. Elle nous a dit que, lorsqu'elle était arrivée au Japon, elle avait été confrontée à plusieurs obstacles. Les Japonais ne voulaient pas qu'elle apprenne leur langue parce qu'ils croyaient que, si elle parlait leur langue, elle comprendrait leur façon de penser. La situation au Japon a évidemment changé depuis.

Je crois que, lorsqu'on apprend la langue d'une autre personne, on comprend ce que celle-ci pense et ressent. Les membres de ma famille viennent de régions très diverses. Par conséquent, nos conversations ne se tiennent jamais dans une seule langue. Nous parlons en anglais, en kutchi, en gujarati, en swahili et, parfois, en hindi et nous choisissons les mots qui décrivent le mieux ce que nous tentons d'exprimer.

Il est très important que les juges comprennent nos deux langues officielles.

[Français]

Avec tout le respect que j'éprouve pour la Cour suprême, permettez-moi d'exprimer ma perception de cette honorable institution. Je la définirais, dans mon français un peu tordu, comme la crème de la crème de la crème de notre société. Cette instance supérieure par excellence qu'est la Cour suprême est plus que l'image juridique de notre pays. Les personnes qui y siègent sont celles à qui une nation entière, la moitié du continent nord-américain, du Pacifique à l'Atlantique, à qui des millions de personnes confient leurs affaires.

La Cour suprême, ultime arbitre dans les litiges, est unique et presque sacrée. Pensons aux juges de la Cour suprême qui, dans le quotidien, prennent des décisions primordiales pour le bien-être des Canadiens. Je suis persuadée que les compétences juridiques et linguistiques sont tout à fait compatibles et que la connaissance d'une seconde langue ne peut qu'améliorer le système juridique de notre pays.

Je suis convaincue que la marraine de ce projet de loi, l'honorable sénateur Tardif, avait raison lorsqu'elle affirmait ceci :

Il est essentiel qu'une institution aussi importante que la Cour suprême [...] soit le reflet de nos valeurs et de notre identité en tant que pays bijuridique et bilingue.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le bilinguisme au pays évolue. Il fut un temps où les premiers ministres étaient unilingues. Aujourd'hui, nous attendons de notre premier ministre qu'il soit bilingue. Il fut un temps où les gouverneurs généraux étaient unilingues. Aujourd'hui, nous attendons de notre gouverneur général qu'il soit bilingue. Il fut aussi un temps où les chefs de l'opposition étaient unilingues. Aujourd'hui, nous attendons d'eux qu'ils soient bilingues. Il fut un temps où les fonctionnaires étaient unilingues. Aujourd'hui, nous nous attendons des fonctionnaires qu'ils soient bilingues. Certains fonctionnaires viennent de l'étranger et doivent apprendre les deux langues officielles.

Pourrais-je disposer d'encore cinq minutes?

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Cinq minutes.

Le sénateur Jaffer : Pourquoi les juges ne devraient-ils pas être assujettis au même critère?

Si la juge en chef de la Cour suprême du Canada, Beverley McLachlin, qui nous vient de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, peut apprendre le français, pourquoi attendrait-on moins des autres juges?

En 1969, les juges ont été exemptés des exigences de bilinguisme. Cela fait plus de 40 ans. Il est temps que l'élite de la profession juridique de notre pays comprenne les deux langues officielles.

[Français]

Si les juges de notre Cour suprême ne comprennent pas les deux langues officielles, ces personnes qui jugent les causes les plus délicates et doivent sentir l'essence des choses au plus profond, si la crème de la crème de la crème de notre société bilingue, devant des actes d'importance nationale, ne peuvent pas répondre aux mêmes critères que les employés fédéraux, si cette exigence ne s'applique pas aux juges de la Cour suprême, à qui donc s'applique-t-elle?

Dans ce pays, si on ne peut exiger que nos représentants fédéraux soient capables de comprendre les deux langues officielles, de qui peut-on l'exiger?

Honorables sénateurs, je vous recommande d'appuyer ce projet de loi afin que les juges puissent comprendre en profondeur le sens des causes présentées devant eux. Peu importe la langue des accusés ou des défendeurs, le citoyen concerné doit pouvoir faire confiance à l'aptitude des juges de comprendre les faits exposés sans interprétation. Les verdicts donnés par les juges doivent être prononcés en toute connaissance de cause et grâce à une compréhension substantielle des plaidoiries et des demandes déposées.

[Traduction]

Honorables sénateurs, au moment de vous prononcer sur ce projet de loi, je vous demande de réfléchir à ce qui suit. Le premier ministre Harper, qui est originaire de l'Alberta, dans l'Ouest du pays, a fait l'effort de devenir bilingue. Pourquoi s'attendrait-on à moins des neuf juges de la Cour suprême?

[Français]

L'honorable Michael A. Meighen : Madame le sénateur accepterait-elle de répondre à une question?

Le sénateur Jaffer : Oui.

Le sénateur Meighen : Vous avez fait allusion au juge en chef McLachlin qui, dans vos mots, a appris le français après sa nomination à la Cour suprême. Êtes-vous d'accord sur le fait que, si ce projet de loi avait été en vigueur au moment de sa nomination, madame la juge McLachlin n'aurait pas été considérée comme étant qualifiée?

[Traduction]

Le sénateur Jaffer : C'est vrai, la juge en chef McLachlin est originaire de la même province que moi et nous sommes très fiers qu'elle soit la juge en chef de notre pays. Quand elle est devenue juge, elle ne savait pas parler français. Mais cela fait 40 ans que les juges en chef bénéficient d'une exemption.

(1650)

Notre pays est bilingue. Les gens qui veulent devenir juges s'y préparent pendant longtemps. En tant que sénateurs, nous qui protégeons les droits des Canadiens devons faire preuve de leadership et dire à tous, y compris aux juges, qu'ils doivent maîtriser le français. Oui, il y a de nombreuses années, la juge en chef McLachlin a dû apprendre le français. Maintenant, les gens savent que dans notre pays, on s'attend à ce qu'on soit bilingue. Je suis certaine que nous pouvons trouver deux juges de l'Ouest qui comprennent les deux langues.

[Français]

Le sénateur Meighen : Dans vos remarques, vous avez souligné le fait qu'il n'est pas nécessaire d'être bilingue et qu'il suffit de comprendre l'autre langue officielle, mais vous parlez sans cesse de bilinguisme. Selon moi, la compréhension de l'autre langue officielle et le bilinguisme sont deux choses différentes.

Le bilinguisme implique la capacité de s'exprimer oralement dans l'autre langue alors que la compréhension ne requiert pas l'expression verbale. Alors, c'est l'un ou l'autre. Pour reprendre les arguments du sénateur Segal, qui va juger du degré de compréhension? Et quel degré accepteriez-vous, un degré de compréhension de base ou un degré à la hauteur de M. Trudeau ou d'autres collègues de cette Chambre?

[Traduction]

Le sénateur Jaffer : La loi stipule précisément qu'il leur suffit de comprendre le français. Ils ne doivent pas être bilingues.

Quant à savoir qui fait l'évaluation, cela se fait tous les jours dans notre fonction publique fédérale. Nous avons un système qui permet d'évaluer le niveau de compréhension du français des gens, et je suis certaine que les juges peuvent appliquer le même système à la Cour suprême du Canada.

[Français]

Son Honneur le Président : Je regrette, mais les cinq minutes additionnelles de l'honorable sénateur sont écoulées.

(Sur la motion du sénateur Meighen, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Déclaration d'intérêts personnels

L'honorable David P. Smith : Honorables sénateurs, étant donné que ma femme est juge en chef de la Cour supérieure de l'Ontario, c'est-à-dire le tribunal comptant le plus grand nombre de juges au Canada, je considère que je dois m'abstenir de voter sur le projet de loi C-232. Je tenais à le souligner.

Les affaires autochtones

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Brazeau, attirant l'attention du Sénat sur la question d'imputabilité, transparence et de responsabilité des affaires autochtones au Canada.

L'honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet de la responsabilité en ce qui concerne les Canadiens des Premières nations.

Les étudiants en histoire connaissent un merveilleux principe qui illustre très bien l'engagement du Canada envers tous ses citoyens. Ce principe, qui a été inscrit il y a 143 ans, aujourd'hui, dans la Loi constitutionnelle, constitue le serment que fait encore le pays à ses habitants, à savoir la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Il ne s'agit que d'une promesse, mais je ne peux pas imaginer de moyen plus essentiel de garantir une qualité de vie optimale pour les citoyens.

En fait, cette formule remonte à bien avant la Confédération. Les autorités britanniques l'ont transmise aux assemblées législatives coloniales dès 1689. Sans engagement du gouvernement à l'égard du bien public, aucune paix durable et aucun ordre juste ne sont possibles.

Les gens qui considèrent élitiste cet engagement formel en matière de paix, d'ordre et de bon gouvernement ne peuvent pas être plus dans l'erreur. Comme l'a écrit le politologue Stephen Eggleston, ce sont les fondements du gouvernement. Ce sont les conditions essentielles pour la liberté et la prospérité des citoyens.

Pourtant, depuis plus d'un siècle, des centaines de milliers de Canadiens ne peuvent pas jouir pleinement de cette garantie constitutionnelle cruciale.

Les membres des Premières nations canadiennes n'ont pas la garantie de bénéficier d'un bon gouvernement. Très souvent, ils doivent s'en passer. La vérificatrice générale du Canada a signalé que, sans que ce soit leur faute, environ les trois quarts des Premières nations sont gérées par des fonctionnaires sans expérience et sans formation.

Le système du logement dans les réserves accuse un arriéré appréciable : des milliers de familles autochtones attendent d'avoir un logement. Dans les réserves canadiennes, un grand nombre de logements existants sont infestés de moisissures, surpeuplés et, selon les normes habituelles, insalubres.

Près d'une cinquantaine de réserves au pays n'ont pas accès en tout temps à de l'eau potable. Il y en avait 193 en 2006, un chiffre ahurissant. C'est notre gouvernement qui a amélioré cette situation.

Soixante pour cent des membres des Premières nations qui habitent dans les réserves ne finissent pas leurs études secondaires.

Selon toutes les mesures socioéconomiques utilisées, les membres des Premières nations canadiennes s'en tirent beaucoup moins bien que tous les autres groupes démographiques du pays. Pourtant, les Canadiens n'ont jamais tant dépensé d'argent qu'à l'heure actuelle pour les programmes destinés aux Premières nations.

Plus de 10 milliards de dollars sont dépensés chaque année pour maintenir dans les réserves un système qui ne peut même pas garantir de l'eau potable et des logements adéquats, deux éléments pourtant fondamentaux. Aucun segment de la société canadienne n'a jamais été aussi surgouverné et n'a jamais eu autant besoin d'une bonne gouvernance que nos Premières nations.

Les Canadiens exigent que ceux qui les gouvernent leur rendent des comptes. Ils s'attendent à cela, et c'est ce qu'ils obtiennent. Or, ce n'est pas le cas dans beaucoup trop de réserves autochtones. Nous n'accepterions jamais cela de la part de nos dirigeants politiques non autochtones, ici, à Ottawa. Ce sont les Autochtones ordinaires qui font les frais de cette politique de deux poids, deux mesures. Les membres des Premières nations savent fort bien que, trop souvent, il est tout à fait anodin de constater que bon nombre des conseils de leurs collectivités sont caractérisés par l'incompétence, le copinage et la corruption. Les atteintes au processus démocratique, comme le refus du droit de vote aux membres des Premières nations, l'intimidation des électeurs ou l'obligation de voter pour un candidat plutôt qu'un autre, sont malheureusement jugées elles aussi anodines.

(1700)

Les détournements de fonds des bandes par les puissants et les privilégiés sont trop anodins, les chefs qui dirigent des collectivités de quelques milliers d'individus seulement s'accordant, à même les fonds des bandes, des salaires supérieurs à ceux des premiers ministres tandis que les maisons et les écoles des réserves tombent en ruine. Ces dirigeants ne rendent pas de comptes aux membres des collectivités qu'ils devraient servir, mais plutôt à Ottawa. Comme l'auteur autochtone Calvin Helin l'a déclaré, c'est là une invitation à la corruption.

Dès lors, on ne devrait pas s'étonner que, lorsque, dans le cadre de son projet sur le développement économique des Indiens, l'Université Harvard s'est penchée sur les principales causes de la pauvreté et du désespoir dans les réserves, les chercheurs sont arrivés à la conclusion qu'ils résultaient d'un problème politique et non pas d'un problème économique.

Les Premières nations du Canada ont d'énormes obstacles à surmonter pour ce qui est de répondre aux besoins les plus fondamentaux en matière de santé et sur les plans social et économique, lesquels ont été comblés il y a déjà longtemps ailleurs au pays. Je ne doute pas que les Premières nations surmonteront elles aussi ces obstacles un jour, à la condition que nous nous assurions qu'elles bénéficient de la garantie canadienne la plus essentielle : la paix, l'ordre et, plus important encore, une bonne gouvernance.

L'honorable Hugh Segal : Puis-je poser une question à madame le sénateur?

Le sénateur Eaton : Certainement.

Le sénateur Segal : J'ai été intrigué par les commentaires de madame le sénateur, et j'appuie dans une large mesure ce qu'elle a dit. On entend souvent dire que le défi que doivent relever ceux qui partagent ces préoccupations est semblable à celui qu'a dû relever Felix Rohatyn lorsqu'on lui a confié la tâche de redresser la situation financière de la ville de New York, qui était en faillite. Il faut alors déterminer par où commencer et quelle voie emprunter en premier lieu.

J'ai déjà dit, et je sais que d'autres sénateurs souscrivent à cette idée, que la seule chose en notre pouvoir au Parlement fédéral consistait à abolir le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. L'autorité des conseils de bande, qui détiennent des pouvoirs sans être démocratiquement tenus de rendre des comptes, provient en fait de la loi qui a créé le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, qui dépense tout cet argent dont parle madame le sénateur sans avantage apparent pour les Canadiens moyens qui sont membres des Premières nations.

Êtes-vous ouverte à l'idée d'abolir ce ministère afin de faire une coupure nette avec le passé et d'amorcer une nouvelle approche visant à affranchir nos Premières nations, afin qu'elles aient le même droit à la paix, à l'ordre et au bon gouvernement que nous souhaitons pour tous nos concitoyens?

Le sénateur Eaton : Je ne suis pas aussi experte en la matière que certains de mes collègues. Dans son intervention, le sénateur Brazeau a mentionné que, en 2006, l'Assemblée des Premières Nations, soutenue par l'opposition, a exercé des pressions pour s'affranchir de la Loi fédérale sur la responsabilité. Avant même d'étudier comment rendre compte du budget annuel de 10 milliards de dollars d'AINC et comment faire en sorte que les simples citoyens autochtones aient voix au chapitre, la participation à la Loi fédérale sur la responsabilité mettrait peut-être le processus en branle.

Le sénateur Segal : J'ai une autre question, si le sénateur veut bien y répondre.

On entend souvent l'argument que, tandis que le reste d'entre nous qui gagnons notre vie et payons des impôts — et qui exigeons, en échange de ces impôts, que ceux qui nous servent dans des charges électives municipales, provinciales et fédérales nous rendent des comptes — les fonds passent dans bon nombre de cas du ministère fédéral aux conseils de bande, et non aux personnes qui habitent dans les réserves. C'est pour cette raison que ces personnes n'ont pas le pouvoir de demander des comptes à leur conseil de bande comme nous avons le pouvoir, en tant que contribuables, de demander des comptes à ceux qui sont élus pour nous représenter.

On fait notamment valoir que, si nous abolissions le ministère et que nous versions aux particuliers membres des Premières nations un revenu de base ou une autre forme de paiement sur lequel ils paieraient de l'impôt à leur collectivité, à leur conseil de bande ou de réserve, comme le font les autres Canadiens, les personnes membres des Premières nations auraient le même genre de pouvoir que nous espérons avoir en qualité de contribuables dans le reste de la population.

Est-ce que madame le sénateur serait prête, plus particulièrement dans le cadre du travail remarquable qu'elle fait au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, à se demander si cette façon de procéder ne serait pas préférable au système que nous appliquons actuellement?

Le sénateur Eaton : Sénateur, on parle beaucoup en ce moment de la propriété privée dans les réserves. Si l'on commence à adhérer à l'idée que la propriété privée soit un jour permise dans une réserve, on pourrait alors peut-être instaurer un régime fiscal qui reflète la valeur patrimoniale d'une personne et le fait qu'elle fait partie d'une collectivité.

Le sénateur soulève des questions pertinentes et je l'en remercie.

(Sur la motion du sénateur Fraser, le débat est ajourné.)

[Français]

L'étude sur les dispositions et l'application de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques

Neuvième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles—Avis de motion tendant à demander une réponse du gouvernement

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion :

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, je donne avis que, dans deux jours, je proposerai :

Que, conformément au paragraphe 131(2) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement au neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, déposé au Sénat le lundi 28 juin 2010, et adopté par le Sénat le mardi 29 juin 2010, le ministère de la Justice et procureur général du Canada et le ministre de la Sécurité publique ayant été désignés ministres chargés de répondre à ce rapport.

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 7 juillet 2010, à 13 h 30.)


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