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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 68

Le mardi 10 juin 2014
L'honorable Pierre Claude Nolin, Président intérimaire

LE SÉNAT

Le mardi 10 juin 2014

La séance est ouverte à 14 heures, le Président intérimaire étant au fauteuil.

Prières.

Le Sénat

Hommage aux pages à l'occasion de leur départ

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, je tiens à souligner le départ de deux des pages du Sénat.

Catherine Belhumeur : en septembre prochain, Catherine entrera à l'Université de Montréal afin d'y poursuivre des études en sciences infirmières, option internationale. Cet été, elle travaillera dans une pharmacie, car elle pense que cela l'aidera pour sa carrière future dans le système de soins de santé. Catherine espère pouvoir un jour œuvrer au sein d'une organisation internationale de la santé.

[Traduction]

Rona Ghanbari a obtenu, summa cum laude, à l'Université d'Ottawa, un baccalauréat en sciences sociales avec double majeure en sciences politiques et en communication. Elle est impatiente de passer à l'étape suivante de sa carrière universitaire en allant étudier le droit à l'Université de Toronto. Personne n'est parfait.

Enfin, pendant ses études en droit, elle espère faire une partie des cours menant à l'obtention de son diplôme dans un établissement francophone en Europe. Elle est impatiente de se servir de l'expérience et des connaissances qu'elle a acquises au Sénat pour atteindre ses objectifs de carrière et concrétiser ses aspirations. Bravo.

Des voix : Bravo!


[Français]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Québec

L'économie de la province

L'honorable Ghislain Maltais : Honorables sénateurs, la semaine dernière, le nouveau gouvernement du Québec déposait son premier budget de « l'ère Couillard », pour l'appeler ainsi. Chose rare pour ce genre d'occasion, le ministre fédéral des Finances et le ministre québécois des Finances se sont rencontrés, pas après, mais bien avant le dépôt du budget.

C'est un budget qu'on appelle, chez nous, un budget de relance, un budget d'austérité. Il était important pour le Québec de se remettre sur la voie de la prospérité. Pour en arriver à prendre ce chemin, il était primordial de redresser l'état des finances publiques. Bien sûr, pendant la première année de ce budget, des Québécois se sont rendu compte qu'il y avait des sacrifices à faire. Nous ne pouvions d'aucune façon continuer sur la lancée du précédent gouvernement.

Ce redressement ne peut se faire qu'avec la participation majeure de l'entreprise privée et un contrôle des dépenses publiques. Les deux sont absolument nécessaires pour en arriver à une recette économique viable. D'ailleurs, le ministre des Finances du gouvernement du Canada, hier, à la conférence de Montréal, a vivement soutenu que le gouvernement canadien ne pourrait pas éternellement continuer à porter seul le poids de la prospérité. Les deux principaux moteurs économiques du Canada sont l'Ontario et le Québec; ils doivent se mettre sur la vitesse du redressement économique.

Pour le bien du pays, pour le bien des Québécois, il est important que l'avenir soit orienté non pas vers des dépenses qui ne sont pas nécessaires, mais bien vers des dépenses constructives. C'est ce que je souhaite au gouvernement du Québec, et je pense que les Québécois et Québécoises se le souhaitent à eux-mêmes. Merci.

[Traduction]

L'honorable Michael J. L. Kirby, O.C.

Félicitations à l'occasion du Prix de reconnaissance pour services exceptionnels

L'honorable Marjory LeBreton : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour féliciter, en notre nom à tous, j'en suis certaine, notre ancien collègue, l'honorable sénateur Michael Kirby, O.C., lauréat du Prix de reconnaissance pour services exceptionnels de l'Association canadienne des ex-parlementaires, qui lui a été remis hier, le lundi 9 juin, par les Présidents du Sénat et de la Chambre des communes.

Michael Kirby a siégé au Sénat du Canada pendant 22 ans, de 1984 à 2006. Entre autres réalisations, il a été président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce pendant cinq très importantes années, pendant l'élaboration de notre politique économique. Ensuite, le sénateur Kirby a présidé le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et a assuré la présidence du Sénat de 1999 à 2006. Sous sa direction, le comité a publié 11 rapports sur les soins de santé, y compris le tout premier rapport national sur la santé mentale et la toxicomanie.

Honorables sénateurs, en tant que membres de cette institution, nous avons toutes les raisons d'être extrêmement fiers que les Canadiens aient davantage pris conscience du travail du Sénat sous sa présidence du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, un exercice qui s'est révélé très productif et positif. J'ai eu le grand honneur d'assumer la vice-présidence du comité durant son étude exhaustive du rôle du gouvernement fédéral dans le système de soins de santé du Canada. Je crois fermement que le rapport de 2002 du comité — j'ai du mal à croire que cela fait déjà 12 ans — et ses recommandations ont résisté à l'épreuve du temps. Je sais que le sénateur Kirby est du même avis.

Dans le cadre de notre étude dirigée par le sénateur, une évaluation honnête et complète du système global de soins de santé au Canada a été réalisée. Nous ne craignions aucunement de remettre en question les idées reçues et les mythes entourant le système de soins de santé au Canada. Plusieurs de nos recommandations ont été adoptées par les gouvernements provinciaux, et beaucoup d'autres encore auraient dû être mises en œuvre.

En mai 2006, sous la présidence du sénateur Kirby, le comité a complété une étude sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie. Le premier d'une série de trois rapports a été publié en novembre 2004, et le rapport final, intitulé De l'ombre à la lumière, a été publié le 9 mai 2006. En mars 2007, le gouvernement a créé la Commission de la santé mentale du Canada, et le premier ministre Harper a demandé au sénateur Kirby d'en assumer la direction. Michael Kirby a donc été le premier à être nommé au poste de président de la nouvelle Commission de la santé mentale du Canada.

(1410)

Nous constatons déjà les répercussions positives de cette étude. Les politiques et les attitudes ont beaucoup changé, et de nombreuses personnes partout au pays peuvent maintenant avoir l'espoir que les maladies mentales ne soient plus reléguées au second plan. Nous avons réellement commencé à nous attaquer aux préjugés.

Comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises, chaque membre du comité était directement touché par des problèmes de santé mentale dans sa famille immédiate, ce que personne ne savait avant de commencer à raconter son histoire aux autres. Notre groupe, et cette institution dans son ensemble, ont enfin pu montrer que la santé mentale doit être prise au sérieux.

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, hier, notre ami et ancien collègue, Michael Kirby, a reçu le Prix de reconnaissance pour services exceptionnels de l'Association canadienne des ex-parlementaires. C'est un honneur grandement mérité.

De 1999 à 2006, Mike a présidé le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, dont j'étais membre. Au total, le comité a publié 11 rapports sur les soins de santé pendant que Mike Kirby en était le président. Je suis fière du travail que nous avons accompli sous sa direction. Nous avons mené une étude approfondie du système de soins de santé du Canada qui était comparable au rapport Romanow, et nous avons aussi publié le tout premier rapport sur la santé mentale, la maladie mentale et les problèmes de toxicomanie, qui s'intitulait De l'ombre à la lumière.

Le rapport sur la santé mentale était très important à mes yeux. Le comité a constaté que le système de santé mentale du Canada était dans un état épouvantable. Nous avons entendu le témoignage de personnes ayant des troubles mentaux, qui nous ont parlé des préjugés dont elles étaient victimes. Je suis heureuse que des changements positifs aient été apportés grâce à ce rapport, et le mérite en revient à Mike.

Après avoir quitté le Sénat, il a aidé à mettre sur pied la Commission de la santé mentale du Canada, qui était la principale recommandation du rapport De l'ombre à la lumière, et il est devenu le premier président de cet organisme. Le travail effectué par la commission sous sa gouverne a contribué à changer des vies. En 2012, la commission a publié la toute première stratégie nationale en matière de santé mentale. Son Centre d'échange des connaissances est le seul centre national du genre lié à la santé mentale. L'initiative Changer les mentalités vise à réduire la stigmatisation liée à la maladie mentale. Par ailleurs, le projet At Home/Chez Soi, qui s'est étendu sur une période de quatre ans dans cinq villes, visait à appuyer véritablement les Canadiens qui sont aux prises avec l'itinérance et des problèmes de santé mentale.

En 2012, Mike a quitté ses fonctions de président de la commission et il est devenu le premier président de Partenaires en santé mentale. Il s'agit d'un organisme de bienfaisance national qui s'est donné pour mission de changer la perception que les Canadiens ont de la santé mentale et des personnes qui ont des problèmes de santé mentale, et de mobiliser des appuis afin d'améliorer les services de santé mentale.

Au cours de sa première année d'existence, cet organisme a élaboré et lancé deux campagnes nationales importantes. Il a recueilli 1,4 million de dollars et il a reçu l'appui de plus de 54 000 Canadiens. Je suis convaincue que cet organisme va poursuivre son travail impressionnant dans les années à venir.

Honorables sénateurs, la carrière de Michael Kirby a été un franc succès, c'est le moins que l'on puisse dire! Compte tenu de sa contribution remarquable, je ne connais personne qui mérite plus que lui le Prix de reconnaissance pour services exceptionnels. Je vous invite à vous joindre à moi pour le féliciter de ce plus récent honneur.

La Pologne

Le vingt-cinquième anniversaire du mouvement Solidarité

L'honorable Betty Unger : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour me dire solidaire des Polonais de partout qui, le 4 juin, ont célébré le 25e anniversaire du début de la fin du communisme en Pologne. En 1989, le mouvement Solidarité, dirigé par Lech Walesa et soutenu par quatre figures spirituelles et intellectuelles marquantes, a remporté les premières élections partiellement libres sous le régime communiste. Cet accomplissement a déclenché, au pays et en Europe, une réaction en chaîne qui a entraîné la chute des communistes et a culminé avec la chute du mur de Berlin.

Permettez-moi de situer cet événement dans un contexte historique. En novembre 1918, la Pologne regagnait son indépendance après 123 ans d'occupation étrangère, pour la perdre de nouveau en mai 1926, lorsque le gouvernement a été renversé par un coup d'État militaire. De 1926 à 1989, le peuple polonais a été victime d'invasions étrangères, d'instabilité politique, de l'application de la loi martiale — qui a entraîné la mort de centaines de personnes et l'incarcération de milliers d'autres —, de persécutions religieuses et de la violation de tous les droits fondamentaux de la personne.

Mon grand-père et mon père ont immigré ici à l'époque où la crise des années 1930 frappait le Canada, ce qui a créé beaucoup de difficultés aux nouveaux immigrants. Néanmoins, peu d'entre eux sont retournés vivre dans leurs pays d'origine. La majorité préférait l'espoir, la liberté et les promesses que leur offrait le Canada. Au fil des années, mon grand-père et mon père ont parrainé quelques membres de notre famille immédiate afin qu'ils puissent venir au Canada. Leurs démarches ont toutefois été mises en suspens lorsque la Pologne a encore été envahie, cette fois par Hitler.

En 1987, mes parents et moi sommes allés en Pologne afin que mon père puisse revoir son pays d'origine. Nous savions que la Pologne était occupée par les communistes, mais nous ne savions pas ce que cela signifiait vraiment. Le beau pays gravé dans la mémoire de mon père n'existait plus. Les villes et la campagne étaient envahies par les mauvaises herbes et les déchets. Des édifices en ruine, ravagés par la guerre, étaient encore visibles, tandis que la plupart des autres étaient noircis par la suie. Les richesses que le pays pouvait produire étaient évidemment toutes acheminées à Moscou, sans que des mesures de restauration ne soient prises pour la Pologne. Nous avons été touchés lorsque nous avons appris que les membres de notre famille qui nous accueillaient avaient dû échanger des bons d'alimentation pour plusieurs mois à venir afin de pouvoir nous recevoir à leur table. Les tablettes des épiceries étaient pratiquement vides et des denrées essentielles comme la farine, le lait, la viande et d'autres aliments étaient rationnées et très rares.

La Pologne est principalement catholique, mais les communistes avaient fermé un grand nombre d'églises, de sorte que les fidèles n'ayant pas d'auto devaient faire de longs déplacements à pied. L'essence aussi était rationnée. Nous l'avons appris seulement lorsque nous avons conduit de l'Allemagne jusqu'à la Pologne. Mon mari était très habile pour échanger discrètement des dollars américains contre de l'essence, jusqu'au jour où nous nous sommes arrêtés dans une station-service à l'allure moderne et qu'on a refusé de nous vendre de l'essence parce que nous n'avions pas de bons de ration. J'entends encore le propriétaire dire sans ménagement à mon père de quitter les lieux. Il disait : « Vous pensez que je ne veux pas de votre argent pour ma famille? L'agriculteur de l'autre côté de la route pourrait être un espion communiste. Il pourrait me dénoncer et j'irais en prison. Par conséquent, allez-vous en tout de suite. » Nous sommes partis, le cœur gros. Nous étions ébranlés par cet emportement, mais aussi par le terrible sort de la Pologne.

Voilà maintenant que Vladimir Poutine se sert de sa grande force pour envahir des régions de l'Est de l'Ukraine et, encore une fois, la Pologne se sent menacée.

Les Polonais jouissent de leur liberté depuis seulement 25 ans, ce qui ne les empêche pas de persévérer et de célébrer.

[Français]

Le décès d'agents de la GRC

Hommage

L'honorable Pierrette Ringuette : En ce moment même, le pays et, plus particulièrement, la communauté de Moncton ainsi que l'ensemble de nos forces policières assistent aux obsèques des trois vénérables agents de la Gendarmerie royale canadienne décédés dans l'exercice de leurs fonctions, mercredi dernier, à Moncton : Douglas James Larche, Dave Joseph Ross et Fabrice Georges Gévaudan.

Le gendarme Douglas James Larche, né à Campbellton, au Nouveau-Brunswick, avait rejoint les rangs de la GRC il y a déjà 12 ans. En 2007, il a reçu les éloges de son commandant pour avoir sauvé la vie d'un jeune enfant. Époux de Nadine et père de trois petites filles, Mia, Lauren et Alexa, le constable Larche était reconnu pour sa bonne nature et sa loyauté. Tout en sachant harmoniser sa vie professionnelle et familiale, Doug était aussi un fervent coureur de marathon.

Le gendarme Dave Joseph Ross, âgé de 32 ans, était membre de la GRC depuis de nombreuses années. Avec son partenaire, le chien policier Danny, Dave était heureux d'offrir aux gens ses services de protection. Époux de Rachael, ils étaient les fiers parents d'un petit garçon, Austin. Rachael est enceinte d'un deuxième garçon qui est attendu à l'automne. Comme il est triste, le départ tragique de Dave, pour Rachael et Austin.

Le gendarme Fabrice Georges Gévaudan, né en France et âgé de 45 ans, était un constable dévoué ayant comme intérêt particulier la défense des femmes victimes de violence. Le constable Gévaudan était l'époux d'Angela et le beau-père d'une fille, Emma. Bien que le constable Fabrice ait dû faire face à des événements quotidiens souvent malheureux, il était doté d'un optimisme et d'un zèle remarquables.

(1420)

Honorables sénateurs, mes simples paroles de reconnaissance pour leurs services et de réconfort pour leurs familles me semblent infimes dans le cadre d'une telle tragédie. Je ne trouve aucune parole réconfortante en prévision des nombreuses années à venir sans la participation de ces hommes aux activités policières, familiales, scolaires et communautaires.

Je n'ai aucun doute que les citoyens et citoyennes de Moncton, ainsi que les forces du détachement de Codiac, feront de leur mieux pour offrir un soutien à ces trois familles; cependant, tous les efforts du monde ne pourront jamais remplacer nos trois constables.

À travers les épreuves de nos hommes et de nos femmes en uniforme, les Canadiens et Canadiennes leur seront toujours solidaires.

Je me joins à vous tous, honorables sénateurs, pour offrir nos plus sincères condoléances aux familles éprouvées ainsi qu'aux membres du détachement de Codiac de la Gendarmerie royale.


[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

Le commissaire à l'intégrité du secteur public

Dépôt du rapport de 2013-2014

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, conformément à l'article 38 de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Rapport annuel du Commissariat à l'intégrité du secteur public du Canada pour 2013-2014.

[Français]

Le vérificateur général

Exportation et développement Canada—Dépôt du rapport sur les processus d'examen environnemental et social

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du vérificateur général du Canada sur la conception et la mise en œuvre de la Directive en matière d'évaluation environnementale et sociale et d'autres processus d'examen environnemental et social d'Exportation et développement Canada. Cette vérification est effectuée en vertu du paragraphe 21(2) de la Loi sur l'expansion des exportations.

[Traduction]

Le règlement transitoire sur les ouvrages en mer dans la zone extracôtière Canada-Nouvelle-Écosse

Dépôt de documents

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Règlement transitoire sur les ouvrages en mer dans la zone extracôtière Canada-Nouvelle-Écosse.

Pêches et océans

Budget et autorisation de se déplacer—L'étude sur la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie—Présentation du cinquième rapport du comité

L'honorable Fabian Manning, président du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, présente le rapport suivant :

Le mardi 10 juin 2014

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans a l'honneur de présenter son

CINQUIÈME RAPPORT

Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le lundi 9 décembre 2013 à étudier, afin d'en faire rapport, la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie au Canada, demande respectueusement des fonds pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2015 et demande qu'il soit, aux fins de ses travaux, autorisé à :

a) voyager à l'extérieur du Canada.

Le budget initial présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration et le rapport de ce comité ont été imprimés dans les Journaux du Sénat le 7 avril 2014. Le 10 avril 2014, le Sénat a approuvé un déblocage partiel de fonds de 263 645 $ au comité.

Conformément au Chapitre 3:06, article 2(1)c) du Règlement administratif du Sénat, un budget révisé pour l'Activité 2 présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
FABIAN MANNING

(Le texte du budget figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 967.)

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Manning, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Le Budget des dépenses de 2014-2015

Le Budget supplémentaire des dépenses (A)—Dépôt du onzième rapport du Comité des finances nationales

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le onzième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales sur les dépenses prévues dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2015.

(Sur la motion du sénateur Day, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

La Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

Projet de loi modificatif—Présentation du septième rapport du Comité des transports et des communications

L'honorable Dennis Dawson, président du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, présente le rapport suivant :

Le mardi 10 juin 2014

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et une autre loi en conséquence, a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 8 mai 2014, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec la modification suivante :

Article 10, page 10 : Supprimer les lignes 35 à 41.

Respectueusement soumis,

Le président,
DENNIS DAWSON

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport modifié?

(Sur la motion du sénateur Dawson, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Projet de loi sur l'accord définitif concernant les Tlaamins

Présentation du cinquième rapport du Comité des peuples autochtones

L'honorable Dennis Glen Patterson, président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présente le rapport suivant :

Le mardi 10 juin 2014

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son

CINQUIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-34, Loi portant mise en vigueur de l'accord définitif concernant les Tlaamins et modifiant certaines lois en conséquence a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 3 juin 2014, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
DENNIS GLEN PATTERSON

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Patterson, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Finances nationales

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat et pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à se réunir le vendredi 13 juin 2014, même si le Sénat siège à ce moment-là, l'application de l'article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard;

Que, nonobstant l'article 12-18(2)a) du Règlement, le comité soit également autorisé à se réunir ce jour-là, même si le Sénat est alors ajourné pour plus d'une journée mais moins d'une semaine.

Affaires juridiques et constitutionnelles

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat et pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à se réunir le vendredi 13 juin 2014 et le lundi 16 juin, même si le Sénat siège à ce moment-là, l'application de l'article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard;

Que, nonobstant l'article 12-18(2)a) du Règlement, le comité soit également autorisé à se réunir ces jours-là, même si le Sénat est alors ajourné pour plus d'une journée mais moins d'une semaine.

(1430)

Affaires étrangères et commerce international

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat et pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l'article 12-18(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à se réunir le vendredi 13 juin 2014 et le lundi 16 juin 2014, même si le Sénat siège à ce moment-là, aux fins de son étude du projet de loi C-20, Loi portant mise en œuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Honduras, de l'Accord de coopération dans le domaine de l'environnement entre le Canada et la République du Honduras et de l'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et la République du Honduras, si ce projet de loi est renvoyé au comité;

Que, nonobstant l'article 12-18(2)a) du Règlement, le comité soit également autorisé à se réunir aux fins de cette étude, ces jours-là, même si le Sénat est alors ajourné pour plus d'une journée mais moins d'une semaine.

La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président intérimaire annonce qu'il a reçu des Communes le projet de loi C-37, Loi visant à changer le nom de certaines circonscriptions électorales ainsi qu'à modifier la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

[Français]

Affaires sociales, sciences et technologie

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier le Programme des travailleurs étrangers temporaires

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à :

  • Examiner le programme des travailleurs étrangers temporaires et l'abus potentiel du système que représente l'embauche de travailleurs étrangers pour remplacer les travailleurs canadiens qualifiés et disponibles;
  • Examiner les critères et la procédure applicables à l'évaluation et à l'approbation des demandes d'emploi;
  • Examiner les critères et la procédure utilisés pour recueillir les opinions permettant de déterminer l'état du marché;
  • Examiner les critères et la procédure utilisés pour évaluer les qualifications des travailleurs étrangers;
  • Examiner les procédures et responsabilités interministérielles à l'égard des travailleurs étrangers au Canada;
  • Formuler des recommandations pour s'assurer que le programme ne puisse pas faire l'objet d'abus quelconques susceptibles de nuire aux travailleurs canadiens;

Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 31 mars 2015 et conserve tous les pouvoirs requis pour publier ses conclusions jusqu'à 180 jours après le dépôt du rapport final.

[Traduction]

Le Sénat

Préavis de motion tendant à encourager le gouvernement du Venezuela à immédiatement mettre fin aux actes de violence et de répression illicites à l'endroit de civils

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Sénat du Canada prenne acte des tensions continues dans la République bolivarienne du Venezuela et qu'il encourage le gouvernement du Venezuela :

1. à immédiatement mettre fin aux actes de violence et de répression illicites à l'endroit de civils, notamment aux activités des groupes civils armés,

2. à instaurer un dialogue sérieux et inclusif axé sur la nécessité :

a) de rétablir la primauté du droit et le constitutionnalisme, y compris l'indépendance de l'appareil judiciaire et des autres institutions de l'État;

b) de respecter et de protéger les droits universels de la personne, y compris la liberté d'expression et la liberté de la presse;

c) de prendre sans tarder les mesures qui s'imposent pour combattre l'inflation, la corruption et l'anarchie et pour assurer la sécurité et le bien-être de tous les Vénézuéliens.

Que le Sénat du Canada invite également tous les partis et les parlementaires du Venezuela :

1. à encourager leurs partisans à s'abstenir de tout acte de violence et de destruction de biens publics et privés;

2. à s'engager à tenir un dialogue dans le but de trouver une solution politique à la crise actuelle et à ses causes.

[Français]

Agriculture et forêts

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date de présentation de son rapport final sur son étude sur l'importance des abeilles et de leur santé dans la production de miel, d'aliments et de graines au Canada

L'honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le jeudi 21 novembre 2013, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts relativement à son étude sur l'importance des abeilles et de leur santé dans la production de miel, d'aliments et de graines au Canada soit reportée du 30 juin 2014 au 31 décembre 2014.

[Traduction]

Sécurité nationale et défense

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Daniel Lang : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé à siéger le vendredi 13 juin 2014 à 10 h, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.


PÉRIODE DES QUESTIONS

La justice

L'industrie du sexe

L'honorable Wilfred P. Moore : Ma question d'aujourd'hui s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle nous parvient de Morgan Sim, de Toronto, et elle porte sur le projet de loi C-36.

Voici la question :

Sincèrement, j'aimerais savoir si le premier ministre et le ministre de la Justice ont pris le temps de lire la décision éclairée de la Cour suprême dans l'affaire R. c. Bedford. Je pose la question parce que le projet de loi C-36 force des femmes vulnérables à travailler dans la rue. Il criminalise, à tort, certaines formes de prostitution; il élimine la possibilité de travailler à l'intérieur; et il limite — ou abolit dans les pires cas — la capacité de faire de la publicité ou de faire un tri parmi les clients. En somme, le projet de loi aura des répercussions extrêmement nuisibles sur les personnes que l'on prétend protéger. Lorsque la vie de ces femmes est en jeu, comment le gouvernement peut-il affirmer qu'il protège les travailleuses du sexe alors qu'il propose un projet de loi qui les pousse à adopter des comportements dangereux?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Merci à ce citoyen pour sa question. Comme le sénateur Moore le sait et, probablement, ce citoyen également, c'est au gouvernement qu'il incombe de proposer des mesures législatives et à tous les parlementaires d'en débattre. Le jugement de la Cour suprême dans l'arrêt Bedford a été sans équivoque. Il soulevait des inquiétudes concernant la sécurité des femmes qui pratiquent ce métier fondamentalement dangereux.

Ce jugement est à la base de notre projet de loi. Le projet de loi C-36 vise à protéger les victimes de la prostitution en criminalisant les proxénètes et les clients, qui créent une demande pour ce service dangereux, tout en mettant en place des mesures qui visent à assurer la sécurité publique, en particulier celle des enfants et d'autres Canadiens vulnérables.

[Traduction]

Le sénateur Moore : J'ai une question complémentaire. Monsieur le leader, le gouvernement de la Nouvelle-Zélande a décidé de décriminaliser et de réglementer la prostitution. L'industrie du sexe n'a pas connu une hausse marquée d'adhérents pour autant. En revanche, les droits des travailleuses à refuser certains clients s'en sont trouvés mieux protégés. Le gouvernement a-t-il étudié ce modèle? S'il l'a fait, pourquoi ne l'a-t-il pas adopté?

(1440)

[Français]

Le sénateur Carignan : Le projet de loi C-36, Loi sur la protection des collectivités et des personnes victimes d'exploitation, est un modèle fabriqué au Canada qui cible directement les demandes à l'égard de cette activité dangereuse et qui prévoit des mesures sévères contre les proxénètes et les clients.

Le projet de loi s'est valu, dès son dépôt la semaine dernière à la Chambre des communes, les éloges de différents organismes. J'aimerais citer le Conseil du statut de la femme, qui a affirmé ce qui suit :

Le Conseil du statut de la femme accueille favorablement le projet de loi du gouvernement fédéral sur la prostitution qui pénalise les clients et les proxénètes et décriminalise les personnes prostituées, s'inspirant ainsi du modèle suédois. On reconnaît que la prostitution n'est pas un choix pour la vaste majorité des personnes prostituées, mais une forme d'exploitation à l'égard des femmes et une atteinte à la dignité humaine, comme le Conseil le documentait dans son avis La prostitution, il est temps d'agir paru en 2012.

Sénateur, il est important de noter que ce projet de loi est adapté à la situation canadienne et qu'il tient compte de certaines expériences vécues dans d'autres pays, ce qui fait en sorte que les clients et les proxénètes sont criminalisés alors que les personnes prostituées ne le sont pas et qu'elles pourront profiter de mesures pour leur venir en aide, compte tenu de leur vulnérabilité.

[Traduction]

Le sénateur Moore : Monsieur le leader, je remarque que le gouvernement annonce qu'il va dépenser 20 millions de dollars pour aider les travailleuses du sexe à quitter cette activité. Je suis certain que ce montant a été fixé à la lumière de recherches et de faits. Combien le gouvernement a-t-il consacré à cette cause par le passé, et quels ont été les résultats?

[Français]

Le sénateur Carignan : La prostitution nuit aux communautés canadiennes et aux populations les plus vulnérables. Nous sommes résolus à protéger les communautés en rendant illégal l'achat de services sexuels dans des endroits publics où pourraient se trouver des enfants, tout en respectant les compétences provinciales dans ce domaine. Nous appuyons ces mesures au moyen d'un nouveau financement de 20 millions de dollars, notamment pour soutenir les organisations communautaires qui viennent en aide aux personnes prostituées les plus vulnérables, car nous reconnaissons tout de même que la majorité d'entre elles cherchent à quitter ce domaine de travail dangereux et nuisible. Nous mettrons donc l'accent sur le financement de programmes éprouvés qui aident les personnes prostituées à se sortir de l'industrie du sexe.

[Traduction]

Le sénateur Moore : Votre Honneur, si je pouvais poser une autre question complémentaire, peut-être pourrais-je obtenir une réponse à ma question.

Monsieur le leader, vous devez avoir étudié la situation et examiné le problème. Je voudrais savoir comment vous en êtes arrivés au montant de 20 millions de dollars. De toute évidence, vous avez pensé que ce montant permettra à des femmes de quitter cette activité. Quelles sont vos prévisions? Étant donné l'histoire de cette activité, que se passera-t-il quand vous dépenserez ces 20 millions de dollars?

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénateur, vous serez sûrement d'accord avec moi pour dire que les organismes communautaires œuvrant dans le milieu, à proximité des besoins, sont les organismes les plus appropriés pour administrer cette aide de 20 millions de dollars afin de prendre les mesures qui s'imposent pour aider ces personnes vulnérables, tout en respectant les compétences provinciales, comme nous avons l'habitude de le faire.

L'honorable Claudette Tardif : Monsieur le leader, vous avez affirmé qu'il s'agissait de développer un modèle propre au Canada. J'aimerais savoir ce qui est différent au Canada par rapport à la Suède et qui justifie cette divergence importante concernant le principe à la base de l'approche suédoise, qui consiste à ne pas criminaliser les victimes pour l'exploitation qu'elles subissent.

Le sénateur Carignan : Si je comprends bien votre question, vous appuyez le projet de loi C-36, qui a justement pour objectif de ne pas criminaliser les personnes prostituées et de restreindre les interdictions ou les condamnations criminelles à ceux qui vont tenter de profiter des situations de vulnérabilité, soit les clients et les proxénètes plus particulièrement.

La sénatrice Tardif : Monsieur le leader, le projet de loi va plus loin. Il est certain que cette question de la prostitution est compliquée, mais, dans votre proposition, les personnes prostituées seraient criminalisées si elles sollicitaient des clients potentiels à proximité des lieux de culte ou d'endroits où pourraient se trouver des enfants âgés de moins de 18 ans. À ce moment-là, vous allez plus loin que ce qui est proposé dans le modèle suédois, et je vous demande pourquoi.

Le sénateur Carignan : Sénatrice, comme vous le savez, la prostitution nuit aux communautés canadiennes et aux Canadiens les plus vulnérables, et le projet de loi vise à protéger nos communautés en rendant illégal l'achat de services sexuels près des endroits publics où pourraient se trouver des enfants. Donc, j'imagine que je n'ai pas besoin de vous expliquer davantage l'importance de cette disposition en particulier.

[Traduction]

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Monsieur le leader, tout le monde connaît les effets préjudiciables de la prostitution, mais j'avais compris que nous ne poursuivrions pas la prostituée, la victime, la personne exploitée.

Voici que le projet de loi dit que nous n'allons pas le faire, mais que oui, nous allons le faire si les faits se déroulent dans un lieu public. Si deux jeunes femmes sont là pour vendre leurs services et qu'une d'elles a moins de 18 ans alors que l'autre a 19 ans, nous allons poursuivre la femme de 19 ans parce qu'elle se trouve près d'une personne mineure. Est-ce le genre de loi que nous aurons? Nous allons poursuivre certaines victimes et pas d'autres. Est-ce là le modèle canadien?

[Français]

Le sénateur Carignan : Je pense que vous conviendrez avec nous de l'importance de s'assurer que les personnes âgées de moins de 18 ans ne sont pas exposées au fléau de la prostitution ni entraînées dans cette voie. Je constate que vous êtes impatients de débattre du projet de loi C-36...

Son Honneur le Président intérimaire : À l'ordre!

Le sénateur Carignan : Au cours de l'automne, lorsque ce projet de loi nous sera renvoyé, nous aurons la chance de l'étudier en comité et de voir l'ensemble de ses tenants et aboutissants. J'espère que le projet de loi saura vous convaincre d'adopter une approche non partisane, comme vous semblez vouloir l'invoquer depuis quelque temps. J'espère que vous vous prononcerez en faveur de ce projet de loi, tout comme le Conseil du statut de la femme, qui accueillait, et je cite :

[...] favorablement le projet de loi du gouvernement fédéral sur la prostitution qui pénalise les clients et les proxénètes et décriminalise les personnes prostituées [...]

[Traduction]

La sénatrice Jaffer : Monsieur le leader, j'ignore ce que vous entendez par « statut de la femme ». Voulez-vous parler de la ministre de la Condition féminine? Il n'existe aucun groupe qu'on appelle « statut de la femme ».

Monsieur le leader, je voudrais revenir sur une autre chose que vous avez dite : 20 millions de dollars ont été mis de côté pour aider les femmes vulnérables. Est-ce là le modèle canadien? Établit-on des critères pour aider les femmes qui sont les plus vulnérables?

[Français]

Le sénateur Carignan : Le Conseil du statut de la femme est un organisme provincial qui a été créé au Québec et dont l'objectif est de promouvoir et de défendre les droits des femmes, notamment.

(1450)

Il s'agit d'un important conseil consultatif qui a été créé et qui émet son opinion sur les dossiers qui concernent les femmes en particulier. Ce conseil est présidé par Julie Miville-Dechêne, ancienne journaliste et ombudsman de Radio-Canada.

En ce qui concerne l'enveloppe de 20 millions de dollars, nous l'avons octroyée afin de soutenir les organisations communautaires qui viennent en aide aux prostituées les plus vulnérables. Il s'agit donc de veiller à ce que l'argent soit versé là où les services sont offerts par les organismes communautaires les plus aptes à aider les gens, et que ces fonds ne se perdent pas dans la bureaucratie.

La sénatrice Jaffer : Je remercie le leader du gouvernement de sa précision au sujet du Conseil du statut de la femme du Québec.

[Traduction]

Monsieur le leader, nous disons qu'il s'agit d'un modèle canadien. Depuis des mois et des mois, nous réclamons une enquête nationale sur les plus vulnérables parmi les vulnérables au Canada, les femmes autochtones. Que fera-t-on au moyen de ces 20 millions de dollars? Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas fait grand-chose. Que ferons-nous pour protéger ces femmes?

[Français]

Le sénateur Carignan : Nous allons continuer à travailler dans le cadre du dossier des femmes autochtones disparues ou assassinées dans le même sens que nous l'avons indiqué dans nos réponses précédentes à ces questions. D'ailleurs, une association de femmes autochtones a publiquement appuyé l'adoption du projet de loi et a invité les parlementaires canadiens à voter en sa faveur.

J'aimerais compléter la réponse que j'ai donnée tout à l'heure à la question de la sénatrice Jaffer sur l'organisation des femmes autochtones.

Le 4 juin 2014, la Coalition des femmes pour l'abolition de la prostitution — une coalition pancanadienne en quête de l'égalité des femmes —, qui inclut l'Association des femmes autochtones du Canada, affirmait qu'elle avait, et je cite :

[...] bon espoir à voir la nouvelle loi s'en prendre aux torts qui sont au cœur de la prostitution : l'achat, la marchandisation et le proxénétisme du corps des femmes.

C'était l'organisation à laquelle je faisais référence.

[Traduction]

L'emploi et le développement social

Le soutien des programmes d'alphabétisation

L'honorable Catherine S. Callbeck : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Ces dernières semaines, le gouvernement conservateur a rejeté des propositions de financement présentées par des organisations provinciales d'alphabétisation de tout le Canada. Ces groupes recevaient un financement de base pour l'alphabétisation, mais le gouvernement a fait savoir qu'il optait maintenant pour le financement par projet. L'an dernier, les organisations ont été invitées à soumettre leurs propositions. Elles les ont envoyées. L'Île-du-Prince-Édouard a présenté une proposition conjointe avec le Nouveau-Brunswick. On leur a dit que la décision viendrait rapidement.

Un an plus tard, ces organisations ont commencé à recevoir leurs lettres de refus. Ce fut un coup très dur pour ces organisations. Elles sont vraiment dans l'impasse. Elles ont perdu leur financement de base, et voici qu'on vient de rejeter leurs demandes de financement par projet.

Pourquoi le gouvernement tourne-t-il le dos à ces organisations d'alphabétisation?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Pour répondre à la question de la sénatrice Callbeck, nous avons pris des mesures afin de financer des projets ciblés permettant aux Canadiens, notamment dans le cas de l'alphabétisation, d'acquérir les compétences nécessaires pour obtenir des emplois. Toutes ces organisations ont été avisées, il y a trois ans, que nous allions modifier l'orientation du financement fédéral pour investir dans des projets qui amélioreraient de façon importante l'alphabétisation chez les adultes, plutôt que d'administrer des projets en arrière-plan, afin que ces organisations disposent du temps nécessaire pour se préparer aux changements. Dans le cadre de notre nouveau programme visant à accroître le taux d'alphabétisation des adultes, n'importe quel organisme au Canada, y compris ceux qui recevaient du financement axé sur l'administration dans le cadre de l'ancienne structure, peut demander de l'aide financière. Comme les contribuables canadiens s'y attendent, les projets sont évalués et financés uniquement en fonction de leur bien-fondé, c'est-à-dire à condition qu'ils permettent aux Canadiens d'acquérir les compétences nécessaires pour obtenir des emplois.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Sauf votre respect, j'ai dit que le gouvernement leur a signifié qu'elles perdraient leur financement de base. Il voulait des propositions portant sur des projets précis. Les organisations provinciales d'alphabétisation de tout le Canada ont répondu à l'invitation.

Vous parlez de financement par projets, mais ces organisations ont essuyé un refus. Elles ont perdu leur financement de base. Leurs projets ont été rejetés. Je le répète, elles sont dans l'impasse.

Ma question est la suivante : pourquoi le gouvernement tourne-t-il le dos à ces organisations?

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai indiqué, les Canadiens s'attendent à ce que les projets financés à partir des fonds publics soient précis et répondent aux objectifs des politiques gouvernementales.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Il s'agissait de projets précis, et ils ont été rejetés. Je veux savoir pourquoi. Je veux savoir pourquoi le gouvernement tourne le dos à l'alphabétisation, refusant de fournir le financement de base et le financement de projets précis à ces organisations provinciales pour l'alphabétisation.

[Français]

Le sénateur Carignan : Les organismes peuvent demander une aide financière. Comme s'y attendent les contribuables, les projets sont évalués et financés uniquement en fonction de leur bien-fondé. Ainsi, les réponses sont données en fonction de leur bien-fondé, par rapport à leur capacité d'améliorer les compétences en littératie permettant d'obtenir un emploi.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Je peux vous assurer que ces projets allaient permettre d'améliorer les compétences des Canadiens...

Le sénateur Tkachuk : Comment le savez-vous?

La sénatrice Callbeck : ... mais permettez-moi de vous poser une question sur un projet précis. Nous avons parlé des organisations provinciales d'alphabétisation. Elles ne sont pas les seules à subir les dures conséquences du manque d'intérêt du gouvernement pour l'alphabétisation. Il élimine toute forme de financement.

Je vous donne un exemple. En avril 2012, Workplace Learning PEI a soumis l'idée d'un très important projet de trois ans au Bureau de l'alphabétisation et des compétences essentielles, le BACE. L'idée a plu au bureau, qui a donné son aval pour qu'elle aille plus loin. Le personnel du BACE et de Workplace Learning PEI ont travaillé à la proposition pendant un an et demi, et le projet a été approuvé à toutes les étapes, jusqu'à ce qu'il arrive sur le bureau du ministre, l'automne dernier.

En mars, le refus est venu. C'est là une organisation qui a réussi à offrir des programmes au moyen de fonds fédéraux pendant tout mon mandat de sénatrice. Et elle s'est fait refuser un projet qui cadrait dans le mandat du BACE.

Je vous demande pourquoi le ministre rejette les conseils de ses propres fonctionnaires et refuse de financer un projet précieux qui porte sur l'alphabétisation et les compétences essentielles.

[Français]

Le sénateur Carignan : Le danger de prendre un projet en particulier et de l'évoquer ici en précisant qu'il a été refusé et pourquoi il a été refusé, c'est qu'on risque de ne pas avoir une vue d'ensemble ni de voir l'ensemble des projets qui ont été financés. Lorsqu'on se penche sur ce type de dossier, il faut faire confiance aux organismes qui présentent des projets et aux fonctionnaires qui étudient le bien-fondé de ces différents dossiers et qui font des recommandations au ministre.

(1500)

Comme je l'ai dit, nous avons pris des mesures pour que le financement fédéral cible des projets qui permettent aux Canadiens d'acquérir les compétences nécessaires pour obtenir des emplois, et je pense que c'est ce que les Canadiens attendent de nous. Vous pouvez nous citer une série de projets qui ont été refusés; j'aimerais plutôt que vous me citiez des projets qui ont été acceptés et que vous nous expliquiez pourquoi ils n'auraient pas dû l'être.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Vous avez dit que vous deviez vous fier aux fonctionnaires, qu'ils faisaient les recommandations. Or, ils ont recommandé ce projet, pour lequel ils ont travaillé pendant un an et demi. Tout au long du processus, les fonctionnaires l'ont approuvé. C'est le ministre qui l'a refusé. J'aimerais savoir pourquoi le ministre n'a pas suivi les conseils de ses fonctionnaires dans ce cas-ci.

[Français]

Le sénateur Carignan : La sénatrice semble avoir connaissance d'une information privilégiée. Vous avez été élue, vous avez occupé des postes parmi les plus élevés dans votre province; vous savez que, à un moment donné, dans un projet, lorsque vient le moment, on doit trancher et s'assurer de donner aux Canadiens ce qu'ils attendent de nous, c'est-à-dire approuver les projets qui sont évalués et financés uniquement en fonction de leur bien-fondé, et approuver ceux qui seront les plus porteurs en ce qui concerne l'atteinte des objectifs. Dans ce cas-ci, il s'agit de permettre aux Canadiens d'acquérir les compétences nécessaires pour décrocher un emploi.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Vous avez dit que les projets étaient évalués en fonction de leur bien-fondé. Tout au long du processus, tous vos fonctionnaires ont approuvé le projet. De toute évidence, c'était un projet solide et ils y croyaient, sinon ils n'auraient pas passé une année et demie à y travailler avec Workplace Learning PEI. Toutefois, lorsque le projet a été présenté au ministre, il l'a rejeté.

Est-ce que le leader pourrait prendre note de cette question et me dire pourquoi ce projet a été approuvé tout au long du processus, jusqu'à ce qu'il soit présenté au ministre, qui l'a rejeté?

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénatrice Callbeck, je ne peux pas parler de ce projet de loi en particulier, mais vous avez occupé des postes décisionnels et vous avez reçu des recommandations. Il m'est arrivé, comme décideur public, de recevoir des recommandations pour cinq, six ou même vingt projets, mais de ne pouvoir en choisir que cinq, six ou dix, ce qui doit être fait de temps à autre. Les projets sont classés par ordre de priorité et sont financés en fonction de leur bien-fondé, et sont choisis de façon à permettre d'atteindre les objectifs liés à l'alphabétisation nécessaire pour obtenir un emploi.

[Traduction]

Réponse différée à des questions orales

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse à deux questions orales concernant le projet de câble électrique entre l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick. Les questions ont été posées par l'honorable Catherine S. Callbeck, le 28 janvier 2014, et par l'honorable Elizabeth Hubley, le 13 mai 2014.

L'infrastructure

L'amélioration de la transmission d'électricité entre l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick

(Réponse aux questions posées le 28 janvier 2014 par l'honorable Catherine S. Callbeck et le 13 mai 2014 par l'honorable Elizabeth Hubley)

Le ministre de l'Infrastructure, des Collectivités et des Affaires intergouvernementales et ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec est très fier que le gouvernement mette en œuvre un Nouveau Plan Chantiers Canada pour aider à financer la construction, la remise en état et l'amélioration des infrastructures partout au Canada. Le Plan comprend plus de 53 milliards de dollars sur dix ans pour les infrastructures provinciales, territoriales et municipales. En ajoutant à cette somme les investissements effectués dans les infrastructures fédérales et dans celles des Premières Nations, les dépenses fédérales consacrées aux infrastructures au cours de la prochaine décennie atteindront un total de 70 milliards de dollars. Il s'agit de l'investissement fédéral le plus important et le plus long dans les infrastructures créatrices d'emploi de l'histoire du Canada.

Des 53 milliards de dollars du Nouveau Plan Chantiers Canada, 47 milliards de dollars consistent en du nouveau financement qui sera alloué aux infrastructures provinciales, territoriales et municipales à compter de 2014-2015, et ce, au moyen de trois principaux fonds :

  • Le Fonds d'amélioration des collectivités : 32,2 milliards de dollars sur dix ans. Ce Fonds se compose du Fonds de la taxe sur l'essence indexé (21,8 milliards de dollars) et du remboursement additionnel de la taxe sur les produits et services (10,4 milliards de dollars). Il permettra aux municipalités de construire des routes, des infrastructures liées au transport en commun et aux loisirs ainsi que d'autres infrastructures communautaires partout au Canada.
  • Le Nouveau Fonds Chantiers Canada : 14 milliards de dollars sur dix ans pour soutenir les grands projets d'infrastructure économique d'importance nationale, régionale et locale. Il inclut 1 milliard de dollars de financement dédié aux municipalités de moins de 100 000 habitants dans le cadre du Fonds des petites collectivités.
  • Le Fonds PPP Canada renouvelé : 1,25 milliard de dollars sur cinq ans pour continuer à soutenir des façons innovantes de réaliser des projets d'infrastructure plus rapidement et de maximiser les ressources des contribuables canadiens grâce à des partenariats public-privé.

Le Nouveau Fonds Chantiers Canada (NFCC) est l'un des éléments du Nouveau Plan Chantiers Canada (NPCC) global. Il s'agit d'un Fonds de 14 milliards de dollars qui soutiendra des projets d'importance nationale, régionale et locale favorisant la croissance économique, la création d'emplois et la productivité. Il comprend deux grands volets :

  • Le volet Infrastructures nationales (VIN), de 4 milliards de dollars, vise à soutenir des projets d'importance nationale. Le financement des projets sera déterminé au mérite, en fonction des priorités fédérales.
  • Le volet Infrastructure provinciales-territoriales (VIPT), de 10 milliards de dollars, fournira 9 milliards de dollars pour des projets nationaux et régionaux et 1 milliard de dollars au titre du Fonds pour les petites collectivités pour des projets réalisés dans des collectivités de moins de 100 000 habitants.

Le NFCC a été officiellement lancé le 28 mars.

Concrètement, cela signifie que l'Île-du-Prince-Édouard bénéficiera d'environ 440 millions de dollars en financement fédéral, y compris plus de 277 millions de dollars aux termes du Nouveau Fonds Chantiers Canada et environ 163 millions de dollars aux termes du Fonds de la taxe sur l'essence fédéral.

Comme il a été annoncé, aux termes du volet Infrastructure provinciales-territoriales du NFCC, les projets seront conjointement identifiés par le gouvernement du Canada et les partenaires provinciaux ou territoriaux. L'énergie verte est une catégorie admissible du volet Infrastructures provinciales-territoriales. Le ministre invite donc la province à soumettre officiellement ce projet à titre de priorité aux fins d'examen dans le cadre de ce programme.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur les parcs nationaux du Canada

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Dennis Glen Patterson propose que le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada (réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh du Canada), soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir prendre la parole à l'étape de la troisième lecture du projet de loi S-5, Loi sur la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh, qui constitue une importante mesure législative en matière de conservation pour notre pays. Je tiens à rappeler aux sénateurs que le nom du parc, Nááts'ihch'oh, a été choisi par les aînés et qu'il décrit la forme du mont Wilson; cela veut dire « pointu comme un piquant de porc-épic ». Il s'agit d'une montagne sacrée pour les Autochtones de la région du Sahtu, les Dénés et les Métis, et elle sera protégée à tout jamais grâce à la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh.

Le projet de loi comporte deux objectifs. Premièrement, il vise à protéger 4 895 kilomètres carrés de belles terres du Nord en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada, pour le bénéfice des générations futures. La réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh sera ajoutée à la liste de parcs nationaux canadiens de renommée mondiale tels que Banff, Gros Morne, Gwaii Haanas et l'île-de-Sable. Par ailleurs, le projet de loi S-5 donne aussi au ministre de l'Environnement le pouvoir d'autoriser l'utilisation de deux routes existantes pour avoir accès à des mines dans un secteur de la réserve à vocation de parc national, et le pouvoir d'appliquer les mesures requises pour protéger l'environnement si l'utilisation de ces voies d'accès s'avère nécessaire. À cet égard, je signale que ces dispositions correspondent exactement à ce qui a été approuvé en 2009 par le Parlement, lorsqu'il a adopté une mesure législative qui multipliait par six la superficie de la réserve du parc national de Nahanni.

Une route d'accès à des mines est envisagée dans la partie nord-ouest du parc national Nahanni, vers le nord, dans le parc national Nááts'ihch'oh. Le projet de loi S-5 élargit simplement les pouvoirs du ministre afin qu'il puisse autoriser l'utilisation de cette partie de la route dans le parc national Nááts'ihch'oh. Si le Sénat du Canada approuve cette mesure législative, nous aurons franchi une autre étape en vue de créer le 44e parc national du Canada et, ce qui est peut-être plus important, de donner suite à la volonté des Autochtones du Sahtu, des Dénés et des Métis de conserver la partie supérieure de la rivière Nahanni Sud et de veiller à ce qu'ils puissent continuer à s'adonner à leurs modes de vie traditionnels sur ces terres, dans les décennies et les siècles à venir.

En 2004, la bande des Dénés de Tulita a reconnu que la source de la rivière South Nahanni était importante et que les habitants de Tulita voulaient une certaine forme de protection. En conséquence, le conseil de bande a adopté une résolution demandant à Parcs Canada d'amorcer le processus d'établissement d'une réserve à vocation de parc national afin de protéger la source de la rivière South Nahanni, dans la région du Sahtu. Une décennie plus tard, nous sommes sur le point de réaliser le projet inspiré par la vision des Autochtones du Sahtu.

Le projet de loi S-5 va créer la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh, mais il permettra aussi au gouvernement, en partenariat avec les Autochtones, de mener à terme un grand projet de conservation du bassin hydrographique de la rivière Nahanni Sud. En 2009, le gouvernement et les Premières Nations du Dehcho ont réalisé l'agrandissement de la réserve de parc national Nahanni, qui a vu sa superficie multipliée par six pour atteindre 30 000 kilomètres carrés. La protection de 4 895 kilomètres carrés supplémentaires dans la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh, adjacente à la Nahanni, créera une superficie de près de 35 000 kilomètres carrés permettant de protéger 86 p. 100 du bassin hydrographique de la Nahanni Sud. Pour vous donner une idée de l'ampleur de cette initiative, sachez que la superficie englobant les 35 000 kilomètres carrés des réserves de parcs nationaux Nááts'ihch'oh et Nahanni sera cinq fois plus grande que celle de l'Île-du-Prince-Édouard et presque égale à celle de l'île de Vancouver.

Honorables sénateurs, ce sont là des mesures de conservation à grande échelle. Cette initiative a été menée à bien en collaboration avec les Autochtones du Sahtu, les Dénés, les Métis et les Premières Nations du Dehcho, dans leurs territoires traditionnels respectifs. C'est pour cette raison que le gouvernement fédéral et Parcs Canada sont des leaders mondiaux dans la préservation de grands trésors naturels de la planète, en collaboration avec les peuples autochtones.

(1510)

L'examen du projet de loi S-5 par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales nous a permis d'apprendre que, à mon grand plaisir, plusieurs acteurs importants du Nord appuient la création de la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh, notamment les Dénés et Métis du Sahtu, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la NWT and Nunavut Chamber of Mines.

Les Dénés et Métis du Sahtu n'ont pas participé aux audiences, mais nous avons appris au cours de nos délibérations que, en mars 2012, leur représentant dans le district de Tulita a signé avec le gouvernement un plan sur les répercussions et les avantages relativement au projet de réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh, comme l'exige l'Entente sur la revendication territoriale globale des Dénés et Métis du Sahtu. Le plan définit les modalités applicables, notamment en ce qui concerne les limites du parc à sa création, les retombées du parc pour les Dénés et Métis du Sahtu et la gestion conjointe de la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh par Parcs Canada et les Dénés et Métis du Sahtu.

Honorables sénateurs, il a par ailleurs été révélé que, lorsque le premier ministre a annoncé les limites de la réserve de parc, en août 2012, les Dénés et Métis du Sahtu ont demandé à ce qu'elles soient élargies jusqu'au lac O'Grady dans le but de faciliter l'accès des visiteurs à la réserve de parc et de permettre éventuellement la construction d'un pavillon en pleine nature dont les retombées économiques additionnelles rejailliraient sur le parc. Je suis donc ravi de signaler que le projet de loi S-5 acquiesce directement à cette demande en accroissant la superficie du parc de 20 kilomètres carrés, pour atteindre le rivage sud du lac O'Grady.

Peter Vician, sous-ministre de l'Industrie, du Tourisme et des Investissements des Territoires du Nord-Ouest, a fait savoir au comité que :

Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest appuie l'établissement du parc proposé dans le projet de loi.

Il a aussi dit ceci :

Notre gouvernement soutient les efforts visant à protéger cette région importante pour la conservation et l'écologie, située en amont de la rivière Nahanni Sud, ainsi qu'à planifier la croissance à venir dans les Territoires du Nord-Ouest.

Honorables sénateurs, il importe également de souligner que Tom Hoefer, qui est directeur exécutif de la Chambre des mines des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, a écrit au comité pour donner son appui au projet de loi S-5. Dans sa correspondance, la Chambre des mines fait remarquer que « le projet de loi S-5 propose une approche raisonnable et équilibrée, qui permet de protéger à la fois la richesse de l’environnement, de la vie sauvage et de la géographie du bassin hydrographique de la Nahanni et le potentiel minier spécial et hors du commun de la région ».

Honorables sénateurs, on dit que les limites définitives du parc sont le signe d'« une approche raisonnable et équilibrée »; permettez-moi d'aborder cet aspect.

Lors de son témoignage, la représentante de la Société pour la nature et les parcs du Canada, qui a joué un rôle important dans l'établissement de notre réseau de parcs nationaux, a émis des réserves, parce que selon l'organisme les limites définitives ne se rendent pas suffisamment loin pour protéger le cours supérieur du bassin hydrographique de la Nahanni-Sud. À la lumière de cette critique, j'aimerais prendre quelques instants pour traiter de la question.

Dans leur mémoire au comité, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la Chambre des mines, qui sont deux grands intervenants dans le Nord canadien, ont dit que le projet de loi S-5 établit une approche équilibrée. Les limites définitives de Nááts'ihch'oh ont été déterminées de manière à assurer des gains majeurs en matière de conservation, y compris la protection du cours supérieur de la Nahanni-Sud, et à protéger l'habitat du caribou des bois et du grizzli, mais ces limites ont également été établies en vue de permettre l'exploitation des concessions minières actuelles et l'utilisation des baux d'exploitation minière, ainsi que de possibles exploitations minières futures.

Bref, honorables sénateurs, les limites protègent 70 p. 100 du bassin hydrographique de la Nahanni-Sud se trouvant au Sahtu, tout en laissant en dehors des limites du parc 70 p. 100 des terres qui présentent un grand potentiel minier. Le projet de loi contribue à la conservation de l'environnement et à l'expérience des visiteurs, et ce, sans bloquer l'accès à de vastes zones qui ont un grand potentiel minier. Il s'agit bien d'une approche équilibrée.

Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la Chambre des mines nous ont appris pourquoi il est si fondamental d'adopter une approche équilibrée. Comme la Chambre des mines l'a indiqué, « les atouts et la solidité de l’économie des Territoires du Nord-Ouest reposent sur l’exploitation des ressources non renouvelables, c’est-à-dire sur les mines et la production pétrolière et gazière ».

Compte tenu de l'entente sur le transfert des responsabilités conclue récemment, l'exploitation de ces ressources jouera un rôle accru dans la croissance économique des Territoires du Nord-Ouest. Et la Chambre des mines ajoute que, « si l’on veut encourager et soutenir notre industrie dynamique des ressources non renouvelables, il est essentiel que cette industrie ait accès aux terres, notamment à celles qui ont un potentiel minier intéressant […] »

Enfin, la Chambre des mines précise : « Étant donné que le parc proposé de Nááts’ihch’oh se situe dans la cordillère des monts Mackenzie, une région jouissant d’un très fort potentiel minier, nous étions en faveur de l’exclusion d’une bonne partie de cette région des limites du parc. Nous nous réjouissons de voir que l’évaluation […] a permis d’identifier le potentiel minier du secteur […] »

Honorables sénateurs, le débat au sein du comité pour savoir si les limites définitives de la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh sont adéquates ou non repose sur ce qui me semble être une prémisse erronée. On nous dit que les terres non incluses dans un parc national seront automatiquement soumises à l'exploitation et, ce faisant, seront irrémédiablement altérées.

Au contraire, le comité a entendu un témoignage convaincant de la part du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, qui nous a affirmé que, si des activités d'exploitation des ressources devaient avoir lieu sur des terres adjacentes à la réserve à vocation de parc national, une évaluation environnementale aurait forcément lieu et comprendrait des audiences publiques conformément à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie.

M. Vician, du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, a donné l'assurance suivante au comité :

Nous avons ainsi dans les Territoires du Nord-Ouest un régime très rigoureux de surveillance et d'intervention pour la protection de l'environnement.

Il a déclaré également ceci :

Même avec l'application des limites proposées, tout projet contigu fera l'objet d'un examen approfondi en vue d'assurer le maintien et la préservation du parc.

Selon lui, la protection prévue dans la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie n'est pas la seule garantie :

[…] il est sans doute encore plus important de noter les relations que nous avons établies avec les gouvernements autochtones des Territoires du Nord-Ouest, de telle sorte qu'avant chaque projet de développement, on s'assure de bien comprendre les possibilités qui sont offertes, mais aussi les répercussions qui peuvent s'ensuivre. En outre, un rigoureux processus d'octroi de permis et des mécanismes efficaces de surveillance [feraient en sorte que] les secteurs les plus menacés ne risquent pas d'être affectés.

Enfin, en ce qui concerne les caribous qui se trouvent dans cette région et sur lesquels la Société pour la nature et les parcs du Canada a insisté au cours de sa présentation, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a déclaré que :

La protection de l'environnement dans ce secteur doit absolument passer par l'établissement de ce parc, parallèlement à des mesures permettant de s'assurer que tout projet de développement est soumis au contrôle strict et au pouvoir décisionnel de la population de la région.

En résumé, honorables sénateurs, je crois que c'est l'équilibre établi entre la protection des valeurs du parc national et le potentiel minier de la région, combiné au fait que des processus et des relations sont en place pour gérer de façon responsable les projets de développement à l'extérieur des limites du parc, qui a mené le comité à recommander au Sénat d'adopter le projet de loi S-5 sans amendement à l'étape de la troisième lecture.

Au bout du compte, honorables sénateurs, grâce à l'adoption du projet de loi S-5, le gouvernement aura multiplié par sept la superficie initiale de 4 765 kilomètres carrés de la réserve du parc national Nahanni, de sorte qu'elle deviendra le troisième complexe de parcs nationaux en importance au Canada, avec une superficie de près de 35 000 kilomètres carrés. Il est essentiel d'envisager dans ce contexte les limites qui ont été définies pour le parc national Nááts'ihch'oh.

Pour aider les sénateurs à comprendre la nature des réalisations de ce projet de loi, il faut dire qu'un habitat qui protégera près de 600 grizzlis est situé dans les limites du parc Nahanni élargi et du nouveau parc Nááts'ihch'oh. C'est neuf fois plus que le nombre de grizzlis protégés à l'intérieur du parc national Banff, le premier parc national du Canada.

Comme je l'ai mentionné à l'étape de la deuxième lecture, le premier ministre Stephen Harper a dévoilé le Plan national de conservation du Canada le mois dernier. La stratégie du gouvernement consiste à conserver les terres et les eaux de notre pays, à restaurer nos écosystèmes et à rapprocher les Canadiens de la nature. La création de la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh est un élément essentiel de ce plan, car celle-ci conservera les terres et les eaux qui contribuent à subvenir aux besoins des Autochtones et à maintenir leur culture en protégeant des terres qu'ils utilisent et qu'ils continueront d'utiliser pour les générations à venir.

Ce projet de loi est un exemple concret des mesures que nous prenons dans le cadre de la Stratégie pour le Nord, qui propose une approche responsable en matière de développement, établit un équilibre entre protection environnementale et développement social et économique, donne aux habitants du Nord une meilleure maîtrise de leur environnement et assure le respect de la souveraineté du Canada dans le Nord. Les peuples autochtones ont participé activement à la gestion de la nouvelle réserve de parc, ce qui contribuera à renforcer les capacités et la gouvernance dans le Nord.

Pour terminer, j'aimerais féliciter tous les membres du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie du travail qu'ils ont accompli. Ils ont tous formulé des observations et des questions très sensées dans le cadre de nos délibérations, ce qui a donné lieu à des discussions approfondies sur les questions relatives à la création de notre 44e parc national.

(1520)

Je tiens aussi à remercier le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la Société pour la nature et les parcs du Canada d'avoir pris le temps de comparaître devant le comité, ainsi que la Chambre des mines des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut d'avoir présenté un mémoire au comité. Ces interventions ont aidé le comité à axer son examen sur les questions de fond liées au projet de loi S-5. Elles nous ont aidés à faire en sorte que le projet de loi S-5 soit le meilleur outil qui soit pour gérer l'utilisation du territoire situé dans la partie supérieure du bassin hydrographique de la rivière Nahanni-Sud. Je tiens aussi à remercie le sénateur Nick Sibbeston de l'appui de principe qu'il accorde à ce projet de loi.

Honorables sénateurs, je vous demande de vous joindre à moi pour assurer l'adoption du projet de loi S-5 au Sénat du Canada. Je vous demande d'appuyer la création de la réserve à vocation de parc national Nááts'ihch'oh du Canada afin que les générations futures puissent profiter de ce merveilleux trésor naturel.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

La Loi électorale du Canada

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Linda Frum propose que le projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d'autres lois et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureuse d'intervenir à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-23, Loi sur l'intégrité des élections. Ce projet de loi a déjà été débattu et examiné en long et en large. Il est juste de dire qu'il a fait l'objet d'un examen parlementaire et public détaillé. Ce projet de loi, qui nous arrive de l'autre endroit, comporte un certain nombre d'amendements. Nous sommes fiers du fait que plusieurs des changements apportés au texte découlent de propositions faites pendant l'étude préalable du projet de loi réalisée par le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles. Cinq des neuf recommandations formulées par ce comité ont été prises en compte dans le projet de loi dont nous avons été saisis.

Premièrement, le gouvernement et la Chambre des communes ont appuyé notre recommandation voulant que le projet de loi autorise expressément le commissaire aux élections fédérales et le directeur général des élections à communiquer entre eux. Ce changement figure à l'article 5.1 du projet de loi C-23.

Deuxièmement, le gouvernement et l'autre endroit ont appuyé notre recommandation visant à interdire aux partis politiques enregistrés d'exclure des dépenses électorales le coût des services obtenus pour solliciter des contributions auprès des particuliers qui ont donné plus de 20 $ au cours des cinq années précédentes. Bien que ce soit là une pratique courante des partis politiques lors des campagnes au leadership, le gouvernement a accepté de retirer cette disposition. Par conséquent, la modification proposée à la Loi électorale du Canada à l'article 86 de la Loi sur l'intégrité des élections a été supprimée.

Troisièmement, notre comité avait recommandé — ce que le gouvernement et la Chambre des communes ont accepté — d'imposer aux fournisseurs de services d'appel qu'ils conservent leurs dossiers durant trois ans, au lieu d'un an comme le prévoyait initialement le projet de loi. Ce changement figure à l'article 77 du projet de loi C-23.

Quatrièmement, le comité avait recommandé qu'Élections Canada conserve son rôle éducatif auprès des élèves des écoles primaires et secondaires. Le gouvernement et la Chambre des communes ont accepté. Le changement figure à l'article 7 du projet de loi C-23.

Enfin, le comité avait recommandé que le directeur général des élections et le commissaire aux élections fédérales soient expressément autorisés à informer le public des problèmes qu'ils découvrent dans le système électoral. Le projet de loi C-23 a été modifié à l'article 108 pour préciser que le commissaire peut communiquer des renseignements qui, à son avis, sont d'intérêt public.

Le projet de loi a donc été modifié à l'article 7 afin d'établir clairement que les restrictions imposées au directeur général des élections ne portent que sur son matériel promotionnel et non sur sa capacité générale de communiquer avec le public.

Honorables sénateurs, au-delà des recommandations du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, le gouvernement a tenu compte des préoccupations exprimées par les témoins qui ont comparu devant notre comité et le comité de l'autre endroit parce que certains électeurs ont de la difficulté à donner une preuve de leur domicile lorsqu'ils vont voter. La Loi sur l'intégrité des élections a donc été amendée afin de permettre à ceux qui ont des pièces d'identité sans preuve de résidence de prêter serment à cet égard pourvu qu'un autre électeur de la même circonscription électorale qui a donné une preuve de son identité et de son domicile prête serment par écrit pour confirmer l'adresse.

Ces dispositions se trouvent aux articles 46, 50 et 54. Des amendements corrélatifs ont également été faits à d'autres articles du projet de loi.

Je voudrais dire, en ce moment très difficile pour le Sénat, alors que l'estime du public pour la Chambre haute et les sénateurs est ébranlée, que nous avons, grâce à ce projet de loi, su montrer que nous pouvons assumer nos responsabilités à titre de Chambre de second examen objectif.

La Loi sur l'intégrité des élections dont nous sommes saisis améliore un projet de loi qui était déjà exceptionnel. Les améliorations apportées sont le résultat d'un travail ardu et d'une analyse approfondie faits tant par le comité de l'autre endroit que par notre Comité des affaires juridiques au cours de son étude préliminaire du projet de loi.

Honorables sénateurs, permettez-moi en conclusion de remercier mes collègues membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et, en particulier, notre président et notre vice-président, les sénateurs Runciman et Baker.

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, je prends la parole pour participer au débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-23, mal nommé Loi sur l'intégrité des élections.

Traditionnellement, dans une démocratie établie comme la nôtre, tout changement apporté à la Loi électorale devrait être le résultat de vastes consultations. Il serait raisonnable de s'attendre à ce que les responsables de l'application de la loi, comme les dirigeants d'Élections Canada, participent à de telles consultations. Malheureusement, le directeur général des élections n'a pas été consulté.

De plus, le projet de loi C-23 était censé apporter une solution sous une forme ou une autre aux préoccupations de beaucoup de Canadiens qui avaient pu constater la fraude électorale qui avait marqué les dernières élections, notamment sous forme d'appels automatisés. Cela dit, on aurait pu s'attendre à ce que le commissaire aux élections fédérales soit consulté, mais il ne l'a pas été, malgré la colère ressentie par des milliers de Canadiens face à cette situation.

Les appels automatisés visaient à envoyer les électeurs aux mauvais bureaux de scrutin et avaient pour but évident d'empêcher des gens de voter. Ces activités ont indigné les Canadiens.

Le gouvernement a cru bon d'accepter des modifications dans plusieurs domaines après les pressions intenses qui se sont exercées et le tollé soulevé dans le pays par les changements qu'il voulait apporter à notre précieuse démocratie dans le projet de loi C-23. Toutefois, il reste de nombreux problèmes qu'ont unanimement dénoncés, dans leur grande majorité, les intervenants qui s'intéressent à notre Loi électorale.

Je voudrais brièvement aborder quelques-unes des lacunes qui restent dans le projet de loi. Premièrement, au chapitre de la constitutionnalité, cette mesure législative ne contient pas suffisamment de garanties pour assurer aux citoyens qui ont le droit de vote en vertu de l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés qu'ils pourront effectivement voter. Par conséquent, le projet de loi est clairement inconstitutionnel et ne peut pas être sauvé par l'article 1 de la Charte.

Lors de sa comparution devant un comité de l'autre endroit, Pierre Lortie, président d'une commission de réforme électorale en 1992, a déclaré que l'élimination du système des répondants « est, sans aucun doute, contraire aux dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés ».

Il faudra voir si la modification relative aux attestations permettra de régler ce problème.

La deuxième préoccupation est liée au pouvoir du directeur général des élections d'autoriser la carte d'information de l'électeur comme pièce d'identité acceptable en remplacement d'une carte d'identité à photo délivrée par le gouvernement. Ce pouvoir devrait être rétabli. Nous savons qu'Élections Canada continuera d'émettre ces cartes. Les Canadiens s'attendront raisonnablement à ce qu'on les autorise à continuer de s'en servir comme pièce d'identité, mais ce n'est pas le cas.

Troisièmement, les articles du projet de loi qui révoquent les dispositions permettant à un électeur n'ayant pas les pièces d'identité prescrites de voter ou de s'inscrire sur la liste des électeurs devraient être supprimés. Ces articles portent sur la question du répondant, qui constitue l'un des aspects les plus controversés du projet de loi. Il faut noter que, malgré l'absence de cas établis de fraude électorale liée au système des répondants, le gouvernement veut encore s'appuyer sur des preuves anecdotiques pour justifier la suppression de ce système.

Il est intéressant de signaler que, en 2007, après la première série de modifications apportées par le gouvernement fédéral à la Loi électorale du Canada en matière d'identification, la loi fait l'objet d'une contestation en Colombie-Britannique, où une requête a été présentée à la Cour suprême du Canada. Il est encore plus intéressant de remarquer que le même gouvernement, qui veut maintenant supprimer le système des répondants, s'en était alors servi pour justifier la modification des exigences d'identification en 2007.

Le gouvernement avait alors convenu que le système était considéré comme une garantie intégrée. Il est instructif de lire l'article publié le 5 mai par le Globe and Mail au sujet de cette affaire et de la requête présentée à la Cour suprême :

Le gouvernement prétend que les réformes adoptées en 2007 « servent à rendre encore plus rares les rares occurrences de fraude et d'erreur, assurent l'intégrité du scrutin et entretiennent la confiance du public envers le régime électoral. »

(1530)

Ce n'est pas ce que le ministre conservateur de la Réforme démocratique, Pierre Poilievre, a dit à la population canadienne. Depuis qu'il a présenté le projet de loi C-23, au début de février, le ministre Poilievre n'a pas arrêté de crier à la fraude électorale pour justifier l'élimination du recours à un répondre pour les électeurs qui n'ont pas les pièces d'identité exigées. Selon la version de la loi adoptée en 2007, les électeurs ayant toutes les pièces d'identité requises peuvent se porter garants d'un autre électeur à qui il en manque. « Les risques que présente le recours à un répondant sont évidents », a dit M. Poilievre aux Communes le 24 mars pour expliquer le resserrement envisagé des règles.

Or, les avocats du gouvernement arguent depuis 2009 devant les tribunaux britanno-colombiens que la preuve d'identité par un répondant garantit la constitutionnalité des règles sur l'identification des électeurs adoptées en 2007, une position que le gouvernement continue de défendre devant la Cour suprême du Canada. Dans son mémoire, le gouvernement fédéral énumère trois mesures pour protéger le droit de vote en vertu de la loi de 2007 — la troisième étant le recours à un répondant — et souligne que le système fonctionne.

Le gouvernement ne peut dire une chose et son contraire, Votre Honneur.

Quatrièmement, le projet de loi devrait autoriser le commissaire aux élections fédérales à demander à un juge de rendre une ordonnance afin d'obliger des témoins à témoigner dans le cadre d'une enquête sur des violations alléguées à la Loi électorale du Canada. Un tel pouvoir changerait la donne pour les agents qui mènent des enquêtes sur des fraudes électorales. Il leur permettrait probablement de mener à bien leurs enquêtes. Voilà toute la différence. Sans ce pouvoir de contraindre des personnes à témoigner, nous savons que des enquêtes seront closes faute de preuves. Nous savons maintenant par expérience que, si un parti politique ne veut pas aider le commissaire aux élections fédérales ou un juge d'un tribunal fédéral à faire toute la lumière dans une affaire, rien ne l'y oblige.

M. Yves Côté, commissaire aux élections fédérales, a tenu les propos suivants :

[...] je tiens à être parfaitement clair : si cette modification n'est pas apportée, les enquêtes continueront d'être longues, et [...] Pire encore, certaines avorteront tout simplement en raison de notre incapacité d'aller au fond des choses.

Si la Loi sur l'intégrité des élections était à la hauteur de son titre, ne donnerions-nous pas aux gardiens de notre système le pouvoir de faire toute la lumière sur les cas de fraude électorale et ce, rapidement, et non des mois ou des années après le jour du scrutin?

La cinquième préoccupation importante est qu'il faudrait rétablir le vaste mandat conféré au directeur général des élections, en vertu de l'article 18 de la Loi électorale du Canada, d'informer le public sur le processus électoral au Canada, l'exercice démocratique du droit de vote et la façon de se porter candidat. Le gouvernement a amendé le projet de loi, mais pas jusqu'où il le devrait. Aux termes de la version actuelle du projet de loi, le directeur général des élections peut communiquer avec les élèves du primaire et du secondaire, mais M. Mayrand, l'actuel directeur général des élections, a souligné ce qui suit :

Je suis très préoccupé par les limites qu'impose le projet de loi C-23 à la capacité de mon bureau de consulter les Canadiens et de diffuser de l'information au sujet du processus électoral ou de publier des résultats de recherche. Je ne connais aucune démocratie où de telles restrictions sont imposées à l'organisme chargé des élections [...]

Sixièmement, on ne devrait pas exiger que le directeur général des élections obtienne l'aval du Conseil du Trésor pour l'embauche temporaire de personnel technique et spécialisé.

Septièmement, on ne devrait pas empêcher le commissaire aux élections fédérales de divulguer des informations concernant une enquête, sauf dans certaines circonstances particulières.

Les éléments essentiels de n'importe quelle démocratie sont la transparence et la consultation. Notre système électoral doit être transparent pour inspirer confiance à la population et cela suppose que le commissaire aux élections fédérales est indépendant et a le pouvoir de contraindre des personnes à témoigner, et n'est pas tenu, à titre d'enquêteur principal, d'avoir recours à l'intermédiaire d'un autre bureau contrôlé par le gouvernement.

L'autre impératif est la consultation, qui signifie qu'il faut encourager les citoyens qui ont le droit de voter à exercer leur droit et veiller à ce qu'un maximum d'entre eux le fasse. Le travail d'un directeur des élections est d'encourager la participation aux élections, et c'est une activité capitale. Le gouvernement semble attribuer au directeur des élections le récent déclin de la participation aux élections, et il utilise ce mensonge comme justification pour limiter la diffusion d'information sur le processus électoral. En réalité, le déclin de la participation n'est pas un phénomène canadien, mais une tendance observée dans un grand nombre de pays démocratiques, sauf là où il est obligatoire de voter. J'ai toujours pensé que la mission consistant à encourager la participation des électeurs, et tout ce qui est fait en ce sens, était un atout.

Chers collègues, il y a d'autres points préoccupants. Dans son rapport, commandé par le gouvernement du Canada, M. Harry Neufeld a recommandé qu'Élections Canada soit responsable de la nomination de tout le personnel électoral et lui dispense une formation suffisamment à l'avance pour qu'il soit prêt le jour du scrutin. Le projet de loi C-23 ne reflète pas cette recommandation, de sorte que le gouvernement nous expose à d'autres irrégularités aux élections, que M. Neufeld a décrites comme administratives et sans lien avec la fraude électorale.

Malheureusement, le gouvernement soutient encore que le rapport de M. Neufeld considère les irrégularités électorales comme des fraudes. Il n'a rien dit de tel et n'a pas fait d'association entre les deux. Il a déclaré qu'une formation donnée avant le jour du scrutin serait le meilleur moyen d'éviter les irrégularités aux bureaux de vote.

Le gouvernement a plutôt réduit le financement d'Élections Canada dans le dernier budget — l'opposé de ce qu'il fallait faire. La disposition selon laquelle le Bureau du commissaire aux élections fédérales ne relèverait plus d'Élections Canada est maintenue dans le projet de loi. Cela n'a aucun sens. Voici ce qu'a déclaré le commissaire aux élections fédérales devant le comité à ce sujet :

En plaçant le commissaire au sein du Bureau du DPP, le projet de loi C-23 réunirait deux fonctions qui sont normalement séparées.

Ce n'est pas une alliance naturelle, au contraire. Lorsqu'il s'agit d'accepter ou de refuser de porter plainte et de porter une affaire devant les tribunaux, il est primordial que le directeur des poursuites pénales maintienne une saine distance avec les enquêteurs et il est crucial que tout le monde sache qu'il l'a maintenue.

Il me semble que c'est une solution à la recherche d'un problème.

Honorables sénateurs, permettez-moi de parler de mes préoccupations à l'égard du projet de loi C-23 et de la façon dont ce dernier propose de gérer les appels automatisés, une fraude électorale qui, comme les preuves l'ont démontré, a effectivement eu lieu. Nous savons que, lors des élections de 2011, l'utilisation des appels automatisés, visant à induire les Canadiens en erreur et à les tromper, était très répandue.

Comme je l'ai déjà déclaré, notamment devant le comité, je n'arrive pas à croire qu'une telle chose ait pu se produire. Quel genre de personne élabore un plan pour priver ses concitoyens de leur droit de vote et les envoyer au mauvais bureau de scrutin? C'est tellement répréhensible. Les célébrations entourant le jour J viennent de prendre fin et je pense à tous les sacrifices que ces hommes et femmes ont consentis pour préserver, défendre et promouvoir nos principes démocratiques. Que faisons-nous? Nous avons la possibilité de régler ce problème, nous savons ce qui s'est passé, nous savons que le système permet aux gens de tricher et nous n'y remédions pas.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Moore : J'attire votre attention sur la décision du juge Mosley, rendue le 23 mai 2013 dans l'affaire dite des appels automatisés. Il a dit ce qui suit :

J'estime qu'on a établi que des appels trompeurs quant à l'emplacement de bureaux de scrutin ont été faits à des électeurs de circonscriptions partout au pays, y compris les circonscriptions ici en cause, et que l'objet de ces appels était de supprimer le vote d'électeurs qui avaient, lors d'appels antérieurs d'identification, mentionné pour qui ils entendaient voter.

Il a également dit ceci :

Je conclus que les demandeurs ont satisfait aux critères permettant d'établir la fraude.

C'est vraiment triste. Il a également fait remarquer que la source la plus probable des renseignements utilisés pour procéder aux appels trompeurs était la base de données du SGIC, tenue et contrôlée par le Parti conservateur du Canada. Quelle honte. Pourtant, la réaction du gouvernement, sous la forme du projet de loi C-23, laisse beaucoup à désirer. Il y a un drôle de contraste dans le projet de loi dont nous sommes saisis. Il n'a jamais été prouvé que le système de répondant a été utilisé pour commettre de la fraude électorale. Le gouvernement a quand même décidé de s'en débarrasser. En revanche, il a été prouvé que les appels automatisés ont été utilisés pour commettre une fraude, mais il ne propose pas grand-chose à cet égard.

D'abord et avant tout, le projet de loi C-23 ne donne pas au commissaire aux élections fédérales le pouvoir d'obliger les gens à témoigner. C'est justement ce pouvoir qui permettrait au commissaire de faire rapidement toute la lumière sur des allégations de fraude électorale.

Le commissaire aux élections fédérales a expliqué l'importance d'un tel pouvoir et ce qui se passe lorsqu'on tente de faire enquête en l'absence de ce pouvoir. Il a dit ceci :

Au cours d'un certain nombre d'enquêtes, dont quelques-unes étaient très graves si l'on se fonde sur les allégations, nous nous sommes heurtés à un mur parce que les gens qui, comme nous le savions, étaient au courant de certaines choses refusaient de nous parler pour toutes sortes de raisons, dont l'une pouvait être la loyauté.

Il voulait dire la loyauté envers un parti politique.

(1540)

Il a poursuivi en disant...

Le sénateur Tkachuk : C'est effrayant.

Le sénateur Moore : C'est effrayant. Le fait que vous ne fassiez rien pour y remédier est très effrayant. En tant que sénateur, vous devriez faire quelque chose. Vous avez prêté serment. Debout devant le bureau, vous avez prêté serment de faire du Canada un pays meilleur.

Il a poursuivi en disant ceci :

J'affirme que, sans ce pouvoir dont disposent l'Ontario, le Québec, trois autres provinces et l'Australie, nous allons continuer de nous heurter à un mur, et les enquêtes continueront d'exiger beaucoup de temps. Malheureusement, certaines enquêtes seront simplement abandonnées, faute de pouvoir prendre connaissance des faits.

On ne nous a donné aucune raison valable pour laquelle ce pouvoir ne serait pas accordé au commissaire pour rétablir la confiance des Canadiens à l'égard de notre système électoral. Il est regrettable que le gouvernement continue de tenir deux discours incompatibles sur cette question. Ceux qui sont chargés de protéger l'intégrité du système ne pourront pas s'acquitter de leur tâche si on ne leur en donne pas les moyens.

Le projet de loi contient une disposition exigeant du CRTC qu'il conserve dans une base de données le texte des enregistrements sonores utilisés pour effectuer des appels automatisés pendant une campagne électorale. Cependant, cette disposition comporte ses faiblesses. Dans la version originale du projet de loi, le CRTC devait conserver la base de données pendant un an, puis la supprimer.

Une telle disposition offre sur un plateau d'argent aux personnes visées par une enquête un moyen de se défiler. Les preuves dont on pourrait avoir besoin risquent de disparaître avant que des accusations puissent être portées. Le gouvernement a fait passer la durée de conservation de la base de données à trois ans. Il aurait été préférable que ce soit plutôt cinq ans, compte tenu de la difficulté que les responsables peuvent avoir à interroger les personnes accusées.

La base de données comporte également une très grave lacune : elle ne permet pas de conserver le numéro de téléphone des personnes ayant reçu un appel automatisé, ce qui est insensé si l'objectif visé était de traduire en justice les coupables de fraude électorale. Je le répète, les personnes accusées de fraude électorale commise au moyen d'appels automatisés trouveront leur ligne de défense directement dans le système. Il leur suffira en effet d'affirmer que le plaignant n'a pas été appelé, puisqu'elles savent pertinemment bien que rien dans la base de données ne permet de prouver le contraire.

En vérité, chers collègues, cette lacune confirme une fois de plus que le gouvernement actuel se contente de modifications de pure forme et qu'il n'a pas vraiment l'intention de réellement améliorer le projet de loi et le processus électoral. Si on cherche véritablement à éviter que les prochaines élections soient de nouveau entachées par ce genre de fraude, il faut supprimer les échappatoires relatives aux appels automatisés. On ne peut pas imposer des amendes plus sévères aux fraudeurs si on n'est pas en mesure de les traduire en justice.

Je rappelle aux honorables sénateurs que les témoins que nous avons entendus dans le cadre de l'étude préalable et les personnes qui ont spontanément émis leur opinion au sujet du projet de loi demandent au gouvernement de retirer celui-ci et de consulter adéquatement la population en vue d'obtenir une mesure législative qui se tient.

Quatre cent soixante-cinq universitaires ont écrit une lettre ouverte adressée au premier ministre pour lui demander de retirer le projet de loi. Je crois que leurs propos méritent d'être répétés :

Nous implorons par conséquent chacun des titulaires de charge publique responsables de respecter les faits, l'expérience et la raison. Le gouvernement devrait carrément retirer ce projet de loi et reprendre, sur de bonnes bases, la révision de la Loi électorale. Nous exhortons les parlementaires consciencieux à travailler à cette fin et, au besoin, à voter contre l'adoption du projet de loi. À défaut de quoi, les sénateurs devraient rester fidèles au rôle qui leur est dévolu au sein de notre ordre constitutionnel — soit celui d'être la voix du second examen objectif — et retourner le projet de loi à la Chambre des communes pour qu'elle y apporte d'autres amendements.

Sheila Fraser, ancienne vérificatrice générale, a dit ceci :

Je crains que l'adoption de cet article nuise au directeur général des élections dans l'exécution de son travail.

À mon avis, il serait très préoccupant qu'un grand nombre de personnes se fassent refuser l'accès aux bureaux de scrutin parce qu'elles n'ont pas les pièces d'identité requises, et je pense que cela nous forcerait à remettre en question la crédibilité de ces élections.

Des projets de loi tels que le projet de loi C-23 ont des répercussions à l'étranger. Mme Norris, de la John F. Kennedy School of Government de l'Université Harvard, nous sert l'avertissement suivant :

Nous devons nous assurer de ne pas porter atteinte à la démocratie canadienne. Nous devons nous assurer de ne pas porter atteinte aux élections canadiennes. Nous devons nous assurer que les pays où l'on ne respecte pas les droits de la personne, et ils sont nombreux dans le monde, ne puissent pas s'inspirer de cet exemple pour dire que si le Canada peut restreindre le moindrement les droits des électeurs, par exemple, alors on peut également le faire au Zimbabwe, au Bélarus, au Kenya ou dans beaucoup d'autres pays qui ne sont pas des démocraties solides, mais qui progressent en suivant l'exemple du Canada.

La majorité des témoins nous ont dit que la fraude électorale au moment du scrutin n'était pas la menace la plus lourde qui pesait sur l'intégrité de notre système électoral. La menace, c'est plutôt la baisse du taux de participation. Pour renforcer notre système, il nous faut plutôt combattre l'apathie chez les Canadiens qui hésitent à aller voter pour choisir leur gouvernement et les dirigeants de leur pays. Plus les Canadiens seront nombreux à s'engager dans notre système, plus leur participation renforcera notre démocratie.

Chers collègues, je crois que nous pouvons apporter d'autres rajustements au projet de loi et l'améliorer dans l'intérêt des Canadiens en amendant certaines des dispositions dont j'ai parlé. Nous devons faire en sorte que notre système électoral fonctionne pour promouvoir l'exercice légal du vote, non priver de leur droit des personnes qui sont normalement habilitées à voter. Nous ne devrions pas sévir contre le vote potentiel, mais le promouvoir. Le droit de vote est garanti par la Charte canadienne des droits et libertés, et ce devrait être le grand principe qui guide notre évaluation du projet de loi.

En tant que sénateurs, il est de notre devoir d'assurer l'intégrité de notre système électoral et de le rendre aussi accessible que possible pour le plus grand bien du Canada et de ses citoyens.

(1550)

Motion d'amendement

L'honorable Wilfred P. Moore : Par conséquent, honorables sénateurs, je propose :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 10, à la page 11, par substitution, aux lignes 28 et 29, de ce qui suit :

« fédérale; il peut fixer et payer leur rémunération et ».

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 46 :

a) à la page 24, par suppression des lignes 42 à 44;

b) à la page 25 :

(i) par substitution, aux lignes 1 à 9, de ce qui suit :

« 46. (1) L'alinéa 143(2)b) de la même loi est »,

(ii) par substitution, à la ligne 15, de ce qui suit :

« (2) Le paragraphe 143(2.1) de la même loi »,

(iii) par substitution, aux lignes 23 à 28, de ce qui suit :

« (3) Le paragraphe 143(3) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

(3) L'électeur peut établir son identité et sa résidence en prêtant »,

(iv) par substitution, à la ligne 39, de ce qui suit :

« b) répond de l'électeur en »;

c) à la page 26,

(i) par substitution, aux lignes 4 à 7, de ce qui suit :

« (iv) il n'a pas répondu d'un autre électeur à l'élection,

(v) aucun autre électeur ne s'est porté répondant pour lui à »,

(ii) par substitution, à la ligne 9, de ce qui suit :

« (4) L'article 143 de la même loi est modifié »,

(iii) par suppression des lignes 16 à 23.

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 47 :

a) à la page 26, par substitution, à la ligne 26, de ce qui suit :

« 143.1 (1) Si une personne décide d'établir son identité et sa »;

b) à la page 27, par substitution, aux lignes 1 et 2, de ce qui suit :

« (2) Si une personne décide de répondre d'un électeur en prêtant serment par ».

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 50 :

a) à la page 28 :

(i) par substitution, aux lignes 7 à 10, de ce qui suit :

« b) soit en établissant son identité et sa résidence »,

(ii) par substitution, à la ligne 26, de ce qui suit :

« (ii) répond de l'électeur en »,

(iii) par substitution, aux lignes 36 à 40, de ce qui suit :

« (D) il n'a pas répondu d'un autre électeur à l'élection,

(E) aucun autre électeur ne s'est porté répondant pour lui à l'élection. »;

b) à la page 29, par suppression des lignes 36 à 39;

c) à la page 30, par suppression des lignes 1 à 4.

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 51, à la page 30 :

a) par substitution, à la ligne 7, de ce qui suit :

« 161.1 (1) Si une personne décide d'établir son identité et sa »;

b) par substitution, aux lignes 16 et 17, de ce qui suit :

« (2) Si une personne décide de répondre d'un électeur en prêtant serment par ».

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié, à l'article 57, à la page 34, par substitution, à la ligne 12, de ce qui suit :

« conformément au paragraphe 169(2) ou ne prête pas ».

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 60, à la page 37, par substitution, à la ligne 13, de ce qui suit :

« ment au paragraphe 169(2). ».

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 93 :

a) à la page 193, par suppression des lignes 23 à 38;

b) à la page 194 :

(i) par substitution, à la ligne 1, de ce qui suit :

« 93. (1) Les alinéas 489(2)d) et e) de la même »,

(ii) par substitution, à la ligne 9, de ce qui suit :

« (2) Le paragraphe 489(3) de la même loi ».

Je propose également :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 46, à la page 25, par substitution, aux lignes 21 et 22, de ce qui suit :

« son auteur. ».

Enfin, je propose :

Que le projet de loi C-23 soit modifié à l'article 108, à la page 227, par adjonction, après la ligne 19, de ce qui suit :

« 510.01 (1) Sur demande ex parte du commissaire ou de son représentant autorisé, un juge d'un tribunal compétent au sens du paragraphe 525(1) peut, lorsqu'il est convaincu d'après une dénonciation faite sous serment ou affirmation solennelle qu'une enquête est menée en application de l'article 510 et qu'une personne détient ou détient vraisemblablement des renseignements pertinents à l'enquête en question, ordonner à cette personne de comparaître, selon ce que prévoit l'ordonnance de sorte que, sous serment ou affirmation solennelle, elle puisse, concernant toute question pertinente à l'enquête, être interrogée par le commissaire ou son représentant autorisé.

(2) Nul n'est dispensé de se conformer à une ordonnance visée au paragraphe (1) au motif que le témoignage qu'on exige de lui peut tendre à l'incriminer ou à l'exposer à quelque procédure ou pénalité, mais un témoignage qu'un individu a rendu conformément à une ordonnance prononcée en application du paragraphe (1) ne peut être utilisé ou admis contre celui-ci dans le cadre de poursuites criminelles intentées contre lui par la suite sauf en ce qui concerne une poursuite prévue à l'article 132 ou 136 du Code criminel.

(3) Le commissaire ou son représentant autorisé peut recevoir les serments et les affirmations solennelles dans le cadre des interrogatoires visés au paragraphe (1). ».

(1600)

Son Honneur le Président intérimaire : Nous débattons de tous ces amendements.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole pour appuyer les amendements proposés par le sénateur Moore. Cependant, avant toute chose, j'aimerais remercier la sénatrice Frum et le sénateur Moore de tout le travail qu'ils ont accompli à l'égard du projet de loi C-23. Je transmets aussi mes remerciements au président et aux membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour tout leur travail dans ce dossier.

Honorables sénateurs, je souscris aux propos du sénateur Moore. J'aimerais revenir sur une question dont j'ai parlé à l'étape de la deuxième lecture. Bien que ce projet de loi ait déjà fait l'objet de moult commentaires, je m'attarderai ici sur des aspects particuliers du recours à un répondant dont il a été question en comité. J'ai déjà longuement expliqué mon point de vue à l'étape de la deuxième lecture, et je veillerai donc à ne pas me répéter.

Notre collègue, le sénateur Moore, a soulevé une question très importante lors de l'examen en comité. Permettez-moi de le citer :

Or, à l'époque, le gouvernement, qui propose aujourd'hui de mettre fin à la preuve d'identité par un répondant, avait justement invoqué cette pratique pour justifier les modifications apportées aux dispositions sur l'identification des électeurs en 2007. Le gouvernement avait alors convenu que la preuve d'identité par un répondant était sans risque. [...]

Selon la version de la loi adoptée en 2007, les électeurs ayant toutes les pièces d'identité requises peuvent se porter garants d'un autre électeur à qui il en manque. [...] Or, les avocats du gouvernement arguent depuis 2009 devant les tribunaux britanno-colombiens que la preuve d'identité par un répondant garantit la constitutionnalité des règles sur l'identification des électeurs adoptées en 2007, une position que le gouvernement continue de défendre devant la Cour suprême du Canada.

Honorables sénateurs, le gouvernement utilise la preuve d'identité par un répondant comme argument pour défendre les règles en matière d'identification des électeurs adoptées en 2007. Celles-ci demeureront-elles valides malgré les changements majeurs apportés au système de recours au répondant?

J'aimerais présenter un scénario dont le sénateur Baker a parlé au comité :

Le directeur général des élections a fourni quelques exemples : des parents qui viennent d'une autre région du pays pour visiter leurs enfants et qui souhaiteraient voter; ou un couple qui reçoit toute l'information au nom d'un seul des deux conjoints, ce qui fait que l'autre n'a pas deux pièces d'identité.

Le sénateur Baker soulève là des situations concrètes qui touchent bien des Canadiens. En fait, pour des raisons indépendantes de leur volonté, beaucoup de Canadiens n'auront aucune pièce d'identité, ou n'en auront qu'une seule, lorsqu'ils se présenteront au bureau de scrutin.

Le sénateur Joyal a lui aussi présenté un exemple fort pertinent en comité, qui illustre bien comment certains individus demeureront privés de leur droit électoral en raison de ce projet de loi. Je me permets de citer les propos du sénateur Joyal :

J'ai un exemple qui date du temps où je siégeais à l'autre endroit. Il s'agit d'un centre de soins prolongés pour personnes âgées. Vingt-six personnes y vivaient, alitées en permanence pour la plupart et sans parent. À chaque étage du centre se trouvait une infirmière responsable. Celle-ci n'était pas autorisée à répondre de l'identité des cinq ou six patients qui vivaient dans la même salle de ce centre de soins prolongés.

Selon moi, dans de pareils cas, on devrait donner l'autorisation. En effet, l'infirmière devait choisir à quel patient, parmi les six sous sa charge, elle allait servir de répondant et lui permettre ainsi de voter. Pour certaines personnes dans ce genre de situation, voter représente le seul lien avec le monde extérieur.

Honorables sénateurs, voter semble déjà une entreprise difficile. Or, ce projet de loi rend le processus encore plus difficile. Est-ce le genre de réforme démocratique que nous voulons?

J'aimerais soulever une dernière question, qui me préoccupe beaucoup. D'après un récent sondage Ipsos, 87 p. 100 des Canadiens croient qu'il est raisonnable d'exiger des électeurs qu'ils prouvent leur identité et leur adresse avant de pouvoir voter. Honorables sénateurs, je conviens que 87 p. 100 des Canadiens jugent cette mesure raisonnable.

Je suis sûre que les députés de l'autre endroit ont tenu compte de cette statistique lorsqu'ils ont présenté le projet de loi. L'autre endroit peut bien s'occuper des 87 p. 100, mais, honorables sénateurs, nous sommes là pour protéger les droits des 13 p. 100 qu'il reste.

Des voix : Bravo!

(1610)

La sénatrice Jaffer : Pendant l'étude du projet de loi C-23, notre collègue, le sénateur Plett, a dit ceci :

Manifestement, l'argument principal, ou le plus grand reproche, de l'opposition porte sur le recours aux répondants et sur la crainte que la mesure législative empêche cinq ou six personnes de voter.

Honorables sénateurs, j'estime que notre rôle en tant que sénateurs est justement de protéger ces cinq ou six personnes qui ne pourront pas voter à cause de cette mesure législative. Voilà pourquoi nous siégeons au Sénat. C'est pour cette raison que chacun d'entre nous a été nommé au Sénat du Canada.

Honorables sénateurs, j'ai été élevée en Ouganda, et je dois vous dire que, lorsque nous avons perdu notre droit de vote parce que nous étions des Ougandais d'origine asiatique, nous avons tout perdu. Lorsque nous sommes venus au Canada et que nous avons pu voter pour la première fois, ce fut le plus beau cadeau que les Canadiens auraient pu nous faire. Jamais les membres de ma famille n'avaient été aussi fiers. Nous avons tous pu voter. À l'époque, nous n'avions même pas d'adresse tellement nous étions fraîchement débarqués, mais nous avions le droit de voter. C'est ce qui fait la beauté du Canada, et c'est ce que le Sénat doit protéger.

Motion d'amendement

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Par conséquent, honorables sénateurs, afin que tous les Canadiens aient le droit et la possibilité de voter, je propose que le projet de loi ne soit pas lu pour la troisième fois maintenant, mais qu'il soit amendé...

Son Honneur le Président intérimaire : Avant que la sénatrice Jaffer commence à lire ses amendements, je crois qu'il convient de demander aux sénateurs s'ils sont d'accord pour que tous les amendements, ceux du sénateur Moore et ceux de la sénatrice Jaffer, soient regroupés, puis étudiés de concert. Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président intérimaire : Ainsi, nous pourrons débattre des propositions d'amendement du sénateur Moore et de la sénatrice Jaffer. Nous sommes d'accord.

La sénatrice Jaffer : Je propose :

Que le projet de loi C-23 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié :

a) à l'article 46, à la page 26 :

(i) par substitution, aux lignes 4 à 6, de ce qui suit :

« (iv) sa propre résidence n'a pas fait l'objet »,

(ii) par suppression des lignes 18 et 19;

b) à l'article 47, à la page 27, par substitution, à la ligne 7, de ce qui suit :

« contrevient aux paragraphes 143(6) ou »;

c) à l'article 50 :

(i) à la page 28, par substitution, aux lignes 36 à 38, de ce qui suit :

« (D) sa propre résidence n'a pas fait »,

(ii) à la page 29, par suppression des lignes 38 et 39;

d) à l'article 51, à la page 30, par substitution, à la ligne 22, de ce qui suit :

« contrevient aux paragraphes 161(7) ou »;

e) à l'article 54 :

(i) à la page 32, par substitution, aux lignes 11 à 13, de ce qui suit :

« (D) sa propre résidence n'a pas fait »,

(ii) à la page 33, par suppression des lignes 17 et 18;

f) à l'article 55, à la page 33, par substitution, à la ligne 40, de ce qui suit :

« contrevient aux paragraphes 169(6) ou »;

g) à l'article 60, à la page 37, par substitution, aux lignes 24 à 26, de ce qui suit :

« (3.1) Il est interdit à l'électeur pour lequel un »;

h) à l'article 93 :

(i) à la page 193 :

(A) par suppression des lignes 25 à 27,

(B) par suppression des lignes 33 à 35,

(ii) à la page 194, par substitution, aux lignes 3 à 7, de ce qui suit :

« d) quiconque contrevient au paragraphe 169(6) (attester d'une résidence alors que sa »;

i) à l'article 94.1, à la page 194, par substitution, aux lignes 27 à 32, de ce qui suit :

« a) contrevient au paragraphe 237.1(3.1) (attester d'une résidence alors que sa propre résidence est attestée);

b) contrevient à l'un ou l'autre des alinéas ».

Merci.

Son Honneur le Président intérimaire : Nous reprenons le débat sur les amendements groupés.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

Fixation de délai—Préavis de motion

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je désire informer le Sénat que je n'ai pas pu en arriver à une entente avec la leader adjointe de l'opposition concernant la fixation de délai pour le projet de loi C-23. Par conséquent, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'article 7-2 du Règlement, pas plus de six heures de délibérations additionnelles soient attribuées à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d'autres lois et modifiant certaines lois en conséquence.

(1620)

La Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon
La Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Daniel Lang propose que le projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est un honneur pour moi de prendre la parole aujourd'hui à titre tant de sénateur du Yukon que de parrain du projet de loi S-6, Loi sur l'amélioration de la réglementation au Yukon et au Nunavut. Le projet de loi propose de modifier deux lois existantes, la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon, qui régit le cadre d'évaluation environnementale du Yukon, et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut, qui gère et réglemente l'utilisation des eaux au Nunavut.

Depuis 2006, le gouvernement du Canada a délibérément fait du développement du Nord une priorité, reconnaissant ainsi l'importance qu'il y a à exercer la souveraineté du Canada et à promouvoir un développement économique responsable. Pour atteindre cet objectif prioritaire, le gouvernement a accordé des pouvoirs aux gouvernements territoriaux en leur transférant des responsabilités et il a également collaboré avec les gouvernements des Premières Nations.

Le projet de loi S-6 s'ajoute à l'engagement pris par le gouvernement fédéral d'habiliter les gouvernements territoriaux à prendre des décisions concernant leurs propres terres et ressources. Le projet de loi modernise et renforce le processus réglementaire régissant les projets de mise en valeur de ressources et de développement communautaire dans le Nord. Ainsi, le processus réglementaire sera plus rigoureux, efficace et prévisible, ce qui favorisera l'investissement et le développement économique responsable du Nord, tout en assurant la protection de l'environnement.

Je voudrais cependant souligner que le projet de loi non seulement profitera au secteur des ressources, mais aura aussi des avantages pratiques réels pour les habitants et les collectivités du Nord ainsi que pour tout particulier et toute entreprise ayant un projet pouvant avoir des effets sur l'environnement. Le gouvernement du Canada a pris des mesures décisives pour rationaliser le processus d'examen réglementaire partout dans le pays en remédiant à la complexité et aux chevauchements qui ont indûment retardé le développement du Nord et causé de l'incertitude. Je veux aussi insister sur le fait que le projet de loi renforcera encore plus notre système réglementaire actuel en mettant en place des lignes directrices claires sur ce qui est attendu des promoteurs et des différents ordres de gouvernement.

Dans bien des cas, certaines organisations opposées au développement n'ont fait que retarder, retarder et retarder encore la mise en œuvre, ce qui a fait piétiner des projets dignes d'intérêt, comme en témoigne la stagnation du projet de gazoduc du Mackenzie. Chers collègues, le projet de loi prévoit des délais fermes et obligera tous les participants à présenter leurs arguments à temps pour que des décisions puissent être prises au profit des habitants du Nord.

Il importe de noter que le projet de loi S-6 répond à l'obligation de consulter les Premières Nations. Les consultations ont commencé en avril 2008, au cours de l'examen quinquennal de la loi exigé par l'Accord-cadre définitif du Yukon. Des représentants du gouvernement du Yukon, des gouvernements des Premières Nations du Yukon et du Conseil des Premières Nations du Yukon ont assisté aux séances de consultation. Depuis, les consultations se sont poursuivies jusqu'en mai 2014 afin de mettre la dernière main aux modifications présentées dans le projet de loi de concert avec les autres intéressés, comme le secteur privé.

Je rappelle à tous les sénateurs que notre régime réglementaire est cogéré par les gouvernements du Canada, du Yukon et des Premières Nations. Cette gestion est assurée par un office composé de membres localement choisis pour représenter les trois parties mentionnées.

Ainsi, non seulement le projet de loi S-6 répond à l'obligation de consulter, mais les représentants des Premières Nations participent directement au processus décisionnel à titre de membres de l'office. Un membre d'une Première Nation a en fait été président de l'Office d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon.

Chers collègues, permettez-moi de prendre quelques instants pour décrire brièvement les effets positifs du projet de loi S-6 sur la mise en valeur des ressources et le développement communautaire.

Au Yukon, le transfert des responsabilités au territoire avance depuis plus de 10 ans, parallèlement à l'Accord-cadre définitif du Yukon. Le résultat de ce transfert de pouvoirs quasi provinciaux nous a permis de développer notre économie tout en nous acquittant de nos responsabilités environnementales. Toutefois, la législation actuelle doit être améliorée pour assurer une meilleure surveillance de nos ressources et du développement communautaire. Le projet de loi S-6 propose de prolonger le mandat des membres de l'office afin de maintenir le quorum et la continuité au cours des processus de présélection et d'examen.

Par le passé, les projets miniers qui avaient déjà été approuvés et avaient fait l'objet de permis devaient être soumis à une nouvelle évaluation environnementale en cas de changements mineurs, ce qui avait créé un climat d'investissement incertain. À l'avenir, on ne procédera à une nouvelle évaluation environnementale que si un projet a été très sensiblement modifié.

Le projet de loi établit aussi des délais totaux pour les décisions devant être prises par l'office, tout en permettant au ministre fédéral de demander des prolongations au besoin. Le gouvernement fédéral est également déterminé à travailler avec tous les intervenants en vue de l'élaboration de mesures législatives sur le recouvrement des coûts.

Contrairement aux habitants des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, la population du Yukon exerce depuis plus de 10 ans un contrôle serré sur ses propres ressources, ce qui a eu de profondes répercussions. Le secteur privé et les promoteurs savent que les décisions sont prises localement, ce qui a formé une bonne base pour l'édification d'une économie durable au Yukon. La certitude et l'accès local ont créé un climat favorable à l'investissement.

De ce fait, le taux de chômage du territoire se maintient bien au-dessous de la moyenne nationale et le PIB croît rapidement par suite de l'augmentation des investissements du secteur privé, surtout dans le secteur minier.

Le système réglementaire du Yukon a été un modèle pour le reste du pays. Ces dernières années, nous avons reconnu la nécessité d'évoluer et de maintenir un système réglementaire compétitif et prévisible à l'échelle internationale. C'est la raison pour laquelle nous allons de l'avant avec ce projet de loi.

Les modifications législatives qui vous sont soumises se répartissent entre quatre grands thèmes : premièrement, rendre le processus d'examen des grands projets plus prévisible et opportun; deuxièmement, réduire le double emploi dans le processus d'examen; troisièmement, renforcer la protection de l'environnement; et quatrièmement, intensifier la consultation avec les peuples autochtones.

Je voudrais maintenant parler de la seconde partie du projet de loi concernant la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut, qui assure la cohérence des responsabilités réglementaires partout dans le Nord.

Les consultations sur les modifications proposées ont commencé en 2012 par un exposé sur l'expansion du Plan d'action visant à améliorer les régimes de réglementation dans le Nord. À la demande de la Nunavut Tunngavik Incorporated, ou NTI, des représentants des gouvernements du Canada et du Nunavut ainsi que de l'Office des eaux du Nunavut ont formé un groupe de travail chargé d'élaborer des modifications aux dispositions relatives aux eaux du Nunavut. La NTI et les organisations régionales inuites — l'Association inuite du Kitikmeot, l'Association inuite du Kivalliq et l'Association inuite du Qikiqtani — ont également été invitées à participer aux activités du groupe de travail. Le gouvernement du Canada a en outre déployé d'autres efforts pour inciter les partenaires inuits à prendre part à l'élaboration de ces mesures législatives.

Le groupe de travail a tenu une série de réunions fructueuses au début de l'année. Les modifications suivantes de la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut sont proposées : augmenter les amendes imposées à ceux qui donnent des informations fausses ou trompeuses ou qui ne se conforment pas aux instructions d'un inspecteur; établir des sanctions administratives pécuniaires; réviser la durée des permis délivrés par l'Office des eaux du Nunavut; conférer au ministre fédéral le pouvoir législatif de conclure des ententes relatives aux garanties avec les Inuits, les demandeurs et l'Office des eaux du Nunavut, en vue de régler le problème de longue date du double cautionnement; fixer des délais totaux fermes pour les décisions concernant les permis d'utilisation des eaux; et soumettre certains processus d'examen des permis d'utilisation des eaux au recouvrement des coûts.

Honorables sénateurs, je suis sûr que beaucoup d'entre vous reconnaîtront les points communs entre les changements réglementaires proposés dans le projet de loi S-6 et le projet de loi C-15, Loi sur le transfert de responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest, que vous avez examiné plus tôt cette année et qui a déjà reçu la sanction royale. Plusieurs des modifications proposées à la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut portent sur les permis d'utilisation des eaux, qui faisaient également partie du projet de loi C-15.

(1630)

Ces améliorations font partie du vaste et ambitieux programme législatif du gouvernement du Canada visant à améliorer et à uniformiser la réforme de la réglementation dans le Nord. Le Plan d'action pour le Nord modernise et améliore les cadres réglementaires des projets d'exploitation des ressources et de développement communautaire dans le Nord.

Dans le cadre de cette initiative, le deux Chambres du Parlement ont adopté la première série d'améliorations réglementaires en juin 2013 dans le projet de loi C-47, Loi sur l'emploi et la croissance dans le Nord. Il comprenait la Loi sur l'aménagement du territoire et l'évaluation des projets au Nunavut et la Loi sur l'Office des droits de surface des Territoires du Nord-Ouest, qui étaient attendues depuis longtemps, ainsi que des mises à jour opportunes à la Loi sur l'Office des droits de surface du Yukon.

Le projet de loi S-6 constitue l'étape finale du volet législatif du Plan d'action pour le Nord du gouvernement fédéral visant à améliorer les régimes de réglementation dans le Nord, à les renforcer, à les rendre plus efficaces et plus prévisibles, tout en assurant une gérance de l'environnement saine et globale, qui favorisera à son tour l'investissement et le développement économique.

Tous les Canadiens bénéficient d'une exploitation responsable des ressources dans le Nord, ainsi que des emplois, de la croissance et de la prospérité qui découlent des régimes réglementaires modernes et efficaces. Pour les habitants du Nord et tous les Canadiens, les projets d'exploitation des ressources peuvent générer des retombées importantes sous forme d'emplois, de possibilités de formation et de revenus.

J'exhorte tous les sénateurs à se joindre à moi pour appuyer le projet de loi S-6 et la vision du gouvernement pour un Nord plus fort et plus prospère. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom du sénateur Mitchell, le débat est ajourné.)

Le Budget des dépenses de 2014-2015

Le Budget principal des dépenses—Adoption du neuvième rapport du Comité des finances nationales

Le Sénat passe à l'étude du neuvième rapport (deuxième intérimaire) du Comité sénatorial permanent des finances nationales (Budget principal des dépenses 2014-2015), déposé au Sénat le 29 mai 2014.

L'honorable Joseph A. Day propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, il s'agit du deuxième rapport provisoire sur le Budget principal des dépenses. Les sénateurs le savent, ce document budgétaire est plutôt volumineux, et le Comité des finances l'étudie tout au long de l'année. C'est notre deuxième rapport provisoire, et il constitue la base d'un projet de loi de crédits qui viendra dans les prochains jours. Ce sont les crédits prévus pour le reste de l'exercice, et nous parlons habituellement des crédits « principaux ».

Le premier projet de loi de crédits que nous avons étudié pour l'exercice en cours prévoyait des crédits dits « provisoires », lorsque nous avons reçu le Budget principal des dépenses, en mars. Nos usages ont évolué de sorte que nous prévoyons des crédits provisoires pour une période d'environ trois mois. Les ministères qui n'ont pas des dépenses uniformes dans le temps, mais des dépenses plus importantes en début d'exercice reçoivent des crédits pour plus de trois mois, mais le plus souvent, chaque ministère reçoit des crédits pour trois mois et ensuite, vers la fin de juin, ce qui est très bientôt, nous recevrons le projet de loi de crédits principaux. Ce projet de loi pourvoit aux besoins du reste de l'exercice, des neuf derniers mois.

Nous autorisons des crédits provisoires d'environ 24,8 milliards de dollars, et nous allons maintenant étudier le solde, ce qui nous amènera à autoriser pour le gouvernement des crédits votés de quelque 86,2 milliards de dollars. Nous devrions anticiper ce projet de loi et, lorsqu'il arrivera, nous vérifierons les chiffres par rapport à l'annexe du Budget principal des dépenses.

Je vous rappelle, honorables sénateurs, que certaines dépenses sont prévues dans des lois. Les lois habilitantes prévoient parfois des fonds, et ce n'est pas là-dessus que nous votons chaque année. Ces dépenses sont déjà prévues et sont qualifiées de « législatives ». Puis, il y a d'autres dépenses et d'autres crédits qui nous sont présentés chaque année. C'est ce que nous examinons ici dans les affectations des projets de loi de crédits.

Quant aux ministères fédéraux que nous avons accueillis pour poursuivre notre étude des raisons que le gouvernement peut avoir de demander cet argent, nous en avons reçu huit, ainsi que trois organisations non gouvernementales. Je vais vous expliquer brièvement ce qu'ils nous ont appris. Je vous invite à prendre connaissance de notre rapport, qui donne beaucoup plus de détails que je ne peux le faire, comte tenu du peu de temps que j'ai.

Le premier ministère que nous avons rencontré est celui des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Il s'agit du regroupement du MAECI et de l'ACDI, c'est-à-dire le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, et l'Agence canadienne de développement international, qui ont été réunis. Nous souhaitions vivement savoir comment la fusion avait fonctionné. Le regrettable acronyme est une chose à laquelle il faudra s'habituer. En effet, le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement emploie comme acronyme MAECD. L'entité a un budget total de 5,3 milliards de dollars pour les deux éléments. Le ministère a également demandé 120 millions de dollars au titre d'un fonds de crise à décaissement rapide. Il s'agit d'un mécanisme de décaissement rapide qui aide le ministère à organiser sa réponse à des crises et à des catastrophes internationales.

Au Comité des finances, nous surveillons de près ces fonds spéciaux particuliers, comme je les ai déjà appelés par le passé. Il est très important de les examiner de près, car l'approbation parlementaire est perdue, une fois que nous avons donné l'approbation générale au début. Il est donc très important de garder un œil sur ces fonds spéciaux.

Les sénateurs se rappelleront que nous avons discuté de l'accord sur l'aide en cas de catastrophe entre le gouvernement fédéral et les provinces pour les catastrophes naturelles. Il prévoit que le gouvernement central rembourse jusqu'à concurrence de 90 p. 100 les coûts subis par les provinces, mais c'est un remboursement que nous avons la possibilité d'approuver chaque année. La réserve pour ce fonds particulier est de 400 millions de dollars, il est international, et on nous demande d'approuver un montant de 120 millions de dollars pour ce mécanisme de décaissement rapide.

Nous allons vouloir surveiller ce fonds. Les fonctionnaires ont expliqué que, avant la fusion, chaque ministère avait un budget distinct. L'ACDI avait 100 millions de dollars dans ce fonds à décaissement rapide, alors que les Affaires étrangères avaient 20 millions de dollars. Les deux montants sont maintenant réunis.

Honorables sénateurs, je suis un peu préoccupé par la Défense nationale. Nous allons surveiller la situation. Je vais simplement vous dire que le ministère a conçu une nouvelle architecture d'alignement des programmes. Nous ne pouvons pas comparer les dépenses d'exercices antérieurs et celles de l'exercice en cours et des prochains. Il faut simplement partir d'ici pour pouvoir faire des comparaisons. Nous connaissons le montant global. Celui que le ministère demande cette année est de 18,7 milliards de dollars. Mais l'architecture des programmes n'est pas celle des crédits classiques, où nous pouvions distinguer les opérations, les subventions et contributions, et les dépenses en capital. C'est le genre d'architecture type que nous avons suivi au fil des ans. Vous pouvez voir qu'une plus grande partie du capital a été utilisée cette année, comparativement aux années précédentes.

(1640)

Les termes employés en vertu de cette nouvelle structure sont différents. Je vais vous donner quelques exemples. Dans le cas de la Défense nationale, le ministère a cinq nouvelles catégories. Un montant de 1,36 milliard de dollars est inscrit à la rubrique « Opérations de soutien et de combat de la Défense ». Ensuite, nous avons « Services de la Défense et contributions au gouvernement ». Il semble s'agir davantage d'activités nationales liées à la Défense et le montant inscrit est de 408 milliards de dollars. Il y a cinq catégories. Nous allons les examiner, mais pendant un certain temps il sera difficile d'établir des comparaisons entre les années.

Il y a une augmentation de 1,2 milliard de dollars des dépenses en capital. Comme nous l'avons vu dans le passé, le fait que le Parlement vote afin d'approuver une dépense en capital et le fait que l'exécutif autorise la dépense liée sont deux choses différentes. Nous verrons quel capital la Défense nationale est en mesure de dépenser, et quel matériel elle peut acquérir au cours de l'année, mais au moins nous établissons une base à cette fin.

Un point qui a été soulevé et que je trouve intéressant est le fait qu'on a prévu un taux de rajustement. Ce taux était auparavant de 1,5 p. 100 et il est maintenant de 2 p. 100 dans le budget de base. Il ne s'agit pas d'une budgétisation à base zéro pour la Défense nationale. Le ministère dispose d'une base de départ et celle-ci est augmentée de 347 millions de dollars cette année en raison du taux de rajustement. Cette structure a été créée afin de garantir une certaine prévisibilité et un financement à long terme.

Nous nous sommes aussi penchés sur le budget de Transports Canada, qui totalise 1,7 milliard de dollars. Il s'agit d'une augmentation de 143 millions de dollars par rapport à l'année précédente. Suite à des recommandations formulées par le vérificateur général, un montant de 357 millions de dollars a été alloué à la sécurité et à la sûreté des voyageurs. Cette somme inclut l'amélioration de la surveillance en matière de sécurité ferroviaire ainsi que les ressources visant à améliorer le transport des matières dangereuses. Ces mesures découlent pratiquement toutes de la tragédie survenue à Lac-Mégantic l'été dernier.

Citoyenneté et Immigration Canada a assumé le contrôle de Passeport Canada et il existe un fonds renouvelable ici qui comporte un excédent important. Il en est ainsi en raison des frais exigés pour la délivrance des passeports. Un certain montant a été transféré aux recettes générales ou au Trésor par suite de l'accumulation de cet excédent.

Une somme de 45,5 millions de dollars est demandée afin d'aider le ministère à traiter la demande accrue liée au programme de citoyenneté et au programme des résidents temporaires. Nous avons demandé si le ministère tente de réduire à environ un an la période d'attente entre la présentation d'une demande et l'obtention d'une décision. À l'heure actuelle, cette période se situe quelque part entre 24 mois dans le cas d'une demande courante de citoyenneté — 24 mois depuis la présentation de la demande jusqu'à ce qu'une décision soit rendue — et 36 mois dans le cas d'une demande non courante. Dans le cas de tout dossier le moindrement compliqué, il faut compter au minimum trois ans avant que la personne qui souhaite venir au Canada en tant que citoyen sache si sa demande est acceptée ou non.

Pour ce qui est de Patrimoine canadien, le gros montant demandé se chiffre à 72,8 millions de dollars, principalement en raison d'un versement unique accordé aux Jeux panaméricains et aux Jeux parapanaméricains, qui se tiendront à Toronto en 2015. La plus grande partie du financement sera consacrée à des infrastructures dans la région de Toronto. On ne s'attend pas à ce que des fonds supplémentaires soient nécessaires. C'est ce qu'ils disent à ce stade-ci, mais il reste trois ans. Par conséquent, nous verrons bien s'ils présentent d'autres demandes.

Le ministère reçoit aussi des fonds destinés à plusieurs musées. Nous savons qu'il est responsable de musées. Toutefois, le financement du Musée canadien de l'immigration au Quai 21 a été réduit en raison d'un changement dans le mode de financement, ainsi que de la fusion et de la rénovation d'installations du musée.

Le budget total de Santé Canada s'élève à 3,7 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 356 millions de dollars par rapport à l'an dernier. Soixante et onze pour cent du budget total de Santé Canada est consacré aux services fournis aux Premières Nations dans les collectivités inuites. C'est une très forte proportion du budget du ministère qui est consacrée aux dépenses en santé de cette collectivité.

Industrie Canada prévoit dépenser 1,1 milliard de dollars. Il s'agit en fait d'une baisse, ce qui est toujours bien. Selon les représentants du ministère, la diminution est due au financement temporaire de divers projets qui sont sur le point d'être achevés et les montants ne seront pas demandés de nouveau. La diminution n'est donc pas attribuable à une baisse des activités.

Le comité s'est beaucoup intéressé aux subventions et aux contributions d'Industrie Canada. Les membres voulaient savoir si les subventions et les contributions étaient distribuées sur une base régionale. Les représentants nous ont dit que même si le ministère recueille des renseignements régionaux, il ne cherche pas à atteindre des objectifs quant à la distribution régionale, parce que les programmes sont pancanadiens. Ceux d'entre nous qui représentent de petites provinces n'ont pas été rassurés par cette réponse. Ces programmes sont évalués tous les cinq ans comme le prévoit la Loi fédérale sur la responsabilité, ce qui permet d'évaluer leur degré de succès.

Travaux publics et Services gouvernementaux Canada demande environ 2,6 milliards de dollars, ce qui correspond à une diminution de 6 p. 100. Là encore, cette diminution est en grande partie attribuable au fait que des programmes sont sur le point de prendre fin. Il s'agit de programmes qui étaient en place mais qui n'ont pas été renouvelés. Les économies réalisées grâce à une plus grande efficacité sont l'autre raison qui explique la diminution.

Le comité a posé plusieurs questions au sujet de la Société immobilière du Canada. Cet organisme prend les biens fonciers qui sont jugés excédentaires compte tenu des besoins du gouvernement, mais il ne s'occupe que des terrains ayant une valeur stratégique, ce qui signifie qu'il peut accroître leur valeur et en tirer des revenus supplémentaires. Lorsque cela se produit, la Société immobilière du Canada est responsable du développement du bien foncier et de l'augmentation de sa valeur.

Certains points n'ont pas été réglés. Honorables sénateurs, vous allez voir dans notre rapport plusieurs endroits où nous disons que le ministère ne nous a pas fourni de renseignements. Il nous a promis qu'il le ferait, mais nous n'avons encore rien reçu. Tous les membres du comité sont très préoccupés par cette situation. Nous assurons un suivi et nous dressons une liste de questions en suspens de façon régulière. Nous n'avons pas encore eu à le faire, mais nous pourrions demander aux représentants du ministère de revenir et d'expliquer pourquoi ils n'ont pas répondu à ces questions, comme ils avaient promis de le faire.

Il arrive que des témoins ne puissent pas répondre au comité, parce qu'ils n'ont pas l'information nécessaire avec eux. Nous recevons parfois les réponses sans tarder. Dans d'autres cas, on dirait qu'il faut les harceler...

Son Honneur le Président intérimaire : Sénateur Day, demandez-vous plus de temps?

Le sénateur Day : Pourrais-je avoir quelques minutes pour terminer?

Son Honneur le Président intérimaire : Le sénateur Day dispose de cinq minutes de plus.

Le sénateur Day : Merci.

Je vous signale ce point parce que je veux que vous sachiez que nous assurons un suivi à ce sujet. Nous avons annexé à notre rapport une page sur le suivi de questions en suspens liées au rapport intérimaire sur le Budget principal des dépenses. Notre premier rapport intérimaire a été présenté en mars. Nous avons maintenant les réponses à toutes les questions en suspens qui se trouvaient dans le rapport précédent.

Lorsque vous lirez notre rapport vous verrez les préoccupations que nous avons formulées et concernant lesquelles on a promis de nous fournir des réponses que nous attendons toujours. Nous allons assurer un suivi et nous allons vous faire rapport à ce sujet. Nous voulions vous en assurer.

(1650)

Honorables sénateurs, c'est la raison d'être des crédits principaux. Nous avons instauré une tradition parce que le projet de loi de crédits, le projet de loi des subsides est présenté tardivement, à la fin de mars, à la fin de juin ou à la fin de l'exercice financier en décembre. Étant donné que nous sommes saisis de ces projets de loi de la Chambre des communes aussi tard, nous avons mis au point une pratique différente.

C'est en quelque sorte une étude préalable. Nous préparons un rapport à la lumière de notre étude du Budget principal des dépenses, que nous déposons par la suite pour que vous puissiez avoir une idée de ce que le budget contient. Ainsi, lorsque le projet de loi arrive, il n'est pas renvoyé à notre comité. Nous passons directement de la deuxième à la troisième lecture, en nous fondant sur ce rapport.

Nous savons que les deux projets de loi de crédits arriveront sous peu. Il y aura également le Budget supplémentaire des dépenses (A). Je prendrai la parole sur ce rapport probablement demain. Nous serons saisis du projet de loi de crédits du Budget principal des dépenses dans les prochains jours, qui fera l'objet d'une deuxième lecture et passera directement à l'étape de la troisième lecture. Je vous le rappellerai au moment d'étudier le rapport sur le Budget principal des dépenses. Il pourrait vous être utile de jeter un œil au rapport avant que le projet de loi arrive.

Merci, honorables sénateurs.

Son Honneur le Président intérimaire : Sénateur Day, vous proposez que le rapport soit adopté. Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

La Loi électorale du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Dawson, appuyée par l'honorable sénateur Robichaud, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-215, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (dépenses électorales).

L'honorable Irving Gerstein : Honorables sénateurs, c'est pour moi un privilège d'intervenir aujourd'hui au sujet du projet de loi S-215, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (dépenses électorales).

J'ai remarqué avec grand intérêt que, le 10 avril, dans un discours fort bien préparé qu'il a prononcé à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi, le sénateur Dawson avait signalé que, comme c'était la troisième fois qu'il présentait cette mesure législative, il se pouvait qu'il se répète à l'occasion.

Sénateur Dawson, je vous assure qu'il n'est pas nécessaire que vous présentiez des excuses au Sénat, car, comme c'est la deuxième fois que je vous réponds sur ce même projet de loi, je vais aussi, très certainement, me répéter à l'occasion.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Gerstein : Tout d'abord, chers collègues, je tiens à dire que j'éprouve un très grand respect et une vive admiration pour le sénateur Dawson. À titre de stratège et d'organisateur de longue date de son parti et d'ancien député de la circonscription de Louis-Hébert à l'autre endroit, le sénateur Dawson apporte un point de vue particulier aux questions abordées dans ce projet de loi.

Par ailleurs, je crois pouvoir apporter au débat un point de vue qui est quelque peu différent du sien. Lorsque je suis arrivé au Sénat, je comptais plus de quatre décennies d'expérience à titre de collecteur de fonds bénévole du Parti conservateur, un rôle dont je suis très fier.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Gerstein : Comme vous le savez tous, le travail qui consiste à amasser des fonds pour un parti politique est à la fois nécessaire et honorable, car les partis politiques ont besoin d'argent pour fonctionner.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Gerstein : Je me sens fort privilégié de respecter la grande tradition et d'emboîter le pas à d'autres éminents collecteurs de fonds du parti qui ont été nommés au Sénat et au nombre desquels je compte des amis, notamment l'ancien sénateur conservateur David Angus, le sénateur libéral Leo Kolber et les regrettés sénateurs John Aird et Jack Godfrey.

Je me rappellerai toujours que le sénateur Godfrey et moi téléphonions ensemble à de grandes sociétés canadiennes pour leur demander instamment d'appuyer le régime des partis sur lequel s'appuie la démocratie parlementaire du Canada. Ensemble, nous faisions grimper les enchères aussi haut que possible, tout en sachant, et en informant le donateur, que 60 p. 100 du montant irait au parti au pouvoir et 40 p. 100 au parti de l'opposition.

Honorables sénateurs, c'était il y a très longtemps, et je suis sûr que vous vous demandez peut-être ce que les souvenirs d'un vieux collecteur de fonds comme moi ont à voir avec le projet de loi S-215. La réponse est simple : cette mesure porte fondamentalement sur les activités de financement.

En gros, le projet de loi S-215 vise à exiger des partis qu'ils incluent dans leurs dépenses électorales les dépenses qu'ils ont engagées au cours des trois mois précédant la période électorale, sous réserve des limites s'appliquant à chaque parti. Même si le sénateur Dawson a insisté sur les dépenses de publicité dans ses remarques, il convient de noter, honorables sénateurs, que le projet de loi S-215 s'appliquerait en fait à un très large éventail d'activités, car il inclut toutes les dépenses engagées qui : « [...] servent à favoriser ou à contrecarrer directement un parti enregistré, son chef ou un candidat pendant la période de trois mois précédant une période électorale ».

Ce libellé est exactement le même que celui du paragraphe 407(1) de la Loi électorale du Canada pour définir l'expression « dépenses électorales ». Par conséquent, le projet de loi s'appliquerait non seulement à la publicité, mais aussi à presque toutes les activités financées par un parti.

Honorables sénateurs, je tiens à être clair : le projet de loi S-215 avantage les partis de l'opposition en empêchant le Parti conservateur d'utiliser son argent comme bon lui semble entre les élections. Chers collègues, c'est là l'objectif du projet de loi.

Le projet de loi S-215 est tout simplement injuste. Il vise à punir la réussite et à récompenser l'échec.

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur Gerstein : Mais ce n'est pas la première fois que les sénateurs d'en face sont en faveur d'une règle de financement électoral injuste. Je fais bien entendu référence à la subvention par vote introduite par l'entremise du projet de loi C-24 du gouvernement libéral en 2003 ou, comme je l'appelais à l'époque, « la loi visant à protéger les députés déjà en place ».

Honorables sénateurs, la formule de la subvention par vote était fondamentalement viciée. Chaque année, tous les partis politiques fédéraux enregistrés recevaient une subvention en fonction du nombre de votes qu'ils avaient obtenus lors des dernières élections générales. Le caractère injuste de ce système était évident. Il allait trop loin en définissant l'avenir financier d'un parti en fonction de son passé. Financer la prochaine campagne d'un parti en fonction des résultats des dernières élections, c'est comme obtenir une hypothèque sur sa prochaine maison en se basant sur la valeur de son ancienne maison.

(1700)

En appui au projet de loi S-215, le sénateur Dawson a tenu les propos suivants :

Une majorité écrasante de Canadiens accepte d'ailleurs que la loi électorale soit basée sur le principe de la règle du level playing field.

Honorables sénateurs, n'oubliez pas que c'est la subvention proportionnelle au nombre de votes qui a entraîné la plus grande inégalité des règles du jeu en matière de financement politique de toute l'histoire canadienne en fournissant des fonds à des partis qui ne font aucun effort pour recueillir leurs propres fonds, en forçant les Canadiens à donner des fonds à des partis qui ne présentent pas de candidats dans leur région et en obligeant les contribuables canadiens à donner des fonds à des partis politiques dont ils n'appuient pas les pratiques et les politiques.

Chers collègues, un homme qui n'est rien de moins qu'un pionnier de la démocratie moderne, le célèbre Thomas Jefferson — sur lequel le sénateur Mercer connaît beaucoup de choses, d'après ce que j'en sais —, a dit un jour ceci :

[...] le fait de forcer un homme à faire des contributions monétaires pour la diffusion d'opinions dans lesquelles il ne croit pas et qu'il exècre constitue un péché et un acte de tyrannie.

Sénateur Mercer, voilà pourquoi le gouvernement conservateur, sous la direction du premier ministre Stephen Harper, a adopté en 2011 une loi pour éliminer la subvention proportionnelle au nombre de votes, même si cela devait avoir sur les revenus de notre parti des répercussions plus grandes que pour tout autre parti.

Sénateur Dawson, je vous soumets respectueusement que, sans subvention proportionnelle au nombre de votes, les règles du jeu sont véritablement égales, parce que le financement de chacun des partis dépend uniquement de la bonne volonté des particuliers. Pour recueillir des contributions politiques, un parti politique doit plaire à un grand nombre de Canadiens ordinaires ou, comme notre chef, le très honorable Stephen Harper, dit, « les Canadiens qui travaillent dur, payent leurs impôts et respectent la loi ». La réussite de la collecte de fonds du Parti conservateur ne dépend pas de la profondeur des poches des donateurs, mais du nombre de ses donateurs.

Honorables sénateurs, tous les partis ont le même droit et autant de possibilités de solliciter des contributions volontaires auprès de Canadiens et de dépenser cet argent pour communiquer leurs idées et leur programme à la population canadienne et les choses doivent rester ainsi, car sans la liberté d'exprimer ses idées politiques, il ne peut y avoir de démocratie. Le projet de loi S-215 est un projet de loi anti-démocratique qui ne vise qu'à répondre à une préoccupation purement partisane du Parti libéral, notamment la position financière actuellement dominante du Parti conservateur. Je le répète, honorables sénateurs, le projet de loi S-215 vise à limiter l'expression politique sans aucun motif si ce n'est de nuire aux intérêts du Parti conservateur.

Après avoir présenté ce projet de loi, sous le numéro S-236, lors de la deuxième session de la 40e législature, le sénateur Dawson a dit, le 28 mai 2009 :

[...] nos élections ne devraient pas et ne doivent pas dépendre de la taille des coffres d'un parti.

Les résultats de nos élections devraient être basés sur l'avis des Canadiens et des Canadiennes qui présentent les meilleures idées pour leur pays.

Il est intéressant de voir que le sénateur Dawson a répété exactement la même chose dans son allocution du 10 avril dernier. Qu'on comprenne bien que je suis tout à fait d'accord avec le sénateur Dawson sur ce point. Il a tout à fait raison de dire que la victoire aux élections ne doit pas tenir aux moyens financiers, mais aux idées. Toutefois, j'avance, bien humblement, que le sénateur Dawson tire une conclusion erronée de ce principe fondamental.

Honorables sénateurs, l'argent et les idées ne constituent pas des forces contraires en démocratie, loin de là. En fait, les deux sont directement et inextricablement liés. Maintenant que les dons massifs provenant de sociétés et de riches particuliers ne font plus partie de l'équation, la taille relative de la caisse de chaque parti est directement fonction du point de vue des Canadiens sur le parti qui a les meilleures idées pour le pays.

Compte tenu du fait que nous avons maintenant des règles du jeu équitables, la taille de la caisse de chaque parti est déterminée par la qualité de son message. S'il y a une chose que j'ai apprise en recueillant de l'argent pour le Parti conservateur depuis les années 1960, c'est la vérité éternelle selon laquelle le message crée l'élan qui crée l'argent. Le contraire n'est jamais vrai.

Cela dit, à un moment donné, un parti peut attirer plus de dons librement consentis que n'importe quel autre. Aujourd'hui, peut-être au grand dam de ceux qui nous critiquent, ce parti, c'est le Parti conservateur du Canada. La raison pour laquelle nous attirons plus de dons que les autres est que nous avons un message très fort et un chef très fort pour le livrer en la personne du très honorable Stephen Harper.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Gerstein : Ce message s'est traduit dans la réalité par l'élection d'un gouvernement conservateur fort, stable et majoritaire qui crée des emplois, de la croissance et de la prospérité à long terme pour les Canadiens.

Honorables sénateurs, il est bien vrai que l'argent facilite le discours politique. C'est également un fait que la publicité politique payée constitue le seul moyen pour les partis de communiquer directement avec les masses sans passer par le filtre des grands médias. Cela dit, le sénateur Dawson surestime — ou comprend mal peut-être — l'effet de l'argent sur les résultats des élections.

Dans le discours qu'il a prononcé sur le projet de loi au cours de la dernière session, puis de nouveau il y a quelques semaines, le sénateur Dawson a parlé plusieurs fois du danger d'« acheter les élections ». Si le danger avait été réel, honorables sénateurs, Kim Campbell aurait dû être élue première ministre avec une majorité écrasante puisque le Parti progressiste-conservateur avait consacré le chiffre record de 22 millions de dollars à sa campagne électorale de 1993.

Dire qu'on peut acheter des élections implique que la publicité politique est en quelque sorte une menace à la démocratie, tout comme l'achat de votes est synonyme de corruption. En réalité, rien n'est plus faux. En fait, comme je l'ai déjà indiqué, la publicité politique contribue énormément à la démocratie.

De plus, parler ainsi n'est pas très élogieux pour les électeurs canadiens, qui ont du discernement et savent se montrer sceptiques quand il le faut.

Aucun parti n'augmentera jamais sa part du vote populaire en dépensant d'énormes sommes pour faire la promotion d'une mauvaise politique ou d'une position qui manque de crédibilité. Nul montant consacré à la publicité ne peut permettre de gagner des élections à moins que les électeurs ne soient sensibles au message transmis. La liberté de l'expression politique profitera toujours à la démocratie, mais ne profitera pas toujours au parti qui s'exprime.

Bref, honorables sénateurs, on peut seulement conclure que ce que nos adversaires craignent vraiment, ce n'est pas l'impact de l'argent conservateur. Non, mes amis, nos adversaires s'inquiètent à juste titre de l'impact du message conservateur. En effet, ils savent que, avec l'argent qu'il reçoit de ses partisans, le Parti conservateur peut communiquer ce message.

Les sénateurs d'en face n'essaieraient pas de faire obstacle à cette réalité s'ils pensaient, ne serait-ce qu'un instant, que les Canadiens peuvent se détourner du message conservateur. En somme, tant que les règles sur la collecte de l'argent sont justes et équitables, il sera sûrement juste et équitable pour chaque parti de dépenser à sa guise l'argent qu'il recueille.

(1710)

Il est vrai que le Parti conservateur a les moyens de dépenser davantage en publicité que les autres partis, mais est-ce en raison d'une injustice dans les règles actuelles? Non, chers collègues; les règles du jeu sont bel et bien équitables.

Je vous assure que n'importe quel parti peut employer les mêmes techniques et technologies de financement que le nôtre. Nous n'avons pas de formule brevetée, pas de potion magique, pas de recette secrète; nous travaillons fort et notre message est percutant, voilà tout.

Comme je l'ai mentionné, j'ai longtemps été agent de financement et je sais ce que c'est quand les dons rentrent à la goutte. Je peux assurer aux sénateurs que la chance tourne, que la marée finit toujours par se renverser, mais que la marée du financement, à la différence de celle de l'océan, est imprévisible. Le sénateur Moore sait bien qu'il n'y a ni table des marées ni almanach pour nous dire quand la marée montante fera rentrer l'argent à flots et quand nous connaîtrons eaux maigres et misère.

Je l'ai déjà dit, le succès d'un parti dans la collecte de fonds dépend uniquement de l'efficacité de son message. Je le répète, « c'est le message qui crée l'élan qui crée l'argent ».

Honorables sénateurs, outre les grands principes que j'ai abordés, plusieurs éléments du libellé du projet de loi S-215 soulèvent de graves problèmes. Je ne me suis pas concentré sur ces questions parce que je ne suis pas ici pour montrer que le projet de loi S-215 comporte des défauts. Je suis plutôt ici pour déclarer, sauf le grand respect que je dois au sénateur Dawson, que le projet de loi S-215 est un affront à la démocratie. Critiquer le projet de loi pour son libellé, ce serait comme critiquer le coin sombre choisi par un agresseur. S'il était mis en œuvre, le projet de loi S-215 ne favoriserait pas l'équité et la démocratie. Au contraire, il flanquerait une raclée à l'équité et viderait les poches de la démocratie.

Honorables sénateurs, le projet de loi S-215 ne réduira aucunement l'influence de l'argent sur la scène politique canadienne parce que ce n'est plus possible. Nous ne sommes plus à l'époque où de gros bailleurs de fonds pouvaient financer les partis politiques. Le projet de loi S-215 vise plutôt à réduire l'influence du grand nombre de Canadiens qui font de petits dons aux partis politiques de leur choix avec l'argent qu'ils gagnent à la sueur de leur front. Voilà pourquoi ce projet de loi est antidémocratique.

Les sénateurs de mon parti adhèrent aux principes de la liberté d'expression politique, de l'égalité des chances pour tous les partis politiques et de l'équité pour tous les Canadiens qui font vivre notre démocratie en versant des contributions aux partis de leur choix. Voilà pourquoi il est essentiel que chaque parti puisse dépenser l'argent qu'il recueille pour promouvoir ses idées, ses politiques et son programme.

Pour terminer, honorables sénateurs, bien que nous n'aimions pas toujours les points de vue de nos collègues, nous pouvons certainement convenir que tous les partis doivent demeurer libres de communiquer leur message au peuple canadien comme bon leur semble, non seulement au cours des campagnes électorales, mais également entre celles-ci. Je sais que beaucoup de sénateurs d'en face seront d'accord avec moi. Après tout, la phrase suivante a été écrite par nul autre que Pierre Elliott Trudeau :

Certains droits politiques sont inséparables de l'essence même de la démocratie : liberté de pensée, de parole, d'expression (presse, radio, et cetera), d'assemblée et d'association.

C'est dans cet esprit que j'exhorte tous les sénateurs à protéger ces droits politiques et à défendre notre démocratie en rejetant le projet de loi S-215.

Des voix : Bravo!

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, il y a sans doute de la buée dans mes lunettes. Je dois me tromper. Je croyais voir en face le sénateur Gerstein. Je croyais que c'était le même type qui était assis à deux places de moi lors des audiences sur le projet de loi C-24 et qui était venu témoigner à cette occasion devant un comité de l'autre endroit. J'étais présent à titre personnel et en tant que partisan du Parti libéral, mais il y était en tant que collecteur de fonds du Parti progressiste-conservateur du Canada, qui était alors le cinquième parti à la Chambre des communes. Oui, le cinquième parti. Les membres de ce parti étaient très favorables au projet de loi C-24. Ils étaient très heureux de voir qu'ils allaient obtenir du financement.

Je ne comprends pas. J'imagine que le vieux dicton qui dit que les choses ont bien changé s'applique ici.

Sénateur, je pense que vous devez dire la vérité et admettre qu'au fur et à mesure que votre rôle a changé en passant de progressiste-conservateur, à membre de l'Alliance canadienne puis à membre du Parti conservateur, votre attitude a elle aussi changé. La situation a évolué depuis l'époque où vous et mon vieil ami, le sénateur Godfrey — et j'ai connu le sénateur Godfrey — lanciez ces appels conjointement. Vous ne pouvez pas dire que vous avez appuyé le projet de loi C-24 lorsque vous avez témoigné devant le comité puis déclarer maintenant que c'était une idée terrible. Comment conciliez-vous ces deux déclarations?

Le sénateur Gerstein : Sénateur Mercer, c'est comme si c'était hier que nous étions devant le comité. Je m'en souviens très bien, parce que vous étiez là avec Eddie Goldenberg. Sauf erreur, c'était la première fois qu'un chef de cabinet venait témoigner devant un comité de la Chambre des communes.

Le sénateur Mercer : Il n'était pas chef de cabinet.

Le sénateur Gerstein : Je suis surpris et j'ai dit plus tôt, lors de mes remarques au sujet de Thomas Jefferson, que vous saviez qui il était. Je ne me suis pas rendu compte que vous le connaissiez peut-être parce que vous êtes complètement dans l'erreur. Vérifiez le compte rendu. J'ai témoigné devant le comité pour m'opposer au projet de loi C-24.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Gerstein : Vous devez être en train de perdre la mémoire. Vous êtes sans doute beaucoup plus âgé que je le pensais. Sénateur Mercer, vérifiez le compte rendu. J'étais contre le projet de loi et non pas en faveur. Vous avez appuyé cette mesure. Je n'étais pas là pour appuyer le projet de loi, croyez-moi.

L'honorable Dennis Dawson : Si ce qui compte, c'est le message, pourquoi dépensez-vous en publicités négatives tout cet argent durement recueilli, au lieu de vous en servir pour faire connaître votre message? Au fil des années, nous n'avons pas vu de messages présentant vos réalisations. Nous avons seulement vu des publicités sur ce que, prétendument, nous faisons mal.

Il est un peu difficile pour moi de parler à titre de libéral, étant donné que je ne fais pas partie du caucus national. Cela dit, je dois admettre que je suis heureux de voir que les libéraux ont maintenant plus de contributeurs à leur campagne que vous n'en avez.

Le sénateur Gerstein : Je crois qu'il y a deux questions. La première observation que j'aimerais faire, c'est que la dernière fois que je suis allé à la banque et que j'ai essayé de déposer plusieurs donateurs sur un seul bordereau de dépôt, on m'a répondu ceci : « Sénateur, lorsque vous aurez l'argent, apportez-le et nous le déposerons dans le compte. » On ne peut pas déposer une liste de donateurs dans le compte bancaire.

Je vais peut-être vous rafraîchir la mémoire. Les publicités négatives constituent un problème délicat, mais vous avez peut-être oublié que — laissez-moi réfléchir, c'était quand déjà? — en 2000, les libéraux de Chrétien ont publié une publicité contre Stockwell Day. La publicité négative mettait en scène des Albertains qui exprimaient leur crainte que Stockwell Day ne crée un régime d'assurance-maladie à deux vitesses. Non seulement la publicité était négative, mais elle comprenait une citation fictive d'un journal, attribuée au Globe and Mail. Ils se sont fait prendre et ont dû retirer la publicité.

En 2006, lorsque les libéraux tiraient cruellement de l'arrière dans les sondages, ils ont publié une publicité qui prétendait que Stephen Harper avait l'intention d'accroître la présence militaire dans nos villes — les villes canadiennes, des soldats et des armes dans nos villes, au Canada. Les médias ont critiqué les libéraux pour leurs propos alarmistes et ces derniers ont retiré la publicité.

Des voix : C'est honteux!

Le sénateur Gerstein : Vous avez le privilège de dépenser l'argent comme bon vous semble et de prendre des risques; si la publicité n'est pas bonne, vous n'obtiendrez pas de soutien. N'oubliez pas que les Canadiens sont tout à fait capables de discernement, comme il se doit.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Le sénateur Gerstein accepterait-il de répondre à une autre question?

(1720)

Sénateur, vous avez dit dans votre intervention que les marées sont imprévisibles. Or, les marées comptent parmi les choses les plus prévisibles sur cette planète. On peut acheter des tableaux qui indiquent à quel moment se produiront les marées pour des années à venir, et à la minute près. La marée monte et descend.

N'ai-je pas raison de croire que la marée du soutien des Canadiens envers votre parti descend depuis un bon bout de temps maintenant?

Le sénateur Gerstein : Sénatrice Fraser, vous avez tout à fait raison; les marées des océans sont tout à fait prévisibles. Ce sont les marées financières qui sont imprévisibles. On ne sait jamais quand elles vont monter ni quand elles vont descendre. Vérifiez les chiffres. Depuis que nous formons le gouvernement, les fonds que nous recueillons augmentent d'année en année, y compris cette année. Merci.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Dawson, avec l'appui de l'honorable sénateur Robichaud, propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dawson, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

La Loi sur les Indiens

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Ngo, appuyée par l'honorable sénatrice Bellemare, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-428, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (publication des règlements administratifs) et prévoyant le remplacement de cette loi.

L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-428, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (publication des règlements administratifs) et prévoyant le remplacement de cette loi. Cette mesure a été présentée par le député Rob Clarke de la circonscription de Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, dans le Nord de la Saskatchewan.

Le sénateur Ngo, qui parraine le projet de loi, a présenté l'objectif principal de cette mesure à l'étape de la deuxième lecture. Aujourd'hui, je vais me concentrer sur deux objectifs du projet de loi : premièrement, exiger du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien qu'il présente chaque année à un comité de la Chambre des communes les mesures qu'il prend en vue de l'élaboration d'une nouvelle loi destinée à remplacer la Loi sur les Indiens; deuxièmement, abroger ou modifier les articles de la Loi sur les Indiens qui portent sur l'éducation.

Honorables sénateurs, je veux d'abord mentionner que la journée de demain marquera le sixième anniversaire des excuses officielles présentées par le premier ministre Stephen Harper au sujet des pensionnats indiens. Ces excuses ont constitué un événement important et historique. Le processus de réconciliation incluait entre autres la création de la Commission de vérité et de réconciliation, qui a fait la lumière sur les pratiques inhumaines et injustes qui ont eu cours dans certains pensionnats indiens. Dans le cadre du processus de réconciliation, il y a quatre ans, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien de l'époque, Chuck Strahl, s'est engagé à faire en sorte que le gouvernement enlève les articles désuets de la Loi sur les Indiens qui portent sur l'éducation.

Honorables sénateurs, je ne peux m'empêcher de penser qu'il est curieux que le projet de loi C-428, qui est un projet de loi d'initiative parlementaire, vise le même objectif, à savoir supprimer de la Loi sur les Indiens les articles qui portent sur l'éducation. En outre, le projet de loi C-33, Loi sur le contrôle par les premières nations de leurs systèmes d'éducation, qui est un projet de loi d'initiative ministérielle, propose aussi de supprimer les mêmes articles de la Loi sur les Indiens. Toutefois, comme vous le savez, le projet de loi C-33 a été mis en veilleuse par le ministre Valcourt et notre comité a suspendu son étude préalable de cette mesure.

Honorables sénateurs, tous les intervenants souhaitent ardemment réformer l'éducation des Premières Nations et il est impérieux de le faire. Se débarrasser des articles de la Loi sur les Indiens qui portent sur l'éducation est un aspect important de la réforme sur le plan politique. Même si les changements apportés à la Loi sur les Indiens ont essentiellement un caractère symbolique, ils sont louables et ils seraient avantageux sur le plan politique. Toutefois, dans les circonstances actuelles, alors que le ministre Valcourt a refusé de négocier avec les soi-disant chefs voyous qui ont des objections importantes face au projet de loi C-33, et alors qu'il refuse de financer adéquatement les écoles dans les réserves sans l'adoption d'une mesure législative, ce serait une parodie que d'adopter le projet de loi C-428 pendant cette période tumultueuse. Supprimer les articles de la Loi sur les Indiens qui portent sur l'éducation en adoptant le projet de loi C-428, qui est un projet de loi d'initiative parlementaire, serait perçu comme une façon déshonorable de donner suite à l'engagement du gouvernement de réformer l'éducation des Premières Nations. La seule façon acceptable d'adopter le projet de loi C-428 serait de le modifier sensiblement en supprimant tous les articles liés à l'éducation qui sont repris dans le projet de loi d'initiative ministérielle, c'est-à-dire le projet de loi C-33, Loi sur le contrôle par les premières nations de leurs systèmes d'éducation.

Honorables sénateurs, c'est la première fois que nous traitons d'un projet de loi d'initiative parlementaire qui vise non seulement à abroger des articles de la Loi sur les Indiens, mais qui cherche aussi à créer un processus pour le remplacement ultérieur de la Loi sur les Indiens. Je signale que cette situation est elle aussi inhabituelle. On s'attend à ce qu'une mesure législative qui s'attaque à l'essence même de la loi qui s'applique à la majorité des Premières Nations du Canada émane du gouvernement lui-même, plutôt que d'un député.

Même si je félicite le député de Desnethé—Missinippi—Churchill River de s'attaquer au remplacement de la Loi sur les Indiens, il faut reconnaître que le lien de gouvernance existe entre la Couronne et chaque Première Nation individuelle. La Couronne a une obligation fiduciaire envers les Premières Nations du Canada. Je sais que le gouvernement et le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada ont appuyé le projet de loi à l'autre endroit. Le fait que ces mesures n'aient pas été incluses dans le projet de loi du gouvernement me laisse perplexe.

En outre, puisque l'un des objectifs du projet de loi consiste à ordonner au ministre d'élaborer une mesure législative pour remplacer la Loi sur les Indiens, il semble que le ministre responsable et son ministère devraient prévoir un cadre législatif pour guider ce processus.

Comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi C-428 obligerait le ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien à comparaître chaque année devant le Comité des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de la Chambre des communes pour faire rapport de ses progrès en ce qui a trait au remplacement de la Loi sur les Indiens. Cette obligation est décrite à l'article 2 de la manière suivante :

Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien présente au comité de la Chambre des communes chargé d'étudier les questions relatives aux affaires autochtones, dans les dix premiers jours de séance de celle-ci au cours de chaque année civile, un rapport portant sur le travail accompli par son ministère en collaboration avec les Premières Nations et les autres parties intéressées en vue de l'élaboration d'une nouvelle loi destinée à remplacer la Loi sur les Indiens.

J'ai trois points à aborder au sujet de cet article. Premièrement, le terme « collaboration » n'y est pas défini. Comme les sénateurs le savent, la Couronne a l'obligation de consulter pleinement les Premières Nations et de tenir compte de leurs points de vue quand elle présente des mesures législatives qui pourraient empiéter sur les droits ancestraux ou issus de traités. Cette obligation a été bien établie dans plusieurs décisions rendues par la Cour suprême au fil des années. Comme le projet de loi C-428 n'est pas un projet de loi d'initiative ministérielle, je me demande si cette obligation sera pleinement respectée, dans l'esprit des décisions rendues par la Cour suprême, lors de l'élaboration d'une mesure législative de remplacement.

(1730)

Cela nous ramène à l'argument que j'ai soulevé au début de mon intervention. Ce n'est pas la Couronne, mais bien un simple député qui a présenté cette mesure législative. Dans le discours qu'il a prononcé à l'étape de la deuxième lecture, le député Clarke a dit ce qui suit au sujet de cet article :

Cette partie de mon projet de loi exige des consultations relatives à la Loi sur les Indiens entre les Premières Nations et le ministre des Affaires autochtones.

Qu'est-ce qui nous garantit que cette collaboration sera conforme à l'obligation légale de consulter énoncée dans les arrêts de la Cour suprême du Canada, puisqu'il ne s'agit pas d'un projet de loi d'initiative ministérielle qui serait assujetti à ces normes juridiques? Je ne sais pas. J'espère que les fonctionnaires du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord et ceux du ministère de la Justice sauront répondre à ces questions lorsque le projet de loi sera examiné à la loupe à l'étape de l'étude en comité.

Deuxièmement, l'article 2 oblige uniquement le ministre à faire rapport de ses activités au comité de la Chambre des communes. Il ne définit pas de paramètres ou de mécanismes concernant l'élaboration d'une loi visant à remplacer la Loi sur les Indiens. Cette tâche revient au ministre et à son ministère. J'imagine qu'il s'agit d'une juste attribution des responsabilités. Cependant, le problème se pose encore ici : puisque le projet de loi C-428 n'est pas un projet de loi d'initiative ministérielle, tout paramètre qui serait défini et inscrit dans des règlements subséquents et soumis au Parlement se trouverait dans une zone grise. L'article 2 favorisera-t-il l'élaboration de règlements visant à établir un cadre de collaboration quelconque?

Nous avons vu que, dans le cas d'autres projets de loi concernant les Premières Nations, le projet de loi S-8, par exemple, une somme considérable avait été prévue pour les consultations. L'article 2 sera-t-il suffisant pour que soient alloués les fonds supplémentaires nécessaires à la tenue de véritables consultations, ou toutes ces questions seront-elles laissées à la discrétion du ministre? Encore une fois, j'espère que les fonctionnaires d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada pourront comparaître devant le comité pour expliquer comment ils comptent mettre en œuvre cet article.

Troisièmement, l'article 2 dispose que la collaboration visant à remplacer la Loi sur les Indiens réunit les Premières Nations, le ministre ou son ministère et les autres parties intéressées. Les autres parties intéressées? Je voudrais m'arrêter un instant à cette expression. Tout remplacement de la loi qui nous régit, la Loi sur les Indiens, qui agit au niveau législatif pour ordonner un système de gouvernance et prescrit ou restreint certain droits qui découlent de cette loi devrait, je le répète, être négocié entre la Couronne et les seules Premières Nations. Qui sont ces autres parties intéressées? Dans certains cas, il pourrait fort bien s'agir d'autres ordres de gouvernement — provincial, territorial et municipal. La collaboration avec les provinces, les territoires ou les municipalités serait raisonnable lorsque des articles de la Loi sur les Indiens permettent à la loi provinciale de s'appliquer ou lorsqu'il s'agit de cadres tripartites très variés susceptibles de remplacer la loi.

Je tiens cependant à faire une mise en garde : si les « autres parties intéressées » comprennent l'industrie, j'ai alors de vives préoccupations. Si, dans l'élaboration de toute loi qui remplacerait la Loi sur les Indiens, l'industrie, et surtout celle des ressources naturelles, collabore à la définition de la nouvelle loi destinée à remplacer la Loi sur les Indiens, il y a là un problème.

Tout remplacement de la Loi sur les Indiens doit refléter, comme le prescrit le préambule du projet de loi C-428, la relation moderne entre le gouvernement du Canada et les peuples des Premières Nations.

Au cours d'une étude en comité, il faudrait préciser quelles sont les entités qui peuvent être considérées comme d'autres parties intéressées légitimes qui peuvent participer au remplacement de la Loi sur les Indiens.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a un double emploi délibéré entre les projets de loi C-428 et C-33. L'article 4 du projet de loi C-428 est identique à l'article 53 du projet de loi C-33. Les exigences prévues à l'article 9 du projet de loi C-428 ont déjà été intégrées à l'article 47 du projet de loi C-33, sur la publication de règlements, et, ce qui est le plus important, les articles 14 à 18 du projet de loi C-428 qui traitent de l'éducation et des pensionnats sont repris dans les articles 52 et 54 avec une modification de coordination à l'article 57 du projet de loi C-33. Pourquoi? Pourquoi fallait-il faire cela? J'espère que le ministre ou ses collaborateurs pourront donner une réponse.

La présence de ces articles dans les deux lois est de toute évidence une manœuvre délibérée, préméditée. La preuve, c'est qu'on trouve des modifications de coordination dans le projet de loi C-33. Comme je l'ai dit, l'article 57 du projet de loi C-33 sert à ordonner l'entrée en vigueur de ces dispositions en double dans un scénario ou l'autre, celui de l'adoption en premier du projet de loi C-33 ou celui de l'adoption du projet de loi C-428 d'abord.

Honorables sénateurs, il est clair que nous avons grand besoin dans les réserves d'un système d'éducation moderne, adapté à la culture et financé de façon équitable. Compte tenu de l'importance de ce besoin, nous avons adopté une motion afin de réaliser une étude préalable du projet de loi C-33 au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Toutefois, comme je l'ai dit tout à l'heure, la vive opposition au projet de loi C-33 par plusieurs dirigeants des Premières Nations et la démission du chef national Atleo ont amené le ministre à mettre le projet de loi en veilleuse aux Communes. Son refus de négocier avec les chefs qui s'opposent et de rectifier immédiatement le financement de l'éducation dans les réserves pénalise les enfants et les jeunes dans les réserves de tout le Canada.

Honorables sénateurs, je réitère ce que j'ai dit tout à l'heure. Ce serait une parodie que d'adopter le projet de loi C-428 en cette période troublée. Retirer de la Loi sur les Indiens les articles qui portent sur l'éducation en adoptant le projet de loi C-428, un projet de loi d'initiative parlementaire, serait considéré comme un moyen peu honorable de mettre en lumière l'engagement du gouvernement à réformer le système d'éducation des Premières Nations. La seule façon acceptable d'adopter le projet de loi C-428 serait de l'amender considérablement en en retirant toutes les dispositions relatives à l'éducation qui sont reprises dans le projet de loi ministériel, le projet de loi C-33, Loi sur le contrôle par les premières nations de leurs systèmes d'éducation.

Honorables sénateurs, lorsque le projet de loi sera renvoyé au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, j'espère que nous apporterons les amendements proposés et que nous étudierons à fond toutes les conséquences du projet de loi, d'autant plus qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, et non d'un projet de loi ministériel.

L'honorable Joseph A. Day : Votre Honneur, l'honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Dyck : Oui.

Le sénateur Day : Je suis désolé. Je n'ai pas le projet de loi C-428 sous les yeux, mais je crois vous avoir entendue dire que, aux termes de ce projet de loi, le ministre est tenu de consulter le comité des Communes chargé des peuples autochtones.

La sénatrice Dyck : C'est exact.

Le sénateur Day : Est-il question quelque part de consultations auprès du comité sénatorial chargé des peuples autochtones?

La sénatrice Dyck : Merci de cette question.

Non, il n'y a aucune mention du Sénat. Cela m'a paru curieux. Le ministre ne ferait rapport qu'au comité des Communes chargé des affaires autochtones. Il n'y a aucune mention du Sénat.

Le sénateur Day : J'ai une question complémentaire, Votre Honneur.

Il est arrivé par le passé que des simples députés oublient l'existence du Sénat. Une fois que nous leur avons expliqué notre rôle et surtout lorsqu'ils prennent conscience du fait que leur projet de loi doit franchir l'étape du Sénat, ils acceptent normalement de faire participer le Sénat au processus de consultation.

Savons-nous si ces démarches ont été faites, si on a communiqué avec M. Clarke à ce sujet et si les parrains du projet de loi au Sénat ont expliqué l'importance du bicaméralisme?

La sénatrice Dyck : Je ne puis parler au nom du parrain, mais le député Rob Clarke est venu me rencontrer. Il est donc au courant de l'existence du Sénat. Il sait qu'il existe également un Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, mais, à ce moment-là, nous n'avons pas parlé d'inclure le comité sénatorial dans le préambule.

(1740)

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Ngo, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Boisvenu, appuyée par l'honorable sénatrice Beyak, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-452, Loi modifiant le Code criminel (exploitation et traite de personnes).

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'ai été surprise de voir que cet article est inscrit au Feuilleton depuis 15 jours. C'est arrivé plus vite que je ne l'aurais cru. Je n'ai pas complété mes recherches sur ce problème fort inquiétant et très grave. Si nous n'y avions pas beaucoup réfléchi avant l'arrivée du nouveau projet de loi sur la prostitution à l'autre endroit, ce dernier nous rappelle la nature très grave et l'ampleur grandissante de la traite de personnes.

Comme il est important, à mon avis, de rendre justice à cette question, je propose l'ajournement du débat pour le temps de parole qu'il me reste.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du cinquième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du cinquième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budget d'un comité—législation), présenté au Sénat le 5 juin 2014.

L'honorable Larry W. Smith propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, le rapport porte essentiellement sur la demande d'un montant de 5 000 $ que l'un de nos comités a présentée, et que nous avons approuvée. Je propose que nous adoptions ce rapport final.

Son Honneur le Président intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : De quel comité s'agit-il, sénateur Smith?

Le sénateur L. Smith : Il s'agit du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui a demandé un montant de 5 000 $ pour des dépenses générales associées à un simple rapport.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

Transports et communications

Budget et autorisation de se déplacer—L'étude sur les défis que doit relever la Société Radio-Canada—Adoption du sixième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications (budget—étude sur les défis que doit relever la Société Radio-Canada—autorisation de se déplacer), présenté au Sénat le 5 juin 2014.

L'honorable Dennis Dawson propose que le rapport soit adopté.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Le sénateur Dawson pourrait-il nous expliquer un peu de quoi il s'agit et où le comité se rendra?

Le sénateur Dawson : Avec plaisir. Il s'agit d'une étude sur CBC/ Radio-Canada. On prévoit une tournée au cours de l'automne dans l'Est du Canada. Nous irons à Halifax, à Québec et à Sherbrooke, ensuite nous irons à Toronto et nous terminerons le voyage à Montréal.

La sénatrice Fraser : Avez-vous l'intention d'aller dans l'Ouest également?

Le sénateur Dawson : Nous sommes allés à Yellowknife, à Edmonton, à Winnipeg et à Calgary il y a quelques mois.

Son Honneur le Président intérimaire : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Le Sénat

Son rôle de protection des minorités—Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Nolin, attirant l'attention du Sénat sur son rôle de protection des minorités.

L'honorable Claudette Tardif : Honorables sénateurs, je voudrais d'abord remercier le sénateur Joyal d'avoir gentiment accepté que je participe à cette interpellation. Je demanderais que le débat demeure ajourné à son nom à la suite de mon intervention.

C'est avec plaisir que je participe à cette interpellation qui vise à mettre en évidence le rôle du Sénat relativement à la protection des minorités. Je tiens à remercier le sénateur Nolin d'avoir amorcé cette série d'interpellations d'une grande importance pour le Sénat, ainsi que la sénatrice Chaput, qui est intervenue la semaine dernière au sujet du rôle du Sénat dans la protection des minorités. Il s'agit d'un sujet qui m'intéresse et qui m'interpelle, étant donné mon héritage franco-albertain.

Comme l'ont précisé le sénateur Nolin ainsi que la sénatrice Chaput, dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec en 1998, la Cour suprême évoque la protection des minorités comme l'un des quatre principes fondamentaux de la structure constitutionnelle canadienne, avec le fédéralisme, la démocratie et la primauté du droit.

Selon la cour, même s'ils ne sont pas formellement énoncés dans la Loi constitutionnelle de 1867, « ces principes inspirent et nourrissent le texte de la Constitution. Ils en sont les prémisses inexprimées ». De plus, dans une allocution qu'elle a prononcée le 1er décembre 2005, la juge en chef Beverley McLachlin a précisé que ces « principes non écrits qui transcendent l'exercice du pouvoir étatique trouvent leur origine dans l'histoire, les valeurs et la culture de la nation envisagée dans son contexte constitutionnel ».

Les Pères de la Confédération ont enchâssé dans la nature même du Sénat le principe de la protection des droits et de la représentativité des intérêts des minorités. Il s'agit de l'une de ses missions fondamentales. Cela était vrai au moment de la Confédération, et ce l'est encore aujourd'hui.

(1750)

Dans l'ouvrage Protéger la démocratie canadienne : le Sénat en vérité, publié sous la direction du sénateur Joyal, le sénateur précise que l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés en 1982 a confirmé cette protection des minorités et l'a élargie. Je cite notre honorable collègue :

Ces nouvelles catégories de droit s'ajoutant à la Constitution, le rôle du Sénat au Parlement à titre de Chambre où s'expriment les droits des minorités et les droits de la personne a été confirmé, élargi et renforcé.

Comme la sénatrice Chaput l'a si bien démontré dans son discours, le principe de protection des minorités n'a pas pour objectif de diluer notre système de représentation démocratique, mais de le renforcer, en le rendant notamment plus inclusif.

L'opinion récemment émise par la Cour suprême du Canada dans le renvoi sur la réforme du Sénat confirme que le Sénat en est venu à représenter divers groupes sous-représentés à la Chambre des communes. Selon la Cour, il a servi de tribune aux femmes ainsi qu'à des groupes ethniques, religieux, linguistiques et autochtones auxquels le processus démocratique populaire n'avait pas toujours donné une opportunité réelle de faire valoir leurs opinions.

Aujourd'hui, on entend généralement par le terme « minorités » un ensemble de groupes qui tendent à être sous-représentés au sein des institutions publiques. Le sens de ce terme a évidemment évolué depuis la Confédération.

Toujours dans l'ouvrage Protéger la démocratie canadienne : le Sénat en vérité, la professeure Janet Ajzenstat affirme que les Pères de la Confédération avaient notamment en tête que le Sénat assurerait la représentation des minorités sur le plan politique, c'est-à-dire la représentation des points de vue politiques sous-représentés dans la société en général. Autrement dit, ils entrevoyaient qu'une Chambre haute composée de membres nommés favoriserait l'opposition politique, mais ils entrevoyaient également qu'un des rôles essentiels du Sénat serait la protection de la minorité francophone en assurant au Québec une représentation équitable au sein de la fédération, et une représentation des minorités nationales, soit la population anglophone du Québec et les populations francophones des autres provinces.

Il est essentiel de se rappeler que la Confédération est plus que le résultat d'une union entre les colonies qui existaient à l'époque. C'est aussi un pacte entre deux communautés politiques, deux peuples fondateurs : les Canadiens français et les Canadiens d'origine britannique. La Confédération canadienne devait garantir la sauvegarde et l'épanouissement des deux peuples qui y ont adhéré. Le Sénat en constitue une composante essentielle qui a permis de sceller ce pacte.

Comme le souligne le professeur Benoît Pelletier dans son texte sur les « Réponses suggérées aux questions soulevées par le renvoi à la Cour suprême concernant la réforme du Sénat », la préservation des droits des minorités et l'inclusion d'une Chambre haute qui soit en mesure de représenter leurs intérêts a été l'une des conditions selon lesquelles les provinces, et notamment le Québec, se sont jointes à la fédération.

Pour reprendre les propos de George Brown, et je cite :

[...] nos amis du Bas-Canada ont accepté de nous donner une représentation en fonction de la population à la Chambre basse à la condition expresse d'obtenir l'égalité à la Chambre haute. Nous n'aurions pas pu avancer d'un pas si nous avions rejeté cette condition.

Par ailleurs, des mesures ont été spécifiquement prévues dans la Loi constitutionnelle de 1867 pour protéger la minorité anglophone du Québec. Les sénateurs de cette province sont en effet nommés dans des districts sénatoriaux qui ont, dans certains cas, été délimités dans le but de garantir la représentation de la communauté anglophone minoritaire. Les Pères de la Confédération n'ont pas jugé bon de prévoir une mesure semblable pour garantir la représentation des francophones minoritaires dans les autres provinces.

Cependant, il existe une tradition bien établie de nommer des représentants des communautés francophones minoritaires au Sénat. Une analyse des nominations au Sénat permet de rendre compte de cette tradition. En fait, en consultant les données historiques sur les sénateurs, on constate que les francophones en situation minoritaire ont joui d'une représentation sénatoriale presque continue en Alberta, au Manitoba, en Ontario, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.

En date du 17 mars 2014, la représentation des députés francophones à l'autre endroit vivant en situation minoritaire était de 3,4 p. 100, tandis qu'au Sénat, la représentation de sénateurs francophones hors Québec était d'environ 11 p. 100.

En ce qui concerne l'Alberta, ma province, à l'exception de deux périodes, soit de 1931 à 1940 et de 1964 à 2005, l'Alberta a eu un représentant francophone au Sénat, et ce, depuis 1906. À la suite du décès du sénateur albertain Amédée Emmanuel Forget en 1923, la représentation de la minorité linguistique au Sénat était une pratique établie, puisque la communauté albertaine s'attendait à ce qu'un sénateur francophone soit nommé. Frank Oliver, propriétaire de l'Edmonton Bulletin, écrit ce qui suit à ce sujet en 1923 :

[Traduction]

Le décès du sénateur Forget crée un vide dans la représentation albertaine au Sénat. Lorsque l'Alberta et la Saskatchewan ont été constituées en provinces, la représentation des quatre provinces de l'Ouest au Sénat a été portée à 24 sénateurs, soit 6 par province, un sénateur albertain étant choisi pour représenter les Canadiens-Français de l'Alberta [...] Il est reconnu que le Sénat existe pour défendre les droits constitutionnels des minorités.

Il faut comprendre, pour la stabilité et la sécurité de l'État, que ces droits ne sont pas menacés et ne doivent pas l'être.

[Français]

En 1928, au moment de la nomination du sénateur franco-ontarien Joseph-Henri Lacasse, le député québécois Pierre-François Casgrain a tenu des propos similaires. Il déclara ce qui suit à l'autre endroit :

Il me fait plaisir de reconnaître que le gouvernement a rempli un devoir; il a reconnu les droits de la minorité canadienne-française en Ontario en appelant à la Chambre haute du Canada un de ses fils distingués en la personne de l'honorable sénateur Lacasse, et je crois que toute la population canadienne-française, de la province de Québec et de toutes les autres parties du pays, saura donner crédit au gouvernement [...] pour un acte aussi juste et équitable.

De la même manière, dans un discours prononcé au Sénat en 1956, le sénateur acadien Calixte Savoie affirme clairement les attentes de la communauté acadienne quant à une représentation à la Chambre haute. Dans son discours inaugural au Sénat, en remerciant le premier ministre Louis St-Laurent de sa nomination au Sénat, il déclare ce qui suit, et je cite :

Je me fais l'interprète fidèle de tous les Acadiens pour traduire leurs sentiments de joie et de reconnaissance à l'endroit de l'honorable premier ministre qui a daigné reconnaître les grands mérites des Acadiens [...]. Ce n'est pas pour autant le fait qu'il a donné à l'Acadie un autre sénateur, car nous y avions droit, qui me fait parler ainsi. C'est plutôt le geste qu'il a posé en lui donnant un sénateur indépendant de tout parti politique.

Au-delà des données historiques et des attentes bien établies des Canadiens français, il faut aussi voir que le Sénat comptait parmi ses membres de grands défenseurs des droits linguistiques et qu'il a servi de tribune importante où on a pu dénoncer les injustices commises à l'endroit des francophones en situation minoritaire et faire valoir leurs préoccupations quant aux gestes posés par leur gouvernement.

(1800)

[Traduction]

Son Honneur le Président intérimaire : Chers collègues, il est presque 18 heures. Me demandez-vous de ne pas tenir compte de l'heure?

Des voix : D'accord.

[Français]

La sénatrice Tardif : Le premier sénateur acadien, Pascal Poirier, nommé au Sénat en 1885, a été un personnage marquant de l'Acadie. Il s'est fait connaître en tant qu'organisateur et intervenant de premier plan lors des grands ralliements des Acadiens de la fin du XIXe siècle. Il s'est aussi fait connaître en tant qu'écrivain, en publiant des ouvrages sur l'histoire et la culture acadiennes.

En Ontario, on peut citer l'exemple du sénateur Napoléon Belcourt, nommé au Sénat en 1907, qui est intervenu à maintes reprises au Sénat pour défendre la cause des Canadiens français. Il a notamment présidé le premier Congrès des Franco-Ontariens en 1910 et est devenu une des figures de proue de la lutte contre le Règlement 17, adopté par le gouvernement de l'Ontario en 1912, qui abolissait effectivement le français comme langue d'enseignement dans les écoles de la province.

D'ailleurs, en fouillant les Débats du Sénat, vous trouverez de nombreuses interventions du sénateur Belcourt au sujet du Règlement 17 et du droit des Canadiens-Français à leurs propres écoles.

Plus récemment, on peut penser au sénateur Jean-Robert Gauthier, qui a poursuivi cette tradition en se vouant à la défense de la minorité francophone dans la Chambre haute. Notamment pendant la longue lutte contre la fermeture de l'Hôpital Montfort à Ottawa, au cours des années 1990, le sénateur Gauthier est intervenu à maintes reprises au Sénat afin d'attirer l'attention de ses collègues sur la grave injustice que vivait la communauté francophone de sa province à cause de la fermeture de cet hôpital. D'autres sénateurs sont aussi intervenus sur le sujet, et le Sénat a adopté à l'unanimité, le 24 avril 1997, une motion destinée à encourager le gouvernement fédéral et le gouvernement ontarien à trouver une solution afin que l'Hôpital Montfort puisse rester ouvert.

Les efforts du sénateur Gauthier ont aussi mené en 2005 à l'adoption de modifications importantes à la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Si cette partie a été renforcée et améliorée, c'est grâce, en grande partie, au travail acharné de Jean-Robert Gauthier, qui voulait améliorer le sort des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Dans la même veine, je dois également souligner les efforts actuels de notre honorable collègue, la sénatrice Chaput, qui veut moderniser la Loi sur les langues officielles au moyen de son projet de loi S-205, afin que l'application de la loi tienne compte des dynamiques actuelles qui façonnent les communautés francophones.

Outre les minorités de langue officielle, d'autres groupes ont demandé à être représentés au Sénat ou ont été intégrés aux principes gouvernant les nominations au fil du temps en vertu de leur identité distincte.

Par exemple, en 1955, le député Walter Dinsdale, dans un discours prononcé à l'autre endroit au sujet de la réforme du Sénat, affirmait que, étant donné « la mission primordiale du Sénat de protéger les intérêts des groupes minoritaires », les femmes et les Autochtones figuraient parmi les groupes dont on devrait tenir compte en procédant aux nominations.

Son Honneur le Président intérimaire : Sénatrice Tardif, désirez-vous plus de temps pour terminer votre intervention?

La sénatrice Tardif : S'il vous plaît.

[Traduction]

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, acceptez-vous d'accorder cinq minutes de plus à la sénatrice Tardif?

Des voix : D'accord.

[Français]

La sénatrice Tardif : Il concluait en affirmant que chaque province devrait être représentée par au moins une sénatrice.

Au cours de la même année, John Diefenbaker, alors député de l'opposition, remarquait aussi qu'il était étrange que les premiers habitants du pays, les Autochtones, n'aient jamais eu de représentant au Sénat. Une fois élu à titre de premier ministre, M. Diefenbaker nomma, en 1958, le premier Autochtone au Sénat, James Gladstone.

En ce qui a trait à la nomination de femmes au Sénat, les gouvernements ont, pendant une période, invoqué qu'elles n'y avaient pas accès, car elles n'étaient pas des personnes entières selon la loi. Après une longue lutte pour dénoncer cette interprétation de la loi, pendant les années 1920, Emily Murphy et quatre autres Albertaines, aujourd'hui connues sous le nom des « Célèbres cinq », demandèrent aux tribunaux de trancher la question.

En 1929, le Conseil privé d'Angleterre infirmait une décision de la Cour suprême du Canada en donnant raison aux arguments des « Célèbres cinq ». Peu de temps après, en 1930, le premier ministre Mackenzie King nommait au Sénat la première Canadienne, Cairine Wilson.

Notons que, en date du 17 mars 2014, la représentation des femmes à l'autre endroit était d'environ 25 p. 100, alors qu'au Sénat, elle était de 35 p. 100. Toujours à cette date, 1,9 p. 100 des députés étaient d'origine autochtone, inuite ou métisse, alors que 5,2 p. 100 des sénateurs l'étaient.

Honorables sénateurs, le Canada et ses institutions ont grandement évolué depuis la Confédération, ainsi que notre conception de ce que constitue une minorité. Ce qui est demeuré bien en place, ce sont les principes qui sont à la base de la Confédération, dont le principe de protection des minorités enchâssé dans la nature du Sénat.

Je suis d'ailleurs préoccupée par l'omission presque complète de la représentation des minorités dans les débats des dernières années sur la question de la réforme du Sénat. Nous oublions ce principe en menant des réflexions sur la démocratie canadienne, uniquement en terme d'une légitimité qui se fonde strictement sur la préférence majoritaire des électeurs. Ceci éclipse l'une des missions fondamentales de la Chambre haute. Le Canada est un pays vaste, complexe et formé de régions différentes. Je suis convaincue que notre système parlementaire a besoin d'une institution qui agit dans l'intérêt des groupes minoritaires en posant un deuxième regard sur des questions importantes, comme le prévoyait le pacte fondateur de la Confédération.

D'ailleurs, plusieurs groupes minoritaires, notamment les associations représentant les communautés francophones en situation minoritaire comme la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada et la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick, tiennent à préserver cette tribune. Elles se sont très clairement exprimées en ce sens à plusieurs reprises au cours des dernières années, sur la place publique et devant les tribunaux, en affirmant que tout changement proposé au Sénat devrait, entre autres, tenir compte de la représentativité de ces communautés.

Il est aujourd'hui plus important que jamais, en réfléchissant à l'avenir du Sénat, de tenir compte de la notion des deux cultures fondatrices, de la contribution des Autochtones à l'édification du pays, de l'apport des autres communautés culturelles à la vitalité nationale et de la spécificité du Québec en vertu de son rôle de défenseur de la communauté francophone sur son territoire et dans les autres régions du pays.

En d'autres termes, il est important de tenir compte du fondement normatif du Sénat et du rôle historique qu'il a joué depuis la Confédération. L'établissement et la préservation d'une institution ne sont jamais une fin en soi. Il ne faut pas oublier que sa valeur se trouve essentiellement dans sa capacité à réaliser les objectifs qui lui ont été confiés. Honorables sénateurs, ne perdons pas de vue ces objectifs.

Pour conclure, je tenais, comme l'a fait la sénatrice Chaput, à reconnaître le très honorable Paul Martin, qui m'a nommée au Sénat en 2005, et qui, ce faisant, a renoué avec cette tradition de nommer à la Chambre haute une Albertaine qui représenterait la communauté francophone. C'est un véritable honneur pour moi de siéger en cette Chambre et de représenter les membres de ma communauté. Finalement, je tiens encore une fois à remercier le sénateur Nolin de m'avoir donné l'occasion de me prononcer sur cet enjeu important.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom du sénateur Joyal, le débat est ajourné.)

(1810)

[Traduction]

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, avant de donner la parole au sénateur Watt, je tiens à informer le Sénat qu'il parlera en inuktitut, ce qui est tout à fait approprié. Il s'agit d'une nouvelle règle que nous avons adoptée. Ceux qui souhaitent écouter l'allocution devront porter leur écouteur. On parlera inuktitut durant la séance. La langue d'origine parlée sur le parquet sera diffusée au canal 1. J'invite ceux qui comprennent l'inuktitut à utiliser le canal 1. L'anglais sera diffusé au canal 2, le français au canal 3.

Le sénateur Watt a la parole.

L'honorable Charlie Watt et l'honorable Anne C. Cools

Le trentième anniversaire de leur nomination au Sénat—Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Cowan, attirant l'attention du Sénat sur le 30e anniversaire de la nomination des sénateurs Charlie Watt et Anne Cools.

L'honorable Charlie Watt : Honorables sénateurs, c'est un privilège de pouvoir m'exprimer en inuktitut. Je suis très touché d'avoir la permission de parler dans ma langue maternelle en cette auguste enceinte. Merci.

Honorables sénateurs, je prends la parole pour souligner en inuktitut le 30e anniversaire de la nomination de la sénatrice Cools. Un interprète traduira mes paroles.

[Note de la rédaction : Le sénateur Watt s'exprime en inuktitut.]

Quel extraordinaire parcours nous avons connu au Sénat. Il y a 30 ans, le premier ministre Pierre Elliott Trudeau nous nommait sénateurs. Il a procédé à quelques nominations peu ordinaires; les nôtres ne furent que deux d'entre elles. Il a même nommé des sénateurs provenant d'autres partis politiques. Je ne voulais vraiment pas être nommé à l'époque, et je soupçonne qu'Anne ne s'est pas laissé convaincre facilement non plus.

Puisque nous avons été assermentés comme sénateurs le même jour, nous avons appris les rouages du métier ensemble. Pendant un certain temps, nous étions dans la même équipe. Nos chemins ont divergé à plusieurs reprises, mais nous continuons tous les deux de servir les Canadiens selon notre conscience.

L'époque de notre arrivée au Sénat était remarquable, car on comptait au sein de cette institution un groupe de sénateurs compétents et respectés qui savaient comment faire avancer les choses. Nous avons donc appris à connaître les avantages d'un débat vigoureux et d'un dialogue ouvert avec nos vis-à-vis. C'est quelque chose que l'on ne voit plus souvent de nos jours.

Nous avons vécu des moments mémorables dans cette enceinte, et nous avons appris quelques leçons en cours de route. Nous avons appris que, au cours d'une tempête politique, il est possible d'être respectueux l'un envers l'autre même si nous avons des opinions divergentes sur un enjeu donné.

Nous avons appris qu'aucun parti ne reste au pouvoir éternellement et qu'il est par conséquent important de travailler avec ses collègues d'en face. Anne a une aptitude particulière à maîtriser les règles du Sénat et la politique sous-jacente des mesures législatives. Elle continue de se fier à ses convictions même si elles correspondent aux idées les moins populaires. Elle pourrait ne pas être d'accord avec vos politiques, mais elle demeurera respectueuse envers vous; elle est franche et toujours aimable.

Au fil des ans, j'ai constaté qu'Anne Cools est une personne exceptionnellement bienveillante et compatissante. Elle n'hésite jamais à défendre les gens lorsqu'elle croit fermement qu'ils sont victimes d'une injustice, même si ce n'est pas la chose populaire à faire ou la position de la majorité.

Elle adore son travail; elle se présente à son bureau tous les jours, sans exception, même pendant l'été et le congé de Noël. Sa passion pour son rôle de sénatrice est tout à fait admirable. Elle aime l'institution qu'est le Sénat. Elle protège l'institution et tout ce qu'elle représente, voire plus encore.

Anne Cools est sincère. Dans tout ce qu'elle fait, elle cherche d'abord et avant tout à maintenir l'intégrité du Sénat, ce que les gens ne comprennent pas toujours. Certains sénateurs font preuve d'une grande partisanerie, mais elle, elle ne cherche qu'à être juste et équitable et à faire preuve de compassion sur le plan humain.

Nous avons fait front commun au besoin, même si nous ne sommes pas toujours du même avis. Cela dit, les Canadiens doivent savoir qu'Anne Cools est une personne respectable et une sénatrice remarquable.

C'est ce que Pierre Trudeau a vu en elle, et il savait qu'elle avait des talents particuliers. Elle est intelligente et vive d'esprit et a une mémoire phénoménale. Il savait que ses plus grandes qualités feraient d'elle une excellente sénatrice.

Aujourd'hui, je suis étonné de constater que nous avons survécu aussi longtemps dans cette enceinte.

(1820)

Nous avons réussi à conserver notre sens de l'humour et à mettre les choses en perspective. Après 30 ans, je suis fier de dire qu'elle est mon amie.

[Note de la réaction : le sénateur Watt poursuit en anglais.]

Je vais maintenant passer à l'anglais.

Pour ceux d'entre vous qui l'ignorent, Anne Cools a gagné plusieurs prix, dont j'aimerais déposer la liste afin qu'elle soit rendue publique. Je demande donc le consentement du Sénat pour déposer la liste des prix qui ont été décernés à l'honorable Anne Cools.

Je rappelle à ceux d'entre vous qui en sont au début de leur mandat de se faire des amis des deux côtés du Sénat. Le temps va passer très rapidement, et j'espère que votre carrière sera aussi stimulante et aussi fructueuse que les nôtres.

Je vous remercie, honorables sénateurs.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président intérimaire : Le consentement est-il accordé pour que la liste soit déposée?

Des voix : D'accord.

L'honorable Anne C. Cools : J'aimerais proposer l'ajournement du débat. Malheureusement, Charlie, je ne pourrai pas vous répondre en inuktitut, mais je ferai de mon mieux en anglais.

(Sur la motion de la sénatrice Cools, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Son rôle législatif—Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Nolin, attirant l'attention du Sénat sur son rôle législatif.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Mon leader m'a donné la permission de prendre la parole.

Cette interpellation porte sur notre rôle le plus fondamental, c'est-à-dire celui que nous jouons sur le plan législatif. Fait intéressant, le sénateur Nolin a lancé cette interpellation avant que la Cour suprême du Canada confirme l'importance de ce rôle, du travail de second examen objectif — pour reprendre la formule classique — que nous réalisons lorsque nous sommes saisis de mesures parfois adoptées à la hâte ou mal conçues à l'autre endroit, ainsi que, bien entendu, de nos propres initiatives sur le plan législatif.

C'est un sujet extrêmement important, sur lequel nous devons tous nous pencher, mais je sais qu'il se fait tard, honorables sénateurs. Bien que je ne cède ma place à personne quant à l'importance que j'accorde à ce dossier, je propose l'ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au mercredi 11 juin 2014, à 13 h 30.)

© Sénat du Canada

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