Aller au contenu
Séances précédentes
Séances précédentes
Séances précédentes

Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 103

Le jeudi 4 décembre 2014
L'honorable Pierre Claude Nolin, Président

LE SÉNAT

Le jeudi 4 décembre 2014

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

L'École Polytechnique de Montréal

Commémoration de la tragédie—Minute de silence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant que nous commencions, je vous invite à vous lever et à observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la tragédie survenue à l'École Polytechnique de Montréal, il y a 25 ans, le 6 décembre.

Les honorables sénateurs observent une minute de silence.


[Français]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L'École Polytechnique de Montréal

Le vingt-cinquième anniversaire de la tragédie

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, à l'approche du 25e anniversaire de la tuerie survenue à l'École Polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989, permettez-moi de me faire la porte-parole, en cette Chambre, du Comité de la commémoration du 25e anniversaire de la tragédie du 6 décembre 1989, qui a rédigé un texte auquel nous pouvons tous souscrire.

Ce dernier déclare ce qui suit, et je cite :

[...] nous joignons notre voix au front commun d'organismes et de citoyens qui croient que notre devoir de mémoire entraîne nécessairement des actions concrètes pour...

... renforcer la lutte contre la violence faite aux femmes, pour garantir, à toute femme, l'exercice effectif de son droit à la sécurité et à vivre dans une société sans violence. Au Québec, les femmes représentent 80 p. 100 des victimes d'infractions commises dans un contexte conjugal, 96 p. 100 des victimes d'agression sexuelle et 93 p. 100 des homicides conjugaux. [...]

Il faut savoir que cette déclaration a été, évidemment, produite par un comité du Québec.

Deuxièmement, le texte indique, et je cite :

... combattre les inégalités entre les femmes et les hommes, en luttant contre la discrimination, la marginalisation et l'exclusion à l'égard des femmes dans les domaines de l'éducation, du travail, de la sécurité économique et de la santé.

Et, troisièmement :

... poursuivre le combat pour un meilleur contrôle des armes, étant donné l'abolition du registre des armes d'épaule ainsi que les nombreux affaiblissements aux mesures de contrôle instaurées par le présent gouvernement fédéral à la demande du lobby des armes. [...] Un encadrement législatif de l'accès, de la possession et des types d'armes à feu disponibles est nécessaire pour minimiser les décès et blessures par balles.

(1340)

Ceci s'adresse, bien sûr, à la mémoire de : Geneviève Bergeron, Nathalie Croteau, Hélène Colgan, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Barbara Klucznik, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie St-Arneault et Annie Turcotte.

J'ajouterai que ma mère est décédée quelques jours après le décès de ces jeunes femmes et que, pour moi, il s'agit certainement d'un anniversaire difficile.

[Traduction]

Le caporal Kyle Button

L'honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je profite de cette occasion pour rendre hommage à un jeune soldat, le caporal Kyle Button, de Terre-Neuve-et-Labrador, qui montait la garde près du Monument commémoratif de guerre en ce jour tragique du mois d'octobre.

Le caporal Button est né et a grandi à Seal Cove. À la fin de ses études à l'école secondaire régionale Queen Elizabeth, à Conception Bay South, en 2006, il s'est immédiatement enrôlé dans l'armée. Il a accompli deux périodes d'affectation en Afghanistan et est actuellement en poste à la base des Forces canadiennes de Gagetown. Il espère un jour être affecté à Ottawa, une ville qu'il aime beaucoup.

Je prends la parole aujourd'hui pour vous faire part de l'ampleur de l'héroïsme, du courage et de la compassion dont a fait preuve le caporal Button dans le cadre de ses fonctions le mercredi 22 octobre dernier.

Le caporal Button montait la garde devant la Tombe du Soldat inconnu. Il se tenait debout à proximité lorsque les coups de feu ont commencé. Il a vu le tireur, mais il n'a perçu une menace que lorsqu'il a vu M. Zehaf-Bibeau lever son arme et tirer à deux reprises sur le caporal Cirillo. Il y a eu d'autres coups de feu, et le caporal Button s'est mis à l'abri, mais très brièvement. Il s'est ensuite précipité vers son ami blessé, comme nous avons tous pu le constater lorsque nous avons vu les images à la télévision. Avec l'aide de civils, il a tout fait pour tenter de sauver la vie du caporal Cirillo et il a continué ses efforts jusqu'à l'arrivée des ambulanciers.

Le caporal Kyle Button a perdu un camarade ce mercredi matin, alors qu'il montait fièrement la garde près du Monument commémoratif de guerre — une tâche de distinction pour laquelle les membres des Forces armées canadiennes sont honorés d'avoir été choisis.

Comme il est un soldat dévoué, il a repris ses fonctions tout de suite après l'événement tragique. Il a monté la garde au Monument commémoratif de guerre, malgré ce qui s'était produit ce matin-là. Avant de retourner à la base des Forces canadiennes de Gagetown, le caporal Button a complété son affectation, avec sans doute à l'esprit le souvenir constant de la perte terrible et tragique de son ami et camarade.

Il ne pourra jamais oublier ce qui s'est produit le 22 octobre 2014, tout comme nous ne pourrons jamais l'oublier non plus. Le caporal Button peut être fier du courage dont il a fait preuve et de ce qu'il a fait pour venir en aide à son compagnon d'armes. Aux prises avec la pire situation qui puisse se produire dans l'exercice de ses fonctions, il a tiré le maximum de sa formation de soldat et a fait tout ce qu'il a pu.

J'ai eu le privilège et l'honneur de m'entretenir un peu avec Kyle après ce jour fatidique d'octobre. Pendant la visite de cet édifice du Parlement, nous avons discuté de ce qui s'est passé ce jour-là et du rôle extrêmement important des Forces armées canadiennes pour assurer notre sécurité et défendre notre liberté. Nous avons aussi eu la très grande chance de rencontrer le sergent d'armes de la Chambre des communes, Kevin Vickers, et de nous faire prendre en photo avec lui.

Kyle est doux et réservé, mais le dévouement complet pour son camarade dont il a fait preuve lors de ces moments terribles en dit long sur son courage, sa détermination, sa compassion et son professionnalisme. Je raconte aujourd'hui au Sénat ce qu'il a fait parce que j'espère qu'on lui rendra officiellement hommage, comme il le mérite pleinement.

Quand je pense au caporal Kyle Button, les mots d'Abraham Lincoln me viennent à l'esprit :

J'aime qu'un homme soit fier de l'endroit où il vit. J'aime qu'il vive de façon à ce que les gens de son milieu soient fiers de lui.

Oui, caporal Button, nous sommes fiers de vous.

Kyle, je tiens à profiter de cette occasion pour vous exprimer ma profonde gratitude et à vous dire que votre famille, vos amis, vos frères d'armes, les gens de votre ville et de votre province, Terre-Neuve-et-Labrador, et tous vos concitoyens, les gens de notre merveilleux pays, sont très fiers de vous et de ce que vous avez fait.

Merci, caporal Kyle Button.

Des voix : Bravo!

La Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, chaque année, le 6 décembre, les Canadiens se souviennent des 14 jeunes femmes qui ont été assassinées à l'École polytechnique de Montréal. Ces étudiantes ont été tuées parce qu'elles étaient des femmes. Il n'y a pas d'autres raisons. Elles étaient des femmes.

La Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes est une occasion privilégiée de se souvenir des femmes qui sont mortes tragiquement et de prendre conscience de toute la violence dont les Canadiennes sont victimes.

[Français]

Vingt-cinq années se sont écoulées depuis le massacre de l'École Polytechnique de Montréal. Pourtant, les femmes canadiennes continuent d'être touchées par la violence à un taux qui est disproportionné et, 25 ans plus tard, il nous faut toujours lutter pour la sécurité la plus élémentaire des femmes.

[Traduction]

Cette année, honorables sénateurs, en ce 25e anniversaire de la tuerie, la Campagne des roses de la YWCA revêt une importance toute particulière. Cette campagne vise à sensibiliser nos concitoyens à la violence faite aux femmes de notre pays et à les convaincre d'agir pour mettre fin à cette violence, en faisant pression auprès des législateurs d'abord, mais aussi en contribuant à changer la façon dont la société envisage la violence faite aux femmes et y réagit.

Cette année, le mot-clic qu'il faut utiliser sur les réseaux sociaux, et qui résume également le message que l'on veut envoyer, est : #PAScorrect.

Honorables sénateurs, ce n'est pas correct de vivre dans une société où on enseigne aux jeunes filles des moyens d'éviter de se faire violer, mais où on n'enseigne pas aux garçons à ne pas violer. Ce n'est pas correct que la violence dans les médias et la culture populaire cible les femmes de manière disproportionnée. Ce n'est pas correct qu'au Canada, seulement 6 agressions sexuelles sur 1 000 donnent lieu à des poursuites et 3 agressions à un verdict de culpabilité. Ce n'est pas correct que, tous les six jours, une femme se fasse tuer par son mari ou son petit ami. Ce n'est pas correct que plus de 800 femmes autochtones aient été tuées ou soient portées disparues et que nous n'ayons pas encore lancé de commission nationale d'enquête. Nous devrions avoir honte.

Au lieu de chiffres, imaginons que ce sont nos sœurs, nos mères et nos meilleures amies qui meurent ou sont portées disparues par centaines. Il est bien difficile de ne pas considérer que la société laisse tomber ses femmes et ses jeunes filles. La Campagne des roses rassemble les victimes — femmes et filles — et leur permet d'espérer que d'autres vont écouter leur histoire. L'une d'elles, qui n'a même pas complété ses études secondaires, demande à ses camarades de prendre la violence contre les femmes au sérieux et de ne pas se laisser désensibiliser par la violence qu'ils voient dans les médias. Elle-même a déjà été agressée sexuellement, et pas par un étranger dans une ruelle sombre, mais par un de ses proches parents, dans sa propre maison. Elle a réussi à se convaincre que ce n'était rien et que personne n'était à blâmer.

Le problème, honorables sénateurs, c'est que la plupart des femmes ont cette impression. Voilà pourquoi 460 000 d'entre elles sont agressées sexuellement chaque année et que seulement 10 p. 100 de ces agressions sont signalées à la police.

Honorables sénateurs, en ce 6 décembre, rendons hommage aux femmes qui ont eu une mort insensée, aux femmes qui continuent de vivre dans la peur de la violence ainsi qu'aux hommes et aux femmes qui s'emploient à éliminer cette réalité inacceptable dans notre pays.

Des femmes sont tuées simplement en raison de leur sexe, et cela doit cesser.

L'aide médicale contre l'épidémie de fièvre Ebola

L'honorable Don Meredith : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour vous communiquer les dernières nouvelles à propos des mesures que le gouvernement canadien prend pour lutter contre l'Ebola. Au cours du sommet du G20, qui a eu lieu à Brisbane, en Australie, les 15 et 16 novembre, le premier ministre Stephen Harper a fait la déclaration conjointe suivante à propos de l'éclosion du virus Ebola en Afrique de l'Ouest :

Nous sommes profondément préoccupés par l'éclosion du virus Ebola en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone, et attristés par la souffrance et les décès qui en découlent. Nous sommes conscients des graves conséquences humanitaires, sociales et économiques sur ces pays ainsi que de la possibilité que ces conséquences ne s'étendent.

Honorables sénateurs, j'aimerais vous communiquer d'excellentes nouvelles. Le Canada continue de jouer un rôle de chef de file dans la lutte contre l'Ebola en Afrique de l'Ouest, en allouant de nouvelles ressources pour appuyer des interventions dans le domaine de la santé, de l'aide humanitaire et de la sécurité. Je suis heureux que la ministre Rona Ambrose ait annoncé récemment que le gouvernement consacrera 20,9 millions de dollars supplémentaires à la lutte contre cette maladie mortelle qui, depuis le début de son éclosion plus tôt cette année, a enlevé la vie à plus de 6 000 personnes.

Grâce à cet investissement, la contribution totale du Canada s'élève maintenant à 113 millions de dollars, auxquels s'ajoutent du soutien en nature et le don de fioles du vaccin canadien contre le virus Ebola.

(1350)

La ministre de la Santé Rona Ambrose a dit ceci :

Le Canada est un chef de file de la lutte mondiale contre le virus Ebola en Afrique de l'Ouest. Il encourage et appuie les travailleurs de la santé canadiens qui mettent leur vie en péril pour sauver d'autres personnes. Nous sommes heureux de travailler avec la Croix-Rouge canadienne pour encourager plus de travailleurs de la santé à se joindre à la lutte contre ce virus.

Honorables sénateurs, ces propos montrent que le Canada se préoccupe du sort des citoyens de ces pays africains et qu'il fera tout en son pouvoir pour les aider. Les travailleurs seraient déployés pendant huit semaines, soit une semaine de formation, quatre semaines de travail et trois semaines de repos.

Lundi, j'ai eu une séance d'information avec le Dr Gregory Taylor, l'administrateur en chef de la santé publique, ainsi qu'avec des hauts fonctionnaires du ministère de la Santé. Le Dr Taylor m'a assuré que le Canada joue un rôle de premier plan dans la lutte contre l'Ebola, et que les Canadiens sur le terrain font un excellent travail. Il parle régulièrement avec ses homologues provinciaux, et il affirme que le Canada sera prêt à réagir s'il y a une éclosion du virus au pays. Je continuerai à demander aux autres ministères de plus amples renseignements sur cette situation, car c'est un sujet qui me tient à cœur.

Honorables sénateurs, nous ne voulons pas que le virus se propage au Canada, et nous devons faire tout en notre pouvoir pour l'éradiquer dans son pays d'origine. Les membres du personnel canadien risquent leur vie pour sauver d'autres personnes. En tant que sénateurs canadiens, nous devrions les remercier de leur service, ainsi que de leur dévouement envers notre pays.

Il y a encore beaucoup de travail à faire. Lorsque nous célébrerons Noël avec notre famille, nous ne devrions pas oublier ceux qui ont perdu des êtres chers à cause de cette maladie mortelle. Ils ont eux aussi besoin de notre soutien. Je vous encourage à parler aux gens de votre entourage qui travaillent dans le domaine médical et qui seraient prêts à se sacrifier pour empêcher d'autres personnes de mourir, surtout des enfants et des aînés.

[Français]

Les États généraux de la francophonie manitobaine 2015

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, le samedi 29 novembre 2014 avait lieu à Saint-Boniface, au Manitoba, le lancement des États généraux de la francophonie manitobaine 2015, auxquels j'ai assisté. Les États généraux sont une consultation par, pour et avec les francophones du Manitoba qui visent à planifier l'avenir de la vie en français au Manitoba. Cette consultation comprendra plusieurs mois de rencontres avec les francophones et les acteurs de la francophonie qui reconnaissent l'importance du français dans leur vie quotidienne, professionnelle ou personnelle.

L'un des objectifs de cette consultation est de dresser un état des lieux et des enjeux prioritaires de la francophonie manitobaine et d'exposer leurs vraies préoccupations. Plus de 200 Manitobains ont répondu à l'invitation de la Société franco-manitobaine et étaient présents, le 29 novembre, au lancement de ces États généraux de la francophonie.

La francophonie manitobaine et ses amis s'engagent dans un exercice de réflexion individuel et collectif sur son avenir. Je remercie les initiateurs de cette démarche. Tout comme eux, je reconnais l'importance de cette prise de conscience et de décisions. Le moment est critique. Il faut agir.


[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

La Loi sur le droit d'auteur
La Loi sur les marques de commerce

Projet de loi modificatif—Dépôt du septième rapport du Comité des banques et du commerce

L'honorable Irving Gerstein, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, dépose le rapport suivant :

Le jeudi 4 décembre 2014

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-8, Loi modifiant la Loi sur le droit d'auteur, la Loi sur les marques de commerce et d'autres lois en conséquence, a, conformément à l'ordre de renvoi du 19 novembre 2014, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans propositions d'amendement.

Votre comité a aussi fait certaines observations, qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
IRVING GERSTEIN

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1413.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Gerstein, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition

Projet de loi modificatif—Dépôt du vingtième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L'honorable Bob Runciman, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 4 décembre 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

VINGTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-483, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (sortie avec escorte), a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 19 juin 2014, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans propositions d'amendement.

Votre comité a aussi fait certaines observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
BOB RUNCIMAN

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1414.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur MacDonald, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Projet de loi no 2 sur le plan d'action économique de 2014

Dépôt du quatorzième rapport du Comité des finances nationales sur la teneur du projet de loi

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le quatorzième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui porte sur la teneur des éléments des parties 1, 2 et 3 et des sections 1, 8, 13, 14, 19, 23, 25, 30 et 31 de la partie 4 du projet de loi C-43, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures.

(Sur la motion du sénateur Day, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Le Sénat

La Loi sur l'abrogation des lois—Préavis de motion tendant à faire opposition à l'abrogation de la loi et de dispositions d'autres lois

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'article 3 de la Loi sur l'abrogation des lois, L.C. 2008, ch. 20, le Sénat a résolu que la loi suivante et les dispositions des autres lois ci-après, qui ne sont pas entrées en vigueur depuis leur adoption, ne soient pas abrogées :

1. Loi sur les grains du Canada, L.R., ch. G-10 :

- alinéas d) et e) de la définition de « installation » ou « silo » à l'article 2 et paragraphes 55(2) et (3);

2. Loi sur les relations de travail au Parlement, L.R., ch. 33 (2e suppl.) :

- parties II et III;

3. Loi sur les contraventions, L.C. 1992, ch. 47 :

- alinéa 8(1)d), articles 9, 10 et 12 à 16, paragraphes 17(1) à (3), articles 18 et 19, paragraphe 21(1) et articles 22, 23, 25, 26, 28 à 38, 40, 41, 44 à 47, 50 à 53, 56, 57, 60 à 62, 84 (en ce qui concerne les articles suivants dans l'annexe : articles 1, 2.1, 2.2, 3, 4, 5, 7, 7.1, 9 à 12, 14 et 16) et 85;

4. Loi de mise en œuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, L.C. 1996, ch. 17 :

- articles 17 et 18;

5. Loi maritime du Canada, L.C. 1998, ch. 10 :

- article 140;

6. Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme, L.C. 1998, ch. 22 :

- paragraphe 1(3) et articles 5, 9, 13 à 15, 18 à 23 et 26 à 28;

7. Loi de mise en œuvre du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, L.C. 1998, ch. 32;

8. Loi sur le précontrôle, L.C. 1999, ch. 20 :

- article 37;

9. Loi sur l'Office d'investissement des régimes de pensions du secteur public, L.C. 1999, ch. 34 :

- articles 155, 157, 158 et 160, paragraphes 161(1) et (4) et article 168;

10. Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations, L.C. 2000, ch. 12 :

- articles 89 et 90, paragraphes 107(1) et (3) et article 109;

11. Loi sur la responsabilité en matière maritime, L.C. 2001, ch. 6 :

- article 45;

12. Loi sur le Yukon, L.C. 2002, ch. 7 :

- articles 70 à 75 et 77, paragraphe 117(2) et articles 167, 168, 210, 211, 221, 227, 233 et 283;

13. Loi modifiant le Code criminel (armes à feu) et la Loi sur les armes à feu, L.C. 2003, ch. 8 :

- article 23;

14. Loi modifiant la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes et d'autres lois en conséquence, L.C. 2003, ch. 26 :

- articles 4 et 5, paragraphe 13(3), article 21, paragraphes 26(1) à (3) et articles 30, 32, 34, 36 (en ce qui concerne l'article 81 de la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes), 42 et 43;

15. Loi sur la procréation assistée, L.C. 2004, ch. 2 :

- articles 12 et 45 à 58;

16. Loi de 2002 sur la sécurité publique, L.C. 2004, ch. 15 :

- articles 40, 78, 105 et 106;

17. Loi modificative et rectificative (2003), L.C. 2004, ch. 16 :

- articles 10 à 17 et 25 à 27.

(1400)

[Français]

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je tiens à signaler la présence à la tribune de l'épouse de l'honorable Claude Carignan, leader du gouvernement au Sénat.

Madame Carignan, au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Projet de loi de crédits no 4 pour 2014-2015

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-45, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2015, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

Le Régime de pensions du Canada
La Loi sur la sécurité de la vieillesse

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-591, Loi modifiant le Régime de pensions du Canada et la Loi sur la sécurité de la vieillesse (pension et prestations), accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

Projet de loi sur le point de service principal du gouvernement du Canada en cas de décès

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-247, Loi visant à faire du ministère de l'Emploi et du Développement social le point de service principal du gouvernement du Canada en cas de décès d'un citoyen ou d'un résident canadien, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

L'Association parlementaire du Commonwealth

Le Colloque de Westminster sur les usages et la procédure parlementaire, tenu du 16 au 20 juin 2014—Dépôt du rapport

L'honorable David P. Smith : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Association parlementaire du Commonwealth concernant sa participation au 63e Colloque de Westminster sur les usages et la procédure parlementaire, tenu à Londres, au Royaume-Uni, du 16 au 20 juin 2014.

La Conférence parlementaire internationale sur les moteurs de croissance pour le développement, tenue du 18 au 20 novembre 2014—Dépôt du rapport

L'honorable David P. Smith : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Association parlementaire du Commonwealth concernant sa participation à la Conférence parlementaire internationale sur les moteurs de croissance pour le développement, tenue à Londres, au Royaume-Uni, du 18 au 20 novembre 2014.

[Français]

Sécurité nationale et défense

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude sur les services et les prestations dispensés aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres et anciens membres de la GRC, les activités commémoratives et la charte

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le mardi 19 novembre 2013, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense relativement à son étude sur les services et les prestations dispensés aux membres des Forces canadiennes; aux anciens combattants qui ont servi honorablement dans les Forces canadiennes par le passé; aux membres et anciens membres de la Gendarmerie royale du Canada et des organismes qui l'ont précédée; et à toutes leurs familles, soit reportée du 19 décembre 2014 au 31 décembre 2015.

(1410)

[Traduction]

Peuples autochtones

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude des responsabilités du gouvernement fédéral à l'égard des Premières Nations, des Inuits et des Métis

L'honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le jeudi 21 novembre 2013, la date pour le rapport final du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis soit reportée du 31 décembre 2014 au 30 septembre 2015.

Affaires sociales, sciences et technologie

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude des produits pharmaceutiques sur ordonnance

L'honorable Kelvin Kenneth Ogilvie : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le mardi 19 novembre 2013, la date pour le rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada soit reportée du 31 décembre 2014 au 30 avril 2015 et que la date jusqu'à laquelle le comité conserve les pouvoirs pour faire connaître ses conclusions soit reportée du 31 mars 2015 au 31 juillet 2015.

[Français]

Droits de la personne

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final relativement à son examen des mécanismes internationaux visant à accroître la coopération pour régler les disputes familiales transfrontalières

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le jeudi 27 février 2014, le dépôt du rapport final du Comité sénatorial permanent des droits de la personne relativement à son examen des mécanismes internationaux visant à accroître la coopération pour régler les disputes familiales transfrontalières, notamment les efforts du Canada pour favoriser l'adhésion et la conformité universelles à la convention de La Haye sur l'enlèvement et renforcer la coopération avec les États non signataires, afin de défendre les intérêts des enfants soit reporté du 31 décembre 2014 au 31 mars 2015.

[Traduction]

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final sur son examen de la façon dont les mandats et les méthodes de l'UNHCR et de l'UNICEF ont évolué pour répondre aux besoins des enfants déplacés dans les situations de conflits contemporains

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le mardi 6 mai 2014, le dépôt du rapport final du Comité sénatorial permanent des droits de la personne relativement à son examen de la façon dont les mandats et les méthodes de l'UNHCR et de l'UNICEF ont évolué pour répondre aux besoins des enfants déplacés dans les situations de conflits contemporains, en prêtant une attention particulière à la crise qui secoue actuellement la Syrie, soit reporté du 31 décembre 2014 au 30 juin 2015.


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

La fiscalité—Les coopératives de crédit

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et concerne les coopératives de crédit au Canada.

Monsieur le leader, nous avons appris que les caisses populaires et les coopératives de crédit du Canada militent pour que le gouvernement fédéral leur accorde à nouveau un crédit d'impôt. Ce crédit d'impôt a été aboli en 2013. C'était une mesure incluse, pour ne pas dire cachée, dans l'article 15 du projet de loi omnibus C-60 qui pénalisait les caisses de crédit, qui sont des coopératives, et non des banques.

Pour M. Gary Rogers, vice-président des politiques financières à la Credit Central Union of Canada, il s'agissait de la première fois, au cours de ses 28 années de service, qu'il y avait un désaccord aussi marqué entre le gouvernement fédéral et les coopératives de crédit. Il a ajouté, d'ailleurs, que le gouvernement avait refusé toute discussion ou consultation dans le cadre de sa prise de décisions.

Monsieur le leader, les caisses de crédit sont des coopératives, et non des banques. Leur rôle est différent, surtout auprès des plus petites collectivités. Vous pourriez dire que ce sont de petites et moyennes entreprises. Pourtant, en 2013, le projet de loi C-60 les a traitées, en matière d'imposition, exactement comme les banques. C'est la raison pour laquelle elles doivent maintenant, en 2014, militer auprès du gouvernement fédéral pour corriger la situation.

Face à la réalisation que cette mesure, telle qu'elle est énoncée, nuit aux coopératives de crédit et aux caisses populaires, ainsi qu'au développement économique des collectivités, votre gouvernement prévoit-il corriger le tir dans le cadre de son prochain budget et accorder un traitement juste aux coopératives de crédit, comme cela se faisait auparavant?

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Je vous remercie, sénatrice, de votre question. Comme vous pouvez vous en douter, les mesures fiscales seront annoncées dans le cadre des futurs budgets, et non pas plusieurs mois à l'avance, dans cette Chambre, par le leader du gouvernement au Sénat.

En ce qui a trait aux mesures fiscales, comme vous le savez, l'ensemble des mesures que nous avons prises fait partie de plans d'action économiques dont l'objectif est d'assurer une équité fiscale, de créer des emplois et de stimuler l'économie. C'est en ce sens que nous continuerons à prendre des mesures pour atteindre ces objectifs.

La sénatrice Chaput : Monsieur le leader, votre gouvernement a-t-il l'intention d'être à l'écoute des caisses populaires et des coopératives de crédit et d'infirmer sa décision?

Le sénateur Carignan : Comme vous le savez sûrement, et vous avez pu le constater, ce gouvernement est constamment à l'écoute des Canadiens et il s'assure de prendre des mesures équitables en matière de fiscalité, des mesures qui stimuleront l'économie et assureront une meilleure création d'emplois. C'est ce que nous continuerons de faire au cours des prochains mois.

La sénatrice Chaput : Alors, votre gouvernement serait-il prêt à rencontrer les représentants des coopératives de crédit et des caisses populaires pour discuter de cette situation?

Le sénateur Carignan : Comme vous le savez, ce gouvernement et l'ensemble de ses membres, les sénateurs et les députés, sont toujours disponibles pour rencontrer des gens, que ce soit des organismes, des entreprises ou des personnes qui vivent dans leur communauté.

La sénatrice Chaput : Alors, monsieur le leader, si je comprends bien, lorsque votre gouvernement recevra une demande formelle de rencontre de la part des coopératives de crédit et des caisses populaires, si c'est le cas, me dites-vous qu'il sera prêt à les rencontrer dans un avenir assez rapproché?

Le sénateur Carignan : Ce qu'il est important de rappeler, c'est que ce n'est pas à moi de fixer les rencontres auprès d'un ministre en particulier. Comme tout Canadien, les organismes canadiens, les entreprises et les individus peuvent faire des demandes pour rencontrer leur député ou leur sénateur.

D'ailleurs, j'imagine que vous recevez ce type de demande de rencontre. J'en reçois fréquemment, presque toutes les semaines, de la part d'organisations, qu'il s'agisse d'associations étudiantes, d'entreprises ou de gens qui veulent nous sensibiliser à certaines problématiques, et nous sommes toujours ouverts à entendre les commentaires des citoyens.

La sécurité publique

Le contrôle des armes à feu

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Dans deux jours, nous commémorerons les 25 ans de la tuerie de l'École Polytechnique de Montréal. Cela fait 25 ans, comme je l'ai dit tout à l'heure, que 14 jeunes femmes sont mortes par une arme, le Ruger Mini-14, surnommé le fusil du pauvre.

Or, ce fusil semi-automatique est toujours considéré comme une arme non restreinte au Canada. Ce même modèle d'arme a servi à Anders Breivik pour tuer 69 personnes, des jeunes, évidemment, en Norvège.

Monsieur le leader, le Ruger Mini-14 n'est pas une arme de chasse, ou alors, c'est une arme de chasse à l'homme. Par conséquent, votre gouvernement est-il prêt à changer la catégorie du Ruger Mini-14 pour en faire une arme restreinte?

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Sénatrice, comme vous l'avez souligné cette semaine, nous prenons le temps de nous souvenir des crimes commis à l'École Polytechnique il y a 25 ans. Donc, comme vous l'avez dit, le 6 décembre 1989, 14 jeunes femmes ont perdu la vie à la suite d'un acte de violence complètement insensé.

(1420)

Nous continuerons de travailler à l'élimination de la violence faite aux femmes, tout en rendant nos communautés plus sûres pour toutes les Canadiennes et tous les Canadiens, et nous continuerons d'appuyer les victimes et de punir les criminels. Nous vous invitons, d'ailleurs, à appuyer nos mesures pour faire en sorte que la violence faite aux femmes soit réduite à sa plus simple expression.

La sénatrice Hervieux-Payette : J'ai une question complémentaire. Monsieur le leader, ni la Loi constitutionnelle de 1867 ni la Charte canadienne des droits et libertés n'octroient aux Canadiens le droit de posséder et d'utiliser des armes à feu — contrairement à ce qu'on prétend aux États-Unis. La Cour suprême du Canada a réitéré à maintes reprises son rejet de l'argument voulant que la Charte reconnaisse indirectement un droit de propriété pour les armes à feu. En 2005, cette même Cour suprême a statué que la possession et l'utilisation d'armes à feu ne constitue pas un droit ou une liberté que garantit la Charte, mais un privilège.

Votre gouvernement peut-il officiellement dire aujourd'hui, à la lumière des dossiers dans ce domaine, que la possession et l'utilisation d'armes à feu au Canada n'est pas un droit, mais un privilège?

Le sénateur Carignan : Sénatrice, comme vous le savez, la vente de toute arme à feu à des acheteurs non titulaires d'un permis est illégale. Il incombe au vendeur d'établir la validité d'un permis d'armes à feu. La vente illégale d'une arme à feu, y compris la vente à un acheteur non titulaire d'un permis, est passible d'une peine d'emprisonnement obligatoire de trois ans pour la première infraction et d'une peine de cinq ans pour les récidivistes — et, si ma mémoire est bonne, vous avez voté contre ces peines minimales.

Je vous invite donc plutôt à vous ranger avec nous du côté des victimes et à prendre des mesures pour protéger les Canadiens et les Canadiennes.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Hervieux-Payette : Bien que je siège généralement à d'autres comités, j'ai siégé au comité qui a étudié la loi qui a amendé la question des armes à feu, leur possession et leur utilisation. Dans cette loi, vous avez, d'une part, éliminé des exigences liées à la vérification de la validité du permis d'armes à feu au moment de l'achat ou du transfert d'une arme d'épaule. Cela n'existe plus, alors que c'était là avant.

Vous avez, en outre, éliminé l'obligation d'enregistrer les armes non restreintes, éliminé l'obligation de maintenir des données sur les ventes d'armes à feu, abrogé l'autorité législative en vertu de laquelle le contrôleur des armes à feu impose aux entreprises l'obligation de maintenir à jour un registre de leurs ventes, éliminé les réglementations sur les expositions d'armes à feu, détruit les données concernant 5,6 millions d'armes à feu, et abrogé l'autorité de la GRC de changer la classe d'une arme à feu à la suite de certains incidents. Et cette liste n'est même pas exhaustive.

Quelle conclusion les parents des jeunes femmes de l'École Polytechnique devront-ils tirer de ces réformes, en faveur desquelles, effectivement, je ne pouvais voter? À qui profiteront ces changements, sinon au lobby des armes à feu? Qui est donc le bénéficiaire de ces changements, dites-moi?

Le sénateur Carignan : Sénatrice, je trouve odieux que vous fassiez de la politique avec ce drame. En ce qui a trait à la Loi visant la délivrance simple et sécuritaire de permis d'armes à feu, notre gouvernement est déterminé à continuer d'établir des politiques sûres et sensées à l'égard des armes à feu. Nous avons présenté des mesures législatives pour éliminer les formalités administratives inutiles et pour empêcher les personnes qui ne devraient pas posséder d'armes à feu d'en avoir. La Loi visant la délivrance simple et sécuritaire de permis d'armes à feu permettra, pour la première fois, de rendre des ordonnances obligatoires d'interdiction de port d'armes contre les personnes reconnues coupables de cas graves de violence conjugale; elle exigera aussi que les personnes qui acquièrent une arme feu pour la première fois suivent un cours de formation avant de pouvoir l'acheter.

Je voudrais vous lire une citation de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, qui se réjouit d'une telle initiative au niveau de ce contrôle. Ils disent ce qui suit, et je cite :

Il s'agit d'un projet de loi qui satisfait grandement les chasseurs du Québec, puisqu'il vient simplifier les démarches d'octroi de permis pour les utilisateurs respectueux de la loi tout en renforçant l'aspect de la sécurité et de l'éducation.

Donc, sénatrice, ce sont des mesures qui visent à renforcer le contrôle quant à l'émission du permis, de sorte que les gens qui ont commis des actes de violence ou qui sont à risque d'en commettre, particulièrement des actes de violence conjugale, ne puissent pas obtenir de permis. Il y a un contrôle extrêmement serré à ce niveau, et c'est ainsi que nous allons continuer d'agir.

La sénatrice Hervieux-Payette : Il me semble que vous oubliez le fait qu'il n'y a à peu près aucune association policière au Canada, que ce soit la GRC ou les polices provinciales, qui n'est pas préoccupée par les changements que votre gouvernement a apportés au contrôle des armes à feu, notamment par le fait que, depuis 2012, le propriétaire d'un Ruger Mini-14 à l'extérieur du Québec peut vendre son arme sans vérifier si l'acheteur détient un permis. On ne saura même pas où va se retrouver cette arme. Le vendeur doit simplement n'avoir aucun motif de croire que l'acheteur n'est pas autorisé à acheter une arme. Évidemment, il a le motif d'en acheter une.

Franchement, monsieur le leader, quel pays, quelle société peut avoir quelque chose à gagner dans la vente d'armes à feu à n'importe qui, puisqu'on ne saura jamais qui sera le second acheteur? Maintenant qu'on a détruit le registre dans neuf provinces, les policiers n'ont aucun moyen de vérifier. J'aimerais bien savoir comment vous allez pouvoir retrouver les propriétaires antérieurs.

Le sénateur Carignan : Je vous rappelle que la vente de toute arme à feu à des acheteurs non titulaires d'un permis est illégale, et il incombe au vendeur d'établir la validité d'un permis d'armes à feu. La vente illégale d'une arme à feu, y compris la vente à un acheteur non titulaire d'un permis, est passible d'une peine d'emprisonnement obligatoire de trois ans pour la première infraction et d'une peine de cinq ans pour les récidivistes, peines contre lesquelles vous avez voté.

La Loi sur la délivrance simple et sécuritaire des permis d'armes à feu prévoira également, pour la première fois, une interdiction d'acheter des armes pour les personnes déclarées coupables d'infractions graves liées à la violence familiale; elle obligera également ceux qui font l'acquisition d'une arme à feu pour la première fois à suivre un cours de maniement sécuritaire des armes à feu afin de pouvoir acheter une arme.

La réalité, sénatrice, c'est que les criminels n'enregistrent pas leurs armes à feu, ils ne les acquièrent pas de façon légale, ils ne les utilisent pas non plus de façon légale. Donc, notre gouvernement continuera de prendre des mesures sensées pour assurer la sécurité des Canadiens sans imposer des tracasseries administratives inutiles aux Canadiens respectueux de la loi.

Je vous rappelle que, selon Statistique Canada, le taux d'homicides commis à l'aide d'une arme à feu a atteint son plus bas niveau depuis près de 50 ans. Depuis 2008, le taux d'homicides commis avec une arme de poing a connu un recul de 30 p. 100. Les homicides commis à l'aide d'une arme à feu ont atteint un creux historique en 2013, la première année complète qui a suivi l'élimination du registre des armes d'épaule. Vous devriez nous féliciter sur le fait que nos mesures fonctionnent.

La sénatrice Hervieux-Payette : On se dirige, avec le projet de loi C-42, vers une situation où les propriétaires détenteurs de permis ne connaîtront plus de restrictions à l'intérieur de leur province. Les autorisations de transport ne seront donc plus requises. On peut donc mettre des armes à feu dans sa voiture et les y laisser. Cela signifie que les armes restreintes, telles que les armes de poing, pourront être transportées librement et gardées dans des automobiles en tout temps.

Si une personne peut transporter son arme à feu, si elle ne veut pas la laisser dans sa voiture, elle la gardera sur elle; nous ne sommes donc pas plus en sécurité. Quelle est la philosophie derrière cette ouverture aux armes de poing et le fait de permettre que, dans le cadre des nouvelles mesures, les autorisations de transport ne seront plus requises?

Le sénateur Carignan : Sénatrice, le problème avec votre question, c'est que vous avez des préambules qui sont erronés. Malheureusement, compte tenu de la quantité d'affirmations erronées, il m'est difficile d'y répondre et de corriger chacune d'elles.

Je veux simplement vous dire que le projet de loi en question va faire l'objet d'une étude au Parlement, au sein des comités appropriés.

(1430)

Je vous invite à porter une attention particulière à ces projets de loi plutôt que de répandre des faussetés ou de créer des rumeurs ou des craintes inutiles.

Je vous invite donc à agir de façon responsable et à lire le projet de loi.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Hervieux-Payette : Monsieur le leader, je vais convenir avec vous que le Canada compte moins de meurtres commis au moyen d'armes à feu que notre voisin américain. Je peux vous dire aussi qu'un Français a 50 fois moins de risque d'être tué par arme à feu qu'un Américain, parce que les mesures en France sont beaucoup plus restrictives que les nôtres.

Je ne crois pas que nous voudrions comparer le Canada avec le pays qui est à peu près le pire élève de la classe, mais plutôt avec les meilleurs élèves de la classe.

J'aimerais faire une comparaison avec l'Australie, par exemple. À la suite de la tuerie de Port Arthur, l'Australie a adopté certaines mesures, y compris l'offre d'incitatifs aux gens possédant des armes, ce qui leur a permis d'en récupérer 700 000. Les gens avaient l'obligation de déclarer toutes les armes qui étaient légales. De plus, l'Australie a introduit un délai de 28 jours entre la réception d'un permis et l'acquisition d'une arme. Donc, il y avait des registres — et les registres n'ont jamais tué personne. Cela leur permettait de savoir qui était propriétaire de l'arme.

J'aimerais donc savoir quand on pourra faire une meilleure performance afin de se trouver parmi les meilleurs élèves et arrêter de se comparer aux États-Unis, qui sont le pire élève de la classe dans le domaine des meurtres par balle?

Le sénateur Carignan : Votre question est amusante, sénatrice, quand vous dites que je fais référence au pire élève de la classe. Je pense que vous avez mal compris la statistique que je vous ai donnée. C'est Statistique Canada qui compare le Canada avec le Canada, et non avec les États-Unis. Il compare les périodes, et le qualificatif de mauvais élève de la classe s'appliquait à la période du gouvernement libéral, période antérieure à la nôtre.

[Traduction]

L'emploi et le développement social

Le Tribunal de la sécurité sociale

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, il y a deux ans, en 2012, j'ai pris la parole au Sénat pour poser une question sur une mesure qui était enfouie dans l'un des projets de loi omnibus du gouvernement. Il s'agissait du remplacement des conseils arbitraux régionaux et des juges-arbitres de l'assurance-emploi ainsi que de la Commission d'appel des pensions par un Tribunal de la sécurité sociale composé de 74 membres à temps plein.

À l'époque, d'importantes préoccupations ont été soulevées par plusieurs intervenants qui craignaient que l'élimination des conseils arbitraux régionaux et des juges-arbitres de l'assurance-emploi et de la Commission d'appel des pensions ne posent des difficultés à certains des citoyens canadiens les plus vulnérables : les handicapés, les pauvres et les malades.

La leader du gouvernement de l'époque avait qualifié les préoccupations que j'avais soulevées et celles des Canadiens de « hauts cris et [de] récriminations ». Elle a ensuite dit ceci :

Qu'ils attendent qu'elle soit en place, et les sénateurs constateront à notre retour, à l'automne, que les catastrophes annoncées seront tout sauf des catastrophes.

Honorables sénateurs, nous voici maintenant deux ans plus tard et l'on constate que les soi-disant hauts cris et récriminations des Canadiens étaient plus que justifiés. Le nouveau Tribunal de la sécurité sociale est effectivement une catastrophe. En à peine plus d'un an et demi, c'est-à-dire depuis que le tribunal a remplacé les anciennes commissions d'appel, l'arriéré des appels a presque doublé, passant de 6 000 à 11 000.

Comme l'indiquent les renseignements obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information, l'arriéré est composé de demandeurs canadiens qui sont des malades en phase terminale, des personnes suicidaires et des gens criblés de dettes. Nombre d'entre eux attendent une décision depuis des années. De toute évidence, ce tribunal qui a été créé par le gouvernement actuel ne fonctionne pas.

Comment le gouvernement entend-il s'assurer que ceux qui attendent recevront de ce tribunal inefficace une décision en temps opportun concernant leur demande?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Sénatrice Cordy, le nouveau Tribunal de la sécurité sociale a reçu des anciens tribunaux un nombre de cas plus élevé que ce qui était prévu. Nous lui avons donné les moyens d'embaucher 22 nouveaux employés à temps partiel pour traiter cet arriéré de cas.

Le projet de loi C-43, qui est à l'étude au Parlement, vise à éliminer le plafond afin que nous puissions traiter cet arriéré. Comme vous avez une préoccupation particulière pour ce dossier, j'imagine que vous voterez avec nous pour faire adopter ce projet de loi.

[Traduction]

La sénatrice Cordy : Ce que je n'appuyais pas, c'était l'établissement de ce tribunal. Les tribunaux d'appel pour les pensions et l'assurance-emploi se trouvaient dans les régions; les gens pouvaient ainsi s'y rendre. Actuellement, il y a un tribunal à Ottawa et il a certainement démontré son inefficacité.

Environ 58 p. 100 des demandes de prestations d'invalidité ont été rejetées l'année dernière — 58 p. 100. Le tribunal rapporte que 68 p. 100 des gens qui ont interjeté appel ont eu gain de cause, alors que les données obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information nous apprennent que seulement 40 p. 100 ont eu gain de cause. Je ne suis pas certaine si nous devons nous fier aux données obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information ou à ce que rapporte le tribunal, mais je serais portée à croire les données obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information qui indiquent que 40 p. 100 des gens qui interjettent appel des décisions ont eu gain de cause.

Les prestations d'invalidité s'élèvent en moyenne à environ 10 000 $ par année. Il ne s'agit pas d'une fortune. Il est ici question de prestations d'invalidité de 10 000 $ par année et de gens qui ont désespérément besoin d'argent pour payer leurs dépenses quotidiennes. Les gens attendent des années, et 58 p. 100 d'entre eux voient leur demande de prestations d'invalidité être rejetée. Nous savons également, d'après les données obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, que 40 p. 100 des demandeurs qui ont interjeté appel ont eu gain de cause.

Qu'est-ce qui fait traîner les choses? Pourquoi le tribunal a-t-il besoin d'autant de temps pour rendre une décision? Pourquoi ne faisons-nous pas preuve de compassion à l'égard de ces Canadiens handicapés qui attendent des mois et parfois même des années pour obtenir des prestations d'invalidité?

Des voix : Bravo!

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénatrice, comme je l'ai dit, le tribunal a reçu un nombre de cas plus élevé que prévu de la part des anciens tribunaux. Nous lui avons donné les moyens d'engager 22 nouveaux employés à temps partiel pour traiter cet arriéré de cas. Or, le projet de loi C-43, qui est à l'étude au Parlement, vise à éliminer le plafond afin que cet arriéré puisse être traité.

Ainsi, encore une fois, si vous avez une préoccupation particulière vis-à-vis ce dossier, j'espère que vous allez appuyer le projet de loi C-43.

[Traduction]

La sénatrice Cordy : J'ai émis des réserves sur ce dossier lorsque les tribunaux ont été créés. J'ai soulevé le sujet lors d'une période des questions auprès de l'ancienne leader, pour me faire répondre que ce n'était que des récriminations de la part des Canadiens. Eh bien, il se trouve que les inquiétudes de ceux-ci étaient fondées : l'arriéré a presque doublé. Ces gens vivent une crise — ils sont dans le besoin. Une réponse aussi désinvolte sur ce que je devrais appuyer ou non ne leur est d'aucun secours.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Cordy : Le Tribunal de la sécurité sociale est en activité depuis seulement 18 mois et le retard accumulé pour les dossiers traitant de prestations d'invalidité du RPC ou de la Sécurité de la vieillesse a déjà augmenté de presque 50 p. 100. Ce n'est pas une plaisanterie. Une grande partie de ces personnes vivent une crise grave sur les plans des finances ou de la santé. Attendre des années qu'une décision soit prise n'aide en rien les gens dans une telle situation. Ce n'est pas la première fois que je soulève le sujet.

Le 5 juin 2012, à ma question sur le tribunal envisagé, la leader du gouvernement au Sénat a répondu ceci :

Le gouvernement tient à s'assurer que ceux qui ont besoin des services du gouvernement les obtiennent facilement. Nous ne ferions rien qui occasionne des difficultés à celui qui cherche à obtenir les services dont il a besoin.

En réalité, le processus prétendument simplifié cause des difficultés aux Canadiens. Il nuit à ceux qui souhaitent avoir accès au système. Les arriérés ne cessent d'augmenter.

Le gouvernement examinera-t-il le fonctionnement de l'actuel Tribunal de la sécurité sociale, afin d'aider les 11 000 Canadiens qui attendent de savoir s'ils recevront ou non leurs prestations d'invalidité du RPC?

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai dit, nous nous sommes penchés sur le problème. Je suis heureux que vous ayez cité la réponse que j'ai donnée à la fin, parce que le début de votre longue introduction laissait plutôt sous-entendre qu'on n'y avait pas porté attention. Heureusement, vous avez cité ma réponse, qui affirme le contraire du début de votre question.

(1440)

Comme je l'ai dit, et je le répète, nous nous sommes penchés sur le problème, en particulier en embauchant du personnel supplémentaire et en élaborant le projet de loi C-43, qui vise à éliminer les plafonds. J'espère que vous serez de notre côté et que vous voterez en faveur de ce projet de loi. Vous indiquez avoir voté contre l'autre projet de loi, ce qui n'est pas nouveau, car, jusqu'à maintenant, vous votez plutôt contre les projets de loi qu'en leur faveur.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur la Journée Lincoln Alexander

Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-213, Loi instituant la Journée Lincoln Alexander, accompagné d'un message informant le Sénat qu'elle a adopté ce projet de loi sans amendement.

[Traduction]

Le Code criminel
La Loi sur la preuve au Canada
La Loi sur la concurrence
La Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur McInnis, appuyé par l'honorable sénateur Enverga, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur la concurrence et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

La Loi sur l'emploi dans la fonction publique

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Carolyn Stewart Olsen propose que le projet de loi C-27, Loi modifiant la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (accès élargi à l'embauche pour certains militaires et anciens militaires des Forces canadiennes), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je me réjouis de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-27, qui offrira un accès élargi à l'embauche pour les membres actuels des Forces canadiennes et nos anciens combattants.

[Français]

C'est avec plaisir que j'appuie ce projet de loi, qui augmentera les possibilités d'embauche des membres actuels des Forces canadiennes et des anciens combattants.

[Traduction]

Il y a quelques semaines à peine, les Canadiens se sont rassemblés pour exprimer non seulement leur profonde tristesse, mais aussi leur gratitude envers les militaires qui servent notre pays.

Nous avons amélioré et nous continuerons d'améliorer les possibilités et les dispositions législatives pour nos anciens combattants pendant qu'ils servent notre pays et lorsqu'ils font la transition à la vie civile. La Loi sur l'embauche des anciens combattants fait fond sur des engagements qu'a pris le gouvernement d'aider les anciens combattants à se trouver un bon emploi une fois leur service terminé.

[Français]

La Loi sur l'embauche des anciens combattants fait fond sur des engagements qu'a pris le gouvernement d'aider les anciens combattants à se trouver un bon emploi une fois leur service terminé.

[Traduction]

Comme il l'a annoncé dans le budget de 2014, le gouvernement propose de modifier la Loi sur l'emploi dans la fonction publique de manière à améliorer l'accès des anciens combattants aux possibilités d'embauche dans la fonction publique fédérale.

Les modifications proposées dans la Loi sur l'embauche des anciens combattants s'ajoutent aux efforts considérables déployés par le gouvernement au cours des quelques dernières années pour accroître et améliorer les services destinés aux anciens combattants. Entre autres, il a embauché plus de professionnels de la santé mentale, investi dans de nouvelles options de traitement, comme les chiens d'assistance, et cherché à réduire les préjugés associés à la maladie mentale. Nous réduisons également les tracasseries administratives et améliorons la prestation de services pour que les anciens combattants reçoivent tous les soins et le soutien dont ils ont besoin. Nous versons maintenant des paiements à l'avance pour couvrir les frais des services d'entretien ménager et d'entretien de terrain offerts dans le cadre du Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Grâce à ce changement, près de 100 000 anciens combattants, survivants et principaux dispensateurs de soins n'ont plus de paperasse inutile à remplir.

Nous avons également lancé le Navigateur des avantages des anciens combattants, qui permet à un plus grand nombre d'utilisateurs de déterminer facilement à quels programmes et avantages ils sont admissibles.

Chers collègues, dans huit budgets, le gouvernement a consacré plus de 5 milliards d'argent frais aux avantages et services pour les anciens combattants — c'est plus que tout autre gouvernement dans l'histoire du Canada.

Tout récemment, le gouvernement a annoncé de nouvelles initiatives élargies en matière de santé mentale à l'intention des anciens combattants, des militaires et de leur famille.

Tout d'abord, nous allons élargir le réseau de cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel et financer une toute nouvelle clinique à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Cette clinique, dont l'ouverture prévue est à l'automne 2015, offrira des services de santé mentale spécialisés et de haute qualité aux anciens combattants d'Halifax et de la région des Maritimes. Elle viendra s'ajouter aux 10 cliniques spécialisées déjà financées par le ministère des Anciens Combattants et aux sept cliniques exploitées par le ministère de la Défense nationale. Chacune de ces cliniques compte une équipe de psychiatres, de psychologues, de travailleurs sociaux, d'infirmières spécialisées en santé mentale et d'autres spécialistes qui comprennent les expériences et les besoins de nos anciens combattants.

En outre, on créera un bureau satellite à Montréal, alors que les bureaux satellites existants dans la région du Grand Toronto seront élargis. Dans les deux cas, les bureaux permettront d'offrir aux anciens combattants des soins spécialisés près de chez eux, tout en améliorant l'accès aux services d'évaluation, de diagnostic et de traitement.

Le gouvernement consacrera également plus d'argent au Programme de soutien pour les blessures de stress opérationnel. Cela signifie qu'on pourra embaucher 15 autres coordonnateurs du soutien par les pairs afin de répondre aux besoins des militaires, des anciens combattants et de leurs familles. De plus, cela permettra d'accroître la portée du programme afin de rejoindre ceux qui en ont besoin.

À titre d'essai, on élargira l'accès aux Centres de ressources pour les familles de militaires afin d'y rendre également admissibles les militaires libérés pour raisons médicales et leurs familles. D'habitude, les services et les programmes offerts par les centres s'adressaient uniquement aux militaires actifs.

Par ailleurs, un cours de premiers soins en santé mentale sera élaboré et offert partout au pays à l'intention des anciens combattants et de leurs familles. Cette formation aidera à accroître la sensibilisation aux divers troubles de santé mentale afin que les gens puissent réagir tôt ou intervenir lorsqu'un ancien combattant ou un membre de sa famille traverse une crise.

Ces projets de grande envergure seront accompagnés de quelques investissements plus modestes pour, notamment, élaborer des normes nationales concernant le recours à des chiens d'assistance psychiatrique; embaucher un psychologue chargé de fournir des conseils d'expert et d'occuper la fonction de vice-président du nouveau centre d'excellence en santé mentale pour les militaires et les anciens combattants; et mener des recherches sur les liens entre les blessures de stress opérationnel et la santé mentale des membres de famille des anciens combattants.

Chers collègues, le gouvernement demeure résolu à améliorer la santé mentale des anciens combattants canadiens et de leurs familles. Les initiatives de ce genre permettent de fournir non seulement une aide, mais aussi une stabilité à ceux qui ont servi notre pays et qui souhaitent réintégrer la société et mener une vie normale.

La Loi sur l'embauche des anciens combattants et ses règlements constituent une autre mesure prise par le gouvernement pour apporter le type de changements dont nous avons besoin afin d'appuyer nos militaires, aussi bien pendant leur service que pendant leur transition vers la vie civile. Nous savons que les anciens combattants font souvent face à des difficultés durant cette période de transition. Le milieu de travail civil est très différent du contexte militaire, et beaucoup d'anciens combattants se heurtent à des obstacles lorsqu'ils essaient de démontrer comment leurs compétences militaires pourront s'appliquer à d'autres professions.

La Loi sur l'embauche des anciens combattants aidera à régler ce problème en assurant aux anciens combattants la priorité d'embauche dans la fonction publique fédérale. Les modifications présentées dans ce projet de loi permettront de créer un droit de priorité de cinq ans pour les anciens combattants canadiens qui sont libérés pour des raisons médicales liées au service — bref, pour les anciens combattants blessés. En langage clair, les anciens combattants auront la priorité pour occuper les emplois offerts dans la fonction publique.

(1450)

Les anciens combattants qui ont servi à temps plein dans la Force régulière ou la Force de réserve qui sont libérés pour des raisons médicales non attribuables au service conserveront leur niveau actuel de priorité mais pour une durée de cinq ans plutôt que deux. Cela prolongera également la durée de leur droit de priorité pour les postes pour lesquels ils ont les qualifications requises.

Le personnel militaire et les anciens combattants qui ont servi pendant au moins trois ans pourront soumettre leur candidature à des postes affichés à l'interne au gouvernement fédéral pour une période de cinq ans après avoir été libérés honorablement.

Les anciens combattants libérés honorablement qui comptent au moins trois années de service auront un droit de priorité dans les processus d'embauche externes pour une période de cinq ans après leur libération.

Lorsque ce projet de loi sera adopté, il sera rétroactif au 1er avril 2012. Par conséquent, un ancien combattant qui jouissait d'un statut prioritaire en vertu du règlement et qui a perdu ce statut parce qu'il est arrivé à échéance verra son statut reconduit pour cinq ans.

Le même principe s'applique à tous les anciens combattants qui ont toujours un droit de priorité. Nous prolongerons la période de validité de ce droit pour cinq années supplémentaires.

Les anciens combattants qui se remettent de leurs blessures ou maladies ont jusqu'à cinq ans pour être jugés aptes à retourner au travail dans l'armée. Ce projet de loi leur donnera jusqu'à 10 ans pour trouver un emploi dans la fonction publique fédérale, s'ils le désirent.

Chers collègues, ce projet de loi vise à offrir aux anciens combattants des possibilités d'emploi et de carrière à l'extérieur des forces armées en reconnaissance du service qu'ils ont rendu et des sacrifices qu'ils ont consentis pour le Canada.

Chaque année, environ 7 600 membres de la Force régulière et de la Force de réserve quittent l'armée, et environ 1 000 d'entre eux sont libérés pour des raisons médicales. Ces anciens combattants ont les compétences, la formation et l'expérience de travail voulues pour être des candidats particulièrement solides pour occuper des emplois dans la fonction publique. Les nouvelles mesures prévues dans ce projet de loi donneront aux anciens combattants et aux membres des Forces canadiennes libérés la capacité de postuler des postes affichés à l'interne et accorderont aux anciens combattants qualifiés un droit de priorité sur les autres candidats dans les processus d'embauche externes.

La Loi sur l'embauche des anciens combattants est donc un autre moyen de continuer d'honorer les anciens combattants de façon sérieuse et concrète. J'invite tous les sénateurs à m'appuyer pour faire avancer l'étude de ces importantes modifications.

Des voix : Bravo!

L'honorable Joseph A. Day : L'honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une question ou deux?

La sénatrice Stewart Olsen : Bien entendu, sénateur.

Le sénateur Day : Merci. La première porte sur la rétroactivité, dont vous avez parlé à la fin de votre intervention. Si j'ai bien compris, l'avantage sera accordé sur cinq ans au lieu de deux, mais vous avez dit que la mesure est rétroactive à mars 2012. Cela fait deux ans et demi sur les cinq ans. Si nous revenons en arrière et disons qu'un ancien combattant est devenu admissible en mars 2012 — 2013, 2014 et la fin de 2014 —, ai-je raison de comprendre que, en fait, la période sera de sept ans, soit les deux que les anciens combattants avaient déjà, plus cinq? Ou bien les deux ans qui étaient déjà prévus sont soustraits, en ce qui concerne la rétroactivité?

La sénatrice Stewart Olsen : D'après ce que je comprends, il s'agit d'une remise à zéro pour que les anciens combattants qui sont actuellement dans l'armée... Mes notes disent que la période sera portée à cinq années complètes. Je vais vérifier, néanmoins. Sur bien des plans, je ne suis pas une spécialiste de ces questions. Je vais vérifier si la réponse que je vous ai faite est exacte.

Le sénateur Day : Merci beaucoup. Je vous en suis reconnaissant. Nous en sommes à l'étape de la deuxième lecture, qui porte uniquement sur le principe, qui est bon et que j'appuie sans réserve. Je voudrais connaître cette réponse, à propos de ces cinq ans, et savoir si les deux ans et demi en sont déduits.

Voici mon autre question. Vous vous êtes fait un devoir de beaucoup parler du travail en santé mentale qui est en cours ou prévu, mais je croyais que le projet de loi portait sur l'embauche des anciens combattants. Pourriez-vous me dire si les autres éléments dont vous avez parlé se trouvent dans le projet de loi ou s'ils se trouvent ailleurs?

La sénatrice Stewart Olsen : À propos de l'embauche des anciens combattants qui éprouvent des problèmes de santé mentale, j'ai dit qu'il y avait une continuité dans l'intervention. C'est ainsi que je vois, les choses, monsieur le sénateur. Il y a une continuité dans les soins que nous devons apporter. Les soldats ou les membres du personnel des Forces canadiennes qui ont des problèmes de santé mentale sont visés par le projet de loi sur l'embauche, mais ils ont cinq ans dans le service pour décider s'ils pourront revenir au travail ou s'ils doivent chercher un poste à l'extérieur.

Il est donc important que vous sachiez que, pendant ces cinq ans, ils ont une large gamme de services à leur disposition pour les aider à se rétablir, car ce ne sont pas tous les soldats qui, lorsqu'ils éprouvent des problèmes, veulent être libérés. Certains d'entre eux peuvent vouloir continuer. Il est donc important qu'il y ait cette période de cinq ans; et puis, après le traitement, s'il est décidé qu'ils ne peuvent pas retourner au travail, ils ont un maximum de cinq ans encore, après avoir été libérés.

Le sénateur Day : Je crois comprendre néanmoins que le projet de loi porte sur l'élément d'embauche et sur la période de cinq ans, et toutes les autres choses dont vous avez parlé, comme les installations pour les services de santé mentale et l'aide en matière de santé mentale, rien de tout cela ne se trouve dans le projet de loi à l'étude, bien qu'elles soient peut-être prévues ailleurs. Ai-je raison?

La sénatrice Stewart Olsen : Tout à fait. Ces annonces ont été faites. Je voulais simplement vous donner une idée complète de ce que le gouvernement essaie de faire. La Loi sur l'embauche des anciens combattants et cette initiative font partie de ce qui se passe, et il est très important que vous le sachiez pour que vous n'ayez pas à vous poser des questions : les gens vont-ils être libérés et livrés à eux-mêmes, sans plus? Que se passe-t-il? Doivent-ils partir et faire une demande immédiatement? Il m'a semblé que c'était une bonne occasion pour tous les sénateurs de comprendre que ce sont là des politiques permanentes grâce auxquelles nous nous occupons des anciens combattants.

Le sénateur Day : Merci. L'honorable sénatrice n'est pas sans savoir que le vérificateur général vient de publier un rapport à ce propos, et il est fort possible que vous ayez entendu les questions que j'ai posées au leader du gouvernement au Sénat. Peut-être devrais-je donner à mon intervention la forme d'une question.

Vous nous présentez la situation dans son ensemble. La présentez-vous pour répondre au vérificateur général ou par suite de son rapport, qui dit que le processus est long et complexe, qu'il est inacceptable parce que des anciens combattants attendent longtemps d'obtenir de l'aide en matière de santé mentale et ne la reçoivent pas? Par vos observations, avez-vous essayé de faire contrepoids au vérificateur général ou de dire : « Nous avons lu ce que le vérificateur général avait à dire, et nous allons apporter des améliorations »?

La sénatrice Stewart Olsen : J'ai plutôt cherché à rassurer tout le monde, car je ne crois pas que la situation des anciens combattants doive être un enjeu politique, pour être parfaitement honnête. Je crois que tous ceux qui sont ici présents veulent obtenir ce qu'il y a de mieux pour les anciens combattants. C'est un dossier idéal pour que les sénateurs travaillent ensemble, je veux faire avancer toutes les questions que nous soulèverons.

Le vérificateur général a fait d'excellentes observations, et elles sont à l'étude. Je n'ai pas réagi spécialement aux problèmes qu'il a soulevés. J'ai répondu à votre question au cours de mon intervention et dans mes notes, disant que c'est le début d'un dialogue qui permettra d'examiner cette situation, de voir ce qui se passe et peut-être de contribuer à améliorer les choses. Je n'ai certainement pas voulu apporter une dimension politique. Il est extrêmement important d'aider les anciens combattants, et je voudrais que nous le fassions tous.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Day : Je remercie l'honorable sénatrice de ses réponses. Je crois que la dernière réponse a provoqué cette observation, et je crois que l'honorable sénatrice sait que je pense exactement comme elle.

(1500)

J'ai l'immense honneur de siéger avec la sénatrice au Sous-comité des anciens combattants, où nous tentons d'adopter une approche impartiale à l'égard des anciens combattants. Je crois que tous les sénateurs estiment que c'est ce qu'il y a de mieux pour les anciens combattants canadiens.

Ce que j'essayais de dire, c'est que nous avons pour rôle de prendre acte des critiques, peu importe qu'elles nous apparaissent ou pas justifiées. Le vérificateur général a étudié en profondeur le traitement des maladies mentales parmi le personnel en service et les retraités — les anciens combattants — des forces armées, et j'ai bon espoir que nous prendrons tous cette question au sérieux. S'il est possible d'améliorer le moindrement ce qui nous faisons, il faut le faire.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci, sénateur Day. Je suis tout à fait d'accord. Je serais ravie de collaborer avec vous et avec tout autre sénateur dans ce dossier très grave. Personnellement, j'aimerais que le Sénat se dote d'un comité autonome voué aux anciens combattants, ce qui, selon moi, refléterait l'intérêt sincère que les sénateurs portent à la question et s'inscrirait tout naturellement dans leur mandat. Merci beaucoup. Les suggestions et les critiques sont toujours les bienvenues. Après tout, personne n'est parfait, et je tiens à collaborer avec tout le monde. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom du sénateur Kenny, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur la sûreté et la sécurité en matière énergétique

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Tannas, appuyée par l'honorable sénatrice Batters, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-22, Loi concernant les opérations pétrolières au Canada, édictant la Loi sur la responsabilité et l'indemnisation en matière nucléaire, abrogeant la Loi sur la responsabilité nucléaire et modifiant d'autres lois en conséquence.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je participe au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-22. J'aimerais d'abord remercier les fonctionnaires qui m'ont fait bénéficier d'une excellente séance d'information à mon bureau, cette semaine, mardi plus précisément. Ces professionnels connaissent très bien les particularités de ce projet de loi. Également, la présence à cette réunion du représentant du ministre Greg Rickford, ministre responsable de ce projet de loi, a été très utile. Je les remercie.

[Traduction]

Je crois qu'il y a beaucoup de bon dans le projet de loi. Si je devais émettre une critique, elle se rapprocherait de celle que j'ai formulée relativement au projet de loi C-3 : dans l'ensemble, c'est un projet de loi adéquat, sauf qu'il ne va pas assez loin. Il appliquerait des mesures qu'il faut apporter parce qu'elles sont nécessaires. Mon collègue albertain, le sénateur Tannas, les a très bien expliquées.

C'est d'ailleurs intéressant que lui et moi soyons le parrain et le porte-parole du projet de loi, pour ainsi dire, alors que nous n'habitons ni l'un ni l'autre à proximité des océans auxquels s'appliqueront ces mesures ni des installations nucléaires qu'il concerne. Cependant, comme tout bon Albertain, nous connaissons le dossier à fond parce que nous l'avons étudié attentivement. Dans le cas du sénateur Tannas, c'est déjà évident, mais j'espère que ce le sera aussi en ce qui me concerne.

Toutefois, comme nous sommes de l'Alberta, nous avons étudié ce dossier de façon approfondie et nous le connaissons bien. C'est déjà clair dans le cas du sénateur Tannas et j'espère que ce le sera aussi pour moi.

Le projet de loi augmente le montant maximal d'indemnisation payable à des tiers par l'exploitant d'une installation nucléaire. Le niveau de la responsabilité absolue, qui s'élève actuellement à 75 millions de dollars, atteindra 1 milliard de dollars après trois ans. La notion de responsabilité absolue suppose évidemment qu'il n'y a pas d'obligation de prouver qu'il y a eu faute. Les exploitants seront tenus de verser jusqu'à un milliard de dollars sans qu'il soit nécessaire de prouver qu'une faute a été commise.

Cette obligation se chiffrait auparavant à 75 millions de dollars. Il est intéressant de noter que l'une des premières recommandations proposant d'augmenter le niveau de responsabilité de l'industrie nucléaire a été faite par le Sénat au début des années 2000. Encore une fois, le travail du Sénat est pris en compte dans les initiatives du gouvernement. Il aura simplement fallu un peu plus de temps que plusieurs d'entre nous l'auraient souhaité, mais réjouissons-nous du fait qu'on ait donné suite à notre recommandation.

Les exploitants seront tenus d'avoir une assurance ou une autre garantie financière acceptable. À la suite à la séance d'information à laquelle j'ai assisté, je suis convaincu qu'il existe des formes de garantie fiables, autres que des actifs financiers à hauteur de la limite d'un milliard de dollars, ce qui est une bonne chose.

Le projet de loi C-22 rallonge aussi — et c'est important — la période durant laquelle des répercussions ou des maladies découlant d'un accident nucléaire peuvent faire l'objet de revendications. Jusqu'à maintenant, cette période était de 10 ans. Grâce à la nouvelle mesure législative, les personnes affectées par un accident nucléaire auront jusqu'à 30 ans pour être admissible à une indemnisation, ce qui est aussi une bonne chose.

La question qui se pose et qui, dans une certaine mesure, se veut une critique et certainement une préoccupation, est de savoir pourquoi cette mesure législative s'applique uniquement aux installations nucléaires, aux centrales. D'autres installations sont visées, comme par exemple les installations de recherche que l'on trouve dans des laboratoires d'université. Toutefois, il ne semble y avoir aucune exigence de garantie dans le cas d'accidents causés ou provoqués par, ou mettant en cause, des entreprises qui, par exemple, approvisionnent une installation nucléaire d'une quelconque façon. Il en est de même pour les tiers qui apportent leur soutien à l'installation.

Par conséquent, cette situation suscite des préoccupations. Encore une fois, il ne s'agit pas d'un problème particulier au projet de loi. Nous disons simplement que cette mesure législative aurait peut-être pu aller un peu plus loin.

Il est également vrai que le projet de loi va permettre au Canada de ratifier le traité qui découle de la Convention sur la réparation complémentaire des dommages nucléaires, de l'Agence internationale de l'énergie atomique. Nous pourrons maintenant ratifier notre adhésion à ce traité, ce qui donnera accès à un autre fonds d'indemnisation, international celui-là, qui pourrait être utile si un accident se produisait au Canada. Le problème avec les accidents nucléaires est évidemment le fait que 1 milliard de dollars est une somme relativement peu élevée, compte tenu des risques et des répercussions globales possibles. Sauf erreur, dans le cas de l'incident survenu au Japon, les coûts s'élèvent maintenant à environ 42 milliards de dollars et ils continuent de grimper.

Je suis favorable aux formes d'énergie qui n'émettent pas de carbone, et celle-ci en est une. Toutefois, c'est une industrie très coûteuse. Les coûts de construction et d'exploitation des installations sont très élevés. Par conséquent, leur coût global est une considération importante.

L'autre chose qu'il ne faut pas oublier, bien entendu, est que la plupart des centrales appartiennent à l'État. La limite de la responsabilité est donc, dans une certaine mesure — je ne dirais pas discutable —, mais il y a certainement des ressources pour y suppléer en cas d'incident pour lequel la responsabilité dépasserait 1 milliard de dollars.

La deuxième grande section de ce projet de loi s'applique à l'exploration et à la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières extracôtières. Nous savons tous très bien, depuis l'explosion de la plateforme de BP dans le golfe, les risques qui y sont associés et nous sommes tous vivement préoccupés par ces risques.

(1510)

Répétons que le projet de loi est utile, car il fait passer la limite de responsabilité d'environ 30 millions de dollars dans la zone extracôtière de l'Atlantique et de 40 millions de dollars dans l'Arctique à 1 milliard de dollars. Il s'agit d'une responsabilité absolue, il n'est pas nécessaire d'établir la faute. Les sociétés impliquées dans un déversement ou une explosion dans ces régions en seraient de facto tenues responsables et elles doivent avoir l'argent nécessaire à cette fin.

Les sociétés peuvent partager cette responsabilité, ou une partie de cette responsabilité, en cotisant à un fonds auquel elles ont toutes accès, ce qui réduirait leur coût global. À mon avis, cette collaboration fonctionnera et elle aidera l'industrie à faire diminuer les coûts afférents. Il s'agit donc d'une bonne mesure.

Contrairement à l'amélioration que le projet de loi prévoit pour secteur le nucléaire, il n'y a aucune limite de responsabilité pour les sociétés pétrolières et gazières. Les sociétés sont responsables, indépendamment de leur faute, jusqu'à une limite de 1 milliard de dollars, mais le gouvernement peut poursuivre ces sociétés pour bien davantage que la limite, ce qui est très bien.

Il convient aussi de souligner que des gens ont dit être inquiets du fait que ces deux secteurs ne sont pas traités de la même façon, à savoir que le secteur nucléaire bénéficie d'une limite de responsabilité. L'Association canadienne du droit de l'environnement a très bien exposé cette préoccupation, ainsi que d'autres craintes, dans une lettre datée du 3 juin 2014 qu'elle a fait parvenir au comité de l'autre endroit. Je m'attends à ce que cette lettre soit présentée pendant l'étude au comité au Sénat, et je proposerais que la directrice exécutive et conseillère juridique de l'association soit appelée à témoigner pour parler de ces préoccupations. Je l'ai d'ailleurs rencontrée tout récemment. Elle est très raisonnable et fort impressionnante. Elle ferait un excellent témoin, car elle pourrait nous aider à mieux examiner ces motifs de préoccupation et à en évaluer la portée et l'importance.

Après cette discussion technique du projet de loi, j'aimerais prendre un moment pour souligner de nouveau la contribution du Sénat. Il est intéressant de rappeler que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a publié, en août 2010, un rapport intitulé Les faits ne justifient pas l'interdiction des opérations actuelles de forage en mer. Le comité était présidé, à l'époque, par le sénateur Angus, un ancien collègue qui nous manque, bien sûr, bien que le sénateur Neufeld l'ait remplacé avec brio à la tête du comité.

Après l'explosion de la plateforme de BP dans le golfe du Mexique, nous avons laissé de côté tous nos autres dossiers pour produire ce rapport. Quand je l'ai relu, j'ai été à la fois ravi et surpris de redécouvrir son contenu exhaustif et l'excellence des nombreuses recherches menées par le comité, avec l'aide de chercheurs et de témoins, bien sûr.

Le rapport énonce plusieurs recommandations. Voici la sixième :

Le comité recommande un examen approfondi de la question de la responsabilité, y compris le rajustement des seuils en fonction de la réalité économique actuelle.

Le Comité de l'énergie peut se féliciter, puisque le gouvernement a encore une fois écouté le Sénat et, plus précisément, le comité. Je le souligne avec fierté.

Le rapport contient d'autres recommandations importantes dont le gouvernement devrait tenir compte et qu'il a peut-être déjà examinées. J'aimerais les décrire brièvement.

Le comité a recommandé la tenue de discussions approfondies entre les organismes de réglementation et l'industrie au sujet des circonstances où il faudrait exiger le forage de puits de secours. Cette recommandation fait suite au déversement de BP dans le golfe, puisqu'il avait alors fallu des semaines, plus précisément 87 jours, avant que l'entreprise puisse forer un puits de secours afin de faire dévier les émissions jusqu'à un endroit où elles pourraient être captées. Il faut donc penser à la disponibilité, à la capacité et à la proximité des ressources quand on veut rendre possible le forage rapide d'un puits de secours. Notons qu'on ne recommande pas de forer un puits de secours à l'avance, au cas où un déversement surviendrait, puisqu'on forerait alors deux puits quand un seul peut suffire, ce qui doublerait les risques associés au forage sous-marin, dans un milieu souvent difficile.

Une autre recommandation veut qu'il y ait davantage de collaboration entre tous ceux qui doivent intervenir en cas de déversement pétrolier pour élaborer, préparer et mettre à l'essai le dispositif avant que ne se produise un déversement. Les protagonistes sont nombreux dans ce domaine. Il y a deux sociétés sans but lucratif, l'une dans l'Est et l'autre dans l'Ouest, bien que celle de l'Est étende son champ d'action très loin vers l'ouest et s'occupe également des eaux intérieures. Bien entendu, les entreprises doivent avoir des ressources. Il y a des partenaires internationaux. L'an dernier, au cours de son étude de la sécurité du transport des produits pétroliers, le comité s'est rendu en Alaska et dans l'État de Washington. Nous avons été très impressionnés par les ressources qu'on y possède pour contenir les déversements, surtout en Alaska, bien connue à cause du déversement de l'Exxon Valdez. On y est particulièrement sensible aux déversements. Les ressources, l'organisation et le leadership qu'on possède dans cette région sont tout à fait remarquables et impressionnants.

Le problème, c'est que, dans le Nord et dans les forages extracôtiers en général, il peut y avoir de vrais risques. Il est difficile de prévoir des ressources à proximité de toutes les plateformes de forage. Le comité a été d'avis qu'il fallait une plus grande collaboration pour discuter des moyens de mobiliser ces ressources lorsque, malheureusement, on en a besoin.

Le comité a aussi estimé qu'il fallait plus de transparence au sujet des plans des entreprises : réaction aux déversements, réaction aux explosions et récupération. Je ne suis pas sûr que les instances gouvernementales aient répondu, mais il est certain qu'il y a de bonnes intentions du côté de l'industrie, qui veut faire quelque chose, et des organisations sans but lucratif qui s'occupent de récupérer le pétrole déversé. Je tiens à souligner de nouveau que c'était là un problème abordé dans le rapport.

Le projet de loi fait quelque chose de très important. Il permet aux intervenants de prendre une décision sur l'utilisation d'agents de traitement des produits déversés, s'ils estiment que, tout bien considéré, il vaut mieux pour l'environnement les utiliser plutôt que s'en abstenir. Imaginons le cas où un puits explose. Une substance toxique, un produit pétrolier suinte ou, pire encore, commence à dériver vers les côtes, où peuvent se trouver des habitats fragiles. Il faut décider de faire quelque chose de plus radical parce que, à cause des eaux agitées, les estacades ne marchent pas, parce qu'il n'y en a pas assez ou que le pétrole se déplace trop rapidement, parce qu'on n'a pas pu le contrôler ou le contenir. Il peut alors être sage, dans l'intérêt de l'environnement, d'utiliser des diluants et divers types de produits absorbants, voire d'enflammer le produit qui se déverse.

Pour l'instant, aucun pouvoir ne permet de prendre cette décision, et les intervenants ont demandé ce pouvoir. Ce sont des gens responsables. Je les ai rencontrés et j'ai discuté avec eux. Le comité en a fait autant. Je crois que c'est là un grand avantage et que ce pouvoir ne sera pas utilisé à la légère ni sans une sérieuse réflexion.

Enfin, je voudrais rappeler que le ministre et d'autres personnes ont dit fréquemment que le projet de loi consacrait le principe du pollueur-payeur. Consacrer ainsi ce principe, c'est intrinsèquement défendable, intrinsèquement bon, est-on porté à penser, et c'est un fait.

(1520)

Je reviens à ce que je disais au sujet de la responsabilité, à savoir si les limites qui ont été établies font en sorte que le pollueur paie suffisamment ou non, particulièrement en ce qui concerne l'énergie nucléaire. J'ai expliqué pourquoi, à mon sens, les limites étaient probablement aussi raisonnables qu'on peut l'espérer dans un régime commercial et économique et compte tenu de l'équilibre qu'il faut trouver.

Beaucoup d'environnementalistes seront en désaccord avec moi et trouvent le nucléaire très inquiétant. Il m'inquiète aussi beaucoup, mais je suis particulièrement préoccupé par les changements climatiques. Il me semble qu'il faut donner aux énergies renouvelables de remplacement la chance d'être exploitées et de l'être efficacement.

Le projet de loi est important dans tout ce domaine de l'établissement du permis social dont j'ai souvent et longuement parlé au Sénat. Cela montre que des mesures sont prises pour que nous devenions plus responsables à l'égard de l'environnement au Canada. Bien entendu, ce n'est pas assez.

Comme M. Manning l'a dit, nous devons prendre très au sérieux l'établissement du prix du carbone. Nous devons dire clairement que, s'il y a une explosion dans une entreprise de forage en mer, notamment des forages gaziers, il peut y avoir des impacts énormes au plan des émissions de gaz à effet de serre. Cela reste un problème, et c'est aussi un problème en ce qui concerne l'obtention du permis social pour réaliser des projets comme la construction des oléoducs dont nous croyons avoir besoin pour nous procurer la richesse que nous pourrons utiliser pour bâtir un avenir fondé sur les énergies renouvelables. Cela doit être au centre de toute vision de l'avenir.

Je l'ai déjà dit hier et je le répète aujourd'hui : je crois que l'effet de levier de chaque dollar investi dans un projet pétrolier et gazier par opposition à un projet d'énergie renouvelable est de six à un. On obtient six emplois de plus pour ce dollar dans un projet d'énergie renouvelable par opposition à un projet pétrolier et gazier.

Nous nous préoccupons tous du Canada rural et du soutien pour assurer la survie de ses collectivités. Lorsque vous construisez une grande installation à l'extérieur d'une ville comme Edmonton, vous ne soutenez pas un grand nombre de collectivités rurales. Toutefois, les énergies renouvelables dispersées, comme la bioénergie solaire et éolienne, sont des projets énergétiques qui, par définition, sont mis en œuvre dans des régions rurales et qui, souvent, soutiennent les collectivités rurales en créant des emplois, en fournissant de l'énergie et en aidant les exploitations agricoles. Ces initiatives assurent un revenu supplémentaire aux exploitations agricoles, elles rendent l'agriculture plus rentable et lui permettent dans bien des cas de survivre parce que, évidemment, ces exploitations doivent faire face à des risques que bon nombre d'autres entreprises ne peuvent même pas imaginer. L'énergie distribuée et l'énergie renouvelable permettent d'aider les agriculteurs.

Je termine en parlant brièvement de la directive sur la qualité des carburants. Encore une fois, c'est une question d'approbation sociale. Nous avons très mauvaise réputation en Europe. J'étais là tout récemment avec une délégation qui a rencontré des députés de l'Union européenne. Certains d'entre eux se sont moqués de la réputation du Canada dans le monde en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre. Le projet de loi nous aide à lutter contre ces railleries et cette perte de réputation, mais c'est un fait que cette mesure n'est pas suffisante et qu'il faut faire davantage.

Nous avons pu le constater avec la directive sur la qualité des carburants. Cette directive a été élaborée par l'Union européenne sur une période de plusieurs années et elle est clairement discriminatoire à l'égard du pétrole de l'Alberta. Il en est ainsi dans une large mesure parce que nous avons des méthodes scientifiques fiables qui permettent à l'Union européenne de connaître nos émissions. Elle croit que notre pétrole est plus polluant que celui du Nigeria, qu'elle préfère acheter plutôt que le nôtre. L'Union européenne n'a pas encore acheté notre pétrole, mais si nous mettons en place un oléoduc Ouest-Est, cette situation pourrait poser un problème. À l'heure actuelle, les produits dérivés de notre pétrole peuvent être vendus. En fait, ils sont probablement vendus en Europe à l'heure actuelle. Par conséquent, ces produits sont eux aussi en danger. Il faut éviter qu'un organisme aussi puissant que l'Union européenne fasse preuve de discrimination à l'égard de notre pétrole. Cette situation envoie dans le monde entier un message qu'il est très difficile de contrer.

Nous croyions surmonter cette difficulté. D'ailleurs, lorsque j'ai accompagné la délégation, la semaine dernière, notre personnel diplomatique a dit à plusieurs reprises qu'il ne fallait pas dire quoi que ce soit au sujet de la directive sur la qualité des carburants, par crainte de donner l'impression que nous crions victoire. Or, la partie n'est pas encore gagnée.

Hier, on a appris que la Commission européenne, qui représente en quelque sorte la fonction publique de l'Union européenne, avait recommandé aux élus de l'Union européenne de faire marche arrière en ce qui concerne la directive sur la qualité des carburants, et que les élus ont rejeté cette recommandation. Par conséquent, la directive, qui propose une approche discriminatoire à l'égard des produits pétroliers et gaziers du Canada, est de nouveau à l'étude. Encore une fois, il faut obtenir le permis social, et en faire davantage pour démontrer que la question de l'environnement est prise au sérieux, en particulier par le gouvernement.

Quand le gouvernement s'en prend aux processus et aux groupes qui visent à protéger l'environnement, et quand il ne parvient pas à négocier avec les groupes autochtones, préférant déléguer cette responsabilité à des sociétés qui ne sont ni autorisées ni habilitées à le faire, il envoie exactement le mauvais message. Afin d'obtenir le permis social nécessaire pour mener à bien les projets visés par le projet de loi, nous devons prendre en compte les questions et les problèmes liés à l'environnement, et démontrer au monde entier que nous avons vraiment l'intention d'agir dans ce dossier.

Je ne suis pas du tout en train de dire que je suis contre le projet de loi. Je crois qu'il aura des effets positifs. J'ai hâte que le comité se penche sur les préoccupations qu'il suscite ainsi que sur ses aspects positifs et négatifs. Je m'attends à ce que les audiences du comité soient très constructives, comme toujours.

Merci.

L'honorable Leo Housakos (Son Honneur le Président suppléant) : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.)

L'ajournement

Adoption de la motion

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement), conformément au préavis donné le 3 décembre 2014, propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera après l'adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu'au lundi 8 décembre 2014, à 18 heures et que l'application de l'article 3-3(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi sur la Journée du Parcours vers la liberté

Troisième lecture—Report du vote

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Ngo, appuyée par l'honorable sénateur Enverga, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-219, Loi instituant une journée nationale de commémoration de l'exode des réfugiés vietnamiens et de leur accueil au Canada après la chute de Saïgon et la fin de la guerre du Vietnam, tel que modifié.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi S-219, loi instituant une journée nationale de commémoration de l'exode des réfugiés vietnamiens et désignant une date comme « Jour de l'Avril noir », devenu la « Journée du Parcours vers la liberté », après amendement par le comité.

Honorables sénateurs, j'aimerais d'abord remercier le sénateur Ngo d'avoir porté la question à notre attention.

(1530)

Honorables sénateurs, le 30 avril est l'une des dates les plus importantes de l'histoire collective des Vietnamiens de partout dans le monde. Elle rappelle la chute de Saïgon, le 30 avril 1975, le jour où le Vietnam du Sud est tombé aux mains du Vietnam du Nord. Ce fut le début de l'exode de millions de Vietnamiens qui ont dû quitter leur patrie.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, nous avons entendu un certain nombre de témoins à l'étape de l'étude au comité. Il y a toutefois une personne qui voulait comparaître que nous n'avons pas pu accommoder, et je lui ai promis que j'allais vous lire sa lettre. Il s'agit de l'ambassadeur du Vietnam au Canada. La lettre se lit comme suit :

Mesdames et Messieurs les sénateurs,

Je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez de vous entretenir de l'état actuel des relations Vietnam-Canada et d'exprimer un point de vue différent sur le S-219.

L'an dernier le Canada et le Vietnam ont célébré le 40e anniversaire de leurs relations diplomatiques. Le Canada a reconnu le Vietnam, alors appelé République démocratique du Vietnam, en 1973 (avant la fin de la guerre intervenue en 1975) et l'a toujours reconnu et appuyé depuis sa réunification. Le Vietnam est reconnaissant au Canada de la compréhension et du soutien qu'il lui a aimablement manifestés au cours des 40 dernières années.

L'ambassadeur continue ensuite de décrire en long et en large toutes les relations bilatérales que le Canada et le Vietnam ont entretenues. Je ne vais pas lire ce passage, compte tenu des contraintes de temps.

L'ambassadeur ajoute ceci :

Par contre, le projet de loi du sénateur Ngo renvoie au passé et brosse un portrait sombre et étriqué du Vietnam, de ses relations internationales et de son histoire. En outre, il vise à consacrer cette vue des choses en proclamant le 30 avril « Jour de l'Avril noir ».

Le gouvernement du Vietnam réprouve cette représentation négative et sélective et a fait part de ses objections en privé et en public.

Selon moi, si ce projet de loi recevait l'approbation du Parlement, il ferait douter le peuple du Vietnam et la communauté internationale de la bonne volonté du Canada envers notre pays.

Le sénateur Ngo a déclaré devant le comité que son projet de loi n'était pas politique et n'aurait aucun effet sur les relations bilatérales entre le Canada et le Vietnam. C'est contraire à la vérité.

En fait, le gouvernement du Vietnam a fait valoir à plusieurs reprises aux plus hauts niveaux du gouvernement du Canada et de l'institution parlementaire ses graves préoccupations concernant l'esprit et la lettre de ce projet de loi.

S'il est adopté, ce projet de loi aura un impact négatif sur les relations bilatérales croissantes entre nos deux pays. Ce projet de loi a beau être qualifié d'apolitique, il incite clairement à la haine et à la discorde nationales, non à l'unité.

Après avoir sillonné le Canada en ma qualité d'ambassadeur, je crois fermement que ce projet de loi ne correspond pas aux vues de la majorité des Canadiens vietnamiens. Il est dommage que le comité n'ait pas eu l'occasion d'entendre des témoins de différentes régions du pays.

Honorables sénateurs, à propos des réfugiés, dont il est amplement question dans le S-219, le gouvernement du Vietnam est reconnaissant au Canada de l'accueil qu'il a réservé à des milliers de Vietnamiens à un moment très difficile de l'histoire de notre pays il y a de cela bien des années.

C'était une époque de guerre, de pauvreté, de désunion et de souffrance. Des millions de Vietnamiens innocents en ont pâti.

Les jours noirs de la guerre et de la souffrance sont ennemis de l'humanité, du développement et de l'espoir.

Le Vietnam et les membres de sa diaspora internationale ont les yeux tournés vers l'avenir et vers des jours meilleurs grâce à l'aide et à l'amitié de pays comme le Canada.

Depuis cette époque difficile, les relations d'amitié et de coopération entre nos deux pays se sont sans cesse développées dans tous les domaines.

Comme je l'ai dit, nos deux pays viennent de célébrer le 40e anniversaire de leurs relations diplomatiques. Il nous faudrait profiter de l'occasion pour mettre en lumière ce qu'il y a de positif, le présent et l'avenir — et non ce qu'il y a de négatif dans le passé.

Honorables sénateurs, les Vietnamiens canadiens de Colombie-Britannique, des Prairies, de l'Ontario, du Québec, des provinces de l'Atlantique, de Terre-Neuve-et-Labrador et même du Grand Nord, sont des gens travailleurs qui forment une partie importante de la mosaïque culturelle canadienne. Ils constituent un pont entre nos deux pays. Voilà ce qu'il nous faudrait célébrer ensemble.

En conclusion, laissons dans le passé les jours noirs de la guerre, de la souffrance et de la désunion. Le Vietnam et les Vietnamiens de par le monde ont fait un bon bout de chemin en 40 ans. Employons-nous à bâtir l'avenir qu'ont tracé les ministres Baird et Pham Binh Minh en septembre 2014. Concentrons-nous sur ce qui nous rapproche et non sur ce qui nous désunit.

Je vous remercie de votre temps et de votre attention.

Honorables sénateurs, comme je l'ai dit, ce projet de loi a maintenant été amendé lors de l'étude au comité et le titre a été remplacé par « Journée du Parcours vers la liberté ».

Selon le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, au moins 250 000 Vietnamiens ont péri en mer lors de leur tentative désespérée pour fuir.

Comme je l'ai dit à l'étape de la deuxième lecture, honorables sénateurs, être réfugié est l'une des plus dures épreuves qu'une personne puisse vivre. Vous êtes accablé par un sentiment d'impuissance lorsque votre sort dépend de la bonne volonté de la communauté internationale.

Encore une fois, j'en profite pour remercier le Canada, et je rends hommage au premier ministre Trudeau pour ses politiques qui ont permis aux Vietnamiens de venir au Canada, et à ma famille de s'y installer en 1975.

Ceux d'entre nous qui ont été réfugiés développent des liens tacites. Nous sommes tout à fait conscients de la souffrance à laquelle tous les réfugiés doivent faire face, à divers degrés. Certains d'entre nous ont eu la chance exceptionnelle d'être accueillis à bras ouverts dans un pays. Plus particulièrement, nous soulignons les efforts des familles, groupes religieux, groupes de bienfaisance et organisations non gouvernementales du pays qui ont parrainé quelque 34 000 réfugiés vietnamiens au Canada. Nous commémorons également les souffrances éprouvées par beaucoup de réfugiés vietnamiens.

Honorables sénateurs, à ce stade-ci, j'aimerais souligner la contribution de l'ancienne mairesse d'Ottawa, qui a fait un travail remarquable pour accueillir des Vietnamiens à Ottawa. Marion Dewar, mairesse d'Ottawa en 1975, a vu les souffrances des nombreux réfugiés que l'on appelait, souvenons-nous, des « réfugiés de la mer ». Elle a sollicité l'aide de sa collectivité pour qu'on appuie ces réfugiés vietnamiens, puis elle a communiqué avec le gouvernement fédéral, qui avait établi un quota de 8 000 personnes, pour l'informer qu'Ottawa accepterait la moitié de ces réfugiés. Le projet était connu sous le nom de « Projet 4000 », dans le cadre duquel 4 000 réfugiés ont été acceptés à Ottawa.

Grâce aux efforts de Marion Dewar, Ottawa a fait passer à 60 000 le nombre de réfugiés acceptés. Marion Dewar a dirigé cette initiative, et elle a encouragé plusieurs maires partout au pays à y participer également. Par conséquent, beaucoup de collectivités ont uni leurs efforts et elles ont reconnu l'importance cruciale du travail de Marion Dewar, d'où leur appui à sa cause.

Aujourd'hui, j'ai parlé au fils de Marion Dewar, Paul Dewar, qui est le député d'Ottawa-Centre. Il m'a dit : « Si vous comptez rendre hommage à ma mère pour le travail qu'elle a accompli, sachez que si elle était ici, elle dirait qu'il ne faut pas la féliciter, elle, mais bien les Canadiens et les membres de sa collectivité. »

Honorables sénateurs, puisque j'ai été une réfugiée, je m'en voudrais de ne pas remercier Marion Dewar et tous les Canadiens qui ont contribué à faire du Canada une terre d'accueil pour bien des réfugiés.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Jaffer : Je sais que la plupart d'entre vous ont entendu jusqu'à plus soif mon histoire de réfugiée de l'Ouganda, mais je ne me lasse pas de la raconter. Comme vous le savez, je suis Indienne d'origine et c'est la raison pour laquelle on m'a renvoyée de l'Ouganda. Nous sommes tous fiers de vivre au Canada. J'aimerais vous décrire ma maisonnée.

Mes petits-enfants parlent le gujarati, une langue indienne, avec quelques-uns d'entre nous à la maison. Mon petit-fils est en immersion française et s'initie à la cornemuse. Mon fils est un joueur professionnel de cornemuse avec le Irish Regiment, bien connu du sénateur Campbell. Ma fille est une danseuse spécialiste du Bharata natyam, une danse indienne. Elle a atteint un très haut niveau grâce à son enseignant, Benoît Villeneuve, un Québécois et danseur indien réputé. Il a une telle réputation qu'on l'a invité à venir s'exécuter en Inde avec d'autres danseurs indiens professionnels à l'occasion d'une visite de M. Chrétien, alors premier ministre.

Voilà pourquoi nous adorons le Canada. Nous aimons le Canada parce que nous pouvons y faire prospérer notre culture indienne et nous intégrer à d'autres cultures.

(1540)

Hélas, certaines choses ne changent pas chez moi. Honorables sénateurs, mes deux enfants cherchent constamment à corriger mon anglais et les mots que j'utilise. Lorsqu'ils écoutent les débats, à l'occasion, ils me disent : « Maman, tu as massacré les mots. Pourquoi ne pas les apprendre pour vrai? » Et ce n'est pas tout.

Mon petit-fils frémit souvent lorsque je lui parle français. Il corrige toujours ma prononciation.

[Français]

Mon petit-fils me dit souvent : « Grand-maman! » Il me dit que mon français devrait être amélioré. C'est facile pour lui de l'affirmer. Pas pour moi.

[Traduction]

Mon petit-fils parle français comme s'il venait du Québec. Mes enfants parlent anglais parce qu'ils viennent de la Colombie-Britannique. Ces deux langues me donnent souvent du fil à retordre.

Honorables sénateurs, je vous raconte ce qui se passe dans ma famille parce que nous aimons qu'il nous soit permis d'aimer ce que nous sommes, à commencer par nos origines indiennes. Nous aimons nous identité canadienne, dont nous sommes fiers, et nous aimons notre confession musulmane et la possibilité que nous avons de prier avec fierté. L'autre jour, à la mosquée, mon petit-fils était le plus jeune du groupe. Nous sommes fiers d'être canadiens parce que nous pouvons faire partie de la société canadienne à part entière. Voilà ce que c'est, être réfugié au Canada.

Le Canada est un pays où on est accueilli, où on ne nous exclut pas à cause de notre religion ou de la couleur de notre peau. En arrivant au Canada, on peut s'intégrer à la société et y contribuer. On comprend alors qu'on a les mêmes rêves et les mêmes aspirations que tous les Canadiens. Voilà pourquoi je suis fière d'être Canadienne.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots de cette initiative, car le Vietnam occupe une place toute particulière dans mon cœur et dans ma vie.

Je tiens pour commencer à féliciter le sénateur Ngo des efforts qu'il a déployés pour faire reconnaître cette époque de l'histoire vietnamienne et de l'histoire canadienne. J'étais très conscient de ce qui se passait à l'époque, à l'époque des réfugiés de la mer. Mon épouse et moi avons fait partie d'un groupe qui parrainait plusieurs réfugiés vietnamiens, mais hélas, avec les années, nous avons perdu le contact. Il s'agissait de deux frères âgés respectivement de 16 et de 17 ans. Ils doivent donc avoir 55 ans aujourd'hui. J'ai essayé de les retrouver, mais, malgré mes efforts sur Internet, je n'y suis pas parvenu.

Quoi qu'il en soit, c'était une période magnifique au Canada. Beaucoup de Canadiens voulaient se sentir utiles, et il existait une sympathie réelle devant la misère des Vietnamiens. Vous pouvez sans doute imaginer, le souvenir de la guerre du Vietnam étant si clair dans notre esprit, avec notre proximité avec les États-Unis, que cela a dû nous rendre plus conscients, plus empathiques, plus proches des Vietnamiens, et notre volonté de les aider en a été renforcé. Ce fut une très belle période.

Je voudrais signaler aussi une chose qu'ignorent beaucoup de Canadiens et que ne connaissent pas non plus bien des gens, bien des sénateurs : le Canada a joué un rôle de maintien de la paix au Vietnam. Quand le Vietnam a été scindé en deux, le Nord et le Sud, en 1956, après que les Français eurent été chassés, pour une raison quelconque, la communauté internationale — et non les Nations Unies, j'ignore pourquoi — a mis sur pied une force d'observation. Trois pays y ont contribué : l'Inde, perçue comme neutre; le Canada, représentant le camp Ouest de la guerre froide; et la Pologne, qui représentait le camp Est de cette guerre.

Cette force s'appelait la Commission internationale de contrôle. Elle avait des postes dans tout le Vietnam, au Nord et au Sud, où était affecté pour un mois un représentant de chacun de ces trois pays. Et il y avait roulement entre les postes. Ils étaient toujours trois, un de chaque pays, à chacun de ces postes, et ils étaient là pour observer et faire rapport des accumulations d'armes par ceux qui sont devenus le Viet Kong, et les armées du Vietnam du Nord et du Sud.

À l'évidence, cela n'a pas marché aussi bien que cela aurait pu, malheureusement, mais je tenais à signaler que les Canadiens avaient apporté cette contribution. Il s'agissait de soldats canadiens. Ils n'étaient pas des combattants, mais ils étaient souvent exposés à de grands risques. Les Canadiens ont participé à cette Commission internationale de contrôle de 1956 jusqu'en 1972 environ.

Si je suis au courant, c'est que mon père a été affecté là-bas pendant un an, de 1963 à 1964. J'étais alors un garçon de 12 ans. Ce départ de mon père pour un an m'a fait une profonde impression. À cette époque, il n'y avait pas de vacances pour couper la période en deux, et il n'y avait pas d'appels interurbains. Un an, c'était un an. Ce fut très long pour moi, ma sœur, mon frère et, sans aucun doute, pour ma mère, comme vous pouvez l'imaginer. Cette expérience m'a marqué à jamais, et je n'ai jamais oublié non plus son respect et son admiration pour les Vietnamiens.

Ce fut une période très formatrice dans ma vie, et cela m'a rendu très respectueux — comme tout le monde, de toute façon — à l'égard des Vietnamiens. Soulignons leur résilience, leur courage, leur force et, bien sûr, leur extraordinaire contribution au développement du Canada pendant ces longues années, d'abord comme immigrants et puis comme citoyens à part entière du Canada.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Seulement quelques mots, chers collègues. Je n'avais pas prévu prendre la parole, mais, après avoir entendu les observations d'aujourd'hui, je me suis dit que j'avais peut-être quelque chose à ajouter.

Je ne suis allée au Vietnam qu'une fois dans ma vie, et c'était il y a huit ou neuf ans. Je me suis rendue à Hanoï pour représenter l'Union interparlementaire. Je me souviens de plusieurs choses. L'une est qu'un Vietnamien m'a prévenue presque avant que je ne quitte l'aéroport que, si je me promenais dans les rues, je ne devais pas regarder les conducteurs qui s'approchaient de moi aux feux rouges, parce que, si j'établissais un contact visuel avec eux, ils ne s'arrêteraient pas. J'ai suivi ce conseil, et j'ai survécu. J'ai appris à l'époque que les feux rouges étaient là à titre indicatif et qu'il n'était pas obligatoire de les respecter.

Le sénateur Munson : Tout comme au Québec. Ce n'est qu'une suggestion.

La sénatrice Fraser : À l'époque, il y avait déjà des investissements occidentaux de plus en plus importants à Hanoï, qui, soit dit en passant, est une très belle ville. Le Vieux-Hanoï est vraiment beau. J'ai passé plus d'une journée à me promener, et j'ai été très impressionnée. On voit entre autres une université de 1 000 ans, plus ancienne, donc, qu'Oxford, Cambridge et la Sorbonne, et même de deux ou trois siècles plus ancienne que les universités italiennes.

Ce dont je me souviens surtout, c'est d'un parlementaire vietnamien qui m'a demandé, rayonnant : « Avez-vous vu la bannière à l'aéroport? » Le vol depuis Montréal avait été très long, et je ne l'avais pas remarquée. Il m'a donné les mots exacts, dont je ne me souviens pas, mais c'était quelque chose comme ceci : « Bienvenue à vous, Vietnamiens de l'étranger. » J'ai répondu : « C'est très bien. » Il m'a dit : « Non, vous ne comprenez pas. C'est très important pour nous. Pendant des années, ceux qui étaient partis, » — comme le sénateur Ngo et des milliers d'autres personnes — « nous ne voulions rien savoir d'eux. Nous pensions qu'ils n'avaient aucune légitimité. Nous les prenions pour des ennemis. Soudain, nous avons pris conscience du fait qu'ils n'étaient pas des ennemis, mais nos frères. Pendant des années, lorsqu'ils essayaient d'envoyer de l'argent à leur famille, nous refusions. Nous disions qu'il était illégal d'accepter cet argent. »

(1550)

« Soudainement, nous avons compris », et son visage s'est éclairé quand il a dit ces mots, « qu'ils envoyaient cet argent par amour, et que nous ne devrions pas refuser des cadeaux faits par amour. » J'ai pensé que quelque chose était en train de se produire. Ce pauvre pays avait vécu des moments tellement terribles, et je crois que l'exode des réfugiés après la guerre montre plus que n'importe quoi d'autre à quel point la situation est devenue mauvaise après l'arrivée du nouveau régime. Cependant, ce que j'ai vu montre que les choses peuvent changer, que le temps peut estomper la douleur, ou au moins permettre aux gens d'acquérir une certaine sagesse, et j'espère que c'est quelque chose que notre pays voudrait cultiver.

Je ne peux vous dire, sénateur Ngo, à quel point je respecte votre expérience et celle de ces milliers de personnes, expérience qui est une partie importante de la très longue histoire de votre ancien pays, mais qui n'en est quand même qu'une petite partie.

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président suppléant : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président suppléant : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président suppléant : De toute évidence, les non l'emportent.

Je vois un sénateur se lever.

Le sénateur Cowan : Honorables sénateurs, je suppose que le débat va se poursuivre.

Monsieur le Président, chers collègues, j'ai été surpris et déçu d'apprendre ce matin que le gouvernement avait refusé d'accéder à ma demande d'ajournement afin que je puisse prendre la parole après la sénatrice Jaffer. C'était une simple question de courtoisie. Le gouvernement n'a donné aucune raison pour son refus, à part pour dire qu'il voulait terminer aujourd'hui l'étude de ce projet de loi.

Chers collègues, S-219 est un projet de loi d'initiative parlementaire, qui a été présenté par le sénateur Ngo le 10 avril 2014. Le sénateur Ngo a pris la parole à son sujet le 30 avril, et notre collègue, la sénatrice Jaffer, en a discuté trois jours de séance plus tard, soit le 7 mai, en sa qualité de porte-parole. La sénatrice Martin a demandé l'ajournement, et le projet de loi est demeuré à ce stade. Le 19 juin, la leader adjointe du gouvernement, la sénatrice Martin, a remis le compte des jours à zéro, et rien d'autre n'est advenu jusqu'au 29 octobre, date à laquelle les leaders d'en face ont mis la question aux voix. Aucun autre discours n'a été prononcé; la question a simplement été mise aux voix, et le projet de loi a été renvoyé à notre Comité des droits de la personne.

Après avoir laissé le projet de loi languir pendant des mois au Sénat, il a fallu tout à coup s'en occuper très rapidement. Seulement 18 heures se sont écoulées entre son adoption à l'étape de la deuxième lecture et la tenue de la première audience du Comité des droits de la personne. À ce moment-là, le sénateur Ngo a comparu devant le comité, en tant que parrain du projet de loi. La deuxième audience a eu lieu trois semaines plus tard. Le comité a alors entendu deux témoins, puis il est passé immédiatement à l'étude article par article.

Chers collègues, les seules personnes qui ont été autorisées à témoigner pendant ces audiences appuyaient le projet de loi. Comme la sénatrice Jaffer nous l'a indiqué, le comité a reçu une lettre inusitée de la part de l'ambassadeur du Vietnam. Dans la lettre datée du 30 octobre, dont la sénatrice Jaffer a lu certains extraits cet après-midi, l'ambassadeur demandait qu'on lui donne l'occasion de comparaître devant le comité. Il n'était pas d'accord avec le sénateur Ngo, lorsque ce dernier disait que le projet de loi n'aurait pas de répercussions négatives sur les relations bilatérales entre le Canada et le Vietnam. Il a écrit les paroles suivantes, qui ont été citées par la sénatrice Jaffer il y a quelques minutes :

S'il est adopté, ce projet de loi aura un impact négatif sur les relations bilatérales croissantes entre nos deux pays.

Le gouvernement a rejeté la demande de comparution de l'ambassadeur. Le comité a décidé de lui demander de présenter un mémoire.

Chers collègues, je ne sais pas qui, du sénateur Ngo ou de l'ambassadeur vietnamien, a raison, mais je m'inquiète du fait qu'on nous demande de nous prononcer sur ce projet de loi aujourd'hui alors que le comité n'a pas eu l'occasion d'entendre les arguments de toutes les parties concernées.

L'ambassadeur vietnamien n'était pas le seul à s'opposer au projet de loi. Nous savons maintenant qu'il y avait d'autres détracteurs. La semaine dernière dans cette enceinte, le sénateur Munson a fait référence à des lettres que des particuliers et des organismes ont envoyées au comité pour lui faire part de leur opposition au projet de loi. Aucun d'entre eux n'a eu l'occasion de témoigner au comité.

Comme la Cour suprême du Canada l'a déclaré et comme l'a mentionné notre Président alors qu'il s'adressait aux médias ce matin, le rôle premier du Sénat et des sénateurs est d'examiner les mesures législatives. Le comité ne s'est pas acquitté de ce rôle de façon équilibrée et exhaustive dans le cadre de l'étude du projet de loi S-219.

Nous avons entendu les arguments d'un seul camp. Le comité n'a entendu que les partisans du projet de loi. Ils ont peut-être raison, mais il y a d'autres points de vue. Puisque le comité fait rapport au Sénat, nous non plus n'avons pas eu la chance d'entendre les arguments des opposants. Nous ne sommes donc pas en mesure de peser le pour et le contre.

La demande inhabituelle de l'ambassadeur vietnamien pour comparaître devant notre comité a été rejetée. Des Canadiens d'origine vietnamienne, comme je l'ai dit et comme l'a signalé le sénateur Munson la semaine dernière, ont rédigé des lettres dans lesquelles ils disent s'opposer au projet de loi. Ces points de vue n'ont jamais été présentés au comité.

Chers collègues, notre rôle en tant que sénateurs a parfois été comparé à celui d'un juge. Quel juge rendrait une décision dans une affaire sans avoir pu entendre les arguments des deux camps? Qui dans cette enceinte appuierait ce genre de système judiciaire? Pourquoi alors acceptons-nous cette pratique dans le cadre de notre processus législatif?

Je ne dis pas que le projet de loi S-219 ne mérite pas notre appui. Il le mérite peut-être. Notre collègue, le sénateur Ngo, et les autres personnes qui sont venues témoigner devant le comité ont fait un travail admirable pour ce qui est d'appuyer le projet de loi. Le problème c'est que nous avons pu entendre uniquement leur point de vue. Nous ne savons tout simplement pas si le projet de loi mérite notre appui, parce qu'on n'a pas permis au comité de faire une étude sérieuse et équilibrée de ses dispositions et de ses répercussions. On ne nous a pas permis de mener le genre d'examen auquel les Canadiens s'attendent de notre part.

Je voulais proposer l'ajournement aujourd'hui afin d'avoir la possibilité — refusée au comité par le gouvernement — de discuter du projet de loi avec l'ambassadeur du Vietnam. J'aurai cette discussion mardi matin, la semaine prochaine. C'est le plus tôt que l'ambassadeur pouvait nous rencontrer, la sénatrice Jaffer, le sénateur Munson et moi. Il n'était pas disponible avant cette date et c'est pourquoi j'ai proposé quelque chose qui me semblait raisonnable, c'est-à-dire l'ajournement, afin de pouvoir entendre l'ambassadeur et d'ainsi avoir une opinion éclairée sur le projet de loi.

Je veux aussi être clair relativement à un autre point : il ne semble pas y avoir urgence relativement au projet de loi. Les gens d'en face n'ont présenté aucun motif justifiant l'adoption du projet de loi dès aujourd'hui. Honorables sénateurs, le projet de loi propose que le 30 avril devienne la « Journée du Parcours vers la liberté ». Nous sommes le 4 décembre. Il reste plus de quatre mois avant le 30 avril. Pourquoi ne pourrions-nous pas reporter le vote de quelques jours, afin de pouvoir entendre le point de vue de l'autre côté?

Dans les circonstances — et je m'exprime uniquement en mon nom —, je n'aurai pas le choix. Je vais m'abstenir de voter sur le projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Je ne pense tout simplement pas avoir suffisamment d'information pour pouvoir voter « oui » ou « non ».

Je crains que notre seul espoir ne soit que l'autre endroit se charge d'effectuer le travail qu'on ne nous a pas permis de faire ici. Je vais exhorter les parlementaires de tous les partis à l'autre endroit d'entendre des témoins ayant des opinions différentes, de permettre à l'ambassadeur de témoigner et de présenter le point de vue de son gouvernement, et d'écouter d'autres personnes expliquer pourquoi elles s'opposent au projet de loi. Honorables sénateurs, il incombera à l'autre endroit de devenir la Chambre de second examen objectif. Nous n'avons pas fait notre travail en ce qui concerne ce projet de loi. Ce n'est pas la bonne façon d'adopter des mesures législatives dans notre pays. Ce n'est pas la voie à suivre pour le « parcours vers la liberté ». Les gens ont le droit de se faire entendre au Sénat et aux comités sénatoriaux.

(1600)

Rejet de la motion d'amendement

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : En conséquence, chers collègues, pour ces raisons, je propose :

Que le projet de loi S-219, Loi instituant une journée nationale de commémoration de l'exode des réfugiés vietnamiens et de leur accueil au Canada après la chute de Saïgon et la fin de la guerre du Vietnam, tel que modifié, ne soit pas lu pour la troisième fois maintenant, mais qu'il soit renvoyé de nouveau au Comité sénatorial permanent des droits de la personne pour étude additionnelle et rapport.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président suppléant : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président suppléant : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président suppléant : À mon avis, les non l'emportent.

La sénatrice Fraser : Avec dissidence.

Une voix : Le vote!

Son Honneur le Président suppléant : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président suppléant : L'honorable sénateur Ngo, avec l'appui de l'honorable sénateur Enverga, propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président suppléant : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président suppléant : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président suppléant : À mon avis, les oui l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés :

Son Honneur le Président suppléant : Je vois deux sénateurs qui se lèvent. Y a-t-il un accord entre les whips sur le moment du vote?

Le sénateur Munson : Votre Honneur, je souhaite que le vote soit reporté à la prochaine séance du Sénat.

Projet de loi constituant le Comité parlementaire sur le renseignement et la sécurité

Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Segal, appuyée par l'honorable sénateur Greene, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-220, Loi constituant le Comité parlementaire sur le renseignement et la sécurité.

L'honorable Grant Mitchell : Je travaille fort aujourd'hui et vous aussi, car vous devez m'écouter.

Le sénateur Day : Quelle corvée!

Le sénateur Mitchell : C'est effectivement une corvée. Je voulais faire quelques observations au sujet du projet de loi S-220, qui est parrainé officiellement par le sénateur Segal et coparrainé par le sénateur Dallaire, deux anciens collègues à nous qui nous manquent évidemment beaucoup.

Je voudrais dire que je souscris à ce projet de loi. Je souscris au concept qui le sous-tend et à ce qu'il doit accomplir. Je voudrais dire qu'il me semble particulièrement urgent, présentement, de nous doter d'un mécanisme de surveillance des organismes canadiens de sécurité et de défense, au sein de la structure de l'État, et que c'est exactement ce que prévoit ce projet de loi.

Le projet de loi créerait un organe parlementaire de surveillance formé de sénateurs et de députés. Il y aurait un plus grand nombre de députés que de sénateurs, ce qui est parfaitement acceptable. Cet organe se verrait accorder la plus haute cote de sécurité, ce qui permettrait aux personnes qui le composeraient de discuter librement et en toute franchise avec les membres des divers organismes de sécurité nationale, de défense et de renseignement, au sein de la structure de notre État. Le comité pourrait conseiller les organismes en matière de politiques, leur donner des orientations générales et les aider à définir leur vision. Il serait capable d'aider les fonctionnaires, le personnel militaire et les autres personnes concernées, dans cette sphère d'activité, en répondant à leurs questions, en leur offrant une perspective externe et en les sensibilisant au point de vue du public.

Essentiellement, il faudrait que ces organismes rendent des comptes aux institutions parlementaires, ce qu'ils ne font pas actuellement. Ils rendent des comptes, s'ils en rendent, à un seul ministre ou à un groupe de ministres, et leur structure est si rigide qu'il est difficile d'assurer une bonne coordination, de leur donner des conseils stratégiques, des instructions, des perspectives et une rétroaction.

Il convient de signaler que le Canada est le seul pays démocratique occidental à ne pas disposer d'un tel organe de surveillance prévu par la loi. C'est le seul membre du Groupe des cinq, groupe de pays avec lesquels nous travaillons étroitement, qui n'a pas d'organe de ce genre.

À l'heure actuelle, les députés et sénateurs peuvent, généralement en comité, interroger les responsables de la sécurité, les officiers de l'état-major général des Forces armées, les sous-ministres du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, d'autres sous-ministres et le commissaire de la GRC, mais ceux-ci ne peuvent tout simplement pas répondre aux questions qui touchent à la sécurité nationale. Voilà qui réduit considérablement le pouvoir qu'ont les parlementaires, autant au Sénat qu'à l'autre endroit, de surveiller ces activités, de fournir une orientation ou de répondre aux nombreuses questions difficiles que ces groupes se posent dans l'exercice de leurs fonctions.

De quels groupes s'agit-il? Il s'agit du SCRS. Il s'agit également du CSARS, le groupe qui surveille le SCRS mais seulement en ce qui concerne les plaintes, et ce, seulement après coup. Il ne joue aucun rôle proactif. Il s'agit aussi du CSTC, la direction des communications de notre service du renseignement, en quelque sorte. Puis, il s'agit de la GRC, de l'Agence des services frontaliers du Canada, du MAECD, du conseiller en matière de sécurité nationale du cabinet du premier ministre, du ministère de la Défense nationale et du Centre intégré d'évaluation du terrorisme, qui relève du ministère de la Défense nationale.

Voilà les neuf groupes auxquels je peux penser qui travaillent dans le domaine du renseignement, de la sécurité nationale et de la défense. Il y a des cas bien étayés de problèmes structurels dans les relations entre ces groupes.

(1610)

Il est vrai que ces groupes font souvent du bon travail ensemble, mais il y a des cas documentés qui tendent à démontrer que leur collaboration comporte souvent des lacunes. Par exemple, aux fins d'un procès lié au terrorisme, ce qui constitue un élément de preuve pour un groupe pourrait être jugé par un autre groupe comme étant irrecevable, puisque chaque groupe est assujetti à des règles différentes. Il y a donc un grave problème de coordination.

Pour rassurer les gens, je précise que ce projet de loi ne propose pas que les membres du comité soient choisis au hasard. Le choix se ferait à la discrétion du premier ministre. L'approche se fonde sur le modèle adopté au Royaume-Uni, où le premier ministre mène une vaste consultation auprès des partis ayant fait élire plus de 12 députés — nous pourrions établir notre propre seuil dans notre système politique — afin de déterminer qui seraient les meilleurs candidats pour former ce comité. Au Canada, aucun parlementaire, quelle que soit son allégeance, ne traite cette question de façon partisane. Comme l'a très bien dit la sénatrice Stewart Olsen, cet après-midi, aucun d'entre nous ne considère les questions liées aux anciens combattants de manière partisane. Je crois que nous considérerions de la même façon la question qui nous occupe.

Il ne s'agit donc pas de réduire les pouvoirs du premier ministre. Nous voudrions seulement créer un comité au mandat bien défini qui se composerait de membres soigneusement choisis afin que, dans le cadre du processus politique, les institutions parlementaires soient davantage en mesure d'exiger des comptes des autorités responsables de la défense nationale, de la sécurité et du renseignement tout en aidant ces autorités à coordonner leurs activités.

L'ancienne commissaire à la protection de la vie privée, Chantal Bernier, a déclaré ce qui suit :

Je crois que les Canadiens sont très intelligents et qu'ils apprécient le fait de pouvoir vivre dans une vraie démocratie, qui, fort heureusement, est dotée de structures gouvernementales solides.

Elle a fait cette déclaration dans le cadre de ses observations en faveur de ce projet de loi et des mesures qu'il contient.

À l'heure actuelle, deux éléments principaux exercent des pressions. Un d'entre eux est la nécessité de coordonner les activités. Comme je l'ai dit, au moins neuf entités travaillent dans ce domaine. Elles ont toutes un rôle à jouer dans la lutte antiterroriste, dans la prévention du terrorisme et dans la capture des terroristes avant qu'ils commettent des attentats au pays ou avant que des Canadiens se rendent à l'étranger pour se livrer à des activités terroristes. Il n'a peut-être jamais été aussi pressant de faire cela, compte tenu de la gravité du problème du terrorisme et de la radicalisation au Canada. Il n'a jamais été aussi important de pouvoir compter sur un groupe qui puisse obliger cet ensemble d'entités à rendre des comptes, lui donner des directives et coordonner ses efforts, et ce, lorsqu'il y a des chevauchements ou non, lorsque ces entités doivent se réunir, mais qu'elles ne le font pas régulièrement, ou lorsqu'elles n'ont pas de façon structurée de convoquer des réunions ou de communiquer. Dans une certaine mesure, il existe des preuves à cet effet. Ce groupe de surveillance parlementaire aurait, ou pourrait avoir, le pouvoir de réunir ces entités et de régler beaucoup de problèmes.

Jusqu'à la semaine dernière, lorsqu'un spécialiste de la question m'a informé de la situation, j'avais l'habitude de dire que, de nos jours, on pourrait prétendre qu'il existe très peu de guerres entre les États. Il y a bien la situation en Ukraine, en Russie et en Israël, mais, bien franchement, les guerres entre les États telles qu'on les a connues il y a 20, 30 ou 40 ans n'existent plus vraiment aujourd'hui. De nos jours, nous avons affaire à des guerres civiles. D'une certaine manière, on pourrait dire que le monde est plus sûr depuis la fin de la guerre froide et la chute du mur de Berlin. On pourrait certainement soutenir, arguments à l'appui, que c'est le cas. Le monde ne donne pas l'impression d'être plus sûr, mais, sur le plan structurel, il se pourrait bien que ce soit le cas.

Cet homme m'a présenté un argument très solide. Il m'a dit que, bien que la situation ait été dangereuse à cette époque-là, le monde comprenait au moins ce qui se passait. À l'époque de la guerre froide, le monde avait érigé des structures pour faire face à ce phénomène. En effet, malgré le danger, les choses étaient beaucoup plus prévisibles et, à certains égards, beaucoup plus stables.

Toutefois, depuis la guerre froide, cette stabilité a été sérieusement ébranlée. Le premier choc a été la chute du mur de Berlin, puis le démantèlement de l'Union soviétique et de sa sphère d'influence. Ce ne sont que quelques-uns des événements qui sont survenus. Ils ont été suivis d'assez près par la première guerre en Irak et par la guerre dans les Balkans. L'éclatement de la Yougoslavie et les guerres qui s'en sont suivies ont ébranlé encore davantage ce système. Puis il y a eu les événements du 11 septembre, la guerre en Afghanistan et la deuxième guerre en Irak. Nous avons ensuite assisté au printemps arabe, que nous n'aurions jamais cru possible il y a trois ou quatre ans. Il y a eu de nouveaux affrontements en Israël. Puis tout à coup, à la suite du printemps arabe, nous avons été témoins d'un revirement presque total. Il y a eu la Syrie, l'Égypte, et maintenant l'EIIS. La Russie pénètre en Ukraine et il y a des attaques terroristes, attaques dont la nature terroriste reste à établir officiellement, contre notre propre Parlement.

Ce qui s'est produit, c'est que l'ordre mondial a vraiment changé. C'est maintenant le désordre mondial, si vous voulez. Ce qui est particulièrement dangereux, c'est que la communauté internationale essaie encore de comprendre quelle est l'origine de ce désordre. Nous sommes encore à une étape d'instabilité et d'imprévisibilité fondamentales. Par conséquent, la communauté internationale, la communauté occidentale si l'on peut dire, n'a pas créé de structures permettant de lutter contre l'adversaire actuel, quel qu'il soit. Nous n'avons pas créé de structures nous permettant au moins de faire face à la situation et de la rendre plus prévisible, sinon plus stable. Tous ces chocs ont eu de grandes répercussions.

Si l'on se fie à l'histoire de l'humanité, ce n'est pas surprenant qu'il faille du temps au monde et à aux puissances de toute nature pour commencer à s'adapter et à se réadapter à ce qui se passe. Par contre, nous ne l'avons pas fait. À certains égards, nous nous retrouvons avec une communauté de la défense, de la sécurité et du renseignement qui est aux prises avec un désordre mondial complètement différent, qui a très peu de direction globale et coordonnée quant à la manière d'aborder le problème et qui n'a aucun endroit où tenir des discussions et des débats exhaustifs sur le rôle du Canada et la manière de l'accomplir. Nous ne savons peut-être même pas ce qu'est le problème exactement et encore moins ce que nous devons faire pour l'empêcher et la manière dont nous devrions déployer nos ressources actuelles et acquérir celles que nous n'avons pas encore parce que nous ne savons pas encore que nous en avons besoin. Il n'y a pas d'endroit où débattre et discuter de ces questions de manière régulière et cohérente. Le comité parlementaire de surveillance qui est proposé dans le projet de loi S-220 jouerait un rôle fondamental à cet égard.

J'appuie donc sa création pour trois raisons. Un tel comité est une nécessité et s'est révélé très utile dans toutes les démocraties occidentales, à l'exception de la nôtre. Les quatre autres pays du Groupe des cinq en ont un, et nous n'en avons pas; c'est donc difficile d'établir les liens les plus efficaces possibles avec ces pays. Il y a un énorme problème qui est accentué par la menace terroriste et l'instabilité dans le monde, en particulier.

Son Honneur le Président : Les sénateurs accordent-ils cinq minutes de plus au sénateur Mitchell pour conclure ses observations?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Mitchell : Il y a l'énorme problème de la coordination de toutes nos ressources en matière de défense nationale, de sécurité et de renseignement.

(1620)

Tout cela pose des défis, surtout en ce qui concerne la protection de la vie privée et des renseignements personnels. Il faut trouver le juste équilibre entre, d'une part, la nécessité d'obtenir la preuve requise pour contrer les éventuels terroristes et, d'autre part, celle de protéger la vie privée, les renseignements personnels, les droits et le mode de vie de tous les Canadiens.

Par ailleurs, nous ne comprenons pas encore vraiment tout ce qu'implique la restructuration de l'ordre mondial. Pour toutes ces raisons, je pense que le temps est venu d'envisager d'appuyer fermement le projet de loi. Je demande aux sénateurs de le faire.

(Sur la motion du sénateur Moore, le débat est ajourné.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Nancy Ruth propose que le projet de loi S-225, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, la plupart des Canadiens n'aiment pas souffrir. Je n'aime pas souffrir. La plupart des Canadiens ne veulent pas contracter une maladie dégénérative et mortelle. Moi non plus. La plupart des Canadiens ne veulent pas tomber malades au point de ne plus répondre aux traitements ni aux médicaments. Moi non plus. Quatre-vingt-quatre pour cent des Canadiens veulent avoir le droit de se prévaloir d'une aide médicale à mourir. Moi aussi. C'est pourquoi je présente ce projet de loi.

Le Canada n'a aucun intérêt à conserver des lois qui laissent les gens souffrir inutilement. Quatre-vingt-quatre pour cent des Canadiens en ont conscience et ils veulent que nous remédiions à la situation. Le temps est venu pour le Parlement d'accéder à la demande des personnes que nous servons et d'examiner attentivement la question de l'aide médicale à mourir de manière à trouver comment légitimer celle-ci.

Ce n'est pas seulement aux tribunaux et aux médias de se pencher sur cette question. Le Parlement doit aussi le faire, par l'intermédiaire des comités, de manière à laisser l'occasion aux Canadiens de participer activement au débat comme ils ne pourraient pas le faire hors de ces murs.

La plupart des Canadiens meurent de vieillesse ou en raison de la détérioration progressive de leur santé. La majorité d'entre nous aimeraient mourir à la maison, mais ce n'est pas ce qui se produit. En raison de la nature des maladies chroniques et du vieillissement, la plupart des Canadiens, soit 70 p. 100, vont mourir dans un hôpital. Ce qui est encore pire, c'est que même si 95 p. 100 d'entre nous bénéficieraient de soins palliatifs à l'approche de la mort, moins du tiers ont accès à ces soins. Or, compte tenu que, selon les prévisions, le nombre d'aînés au Canada devrait doubler au cours des deux prochaines décennies, la situation ne fera qu'empirer. Il n'est donc pas surprenant que la grande majorité des Canadiens soient en faveur de solutions de rechange.

En septembre 2014, Ipsos Reid a mené un sondage dans lequel on demandait aux gens si un médecin devrait pouvoir aider une personne à mettre fin à ses jours lorsque cette personne est un adulte qui a la capacité de prendre une décision, qu'elle est en phase terminale, qu'elle est affligée de souffrances insupportables qui ne peuvent être calmées par des médicaments et qu'elle demande à répétition qu'on l'aide à mourir. Quatre-vingt-quatre pour cent des participants ont répondu oui. Quatre-vingts pour cent des personnes qui se disent chrétiennes sont en faveur de l'aide médicale à mourir. Nous ne connaissons pas les pourcentages pour les autres religions parce que les échantillons étaient trop petits pour pouvoir tirer des conclusions. Par ailleurs, 85 p. 100 des professionnels de la santé sont en faveur de l'aide médicale à mourir. L'Association médicale canadienne donne maintenant son appui conditionnel. Il importe de noter que 85 p. 100 des Canadiens gravement handicapés appuient eux aussi l'aide médicale à mourir.

Ce débat se poursuit au Parlement depuis 1991. Le Sénat devrait dès maintenant prendre l'initiative relativement à cet important dossier. Un grand nombre de choses ont changé depuis cinq ans, soit depuis le dernier projet de loi sur l'aide médicale à mourir. Non seulement le sondage Ipsos Reid illustre clairement la position des Canadiens, mais dans la décision Taylor rendue l'année dernière, la juge Lynn Smith a conclu que l'interdiction visant l'aide médicale à mourir violait la Charte pour des motifs qui n'avait pas été pris en considération dans la cause de Sue Rodriguez, il y a plus de 20 ans.

La juge Smith a dit que le droit canadien et l'éthique médicale autorisaient déjà plusieurs pratiques pour mettre fin à la vie. Il n'est pas illégal pour les citoyens de mettre fin à leurs jours. Nous leur permettons d'ordonner à leur médecin de ne pas recourir à des traitements destinés à les maintenir en vie, ou de cesser de tels traitements, et aussi de demander des médicaments contre la douleur qui précipitent leur décès. C'est pour cette raison que la juge Smith a conclu qu'empêcher les médecins de donner suite à la volonté d'un patient de mettre fin à ses jours est arbitraire. Cette interdiction est discriminatoire à l'égard des personnes qui ne sont pas capables de mettre fin à leurs jours sans aide. La juge a dit que cette interdiction violait l'article 15 de la Charte.

Lorsque la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a entendu la cause Carter l'an dernier, elle a confirmé le bien-fondé de la loi actuelle, sur laquelle la Cour suprême est maintenant en train de se pencher. Nous ne connaîtrons probablement pas avant l'an prochain la décision de la Cour suprême relativement à l'appel Carter, mais il n'y aucune raison valable qui nous empêche d'aller de l'avant avec le projet de loi. Pourquoi devrions-nous attendre la décision? La cour ne va pas préciser les conditions dans les lesquelles cela peut se faire.

Il est intéressant de noter que le seul magistrat qui était présent lors de la cause Rodriguez en 1992 et qui est encore en fonction aujourd'hui est la juge en chef Beverley McLachlin. Celle-ci avait rédigé l'opinion dissidente selon laquelle l'article 241b) du Code criminel violait l'article 7 de la Charte. La juge McLachlin avait conclu qu'il serait contraire aux principes de justice fondamentale de priver Mme Rodriguez d'un choix que peuvent exercer les personnes ayant la capacité physique de prendre elles-mêmes des mesures pour mettre fin à leurs souffrances.

L'opinion dissidente du juge en chef Lamer se fondait sur le paragraphe 15(1) de la Charte. Il avait conclu que l'article 241b) créait une inégalité, en ce sens que les personnes souffrant d'un handicap physique sont incapables de se suicider sans aide. Une personne capable de mettre fin à ses jours peut le faire impunément, mais aucune option sanctionnée par la loi n'existe pour la personne qui ne peut agir seule.

Même si le juge Lamer a dit craindre que la décriminalisation de l'aide au suicide n'accentue le risque que les handicapés physiques soient manipulés par d'autres personnes, il a affirmé que de telles conjectures ainsi que l'argument du « doigt dans l'engrenage » ne justifiaient pas l'imposition d'une restriction à ceux qui ne sont pas vulnérables et qui consentent librement à se donner la mort.

Le projet de loi a été soigneusement rédigé. Il n'impose pas un principe moral absolu à notre population diversifiée. Il donne simplement une option aux Canadiens, un cadre juridique, pour qu'ils puissent envisager cette option au Canada, chez eux, et non pas dans un autre pays comme la Hollande, la Belgique, la Suisse ou les États-Unis. Nous pouvons tirer des leçons des actions, des données scientifiques et de l'expérience des autres nations. Le projet de loi prévoit des protections ayant fait leur preuve pour les patients, y compris les plus vulnérables.

Prenons l'exemple de l'Oregon. En 1997, cet État a adopté une loi pour permettre aux patients en phase terminale d'obtenir de leur médecin une ordonnance pour qu'ils puissent se procurer une dose mortelle de médicament; les patients pourraient le prendre eux-mêmes s'ils le souhaitent, et ce, au moment de leur choix. La loi adoptée en Oregon établit des lignes directrices claires et rigoureuses. Toutes les ordonnances doivent être documentées, et un rapport annuel est publié. Lorsque la mesure législative a été présentée, les opposants ont fait valoir que la vie des gens vulnérables serait en péril.

Les faits prouvent le contraire. Ce n'est pas tout le monde qui prend le médicament, et la plupart de ceux qui le prennent le font en toute connaissance de cause : ils souffrent du cancer et ils craignent de perdre autonomie et dignité et d'être incapables de jouir de la vie. La loi en Oregon est utilisée comme il se doit par ceux qui souffrent d'une maladie mortelle, et ce, pendant qu'ils sont encore capables de décider ce qui est le mieux pour eux.

En 2011, la Société royale du Canada a mené une étude scientifique rigoureuse sur l'aide médicale à mourir dans un certain nombre d'endroits, y compris dans les États de l'Oregon et de Washington, aux Pays-Bas, en Belgique et en Suisse. La Société royale du Canada n'a rien trouvé qui puisse permettre de croire qu'un régime juridique prévoyant des mesures de protection pose un risque pour les personnes vulnérables.

(1630)

Je tiens à ce que les choses soient claires : ce projet de loi ne permet pas à qui que ce soit de mettre un terme à la vie d'une personne qui n'en a pas fait la demande. Le projet de loi ne permet pas non plus de mettre un terme à la vie d'une personne sans avoir bien pesé les pour et les contre de cette décision, et il comprend aussi des mesures de protection pour les médecins. En fait, le projet de loi prévoit que l'aide médicale à mourir ne peut être offerte qu'à une personne qui est âgée d'au moins 18 ans, est un citoyen ou un résident permanent du Canada au moment où elle présente sa demande et a reçu d'un médecin un diagnostic de maladie ou d'incapacité, notamment une incapacité découlant d'une blessure traumatique. Cet état doit lui causer des souffrances physiques et psychologiques qui lui sont insupportables et qui ne peuvent être soulagées par aucun traitement médical qui soit acceptable pour cette personne.

Les personnes qui se trouvent dans un état d'affaiblissement de leurs capacités, sans aucune chance d'amélioration, qui sont saines d'esprit et aptes à comprendre pleinement les répercussions de cette décision et peuvent agir volontairement, sans contrainte ni influence indue, peuvent aussi faire une demande d'aide médicale à mourir. En fait, les médecins de notre système de soins de santé possèdent déjà une vaste expérience en lien avec ce processus, car beaucoup de circonstances médicales exigent qu'ils déterminent la capacité d'un patient.

J'aimerais maintenant vous expliquer comment une personne doit procéder pour présenter une demande d'aide médicale à mourir. La demande doit être formulée par écrit et signée par la personne qui fait la demande en présence du médecin aidant et de deux témoins. Ce n'est pas tout le monde qui peut agir comme témoin. Ainsi, le partenaire de la personne qui fait la demande, les membres de sa famille ou ses enfants adoptés, les personnes qui auront droit à la succession du patient et les travailleurs de la santé de l'établissement où la personne est ou a été soignée ne peuvent pas agir en qualité de témoin.

Une fois que la demande a été faite, deux médecins, y compris un médecin-conseil qualifié qui n'entretient aucun lien professionnel ou personnel avec le médecin aidant, doivent examiner la personne qui fait la demande pour déterminer si elle satisfait aux conditions énoncées dans la loi. Le médecin aidant doit ensuite fournir des renseignements précis à la personne qui fait la demande au sujet de son pronostic, de ce qu'il adviendra si on accède à sa demande et des autres traitements possibles, qui peuvent comprendre les soins de confort, les soins palliatifs dispensés à l'hôpital ou en maison de soins et le soulagement de la douleur.

Le projet de loi impose également une période d'attente d'au moins 14 jours avant qu'on ne donne suite à la demande. De plus, la demande d'aide médicale à mourir peut être révoquée à tout moment, verbalement, par écrit ou par tout autre moyen. Au moment de l'acte, le médecin qui apporte son aide doit consigner tous les détails et demander explicitement au patient s'il veut toujours recevoir cette aide. Le projet de loi dispose qu'il faut verser les documents relatifs à l'acte au dossier médical de la personne. Et dans les 30 jours, le médecin aidant doit faire rapport au ministre provincial de la Santé.

Le projet de loi respecte les Canadiens. Il respecte ceux qui optent pour les soins palliatifs, les centres de soins ou les soins à domicile — toutes les options appuyées par une bonne politique d'intérêt public qui limite les risques et la souffrance pour les Canadiens et leur famille. Il respecte ceux qui n'ont aucun choix sinon l'agonie par inanition ou retrait des équipements de survie. Il n'est plus justifiable d'abandonner ces Canadiens et leur famille à cause d'un vide politique qui accroît les risques et la souffrance. Si votre ami voulait mettre fin à la vie d'un être cher, d'un conjoint, d'un parent ou d'un enfant pour lui épargner une mort lente et douloureuse, mais ne le pouvait pas sans votre aide — souvenez-vous de Robert Latimer et de sa fille —, seriez-vous prêt à passer 14 ans en prison parce que vous avez soulagé les souffrances de cette personne? Tel est le fardeau imposé aux Canadiens et à ceux qu'ils aiment.

Nous avons de bonnes raisons de modifier cette loi. De plus, il y a une autre approche qui a été mise à l'essai et vérifiée ailleurs. Voilà pourquoi je vous demande d'approuver rapidement le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. Ainsi, il pourra être renvoyé à un comité après nos discours au Sénat sur l'aide médicale à mourir. Les Canadiens pourront alors faire entendre leur voix. Je vous exhorte à encourager nos dirigeants à ne pas retarder une mesure qui peut être avantageuse pour nous tous. Le projet de loi permet la transparence, le contrôle et la surveillance du cadre de l'aide médicale à mourir. Il nous donne l'occasion de marquer l'histoire, de proposer une loi qui est susceptible d'apporter un soulagement psychologique et physique à tout le monde au Canada et, de la sorte, de répondre aux vœux explicites de la majorité de ceux que nous servons.

Lors d'audiences récentes devant la Cour suprême, les avocats de la Couronne ont reconnu que les lois actuelles du Canada imposent des souffrances et des douleurs inutiles aux patients. En conséquence, certains s'enlèveront la vie bien avant qu'ils ne soient réellement prêts, simplement parce qu'ils ne veulent pas être privés de cette option lorsqu'ils la voudront vraiment et qu'ils ne seront plus en mesure d'agir sans aide. C'est pourquoi il nous faut prendre des mesures. Joseph Arvay, avocat de droit constitutionnel respecté qui a défendu le droit à l'aide médicale à mourir dans l'affaire Taylor devant la Cour suprême, nous rappelle ceci : « Personne ne veut mourir si vivre est une meilleure option. »

Le projet de loi proposé ne donnerait pas lieu tout à coup à une énorme augmentation du nombre de demandes de suicide assisté. Cela ne s'est pas produit dans d'autres pays. Parfois, particulièrement lorsque des personnes se retrouvent dans des situations difficiles, choisir sa façon de mourir est le moindre de deux maux.

On a dit que toutes les politiques sont personnelles. Il n'y a pas plus personnel que la question des soins de fin de vie, du droit de contrôler la douleur et de choisir comment l'on veut mourir. Il ne s'agit pas d'une question partisane. Des députés de chaque parti ont indiqué publiquement qu'il fallait modifier les lois, et les Canadiens nous mènent déjà vers de tels changements. Nous devons leur emboîter le pas. Sénateurs, aidez-moi à faire adopter ce projet de loi.

L'honorable Denise Batters : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Nancy Ruth : Absolument.

La sénatrice Batters : Honorables sénateurs, la sénatrice Nancy Ruth a mentionné ceci, mais je voudrais attirer l'attention sur ce que le projet de loi prévoit. L'alinéa 241.1(3)c) est ainsi libellé :

(i) qui cause des souffrances physiques ou psychologiques qui lui sont insupportables et qui ne peuvent être soulagées par aucun traitement médical qui lui soit acceptable [...]

À mon avis, honorables sénateurs, sur ce seul aspect, on s'engage avec ce projet de loi sur une pente dangereuse, parce qu'il y est question de souffrances psychologiques qui sont insupportables.

L'honorable sénatrice convient-elle que le fait d'inclure des souffrances psychologiques pourrait créer un dangereux précédent, puisque n'importe quelle personne qui souffre — et je suis malheureusement bien placée pour le savoir — d'anxiété ou de dépression grave pourrait se trouver dans une telle situation et le projet de loi pourrait lui permettre de recourir au suicide assisté par un médecin? Je souligne que la sénatrice Nancy Ruth a donné au début de la semaine une entrevue aux médias et elle a déclaré que, selon son expérience et après avoir discuté avec bon nombre de personnes qui souhaitent mettre fin à leur vie, lorsque ces personnes prennent cette décision, elles passent à l'acte immédiatement. Le délai d'attente de 14 jours ferait en sorte que le patient aurait le temps de réfléchir à la question et de prendre une décision. Malheureusement, les gens planifient généralement leur suicide. J'aimerais qu'elle nous fasse part de ses observations à ce sujet également.

La sénatrice Nancy Ruth : Honorables sénateurs, outre la sénatrice Batters, au moins un autre sénateur m'a demandé de retirer la disposition du projet de loi qui porte sur les souffrances psychologiques. J'ai décidé de ne pas le faire après avoir eu plusieurs discussions avec des avocats, des médecins et des personnes qui souffrent de dépression clinique. Je suis aussi influencée par les décisions rendues dans l'arrêt Rodriguez, qui font allusion aux articles 7 et 15(1) de la Charte.

Le projet de loi prévoit, entre autres exigences, que la personne doit avoir reçu un diagnostic de maladie ou d'incapacité qui cause des souffrances physiques ou psychologiques qui lui sont insupportables et qui ne peuvent être soulagées par aucun traitement médical qui lui soit acceptable, ou à cause de laquelle elle se trouve dans un état d'affaiblissement de ses capacités sans aucune chance d'amélioration.

À mon avis, le projet de loi assure un équilibre entre les intérêts de la personne qui veut faire une demande et les préoccupations de ceux qui sont liés personnellement et professionnellement à cette personne.

(1640)

Sur le plan juridique, nous sommes tenus de respecter les volontés de ceux qui souffrent, peu importe le genre de maladie ou d'incapacité. La Charte et nos codes des droits de la personne s'appliquent de la même façon aux personnes qui ont un handicap physique ou mental.

Sur le plan pratique, le projet de loi est très clair : (a) toute maladie ou incapacité doit avoir fait l'objet d'un diagnostic par un médecin; (b) la personne qui fait la demande doit être saine d'esprit et apte à comprendre pleinement les renseignements qui lui sont fournis; (c) la personne doit agir volontairement.

Le médecin aidant et le médecin-conseil doivent tous deux examiner la personne qui fait la demande afin de s'assurer que toutes les conditions sont respectées, y compris celles que je viens de mentionner, et le médecin doit confirmer la décision 14 jours plus tard. Je sais que cette disposition dérange beaucoup certaines personnes. J'en suis bien consciente, mais je pense qu'il serait discriminatoire d'empêcher ceux qui ont des souffrances psychologiques d'avoir accès à l'aide médicale à mourir.

Son Honneur le Président : Sénateur Meredith, je pense que vous aviez une question.

L'honorable Don Meredith : Merci, monsieur le Président.

Sénatrice, je vous ai entendu vous exprimer de façon éloquente sur le projet de loi. Cette mesure vous tient vraiment à cœur, mais en tant que personne croyante — et c'est aussi votre cas — je ne peux m'empêcher de vous poser la question suivante : qu'en est-il de la responsabilité spirituelle que nous avons de protéger la vie et de laisser Dieu venir nous chercher quand il le juge à-propos, indépendamment du fait que nous allons souffrir et vivre certaines choses sur cette terre? Quelle est votre réponse à cet égard, d'un point de vue spirituel?

La sénatrice Nancy Ruth : Si je me souviens bien des Écritures, Jésus a dit : « Laissez venir à moi les petits enfants. » Dans le cas qui nous intéresse, je pense que ces paroles signifient qu'il faut se servir des moyens dont nous disposons en tant que société, notamment la technologie, pour alléger les souffrances. Ces paroles signifient que nous sommes une entité spirituelle. Cela dit, je ne veux pas trop souffrir et je veux pouvoir exercer un choix avant d'en arriver là.

L'honorable A. Raynell Andreychuk : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question?

Son Honneur le Président : Nous avons le temps.

La sénatrice Nancy Ruth : D'accord.

La sénatrice Andreychuk : Vous avez parlé — en réponse à une intervention de la sénatrice Batters, je crois — de maladies psychologiques et physiques, et souligné que la participation de deux médecins servirait de protection. J'aimerais savoir si vous avez tenu compte de la distinction suivante : lorsqu'il s'agit d'une maladie physique, mortelle ou non, deux médecins peuvent probablement arriver à une conclusion en se fondant sur un vaste corpus de recherches et un certain nombre d'opinions. Dans le domaine psychologique, par contre, les opinions semblent diverger davantage, du moins d'après ce que j'ai vu dans le cadre de mon travail au sein des tribunaux qui traitent des affaires criminelles. Croyez-vous qu'il sera suffisant d'exiger la participation de deux médecins quand il s'agit d'un problème psychologique ou émotif, plutôt que d'une maladie physique mortelle?

La sénatrice Nancy Ruth : Honorable sénatrice, je n'ai pas la réponse à votre question. Il faudrait que j'entende davantage de témoignages de psychiatres. Signalons que la demande doit aussi être confirmée par deux témoins qui n'ont pas de liens avec le patient. Les médecins ne sont donc pas les seuls intervenants. Nous savons tous qu'il y a parfois collusion entre quelques médecins, mais le projet de loi cherche à éviter cette situation.

Supposons qu'il s'agisse d'un membre de ma famille, que je soupçonne la présence de collusion et que je doute que le patient veuille une aide médicale à mourir, alors je ferais intervenir un autre médecin sans tarder.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je remercie la sénatrice Nancy Ruth du travail qu'elle a accompli dans ce dossier et pour son profond engagement à l'égard de cette cause. J'aimerais que la sénatrice m'explique quelle loi ou quelle partie de la Constitution donne à la sénatrice ou à quiconque le droit de mettre fin à la vie d'une personne. J'aimerais savoir quel est le fondement constitutionnel de ce pouvoir. C'est ma première question.

Il est intéressant de souligner que, il y a bien des années, le Canada, à l'instar de la plupart des pays occidentaux — oublions les États-Unis pour l'instant — a reconnu que nul être humain n'a le pouvoir de prendre la vie d'autrui. Dans beaucoup de pays, cela a entraîné l'abolition de la peine de mort, car aucune décision prise par l'homme ni aucun appareil décisionnel conçu par l'homme n'est parfait au point d'être exact en toute circonstance. Dans la plupart des pays, la situation judiciaire en était au point où gouvernements, juges et jurys évitaient le verdict de culpabilité pour éviter les peines de mort en raison de l'incertitude du processus.

Il est donc curieux que, la loi canadienne s'étant départie de la peine capitale, nous souhaitions maintenant créer une forme de meurtre capital.

Le sénateur Campbell : Posez votre question!

La sénatrice Cools : Honorables sénateurs, j'aimerais connaître l'opinion de la sénatrice Ruth au sujet de ce que je viens de dire, et je vous invite tous à y songer sérieusement.

Je vous pose la question, sénatrice, parce que vous avez fait beaucoup de recherche sur le sujet. Par quel pouvoir légal peut-on autoriser un homme ou une femme à enlever la vie à un autre être humain? C'est très nébuleux; il s'agit d'une question qui demeure sans réponse depuis des millénaires, depuis le début de l'humanité. C'est la question essentielle à laquelle il faudra trouver réponse dans ce débat : quelle est la source du pouvoir d'enlever la vie à un autre être humain?

La sénatrice Nancy Ruth : Honorable sénatrice, je ne connais aucun pouvoir constitutionnel permettant de mettre fin à la vie, pas plus que je ne connais de pouvoir constitutionnel permettant de créer la vie.

La sénatrice Cools : Il existe un pouvoir constitutionnel de créer la vie.

Son Honneur le Président : Toutes les questions ont été posées.

(Sur la motion du sénateur Campbell, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur l'impartialité politique des bureaux des agents du Parlement

Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Michel Rivard propose que le projet de loi C-520, Loi visant à soutenir l'impartialité politique des bureaux des agents du Parlement, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir prendre la parole au sujet de ce projet de loi aujourd'hui. Il a pour objet d'éviter les conflits qui pourraient survenir ou sembler survenir entre les activités partisanes et les fonctions et responsabilités officielles de toute personne qui travaille pour le bureau d'un agent du Parlement.

Le projet de loi C-520 est conforme à l'engagement pris de longue date par le gouvernement d'accroître la responsabilisation et la transparence, et c'est la raison pour laquelle le gouvernement est heureux de l'appuyer.

Honorables sénateurs, la responsabilisation et la transparence sont deux éléments importants d'une saine administration. Si nous faisons tout notre possible pour les ancrer dans nos institutions publiques, les Canadiens ne s'en porteront que mieux. C'est une conviction à laquelle adhère le gouvernement, et nous ne manquons jamais l'occasion de prendre des mesures en ce sens. Mentionnons, notamment, des mesures comme la Loi fédérale sur la responsabilité de 2006 et le plan d'action connexe.

La loi et le plan d'action visaient à renforcer la responsabilisation d'une longue liste d'intervenants importants au sein de nos institutions publiques, qu'il s'agisse du premier ministre, des parlementaires, des employés du secteur public ou des bénéficiaires de financement public.

Je vais vous donner quelques exemples. Nous avons désigné les sous-ministres comme les administrateurs des comptes. Cette désignation souligne le rôle clé que jouent les administrateurs généraux pour ce qui est de gérer leur organisation et d'appuyer les activités de reddition de comptes de leurs ministres.

(1650)

Honorables sénateurs, il est important de noter que le système d'administrateurs des comptes n'a pas été créé pour modifier le principe constitutionnel fondamental selon lequel seuls les ministres sont tenus de rendre compte au Parlement de tous les actes du pouvoir exécutif.

Il a plutôt servi à codifier et à renforcer une pratique de longue date voulant que les sous-ministres comparaissent devant les comités parlementaires pour fournir de l'information et des explications sur les questions liées à la gestion ministérielle, par exemple la conformité avec les politiques du gouvernement et la mise en place de systèmes efficaces de contrôle interne.

Nous avons aussi pris des mesures pour renforcer l'éthique dans la fonction publique. Au moyen de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, nous permettons aux employés de la fonction publique et aux Canadiens de divulguer honnêtement et ouvertement des actes répréhensibles commis par le gouvernement, sans crainte de représailles. Nous avons proposé des réformes à la Loi sur le lobbying et à son règlement, afin de donner suite aux désirs des Canadiens qui réclamaient une transparence accrue et un comportement plus éthique en ce qui concerne les activités de lobbying.

La Loi sur les conflits d'intérêts est aussi entrée en vigueur, et nous avons nommé un commissaire aux conflits et à l'éthique. Les Canadiens ont ainsi eu la possibilité d'exprimer leurs préoccupations au sujet de comportements contraires à l'éthique au sein du gouvernement. En outre, nous avons établi de nouvelles peines et de nouvelles sanctions à imposer à toute personne qui fraude l'État.

Comme vous pouvez le voir, nous avons pris une série de mesures pour accroître la responsabilisation et la transparence des activités du gouvernement. Ce projet de loi est un autre pas dans cette direction.

J'aimerais parler des autres façons dont notre gouvernement s'est employé à rendre nos institutions publiques plus transparentes et plus responsables. Par exemple, nous avons donné aux Canadiens l'accès à une quantité importante d'information sur les organisations publiques. En 2013, le président du Conseil du Trésor a établi une base de données sur les dépenses en ligne, un nouvel outil de recherche qui regroupe toute l'information sur les dépenses du gouvernement en un seul endroit.

Nous y abordons tous les sujets, allant des dépenses liées aux programmes du gouvernement aux dépenses opérationnelles concernant des questions comme le personnel et le matériel. Les Canadiens peuvent donc avoir un tableau complet de la façon dont les fonds publics sont dépensés, et les parlementaires sont mieux outillés pour faire leur travail. Nous savons tous à quel point il peut être difficile de parcourir de nombreux documents financiers complexes pour essayer d'avoir une vue d'ensemble des dépenses pangouvernementales et ce à quoi elles sont consacrées, sans parler du temps nécessaire pour le faire.

Grâce à cette base de données, les utilisateurs peuvent trouver en un seul endroit l'information sur les dépenses engagées par chaque ministère et chaque organisme, pour des éléments comme les paiements de transfert aux provinces. Cette base de données s'ajoute aux mesures que nous avons déjà prises pour améliorer les rapports financiers et faciliter l'examen du budget des dépenses et des documents d'approvisionnement pour le Parlement.

Il s'agit de mesures comme l'instauration des rapports financiers trimestriels. Depuis le début de l'exercice 2011-2012, les ministères, les organismes et les sociétés d'État ont préparé ces rapports et les ont rendus publics. Ils consistent en des tableaux financiers qui comparent les dépenses prévues et les dépenses réelles au cours du trimestre précédent et pour l'ensemble de l'exercice. Ils comprennent aussi une section descriptive sur tous les changements importants qui touchent à la fois les résultats trimestriels et les résultats financiers cumulatifs, ainsi que les changements apportés aux activités, au personnel et aux programmes.

Honorables sénateurs, ces rapports sont devenus des outils essentiels pour les parlementaires qui veulent faire surveiller la façon dont les ministères utilisent les pouvoirs de dépenser qui leur ont été accordés dans les documents budgétaires.

Mais ce n'est pas tout. Le gouvernement a aussi annoncé un certain nombre de nouvelles mesures visant à accroître la transparence des marchés publics.

Citons notamment l'annonce faite en avril 2013 au sujet de la divulgation proactive de tous les marchés de services publics de plus de 10 000 $ attribués à d'anciens fonctionnaires qui touchent déjà une pension. Nous avons commencé à publier de l'information plus détaillée sur les marchés de services, comme les services professionnels et les contrats de consultation en gestion.

Je voudrais aussi souligner les mesures prises pour améliorer la circulation de l'information dans le système d'accès à l'information.

Avec la Loi fédérale sur la responsabilité, nous avons donné aux Canadiens un accès élargi et amélioré à plus d'information provenant des organisations publiques. Nous y sommes parvenus en étendant la portée de la Loi sur l'accès à l'information pour que celle-ci s'applique à la Commission canadienne du blé, à cinq fondations, à cinq agents du Parlement et à la plupart des sociétés d'État et à leurs filiales en propriété exclusive.

De plus, en avril 2013, nous avons lancé un projet pilote pour recevoir les demandes d'accès à l'information et les paiements en ligne de la part de trois ministères participants, un nombre qui, depuis, est passé à 29. Le projet permet d'offrir de meilleurs services aux Canadiens en simplifiant le processus de demande de dossiers gouvernementaux et en les rendant plus opportuns.

En outre, nous avons déployé des efforts supplémentaires en vue d'accroître la transparence, en exigeant la publication en ligne des sommaires des demandes d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels en ligne qui ont été traitées.

Tout le monde peut maintenant consulter ces sommaires en ligne à partir d'un seul point d'accès sur ouvert.canada.ca. Toutes les organisations fédérales affichent maintenant les sommaires des demandes d'accès à l'information qui ont été traitées. J'ajouterais que, en 2012, nous avons donné accès aux Canadiens à une plus grande quantité d'information gouvernementale — près de 6 millions de pages—, plus que jamais auparavant.

Honorables sénateurs, il est clair que le gouvernement a pris des mesures pour renforcer la responsabilisation et s'assurer que les pouvoirs conférés par nos citoyens à nos institutions publiques sont exercés dans l'intérêt public. Avec le projet de loi C-520, nous pouvons contribuer de façon significative à la responsabilisation. Ce projet de loi permet de rendre notre système de gouvernement plus fort. Il y parviendra en nous aidant à éviter les conflits qui pourraient survenir ou sembler survenir entre les activités partisanes et les fonctions et responsabilités officielles des agents du Parlement et de leur personnel.

J'appuie ce projet de loi avec enthousiasme, et j'invite tous les sénateurs à faire de même.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Est-ce que le sénateur Rivard accepterait de répondre à une question?

Le sénateur Rivard : Oui.

La sénatrice Fraser : Puisque ce n'est pas un projet de loi gouvernemental, je me demande, et vous pouvez peut-être me le dire, si on a obtenu une opinion de la part du ministère de la Justice pour savoir si ce projet de loi est conforme à la Charte des droits et libertés.

Le sénateur Rivard : Merci, honorable sénatrice. Je ne sais pas si un avis a été demandé. Cependant, rien ne nous empêche, si ce projet de loi est transféré à un comité du Sénat, d'obtenir cet avis. Mais je ne sais pas, au moment où vous posez la question, si cet avis a été demandé et fourni.

La sénatrice Fraser : Savez-vous si, au moins au cours de l'examen de ce projet de loi à la Chambre des communes, on en a parlé?

(1700)

Je pose la question car, si ma mémoire est bonne, la Cour suprême du Canada a déjà confirmé que les fonctionnaires sont libres de voter et d'avoir des appartenances politiques. Donc, vous voyez où je veux en venir. Savez-vous si on a déjà examiné cette question?

Le sénateur Rivard : Encore une fois, je ne peux pas vous l'affirmer. Par contre, je vous ferais remarquer que ce projet de loi ne touche que les employés des agences du Parlement, soit les neuf commissaires ou bureaux, y compris le Bureau du vérificateur général et le Bureau du directeur général des élections. Ce projet de loi ne touche que ces neuf bureaux. Les autres ministères ne sont pas touchés par ce projet de loi. On veut éviter les conflits réels ou potentiels. Ainsi, dans le cadre de toute nouvelle candidature, les candidats devront dire s'ils ont effectué du travail politique au cours des 10 dernières années. Dans le projet de loi, on cite les postes dont il est question : avoir été candidat à une élection fédérale, avoir été un agent officiel, un président d'association, qu'on appelle un premier dirigeant ou un agent. Dans le projet de loi, ces postes sont définis.

Pour ce qui est des employés actuels, on ne peut pas revenir en arrière. S'ils décident, lors d'une élection prochaine, d'occuper l'un de ces postes, ils doivent en aviser leur directeur, et on indiquera, sur le site web de l'agent du Parlement, que monsieur ou madame s'engage pour un parti politique ou sera nommé par un parti politique.

La sénatrice Fraser : Il me semble y avoir matière à une étude très sérieuse en comité.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom du sénateur Downe, le débat est ajourné.)

L'étude sur les impacts des changements récents au système d'immigration sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire

Quatrième rapport du Comité des langues officielles et demande d'une réponse du gouvernement—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles, intitulé Saisir l'occasion : Le rôle des communautés dans un système d'immigration en constante évolution, déposé au Sénat le 2 décembre 2014.

L'honorable Claudette Tardif propose :

Que le quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles intitulé Saisir l'occasion : Le rôle des communautés dans un système d'immigration en constante évolution, déposé au Sénat le mardi 2 décembre 2014, soit adopté et que, conformément à l'article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport.

— Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole au sujet de la motion visant l'adoption du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles, intitulé Saisir l'occasion : Le rôle des communautés dans un système d'immigration en constante évolution, déposé en cette Chambre le mardi 2 décembre 2014.

J'aimerais tout d'abord remercier la sénatrice Fortin-Duplessis, vice-présidente du comité, pour sa contribution importante aux travaux du comité et à la préparation de ce rapport. Je veux aussi remercier mes honorables collègues, les sénateurs Chaput, Charette-Poulin, Maltais, McIntyre et Poirier de leur participation active aux travaux du comité dans le cadre de cette étude. J'aimerais, bien sûr, remercier les sénateurs qui ont pris part, de façon occasionnelle, aux travaux, mais qui ont tout de même joué un rôle très important dans cette étude. Je tiens à souligner le travail remarquable de notre analyste, Mme Marie-Ève Hudon, et de notre greffier, M. Daniel Charbonneau. Je les remercie très sincèrement au nom du comité. Tous les membres du comité expriment leur gratitude et leur reconnaissance aux témoins qui ont accepté de partager leurs connaissances et leurs suggestions.

En avril 2013, les membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles entreprenaient une étude de l'impact des réformes les plus récentes au système d'immigration sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Le comité a consacré 15 réunions à l'examen de cette question et 44 témoins y ont exposé leur point de vue.

Le comité s'est penché sur les changements survenus depuis le début de la 41e législature et sur ceux qui seront mis en œuvre d'ici la fin de l'année 2014 et en 2015. Ces changements ont pris la forme de modifications législatives ou réglementaires, de décrets approuvés par le gouverneur en conseil, de réaffectation des dépenses ou d'instructions ministérielles.

Les neuf recommandations présentées par le comité sénatorial à l'intention du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration visent à assurer la pleine mise en œuvre de ses obligations linguistiques, soit celles qui sont contenues dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles, laquelle vise à ce que le gouvernement prenne des mesures positives pour favoriser l'immigration francophone, et en vertu de l'article 3 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui « a pour objet d'enrichir et de renforcer le tissu social et culturel du Canada dans le respect de son caractère fédéral bilingue et multiculturel et de favoriser le développement des collectivités de langue officielle en situation minoritaire au Canada. » L'intention derrière les recommandations de ce rapport est de permettre aux communautés francophones et anglophones de ce pays de profiter des occasions qui se présentent à elles dans un système d'immigration en constante évolution.

En raison des changements démographiques et sociologiques, l'immigration est devenue un facteur déterminant pour l'avenir et l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, qui en ont fait un axe d'intervention prioritaire pour assurer leur développement à long terme.

Honorables sénateurs, le gouvernement a entrepris une réforme en profondeur du système d'immigration en mettant l'économie au cœur de ces changements et en accordant une place plus importante aux employeurs.

L'immigration étant un domaine de compétence partagée, la grande majorité des témoins ont insisté sur l'importance de la coordination entre les différents acteurs. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer pour stimuler la croissance des communautés de langue officielle en situation minoritaire par l'immigration. Cet objectif comporte des avantages économiques et démographiques qui sont propres à chaque région. Il est donc de mise qu'une stratégie nationale concertée, qui exige la participation de tous, tienne compte des partenaires et des particularités propres à chaque région.

Par conséquent, votre comité présente une première recommandation de grande importance :

Que Citoyenneté et Immigration Canada, en collaboration avec l'ensemble de ses partenaires et en consultation avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire, établisse rapidement une stratégie nationale concertée pour stimuler la croissance de ses communautés par l'immigration. Cette stratégie doit préciser les règles et responsabilités des différents partenaires et être suffisamment souple pour tenir compte des particularités propres à chaque région.

Honorables sénateurs, même s'il m'est impossible de vous présenter l'ensemble du rapport, en raison du manque de temps — et je comprends qu'il est déjà tard —, j'aimerais quand même attirer votre attention sur quatre constats principaux qui se dégagent clairement de tous les témoignages que nous avons entendus au cours de cette étude.

Premièrement, en ce qui concerne l'immigration économique et le rôle prépondérant donné aux employeurs, Citoyenneté et Immigration Canada doit s'assurer que les immigrants de langue française pourront s'inscrire dans le bassin de candidats qualifiés du nouveau système Entrée Express, sans qu'il y ait entrave à la reconnaissance de leurs titres de compétences étrangers. Avec la mise en œuvre, en 2015, du système Entrée Express, les employeurs seront appelés à jouer un rôle déterminant dans le recrutement des nouveaux arrivants.

(1710)

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) a précisé qu'il y a un travail de persuasion à faire auprès des employeurs anglophones, et ce, à deux niveaux. D'abord, il faut rassurer ces employeurs quant au fait que les immigrants qui s'installent en milieu linguistique minoritaire sont généralement bilingues et que, sinon, de la formation linguistique leur sera offerte; ensuite, il faut leur faire comprendre que des réseaux en immigration francophone existent et qu'ils offrent un accompagnement aux familles.

La FCFA a rappelé l'importance d'y incorporer une lentille francophone pour assurer la reconnaissance des besoins des communautés et a indiqué vouloir faire partie de l'élaboration de l'outil. D'autres témoins se sont aussi prononcés en faveur de l'ajout d'une telle lentille francophone. Dans un mémoire soumis au comité sénatorial, des préoccupations d'ordre technique à l'égard du nouveau système ont été exprimées comme suit, et je cite :

La FCFA et d'autres intervenants des communautés francophones en situation minoritaire ont soulevé des inquiétudes quant à la capacité des candidats francophones de se retrouver dans le bassin de candidatures. Cette préoccupation est fondée, notamment, sur les difficultés liées à la reconnaissance des titres de compétences étrangers. Ainsi, il est probable que l'exigence de fournir une preuve de l'évaluation du diplôme dès la première étape de ce processus empêche bon nombre d'immigrants potentiels de langue française de soumettre un formulaire de déclaration d'intérêt et de s'inscrire dans le bassin de candidats qualifiés.

Un représentant francophone de l'Alberta s'est montré plutôt pessimiste lors de son témoignage devant le comité en disant ce qui suit, et je cite :

Selon nos observations, le rôle majeur proposé aux employeurs dans la sélection des immigrants, doublé de la grande responsabilité offerte aux provinces et aux territoires dans ce dossier, tous non soumis aux obligations linguistiques, risquent de diluer les engagements du gouvernement fédéral envers les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Voilà une réflexion très inquiétante.

Honorables sénateurs, le système Entrée Express compte parmi les changements apportés au système d'immigration qui attirent le plus d'attention de la part des chercheurs et des acteurs du milieu communautaire. Plusieurs craignent qu'un accent trop important ne soit mis sur la sélection de candidats anglophones. Une étude publiée en 2013 a indiqué ce qui suit :

Il sera nécessaire d'approcher les employeurs anglophones pour sélectionner des immigrants d'expression française.

Un deuxième constat important qui est ressorti de l'étude est que les communautés de langue officielle en situation minoritaire devront passer d'un rôle réactif à un rôle proactif. Certains témoins ont parlé d'opération de charme, de grande séduction pour convaincre de nouveaux arrivants de s'installer en milieu francophone minoritaire. Plusieurs témoins ont affirmé que Citoyenneté et Immigration Canada devrait favoriser une approche par et pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire dans le cadre des changements en place et à venir.

Plus que jamais, les communautés sont conscientes du potentiel que représente l'immigration pour assurer leur vitalité. Elles ne pourront, cependant, atteindre les résultats voulus que si elles disposent des ressources nécessaires. Il est recommandé que le ministre porte une attention particulière au soutien continu et renforcé aux réseaux en immigration francophones, aux services pré-départ en français, à la promotion des communautés à l'étranger et à la prise en compte des besoins particuliers des réfugiés, des travailleurs temporaires et des étudiants étrangers.

Voilà une recommandation clé de ce rapport. Les représentants des communautés de langue officielle en situation minoritaire qui ont comparu devant votre comité ont tous insisté sur l'importance de la consultation. Selon le commissaire aux langues officielles, il est important de consulter ces communautés pour connaître les besoins en matière de recrutement, d'accueil et d'établissement des nouveaux arrivants.

Deux recommandations portent sur des mesures positives ciblées à l'égard de l'immigration francophone que le gouvernement pourrait mettre en œuvre. Ce sont les suivantes :

Que le ministre porte une attention particulière à la mesure positive suivante, soit des mesures de recrutement ciblées envers les pays francophones;

Que Citoyenneté et Immigration Canada reconnaisse que :

  • Le programme des candidats des provinces et la catégorie de l'expérience canadienne doivent attirer un nombre suffisant d'immigrants francophones;
  • Le système Entrée Express doit inclure une lentille francophone, afin de permettre aux communautés francophones et acadiennes de tirer profit de mesures positives ciblées;
  • Ces communautés doivent participer à l'élaboration d'outils qui favorisent l'immigration dans leur milieu.

L'importance d'agir auprès des immigrants avant leur arrivée au pays a été soulevée par des témoins. Ils ont besoin de renseignements précis et pertinents, comme les réalités du marché du travail dans lequel ils souhaitent s'établir, car il n'est pas rare de croiser des immigrants déçus de ne pas trouver d'emploi qui corresponde à leur expérience ou à leurs compétences. Avant de choisir de s'établir dans une communauté en situation minoritaire, il est préférable que le futur immigrant obtienne des renseignements pertinents sur le milieu en question.

Citoyenneté et Immigration Canada doit également mettre à la disposition des communautés francophones et anglophones des données convaincantes pour leur permettre de tirer profit des changements apportés. Les communautés doivent disposer de données à jour leur permettant de mieux cibler leurs actions.

Voici ce qu'un représentant de Statistique Canada a indiqué lors de son passage devant le comité, et je cite :

Les intervenants du milieu communautaire nous ont récemment manifesté un très grand intérêt pour qu'une enquête puisse être réalisée par Statistique Canada sur les immigrants de langue française à l'extérieur du Québec, afin de mieux les outiller face aux défis qui les attendent au cours des prochaines décennies.

[Traduction]

En décembre 2013, le conseil d'administration du Quebec Community Groups Network a adopté une résolution concernant les priorités en matière de recherche des communautés anglophones du Québec au chapitre de l'immigration. La résolution a dégagé six priorités et trois principes directeurs connexes :

  • Lier la recherche à des objectifs qui ont une portée réelle et concrète sur les communautés anglophones du Québec.
  • Appuyer la recherche qui a pour effet de renforcer les communautés, en favorisant la collaboration, le réseautage, le partage de pratiques exemplaires et l'effet de levier financier.
  • Porter l'attention de la recherche sur le progrès économique, le soutien à la famille et l'intégration des nouveaux arrivants de langue anglaise au Québec grâce aux institutions communautaires anglophones.

Les communautés anglophones veulent encourager le gouvernement du Québec, avec l'appui du gouvernement fédéral, à travailler avec les organisations anglophones pour cerner les ressources disponibles dans les régions et aider le Québec à atteindre son objectif en matière d'immigration. À l'heure actuelle, ni le gouvernement fédéral ni le gouvernement provincial n'a montré la moindre ouverture à cet égard. Une approche intégrée serait souhaitable.

[Français]

La maîtrise des langues officielles, en particulier l'anglais, est un facteur déterminant de réussite en ce qui concerne l'intégration des immigrants. L'accès à la formation linguistique n'est pas garanti partout ni pour toutes les catégories d'immigrants économiques. Citoyenneté et Immigration Canada doit appuyer le rôle des établissements francophones d'enseignement postsecondaire de la francophonie canadienne comme plaque tournante au sein du nouveau système d'immigration. Il doit élargir l'accès aux programmes de formation linguistique dans l'ensemble des régions et permettre l'inscription des travailleurs étrangers temporaires et des étudiants internationaux à ces programmes.

Les audiences publiques ont montré que l'intégration économique passe surtout par l'anglais, alors que l'intégration sociale et culturelle passe par le français. Un représentant de Statistique Canada a indiqué que les immigrants francophones qui ne connaissent pas l'anglais ont un taux de chômage de trois points de pourcentage supérieur, en dépit de leur scolarisation élevée. Malgré des parcours d'immigrants variés, des témoins ont tous souligné l'importance d'apprendre l'anglais. Un apprentissage misant sur les deux langues officielles favoriserait l'intégration économique des nouveaux arrivants en anglais, tout en élargissant leur réseau social en français.

De plus, les audiences publiques ont montré que les établissements d'enseignement postsecondaire sont appelés à jouer un rôle de premier plan au sein du nouveau système d'immigration. Ces établissements accueillent, année après année, un nombre grandissant d'étudiants internationaux.

D'ailleurs, comme l'a confirmé un chercheur, une attention de plus en plus importante est accordée à ce type d'immigration, et je le cite :

On est en train de reconnaître que l'une des raisons d'aller chercher des étudiants étrangers, c'est pour les garder.

Puis-je avoir cinq minutes de plus, s'il vous plaît?

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, acceptez-vous d'accorder plus de temps à la sénatrice?

Des voix : D'accord.

La sénatrice Tardif : Je poursuis la citation comme suit :

C'est un vecteur très important pour les communautés minoritaires, parce que c'est un vecteur que l'on contrôle. On a des établissements postsecondaires qui sont capables d'aller recruter des étudiants étrangers, de les amener et de les faire vivre dans nos communautés pendant trois, quatre, cinq ou six ans avant qu'ils passent à la résidence permanente. Cela devient une autre façon d'ancrer leur attachement affectif à la communauté minoritaire.

(1720)

Le quatrième constat traite de l'établissement des cibles établies par le gouvernement fédéral dès 2003 en vue d'augmenter le nombre d'immigrants francophones qui s'installent dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Une première cible de 4,4 p. 100 jusqu'à 2008 avait été fixée, puis elle a été revue à la baisse en donnant au gouvernement jusqu'en 2013 pour atteindre une proportion de 1,8 p. 100 d'immigrants d'expression française à l'extérieur du Québec, et jusqu'en 2023 pour atteindre la cible initiale de 4,4 p. 100. Toutefois, en 2013, dans la foulée des changements apportés en faveur de l'immigration économique, le gouvernement a établi une nouvelle cible de 4 p. 100 d'immigrants économiques d'expression française d'ici 2018.

Pour atteindre cet objectif, Citoyenneté et Immigration Canada doit assortir le Programme des candidats des provinces, la Catégorie de l'expérience canadienne et le système Entrée express d'une lentille francophone. Effectivement, les témoignages effectués devant le comité sénatorial ont montré qu'il y a lieu de se questionner sur l'atteinte possible de ces cibles. Entre autres, les audiences publiques n'ont pas donné d'indication claire pour déterminer quelles étaient les variables utilisées par le ministère pour calculer le nombre d'immigrants d'expression française arrivés au Canada. Un représentant de Statistique Canada a rappelé que les cibles qui ont été fixées par le gouvernement fédéral ne permettront pas de compenser la perte du poids démographique dans les communautés francophones et acadiennes.

Honorables sénateurs, compte tenu de cet enjeu critique que représente l'immigration auquel sont confrontées les communautés de langue officielle en situation minoritaire, vous constaterez, à la lumière des conclusions de ce rapport, qu'il est urgent et de la plus haute importance que les gouvernements fédéral et provinciaux agissent en partenariat, afin d'inclure une véritable perspective francophone dans leurs politiques et leurs programmes liés à l'immigration. L'immigration doit devenir pour ces communautés un outil puissant de développement et une force véritablement positive.

La mise en œuvre des recommandations de ce rapport est cruciale, car les communautés francophones et anglophones en situation minoritaire doivent bénéficier concrètement de l'immigration dans un avenir très rapproché. Il en va de leur survie.

La citation suivante de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada résume bien les attentes des communautés à l'égard du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration :

La réforme du système d'immigration continue à se poursuivre et la mise en œuvre des changements demeure inachevée. Bien que les communautés aient déjà adapté bon nombre de leurs activités et pratiques pour assurer la pertinence et l'efficacité de celles-ci dans le nouveau contexte en matière d'immigration, cela n'enlève rien à la responsabilité des gouvernements de veiller à ce que les changements récents au système d'immigration aient des impacts positifs sur les communautés.

Statistique Canada prévoit que, d'ici 2050, la majorité de la population se renouvellera par l'immigration. Voilà une raison de plus pour redoubler d'efforts afin d'accroître l'immigration des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Permettez-moi, pour conclure, de citer les paroles du commissaire aux langues officielles, qui a dit ce qui suit à la suite de son intervention du 30 octobre dernier :

Nous sommes arrivés à un point critique. Durant la dernière année, le gouvernement fédéral a renouvelé son engagement de s'attaquer à la pénurie d'immigrants francophones. Au même moment, nous ne sommes qu'à quelques mois d'une des plus importantes refontes du système d'immigration de notre histoire. Nous avons présentement la possibilité de transformer l'immigration en une force véritablement positive pour les communautés francophones hors Québec. Nous ne pouvons pas la rater.

Honorables sénateurs, je vous recommande vivement d'appuyer cette motion, de lire le rapport et de l'adopter.

Je vous remercie.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, au nom de la sénatrice Fortin-Duplessis, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Le Comité de sélection

Adoption du quatrième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport du Comité de sélection (désignation du président à titre intérimaire), présenté au Sénat le 2 décembre 2014.

L'honorable Elizabeth (Beth) Marshall propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, voici le rapport du Comité de sélection, qui s'est réuni mardi matin. Il porte sur la désignation du sénateur Housakos en tant que Président intérimaire. Je crois que le rapport se passe d'explications, je vous remercie.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Le Sénat

Motion tendant à constituer un comité spécial sur la transformation du Sénat—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Ringuette, appuyée par l'honorable sénatrice Cordy,

Qu'un comité spécial sur la transformation du Sénat soit nommé pour examiner :

1. les façons de réduire le rôle des partis politiques au Sénat en établissant des caucus régionaux et des systèmes pour assurer la reddition de comptes aux citoyens;

2. les façons d'accroître la participation des sénateurs à la gestion des travaux du Sénat en créant un comité à cette fin et en assurant l'égalité régionale au sein dudit comité;

3. les façons de permettre aux sénateurs de participer au choix du Président du Sénat en proposant une recommandation au premier ministre;

4. les façons d'adapter la Période des questions pour accroître son utilité en tant qu'exercice de reddition de comptes;

5. toute autre question que le Sénat pourrait lui renvoyer;

Que le comité soit composé de neuf membres, désignés par le Comité de sélection, et que le quorum soit constitué de quatre membres;

Que le comité soit habilité à convoquer des personnes, à obtenir des documents et des dossiers, à interroger des témoins et à faire imprimer au jour le jour les documents et témoignages dont il peut ordonner l'impression;

Que, nonobstant l'article 12-18(2)b)(i) du Règlement, le comité soit habilité à se réunir du lundi au vendredi, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine;

Que le comité soit habilité à faire rapport de temps à autre et à présenter son rapport final au plus tard le 30 juin 2015.

L'honorable Elizabeth (Beth) Marshall : Honorables sénateurs, cet article en est à son 15e jour. En l'absence de la sénatrice Poirier, j'aimerais que le débat soit ajourné à mon nom.

(Sur la motion de la sénatrice Marshall, le débat est ajourné.)

Déclaration du Président

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je tiens à vous indiquer qu'un conflit s'est produit entre l'heure de tenue du vote reporté sur la motion relative au projet de loi S-219 et l'heure de séance du Sénat le lundi 8 décembre. Les articles 9-10(1) et 9-10(2) du Règlement prévoient que le vote doit avoir lieu à 17 h 30 le prochain jour de séance. Or, en vertu de l'ordre adopté pour la séance du lundi, le Sénat ne siègera qu'à 18 heures.

Il faut donc résoudre l'écart entre ces deux heures. Il serait également souhaitable de ne pas oublier que les votes différés n'ont normalement pas lieu au début d'une séance, ce qui permet aux sénateurs d'avoir suffisamment de temps pour se rendre en Chambre sans difficulté.

(1730)

Compte tenu de ces facteurs, nous pouvons résoudre cette situation en tenant le vote reporté au début de l'ordre du jour lundi, c'est-à-dire après la période des questions. Cette solution concilie les différentes dispositions du Règlement et les décisions du Sénat, et permet aux sénateurs d'être présents au vote.

Le vote reporté aura donc lieu au début de l'ordre du jour, lundi.

[Français]

Agriculture et forêts

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude sur l'importance des abeilles et de leur santé dans la production de miel, d'aliments et de graines

L'honorable Percy Mockler, conformément au préavis donné le 2 décembre 2014, propose :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le jeudi 12 juin 2014, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts relativement à son étude sur l'importance des abeilles et de leur santé dans la production de miel, d'aliments et de graines au Canada soit reportée du 31 décembre 2014 au 31 mai 2015.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Droits de la personne

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Salma Ataullahjan, conformément au préavis donné le 3 décembre 2014, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à siéger à 18 h le lundi 8 décembre 2014, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Langues officielles

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Claudette Tardif, conformément au préavis donné le 3 décembre 2014, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé à siéger le lundi 8 décembre 2014, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au lundi 8 décembre 2014, à 18 heures.)

© Sénat du Canada

Haut de page