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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature,
Volume 150, Numéro 105

Le mardi 28 mars 2017
L'honorable George J. Furey, Président

LE SÉNAT

Le mardi 28 mars 2017

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

Les victimes de la tragédie

Londres, au Royaume-Uni—Minute de silence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'aimerais prendre un moment pour souligner l'attaque tragique et insensée qui s'est produite à Londres la semaine dernière.

[Traduction]

Quatre personnes, dont un agent de police chargé de protéger le Parlement, ont été tuées, et de nombreuses autres personnes ont été blessées et touchées par cet attentat.

Je sais que nous sommes tous solidaires de nos collègues du Parlement britannique et des habitants du Royaume-Uni. Nous offrons nos plus sincères condoléances aux familles et aux amis des personnes qui sont décédées, qui ont été blessées ou qui ont été touchées lors de cette attaque épouvantable et insensée.

J'invite maintenant tous les honorables sénateurs à se lever pour observer une minute de silence à la mémoire des victimes et en guise de solidarité avec les habitants du Royaume-Uni.

Les honorables sénateurs observent une minute de silence.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Mois du travail social

L'honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, mars est le Mois national du travail social. J'interviens donc aujourd'hui pour féliciter et remercier tous les travailleurs sociaux du travail qu'ils font tous les jours dans leurs différents domaines de pratique, y compris mes collègues du Sénat qui œuvrent dans ce secteur.

Je tiens aussi à profiter de l'occasion pour rendre hommage à l'une des membres fondatrices de l'Association des travailleurs sociaux noirs de la Nouvelle-Écosse, Mme Francis Mills-Clements.

Mme Francis Rebecca Mills-Clements, de Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, est décédée le 22 février 2017, à l'âge de 90 ans. Elle a été conseillère municipale pendant de nombreuses années et a occupé les fonctions de maire adjointe de Bridgetown, en Nouvelle-Écosse, durant deux mandats. Lors de sa retraite, on a créé un fonds en son nom en vue d'accorder des bourses d'études à des Néo-Écossaises de race noire qui poursuivent des études postsecondaires.

Cette année, le thème du Mois national du travail social est « Le pouvoir de se réaliser ». Je pense que, compte tenu de sa vie et de sa carrière en tant que travailleuse sociale, on peut dire que Mme Francis Mills-Clements a parfaitement incarné ce thème. Sa passion à l'égard du bénévolat l'a conduite à occuper un emploi au Black United Front en tant qu'agente de liaison avec les prisons, poste qu'elle a occupé pendant 20 ans avant de prendre sa retraite. Francis a déjà dit qu'un des faits saillants de sa carrière avait été sa participation à la création de l'Association des travailleurs sociaux noirs de la Nouvelle-Écosse, car cela lui avait permis de travailler dans d'autres secteurs, notamment auprès de la Société de l'aide à l'enfance. Elle a ainsi pu prendre part à des initiatives de prévention, travail qu'elle a trouvé très épanouissant.

C'est la passion pour la justice de Francis Mills-Clements, son affection profonde pour les enfants noirs pris en charge et son travail auprès de jeunes hommes noirs en prison qui l'ont motivé à contribuer à l'émergence de l'Association des travailleurs sociaux noirs. Dans le livre intitulé Still Fighting For Change, elle offre une leçon précieuse à la prochaine génération quand elle écrit ce qui suit :

[...] impliquez-vous dans votre collectivité et redonnez tout ce que vous pouvez à la collectivité qui vous soutient même quand vous ne savez pas que vous avez besoin d'elle [...] connaissez votre passé afin de mieux vous préparer pour l'avenir.

Honorables collègues, j'ai le privilège de pouvoir dire aujourd'hui que Francis Mills-Clements a joué un rôle déterminant dans ma carrière en me guidant, car elle se servait du pouvoir qu'elle avait pour donner aux autres les moyens d'agir. J'espère que nous continuerons de soutenir les milliers de travailleurs sociaux de partout au Canada qui donnent le pouvoir aux gens d'agir et font avancer les choses comme Francis Mills-Clements le faisait.

L'Île-du-Prince-Édouard

Jenna Burke

L'honorable Elizabeth Hubley (leader adjointe des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, j'ai le plaisir aujourd'hui de vous parler d'une jeune femme exceptionnelle de l'Île-du-Prince-Édouard qui met ses compétences et son temps au service de sa province.

Jenna Burke est une étudiante de quatrième année en science politique à l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard. Elle recevra son diplôme en mai prochain. Tout au long de ses études à l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard, elle a joué un rôle clé en matière de sensibilisation aux questions autochtones et d'inclusion des Autochtones sur le campus.

Elle baigne dans la culture autochtone depuis qu'elle est petite et partage sa passion partout où elle va. Elle a commencé à faire du bénévolat à un jeune âge de bien des façons auprès d'un organisme autochtone hors réserve, le Conseil des Autochtones de l'Île-du-Prince-Édouard.

Après avoir reçu, en 2006, son diplôme du collège Holland en travail social auprès des enfants et des adolescents, Jenna a créé un programme pour les jeunes au Conseil des Autochtones de l'Île-du-Prince-Édouard, qu'elle a dirigé pendant six ans. Elle a ensuite été coordonnatrice, à Ottawa, de la politique nationale sur les jeunes du Congrès des Peuples Autochtones. Sa réalisation la plus remarquable est la création et la supervision du programme pour les jeunes Find Your Voice, qui cherche à favoriser la participation citoyenne des jeunes Autochtones.

Lorsqu'elle était étudiante à l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard, Jenna était bénévole au centre pour les étudiants autochtones Mavi'omi; elle a ainsi été mentor pour bien des jeunes et a organisé de nombreuses activités sur le campus universitaire.

En plus de ses nombreuses activités universitaires, Jenna a été l'organisatrice principale, à titre bénévole, du Grand Exercice des couvertures, qui a eu lieu en mai 2016, à Charlottetown. Cette activité, qui a rassemblé plus d'une trentaine de bénévoles et d'une centaine de participants devant l'assemblée législative provinciale, a permis de raconter l'histoire du Canada du point de vue des Autochtones. Elle a été organisée à l'occasion du premier anniversaire de la Commission de vérité et réconciliation, qui réclamait de passer à l'action. Cette activité, qui a rassemblé des Autochtones et des non-Autochtones de l'ensemble des Maritimes, a connu un succès retentissant.

Ardente défenseure de tous les peuples autochtones, Jenna a été acceptée au programme de maîtrise sur les gouvernements autochtones de l'Université de Victoria, en Colombie-Britannique. En fait, elle est l'une des trois personnes en tête de liste qui ont été acceptées dans le programme. Je la félicite de cette grande réalisation, et je la remercie de son investissement continu dans la communauté autochtone et dans l'île.

(1410)

Le championnat Brier Tim Hortons de 2017

Félicitations à l'équipe Gushue

L'honorable Norman E. Doyle : Honorables sénateurs, c'est avec beaucoup de fierté que je prends la parole pour féliciter l'équipe Gushue, de Terre-Neuve-et-Labrador, d'avoir remporté le championnat de curling canadien Brier Tim Hortons de 2017. Le fait que la compétition s'est déroulée à St. John's devant des milliers de partisans locaux ardents et enflammés rend la victoire encore plus douce. Le capitaine Brad Gushue, le troisième Mark Nichols, le deuxième Brett Gallant et le premier Geoff Walker sont actuellement les coqueluches de la province et du pays, et ils le méritent bien.

Le capitaine de l'équipe de Terre-Neuve, Brad Gushue, attendait depuis longtemps cette victoire au Brier. Il a remporté les championnats provinciaux de curling junior pour la première fois en 1995, puis il les a remportés de nouveau pendant cinq années consécutives. En 1999, son équipe a gagné la médaille de bronze aux championnats canadiens de curling junior, et la médaille d'argent en 2000. L'année suivante, il a remporté les championnats canadiens de curling junior et le championnat mondial de curling junior. Il est évident que, même dans sa jeunesse, Brad Gushue était un joueur de curling très talentueux et, ce qui est tout aussi important, qu'il avait du cœur au ventre et l'intelligence requise pour pratiquer ce sport.

Après sa carrière chez les juniors, M. Gushue s'est rapidement imposé comme un sérieux compétiteur en curling masculin, en se classant bien aux championnats Brier Nokia de 2003 et de 2005, ainsi qu'au championnat Brier Tim Hortons de 2015. En décembre 2005, Gushue et son équipe ont remporté les essais olympiques canadiens, ce qui leur a permis de représenter le Canada lors des Jeux olympiques d'hiver de 2006 à Turin, en Italie.

À la grande surprise de la communauté internationale, l'équipe Gushue est devenue la première équipe de Terre-Neuve-et-Labrador à gagner une médaille d'or olympique, ce qui a rendu les habitants du « Rocher » extrêmement heureux.

Toute autre personne aurait pu être tentée de se reposer sur ses lauriers et de retourner à la vie civile, mais pas M. Gushue. Il a continué de renforcer et de diriger des équipes sur le circuit de curling masculin. Il a remporté 7 grands chelems. Il a également participé à 13 Briers, notamment l'an dernier, où il a perdu dans une partie très serrée. Cependant, l'or au Brier lui a toujours échappé, à un point tel que remporter le Brier est devenu une obsession, l'objectif d'une vie, objectif qu'il a finalement réussi à atteindre grâce à sa récente victoire à St. John's.

Gagner le Brier de 2017 ne marque pas la fin pour Brad Gushue; c'est le début d'une année en tant que capitaine de l'équipe Canada, qui représentera notre pays au championnat mondial de curling de 2017 et qui obtient automatiquement une participation au Brier de 2018.

Je suis convaincu que tous mes collègues se joindront à moi pour féliciter l'équipe Gushue de sa victoire au championnat Brier et pour lui souhaiter la meilleure des chances dans son rôle en tant qu'équipe Canada.

L'appui aux anciens combattants

L'honorable Pamela Wallin : Le Sous-comité des anciens combattants a récemment entendu un témoignage scandaleux de la part de l'ombudsman des vétérans. En effet, celui-ci a révélé que plus de la moitié des 2 000 plaintes au sujet desquelles il a mené une enquête l'an dernier concernaient la transition de fin de service, c'est-à-dire la transition de la vie militaire à la vie civile.

De toute évidence, c'est là un signal d'alarme concernant le traitement des hommes et des femmes qui ont porté l'uniforme et servi le pays.

L'ombudsman dit que le système est tout simplement trop compliqué et bureaucratique et que de nombreux membres sortants des Forces canadiennes ne reçoivent ni les conseils ni même les avantages sociaux qu'ils méritent.

Il recommande de ne libérer aucun membre des Forces canadiennes tant que toute l'information n'est pas complète et que tous les avantages pour les anciens combattants ne sont pas en place. Il demande en outre à Anciens Combattants Canada d'établir un service de guide-expert, qui est un système de compagnonnage, afin que les anciens combattants aient quelqu'un vers qui se tourner pour obtenir de l'aide relativement aux règles et à la bureaucratie.

Selon lui, ces améliorations sur le plan des ressources et du personnel coûteraient environ 10 millions de dollars, ce qui est modeste, si on songe à quel point elles changeraient les choses pour les anciens combattants et leur famille.

Je salue le fait que, dans le budget, on promette de fournir aux anciens combattants blessés la possibilité de recevoir leur indemnité d'invalidité sous forme de versements mensuels à vie plutôt qu'en un seul paiement. Toutefois, il y a lieu de préciser cette promesse. S'agira-t-il d'une pension d'indemnité semblable à celle offerte aux anciens combattants de la guerre de Corée ou de la Première ou Seconde Guerres mondiales? Envisage-t-on d'établir un système totalement nouveau ou de simplement diviser le montant forfaitaire prévu dans la nouvelle charte?

Ainsi, en dépit de l'engagement du gouvernement, beaucoup de questions demeurent en suspens relativement aux militaires en transition vers la vie civile ou vers un emploi civil, dans la fonction publique ou ailleurs.

Voici un autre fait troublant à ce sujet. Selon un rapport récent, 315 anciens combattants au total, soit moins de 0,1 p. 100 de la fonction publique, ont été embauchés en vertu de la loi qui leur permettait un traitement préférentiel à cet égard.

Pour payer notre dette envers les anciens combattants, nous devons en faire davantage. Je vais conclure en citant encore une fois les propos de l'ombudsman Walbourne :

Certaines des luttes des militaires libérés des Forces armées canadiennes ont été portées à l'attention du public. Il est impossible de les réprimer. On entend parler de difficultés financières, de stress émotionnel et de frustration inutile. Des membres des Forces armées canadiennes qui ont servi notre pays pendant des décennies, qui ont effectué de multiples déploiements et qui ont obtenu des mentions élogieuses sont menacés d'expulsion ou sont expulsés de leur maison et font face à la ruine financière parce qu'ils attendent leur indemnité de départ, leur premier chèque de pension ou leurs prestations. Cela pourrait très bien être évité.

Monsieur le Président, cela pourrait être évité et il nous incombe de régler le problème.

Le sort des yézidies

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention aujourd'hui sur le sort des yézidies et sur tout ce qu'ont pu faire une poignée de Canadiennes pour les aider.

La lutte contre l'EIIS se poursuit, et les yézidis — un petit groupe religieux du Sinjar, en Irak — continuent de faire les frais de la brutalité des combattants de l'EIIS. Environ 3 400 femmes et enfants yézidis demeurent captifs de l'EIIS, qui s'en sert comme esclaves sexuels ou les entraîne pour en faire des combattants. Pas moins de 90 p. 100 de l'ensemble de la population yézidie vit désormais dans des camps de réfugiés de par le monde.

Alors que la tempête continue de s'abattre sur la tête des yézidis, de nombreux Canadiens ont pris sur eux de leur venir en aide. En août dernier, j'ai joint ma voix à celle de Christine McDowell, qui est à la tête du groupe qui réclamait du gouvernement qu'il accorde l'asile aux yézidies.

Le 24 février à Vancouver, j'ai assisté à un cercle de discussion organisé par l'organisme Remember Our Sisters Everywhere; il a alors été question d'une foule de sujets liés au sort que connaissent les yézidies. J'ai aussi appris qu'une poignée de Canadiennes, comme Christine McDowell, Lianne Payne, Krista Marshall, Moira Simpson, Leslie Timmins, Elinor Warkentin et Mia Edbrooke, pour ne nommer qu'elles, avaient réussi à changer la vie de nombreuses yézidies.

Honorables sénateurs, ce que j'ai vu ce jour-là, ce sont les valeurs canadiennes incarnées. Les Canadiens sont des gens de cœur, alors quand ils voient qu'ailleurs sur la planète des gens souffrent, ils ne détournent pas le regard. Ils se retroussent plutôt les manches et font le nécessaire pour leur venir en aide. Je suis par ailleurs heureuse que le gouvernement ait décidé de leur emboîter le pas et d'accueillir des réfugiés yézidis : 400 femmes et des membres de leur famille sont déjà ici, et d'autres devraient suivre bientôt.

Ce programme permettra également à un plus grand nombre de familles de demeurer ensemble afin qu'elles puissent plus facilement s'adapter à la vie au Canada et se remettre des traumatismes dont elles ont été victimes.

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous répéter ce qu'une jeune yézidie de 14 ans m'a raconté pendant un de mes déplacements. Quand je l'ai rencontrée, elle avait de nombreuses blessures, physiques et psychologiques, elle était très fragile et ses yeux étaient d'une tristesse incroyable.

Elle m'a raconté que, un jour, des hommes sont arrivés chez elle soudainement. Ils ont emmené son grand-père, son père, ses oncles et ses frères à l'extérieur, puis ils les ont tués sous les yeux des femmes et des enfants. Ensuite, ils ont enlevé les femmes et les très jeunes enfants. Les jeunes filles ont été emmenées dans un fourgon qui a roulé de plusieurs heures. La jeune fille qui m'a raconté cela a été enfermée dans une pièce sombre où, pendant des jours, elle a été agressée sexuellement à maintes reprises par de nombreux hommes. Elle a ensuite été emmenée au marché, où elle a été vendue à un homme qui la brutalisait. Un jour, elle s'est enfuie.

Elle avait bien d'autres choses à me raconter. Lorsque je l'ai rencontrée, elle avait tout perdu, y compris sa famille, et elle n'avait nulle part où aller. Elle ne pouvait pas se réfugier nulle part.

Elles ne peuvent pas lui ramener sa famille, mais Christine McDowell et d'autres femmes canadiennes essaient de lui offrir un refuge. Je remercie le gouvernement et ces femmes de soutenir les filles yézidies et de se porter à leur défense. Merci.

(1420)

Le championnat Brier Tim Hortons de 2017

Félicitations à l'équipe Gushue

L'honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, cette histoire est si extraordinaire pour Terre-Neuve-et-Labrador que je la raconterai deux fois. Je suis heureux de présenter aujourd'hui le chapitre 14 de « Notre histoire ».

Le curling n'est peut-être pas la première chose à laquelle on pense lorsqu'il est question de Terre-Neuve-et-Labrador. Toutefois, du 4 au 12 mars de cette année, ce sport était sur toutes les lèvres dans la province — il a même réussi à éclipser le sujet de conversation inépuisable qu'est la météo cet hiver!

Pour la première fois en 45 ans, le Brier a eu lieu à Terre-Neuve-et-Labrador, et cette édition marquera les annales. La province était représentée par l'équipe Gushue, composée du premier joueur Geoff Walker, du second Brett Gallant, du troisième Mark Nichols et du capitaine Brad Gushue.

Les générations futures de Terre-Neuve-et-Labrador seront bercées par l'histoire de la réussite de Brad Gushue. Dire que l'atmosphère à St. John's et dans l'ensemble de la province était électrisante et enlevante pendant cette semaine serait un euphémisme. Selon les données officielles sur les spectateurs publiées par Curling Canada, 123 000 amateurs se sont entassés au Mile One Stadium, une performance qui s'inscrit dans les 20 records d'assistance de l'histoire du Brier.

En effet, le passé a été ravivé grâce à une surprise : Jack McDuff, le dernier homme à avoir permis à la province de remporter le Brier en 1976, s'est présenté à la cérémonie d'ouverture, accompagné de ses coéquipiers d'il y a plus de 40 ans. Jack, qui lutte contre la sclérose en plaques, a trouvé la force d'effectuer ce difficile voyage depuis son domicile actuel au Nouveau-Brunswick. Ce tour de force a fortement inspiré Brad et son équipe.

Pendant que des vents violents dignes d'un ouragan hurlaient à l'extérieur, les partisans hurlaient à l'intérieur alors que Gushue et son équipe poursuivaient leur rêve — un rêve qui leur échappait depuis si longtemps.

Il s'agit de la 14e participation de Gushue au Brier. Il s'est rendu en finale en 2007 et en 2016; il a engrangé de superbes victoires par le passé. En 2001, Gushue et son équipe ont remporté le Championnat du monde de curling junior. Lui et son coéquipier, Mark Nichols, ont monté sur la plus haute marche du podium lorsqu'ils ont décroché la médaille d'or aux Jeux olympiques d'hiver de 2006.

Ils ont déjà laissé une marque incroyable dans l'histoire de ce sport à Terre-Neuve-et-Labrador, mais je doute qu'aucune de leurs victoires n'ait été aussi satisfaisante que celle du championnat canadien Brier Tim Hortons 2017 à St. John's au début du mois.

Lors de la finale, dimanche soir, 6 471 partisans enthousiastes étaient présents. Il n'y a pas de mot pour exprimer leur ferveur. La fierté des gens de Terre-Neuve-et-Labrador était à son comble et Gushue et son équipe n'allaient pas décevoir la foule.

L'équipe de Gushue a affronté Équipe Canada, soit Kevin Koe et son équipe de l'Alberta, qui ont gagné le Brier de l'année dernière. Quelle partie! À la fin de la neuvième manche, les deux équipes étaient à égalité, 6-6. Gushue et son équipe ont eu le dernier lancer à la 10e manche et c'est la dernière pierre qui leur a accordé cette victoire triomphale. Pendant un instant, tout le monde retenait son souffle dans le stade du Mile One Stadium, même le vent s'est calmé, l'espace d'un moment.

On aurait pu entendre une mouche voler lorsque Brad s'est élancé et que la pierre a commencé à glisser vers la victoire. Alors que Gushue et ses coéquipiers, Mark, Brett et Geoff, qui balayaient avec vigueur, écrivaient une page de l'histoire du curling, les gens dans le stade, dans les bars du coin et dans les foyers de la province se sont tous levés. C'était un lancer parfait pour une fin parfaite!

Brad Gushue et son équipe ont réalisé un rêve. La province est fière de ses champions du Brier 2017.

Si les acclamations de la foule se sont tues, tout comme le vent s'est calmé, la fierté de la province, elle, restera pendant longtemps. Quel merveilleux chapitre dans l'histoire de Terre-Neuve-et-Labrador.

L'équipe Gushue représentera le Canada au Championnat du monde de curling, qui se tiendra à Edmonton, en Alberta, à compter du week-end prochain. Je tiens à lui souhaiter bonne chance dans cette compétition.

Je demande à tous les sénateurs de se joindre à moi pour féliciter les gagnants du Brier Tim Hortons de 2017, l'équipe Gushue, de Terre-Neuve-et-Labrador!

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

La Commission canadienne des droits de la personne

Dépôt du rapport de 2016

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de 2016 de la Commission canadienne des droits de la personne, conformément à l'article 61 de la Loi canadienne sur les droits de la personne et à l'article 32 de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

[Français]

Le Tribunal canadien des droits de la personne

Dépôt du rapport annuel de 2016

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel de 2016 du Tribunal canadien des droits de la personne, conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Le budget de 2017

Dépôt de documents

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le budget de 2017, intitulé Bâtir une classe moyenne forte, et un document d'accompagnement intitulé Mesures fiscales : Renseignements supplémentaires.

[Traduction]

Éthique et conflits d'intérêts des sénateurs

Renseignements au sujet du dépôt d'un rapport d'enquête et de deux lettres de détermination préliminaire de la conseillère sénatoriale en éthique

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'aviser le Sénat que, conformément aux paragraphes 47(17) et 48(18) du Code régissant l'éthique et les conflits d'intérêts des sénateurs, j'ai fait déposer auprès du greffier du Sénat, le 9 mars 2017, un rapport d'enquête ainsi que deux lettres de détermination préliminaire de la conseillère sénatoriale en éthique. En vertu de l'article 14-1(6) du Règlement, un document déposé auprès du greffier conformément au Règlement, à un ordre ou à une loi est « réputé avoir été déposé sur le bureau du Sénat ». Les documents sont, en outre, devenus des documents publics dès leur dépôt, conformément aux paragraphes 47(18) et 48(19) du Code régissant l'éthique et les conflits d'intérêts des sénateurs.

[Français]

La Loi constitutionnelle de 1867
La Loi sur le Parlement du Canada

Projet de loi modificatif—Présentation du onzième rapport du Comité spécial sur la modernisation du Sénat

L'honorable Serge Joyal, vice-président du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, présente le rapport suivant :

Le mardi 28 mars 2017

Le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat a l'honneur de présenter son

ONZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-213, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 et la Loi sur le Parlement du Canada (présidence du Sénat), a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 6 octobre 2016, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le vice-président,
SERGE JOYAL

(Le texte des observations figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1370.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Mercer, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Affaires étrangères et commerce international

Budget—L'étude sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique depuis le dépôt du rapport du comité, intitulé Voisins nord-américains : maximiser les occasions et renforcer la coopération pour accroître la prospérité—Présentation du neuvième rapport du comité

L'honorable A. Raynell Andreychuk, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, présente le rapport suivant :

Le mardi 28 mars 2017

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international a l'honneur de présenter son

NEUVIÈME RAPPORT

Votre comité a été autorisé par le Sénat le mardi 22 mars 2016 à examiner et à faire rapport sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique depuis le dépôt du rapport du comité, en juin 2015, intitulé Voisins nord-américains : maximiser les occasions et renforcer la coopération pour accroître la prospérité.

Le budget présenté par le comité au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a été imprimé dans les Journaux du Sénat le 14 avril 2016. Le 19 avril 2016, le Sénat a approuvé un déblocage partiel de fonds de 8 952 $ au comité.

Conformément au chapitre 3:06, article 2(1)c) du Règlement administratif du Sénat, le budget supplémentaire présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente
RAYNELL ANDREYCHUK

(Le texte du budget figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1390.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion de la sénatrice Andreychuk, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Le Budget des dépenses de 2016-2017

Le Budget supplémentaire des dépenses (C)—Dépôt du treizième rapport du Comité des finances nationales

L'honorable Larry W. Smith : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le treizième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales portant sur les dépenses prévues dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2017.

(Sur la motion du sénateur Smith, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1430)

Le Sénat

Adoption de la motion concernant la période des questions de la présente séance

L'honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat, je propose :

Que, nonobstant l'ordre adopté le 9 mars 2017, la période des questions aujourd'hui ait lieu à son heure habituelle.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Le budget de 2017

Préavis d'interpellation

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J'attirerai l'attention du Sénat sur le budget intitulé Bâtir une classe moyenne forte, déposé à la Chambre des communes le 22 mars 2017 par le ministre des Finances, l'honorable Bill Morneau, C.P., député, et au Sénat le 28 mars 2017.

[Français]

Projet de loi de crédits no 5 pour 2016-2017

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-40, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2017, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

L'honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l'article 5-6(1)f) du Règlement, je propose que le projet de loi soit inscrit à l'ordre du jour pour une deuxième lecture à la prochaine séance.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion de la sénatrice Bellemare, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi de crédits no 1 pour 2017-2018

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-41, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2018, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

L'honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l'article 5-6(1)f) du Règlement, je propose que le projet de loi soit inscrit à l'ordre du jour pour une deuxième lecture à la prochaine séance.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion de la sénatrice Bellemare, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

L'Association parlementaire Canada-Europe

La quatrième partie de la Session ordinaire de 2016 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et la mission parlementaire à Malte, tenues du 10 au 19 octobre 2016—Dépôt du rapport

L'honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe concernant sa participation à la quatrième partie de la Session ordinaire de 2016 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et sa mission parlementaire à Malte, le prochain pays qui assurera la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne, tenues à Strasbourg, en France, et à La Valette, à Malte, du 10 au 19 octobre 2016.


PÉRIODE DES QUESTIONS

La justice

La légalisation de la marijuana

L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

[Français]

Monsieur le leader du gouvernement au Sénat, les médias ont abondamment rapporté cette semaine le fait que le gouvernement libéral se prépare à présenter un projet de loi pour légaliser la marijuana, qui entrerait en vigueur le 1er juillet 2018. À ce chapitre, je trouve étrange que le budget fédéral présenté la semaine dernière ne mentionne qu'une seule fois cet important changement de politique.

En fait, le budget propose d'affecter un financement existant de 9,6 millions de dollars sur cinq ans pour aider Santé Canada à appuyer des programmes d'éducation publique et des activités de surveillance. C'est tout ce qui est annoncé. Aucune mention n'est faite en ce qui a trait à des initiatives de recherche ou à des fonds additionnels visant la collecte de données ou l'acquisition d'appareils de détection de drogue pour traiter les cas de conduite avec les facultés affaiblies par les drogues.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire d'où proviennent les fonds qui seront destinés à la recherche sur la marijuana et sur l'effet de cette drogue sur les jeunes, notamment en ce qui concerne la conduite avec les facultés affaiblies? Pourrait-il également nous dire d'où proviennent les fonds qui permettront d'aider les organismes d'application de la loi à se préparer à l'entrée en vigueur de ce nouveau régime?

[Traduction]

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Les sénateurs se souviendront que, au cours de la dernière séance, juste avant la pause, j'ai remercié l'honorable sénateur de la dernière question qu'il m'a posée en tant que leader de l'opposition au Sénat. Je crois bien que j'ai agi de façon prématurée, mais je tiens à reconnaître sa contribution, comme nous l'avons tous fait, et j'aimerais également souhaiter la bienvenue au sénateur Smith dans ses nouvelles fonctions.

En ce qui concerne la question qui a été posée au sujet du cannabis, j'aimerais simplement rappeler que le gouvernement a l'intention, comme l'a indiqué la ministre de la Santé à la période des questions, de présenter une mesure législative ce printemps et de tenir au Parlement un débat élargi sur la question de la légalisation. C'est un engagement qu'a pris le gouvernement pendant la campagne électorale, et, après les délibérations et l'étude par le Parlement, le gouvernement fera, s'il y a lieu, d'autres recommandations et affectera des fonds selon ce qui aura été déterminé par le Parlement. Les questions soulevées par le sénateur devront, bien sûr, être examinées dans le contexte du programme que le Parlement adoptera, au bout du compte.

Les finances

Le déficit fédéral—L'économie

L'honorable Richard Neufeld : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au cours de la campagne électorale fédérale de 2015, le Parti libéral a promis aux Canadiens d'enregistrer un modeste déficit à court terme de moins de 10 milliards de dollars au cours des deux prochaines années.

D'après les libéraux, le déficit devait ensuite diminuer, et l'équilibre budgétaire au Canada serait rétabli en 2019. Au contraire, le déficit des libéraux est près de trois fois plus élevé que ce qu'ils avaient promis. En outre, le budget ne comprend aucun plan, pas même l'ombre d'un plan, quant à la façon dont le gouvernement libéral compte rétablir l'équilibre budgétaire.

Le leader du gouvernement pourrait-il confirmer que le gouvernement libéral a complètement renoncé à l'idée de présenter un budget équilibré aux Canadiens?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. J'aimerais souligner deux aspects dont tiennent compte les documents budgétaires. D'une part, le déficit prévu pour 2017-2018 est de 28,5 milliards de dollars, et il devrait, selon les prévisions, baisser à 18,8 milliards de dollars d'ici 2021. À cet égard, les prévisions reflètent les attentes du gouvernement. D'autre part, précisons que, selon les prévisions, le ratio de la dette par rapport au PIB, un facteur important, devrait passer de 31,6 p. 100 en 2017-2018 à 30,9 p. 100 d'ici le budget de 2021.

Le sénateur Neufeld : Les libéraux ont laissé entendre aux Canadiens qu'on peut favoriser la croissance à coup de dépenses. Pourtant, le budget ne prévoit qu'une faible hausse du PIB au cours des années à venir, tout en maintenant le déficit annuel bien au-delà des 10 milliards de dollars promis.

(1440)

Où est la croissance économique que les libéraux avaient promise en échange de leurs importants déficits?

Le sénateur Harder : Je tiens à souligner, toujours en me fiant aux documents budgétaires, qu'on prévoit une hausse de la croissance réelle du PIB de 1,9 p. 100 en 2017 et de 2 p. 100 en 2018. Je rappelle aussi à tous les sénateurs que le taux de chômage a baissé, passant de 7,1 à 6,6 p. 100. J'aimerais également rappeler aux sénateurs un récent rapport du FMI, où l'on peut lire ceci :

Regardez ce qui se passe au Canada [...] Ils actionnent tous les leviers possibles pour faire avancer les choses et pour favoriser la croissance économique. Tous les pays pourraient en faire autant.

La sécurité publique

L'examen législatif—Les droits de la personne

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le leader, pendant la campagne électorale, bien des gens avaient apprécié le fait que les droits de la personne iraient de pair avec le programme en matière de sécurité. Peut-être à tort, j'avais l'impression que le projet de loi C-51 ne manquerait pas de figurer sur la liste des tâches du gouvernement. Après presque deux ans, il ne semble pas se passer grand-chose sur le plan de la sécurité.

Le 20 mars, le ministre Goodale a émis un commentaire au sujet du projet de loi C-22, qui vise la création d'un comité de parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. Il ne s'agit que d'un comité de surveillance, qui n'examinera pas directement les problèmes liés au projet de loi C-51.

Toutefois, dans son commentaire, le ministre a indiqué que quelques changements avaient été apportés au projet de loi C-22 à la suite des commentaires obtenus lors des consultations. Je suis heureuse de constater que le ministre est disposé à accepter les commentaires concernant ce projet de loi. Le comité de parlementaires doit disposer des outils nécessaires pour bien établir un équilibre entre le besoin de sécurité et le respect des droits de la personne. Je crois que ce comité de surveillance sera le bienvenu.

Monsieur le leader, je reçois régulièrement des appels téléphoniques de la part de personnes qui, deux ans plus tard, se font encore arrêter, interrompre ou harceler à cause du projet de loi C-51. Quand le gouvernement s'occupera-t-il de ce problème?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie encore une fois la sénatrice de sa question, qui porte sur un sujet important ayant fait l'objet d'un débat public, y compris pendant la dernière campagne électorale, comme elle l'a dit.

En ce qui concerne le moment exact où le gouvernement compte légiférer, je vais m'informer et transmettre ultérieurement la réponse au Sénat.

La sénatrice Jaffer : Merci. Je l'apprécie, monsieur le leader. Je suis contente que vous compreniez les problèmes que vivent les gens.

Cependant, il y a un autre projet de loi qui ne reçoit pas assez d'attention, et c'est le projet de loi C-13, concernant l'accès légal. Selon le commissaire à la protection de la vie privée du Canada, ces dispositions juridiques devraient, elles aussi, être examinées.

Lorsque vous vous informerez, pourriez-vous chercher à savoir quel est l'état de ce dossier également? Quand le gouvernement a-t-il l'intention de déposer un projet de loi destiné à trouver le juste équilibre entre les droits de la personne et la sécurité dans le projet de loi C-51? Quand le gouvernement a-t-il l'intention d'examiner le projet de loi C-13?

Le sénateur Harder : Je poserai la question.

La sénatrice Jaffer : Merci.

Les finances

Le budget de 2017—L'équipement militaire

L'honorable Daniel Lang : Chers collègues, je voudrais adresser une question au leader du gouvernement concernant le budget déposé la semaine dernière.

Le ministre des Finances, M. Morneau, a défendu l'idée de ne pas consacrer assez d'argent à la défense dans le budget 2017-2018, en disant que, selon le gouvernement dont il fait partie, nos forces armées sont adéquatement approvisionnées. Je voudrais dire, chers collègues, que je trouve cette affirmation très troublante, compte tenu des lacunes importantes dans les capacités et de la pénurie d'équipement qui affligent les Forces armées canadiennes.

Il est également troublant de constater que le Canada est de plus en plus dépendant des États-Unis pour sa sécurité et sa défense. Aujourd'hui, le Canada est au 23e rang sur 28 pays de l'OTAN en ce qui a trait aux dépenses liées à la défense.

Chers collègues, au cours des 10 derniers mois, le Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense a examiné en détail les besoins des Forces armées canadiennes. De nombreux experts, notamment le directeur parlementaire du budget et des analystes de la défense tels que David Perry, ont indiqué au comité que l'armée avait besoin de 2 milliards de dollars de plus, ne serait-ce que pour maintenir ses opérations actuelles.

Le leader du gouvernement peut-il nous dire si le gouvernement actuel est vraiment d'avis que l'armée est convenablement équipée, alors que nous savons pertinemment que celle-ci a besoin d'au moins 2 milliards de dollars de plus pour simplement maintenir ces opérations quotidiennes?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. J'aimerais signaler que le budget de 2017 maintient, à court terme, les dépenses — ainsi que les augmentations — qui avaient été prévues lorsque le gouvernement est entré en fonction.

À long terme, le gouvernement adoptera bientôt une politique dont les coûts, comme l'indique le budget, seront rigoureusement établis et qui garantira la viabilité des Forces armées canadiennes au cours des prochaines années. C'est l'engagement qu'a pris le gouvernement aux termes du budget, et c'est cet engagement que le gouvernement respectera.

Le sénateur Lang : Chers collègues, j'aimerais revenir sur un autre volet du budget qui mérite d'être précisé. Si vous avez lu les commentaires des experts de l'armée et des dépenses militaires, vous savez que beaucoup de gens ont été mal renseignés et sont très déçus de ce que le budget prévoit en matière de sécurité publique.

Le budget prévoit, et je cite :

Des fonds de 8,48 milliards de dollars pour la période allant de 2015-2016 à 2035-2036 doivent être réaffectés à des exercices ultérieurs pour permettre la réalisation de deux projets d'immobilisations clés : l'acquisition d'aéronefs de recherche et sauvetage à voilure fixe et la modernisation des véhicules blindés légers [...]

Le leader du gouvernement peut-il expliquer ce qu'il faut comprendre lorsque le budget dit que ce report de 8,48 milliards de dollars est lié au remplacement d'aéronefs de recherche et de sauvetage à voilure fixe et le projet de modernisation des véhicules blindés légers en référence à la période 2035-2036?

Le sénateur Harder : Avec plaisir. Les dépenses prévues dans le budget relativement à ces 8,48 milliards de dollars correspondent à la réalisation effective du projet; c'est-à-dire lorsque nous versons réellement les fonds, et cela témoigne de la saine gestion budgétaire dont le gouvernement fait preuve dans toutes ses dépenses.

Le report d'impôt pour les producteurs de certains grains

L'honorable Donald Neil Plett : Honorables sénateurs, ma question s'adresse également au leader du gouvernement au Sénat.

Le gouvernement a annoncé dans le budget fédéral qu'il organisera une consultation publique relativement au report de l'impôt sur le revenu pour les producteurs de certains grains en ce qui concerne la mise en marché et la livraison de ceux-ci. La Western Canadian Wheat Growers Association a répondu en disant que la suppression de ce report de l'impôt sur le revenu « [...] changerait fondamentalement le cycle économique des exploitations céréalières de l'Ouest et aurait une incidence financière très négative sur de nombreux agriculteurs [...] »,

Le gouvernement libéral a-t-il déjà pris sa décision à ce sujet? Mènera-t-il un véritable processus de consultation ou s'agira-t-il seulement d'un faux-semblant pour lui permettre d'aller de l'avant avec ce qu'il a déjà décidé?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je tiens à assurer à l'honorable sénateur que les consultations menées par le gouvernement visent toujours, au cours du processus, à entendre les commentaires de tous les intervenants touchés.

Le sénateur Plett : Eh bien, un jour, nous obtiendrons une réponse dans cette enceinte. Nous verrons que, en fait, ce n'était pas l'objet de leurs consultations, même dans le cas de la réforme électorale.

J'ai une question complémentaire à poser au leader. En plus des craintes causées par la taxe sur le carbone du premier ministre, d'autres mesures prévues dans le budget préoccupent les agriculteurs. Par exemple, le budget élimine l'exemption d'impôt sur le revenu pour les assureurs de biens d'agriculture ou de pêche. Cette mesure pourrait bien amener les compagnies d'assurances à augmenter le coût des primes des agriculteurs.

De plus, le budget ne contient aucun détail au sujet du prochain cadre stratégique pour l'agriculture ou sur les plans du gouvernement au chapitre des services ferroviaires pour les producteurs de grain de l'Ouest canadien.

(1450)

De plus, il n'y a pas d'argent frais pour la gestion des risques de l'entreprise pour les agriculteurs. La seule certitude offerte aux agriculteurs par ce budget est l'augmentation des coûts, mais il passe sous le silence plusieurs questions qui ont une incidence sur leur travail quotidien. Pourquoi le gouvernement libéral a-t-il oublié les besoins des agriculteurs canadiens?

Le sénateur Harder : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. J'ai une opinion différente de celle du secteur agricole à l'égard de ce budget, car le secteur agricole et agroalimentaire en constitue, en fait, une pierre angulaire : le budget le reconnaît comme moteur principal de l'économie canadienne. Permettez-moi de vous décrire brièvement les dispositions du budget qui en font preuve.

Le budget aidera le secteur à atteindre son potentiel comme moteur économique encore plus fort en fixant des objectifs ambitieux de 75 milliards de dollars par année pour les exportations de produits alimentaires d'ici 2015; en investissant 70 millions de dollars pour soutenir les découvertes, les sciences et les innovations agricoles; en créant un nouveau fonds stratégique pour l'innovation de 1,26 milliard de dollars qui améliorera le soutien des transformateurs à valeur ajoutée de l'agroalimentaire; en investissant 950 millions de dollars pour appuyer les supergrappes d'innovation qui mettent l'accent sur les industries novatrices comme l'agroalimentaire; en investissant 200 millions de dollars sur quatre ans pour appuyer des projets de technologies propres; en investissant 2 milliards de dollars dans un fonds pour soutenir les corridors commerciaux nationaux; en investissant 2 milliards de dollars dans un fonds pour appuyer l'infrastructure en milieu rural, y compris les ponts et les routes, ce qui facilitera l'accès des producteurs agroalimentaires canadiens aux marchés canadiens et étrangers; et en investissant 80 millions de dollars pour créer un centre de recherche de calibre mondial sur la santé des végétaux. En fait, il s'agit d'investissements importants pour un secteur très important.

Le régime fiscal pour petites entreprises

L'honorable Tobias C. Enverga, Jr. : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au cours de la dernière campagne électorale fédérale, en septembre 2015, lors d'une entrevue à la CBC, le chef libéral Justin Trudeau a déclaré ceci :

Nous devons savoir qu'une proportion importante des petites entreprises ne sont, en fait, pour des Canadiens plus riches, qu'un moyen de payer moins d'impôts.

Cette attitude méprisante à l'égard des petites entreprises dans notre pays s'est manifestée dans le budget de 2017, alors que le gouvernement libéral a annoncé la fin de l'utilisation de la comptabilité fondée sur la facturation aux fins de l'impôt sur le revenu. Cette méthode de comptabilité est adoptée par les comptables, les chiropraticiens, les dentistes et les vétérinaires, et leur permet d'exclure la valeur du travail en cours lorsqu'ils calculent leur revenu.

Le gouvernement libéral craint-il que cette décision incite les entreprises à se tourner vers des endroits où le climat fiscal est plus avantageux, un climat comme celui que le président Trump a promis de créer aux États-Unis?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je crois qu'il conviendra qu'un régime fiscal juste est important pour tous les Canadiens, y compris les propriétaires de petites entreprises et les travailleurs autonomes.

En ce qui a trait à la deuxième partie de sa question et à l'idée que les propriétaires de petites entreprises quitteront le Canada pour jouir d'impôts moins élevés ailleurs, je pense qu'il en est venu trop rapidement à cette conclusion. Tous les gouvernements, pas seulement celui du Canada, doivent établir des taux d'imposition concurrentiels, et c'est exactement ce que le gouvernement actuel tente de faire.

Le sénateur Enverga : Les propriétaires de petites entreprises sont aussi durement touchés par le budget fédéral en raison de l'augmentation des charges sociales. En effet, l'augmentation des cotisations d'assurance-emploi l'an prochain s'ajoute à la hausse des cotisations au RPC, qui entrera en vigueur à compter de 2019, ainsi qu'à la taxe sur le carbone du premier ministre, qui entraînera une augmentation des coûts de l'énergie pour tous les Canadiens, y compris les propriétaires de petites entreprises. D'ailleurs, ces derniers se souviennent très bien du budget de l'an dernier, dans lequel les libéraux ont trahi leur promesse électorale de réduire le taux d'imposition pour les petits entrepreneurs et de créer un crédit pour l'embauche de jeunes.

Pourquoi le gouvernement libéral veut-il accroître le fardeau fiscal des petites entreprises jusqu'à les pousser à la faillite?

Le sénateur Harder : Ce n'est pas l'intention du gouvernement et ce n'est pas du tout ce qui ressort des mesures qu'il prend, bien au contraire. Les PME sont l'épine dorsale de l'économie canadienne. Tous les sénateurs l'admettront volontiers. Le gouvernement du Canada veut que les entreprises disposent des outils nécessaires pour se doter d'une main-d'œuvre plus qualifiée et pour mieux soutenir la concurrence mondiale, et il leur fournit les mécanismes de soutien dont ils ont besoin pour y parvenir.

[Français]

Le développement international

Le financement accordé à l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient

L'honorable Thanh Hai Ngo : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au mois de novembre, le gouvernement libéral a annoncé qu'il rétablirait le financement de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies, connu en anglais sous l'acronyme UNRWA.

En 2010, le précédent gouvernement conservateur avait retiré le financement permanent accordé à l'Office de secours et de travaux des Nations Unies en raison des liens que l'organisme entretenait avec le Hamas, qui est inscrit comme entité terroriste au Canada.

En février dernier, l'office a suspendu un employé lorsqu'il a appris que cette personne avait été élue à un poste de dirigeant au sein du Hamas. Puis, au début de mars, on apprenait qu'un autre cadre de haut niveau au sein de l'office avait également été élu à un poste au bureau politique du Hamas.

Alors que d'autres liens ont été révélés entre l'UNRWA et le Hamas, le gouvernement libéral a-t-il l'intention de revenir sur sa décision d'octroyer à l'office 25 millions de dollars qui proviennent de l'argent des contribuables?

[Traduction]

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Le Canada estime que l'Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient est une organisation très importante, qui défend le territoire palestinien et offre des programmes aux Palestiniens. Les données sur les fonds affectés que vous avez fournies sont exactes. Lors de l'annonce de ce financement, le gouvernement avait aussi dit que, pour que les fonds soient distribués adéquatement, il allait en revoir régulièrement l'utilisation.

[Français]

Le sénateur Ngo : J'ai une question complémentaire. La poursuite des contacts entre l'office et le Hamas ne devrait surprendre personne au sein du gouvernement fédéral. L'un des employés qui ont été suspendus récemment avait déjà été suspendu en 2011 à la suite de sa participation à des activités organisées par le Hamas.

En 2015, les Nations Unies ont suspendu de nombreux employés de l'UNRWA qui avaient appuyé la violence anti-Israël et antisémite sur les médias sociaux. En fait, le gouvernement libéral avait déclaré qu'une partie des fonds des contribuables canadiens servirait à élargir la formation du personnel quant à l'usage adéquat et neutre des médias sociaux, et on parle du personnel d'une agence des Nations Unies.

L'ambassadeur d'Israël aux Nations Unies a écrit récemment aux pays donateurs de l'UNRWA pour demander une enquête sur les opérations de cette organisation. Le Canada a-t-il reçu cette demande? Dans l'affirmative, comment y a-t-il répondu?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Je dois dire que je n'ai pas eu connaissance de cette lettre. Je vais m'informer, puis je me ferai un plaisir de répondre à la question de l'honorable sénateur.

Les pêches et les océans

La pêche dans l'Arctique

L'honorable Dennis Glen Patterson : Ma question s'adresse au représentant du gouvernement au Sénat. J'ai constaté avec plaisir que le budget de 2017 parle de création d'emplois dans les communautés autochtones côtières et éloignées qui vivent de la pêche. Afin notamment d'accroître les programmes de gestion collaborative des Autochtones, il propose de fournir 250 millions de dollars sur cinq ans et 62,2 millions par année, par la suite, à Pêches et Océans Canada.

J'aimerais savoir si ces mesures louables qui favoriseraient le développement des pêches autochtones seront enfin offertes aux Inuits afin qu'ils puissent développer leurs activités de pêche en pleine expansion sur le plus long littoral du Canada.

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question et de son intérêt soutenu à l'égard de ce dossier. Nous avons eu des discussions à ce sujet à l'extérieur de cette enceinte. Je vais m'informer plus précisément sur la question que vous avez soulevée, et je serai ravi de vous communiquer la réponse.

Le sénateur Patterson : Merci. Je suis reconnaissant de cet engagement. Je souligne que, dans le document budgétaire, on propose de renouveler et d'élargir les efficaces initiatives des pêches commerciales intégrées du Pacifique et de l'Atlantique destinées aux Autochtones.

(1500)

J'aimerais savoir si le représentant du gouvernement convient aussi que, outre les côtes du Pacifique et de l'Atlantique, il existe également une côte de l'Arctique, qui est, en fait, plus longue que les deux autres combinées.

Le sénateur Harder : Je confirme que c'est effectivement ainsi que je conçois la géographie de ce pays et que, dans le contexte de ma réponse précédente, je ferai part de la question au ministre.

Dépôt de réponses à des questions inscrites au Feuilleton

La santé—La sécurité publique et la protection civile—La justice—Les coûts estimés par le gouvernement fédéral relativement à la mise en place d'un régime de légalisation de la marijuana

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) dépose les réponses à la question no 31 inscrite au Feuilleton par le sénateur Carignan.

La sécurité publique et la protection civile—La justice—Les prévisions du gouvernement concernant le nombre de décès reliés à la conduite avec les facultés affaiblies par la marijuana pour chacune des trois années qui suivront la légalisation de la marijuana

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) dépose les réponses à la question no 32 inscrite au Feuilleton par le sénateur Carignan.

La santé—La justice—Les organismes et les particuliers consultés au sujet de la légalisation de la marijuana

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) dépose les réponses à la question no 33 inscrite au Feuilleton par le sénateur Carignan.

Les finances—Les paiements trop-perçus de TVH par les provinces de l'Atlantique

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 40 inscrite au Feuilleton par la sénatrice Griffin.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur la citoyenneté

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Motion d'amendement—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Omidvar, appuyée par l'honorable sénatrice Gagné, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et une autre loi en conséquence.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénatrice McCoy, appuyée par l'honorable sénatrice Ringuette,

Que le projet de loi C-6 ne soit pas maintenant lu pour une troisième fois, mais qu'il soit modifié :

a) à l'article 3, à la page 4, par substitution, à la ligne 1, de ce qui suit :

« 3 (1) Le paragraphe 10(2) de la même loi est abrogé.

(2) Le paragraphe 10(3) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

(3) Avant de révoquer la citoyenneté d'une personne ou sa répudiation, le ministre lui envoie un avis écrit dans lequel :

a) il l'informe qu'elle peut présenter des observations écrites;

b) il précise les modalités de présentation des observations;

c) il expose les motifs et les justifications, notamment les éléments de preuve, sur lesquels il fonde sa décision;

d) il l'informe qu'elle peut demander que l'affaire soit renvoyée à la Cour.

(3.1) Dans les soixante jours suivant la réception de l'avis, la personne peut :

a) présenter des observations écrites sur ce dont il est question dans l'avis, notamment toute considération d'ordre humanitaire — tel l'intérêt supérieur d'un enfant directement touché — justifiant, vu les autres circonstances de l'affaire, la prise de mesures spéciales ainsi que le fait que la décision la rendrait apatride, le cas échéant;

b) demander que l'affaire soit renvoyée à la Cour.

(3.2) Le ministre tient compte de toute observation reçue au titre de l'alinéa (3.1)a) avant de rendre sa décision.

(3) La même loi est modifiée par adjonction, après le paragraphe 10(4), de ce qui suit :

(4.1) Si la personne a présenté des observations écrites en vertu de l'alinéa (3.1)a) et a demandé que l'affaire soit renvoyée à la Cour en vertu de l'alinéa (3.1)b), le ministre renvoie l'affaire à la Cour au titre du paragraphe 10.1(1) sauf s'il est convaincu que :

a) soit, selon la prépondérance des probabilités, l'acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci n'est pas intervenue par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels;

b) soit des considérations d'ordre humanitaire justifient, vu les autres circonstances de l'affaire, la prise de mesures spéciales.

(4) La même loi est modifiée par adjonction, après le paragraphe 10(5), de ce qui suit :

(5.1) L'avis visé au paragraphe (3) ou la décision visée au paragraphe (5) est signifié à personne. Si pareille signification est en pratique impossible, le ministre peut demander à la Cour de rendre une ordonnance autorisant la signification substitutive ou dispensant de la signification.

(5.2) La décision du ministre de révoquer la citoyenneté d'une personne ou sa répudiation est définitive et n'est pas susceptible de contrôle judiciaire sous le régime de la présente loi ou la Loi sur les Cours fédérales. »;

b) à l'article 4, à la page 4 :

(i) par substitution, à la ligne 2, de ce qui suit :

« 4 (1) Le paragraphe 10.1(1) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

10.1 (1) Lorsqu'une personne présente une demande en vertu de l'alinéa 10(3.1)b), la citoyenneté de la personne ou sa répudiation ne peuvent être révoquées que si, à la demande du ministre, la Cour déclare, dans une action intentée par celui-ci, que l'acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

(2) Les paragraphes 10.1(2) et (3) de la même loi »,

(ii) par adjonction, après la ligne 6, de ce qui suit :

« (3) Le paragraphe 10.1(4) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

(4) Si le ministre demande une déclaration, il doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que l'acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

(5) La Cour saisie d'une telle demande :

a) détermine si, selon la prépondérance des probabilités, les faits — actes ou omissions — qui sont allégués au soutien de la demande sont survenus, surviennent ou peuvent survenir;

b) n'est pas liée, à l'égard des éléments de preuve, par les règles juridiques ou techniques de présentation de la preuve et peut recevoir les éléments de preuve déjà traités dans le cadre de l'instance qu'elle juge crédibles ou dignes de foi en l'occurrence et fonder sa décision sur eux. »;

c) à la page 4, par adjonction, après la ligne 8, de ce qui suit :

« 5.1 Le paragraphe 10.5(1) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

10.5 (1) (1) À la requête du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le ministre demande, dans l'acte introductif d'instance de l'action intentée en vertu du paragraphe 10.1(1) au motif que l'acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels liée à l'un ou l'autre des faits énoncés aux articles 34, 35 ou 37 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés sauf ceux énoncés aux alinéas 36(1)a) ou b) ou (2)a) ou b) de cette loi, que la personne soit déclarée interdite de territoire pour raison de sécurité, pour atteinte aux droits humains ou internationaux ou pour criminalité organisée au titre, respectivement, du paragraphe 34(1), des alinéas 35(1)a) ou b) ou du paragraphe 37(1) de cette loi. »;

d) à la page 7,

(i) par adjonction, après la ligne 20, de ce qui suit :

« 19.1 La personne dont la citoyenneté ou sa répudiation a été révoquée en vertu du paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté après la date de sanction de la présente loi mais avant la date d'entrée en vigueur des paragraphes 3(2) à (4) est réputée ne pas avoir vu sa citoyenneté révoquée. »,

(ii) par adjonction, après la ligne 25, de ce qui suit :

« 20.1 Si, à l'entrée en vigueur de l'article 4, un avis a été donné à une personne en application du paragraphe 10(3) de la Loi sur la citoyenneté sans que l'affaire ait été décidée définitivement avant cette entrée en vigueur, la personne peut, dans les trente jours suivant cette entrée en vigueur, demander que l'affaire se poursuive comme si l'avis avait été donné en application du paragraphe 10(3) de la Loi sur la citoyenneté, dans sa version édictée par le paragraphe 3(2). »;

e) à la page 8, par substitution, aux lignes 17 à 26, de ce qui suit :

« 25 Les sous-alinéas 40(1)d)(ii) et (iii) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés sont remplacés par ce qui suit :

(ii) soit au titre du paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté, dans le cas visé à l'article 10.2 de cette loi avant l'entrée en vigueur des alinéas 46(2)b)et c), dans leur version édictée par la Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et une autre loi en conséquence,

(iii) soit au titre du paragraphe 10.1(3) de la Loi sur la citoyenneté, dans le cas visé à l'article 10.2 de cette loi avant l'entrée en vigueur des alinéas 46(2)b)et c), dans leur version édictée par la Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et une autre loi en conséquence.

26 Les alinéas 46(2)b) et c) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

b) soit au titre du paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté;

c) soit au titre du paragraphe 10.1(3) de la Loi sur la citoyenneté. »;

(f) à l'article 27, à la page 9, par adjonction, après la ligne 6, de ce qui suit :

« (3.1) Les paragraphes 3(2) à (4), les paragraphes 4(1) et (3) et l'article 5.1 entrent en vigueur un an après la date de sanction de la présente loi ou, dans cet intervalle, à la date ou aux dates fixées par décret. ».

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer l'amendement de la sénatrice McCoy au projet de loi C-6. Je la remercie de cet amendement et je remercie aussi la sénatrice Omidvar de tout son travail par rapport à ce projet de loi.

Je n'expliquerai pas le détail technique du projet de loi, qui a déjà été bien expliqué par la sénatrice McCoy, le sénateur Pratte et la sénatrice Omidvar. Je vais plutôt parler du bien-fondé de l'amendement et expliquer en quoi celui-ci est nécessaire pour rétablir l'intégrité des valeurs canadiennes.

Si je suis en faveur de l'amendement, c'est parce que, lors de l'étude du projet de loi au comité, j'ai pu voir plusieurs valeurs canadiennes incarnées dans le projet de loi C-6 : la primauté du droit, la justice fondamentale et l'égalité pour tous les Canadiens.

L'amendement concorde avec les valeurs mêmes que représente le projet de loi C-6. En corrigeant un élément problématique dans nos lois en matière de citoyenneté, il rétablira l'intégrité de notre système. Pour comprendre pourquoi cette modification est si importante, il faut d'abord comprendre ce qui rend l'amendement nécessaire en premier lieu.

Notre citoyenneté est l'un de nos droits les plus précieux en tant que Canadiens. Avant l'adoption du projet de loi C-24, de nombreuses mesures de protection entouraient le processus de révocation. Si le ministre de l'Immigration avait des motifs raisonnables de croire qu'une personne avait obtenu sa citoyenneté par la voie d'une fausse déclaration ou de fraude ou en dissimulant sciemment des faits essentiels, la personne était protégée par un système de mesures de protection.

Avant l'adoption du projet de loi C-24, le cas de cette personne aurait d'abord été traité par le ministre ou son délégué, puis examiné par la Cour fédérale, avant de finalement être confié au gouverneur en conseil. Ces freins et contrepoids reflétaient l'intégrité de notre système, reconnaissant que la citoyenneté est l'un des droits les plus importants au Canada.

Tout cela a changé avec l'adoption du projet de loi C-24. Le projet de loi a changé le système de telle sorte que seuls le ministre ou un fonctionnaire qui le représente peuvent prendre la décision de révoquer la citoyenneté d'une personne. Il est impossible de faire appel. Il n'y a aucune place pour la compassion ou les motifs humanitaires. Le système ne prévoit aucune procédure régulière. Par conséquent, des Canadiens se voient nier leur droit d'être traités en toute intégrité et dans le respect des principes de la justice fondamentale.

Les Canadiens n'ont pas le droit de faire appel.

Honorables sénateurs, ce n'est pas la première fois que des gens se voient refuser le droit d'être entendus ou de bénéficier d'une procédure régulière. Il y a 30 ans, en 1985, nous nous sommes retrouvés dans la même situation lors d'une affaire soumise à la Cour suprême, connue sous le nom de Singh c. Canada.

Harbhajan Singh est arrivé au Canada en compagnie de plusieurs autres réfugiés cherchant à obtenir l'asile, après avoir fui les persécutions dans leur pays. Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration de l'époque a refusé de leur accorder la résidence permanente et leur a dit qu'ils n'avaient pas le droit d'être entendus.

La Cour suprême a été très claire dans sa décision concernant cette affaire. L'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés accorde à tout le monde un droit que l'on appelle la justice fondamentale. Dans l'affaire Singh, le droit à la justice fondamentale signifie que le principal intéressé avait le droit inaliénable de plaider sa cause et de prendre connaissance du dossier de la preuve retenue contre lui. Les juges ont statué qu'il avait le droit d'être entendu, vu « la nature des droits en cause et [...] la gravité des conséquences pour les personnes concernées ».

Le sénateur Harder, qui est leader du gouvernement au Sénat, pourrait beaucoup nous renseigner à ce sujet puisqu'il a été l'architecte de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Il pourrait attester de l'importance de pouvoir être entendu en personne devant un tribunal indépendant.

L'arrêt Singh, par lequel les tribunaux ordonnaient des audiences, a totalement paralysé le système d'octroi d'asile. Les conséquences de cet arrêt devaient se faire sentir pendant de nombreuses années. J'en sais quelque chose puisque, comme avocate spécialisée en droit de l'immigration, j'ai participé étroitement au processus avant et après l'arrêt Singh. Ainsi, Citoyenneté et Immigration Canada invoque désormais le principe de justice naturelle comme fondement des lignes directrices régissant ses opérations quotidiennes. Le ministère énonce en effet que :

Les principes de justice naturelle visent à protéger les personnes dans leurs interactions avec l'État. Ces principes précisent que chaque fois que les droits, privilèges ou intérêts d'une personne sont en jeu, il y a un devoir d'agir selon une procédure équitable.

Les concepts de justice fondamentale et de justice naturelle influencent même les décisions des tribunaux aux termes du projet de loi C-24. Dans l'affaire dont a été saisie récemment la Cour fédérale, soit l'affaire Monla c. Canada (Citoyenneté et Immigration), le juge Zinn a rendu un verdict favorable à Mohamad Raafat Monla en faisant valoir que la révocation de la citoyenneté au motif qu'elle aurait été acquise au moyen d'une fausse déclaration était inconstitutionnelle en l'absence de procédure équitable.

En dépit de l'arrêt Singh, de la jurisprudence qui s'en est suivie et de sa reconnaissance par le gouvernement, nous nous retrouvons dans la situation où des Canadiens se voient privés du droit à la justice fondamentale et à la justice naturelle. En fait, les droits juridiques mis en péril par le projet de loi C-24 et désormais par le projet de loi C-6 dépassent largement ceux qui avaient été examinés dans l'affaire Singh. Plutôt que simplement refuser l'accès à la citoyenneté canadienne, le projet de loi C-24 va jusqu'à la révoquer sans aucune application régulière de la loi.

En étudiant cet amendement, honorables sénateurs, nous devrions nous rappeler les leçons tirées de l'affaire Singh.

En ce moment, les résidents permanents et les réfugiés ont droit à une audience, alors que les citoyens canadiens n'y ont pas droit. En effet, les citoyens canadiens n'ont pas droit à une procédure équitable.

Honorables sénateurs, l'article 15 de la Charte prévoit que la loi ne fait acception de personne et qu'elle s'applique également à tous, et que tous doivent bénéficier de l'application régulière de la loi, peu importe leur origine ou la façon dont ils deviennent citoyens. Errol Mendes, professeur à l'Université d'Ottawa, a dit ce qui suit à ce sujet :

Étant donné que les citoyens ont des droits consacrés que les résidents permanents et les réfugiés n'ont pas, comme ceux qui se trouvent à l'article 6, qui porte sur le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir, et les droits démocratiques les plus fondamentaux qui se trouvent à l'article 3, ils ont un droit encore plus légitime à la justice procédurale que tout autre groupe de la population.

En effet, ces droits ne sont même pas assujettis à la disposition de dérogation. Dans ce cas-ci, comment peut-on justifier d'accorder moins de droits aux citoyens qu'à n'importe quel autre Canadien?

Permettre la révocation sans permettre la tenue d'une audience rend certains citoyens canadiens plus vulnérables que d'autres Canadiens. Honorables sénateurs, le projet de loi C-6, dans sa forme actuelle, ne rétablit pas entièrement l'intégrité et la constitutionnalité de notre système d'immigration. En effet, il reste des enjeux constitutionnels importants à régler.

Je crois que l'amendement de la sénatrice McCoy complète le tout. Je la remercie de l'avoir proposé. Il confère au projet de loi l'intégrité à laquelle s'attendent tous les Canadiens. L'amendement permettra aux Canadiens de bénéficier de l'application régulière de la loi lorsque leur citoyenneté est menacée en leur donnant le droit de faire appel devant la Cour fédérale.

Le fait que l'on ait choisi la Cour fédérale n'est pas anodin. Exception faite de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, c'est l'un des seuls endroits où une personne peut être sûre que son audience sera impartiale. Lorne Waldman, un avocat qui a comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, a affirmé ceci :

Le mieux serait de confier ce type d'affaires à un tribunal indépendant, la CISR en l'occurrence, mais nous ne pouvons pas prévoir cela dans le cadre d'un amendement au projet de loi. Il nous faut, en effet, introduire la possibilité d'une audience et, en l'état actuel de la situation, une audience indépendante ne peut avoir lieu que devant la Cour fédérale.

(1510)

Josh Patterson, directeur général de la B.C. Civil Liberties Association, a abondé dans le même sens en disant :

À notre avis, il faudrait rétablir le droit à une audience devant un organe judiciaire indépendant. Le ministre ne peut être la seule entité à prendre une décision aussi importante qui touche si profondément les droits de certaines personnes — puisqu'il s'agit de leur appartenance même à notre pays.

Cet amendement fait aussi en sorte que le processus soit juste, puisque le ministre devra donner aux citoyens les motifs et les justifications de la révocation de leur citoyenneté. Ainsi, les citoyens sauront à quoi s'attendre au tribunal.

Honorables sénateurs, l'autre point très troublant au sujet du projet de loi C-6 est qu'il ne permet pas aux gens d'invoquer des raisons d'ordre humanitaire pour expliquer pourquoi il ne faudrait pas révoquer leur citoyenneté. Le processus de détermination du statut de réfugié comprend une démarche très longue dans laquelle le réfugié, même un demandeur débouté, peut faire valoir des considérations d'ordre humanitaire pour justifier pourquoi il devrait vivre dans notre pays.

Aux termes du projet de loi C-6, le ministre n'a pas à tenir compte des raisons humanitaires. En application du projet de loi C-24, il y a déjà eu des cas où la personne désignée par le ministre pour examiner de tels cas a affirmé qu'elle n'avait pas à se pencher sur les raisons humanitaires.

Honorables sénateurs, je tiens à porter une histoire à votre attention afin d'expliquer pourquoi c'est si important. Ne pas tenir compte des raisons humanitaires peut avoir des conséquences dévastatrices sur la vie des gens, des gens qui, tout compte fait, estiment qu'ils sont réellement Canadiens.

Lorsque nous avons examiné le projet de loi à l'étape de l'étude en comité, nous avons entendu l'histoire de deux enfants dont la citoyenneté a été révoquée pour des raisons indépendantes de leur volonté. Les parents de ces enfants avaient fait de fausses déclarations dans leur demande de citoyenneté. Cependant, compte tenu de leur âge, les enfants n'étaient nullement conscients de ce qu'avaient fait leurs parents. Ils ont perdu leur citoyenneté 15 années plus tard. Au bout du compte, ces enfants étaient des Canadiens. Ils ont grandi au Canada. Ils ont fréquenté l'école et l'université au Canada. C'étaient, effectivement, des enfants canadiens. Ils étaient établis au Canada et avaient de très bons emplois.

La révocation de leur citoyenneté a eu sur eux un effet dévastateur. Ces jeunes ont tous deux perdu un très bon emploi puisqu'ils n'étaient plus autorisés à voyager munis d'un passeport canadien, leur travail exigeant qu'ils se déplacent. Tous les deux avaient un emploi exigeant qu'ils voyagent à l'étranger.

Ces deux jeunes se sont également retrouvés avec pratiquement aucune perspective d'emploi dans leur domaine, puisque la révocation les empêchait d'obtenir la citoyenneté pendant 10 ans.

Ces enfants étaient complètement innocents. Ils ont grandi au Canada et ont travaillé très fort. C'est le genre de cas qui est visé au moment de prendre en compte des motifs d'ordre humanitaire, et je crois que, si leur cas avait été soumis aux tribunaux, ils auraient recouvré leur citoyenneté. Cependant, les mesures législatives actuelles, c'est-à-dire les projets de loi C-24 et C-6 que nous étudions actuellement, ne nous permettent pas de prendre des mesures spéciales pour des motifs d'ordre humanitaire.

Honorables sénateurs, la possibilité de prendre des mesures spéciales pour motifs d'ordre humanitaire permettra d'éviter à l'avenir ce genre de situation, où des gens perdent leur citoyenneté alors qu'ils sont innocents.

C'est pourquoi l'amendement présenté par la sénatrice McCoy est important. Honorables sénateurs, unissons-nous pour améliorer le projet de loi C-6 et adopter l'amendement. Nous sommes, en tant que sénateurs, les gardiens de notre Constitution. Les principes de la justice fondamentale et de la justice naturelle sont enchâssés dans notre Constitution, et celle-ci prévoit explicitement que tous les Canadiens sont égaux devant la loi. Par conséquent, j'approuve cet amendement, qui nous donne l'occasion de rétablir l'intégrité et le caractère constitutionnel de notre loi sur la citoyenneté.

L'honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, j'interviens pour parler d'un amendement au projet de loi C-6 présenté par la sénatrice McCoy le 9 mars.

Après les audiences du comité sur le projet de loi C-6 des libéraux concernant la réforme du système d'immigration, je demeure plus opposée que jamais à ses mesures cyniques et irréfléchies. Lors des élections de 2015, il ne fait aucun doute que, lorsque les libéraux ont promis d'accélérer l'obtention de la citoyenneté canadienne et d'assouplir les exigences linguistiques, ils ont attiré beaucoup de votes dans les régions urbaines. Or, la question de savoir si ces mesures sont ou non dans l'intérêt du Canada est un tout autre sujet, que j'aborderai à l'étape de la troisième lecture. Pour l'instant, je limiterai mes observations à l'amendement dont nous sommes saisis.

La sénatrice McCoy essaie de modifier non seulement le projet de loi C-6, mais aussi la Loi sur la citoyenneté canadienne. Lorsqu'un amendement semblable à l'article 10 de la Loi sur la citoyenneté canadienne a été présenté à la Chambre des communes, il a été jugé irrecevable. Je me demande si nous pouvons étudier une proposition législative qui vise à modifier un aspect de la loi qui n'est pas compris dans le projet de loi. Cependant, je laisserai à d'autres le soin de déterminer la validité procédurale de l'amendement.

Je souligne que l'amendement est beaucoup plus large que son objectif déclaré de légiférer pour que le ministre renvoie les cas de révocation à la cour sur demande. En plus de cette mesure, l'amendement de la sénatrice McCoy donne à toute personne qui reçoit un avis de révocation un délai de 60 jours pour y répondre. De plus, il prévoit que l'avis de décision doit être remis en main propre à la personne et qu'une demande doit être présentée à la cour pour être dispensé de la signification.

Dans le cadre de l'étude de cet amendement, qui vise à ajouter un processus d'appel complexe qui comporte plusieurs étapes au processus décisionnel actuel, n'oublions pas les raisons pour lesquelles le gouvernement précédent a choisi, au moyen du projet de loi C-24, de simplifier le processus d'appel pour les personnes trouvées coupables d'avoir obtenu leur citoyenneté canadienne par des moyens frauduleux.

Le cas de Helmut Oberlander, un criminel de guerre nazi, est un bon exemple. M. Oberlander, qui est arrivé au Canada en 1954, a obtenu frauduleusement la citoyenneté en 1960 en mentant sur son rôle dans un escadron de la mort nazi. Lorsque son véritable passé militaire a été révélé en 1995, M. Oberlander a exercé tous ses droits d'appel pour éviter la déportation.

Aujourd'hui, plus de 20 ans plus tard, il vit toujours à Waterloo, en Ontario, parce qu'il a continué de défendre son cas de mauvaise foi jusqu'à la Cour suprême du Canada.

Honorables sénateurs, ce degré d'abus des procédures d'appel inépuisables est peut-être un exemple extrême. Il aide cependant à illustrer ce qui est possible et ce qui arrive lorsque des criminels et des fraudeurs — et c'est bien de cette catégorie de personnes qu'il s'agit ici — ont accès à des procédures d'appel trop élastiques.

Il convient également de se rappeler les éléments déclencheurs qui ont mené aux mesures du projet de loi conservateur C-24, lequel vise la simplification du processus d'appel dans les cas de fraudes.

En 2010, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a découvert que plus de 300 personnes déclaraient Palestine House, un immeuble de bureaux situé à Mississauga, en Ontario, comme résidence permanente au Canada.

Bien évidemment, ces 300 personnes ne vivaient pas vraiment dans l'immeuble de bureaux. En fait, elles ne vivaient même pas au Canada, ce qui ne les empêchait pas de recevoir des allocations pour enfants du gouvernement à cette adresse. Dans un autre cas en 2012, 1 000 personnes ont affirmé vivre dans un immeuble de bureaux à Montréal. Ces fraudes et d'autres du même type ont mené le gouvernement à relever 3 100 cas de citoyennetés frauduleuses et qui devaient être révoquées.

Honorables sénateurs, avant le projet de loi C-24, ces 3 100 personnes prises en flagrant délit de fraude pouvaient se prévaloir d'un processus d'appels inépuisables. À ma connaissance, ces cas font toujours l'objet d'un appel.

Loin de moi l'idée de laisser entendre que le droit d'appel devrait être éliminé. Toutefois, j'accepte les explications données par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, M. Ahmed Hussen, lors de son témoignage devant notre comité. Il a alors déclaré que le processus actuel est suffisant et juste. Pour la gouverne des sénateurs qui n'ont pas assisté à cette réunion, j'aimerais décrire le processus actuel, comme l'ont expliqué en détail le ministre et ses fonctionnaires.

Dès la découverte d'un cas possible de fraude, une division du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration fait enquête pour déterminer s'il existe suffisamment de preuves pour justifier l'éventuelle révocation de la citoyenneté. Si les preuves sont jugées suffisantes, le dossier est alors transféré à une autre division du ministère, qui détermine s'il convient d'envoyer un avis d'intention de révoquer la citoyenneté.

(1520)

Si la division détermine que c'est le cas, elle envoie un avis à la personne concernée. Cet avis contient toutes les preuves sur lesquelles repose la décision.

L'avis en question n'est pas une simple lettre informant la personne visée que sa citoyenneté sera révoquée. Il l'invite plutôt à fournir de plus amples renseignements ou facteurs qui devraient être pris en compte, y compris des détails concernant sa situation personnelle, comme la durée de la période qu'elle a passée au Canada, l'âge qu'elle avait lorsqu'elle a obtenu sa citoyenneté, l'étendue de ses liens avec le Canada, ainsi que d'autres motifs d'ordre humanitaire. Une fois la réponse reçue, le ministère décide s'il y a lieu ou non de révoquer la citoyenneté.

En résumé, contrairement à ce que nous avons entendu dans cette enceinte, premièrement, toutes les preuves relatives à la possible révocation de la citoyenneté sont communiquées au citoyen visé.

Deuxièmement, le citoyen a la possibilité de fournir tous les renseignements pertinents relatifs à sa situation personnelle, y compris des motifs d'ordre humanitaire. En fait, le ministre a même dit que l'envoi d'un avis de révocation sert essentiellement à permettre cet échange de renseignements.

Troisièmement, la personne visée a droit à un avocat.

Quatrièmement, la personne visée a droit à un contrôle judiciaire, si elle en obtient l'autorisation.

Selon moi, nous pouvons tous convenir que le processus que je viens de décrire est tout à fait conforme au principe de l'application régulière de la loi.

Honorables sénateurs, dans mon discours à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-6, j'ai fait remarquer qu'une grande partie du contenu de cette mesure législative semble exister pour la simple raison partisane d'être à l'opposé du libellé du projet de loi C-24 présenté par les conservateurs.

Jamais le gouvernement actuel n'a envoyé au Sénat de projet de loi qui soit motivé davantage par des raisons politiques. Cependant, il convient de signaler que la simplification du processus d'appel dans les cas de fraude ne figure pas parmi toutes les mesures contenues dans le projet de loi C-6, que les libéraux ont proposées simplement à des fins électoralistes plutôt qu'en fonction de données probantes en matière de politiques publiques. En fait, lors des audiences du comité du Sénat, le ministre a déclaré que l'ajout d'étapes au processus d'appel n'avait même jamais été envisagé lors de la rédaction du projet de loi.

Cela en dit long, n'est-ce pas? Il s'agit d'un projet de loi libéral visant à abroger de nombreuses mesures législatives pour la seule raison que ce sont des lois conservatrices qui ont laissé le processus d'appel simplifié des conservateurs intact. Autrement dit, le processus d'appel actuel, qui a été créé par un gouvernement, a maintenant été appuyé par un second gouvernement. Étant donné que deux gouvernements rivaux successifs conviennent que le système de recours actuellement en vigueur est suffisant, je ne vois aucune raison d'adopter l'amendement proposé.

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-6, et, bien que je l'appuie, je crains qu'un élément essentiel n'ait été omis de celui-ci. Voilà ce que l'amendement de la sénatrice McCoy propose de corriger. Après avoir entendu les témoignages présentés au comité, j'appuie sans réserve les modifications suggérées par notre collègue, car celles-ci respectent le principe du traitement égal devant la loi.

L'amendement porte sur les pouvoirs conférés au ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté relativement à la révocation de la citoyenneté pour motif de fausse déclaration ou de fraude. Comme la sénatrice McCoy l'a souligné, ce pouvoir est délégué à un employé du ministère. Cette personne est celle qui décidera ultimement si un individu demeurera citoyen du Canada. Je ne mets pas en doute le bon travail effectué par la fonction publique, mais il s'agit d'un pouvoir incroyable que l'on confère à des fonctionnaires.

À l'heure actuelle, les personnes qui reçoivent ce type d'avis de révocation sont privées du droit à l'application régulière de la loi. Je ne suis pas du tout d'accord avec ce que la sénatrice Frum a dit lorsqu'elle a suggéré que ces personnes y avaient droit. Ce n'est pas le cas. Tout ce qu'elles ont le droit de faire est de répondre par écrit à leur accusateur dans les 60 jours. Elles peuvent dire qu'une erreur a été commise ou réclamer la clémence pour des motifs d'ordre humanitaire, et c'est tout. Si l'argument qu'elles présentent ne convainc pas l'individu qui a déjà décidé qu'une fraude ou une fausse déclaration a eu lieu, leur citoyenneté est révoquée et l'affaire est classée.

Comme si ce n'était pas assez absurde, un citoyen naturalisé canadien a moins de droits que s'il était resté un résident permanent. En effet, si un résident permanent est accusé de fraude ou de fausse déclaration dans sa demande, il peut obtenir une audience devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et a même droit à un appel devant la Section d'appel de l'immigration. C'est de cette façon que fonctionne le droit à l'application régulière de la loi. Pourtant, au Canada, ce droit fondamental vous est refusé si vous devenez citoyen.

Honorables sénateurs, peu de sanctions ont des conséquences plus lourdes que la révocation de la citoyenneté. Comme l'a expliqué le sénateur Pratte à la dernière séance, une personne qui est passible d'une amende de 35 $ pour une contravention de stationnement a plus de recours qu'une personne dont la citoyenneté est révoquée. C'est, fondamentalement, inacceptable.

Lors d'un débat antérieur, la sénatrice Omidvar a dit ne pas comprendre pourquoi cette question n'a pas été réglée dans le projet de loi C-6. Ce fait me laisse tout aussi perplexe. Si cette procédure de révocation n'est pas réglée, les citoyens naturalisés canadiens continueront de se voir refuser le droit à l'application régulière de la loi — un droit accordé à chaque citoyen qui est un Canadien de naissance. Je m'oppose à l'idée d'avoir deux catégories de citoyens canadiens.

Le gouvernement a même reconnu cette omission. Lorsque l'ancien ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, John McCallum, a comparu devant le Sénat, je lui ai posé des questions à ce sujet. Il a admis que chaque Canadien devrait avoir le droit — et non la permission — de faire appel. Il a indiqué que son gouvernement et lui accueilleraient favorablement un amendement au projet de loi C-6 pour s'en assurer.

J'avoue que son successeur, le ministre Hussen, était quelque peu hésitant lorsque je l'ai questionné sur la question au Comité des affaires sociales, où nous avons étudié cette mesure législative. Pourtant, même s'il défendait le système actuel, il a dit ceci : « Nous sommes parfaitement disposés à envisager toute mesure permettant d'améliorer et de renforcer l'équité procédurale [...] Je prends devant vous l'engagement d'étudier très soigneusement de telles propositions et de collaborer avec vous afin de voir ce qui pourrait être fait à cet égard. »

Nous avons l'occasion de régler ce problème avec un amendement. Heureusement, c'est ce à quoi le Sénat excelle. À titre de sénateurs, l'une de nos tâches fondamentales consiste à étudier les projets de loi en profondeur. Si nous y voyons un défaut, nous essayons de le corriger. Il existe peu de meilleurs exemples que l'amendement qui est actuellement à l'étude.

L'amendement assure un juste équilibre. Il n'élimine pas la révocation comme punition en cas de fraude ou de fausse déclaration. Il ne l'élimine pas. Il ne fait qu'assurer aux citoyens canadiens le droit d'être entendu, de se défendre devant les tribunaux, d'avoir une audience devant un tribunal indépendant. C'est la façon dont fonctionne le système de justice au Canada.

J'ai entendu des arguments selon lesquels certains individus ne pourront pas se permettre de porter leur cause devant les tribunaux. Je suis du même avis. C'est le cas de nombre de personnes, et j'accueille à bras ouverts toute tentative de rendre notre régime d'aide juridique plus efficace, mais cela n'a jamais été une raison pour contourner l'application régulière de la loi dans ce pays et cela ne devrait jamais l'être. Nous ne pouvons pas priver un certain groupe de Canadiens de ce droit en raison des coûts.

J'ai également entendu des arguments venant de l'autre bout du spectre, c'est-à-dire qu'un individu qui en a les moyens pourrait faire prolonger sa procédure judiciaire, abusant ainsi du système et retardant le verdict. Ce sont des situations qui se produisent dans notre système de justice, et des réformes s'imposent pour assurer la prise de décision en temps opportun, mais depuis quand se sert-on de cet argument pour éliminer complètement l'application régulière de la loi? On ne l'a jamais fait, et ce cas-ci ne fait pas exception.

Honorables sénateurs, on dit que la citoyenneté est le droit à tous les autres droits. Cependant, dans ces circonstances, un individu peut en fait perdre le droit à l'application régulière de la loi lorsqu'il devient citoyen. C'est inacceptable, et l'amendement à l'étude pourrait corriger cette situation.

À la lumière du second examen objectif, il m'apparaît évident que cet amendement est nécessaire. Il n'était pas prêt à temps pour que le comité puisse le mettre aux voix, mais les sénateurs constateront que notre rapport comprend trois observations, auxquelles je souscris aussi. L'une d'elles portait sur l'augmentation des frais associés aux demandes de citoyenneté. Depuis trois ans, ces frais ont augmenté de plus de 500 p. 100. C'est exact : plus de 500 p. 100.

Si on considère que les frais relatifs au droit de citoyenneté sont de 100 $, les familles de quatre personnes, dont deux enfants d'âge mineur, devront débourser 1 460 $ pour obtenir la citoyenneté canadienne. Ces frais sont encore plus élevés lorsqu'on ajoute le coût de la formation et des tests linguistiques. Le coût peut constituer un obstacle pour les personnes à faible revenu. Ces gens ne devraient pas être privés de la citoyenneté canadienne parce qu'ils n'ont pas les moyens nécessaires pour présenter une demande. Or, au sous-comité, les témoins nous ont dit que le nombre de demandes de citoyenneté avait chuté de 50 p. 100.

(1530)

Historiquement, il y avait approximativement 200 000 demandes par année. En 2015, l'année de l'entrée en vigueur de cette nouvelle tarification, ce nombre est passé à 130 000. En 2016, on prévoit que le nombre de demandes baissera à 100 000, ce qui équivaut à une diminution d'environ 50 p. 100.

Avant de terminer, honorables sénateurs, j'aimerais aborder brièvement la question des Canadiens de deuxième génération nés à l'étranger. Ceux-ci font partie du groupe de personnes qu'on appelle les « Canadiens apatrides ».

Depuis la présentation du projet de loi C-6 au Sénat, plusieurs Canadiens ont communiqué avec moi pour me dire qu'ils s'inquiétaient des répercussions qu'auront les lois sur la citoyenneté actuelles sur la citoyenneté de leurs petits-enfants. Je vais vous donner un exemple pour illustrer mes propos. Une famille qui a adopté leur fille à l'étranger est entrée en contact avec moi. Leur fille sera élevée ici. Elle fréquentera une école canadienne, occupera un emploi au Canada et paiera des impôts. Elle est Canadienne. Or, si elle choisit plus tard de fonder une famille et que ses enfants sont nés à l'extérieur du Canada, il se pourrait que ceux-ci ne soient pas considérés comme étant Canadiens, même si le Canada est son pays de résidence.

Dans le contexte actuel de la mondialisation, je crois qu'il s'agit d'une limite déraisonnable à imposer aux citoyens canadiens. Le Canada est une société plurilingue, cosmopolite et éduquée. Les Canadiens sont très convoités. De plus en plus, les études et les possibilités d'emploi les feront aller partout dans le monde, parfois pendant de longues périodes. Ils ne devraient pas être pénalisés pour cela. C'est une force et un avantage pour notre pays. Nous devrions les encourager à faire valoir nos valeurs et nos intérêts économiques à l'étranger au lieu de leur imposer des limites arbitraires. Leur attachement au Canada est ce qu'il y a de plus important.

Au cours des prochains mois, j'ai l'intention de présenter une mesure législative pour corriger cette situation. Un projet de loi permettra au Sénat de régler les nombreux problèmes, notamment d'ordre technique, qui s'y rapportent. J'ai hâte de travailler sur ce dossier avec mes honorables collègues.

Entre-temps, nous sommes saisis du projet de loi C-6. Il s'agit d'un bon projet de loi, mais il est incomplet sans l'amendement proposé par la sénatrice McCoy. J'encourage les sénateurs à adopter la motion d'amendement, puis à renvoyer le projet de loi à l'autre endroit aux fins d'examen.

(Sur la motion du sénateur Harder, le débat est ajourné.)

Le budget de 2016

Retrait de l'interpellation

À l'appel de l'article no 1 de l'honorable Peter Harder, sous la rubrique des affaires du gouvernement, interpellations :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur le budget intitulé Assurer la croissance de la classe moyenne, déposé à la Chambre des communes le 22 mars 2016 par le ministre des Finances, l'honorable Bill Morneau, C.P., député, et au Sénat le 24 mars 2016.

(L'interpellation est retirée.)

Projet de loi sur la non-discrimination génétique

Message des Communes—Amendement des Communes—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude de l'amendement apporté par la Chambre des communes au projet de loi S-201, Loi visant à interdire et à prévenir la discrimination génétique :

Page 6, après la ligne 31, le nouvel article suivant :

« DISPOSITIONS DE COORDINATION

11 (1) En cas de sanction du projet de loi C-16, déposé au cours de la 1re session de la 42e législature et intitulé Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel (appelé « autre loi » au présent article), les paragraphes (2) et (3) s'appliquent.

(2) Dès le premier jour où, à la fois, l'article 1 de l'autre loi et l'article 9 de la présente loi sont en vigueur, l'article 2 de la Loi canadienne sur les droits de la personne est remplacé par ce qui suit :

2 La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne en donnant effet, dans le champ de compétence du Parlement du Canada, au principe suivant : le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l'égalité des chances d'épanouissement et à la prise de mesures visant la satisfaction de leurs besoins, indépendamment des considérations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l'âge, le sexe, l'orientation sexuelle, l'identité ou l'expression de genre, l'état matrimonial, la situation de famille, les caractéristiques génétiques, la déficience ou l'état de personne graciée.

(3) Dès le premier jour où, à la fois, l'article 2 de l'autre loi et le paragraphe 10(1) de la présente loi sont en vigueur, le paragraphe 3(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne est remplacé par ce qui suit :

3 (1) Pour l'application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l'âge, le sexe, l'orientation sexuelle, l'identité ou l'expression de genre, l'état matrimonial, la situation de famille, les caractéristiques génétiques, l'état de personne graciée ou la déficience. »

L'honorable Art Eggleton propose que le Sénat agrée l'amendement apporté par la Chambre des communes au projet de loi S-201, Loi visant à interdire et à prévenir la discrimination génétique, et qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

— Honorables sénateurs, je suis ravi d'intervenir dans le débat sur la motion que je viens de présenter. Elle vise à apporter un amendement de forme, que j'expliquerai plus en détail dans un instant, à un projet de loi dont, à mon avis, tous les sénateurs peuvent être très fiers.

Le projet de loi S-201 est un projet de loi sénatorial, un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par notre ancien collègue, le sénateur Jim Cowan. Il vise à interdire et à prévenir la discrimination génétique afin que les gens aient le contrôle de leurs propres données génétiques.

Ce projet de loi a fait l'objet d'un examen approfondi, tout d'abord ici, au Sénat, où, à cause d'une prorogation et des élections de 2015, il a été examiné non pas une, mais bien deux fois par le Comité sénatorial des droits de la personne. Il a ensuite été examiné à l'autre endroit. Le Comité de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes a, en effet, tenu 5 réunions et entendu 28 témoins à son sujet.

Ce projet de loi a été extrêmement bien accueilli par les deux Chambres. Le 14 avril 2016, soit il y a presque un an, il a été adopté à l'unanimité au Sénat à la suite d'un vote oral.

Le projet de loi a ensuite été renvoyé à l'autre endroit, où il a été adopté par une rare unanimité à l'étape de la deuxième lecture à l'occasion d'un vote par appel nominal. Les députés de tous les partis l'ont appuyé, tout comme le premier ministre et l'ensemble des membres de son Cabinet qui étaient présents.

Les membres du Comité de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes ont également été impressionnés et ont, eux aussi, adopté ce projet de loi à l'unanimité, en y ajoutant le simple amendement de forme sont nous sommes saisis aujourd'hui.

Le 8 mars, le projet de loi a franchi l'étape de la troisième lecture à la Chambre des communes avec une majorité fort confortable de 222 voix contre 60. C'est tout un exploit, honorables sénateurs, et il représente parfaitement ce que les sénateurs peuvent accomplir, à titre individuel et collectivement en tant que Sénat du Canada.

Je serai évidemment heureux de répondre aux questions que les honorables sénateurs pourraient poser au sujet de ce projet de loi et expliquer les besoins essentiels auxquels il répond. C'est d'ailleurs pourquoi il a joui d'un appui aussi enthousiaste de la part des parlementaires des deux Chambres et des Canadiens d'un océan à l'autre. En fait, aujourd'hui, nous n'avons qu'à débattre de l'amendement de forme contenu dans le message de la Chambre des communes. Ce projet de loi a été adopté par les deux Chambres. Il n'attend plus que la sanction royale. Nous n'avons qu'à examiner cet amendement de forme, car toutes les dispositions du projet de loi ont déjà été adoptées. Nous sommes simplement saisis de la disposition supplémentaire que la Chambre des communes souhaite voir ajoutée au projet de loi S-201.

Il s'agit de ce qu'on appelle une disposition de coordination. Des circonstances inhabituelles la rendent nécessaire. En effet, le Parlement est saisi de deux projets de loi qui visent tous deux à modifier les mêmes dispositions de la même loi, c'est-à-dire la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ainsi, le projet de loi S-201 ajoute les « caractéristiques génétiques » aux motifs de discrimination interdits par la loi et le projet de loi C-16, dont nous sommes également saisis, vise à inclure « l'identité ou l'expression de genre » à la même disposition de la loi.

À la lecture des projets de loi S-201 et C-16, on constate que les deux énoncent les articles pertinents de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ils énumèrent tous les motifs de discrimination illicite existants, comme la race, la couleur de la peau, la religion, et cetera, et chacun propose d'y intégrer leur disposition respective.

La disposition de coordination à l'étude assure que les deux amendements peuvent entrer en vigueur dans l'éventualité où le Parlement adopterait les deux projets de loi. Sans cet amendement, si le projet de loi S-201 est adopté en premier, l'amendement concernant la discrimination génétique qu'il propose à la Loi canadienne sur les droits de la personne serait effacé involontairement si le projet de loi C-16 était lui aussi adopté.

Honorables sénateurs, j'insiste sur le fait que l'amendement à l'étude n'a aucune incidence sur notre décision quant au projet de loi C-16. Il n'entraîne aucune répercussion à cet égard. S'il s'avère que le projet de loi C-16 n'est jamais adopté, la disposition à l'étude restera sans effet. En revanche, si le projet de loi C-16 est adopté, les protections que nous aurons incluses dans la Loi canadienne sur les droits de la personne pour protéger les Canadiens contre la discrimination génétique ne seront pas involontairement effacées.

Ainsi, l'amendement commence avec l'article suivant :

(1) En cas de sanction du projet de loi C-16, déposé au cours de la 1re session de la 42e législature et intitulé Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel (appelé « autre loi » au présent article), les paragraphes (2) et (3) s'appliquent.

Chers collègues, il ne s'agit pas d'un amendement controversé. Il a été adopté à l'unanimité par le Comité de la justice et des droits de la personne de l'autre endroit, et autant l'ancien sénateur Cowan que le parrain du projet de loi à la Chambre des communes, le député Rob Oliphant, l'appuient complètement.

Il s'agit d'un amendement de forme comme on en voit souvent dans cette enceinte, et j'estime que le Sénat peut l'adopter rapidement.

(1540)

Avant de terminer, je voudrais prendre un instant pour parler aux sénateurs des réactions que ce projet de loi a suscitées parmi les Canadiens. Lorsque nous sommes absorbés par nos responsabilités, il peut facilement nous arriver de ne pas voir le résultat, sur le sort des Canadiens, du travail que nous avons le privilège de faire. Ce projet de loi, qui est un projet de loi sénatorial d'initiative parlementaire, a été applaudi par beaucoup de Canadiens d'un peu partout au pays. Permettez-moi de lire quelques extraits des courriels envoyés au bureau du sénateur Cowan après que le projet de loi eut franchi l'étape de la troisième lecture aux Communes, ce mois-ci.

Voici un extrait d'un courriel envoyé par un généticien chevronné du Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario :

Cela suffit à nous faire croire que tout est possible. Je saute de joie. J'ai très hâte de pouvoir rassurer mes patients. C'est un formidable! [...] vous avez réussi tous à accomplir quelque chose d'important aujourd'hui.

Voici un bref extrait d'un courriel envoyé au nom de la Société canadienne de la SLA :

Quelles nouvelles formidables pour nos patients et leur famille!

Et voici maintenant ce que dit la Fondation de la lutte contre la cécité :

Après 10 ans, le rêve de mettre fin à la discrimination génétique se concrétise ce soir [...] Je suis très, très heureux pour notre collectivité et je suis fier de ceux qui ont eu le courage de prendre la parole. C'est lorsque tout le monde met la main à la pâte qu'on obtient de tels résultats. Quel legs remarquable vous nous laissez! Vous venez de poser un jalon historique. J'ai peine à trouver les mots tellement je suis heureux.

Les gens ont littéralement célébré ce moment dans de nombreux hôpitaux. À l'hôpital pour enfants de Toronto, un courriel a été envoyé le matin après le vote, avec la mention suivante dans la case expliquant l'objet du courriel : « Un tournant de l'histoire de la génétique a été franchi hier soir. » Voici un extrait de ce courriel :

Le projet de loi S-201 a été adopté tel quel hier soir. C'est très important pour les Canadiens en général et pour notre recherche en particulier. Il y aura de la pizza et des boissons.

Je ne sais pas quelle en est la valeur nutritive, compte tenu du rapport que nous avons produit sur l'obésité, mais tant pis.

La collation sera servie de midi à midi trente et des poussières. Elle a été prévue pour 100 personnes, mais n'hésitez pas à apporter votre propre déjeuner. Nous voulons simplement que les gens se retrouvent pour célébrer ce vote... La démocratie a marché.

Voilà un exemple de courriel reçu au bureau du sénateur Cowan.

Cela fait du bien d'avoir des commentaires positifs sur ce qui se fait au Sénat. Ce n'est pas tous les jours qu'on en reçoit.

Ce projet de loi signifie beaucoup pour un grand nombre de Canadiens, chers collègues. Il est une illustration du Sénat à son meilleur. Après avoir constaté un besoin, le sénateur Cowan a cherché à le satisfaire. Il n'y avait rien là de partisan; l'enjeu était la santé des Canadiens, d'où l'immense appui qu'il a reçu des parlementaires de tous partis, dans les deux Chambres.

C'est l'héritage d'un sénateur émérite qui nous a quittés. Je suis très fier d'avoir participé à son examen en comité et au Sénat, et de l'avoir appuyé. Le projet de loi va maintenant entrer en vigueur.

J'espère que vous vous joindrez à moi pour signaler sans tarder à la Chambre des communes que nous avons convenu de son amendement. Ce projet de loi si nécessaire pourra ainsi recevoir la sanction royale et devenir loi.

(Sur la motion du sénateur Housakos, le débat est ajourné.)

[Français]

La Loi sur l'hymne national

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Lankin, C.P., appuyée par l'honorable sénatrice Petitclerc, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-210, Loi modifiant la Loi sur l'hymne national (genre).

L'honorable René Cormier : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour apporter mon appui au projet de loi C-210, qui vise à remplacer dans la version anglaise de l'hymne national du Canada les mots « true patriot love in all thy sons command » par les mots « true patriot love in all of us command ».

D'entrée de jeu, je dirai que je bénéficie des allocutions fort éclairantes qui ont été faites dans cette Chambre par plusieurs d'entre vous au cours des derniers mois. J'affirmerai aussi que j'ai lu avec beaucoup d'attention les discours écrits à ce sujet, et que les arguments mis de l'avant, de part et d'autre, sont tout à fait valables et pertinents. Voilà donc la posture de départ qui sera la mienne, celle d'un jeune sénateur qui est avant tout admiratif de la rigueur des arguments énoncés et de la force de conviction de ceux qui les ont exprimés.

[Traduction]

Dans vos déclarations, vous avez parlé avec émotion et conviction de bien des sujets : le respect de notre patrimoine et de notre histoire, la diversité et l'inclusion, l'égalité hommes-femmes, le respect des artistes et de leur travail, le pouvoir de nos symboles, le respect de la langue et de la grammaire, ainsi que l'évolution du pays et sa faculté d'adaptation.

Voilà autant de sujets abordés qui ont suscité chez moi de nombreuses réflexions et que je souhaite partager avec vous aujourd'hui dans ce que je considère être mon premier discours dans cette auguste Chambre.

[Français]

Afin d'expliquer ma position à l'égard de ce projet de loi, permettez-moi d'abord, honorables collègues, de vous dire ce qui a traversé mon cœur et mon esprit, le 15 novembre 2016, quand j'ai eu le privilège de faire mon entrée dans cette enceinte en tant que sénateur.

Ce jour-là, j'étais habité d'une grande fierté et d'un sens aigu des responsabilités associées à cette nouvelle fonction. La présence des honorables sénateurs acadiens qui m'ont précédé imprégnait chacun de mes pas, notamment celle de Pascal Poirier, écrivain, avocat, homme de théâtre et président de la Société Nationale de l'Assomption qui est devenu, il y a exactement 132 ans ce mois-ci, le premier Acadien à siéger au Sénat du Canada. Il y est demeuré 17 732 jours, soit un peu plus de 48 ans, ce qui fait de lui encore à ce jour le sénateur ayant siégé le plus longtemps. Je suis, évidemment, très fier de son engagement envers notre pays, mais je vous rassure, mon mandat sera plus court.

J'ai aussi eu la nette impression, en accédant à cette Chambre, que j'y faisais entrer toutes les générations d'hommes et de femmes qui m'ont précédé et dont je suis l'humble descendant. Je suis le fils de Livin, à Adolphe, à Michel, à Charles, à Thomas, à Jean, à Jean-Baptiste, à Alexis, à Thomas, à Robert Cormier, maître-charpentier de Louisbourg. Je suis aussi le fils d'Anita, à Louisa, à Marguerite, à Marie-Marcelline, à Marie-Françoise, à Agathe, à Anne, à Marguerite.

[Traduction]

Si je vous énumère ainsi ma généalogie, ce n'est pas pour vous convaincre que je suis un noble descendant de Louis XIV — je n'ai visiblement pas la coiffure de l'emploi —, mais avant tout pour témoigner de l'importance qu'occupent chez nous le patrimoine et l'histoire. En effet, dès mon jeune âge, le respect du passé a fortement imprégné mon éducation. D'ailleurs, comme mes neuf frères et sœurs, j'ai probablement su que j'étais Acadien avant même de connaître mon prénom.

C'est vous dire le respect que mes parents accordaient à la culture et aux origines, comme si la déportation de notre peuple au XVIIIe siècle nous obligeait à renommer, à chaque fois, toutes les générations qui nous ont précédés, pour bien retisser le fil de notre histoire, réaffirmer notre identité culturelle commune et manifester notre appartenance à ce territoire.

[Français]

Je comprends donc tout à fait les préoccupations exprimées par certains d'entre vous concernant le respect du patrimoine et de l'histoire, et je les fais miennes. Cela dit, l'écrivain français Anatole France affirmait ce qui suit :

L'histoire n'est pas une science, c'est un art. On n'y réussit que par l'imagination.

En effet, l'histoire est sujette à interprétation et la lecture que nous en faisons n'est pas immuable. Elle s'affine selon les connaissances et la conscience que nous acquérons au fil des générations. J'en veux pour preuve les différents points de vue que les historiens peuvent avoir sur un même évènement historique. Au Canada, n'avons-nous pas malheureusement omis de raconter certains pans de notre histoire dans nos manuels scolaires? Voilà pourquoi, à mes yeux, le changement proposé n'a certainement pas de visées révisionnistes, mais cherche plutôt à mettre en lumière la richesse de la contribution de toutes les Canadiennes et de tous les Canadiens à notre histoire.

En faisant mes premiers pas dans cette Chambre, j'avais aussi dans le cœur une mélodie, celle de l'hymne national de l'Acadie. Eh oui! Honorables collègues, malgré le respect que le peuple acadien portait et porte toujours à notre pays, les premiers leaders acadiens ont donné à cet espace politique et culturel qu'on appelle l'Acadie les premiers symboles officiels de son identité.

À la Convention nationale acadienne de 1881, les délégués ont désigné le 15 août, fête de l'Assomption, comme la fête nationale de l'Acadie et, en 1884, à la deuxième convention qui a eu lieu à l'Île-du-Prince-Édouard, « berceau de la Confédération », ils ont choisi un drapeau, une devise, un insigne et un hymne national. Inspiré par le contexte social, culturel et religieux de l'époque, le chant qui a été choisi est un hymne catholique en latin, dédié à la Vierge Marie, l'Ave Maris Stella.

(1550)

[Traduction]

Au fil des générations, afin de maintenir la pertinence de ce symbole, pour qu'il soit représentatif de l'évolution de la société acadienne et qu'il ait un sens pour toutes les générations, des changements y furent apportés. Tout en conservant une partie du texte en latin, des paroles en français ont été introduites. Malgré la résistance de certains de nos compatriotes, cette nouvelle version s'est aujourd'hui imposée et je suis toujours ému d'entendre la jeunesse acadienne et les nouveaux venus en Acadie entonner cet hymne avec fierté. Grâce aux changements apportés, ce symbole demeure un pilier fondamental de notre identité collective et agit comme une source d'inspiration pour célébrer notre passé et projeter l'Acadie dans l'avenir.

[Français]

Cet après-midi de novembre 2016, en accédant à cette Chambre, j'étais donc habité, comme vous tous, j'imagine, quand vous y avez été conviés, par de nombreuses pensées et de profondes émotions. J'avais un sourire accroché au visage pour ne pas laisser paraître la nervosité qui m'assaillait en raison du doute incessant qui me tiraille toujours en pareille occasion, celui de me demander si je serais accepté dans ce nouvel environnement et si j'y trouverais ma place comme citoyen pluriminoritaire : minoritaire francophone vivant au sein de la majorité anglophone au Canada; minoritaire francophone vivant à l'extérieur de la majorité francophone du Québec; minoritaire parce que je vis depuis 33 ans avec un conjoint du même sexe que moi; minoritaire dans cette Chambre, parce que non associé à un parti politique; et, enfin, pourquoi pas, minoritaire, parce que chauve parmi ces magnifiques et élégantes coiffures!

Or, ce qui a été le plus révélateur pour moi en entrant ici a été de constater la pluralité culturelle de cette Chambre, reflet de la diversité de notre pays. De la région francophone homogène dont je suis issu, ce portrait du Canada est moins visible et a moins imprégné le quotidien de mes concitoyens de la péninsule acadienne.

[Traduction]

Cette diversité implique beaucoup d'ouverture et de compromis, j'en conviens, mais n'est-ce pas là un des paris du Canada? À celles et ceux qui croient que nous assistons au pays à une utilisation excessive de la notion d'inclusion attribuable à une vision trop « politiquement correcte », je dirai que je serai du même avis, si les actions posées pour affirmer cette inclusion et cette diversité restent de belles paroles et ne s'ancrent pas dans nos référents culturels communs, dans nos symboles, dans nos lois et dans nos actions.

[Français]

Au-delà de la diversité culturelle, la présence d'un nombre important de femmes dans cette Chambre m'a aussi réjoui et rassuré. Celles qui composent 52 p. 100 de la population canadienne ne sont pas encore pleinement représentées dans cette enceinte, mais le Sénat tend vers un meilleur équilibre des genres, et cela est rassurant pour l'avenir de la démocratie et de notre pays.

Dans l'histoire du Canada, tant de citoyennes ont contribué au développement de notre société. Nous avons tous dans nos communautés des femmes qui, par de petites et grandes actions, transforment notre quotidien et contribuent à notre bonheur individuel et collectif. Elles sont artistes, travailleuses sociales — je leur rends hommage aujourd'hui —, femmes d'affaires, médecins, professeures, scientifiques, politiciennes et sénatrices. Elles sont nos sœurs, épouses, grand-mamans, mères, tantes, nièces et amies. N'est-il pas légitime alors que cette proportion si importante de la population canadienne puisse s'identifier pleinement aux symboles collectifs qui sont les nôtres?

[Traduction]

En parcourant les nombreuses allocutions relatives au projet de loi C-210, j'étais ravi de lire les propos d'une de nos honorables collègues qui soulevait avec rigueur et passion l'enjeu du respect des artistes et de leurs œuvres. Au Canada, malgré des lois importantes comme celles sur le droit d'auteur et celle sur le statut de l'artiste, les créateurs canadiens font encore face à de nombreux défis liés au respect de leurs œuvres.

[Français]

Nous nous souvenons tous de l'affaire Robinson, cette saga judiciaire entre l'auteur-dessinateur québécois Claude Robinson et la maison de production audiovisuelle Cinar, qui s'est amorcée en 1996 lorsque Claude Robinson a accusé les producteurs d'avoir plagié son dessin animé Robinson Curiosité. Les propriétaires de Cinar avaient en effet repris l'ensemble de son concept dans une série de dessins animés similaires intitulée Robinson Sucroé. Il s'en est suivi une longue série de poursuites et de démêlés judiciaires devant les tribunaux pour la reconnaissance des droits d'auteurs de Claude Robinson, qui a consacré plus de 18 ans de sa vie à obtenir justice dans cette affaire. La Cour suprême du Canada lui a finalement donné raison en 2013.

[Traduction]

Le respect de la propriété intellectuelle est assurément non négociable, et le respect de l'intégrité des œuvres l'est tout autant. Voilà pourquoi l'examen de la Loi sur le droit d'auteur qui aura lieu l'automne prochain nécessitera une attention particulière de la part de cette Chambre.

[Français]

Cela étant dit, l'œuvre dont il est question dans le projet de loi C-210 est aujourd'hui du domaine public et n'impose donc pas les mêmes exigences. L'article 6 de la partie I de la Loi sur le droit d'auteur précise ce qui suit, et je cite :

6 Sauf disposition contraire expresse de la présente loi, le droit d'auteur subsiste pendant la vie de l'auteur, puis jusqu'à la fin de la cinquantième année suivant celle de son décès.

Après cela, l'œuvre est du domaine public et peut être utilisée par quiconque, sans autorisation ou paiement de redevances. Comme le précise le ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique, au Canada, on peut même modifier l'œuvre sans autorisation.

La Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN), une organisation collective canadienne de droits qui gère les droits d'exécution de plus de 100 000 auteurs, compositeurs et éditeurs membres, confirme d'ailleurs cette affirmation.

À la lumière de ces renseignements, nous devons admettre que le projet de loi C-210 n'implique aucunement un non-respect de l'intégrité de l'œuvre de Robert Stanley Weir, d'autant plus qu'il propose de revenir à la version originale de son texte dans laquelle l'utilisation de l'expression of us apparaissait.

[Traduction]

« Us », « nous », est un mot qui peut résonner avec force dans les deux langues officielles et qui a aujourd'hui un sens si profond qu'il est, sans l'ombre d'un doute, la raison pour laquelle je voterai en faveur de ce projet de loi.

Connaissant comme vous les problèmes qui assaillent actuellement notre pays et le monde, je suis convaincu que la principale préoccupation de nos contemporains en ce moment n'est pas le changement de deux mots dans notre hymne national. Je crois cependant fermement et sincèrement que l'enjeu du « nous », du vivre ensemble, est au cœur de nos défis actuels et à venir.

[Français]

« Les hommes le plus souvent se querellent pour des mots. C'est pour des mots qu'ils tuent et se font tuer le plus volontiers », affirmait Anatole France. Certains dirigeants de notre planète l'ont bien compris et utilisent les mots comme des armes pour diviser, instaurer la peur, construire des murs entre les nations et justifier les guerres et les conflits.

Il y a quelques jours à peine, nous avons assisté encore une fois à des gestes d'une violence inouïe sur le pont de Westminster et dans l'enceinte du Parlement britannique. N'est-ce pas encore là un exemple flagrant de cette tentative répandue dans notre société occidentale de créer des ruptures et des divisions au sein de nos sociétés? Permettez-moi d'offrir nos plus sincères condoléances aux familles touchées, à nos collègues parlementaires et au peuple anglais.

[Traduction]

Honorables collègues, je reconnais qu'il y a de multiples arguments pour maintenir notre hymne national tel qu'il est depuis 1980. Or, le Canada ne ressemble plus à celui des années 1980. Bien sûr, il possède toujours ses deux langues officielles qu'il faut constamment réaffirmer comme nos langues citoyennes, et cela, sans rien enlever aux autres langues parlées dans ce pays, que ce soit les langues autochtones ou celles d'autres communautés, mais le Canada qui fêtera sous peu son 150e anniversaire est transformé à jamais et de manière irréversible.

[Français]

Je crois que nous faisons fausse route, honorables sénateurs, si nous n'intégrons pas dans nos lois et nos actions des stratégies culturelles qui permettent de renforcer nos référents culturels communs et notre identité collective. Cela signifie, en effet, que nous devons avoir le courage, parfois, d'apporter des changements à certains de nos symboles pour qu'ils soient encore plus forts, plus signifiants et plus mobilisateurs.

À celles et ceux qui disent que ce changement ouvre la porte à d'autres changements, je dis que vous avez sans doute raison. Cela dit, nous ne pouvons pas prévoir ce que les générations futures voudront faire, mais nous pouvons certainement agir sur notre époque, en sachant que nos enfants et petits-enfants auront la sagesse de faire leurs propres choix.

Son Honneur le Président : Sénateur, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

Le sénateur Cormier : S'il vous plaît.

[Traduction]

Le sénateur Cormier : Aussi, considérant les défis auxquels notre société canadienne doit faire face dans sa capacité à rassembler les Canadiennes et Canadiens autour d'une vision commune; considérant le désir de leadership du Canada en matière d'égalité et d'inclusion; considérant les oublis et omissions qui amputent notre histoire collective d'une partie de sa richesse, que ce soit la contribution des femmes, des Premières Nations ou des minorités à l'essor de notre pays, j'affirme que nous avons collectivement besoin du « nous » proposé dans ce projet de loi.

[Français]

Affirmons-le dans notre hymne national, comme son auteur l'a fait à l'origine. Chantons cet hymne légèrement modifié avec la conviction qu'il résonnera encore davantage auprès de l'ensemble des Canadiennes et Canadiens de toutes origines et de tous les genres, et soyons fiers du leadership et de la vision que nous, honorables sénateurs et sénatrices, pouvons mettre en œuvre en adoptant ce projet de loi.

(1600)

[Traduction]

Je ne veux certainement pas prendre la parole au nom de M. Robert Stanley Weir, mais, à la lumière de son texte original et de son désir de rester pertinent, considérant les modifications qu'il a lui-même apportées à son texte en fonction des changements politiques et sociaux importants qui se sont produits à son époque, je pense qu'il serait heureux aujourd'hui que le mot « nous » fasse à nouveau son apparition dans son texte, dans les paroles qu'il a écrites avec tant d'amour pour ses compatriotes.

[Français]

Il en est certainement de même pour le parrain de ce projet de loi, le regretté Mauril Bélanger, dont je salue ici la mémoire avec beaucoup d'émotion et de gratitude.

Sur ce, honorables sénateurs, en m'appuyant sur cette phrase attribuée à Voltaire qui dit : « Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire », je vous remercie sincèrement de m'avoir permis d'exprimer mon point de vue.

Des voix : Bravo!

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, je tiens à féliciter le sénateur Cormier de son discours, dans lequel il a présenté une vision très large et fait appel à nos sentiments les plus élevés. Cependant, il sait déjà que je ne suis pas d'accord avec lui.

Une voix : Bien essayé!

[Traduction]

La sénatrice Fraser : Chers collègues, comme je l'ai déjà dit au Sénat et comme je le dirai probablement encore, je suis une féministe engagée, mais je n'appuie pas ce projet de loi pour plusieurs raisons.

Commençons par la raison qui est probablement la moins importante. Je pense que le libellé proposé, « in all of us command », est maladroit, lourd et banal. C'est un bon exemple de ce qui se passe lorsqu'on laisse la politique se mêler d'affaires qui ne la regarde pas. En général, les politiciens ne sont pas poètes.

En plus d'être extrêmement maladroit, le changement proposé ne fait rien pour enlever l'ambiguïté de cette phrase de notre hymne national. Mes collègues se souviendront de la discussion très intéressante que nous avons eue quand le sénateur MacDonald a parlé, à l'étape de la deuxième lecture, de la grammaire et de la signification réelle de la phrase « in all of us command ». À quoi fait référence le mot « command »? Que ce soit « in all of us » ou « in all thy sons », l'ambiguïté demeure. Si nous avions déjà décidé de modifier l'hymne national, pourquoi ne l'avons-nous pas modifié pour le rendre plus clair?

Pendant que j'y suis, l'amendement proposé ne fait rien pour améliorer une autre phrase que j'ai toujours trouvé discutable — selon les termes d'un comité parlementaire pour notre hymne national —, soit « from far and wide, O Canada, we stand on guard for thee ».

Je crois qu'il s'agit d'une tentative de reconnaître et de rendre hommage aux nouveaux arrivants dans ce pays, et Dieu sait à quel point ils méritent notre reconnaissance et notre considération. Sans eux, notre pays ne serait pas aussi grand et prospère qu'il l'est actuellement. Les paroles « From far and wide » rappellent un mouvement, alors que « Stand on guard » renvoie à une position stationnaire. Je ne vois pas comment les deux sont possibles à la fois.

C'est peut-être le genre d'objection à laquelle on peut s'attendre d'une ancienne réviseure. On peut bien quitter la salle de rédaction, mais la salle de rédaction ne nous quitte jamais. Je suggère que le Parlement, s'il décide, dans son infinie sagesse, de réécrire l'hymne national, ait recours aux services du poète officiel du Parlement, maintenant que nous en avons un, plutôt qu'aux services de parlementaires, qui, bien que passionnés et éloquents, ne sont pas des poètes.

Plus sérieusement, il y a la question de savoir si l'hymne national devrait refléter l'ensemble des valeurs que les Canadiens chérissent et tentent de respecter. En théorie, on pourrait affirmer que c'est la chose à faire. Nombre de sénateurs ont affirmé en effet que c'est la chose à faire, qu'il faut reconnaître que le Canada n'est pas uniquement composé de fils, mais également de filles.

Si nous voulons toutefois inclure les femmes, qu'allons-nous faire des autres groupes qui pourraient ne pas être pris en compte ou qui pourraient être offusqués par les paroles de l'hymne national? Par exemple, je m'interroge quant à la décision du comité parlementaire, qui souhaite inclure les paroles « God keep our land glorious and free ». La notion de « Dieu » a été ajoutée par les parlementaires. Ne vous y trompez pas, honorables collègues. Il est question du Dieu des chrétiens et pas celui des autres religions. Il ne fait aucun doute que les paroles renvoient au Dieu des chrétiens. Si quelqu'un en doute, il suffit d'examiner la version française, la version originale de l'hymne, qui fait référence à la croix et à la « valeur, de foi trempée » — la foi chrétienne, sans aucun doute.

Qu'en est-il des gens qui ne sont pas chrétiens? Qu'en est-il des athées ou des polythéistes? Comment se sentent-ils lorsqu'ils sont obligés de chanter « God keep our land glorious and free »?

À mon avis, il est inutile, voire insultant, de se lancer dans ce genre de choses. Dans ce cas, je pense que le comité parlementaire aurait dû laisser le concept de dieu à la conscience et la croyance de chaque citoyen.

La version anglaise de notre hymne national mentionne notre « home and native land ». À mon avis, cela ne fait pas référence aux peuples autochtones du Canada. Je crois plutôt que cela renvoie aux colons européens qui se sont installés au Canada il y a longtemps et dont les descendants sont nés et ont été élevés ici. Si on revient à la version française, on peut voir qu'il est question de la « Terre de nos aïeux », c'est-à-dire de la terre de nos ancêtres.

Lorsque je regarde autour de moi, je vois des sénateurs dont les ancêtres ne sont évidemment pas nés au Canada. Nous sommes très chanceux et heureux de tous les avoir. Pourquoi les excluons-nous de l'hymne national si nous essayons d'en faire une représentation appropriée de nos valeurs?

La réalité, c'est qu'il est très rare que les hymnes nationaux illustrent les valeurs d'aujourd'hui ou ce que ces valeurs pourraient être à un moment donné. Tous les hymnes nationaux ont tendance à être sanguinaires, ethnocentriques, axés sur une seule religion et non inclusifs de manière générale.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples. L'hymne national du Brésil comprend des paroles qui se traduisent comme suit : « Tu ne verras aucun de tes enfants fuir le combat, ni même, celui qui t'adore, craindre la mort. » Soit dit en passant, l'hymne fait aussi mention de la croix.

L'hymne russe parle d'une terre natale protégée par Dieu.

Dans son hymne national, le Pakistan se décrit comme une citadelle de la foi. L'hymne comprend aussi la mention du drapeau du croissant et de l'étoile, des symboles musulmans.

(1610)

L'hymne de l'Italie affirme que les Italiens « sont prêts à mourir ». J'ignore l'origine de cette référence, mais elle se trouve dans le texte depuis très longtemps.

L'hymne national argentin dit : « Nous promettons de mourir dans la gloire. » En Irlande, on chante ce qui suit : « Nous entonnerons un chant, un chant de soldat [...] impatients de livrer la bataille à venir. » En Grèce, on dit : « Sur la tombe de nos morts, votre bravoure prévaudra. »

Comme je l'ai dit à ce sujet il y a quelques années, l'exemple le plus frappant d'un hymne national qui ne reflète pas les valeurs d'aujourd'hui est sans doute La Marseillaise, qui a été écrit à la fin du XVIIIe siècle. Étant donné le contexte de l'époque, les références de l'hymne aux envahisseurs et à la tyrannie sont facilement compréhensibles. Toutefois, compte tenu des valeurs d'aujourd'hui, la plupart d'entre nous trouveront inacceptable de souhaiter que du sang impur abreuve les sillons de la France.

En fait, la valeur de ces hymnes nationaux ne repose pas sur les mots qu'ils utilisent. Ils sont plutôt portés par les générations de citoyens qui les ont entonnés dans ces pays.

On chante La Marseillaise depuis plus de 200 ans, et cet hymne a résonné durant les périodes de guerre. Si je ne me trompe pas, les Français n'étaient pas autorisés à le chanter pendant l'occupation nazie. Le simple fait de le chanter constituait un acte d'héroïsme et de loyauté ainsi qu'une affirmation de liberté. Voilà ce qui fait de La Marseillaise un symbole sacré, et non ses quelques mots sur le sang impur. La situation est la même pour les hymnes nationaux de partout dans le monde. Chers collègues, la même chose s'applique, selon moi, à celui du Canada.

Il y a eu des périodes dans l'histoire du pays où l'on ne tenait pas le patriotisme canadien pour acquis. Des périodes où se lever et dire : « Je crois en ce pays » exigeait un certain courage. Des périodes où chanter l'hymne national était une manifestation de ces croyances, de cette loyauté et de ce patriotisme. C'était le fait même de chanter, et non les mots, qui importait, et c'est toujours le cas.

Si nous laissons l'idée d'être correctement modernes en tout temps nous obnubiler, nous perdrons une partie de notre patrimoine. Notre patrimoine n'est peut-être pas parfait — et ce n'est pas ce que je prétends —, mais il est le nôtre. Je crois qu'il mérite qu'on le respecte et que nous l'acceptions pour ce qu'il est : il est imparfait, mais il est le nôtre.

Par conséquent, je n'appuie pas le projet de loi, même si j'ai le plus grand respect possible pour ceux et celles qui l'appuient ainsi que pour les intentions qui le sous-tendent.

(Sur la motion du sénateur Carignan, au nom du sénateur Wells, le débat est ajourné.)

Le Budget des dépenses de 2017-2018

Le Budget principal des dépenses—Dépôt du quatorzième rapport du Comité des finances nationales

Consentement ayant été accordé de revenir à la présentation ou au dépôt de rapports de comités :

L'honorable Larry W. Smith : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le quatorzième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales, son premier rapport provisoire sur les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2018.

(Sur la motion du sénateur Smith, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi relatif à une stratégie nationale sur la maladie d'Alzheimer et d'autres démences

Deuxième lecture

L'honorable Carolyn Stewart Olsen propose que le projet de loi C-233, Loi concernant une stratégie nationale sur la maladie d'Alzheimer et d'autres démences, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-233, Loi concernant une stratégie nationale sur la maladie d'Alzheimer et d'autres démences.

En ce qui a trait à sa forme et à sa fonction, le projet de loi est d'une grande simplicité. Il nous demande d'adopter une mesure législative qui encouragerait le gouvernement à élaborer une approche coordonnée à une maladie qui ravage notre population d'aînés.

Le projet de loi C-233 émane de la Chambre des communes, où il a été présenté par mon collègue, le député conservateur Rob Nicholson, et a reçu l'appui du Parti libéral et du NPD.

D'habitude, je suis prudente lorsqu'il s'agit de recommander des stratégies nationales, mais ce projet de loi est très précis dans ce qu'il demande au gouvernement de faire. Il stipule que la stratégie nationale doit se concentrer sur l'aide offerte aux provinces pour concevoir de meilleurs plans de traitement et avancer les pratiques exemplaires existantes dans l'ensemble du pays. Il prévoit aussi des investissements dans la recherche contre la maladie d'Alzheimer et la coordination avec des organismes internationaux.

La stratégie nationale doit être conçue par un conseil consultatif composé de 15 membres, dont des spécialistes du domaine ayant la tâche de renseigner le ministre de la Santé sur toute question liée à la démence. Le gouvernement demeure responsable de la stratégie nationale proposée, car le ministre est tenu de préparer un rapport annuel portant sur l'efficacité de la stratégie et sur les mesures prises par le gouvernement qui sera présenté au Parlement.

Durant la législature précédente, un député du NPD a présenté un autre projet de loi, très semblable à celui-ci; certains demandent pourquoi on adopterait ce projet de loi, et non l'autre.

Malgré l'entente de principe au sujet du projet de loi précédent, le projet de loi C-356 comportait une erreur de rédaction qui en a fait ce qu'on appelle un projet de loi de finances. Il lui aurait donc fallu l'appui du gouvernement sous la forme d'une recommandation royale. Le projet de loi C-233, le projet de loi que nous étudions, ne comporte pas de considération monétaire et, de toute façon, la ministre Philpott a signalé son appui au projet de loi.

Le projet de loi dont nous sommes saisis arrive à point nommé; il coïncide avec une étude approfondie sur la démence au Canada, effectuée par le Comité sénatorial des affaires sociales. Il donne suite à une recommandation directe du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir. Dans le cadre de l'étude, nous avons rencontré des intervenants de partout au pays. Ils avaient une chose en commun : leur grand désir de voir se réaliser une stratégie nationale sur la démence.

Le cadre que le projet de loi C-233 propose pour la stratégie répond à l'appel de notre comité en faveur d'un investissement adéquat de la part du gouvernement fédéral et d'une intervention appropriée de la part des gouvernements provinciaux. À mesure que la population canadienne vieillira, ou plutôt que son espérance de vie augmentera, la démence deviendra une maladie de plus en plus répandue.

Comme la plupart des nations avancées, le Canada a connu une hausse incroyable de l'espérance de vie. Cela signifie qu'il y aura de plus en plus d'aînés octogénaires, nonagénaires et même centenaires qui vivront parmi nous. Avec l'âge, la prévalence de la démence augmente. Cependant, même si l'âge est la cause principale de la démence, il ne faudrait pas penser qu'il s'agit d'une conséquence normale du vieillissement.

(1620)

Une personne dans la quarantaine ou dans la cinquantaine — soit les années les plus productives de celle-ci — peut développer cette maladie. En 2008, il y avait environ 50 000 Canadiens âgés de 50 ans et moins atteints de démence. En 2011, il y avait un total de 750 000 Canadiens atteints de démence. D'ici 2031, on prévoit que ce nombre augmentera à 1,4 million. Il s'agit là d'estimations très conservatrices.

N'importe qui peut être atteint de cette maladie, et probablement que tous les sénateurs connaissent un ami ou un proche atteint de démence.

La situation n'est pas aussi sombre qu'il y paraît. Il y a encore des raisons d'être optimiste. Même s'il n'existe ni remède ni aucune façon de prévenir assurément la démence, comme avec les autres maladies, on croit qu'un mode de vie sain contribue grandement à réduire le risque.

Les personnes de tous âges atteintes de démence peuvent vivre pleinement leur vie de manière autonome pendant longtemps avec la bonne combinaison de ressources et de soutien. Cependant, les personnes atteintes de la maladie finissent ultimement par vivre ailleurs qu'à la maison. Il faut d'énormes ressources pour subvenir à leurs besoins.

Le fardeau économique est très lourd et il continuera de s'alourdir. Actuellement, la démence coûte 33 milliards de dollars par année à l'économie du pays, et, d'ici 2040, ce sera plus de 293 milliards de dollars. On prévoit que les coûts médicaux directs payés par les contribuables doubleront, passant de 8,3 milliards de dollars en 2011 à 16,6 milliards de dollars en 2031.

Notre système de santé est dépassé, dans certains secteurs, par la portée de ce problème. Beaucoup de patients n'ont pas accès aux renseignements dont ils ont besoin afin de connaître les ressources dont ils disposent. Par conséquent, nombre d'entre eux se retrouvent à l'urgence et mobilisent un lit d'hôpital qui serait utile ailleurs. Les établissements de soins manquent de personnel et les employés qui travaillent sont souvent sous-payés et épuisés par la surcharge de travail. Les proches deviennent débordés par le fait de devoir donner des soins 24 heures sur 24 en recevant une aide irrégulière.

Le Canada n'est pas resté les bras croisés à cet égard. En 2014, le gouvernement a mis en œuvre un plan national de recherche et de prévention concernant la démence. Ce plan prévoyait notamment un investissement de 183 millions de dollars en recherche concernant la démence. Des organisations privées ont aussi élaboré des stratégies de soutien comme les cafés de la mémoire. Le Nouveau-Brunswick compte huit cafés de la mémoire. Ces endroits offrent aux gens un environnement sûr où ils peuvent se réunir et se soutenir sans être jugés.

Diverses provinces ont élaboré des stratégies de soins à domicile afin de faciliter l'accès au traitement pour les personnes souffrant de démence dans le confort de leur foyer. Au Nouveau-Brunswick, la stratégie D'abord chez soi tente d'éliminer les obstacles internes et offre une gamme d'options d'aide aux personnes âgées dans le but de réduire le temps passé à l'hôpital.

Les bonnes initiatives sont nombreuses, mais, en fin de compte, en raison de la nature du système de santé, les centres d'excellence et les pratiques exemplaires se retrouvent isolés dans différents ministères ou différentes provinces sans aucun vase communicant entre eux.

Le Canada est l'une des dernières économies industrielles avancées à ne pas avoir de stratégie nationale pour lutter contre la démence. Le projet de loi C-233 contribuera grandement à régler ce problème en forçant tous les intervenants à se parler et à s'échanger leurs pratiques. Il encouragera également le gouvernement à coordonner la recherche et à obtenir la participation des organisations internationales.

La démence, mesdames et messieurs les sénateurs, est un problème qui touche tous les Canadiens, et, en adoptant ce projet de loi, nous nous assurerons que notre pays se dote d'une stratégie de classe mondiale pour lutter contre la démence, stratégie dont nous pourrons tous être fiers.

Je vous exhorte à appuyer ce projet de loi, qui nous aidera à adopter une approche nationale de gestion et de traitement de la démence.

L'honorable Frances Lankin : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Stewart Olsen : Bien entendu.

La sénatrice Lankin : Je vous remercie beaucoup. Je vous sais gré de vos observations. Je sais que ce projet de loi sera soumis au vote aujourd'hui, puis renvoyé à un comité, alors je me contenterai de vous poser une question et je réserverai mes observations pour le débat à l'étape de la troisième lecture.

J'adhère à l'esprit du projet de loi et à nombre de vos observations. Vous avez insisté sur l'aide fédérale aux provinces, et j'imagine que vous l'avez fait pour donner au Sénat l'assurance que nous ne devrions pas nous faire de souci en ce qui a trait aux questions comme la séparation des pouvoirs et les empiétements sur les champs de compétence. Je présume que cette assurance nous sera donnée de nouveau lors de l'étude du projet de loi par le comité.

C'est un peu ce qui me vient à l'esprit, compte tenu de mon expérience sur la scène provinciale. Pourriez-vous nous dire un mot à ce sujet, je vous prie?

La sénatrice Stewart Olsen : Merci, madame la sénatrice. Effectivement, c'est ainsi que je vois le projet de loi.

Au Canada, ce sont les provinces qui gèrent leur système de santé, et je ne pense pas que nous souhaitions nous immiscer là-dedans. Nous voulons plutôt aider les provinces, qui sont aux prises avec ce problème actuellement, qu'on le veuille ou non. Elles peinent à trouver de l'information et à choisir la meilleure orientation à prendre. Je pense que ce projet de loi respecte les champs de compétence. Il ne prescrit aucune obligation, mais crée plutôt un mécanisme destiné à éclairer les provinces en leur proposant des pratiques exemplaires ayant cours dans une province ou en Europe. Nous devons cesser de fonctionner en vases clos, et ce projet de loi nous permettrait justement d'abandonner cette mauvaise habitude dans un dossier précis.

Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Stewart Olsen, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

Projet de loi relatif à la stratégie nationale sur l'élimination sûre et écologique des lampes contenant du mercure

Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Cordy, appuyée par l'honorable sénateur Dawson, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-238, Loi concernant l'élaboration d'une stratégie nationale sur l'élimination sûre et écologique des lampes contenant du mercure.

L'honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, je suis ravi de prendre la parole aujourd'hui à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-238, Loi concernant l'élaboration d'une stratégie nationale sur l'élimination sûre et écologique des lampes contenant du mercure, qui porte sur une importante question qui a des effets sur notre environnement, ainsi que sur la santé et la sécurité de tous les Canadiens. Qui a dit qu'il ne serait pas intéressant d'être à Ottawa cette semaine?

Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui a reçu un appui généralisé à l'autre endroit, dont l'appui du Parti libéral, du Parti conservateur, du NPD et du Parti vert.

Je tiens à préciser que même si je m'adresse à vous aujourd'hui en tant que porte-parole de l'opposition au sujet de ce projet de loi, je l'appuie sans réserve. Je pense qu'il s'agit d'une mesure législative importante qui traite d'une question tout aussi importante.

Le projet de loi a pour but de créer une stratégie nationale sur l'élimination sûre des lampes contenant du mercure, qui sera élaborée par la ministre de l'Environnement, en collaboration avec des représentants des gouvernements provinciaux et territoriaux et d'autres gouvernements et organismes intéressés.

La stratégie prévoirait l'identification de pratiques d'élimination sûre et écologique des lampes fluorescentes, l'établissement de lignes directrices pour les installations où sont éliminées ces lampes et l'élaboration d'un plan visant à sensibiliser le public à cette question.

Le ministre serait tenu de déposer un rapport à la Chambre des communes et au Sénat dans les deux années suivant la sanction royale, puis de mener un examen sur l'efficacité de la stratégie tous les cinq ans.

Les lampes fluorescentes sont des sources d'éclairage que l'on trouve très couramment dans les lieux résidentiels, commerciaux et industriels du pays. Ces lampes, que l'on peut aussi appeler des ampoules, se présentent sous différentes formes. La plupart du temps, il s'agit de tubes linéaires fluorescents, souvent utilisés dans les espaces commerciaux et les bureaux, ainsi que de petites ampoules fluorescentes en forme de spirale, aussi appelées lampes fluorescentes compactes, que l'on trouve couramment dans les maisons.

L'utilisation croissante des ampoules fluorescentes est attribuable au fait qu'elles sont beaucoup plus éconergétiques que les ampoules à incandescence traditionnelles et qu'elles durent plus longtemps. Elles peuvent par exemple durer une dizaine d'années en ne consommant qu'une fraction de l'énergie requise pour faire fonctionner une ampoule incandescente.

(1630)

Cela dit, l'efficacité des ampoules fluorescentes compactes est attribuable à leur composition chimique : elles utilisent en effet du mercure élémentaire pour produire de la lumière ultraviolette. Considéré comme une substance toxique par la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, le mercure est une dangereuse neurotoxine qui peuvent avoir des effets néfastes autant sur l'environnement que la santé humaine. Même si les ampoules fluorescentes n'en contiennent qu'une petite quantité, leur accumulation dans les sites d'enfouissement canadiens a de quoi inquiéter sérieusement l'ensemble des Canadiens.

Il est impossible de remplacer le mercure par autre chose dans les ampoules fluorescentes, les propriétés uniques du premier le rendant essentiel au fonctionnement des deuxièmes.

Bien que la gravité des symptômes varie selon un certain nombre de facteurs, l'exposition importante au mercure peut causer une dégradation des muscles, une perte de la coordination, de la vue et de l'ouïe, des tremblements et des engourdissements, voire la mort. Les femmes enceintes et les fœtus sont considérés comme particulièrement vulnérables.

Je tiens à rappeler que ces ampoules ne dégagent aucun mercure pendant leur utilisation : le mercure étant bien enfermé à l'intérieur, il ne présente aucun danger tant que l'ampoule demeure intacte. C'est à l'élimination des ampoules fluorescentes que le projet de loi veut s'attaquer, une fois qu'elles ont atteint la fin de leur vie utile. Malheureusement, une bonne partie d'entre elles finissent aux ordures, donc dans les décharges municipales, où elles se cassent et relâchent le mercure qu'elles contiennent dans l'air et dans l'eau.

Le mercure ainsi relâché se retrouve alors dans les différents plans d'eau du pays, où il se transforme en méthylmercure et s'immisce dans la chaîne alimentaire en raison de sa bioaccumulation dans les populations de poisson.

Nous avons hélas eu un exemple de ce qui arrive quand des gens sont empoisonnés au mercure ici même au Canada, à Grassy Narrows, dans le Nord de l'Ontario. Les déchets industriels qui ont été rejetés dans la rivière pendant les années 1960 et 1970 ont eu un effet dévastateur sur la santé des Premières Nations des environs. Selon les plus récents rapports, même si des dizaines d'années se sont écoulées depuis, la zone demeure contaminée et une grande partie de la population présente encore des symptômes d'empoisonnement au mercure.

L'empoisonnement survenu à Minamata, une ville japonaise, est peut-être le plus grave de tous. Dans un scénario semblable à celui de Grassy Narrows, des poissons et fruits de mer locaux ont été contaminés par les déchets industriels provenant d'une usine de la région. Ce grave empoisonnement au mercure a causé un syndrome neurologique aux effets dévastateurs, mortels dans bien des cas, qu'on appelle depuis la « maladie de Minamata ».

La tragédie de Minamata et la situation de Grassy Narrows nous rappellent constamment qu'il faut assurer une réglementation et une supervision adéquates des rejets de mercure provenant d'activités humaines.

Rappelons que le gouvernement précédent a signé, en 2013, la Convention de Minamata sur le mercure, un accord mondial visant à protéger la santé humaine et l'environnement contre les effets négatifs de cette substance.

Revenons maintenant aux lampes fluorescentes, chers collègues. Certains se demandent peut-être pourquoi elles ne sont pas simplement interdites au Canada. Il faut savoir que l'utilisation de lampes fluorescentes peut contribuer à la réduction des émissions de mercure. En effet, comme elles ont un bon rendement énergétique, elles permettent de réduire la consommation d'électricité dans les régions alimentées par des centrales au charbon. La combustion du charbon, encore utilisé notamment dans ma province, la Nouvelle-Écosse, rejette du mercure dans l'environnement. Voilà pourquoi l'emploi de produits comme les ampoules fluocompactes permet de réduire les émissions de mercure et a un effet bénéfique sur l'environnement, particulièrement si elles sont ensuite récupérées ou recyclées correctement.

Chers collègues, nous devons voir à ce qu'il y ait, partout au pays, des programmes permettant d'éviter que ces ampoules se retrouvent au dépotoir. L'élaboration d'une stratégie nationale donnerait au gouvernement l'occasion de collaborer avec les administrations provinciales, municipales et autochtones afin d'élargir l'accès aux centres d'élimination. Bien que la plupart des centres urbains disposent maintenant d'options pour l'élimination des déchets dangereux ou de programmes de récupération gérés par des commerces, ces services sont loin de s'étendre à l'ensemble du pays et demeurent particulièrement rares en région rurale.

De plus, de nombreux Canadiens ne savent peut-être pas que les ampoules fluorescentes contiennent du mercure et qu'on nuit à l'environnement lorsqu'on les jette à la poubelle. Plusieurs d'entre eux ne savent peut-être pas ce qu'il faut faire ni où aller pour s'en débarrasser. En fait, selon un rapport de Statistique Canada, la moitié des foyers sondés se débarrassait des ampoules fluorescentes compactes par une méthode « non contrôlée ». Autrement dit, ces ampoules se retrouvent dans les dépotoirs.

Je suis convaincu que la sensibilisation de la population fera beaucoup pour que ces ampoules soient éliminées de façon sûre.

Plus la population sera sensibilisée, plus il faudra d'installations permettant de recycler ces produits de façon sûre. Moi qui habite à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, je m'en voudrais de ne pas parler des installations novatrices de Dan-X Recycling. La sénatrice Cordy, qui parraine le projet de loi au Sénat et qui habite aussi à Dartmouth, a déjà parlé des méthodes novatrices qu'utilisent ces installations pour recycler toutes les composantes des ampoules fluorescentes contenant du mercure et éviter ainsi que la toxine finisse par contaminer l'environnement.

Je rappelle aussi que le parrain du projet de loi à l'autre endroit est Darren Fisher, ancien membre du Conseil régional d'Halifax et député actuel de Dartmouth—Cole Harbour. Cette initiative est donc complètement « dartmouthoise ».

Honorables sénateurs, après avoir rappelé les conséquences graves que pourrait avoir l'élimination non contrôlée de mercure sur l'environnement et notre santé, il m'apparaît évident que l'adoption d'une stratégie nationale sur l'élimination sûre des ampoules fluorescentes est nécessaire.

La question qui nous occupe relève de plusieurs domaines de compétences. C'est la raison pour laquelle il faut que cette stratégie résulte d'une collaboration entre le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux, les administrations municipales et les autres organismes et gouvernements intéressés.

Le mercure ne connaît pas de frontière, chers collègues. Les produits qui contaminent l'air et l'eau nous touchent tous. Il est temps d'avoir une stratégie nationale, dont le gouvernement fédéral devrait être le fer de lance.

J'encourage mes collègues à appuyer le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. Merci.

[Français]

L'honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Sénateur MacDonald, accepteriez-vous de répondre à une question? Je présume que vous avez déjà discuté de la question du consentement royal, à savoir si le projet de loi doit être approuvé par un ministre. J'imagine que la réponse est non. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi un tel projet de loi pourrait être porté par un député plutôt que par un ministre?

[Traduction]

Le sénateur MacDonald : Je ne sais pas pourquoi le projet de loi a été présenté par un député plutôt que par un ministre, mais je vais me renseigner à ce sujet.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Hubley, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.)

Modernisation du Sénat

Dixième rapport du comité spécial—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénatrice Cordy, tendant à l'adoption du dixième rapport (intérimaire) du Comité spécial sénatorial sur la modernisation du Sénat, intitulé La modernisation du Sénat : Aller de l'avant (Nature), présenté au Sénat le 26 octobre 2016.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je vais poursuivre l'intervention que j'avais commencée il y a quelque temps. Étant donné que j'avais demandé que le débat soit ajourné à mon nom et que, conformément au Règlement du Sénat, on ne peut pas le demander deux fois, je me vois aujourd'hui dans l'obligation de terminer mon intervention.

Je rappelle aux honorables sénateurs que le dixième rapport traite de la recommandation du Comité spécial sur la modernisation pour que le Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement revoie le Règlement du Sénat, le Règlement administratif et les usages du Sénat pour faire en sorte qu'ils reflètent de façon plus fidèle le rôle constitutionnel du Sénat et le devoir constitutionnel de chaque sénateur. Cependant, bien sûr, pour examiner le Règlement, il faut disposer de certains objectifs si on veut pouvoir en arriver à une conclusion après avoir analysé les diverses règles et procédures qui nous régissent, comme le Règlement, le Règlement administratif et les pratiques du Sénat. Donc, la première question est la suivante : quel est le rôle du Sénat? Quel est le rôle d'un sénateur?

(1640)

Honorables sénateurs, contrairement à l'autre endroit, nous avons pu bénéficier de la sagesse de la Cour suprême du Canada à deux reprises au cours des 30 dernières années. La première fois, ce fut à la suite d'un renvoi du Sénat pendant les années 1980. J'avais d'ailleurs oublié que, à l'époque, j'avais participé, à l'autre endroit, à la discussion qui avait mené à ce renvoi. Le gouvernement de l'époque avait présenté le projet de loi C-60, qui visait une refonte complète de l'institution. Des provinces et certains constitutionnalistes s'y étaient opposés, arguant que, pour ce faire, le Parlement du Canada devait obtenir l'appui des provinces.

Il y a eu un débat très animé au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles en 1979, et le gouvernement de l'époque a décidé de renvoyer le dossier devant la Cour suprême du Canada. La Cour suprême a donc rendu un premier jugement en 1980.

Qu'est-ce que la Cour suprême avait à dire au sujet de la relation entre le Sénat et les Communes en 1980? Car c'était bien là le cœur de la question : quel est le rôle du Sénat par rapport à celui de la Chambre des communes, étant donné que ces deux Chambres composent le Parlement? En fait, c'est assez clair si on lit l'article 17 de la Constitution :

Il y aura, pour le Canada, un parlement qui sera composé de la Reine, d'une Chambre haute appelée le Sénat, et de la Chambre des Communes.

Le Sénat est donc tout autant une partie intégrante du Parlement que la Chambre des communes.

En fait, à l'article 95, ou plutôt 91 de la Constitution qui invoque l'autorité législative du Parlement du Canada, on peut lire ceci :

Il sera loisible à la Reine, de l'avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes [...]

Autrement dit, l'avis et le consentement du Sénat sont tout aussi valables que ceux de la Chambre des communes. Il est tout aussi nécessaire de les obtenir pour faire adopter un projet de loi. Le Sénat est une assemblée législative, faisant partie d'un Parlement bicaméral, qui joue le même rôle et possède les mêmes pouvoirs que la Chambre des communes en ce qui a trait aux mesures législatives.

Y a-t-il d'autres caractéristiques qui distinguent les deux Chambres? Oui, si je me fie de nouveau à la décision rendue en 1980 par la Cour suprême du Canada. Quelle est la distinction essentielle entre le Sénat et l'autre endroit? La réponse est très simple. Nous sommes la Chambre du Parlement qui incarne le principe fédéral.

Vous vous rappellerez que les Pères — ou, pour utiliser une expression plus féministe, « les artisans » — de la Confédération avaient eu initialement de la difficulté à déterminer comment concilier les intérêts d'une majorité élue qui, en 1867, se trouvait en Ontario, avec ceux des plus petites régions, à savoir le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, et ceux du Québec, que distinguait la langue et la religion . Comment tenir compte des intérêts de la population majoritairement protestante de l'Ontario, tout en prenant en considération les caractéristiques linguistiques uniques du Québec et, bien sûr, de la situation économique distincte des deux provinces maritimes?

Je tiens à préciser, en passant, que l'Île-du-Prince-Édouard avait initialement refusé d'entrer dans la Confédération. Contrairement aux quatre autres provinces, elle ne figurait pas sur le drapeau original. Elle ne figurait pas non plus sur la médaille originale de 1867.

Je sais qu'un projet de loi sur le berceau de la Confédération est à l'étude, mais je ferai respectueusement remarquer que l'Île-du-Prince-Édouard ne faisait pas partie des artisans d'origine qui ont mené à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867. Nous pouvons bien réfléchir au rôle de l'Île-du-Prince-Édouard, mais, ce faisant, nous devrons veiller à citer correctement l'histoire. Je dis cela avec le plus grand respect pour la sénatrice Hubley, notre collègue le sénateur Downe et la nouvelle sénatrice de l'Île-du-Prince-Édouard. Je n'étais pas à la Chambre lorsque ce projet de loi a été débattu. J'étais occupé à l'extérieur. Cela dit, une autre occasion se présentera ultérieurement. Je ferme la parenthèse.

Autrement dit, lorsque les artisans de la Confédération, à l'origine, ont été appelés à de débattre de l'idée de créer un pays uni avec une majorité élue, des provinces au poids économique et financier différent, et des provinces aux caractéristiques linguistiques et religieuses différentes, ils ont conclu que la seule solution était d'avoir une assemblée sénatoriale divisée proportionnellement entre les trois régions, reconnaissant qu'elle compterait un représentant des minorités protestantes au Québec, et que les sièges y seraient précisément attribués pour maintenir le droit de ces minorités de prospérer selon leur identité. Ils ont conclu que la seule manière d'avoir une Chambre du Parlement représentant les régions et les minorités linguistiques et religieuses de l'époque était de créer le Sénat tel que nous le connaissons.

Le Sénat est très différent de l'autre endroit, non seulement parce que les sénateurs ne sont pas élus alors que les députés le sont, mais aussi parce que nous sommes nommés, et nous sommes nommés différemment. Nous sommes nommés par l'entremise d'une commission royale. Autrement dit, nous ne relevons pas d'un mandat démocratique. Notre nomination découle de la prérogative de la souveraine, qui à l'époque était la reine Victoria, représentée par le gouverneur général du Canada. La nomination est faite sur la recommandation du premier ministre. Toutefois, si le Sénat est une Chambre structurée différemment qui détient les mêmes pouvoirs législatifs que les Communes, comment pouvons-nous concilier l'utilisation de ce pouvoir et la volonté démocratique de l'autre endroit? Autrement dit, comment pouvons-nous utiliser nos pouvoirs?

Il s'agit en fait de se demander quels sont ces pouvoirs. Eh bien, c'est simple : nous avons le pouvoir de donner notre avis et notre consentement. Nous pouvons donc dire « oui », ce qui revient à approuver, ou dire « non » pour exprimer notre désapprobation. Ultimement, dire « non » constitue un veto et peut entraîner la mort d'un projet de loi. C'est arrivé à quelques occasions. Je vais dire plus tard à combien de reprises cela s'est produit et pour quels motifs.

Le pouvoir d'approuver ou de rejeter implique le pouvoir de négocier. En effet, avant de rejeter un projet de loi, nous pouvons faire changer les choses en demandant qu'il soit amendé, ou qu'un ministre s'engage à le modifier ou à présenter une politique qui répondrait aux réserves que nous avons.

Le pouvoir de dire « non » a pour corollaire le pouvoir de négocier, comme nous l'avons constaté au cours des six derniers mois. Nous avons exercé notre pouvoir d'approbation par rapport à quelques projets de loi. Je vois la sénatrice Marshall de l'opposition opiner du bonnet. Lorsque l'opposition était en majorité dans cette enceinte, elle aurait pu dire « non » à certains projets de loi budgétaires, mais elle a dit « oui ». Il s'agissait d'une décision politique motivée par des raisons précises.

Nous avons donc le pouvoir de rejeter un projet de loi. Ainsi, à propos d'un projet de loi contenant des dispositions relatives à la protection des consommateurs, nous avons fait savoir que nous dirions « non ». Le pouvoir de négocier a pu être exercé. Si vous n'avez pas le pouvoir de dire « non », vous n'avez pas le pouvoir de négocier ou d'améliorer le projet de loi. À tous ceux qui affirment que nous devons toujours céder à la volonté de la majorité élue, j'aimerais dire que cela signifie que nous perdrons ainsi notre pouvoir de négociation.

(1650)

Nous avons aussi le pouvoir de reporter à plus tard, qui constitue un pouvoir très efficace. En fait, au cours de la législature précédente, nombre de mes collègues se rappelleront le projet de loi sur les paris sportifs. Je vois certains sénateurs hocher la tête. Qu'avons-nous fait de ce projet de loi? Nous n'avons pas dit « oui » à l'étape de la troisième lecture. Nous n'avons pas dit « non » à l'étape de la troisième lecture. Nous n'avons débattu d'aucun amendement à quelque étape que ce soit. Nous n'avons simplement rien fait, et le projet de loi a échoué. Nous ne l'avons pas rejeté; nous n'avons fait que le reporter. Lorsque l'ordre du jour a appelé la question, les deux côtés ont répondu « non » — je regarde mon collègue, le sénateur Mockler — et il n'y avait personne d'un côté ou de l'autre qui voulait débattre du projet de loi. Le projet de loi est demeuré au Feuilleton, et, à la fin de la session, le projet de loi a échoué.

Honorables sénateurs, le pouvoir de reporter est très efficace. Avant d'envisager de redéfinir les pouvoirs du Sénat, nous devons réfléchir à la façon dont les pouvoirs du Sénat peuvent être exercés afin de protéger les intérêts régionaux qui sont expressément visés par notre mandat, c'est-à-dire protéger les minorités linguistiques et les autres minorités.

La Cour suprême, dans sa décision rendue en 2014, a dit très clairement que, au cours des années, le mandat du Sénat pour ce qui est de protéger les minorités ethniques, les minorités linguistiques, les Autochtones, les minorités raciales, les minorités sexuelles et toutes les autres minorités s'était élargi. La cour, dans sa grande sagesse, a reconnu que, dans le cadre de notre mandat actuel, il est de notre devoir constitutionnel de parler au nom de ces minorités. Pourquoi ce mandat précis nous a-t-il été confié? C'est parce que, à l'autre endroit, la majorité l'emporte, un point, c'est tout. Vous connaissez ce genre de jeux. Lorsque vous avez le plus de cartes, vous remportez tout. Vous ne gagnez pas en fonction du nombre d'as ou de rois que vous tenez dans vos mains, mais en fonction du nombre de cartes.

Puis-je avoir deux minutes de plus, honorables sénateurs?

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Joyal : Autrement dit, honorables sénateurs, je vous invite à réfléchir à cela dans le cadre de notre processus de modernisation. Nous nous efforçons de faire en sorte que le Sénat puisse exercer son jugement de manière plus indépendante. Cependant, nous ne devrions pas oublier que, en essayant d'amener le Sénat à plus d'indépendance dans ses délibérations, nous remettons aussi nos pouvoirs en question. J'ai entendu certaines personnes dire que le Sénat sera plus indépendant, mais que, évidemment, il n'exercera pas ses pouvoirs et ne s'opposera pas à la volonté de la majorité élue à l'autre endroit. Or, si nous sommes prêts à accepter cela, c'est que nous renonçons à notre devoir, exigé par la Constitution, de défendre les intérêts des régions et des minorités que nous avons été chargés de représenter dans cette enceinte. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas parvenir à une entente après avoir négocié et obtenu ce qui nous semble être un compromis acceptable, comme nous allons le faire à l'égard des amendements au projet de loi C-6 que le sénateur Eggleton et la sénatrice McCoy ont présentés dans cette enceinte au sujet du processus d'appel lié à la révocation de la citoyenneté. Cependant, c'est parce que nous pouvons dire « non » que nous sommes en mesure de négocier et d'obtenir un compromis acceptable afin d'améliorer la loi. Or, si nous renonçons à notre droit de veto, à notre capacité de dire « non », nous n'aurons plus de véritable pouvoir de négociation. Je vous invite donc à y réfléchir à deux fois avant de croire que, parce que nous serons plus indépendants, nous allons renoncer à notre pouvoir d'imposer notre veto ou de rejeter un projet de loi.

Honorables sénateurs, j'aimerais vous donner un dernier exemple. Je sais que nous n'avons plus beaucoup de temps, comme me l'indique la sénatrice Andreychuk.

J'espère que vous avez vu pendant la fin de semaine que le ministre de la Santé du Québec a décidé de faire un renvoi à la Cour d'appel du Québec concernant l'aide médicale à mourir. Il n'y a pas si longtemps, nous débattions d'un amendement au Sénat qui visait à demander au gouvernement de renvoyer la question à la Cour suprême. Bien évidemment, il y aura maintenant une approche en deux étapes. Une décision sera rendue par la Cour d'appel du Québec concernant l'interprétation du concept de mort raisonnablement prévisible, puis bien entendu le parti qui ne sera pas d'accord avec la décision fera appel ailleurs. Si nous avions insisté sur le fait de renvoyer cette disposition du projet de loi à la Cour suprême du Canada dans nos amendements, nous aurions pu obtenir des résultats qui auraient, en fin de compte, profité aux Canadiens.

À titre d'exemple, selon moi, quand nous prenons position au Sénat sur une question comme celle-ci, qui touche aux droits de minorités et aux droits de personnes adultes qui ont des problèmes de santé graves et irrémédiables, qui souffrent beaucoup et qui sont capables de donner leur consentement, je crois qu'il est possible de dire que ces personnes ont droit à l'aide médicale à mourir. Ensemble, nous avons décidé de remettre à plus tard la décision. Comme je vous l'ai dit, nous avons la possibilité de négocier. Ainsi, j'invite le Sénat à examiner l'article 16-3 du Règlement du Sénat, afin de mieux définir le contexte dans lequel nous devons négocier pour trouver des solutions en cas d'impasse avec la Chambre des communes et exercer notre plein pouvoir afin d'avoir de meilleures lois.

Honorables sénateurs, je recommande que le dixième rapport soit adopté, avec un amendement mineur.

Motion d'amendement

L'honorable Serge Joyal : Ainsi, honorables sénateurs, je propose :

Que le rapport soit modifié :

1. par substitution des mots « donne instruction au » par les mots « invite le »;

2. par substitution des mots « et au Comité » par les mots « et le Comité »;

3. par substitution des mots « de revoir » par les mots « à revoir ».

Cet amendement vise à remplacer le libellé qui affirme que le Sénat « donne instruction » au Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement par un libellé qui « invite » le Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, afin d'assurer la conformité du rapport avec l'autre recommandation. On invite le comité au lieu de lui donner instruction. Il s'agit d'un changement simple et conforme aux façons de faire — les comités invitent d'autres comités à étudier des questions.

Cela dit, honorables sénateurs, je demande votre consentement pour amender le texte du dixième rapport. Merci, honorables sénateurs.

Son Honneur le Président : Sénateur Joyal, proposez-vous un amendement?

Le sénateur Joyal : J'ai proposé l'adoption du dixième rapport, alors je modifierais ma propre proposition. Il faudrait que je demande le consentement du Sénat pour procéder ainsi.

Je ne veux pas sonder la volonté du Sénat à votre place, mais je vois un consensus parmi les honorables sénateurs.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion d'amendement est adoptée.)

(Sur la motion du sénateur Carignan, le débat est ajourné.)

L'étude sur des questions liées aux relations étrangères et au commerce international en général

Septième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international et demande de réponse du gouvernement—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du septième rapport (intérimaire) du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, intitulé Les accords de libre-échange : Un levier de prospérité économique, déposé auprès du greffier du Sénat le 7 février 2017.

L'honorable A. Raynell Andreychuk propose :

Que le septième rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, intitulé Les accords de libre-échange : un levier de prospérité économique, qui a été déposé auprès du greffier du Sénat le mardi 7 février 2017, soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre du Commerce international étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport, en consultation avec la ministre des Affaires étrangères.

— Honorables sénateurs, je tiens à souligner, au nom du comité, certains des éléments importants que nous avons soulevés dans le septième rapport sur les accords de libre-échange, puisque je crois qu'ils seront utiles et instructifs en ce qui concerne l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et l'Accord de libre-échange Canada-Ukraine.

(1700)

Le premier accord commercial du Canada, l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, est entré en vigueur en 1989. À l'heure actuelle, le Canada a 11 accords de libre-échange en vigueur, qui donnent un accès privilégié aux marchés de 15 pays.

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international entreprendra bientôt l'étude de projets de loi pour la mise en œuvre de deux accords de libre-échange supplémentaires que le Canada a signés récemment : l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et l'Accord de libre-échange Canada-Ukraine. De plus, le Canada négocie actuellement ou envisage la possibilité d'entreprendre des négociations avec un certain nombre d'autres pays, notamment avec d'importantes économies de la région Asie-Pacifique.

Les accords de libre-échange sont devenus un élément essentiel de la politique commerciale du Canada. Cependant, les négociations récentes ont relancé les débats dans l'ensemble du pays au sujet des avantages et des inconvénients des accords commerciaux pour le Canada. C'est dans ce contexte que le comité a entrepris une vaste étude des accords de libre-échange au cours de laquelle des témoins ont parlé des avantages et des défis qui découlent de divers aspects de ces accords pour le Canada.

Le 7 février 2017, le comité a déposé son rapport intitulé Les accords de libre-échange : Un levier de prospérité économique. Au nom des membres du comité, je tiens à vous faire part des principales conclusions auxquelles mes collègues sénateurs sont arrivés.

Au cours de l'étude, les témoins ont fait valoir l'importance du commerce international pour l'économie du Canada et ils ont souligné que les accords de libre-échange sont des outils cruciaux pour que les entreprises canadiennes soient concurrentielles et réussissent à l'échelle mondiale. Par exemple, les témoins ont signalé que les accords de libre-échange offrent aux entreprises un accès élargi, diversifié et plus prévisible aux marchés et permettent aux entreprises de concurrencer sur un pied d'égalité leurs concurrents internationaux. Les témoins ont aussi fait remarquer que les accords de libre-échange aident les entreprises à profiter du développement économique mondial, y compris de l'émergence des chaînes de valeur mondiales.

D'après les témoins qui ont comparu devant le comité, l'interrelation grandissante entre le commerce, les investissements, les services et la propriété intellectuelle, qui est associée à ces chaînes de valeur, nécessite la négociation et la mise en œuvre d'accords de libre-échange contenant des dispositions sur une gamme étendue de questions commerciales.

Tout au long de l'étude, le comité a aussi été informé de certains défis résultant de la mise en œuvre des accords de libre-échange. Par exemple, des témoins ont noté l'augmentation des déficits du Canada au chapitre du commerce de marchandises avec certains de ses partenaires de libre-échange, ainsi que l'incapacité de certains accords de libre-échange à générer les résultats attendus en matière de croissance des exportations canadiennes de biens à valeur ajoutée. Des témoins ont affirmé que la négociation de ce type d'accords consiste à trouver un équilibre entre des intérêts commerciaux offensifs et défensifs, et que certains secteurs et travailleurs peuvent ainsi être affectés négativement par les changements économiques provoqués par ces accords.

Notre rapport présente les observations du comité, ainsi que neuf recommandations fondées sur les témoignages entendus. Voici quelques points à souligner.

Les accords de libre-échange, à eux seuls, ne suffisent pas à aider les entreprises canadiennes à profiter au maximum des débouchés commerciaux sur la scène internationale. Pour améliorer la performance économique et commerciale du pays, le gouvernement du Canada devrait veiller à ce que des politiques coordonnées sur le commerce international, le commerce intérieur, l'innovation, les infrastructures, l'éducation et d'autres secteurs applicables fournissent les bases économiques pour tirer le maximum des accords de libre-échange. En d'autres mots, le gouvernement devrait prévoir une stratégie de mise en œuvre efficace.

De plus, les agents qui offrent des services fédéraux de promotion du commerce, comme le Service des délégués commerciaux et Exportation et développement Canada, devraient être prêts à s'engager auprès des entreprises canadiennes dès qu'un nouvel accord commercial entre en vigueur. Pour que celles-ci soient prêtes, il faut publier une stratégie de mise en œuvre de l'accord de libre-échange indiquant les mesures fédérales destinées à aider les entreprises canadiennes à tirer profit de l'accord dès la signature. De plus, une telle stratégie de mise en œuvre devrait préciser les mesures fédérales visant à atténuer les effets négatifs d'un accord sur certains travailleurs et certains secteurs de l'économie.

Enfin, comme les statistiques actuelles liées au commerce ne dressent pas un portrait fidèle des flux commerciaux dans le cadre des chaînes de valeur mondiales, le gouvernement du Canada devrait encourager les initiatives qui fourniraient une analyse plus détaillée de la participation des entreprises canadiennes aux chaînes de valeur mondiales.

Le manque de transparence dans les négociations des accords de libre-échange peut contribuer à donner l'impression que ceux-ci ne sont pas toujours négociés dans l'intérêt public, ainsi qu'à nourrir le scepticisme quant aux avantages économiques qu'ils sont censés procurer.

Le comité a formulé plusieurs recommandations pour renforcer le processus de consultation et la transparence du gouvernement durant la négociation et la mise en œuvre des accords de libre-échange. En voici quelques-unes.

Le comité croit que le gouvernement du Canada devrait établir un processus de consultation officiel au moment de définir le mandat de négociation de tout accord de libre-échange. Les consultations devraient se poursuivre tout au long des négociations et être accessibles à tous les intervenants concernés, y compris le public. Le comité estime qu'une consultation accrue des parlementaires au sujet des négociations commerciales en cours ou à venir — ainsi qu'au sujet des mandats de négociation et de l'avancement des pourparlers — devrait faire partie des efforts du gouvernement du Canada pour améliorer la transparence entourant les accords de libre-échange.

Même s'il reconnaît l'importance de protéger la confidentialité de l'information, le comité considère qu'informer les parlementaires en temps utile des progrès accomplis durant les négociations permettrait aux législateurs de jouer leur rôle plus efficacement.

Le comité recommande aussi que, avant la ratification d'un accord de libre-échange, le gouvernement du Canada fasse état publiquement des retombées éventuelles de l'accord sur le plan économique et de la main-d'œuvre ainsi que du point de vue environnemental, social ou autre. De plus, cinq ans après la ratification de l'accord, le gouvernement devrait demander une ou plusieurs évaluations indépendantes afin d'analyser les retombées de l'accord et en présenter le rapport au Sénat et à la Chambre des communes.

En conclusion, le comité est d'avis qu'aider les Canadiens et les entreprises canadiennes à profiter au maximum des possibilités que leur offrent les accords de libre-échange et relever adéquatement les défis que posent ces accords sont deux approches qui devraient ensemble permettre au Canada de tirer davantage profit des échanges commerciaux.

Le comité croit également que l'une des priorités absolues du Canada devrait consister à rehausser la confiance du public à l'égard de l'importance du commerce international pour la prospérité du pays.

Enfin, il est important de souligner que, dans le cadre de cette étude, les audiences ont eu lieu du 18 février au 3 novembre 2016. Des événements survenus à l'échelle mondiale pendant et après ces audiences pourraient avoir des répercussions considérables sur l'économie du Canada et le commerce international, ainsi que sur les systèmes économiques et commerciaux mondiaux. Néanmoins, les observations et les recommandations contenues dans le rapport sont toujours pertinentes et devraient être utilisées dans le cadre de négociations futures, ainsi que de délibérations sur des enjeux liés au commerce et à des négociations commerciales.

(Sur la motion de la sénatrice Bellemare, le débat est ajourné.)

(1710)

Règlement, procédure et droits du Parlement

Quatrième rapport du comité—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport (intérimaire) du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, intitulé Ordre sessionnel, présenté au Sénat le 7 mars 2017.

L'honorable Joan Fraser propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, comme le sénateur Eggleton avant moi, je m'excuse de prendre de nouveau la parole. J'essaierai d'être brève.

Ce rapport est la deuxième partie de la réponse du Comité du Règlement aux propositions du Comité sur la modernisation concernant la façon dont nous gérons le Feuilleton. Vous vous souviendrez peut-être que le Comité du Règlement a déjà fait rapport sur l'ordre des éléments dans le Feuilleton, et que le Sénat a adopté nos propositions. Désormais, les projets de loi, les motions et les interpellations sont en ordre numérique, ce qui est beaucoup moins compliqué qu'avant — compliqué pas seulement selon moi, mais selon plusieurs personnes. C'est chose faite.

Les autres propositions du Comité sur la modernisation portaient sur les articles reportés — les articles au sujet desquels nous disons « reporté » lorsque nous souhaitons que le débat à leur égard demeure ajourné jusqu'à une prochaine séance.

Un nombre raisonnable de sénateurs sont d'avis que cette méthode est ancienne. Ils pensent qu'elle est inappropriée pour une Chambre moderne dont les délibérations seront bientôt télévisées. Le Comité sur la modernisation a élaboré un processus relativement compliqué pour traiter les objections à l'utilisation de la procédure utilisée lorsque nous souhaitons reporter le débat.

Nous avons eu passablement de discussions dans cette enceinte au sujet de la façon de procéder. Certains estiment que la solution pourrait aggraver le problème ou, du moins, être plus compliquée que le problème, étant donné qu'il faudrait donner un préavis quant à la personne qui parlera de tel ou tel article, et à la fin de la catégorie ou de la journée, donner à quelqu'un d'autre la possibilité de revenir à un article précédent du Feuilleton.

Bien sûr, l'enjeu fondamental était et demeure le fait que nous voulons préserver la capacité de tous les sénateurs à intervenir au sujet de toute question au Feuilleton, s'ils le souhaitent, quelle que soit la journée. C'est l'une des caractéristiques qui distinguent le Sénat de l'autre endroit, et elle a parfois donné lieu à d'excellents débats. Personne ne voulait perdre cet atout. Cependant, plusieurs personnes estiment que le fait de répéter le mot « reporté » va nuire à l'image du Sénat, surtout lorsque les séances seront télévisées.

Le Comité du Règlement propose un ordre sessionnel pour trouver une solution à cet enjeu en s'attaquant directement au mot « reporté » : plutôt que de demander le remaniement du Feuilleton pour tenir compte des personnes qui ont signalé d'avance qu'elles prendraient la parole pendant la séance, nous jugeons qu'il serait approprié de simplement éliminer l'utilisation du mot « reporté ». Nous pouvons même l'essayer pour la durée de la présente session. Par exemple, le greffier appellerait des projets de loi à l'étape de la deuxième lecture : le projet de loi S-225, suivi du projet de loi S-226, suivi du projet de loi S-234. Cependant, au moment où le greffier annoncerait le projet de loi S-225, au lieu que le sénateur dise « reporté » et que le Président répète « reporté », il y aurait une courte pause. Le greffier attendrait quelques instants avant de passer au prochain point, et il relèverait de la responsabilité du sénateur qui souhaite intervenir sur cette question de se lever promptement et d'attirer l'attention du Président en disant « Votre Honneur ».

Si nous adoptons l'ordre sessionnel proposé, il sera primordial que les sénateurs signalent leur intention de parler au Président, puisque ce dernier n'est pas toujours en mesure de les voir. C'est surtout le cas des sénateurs qui sont assis dans le fin fond de l'enceinte du Sénat parce que le greffier est debout et, à moins qu'il ne soit particulièrement petit, il bloque la vue du Président.

Il reviendrait à tous les sénateurs, lorsqu'ils veulent intervenir, de se lever dès que l'article est appelé et de dire clairement : « Votre Honneur ». Le Président leur accorderait alors la parole.

Cette façon de procéder nous permettrait d'éliminer la répétition sans fin du mot « reporté », qui dérange certaines personnes. De plus, je peux aussi comprendre que cette pratique peut laisser certains citoyens qui ne comprennent pas les détails du Règlement un peu perplexes.

Presque tous ces changements peuvent être adoptés à titre expérimental sans nécessiter de décision du Sénat, sauf pour un accroc : pour que l'ajournement d'un débat demeure, le Sénat doit avoir indiqué la décision de maintenir un ajournement ou d'adopter toute autre mesure.

Voilà ce que le mot « reporté » signifie. Ce mot indique qu'on demande au Sénat de prendre la décision de maintenir l'ajournement, et c'est ce qui se produit si personne ne s'y oppose.

Nous avons besoin d'un ordre sessionnel qui dit qu'il n'est pas nécessaire que l'on déclare à voix haute que le Sénat autorise le maintien de l'ajournement. Cet ordre dirait que, pour le reste de la présente session, lorsqu'un article inscrit au Feuilleton et Feuilleton des préavis est appelé et qu'aucun sénateur ne prend la parole, l'article est reporté d'office à la prochaine séance du Sénat.

Nous ne savons pas si cette solution fonctionnerait — si elle serait jugée plus acceptable que d'autres approches —, mais il semble qu'il vaille la peine de l'essayer pour trouver l'équilibre entre les procédures que nous voulons préserver et ce que beaucoup de gens veulent améliorer.

Honorables sénateurs, j'espère ne pas avoir embrouillé davantage le sujet en tentant de l'expliquer. Je vous invite fortement à accueillir favorablement le rapport.

(Sur la motion du sénateur Carignan, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion tendant à encourager le gouvernement à évaluer le coût et l'incidence de la mise en place d'un régime national de revenu de base — Motion d'amendement — Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Eggleton, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Dawson,

Que le Sénat encourage le gouvernement fédéral à parrainer, à l'issue de consultations adéquates et de concert avec un ou plusieurs gouvernements provinciaux ou territoriaux, un projet-pilote et toute étude complémentaire visant à évaluer le coût et l'incidence de la mise en place d'un régime national de revenu de base fondé sur un impôt négatif sur le revenu afin d'aider les Canadiens à sortir de la pauvreté.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénatrice Bellemare, appuyée par l'honorable sénateur Harder, C.P.,

Que la motion soit modifiée afin qu'elle se lise comme suit :

Que le Sénat encourage le gouvernement fédéral à appuyer, à l'issue de consultations adéquates, les initiatives des gouvernements provinciaux ou territoriaux, y compris des collectivités autochtones, visant à évaluer le coût et l'incidence de la mise en place de mesures, de programmes et de projets-pilotes afin d'aider les Canadiens à sortir de la pauvreté au moyen d'un régime de revenu de base (comme un impôt négatif sur le revenu), et à faire rapport sur leur efficacité.

L'honorable Yuen Pau Woo : Je prends la parole pour appuyer la motion no 51, proposée au départ par le sénateur Eggleton, puis modifiée par la sénatrice Bellemare. Toutes les autres personnes qui sont intervenues ont apporté leur soutien à cette motion et ont avancé d'excellents arguments sur les plans de l'équité, de l'efficacité et de la justice sociale pour appuyer la mise en place d'un revenu de base garanti.

[Français]

Aujourd'hui, je souhaite brièvement la parole au sujet d'une considération plus fondamentale, c'est-à-dire qu'un revenu de base garanti est une question de liberté et de dignité.

(1720)

[Traduction]

Je crois que la liberté n'est pas seulement le droit d'agir comme on l'entend, mais aussi la possibilité de le faire. La liberté est une fin en soi et, par conséquent, une valeur sociale importante, mais elle est aussi, pour l'individu, un moyen de parvenir à d'autres fins, comme la réalisation d'une carrière enrichissante, l'achat de biens ou la poursuite d'entreprises artistiques.

Malheureusement, nous ne naissons pas tous aussi libres les uns que les autres, du moins pas dans le sens que je viens de décrire. Notre liberté individuelle intrinsèque est entravée par des conventions sociales, comme la nature des marchés, les normes et valeurs socioculturelles, et des barrières à la mobilité fondée sur l'histoire, la tradition et, souvent, les préjugés.

Comme l'a expliqué M. Amartya Sen, lauréat du prix Nobel d'économie, la liberté joue un rôle à la fois « constitutif » et « instrumental ». Le rôle constitutif fait référence aux libertés importantes liées à des capacités élémentaires, comme être en mesure d'éviter la famine, la malnutrition et la mortalité prématurée, ainsi qu'aux libertés associées au fait de savoir lire, écrire et compter, et de pouvoir participer au processus politique. Le rôle « instrumental » de la liberté, par contre, a trait au fait que différents droits et possibilités contribuent à l'élargissement des libertés humaines dans leur ensemble.

Un revenu de base garanti peut grandement contribuer à faire progresser les libertés d'un individu, tant sur le plan constitutif qu'instrumental. Offrir à un individu les moyens de subvenir à ses besoins fondamentaux est une façon de lui accorder la liberté de se développer et d'accroître sa capacité à accéder à une plus grande liberté.

D'autres sénateurs ont parlé des avantages, sur le plan de l'efficacité, d'un revenu de base garanti. Les projets-pilotes envisagés dans la motion no 51 permettront de vérifier l'étendue et la portée de ces avantages, mais nous ne devrions pas perdre de vue la valeur intrinsèque d'un revenu garanti lorsqu'il s'agit d'appuyer les libertés individuelles.

Par exemple, les femmes qui utiliseraient ce revenu de base garanti pour poursuivre leurs études jouiraient dans les faits d'une liberté qui leur était auparavant interdite. Dans ce cas-ci, l'attrait réside non pas dans la réduction des prestations versées pendant la durée des études, mais dans l'accroissement du capital humain une fois que ces femmes accèdent au marché du travail.

Dans la même veine, chers collègues, l'arrivée de ce qu'on appelle l'économie par petits boulots, qui regroupe un nombre important, et surtout croissant, de travailleurs, aggrave l'insécurité financière de nombreuses personnes, ce qui réduit d'autant leur liberté. Selon un rapport produit en 2016 par le McKinsey Global Institute, environ 30 p. 100 des Américains et des Européens en âge de travailler font ce qu'ils qualifient de travail indépendant.

Les rapports de Statistique Canada font eux aussi état d'une augmentation constante de la proportion de travailleurs autonomes depuis 25 ans. En 2016, le Canada en comptait 2,8 millions. Bien que ce chiffre englobe tous les types d'emplois indépendants, y compris ceux des professionnels bien nantis, il laisse peu de doute quant au nombre sans cesse grandissant de Canadiens occupant un emploi précaire.

En plus d'atténuer la situation des travailleurs en situation précaire, l'instauration d'un revenu de base garanti pourrait bien constituer le filet social qui permettra à terme aux innovateurs, aux artistes et autres rêveurs de ce monde de mener des projets susceptibles de créer de nouveaux débouchés économiques et de donner un sens à leur vie, personnellement et socialement.

Si l'économie par petits boulots est vraiment la voie de l'avenir, comme le pensent de nombreuses personnes, comment peut-on rendre cette perspective à la fois moins menaçante pour les travailleurs et plus intéressante pour eux et pour la société? Sur le plan des libertés, l'économie par petits boulots pourrait représenter l'idéal de nombreuses personnes, pourvu que l'on puisse résoudre les problèmes liés à l'insécurité financière.

Il ne faudrait pas croire toutefois qu'un revenu garanti suffirait à accroître les libertés et qu'il constituerait ainsi une panacée capable de corriger toutes les iniquités sociales liées à l'emploi, à l'éducation et autre. Même s'il est vrai qu'un programme bien conçu de revenu de base garanti pourrait rendre caducs de nombreux autres types de programmes d'aide sociale et les structures bureaucratiques connexes, certains obstacles à la liberté — liés non pas au revenu, mais à la condition sociale, ainsi qu'aux normes et valeurs culturelles et aux bons vieux préjugés — demeureront présents.

L'État a intérêt à ce que les citoyens, en recevant un revenu garanti, puissent exercer leurs libertés les plus fondamentales, mais il doit aussi faire le nécessaire pour que progressent les libertés fondamentales de l'ensemble de la population.

En plus d'accroître les libertés fondamentales des gens, le revenu de base garanti leur confère aussi la dignité nécessaire pour fonctionner en société sans être victimes de préjugés. Comme l'ont dit un certain nombre d'intervenants avant moi, beaucoup de nos programmes d'aide sociale doivent,pour bien fonctionner, placer les gens dans telle catégorie ou telle sous-catégorie. Il est déjà difficile d'être handicapé, sans abri ou toxicomane. Pourquoi en rajouter en associant ce genre d'étiquettes aux prestations qui sont censées constituer une forme de revenu de base?

Bien souvent, les participants aux programmes d'aide sociale ne veulent pas travailler parce que, s'ils gagnent un salaire, leurs prestations seront coupées. Comme plusieurs autres sénateurs ont soulevé le même problème, je ne m'étendrai pas sur le sujet. Je dirai seulement que, en supprimant ce facteur, le revenu de base garanti aiderait les personnes concernées non seulement à accroître leurs libertés, mais aussi à vivre davantage dans la dignité.

[Français]

Enfin, il existe de nombreuses questions entourant les modalités d'un programme de revenu de base garanti et ses avantages pour les particuliers et la société en général. C'est justement ce sur quoi porte la motion no 51, qui invite le gouvernement à examiner plus attentivement cette idée, à mener des projets-pilotes et, particulièrement, à collaborer avec les provinces.

[Traduction]

Ces projets-pilotes mettront sans aucun doute l'accent sur l'équité et l'efficience, y compris les moyens pour diminuer le coût de l'ensemble des programmes d'aide sociale et de soins de santé, ainsi que sur les effets incitatifs ou dissuasifs sur les bénéficiaires. Il s'agit là de facteurs importants à prendre en considération si nous voulons concevoir un programme de revenu de base garanti de grande portée, et peut-être même de portée nationale. Toutefois, il ne faut pas oublier la raison pour laquelle nous souhaitons, ou du moins je souhaite, vivement trouver de meilleurs moyens d'aider les membres de notre société qui en ont le plus besoin : nous voulons accroître leurs libertés et leur permettre d'exercer ces libertés en toute dignité.

(Sur la motion de la sénatrice Gagné, au nom de la sénatrice Dupuis, le débat est ajourné.)

(1730)

L'alphabétisation à l'Île-du-Prince-Édouard

Interpellation—Poursuite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Hubley, attirant l'attention du Sénat sur la situation actuelle de l'alphabétisation et des programmes d'alphabétisation à l'Île-du-Prince-Édouard, notamment sur la nécessité pour le gouvernement fédéral d'appuyer la PEI Literacy Alliance.

L'honorable Elizabeth (Beth) Marshall : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour répondre à l'interpellation de la sénatrice Hubley, faisant suite à son préavis du 28 septembre, attirant l'attention du Sénat sur la situation actuelle de l'alphabétisation et des programmes d'alphabétisation à l'Île-du-Prince-Édouard, notamment sur la nécessité pour le gouvernement fédéral d'appuyer la PEI Literacy Alliance. J'aimerais vous faire part de la situation de l'alphabétisation dans ma propre province de Terre-Neuve-et-Labrador.

Comme l'a mentionné la sénatrice Hubley, le Canada atlantique a l'un des plus faibles taux d'alphabétisation du pays. Selon la dernière étude comparative internationale, le Canada a obtenu la note « C » en raison de ses compétences insuffisantes en lecture et en écriture. Par ailleurs, selon l'Organisation de coopération et de développement économiques, plus connue sous son sigle d'OCDE, 48 p. 100 des adultes canadiens ont de faibles capacités de lecture et d'écriture. À titre de comparaison, ce pourcentage est de 45 p. 100 à l'Île-du-Prince-Édouard, de 50 p. 100 en Nouvelle-Écosse, de 53 p. 100 au Nouveau-Brunswick et de 57 p. 100 à Terre-Neuve-et-Labrador.

À l'échelle du pays, les résultats sont mitigés. Alors que l'Alberta, l'Île-du-Prince-Édouard, la Colombie-Britannique, l'Ontario, le Manitoba et la Saskatchewan ont obtenu la note « C », les autres provinces, dont Terre-Neuve-et-Labrador, ont obtenu la note « D ». En fait, c'est à Terre-Neuve-et-Labrador que les compétences en lecture et en écriture sont les plus faibles.

À l'initiative de l'OCDE, une évaluation des compétences des adultes a été menée dans une quarantaine de pays dans le cadre du Programme pour l'évaluation internationale des compétences des adultes. L'évaluation mesure la littératie, la numératie et la résolution de problèmes, et collecte des informations et des données sur l'application de ces compétences dans le cadre privé, professionnel et social. L'évaluation se déroule en trois rondes, de 2008 à 2019. Le Canada a participé, en même temps que 22 autres pays, à la première ronde qui s'est déroulée de 2008 à 2013.

Statistique Canada, Emploi et Développement social Canada et le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada ont terminé en 2013 un rapport présentant les résultats de l'évaluation menée dans le cadre de ce programme, qui est une initiative de l'OCDE. Le rapport présente une évaluation très détaillée des compétences en littératie, en numératie et en résolution de problème dans un environnement à forte composante technologique chez les adultes âgés de 16 à 65 ans à l'échelle du pays, de même que dans les provinces et les territoires.

Parmi les principales conclusions du rapport, soulignons que, en matière de littératie, le Canada se situe au niveau de la moyenne de l'OCDE. La province de Terre-Neuve-et-Labrador se trouve sous la moyenne canadienne et donc en deçà de la moyenne de l'OCDE en matière de littératie.

Le Canada se situe également en deçà de la moyenne de l'OCDE en ce qui concerne la numératie. Terre-Neuve-et-Labrador se classe sous la moyenne canadienne et, partant, sous la moyenne de l'OCDE à cet égard. Le niveau de numératie à Terre-Neuve-et-Labrador est le plus faible de toutes les provinces canadiennes.

Le Canada se situe au-dessus de la moyenne de l'OCDE en résolution de problèmes dans des environnements à forte composante technologique. Toutes les provinces canadiennes se trouvent à un niveau équivalent ou supérieur à la moyenne de l'OCDE, sauf Terre-Neuve-et-Labrador. Autrement dit, notre province est la seule à se situer sous la moyenne de l'OCDE en ce qui concerne la résolution de problèmes dans des environnements à forte composante technologique.

Les plus récents résultats du Programme international de l'OCDE pour le suivi des acquis des élèves indiquent le faible taux de littératie des Canadiens de Terre-Neuve-et-Labrador. Ce programme consiste en des évaluations internationales triennales des systèmes d'éducation dans 72 pays au moyen de tests de compétences et de connaissances en mathématiques, en lecture et en sciences faits par des étudiants de 15 ans.

En ce qui concerne la performance en mathématique, les résultats compilés par l'OCDE en 2015 indiquent que les compétences des étudiants canadiens en mathématiques se situent au-dessus de la moyenne. Parmi les 72 pays participants, seulement 6 pays ont surpassé le Canada dans le volet mathématique de l'étude. Soulignons toutefois que les résultats obtenus par Terre-Neuve-et-Labrador en mathématiques sont inférieurs à la moyenne canadienne.

Pour ce qui est de la compréhension de l'écrit et de la performance des élèves en sciences, l'étude de l'OCDE indique que le score moyen des Canadiens de 15 ans est bien supérieur à la moyenne de l'OCDE. Parmi les 72 pays participants, un seul pays a dépassé le Canada pour ce qui est de la compréhension de l'écrit et 6 pays ont mieux réussi que le Canada en sciences.

Cependant, Terre-Neuve-et-Labrador a obtenu des résultats inférieurs à la moyenne canadienne en lecture et en sciences.

Voilà des faits très inquiétants au sujet de ma province. À Terre-Neuve-et-Labrador, le taux d'alphabétisation des adultes en âge de travailler, c'est-à-dire ceux qui ont entre 18 et 65 ans, est nettement inférieur à la moyenne nationale. Qui plus est, les enfants d'âge scolaire de cette province présentent des résultats inférieurs à la moyenne des enfants du reste du pays dans les domaines de la lecture, des mathématiques et des sciences.

Il existe une forte corrélation entre la faiblesse des compétences en lecture et en écriture et l'augmentation du taux de chômage et la diminution du niveau d'instruction et du salaire. Les compétences en lecture et en écriture ont un effet direct sur le bien-être socioéconomique de notre société.

Honorables sénateurs, compte tenu de toutes ces statistiques, nous devrions être inquiets de constater que des organismes à but non lucratif faisant la promotion de l'alphabétisation sont en train de fermer leurs portes partout au pays. En 2014, le gouvernement fédéral a cessé de financer les groupes d'alphabétisation au pays et a plutôt décidé de verser des fonds à des programmes individuels. Cependant, les organismes d'alphabétisation soutiennent que le financement de base permet de payer le salaire du personnel de bureau et que, sans ces employés essentiels, les programmes qu'ils administrent ne peuvent pas être soutenus convenablement et que, par conséquent, ils ne peuvent pas être offerts dans la collectivité.

Victime des compressions et incapable de recueillir suffisamment de fonds pour assurer son fonctionnement, l'organisme Literacy Newfoundland and Labrador a dû fermer définitivement ses portes en juillet 2015. L'organisme, qui mettait sur pied et appuyait des projets et des travaux de recherche en matière d'alphabétisation aux quatre coins de Terre-Neuve-et-Labrador, a ensuite demandé une somme d'un million de dollars au gouvernement provincial. Hélas, cette demande a aussi été rejetée, et seulement un dixième du financement a été approuvé pour un projet particulier. Literacy Newfoundland and Labrador a donc été obligé de fermer ses portes et de cesser d'offrir des programmes.

Si les programmes d'alphabétisation offerts à Terre-Neuve-et-Labrador ne reçoivent pas un soutien approprié, les enfants, les adolescents et les adultes ne seront pas motivés à améliorer ou à perfectionner leurs compétences en lecture et en écriture. Des études révèlent que les organismes qui offrent des programmes d'alphabétisation aux personnes ayant des compétences très faibles en lecture et en écriture aident celles-ci à acquérir les outils et les compétences en la matière dont elles ont besoin pour occuper un emploi.

Lorsque des personnes atteignent un degré de littératie suffisant pour répondre aux exigences du marché du travail, le taux d'emploi s'améliore, et elles peuvent réaliser leur plein potentiel. Elles deviennent utiles à la société. On a démontré que les enfants dont les parents ont un degré de littératie élevé atteignent, eux aussi, un degré de littératie élevé et cherchent à poursuivre leurs études plus longtemps. En fait, le degré de littératie et le niveau de scolarité des parents sont des variables particulièrement importantes pour prédire le degré de littératie des enfants.

Hausser le degré de littératie de ceux qui ont des degrés de littératie et de numératie plutôt bas est avantageux pour les employeurs et les employés. Selon l'OCDE, améliorer les compétences en lecture et en écriture des groupes où ces compétences sont faibles a des effets bénéfiques pour les employeurs et les employés. Les employeurs deviennent plus productifs et novateurs, tandis que les employés améliorent leur rendement au travail, leur salaire et leur qualité de vie.

Chers collègues, le faible degré de littératie et de numératie a des conséquences majeures sur le marché du travail. Les personnes qui ont des lacunes en lecture et en écriture sont plus susceptibles de rester au chômage plus longtemps, et celles qui se trouvent au bas de l'échelle de la littératie et de la numératie sont deux fois plus susceptibles de demeurer sans emploi pendant six mois ou plus que celles qui sont fortes en lecture et en écriture.

Étant donné que ma province est aux prises avec un taux de chômage de 16 p. 100 comparativement au taux de 7 p. 100 de chômage dans l'ensemble du Canada, nous devons songer à l'incidence du taux de littératie de la population de Terre-Neuve-et-Labrador sur ses perspectives d'emploi et de réussite. Nous devons nous assurer que tout le monde a accès à des programmes capables d'améliorer le taux de littératie de nos concitoyens et de les faire progresser sur le plan social et économique, en particulier dans la région de l'Atlantique.

Terre-Neuve-et-Labrador a beaucoup à offrir au Canada et au monde. Je crois que hausser les taux de littératie et de numératie est la clé qui nous permettra d'améliorer les perspectives d'emploi dans toutes les tranches d'âge, ce qui aura nécessairement des effets bénéfiques sur notre économie, notre qualité de vie et la vitalité de nos collectivités dynamiques.

Le 1er janvier dernier, le gouvernement provincial a imposé une taxe de 10 p. 100 sur les livres, faisant ainsi de Terre-Neuve-et-Labrador la seule province à taxer les livres. Certaines personnes et des groupes communautaires ont critiqué la décision du gouvernement en faisant valoir que la taxe sur les livres aggravera les effets négatifs sur le taux d'alphabétisation. De plus, selon ceux qui s'opposent à la taxe, même si celle-ci n'empêchera pas les mieux nantis de s'acheter des livres, ceux qui sont au bas de l'échelle socioéconomique seront plus durement touchés. Nous savons tous que le faible taux d'alphabétisation est un problème qui touche particulièrement les personnes au bas de l'échelle socioéconomique.

L'année dernière, le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador a mis sur pied un groupe de travail sur l'amélioration des résultats en éducation, qui a amorcé ses travaux en novembre dernier.

(1740)

On s'attend à ce que le groupe de travail du premier ministre publie ses recommandations cette année. Certaines devraient porter sur la littératie.

Le plan provincial de 2013 en matière de littératie est toujours en vigueur, mais on prévoit qu'il sera touché par les recommandations du groupe de travail.

Pour terminer, je remercie la sénatrice Hubley d'avoir lancé une interpellation sur cet enjeu important. Je tiens aussi à souligner l'apport du sénateur Demers, qui a grandement contribué à faire connaître cet enjeu qui nous touche tous. Merci.

(Sur la motion du sénateur Housakos, le débat est ajourné.)

Affaires étrangères et commerce international

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final concernant son étude sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique depuis le dépôt du rapport du comité, intitulé Voisins nord-américains : maximiser les occasions et renforcer la coopération pour accroître la prospérité

L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 2 mars 2017, propose :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le mardi 22 mars 2016, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international concernant son étude sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique soit reportée du 31 mars 2017 au 31 octobre 2017.

— Il s'agit simplement de la prolongation de l'étude que nous avons menée avec le Mexique. Étant donné les récents développements et notre visite au Mexique, nous souhaitons poursuivre notre étude et la compléter. Nous demandons donc une prolongation qui nous permettra de poursuivre nos travaux et figurera au Feuilleton.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'Étude sur les faits nouveaux en matière de politique et d'économie en Argentine dans le cadre de leur répercussion possible sur les dynamiques régionale et globale

L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 2 mars 2017, propose :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le mardi 22 mars 2016, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international concernant son étude sur les faits nouveaux en matière de politique et d'économie en Argentine soit reportée du 31 mai 2017 au 31 octobre 2017.

—Il s'agit de reporter la date, afin que nous ayons la possibilité de présenter notre rapport, d'obtenir une réponse des ministres et de tenir les tables rondes et les consultations publiques que nous pourrions juger utiles. Nous demandons donc que la date du dépôt soit reportée au mois d'octobre.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

Droits de la personne

Autorisation au comité d'étudier les obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne et de recevoir les documents reçus et les témoignages entendus depuis le début de la première session de la trente-septième législature

L'honorable Jim Munson, conformément au préavis donné le 7 mars 2017, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à étudier et surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et à examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne;

Que les documents reçus, les témoignages entendus, et les travaux accomplis par le comité sur ce sujet depuis le début de la première session de la trente-septième législature soient renvoyés au comité;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 mars 2018.

— Honorables sénateurs, il s'agit de notre ordre de renvoi général. Aucune somme d'argent n'est dépensée. Il est utilisé dans le cadre de l'une de nos études de courte durée. Par exemple, il a entre autres servi à des études sur les transfuges nord-coréens et l'analyse comparative entre les sexes, ainsi qu'à des rencontres sur le Vietnam. Il est important que nous adoptions ce nouvel ordre de renvoi afin de pouvoir tenir des rencontres opportunes sur des sujets importants.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne à demain, à 14 heures.)

 
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