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Président du Sénat

Décision du président – Rappel au Règlement – Motion d’amendement (projet de loi C-7)


Honorables sénateurs, j’avais l’intention d’être présent au Sénat aujourd’hui, mais compte tenu de la situation changeante à Terre-Neuve-et-Labrador, j’ai cru qu’il était important de faire preuve d’un respect scrupuleux des mesures sanitaires mises en place par les autorités de santé publique de la province.

J’ai maintenant l’intention de rendre ma décision concernant le recours au Règlement soulevé la semaine dernière. Une fois que j’aurai rendu ma décision, je demanderai de nouveau à la sénatrice Ringuette de présider la séance. Je vous remercie, chers collègues, de votre compréhension et j’espère que vous demeurerez tous en sécurité.

Honorables sénateurs, je suis prêt à me prononcer sur le rappel au Règlement soulevé par le sénateur Gold le 11 février 2021 concernant l’amendement proposé par la sénatrice McPhedran relativement au projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir). Le sénateur Gold a contesté l’amendement au motif que celui-ci ne respecte pas l’objectif fondamental du projet de loi et qu’il en mine le principe. Après avoir entendu des arguments dans le cadre du rappel au Règlement, la Présidente intérimaire a pris la question en délibéré. Le débat s’est ensuite poursuivi dans l’attente d’une décision, conformément à l’ordre adopté le 8 février concernant le déroulement du débat sur le projet de loi C-7.

L’article 10-4 du Règlement prévoit que, « [à] l’étape de la deuxième lecture, le débat porte habituellement sur le principe du projet de loi ». La deuxième lecture est donc une étape cruciale du processus législatif, puisque c’est à ce stade que le Sénat doit se déclarer pour ou contre le principe du projet de loi, c’est-à-dire l’intention et les objectifs fondamentaux de la proposition législative. En adoptant un projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, le Sénat souscrit à son principe et à ses objectifs fondamentaux, et toute modification subséquente doit respecter cette décision. Aucun amendement ne peut miner l’objectif fondamental d’un projet de loi, bien que le Sénat conserve, bien entendu, le droit de rejeter un projet de loi au complet à une étape subséquente du processus législatif.

Les idées de la portée et de la pertinence ont des connexions à cette limitation. Même si les trois notions sont souvent évoquées ensemble, elles demeurent toutefois distinctes. Dans une décision du 9 décembre 2009, la présidence a déclaré :

« En général, on considère que le principe d’un projet de loi est l’idée qui le sous-tend. La portée du projet de loi correspond aux paramètres fixés par le projet de loi pour atteindre les buts ou objectifs visés, ou aux mécanismes généraux envisagés pour parvenir aux fins voulues. Enfin, la pertinence concerne la mesure dans laquelle un amendement se rapporte à la portée ou au principe du projet de loi à l’étude. »

De plus, on peut lire ce qui suit à la page 141 de la Procédure du Sénat en pratique :

« Les amendements doivent donc avoir un lien quelconque avec le projet de loi […] et ne peuvent introduire un élément ou facteur qui lui est étranger ou qui va à l’encontre de ses buts originaux. Ils doivent aussi respecter les objectifs du projet de loi. »

Si ces types de questions se posent habituellement dans le contexte des délibérations en comité, il n’en demeure pas moins que le même cadre d’analyse s’applique aux délibérations dans l’enceinte du Sénat, comme le confirme une décision du 4 avril 2019.

En l’espèce, il semble que l’intention ou l’objectif fondamental du projet de loi C-7 soit de reconnaître et de prendre en compte une décision judiciaire qui confirme l’existence d’un droit constitutionnel à l’aide médicale à mourir pour les personnes dont la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible. Le projet de loi propose donc d’étendre l’accès à l’aide médicale à mourir, en prévoyant un système de mesures de sauvegarde et des critères d’admissibilité, afin que ces personnes puissent exercer ce droit dans les faits. Comme l’ont indiqué les intervenants lors du rappel au Règlement, l’amendement mettrait à néant cet objectif fondamental du projet de loi. Si l’amendement était adopté, le projet de loi ne donnerait plus aucune suite à la décision du tribunal, et la loi continuerait de limiter la prestation de l’aide médicale à mourir aux seules personnes dont la mort naturelle est raisonnablement prévisible. Cela va directement à l’encontre du principe du projet de loi.

Puisque l’amendement va à l’encontre du principe du projet de loi et ne respecte pas la décision prise par le Sénat à l’étape de la deuxième lecture, il est irrecevable, et le débat ne peut donc pas se poursuivre.

(En conséquence, la motion d’amendement est retirée, par ordre.)

Honorables sénateurs, je demande maintenant à la sénatrice Ringuette de présider de nouveau la séance. Encore une fois, je souhaite vous remercier, chers collègues, de votre collaboration et je vous souhaite une bonne continuation de vos débats. Merci beaucoup.

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