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Projet de loi modifiant certaines lois et d'autres textes en conséquence (armes à feu)

Troisième lecture--Report du vote

13 décembre 2023


L’honorable David Arnot [ + ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-21. Je remercie notre collègue, l’honorable sénateur Yussuff, de parrainer cette mesure législative d’une manière toujours aussi compétente et professionnelle. Je tiens aussi à remercier le sénateur Dean d’avoir présidé et supervisé les travaux du comité, et je les remercie tous les deux d’avoir encouragé un débat complet sur ce projet de loi au Sénat.

Je vais m’attarder sur quatre points. Premièrement, le gouvernement fédéral a manqué à son obligation fiduciaire. Deuxièmement, il n’a pas consulté les principales parties intéressées visées par ce projet de loi. Troisièmement, le projet de loi n’accorde pas l’autorisation légale et le pouvoir aux contrôleurs des armes à feu du Canada de gérer les armes à feu qui relèvent de leur compétence, ce que je considère être une lacune importante. Enfin, il n’y a pas de politiques et de programmes qui permettraient d’atteindre les objectifs de ce projet de loi.

Avant d’aller plus loin, je vous demande de songer à la nature du discours — de la psychologie, si vous préférez — employé au sujet de ce projet de loi.

Tout d’abord, examinons l’argument d’une seule vie, un argument selon lequel il faut adopter le projet de loi, même s’il ne sauve qu’une seule vie. En tant qu’ancien commissaire aux droits de la personne et ancien juge provincial, je peux vous dire que l’argument d’une seule vie ne tient pas au pays. Il ne tient pas dans les hôpitaux, où on prend des décisions de vie ou de mort. Il ne tient pas sur les autoroutes du pays, où les limites de vitesse réduisent les risques, mais ne les éliminent pas. Il ne tient pas dans les patinoires de hockey, où les risques de blessures, d’invalidité et même de mort sont déterminés par des actuaires. Je ne dis pas que les hôpitaux, les autoroutes et les patinoires de hockey sont similaires aux préoccupations concernant l’utilisation illégale d’armes de poing ou d’armes à feu. Clairement, chaque vie a la même importance.

Nous devons toutefois éviter les faux dilemmes et les fausses dichotomies — des sophismes qui présentent deux options opposées comme étant les seules possibles, alors qu’il existe en fait davantage d’options. Nous devons également ignorer le mantra « Vous êtes soit avec nous, soit contre nous ». C’est un sophisme qui simplifie à l’extrême les questions et balaie la possibilité de positions neutres ou différentes. On peut ainsi influencer plus facilement l’opinion en présentant la situation comme étant dichotomique, ce qui est en fait trompeur.

Honorables collègues, je sais que nous sommes tous bien conscients de l’importance des discours persuasifs dans cette enceinte. Toutefois, aujourd’hui, nous devons mettre de côté les faux arguments voulant que le projet de loi C-21, dans sa forme actuelle, puisse prévenir des décès, des méfaits et des crimes commis avec des armes à feu, et que nous n’ayons donc d’autre choix que d’adopter le projet de loi C-21 tel quel. Nous devons faire abstraction des faux arguments selon lesquels ce projet de loi répondrait aux souhaits et aux besoins des victimes et de leurs proches. On nous dit que c’est malheureusement la seule solution, que c’est à prendre ou à laisser.

En tant que juge de la Cour provinciale, j’ai dû instruire de nombreux procès pour des crimes liés aux armes à feu, et je peux vous dire que ni les victimes ni les proches n’ont envie d’aller en cour. Ils voudraient que ce crime n’ait jamais eu lieu, qu’ils n’aient jamais perdu un être cher. Les groupes et les militants pour les droits des victimes sont très engagés, à juste titre, dans le processus législatif visant les armes à feu. Ils veulent et méritent du changement, c’est tout à fait légitime, et ils veulent notamment avoir l’assurance qu’ils seront en sécurité dans leurs foyers, leurs écoles, leurs collectivités, leurs mosquées, leurs synagogues et leurs lieux de culte. Cependant, ce n’est pas faire preuve de respect envers les victimes de violence que d’approuver automatiquement un projet de loi boiteux ou un projet de loi qui aura des résultats limités. Il faut des programmes et des politiques bien conçus de façon éclairée pour qu’on puisse s’attaquer aux causes profondes de la violence liée aux armes à feu, ainsi que des mesures législatives rigoureuses pouvant sauver la vie de bien des gens.

Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-21 obligera les tribunaux canadiens à déterminer la capacité de cette mesure législative non pas à sauver des vies, mais à juger les personnes qui ont violé ou qui pourraient avoir violé la loi. L’expérience nous montre que les tribunaux offrent des indicateurs et des statistiques à retardement; ils ne mesurent pas le nombre de vies sauvées.

Il est évident que le Canada a besoin de mesures législatives pour prévenir les tragédies liées aux armes à feu, comme les actes horribles qui se sont produits à Portapique et dans la communauté nordique de La Loche, en Saskatchewan, comme les fusillades et les meurtres survenus au Centre culturel islamique de Québec et les fusillades et meurtres sexistes et misogynes qui se sont déroulés à l’École Polytechnique. Ces tragédies déchirent le cœur des Canadiens et portent atteinte à leur identité citoyenne au sein de la démocratie canadienne. Nous avons besoin d’une législation qui protège le bien public de la sécurité publique.

Certains affirment que le projet de loi C-21 serait une mesure législative proactive qui réduira la criminalité en réduisant le nombre d’armes à feu et qui fera du Canada un endroit plus sûr. Est-ce vrai? Est-ce bien le cas?

Je répondrai à cette question en citant ce que l’Association canadienne des chefs de police a affirmé à l’autre endroit :

[L]e véritable problème [ce sont] les armes de poing illégales obtenues aux États-Unis qui ont conduit à la tendance actuelle inquiétante de la violence armée qui est largement liée aux gangs, aux gangs de rue et aux groupes criminels organisés plus sophistiqués.

Evan Bray, chef de la police de Regina, a également affirmé que « [...] la restriction de la possession légale d’armes de poing ne permettra pas de s’attaquer de manière significative au véritable problème [...] ».

Je pense aux pages d’observations générées par les témoignages livrés devant le comité sénatorial permanent. Les groupes autochtones, les agriculteurs, les chasseurs, les trappeurs, les éleveurs, les tireurs sportifs et les collectionneurs étaient déçus du processus de consultation, tout comme les chercheurs et les groupes de défense de l’intérêt des victimes.

Le projet de loi C-21 ne répond pas efficacement aux besoins en matière de politiques et de programmes visant à lutter contre la violence familiale, la violence contre un partenaire intime et le suicide. Le Canada a besoin d’un nombre suffisant de psychologues, de psychiatres, de médecins et de membres du personnel pour veiller au bien-être de nos concitoyens qui éprouvent des problèmes de santé mentale. Le Canada a besoin d’éducation publique au sujet de la responsabilité civique fondamentale afin de respecter et de préserver la sécurité de tous les citoyens de manière égale, une éducation qui réprime le nationalisme blanc et d’autres menaces nationales. Malheureusement, le Canada a également besoin de plus de refuges pour les femmes et les enfants qui fuient la violence familiale, ainsi que pour les personnes 2ELGBTQI+. Il doit aussi retirer les armes à feu des personnes commettant ces actes de violence grâce à des contrôles efficaces des antécédents des propriétaires d’armes à feu.

Chers collègues, le Canada est un pays très diversifié. Nous savons tous que les besoins dans les régions rurales du pays ne sont pas forcément les mêmes que dans les régions urbaines. Les contrôleurs des armes à feu ont un rôle déterminant à jouer pour combler le fossé entre les régions rurales et urbaines. Ce sont eux qui sont chargés de mettre en œuvre sur le terrain une grande partie des aspects de cette mesure législative, et c’est là que, selon moi, réside l’une des principales lacunes.

Les contrôleurs des armes à feu de chaque province et territoire devraient avoir l’autorité législative, le pouvoir discrétionnaire et les outils nécessaires pour adapter la mise en œuvre de ce projet de loi dans leurs administrations respectives. Ils savent comment travailler avec les municipalités, tant rurales qu’urbaines.

Il y a tout juste deux semaines, dans la province de Saskatchewan, le gouvernement a signé un protocole d’entente avec la Nation métisse de la Saskatchewan pour promouvoir la sécurité dans le maniement des armes à feu au moyen de l’éducation. Le contrôleur des armes à feu de la Saskatchewan, Robert Frenerg, et la contrôleuse des armes à feu de l’Alberta, Mme Teri Bryant, ont démontré leur efficacité à créer les changements nécessaires par le dialogue, l’engagement des parties prenantes et l’éducation du public. Ils sont des modèles d’excellence et pourtant, malgré leurs efforts désespérés, ils n’ont pas été en mesure d’apporter la moindre contribution à la mesure législative.

Je veux être bien clair : je crois que le contrôleur des armes à feu de la Saskatchewan adopte une approche professionnelle, positive, pragmatique et proactive et que le pays en entier devrait prendre exemple sur lui.

Disons-le sans détour : la sécurité en matière d’armes à feu passe par l’application des lois, et l’application des lois liées aux armes à feu passe directement par les ressources financières nécessaires et les consultations en bonne et due forme avec les personnes touchées par les mesures législatives. Nous avons entendu bien peu de choses jusqu’à maintenant sur les modalités de financement pour couvrir le coût de la mise en œuvre et de l’application de la loi. Sans financement additionnel et réservé, les services de police municipaux et provinciaux, qui souffrent de sous-financement chronique, n’arriveront pas à faire appliquer la loi.

La commissaire adjointe de la Division F de la GRC en Saskatchewan, Rhonda Blackmore, affirme qu’il faudrait 20 millions de dollars seulement pour maintenir les services actuels dans la province. Un problème de recrutement afflige tous les services de police du Canada.

J’ai déjà expliqué que le projet de loi C-21 va à l’encontre des droits ancestraux ou issus de traités. J’ajouterai seulement que les tribunaux ont mis le gouvernement en garde contre l’idée d’utiliser le système de justice pour régler les problèmes.

Dans l’arrêt Delgamuukw de 1997, la Cour suprême du Canada a expressément dit au gouvernement du Canada de collaborer proactivement et de bonne foi avec les Premières Nations. Je me rappelle les remontrances du juge en chef Lamer. Je le paraphrase, mais il a dit qu’il ne fallait pas constamment retourner devant les tribunaux à la recherche d’une solution. Les tribunaux n’ont pas les outils dont vous avez besoin pour trouver la solution, disait-il. Les problèmes nécessitent des solutions politiques que l’on peut uniquement trouver dans un forum politique, autrement dit par la consultation, le dialogue constructif et une culture de la résolution de problèmes.

Les Premières Nations, les Métis et les Inuits n’ont pas été consultés à propos de ce projet de loi. Si aucune consultation digne de ce nom n’a eu lieu, comment pouvons-nous évaluer la valeur du projet de loi et, à plus forte raison, comment pouvons-nous l’appuyer? Ma pire inquiétude, c’est qu’en adoptant de ce projet de loi, le Sénat souscrive à l’idée que la majorité peut exercer sa tyrannie sur la minorité en adoptant des projets de loi. Actuellement, cette enceinte est le dernier bastion pour protéger les droits des Autochtones. Je pose la question : si nous ne les protégeons pas maintenant, quand le ferons-nous? Si ce n’est pas vous qui le faites, sénateurs, qui le fera?

Des droits qui ne sont pas respectés, qui ne sont pas rendus effectifs et qui ne sont pas mis en œuvre n’ont en fait aucune valeur. Au moment du vote, saisissez l’occasion de montrer aux Canadiens que le Sénat a le plus grand respect pour la Constitution du Canada tandis que d’autres n’ont pas ce respect apparemment.

L’un des rôles fondamentaux du Sénat est de protéger les minorités contre la tyrannie de la majorité. Je vous prie de vous montrer à la hauteur de votre devoir. Le seul moyen efficace de faire pression sur le Cabinet consiste à rejeter ce projet de loi. Vous avez le pouvoir d’utiliser cet outil maintenant.

Il reste moins de trois ans de mandat au gouvernement actuel. C’est assez de temps pour remédier à ces défauts et pour créer la loi dont le Canada a réellement besoin. Il nous faut une loi qui soit élaborée dans le respect de la Constitution et qui intègre nécessairement tous les conseils, toutes les informations et tous les outils disponibles.

Nous avons entendu les explications du gouvernement, mais pas les raisons pour lesquelles il néglige sa responsabilité. Pourquoi? Parce qu’il n’existe ni justification ni excuse valable pour enfreindre la Constitution de la manière dont on l’a fait lors de l’élaboration de ce projet de loi. Le moyen le plus efficace de faire réagir le gouvernement à ces omissions et à ces violations de la Constitution, c’est de rejeter ce projet de loi.

Chers collègues, pour que le modèle canadien du fédéralisme fonctionne, les principes de collaboration, de coopération et de compromis sont nécessaires. Les dirigeants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux doivent faire preuve de sagesse politique. Si l’un de ces gouvernements crée des obstacles à une relation constructive, il en résultera une entrave à la sécurité des citoyens canadiens.

Dans sa forme actuelle, ce projet de loi, premièrement, n’est pas fondé sur une consultation sérieuse des détenteurs de droits légitimes, y compris les droits issus de traités, les droits des Autochtones et les droits de la personne. Deuxièmement, il n’est pas fondé sur une consultation sérieuse de ceux qui ont un problème légitime de sécurité sur leur lieu de travail. Troisièmement, il n’est pas fondé sur une consultation sérieuse des personnes chargées de l’application de la loi dans chaque province et chaque territoire, en particulier les contrôleurs des armes à feu. Quatrièmement, il n’est pas fondé sur la capacité à cibler les armes qui sont à l’origine des crimes commis avec des armes à feu, c’est-à-dire les armes illégales qui franchissent la frontière du Canada. Cinquièmement, il ne repose pas sur des mesures de sensibilisation et d’éducation qui établissent ce que veulent les Canadiens, à savoir la réduction de la criminalité et la sécurité personnelle. Sixièmement, il ne prévoit pas de financement adéquat pour permettre une application efficace de la loi.

Est-ce que je crois que le projet de loi C-21 peut être corrigé? Oui. Est-ce que je crois que le projet de loi C-21 doit être corrigé? Oui. Est-ce que je crois qu’en tant que Chambre de second examen objectif, il est de notre responsabilité de résoudre l’incongruité entre ce qui est offert et ce qui est nécessaire? Oui.

Si les défauts fondamentaux du projet de loi C-21 étaient corrigés, j’en serais le champion. Cependant, le Canada n’a pas besoin et ne bénéficie pas d’une loi basée sur des promesses lénifiantes selon lesquelles c’est le mieux que l’on puisse faire, que si l’on adopte ce projet de loi, les choses s’amélioreront, ni sur des promesses de programmes et de politiques qui n’existent pas encore.

Chers collègues, ne fuyons pas notre responsabilité sur cette question. J’appuie les lois qui favorisent la sécurité publique, mais je ne peux pas appuyer ce projet de loi en particulier. Je voterai contre le projet de loi C-21 et je vous invite à faire de même. Merci.

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu). Je tiens à souligner qu’aujourd’hui, je m’adresse à vous depuis le territoire non cédé de la nation algonquine anishinabe.

Chers collègues, je crois que nous partageons la même conception de l’urgence de s’attaquer au problème croissant des armes à feu illégales qui sont en circulation au Canada, notamment pour les cas de violence entre partenaires intimes qui impliquent ces armes dangereuses. Mes observations d’aujourd’hui concernent les ramifications particulières de certains articles du projet de loi C-21. Ce n’est pas une critique de l’objectif général du projet de loi.

En tant qu’Inuite, je comprends parfaitement l’impact de la loi fédérale sur les communautés. Qu’elle vise à affaiblir l’identité autochtone ou qu’elle soit pleine de bonnes intentions, lorsqu’elle est élaborée sans tenir compte de notre situation particulière, la loi présente souvent des risques pour le Nord et les peuples autochtones. Ce n’est pas surprenant que ces préoccupations soient évidentes dans la structure du projet de loi C-21.

Ce projet de loi suscite trois grandes préoccupations : premièrement, le rôle central du contrôleur des armes à feu et son principal lieu de résidence qui est situé à l’extérieur du territoire qu’il représente. Deuxièmement, l’absence de consultation sérieuse. Troisièmement, les dispositions relatives aux signalements.

En 1972, le chef Dan George a déclaré ceci :

Que personne ne l’oublie. Nous sommes un peuple qui dispose de droits spéciaux qui nous sont garantis par des promesses et des traités. Nous ne quémandons pas ces droits et nous ne vous en remercions pas. Nous ne vous remercions pas pour ces droits parce que nous les avons payés, et le prix que nous avons payé était exorbitant. Nous avons payé pour eux avec notre culture, notre dignité et notre amour-propre. Nous avons payé jusqu’à ce que nous devenions une race battue, pauvre et conquise.

Il est paradoxal que mon plaidoyer initial ne vise pas à obtenir un traitement spécial, mais plutôt l’égalité dans le but d’accorder au Yukon, aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut les mêmes droits que les 10 provinces canadiennes. Le Cadre stratégique pour l’Arctique et le Nord du Canada souligne à juste titre l’écart de longue date qui existe entre l’accès des habitants de l’Arctique et du Nord, en particulier les communautés autochtones, aux services, aux possibilités et au niveau de vie, et celui des autres Canadiens.

Le projet de loi C-21 est un exemple frappant de cet écart. Par exemple, les contrôleurs des armes à feu, ou CAF, pour le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut sont situés respectivement à Surrey, en Colombie-Britannique, à Edmonton, en Alberta, et à Winnipeg, au Manitoba. Cet arrangement contraste fortement avec la structure provinciale, où chaque CAF mène ses activités dans sa province respective. Cet écart fait ressortir le fait que les trois CAF territoriaux sont situés dans le Sud, ce qui amplifie le manque continu d’accès et de représentation équitables pour les communautés de l’Arctique et du Nord, en particulier les Autochtones.

Le 6 novembre 2023, Natan Obed, président de l’Inuit Tapiriit Kanatami, a déclaré ceci devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants :

Les dispositions de l’article 70.3, qui prévoient la délivrance de permis assortis de conditions n’offrent aucune garantie, car elles relèvent plutôt du pouvoir discrétionnaire du contrôleur des armes à feu. Ce n’est pas une mesure équitable, en particulier si l’on considère les obstacles géographiques et logistiques auxquels les Inuits sont confrontés pour avoir accès aux contrôleurs des armes à feu. Le contrôleur responsable du Nunavut, par exemple, est à Winnipeg. Cette distance est plus que géographique, elle est aussi culturelle et pratique. Nous devons nous demander si ces fonctionnaires sont en mesure d’évaluer et de comprendre correctement les circonstances et les besoins particuliers des chasseurs inuits [...]

Ma tentative de proposer un amendement en comité, qui obligerait les contrôleurs des armes à feu à résider dans leur territoire désigné et à y exercer leurs activités, s’est malheureusement soldée par un échec. En tant que législateurs responsables d’un second examen objectif, il semble essentiel que nous nous attaquions aux inégalités et aux disparités qui persistent au Canada.

Comment se fait-il que le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut soient assujettis à la même législation que le reste du Canada, mais qu’ils n’aient pas un accès comparable aux services et au soutien offerts aux 10 provinces? Je souligne que, par la suite, le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, a écrit une lettre aux trois premiers ministres territoriaux concernant la nomination éventuelle de contrôleurs des armes à feu qui résident dans chaque territoire. Bien que cela soit prometteur, je pense que nous avons l’obligation morale et légale de nommer immédiatement des contrôleurs des armes à feu dans les trois territoires. Toute autre mesure corrective est inacceptable et représente un manquement aux devoirs du Canada.

Deuxièmement, je souligne une fois de plus l’absence continue de consultations sérieuses auprès des peuples autochtones, ce qui fait écho à une tendance alarmante et récurrente évidente observée dans le cadre de projets de loi antérieurs. Cette répétition persiste malgré l’existence de l’article 35 de la Constitution, de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, des appels à l’action énoncés dans la Commission de vérité et réconciliation et de l’engagement constant du Canada envers la réconciliation, y compris l’affirmation d’une véritable consultation.

Je remarque que les Autochtones constituent 49,6 % de la population des Territoires du Nord-Ouest, 85,9 % de celle du Nunavut et 22,3 % de celle du Yukon. Le manque de consultation est particulièrement préoccupant, car le droit des peuples autochtones de chasser est affirmé à l’article 35 de la Constitution ainsi que dans les traités historiques et modernes et les accords de revendications territoriales. Voici ce qu’on peut lire dans un article de périodique publié en 1974, intitulé « Inuit Hunting Rights in the Northwest Territories »:

La culture et l’identité inuites sont fondées sur une relation intime avec les terres et les cours d’eau que les Inuits ont traditionnellement occupés et utilisés. La chasse pour se nourrir et se vêtir fait partie de leur culture traditionnelle, qui continue d’exister. Leurs terres et leurs cours d’eau font partie intégrante de leur être. Peu de Canadiens se rendent compte qu’en une seule vie, de nombreux Inuits subissent une énorme transformation culturelle, passant d’une communauté tribale pratiquant la cueillette de nourriture à une société industrielle [...]

Par conséquent, la préservation des droits de chasse des Inuits a pour effet de renforcer leur identité culturelle dans une société en mutation rapide. Les avantages économiques actuels de la chasse seront de plus en plus accessoires par rapport aux aspects culturels, enracinés depuis des milliers d’années en tant que peuple de chasseurs. La protection des droits de chasse des Inuits peut être considérée comme un mécanisme de préservation de la culture inuite, sans coût pour le reste de la société canadienne.

Cette affirmation est tout aussi vraie 49 ans plus tard, alors que la chasse de subsistance est au cœur non seulement de notre identité, mais aussi de notre survie. La chasse, et donc les armes à feu, restent essentielles pour nous permettre de faire face à l’insécurité alimentaire et au coût élevé de la vie. Les armes à feu sont également une nécessité pour assurer notre sécurité face aux animaux prédateurs à l’intérieur et à l’extérieur de nos communautés.

Voici ce qu’a déclaré M. Paul Irngaut, vice-président de Nunavut Tunngavik Inc., le 8 novembre 2023 :

Le projet de loi n’a pas fait l’objet d’une consultation suffisante. Nous croyons savoir que l’Inuit Tapiriit Kanatami, l’organisation nationale inuite communément appelée ITK, s’est fait expliquer la plus récente version du projet de loi peu avant sa déposition en mai dernier. Cependant, ni ITK ni NTI n’ont été pleinement consultés sur le libellé dudit projet de loi ou sur les répercussions qu’il pourrait avoir.

En outre, je réitère le point de vue exprimé par mon collègue, le sénateur Don Plett, dans cette enceinte. Voici ce qu’a déclaré M. David, conseiller juridique de l’Inuit Tapariit Kanatami, lors de son témoignage du 6 novembre 2023 concernant la consultation sur le projet de loi C-21 :

Pour dire les choses simplement, il n’y a pas eu de consultations. Le ministre avait communiqué avec nous et nous avions fait une demande, mais cette consultation n’a jamais eu lieu. Nous attendons toujours.

Je partage ce sentiment, car je suis toujours en attente moi aussi — j’attends que le Canada honore et respecte ses engagements envers les peuples autochtones. Malgré mon rôle de sénatrice, et malgré toutes les possibilités et tous les privilèges dont je jouis en tant que parlementaire, je dois constamment composer avec le fait que je suis une femme inuite dans un lieu dont l’histoire a profondément influencé et façonné d’une manière incommensurable, néfaste et profondément marquante non seulement ma propre personne, mais aussi les membres de ma famille, ma collectivité et des générations d’Inuits.

Les parlementaires devraient être très inquiets quand le Canada adopte une après l’autre des mesures législatives sans mener des consultations sérieuses, malgré que des cadres cruciaux sont prévus à cet effet, comme la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, l’article 35 de la Constitution et les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation, en plus de l’engagement explicite du gouvernement fédéral envers la réconciliation. Ce mépris persistant de la tenue de consultations en bonne et due forme mine l’intégrité du processus législatif. De plus, cela va à l’encontre des promesses du Canada de respecter les droits et la souveraineté des Autochtones et de participer à un véritable processus de réconciliation. Un tel comportement perpétue les inégalités systémiques, mine la confiance et fait fi de la voix et des droits des peuples autochtones, entravant les progrès de la nation vers une véritable réconciliation et la gouvernance équitable.

Cela m’amène aux nouvelles dispositions relatives aux situations d’urgence qui permettraient à toute personne de faire une demande ex parte à un juge de la Cour provinciale de rendre une ordonnance pour la perquisition et la saisie des armes à feu, avec ou sans mandat.

Selon M. Thurley, chercheur en matière d’armes à feu et spécialiste des politiques :

Les [dispositions de signalement d’urgence proposées], irréfléchies, posent aussi problème. En vertu du régime actuel de délivrance de permis au Canada, les forces policières et les juges ont déjà le pouvoir de retirer les armes à feu et de révoquer les permis de ceux qui représentent une menace. Les nouvelles dispositions ne prévoient aucune exigence pour tenir compte des droits des Autochtones de chasser; pour qu’un lien existe entre le plaignant et l’accusé; ou pour que l’accusé témoigne devant un tribunal. Les Autochtones sont touchés de façon disproportionnelle par le système de justice pénale et sont ceux qui dépendent le plus des armes à feu pour leur subsistance. Les garde-fous intégrés de la loi actuelle [...] seront minés. Les conséquences seront réelles dans les régions où les gens chassent pour nourrir leurs familles.

M. Thurley a également soulevé une préoccupation cruciale : l’anonymat des plaintes et la mise sous scellés des dossiers judiciaires pourraient rendre le système vulnérable à des plaintes fausses, insignifiantes ou vexatoires à l’encontre de personnalités importantes, y compris des agents des forces de l’ordre et des militaires. Pour les Canadiens autochtones, déjà surreprésentés dans le système judiciaire, il pourrait s’avérer exceptionnellement difficile de s’y retrouver dans la procédure de récupération des armes à feu injustement confisquées.

Selon Natan Obed, président d’ITK :

La façon de signaler un problème est un autre exemple d’une mesure équilibrée qui crée un mécanisme qui pourrait perturber de façon disproportionnée les ménages inuits. Les Inuits vivent souvent dans des logements multigénérationnels. Ainsi, la saisie d’armes à feu pourrait avoir des répercussions imprévues sur des familles entières, et non seulement sur les personnes visées par les dispositions du projet de loi. La nature confidentielle du processus de demande et la possibilité que la personne visée par la demande ou sa famille ne soit même pas au courant de la demande pourraient également se traduire par la prise de mesures sans préavis suffisant ou sans compréhension de la situation familiale. D’un autre côté, l’accès limité à la justice auquel sont confrontés les Inuits signifie aussi que les demandes elles-mêmes seraient probablement freinées par le simple fait que les Inuits pourraient ne pas être en mesure de présenter une demande.

Dans les Territoires du Nord-Ouest, 21 des 33 collectivités sont accessibles uniquement par avion, et au Nunavut, les 25 collectivités sont seulement accessibles par avion. En raison de l’éloignement et du manque d’infrastructures dans ces régions, sur une grande partie du territoire, il faut faire venir par avion des juges, des avocats, des procureurs de la Couronne, des gens de l’aide juridique et du personnel des tribunaux pour la tenue des procès. Ces séances ont lieu tous les deux ou trois mois, mais elles peuvent être reportées ou annulées en raison de conditions météorologiques défavorables ou de circonstances imprévues.

Pour les peuples autochtones de ces territoires, l’accessibilité demeure restreinte, non seulement à cause de la nécessité de faire venir les tribunaux par avion, mais aussi parce que, dans la majorité des cas, on fait appel à des avocats des services d’aide juridique.

Au sujet des dispositions de signalement des comportements alarmants, M. Will David a déclaré :

Je suppose que le régime lui-même présume qu’il y a une force de police pour l’appliquer. Il présume également qu’il y a des tribunaux provinciaux efficaces dans toutes les communautés à tout moment. La question de savoir si une personne qui demande une ordonnance dispose des moyens nécessaires pour le faire pose un vrai problème. Du point de vue de la prévention de la violence, le régime d’avertissement proprement dit peut ne pas être entièrement utile dans toutes les communautés de l’Inuit Nunangat. En outre, il permet de demander une ordonnance ex parte, de sorte que la police pourrait, là où le régime d’avertissement existe, se présenter à l’improviste pour saisir les armes à feu de personnes qui ne savent pas que la police se présente pour saisir ces armes à feu.

L’ensemble du système semble conçu pour fonctionner correctement dans les régions où il existe de multiples infrastructures juridiques et de mise en œuvre. Le problème ici est que nous n’avons pas l’impression qu’il existe d’infrastructures suffisantes pour rendre les dispositions efficaces, que ce soit pour la sécurité de la communauté ou pour l’équilibre délicat que la législation cherche à établir entre, essentiellement, les détenteurs et les titulaires de droits au sens de l’article 35 et les victimes ou les victimes potentielles de violence conjugale.

Pour ces raisons, les dispositions sur le pouvoir d’intervention en cas de comportement problématique amènent des enjeux de logistique concrets dans les trois territoires, notamment en raison du manque de consultations significatives et du fait qu’aucun amendement n’a été adopté en dépit des témoignages entendus au Comité permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Je suis désolée, sénatrice. Le temps pour le débat est terminé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

Oui.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Malgré les efforts récents du ministre LeBlanc pour corriger les lacunes du projet de loi C-21 concernant les peuples autochtones et le Nord canadien, mes attentes demeurent basses face à l’incertitude relative à la volonté de mettre en place des mesures utiles pour combler l’écart en matière de soutien aux Autochtones et de soutien dans les trois territoires, ainsi que l’écart d’une province ou d’un territoire à l’autre. Il est essentiel que le Canada reconnaisse que les peuples autochtones doivent être des acteurs du processus législatif, pas de simples sujets.

Selon Natan Obed, président de l’Inuit Tapiriit Kanatami :

Les droits affirmés dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ne peuvent être mis en œuvre que si on leur donne le caractère de droits légaux et que leur respect est appliqué en conséquence. Les droits de la personne des Autochtones ne sont pas des droits de deuxième ordre et ils méritent d’être protégés au même titre que les droits des autres Canadiens.

Quyanainni. Mahsi’cho. Koana. Merci.

L’honorable Mary Coyle [ + ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui sur les terres non cédées de la Nation algonquine anishinaabe à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-21, qui vise à renforcer les dispositions législatives et autres mesures nationales actuelles en matière de contrôle des armes à feu afin de bâtir un Canada plus sûr pour tous.

Chers collègues, dimanche dernier a marqué la fin des 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe, et la semaine dernière, nous avons souligné la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes. Or, ce soir, nous examinons un projet de loi destiné à prévenir la violence.

Cette mesure législative importante que nous attendons depuis longtemps a plusieurs objectifs. Le projet de loi C-21 vise à réduire et à prévenir la violence liée aux armes à feu que nous observons dans les villes et qui est souvent le fait de gangs; il vise à prévenir d’autres tragédies de masse, comme celle qui a eu lieu dans ma province en 2020 ainsi que les meurtres commis à la mosquée de Québec et à l’École polytechnique.

Le projet de loi C-21 vise à lutter contre la violence à l’égard des femmes, ainsi que contre toute forme de violence fondée sur le sexe et de violence familiale en milieu rural et urbain. Enfin, il vise à réduire les actes d’automutilation et le suicide.

Nous regardons souvent de haut nos voisins américains maniaques des armes à feu. Aux États-Unis, 400 millions d’armes à feu sont détenues par des civils, et les actes de violence commis à l’aide d’armes à feu et les fusillades ont pris des proportions épidémiques. Pourtant, chers collègues, le Canada a un des taux de possession d’armes à feu les plus élevés de tous les pays industrialisés. Nous sommes au 4e rang des 38 pays de l’OCDE pour ce qui est du taux de décès par arme à feu, et nous avons le 3e taux d’homicide commis à l’aide d’armes à feu des pays populeux à revenu élevé, après les États-Unis et le Chili.

Le projet de loi C-21 — et je vais expliquer ce qu’il fera — impose un moratoire national sur les armes de poing. Il ne s’agit pas d’une interdiction. Les armes de poing détenues en toute légalité ne seront pas confisquées. Le nombre d’armes de poing détenues légalement est passé de 360 000 en 2006 à plus de 1 million, réparties entre 275 000 Canadiens.

Le projet de loi ajoute également une nouvelle définition prospective — et non pas rétrospective — qui inclut les caractéristiques propres aux armes d’assaut. Les chasseurs ne vont pas perdre leurs fusils. On estime que 2,5 millions de Canadiens possèdent entre 7 et 8 millions de carabines et de fusils de chasse.

Le projet de loi C-21 ajoute de nouvelles dispositions sur l’intervention rapide qui visent à réduire et à prévenir la violence en milieu familial et entre partenaires intimes, l’automutilation et le suicide.

Il contient également des mesures pour renforcer les contrôles à la frontière afin de lutter contre le trafic d’armes à feu et d’exiger que les personnes qui importent des munitions soient titulaires d’un permis d’armes à feu en bonne et due forme.

Il comprend aussi des mesures portant sur les armes à feu fabriquées illégalement au moyen d’imprimantes 3D, qu’on appelle aussi les « armes fantômes ». Il ajoute des infractions liées aux armes à feu et impose des peines plus sévères.

Chers collègues, on espère essentiellement qu’au fil du temps, les dispositions contenues dans ce projet de loi auront comme effet de réduire le nombre d’armes à feu qui circulent au Canada, ou du moins d’empêcher le nombre d’augmenter. On pense ainsi que le risque de décès lié aux armes à feu et les préjudices subis par la société diminueront.

Ce sont les prémisses invoquées. Le sénateur Yussuff nous a déjà fourni beaucoup plus de détails sur le projet de loi et ses principaux éléments.

Malheureusement, certains de nos concitoyens ont été induits en erreur concernant certains aspects du projet de loi et quelques-unes des grandes questions relatives aux armes à feu, aux crimes liés aux armes à feu, aux dispositions législatives de contrôle des armes à feu et aux droits des propriétaires d’armes à feu au Canada.

Dans le cadre de mes observations d’aujourd’hui sur le projet de loi C-21, j’aimerais parler un peu de la mésinformation qui circule à ce sujet et qui est parfois même de la désinformation répandue délibérément. Il est important de comprendre les puissantes influences qui agissent. Nous voyons des cas de mésinformation et de désinformation en lien avec d’autres enjeux de société importants, des enjeux dont nous en avons discuté dans cette enceinte. Je pense, par exemple, à la COVID-19, aux changements climatiques et, plus récemment, aux droits des enfants et des jeunes LGBTQ. Ce sont des problèmes qui menacent notre démocratie.

C’est très important que tous les Canadiens comprennent les paroles du juge Peter Cory, comme les cite R. Blake Brown dans son article intitulé « Firearm ‘Rights’ in Canada: Law and History in the Debates over Gun Control »:

Contrairement à la Constitution américaine, la Constitution canadienne ne garantit pas le droit de porter des armes. En effet, la plupart des Canadiens préfèrent la tranquillité d’esprit et le sens de la sécurité qui découlent du fait de savoir que la possession d’une arme automatique est interdite.

Certaines informations erronées laissent entendre que le projet de loi C-21 interdirait les armes de chasse et qu’il pourrait même interdire toutes les armes à feu.

Rick Igercich, président national de l’Association canadienne pour les armes à feu, a dit ceci à propos du projet de loi C-21 :

Ça pourrait être l’une des pires attaques de l’histoire contre les droits, les libertés, le gagne-pain et la propriété des Canadiens.

Même si la Coalition canadienne pour le droit aux armes à feu affirme que ce sont en fait des lobbyistes anti-armes qui répandent de fausses rumeurs sur l’implication des Américains dans les lobbies canadiens des armes à feu, deux articles récents de Bloomberg établissent des liens inquiétants avec le gouvernement américain, l’industrie américaine des armes à feu, la NRA et d’autres lobbies américains des armes à feu et leurs homologues dans des pays tels que le Canada. Dans le premier article de Bloomberg, intitulé « La politique de la NRA a transformé la culture des armes au Canada — et les fusillades ont augmenté de 869 % », les auteurs écrivent que « la NRA a aidé l’Association des sports de tir du Canada à mettre en place une branche politique pour lutter contre l’élargissement de la réglementation ».

À l’époque, il était question du registre des armes d’épaule.

L’organisation américaine a également formé les membres du groupe canadien à la mobilisation communautaire afin de promouvoir les candidats favorables aux armes à feu lors des élections de 2006.

Je continue de citer l’article de Bloomberg.

Au cours des 20 dernières années, le volume annuel des importations canadiennes d’armes à feu semi-automatiques de fabrication américaine a été multiplié par près de 10. Au cours de cette période, le nombre annuel de crimes a légèrement diminué, tandis que le nombre de crimes violents est demeuré relativement stable […] pourtant, les crimes impliquant une arme à feu ont plus que doublé […] et le nombre de fusillades a augmenté de 869 %, passant de 219 en 2003 à 2 123 en 2022. En janvier, le US Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives a révélé pour la première fois que, sur les quelque 25 000 armes à feu canadiennes utilisées pour commettre des crimes qu’il a retracées entre 2017 et 2021, le tiers d’entre elles avait été légalement importé des États-Unis.

L’article du Bloomberg poursuit sur la même voie :

La National Rifle Association affirme que sa « diplomatie discrète » fait d’elle le promoteur des armes à feu le plus influent au monde. Lors d’une réunion de son conseil d’administration en janvier 2021, le directeur des affaires internationales de l’association, James Baranowski, a mentionné le débat en cours au Canada au sujet des politiques de M. Trudeau. Il a déclaré que les efforts de l’association sont souvent « dans l’ombre », mais qu’on peut voir et entendre les résultats dans le monde entier.

Dans le second article de Bloomberg intitulé « US Gun Exports Surge, Fueling Violence Around the World », les auteurs indiquent que :

Pour alimenter sa poussée à l’étranger, l’industrie états‑unienne des armes à feu, par l’intermédiaire de ses alliés politiques, a réussi à affaiblir les lois sur le contrôle des armes à feu et à lancer des campagnes en faveur des armes à feu dans d’autres pays.

Ils affirment que le gouvernement états-unien a contribué à porter les ventes internationales d’armes à feu à tir rapide à des niveaux record. Le Canada en est l’un des principaux clients.

Le département du Commerce des États-Unis a joué un rôle de catalyseur dans l’industrie des armes à feu, alors même que les tueries de masse aux États-Unis horrifient le monde entier et que les taux de criminalité par arme à feu augmentent dans de nombreux pays importateurs.

SIG Sauer, un exportateur d’armes à feu prospère basé aux États‑Unis, a fait don de centaines de milliers de dollars à la National Rifle Association of America et à la National Shooting Sports Foundation des États-Unis, et, en 2016, cette société a donné 100 000 $ à #GUNVOTE, un comité d’action politique qui a fortement appuyé l’ancien président Donald Trump.

Dans les médias canadiens, le magazine The Walrus a publié en septembre 2021 un article intitulé « Pourquoi les défenseurs des droits des armes s’associent à des groupes islamophobes ». L’article décrit comment Colin Saunders, qui était alors agent de terrain de la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu, est monté sur le podium lors d’un événement organisé sur la Colline du Parlement par la Coalition canadienne de combat, un groupe connu pour sa haine contre les musulmans. Il s’est levé et a déclaré : « Je suis fier de me tenir ici avec un groupe de vrais Canadiens qui défendent de vraies valeurs. » On a établi des liens entre les armes à feu et les tenants du suprémacisme blanc, tant au Canada qu’aux États-Unis. Le centre de droit Giffords a publié un article intéressant sur la façon dont les lois sur les armes à feu alimentent la haine armée, et le magazine Time a publié en 2022 un article intitulé « Comment les armes à feu rendent le suprémacisme blanc encore plus mortel ».

En 2019, dans le magazine Maclean’s, Pam Palmater a écrit que « les armes à feu et les tenants du suprémacisme blanc ne font pas bon ménage ».

Chers collègues, nous savons certes que les membres des organisations canadiennes de défense des armes à feu ne sont pas tous fortement influencés par le lobby américain des armes à feu et que la plupart des propriétaires d’armes à feu au Canada ne sont pas prédisposés à être membres de groupes haineux. Nous savons cependant que les groupes haineux et leurs membres ont tendance à posséder et à amasser des armes, ce qui les rend plus dangereux, et nous savons que des universitaires commencent à établir un lien entre les groupes d’extrême droite et de suprémacisme blanc et le lobby des armes à feu.

Nous savons également que certains membres du lobby canadien des armes à feu emploient des stratégies d’intimidation et de musellement similaires à celles qu’emploie la NRA contre ceux qui, au Canada, réclament le renforcement du contrôle des armes à feu. La Dre Najma Ahmed, qui a soigné certaines victimes de la fusillade de Toronto Danforth en 2018 et qui est membre de Médecins pour un meilleur contrôle des armes à feu, a été prise pour cible par la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu. Cette dernière a encouragé ses abonnés sur les réseaux sociaux à porter plainte contre la Dre Ahmed auprès de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario. On a également demandé à la Dre Ahmed de se mêler de ses affaires, ce qui a fait écho à ce que la NRA avait déclaré à l’American College of Physicians quelques mois plus tôt, après que celui-ci eut publié un document présentant la violence liée aux armes à feu comme un problème de santé publique.

R. Blake Brown, un éminent historien canadien en matière de contrôle des armes à feu, a déclaré ceci :

Dans les années 1970, il n’y avait pas beaucoup de groupes de défense des armes à feu au Canada. Il s’agissait surtout de groupes de chasseurs qui refusaient catégoriquement d’être étiquetés comme des lobbys. Or, les temps ont changé. Les Canadiens qui, dans les années 1970, rejetaient l’idée selon laquelle ils étaient d’une manière ou d’une autre affiliés à la NRA ou influencés par celle-ci sont aujourd’hui plus enclins à adopter certaines de ses idées.

Bien entendu, dans les années 1970, les médias sociaux n’existaient pas.

Chers collègues, tout dépend du type de société dans laquelle nous voulons vivre et que nous voulons laisser en héritage aux générations futures. Notre proximité avec les États-Unis et l’influence puissante des médias sociaux rendent notre travail de législateur et celui de tous ceux qui veulent un Canada à l’abri de la violence armée d’autant plus difficile et complexe. Nous savons que des pays comme l’Australie, le Royaume-Uni et le Japon ont mis en œuvre des mesures de contrôle des armes à feu plus complètes que celles du Canada et que ces pays ont enregistré des taux de décès liés aux armes à feu et de fusillades de masse inférieurs à ceux du Canada.

Le Royaume-Uni a interdit les armes de poing à la suite du massacre de l’école de Dunblane, en Écosse, en 1996; depuis, il n’y a eu aucune fusillade dans des écoles et une seule fusillade de masse dans ce pays.

Le projet de loi C-21 a été adopté sans amendement par le comité. Chers collègues, le projet de loi n’est pas parfait, mais je crois qu’il prend plusieurs mesures importantes pour répondre aux recommandations de la Commission des pertes massives de la Nouvelle-Écosse et de l’enquête du comté de Renfrew, ainsi qu’aux demandes des groupes de victimes de fusillades de masse : PolySeSouvient, Danforth Families for Safe Communities et le Centre culturel islamique de Québec.

Honorables sénateurs, en conclusion, j’appuie le projet de loi C-21 et ses mesures conçues pour protéger les Canadiens contre la violence liée aux armes à feu sous toutes ses formes. Chers collègues, après tout, la vie, chaque vie, est un cadeau précieux. Adoptons ce que je considère comme un projet de loi raisonnable sur le contrôle des armes à feu qui, comme le montrent les faits, est conçu pour protéger et sauver des vies. Honorables sénateurs, les Canadiens veulent un Canada plus sûr. Franchissons ce pas important tout en continuant à exiger que bien d’autres mesures soient prises. Merci, chers collègues. Wela’lioq.

L’honorable Donna Dasko [ + ]

Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu). Ce projet de loi apporte des modifications et des réformes substantielles en matière d’armes à feu au Code criminel et à la Loi sur les armes à feu. Le ministre de la Sécurité publique a présenté le projet de loi en première lecture le 30 mai 2022. Le projet de loi est arrivé au Sénat le 18 mai de cette année et a été envoyé au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants le 21 juin. Notre comité a organisé 12 réunions sur le projet de loi C-21 et a entendu 66 témoins.

Sous la direction de notre président, le sénateur Dean, le processus a été rigoureux et exhaustif. Nous avons bien examiné les sujets de préoccupation. Le comité a fait rapport du projet de loi sans proposer d’amendement, mais il a dressé une longue liste d’observations. J’estime que notre travail est terminé et qu’il a été bien fait. Les raisons qui sous-tendent ce projet de loi important sont les statistiques sur la criminalité ainsi que le nombre croissant d’armes à feu au Canada. Le 9 juin 2022, dans son discours de présentation du projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, le ministre Mendicino a cité un rapport de Statistique Canada datant de 2022 qui, selon ses propres mots, montre que :

La violence liée aux armes à feu a augmenté de 81 % depuis 2009. Le nombre d’homicides par arme à feu est en hausse. La violence liée aux armes de poing, en particulier, est en hausse et c’est le type d’arme à feu le plus employé pour commettre un homicide. Il est alarmant de constater que la violence familiale, la violence entre partenaires intimes et la violence fondée sur le sexe sont toutes en hausse en raison de la présence d’armes à feu et de la violence liée aux armes à feu.

D’autres parlent de l’augmentation du nombre d’armes à feu pour justifier les mesures prévues dans le projet de loi. Par exemple, dans son discours au Sénat, le sénateur Yussuff a parlé de l’augmentation de la prévalence des armes de poing au Canada. Entre 2010 et 2020, il a souligné que le nombre d’armes de poing a augmenté de 74 % : il y a désormais 1 million d’armes de poing détenues par environ 275 000 personnes au Canada.

Il y a une théorie au sujet de l’augmentation du nombre d’armes à feu, qui est la suivante : plus il y a d’armes à feu dans la société, plus il y a de préjudices liés aux armes à feu, et ces préjudices ne se limitent pas aux crimes commis avec des armes à feu et comprennent d’autres préjudices comme le suicide, la mauvaise utilisation des armes et les accidents. En corollaire à cette théorie, la réduction du nombre d’armes à feu réduira ces préjudices. Une diminution du nombre d’armes à feu signifie une diminution des préjudices.

Pour prouver cette théorie, il suffit de regarder ce qui se passe au sud de la frontière et de constater la quantité de meurtres et de décès attribuables à l’abondance des armes à feu et à l’idéologie de la possession d’armes à feu.

Au Canada, nous n’accepterons jamais la dystopie fondée sur les armes à feu que sont les États-Unis d’Amérique. Le projet de loi C-21 s’attaque à l’enjeu central qui consiste à limiter l’accessibilité des armes à feu de plusieurs façons. Il y a un gel des armes de poing. Le projet de loi C-21 mettrait en œuvre un gel national de la vente, de l’achat, du transfert et de l’importation d’armes de poing. Il ne s’agit pas de l’interdiction des armes de poing que certaines personnes réclamaient, et aucune des armes de poing détenues par des détenteurs de permis en bonne et due forme ne sera confisquée, mais, avec le temps, ce gel limitera le nombre d’armes de poing au pays.

Ensuite, il y a le problème des armes d’assaut. En 2020, par décret, le gouvernement a interdit une liste d’environ 1 500 marques et modèles d’armes à feu de type armes d’assaut. Le projet de loi ajoute une autre mesure pour lutter contre les armes d’assaut en interdisant l’entrée sur le marché canadien de futures armes à feu de type armes d’assaut. Là encore, cette approche ne va pas aussi loin que certains le souhaiteraient puisqu’elle ne concerne pas les autres marques et modèles actuellement détenus par les Canadiens. Le gouvernement propose de créer un conseil chargé de désigner les armes à feu qui pourraient alors faire l’objet d’une interdiction. Ainsi, à terme, ces mesures devraient contribuer à réduire le nombre d’armes à feu de type armes d’assaut au pays.

Il y a aussi les armes fantômes : les armes à feu ou les pièces d’armes à feu qui peuvent être fabriquées, qui ont proliféré ces dernières années. Le projet de loi C-21 créera de nouvelles infractions visant l’utilisation de l’impression 3D pour la fabrication et le trafic d’armes à feu et classera les armes fantômes et autres armes à feu fabriquées illégalement comme interdites.

Les dispositions relatives aux armes de poing, aux armes d’assaut et aux armes fantômes, si elles sont toutes mises en œuvre, limiteront à l’avenir le nombre d’armes à feu au pays.

Il y a deux autres parties du projet de loi qui sont extrêmement importantes. Le projet de loi C-21 répond également au problème de la violence entre partenaires intimes et de la violence fondée sur le sexe en instaurant des mesures législatives sur le pouvoir d’intervention en cas de comportement problématique et sur l’élargissement de la possibilité de révoquer les permis. Grâce à la nouvelle mesure sur le pouvoir d’intervention, n’importe qui pourra demander au tribunal de retirer pour un maximum de 30 jours les armes à feu d’une personne qui représente une menace pour elle‑même ou pour les autres. Il sera également possible d’empêcher la personne d’avoir des armes en sa possession pendant cinq ans au maximum s’il continue d’y avoir des motifs raisonnables de penser que la personne constitue une menace.

De plus, il serait possible de révoquer le permis d’arme à feu d’une personne dans les cas de violence familiale ou de harcèlement criminel où une ordonnance de protection a été émise contre un titulaire de permis ou lorsqu’une ordonnance de signalement est émise.

Le projet de loi C-21 compte de nombreuses autres mesures, mais ce sont celles qui comptent le plus pour moi.

Bien entendu, ce projet de loi est bien loin d’être parfait, et je dois dire que j’ai été surprise et très déçue de voir les graves faux pas commis par le gouvernement en cours de route. On nous a parlé la semaine dernière et aux réunions du comité du fait que les groupes autochtones et d’autres parties intéressées, tels que les contrôleurs d’armes à feu, n’ont pas été consultés adéquatement dans le cadre du processus de rédaction du projet de loi. On nous a parlé de problèmes non résolus, notamment ceux qui concernent les sports de tir à l’arme de poing. Beaucoup d’entre nous se souviennent que le gouvernement a présenté en novembre 2022 des amendements renfermant une longue liste d’armes à feu de style arme d’assaut qui devaient être prohibées. Cela a soulevé un tollé chez les chasseurs et les agriculteurs, qui affirmaient que les fusils de chasse figuraient également sur cette liste. Par conséquent, le gouvernement a fini par retirer cette liste qu’il avait proposée en février dernier. Cela a fait reculé les efforts en vue limiter les armes de style arme d’assaut dans ce pays.

Néanmoins, le projet de loi C-21 mérite tout à fait qu’on l’appuie. Je suis fort impressionnée par le très grand nombre de spécialistes, d’universitaires, de chercheurs en santé, de militants et d’organismes d’application de la loi qui appuient ce projet de loi. Mentionnons l’Association canadienne des médecins d’urgence, Médecins pour un meilleur contrôle des armes à feu, la Société canadienne de pédiatrie, la Coalition pour le contrôle des armes, Danforth Families for Safe Communities, les familles de Dawson, l’Association nationale Femmes et Droit, le Centre culturel islamique de Québec, PolySeSouvient, le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale et Les refuges pour femmes violentées au Canada. Ce ne sont là que quelques exemples des nombreux intervenants qui sont en faveur du projet de loi.

Par exemple, Wendy Cukier, de la Coalition pour le contrôle des armes à feu, qui représente plus de 200 organisations dans les domaines de la santé, de la prévention de la criminalité, du maintien de l’ordre et des droits des femmes, a déclaré : « Nous vous demandons d’adopter le projet de loi dans sa forme actuelle. »

La Dre Najma Ahmed, professeure de chirurgie et de traumatologie à l’Université de Toronto, qui s’exprimait au nom de Médecins canadiens pour un meilleur contrôle des armes à feu, a déclaré : « Le Canada a besoin du projet de loi C-21. Il sauvera des vies. »

Nathalie Provost, porte-parole de PolySeSouvient, un organisme qui représente les survivantes du féminicide du 6 décembre à l’École Polytechnique, a déclaré :

Nous vous exhortons aujourd’hui d’adopter le projet de loi C-21 sans amendement et le plus rapidement possible. C’est un bon projet de loi. Il n’est pas parfait ni complet, mais il gèle la vente des armes de poing et contribue à la protection des femmes contre les meurtres liés à la violence familiale. Il sauvera des vies.

Elle a aussi dit : « [...] on considère qu’il faut absolument adopter le projet de loi afin de pouvoir aller de l’avant. Pour nous, le projet de loi a beaucoup de valeur. »

La Dre Natasha Saunders, médecin à l’Hôpital des enfants et représentante de la Société canadienne de pédiatrie, a déclaré que « [l]a Société canadienne de pédiatrie appuie le projet de loi C-21 ».

Chers collègues, je souligne aussi que les représentants des forces de l’ordre appuient le projet de loi C-21. Je dois admettre que cela m’a surprise au début et que je m’attendais à davantage de critiques de leur part. Pourtant, le chef adjoint Bill Fordy, que d’autres ont mentionné plus tôt et qui représentait l’Association canadienne des chefs de police, ou ACCP, a dit à notre comité que :

L’ACCP soutient le projet de loi C-21 et estime que cette loi introduit des dispositions essentielles au Code criminel et à la Loi sur les armes à feu.

Il a ajouté :

[...] je crois que ce projet de loi est plus utile que nuisible. Je crois que le libellé plus ferme concernant les armes à feu prohibées est utile. Je crois que les efforts visant à diminuer la violence familiale et, comme l’a dit le témoin avant moi, le nombre de victimes de ces incidents, sont utiles.

Il s’agit du principal témoin représentant les forces de l’ordre que notre comité a entendu. Il représentait l’Association canadienne des chefs de police.

Des arguments similaires ont été présentés par d’autres témoins des forces de l’ordre, dont Fiona Wilson, cheffe de police adjointe du Service de police de Vancouver, qui a affirmé que le projet de loi était positif et donne aux policiers de nombreux outils supplémentaires.

À l’inverse, je pense que tous les sénateurs sont au courant de l’action des groupes bien organisés qui font un intense lobbying pour s’opposer au projet de loi. La sénatrice Coyle a mentionné quelques-uns de ces groupes.

En ce qui me concerne, j’ai compté plus de 2 000 lettres reçues depuis que le projet de loi a été renvoyé au Sénat, en mai. La vaste majorité de cette correspondance provient de groupes opposés au projet de loi. Leur présence se fait énormément sentir sur les médias sociaux.

Dans quelle mesure les points de vue de ces groupes sont-ils représentatifs? En fait, ils le sont assez peu. J’ai décidé de commander un sondage au sujet de certains volets clés du projet de loi. Réalisé à l’échelle nationale, le sondage nous apprend que la vaste majorité des Canadiens sont en fait favorables à un contrôle encore plus strict des armes à feu. Les chiffres sont sans équivoque : 73 % des Canadiens veulent un gel des ventes, des achats, du transport et de l’importation des armes de poing. De plus, 85 % des Canadiens sont pour que l’on empêche les armes à feu qualifiées d’armes d’assaut d’entrer sur le marché canadien.

Plus de 90 % des Canadiens appuient l’idée d’adopter des dispositions de signalement, qui permettent à un juge de délivrer une ordonnance pour que l’on puisse enlever les armes à feu à leur propriétaire s’il représente un danger pour lui-même ou pour les autres. Une proportion de 96 % des Canadiens est pour que la loi permette la confiscation du permis d’armes à feu d’une personne impliquée dans de la violence conjugale ou du harcèlement criminel.

Partout au pays, une majorité de Canadiens des deux sexes — surtout des femmes, mais aussi des hommes — et de toutes les catégories d’âge appuie ces quatre mesures. Chers collègues, ce ne sont pas les élites qui ont parlé, mais bien des Canadiens ordinaires.

Soyons très clairs. Les Canadiens disent oui à des mesures de contrôle plus strictes des armes à feu et oui aux dispositions clés du projet de loi C-21. En outre, en appuyant ce projet de loi, notre pays franchira une autre étape importante vers l’affranchissement de la culture destructrice des armes à feu et de la violence armée omniprésente chez nos voisins du Sud.

Chers collègues, je vais voter en faveur de ce projet de loi. J’espère que vous en ferez autant. Merci beaucoup.

Son Honneur la Présidente [ + ]

La sénatrice Batters a une question. Sénatrice Dasko, acceptez-vous de répondre à une question?

La sénatrice Dasko [ + ]

Oui.

L’honorable Denise Batters [ + ]

Merci. C’est au sujet du sondage dont vous avez parlé. Combien a-t-il coûté, et l’avez-vous payé à même votre budget sénatorial?

L’honorable Donna Dasko [ + ]

Je vous remercie de la question, sénatrice.

Le sondage a coûté 3 400 $. Je l’ai payé à même mon budget du Sénat. C’est le meilleur investissement de 3 400 $ que j’aie jamais fait. Je ne peux pas croire que vous pouvez consulter les Canadiens pour aussi peu que 3 400 $ au sujet d’un projet de loi comme celui‑ci. Cela vous permet de poser des questions substantielles. Quel que soit le résultat, je peux affirmer que ces 3 400 $ étaient une aubaine, sur tous les plans.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Son Honneur la Présidente [ + ]

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Son Honneur la Présidente [ + ]

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Son Honneur la Présidente [ + ]

À mon avis, les oui l’emportent.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Je vois deux sénateurs se lever. Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?

Conformément à l’article 7-4(5)c) du Règlement, le vote est reporté à 17 h 30, à la prochaine séance.

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