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LE SÉNAT — Le pensionnat autochtone de Kamloops

La découverte des restes d'enfants autochtones sur les lieux--Hommages

1 juin 2021


L’honorable Patti LaBoucane-Benson [ + ]

Honorables sénateurs, aujourd’hui, nous commémorons et pleurons collectivement la mort de 215 enfants autochtones découverts dans une fosse commune à l’extérieur d’un pensionnat, à Kamloops, en Colombie-Britannique.

Chers collègues, souvent, dans les cérémonies, les aînés autochtones nous rappellent que les enfants ne sont pas notre possession, mais plutôt un cadeau précieux du Créateur. Notre devoir sacré consiste à les aimer et à en prendre soin, à les protéger des préjudices et à les soutenir à toutes les étapes de leur vie.

La réalité, c’est que, pendant plus d’un siècle, 150 000 enfants autochtones ont été enlevés à leur famille et forcés de vivre dans des pensionnats exploités par l’Église et sanctionnés par la Loi sur les Indiens.

Non seulement cette pratique a privé les enfants de l’amour de leur famille, de leur langue et de leur identité, elle a privé les adultes de l’occasion d’accomplir leur devoir le plus sacré envers le Créateur : élever leurs enfants.

Aujourd’hui, nous reconnaissons la douleur et le traumatisme que la découverte de cette fosse commune fait revivre au peuple Tk’emlúps te Secwépemc ainsi qu’à d’autres peuples des Premières Nations et des communautés métisse et inuite au pays. Nous sommes conscients qu’il s’agit probablement d’une seule des nombreuses découvertes de fosses communes à venir. Nous sommes conscients que les enfants décédés étaient probablement terrifiés. S’ils étaient malades, ils ont probablement souffert dans la solitude. Ils ont quitté ce monde sans le réconfort de leurs parents, de leurs grands-parents, de leurs tantes et de leurs oncles.

Honorables sénateurs, il nous faut aussi saluer les enfants qui ont survécu. Un grand nombre d’entre nous ont entendu les souvenirs traumatiques de survivants contraints de creuser les tombes de leurs camarades de classe, de frères, de sœurs et de cousins, contraints de pleurer seuls la perte de leur famille. Les chuchotis de la violence à l’école, de la mort et du désespoir sont transmis d’une génération à l’autre.

Nous reconnaissons que ne pas informer les familles, laissées dans le doute de ce qui avait bien pu arriver à leurs enfants qui ne devaient jamais être revus chez eux, était tout à fait indigne. On les a privées de la tranquillité d’esprit qui leur aurait permis de faire leur deuil et d’accepter la disparition de leurs enfants. Le deuil et le sentiment de perte qui se transmettent d’une génération à l’autre au sein des familles autochtones restent ce qui est le plus lourd à porter dans ce traumatisme historique.

Le 1er juin marque le début du Mois national de l’histoire autochtone. Ce devrait être l’occasion de célébrer la culture, la langue, la résilience et la résistance des Autochtones. Au lieu de cela, nous nous retrouvons à chercher à prendre des nouvelles de nos amis et de notre famille, en espérant que leur chagrin et leur désespoir ne les emportent pas.

La découverte de ce qui reste des corps terrestres des enfants est un rappel brutal qu’il ne faut jamais oublier les enfants qui ont souffert et ceux qui sont morts dans les pensionnats, qu’il faut être plus attentifs à la façon dont ce traumatisme se manifeste dans les communautés, qu’il faut soutenir les initiatives communautaires de guérison des traumatismes historiques qui sont adaptées à la culture et qu’il faut favoriser les cérémonies qui nous aident à surmonter ce chagrin, cette perte et ce désespoir. Cela nous rappelle que nous avons tous un rôle à jouer dans la guérison et la réconciliation si nous voulons surmonter notre douleur collective. Hiy hiy.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition)

Honorables sénateurs, je prends aussi la parole au sujet de l’horrible découverte des restes de 215 enfants qui sont morts au pensionnat autochtone de Kamloops. Nous parlons d’enfants, honorables collègues : 215 vies précieuses ont pris fin beaucoup trop tôt. Toute vie humaine a une valeur intrinsèque, et je suis atterré par la découverte de ces 215 corps. Je suis consterné que les pensionnats autochtones constituent un chapitre bien réel et très sombre de l’histoire de notre pays, un sentiment que nous devrions tous partager.

Je ne pourrai jamais comprendre pleinement la douleur que vivent les survivants des pensionnats autochtones et les familles touchées.

Cette découverte nous rappelle que notre examen collectif du passé est un processus continu. Il ne suffit pas de chercher la vérité une fois; il faut le faire constamment. À mon avis, les excuses officielles que l’ancien premier ministre Stephen Harper a présentées aux survivants des pensionnats autochtones en 2008 représentaient une importante première étape pour jeter les bases du processus de réconciliation avec les peuples autochtones.

Puis, en 2015, le rapport final de la Commission de vérité et réconciliation a montré ce que les peuples autochtones savaient déjà : des milliers d’enfants autochtones ont perdu la vie à la suite de malnutrition, de maladies et de mauvais traitements dans les pensionnats du Canada.

Il pourrait y avoir jusqu’à 6 000 enfants qui sont morts dans ces pensionnats. Cela dit, la quantification des décès ne diminue en rien l’aspect tragique de ce lieu d’inhumation oublié à Kamloops. La découverte faite à Kamloops raconte une tragédie qui secoue tous les Canadiens en ce moment. Elle rappelle aussi des souvenirs douloureux aux personnes qui ont été directement touchées par le système des pensionnats autochtones.

En cherchant à faire la lumière sur notre passé, nous ne devons pas laisser l’espoir de nous réconcilier s’éteindre. Il faut continuer de faire face aux moments douloureux de notre histoire collective. Nous devons aux familles qui ont perdu des enfants par la faute du système des pensionnats autochtones et aux survivants de ces pensionnats de poursuivre nos efforts collectifs afin de raviver l’espoir dans l’avenir.

Au nom de l’opposition au Sénat, j’offre nos condoléances, nos pensées et nos prières aux personnes, aux familles et aux communautés autochtones qui souffrent et qui pleurent les disparus. Je me joins à tous mes collègues dans cette enceinte pour observer un moment de silence afin d’honorer la vie et de pleurer la mort de 215 enfants.

Prenons un moment pour honorer leur mémoire. J’espère que ce geste de respect sera source d’un modeste réconfort en cette période difficile. Merci.

L’honorable Dan Christmas [ + ]

Honorables sénateurs, c’est avec grande tristesse que j’interviens aujourd’hui pour parler de la tragédie incommensurable de la semaine dernière, c’est-à-dire la découverte des tombes des jeunes innocents qui ont péri dans le pensionnat indien de Kamloops en Colombie-Britannique.

Je prends la parole au nom du Groupe des sénateurs indépendants et je remercie le sénateur Woo de me donner l’occasion de le faire. Je vous assure que cela ne sera facile pour aucun d’entre nous. Je ne cherche pas à susciter la colère ou à désigner des coupables, mais je voudrais qu’en jetant un regard sur notre passé, nous prenions conscience des événements tragiques qui jalonnent notre histoire et qui ont façonné notre pays. Nous devons avoir le courage de regarder cette réalité en face.

Pensez aux 215 enfants : les 215 avenirs jamais réalisés, les 215 âmes qui auraient pu changer leur nation, voire le Canada, si leur vie avait été épargnée et si on avait respecté leurs droits et leurs libertés d’êtres humains dont la vie a une valeur égale à celle des autres.

Au lieu de cela, la politique publique de notre pays, soit la Loi sur les Indiens qui a été adoptée en 1876 par le Parlement où nous siégeons aujourd’hui, a fait en sorte que le Canada n’a jamais bénéficié de l’apport de ces personnes et ne les a pas valorisées.

Aujourd’hui, le Canada est balayé par un raz-de-marée de larmes, que nous devons laisser couler. Notre peuple, mon peuple et, oui, votre peuple — vu que c’est ce qu’il est et que c’est ce que nous sommes — sont accablés par le deuil et le chagrin. Nous pleurons la perte de nos bébés, de nos anges, de notre culture et de nos libertés, la rupture avec nos terres et nos traditions ainsi que la façon dont nous devons sans cesse nous battre pour convaincre le Canada qu’il doit comprendre, reconnaître et accepter qui nous sommes ainsi que les aspirations que nous continuons de vouloir réaliser.

Nous vous demandons instamment de comprendre que nous devons collaborer pour confirmer que, dans ce cas-ci, l’existence de cette politique a clairement coûté des vies — la vie de jeunes enfants sans défense et terrifiés. Pensez-y, chers collègues. Pensez à eux et rappelez-vous que tout le monde laisse une empreinte dans ce monde, peu importe sa taille. Soyons l’empreinte de ces enfants. Soyons leur voix.

Honorables sénateurs, je nous exhorte à agir et à informer le premier ministre et Marc Miller, ministre des Services aux Autochtones, que nous devons immédiatement accorder des fonds supplémentaires aux services actuels de soutien en santé mentale dans les communautés autochtones. Nous avons besoin de plus qu’une ligne d’aide téléphonique pour composer avec cette tragédie. À tout le moins, nous avons besoin de cercles de partage en ligne avec du soutien en santé mentale. Il s’agit du strict minimum.

Un auteur bien connu a dit que les larmes doivent se traduire en mots. À titre de sénateurs, versons ces larmes de douleur. Traduisons-les en mots et adoptons les mesures qui s’imposent pour mettre fin à ces pertes de vie horribles et tragiques directement attribuables à une politique gouvernementale que le Canada avait adoptée dans le passé.

Je pourrais évoquer au moins 215 bonnes raisons de prendre de telles mesures, de faire changer les choses, de rompre avec les pratiques passées et de nous employer à faire mieux. Les 215 âmes de ces petits anges et leur souvenir ne méritent rien de moins.

Wela’lioq.Merci.

L’honorable Scott Tannas [ + ]

Cette découverte est innommable. Pourtant, nous devons en parler.

Les voix de 215 petits anges se sont jointes au chœur des voix qui exhorte les Canadiens à chercher la vérité et à comprendre la monstrueuse tragédie qui s’est déroulée au Canada pendant des décennies. Des enfants ont été enlevés à leur famille et envoyés loin de leur milieu et bon nombre d’entre eux ne sont jamais revenus car ils sont morts apeurés et seuls, sans la présence de leur mère et de leur père pour les réconforter.

Le Canada ne sera jamais le pays que nous souhaitons tant que nous ne reconnaîtrons pas ce chapitre de notre histoire. Nous devons faire le nécessaire pour assurer la réconciliation.

Les héros de la Commission de vérité et réconciliation, ceux qui ont témoigné de la souffrance qu’ils ont vécue et ceux qui les ont écoutés avec courage, ont formulé des appels à l’action clairs dont les résultats sont mesurables.

Pour bon nombre de Canadiens, aujourd’hui est le premier jour de la marche vers la réconciliation. Des Canadiens de toutes les couches de la société et de toutes les confessions et origines raciales ont le cœur lourd, mais sont prêts à passer à l’action.

Que devons-nous faire? Ce soir, avant de m’endormir dans mon lit confortable et sécuritaire, dans ce pays riche et plein de promesses, je lirai les 94 appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Je vais en sélectionner un, et je m’emploierai à y donner suite. Quand ce sera fait, j’en choisirai un autre, et ainsi de suite. En tant que Canadien, c’est de cette façon que j’ai l’intention d’agir et de suivre la voie de l’honneur. C’est comme cela que j’honorerai les enfants perdus du pensionnat de Kamloops et les nombreux autres anges dont je crois que nous entendrons bientôt la voix. Merci.

L’honorable Jane Cordy [ + ]

Honorables sénateurs, je souhaite tout d’abord souligner que je participe au débat à partir de Mi’gma’ki, territoire ancestral du peuple mi’kmaq.

Je joins aujourd’hui ma voix à celle des gens qui ont déjà réagi à la tragique découverte faite la semaine dernière, celle des restes de 215 enfants, dont certains n’avaient que trois ans — trois ans à peine — et qui ont été enterrés dans des tombes anonymes sur le terrain de l’ancien pensionnat autochtone de Kamloops, en Colombie-Britannique.

Pour bon nombre d’entre nous, les atrocités qui se sont produites semblent impensables, surtout quand les personnes touchées sont les êtres les plus vulnérables de la société, les enfants. Pour beaucoup de membres des communautés des Premières Nations, métisses et inuites, cette nouvelle a toutefois rouvert une ancienne blessure qui n’était pas encore guérie. Les traumatismes et les souffrances que ces communautés ont subis ne sont pas qu’un sombre chapitre de notre histoire : il s’agit d’une réalité quotidienne et incarnée des peuples autochtones.

Honorables sénateurs, nous devons redoubler d’efforts pour remédier à ces torts grâce à des gestes concrets et durables. Il est particulièrement crucial que les personnes non autochtones participent activement à la réconciliation. Nous devons ménager un espace pour écouter les voix des populations des Premières Nations, métisses et inuites, mais écouter ne suffit pas, honorables sénateurs.

Nous devons reconnaître qu’il faut plus que des mots pour donner suite à la douleur que nous avons ressentie à la découverte de ces 215 enfants innocents qui ont été retirés à leur famille et ne sont jamais retournés chez eux. Le travail de la Commission de vérité et réconciliation trace la voie à suivre pour les prochaines étapes. Les gestes que nous poserons contribueront davantage à la vérité, à la guérison et à la réconciliation que des paroles ne pourraient le faire.

Honorables sénateurs, nous devons honorer la vie de ces 215 enfants et déplorer, comme le reste de la société, les circonstances de leur décès. Cependant, nous devons aussi assumer notre part de responsabilité et nous engager à faire le travail requis pour parvenir à une véritable réconciliation. J’abonde dans le sens des dirigeants autochtones nous exhortant à donner suite aux recommandations de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, y compris en fouillant tous les terrains des pensionnats autochtones pour nous assurer qu’on n’y trouve pas d’autres restes de personnes autochtones.

Au nom du Groupe progressiste du Sénat, j’offre mes sincères condoléances aux familles et aux communautés des 215 enfants trouvés en Colombie-Britannique, ainsi qu’à tous les Autochtones dont la vie a été touchée par les pensionnats autochtones. Nous vous voyons, nous vous entendons, et nous vous offrons notre soutien.

Honorables sénateurs, nous pouvons et devons faire mieux. Merci.

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