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Projet de loi relative à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

Rejet de la motion d'amendement

10 juin 2021


L’honorable Mary Jane McCallum [ - ]

Par conséquent, honorables sénateurs, je propose l’amendement suivant :

Que le projet de loi C-15 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié :

a) à la page 1, par substitution, au titre intégral, de ce qui suit :

« Loi de mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones »;

b) au préambule, à la page 3 :

(i) par substitution, à la ligne 3, de ce qui suit :

« de mettre en œuvre la Déclaration; »,

(ii) par substitution, à la ligne 25, de ce qui suit :

« mettre en œuvre la Déclaration; »;

c) à la page 4, par adjonction, après la ligne 25, de ce qui suit :

« Application à Sa Majesté

2.1 La présente loi lie Sa Majesté du chef du Canada. »;

d) à l’article 4, à la page 5 :

(i) par substitution, à la ligne 4, de ce qui suit :

« droits de la personne qui a force de loi en droit »,

(ii) par substitution, à la ligne 6, de ce qui suit :

« b) d’encadrer la mise en œuvre, en droit canadien, de la Déclaration par »,

(iii) par adjonction, après la ligne 7, de ce qui suit :

« c) de prévoir que la Déclaration doit servir de base à l’interprétation extensive et téléologique qui doit être faite des droits et liberté des peuples autochtones du Canada d’une part, y compris ceux énoncés aux articles 25 et 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, et des engagements pris à l’égard de ces peuples d’autre part. »;

e) à l’article 6, à la page 5, par substitution, à la ligne 15, de ce qui suit :

« de mettre en œuvre la Déclaration.

(1.1) Les consultations et la collaboration avec les peuples autochtones doivent être significatives et, dans le cadre de leur mise en œuvre, le ministre et les autres ministres fédéraux doivent :

a) tenir des consultations et collaborer avec des conseils, des gouvernements et d’autres entités autorisés à agir pour le compte d’un groupe, d’une collectivité ou d’un peuple autochtones titulaire des droits reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982;

b) adopter une approche spécifique à chaque groupe, collectivité ou peuple autochtones qui soit respectueuse de ses lois, traditions et méthodes. »;

f) à la page 6, par adjonction, après la ligne 11, de ce qui suit :

« Participation

6.1 Afin de garantir que les intéressés puissent participer efficacement et en temps voulu à l’élaboration du plan d’action prévu à l’article 6, le ministre doit, au plus tard soixante jours après la date de sanction de la présente loi, rendre public le processus par lequel il entend faire participer à l’élaboration et à la mise en œuvre du plan d’action certains groupes et personnes, notamment :

a) des conseils, des gouvernements et d’autres entités autorisés à agir pour le compte d’un groupe, d’une collectivité ou d’un peuple autochtones titulaire des droits reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982;

b) des organisations et des collectivités autochtones. ».

L’honorable Dennis Glen Patterson [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour débattre des amendements proposés par la sénatrice McCallum.

Tout d’abord, je tiens à la féliciter du travail qu’elle a fait et qu’elle continue de faire pour le compte des Autochtones. Sénatrice McCallum, je sais que nous ne nous entendons pas toujours sur les politiques, mais je respecte votre détermination à faire valoir les préoccupations des dirigeants autochtones et des détenteurs de droits, plus particulièrement ceux de la région que vous représentez.

Je sais que la sénatrice McCallum connaît mon point de vue sur ses amendements. Je conviens que des amendements importants doivent être apportés au projet de loi pour qu’il puisse faire ce qu’il est censé faire. Je pense que, dans la Chambre de second examen objectif, nous avons ce devoir, celui de poser des questions et de formuler des critiques constructives sur les projets de loi que la Chambre des communes nous demande d’étudier. Cependant, je pense que la sénatrice McCallum sait aussi que ma principale réserve à l’égard du projet de loi est qu’il est loin d’avoir fait l’objet de consultations appropriées et sérieuses. À mon avis, ce n’est pas quelque chose que nous pouvons ignorer.

Il est donc difficile pour moi d’appuyer des changements de fond au projet de loi sans d’abord avoir entendu l’opinion de gens comme les signataires des Traités nos 6, 7 et 8, l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador et le Conseil des Mohawks de Kahnawake sur cet amendement important, surtout que nous n’aurons pas l’occasion de leur demander leur opinion parce que nous sommes pressés de faire adopter le projet de loi, à cause du calendrier qui nous est imposé.

S’il m’est impossible d’appuyer l’amendement pour cette raison, j’appuie les efforts de la sénatrice McCallum pour mettre en lumière les immenses lacunes de ce projet de loi et permettre aux nombreuses personnes mécontentes qu’on tasse du revers de la main dans le but de forcer l’adoption rapide de ce projet de loi sans amendement de se faire entendre. Il est déconcertant de constater qu’on ignore l’avis de peuples et de leaders autochtones de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, du Québec et du Labrador, entre autres.

À cet égard, je voudrais lire un passage d’une lettre que les sénateurs ont reçue cette semaine. Elle a été envoyée au premier ministre par le grand chef de l’Assemblée des chefs du Manitoba, Arlen Dumas. Voici ce qu’il a écrit :

Je vous écris pour vous demander de suspendre tous les travaux parlementaires concernant le projet de loi C-15, Loi concernant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, afin que le gouvernement fédéral et le Parlement puisse, de toute urgence, accorder la priorité à la réponse à donner face à la découverte, par la Première Nation Tk’emlups te Secwepemc, des restes de 215 enfants sur les lieux de l’ancien pensionnat de Kamloops, en Colombie-Britannique, et offrent des ressources et de l’aide aux Premières Nations qui mènent des enquêtes concernant tous les autres pensionnats.

Le projet de loi C-15 du gouvernement a été annoncé avec tambours et trompettes auprès de l’Assemblée des Premières Nations et d’autres groupes non membres des Premières Nations. L’appui des Premières Nations a été atténué, c’est le moins qu’on puisse dire, par l’opposition farouche de certaines nations. Bien que l’Assemblée des chefs du Manitoba ait tenu un forum des dirigeants sur le projet de loi C-15, elle n’a toujours pas pris position officiellement, car elle continue de se concentrer sur les mesures locales en réponse à la pandémie de COVID-19.

Ce n’est pas le moment pour le gouvernement du Canada de faire adopter un projet de loi controversé concernant les droits des Premières Nations, étant donné la découverte récente et accablante de restes d’enfants autochtones dans une fosse commune et anonyme.

Les dirigeants des Premières Nations du Manitoba demandent au Canada de contribuer aux recherches de tous les enfants perdus qui ont fréquenté les pensionnats du Manitoba et de fournir des soutiens appropriés aux survivants des pensionnats. Ce n’est pas ce que prévoit le projet de loi C-15.

Le projet de loi C-15 ne fait que répondre à un seul appel à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation :

Article 44 : Nous demandons au gouvernement du Canada d’élaborer un plan d’action et des stratégies de portée nationale de même que d’autres mesures concrètes pour atteindre les objectifs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Le chef Dumas poursuit ainsi :

Le fait qu’il est question de génocide et de restes humains dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ne passe pas inaperçu. Le projet de loi C-15 ne traite pas de l’horreur de la récente découverte faite au pensionnat de Kamloops :

Paragraphe 7(2) : Les peuples autochtones ont le droit, à titre collectif, de vivre dans la liberté, la paix et la sécurité en tant que peuples distincts et ne font l’objet d’aucun acte de génocide ou autre acte de violence, y compris le transfert forcé d’enfants autochtones d’un groupe à un autre.

Paragraphe 12(2): Les États veillent à permettre l’accès aux objets de culte et aux restes humains en leur possession et/ou leur rapatriement, par le biais de mécanismes justes, transparents et efficaces mis au point en concertation avec les peuples autochtones concernés.

Bien que le projet de loi C-15 n’est qu’un plan pour élaborer un plan, il ne répond pas à l’appel à l’action no 43 de la Commission de vérité et réconciliation :

Nous demandons au gouvernement fédéral, aux provinces et aux territoires de même qu’aux administrations municipales d’adopter et de mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones dans le cadre de la réconciliation.

Pour situer les choses dans leur contexte, la Commission de vérité et réconciliation a fait six appels à l’action concernant les enfants disparus et les renseignements sur l’inhumation, soit les appels à l’action nos 71 à 76, mais le Canada n’y a pas du tout donné suite. Le projet de loi C-15 ne s’attaque pas à la situation actuelle.

Au nom des dirigeants des Premières Nations au Manitoba, je vous demande de collaborer avec vos collègues chefs de parti à la Chambre de façon non partisane, de suspendre toutes les activités entourant le projet de loi C-15 et de consacrer ce temps à travailler avec les Premières Nations au Manitoba et celles de tout le Canada pour enquêter sur l’ensemble des sites des pensionnats.

La réponse du Canada à la récente découverte du génocide perpétré dans les pensionnats pourrait avoir des répercussions durables sur les générations à venir. Je vous demande de faire ce qui s’impose pour les Premières Nations et les Canadiens.

Honorables sénateurs, je terminerai par une lettre, datée du 4 juin 2021, qui a été envoyée au premier ministre par le grand chef Okimaw Vernon Watchmaker du Traité no 6 :

Nous vous demandons de suspendre immédiatement toutes les activités parlementaires et législatives liées au projet de loi C-15 afin de nous accorder le temps et l’espace nécessaires pour nous concentrer sur les questions urgentes découlant de la découverte troublante des restes non signalés de 215 enfants dans l’ancien pensionnat de Kamloops, en Colombie-Britannique. Ce projet de loi est très controversé et il serait prudent de le mettre en veilleuse en cette période horrible.

Comme vous le savez sans doute, le processus entourant le projet de loi C-15 était fondamentalement inadéquat. Le projet de loi ne prévoit pas l’adoption de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ni ne légifère de quelque façon que ce soit sur les principes que la déclaration cherche à respecter. Le Canada a informé la communauté internationale qu’il appuierait pleinement le projet de loi, ce qui n’a pas été le cas. De plus, les titulaires de droits n’ont pas été consultés, le Canada a plutôt fait appel à des organisations nationales sans mandat. Les principes de bonne gouvernance ne sont pas non plus respectés dans le projet de loi C-15. Le Sénat a été invité à effectuer une étude préalable sur le projet de loi et il ne sera probablement pas en mesure de publier un rapport à temps pour permettre un véritable débat. Le Sénat a également été informé que les amendements ne sont pas acceptés pour le moment, ce qui constitue une ingérence dans le processus du Sénat. De plus, le juge en chef de la Cour suprême donnera la sanction royale au projet de loi, qui sera probablement contesté à un moment donné devant la Cour suprême. La Confédération des Premières Nations du Traité no 6 ainsi que les Premières Nations du Traité no 7 et du Traité no 8 ont rejeté le projet de loi. Les Premières Nations sont confrontées à une pandémie qui suscite des préoccupations très réelles en matière de santé et de mortalité dans les communautés. Ces raisons à elles seules devraient suffire pour arrêter le processus et réévaluer les enjeux du projet de loi. Cependant, une question plus importante et plus récente doit avoir la priorité.

Nous demandons que vous donniez instruction à vos ministères de consacrer leurs efforts non pas à l’adoption de ce projet de loi boiteux, mais à la production de résultats tangibles qui aideront la communauté de Tk’emlups te Secwepemc à surmonter le traumatisme réel et profond qu’engendre une découverte de cette nature. Il s’agit de faire face à un génocide, au deuil, à la perte et à des crimes qui demeurent impunis. Cela aidera à tracer la voie à suivre en cas d’autres découvertes de cette nature. D’après notre histoire orale et nos enseignements, nous, Premières Nations, savons que ce n’est que la pointe d’un énorme iceberg. Nous sommes tous en deuil en ce moment et nous nous efforçons de faire face à cette découverte horrible qui a rouvert les blessures du génocide avec lesquelles nous vivons depuis la négociation des Traités. Je vous rappelle les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et le fait que celle-ci a proposé au gouvernement un plan à suivre pour ce genre de situations. Les appels à l’action 71 à 76 traitent de questions directement liées aux enfants disparus et aux renseignements sur l’inhumation, aux enfants assassinés et aux cimetières. Les appels à l’action ont été publiés en 2015 et on n’a toujours pas commencé à les mettre en œuvre.

Vos réponses et vos actions dans ces affaires passeront à la postérité. Je vous demande de collaborer avec la Confédération des Premières Nations visées par le Traité 6 afin de faire ce qui s’impose et de véritablement consacrer votre temps et vos ressources à ces questions.

Je conclus mon intervention sur ce conseil provenant de détenteurs de droits respectés. Merci, honorables sénateurs. Qujannamiik.

L’honorable Patti LaBoucane-Benson [ - ]

Honorables sénateurs, je veux remercier la sénatrice McCallum du travail acharné qu’elle a accompli pour ce projet de loi. Je sais qu’elle propose des amendements avec de bonnes intentions et avec le désir profond de créer une vie meilleure pour les Autochtones. Je l’en remercie. Je veux également la remercier d’avoir apporté son éventail en plumes d’aigle. En tant que danseuse du soleil, je connais très bien le pouvoir de l’éventail en plumes d’aigle et l’énergie qu’il apporte à ce débat. Il nous rappelle que nous sommes tous ici pour le bien de la population.

[Note de la rédaction : La sénatrice LaBoucane-Benson s’exprime dans une langue autochtone.]

Nous devons nous y mettre avec humilité, compassion et respect. Je l’en remercie.

Je veux parler de la partie de l’amendement voulant ajouter la « mise en œuvre » au projet de loi. Je soulignerais que l’article 38 de la déclaration dit :

Les États prennent, en consultation et en coopération avec les peuples autochtones, les mesures appropriées, y compris législatives, pour atteindre les buts de la présente Déclaration.

Cet article reconnaît que les pays disposent de nombreux outils pour mettre en œuvre des instruments internationaux pour les droits de la personne, y compris un éventail de processus, de politiques et de mesures législatives. Le projet de loi C-15 propose un cadre législatif de mise en œuvre de la déclaration, mais il ne propose pas de mise en œuvre complète de la déclaration elle-même. La description de ce projet de loi comme une mise en œuvre complète de la déclaration pourrait s’avérer trompeuse et amenuiser toutes les autres initiatives, qui contribuent elles-mêmes à la mise en œuvre de la déclaration, y compris la négociation de traités et d’autres accords, des mesures législatives sectorielles, et des politiques et directives nouvelles ou révisées. La transformation intégrale de traités internationaux en lois canadiennes ne constitue pas l’objectif du projet de loi.

Comme je l’ai mentionné, concernant la partie de l’amendement qui lierait la Couronne, les dispositions de fond du projet de loi énoncent clairement les objectifs du gouvernement du Canada et du ministre fédéral. Par conséquent, le projet de loi C-15 lie effectivement le gouvernement aux trois obligations suivantes : premièrement, prendre des mesures pour veiller à ce que les lois soient compatibles avec la déclaration; deuxièmement, élaborer et mettre en œuvre un plan d’action; troisièmement, présenter un rapport sur les progrès accomplis chaque année au Parlement. Donc, il n’est pas nécessaire d’inclure une disposition distincte pour lier la Couronne.

Finalement, concernant la partie de l’amendement qui porte sur la force exécutoire de la déclaration ou son intégration au droit canadien, je souligne avoir déjà dissipé toute confusion exprimée par certains témoins à l’égard de l’objet du projet de loi.

Je répète que le ministre Lametti a confirmé au comité qu’il s’agit d’une mesure législative de mise en œuvre comme il est décrit à l’article 4b). L’objet du projet de loi est d’encadrer la mise en œuvre de la déclaration, et non de l’incorporer directement dans le droit canadien. Les amendements proposés modifieraient fondamentalement l’objet du projet de loi pour l’étendre au-delà de ce qui a été discuté avec les partenaires autochtones, les provinces, les territoires et d’autres intervenants. Merci.

L’honorable Brian Francis [ - ]

Honorables sénateurs, je veux d’abord remercier la sénatrice McCallum de son discours.

En tant qu’Autochtone et porteur d’un bâton à exploits, je suis personnellement offusqué et consterné par le rappel au Règlement qui a été fait plus tôt. À mon avis, le fait de qualifier la plume d’aigle, qui est traitée avec le plus grand respect par toutes les Premières Nations, d’accessoire en dit long sur le besoin d’offrir sans délai une formation à tous les parlementaires sur la richesse et la diversité des philosophies, des histoires, des traditions et des cultures des Premières Nations, des Métis et des Inuits au Canada.

Je crois aussi que ce rappel au Règlement en dit long sur l’importance cruciale du projet de loi. Il vise à ce que le Canada respecte les normes minimales — et non maximales — nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones qui, pendant des générations, ont subi des campagnes d’assimilation forcée ou de destruction de leur culture, de leur langue et de leur existence même.

Nous sommes en droit de nous attendre, comme n’importe quel autre Canadien, que nos croyances et nos pratiques soient respectées et acceptées, à l’intérieur et à l’extérieur du Sénat. S’excuser est une preuve de leadership; je remercie donc le sénateur Plett. Cependant, il nous faut maintenant apporter des changements pour que ces situations ne se répètent plus à l’intérieur ou à l’extérieur du Sénat. Une fois est une fois de trop.

Maintenant que je me suis vidé le cœur, nous sommes ici aujourd’hui pour parler de l’amendement présenté par la sénatrice McCallum, pour qui j’ai le plus grand respect et la plus grande admiration. Je la félicite pour l’énorme travail qu’elle a accompli sur ce projet de loi. Je la félicite aussi au nom des Autochtones.

Comme elle, je partage les sentiments de méfiance, de scepticisme, voire de peur à l’égard des gouvernements fédéraux consécutifs, tant libéraux que conservateurs, qui nous ont laissé tomber à maintes reprises. Il est difficile pour beaucoup de gens de croire que le Canada et les parlementaires agiront honorablement envers les Autochtones, mais j’ai espoir que nous avons entamé une introspection nationale et que le Canada et les Canadiens feront mieux. Comme le sénateur Klyne l’a mentionné tout à l’heure, il est temps de devenir le Canada que nous voulons être.

Pour déterminer le pouvoir et la portée du projet de loi C-15 et pour savoir s’il met vraiment en œuvre la déclaration des Nations unies, les tribunaux examineront le libellé de ce dernier pour analyser son objet et son intention. Comme le précise l’article 4, les objectifs du projet de loi C-15 sont les suivants :

a) de confirmer que la [d]éclaration constitue un instrument international universel en matière de droits de la personne qui trouve application en droit canadien;

b) d’encadrer la mise en œuvre de la [d]éclaration par le gouvernement du Canada.

Bon nombre des amendements proposés par la sénatrice McCallum portent sur des préoccupations relatives à la mise en œuvre de la déclaration, y compris la modification de l’objet du projet de loi en remplaçant le mot « confirmer » par « mettre en œuvre » pour plus de clarté. Cependant, le paragraphe 4b) indique clairement que l’objet du projet de loi est de mettre en œuvre la déclaration. Par conséquent, je maintiens que cet amendement n’est pas nécessaire.

Le libellé de l’article 4b) indique que le projet de loi a pour objet d’encadrer la mise en œuvre de la Déclaration par le gouvernement du Canada. Cette position a été appuyée par le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord dans son témoignage devant le comité le 7 mai dernier, où il a indiqué que le projet de loi C-15 sera utilisé dans l’interprétation du droit canadien. Le projet de loi a pour but d’encadrer la façon dont cela se produira et de confirmer que la Déclaration est une source d’interprétation du droit canadien.

De plus, la ministre Bennett a également confirmé que le dépôt du projet de loi C-15 respecte l’engagement du gouvernement à présenter un projet de loi et à mettre en œuvre la déclaration, faisant du projet de loi C-262 le minimum plutôt que le maximum.

En plus du libellé dans la section sur l’objet de la loi, l’alinéa 4a) est une affirmation du Canada que la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones s’applique dans la législation canadienne. Cependant, cet énoncé n’est pas nouveau puisque, comme vous le savez, la Déclaration s’applique réellement au Canada. À l’heure actuelle, elle est utilisée comme outil d’interprétation par les tribunaux, mais les tribunaux ont un grand pouvoir discrétionnaire pour déterminer comment appliquer la Déclaration des Nations unies. Cette situation a donné lieu à des jugements qui ne vont pas dans le sens des droits fondamentaux des Autochtones.

Ce projet de loi nous aidera à corriger le tir. La ratification de la loi donne plus de poids à la Déclaration des Nations unies et à la manière dont les tribunaux peuvent l’utiliser, non seulement pour l’interpréter, mais aussi pour trouver des obligations et des droits fondamentaux.

Si l’on examine l’alinéa 4b), ce libellé peut facilement convaincre un tribunal que le Canada vise à mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies par l’entremise du projet de loi C-15. Les tribunaux examineraient ensuite les autres dispositions du projet de loi C-15 pour déterminer quelle forme prendra la mise en œuvre. Voilà le plan d’action. Il est donc important que le plan d’action, tel qu’il est inclus dans le projet de loi C-15, soit bien révisé, car les tribunaux s’y référeront pour interpréter l’engagement du Canada à mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies.

Ce projet de loi n’est pas parfait. Aucun ne l’est. Je suis toutefois convaincu que nous devons adopter le projet de loi C-15 sans tarder. Il serait honteux pour cette institution de répéter ce qui s’est produit avec le projet de loi C-262.

Au Comité des peuples autochtones, nous avons entendu de nombreux témoins, dans le cadre de l’étude préliminaire du projet de loi C-15, qui nous ont exhortés à adopter le projet de loi sans amendement de crainte qu’il soit rejeté. Parmi ces témoins, il y avait des dirigeants et des titulaires de droits autochtones, notamment l’Assemblée des Premières Nations, le Ralliement national des Métis, l’Inuit Tapiriit Kanatami, Nunavut Tunngavik Inc, le Grand conseil des Cris, la nation dénée et le Conseil des leaders des Premières Nations de la Colombie-Britannique, ainsi que des universitaires autochtones, dont Brenda Gunn, Val Napoleon, Pamela Palmater, Sheryl Lightfoot, Naiomi Mettalic et Wilton Littlechild, ancien commissaire de la Commission de vérité et réconciliation. En tant que titulaire de droits, j’appuie ce point de vue. C’est une occasion historique d’avancer dans la bonne direction. Ce changement ne se fera pas sans problèmes, mais il se fait attendre depuis longtemps.

Je ne m’attarderai pas davantage sur les raisons pour lesquelles je n’appuie pas les amendements. Les Autochtones, à l’instar des non-Autochtones, ne partagent pas toujours le même avis au sujet des politiques et d’autres questions. Cet amendement en est un exemple. Il existe diverses opinions. Nous pouvons respectueusement convenir que nous ne sommes pas d’accord au sujet de l’amendement. Merci. Wela’lioq.

Son Honneur le Président [ - ]

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion et qui sont sur place veuillent bien dire oui.

Que les sénateurs qui sont contre la motion et qui sont sur place veuillent bien dire non.

Son Honneur le Président [ - ]

À mon avis, les non l’emportent. Je vois un sénateur se lever. Non?

Parmi ceux qui participent à la séance à distance, y a-t-il un sénateur qui demande un vote par appel nominal?

La sénatrice McCallum [ - ]

Oui.

Son Honneur le Président [ - ]

Il faut deux sénateurs, un dans cette Chambre et un qui participe à distance. Je vois un sénateur se lever.

Son Honneur le Président [ - ]

Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?

La sénatrice LaBoucane-Benson [ - ]

Quinze minutes.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition)

Votre Honneur, il faut que deux sénateurs présents à la Chambre s’entendent sur la durée de la sonnerie.

Son Honneur le Président [ - ]

Il faut le consentement du Sénat pour réduire la durée de la sonnerie à 15 minutes. Que ceux qui s’opposent à ce que la sonnerie retentisse pendant 15 minutes veuillent bien dire non.

La sonnerie retentira pendant 15 minutes. Le vote aura lieu à 19 h 53. Convoquez les sénateurs.

Son Honneur le Président [ - ]

Honorables sénateurs, nous reprenons le débat sur la motion principale.

L’honorable Pat Duncan [ - ]

Je propose l’ajournement du débat.

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