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Debates of the Senate (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 110

Le mardi 19 juin 2007
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 19 juin 2007

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L'HONORABLE LARRY W. CAMPBELL

LA CITATION DE L'HONORABLE A. RAYNELL ANDREYCHUK DANS LE HILL TIMES—DEMANDE D'EXCUSES

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je tiens à souligner ce que je considère être une mesure regrettable qui a été prise par un de nos collègues. Hier soir, pendant la séance que nous avons tenue ici, j'ai jeté un coup d'oeil aux communications du Sénat qui parlaient d'un article écrit par le sénateur libéral Larry Campbell et publié dans le Hill Times, en anglais seulement, sous le titre « A constitutional crisis from within ». L'article commençait par une citation qui m'était attribuée. Le sénateur m'attribuait les propos suivants :

Je ne crois pas que nous puissions lancer un processus de consultation des premiers ministres provinciaux. Cela me paraît dépasser les bornes.

Il n'y avait pas d'autre commentaire et aucune autre précision sur mon rôle au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Cette formulation était clairement trompeuse. Mon commentaire portait évidemment sur le fait que le processus dans lequel nous étions engagé allait trop loin, c'est-à-dire que nous ne ferions pas l'étude article par article du projet de loi S-4 tel que convenu, mais que nous retarderions, une fois de plus, les travaux du gouvernement.

En général, les sénateurs font preuve de prudence et d'honnêteté lorsqu'ils citent les paroles de leurs collègues. Si le sénateur Campbell veut parler de moi dans un article, sans me le faire savoir, il devrait à tout le moins citer convenablement mes propos. Plutôt que de citer textuellement ce que j'ai dit, c'est-à-dire que je considérais que les délibérations du 9 mai 2007 du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles avaient été très inhabituelles, il a plutôt choisi de ne garder qu'une phrase qui menait à ma conclusion, et non les cinq paragraphes et demi qui précédaient et qui sont consignés au procès-verbal, ni les cinq paragraphes suivants.

(1405)

Nous avions été convoqués pour effectuer l'étude article par article du projet de loi S-4. On nous a alors informés qu'au lieu de procéder à l'étude, les sénateurs d'en face voulaient transmettre une lettre que le premier ministre d'une province avait écrite à ses homologues. Comme on l'a fait remarquer avec raison, les premiers ministres provinciaux avaient été consultés et devaient répondre avant une date limite. La lettre du premier ministre en question était arrivée plus tard et on nous avait demandé de la transmettre aux autres premiers ministres pour recueillir leur opinion. Je m'objectais à l'idée de retarder encore davantage l'étude des affaires ministérielles, puisque que nous avions déjà consulté les premiers ministres.

Tous ceux qui ont lu ma déclaration du début à la fin — et je ne vais pas la répéter maintenant — auront compris que je m'objectais à ce que j'estimais être une tactique dilatoire et à la démarche qu'on voulait adopter pour consulter les premiers ministres provinciaux. Le fait de rapporter simplement que je trouvais scandaleux de consulter les premiers ministres provinciaux constitue une manœuvre fallacieuse qui n'est pas digne des normes habituellement élevées que nous nous imposons au Sénat. Le sénateur Campbell sait ou, du moins, devrait savoir, que ce que je trouvais scandaleux, ce n'était pas le fait de consulter les premiers ministres provinciaux, mais le fait de recourir à des tactiques dilatoires.

Je respecte l'opinion de tous les sénateurs ainsi que leur droit de faire valoir leurs arguments, et je m'attends à la même courtoisie en retour. J'espère que le sénateur Campbell reconnaîtra son erreur et me présentera des excuses pour avoir rapporté mes commentaires de façon faussée et inexacte.

BIBLIOTHÈQUE ET ARCHIVES CANADA

LES DONNÉES DU RECENSEMENT ET LES RENSEIGNEMENTS GÉNÉALOGIQUES

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, Bibliothèque et Archives Canada donne accès à de nombreuses ressources généalogiques, par l'entremise de son site web. Les Canadiens ont accès à ces ressources gratuitement, à leur convenance, peu importe où ils vivent. La collection historique de Bibliothèque et Archives Canada a été mise sous forme numérique et est accessible sur Internet.

Ces ressources incluent aussi les données des recensements de 1851, 1901, 1906 et 1911 au Canada. Elles incluent des photos de documents de recensement et de certaines listes de personnes qui ont émigré au Canada par bateau entre 1865 et 1922. Ces ressources accessibles sur le web sont très utilisées. Par exemple, les photos du recensement de 1911 sont téléchargées plus de 6 millions de fois par année, tandis que le site web de Bibliothèque et Archives Canada accueille annuellement 12 millions de visiteurs, dont 20 p. 100 s'intéressent à la généalogie.

Le sénateur Comeau sera intéressé de savoir que l'accès aux photos du recensement de 1911 n'a entraîné aucune plainte à la commissaire à la protection de la vie privée. En fait, il n'y a jamais eu de plainte liée à l'accès aux données de recensement historiques, que ce soit de la part des utilisateurs des ressources ou de quiconque aurait été victime d'une violation de sa vie privée.

Outre des ressources numériques, Bibliothèque et Archives Canada a un grand nombre d'autres documents dans sa collection qui présentent un intérêt pour les généalogistes, qu'il s'agisse de microfilms d'autres données de recensement, de l'impressionnante collection de journaux, d'autres documents sur l'immigration et les militaires, de photos, d'illustrations et de films représentant des personnes, des endroits et des événements au Canada. Tout cela forme un fonds documentaire précieux pour les chercheurs. En fait, chaque année, la bibliothèque reçoit plus de 20 000 personnes et demandes de renseignements sur place.

Dans le cadre de ses efforts continus pour améliorer l'accessibilité aux renseignements généalogiques, Bibliothèque et Archives Canada a annoncé le 1er juin un nouveau partenariat public-privé avec le site ancestry.ca, qui est un important fournisseur de ressources généalogiques en ligne.

Au début, ancestry.ca et Bibliothèque et Archives Canada vont se concentrer sur l'indexation des listes de passagers à Québec, de 1870 à 1900, qui renferment plus de 750 000 noms. Les images numériques de ces listes et d'autres listes de passagers sont déjà sur le site web de Bibliothèque et Archives Canada. L'index pour la ville de Québec sera disponible gratuitement sur son site web, ainsi que sur le site ancestry.ca.

Bibliothèque et Archives Canada continuera de travailler avec ancestry.ca afin qu'un jour toutes les listes des passagers qui sont arrivés au Canada entre 1865 et 1935, notamment aux ports de Halifax, Saint John, Vancouver, Victoria et North Sidney, soient numérisées et indexées.

(1410)

L'ENVIRONNEMENT

LE PROTOCOLE DE KYOTO—LES EFFORTS DES FABRICANTS CANADIENS CONCERNANT LES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE

L'honorable Mira Spivak : Honorables sénateurs, il est injuste de pénaliser les industries canadiennes qui ont déjà respecté plus que leur part de l'engagement que le Canada a pris aux termes, oserais-je le dire, du Protocole de Kyoto. Les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'ensemble du secteur canadien de la fabrication sont, environ, de 7,4 p. 100 au-dessous des niveaux de 1990. Celles du secteur forestier ont diminué de 44 p. 100, tandis que certains de ses membres sont parvenus à une réduction de 70 p. 100. Le secteur de la construction émet 30 p. 100 moins de gaz à effet de serre qu'il y a 17 ans, tandis que le secteur minier, qui comprend l'exploitation des sables bitumineux de l'Alberta, a augmenté ses émissions de 104 p. 100.

En faisant passer de 1990 à 2006 l'année de base pour fixer des objectifs de réduction obligatoire, non seulement le gouvernement refuse d'honorer les obligations internationales du Canada, mais il envoie le mauvais message à notre secteur industriel. Ce message est essentiellement le suivant : si on prend rapidement des mesures, il ne sera que plus difficile de respecter les nouvelles lois. Le baume qu'offre le gouvernement du Canada — un crédit pour réductions rapides allant jusqu'à 15 millions de tonnes — n'a rien d'un baume. Une seule papetière de la Colombie-Britannique a besoin de crédit pour un million de tonnes.

J'espère que le gouvernement du Canada augmentera la somme qu'il accordera aux industries qui ne sont pas restées sans rien faire pendant une décennie et demie d'inaction gouvernementale. Ce qui est tout à l'honneur de ces industries, c'est qu'elles ont pris des mesures qui réduisent leurs coûts et qui sont avantageuses pour nous tous. Peu importe le plan de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre qui entrera enfin en vigueur, les efforts des industries qui ont agi rapidement devraient être pleinement reconnus.

LES RELATIONS ENTRE LE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS

LES EFFORTS POUR ATTÉNUER LES EFFETS DE L'INITIATIVE RELATIVE AUX VOYAGES DANS L'HÉMISPHÈRE OCCIDENTAL

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je suis heureux d'annoncer une excellente nouvelle aux sénateurs au sujet des travaux de deux comités du Sénat pour atténuer les effets de l'Initiative relative aux voyages dans l'hémisphère occidental, l'IVHO, que les États-Unis ont adoptée il y a quelques années, ainsi que certaines mesures prises au Congrès. Si ces mesures sont mises en œuvre des deux côtés du Sénat et des deux côtés du Congrès des États-Unis, elles permettront d'éviter un bouleversement économique énorme dans pratiquement toutes les collectivités du Canada, et au long de chaque côté de la frontière.

Le 9 mai 2007, Mme Louise Slaughter, membre de la Chambre des représentants des États-Unis, a annoncé que la H.R.1684, la Department of Homeland Security Authorization Act, avait été adoptée par la Chambre des représentants le 8 mai 2007 par un vote de 296 contre 126. Ce projet de loi avait été rédigé en partie par Mme Slaughter.

Les dispositions qu'elle avait rédigées et incluses dans la H.R. 1684 venaient de la H.R.1061, la Protecting American Commerce and Travel Act of 2007, qu'elle avait parrainée. Les dispositions de l'IVHO, elles, exigeraient ce qui suit du Département américain de la sécurité intérieure : mener une analyse coûts-avantages approfondie avant la mise en oeuvre de l'initiative; effectuer des essais sur les nouveaux types de passeports et faire part des résultats au Congrès américain avant l'émission d'une règle finale relative à la mise en oeuvre de l'initiative; instituer un délai de grâce de six mois pour les voyageurs qui n'ont pas les pièces d'identité requises en vertu de l'IVHO; rédiger un plan de sensibilisation du public en collaboration avec les secteurs des transports et du commerce; soustraire les enfants de 15 ans et moins aux exigences en matière de pièces d'identité pour les déplacements terrestres et maritimes, et prévoir une certaine souplesse pour les groupes d'enfants; faire rapport au Congrès américain tous les 120 jours sur la mise en œuvre de l'initiative. Je ne décrirai pas en détail, comme l'a fait Mme Slaughter, les autres changements qu'elle imposera dans le cadre des programmes NEXUS et FAST, c'est-à-dire deux autres pièces d'identité acceptées qui faciliteront des solutions.

(1415)

J'aimerais aussi féliciter le sénateur Patrick Leahy du Vermont et le sénateur Ted Stevens de l'Alaska. Le 14 juin, pendant la révision du projet de loi de crédits pour la Sécurité intérieure pour l'année financière 2008, le comité du Sénat sur les crédits a adopté un amendement parrainé par les sénateurs Leahy et Stevens. Cet amendement vise à prolonger le délai de mise en oeuvre des parties de l'IVHO portant sur les déplacements terrestres et maritimes. Cet amendement a été coparrainé par les sénateurs Larry Craig, de l'Idaho et Pete Domenici, du Nouveau-Mexique.

L'année dernière, les sénateurs Leahy et Stevens ont inséré des dispositions dans le projet de loi de crédits pour la Sécurité intérieure pour l'année financière 2007, permettant au Département de la sécurité intérieure et au Département d'État de repousser la mise en oeuvre de l'IVHO jusqu'au 1er juin 2009, ou bien trois mois après la satisfaction de toutes les exigences, selon la première éventualité.

Je ne préciserai pas les autres exigences, mais il y en a beaucoup, notamment sept conditions de certification qui ont été adoptées l'année dernière, avant qu'on ait pu mettre en œuvre l'IVHO.

J'aimerais féliciter le sénateur Leahy, du Sénat américain, et Louise Slaughter, de la Chambre des représentants, tous deux des amis de longue date du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis, pour le leadership qu'ils exercent de manière à éviter ce qui serait à nos yeux un tsunami de retards et de bouchons à la frontière canado-américaine, qui aurait de graves répercussions économiques sur les collectivités de part et d'autre de la frontière.

Restez à l'écoute, honorables sénateurs. Cet été, le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis continuera de parcourir l'Amérique pour appuyer cette cause.

VISITEURS À LA TRIBUNE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer au dépôt de documents, je tiens à signaler la présence à la tribune de la juge Sandra E. Oxner, présidente de l'Institut de formation des juges du Commonwealth, situé à l'Université Dalhousie, à Halifax, en Nouvelle-Écosse, qui est accompagnée de participants au programme d'études intensives destiné aux formateurs de juges. Ils sont les invités du sénateur Cowan.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

LE COMMISSAIRE À L'ÉTHIQUE

DÉPÔT DU RAPPORT ANNUEL DE 2006-2007

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel de 2006-2007 du commissaire à l'éthique sur les activités ayant trait aux titulaires de charge publique, conformément à l'article 72.13 de la Loi sur le Parlement du Canada.

[Traduction]

PEUPLES AUTOCHTONES

BUDGET—L'ÉTUDE DE RAPPORTS RÉCENTS ET DU PLAN D'ACTION CONCERNANT L'EAU POTABLE DANS LES COLLECTIVITÉS DES PREMIÈRES NATIONS—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Gerry St. Germain, président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présente le rapport suivant :

Le jeudi 19 juin 2007

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son

NEUVIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le jeudi 29 mars 2007, à étudier, pour en faire rapport les travaux récents concernant l'eau potable dans les collectivités des Premières nations, demande respectueusement que des fonds lui soient approuvés pour l'année financière se terminant le 31 mars 2008.

Conformément à l'alinéa 2(1)c) du chapitre 3:06 du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
GERRY ST. GERMAIN

(Le texte du budget figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1777. )

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur St. Germain, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LES TRANSPORTS

LE PROGRAMME DE PROTECTION DES PASSAGERS

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Comme tout le monde le sait, le gouvernement vient de mettre en place une liste noire des passagers aériens. Les Canadiens ne pourront pas consulter cette liste secrète. Ils ne pourront pas savoir si leur nom figure sur la liste avant de se voir refuser l'embarquement à bord d'un avion sans qu'aucune accusation, interrogation ou procès ait été porté.

(1420)

Ils ne pourront pas connaître les critères utilisés par la GRC ou le SCRS pour inscrire leur nom sur cette liste. Dois-je rappeler que le député John Williams, de l'autre Chambre, a été victime d'une telle liste lors d'un voyage qu'il devait faire aux États-Unis? Ce gouvernement a-t-il pensé que cette liste noire peut porter atteinte à notre Charte des droits et libertés ainsi qu'à nos lois, qui garantissent la libre circulation des individus et la présomption d'innocence?

On nous dit que cette liste comportera entre 500 et 2 000 noms. Puisqu'elle est secrète, qui nous garantira que nous n'aurons pas une liste de 44 000 noms, comme c'est le cas aux États-Unis? Qui nous garantit que cette liste ne comportera pas les noms d'opposants à tel ou tel régime, à tel ou tel parti? En l'absence de critères transparents, on peut tout imaginer.

Honorables sénateurs, il y a trop de questions qui se posent dans cette situation. Quel est le processus en vigueur pour inscrire un nom sur cette liste noire? Quels en sont les critères? Qui administre cette liste secrète? Comment un Canadien qui se trouve par erreur sur la liste peut-il faire retirer son nom de celle-ci?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie le sénateur de sa question. Tout d'abord, le Programme de protection des passagers, qui a été créé au Canada, est entré en vigueur, comme madame le sénateur le sait, hier, le 18 juin. Il s'applique aux vols intérieurs et internationaux. D'après le bilan de la première journée d'exécution du programme, il n'y a eu aucun problème dans nos aéroports. Les déplacements, assujettis aux mesures normales de sécurité, se sont déroulés comme d'habitude.

On ajoute le nom d'une personne à la liste si elle a posé des gestes qui nous amènent à croire qu'elle peut représenter un risque immédiat à la sécurité aérienne si elle tente de monter à bord d'un avion. Je crois que la majorité des Canadiens, lorsqu'ils prennent l'avion, trouvent rassurant de savoir que nos agents de sécurité gardent un œil sur ce genre de personnes. Les lignes directrices qui permettent de déterminer qui figure sur la liste sont axées sur la sécurité aérienne. Sont visées les personnes qui peuvent avoir été mêlées à un groupe terroriste, avoir été reconnues coupables d'un ou de plusieurs crimes graves contre la sécurité aérienne, ou avoir été reconnues coupables d'une ou de plusieurs infractions graves pouvant mettre la vie de gens en danger, et qui pourraient s'en prendre à un transporteur aérien, à des passagers ou à des membres d'équipage.

Pour faire face aux problèmes touchant la protection des renseignements personnels, Transports Canada, au moment de créer le Programme de protection des passagers, a collaboré avec le commissariat à la protection de la vie privée et consulté de nombreux groupes culturels et groupes de défense des libertés civiles.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, je pense que madame le leader ne me convainc pas que cet objectif d'avoir une liste protégera les Canadiens contre des gens qui auraient des mauvaises intentions. Il faudrait ajouter des éléments à cette liste. Est-ce que cette liste va servir à toutes sortes de fins, lorsque nous prenons l'autobus, le métro ou que nous allons dans un centre commercial ou une salle de concert, contre des gens qui auraient des mauvaises intentions? Cette liste s'appliquerait aux passagers à bord des avions, sans aucun critère connu. Pourquoi ne protégerions-nous pas d'autres endroits publics au Canada? Quel est l'objectif final de cette fameuse liste noire?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Manifestement, d'autres organismes publics, nos corps policiers plus précisément, ont pour responsabilité de protéger les Canadiens dans les lieux publics où ils travaillent et dans un grand nombre de lieux, possiblement à risque, du pays. La plupart des sénateurs et la plupart des gens, en général, conviendraient que le secteur du transport aérien constitue un cas unique, à la lumière des événements passés. Le secteur du transport aérien est un cas unique du fait que les avions, une fois qu'ils ont décollé, sont particulièrement vulnérables.

(1425)

Dans un cas où une personne se présenterait à l'aéroport et on lui demanderait de sortir de la file parce qu'il y a un problème avec son nom, il existe un processus qui est immédiatement suivi pour faire face à la situation. Le fait est que cette mesure a été instaurée pour protéger les Canadiens. Les Canadiens veulent avoir le sentiment que toutes les précautions possibles sont prises pour assurer leur sécurité en avion, et lorsqu'ils utilisent d'autres moyens de transport, mais, comme je l'ai mentionné, d'autres personnes ont des responsabilités dans les autres secteurs.

Je pense que la plupart des Canadiens approuveraient cette mesure — assurément tous ceux qui craignent les actes de terrorisme ou craignent pour la sécurité de leur famille lorsqu'ils montent dans un avion. Les citoyens canadiens qui respectent la loi n'ont rien à craindre du Programme de protection des passagers.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette : J'aimerais quand même que madame le leader du gouvernement me dise combien de pays s'échangeront cette liste et combien d'autres pays nous enverront la leur. Les terroristes ne sont pas nécessairement des citoyens canadiens. J'aimerais donc qu'elle nous donne la liste des pays avec lesquels nous allons échanger une liste et qui vont adopter cette mesure de liste noire.

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Le règlement interdit aux transporteurs aériens de communiquer la liste des noms. De toute évidence, les autorités policières, comme la GRC, le SCRS et différents corps policiers de partout dans le monde, auraient les moyens de partager ces renseignements. Cependant, il est interdit aux transporteurs aériens de communiquer la liste des noms.

LE PATRIMOINE

LA COMMISSION CANADIENNE D'EXAMEN DES EXPORTATIONS DE BIENS CULTURELS—LA CLOCHE DE L'EMPRESS OF IRELAND

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, afin de vous situer, je rappelle que, le 29 mai 1914, l'Empress of Ireland a été éperonné et a coulé en 14 minutes dans le fleuve Saint-Laurent, en face de Pointe-au-Père. Mille douze personnes sont mortes ce jour-là, soit plus que dans le naufrage du Titanic. Beaucoup étaient membres de l'Armée du Salut et un monument commémoratif a été élevé à leur mémoire à Toronto.

Philippe Beaudry a découvert l'épave en 1970 et il en a extrait des artéfacts pendant 30 ans, jusqu'à ce que cette épave soit déclarée site du patrimoine canadien et que le pillage en soit interdit.

Depuis des années, la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels l'empêche de vendre la cloche du navire à des collectionneurs étrangers, mais je viens d'apprendre que la ministre Oda, la ministre du Patrimoine canadien, vient de lui accorder la permission d'exporter cette cloche.

Est-ce madame que le leader du gouvernement au Sénat intercédera auprès de la ministre Oda pour empêcher que cela se fasse?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. J'ignorais tout de cette affaire, aussi vais-je prendre note de sa question et je lui donnerai une réponse lorsque je l'aurai.

Le sénateur Milne : Je remercie la ministre.

Le Musée de la mer de Pointe-au-Père a offert 325 000 $ à M. Beaudry pour sa collection d'artéfacts provenant de l'Empress of Ireland, mais il réclame 1 million de dollars pour la cloche seulement.

Est-ce que la ministre empêchera que cette cloche, prise sur le lieu de la mort de 1 012 personnes, sorte du Canada? Je dois préciser ici que je m'intéresse personnellement à cette affaire parce que ma mère, Dorothy Bainbridge, est arrivée au Canada sur l'Empress of Ireland avec sa mère et son frère aîné en 1911. J'aimerais donc que la cloche reste au Canada, là où elle doit être.

Le sénateur LeBreton : Comme dans le cas de la première question, je porterai celle-ci à l'attention de la ministre du Patrimoine et j'informerai madame le sénateur de la réponse dès que possible.

LES FINANCES

LES PAIEMENTS DE PÉRÉQUATION—RAPPORT DU CONSEIL ÉCONOMIQUE DES PROVINCES DE L'ATLANTIQUE

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La plus récente étude menée par le Conseil économique des provinces de l'Atlantique, ou CEPA, contient des analyses pessimistes du nouveau programme de péréquation annoncé par le gouvernement.

(1430)

Selon le rapport du CEPA, toutes les provinces de l'Atlantique sortiront perdantes du nouveau programme de péréquation. Par exemple, l'Île-du-Prince-Édouard obtiendra moins d'argent pendant 11 des 13 prochaines années. L'étude du CEPA prévoit un manque à gagner de 196 millions de dollars dans les coffres de la province à cause du seul programme de péréquation. Notre province compte plus que toute autre sur les paiements de péréquation, qui constituent le quart de ses revenus.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle expliquer pourquoi la nouvelle formule de péréquation du nouveau gouvernement accorde moins d'argent à l'Île-du-Prince-Édouard pour la quasi-totalité des exercices des prochaines années?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur d'avoir posé cette question. Ce rapport a déjà fait l'objet de certaines questions car, lorsque les prévisions ont été réalisées pour Terre-Neuve-et-Labrador, par exemple, les chiffres n'étaient pas disponibles. Comme je l'ai déjà dit, ce rapport est une étude comme toutes les autres, et les prévisions s'avèrent souvent fausses.

La formule O'Brien profitera à toutes les provinces. Elle bénéficie au surplus de l'appui de toutes les provinces, sauf Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse, de même que la Saskatchewan, dans un autre contexte. Quoi qu'il en soit, le gouvernement précédent de l'Île-du-Prince-Édouard était en faveur de cette nouvelle formule, et le gouvernement actuel l'est aussi, je crois.

Le budget présente cette nouvelle formule, et le gouvernement est d'avis que, lorsque les provinces auront en main le montant auquel leur donnera droit cette formule de péréquation et les autres sommes qui leur sont versées directement, au titre des infrastructures et de l'éducation, par exemple, la situation de l'Île-du-Prince-Édouard va être meilleure qu'elle ne l'était avant le dépôt du budget de 2007.

Je me ferai un plaisir d'obtenir la liste de tous les montants précis qui seront versés à l'Île-du-Prince-Édouard en application du programme de péréquation et d'autres programmes prévus dans les budgets de 2006 et de 2007, afin d'avoir une image complète de sa situation financière.

Le sénateur Callbeck : Honorables sénateurs, c'est bien beau de mentionner d'autres programmes, mais, entre nous, il est bien connu que des programmes naissent et d'autres disparaissent. Je m'inquiète du financement à long terme de la péréquation, dont les montants seront réduits au cours de 11 des 13 prochaines années, selon une étude du CEPA.

L'étude révèle également que, en vertu du budget de cette année, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador peuvent choisir de conserver l'ancien cadre fixe de péréquation. Cette possibilité n'a cependant pas été offerte à l'Île-du-Prince-Édouard.

Pourquoi des provinces sont-elles traitées différemment? Pourquoi n'a-t-on pas donné le même choix à l'Île-du-Prince-Édouard qu'à d'autres provinces, ce qui nous aurait permis de conserver les 200 millions de dollars que nous fera perdre le nouveau cadre de financement?

(1435)

Le sénateur LeBreton : Je n'accepte pas l'hypothèse selon laquelle l'Île-du-Prince-Édouard perdra 200 millions de dollars. Le budget a été élaboré de façon à tenir compte des préoccupations particulières relatives aux ressources extracôtières non seulement de Terre-Neuve-et-Labrador mais aussi de la Nouvelle-Écosse. On a appliqué au budget la formule proposée dans le rapport O'Brien, sauf dans le cas de ces deux autres provinces qui ont eu le choix soit de s'en tenir à l'ancien Accord atlantique et à la formule qui était en place au moment où le gouvernement Martin a signé cet accord, soit de se prévaloir de la nouvelle formule.

Il faut se rappeler que la Commission O'Brien a été mise sur pied par le gouvernement précédent. En fait, le rapport de cette commission a été présenté à l'ensemble des ministres des Finances et aux premiers ministres provinciaux. Toutefois, ils ne sont pas arrivés à s'entendre. La péréquation est un programme fédéral et, lors des discussions, toutes les provinces ont clairement dit au comité d'experts qu'elles souhaitaient revenir à un programme de péréquation fondé sur une formule. Nous avons tenu compte de cette demande des provinces dans l'élaboration du budget de 2007 et nous avons proposé un programme de péréquation fondé sur des principes et une norme établis en fonction des dix provinces, tel que recommandé dans le rapport du comité d'experts.

Encore une fois, sénateur Callbeck, en ce qui concerne le budget, les provinces bénéficient de bon nombre de programmes en plus de la péréquation. Comme je l'ai dit précédemment dans cette enceinte, on a accordé moins d'attention aux transferts versés directement aux provinces pour l'éducation, la garde des enfants, l'infrastructure et l'écoFiducie. Un grand nombre de programmes financent directement des projets dans les provinces. J'estime que si l'on veut être équitable, on ne peut critiquer une mesure budgétaire en particulier sans tenir compte de l'ensemble du budget.

Le sénateur Callbeck : Honorables sénateurs, je rappelle que madame le leader du gouvernement au Sénat a dit qu'elle déposerait les chiffres concernant les paiements de péréquation à l'Île-du-Prince-Édouard pour les 13 prochaines années.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je n'ai pas dit cela. J'ai dit qu'il me ferait plaisir de déposer les chiffres correspondant aux paiements destinés à l'Île-du-Prince-Édouard dans les budgets de 2006 et 2007. Pour ce qui est du rapport du CEPA dont madame le sénateur Callbeck a fait mention, certains remettent en question les chiffres qui y figurent, compte tenu de la nature spéculative des résultats à venir.

Je n'ai donc jamais dit que je déposerais un tel document. Comme je l'ai dit, le programme de péréquation constitue une norme applicable aux dix provinces, qui place les provinces et le gouvernement fédéral dans une situation très stable, de sorte que, bon an mal an, la péréquation ne devienne pas un enjeu politique qui satisfait certaines provinces et déplaît à d'autres.

En appliquant le rapport de la Commission O'Brien, je crois que nous réussirons à asseoir la péréquation sur des bases solides sur le plan économique et axées sur des principes. Nous espérons que les provinces — quand elles auront eu le temps de travailler sur leurs budgets et de prendre conscience des montants qu'elles recevront du gouvernement fédéral grâce à la péréquation axée sur des principes ainsi qu'à d'autres programmes — comprendront que leur situation est bien meilleure qu'elle ne l'était avant le budget de mars 2007.

Le sénateur Callbeck : Madame le leader du gouvernement dit que les chiffres tirés de l'étude du CEPA que j'ai utilisés posaient problème. Pourrait-elle nous dire de quels chiffres son gouvernement s'est servi pour estimer le montant que l'Île-du-Prince-Édouard recevra au cours des 13 prochaines années grâce à la péréquation?

Le sénateur LeBreton : Je prends note de la question.

(1440)

L'honorable Percy Downe : Les renseignements que madame le sénateur Callbeck a demandés au gouvernement sont d'ordre public. Si la ministre affirme que les chiffres utilisés par le CEPA sont erronés, elle a la responsabilité de déposer les données utilisées par le gouvernement. Le fera-t-elle?

Le sénateur LeBreton : Je n'ai pas dit directement que les chiffres étaient erronés. J'ai dit qu'ils avaient été contestés publiquement. Chaque jour, des cercles de réflexion ou des groupes d'étude publient des données qui sont parfois exactes, parfois inexactes.

Je répondrai au sénateur Downe la même chose qu'au sénateur Callbeck : je vais poser la question au ministère des Finances, qui sera heureux de fournir tout renseignement de nature publique.

Le sénateur Downe : Le Conseil économique des provinces de l'Atlantique, comme l'honorable sénateur le sait, est un organisme indépendant et apolitique. Ses responsables ont analysé ce budget et conclu que l'Île-du-Prince-Édouard perdrait 196 millions de dollars au cours des 20 prochaines années.

Le gouvernement du Canada aurait-il un montant exact qui permettrait aux insulaires de savoir si l'organisme a raison? Quel est le montant exact? Madame le leader pourrait-elle nous communiquer ce montant aujourd'hui?

Le sénateur LeBreton : Je remercie l'honorable sénateur de sa question.

Je ne suis pas en mesure de communiquer ces chiffres aujourd'hui. Je ne suis pas économiste. Je prends note de la question. Encore une fois, de nombreux organismes indépendants et apolitiques font des prévisions et formulent des recommandations aux gouvernements. Ils ont le droit de le faire, mais ils n'ont pas toujours raison.

J'ai entendu dans les médias des gens mettre en doute les prévisions de l'APEC. Cela dit, pour répondre à la première question du sénateur, je serai heureuse de transmettre ses observations au ministère des Finances. Je suis sûre qu'on me fournira tous les renseignements que possède le ministère, dans la mesure où ils sont d'ordre public.

LE PATRIMOINE

LA COMMISSION CANADIENNE D'EXAMEN DES EXPORTATIONS DE BIENS CULTURELS—LES OBJETS PROVENANT DE L'EMPRESS OF IRELAND

L'honorable Tommy Banks : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Je vais poser une question non partisane pour la deuxième journée d'affilée. Je vais aussi offrir de l'aide à madame le leader pour répondre à la question du sénateur Milne. Je vais ensuite faire vérifier ma tension artérielle.

La question de madame le sénateur Milne est importante. Certains de mes électeurs en Alberta sont arrivés sur ce navire et sur des navires de la Great White Fleet, comme on l'appelait à l'époque. L'Empress of Ireland faisait partie de cette flotte. La compagnie Canadien Pacifique gérait le plus grand réseau de transport dans le monde en ce temps-là.

Le sénateur Milne a fait allusion à des objets qui intéressent bon nombre de mes électeurs, à tel point que j'ai écrit plusieurs lettres, depuis quelques mois, à quatre ministres du Patrimoine canadien, dont la ministre actuelle et les trois qui l'ont précédée.

Ils m'ont tous répondu qu'ils ne pouvaient trouver personne au Canada qui soit désireux d'acquérir ces objets. Cela est inexact.

Le Musée de la mer de Pointe-au-Père, dont parle le sénateur Milne, est dirigé par Serge Guay, qui voudrait bien obtenir ces objets. Le hic, c'est la différence entre le montant qu'il a pu réunir par ses propres moyens et par l'intermédiaire de son organisation et le montant que demande Philipe Beaudry, et cette différence est importante. Je suis certain qu'il serait possible de trouver une solution.

Peu de musées sont en mesure de verser soudainement l'argent nécessaire à l'acquisition de tels objets. Si madame le sénateur le souhaite et si elle pense que cela lui sera utile, je serai heureux de lui remettre des copies de toutes les lettres échangées avec les ministres successifs et de lui communiquer le numéro de téléphone de M. Guay ainsi que son adresse postale et son adresse électronique.

(1445)

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Au sujet des pièces qui présentent un intérêt particulier pour les Canadiens, il y a lieu de mentionner qu'il n'y a pas très longtemps, des Canadiens ont essayé d'empêcher la vente sur eBay d'une Croix de Victoria. C'est une question difficile. Comme l'honorable sénateur l'a dit, beaucoup de nos petits musées de même que les membres de la Légion et d'autres groupes d'anciens combattants ne sont pas assez riches pour faire concurrence aux collectionneurs du monde. Je n'étais pas au courant de ce cas. Je n'en avais pas entendu parler. Je serai heureuse de me renseigner auprès du ministère du Patrimoine canadien pour déterminer s'il y a une politique particulière permettant de protéger les intérêts canadiens dans le domaine des pièces historiques.

Le sénateur Banks : Je peux aider madame le ministre à cet égard. Il existe depuis plusieurs années un moyen d'empêcher l'exportation de pièces de ce genre. Il n'y a plus d'interdiction aujourd'hui. Il s'agit plutôt d'un moyen de trouver au Canada des acheteurs compétitifs pour les objets qui seraient autrement vendus à l'étranger pour un montant supérieur, je suppose. L'interdiction n'existe plus maintenant.

M. Beaudry, à qui les pièces appartiennent, est actuellement libre — ce qui n'était pas le cas il y a un certain temps — de les vendre à l'acheteur de son choix. La question est de savoir si le gouvernement est disposé à payer pour aider le Musée de la mer à acheter ces pièces pour un montant que M. Beaudry serait disposé à accepter.

L'honorable Hugh Segal : Je voudrais poser une question complémentaire au sujet de ces pièces. Lorsque madame le ministre ira aux renseignements, pourrait-elle envisager l'option d'une évaluation indépendante de la cloche et des autres artéfacts, qui serait remise à la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels pour qu'elle procède elle-même à des évaluations indépendantes, pour le compte de l'Agence du revenu du Canada, afin de déterminer si la valeur est équitable? Ordinairement, deux ou trois évaluations sont nécessaires.

(1450)

Si l'écart entre la valeur et ce qu'offre le musée est important, comme le sénateur Milne le pense, il serait peut-être possible d'envisager un don à la Couronne. Cela assurerait au donateur un avantage fiscal pouvant réduire sa perte, tout en permettant que les pièces restent au Canada. Madame le ministre pourrait faire cette suggestion, si elle le souhaite, pour donner suite aux instances présentées par l'honorable sénateur.

Le sénateur LeBreton : Je me renseignerai certainement à ce sujet.

LES RELATIONS CANADO-AMÉRICAINES

LE LAC DEVILS, AU DAKOTA DU NORD—LES EFFETS DU SYSTÈME DE CONTRÔLE DES INONDATIONS SUR LE MANITOBA

L'honorable Tommy Banks : Ma question porte sur un sujet qui préoccupe tous les Canadiens, surtout ceux qui vivent au Manitoba, et tous les citoyens américains vivant au Minnesota et au Dakota du Nord. Elle porte sur le lac Devils.

Nous n'avons pas vraiment eu de résolution, seulement un pis-aller si je puis dire, dans le cas du problème causé par le déversement des eaux à certains égards pollués du lac Devils, qui n'est pas un lac naturel puisqu'il n'est relié à aucun cours d'eau, dans la rivière Cheyenne qui se jette ensuite dans la rivière Rouge qui, elle, aboutit dans le lac Winnipeg.

À la suite des pressions exercées par les provinces et les États voisins du Dakota du Nord, on s'est entendu pour cesser tout déversement jusqu'à ce qu'on puisse régler la situation en installant un système approprié de filtration qui éviterait le transfert d'éléments non désirables et jusqu'à maintenant absents des bassins hydrographiques canadiens.

La Constitution canadienne est différente de la constitution américaine. Aux États-Unis, chaque État a des droits absolus. J'espère que le leader du gouvernement va de temps à autre nous tenir au courant des efforts déployés par le gouvernement du Canada pour régler cette situation et empêcher que cette eau ne pollue — il n'y a pas d'autre mot — la rivière Cheyenne, la rivière Rouge et le lac Winnipeg. Je sais que le gouvernement fait des efforts dans ce sens, mais la ministre pourrait-elle de temps à autre nous renseigner sur l'état d'avancement du dossier?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Comme l'honorable sénateur le sait, la question du lac Devils a refait surface et préoccupe les gens des deux côtés de la frontière. Je sais qu'elle a été abordée à l'autre endroit. Je vais demander au ministre des Affaires étrangères de me préciser où en sont les choses et de me renseigner sur les prochaines mesures que le gouvernement entend prendre.

[Français]

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer trois réponses à des questions orales posées par l'honorable sénateur Rivest, le 15 mai 2007, concernant les langues officielles, le rapport du commissaire, la recommandation visant la création d'un ministère des Langues officielles; par l'honorable sénateur Milne, le 30 mai 2007, concernant l'agriculture et l'agroalimentaire, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, la salubrité des aliments importés; et par l'honorable sénateur Segal, le 30 mai 2007, concernant les programmes d'Agriculture et Agroalimentaire Canada qui encouragent la consommation d'aliments locaux.

LES LANGUES OFFICIELLES

LE RAPPORT DU COMMISSAIRE—LA RECOMMANDATION VISANT LA CRÉATION D'UN MINISTÈRE DES LANGUES OFFICIELLES

(Réponse à la question posée le 15 mai 2007 par l'honorable Jean-Claude Rivest)

À titre de ministre de La Francophonie et des Langues officielles, l'honorable Josée Verner veille, en collaboration avec ses collègues du Cabinet, à ce que la dualité linguistique soit intégrée dans le processus d'élaboration des politiques et des programmes. Elle a la responsabilité de coordonner toute la gamme des activités du gouvernement fédéral en matière de langues officielles et entretient, à cette fin, un dialogue suivi, au nom du gouvernement du Canada, avec les communautés de langue officielle et des intervenants clés tels les gouvernements des provinces et des territoires. La ministre collabore étroitement avec ses collègues en vue de s'assurer que les institutions dont ils sont responsables se conforment intégralement à la Loi sur les langues officielles, y compris la partie VII de la loi, qui lui confère des responsabilités particulières à cet égard.

Le gouvernement s'est engagé à appuyer le bilinguisme et à apporter son soutien aux minorités de langue officielle dans tout le pays. Le Plan d'action pour les langues officielles de 2003 affectait 642 millions de dollars sur cinq ans à la promotion et à l'épanouissement des langues officielles au Canada. Le budget de 2007 a poursuivi dans cette voie en consacrant une somme additionnelle de 30 millions de dollars sur deux ans aux activités culturelles et parascolaires et aux centres communautaires. Ces activités contribueront à enrichir les bienfaits du bilinguisme parmi les jeunes, notamment au moyen de voyages-échanges et de programmes jeunesse.

Il est inexact d'affirmer que le président du Conseil privé de la reine, ou quelque autre ministre au sein du portefeuille du Premier ministre, a « une autorité latérale sur l'ensemble des ministères » ou « une autorité supraministérielle ». Il est d'usage que la coordination horizontale des questions soit assurée par un ministre, avec l'appui d'un ministère ou organisme.

L'AGRICULTURE ET L'AGROALIMENTAIRE

L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS—LA SÉCURITÉ DES IMPORTATIONS

(Réponse à la question posée le 30 mai 2007 par l'honorable Lorna Milne)

Tous les produits alimentaires importés au Canada et de production intérieure doivent être conformes aux normes canadiennes en matière de salubrité des aliments qui sont établies par Santé Canada et appliquées par l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA).

Les programmes canadiens d'inspection des importations se fondent sur les normes et principes reconnus à l'échelle internationale et sont comparables aux systèmes d'inspection des importations d'autres pays développés comme les États-Unis.

Les laboratoires des aliments de l'ACIA analysent des produits alimentaires canadiens et importés pour y dépister un vaste éventail de contaminants chimiques et biologiques.

En ce qui concerne l'hormone somatotropine bovine recombinante (STbr), Santé Canada a conclu, il y a déjà plusieurs années, qu'elle ne présentait pas de risque pour la santé humaine. Toutefois, la vente de STbr au Canada n'est pas approuvée en raison de préoccupations à l'égard de la santé animale. Les analyses ne peuvent faire la distinction entre la STbr (hormone artificielle de croissance) et la STb (hormone naturelle de croissance). Par conséquent, comme aucun risque pour la santé humaine n'est associé à la STbr et qu'aucune épreuve ne permet de distinguer la STbr de la STb, l'ACIA ne conduit pas d'analyse de dépistage de la STbr dans les produits laitiers importés.

En ce qui concerne l'étiquetage, la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation qui s'applique à tous les aliments vendus au Canada exige que l'étiquette des produits préemballés qui sont entièrement transformés ou produits dans un autre pays que le Canada porte la mention « Importé par » ou « Importé pour », à moins que l'origine géographique de l'aliment n'y soit indiquée — par exemple « Produit des États-Unis ».

Tous les produits de consommation vendus au Canada sont assujettis à la Loi et au Règlement sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation. Le Règlement n'exige pas de marque propre au pays d'origine même si les étiquettes apposées sur les produits alimentaires préemballés et les produits en vrac emballés ailleurs qu'au détail qui sont entièrement importés doivent porter la mention « Importé par » ou « Importé pour » et le nom du négociant canadien ou une indication de l'origine géographique.

Il faut indiquer le pays d'origine pour les fruits et légumes frais importés.

Les fruits et légumes transformés ainsi que la plupart des autres aliments contenant un mélange de matières produites au Canada et importées, comme le jus de pommes, peuvent porter la mention « Produit du Canada » lorsqu'il est possible de démontrer que la dernière étape importante de la production a eu lieu au Canada en utilisant de la main-d'œuvre canadienne directe et/ou des matières canadiennes dans une proportion d'au moins 51 p. 100.

Ce chiffre de 51 p. 100. est fonction du coût total de la main-d'œuvre directe et/ou des matières utilisées. Un produit a été créé au Canada si la dernière étape importante de sa production a eu lieu au Canada, conformément à la politique du gouvernement du Canada sur les produits « Fabriqués au Canada».

Il n'est pas nécessaire d'indiquer sur les aliments produits au Canada qu'ils sont canadiens. Par ailleurs, l'étiquette de certains produits agricoles importés doit mentionner leur pays d'origine, par exemple, produits laitiers, fruits et légumes frais, viande ou poisson importés.

Conformément à la politique générale du gouvernement du Canada en ce qui concerne l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation, l'ACIA applique les règles suivantes à son analyse de la déclaration du Canada comme pays d'origine sur des produits qui contiennent des matières brutes ou des constituants de l'étranger. La dernière transformation importante des produits doit avoir été réalisée au Canada, et au moins 51 p. 100. des coûts directs totaux de production ou de fabrication des biens doivent avoir été engagés au Canada.

Pour tous les produits alimentaires restants non enregistrés, l'ACIA applique la politique du gouvernement du Canada en ce qui concerne les produits « Fabriqués au Canada » lorsqu'elle fait une évaluation des énoncés « Fabriqué au Canada » ou « Produit du Canada ».

L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS—LA SÉCURITÉ DES IMPORTATIONS

(Réponse à la question posée le 30 mai 2007 par l'honorable Hugh Segal)

Agriculture et Agroalimentaire Canada examine la question de la consommation d'aliments locaux ainsi que d'autres questions posées au cours du processus de consultation pour la nouvelle politique du cadre stratégique agricole. Le gouvernement fédéral s'engage à travailler avec les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi qu'avec les intervenants afin de mettre au point le cadre stratégique pour contribuer à un secteur agricole compétitif et profitable dans les années à venir.


[Traduction]

LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867

PROJET DE LOI MODIFICATIF—RAPPORT DU COMITÉ—DÉPÔT DE DOCUMENT

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, j'aimerais me référer au compte rendu des Débats du Sénat du 14 juin. À cette date, madame le sénateur Cools m'a posé une question lorsque je parlais du rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles sur le projet de loi S-4 (durée du mandat des sénateurs). Elle m'a posé une question sur des renseignements concernant le libellé d'un projet de loi qu'elle avait demandés à des représentants du Bureau du Conseil privé et du ministère de la Justice lorsqu'ils ont comparu devant le comité le 21 mars 2007.

J'ai trouvé ces renseignements. Les renseignements demandés par madame le sénateur Cools ont été préparés par le ministère de la Justice et transmis à la greffière de comité, Shaila Anwar, le 27 mars 2007. Mme Anwar a précisé par la suite qu'elle distribuerait ces renseignements à tous les membres du comité immédiatement. Puisque madame le sénateur Cools n'est pas membre de ce comité, elle n'a peut-être pas reçu les renseignements quand ils ont été distribués. J'ai reçu une autre copie du document de M. King, du Bureau du Conseil privé, et je suis heureux de la déposer maintenant comme je m'étais engagé à le faire.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.


[Français]

ORDRE DU JOUR

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
LA LOI SUR L'EMPLOI DANS LA FONCTION PUBLIQUE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—MESSAGE DES COMMUNES—REJET D'UN AMENDEMENT DU SÉNAT—ADOPTION DE LA MOTION

Le Sénat passe à l'étude du message de la Chambre des communes concernant le projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

L'honorable Pierre Claude Nolin propose :

Que le Sénat approuve l'amendement apporté par la Chambre des communes à ses amendements au projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

Honorables sénateurs, je serai bref, ne serait-ce que pour vous faire part de ma fierté du fait que le gouvernement a reconnu l'efficacité de notre travail. Vous vous souviendrez que nous avions apporté 12 amendements à ce projet de loi; 11 de ces amendements ont été adoptés.

Il s'agissait de cinq groupes d'amendements; le premier groupe concernait les fameuses « cartes de bingo »; le deuxième concernait l'article de la loi qui vise la mise en vigueur de la loi; le troisième concernait les amendements qui touchent les employés occasionnels et temporaires d'Élections Canada; et le quatrième concernait la question des dates de naissance. Nous devons reconnaître avec satisfaction que tout le monde a calmé ses ardeurs à l'autre endroit pour accepter la sagesse de nos amendements et qu'ils ont recommu que nous avions raison.

Il y avait, en dernier lieu, l'amendement du sénateur Joyal sur l'augmentation des peines. Je pense que le gouvernement, et tous les députés se sont réjouis de la mise à niveau proposée par le sénateur Joyal.

[Traduction]

Le seul amendement qui pose légèrement problème à la Chambre a trait à l'entrée en vigueur — et seulement à l'entrée en vigueur de l'article qui vise ces fameuses cartes de bingo. Pour donner un peu d'historique aux honorables sénateurs, je dirai tout d'abord que cela ne faisait pas partie du projet de loi. La disposition a été présentée au comité de la Chambre des communes, qui a proposé une période d'entrée en vigueur de deux mois.

Lorsque le directeur général des élections a fait son exposé devant notre comité, il nous a convaincus qu'il était opportun de lui accorder 10 mois pour la mise en place de toute la technologie de l'information nécessaire à l'établissement de cette nouvelle forme de système, qui informera toutes les organisations politiques aux 30 minutes le jour des élections. Nous avons convenu de 10 mois. Après s'être penchés là-dessus, les députés ont décidé de raccourcir cette période à six mois.

Puisque je devais prendre la parole aujourd'hui, j'ai pris la liberté de converser au téléphone ce matin avec le directeur général des élections et de lui demander son avis sur la décision des députés. Bien entendu, il aurait préféré la période de dix mois. Cependant, il est disposé — les honorables sénateurs devront prendre ma parole là-dessus — à accepter les six mois.

Supposons que le projet de loi soit adopté et que la sanction royale soit donnée dans les meilleurs délais. La période de six mois commencera à ce moment-là. Il est prêt à faire le pari qu'il n'y aura pas d'élections générales avant six mois. Cependant, au besoin, il fera de son mieux. Comme il l'a dit ce matin, son degré de préparation sera vraisemblablement de 85 p. 100 à ce moment-là, de sorte que nous pouvons accepter cela.

Bref, l'amendement qui est devant nous propose de raccourcir la période de dix à six mois. J'estime que c'est équitable; c'est un bon compromis, de sorte que je recommande que nous acceptions cet amendement.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, tout comme le sénateur Nolin, je souhaite appuyer le message de la Chambre des communes. J'aimerais simplement ajouter quelques mots à ce qu'a dit le sénateur Nolin.

Lorsque le directeur général des élections a comparu devant le comité, il a demandé une période de dix mois. Voilà d'où provient le chiffre; ce ne sont pas les sénateurs présents qui l'ont proposé. Évidemment, il a proposé cette période en tenant compte de tous les autres aspects de mise en œuvre du projet de loi, qui sont passablement complexes.

La meilleure approche pour le directeur général des élections consisterait probablement à soulever la question des progrès réalisés dans la mise en œuvre du projet de loi au comité consultatif, où tous les partis sont présents, et à formuler des avis en conséquence. J'ai la conviction que nous pouvons résoudre les problèmes techniques qui pourraient surgir et qui devront être réglés pour que la « carte de bingo » puisse être mise en œuvre. Je suis d'accord avec le sénateur Nolin et je me ferai un plaisir d'appuyer le message de la Chambre des communes.

[Français]

Le sénateur Nolin : J'ai oublié de mentionner que, lors de la conversation téléphonique de ce matin, le directeur général des élections, M. Mayrand, m'a informé qu'il allait justement communiquer avec les divers partis politiques et son groupe consultatif pour s'assurer que, en ce qui concerne la mise en place de la mécanique appropriée à la production de ces fameuses cartes de bingo, tous soient bien au courant des défis auxquels il fait face afin que tout le monde participe avec lui à la réalisation des objectifs prévus dans le projet de loi. Vous aviez donc raison de déposer cette question et le directeur général des élections vous a devancé.

[Traduction]

L'honorable Lorna Milne : J'ai une autre question pour le sénateur. Je suis moi aussi prête à accepter cette réduction de temps.

(1500)

La principale préoccupation du directeur général des élections est d'avoir le temps nécessaire pour changer les programmes informatiques. Il a dit qu'il serait prêt dans une proportion de 85 p. 100, mais 85 p. 100 de la liste électorale, ce n'est pas beaucoup. J'aimerais avoir un peu plus de détails sur ce que le direction général des élections prévoit faire, si l'honorable sénateur n'a rien à ajouter.

Le sénateur Nolin : J'ai aussi demandé ce que représentaient ces 85 p. 100. S'agit-il de 85 p. 100 des noms? Non, le directeur général des élections a reçu ce chiffre de son expert ce matin. Étrangement, ils n'étaient pas au courant de cela avant mon appel. Il a vérifié auprès du personnel. Je crois comprendre que ces programmes ne sont pas mis à l'essai avant la tenue d'une élection. Les 15 p. 100 représentent probablement les ajustements qu'il faudra apporter en fonction des problèmes qui surgiront durant un scrutin.

Par conséquent, il est important d'être en contact avec les différentes organisations politiques pour suivre les progrès. Le fait que chaque électeur se verra attribuer un numéro facilitera ce processus. Cependant, nous ne savons pas à l'avance à quel point cela fonctionnera. Nous devrons apporter des correctifs à divers processus après les premières élections. Il ne fait aucun doute que les listes seront prêtes.

Le sénateur Milne : En fait, le sénateur est en train de nous dire que la question du temps dont disposerait Élections Canada importe peu. De toute façon, le délai serait de 15 p. 100 trop court. En outre, l'organisme devrait attendre la première élection pour mettre le programme à l'essai.

Le sénateur Nolin : C'est tout à fait juste.

Le sénateur Milne : Dans ce cas, je n'ai aucune objection.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

PROJET DE LOI MODIFIANT CERTAINES LOIS EN MATIÈRE D'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES

TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Nolin, appuyée par l'honorable sénateur Stratton, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques.

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au nom de l'opposition au sujet du projet de loi C-18. Je suis désolée d'avoir été absente hier, quand le sénateur Nolin a parlé du projet de loi et a fait un excellent résumé des audiences du comité sur le projet de loi C-18. Je suis reconnaissante au sénateur Nolin d'avoir dit que ce projet de loi n'était vraiment pas une mesure partisane et que son adoption rendrait le Canada plus sûr. Essentiellement, le projet de loi concerne surtout la science du droit et la promotion de l'utilisation accrue des techniques basées sur les empreintes génétiques pour l'identification des criminels et la quête de justice.

Les observations des sénateurs Joyal et Baker, à la suite de l'exposé du sénateur Nolin, étaient très intéressantes. Le sénateur Joyal a mentionné la nécessité d'un examen et le sénateur Baker a parlé du problème des erreurs administratives dans l'exécution d'une ordonnance. Le comité a traité de ces deux questions.

Je pense qu'il serait pertinent, avant d'ajourner ce débat à l'étape de la troisième lecture, de rappeler les observations formulées par le comité lors de sa dernière séance, à la suite de l'examen article par article du projet de loi C-18.

[Français]

Je vais donc lire les observations du rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles sur le projet de loi C-18.

Dans la mesure où les droits de la personne en vertu de la Charte canadienne sont respectés, il est justifié de donner à la police les outils nécessaires pour tirer pleinement partie des analyses génétiques dans les enquêtes criminelles. Le comité souscrit donc aux méthodes et objectifs généraux du projet de loi C-18, mais elle exprime des réserves au sujet de certains détails.

Premièrement, il y a le partage international de l'information. Nos préoccupations ont trait au partage avec l'étranger de renseignements contenus dans la Banque nationale de données génétiques. Nous craignons que des États ne réclament les renseignements en question dans le cas d'efforts pour réprimer des crimes qui n'en sont pas en vertu du droit canadien. Par exemple, la dissidence politique non violente peut être considérée comme un acte criminel dans certains territoires et nous ne voulons pas que la Banque en facilite la judiciarisation. Par conséquent, nous recommandons que l'un des critères du partage de renseignements avec un État étranger soit que l'infraction présumée avoir été commise à cet endroit soit considérée comme un acte criminel en vertu du droit canadien et que les lois et règlements appropriés soient ainsi amendés.

Deuxièmement, le comité a parlé du processus concernant une erreur administrative. Le comité s'inquiète également du fait que le procureur général peut présenter une requête ex parte, c'est-à-dire sans que la personne qui en fait l'objet en soit avisée et en son absence. En vue de rectifier une erreur d'écriture dans une ordonnance de prélèvement pour analyse génétique, étant donné que, dans presque tous les cas, l'ordonnance défectueuse aura déjà été exécutée afin d'obtenir une preuve génétique pouvant être utilisée ultérieurement contre un particulier, le gouvernement devrait envisager une disposition future en vertu de laquelle ce dernier ou son avocat recevrait un avis préalable de la requête ou, serait informé du fait que la demande a été faite et que l'ordonnance a été modifiée.

La troisième observation du comité concerne l'évaluation du service effectué par les laboratoires judiciaires. Le comité prend acte de la dernière recommandation faite par la vérificatrice générale du Canada. Dans son rapport de mai 2007 concernant la gestion des services de laboratoires judiciaires, elle a dit que la GRC devrait veiller à ce que les parlementaires reçoivent les renseignements dont ils ont besoin pour demander des comptes au gouvernement sur la prestation des SLJ. Le comité tient à souligner que le gouvernement a besoin de rapports complets et transparents afin de suivre et d'évaluer les faits cumulatifs que les textes successifs ont eus non seulement sur les SLJ, mais sur le fonctionnement de la Banque de données génétiques et sur son incidence sur les particuliers.

La quatrième observation du comité concerne la nécessité pour le projet de loi sur l'identification par les empreintes génétiques de faire l'objet d'une revue parlementaire. Cette revue est déjà en retard de deux ans.

(1510)

La Loi sur l'identification par les empreintes génétiques est entrée en vigueur le 30 juin 2000. En vertu de l'article 13 de cette loi, un comité du Sénat, de la Chambre des communes ou des deux Chambres du Parlement devrait effectuer un examen de ses dispositions et de son fonctionnement dans un délai de cinq ans. À ce jour, rien n'a été fait. Le comité s'inquiète de constater que le Parlement aura adopté deux projets de loi qui ont servi à établir une Banque nationale de données génétiques et qui sont maintenant en train d'affecter la manière dont la Banque est utilisée sans que ce système ait fait l'objet d'un examen fondamental. Il faut procéder de toute urgence à un examen du système d'identification génétique afin que le Parlement puisse déterminer s'il convient d'y apporter des améliorations et de réviser la manière dont la Banque est utilisée.

[Traduction]

Il semble bien que cela répond aux préoccupations dont a longuement parlé le sénateur Joyal, et ce sont les seules considérations sur lesquelles je souhaite attirer l'attention du Sénat à l'étape de la troisième lecture.

Comme je l'ai dit dans mon discours le 9 mai 2007, je considère ce projet de loi comme une étape importante. Il a d'ailleurs été adopté à la Chambre des communes avec une seule abstention. Il a été adopté par tous les partis, et il a obtenu le même soutien au comité sénatorial. Non seulement ce projet de loi améliore la sécurité des Canadiens, mais encore il met la science, si vous voulez, au service de notre système judiciaire, notamment en ce qui concerne les infractions sérieuses.

Ce fut un honneur pour moi que de prendre la parole au nom de l'opposition sur ce projet de loi, et je ne doute pas qu'il recevra l'appui de tous les sénateurs.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adoption la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

PROJET DE LOI SUR LES MARQUES OLYMPIQUES ET PARALYMPIQUES

DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur LeBreton, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Tkachuk, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-47, Loi concernant la protection des marques liées aux Jeux olympiques et aux Jeux paralympiques et la protection contre certaines associations commerciales trompeuses et apportant une modification connexe à la Loi sur les marques de commerce.

L'honorable Larry W. Campbell : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-47. Je serai relativement bref, puisque le ministre a bien expliqué hier ce projet de loi, en fournissant beaucoup de détails.

C'est un projet de loi qui précise la volonté du Parlement en ce qui a trait à la protection et aux recours judiciaires dont devrait disposer le Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Vancouver, ou COVAN. Le COVAN ne sera pas tenu de prouver l'existence d'un préjudice irréparable, ce qui constitue le critère juridique le plus difficile à respecter en cas de poursuite. Il pourra ainsi réagir rapidement et efficacement pour mettre un terme à l'utilisation illicite de cette marque.

Ce projet de loi est conforme aux dispositions juridiques ayant accordé aux Jeux olympiques une protection accrue en Australie, aux États-Unis, en Grèce et en Italie. Il vise uniquement les utilisations commerciales et ne touchera aucunement les personnes qui agissent sans but lucratif. Il va permettre au COVAN de recueillir d'importantes sommes d'argent en s'associant à des commanditaires et des partenaires et en accordant des licences d'utilisation, ce qui lui permettra d'atténuer l'effet des éventuels dépassements de coûts résultant de la tenue des Jeux olympiques. Il n'est pas sans intérêt de souligner qu'environ 40 p. 100 des recettes du COVAN proviendront de telles sources.

Le projet de loi prévoit clairement des exceptions pour protéger la liberté d'expression. Les créations artistiques, la diffusion de nouvelles, les critiques et les parodies figurent parmi ces exceptions. Il prévoit aussi l'utilisation commerciale légitime de certains mots servant de marques olympiques et paralympiques. Ainsi, les entreprises pourront employer ces mots dans les indications géographiques qui décrivent leur marché ou leurs services, du genre de l'adresse « 2010, avenue Olympique ». Les athlètes dont les commanditaires ne figurent pas parmi les commanditaires officiels des Jeux olympiques pourront maintenir leur relation avec leurs commanditaires. Quiconque a adopté ou employé une marque olympique avant le 2 mars 2007 aura le droit de continuer d'employer cette marque aux mêmes fins et ne sera pas obligé de changer le nom de son entreprise.

Honorables sénateurs, il s'agit d'un projet de loi important pour les Jeux olympiques, pour Vancouver, pour la Colombie-Britannique et pour le Canada. Je vous invite à l'appuyer.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur LeBreton, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.)

LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Oliver, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-14, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (adoption).

L'honorable Mac Harb : Honorables sénateurs, le projet de loi C-14 est en fait l'ancien projet de loi C-76, qui a été présenté à l'origine par l'ancien gouvernement libéral au cours de la dernière législature. On pourrait penser, honorables sénateurs, que nous devrions célébrer aujourd'hui le fait que le Sénat est maintenant saisi de ce projet de loi, mais la réalité est que ce n'est pas vraiment quelque chose à célébrer. Nous devrions plutôt déplorer le fait qu'il a fallu plus de dix ans pour qu'une bonne mesure législative nous parvienne de l'autre endroit, tout cela à cause de retards indus, de querelles intestines, de renvois inutiles et d'un geste irresponsable de la part de certaines personnes à l'autre endroit. Évidemment, cela montre ce qui arrive lorsque les rôles sont renversés. Nous sommes maintenant dans l'opposition et nous avons été capables de faire progresser très rapidement, en fait en un temps record, l'étude de ce projet de loi, et nous sommes ici aujourd'hui pour veiller à ce que tout se passe bien afin que le projet de loi C-14 puisse enfin devenir loi.

Honorables sénateurs, pourquoi ce projet de loi est-il si important? C'est parce qu'il touche la vie d'un grand nombre de Canadiens, soit environ 2 000 chaque année. La mesure législative proposée, dont nous débattons aujourd'hui, vise à atténuer la distinction entre les enfants adoptés et les enfants nés de citoyens canadiens en ce qui concerne l'admissibilité à la citoyenneté. Les enfants adoptés auraient automatiquement la citoyenneté canadienne, tout comme les enfants nés de citoyens canadiens.

À l'heure actuelle, tout parent canadien qui adopte un enfant non canadien doit tout d'abord faire une demande de statut de résident permanent pour l'enfant, puis veiller à ce que l'enfant remplisse les critères de résidence avant de pouvoir faire en son nom une demande de citoyenneté. Les citoyens canadiens qui adoptent des enfants à l'extérieur du Canada peuvent être aux prises avec un processus long et coûteux avant que leurs enfants puissent obtenir la citoyenneté. Par contre, les enfants nés à l'étranger de parents Canadiens sont automatiquement citoyens canadiens. En vertu de la loi existante, les enfants adoptés sont traités différemment des enfants biologiques nés à l'étranger de citoyens canadiens.

[Français]

En ce qui a trait à la Loi sur la citoyenneté daté de 1997, la modification proposée est fondée sur des consultations et des propositions législatives antérieures : le projet de loi C-63, proposé au Parlement en 1998, le projet de loi C-16, présenté en 1999, le projet de loi C-18, présenté en 2002 et le projet de loi C-76, proposé en 2007.

(1520)

[Traduction]

Comme je l'ai mentionné, le gouvernement libéral avait présenté les projets de loi précédents qui, malheureusement, n'ont pas été adoptés. Le dernier d'entre eux, le projet de loi C-76, avait été déposé au Parlement en 2005. Nous espérons que le projet de loi C-14 franchira les différentes étapes pour être adopté le plus tôt possible.

Le gouvernement libéral avait travaillé fort en faveur des familles adoptives en établissant un encouragement fiscal permettant de compenser dans une certaine mesure les énormes frais à engager pour adopter un enfant à l'étranger. Dans certains cas, ces frais se chiffrent en dizaines de milliers de dollars. Cet encouragement fiscal était un important progrès pour les familles canadiennes. Le projet de loi à l'étude représente un autre pas dans la bonne direction.

Honorables sénateurs, de nombreux Canadiens choisissent d'adopter des enfants nés à l'étranger pour diverses raisons, notamment pour agrandir leur famille ou pour aider des enfants qui vivent dans des conditions difficiles dans leur pays d'origine. Bref, il s'agit de leur offrir la possibilité d'un avenir meilleur. En 2004, des Canadiens ont adopté 1 955 enfants nés à l'étranger, par rapport à 2 180 l'année précédente. Le nombre d'adoptions internationales a été relativement stable au Canada dans les dix dernières années, se situant entre 1 800 et 2 200 par an.

Il y a lieu de mentionner que les principaux pays d'origine des enfants ainsi adoptés sont la Chine, Haïti, la Russie, la Corée du Sud, les États-Unis, les Philippines, la Thaïlande, la Colombie, l'Inde, l'Éthiopie et le Bélarus, pour ne nommer que ceux-ci.

La décision de procéder à une adoption internationale n'est pas prise à la légère. Ces adoptions sont les plus difficiles à organiser pour plusieurs raisons. Il y a d'abord les lois, les règlements et les politiques du pays d'origine qui varient constamment, les problèmes politiques que suscite dans certains pays l'adoption d'enfants par des parents étrangers, le manque de scrupules de certains intermédiaires privés dans ces pays ainsi que l'obligation de satisfaire aux lois canadiennes sur la citoyenneté et l'immigration, à la réglementation provinciale ainsi qu'à la Convention de La Haye sur l'adoption internationale. Finalement, il y a la difficulté de joindre les responsables étrangers, les problèmes linguistiques et culturels et l'interprétation des procédures.

Dans les affaires de droit international, il n'y a pas de garanties. Une famille peut entreprendre des démarches, puis découvrir à mi-chemin que les procédures ou les frais ont changé ou que le programme a été annulé sans préavis. De plus, il faut prévoir un temps suffisant pour que chaque organisme et ministère prenne les mesures nécessaires et transmette les documents voulus. La plupart des adoptions internationales prennent le plus souvent un ou deux ans, parfois beaucoup plus, et coûtent en moyenne 18 000 $.

Après avoir surmonté ces obstacles et payé ces frais, les familles doivent affronter la bureaucratie des services d'immigration. Les parents qui espèrent adopter un enfant né à l'étranger doivent organiser un parrainage par l'entremise d'un centre canadien d'immigration.

[Français]

Cette législation est d'une grande importance non seulement pour les enfants adoptés et les familles adoptives, mais aussi pour notre pays. Étant donné le déclin du taux de natalité, nous devons compter de plus en plus sur l'immigration si nous voulons avoir suffisamment d'habitants pour assurer notre avenir.

[Traduction]

De toute évidence, honorables sénateurs, le Canada doit travailler pour atténuer les obstacles affrontés par les parents adoptifs. Même si le processus d'adoption relève des provinces, une fois les démarches terminées au niveau provincial, le projet de loi C-14, s'il est adopté, assurera l'attribution automatique de la citoyenneté canadienne à l'enfant adopté, comme s'il était né de parents canadiens.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-14 constitue une bonne mesure législative dont l'adoption n'a que trop tardé au Canada. Il respecte les compétences provinciales et remplit les responsabilités fédérales. Il a pour objet d'aider les familles canadiennes à accueillir leur enfant nouvellement adopté.

Le projet de loi modifie la Loi sur la citoyenneté en vue de l'attribution de la citoyenneté canadienne à un enfant adopté par des Canadiens à l'étranger. Autrement dit, il traite les enfants adoptés de la même façon que les enfants biologiques. Comme je l'ai déjà dit, il élimine l'exigence pour un enfant adopté de devenir d'abord résident permanent du Canada, puis de demander la citoyenneté par la suite.

Cette proposition a été appuyée par les tribunaux. La Cour fédérale a indiqué que les distinctions fondées sur l'adoption violent les droits à l'égalité garantis par l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. De plus, en vertu de la loi actuelle, les enfants adoptés par des parents canadiens qui vivent et veulent continuer à vivre à l'étranger ne peuvent pas devenir des résidents permanents et n'ont donc pas la possibilité de demander la citoyenneté canadienne.

En 2001, le gouvernement libéral a adopté une mesure spéciale provisoire pour régler le problème dans le cadre de la Loi sur la citoyenneté, mais ce n'était qu'une solution temporaire. L'adoption et l'entrée en vigueur du projet de loi C-14 constitueront une solution permanente.

En vertu du projet de loi C-14, l'adoption doit répondre à quatre critères précis. Premièrement, elle doit être faite dans l'intérêt supérieur de l'enfant, selon la définition de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. Il était important de veiller au respect des dispositions de cette convention, ce que fait le projet de loi.

Deuxièmement, l'adoption doit créer un véritable lien affectif parent-enfant entre l'adoptant et l'adopté, ce qui implique la fondation d'une famille.

Troisièmement, l'adoption doit avoir été faite conformément aux lois du lieu de l'adoption et du pays de résidence de l'adoptant. Autrement dit, elle doit être conforme au droit de la province où l'adoption a lieu ainsi qu'au droit du pays de naissance de l'enfant.

Quatrièmement, l'adoption ne doit pas principalement viser l'acquisition d'un statut ou d'un privilège relatifs à l'immigration ou à la citoyenneté. En d'autres termes, il ne doit pas s'agir d'une adoption de commodité.

De plus, honorables sénateurs, le projet de loi reconnaît le caractère particulier du processus d'adoption au Québec. Comme nous l'avons déjà entendu, c'est là un aspect essentiel du projet de loi.

Nos collègues de l'autre endroit ont fait du bon travail dans les circonstances, en œuvrant ensemble à l'amélioration de cette mesure. Ils ont examiné les questions liées au processus d'appel et à l'adoption d'adultes, si les parents adoptifs ont joué un rôle parental avant que la personne en cause n'ait atteint l'âge de 18 ans.

Je félicite mes collègues de l'autre endroit, et plus particulièrement les membres du comité permanent, pour leur travail qui a permis d'étudier le projet de loi, de l'adopter et de le transmettre au Sénat sans retard indu.

Enfin, il s'agit d'un projet de loi en faveur de l'équité, du bon sens et de la compassion. Une fois le processus d'adoption terminé, il s'agira de parents canadiens, d'enfants canadiens élevés au Canada et ayant les mêmes droits et privilèges que tous les autres enfants canadiens.

J'encourage les honorables sénateurs à appuyer ce projet de loi.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

(1530)

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Cochrane, appuyée par l'honorable sénateur Segal, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-22, Loi modifiant le Code criminel (âge de protection) et la Loi sur le casier judiciaire en conséquence.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je souhaite participer au débat à l'étape de la deuxième lecture concernant le projet de loi C-22, un projet de loi que je considère très sérieux. Il touche le statut des adolescents par rapport au Code criminel, puisqu'il ferait passer l'âge du consentement de 14 à 16 ans. Pour nous, la Chambre du second examen objectif, il importe de réfléchir aux répercussions que pourrait avoir ce projet de loi, s'il est adopté, sur la société canadienne telle que nous la connaissons.

Je ne voudrais pas m'attarder indûment sur l'historique de l'âge du consentement. Cependant, bon nombre d'entre nous qui ont étudié l'histoire du Canada sauront que, à un moment donné, on pouvait se marier dès l'âge de 12 ans. Pourquoi? À cette époque, le gouvernement dit colonial souhaitait un accroissement de la population. Les gens se mariaient très tôt, dès qu'ils étaient capables de fonder une famille. L'âge du consentement au mariage était adapté aux conditions socioéconomiques de l'époque.

Aujourd'hui, on nous demande d'étudier la possibilité de relever l'âge du consentement, une mesure qui aura certainement des répercussions sur le genre de société dans laquelle nous vivons.

Il faut tout d'abord comprendre l'activité sexuelle des adolescents. Qui sont donc les adolescents qui participent à des activités sexuelles? Je voudrais porter à l'attention des honorables sénateurs le rapport le plus récent de Statistique Canada, celui de 2005, une période assez recente et donc pertinente. Selon ce rapport, 5 p. 100 des adolescents âgés entre 12 et 13 ans ont déjà eu des relations sexuelles; 13 p. 100 des adolescents âgés de 14 à 15 ans ont eu des relations sexuelles, et 41 p. 100 de ceux âgés de 16 à 17 ans ont eu des relations sexuelles. Parmi les adolescents âgés de 14 à 15 ans qui ont des activités sexuelles, 37 p. 100 ont eu leur premier contact sexuel entre 12 et 13 ans, 36 p. 100 à 14 ans et 27 p. 100 à 15 ans.

La donnée que nous devons garder à l'esprit, c'est que 41 p. 100 des adolescents canadiens de 16 et 17 ans ont eu des rapports sexuels.

Il est important que nous soyons appelés à légiférer dans un domaine qui touchera de nombreux adolescents au Canada, 41 p. 100 d'entre eux, en fait. J'ai tiré ce chiffre du témoignage de Mme Lynn Barr-Telford, du Centre canadien de la statistique juridique, à Statistique Canada, que le comité de l'autre endroit a entendue le 29 mars 2007. C'est le premier point que je voulais porter à l'attention des honorables sénateurs.

Le deuxième point a trait aux adolescents les plus vulnérables, soit ceux qui se retrouvent pris dans le système juridique canadien. Honorables sénateurs, il faut ajouter cela aux statistiques que madame le sénateur Dyck a mentionnées hier soir. Il était très tard, vers 22 heures. J'écoutais attentivement le sénateur lorsqu'elle a décrit la situation dans laquelle se retrouvent les jeunes Autochtones eu égard à l'éducation.

Aujourd'hui, mettons l'accent sur la situation des jeunes Autochtones eu égard au système de justice pénale. Cela me préoccupe beaucoup, honorables sénateurs. Des sénateurs se souviendront qu'en 2002, le Sénat a été appelé par le gouvernement précédent à examiner la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Je crois que madame le sénateur Milne présidait le Comité sénatorial permanent de la justice et des affaires constitutionnelles lorsqu'il a examiné la loi. Je me souviens que le sénateur Grafstein faisait partie de ce comité.

Nous avons proposé un amendement au projet de loi C-7. Nous avions signalé au Sénat que, à notre humble avis, le projet de loi entrait en conflit avec la Charte. Par la suite, la Cour d'appel du Québec et la Cour d'appel de la Colombie-Britannique ont confirmé notre impression. Depuis, le problème a été réglé.

Tous les amendements que nous avions proposés à l'époque, sauf un, ont été rejetés. Je rappelle aux honorables sénateurs quel amendement a été adopté par le Sénat, par une voix. Je croyais que cet amendement serait défait, comme les autres, mais il a été adopté. Il portait sur les conditions de détermination de la peine dans le cas des jeunes Autochtones. L'alinéa 38(2)d) de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, sur les principes de détermination de la peine, est le suivant :

d) toutes les sanctions applicables, à l'exception du placement sous garde, qui sont justifiées dans les circonstances doivent faire l'objet d'un examen, plus particulièrement en ce qui concerne les adolescents autochtones [...]

Honorables sénateurs, cela renvoie directement à nos préoccupations au sujet de la situation des jeunes Autochtones aux prises avec le système de justice pénale. Si nous devons légiférer et créer de nouvelles situations qui pourraient amener les adolescents devant les tribunaux de justice pénale, nous devons nous demander quelles seront les répercussions sur les jeunes Autochtones.

J'aimerais rappeler aux honorables sénateurs les chiffres révélateurs concernant les jeunes Autochtones. J'ai pris ce qui suit dans un rapport du « Quotidien » de Statistique Canada du mercredi 13 octobre 2004. Permettez-moi de vous lire le paragraphe qui traite de cette question :

Les jeunes autochtones représentaient une admission sur cinq dans les services correctionnels. Parallèlement, ils constituaient environ 5 p. 100 de la population totale des jeunes. On a dénombré environ 6 200 admissions de jeunes autochtones à un type quelconque de service correctionnel. Le quart de toutes les détentions après condamnation, 22 p. 100 de toutes les admissions en détention provisoire et 15 p. 100 de toutes les admissions en probation étaient des jeunes autochtones.

En termes simples, les jeunes Autochtones représentent 5 p. 100 de l'ensemble des jeunes, mais 25 p. 100 des jeunes envoyés en détention.

Le rapport se poursuit ainsi :

Les jeunes autochtones affichaient des niveaux plus élevés de représentation dans les détentions après condamnation comparativement à leur représentation dans la population de jeunes canadiens, et ce, dans presque toutes les provinces et tous les territoires. Par exemple, en Colombie-Britannique, le nombre de jeunes autochtones admis en détention après condamnation était de six fois supérieur à leur représentation dans la population de jeunes.

Honorables sénateurs, cela fournit un bref aperçu du problème concernant les jeunes Autochtones. Les adolescents et adolescentes autochtones sont fortement représentés dans les services correctionnels, mais tout particulièrement les adolescentes autochtones. Par exemple, en 2004-2005, les adolescentes autochtones représentaient 35 p. 100 de tous les placements d'adolescentes sous garde en milieu fermé et 29 p. 100 de tous les placements d'adolescentes sous garde en milieu ouvert. Autrement dit, il y a une double distorsion. La première concerne le groupe et la deuxième, la jeune autochtone. C'est un grave problème, honorables sénateurs.

(1540)

Ce n'est peut-être pas très évident dans le projet de loi C-22, c'est pourquoi je le souligne. J'ai relu les témoignages faits devant le comité de l'autre endroit. À l'étape de l'étude au comité, 37 témoins ont comparu et aucun d'entre eux n'a parlé du problème des jeunes autochtones face aux crimes de nature sexuelle ou aux activités sexuelles. Le rapport de Statistique Canada sur lequel je voudrais attirer votre attention renferme des données importantes aussi. Selon ce document, on aurait observé une baisse généralisée correspondant à un quart du nombre des incarcérations liées à des infractions sexuelles entre 1990 et 2005. En d'autres termes, au cours des 15 dernières années, le nombre des infractions sexuelles n'aurait pas augmenté. Il a diminué de 25 p. 100.

Quelle est la raison d'être de ce projet de loi? Le problème des infractions sexuelles au Canada aurait-il atteint un niveau de « crise » tel que cela justifie ce projet de loi?

Honorables sénateurs, d'après le témoignage de Statistique Canada, ce n'est pas ce qui ressort de l'analyse qu'il a fournie. Selon le témoignage de Statistique Canada, à partir des statistiques actuelles, il lui est impossible de prédire l'impact direct qu'aura l'adoption de ce projet de loi sur le nombre et la nature des infractions sexuelles qui seront signalées à la police.

Autrement dit, il manque des renseignements; c'est ce qui ressort du plus grand nombre de témoignages présentés au comité de l'autre endroit que j'ai pu lire rapidement, sachant que le gouvernement veut faire progresser ce projet de loi, ce à quoi je ne m'oppose guère. Cependant, ce projet de loi renferme des éléments sur lesquels nous devrons nous pencher lorsqu'il sera soumis à l'étude du comité.

Honorables sénateurs, des observations ont été faites par d'autres sénateurs qui ont pris part au débat, notamment madame le sénateur Callbeck qui a signalé un problème concernant l'âge du consentement en ce qui a trait au mariage. Dans les provinces, l'âge du consentement au mariage est 16 ans, mais dans les territoires, c'est 15 ans. S'il devient illégal pour quelqu'un d'avoir une relation sexuelle avec une personne de cinq ans son aînée, et si c'est illégal dans une province mais légal dans un territoire, il nous faudra nous pencher sur cette disposition parce qu'elle donne lieu à un véritable problème. La définition de mariage et de l'âge du consentement au mariage est une question de compétence provinciale, bien sûr. Lors de l'étude de la Loi sur le mariage civil, nous savions sur quoi nous pouvions légiférer et quelle était la prérogative des provinces. Nous devons revoir cette situation pour qu'il n'y ait pas d'incompatibilité.

Prenons quelques statistiques du Yukon. Au Yukon, les Autochtones adultes représentent 74 p. 100 de toute la population carcérale. En d'autres termes, pour tenir compte de la réalité autochtone là-bas, il nous faudra uniformiser, dans un sens ou l'autre, l'âge du consentement au mariage dans les territoires par rapport à celui qui est établi dans les provinces, parce que dans les territoires il est possible de se marier dès l'âge de 15 ans. Daphne Gilbert, professeure à l'Université d'Ottawa, a soulevé cette question technique quand elle a comparu à l'autre endroit, et le comité voudra sûrement revenir sur ce problème et voir comment le résoudre.

Honorables sénateurs, en dernier lieu, il y a le contexte général de ce projet de loi. Il n'y a aucun doute que lorsque nous apportons des changements qui semblent inoffensifs ou bien intentionnés, et tous ceux qui sont en faveur du projet de loi veulent protéger les adolescents, nous devons étudier attentivement quelles en seraient les répercussions sur l'éducation sexuelle des adolescents, sur la possibilité pour eux d'obtenir des conseils et du soutien ainsi que sur notre façon d'aborder la question de la sexualité chez les jeunes.

Honorables sénateurs, je vous renvoie à un autre rapport que Statistique Canada a publié en 2003, intitulé Issues de la grossesse J'aimerais en citer les principales conclusions.

Son Honneur le Président : Je regrette de devoir interrompre le sénateur, mais son temps de parole est écoulé.

Le sénateur Cools : Demandez une prolongation.

Des voix : D'accord.

Le sénateur Joyal : Honorables sénateurs, je vous remercie.

Comme vous le constatez, cette importante étude est très longue. Statistique Canada l'a publiée en 2003. L'étude est arrivée à la conclusion suivante :

De 1994 à 1997, le taux de grossesses a diminué chez les adolescentes, entraînant ainsi de plus faibles taux de natalité et de mortalité fœtale. En revanche, durant cette période, le taux d'avortements est demeuré stable, si bien qu'un peu plus de la moitié des grossesses chez les adolescentes ont abouti à un avortement en 1997.

Honorables sénateurs, c'est un problème grave parce que l'avortement est maintenant devenu un moyen de contraception, une façon d'éviter la grossesse. Les adolescentes n'utilisent pas la pilule ou d'autres méthodes pour se protéger. Elles se disent : « Si je suis enceinte, je me ferai avorter. » Il est étonnant de lire ces statistiques. La moitié des adolescentes qui tombent enceintes ont recours à l'avortement. Voilà la conclusion de cette importante étude.

En d'autres termes, il existe un grand besoin d'éducation sexuelle. Lorsque nous adoptons un projet de loi qui aura une incidence sur le statut des adolescents en matière sexuelle au Canada, qui apporte un changement qui semble simple, en principe — faire passer l'âge de 14 à 16 ans — nous devons faire attention au fait que nous donnons aux adolescents une responsabilité d'adulte, en ce qu'ils doivent décider de ce qu'ils feront de leur vie, et nous devons penser à la façon dont le système d'éducation peut les aider à comprendre les implications des activités sexuelles. Avant de criminaliser les activités sexuelles des adolescents à un âge où ils devraient être ouverts et demander conseil, nous devrions consulter des spécialistes. J'espère que le comité pourra entendre de spécialistes, de représentants des jeunes, de travailleurs sociaux ainsi que de responsables de l'éducation et des collectivités autochtones comment ce problème est traité dans leur milieu, de sorte que, au moment de légiférer, nous aurons, dans toute la mesure du possible, une vue d'ensemble des implications d'un projet de loi aussi important.

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, je voulais poser quelques questions à notre distingué collègue, mais il manque de temps. Je vais donc parler brièvement et céder ma place.

En théorie, bien que je ne sois pas en désaccord de quelque façon que ce soit au sujet des rapports de Statistique Canada sur l'activité sexuelle chez les jeunes, et que je m'en remets à tous les avocats dans cette pièce — et Dieu sait qu'ils sont probablement majoritaires — je ne vois pas le Code criminel comme un programme d'éducation sexuelle. Je ne considère pas le Code criminel comme un instrument social destiné à favoriser certains comportements. Je n'accepte certainement pas la notion que le Code criminel devrait s'appliquer différemment à différents groupes de Canadiens, définis en fonction de paramètres géographiques ou ethniques.

(1550)

Dans une société d'observation volontaire, le Code criminel a pour but de définir des normes. Dieu merci, nous n'avons pas assez de policiers pour faire appliquer le Code criminel d'une façon générale. Dans l'ensemble, ce sont les normes qu'il définit qui constituent la base sur laquelle repose la façon de vivre de l'essentiel de notre société.

J'ai le plus grand respect pour ce qu'a dit mon éminent collègue, qui a bien plus d'expérience que moi, au sujet des incidences sociales auxquelles les sénateurs doivent réfléchir.

Pour être juste envers le sénateur, je dirai qu'il n'a pas affirmé que l'action préventive du gouvernement destinée à protéger les jeunes grâce à ce changement législatif équivaut en quelque sorte à de l'insensibilité sociale. Toutefois, il a bien dit que cela pourrait être un effet pervers de cette mesure, qui irait au-delà de ce qu'on attend de ces modifications du Code criminel.

Dans les nombreux messages que j'ai reçus de centaines de parents, d'enseignants et d'autres personnes de tous les coins du pays, j'ai perçu une ferme volonté de voir ce projet de loi adopté et cette protection supplémentaire mise en place.

Je ne crois pas que nous ayons nécessairement à consulter Statistique Canada au sujet de questions d'équilibre humaniste et moral, qui, à mon avis, protègent en général l'ensemble de la société. Je crois que c'est là l'intention du projet de loi. C'est la raison pour laquelle je l'appuie et souhaite qu'il soit renvoyé au comité le plus rapidement possible.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je trouve assez curieuse l'analyse du sénateur Segal. Si l'application du Code criminel à des personnes plus jeunes augmente le taux de récidive, croit-il que ce serait un résultat acceptable du projet de loi?

Le sénateur Segal : Bien sûr que non. Toutefois, je ne crois pas que le Code criminel doive se substituer aux parents, à la pression des pairs et à la compréhension des normes et des règles sociales. Ce n'est pas là le rôle du Code criminel. Comme mon éminent collègue le sait mieux que moi, le Code criminel définit les règles en fonction desquelles Sa Majesté a le droit d'intervenir pour protéger le public contre des actes répréhensibles. Je ne pense pas qu'il convienne de s'appuyer sur le Code criminel pour élever les enfants ou leur inculquer le sens du bien et du mal et du respect des droits d'autrui, surtout quand ils sont jeunes. Le rôle du Code criminel est d'établir les règles d'intervention de la Couronne. C'est l'objet de cette loi. S'il faut s'attaquer à des problèmes sociaux, il faut le faire ailleurs et dans un autre contexte. Il ne faut évidemment pas éviter ces problèmes, mais il serait à la fois injuste et impossible d'en laisser le soin au Code criminel.

Le sénateur Grafstein : Comme le dit le sénateur, le droit criminel a pour objet de définir des principes ou des normes. Toutefois, il ne faut pas que le droit criminel sombre dans le ridicule. Lorsque des faits sociologiques pèsent beaucoup plus lourd que l'argument concernant l'inscription dans le droit criminel de questions liées au comportement, alors le droit criminel sombre dans le ridicule. De toute évidence, ce n'est pas une situation souhaitable parce que nous sommes là pour faire respecter les normes réalistes.

Si l'application de cette mesure augmente le taux de récidive et intensifie le comportement criminel, cela va à l'encontre de l'objet du Code criminel et du droit criminel.

Le sénateur Segal : Je conviens avec l'honorable sénateur qu'une loi qui jette le discrédit sur l'administration de la justice n'est pas à recommander. Je crois cependant, si l'on considère les travailleurs sociaux qui aident les tribunaux par l'intermédiaire des organismes d'intervention, qu'en présence de moyens suffisants, nous avons la capacité de nous montrer sensibles aux circonstances. Les procureurs de la Couronne doivent considérer non seulement la loi, mais aussi le contexte des événements allégués et déterminer si le fait de porter des accusations sert l'intérêt public.

Dans cette optique, les observations de l'honorable sénateur et les questions soulevées par le sénateur Grafstein feront toutes partie du contexte qui sera pris en compte lorsque les procureurs de la Couronne chercheront à déterminer l'intention criminelle, qui constitue l'un des aspects essentiels de l'administration du Code criminel.

J'accepte le principe général qu'on ne devrait pas adopter une mesure législative qui, par définition, jetterait le discrédit sur l'administration de la justice. Je crois cependant que nous pouvons, en tant que société, agir pour protéger les jeunes sans avoir à nous soucier constamment des résultats des analyses administratives ou statistiques qui seront faites à l'avenir. Autrement, nous ne pourrions jamais agir. Je crois que les Canadiens souhaitent que les jeunes soient protégés de la façon précise que le projet de loi propose.

Le sénateur Grafstein : Je suppose, par conséquent, que le sénateur qui propose ce projet de loi ne s'opposera pas à ce que le comité examine des renseignements sociologiques pour déterminer si les normes ou les principes proposés auront ou non les effets préjudiciables que je signale.

Le sénateur Segal : Je n'ai pas à exprimer un point de vue sur ce que le comité directeur du comité jugera approprié, mais je suis persuadé que mes collègues sénateurs agiront dans l'intérêt public lorsqu'ils décideront de la portée de l'étude nécessaire pour permettre au comité de faire son travail, qui sera excellent, j'en suis sûr.

[Français]

L'honorable Lucie Pépin : Honorables sénateurs, j'ai une autre approche. À l'école, on peut constater qu'un nombre important d'enfants commencent à avoir des relations sexuelles à 14 ans et demi. Vous savez également que certaines jeunes filles de 14 ans et demi ont l'apparence d'une jeune fille de 16 ans. Si ces jeunes filles ont des relations sexuelles avec quelqu'un de plus âgé qu'elles, disons de cinq ans, une copine un peu déçue parce qu'elle aimerait bien fréquenter ce copain pourrait faire des déclarations, à savoir qu'un tel a des relations sexuelles avec une telle.

Ceci pourrait avoir pour résultat que ces jeunes soient arrêtés. Je trouve cela inacceptable. Actuellement, dans le projet de loi, si la jeune fille est mariée ou si elle est enceinte, l'article ne s'applique pas. Par contre, si elle a des relations sexuelles avec quelqu'un de plus âgé qu'elle, cette disposition pourrait s'appliquer.

Je crois donc que nous risquons de criminaliser nos jeunes de plus en plus, au lieu de leur donner l'éducation sexuelle à laquelle ils devraient avoir accès.

Le sénateur Segal : Je fréquentais une école confessionnelle, alors je n'ai aucune expérience de ce dont vous avez parlé. Je ne pense pas que le Code criminel du Canada, ou même les changements proposés par le gouvernement, puissent servir à redéfinir les relations entre les jeunes qui sont consentants.

Les modifications au Code criminel qui devront être proposées dans le projet de loi seront les lignes directrices à être respectées par les représentants de la Couronne et les agents de police si des plaintes sont déposées.

À mon avis, la loi sera définie d'une façon tout à fait responsable et fera preuve de souplesse. C'est ce qu'elle fait maintenant en général, sauf que le gouvernement veut hausser l'âge de consentement, ce qui représente une initiative très positive.

La raison pour laquelle cette assemblée est divisée à ce sujet tient peut-être au fait que nous avons des perspectives sociales différentes au sujet des lois et des standards qui doivent être en place.

Le sénateur Pépin : Quand vous parlez de plaintes, j'ai l'impression de retourner en arrière, au début des années 1960. J'ai toujours fréquenté une école catholique, mais je crois que les étudiants qui fréquentent des écoles catholiques passent leurs fins de semaine à la maison.

(1600)

Dans les années 1960, lorsque l'avortement était illégal, une femme pouvait se faire arrêter parce qu'elle s'était fait avorter et que quelqu'un l'avait dénoncée. Je crains que, avec votre système, cela pourrait se produire à nouveau chez les jeunes.

[Traduction]

Le sénateur Joyal : Je me permets d'ajouter aux observations de madame le sénateur. Elle a raison. La loi s'applique à tous, en particulier le Code criminel. Cependant, les dispositions du Code relatives à la détermination de la peine tiennent compte de la situation des Autochtones en général. Un article particulier s'adresse au juge qui, après s'être prononcé sur la culpabilité ou l'innocence de l'accusé, doit passer à l'étape suivante, la détermination de la peine.

À cette étape, le Code criminel invite expressément le juge à prendre en considération le fait que l'accusé est membre d'une communauté autochtone et qu'au sein d'une communauté autochtone existent parfois des sanctions qui sont plus efficaces que l'incarcération, qui est l'école du crime.

Les statistiques que j'ai fournies sont incontournables. En tant que législateurs, nous devons absolument en tenir compte quand nous sommes invités à allonger la liste des crimes, surtout quand il est question d'un groupe de Canadiens dont une plus grande proportion est emprisonnée et qui ne bénéficient pas du soutien nécessaire à leur réhabilitation et leur réinsertion dans l'ensemble de la société.

Je tiens à signaler qu'avant d'ajouter à la liste des crimes contenue dans le Code criminel, il faut être bien conscient des raisons pour lesquelles nous le faisons, compte tenu que cette mesure ajoutera un fardeau supplémentaire aux adolescents d'une collectivité pour qui les relations sexuelles sont permises, tout à fait légales et légitimes. C'est pourquoi j'ai tenté de découvrir dans les témoignages entendus à l'autre endroit d'où vient le projet de loi. Nous voulons tous le bien de la société. Nous sommes tous favorables à la protection de la société. La protection de la société suppose un équilibre entre la liberté et l'interdiction. Nous vivons alors dans une société libre et démocratique.

En tant que législateurs, notre rôle consiste à établir un équilibre entre le mal que nous voulons réprimer en matière de sexualité et le désir de légiférer en matière de morale. Dans la décision qu'elle a rendue en 1992 dans l'affaire Butler, la Cour suprême s'est prononcée sur la définition de l'obscénité. Les honorables sénateurs se souviennent peut-être de cette célèbre affaire, où le tribunal a établi une nette distinction entre le fait de légiférer en matière de morale, c'est-à-dire distinguer le bien du mal en se fondant sur des principes, et le fait de légiférer de manière à empêcher qu'une personne soit lésée.

C'est là qu'il faut tracer la ligne. Ce n'est toutefois pas facile et c'est pourquoi, en livrant mes observations aujourd'hui, j'ai tenté d'expliquer aux sénateurs qu'en poursuivant un objectif qui paraît désirable, nous allons créer une situation sur laquelle nous ne pourrons fermer les yeux et demander à d'autres de s'en charger. Quand on change une situation et qu'on alourdit la responsabilité pénale des citoyens, surtout des citoyens plus vulnérables, des adolescents qui ne peuvent se faire un jugement sûr et qui n'ont pas atteint la maturité aux termes de la loi, on doit aussi savoir exactement ce qu'on leur impose et pourquoi on le fait.

Honorables sénateurs, voilà en gros ce que je tenais à dire.

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, en écoutant le débat aujourd'hui, je suis frappée de constater que de nombreux aspects sociaux importants, et pas seulement des aspects juridiques, doivent être pris en considération. Je ne sais pas au juste à quel comité cette mesure sera renvoyée, si elle ira au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ou au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. En tant que médecin ayant pratiqué pendant 27 ans et ayant traité des situations les plus intimes où des jeunes avaient besoin de conseils et d'aide médicale, je trouve que ce sont là des questions sérieuses qui débordent le cadre juridique et social. Quel que soit le comité chargé d'étudier le projet de loi, j'espère qu'il y aura parmi les témoins convoqués des gens qui comprennent la santé, les pratiques sociales, les besoins et les problèmes des jeunes, ainsi que le monde qui évolue.

C'est une question très importante, comme les honorables sénateurs l'ont mentionné, et c'est une question qui devra être étudiée considérablement avant l'adoption finale du projet de loi. Si le projet de loi n'est pas renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, j'espère qu'il y aura des professionnels de la santé, des travailleurs sociaux et beaucoup de personnes qui pourront aborder les questions auxquelles on a fait allusion ici aujourd'hui.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, à quel comité le gouvernement prévoit-il envoyer ce projet de loi?

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Ce projet de loi serait renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Le sénateur Cools : Je dois admettre que je n'ai pas examiné très attentivement le projet de loi. Toutefois, après ce que le sénateur Joyal et les sénateurs Segal et Trenholme Counsell ont dit, j'aimerais demander l'ajournement du débat afin de pouvoir y jeter un coup d'oeil.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867

PROJET DE LOI MODIFICATIF—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Oliver, appuyé par l'honorable sénateur Di Nino, tendant à l'adoption du treizième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 (durée du mandat des sénateurs), avec des amendements, une recommandation et des observations), présenté au Sénat le 12 juin 2007.

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, j'aimerais parler du rapport du comité sur le projet de loi S-4.

Je suis heureuse de participer au débat aujourd'hui sur le treizième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles qui porte sur le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 (durée du mandat des sénateurs).

Je veux commencer par remercier tous les honorables sénateurs qui ont participé à l'étude du comité sur ce projet de loi. Les interventions au comité et les questions pertinentes qui ont été posées ont grandement aidé le comité dans l'étude des conséquences possibles du projet de loi et de ses effets durables sur notre régime parlementaire.

Lorsque j'ai parlé du projet de loi S-4 à l'étape de la deuxième lecture, je me souviens que l'une de mes principales préoccupations portait sur la durée du mandat qui avait été initialement proposée par le gouvernement. Une autre chose qui me préoccupait également beaucoup, c'était le fait que le projet de loi S-4, dans sa première version, prévoyait que le mandat des sénateurs serait renouvelable. Ces deux questions m'ont portée à me demander si le projet de loi S-4 allait au-delà de la compétence exclusive du Parlement fédéral puisqu'il porte atteinte aux caractéristiques fondamentales ou essentielles attribuées au Sénat.

Si le comité a recueilli des témoignages qui pourraient aider à apaiser mes craintes à l'égard de la durée du mandat des sénateurs, la plupart des témoins ont toutefois semblé être du même avis que moi et penser que la durée du mandat proposé par le gouvernement était tout simplement trop courte.

Il ne faut pas oublier, honorables sénateurs, que le préambule du projet de loi S-4 précise clairement que le Parlement du Canada entend préserver les caractéristiques essentielles du Sénat, lieu de réflexion indépendante, sereine et attentive au sein de la démocratie parlementaire canadienne. Dans cette optique, je voulais établir, en me basant sur les témoignages entendus au comité, si le projet de loi S-4, sous sa forme originale, modifierait l'équilibre entre le désir du gouvernement actuel d'accroître la soi-disant légitimité démocratique du Sénat, tout en maintenant l'indépendance...

Son Honneur le Président : Je dois interrompre le sénateur Milne pour éclaircir une chose. En sommes-nous bien à l'article 2, c'est-à-dire l'étude du rapport?

(1610)

Le sénateur Milne : Il s'agit de l'article no 1 sous la rubrique « Rapports de comités ».

Son Honneur le Président : Je voulais que ce soit clair. Merci, honorables sénateurs. Je suis désolé de cette interruption.

Le sénateur Milne : En gardant cela à l'esprit, je voulais déterminer, compte tenu des audiences du comité, si le projet de loi S-4, dans sa version initiale, modifierait l'équilibre entre le désir du gouvernement actuel d'accroître la légitimité démocratique du Sénat et celui de préserver l'indépendance des sénateurs, qui est indispensable.

Lorsque le professeur Andrew Heard a comparu devant le comité, il a fait remarquer que, depuis 1965, seulement 17 p. 100 des sénateurs comptant moins de quatre ans de service ont déjà occupé un poste de direction au Sénat. Par poste de direction, il entendait un poste assorti d'un supplément de rémunération : autrement dit, un traitement.

Le professeur Heard a ajouté que l'histoire montre que le système d'ancienneté n'existe pas seulement parce que tout vient à point à qui sait attendre, mais bien parce qu'il faut des connaissances et une expérience institutionnelle avant de pouvoir occuper de façon compétente un poste de direction. Il a conclu qu'un mandat de huit ans n'est pas assez long pour que les nouveaux sénateurs acquièrent l'expérience nécessaire et soient bien intégrés au Sénat.

Alan Cairns, professeur émérite à l'Université de la Colombie-Britannique, a fait remarquer pendant son témoignage que les sénateurs doivent acquérir une vaste expérience avant d'être pleinement au courant du fonctionnement du Sénat.

Il a également soutenu que le mandat d'un sénateur devrait être suffisamment long pour qu'un premier ministre ait beaucoup de difficulté s'il tente de nommer au Sénat un grand nombre de ses partisans. M. Cairns a conclu qu'un mandat de huit ans semblait trop court.

Une autre préoccupation éventuelle qui a été portée à l'attention du comité pendant son étude du projet de loi S-4, c'est la notion selon laquelle un sénateur nommé pour huit ans qui arrive à la fin de son mandat risquerait d'être moins indépendant que les autres, ce qui pourrait conduire à un Sénat moins capable, en sa qualité d'assemblée délibérante, de réflexion sereine et attentive.

Le professeur Errol Mendes, de l'Université d'Ottawa, a signalé qu'un sénateur nommé pour huit ans pourrait encore avoir quelques bonnes années de carrière devant lui et, par conséquent, sa capacité de réflexion indépendante et sereine pourrait être influencée par le désir d'obtenir un second mandat ou d'être nommé à une autre charge publique de haut niveau.

M. Mendes a conclu qu'un mandat de huit ans était trop court et risquait de faire problème du point de vue constitutionnel. Il a dit craindre que, si tous les sénateurs étaient nommés pour huit ans, un futur premier ministre en arriverait à nommer la totalité des membres du Sénat. Il a conclu qu'on devrait envisager sérieusement un mandat de plus longue durée, environ 12 ans, voire plus.

Quel est le bon chiffre, ou, comme l'a fait remarquer notre collègue, le sénateur Fraser, au comité, où se trouve le bon équilibre? Quel critère utilisons-nous, et de quelle façon, pour déterminer à partir de quand les caractéristiques fondamentales et nécessaires du Sénat sont altérées?

Dans le Renvoi relatif à la Chambre haute de 1979, la Cour suprême avait conclu que si un gouvernement proposait des changements au mandat des sénateurs, elle pourrait déterminer à ce moment-là si ces changements étaient constitutionnels.

Comme l'a si éloquemment affirmé Henry S. Brown, du cabinet Gowling Lafleur Henderson, lorsqu'il a comparu devant le comité :

[...] on peut apporter une modification mais pas jusqu'à nuire à ce rôle. Autrement dit, il est autorisé d'altérer quelque peu le rôle de réflexion indépendante mais non pas d'y nuire.

La deuxième réserve que j'ai exprimée à l'occasion du débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S-4 concernait le caractère renouvelable du mandat des sénateurs. Je ne suis pas la seule à avoir exprimé cette réserve, qui figure d'ailleurs dans les commentaires annexés au rapport de votre comité sur le projet de loi.

En fait, la première citation de George Brown, Père de la Confédération, le 8 février 1865, exprime parfaitement la réserve que j'ai exprimée 142 ans plus tard :

Supposons que vous les nommiez pour neuf ans, quelle sera la conséquence? Pendant les trois ou quatre dernières années de leur service ils auront devant les yeux l'expiration de leur mandat, et se tourneront avec anxiété du côté du gouvernement alors au pouvoir pour obtenir la faveur de se faire nommer de nouveau; la conséquence sera qu'un tiers des sénateurs seront en tout temps sous l'influence de l'exécutif.

Beaucoup de témoins qui ont comparu devant le comité étaient d'accord avec M. Brown pour dire que l'indépendance des sénateurs risquait d'être amoindrie si leur mandat était renouvelable.

À la lumière de ces éléments de preuve, je pense qu'il va sans dire que le fait de rendre le mandat des sénateurs renouvelable ferait plus qu'altérer le rôle de réflexion indépendante du Sénat, il y nuirait, et par conséquent, serait déclaré inconstitutionnel si la question était renvoyée à la Cour suprême. C'est pour cette raison, honorables sénateurs, que votre comité a proposé des amendements afin que les sénateurs soient nommés pour un mandat plus long et non renouvelable.

Pourquoi alors le comité a-t-il recommandé que le projet de loi modifié soit renvoyé à la Cour suprême du Canada? À mon avis, honorables sénateurs, et les observations du comité vont également en ce sens, il subsiste d'importantes préoccupations d'ordre constitutionnel quant à savoir si le Parlement peut adopter seul ce projet de loi.

De plus, j'estime qu'en soumettant à la Cour suprême l'idée d'instaurer un mandat non renouvelable de 15 ans, le gouvernement du jour pourrait peut-être empêcher une période de confusion constitutionnelle dans l'avenir.

Et si la Cour suprême jugeait que des mandats de 15 ans compromettraient la capacité du Sénat à effectuer ce que sir John A. Macdonald décrivait comme un second examen objectif des lois? Ne serait-il pas préférable de le savoir maintenant, avant de faire le changement, plutôt que dans plusieurs années, lorsque le fonctionnement de l'institution aura déjà été compromis?

Et si la Cour suprême jugeait que le Parlement du Canada ne possède pas des pouvoirs suffisants pour modifier ainsi la Constitution sans l'accord des provinces? Ne serait-il pas préférable de le savoir maintenant, avant de faire un changement qui pourrait se répercuter sur notre légitimité constitutionnelle, plutôt que de risquer de plonger le gouvernement dans l'embarras plus tard lorsqu'il apprendra qu'il a violé le plus important texte de loi au Canada, la Constitution?

En terminant, honorables sénateurs, il ne s'agit pas d'être pour ou contre la réforme du Sénat, car je suis en faveur des mandats d'une durée limitée. Il s'agit plutôt de réformer le Sénat tout en veillant au respect des règles constitutionnelles qui ont été adoptées pour garantir l'indépendance des sénateurs.

Je n'étais pas convaincue que le projet de loi S-4 accomplissait cet objectif dans sa forme initiale et je doute encore que le Parlement du Canada soit autorisé à adopter unilatéralement la mesure proposée, même dans sa forme actuelle.

Toutefois, au lieu de rejeter le projet de loi pour les raisons que je viens de donner, j'estime que les Canadiens et leur gouvernement méritent une réponse à la question de savoir si le contenu du projet de loi S-4 et la procédure qui l'entoure contreviennent à la Constitution.

J'invite les honorables sénateurs à poursuivre leur réflexion et à tirer leurs propres conclusions sur cette importante question, et je les exhorte à adopter ce rapport.

L'honorable Tommy Banks : Au sujet du même rapport, j'aimerais présenter brièvement aux sénateurs le point de vue du caucus libéral de l'Alberta relativement au rapport et au projet de loi.

Le caucus libéral de l'Alberta est en faveur de la réforme parlementaire, notamment de la réforme du Sénat, et il l'a fait savoir. Cependant, lors de l'examen de cette mesure législative et de son lien avec le projet de loi C-43, un lien d'ailleurs absolument vital, le comité s'est dit en faveur du principe de la réforme du Sénat et de la réforme parlementaire, mais il a pris la peine d'écrire au premier ministre de l'Alberta et au ministre albertain responsable des relations internationales, intergouvernementales et avec les Autochtones. Tous deux m'ont répondu que le premier ministre de la province, l'honorable Ed Stelmach, et le gouvernement de l'Alberta sont favorables au projet de loi S-4 dans sa forme initiale. Voilà la position du gouvernement de l'Alberta.

(1620)

Le caucus libéral du Sénat a également pris en compte le fait que la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, l'Ontario, le Québec, le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve-et-Labrador et le Nunavut se sont énergiquement opposés au projet de loi S-4. Par conséquent, nous partageons le point de vue exprimé dans le rapport, selon lequel il serait pour le moins malavisé d'adopter une mesure législative qui, d'après les renseignements que nous avons obtenus des dirigeants de ces gouvernements respectifs et des autres ordres de gouvernement, serait certainement contestée devant les tribunaux, au lieu de demander au tribunal de rendre une décision définitive sur les questions constitutionnelles dont madame le sénateur Milne a fait mention. Si le tribunal devait statuer que le Parlement a le pouvoir d'adopter une mesure législative comme le projet de loi S-4, cela règlerait la question et supprimerait tout obstacle à cet égard.

Nous estimons qu'il est tout simplement prudent de demander au gouvernement — puisque nous ne pouvons pas le faire — de renvoyer l'affaire à la Cour suprême pour que nous cessions de discuter de la constitutionnalité de cette mesure législative et que nous obtenions l'opinion de la Cour suprême afin d'éviter que la loi soit renvoyée devant les tribunaux une fois qu'elle aura été adoptée, ce qui serait nettement plus compliqué et infiniment plus coûteux. On peut répondre à la question rapidement en demandant un renvoi au tribunal. Voilà le point de vue du caucus libéral de l'Alberta.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

L'honorable Anne C. Cools : Votre Honneur, j'aimerais que le compte rendu montre que la motion a été adoptée à l'unanimité.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Que le compte rendu montre que Son Honneur n'a pas entendu les mots « avec dissidence » prononcés de ce côté-ci de la Chambre.

Son Honneur le Président : La motion est adoptée, avec dissidence.

Le sénateur Cools : Après coup. Selon moi, elle a été adoptée à l'unanimité.

(La motion est adoptée avec dissidence et le rapport est adopté.)

(La troisième lecture est suspendue conformément au rapport.)

PROJET DE LOI SUR LES SOURCES D'EAU POTABLE

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Joyal, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-208, Loi exigeant que le ministre de l'Environnement crée, en collaboration avec les provinces, une agence habilitée à définir et à protéger les bassins hydrographiques du Canada qui seront les sources d'eau potable des générations futures.—(L'honorable sénateur Comeau)

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, j'aimerais demander quelque chose d'un peu inhabituel. D'aucuns conviendraient que l'objectif du projet de loi du sénateur Grafstein est de fournir de l'eau potable saine, question aussi abordée dans le rapport du sénateur St. Germain.

Le sénateur Nolin a cependant soulevé des points intéressants relativement à une loi du Parlement qui existe déjà et qui traite, en quelque sorte, de la même question. Je demanderai ceci aux sénateurs. Sans renvoyer le projet de loi au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles — et je mentionne ce comité dont j'assume la présidence car il a beaucoup d'expérience dans ce domaine —, en nous entendant pour que le comité examine la loi existante du Parlement et le projet de loi et détermine à quel point ils se complètent, se chevauchent ou font double emploi, le comité pourrait faire rapport aux honorables sénateurs avant que nous examinions l'essence du projet de loi.

RENVOI DE L'OBJET DU PROJET DE LOI AU COMITÉ

L'honorable Tommy Banks : Par conséquent, honorables sénateurs, je propose :

Que le projet de loi S-208 ne soit pas maintenant lu pour la deuxième fois mais que son objet soit renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles;

Que l'ordre pour la reprise du débat sur la motion portant deuxième lecture du projet de loi demeure au Feuilleton et Feuilleton des avis.

S'il convient de donner une explication, honorables sénateurs, et j'espère que c'est le cas, avec l'indulgence du Sénat, je demanderais au sénateur Grafstein, qui a présenté ce projet de loi, de nous faire part de cette explication.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le débat porte sur la motion d'amendement.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je n'abuserai pas de votre patience. Il se fait tard. J'interviens pour appuyer la motion du sénateur Banks et répondre brièvement au discours du sénateur Nolin sur le fond du projet de loi S-208.

Comme le sénateur Banks l'a mentionné, le sénateur Nolin a soulevé deux problèmes par rapport à mon projet de loi. Le premier a trait aux questions de compétence et à la portée constitutionnelle et le deuxième, au chevauchement bureaucratique possible avec la Loi sur les ressources en eau du Canada.

Dans les circonstances, le sénateur Nolin et moi avons convenu, sous réserve de l'accord de nos chefs et de l'appui des deux côtés de la Chambre, de demander au comité d'examiner l'objet de mon projet de loi, le S-208, tel que l'indique la motion du sénateur Banks. Le comité se penchera donc non seulement sur le projet de loi S-208, mais aussi sur la Loi sur les ressources en eau du Canada afin de déterminer s'il y a un chevauchement.

J'aimerais aborder l'historique et l'objectif de la Loi sur les ressources en eau du Canada. Le but de mon projet de loi d'initiative parlementaire et celui de la loi sont assez différents. Le projet de loi S-208 vise à cartographier les bassins hydrographiques et les nappes phréatiques, sources d'eau potable du Canada. L'objectif premier de la Loi sur les ressources en eau du Canada est de lutter contre la pollution de l'eau. Cette loi n'a pas été promulguée dans le but précis d'aborder la question des bassins hydrographiques, des nappes phréatiques ou des sources d'eau potable au Canada.

Au début, la partie II de la Loi sur les ressources en eau du Canada s'attardait aux grands plans d'eau pollués, comme dans le port de Halifax, et non à la cartographie ou à la protection des sources d'eau potable, ce que fait le projet de loi S-208.

Malheureusement, la Loi sur les ressources en eau du Canada est tombée en désuétude et elle n'est pas observée.

(1630)

La partie II de la Loi sur les ressources en eau du Canada n'a jamais été appliquée de manière appropriée, même si la loi est en vigueur depuis des décennies. Aucun rapport n'a été présenté au Parlement depuis l'an 2000, même si la loi l'exige. En clair, le gouvernement fédéral ne dispose d'aucune stratégie nationale sur l'eau. Un éminent spécialiste et ancien haut fonctionnaire réputé m'a dit ceci aujourd'hui : « Ce que le gouvernement appelle une stratégie nationale sur l'eau n'a rien de national ni de stratégique — il s'agit plutôt d'une série de projets de financement distincts et aléatoires. »

Je demande instamment aux sénateurs de renvoyer l'objet du projet de loi S-208 au comité. Le sénateur Banks a mentionné avoir accepté d'examiner minutieusement le projet de loi et la loi. J'espère que le comité élaborera un plan pour enfin découvrir et cartographier notre trésor national qui s'amenuise — les bassins hydrographiques du Canada et ses sources d'eau potable — afin de protéger les générations actuelle et futures.

Je recommande avec insistance le renvoi de l'objet du projet de loi au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Banks, l'objet du projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.)

LA LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Goldstein, appuyée par l'honorable sénateur Chaput, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (entrée en vigueur des articles 110, 111 et 171).—(L'honorable sénateur Comeau)

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui en faveur du projet de loi C-280, dont le sénateur Goldstein est le parrain.

Honorables sénateurs, de nombreux réfugiés viennent chez nous. La plupart d'entre eux, mais pas tous, sont des demandeurs légitimes du statut de réfugié. Tous ont néanmoins droit à deux choses. Ils ont le droit, premièrement, d'obtenir promptement une décision et, deuxièmement, d'en appeler de cette décision, si celle-ci ne leur est pas favorable, car la décision est rendue par une seule personne, et des erreurs peuvent être commises.

Les parlementaires ont approuvé ce principe en adoptant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Ni le gouvernement précédent ni le gouvernement actuel n'ont cependant mis en vigueur les dispositions portant création de la section d'appel.

Honorables sénateurs, les deux gouvernements ont pris prétexte des arriérés pour ne pas mettre en vigueur les dispositions pertinentes. C'est injuste. Prétexterait-on que nos tribunaux sont trop occupés pour nier aux personnes déclarées coupables d'une infraction le droit de faire appel? Bien sûr que non. Nous savons que des erreurs sont commises dans notre système judiciaire, et le droit d'appel est indispensable, si l'on veut que la primauté du droit soit crédible. Il devrait en être de même du droit d'un réfugié d'en appeler d'une décision rendue par un seul arbitre.

Honorables sénateurs, il existe manifestement un arriéré des dossiers de réfugiés au Canada, mais cela n'est quand même pas la faute des réfugiés. Cet arriéré cause des problèmes tant aux réfugiés qu'à notre pays dans son ensemble. Pour les réfugiés, plus ils sont absents longtemps de leur pays, plus il leur sera difficile de se réorganiser s'ils sont forcés de quitter le Canada.

Ce problème suscite également de graves questions et des inquiétudes au sujet d'enfants qui seraient nés au Canada pendant cette période d'attente. Ces enfants peuvent prétendre à la citoyenneté canadienne. La Convention relative aux droits de l'enfant stipule même que les décisions concernant les enfants doivent être prises dans leur meilleur intérêt.

Peut-être est-ce en raison de ma grande fierté d'être Canadienne, mais je crois que le meilleur intérêt de la plupart des enfants serait de rester au Canada. Cependant, cela est diamétralement opposé à leur droit d'être élevés par leurs parents naturels. Par conséquent, il est impératif, à mon avis, que les demandes des réfugiés soient traitées rapidement et qu'elles soient suivies sans tarder d'un appel, si nécessaire.

S'il n'en va pas ainsi à l'heure actuelle, c'est en raison d'un manque de ressources et de personnel, mais c'est là une fausse économie. Si ces enfants demeurent au Canada — selon moi, un grand nombre devraient rester — cela coûte cher. Il faut notamment assurer leur subsistance, bien que les coûts d'éducation, de bien-être social et de santé relèvent de la compétence des provinces. Le gouvernement fédéral ne fait pas ce qu'il faut; il n'élimine pas les retards de traitement et se décharge des coûts sur les provinces, un autre exemple de délestage.

Honorables sénateurs, il s'agit ici d'êtres humains, des hommes, des femmes et des enfants. Il y a probablement de mauvais éléments parmi eux, et ceux-là doivent être expulsés, mais il faut le faire rapidement. Même un mauvais élément a le droit d'interjeter appel.

De même, il faudrait traiter rapidement les dossiers des authentiques réfugiés. Un bon nombre d'entre eux ont vécu l'horreur. S'ils doivent être accueillis comme d'authentiques réfugiés, leur installation sera plus positive si elle s'effectue rapidement et ils pourront plus facilement devenir des Canadiens prospères.

Honorables sénateurs, je vous demande instamment d'appuyer ce projet de loi.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, au nom du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

[Français]

L'ÉTUDE DES QUESTIONS LIÉES AUX OBLIGATIONS NATIONALES ET INTERNATIONALES EN MATIÈRE DE DROITS DE LA PERSONNE

ADOPTION DE LA MOTION DEMANDANT UNE RÉPONSE DU GOUVERNEMENT AU RAPPORT DU COMITÉ DES DROITS DE LA PERSONNE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Andreychuk, appuyée par l'honorable sénateur Stratton,

Que, conformément au paragraphe 131(2) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères étant désigné ministre chargé de répondre au douzième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne intitulé Le Canada et le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies : À la croisée des chemins.—(L'honorable sénateur Corbin)

L'honorable Eymard G. Corbin : Honorables sénateurs, je serais prêt à engager un débat avec madame le sénateur Andreychuk, qui a présenté ce rapport. À cause de circonstances qui me sont inconnues, il semble que nous ne sommes jamais présents en Chambre en même temps ou que cet article à l'ordre du jour est appelé très tard dans la journée. Je ne vois pas l'utilité d'en débattre quand tout le monde préfère aller se coucher.

Cependant, j'ai une solution. Madame le sénateur Fraser, la vice-présidente du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, accepterait-elle de répondre à mes questions à la place de sa collègue, la présidente du comité, madame le sénateur Andreychuk? Je ne voudrais pas être accusé de retarder l'adoption de cette motion. Nous avions adopté à la hâte le texte même du rapport; il avait été entendu que l'on me donnerait la chance de poser mes questions au moment de l'étude de la demande de réponse du gouvernement au rapport.

(1640)

Madame le sénateur Fraser serait-elle réceptive à ma demande?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, la Chambre est-elle d'accord pour que le sénateur Fraser réponde aux questions?

Des voix : D'accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Fraser, est-ce que vous acceptez de répondre aux questions?

L'honorable Joan Fraser : Si le Sénat n'avait pas donné son consentement, j'aurais dit que j'avais l'intention de dire quelques mots à propos de cette motion moi-même et que, ensuite, le sénateur Corbin aurait pu poser des questions. Je ne suis pas du tout sûre que je pourrai répondre à ses questions, mais s'il veut me les poser et que la Chambre y a consenti, je veux bien essayer d'y répondre, tout en rappelant que, après, je voudrais dire quelques mots moi-même.

Le sénateur Corbin : Je vous remercie, honorables sénateurs. Ce rapport n'était pas un rapport définitif et final du comité, qui s'est penché sur l'organisation et les opérations du nouveau Conseil des droits de la personne. Ce dernier remplace la défunte Commission des droits humains.

Cela dit, et ayant lu attentivement le rapport, je considère qu'il est prématuré, parce que le conseil est loin d'avoir organisé les aménagements pour sa gouverne interne. De plus, le comité a indiqué que le conseil était en train de tomber dans les mêmes travers que l'ancienne commission. En d'autres mots, on se sert de la Commission des droits humains pour jouer le jeu des tensions géopolitiques, ce qui est non seulement désavantageux, mais néfaste pour l'efficience des travaux de ce conseil qui, après tout, vise à atteindre des objectifs spécifiques sur le plan des droits de la personne.

Dans ce sens, je trouve que le rapport est incomplet et prématuré. Madame le sénateur Andreychuk nous a dit que le conseil était en place depuis un an et que ce n'était peut-être pas une mauvaise idée que le comité fasse connaître au gouvernement ses préoccupations quant aux questions que je viens de porter à l'attention des honorables sénateurs.

Le sénateur Fraser pourra évidemment réagir à cela, mais je crois que le conseil a énormément de travail à faire pour ce qui est de mettre un peu d'ordre et de bons sens dans la façon de conduire ses affaires, et tout n'a pas été dit.

Une des recommandations qui a particulièrement attiré mon attention était celle concernant la création d'un poste, au Canada, d'ambassadeur des droits de la personne. On a expliqué pourquoi cela pouvait être une bonne chose. Cependant, je me suis fait la réflexion suivante, après avoir lu dans le rapport des citations venant des représentants de la délégation canadienne au Conseil des droits de la personne, qui semble effectuer un excellent travail; on a l'impression que cette suggestion de nommer un ambassadeur serait une façon de dire qu'on n'est pas satisfait du travail de la délégation canadienne. Je ne sais pas si j'ai raison de dire cela car pour soutenir son rapport, le comité cite à plusieurs reprises l'excellent travail que fait la délégation canadienne au conseil.

Si nos représentants, nos diplomates canadiens, font un bon travail, pourquoi avons-nous besoin d'un ambassadeur? Un ambassadeur pourrait causer des dépenses de cinq millions de dollars au moins si on considère tout l'appareil qui doit entourer un tel poste.

Le sénateur Fraser pourrait peut-être nous dire si l'idée est venue de l'organisation canadienne ou si elle est née de suggestions fournies par des ONG — je sais que, pour avoir lu le rapport, les ONG canadiennes ont des vues assez prononcées, je dirais même expertes, eu égard à certaines questions. D'où vient l'idée de demander au gouvernement de créer un poste d'ambassadeur pour les droits de la personne qui serait attaché à ce conseil et qui, en plus, pourrait se promener au Canada pour sensibiliser davantage les Canadiens à l'importance des droits humains? Pourriez-vous nous faire part de l'information que vous auriez à ce sujet, madame le sénateur?

Le sénateur Fraser : D'abord, permettez-moi de répéter très explicitement et formellement que l'idée du comité n'était nullement de critiquer directement ou indirectement le travail des gens qui nous représentent à Genève en ce moment. Ils font un excellent travail. L'idée d'avoir un nouvel ambassadeur pour les droits de la personne était plutôt de compléter leur travail. Eux, ils sont à Genève, ils sont occupés à plein temps à Genève. Ils n'ont pas un travail facile à accomplir, mais il nous semblait — j'espère que les autres membres du comité trouveront exacte ma formulation du sens de nos discussions — qu'il y avait aussi lieu d'avoir quelqu'un qui serait plus libre de voyager, non seulement au Canada, mais aussi ailleurs dans le monde, pour traiter formellement, comme représentant formel du gouvernement du Canada, avec les autres gouvernements, pour essayer de faire avancer notre position diplomatique dans ce domaine important.

Cela enverrait le signal aux Canadiens et au monde entier que, pour nous, ce n'est pas un sujet secondaire que les droits de la personne, mais plutôt un sujet de premier ordre, de toute priorité, et que nous l'avons trouvé tellement important qu'il fallait nommer un représentant très haut placé pour en faire la promotion.

J'aimerais revenir sur vos remarques, au début de votre intervention, quant au fait que c'est un rapport intérimaire. Je ne vous cite pas avec exactitude, mais je pense que l'idée que vous exprimiez était qu'il était peut-être un peu prématuré de faire des recommandations et des critiques.

La situation est un peu bizarre. Le conseil fonctionne depuis un an mais, au moment où nous avons formulé notre rapport, il restait des pans très importants à déterminer. Des négociations clés allaient avoir lieu ce mois-ci — au mois de juin de cette année — sur des modalités de procédure qui seront très importantes. Il ne s'agit pas de la couleur du papier dont on se sert pour écrire des lettres. Il s'agit, par exemple, de la façon dont sera effectuée la « revue périodique universelle », qui est peut-être l'outil le plus important qui a été donné au nouveau conseil et qu'on pourrait vider de toute sa force si on n'adoptait pas les bonnes règles.

(1650)

Il nous semblait donc utile, sans surestimer notre importance, d'ajouter notre voix à celles qui appuient de bons règlements de procédure, un bon système qui aura du mordant, qui pourra faire les enquêtes, par exemple, dans les « universal periodic review », dont je ne connais pas le nom en français, vous m'en excuserez.

Il est certain que c'est un peu étrange de faire des recommandations alors que les arrangements ne sont pas formalisés. Il nous a semblé que cela était conforme à la tradition du Sénat de faire des recommandations dans un rapport intérimaire. On l'a vu dans d'autres cas, par exemple lors de l'étude du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur le système de santé, qui a produit plusieurs rapports intérimaires. Ceux-ci ont eu leur influence. Nous espérions avoir une certaine influence à un moment clé. Nous savons qu'il faudra regarder plus loin. C'est pourquoi ce n'est qu'un rapport intérimaire parce que la situation n'est pas encore très claire. Donc, quand nous pourrons, nous présenterons un rapport final.

Le sénateur Corbin : Je remercie ma collègue de ces éléments d'information. Je dois dire que la lecture du rapport est difficile parce que, en vertu de sa qualité de rapport intérimaire, il nous manque des informations sur les dates de comparution, les déplacements du comité, la qualité des témoins, leur expertise, ainsi de suite. Il va sans doute falloir attendre le rapport final pour y avoir accès. Je dois dire que la lecture du rapport est plus difficile à cause de cette absence de renseignements de base.

Une autre chose m'a vraiment étonné : le rapport dit que le Canada perd ses alliés traditionnels au chapitre de ses engagements, qui visent à une meilleure action au chapitre des droits de la personne. Il n'a plus pour alliés l'Australie, la Nouvelle-Zélande et d'autres partenaires parce que le conseil a été établi sur la base de blocs régionaux. Cela prive le Canada de ses alliés et de ses renforts traditionnels. Il se trouve un peu isolé. C'est ce que le rapport dit. Je ne suis pas sûr que la nomination d'un ambassadeur comblera ce vide.

J'ai l'impression, compte tenu des commentaires du rapport sur la défunte commission et sur la façon de fonctionner depuis un an du nouveau conseil, même s'il y a des éléments encourageants, comme vous venez de l'indiquer, qu'on n'a absolument rien gagné en termes de bonne volonté. Ce sera une œuvre de longue haleine pour arriver à un travail objectif sur le plan des droits de la personne. Il y a toutes sortes de facteurs géopolitiques régionaux qui entrent en ligne de compte dans les décisions des membres de ce conseil. Je trouve cela très décourageant.

On avait mis beaucoup d'espoir dans l'établissement du nouveau conseil. Malheureusement, ne soyons pas surpris car tous les appareils des Nations Unies sont plutôt lourdauds et celui-ci me paraît l'être davantage. Au lieu de corriger les anciens problèmes, on les conserve et on en ajoute d'autres. C'est ma perception de l'information.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, le temps de parole de l'honorable sénateur Corbin est écoulé.

Le sénateur Corbin : Est-ce que je pourrais demander quelques minutes supplémentaires pour permettre à madame le sénateur Fraser de répondre?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'accepter?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Fraser : Honorables sénateurs, l'ancienne commission avait perdu beaucoup de sa force, de sa crédibilité et de son efficacité à cause des politiques et de l'influence de blocs géopolitiques. On avait espéré, en créant ce conseil, diminuer l'influence de ces blocs. À ce jour, les indications ne sont pas très encourageantes. Il faut reconnaître que le groupe de pays qui partage plus ou moins les opinions du Canada a perdu un peu de poids par rapport à celui qu'il avait à l'ancienne Commission.

L'observation que le sénateur Corbin a soulevée dans notre rapport intérimaire au sujet des alliés traditionnels du Canada fait référence à cela mais aussi au fait — il faut vraiment prendre cela avec beaucoup de nuance — que même des pays qui partagent nos opinions la plupart du temps, ont trouvé à certaines occasions, depuis un an, avec le nouveau conseil, que certaines de nos prises de position étaient un peu trop crues, que nous n'étions pas assez ouverts à des possibilités de compromis. Nous avons entendu cela de plusieurs sources, par exemple de la part d'ONG très crédibles. C'est pourquoi vous avez trouvé ces références dans le rapport. Il faudrait vraiment comprendre que nous ne critiquions pas la position de base du Canada. Il s'agit du Moyen-Orient. Le comité ne prenait pas position contre la politique du gouvernement en général, mais sur certaines questions, certains votes.

On nous a dit que le Canada avait été peut-être un peu trop rigide dans ses prises de position. J'essaie de choisir mes mots et madame le sénateur Andreychuk voudra peut-être prendre la parole pour préciser notre pensée. Je lui laisse toute liberté de le faire.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Nous poursuivons le débat.

Le sénateur Fraser : Honorables sénateurs, j'aimerais prendre brièvement la parole, si vous le permettez, et non demander l'ajournement du débat.

Honorables sénateurs, j'avais averti quelques personnes, y compris Son Honneur, que, lorsque le débat reprendrait sur cette question, j'aurais un point de vue à faire valoir.

Permettez-moi de dire premièrement que j'appuie la motion. Je pense que c'est une bonne motion, qu'elle est conforme à la procédure et qu'il serait bon que nous l'adoptions. C'est une bonne idée de voir à ce que le gouvernement donne suite aux rapports sérieux produits par les comités sénatoriaux.

Néanmoins, les sénateurs se souviendront peut-être que, pendant la semaine au cours de laquelle cette question a été soulevée, il y a eu beaucoup de discussions et même beaucoup de confusion autour de divers sujets, notamment la formulation correcte des motions et la présentation correcte des motions d'adoption des rapports de comité. J'aimerais demander bien humblement au Président si, pendant l'été, il ne pourrait pas nous préparer un petit aide-mémoire. Ainsi, nous savons tous, par exemple, qu'il est de coutume, au Sénat, de proposer sur-le-champ l'adoption d'un rapport qui se trouve au Feuilleton en disant simplement : « Je propose que le rapport soit adopté. »

(1700)

Pourtant, le paragraphe 57(1) du Règlement dit ceci :

Avis de deux jours doit être donné pour toute motion ayant pour objet :

e) l'adoption du rapport d'un comité spécial ou d'un comité mixte spécial;

C'est le rapport du comité spécial sur le projet de loi S-4 qui, à l'origine, a attiré notre attention sur cette question.

Voici maintenant ce que dit le paragraphe 58(1) :

Il faut donner un jour d'avis pour les motions suivantes :

g) l'adoption du rapport d'un comité permanent ou d'un comité mixte permanent;

Donc, la pratique que nous observons tous depuis longtemps ne semble pas correspondre à ce qui est écrit en toutes lettres dans le Règlement. J'aimerais autant que possible que nous obtenions des précisions à ce sujet.

Il y a aussi le paragraphe 131(2), qui s'applique précisément à la motion que madame le sénateur Andreychuk a sagement et gracieusement décidé de scinder pour que nous adoptions le rapport et présentions une motion distincte pour demander une réponse au gouvernement. Selon ce que prévoit le paragraphe 131(2), je conviens que la motion initiale était probablement recevable. Cette disposition se lit comme suit :

Le Sénat peut demander au gouvernement d'apporter une réponse complète et détaillée au rapport d'un comité particulier qui a été adopté par le Sénat, si le rapport ou la motion d'adoption du rapport contient une telle demande ou si une motion à cet effet est adoptée après l'adoption du rapport.

J'attire l'attention des sénateurs sur le passage du milieu. On peut demander une réponse complète à un rapport qui a été adopté par le Sénat si le rapport ou la motion d'adoption du rapport contient une telle demande. Il me semble bien que cela commence à devenir un peu alambiqué et compliqué.

Cela ne devrait pas nécessairement faire partie de l'aide-mémoire que je demande, mais il pourrait être utile que le Comité du Règlement examine la question et détermine s'il conviendrait mieux que deux motions soient présentées dans ce cas, la première concernant l'adoption du rapport, et la seconde demandant une réponse au gouvernement, ce qui était, à mon avis, le point initial du sénateur Corbin lorsqu'il a soulevé cette question. Nous voulons qu'une motion fasse deux choses différentes, ce qui s'écarterait un peu de notre pratique habituelle.

J'appuie certes la motion et j'exhorte les sénateurs à en faire autant.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Poursuivons-nous le débat?

Le sénateur Corbin : Sur le recours au Règlement.

Le sénateur Fraser : Cela n'était pas un recours au Règlement.

Le sénateur Corbin : Il s'agissait en fait d'une discussion ou d'un débat sur un recours au Règlement. Le sénateur Fraser et moi sommes rarement d'accord; nous coupons les cheveux en quatre.

Lorsque madame le sénateur Andreychuk a présenté le rapport au Sénat, elle n'a pas demandé une réponse au gouvernement. Elle a fait une telle demande lorsqu'elle a pris la parole au Sénat et qu'elle a demandé que le rapport soit adopté. C'était la première fois que nous entendions parler d'une demande de réponse au gouvernement. Une telle demande doit être précédée d'un avis de motion, ce qui n'a pas été fait dans ce cas-ci, et c'est la raison pour laquelle madame le sénateur Carstairs et moi nous sommes levés pour dire que cette façon de faire était pour le moins irrégulière.

Cela dit, je suis d'accord avec madame le sénateur Fraser que cet article, et tout autre article du Règlement qui renferme la mention « ou », devrait être supprimé. En effet, nous devrions avoir des directives très claires, afin d'éviter que l'on perde notre temps avec de telles questions.

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, je suis désolé, mais je ne savais pas trop si le sénateur Corbin invoquait le Règlement, ou s'il répondait. Il invoquait le Règlement? Très bien.

Son Honneur la Présidente intérimaire : En ce qui a trait au recours au Règlement je veux remercier madame le sénateur Fraser. Je vais informer Son Honneur le Président du devoir qu'on lui a donné à faire cet été.

Pour ce qui est du recours au Règlement du sénateur Nolin, une décision sera rendue prochainement.

Poursuite du débat sur la motion?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : L'honorable sénateur Andreychuk, avec l'appui de l'honorable sénateur Stratton, propose qu'en vertu du paragraphe 131(2)... Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix : Suffit!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

L'ÉTAT DE LA RECHERCHE AU CANADA

INTERPELLATION—SUSPENSION DU DÉBAT

L'honorable Wilbert J. Keon, ayant donné avis le 5 juin 2007 :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur l'état de la recherche au Canada.

— Honorables sénateurs, il y a quelques semaines, le premier ministre et le ministre de l'Industrie ont annoncé la nouvelle Stratégie relative aux sciences et à la technologie. Intitulée Avantage Canada : Réaliser le potentiel des sciences et de la technologie au profit du Canada, la stratégie du Canada pour atteindre les objectifs établis dans le plan économique de novembre dernier est un document vraiment remarquable. À mon avis, si elle était appuyée à l'échelle nationale et mise en œuvre avec vigueur et avec imagination par tous les secteurs de notre économie, cette stratégie cohérente pourrait placer notre pays dans une excellente position économique pour l'avenir.

Les sciences et la technologie sont fondamentales pour l'économie parce que la véritable richesse est créée par les sciences et la technologie, par la recherche et le développement. Avec le peu de temps dont je dispose, je ne vais pas tenter de convaincre les sénateurs du fait que la richesse dépend des sciences et de la technologie, mais je vais donner deux exemples.

Mon propre secteur, les soins de santé, dépend des recherches scientifiques fondamentales en biologie, en sociologie, en ethnographie, en technologies de l'information, en science des matériaux et dans bon nombre d'autres domaines, et des technologies élaborées à partir de la recherche fondamentale.

La santé compte pour environ 10 p. 100 de notre économie. Notre système de soins de santé est aussi à la base du reste de notre économie. Par exemple, il est généralement admis que notre système de soins de santé réduit de 1 000 $ le coût de fabrication d'une automobile au Canada par rapport aux États-Unis.

Le gouverneur Arnold Schwarzenegger a soulevé des points très semblables relativement à l'environnement dans son récent discours devant l'Economic Club of Toronto. Il a souligné les engagements pris par la Californie envers les recherches et le développement de technologies liées à la lutte contre les changements climatiques et à la durabilité de l'environnement. Il a exprimé de façon éloquente sa conviction que les initiatives environnementales auront des effets comparables à ceux de l'aérospatiale et de l'industrie de l'information sur le bien-être économique des Californiens, sans parler de leurs bienfaits sur l'environnement.

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous résumer ce qui constitue, à mon avis, les plus importants aspects de cette stratégie.

Le thème central de la stratégie est d'assurer la compétitivité du Canada à l'échelle internationale. L'économie d'un pays dépend de la capacité de ce pays à faire concurrence aux autres pays. Bien entendu, au Canada, nous n'avons pas tiré pleinement profit des sciences et de la technologie.

(1710)

Même si l'économie canadienne semble florissante en ce moment, dans l'ensemble, nos industries sont beaucoup moins concurrentielles à l'échelle internationale qu'elles devraient l'être. Il faut admettre cette réalité fondamentale. Nos quelques éclatants modèles de chefs de file mondiaux ne doivent pas nous faire oublier les problèmes auxquels est confrontée l'ensemble de notre économie.

La stratégie reconnaît clairement qu'en soi, un gouvernement ne crée pas la richesse nationale. Un gouvernement peut seulement établir le contexte dans lequel les acteurs des sciences et de la technologie pourront oeuvrer ensemble à créer la richesse nationale. C'est nécessairement un processus en évolution.

Un gouvernement peut aussi aider à stimuler l'industrie par des programmes de soutien soigneusement conçus et ciblés, comme le Programme d'aide à la recherche industrielle du Conseil national de recherches. L'environnement concurrentiel change constamment parce que les autres pays adaptent leurs propres contextes scientifique et technologique dès qu'ils ont l'impression d'être devancés. Un gouvernement, à l'instar d'un scientifique et d'une industrie, doit donc continuellement rester à l'avant-garde.

Le commentaire banal de Wayne Gretzky selon lequel il faut patiner en direction de la rondelle convient à merveille à la compétitivité économique nationale.

La stratégie « Réaliser le potentiel des sciences et de la technologie au profit du Canada » énonce quatre principes directeurs. Le premier consiste à « promouvoir une excellence de classe internationale ». Le succès en compétition veut dire gagner et on ne gagne pas à moins d'être constamment le meilleur.

Le deuxième principe est « concentrer les efforts sur les priorités ». La stratégie reconnaît clairement l'importance pour le Canada d'une excellente recherche fondamentale d'un bout à l'autre d'un large éventail de domaines scientifiques. Il le faut puisque les connaissances spécialisées ne coulent pas comme d'un robinet et peuvent même être rapidement perdues. Cela est particulièrement important, car personne ne peut prédire quel domaine scientifique donnera le plus d'avantages à moyen et à long terme. Toutefois, la stratégie reconnaît également que certains domaines comportent continuellement des avantages ou des besoins spéciaux et ont donc besoin d'un encouragement relatif.

Le troisième principe vise à « favoriser les partenariats ». Grâce à des initiatives telles que le programme Réseaux de centres d'excellence et les programmes de collaboration des Instituts de recherche en santé du Canada, les Canadiens excellent dans les partenariats; nous sommes même reconnus comme des chefs de file mondiaux à cet égard.

La visite du gouverneur Schwarzenegger pour signer des accords de partenariat avec l'Ontario et la Colombie-Britannique montre sans la moindre équivoque qu'il voit dans le Canada un partenaire productif et qu'il reconnaît les excellents débouchés qu'offre notre pays.

Le quatrième principe consiste à « améliorer la responsabilisation ». Bien sûr, la responsabilisation c'est veiller à ce que nos ressources soient utilisées comme prévu. Mais la responsabilisation comprend aussi une autre idée plus complexe, qui est de suivre les progrès réalisés afin de pouvoir modifier les orientations générales et les détails opérationnels au fil des succès et des échecs et de l'évolution du contexte.

À cette fin, le nouveau Conseil des sciences, de la technologie et de l'innovation remplacera les trois conseils consultatifs en sciences et en technologie dont dispose actuellement le gouvernement. J'ai eu l'occasion à deux reprises de dire au premier ministre et au ministre des Finances, au ministre de la Santé et au ministre de l'Industrie que nous ne pouvons pas nous contenter de la situation actuelle en ce qui a trait aux conseils consultatifs. Nous devons tenter d'imiter le Japon, par exemple, qui a un conseil consultatif en sciences qui fournit chaque mois des conseils au premier ministre. Nous devrions au moins tenter d'égaler ce que font nos amis les Américains.

Le nouveau Conseil conseillera le gouvernement et évaluera le rendement du Canada en sciences et en technologie par rapport aux normes internationales d'excellence. C'est une initiative astucieuse de la part du gouvernement et j'ai hâte de voir les améliorations qui en résulteront.

Guidée par ces quatre principes, la stratégie engage le gouvernement à adopter des politiques qui devraient avantager le Canada sous trois thèmes sectoriels : l'entrepreneuriat, le savoir et le talent. Un quatrième thème domine, bien sûr, et c'est celui de la responsabilisation.

Le premier thème s'intitule « créer un avantage entrepreneurial ». Comme le titre le laisse entendre, cette série d'engagements politiques est axée sur l'industrie. L'idée est de favoriser un environnement commercial compétitif et dynamique qui favorise les investissements en sciences et en technologie.

Nos industries exportatrices prospéraient quand notre dollar relativement bas par rapport au dollar américain leur permettait d'exporter sans devoir prêter trop d'attention à la productivité. Par ailleurs, tous les secteurs pâtissaient des coûts relativement élevés de la technologie et de l'équipement importés.

Le résultat a été que la productivité au Canada, qui correspondait à 91 p. 100 de la productivité aux États-Unis en 1984, avait chuté pour se situer à 74 p. 100 de la leur en 2004, et elle semble toujours en baisse. Cela ne peut durer. Le Canada est le seul grand pays qui a constamment un excédent et de plus, parmi ses principaux concurrents, le Canada a le rapport dette-PIB le plus bas. Le huard sera bientôt à parité avec le billet vert.

(Le débat est suspendu.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur la Présidente intérimaire : Il reste à l'honorable sénateur Keon six minutes pour son discours mais, puisqu'il est 17 h 15, conformément aux paragraphes 67(2) et 66(3) du Règlement, je dois interrompre les délibérations et demander que sonne le timbre d'appel des sénateurs jusqu'à 17 h 30, auquel moment le Sénat passera au vote différé sur le sous-amendement au projet de loi C-288.

Convoquez les sénateurs.

PROJET DE LOI DE MISE EN ŒUVRE DU PROTOCOLE DE KYOTO

TROISIÈME LECTURE—MOTIONS D'AMENDEMENT ET DE SOUS-AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT—REPORT DU VOTE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mitchell, appuyée par l'honorable sénateur Trenholme Counsell, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-288, Loi visant à assurer le respect des engagements du Canada en matière de changements climatiques en vertu du Protocole de Kyoto;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Tkachuk, appuyée par l'honorable sénateur Angus, que le projet de loi C-288 ne soit pas maintenant lu pour la troisième fois, mais qu'il soit modifié :

a) à l'article 3, à la page 3, par substitution , à la ligne 19, de ce qui suit :

« prise, dans toute la mesure du possible, de mesures efficaces et rapides par le »;

b) à l'article 5 :

(i) à la page 4 :

(A) par substitution, à la ligne 2, de ce qui suit :

« d'assurer, dans toute la mesure du possible, le respect des engagements du »,

(B) par substitution, à la ligne 6, de ce qui suit :

« normes de rendement réglementées, pour une année, pour les émissions des véhicules qui sont équivalentes ou supérieures aux meilleures pratiques internationales à l'égard de toute catégorie réglementaire de véhicules automobiles, »,

(C) par adjonction, après la ligne 15, de ce qui suit :

« (iii.2) la reconnaissance des mesures rapides pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, »,

(ii) à la page 5,

(A) par substitution, à la ligne 10, de ce qui suit :

« a) dans les dix jours suivant l'expiration du »,

(B) par substitution, à la ligne 24, de ce qui suit :

« au paragraphe (1) ou dans les quinze premiers »,

(C) par substitution, aux lignes 27 à 31, de ce qui suit :

« qui est déposé devant chaque chambre du Parlement est réputé renvoyé au comité permanent du Sénat ou de la Chambre des communes qui étudie habituellement les questions portant sur l'environnement ou à tout autre comité que l'une ou l'autre chambre peut désigner pour »;

c) à l'article 6, à la page 6 , par adjonction, après la ligne 33, de ce qui suit :

« (3) Pour l'application de la présente loi, le gouverneur en conseil peut, par règlement, limiter les émissions des « grands émetteurs industriels », personnes qu'il estime expressément responsables d'une partie importante des émissions de gaz à effet de serre du Canada, notamment :

a) les personnes du secteur de la production d'électricité, y compris celles qui utilisent des combustibles fossiles pour la produire;

b) les personnes de l'industrie pétrolière et gazière en amont, y compris celles qui produisent et transportent des combustibles fossiles, mais à l'exception des raffineurs de pétrole et des distributeurs de gaz naturel aux utilisateurs finaux;

c) les personnes du secteur énergivore, y compris celles qui utilisent l'énergie tirée des combustibles fossiles, les raffineurs de pétrole et les distributeurs de gaz naturel aux utilisateurs finaux. »;

d) à l'article 7 :

(i) à la page 6 :

(A) par substitution, à la ligne 37, de ce qui suit :

« Canada honore, dans toute la mesure du possible, les engagements qu'il a pris en »,

(B) par substitution, à la ligne 44, de ce qui suit :

« ce que le Canada honore, dans toute la mesure du possible, les engagements qu'il »,

(ii) à la page 7, dans la version anglaise, par substitution, à la ligne 4, de ce qui suit :

« (3) In ensuring that Canada makes all reasonable attempts to meet its »;

e) à l'article 9 :

(i) à la page 7, par substitution, à la ligne 37, de ce qui suit :

« pris afin d'assurer que le Canada respecte, dans toute la mesure du possible, »,

(ii) à la page 8 :

(A) par substitution, à la ligne 3, de ce qui suit :

« indiquée dans les trente jours suivant le délai »,

(B) par substitution, à la ligne 7, de ce qui suit :

« paragraphe (1) ou dans les quinze premiers »;

f) à l'article 10 :

(i) à la page 8 :

(A) par substitution, à la ligne 10, de ce qui suit :

« 10. (1) Dans les cent quatre-vingts jours suivant la »,

(B) par substitution, à la ligne 13, de ce qui suit :

« graphe 5(3) ou dans les quatre-vingt-dix jours suivant la »,

(C) par substitution, à la ligne 42, de ce qui suit :

« a) dans les quinze jours après avoir reçu les »,

(ii) à la page 9 :

(A) par substitution, à la ligne 6, de ce qui suit :

« dans les quinze premiers jours de séance de »,

(B) par substitution, à la ligne 8, de ce qui suit :

« b) dans les trente jours suivant la réception des »;

g) à l'article 10.1, à la page 9 :

(i) par substitution, à la ligne 16, de ce qui suit :

« ment et au développement durable peut préparer un »,

(ii) par substitution, à la ligne 32, de ce qui suit :

« président du Sénat et à celui de la Chambre des communes au plus »,

(iii) par substitution, aux lignes 33 et 34, de ce qui suit :

« tard le jour où il est publié et chaque président le dépose devant sa chambre respective dans les quinze ».

Sur le sous-amendement de l'honorable sénateur Di Nino, appuyé par l'honorable sénateur Oliver, que la motion d'amendement soit modifiée par remplacement de l'alinéa g) par ce qui suit :

g) à l'article 10.1, à la page 9, par substitution, à la ligne 16, de ce qui suit :

« ment et au développement durable peut préparer un ».

(1730)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion suivante : Le sénateur Di Nino, avec l'appui du sénateur Oliver, propose :

Que la motion d'amendement soit modifiée par remplacement de l'alinéa g) par ce qui suit :

g) à l'article 10.1, à la page 9...

Puis-je me dispenser de lire le reste?

Des voix : Suffit!

Son Honneur le Président : Que tous ceux qui sont en faveur de la motion de sous-amendement veuillent bien se lever.

(La motion de sous-amendement, mise aux voix, est rejetée.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk Meighen
Angus Nancy Ruth
Cochrane Nolin
Comeau Oliver
Di Nino Segal
Gustafson St. Germain
Johnson Stratton
Keon Tkachuk—17
LeBreton

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams Jaffer
Baker Lavigne
Banks Losier-Cool
Biron Lovelace Nicholas
Bryden Mercer
Carstairs Merchant
Cools Milne
Corbin Mitchell
Cordy Moore
Cowan Munson
Dallaire Murray
Dawson Pépin
Day Peterson
De Bané Phalen
Downe Poulin
Dyck Ringuette
Eggleton Robichaud
Fairbairn Rompkey
Fitzpatrick Spivak
Fox Stollery
Fraser Tardif
Goldstein Trenholme Counsell
Harb Watt
Hervieux-Payette Zimmer—49
Hubley

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucun.

Son Honneur le Président : Le Sénat passe maintenant à l'étude de la motion d'amendement du sénateur Tkachuk, appuyée par le sénateur Angus.

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir participer au débat sur les amendements proposés au projet de loi C-288. Les changements climatiques sont l'un des plus grands défis de l'heure. C'est un problème réel et d'actualité qui aura d'énormes conséquences pour chacun de nous. C'est pour cette raison qu'il doit être abordé avec beaucoup de sérieux. Les changements climatiques pourraient avoir d'importantes répercussions sur notre santé, notre environnement et nos conditions de vie. Malheureusement toutefois, le projet de loi C-288 ne présente pas de plan rationnel ou pratique qui pourrait permettre de lutter contre les changements climatiques eux-mêmes.

En exigeant du Canada qu'il fasse en six mois ce qu'il est impossible de faire et ce qui n'a pu être fait en dix ans, le projet de loi C-288 mène directement le pays et tous ceux qui se préoccupent de cette question à un autre échec.

Les arguments économiques contre le projet de loi C-288 sont très forts. Si ce projet de loi devait être mis en vigueur, des milliers de Canadiens perdraient leur emploi d'ici 2009. Les prix du gaz naturel et de l'essence grimperaient en flèche et le coût des transports, particulièrement dans les régions rurales du Canada, en ferait tout autant. Comme l'a fait remarquer le comité qui se penche sur les questions d'agriculture et de pauvreté rurale, cela serait tout particulièrement difficile pour les pauvres et les plus démunis que l'on trouve dans bon nombre de régions rurales du Canada.

Ce ne sont là que les projections minimales auxquelles la Couronne en est arrivée dans le cadre de l'analyse qu'elle a faite du projet de loi C-288 et des répercussions qu'il aurait au niveau économique.

Honorables sénateurs, le gouvernement du Canada n'est pas le seul à penser ainsi. Permettez-moi de citer un article paru dans le numéro du 9 juin du quotidien montréalais The Gazette, dans lequel on pouvait lire que le projet de loi C-288 était « intellectuellement inepte ». Voici ce qu'on pouvait lire dans l'éditorial :

M. Rodriguez n'a jamais présenté un tel projet de loi au moment où le dernier gouvernement libéral faisait fi de ses propres promesses à l'égard de Kyoto. Les libéraux doivent savoir qu'il est maintenant tout à fait impossible d'atteindre les objectifs de Kyoto.

Dans le numéro du 15 juin du Globe and Mail, Jeffrey Simpson, ce chroniqueur loquace, équilibré, sérieux, réfléchi et consciencieux, a écrit que les partis d'opposition du Canada sont, et je cite :

[...] convaincus que le Canada peut atteindre les objectifs de Kyoto d'ici 2012 sans trop nuire à l'économie. Ils ont tort. Le Canada ne pourra pas et ne devrait pas atteindre d'ici 2012 les objectifs fixés dans le Protocole de Kyoto, c'est-à-dire de réduire les émissions de 6 p. 100 par rapport au niveau de 1990, alors que les émissions du Canada sont actuellement supérieures à cet objectif d'environ 35 p. 100.

Plus tôt, nous avons expliqué que toute mesure législative qui jette le discrédit sur l'administration de la justice est mauvaise. Toute mesure législative qui détruit la bonne foi et la volonté de réussir d'un pays, sur le front environnemental, ce que ferait le projet de loi C-288 en nous vouant à l'échec, est aussi une mauvaise mesure législative.

Pensez aux sentiments qu'a déjà eus le parrain du projet de loi ici, mon bon ami et estimé collègue, le sénateur Grant Mitchell. Lorsqu'il était chef des libéraux de l'Alberta, pauvre, plongé dans l'ignorance, en difficulté — ne partez pas sénateur, vous allez aimer la suite — durant la période qui a précédé la négociation du Protocole de Kyoto, il est apparu beaucoup plus soucieux des répercussions économiques potentielles pour sa province que maintenant. Il semblait aussi plus sensible à la nécessité d'une harmonie fédérale-provinciale.

Permettez-moi de citer le Globe and Mail du 1er octobre 1997 :

Le chef libéral de l'Alberta, Grant Mitchell, sentant manifestement que même les partisans libéraux n'étaient pas prêts pour un nouveau programme énergétique fédéral susceptible de réduire de 30 p. 100 les revenus énergétiques de l'Alberta et de causer un ralentissement important de la croissance et de la production dans la population, a demandé à M. Chrétien de lancer un débat public national sur cette question. Il a dit que le premier ministre, comme M. Clinton, devrait présider une rencontre nationale réunissant les ministres provinciaux de l'Énergie et de l'Environnement ainsi que des représentants du secteur industriel et du public.

(1740)

Selon le Calgary Herald du 26 septembre :

[...] Le caucus libéral de l'Alberta appuie l'objectif mondial d'imposer une limite aux émissions de gaz à effet de serre, mais pas aux dépens de industrie pétrolière et gazière de la province.

Cela, honorables sénateurs, est de notoriété publique.

Compte tenu des positions qui viennent d'être citées, on penserait au moins que le sénateur hésiterait un peu plus à présenter un projet de loi qui aurait des répercussions économiques aussi négatives, particulièrement sur sa province.

Je suis fier de prendre la parole ici, à titre de sénateur de l'est de l'Ontario, pour défendre les intérêts économiques des habitants et contribuables de l'Alberta. Ce sont des Canadiens, eux aussi! Ils méritent d'être protégés et de ne pas être balayés du revers de la main, comme nous le faisons si souvent, surtout lorsque les libéraux sont au pouvoir et mettent en place des programmes spoliateurs comme le Programme énergétique national, qui faisait preuve d'un immense mépris pour nos collègues et citoyens de l'Alberta.

Revenant à l'amendement généralement excellent proposé par mon collègue de la Saskatchewan, un fils des Prairies, le sénateur Tkachuk, je note que le sous-alinéa g)(i) fait passer d'obligatoire à optionnelle la préparation d'un rapport par le commissaire à l'environnement et au développement durable au moins une fois tous les deux ans. Il me semble qu'un tel rapport est en fait nécessaire et qu'il ne devrait pas être optionnel.

MOTION DE SOUS-AMENDEMENT

L'honorable Hugh Segal : En conséquence, je propose :

Que la motion d'amendement soit modifiée par la suppression de l'amendement g)(i) et par le changement de la désignation littérale des amendements g)(ii) et g)(iii) à celle des amendements g)(i) et g)(ii).

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Le sous-amendement proposé par le sénateur Segal et appuyé par le sénateur Gustafson est que la motion d'amendement soit amendée par suppression de l'amendement g)(i) et...

Des voix : Suffit!

Son Honneur le Président : Débat sur le sous-amendement.

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer? Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés :

Son Honneur le Président : Convoquez les sénateurs.

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, je propose, conformément aux paragraphes 67(1) et 67(2) du Règlement que le vote soit reporté à 17 h 30 demain.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Par conséquent, le vote est reporté à demain, le mercredi 20 juin 2007, à 17 h 30.

L'ÉTAT DE LA RECHERCHE AU CANADA

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation du sénateur Keon, attirant l'attention du Sénat sur l'état de la recherche au Canada.—(L'honorable sénateur Keon)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous revenons à l'interpellation no 35. Le sénateur Keon a la parole pour le reste du temps qui lui était accordé.

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, je suis vraiment très heureux d'avoir l'occasion de poursuivre mon discours. Je craignais que le discours prononcé d'une voix si douce par mon ami, le sénateur Segal, n'ait endormi certains d'entre vous. Je vais essayer de récapituler assez rapidement.

Je m'étais arrêté aux quatre priorités de la recherche, c'est-à-dire les sciences et les technologies de l'environnement, les ressources naturelles et l'énergie, la santé et les technologies connexes des sciences de la vie ainsi que les technologies de l'information et des communications. Ce sont les priorités actuelles du gouvernement, qui seront périodiquement revues.

Les organismes chargés d'appuyer la recherche dans les universités et les établissements de recherche fédéraux collaboreront pour créer des masses critiques dans ces domaines prioritaires en soutenant des travaux pluridisciplinaires réunissant les experts voulus. Les programmes seront également examinés pour déterminer les pratiques exemplaires et les renforcer.

Il sera important, dans ce contexte, d'examiner les programmes de recherche internes du gouvernement afin de cerner les moyens auxquels il devrait avoir recours pour assurer les plus grands avantages aux Canadiens.

Pour s'acquitter de son mandat politique et réglementaire dans des domaines tels que la santé, la sécurité et l'environnement, le gouvernement doit avoir un accès rapide et efficace à une expertise de haut niveau en sciences et en technologie. Il est donc nécessaire que le gouvernement fasse de bonnes recherches dans ses propres établissements. Il faut dire, à cet égard, que ses chercheurs servent bien les Canadiens.

L'intention, exprimée dans la stratégie, de transférer aux universités ou au secteur privé les laboratoires fédéraux qui n'ont pas de fonctions réglementaires exigera de réaliser un équilibre soigneux entre de nombreuses priorités contradictoires. La façon de servir au mieux les Canadiens doit être déterminée en fonction des quatre principes sur lesquels se fonde la stratégie, et non sur la base d'autres objectifs comme les économies à réaliser ou les considérations régionales.

Le troisième thème de la stratégie est de créer un avantage pour les gens. Ce sont les gens, et non les institutions, qui font avancer les sciences et la technologie. Des personnes talentueuses, compétentes et créatrices constituent, à long terme, l'élément le plus important d'une économie nationale forte. Des Canadiens talentueux, compétents et créateurs travaillent partout dans le monde, ce qui illustre bien le problème.

Parmi les pays de l'OCDE, nous avons le pourcentage le plus élevé de personnes ayant fait des études postsecondaires. Toutefois, nous nous classons dans la moitié inférieure pour ce qui est du pourcentage de diplômés en sciences naturelles et en génie, de titulaires de doctorats et de professionnels des sciences et de la technologie. Nous nous situons très bas par rapport aux autres pays de l'OCDE.

Nous ne formons pas suffisamment de personnel en sciences et en technologie. De plus, nous perdons beaucoup de ceux que nous formons au profit d'autres pays. Notre situation serait encore pire si nous n'avions pas eu la capacité d'attirer des gens instruits et talentueux d'autres pays. Malheureusement, beaucoup de ces gens sont chauffeurs de taxi.

Les gens compétents qui ont une bonne formation sont extrêmement mobiles. Ceux qui excellent consacrent au moins dix ans de leur vie à faire des études universitaires, à suivre des cours de formation et à faire la preuve de leur potentiel dans des publications internationales de sciences et de technologie.

Ces gens veulent ensuite utiliser leur talent et apporter leur contribution. Ils le feront dès qu'ils auront trouvé un environnement répondant à leurs aspirations professionnelles et à leurs attentes en matière de qualité de vie. Les organisations internationales déploient de grands efforts pour les attirer. Le Canada peut assez bien soutenir la concurrence sur le plan de la qualité de vie, mais nous ne nous classons pas très haut dans le domaine de l'avancement professionnel.

La stratégie cible donc à juste titre le besoin de former, d'attirer et de garder les éléments brillants. Cela nous ramène à la fiscalité et à l'engagement à rendre le régime fiscal plus équitable pour que le Canada puisse attirer et garder les travailleurs hautement qualifiés qu'il lui faut pour stimuler l'innovation et la croissance.

La stratégie vise à réduire les obstacles à la mobilité et à reconnaître les titres professionnels. À l'heure actuelle, ces obstacles empêchent la mise en place de pratiques de travail optimales. La stratégie a pour but d'assurer un financement stable et prévisible de l'éducation postsecondaire, d'accroître le soutien des stages de recherche dans l'industrie et d'offrir des bourses plus nombreuses et plus généreuses aux stagiaires avancés.

Honorables sénateurs, j'ai essayé de résumer cette stratégie que je considère très importante pour la croissance économique future du Canada et qui vise à mobiliser les sciences et la technologie au service du Canada.

On raconte que des constructeurs automobiles américains et japonais ont tenu une réunion pour discuter de planification à long terme, mais qu'ils ont eu des difficultés à communiquer parce que leurs notions du temps étaient très différentes. Pour les Américains, un horizon de planification de cinq ans représentait le très long terme. Pour les Japonais, on ne pouvait pas parler de long terme à moins de 25 ans. Notre stratégie est plutôt modelée sur la façon de penser des Japonais. Elle a pour but de positionner le Canada bien au-delà de la durée de n'importe quel gouvernement.

Il est facile de trouver des défauts dans une stratégie aussi complexe. Je suis certainement préoccupé par certaines de ses priorités et de ses notions d'équilibre. Mais ce n'est pas vraiment un problème. L'important, c'est que nous avons une plate-forme scientifique exceptionnelle collectivement bâtie dans les 20 dernières années par les gouvernements, les universités et l'industrie. Quelle que soit la norme choisie, elle est exceptionnelle par rapport aux normes mondiales. Cette plateforme a bénéficié d'un grand coup de pouce dans le dernier budget. En effet, une somme de 9,2 millions de dollars a été attribuée en vue de soutenir l'effort canadien collectif. Nous avons maintenant une excellente stratégie technologique et scientifique qui nous permettra de passer sans inquiétude à une économie de la connaissance, comme il se doit, sans dépendre totalement de nos ressources naturelles.

(Sur la motion du sénateur Losier-Cool, le débat est ajourné.)

(1750)

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DE PRÉSENTATION DE SON RAPPORT FINAL DE L'ÉTUDE SUR LES PRESTATIONS ET SERVICES OFFERTS AUX ANCIENS COMBATTANTS, LES ACTIVITÉS COMMÉMORATIVES ET LA CHARTE

L'honorable Tommy Banks, au nom du sénateur Day, conformément à l'avis du 31 mai 2007, propose :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 11 mai 2006, la date pour la présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense sur les services et les avantages sociaux offerts aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres des missions de maintien de la paix et à leurs familles en reconnaissance des services rendus au Canada, soit reportée du 30 juin 2007 au 31 mars 2008.

— Honorables sénateurs, le sénateur Day est président du sous-comité du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Comme nous le savons tous, il préside actuellement le Comité des finances nationales qui procède actuellement à l'examen du projet de loi C-52. Il a par conséquent demandé que je propose la motion inscrite à son nom, dont l'objet est de prolonger le délai pour la présentation d'un rapport par ce sous-comité au sujet des services et des avantages offerts aux anciens combattants des Forces armées et des missions de maintien de la paix, notamment. Il s'agit exactement du même ordre de renvoi que celui que possède le comité, et je vais donc proposer l'adoption du rapport en son nom.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DU DÉPÔT DE SON RAPPORT FINAL SUR L'ÉTUDE DES DISPOSITIONS DE LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867 QUI CONCERNENT LE SÉNAT

L'honorable Wilbert J. Keon, conformément à l'avis du 7 juin 2007, propose :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 14 décembre 2006, la date pour la présentation du rapport final du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, autorisé à examiner, pour en faire rapport, les dispositions de la Loi constitutionnelle de 1867 qui concernent le Sénat, soit reportée du 21 juin 2007 au 24 juin 2008.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, dois-je considérer qu'il est 18 heures?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Comme il est 18 heures, je dois quitter le fauteuil jusqu'à 20 heures, heure où nous reprendrons le débat.

(La séance du Sénat est suspendue.)

(2000)

[Français]

(Le Sénat reprend sa séance.)

LA COMMISSAIRE À L'INTÉGRITÉ DU SECTEUR PUBLIC

LA NOMINATION DE MME CHRISTIANE OUIMET—ÉTUDE EN COMITÉ PLÉNIER

L'ordre du jour appelle :

Le Sénat se forme en comité plénier afin de recevoir Mme Christiane Ouimet relativement à sa nomination à titre de commissaire à l'intégrité du secteur public.

Le Sénat s'ajourne à loisir et se forme en comité plénier, sous la présidence de l'honorable Rose-Marie Losier-Cool, afin de recevoir Mme Christiane Ouimet relativement à sa nomination à titre de commissaire à l'intégrité du secteur public.

La présidente : Conformément à l'ordre, le Sénat est formé en comité plénier afin d'accueillir Mme Christiane Ouimet relativement à sa nomination à titre de commissaire à l'intégrité du secteur public.

[Traduction]

Avant de commencer, je me permets d'attirer votre attention sur le paragraphe 83 du Règlement, qui prévoit ce qui suit :

Lorsque le Sénat se forme en comité plénier, chaque sénateur doit occuper sa place. Un sénateur qui veut prendre la parole se lève et s'adresse au président du comité.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, de déroger à l'article 83?

Des voix : D'accord.

[Français]

Le sénateur Comeau : Honorables sénateurs, je propose, avec l'appui du sénateur LeBreton, que Mme Christiane Ouimet soit invitée à prendre place dans la salle du Sénat.

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : Madame Ouimet, au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat. Vous avez été invitée pour répondre à des questions au sujet de votre nomination à titre de commissaire à l'intégrité du secteur public.

Nous entendrons d'abord votre déclaration préliminaire. J'inviterai ensuite les sénateurs à poser des questions.

[Traduction]

Madame Ouimet, vous pouvez commencer par une brève déclaration.

[Français]

Mme Christiane Ouimet : Madame la présidente, honorables sénateurs, il me fait grand plaisir d'être parmi vous aujourd'hui pour discuter de ma candidature au poste de commissaire à l'intégrité du secteur public. C'est un véritable privilège et un grand honneur pour moi d'être considérée pour ce poste.

J'aimerais par conséquent partager avec vous ma feuille de route et vous faire part de ma perspective générale relativement aux fonctions de ce poste important pour la fonction publique, le Parlement, mais aussi, je le crois, pour l'ensemble des Canadiens.

[Traduction]

Pour commencer, je me permettrai de parler un peu de moi-même aux sénateurs. Je suis née dans une ferme laitière, dans le petit village de St. Albert, en Ontario. Ma mère est Madeleine Laflèche et mon père, feu Albert Ouimet. J'ai reçu mon éducation primaire à l'école locale et j'ai ensuite fréquenté l'école secondaire de Casselman, le village voisin. Par la suite, j'ai décroché un baccalauréat avec spécialisation en lettres françaises de l'Université d'Ottawa et deux baccalauréats en droit, un en droit civil et le deuxième en common law. J'ai fait mon stage dans un cabinet local, en me concentrant sur la pratique générale, et j'ai ensuite passé mon barreau. Mon conjoint et moi sommes mariés depuis 26 ans, et nous avons deux filles merveilleuses.

Je suis entrée à la fonction publique fédérale en 1982 à la Commission de contrôle de l'énergie atomique, maintenant la Commission canadienne de sûreté nucléaire, comme agente de réglementation et de consultation publique. C'est là où j'ai été sensibilisée à l'importance d'un solide cadre réglementaire tant pour le public que pour l'industrie. J'ai ensuite été présidente d'une Commission d'appel de la Commission de la fonction publique, où j'ai mené des enquêtes sur la nomination et le renvoi des fonctionnaires. Je jouais un rôle quasi-judiciaire puisque je devais garantir que le principe du mérite était respecté quand une nomination était faite et que les employés retrogradés ou renvoyés avaient eu la chance d'être entendus.

Quoi qu'il en soit, les principes de la justice naturelle doivent évidemment être respectés. Un nouveau tribunal assurera désormais le respect de ces principes relativement aux nominations. L'existence de processus logiques, équitables, transparents et fondés sur le mérite pour l'approbation des nominations constitue le fondement d'une fonction publique capable de fournir les meilleurs services qui soient aux Canadiens.

Après avoir dirigé brièvement la Direction des affaires réglementaires de Revenu Canada, dans le secteur des douanes, j'ai été la première personne à diriger la section des opérations d'application de la loi, qui était chargée des enquêtes sur les fraudes commerciales ainsi que du programme de lutte contre le trafic des drogues. Grâce à la rigueur de nos méthodes et à la minutie de nos agents, nous avions un excellent taux de réussite dans les poursuites que nous intentions.

En 1992, j'ai commencé à travailler au sein du secrétariat du gouvernement, c'est-à-dire au Bureau du Conseil privé, où j'ai eu le privilège de travailler pour trois premiers ministres, que j'ai pu conseiller relativement aux ministères à vocation économique en vue des transitions et des restructurations de l'État. Dans le cadre de mes fonctions, j'ai dû également conseiller les premiers ministres relativement aux rôles et aux responsabilités des titulaires de charge publique de haut rang. Ainsi, j'ai pu comprendre les rouages du gouvernement et l'importance, pour ce dernier, de pouvoir bénéficier d'avis fournis en toute indépendance par la fonction publique pour garantir la continuité et la saine gestion des affaires de l'État.

Par la suite, j'ai travaillé au ministère du Solliciteur général du Canada pendant cinq ans. J'ai fini par occuper le poste de sous-solliciteure générale adjointe chargée du programme de la police des Autochtones. Je resterai toujours grandement reconnaissante de m'être vu décerner, par l'Association des chefs de police des Premières nations, le titre de chef de police honoraire des Premières nations.

À la fin de 1999, j'ai été nommée PDG de Conseils et Vérification Canada, au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Cet organisme offre, selon le principe du recouvrement des coûts, une gamme complète de services visant à améliorer l'efficacité et la capacité de rendre compte. Quelques années plus tard, je suis revenue travailler au même ministère, mais cette fois comme sous-ministre associée. J'ai dû alors diriger une restructuration majeure d'un ministère comptant plus de 14 000 fonctionnaires. J'ai en outre beaucoup participé à l'élaboration, en 2004, du plan d'action du ministère en matière de valeurs et d'éthique et j'ai contribué à la résolution d'un certain nombre de problèmes de fonctionnement.

(2010)

Juste auparavant, j'ai été directrice générale de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, le plus vaste tribunal administratif du pays au lendemain du 11 septembre 2001. Pendant cette période, notre Section de l'immigration a élaboré un mode alternatif très efficace de règlement des litiges. Je sais qu'un mode alternatif de règlement des litiges est essentiel à la bonne marche des tribunaux administratifs, qui sont constitués expressément pour rendre justice plus rapidement et plus simplement que les tribunaux traditionnels dans des domaines spécialisés.

Enfin, je vais faire quelques observations au sujet de mon poste actuel de sous-ministre associée à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Je suis chargée d'appuyer le sous-ministre comme il le juge bon et d'agir en son nom au besoin, mais, au cours des quelques dernières années, je me suis principalement occupée des questions ministérielles, comme les relations avec les syndicats des employés, les griefs, les questions de diversité, les stratégies liées aux ressources humaines et la vérification. L'actuel sous-ministre m'a également chargée d'exercer la fonction de championne des valeurs et de l'éthique.

On pourrait dire que j'ai eu une carrière éclectique. Cependant, je pense que le fil conducteur est un désir de servir et d'apporter une contribution dans l'intérêt public.

J'estime que mes antécédents dans le secteur juridique m'ont été fort utiles, particulièrement dans les milieux quasi judiciaires, qui sont, bien sûr, semblables au Bureau du commissaire à l'intégrité. Je m'estime privilégiée d'être prise en considération pour le poste de commissaire à l'intégrité du secteur public.

J'ai examiné les nouvelles dispositions de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles pour évaluer les tâches qui m'attendent. Si je comprends bien, ces nouvelles dispositions visent à consacrer dans la loi un régime solide pour régir la divulgation d'actes répréhensibles dans la fonction publique fédérale. Les éléments clés en sont la création du poste de commissaire, qui fait rapport directement au Parlement, et qui possède une compétence accrue et des pouvoirs considérables d'enquête et d'application de la loi; le pouvoir du commissaire de faire rapport des conclusions d'enquête, de formuler des recommandations lorsque des actes répréhensibles sont confirmés et de présenter des rapports annuels et spéciaux au Parlement; et une interdiction claire de prendre des mesures de représailles contre les plaignants.

Le Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles offre une protection supplémentaire aux plaignants. À la demande du commissaire, il détermine si des représailles ont été exercées. D'autres dispositions, concernant notamment l'aide juridique et la divulgation protégée, renforcent également le rôle du commissaire et améliorent l'accessibilité du processus.

Au moment opportun, j'examinerais attentivement les liens entre le rôle du commissaire et ceux des autres organes de surveillance et organismes parlementaires. Néanmoins, je le répète, le cadre juridique établi dans la loi demeurera l'objectif et le guide ultimes.

Le poste de commissaire à l'intégrité du secteur public doit avoir la confiance du Parlement. Autrement dit, le rôle essentiel du commissaire et de son bureau sera d'appliquer une loi qui vise à encourager les employés de la fonction publique à s'exprimer s'ils ont raison de croire que des actes répréhensibles ont été commis et à protéger ces employés contre des représailles à la suite de divulgations.

L'objectif est un système équitable et accessible qui permette que justice soit faite. Le but le plus important est de protéger l'intérêt public.

[Français]

Au cours de ma carrière, j'ai eu le privilège de servir les Canadiens dans différentes fonctions. Je suis fière que vous me considériez pour le poste de commissaire à l'intégrité du secteur public. Le commissaire contribue à rehausser la réputation du secteur public, en offrant une grande transparence et une ouverture pour toute personne qui se croit lésée.

Je suis d'origines modestes. Toutefois, dans le milieu d'où je viens, l'honnêteté et la franchise sont de grandes valeurs. Mon père a toujours été vu comme un homme d'une grande intégrité et j'en suis fière. Cette réputation fut en quelque sorte sa marque de commerce non seulement dans notre petite communauté de St. Albert, mais aussi dans les villages avoisinants.

En sa mémoire, c'est avec humilité et fierté que je porterai le titre de commissaire à l'intégrité du secteur public, si ce comité et le Sénat jugent que je mérite leur confiance.

La présidente : Honorables sénateurs, nous passerons maintenant à une période de questions.

Le sénateur Hervieux-Payette : Je n'ai nulle intention de mettre en doute les mérites et la carrière de Mme Ouimet. J'aimerais toutefois rappeler aux honorables sénateurs que je me suis prononcée contre le projet de loi et contre le principe de la délation. À mon avis, ce principe détruit la confiance qui doit régner entre les membres de la fonction publique et constitue un système parallèle à notre système de justice. Je tenais à vous en faire part.

Il n'en tiendra qu'à vous de prouver, par vos actions et dans l'exécution de vos fonctions, que mes craintes quant à l'abus pouvant découler de la délation sont injustifiées et que notre système de justice en général sera bien servi.

Ce système est en vigueur aux États-Unis depuis plusieurs dizaines d'années. On se rappellera de cas de délateurs célèbres, d'entreprises privées ayant commis des infractions graves qui ont coûté des milliards de dollars à l'économie américaine. On se souviendra de la personne qui avait découvert des failles dans le système de sécurité américain qui auraient pu prévenir les événements du 11 septembre 2001. Ces personnes qui ont dénoncé et qui avaient déjà fait des rapports non seulement n'ont pas été récompensées, elles ont été punies. La plupart étaient des femmes, et elles ont dû traverser beaucoup de difficultés dans leur carrière. Au lieu d'aller de l'avant, elles ont accusé un recul.

Par contre, certaines personnes peuvent être accusées injustement. Ce geste peut être motivé par l'envie de la part d'un collègue, par la compétition, la malice ou la vengeance. Je n'ai pas vu beaucoup de cas où des réprimandes ont été imposées pour les conséquences de ces fausses accusations.

Le vérificateur général peut nous aviser de la mauvaise gouvernance, donc des erreurs de bonne foi. Toutefois, il en est autrement pour les gens qui manquent de compétences. D'autre part, il y a le procureur général. Dans les cas d'infraction, la poursuite judiciaire est le processus habituel. Si une personne commet un vol ou une infraction, comme détourner des fonds, on a recours dans le système privé au système de justice en place. Je ne vois donc pas la nécessité d'avoir un système différent pour les fonctionnaires.

Vous dites que le système sera juste et indépendant. Je ne mets pas en doute vos propos. Toutefois, la fonction en soi suscite chez moi un doute raisonnable. Je pense que cet outil peut être utilisé de façon odieuse. J'ai pris connaissance de cas réels, dans la fonction publique, où des personnes ont été victimes de délations injustifiées. Ces personnes se sont rendues malades et ont dû être hospitalisées. Certaines personnes ont été obligées de démissionner de la fonction publique car le stress était trop élevé.

Il faut mesurer les conséquences de la plainte déposée et les inconvénients pour la personne accusée. J'aimerais que vous me précisiez les outils dont vous disposerez pour protéger les droits des accusés, lorsque vous entreprendrez une enquête, et assurer l'intégrité.

(2020)

Je parle de personnes qui ont fait l'objet d'une enquête sur leur honnêteté. Une batterie de vérificateurs a examiné, pendant des mois, de A à Z, tous les chiffres, ont regardé les coupons de taxi pour savoir si l'argent avait été bien dépensé et finalement, l'enquête a coûté plus cher que l'infraction reprochée. Il y a la question de la mesure des dépenses qui seront faites pour arriver à la conclusion qu'il y avait vraiment une infraction car pour un détournement de fonds de 100 millions de dollars, on peut dépenser quelques sous. Un cas semblable est survenu au ministère de la Défense, où une somme de 90 millions de dollars a été détournée, et le système de justice actuel s'en est occupé correctement.

Pouvez-vous nous faire part de la façon dont vous allez vous acquitter de votre tâche? Ce sera un grand défi pour vous de prouver que les Canadiens pourront bénéficier d'un commissaire à l'intégrité du secteur public au lieu de décourager les gens de joindre la fonction publique et d'être continuellement espionné par des personnes qui pourraient vouloir leur nuire et utiliser ce système pour leur porter des préjudices.

Mme Ouimet : Merci, madame la présidente. D'emblée, j'aimerais faire des commentaires concernant les préoccupations du sénateur Hervieux-Payette. Il y a trois éléments qui, à mon avis, sont absolument indispensables pour toute personne occupant le poste de commissaire.

Le commissaire se doit d'être une entité neutre et doit s'assurer d'être vu ainsi si on prend en considération tous les éléments importants. Il y a plus de 25 ans, j'ai prêté un serment d'office en tant qu'avocate. J'ai pris un extrait de ce serment et, en tant qu'officier de la cour, j'ai l'obligation de m'assurer de protéger et de défendre les droits et les intérêts de mes concitoyens. Je dois également m'assurer que les intérêts de tous ne soient pas négligés. Il y a une disposition particulière où il est dit que vous ne refuserez pas de défendre des causes raisonnablement fondées ni n'intenterez d'action frivole. Cela me touche beaucoup en tant qu'agent de la cour.

Dans un deuxième temps, je serai guidée par les paramètres de la loi. La Cour suprême s'est prononcée, il y a plusieurs années, à l'effet que lorsqu'on touche aux droits des individus, que ce soit les plaignants ou les répondants, il faut absolument observer les principes de justice naturelle. Cela s'applique à tous ceux qui pourraient être impliqués directement ou indirectement.

Lors de ma déclaration, j'ai dit que j'allais examiner avec soin les rôles des agents du Parlement qui ont des mandats précis et tout organisme de surveillance afin de m'assurer non seulement que nous travaillions de concert, mais que la meilleure expertise soit mise à contribution selon le cas.

Je prends très au sérieux la réputation et les droits des individus. Au fil des années et dans toutes les fonctions que j'ai occupées, j'ai toujours été consciente de l'impact que ces décisions administratives pouvaient avoir, même dans certains cas, sur la vie de réfugiés et, dans d'autres cas, sur la réputation d'un individu.

J'aimerais donner toute l'assurance possible que c'est avec diligence et beaucoup de rigueur que j'occuperai ce poste.

[Traduction]

Le sénateur Segal : Bienvenue, madame Ouimet. Je suis toujours ravi de voir un ancien étudiant de l'Université d'Ottawa s'élever dans le firmament du gouvernement fédéral. Mes félicitations sincères et profondes.

Votre tâche sera intéressante et importante. Il ne s'agit pas seulement d'examiner des plaintes futiles, comme l'a indiqué ma collègue, le sénateur Hervieux-Payette. Divers joueurs de l'échiquier de la politique et de la démocratie pourraient utiliser votre bureau pour faire avancer leur cause, peu importe vos constatations dans un cas en particulier.

Par exemple, admettons que vous receviez deux plaintes. Supposons que l'une soit sérieuse et que l'autre soit futile, mais que vous ne puissiez le déterminer de prime abord et que vous deviez mener une enquête.

L'un des risques auxquels vous êtes exposée — et j'aimerais entendre votre réaction à ce sujet —, c'est que l'un des plaignants, celui dont la plainte est sérieuse ou celui dont la plainte est futile, décide de parler de la nature de sa plainte aux médias en même temps qu'il vous en fait part. Le problème de la réputation entachée d'un fonctionnaire se poserait déjà avant même que vous ayez eu l'occasion de déterminer si la plainte était sérieuse ou non.

Dans l'autre cas, supposons que, en votre qualité de mandataire du Parlement, vous vous trouviez dans une situation où l'on pose, dans l'une ou l'autre Chambre, des questions à des ministres au sujet d'allégations concernant un fonctionnaire, ce à quoi ils pourraient très bien répondre : « Je crois savoir que le commissaire à l'intégrité du secteur public fait actuellement enquête. Il serait inopportun que je fasse des commentaires. »

Dans les deux cas, l'existence de votre bureau, qui n'a par ailleurs rien à voir avec l'objet de la plainte, peut être invoquée à diverses fins. Je serais curieux de savoir comment, de la façon dont vous envisagez vos fonctions à mesure que vous vous familiarisez avec votre rôle, vous comptez vous protéger et protéger votre indépendance et votre capacité de mener des enquêtes confidentielles dans le contexte plus vaste de la dynamique qui entoure généralement des questions qui deviennent d'intérêt public.

Mme Ouimet : Merci beaucoup, madame la présidente. Il serait peut-être bon que j'ajoute à ce que j'ai dit au sénateur Segal, en réponse à sa question, que j'attache de l'importance au rôle de mandataire du Parlement et ce que je compte faire à l'égard de cas particuliers, c'est de présenter un rapport. Je demanderai ouvertement l'avis des deux Chambres quant à la façon de régler des situations précises. J'espère obtenir la rétroaction des deux Chambres.

En ce qui a trait aux cas précis qui ont été mentionnés par le sénateur, il va de soi qu'il existe une procédure détaillée quant à la façon dont la divulgation est faite. Un plaignant qui se manifeste peut se prévaloir de la dénonciation protégée si les critères précis de la loi sont respectés, notamment si la question de la sécurité intervient, ou s'il y a urgence. Toutefois, à ce moment-là, on ne peut plus parler de « dénonciation protégée ». Cette situation s'est produite dans un certain nombre de cas, lorsque les gens décidaient d'informer les médias de leur cause.

Je ne crois pas que ce soit la bonne façon de faire. Une fois que vous avez des critères précis, vous devez respecter les institutions qui ont été créées de façon démocratique, pour le bénéfice du plaignant et de l'intimé.

Je ne peux commenter des cas précis, mais il va de soi que la loi n'offrira plus la protection qu'elle offrait au niveau de la protection de l'anonymat et des renseignements, si la personne se manifeste.

Je vais me fonder sur la législation au moment de traiter chaque cas. Il existe toute une gamme d'outils, à commencer par la définition de la portée du mandat, la compétence et l'affectation d'un enquêteur chargé d'examiner expressément tous les détails du cas. Il existe aussi des dispositions précises liées à la justice naturelle. La tenue d'une audience est une mesure utile. Dans les cas où il y a allégation de représailles, un tribunal sera mis sur pied.

Tout cela pour dire que je m'attends à ce que certaines causes soient plus fondées que d'autres. Cela dit, je vais suivre le processus défini dans la législation et je vais m'assurer à toutes les étapes que les gens aient la possibilité de se faire entendre. En outre, à titre de commissaire, je vais étudier soigneusement tous les aspects de la question.

(2030)

Il peut y avoir des situations, et l'honorable sénateur a raison, où des titulaires de charges publiques supérieures discutent d'un cas. Cela ne m'empêchera pas de m'assurer que nous examinons les éléments de preuve présentés dans le cadre de l'enquête et, encore une fois, que les principes de justice naturelle et d'équité de la procédure sont respectés à tous égards.

Le sénateur Segal : Vous devrez de toute évidence recruter quelques employés pour vous seconder. Si vous aviez une baguette magique et pouviez recruter le personnel qui, selon vous, conviendrait parfaitement pour votre travail, quelle formation posséderait ce personnel? S'agirait-il d'avocats, comme vous? Vos employés auraient-ils de l'expérience dans la conduite d'enquêtes? Dans un monde parfait, quel type d'employés souhaiteriez-vous avoir?

Mme Ouimet : Je me chercherai une baguette magique et je l'apporterai avec moi la prochaine fois.

Tout d'abord, ce n'est pas le nombre d'employés qui compte, mais leur qualité. Je m'appuierai sur l'excellent travail accompli ces cinq dernières années.

Lorsque j'occupais des fonctions quasi judiciaires, j'avais des collègues qui possédaient un bagage juridique. Je crois que cela pourrait être un atout dans certains cas. J'avais aussi des collègues qui possédaient des compétences et avaient une expérience variées, notamment dans les domaines des ressources humaines, des relations de travail et de l'exécution de la loi.

Qu'il s'agisse de recherchistes ou d'enquêteurs, je rechercherais certainement des personnes crédibles et intègres qui respectent les lignes directrices établies dans la loi.

Le sénateur Tkachuk : Merci pour votre exposé. Bienvenue au Sénat, madame Ouimet.

J'ai des questions d'ordre pratique. Supposons que quelqu'un constate quelque chose de répréhensible qui a trait, par exemple, à l'éthique ou qui peut constituer une infraction de nature criminelle, comme une fraude, et décide de le signaler. Est-ce que cette personne doit vous rapporter la situation à vous ou la signaler d'abord à son supérieur puis à vous? Comment intervenez-vous dans le dossier et qu'est-ce que vous devez protéger lorsque quelqu'un dénonce une situation?

Ensuite, comment vérifiez-vous le méfait possible dans tout cela? Il s'agit d'une immense organisation comptant des dizaines de milliers de personnes qui se jalousent souvent. Ce peut être difficile.

Quelle est la nature de votre participation quand un dénonciateur dit : « Voilà une mauvaise situation qui a cours dans mon service »?

Mme Ouimet : D'abord, comme l'indique la loi, le divulgateur peut aviser son supérieur immédiat ou le responsable de la divulgation au sein du ministère, ou encore se rendre directement au bureau du commissaire. Il revient alors au commissaire de déterminer si, à première vue, la situation relève de son bureau.

Il faut aussi déterminer s'il y a activité criminelle. J'insistais beaucoup sur ce point quand je travaillais aux Douanes. J'étais responsable des enquêtes criminelles. Bien entendu, la détection des fraudes était l'un des éléments clés de nos activités.

Je disposais d'employés spécialement formés, surtout en matière de fraudes, pour exécuter des mandats de perquisition avec l'autorisation de la cour. Il s'agit ici d'un sujet très délicat. L'exécution de mandats de perquisition, ce que j'ai fait dans des résidences privées et des commerces, constitue un pouvoir très intrusif. Je devrai décider si la question mérite d'être explorée sous l'angle d'une enquête criminelle devant être menée par des policiers ou des autorités d'application de la loi.

C'est la raison pour laquelle j'ai dit plus tôt qu'il importe tout autant de nous pencher sur les questions de dotation que d'établir le mandat. Il existe maintenant un tribunal chargé d'étudier les nominations. Chaque organisation a été créée pour une raison précise, mais nous devons veiller à éviter les dédoublements et à faire en sorte que toute plainte soit acheminée vers une institution qui dispose d'un mandat clair et de tous les outils nécessaires. Si une question relève de mon mandat, j'appliquerai le processus dont j'ai parlé plus tôt.

Le sénateur Tkachuk : Toutefois, qui assume la responsabilité? Si quelqu'un vous approche et fait rapport d'un fait que vous soupçonnez être de nature criminelle, le fonctionnaire qui vous a approché a-t-il alors fait le travail qu'il avait à faire? A-t-il l'obligation de déclarer l'incident à la police ou bien, une fois qu'il vous l'a rapporté, est-ce tout et est-ce à vous de décider si le cas doit être soumis à la police? Cela continue de me paraître étrange et je suis toujours en train de me demander comment cette organisation va fonctionner.

Mme Ouimet : Tout dépend de la situation. Par exemple, cela dépend de la valeur de la preuve, du fait que des vies sont en jeu ou non et du fait qu'il s'agit ou non d'une question de sécurité nationale.

Il existe une disposition qui prévoit la possibilité d'accorder l'aide juridique à l'auteur de la plainte, et je n'hésiterai pas à m'en prévaloir. On dispose de 1 500 $ à cette fin, et cela peut aller jusqu'à 3 000 $, mais le tribunal aurait également une certaine souplesse.

C'est le bureau du commissaire qui aurait la responsabilité de guider l'auteur de la plainte. Ce dernier a la responsabilité de présenter des faits sérieux, de collaborer et de présenter tout élément de preuve dont il dispose. Tel est l'esprit de la mesure législative. Cet aspect est utile pour que les bonnes décisions soient prises.

Le sénateur Fraser : Soyez la bienvenue au Sénat. Je souhaite poser une question que je considère simple. À quoi vous attendez-vous comme budget et comme effectif? Je ne veux pas que vous me donniez des montants précis ou des fractions d'année-personne, mais pouvez-vous nous donner un ordre de grandeur?

Mme Ouimet : J'ai reçu brièvement la visite du directeur exécutif actuel ou le commissaire suppléant. Cette personne m'a informée que l'organisation compte environ 12 à 15 personnes en ce moment et qu'il est prévu de doubler les ressources. Je n'ai pas demandé précisément quel était le budget. Je me suis penchée sur les budgets des années antérieures. Je voulais obtenir de l'information concernant les personnes qui seront choisies pour occuper les postes.

Il est toujours difficile, au début d'un mandat, de déterminer avec exactitude les ressources nécessaires. Je n'hésiterai pas à vous indiquer, dans mon premier rapport, les renseignements détaillés demandés par l'honorable sénateur.

Le sénateur Fraser : Vous avez dit que vous avez pris connaissance des budgets des années précédentes. Qu'avez-vous glané?

Mme Ouimet : J'ai vu que c'était un petit bureau en début de mandat. Si je me souviens bien, il disposait de quelques millions de dollars. On a proposé de doubler sa taille. J'ignore le chiffre exact, je m'en excuse.

Le sénateur Fraser : Peut-être que quand vous le connaîtrez, vous pourriez nous envoyer une note pour nous tenir au courant.

Ma dernière question est la suivante : vous attendez-vous à ce que la dotation représente les principales dépenses ou comptez-vous retenir les services de beaucoup d'avocats à l'externe?

Mme Ouimet : J'imagine que l'embauche d'employés permanents représenterait la principale dépense. La majeure partie des ressources serait investie dans les ressources humaines.

(2040)

Le sénateur Nancy Ruth : Pendant notre débat sur le projet de loi C-2, on a souvent répété que la présence de dénonciateurs, d'un commissaire, notamment, pourrait effrayer la fonction publique.

Vous avez travaillé dans beaucoup de ministères. Vous avez sans doute beaucoup de contacts. Pensez-vous que votre nomination soulagera les fonctionnaires au lieu de les effrayer?

Mme Ouimet : Madame la présidente, je n'ai aucun doute que l'ensemble de la fonction publique se réjouira de la mesure législative, à condition qu'elle soit administrée de façon adéquate mais également en toute objectivité en ce qui a trait à certaines des questions qui ont été soulevées aujourd'hui.

Connaissant l'ensemble de la fonction publique, j'estime qu'elle coopérera pleinement quand des actes répréhensibles seront exposés. De plus, la mesure sera utile, non seulement du point de vue de l'exécution de la loi, mais aussi comme moyen de prévention et pour assurer une bonne communication. Je pense que le poste envoie un message important de transparence et de reddition de comptes, et nous rappelle que, même s'il n'est pas utilisé au quotidien, nous avons un système disponible qui est prêt à réagir et à répondre aux préoccupations soulevées.

Au bout du compte, même s'il peut exister une certaine anxiété au début, c'est une structure qui sera bien accueillie et qui sera perçue comme étant une institution très utile. Du moins, c'est ce que j'espère, madame la présidente.

Le sénateur Nancy Ruth : Vous semblez être d'avis qu'il est important pour vous de créer un climat favorable.

Lorsque je recrute des personnes dans mes entreprises, je leur demande toujours ce qu'elles aimeraient changer, faire ou réaliser si elles avaient une baguette magique. Si vous aviez une baguette magique, qu'est-ce que vous aimeriez laisser lorsque vous quitterez ce poste? Qu'est-ce qui se sera passé? En quoi la fonction publique du Canada sera-t-elle différente?

Mme Ouimet : Madame la présidente, si j'avais une baguette magique je voudrais que l'institution ait non seulement accompli ce qu'elle est censée faire, mais qu'elle soit vraiment perçue comme ayant rendu justice, comme ayant été accessible et comme ayant fait ce qui s'imposait.

J'entends par cela que j'aimerais que cette institution soit perçue comme ayant protégé de façon légitime et juste les intérêts des Canadiens et du secteur public.

Le sénateur Nancy Ruth : Cela signifie-t-il que vous allez recruter des employés qui ont un penchant naturel pour la justice et l'équité?

Mme Ouimet : Madame la présidente, je pense qu'il est important que quiconque fait partie de ce très petit bureau partage les mêmes valeurs, mais en bout de ligne il faut se fonder sur la loi. Le bureau a un mandat législatif et relèvera directement du Parlement. Je pense que chaque employé du bureau relèvera aussi du Parlement, par l'entremise de la commissaire.

Le sénateur Kinsella : Compte tenu que le modèle de cette loi sur la dénonciation est un processus fondé sur les plaintes, pourriez-vous élaborer sur l'importance de la manière dont les dénonciateurs seront protégés contre des représailles, particulièrement au début du mandat?

Mme Ouimet : Madame la présidente, je pense que le but de la législation est d'abord de donner l'assurance à tout un chacun, même les Canadiens qui ne font pas partie du secteur public, qu'ils peuvent se manifester et dénoncer des actes répréhensibles, sans avoir à craindre de faire l'objet de représailles.

Une partie du rôle du tribunal, et cela est aussi énoncé dans l'une des premières fonctions du commissaire — je n'ai pas le libellé précis — consiste à renseigner les gens sur la fonction du tribunal. Ce travail de sensibilisation et de communication afin de s'assurer que le rôle du tribunal est bien compris est une fonction précise.

Cela pourrait prendre un certain temps, voire quelque mois, car c'est une toute nouvelle loi, un territoire encore inexploré. C'est une première au Canada. En fait, à ma connaissance, ce pourrait être une première dans le monde.

En fin de compte, l'objectif est très clair : protéger tous les dénonciateurs contre d'éventuelles représailles.

Le sénateur Kinsella : Une fois qu'une plainte relative à des actes répréhensibles soupçonnés aura été reçue et que votre bureau aura fait son enquête, va-t-on tenter de parvenir à un règlement par voie de conciliation avec le ministère en cause? Selon vous, quel sera le rôle de votre bureau dans la négociation de règlements relatifs aux plaintes?

Mme Ouimet : Je suis ravie que le sénateur soulève cette question. Comme je l'ai indiqué au début de mon intervention, je crois fermement en l'efficacité des mécanismes alternatifs de règlement des différends. D'ailleurs, à l'époque où j'étais une jeune membre de la commission d'appel, nous avions instauré un processus de divulgation préliminaire. La loi ne nous obligeait pas à le faire, mais nous avons toujours jugé extrêmement important de faire en sorte que les parties puissent dialoguer, discuter des faits et échanger des explications aussi tôt que possible dans le processus. Plus souvent qu'autrement, cette façon de procéder nous a permis de résoudre une grande partie du problème et de trouver une solution plus rapide, satisfaisante pour tous et probablement perçue comme plus équitable même.

J'utiliserais cet outil pour assurer de meilleures communications et un règlement plus rapide.

Le sénateur Kinsella : Madame la présidente, je trouve cela rassurant. Comme le montre l'expérience de la Commission des droits de la personne à ce jour, je crois que plus de 90 p. 100 des plaintes reçues sont réglées par conciliation et ne se rendent pas à l'arbitrage devant un tribunal administratif, comme une commission d'enquête.

Vous avez réfléchi à ce rôle important, alors quelles sont vos estimations quant au nombre de plaintes? Je peux aussi formuler ma question autrement : combien de cas verriez-vous, selon vous, comparativement à ce qui ressort du modèle de M. Keyserlingk?

Mme Ouimet : Le commissaire intérimaire, avec qui je me suis brièvement entretenue, ne prévoit pas un grand nombre de plaintes dans un premier temps. La loi est maintenant en vigueur depuis le 15 avril, et cette personne travaille dans le domaine depuis cinq ans. Par conséquent, il est important que nous expliquions ce que le mandat permet à tous les niveaux de l'organisation. Ce serait ma première priorité. Il est difficile de faire des prévisions à ce moment-ci, mais on peut sûrement s'attendre au même nombre de plaintes que dans le passé. Nous traiterons cependant tous les cas avec la même diligence et aussi efficacement et rapidement que possible.

[Français]

Le sénateur Fox : Bienvenue au Sénat, madame Ouimet, et merci de passer cette soirée avec nous.

Je dois tout d'abord dire que je suis très heureux qu'on nous présente une personne qui a une très grande expérience dans la fonction publique du Canada, environ une vingtaine d'années, et dans des ministères qui n'ont pas tous été très faciles.

(2050)

Je me joins aux souhaits de bienvenue du sénateur Segal, qui parlait de vos antécédents comme étudiante à l'Université d'Ottawa. Cela m'a bien surpris d'entendre qu'il parlait encore de l'Université d'Ottawa plutôt que de l'Université canadienne, qui est maintenant son nom.

Je vous souhaite, d'ailleurs, en parlant de l'Université canadienne, de marcher dans les traces du chancelier de l'université, Mme Labelle, qui a également été une grande fonctionnaire, un grand serviteur de l'État. J'ai eu le plaisir, dans ma vie antérieure, de l'avoir comme sous-ministre et je sais tout le travail qu'elle a pu faire et le succès qu'elle a connu au sein de la fonction publique. Pour moi, c'est vraiment un modèle pour tous, hommes ou femmes, francophones ou anglophones, de quelque parti politique que ce soit.

J'aurais deux questions et une suggestion, et j'espère que, dans votre premier rapport, vous allez nous revenir avec une suggestion quant à la façon dont on pourrait désigner votre fonction de manière plus élégante. Je vois que cette fonction s'appelle « protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles »; je trouve cela un peu lourd et j'espère que, au fil des ans, on va trouver une façon plus élégante de décrire ce rôle.

D'ailleurs, quand on parle de votre rôle, je serais porté à penser, et j'aimerais avoir votre réaction à cette idée, que votre succès sera mesuré, quant à moi, non pas par le nombre de divulgateurs d'actes répréhensibles qui se seront fait connaître — il y en aura sûrement — mais plutôt par le genre de climat, et j'espère que cela fait partie de votre rôle, que vous réussirez à établir au sein de la fonction publique pour faire de celle-ci un lieu où, effectivement, — et vous avez parlé de mode alternatif de règlement des conflits — on ne ressentira pas le besoin d'écrire ces lettres qu'on met dans des enveloppes brunes, dans votre cas, avec des retours d'adresse dessus.

Je reviens à cette idée. Il va sûrement y en avoir plusieurs au début, mais au fil des ans, j'espère que votre succès sera marqué par des rapports qui tendront vers le succès parfait qui serait de dire, pour une année donnée, qu'il n'y aura eu aucun divulgateur d'actes répréhensibles et que nous n'aurions plus besoin d'un commissaire pour cette fonction.

Mme Ouimet : Effectivement, de façon très éloquente, vous avez exprimé un souhait que je fais aussi, car c'était l'approche que je préconisais lorsque je travaillais aux douanes, où on parlait d'exécution de la loi mais aussi de « compliance, » une formule par laquelle on encourageait les gens à se conformer aux exigences de la loi sans user de la menace du bâton. Les premiers mois vont offrir des défis intéressants au niveau de l'éducation, de la communication et de la concertation afin de s'assurer que le mandat est bien compris.

Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'on ne doit pas mesurer le succès d'une organisation comme celle-ci au nombre d'interventions, mais plutôt à la qualité du règlement des différends et au fait que tout le monde voit cette institution comme étant accessible et représentant la démocratie au Canada.

Le sénateur Fox : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn : Je vous félicite; vous aurez certainement un avenir plein de rebondissements. On vous confie une énorme responsabilité, ce qui peut susciter de l'inquiétude chez certains Canadiens. Une fois que vous vous serez entourée d'une équipe de collaborateurs, quelle ouverture manifesterez-vous à l'égard des Canadiens en ce qui concerne vos activités? Vos collaborateurs viendront-ils exclusivement de la fonction publique, ou, compte tenu de votre propre formation et de votre expérience, aurez-vous la possibilité de puiser également dans le secteur privé?

Mme Ouimet : Pour ce qui est de la première observation concernant notre ouverture à l'égard du public, j'aimerais effectivement que le Bureau du commissaire à l'intégrité du secteur public tende la main, qu'il établisse des liens avec d'autres organisations et qu'il fournisse des renseignements de façon très informelle mais très accessible. Ma première démarche sera de mettre sur pied un programme de sensibilisation, de formation et de communications. Nous communiquerons l'information au secteur public.

Le deuxième argument est que les employés sont nommés en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, qui est un outil de recrutement qui peut servir à recruter à l'intérieur et à l'extérieur de la fonction publique. Je ne sais pas de quel éventail de compétences nous disposons à l'heure actuelle, mais j'ai déjà indiqué au directeur exécutif, qui était très ouvert à l'idée, que je me pencherais sur nos capacités et sur notre éventail de compétences à l'heure actuelle afin de déterminer de quels employés nous aurions besoin. Je n'hésiterai pas à recruter à l'extérieur, au besoin, en suivant le processus que je suis autorisée à suivre.

Le sénateur Fairbairn : Dans votre travail auprès du gouvernement, non pas de l'entité politique, mais bien de la fonction publique, aurez-vous des liens avec le greffier du Bureau du Conseil privé, qui est très important dans la hiérarchie de notre système de gouvernance?

Mme Ouimet : Cette question a deux volets. En tant que mandataire du Parlement, je relèverai du Parlement et je ne ferai plus partie de la communauté des sous-ministres. Il y a une relation d'indépendance en ce qui a trait aux cas précis et, bien entendu, aux rapports. Dans le même ordre d'idées, par l'entremise de l'éducation, de la formation et des communications, je vais atteindre tous les échelons du secteur public. Je veillerai, tout comme la vérificatrice générale, à maintenir de bons échanges, pas seulement en cas de problème, mais aussi en prévision des problèmes qui pourraient survenir. Ces échanges incluront le greffier du Bureau du Conseil privé.

Le sénateur Fairbairn : La situation est difficile en ce moment au Canada, compte tenu notamment des problèmes qui ont été évoqués au cours des débats parlementaires sur la Gendarmerie royale du Canada. Ce niveau d'intégrité et de préoccupation sera-t-il inhérent à vos opérations?

Mme Ouimet : Sans faire de commentaires sur la situation comme telle, je puis quand même dire ceci. La loi concerne les membres de la GRC. Elle contient certaines exclusions relatives à divers aspects de ses opérations, mais je n'ai pas vraiment songé à la façon dont elles pourraient être utilisées. La loi porte sur l'ensemble de la fonction publique, tout en prévoyant quelques exceptions relatives à la sécurité nationale et aux Forces armées. J'accueillerais volontiers tout nouvel élément qui relèverait du mandat du bureau.

Le sénateur Fairbairn : Seriez-vous disposée — et la réponse sera probablement positive — à comparaître devant les comités parlementaires, chaque année peut-être, au fur et à mesure des progrès de vos travaux et de l'évolution de votre mandat? Votre comparution devant les comités parlementaires pourrait-elle s'inscrire dans le cadre de votre politique de transparence à l'égard du public?

(2100)

Mme Ouimet : Madame la présidente, je crois que ce rôle s'inscrit dans le cadre des devoirs et des responsabilités du commissaire.

Le sénateur Fairbairn : Merci beaucoup et bonne chance.

[Français]

Le sénateur Comeau : Bienvenue au Sénat, madame Ouimet, c'est un grand plaisir de vous recevoir ici. J'aurais quelques brèves questions à vous poser. Vous avez la responsabilité de la protection des divulgateurs. Ce n'est pas toujours facile de protéger l'identité des divulgateurs. Il y a devant le Sénat actuellement un projet de loi qui propose que les documents de travail et de vérification de la commissaire aux langues officielles et de la vérificatrice générale soient disponibles au public. Cela veut dire que si quelqu'un fait part d'une inquiétude en ce qui concerne les langues officielles ou un financement, à la fin de la vérification, l'employeur peut savoir qui a logé une plainte contre lui. Les gens pourraient avoir peur de déposer une plainte par crainte des représailles.

Si vous aviez à faire un commentaire sur ce projet de loi d'initiative privée, quel serait-il quant à cette façon de faire avec documents de travail disponibles au public à la fin de l'examen?

Mme Ouimet : Avec votre permission, madame la présidente, j'aimerais surtout traiter de la loi telle qu'elle existe présentement, parce que lorsqu'on parle de politiques ou de projets de loi, c'est un peu difficile dans ma position de faire des commentaires. Toutefois, j'aimerais rassurer le sénateur en lui disant que je me sens tout à fait à l'aise de fonctionner dans les paramètres du projet de loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles — je vais essayer de trouver un titre plus court, comme on l'a suggéré précédemment — où les divulgations sont protégées.

Dans le contexte de la loi, je me sens tout à fait à l'aise avec le genre de protection qui est offerte sous la responsabilité du commissaire.

Le sénateur Comeau : Si nous supposons que ce projet de loi était en vigueur actuellement au pays, vous seriez probablement exemptée, car vous ne faites pas partie, en tant que commissaire à l'intégrité, du projet de loi qui est proposé. Alors peut-être que les gens qui ont des inquiétudes en ce qui concerne les langues officielles préféreraient aller vous voir pour divulguer des informations sur des employeurs qui ne respectent pas la Loi sur les langues officielles. Seriez-vous prête à recevoir ces gens ou leur diriez-vous d'aller voir le commissaire aux langues officielles?

Mme Ouimet : Madame la présidente, c'est vrai qu'il y a certaines exclusions par rapport à l'accès à l'information. Je les ai notées en lisant le texte de loi. Je devrais m'en remettre aux paramètres précis de la loi que j'administre. Toute demande, quelle que soit son origine — des contraventions sérieuses à une loi, une mauvaise gestion grave, une atteinte à la sécurité, et cetera —, doit obéir à des paramètres très précis. Je m'en remettrais aux cadres de la loi et de mon mandat en faisant abstraction d'autres avenues. S'il y a un mandat précis qui appartient à un autre organisme, je pense qu'il est de mon devoir de le considérer.

[Traduction]

Le sénateur Andreychuk : Le Comité sénatorial des droits de la personne a étudié la question de l'équité en matière d'emploi. Quatre groupes cibles sont sous-représentés dans la Commission de la fonction publique. Vous serez à l'autre extrémité pour enquêter sur les opérations et les plaintes. Comment tiendrez-vous compte des différences culturelles des Canadiens au sein de ces groupes? Comme nous l'avons découvert, le problème venait en partie de la culture existante. Nous n'avons pas besoin de lois supplémentaires, mais nous devons favoriser des attitudes différentes face aux divers groupes de Canadiens pouvant comparaître devant la Commission de la fonction publique. Comment intégrerez-vous cela à votre poste?

Mme Ouimet : Durant toute ma carrière et encore plus depuis dix ans, je me suis vivement intéressée aux questions liées à l'équité en matière d'emploi. Au sein d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, j'étais présidente d'un groupe chargé de ce qu'on appelait les questions de gestion inclusive. J'ai également travaillé avec les peuples autochtones. Ce sont là des questions qui, à mon avis, sont très importantes dans toute organisation. Toutefois, je devrai revenir aux paramètres législatifs du rôle du commissaire. Si les problèmes que je soulève sont fondés sur des preuves, des faits, à l'intérieur, je le répète, des paramètres particuliers des dispositions que j'aurai à gérer, ils seront alors pertinents. Cela sera fait conformément à l'application régulière de la loi.

[Français]

Le sénateur Nolin : Bonsoir, madame Ouimet. J'ai également étudié à l'Université d'Ottawa. Comme on nous demande de ratifier votre nomination, vous me permettrez des questions un peu incisives. Vous me pardonnerez à l'avance si, malheureusement, je heurte votre joie de vivre.

Premièrement, pourquoi avez-vous accepté ce poste? Vous êtes une jeune dame dans la fleur de l'âge, qui ne me paraissez pas au crépuscule de votre carrière dans la fonction publique canadienne. Est-ce que vous considérez cela comme votre dernier emploi dans la fonction publique?

Mme Ouimet : Madame la présidente, tout d'abord, lorsqu'on m'a approchée pour ce poste, j'ai été un peu surprise. J'ai demandé d'y réfléchir. J'y ai réfléchi pendant 48 heures puis j'ai décidé d'accepter. Je considérais vraiment sérieusement l'ampleur de la tâche, l'importance du mandat, le fait que c'est une première au Canada. Je dois vous avouer en toute sincérité que c'est un honneur et un privilège d'avoir la confiance du Parlement, qu'on ait pensé à moi pour accomplir ces fonctions. J'aimerais vous donner l'assurance que je vais le faire avec enthousiasme, avec dévouement et avec tout le professionnalisme que j'ai acquis à travers les années.

Le sénateur Nolin : Sans entrer dans les détails, et je comprends pourquoi vous pourriez être réticente d'en parler, vous avez la responsabilité de la GRC. Un enquêteur a été nommé par le ministre responsable pour examiner ce qui se passait à l'intérieur de la GRC. Il en a conclu qu'il y avait une culture qu'il fallait changer à l'intérieur de cette force de police qui fait l'honneur de tous les Canadiens.

Comment pensez-vous être capable, avec toute la fougue que vous nous montrez ce soir, l'enthousiasme que vous avez manifesté, après avoir réfléchi pendant 48 heures, de changer cette culture?

Mme Ouimet : Tout d'abord, je ne me fais pas d'illusions, c'est effectivement un mandat difficile.

Au cours de ma carrière, j'ai eu à exercer des fonctions et à prendre des décisions qui n'étaient pas toujours faciles, que ce soit dans un contexte quasi judiciaire, lorsque j'examinais des dossiers de fraude ou lorsqu'il y avait une certaine problématique dans le contexte de la police autochtone.

(2110)

Il y avait tout un remous après le 11 septembre, lorsque j'étais à la Commission du statut de réfugié. Il y avait de grands défis à relever. On parlait de vie et de mort. On parlait de décisions qui affectaient des gens qui pouvaient retourner dans leur pays et être torturés ou même tués.

Je ne prends pas cela à la légère. J'aimerais rassurer cette Chambre que je n'hésiterai pas à utiliser tous les pouvoirs qui sont donnés au commissaire. Il y a des pouvoirs quand même assez coercitifs en vertu de la Loi sur les enquêtes. Je n'hésiterai pas non plus à prendre les décisions nécessaires, mais il est important que ces décisions soient motivées et que la preuve soit très claire, parce qu'il va y avoir des droits de regard, et les décisions peuvent toujours être réexaminées par des tribunaux.

Finalement, vous serez les juges de mon mandat et de la façon dont je l'aurai exécuté. J'aimerais vous laisser avec cet engagement.

Le sénateur Nolin : Merci beaucoup, madame Ouimet. Je vous souhaite bonne chance.

Le sénateur Corbin : Madame la présidente, je voudrais commencer par faire un reproche à Mme Ouimet. Elle nous a dit qu'elle est née sur une ferme laitière, mais elle a négligé de nous parler du bon et fameux fromage Saint-Albert. Quelle occasion en or pour en faire la promotion!

Mme Ouimet : Je m'en confesse!

Le sénateur Corbin : Je ne vous en ferai pas un reproche dans le sens strict. Cependant, j'aimerais connaître votre attitude vis-à-vis le défi qui se pose quant à l'immensité de ce pays. Est-ce que vous établirez des bureaux satellites dans les régions du Canada? Avez-vous l'intention de vous déplacer de temps à autre pour aller respirer l'air régional?

Vous savez que les fonctionnaires des régions ne pensent pas comme la masse des fonctionnaires d'Ottawa. Ils ont des besoins et des griefs particuliers. Les rapports avec leurs supérieurs locaux sont tout à fait différents de ceux d'Ottawa. Quelle attitude allez-vous prendre vis-à-vis ce défi qui est très réel dans un grand pays comme le Canada?

Mme Ouimet : Je dois vous dire qu'au moins à sept reprises au cours de ma carrière, j'ai eu le plaisir de gérer des bureaux régionaux de différentes tailles et avec des mandats différents. Il est effectivement très important d'aller sur place, de communiquer, de comprendre la culture parce qu'il y a des cultures régionales qui sont très riches en expériences. Pour moi, ce fut toujours un plaisir.

Je pense que, dans le contexte du mandat qui pourrait m'être confié, cette fonction ne doit pas fonctionner en vase clos. J'ai déjà parlé d'un programme de communication et ce sera avec grand plaisir que j'irai partout au Canada, en temps et lieu toutefois, parce qu'il y aura quand même un travail à faire. Si besoin il y a, je ferai rapport au Parlement en ce qui a trait aux besoins de bureaux régionaux. À ce stade-ci, je ne sais pas vraiment s'il y a une nécessité, mais je pense que le commissaire a pour mandat de s'assurer qu'on ait l'information d'un bout à l'autre du pays et qu'on est ouvert et disponible.

Le sénateur Corbin : Il y aura sans doute un travail de formation des mentalités et d'éducation quant à vos responsabilités. Il me paraît impératif que vous vous déplaciez vers ces régions dès le début de l'exercice de votre mandat afin qu'on comprenne mieux en quoi vos fonctions consistent, quel en est le potentiel et quelles en sont les limites.

Mme Ouimet : C'est noté, madame la présidente.

Le sénateur Joyal : Bienvenue, madame Ouimet. Ma première question concerne la présentation de vos notes biographiques, de votre profil. Je remarque qu'au bas de la page 2 — et vous y avez fait référence dans une réponse antérieure — vous proposez les négociations d'ententes tripartites très délicates pour les services de police autochtones dans les collectivités des Premières nations partout au Canada, en particulier celle des Mohwaks, à Oka.

Est-ce vous qui avez négocié l'entente avec M. James Gabriel qui a produit les difficultés et les affrontements qu'on a vus par la suite et les difficultés qui s'en sont suivies au niveau des forces de police, qui ont eu à intervenir dans les réserves dans les environs de Montréal?

Mme Ouimet : J'ai effectivement eu des rencontres directes avec M. James Gabriel et j'ai participé à la négociation de cette entente. À l'époque, c'était vu comme un grand succès où on ramenait la sécurité au sein de la communauté. J'étais présente lors de l'ouverture du premier poste de police à Kanesatake.

Le sénateur Joyal : Il y a actuellement une enquête sur la manière dont les sommes ont été mises à la disposition des services policiers par le gouvernement canadien suite aux négociations dans lesquelles vous avez été impliquée. L'enquête en question vise précisément à déterminer la nature du mandat confié aux forces policières et la façon dont le contrôle devait se faire en ce qui concerne l'utilisation des sommes allouées pour la mise en application des services de police.

Mme Ouimet : Il va sans dire que chaque entente comportait des vérifications. Suite à la politique qui avait été approuvée, il y avait aussi tout un système d'évaluation, mais cela remonte à quelques années. Je n'ai donc pas fait partie de cette enquête. Personne n'est venu me voir, mais si jamais c'était le cas, je suis tout à fait disposée à partager les renseignements qui étaient disponibles à l'époque.

Le sénateur Joyal : D'une certaine façon, vous répondez directement à ma question. Le ministre de la Sécurité publique a demandé une enquête suite à l'utilisation de sommes dans un contexte qui soulevait des doutes sur leur destination. Je voulais savoir si vous aviez été contactée, puisque vous étiez une des personnes impliquées dans la négociation, donc dans la définition du mandat et de l'étendue des responsabilités qui étaient dévolues à la police et de quelle manière elle devait utiliser et faire rapport des sommes qui lui étaient octroyées aux termes de l'entente.

Mme Ouimet : Personne ne m'a approchée à ce stade-ci. J'étais responsable du programme, mais j'avais des négociateurs qui s'occupaient du cadre de l'entente qui avait été signée selon les paramètres qui existaient à l'époque.

Le sénateur Joyal : Selon vous, est-ce qu'il y avait des conditions qui étaient attachées à l'utilisation des sommes transmises aux forces de police autochtones?

Mme Ouimet : Je ne me souviens pas précisément des dispositions de cette entente, mais d'emblée, dans chaque entente il y avait toujours des termes et des conditions, des évaluations. Il y avait une imputabilité qui se rattachait à toutes les ententes qui étaient signées. Il y en avait plus de 125 au pays quand j'ai quitté le programme.

Le sénateur Joyal : Selon vous, il y avait des conditions qui étaient attachées à l'utilisation des sommes d'argent qui étaient transmises à la police en termes de reddition de comptes et d'imputabilité?

Mme Ouimet : De mémoire, j'aimerais parler plutôt de toutes les ententes. Sans exception, il y avait des mesures bien précises sur l'utilisation. Cela faisait partie de la politique qui régissait toutes les ententes tripartites.

Le sénateur Joyal : Je vous remercie. Je voudrais maintenant vous référer à l'article 25.1, paragraphe 4, de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs dans la fonction publique.

Mme Ouimet : Quel alinéa?

Le sénateur Joyal : Il y a neuf sous-alinéas et j'attire votre attention sur le sous-alinéa 4, qui stipule que le maximum de frais que vous pouvez octroyer à un plaignant est de 1 500 dollars.

(2120)

Je cite le sous-alinéa pour le bénéfice de mes collègues :

Les frais qui peuvent être payés en vertu du présent article par le commissaire au titre des services de consultation juridique qu'il met à la disposition de l'intéressé, concernant un acte ou une omission susceptible de constituer un acte répréhensible ou des représailles, ne peuvent dépasser 1 500 $.

Vous êtes avocate et vous conviendrez avec moi qu'avec un montant de 1 500 $, on ne peut pas obtenir beaucoup de frais de consultation juridique auprès d'un avocat.

Puisque c'est vous qui devez mettre à la disposition de l'intéressé des services de consultation juridique, c'est donc vous qui avez la responsabilité de déterminer ces services de consultation juridique. Je ne sais pas si vous avez l'intention de les acheter dans le secteur privé ou d'avoir au sein de votre bureau une division juridique, mais je crois que le montant de 1 500 $ m'apparaît bien en deçà de ce que cela coûte dans le secteur privé pour retenir les services d'une firme d'avocats.

Comment pensez-vous pouvoir mettre en application la loi à ce chapitre, avec un montant aussi peu élevé, pour aider un plaignant à préparer son dossier? Puisque cela peut aller devant un tribunal, il y aura donc une procédure judiciaire qui permettra de contredire ce que le plaignant avancera. Comment pensez-vous qu'un fonctionnaire pourra se défendre si vous lui offrez un montant maximum de 1 500 $?

Mme Ouimet : Madame la présidente, c'est une excellente question. J'aimerais également porter à l'attention du sénateur le sous-alinéa 6, où il est mentionné que si le commissaire est d'avis qu'il existe des circonstances exceptionnelles, la somme maximale prévue est réputée être de 3 000 $. Il y a donc une certaine latitude. Je conviens, toutefois, que ce n'est pas une somme très importante lorsqu'on considère les tarifs qui ont cours.

Par contre, j'espère que nous pourrons dresser une liste d'experts-conseils et on parle ici d'appui pour la divulgation, contrairement aux représailles. Parce que le tribunal a aussi une certaine latitude pour rembourser des dépenses. C'est important d'apporter ces distinctions.

Concernant la divulgation d'actes répréhensibles, pour ce qui est du montant de 1 500 à 3 000 $, je pense qu'il incombera au commissaire de donner aussi un appui, de partager par exemple des précédents et de s'assurer qu'on puisse disposer d'experts-conseils chevronnés qui connaissent le système et qui peuvent guider le divulgateur.

Le sénateur Joyal : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Votre approche, qui consiste à dresser une liste d'experts-conseils, est tout à fait opportune. Mais vous savez comme moi que, si vous dressez une liste d'experts-conseils, cela coûte plus cher que de faire affaire avec des avocats de pratique générale. C'est comme aller voir un médecin spécialiste plutôt qu'un médecin de famille; la consultation est d'autant plus onéreuse qu'on fait appel à des personnes qui ont une expertise plus large et plus pointue.

Je comprends qu'il peut y avoir, dans les cas d'actes répréhensibles, une procédure plus simple. Mais, dans le cas de représailles, il m'est avis que la preuve peut parfois être beaucoup plus difficile et subtile à présenter et à préparer.

Par conséquent, parce qu'on sait que vous connaissez les pratiques de la fonction publique encore plus que nous, puisque cela a été votre pain quotidien depuis plusieurs années, un montant de 1 500 $ m'apparaît presque dérisoire par rapport à ce qu'on veut atteindre comme objectif, c'est-à-dire vraiment protéger le fonctionnaire divulgateur ou le fonctionnaire persécuté suite à une divulgation, car les deux statuts se complètent d'une certaine façon.

Mme Ouimet : Madame la présidente, je suis prête à agir conformément à la loi et, si besoin il y a, à faire rapport sur la pertinence du montant. Merci, c'est bien noté.

Le sénateur Joyal : Est-ce que j'ai le temps de poser une autre question, madame la présidente?

La présidente : Vous avez une minute.

Le sénateur Joyal : Dans la même loi, l'alinéa 21.7(1)f) a trait à la compensation qui peut être octroyée à un plaignant. Si vous me le permettez, je vais lire l'article :

[Traduction]

L'indemniser [le plaignant], jusqu'à concurrence de 10 000 $, pour les souffrances et douleurs découlant des représailles dont il a été victime.

[Français]

Un montant limite de 10 000 $, lorsqu'on observe la jurisprudence contemporaine qui a suivi une procédure de ce genre et les montants que les tribunaux ou arbitres ont octroyés dans le cas de conventions collectives eu égard aux souffrances et aux douleurs comme la détresse psychologique ou le stress, cela me semble être un problème.

Encore une fois, cela ne vous apparaît-il pas tellement faible que, en pratique, cela pourrait décourager une personne de se lancer dans ce processus dont il est souvent difficile de prévoir l'issue, la durée et le contexte à l'intérieur duquel tout va se dérouler, ainsi que ce qu'il adviendra de la carrière de la personne?

Mme Ouimet : Madame la présidente, dans les cas de représailles, ce sera au tribunal de déterminer le montant. Je pense qu'il faudra avoir un peu plus d'expérience avec la loi et voir son application. Encore là, ceci pourrait faire l'objet d'un rapport dans le prochain rapport annuel.

Le sénateur Joyal : Je vous remercie de la réponse; c'est bien ce que je croyais que vous alliez dire. J'attire simplement votre attention à l'alinéa 21.6(2), à savoir qu'à titre de commissaire, vous avez un statut devant le tribunal, et je cite :

[Traduction]

Dans le cadre de toute procédure, le commissaire adopte l'attitude qui, à son avis, est dans l'intérêt public, compte tenu de la nature de la plainte.

[Français]

Vous avez un statut d'intervenant devant le tribunal et vous pouvez faire valoir les motifs que vous estimez que le tribunal devrait prendre en considération, en décidant du quantum de la compensation. Mais rien ne vous empêche dans la loi de faire des représentations auprès du tribunal. Vos représentations, évidemment, m'apparaissent fort limitées eu égard aux conclusions de l'enquête que vous pouvez vous-même avoir menée et sur la nature du dommage que cette personne peut avoir subi dans le contexte des représailles dont elle a été la victime.

Mme Ouimet : Madame la présidente, j'aimerais donner l'assurance au comité que, selon le cas qui me sera présenté à titre de commissaire, il sera de mon devoir d'appuyer le tribunal, de fournir toute la preuve et de faire tous les commentaires pertinents dans un contexte donné. Je n'hésiterai pas à le faire.

Le sénateur Joyal : Merci, madame la présidente.

[Traduction]

Le sénateur Banks : Bienvenue, madame Ouimet et merci d'être avec nous. Tous les sénateurs présents apprécient votre courtoisie. Cela dit, vous aurez remarqué, en prévision de votre prochaine visite ici, que notre façon de faire les choses est moins formelle qu'à d'autres endroits et que nous nous parlons directement, plutôt que de le faire par l'entremise d'une autre personne.

Lorsque vous avez dit que vous auriez un très petit bureau doté d'un budget de 2 millions de dollars, certains ont réagi ici, parce que ce montant est 13 fois plus élevé que le budget de n'importe quel sénateur. La prochaine fois que vous viendrez nous voir, évitez de commencer en disant « juste un petit bureau avec un budget de 2 millions de dollars ».

C'est la dernière question. Il y a quelques années, nous étions ici en train de poser des questions à une personne qui avait été nommée à un poste semblable au vôtre. Nous étions intrigués dans ce cas, tout comme dans votre cas, par les qualifications de la personne et par l'exposé que celle-ci avait fait. Toutefois, à l'époque, nous avions négligé de poser certaines questions précises. L'une de ces questions aurait été, si nous avions su : êtes-vous actuellement en train de vivre une faillite personnelle? Dans ce cas particulier, la réponse aurait été : oui, je le suis.

Pour des raisons de transparence, y a-t-il quelque chose que nous ne vous avons pas encore demandé mais que, selon vous, nous devrions savoir à votre sujet, dans l'intérêt public?

(2130)

Mme Ouimet : À ma connaissance, il n'y a absolument rien que je devrais déclarer en ce qui a trait à la façon dont je me suis acquittée de mes responsabilités à titre de fonctionnaire jusqu'à présent.

Le sénateur Banks : Je vous remercie.

[Français]

La présidente : Madame Ouimet, il ne me reste qu'à vous remercier. Vous avez pu constater, par les nombreuses questions, que les sénateurs sont très intéressés.

Je vous souhaite bonne chance ainsi qu'une baguette magique juste et intègre.

Mme Ouimet : Merci, madame la présidente.

Le sénateur Comeau : Honorables sénateurs, je crois que nous sommes d'accord sur le fait que le comité plénier a terminé ses délibérations.

La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord?

Des voix : D'accord.

(Le Sénat reprend sa séance.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.

RAPPORT DU COMITÉ PLÉNIER

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, le comité plénier, qui a entendu Mme Christiane Ouimet, m'a chargée de faire rapport que le comité a terminé ses délibérations.

[Traduction]

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Les honorables sénateurs consentiraient-ils à revenir à la motion no 2 qui porte sur ce sujet?

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Comeau : Honorables sénateurs, je propose :

Que, conformément à l'article 39 de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, chapitre 46 des Lois du Canada (2005), le Sénat approuve la nomination de Christiane Ouimet à titre de commissaire à l'intégrité du secteur public.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que j'interviens pour dire quelques mots à l'appui de la motion visant à approuver la nomination de la candidate, Christiane Ouimet, au poste de commissaire à l'intégrité du secteur public.

Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles le 15 avril 2007, le Canada dispose d'un processus, prévu en droit, en vertu duquel les fonctionnaires et les Canadiens qui dénoncent des actes répréhensibles dans la fonction publique sont protégés contre les représailles.

En tant que mandataire du Parlement, le commissaire à l'intégrité du secteur public est responsable de l'administration de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles.

Le commissaire mènera un examen indépendant des dénonciations de mauvaise conduite de façon équitable et en temps opportun, publiera des rapports de ses constatations pour permettre aux organisations de prendre des mesures correctives appropriées et soumettra des rapports annuels et spéciaux au Parlement.

À l'appui des fonctionnaires, du Parlement et des Canadiens, le commissaire à l'intégrité du secteur public jouera un rôle essentiel en veillant à la protection de ceux qui ont été témoins d'actes répréhensibles afin qu'ils puissent communiquer des renseignements sans crainte de représailles. Le titulaire du poste doit faire preuve d'une adhésion aux normes d'éthique les plus strictes, d'un bon jugement, d'objectivité, d'équité et de leadership.

Comme tous les mandataires du Parlement, le titulaire du poste doit avoir la confiance du Parlement et des Canadiens.

En tant que haut fonctionnaire, Christiane Ouimet a acquis une combinaison unique de compétences et d'expérience au fil de sa carrière, combinaison qui fait d'elle la candidate idéale pour le poste. Dans son introduction ce soir, elle a fait part aux honorables sénateurs de son impressionnant curriculum vitae. Je dois dire, ayant moi-même été élevée sur une ferme laitière dans l'est de l'Ontario, que j'ai été particulièrement impressionnée par cet aspect de son cheminement et par l'amour évident qu'elle éprouve pour sa famille et ses parents — qui doivent être très fiers d'elle.

À la lumière des diplômes que lui a décernés l'Université d'Ottawa — un baccalauréat spécialisé en lettres françaises et deux baccalauréats en droit, un en droit civil et l'autre en droit criminel — et des postes qu'elle a occupés — actuellement sous-ministre adjointe de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, et anciennement sous-ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux — il va sans dire qu'elle sera un atout pour ce poste.

Avocate de formation, Mme Ouimet a beaucoup travaillé au sein d'organismes quasi judiciaires. Elle a effectué des enquêtes sur la nomination et le renvoi de fonctionnaires alors qu'elle faisait partie du comité d'appel de la Commission de la fonction publique. De plus, elle a acquis une compréhension approfondie de la structure et de l'organisation de l'État au fil de ses affectations comme directrice exécutive du plus important tribunal administratif au Canada, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, comme sous-solliciteure générale adjointe chargée des affaires correctionnelles et de la police des Autochtones, au ministère du Solliciteur général, où elle s'est révélée particulièrement habile dans les négociations et les relations interpersonnelles, et comme première personne à diriger le service d'exécution de la loi à Revenu Canada, où elle avait notamment la responsabilité des enquêtes sur les fraudes commerciales.

Manifestement, honorables sénateurs, elle a toute l'expérience nécessaire pour mettre sur pied le Commissariat à l'intégrité du secteur public ainsi que le nouveau régime de protection des dénonciateurs.

Honorables sénateurs, grâce à son expérience particulière, à ses compétences, à ses connaissances et à sa ferme volonté de servir l'intérêt public, Mme Ouimet a toutes les qualités nécessaires pour remplir les fonctions de commissaire à l'intégrité du secteur public avec crédibilité, professionnalisme et distinction.

Compte tenu de cela, j'exhorte tous les honorables sénateurs à appuyer cette motion qui demande que le Sénat approuve la nomination de Christiane Ouimet à titre de commissaire à l'intégrité du secteur public.

Des voix : Bravo!

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je suis heureux de me joindre au sénateur LeBreton pour appuyer la candidature de Mme Ouimet. Je vais juste ajouter quelques mots. Comme nous l'avons entendu, Mme Ouimet est parfaitement bilingue. Tout fonctionnaire qui désirera s'adresser à Mme Ouimet pourra le faire dans la langue de son choix — ce qu'il convient de souligner. Les compétences linguistiques de Mme Ouimet n'ont pas été mentionnées dans nos délibérations ce soir, mais elles étaient bien évidentes.

L'honorable leader du gouvernement sait que, ces dernières semaines, on a critiqué la nomination de personnes par ailleurs très qualifiées qui ne pouvaient pas vraiment offrir leurs services dans les deux langues. Mme Ouimet est un exemple remarquable d'une personne qui pourra s'acquitter de ses fonctions avec une grande compétence. En outre, c'est une femme, et il est très important que nous appuyions les femmes lorsqu'elles ont la possibilité d'occuper un poste aussi élevé. Le sénateur Andreychuk a posé une question au sujet de l'équité dans le secteur public et il y a lieu de féliciter le gouvernement de cette candidature. J'appuie cette candidature.

[Français]

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 20 juin 2007, à 13 h 30.)


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