Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Peuples autochtones
Fascicule 1 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 20 mars 1996
Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 17 heures, en vue d'organiser ses travaux.
M. Tônu Onu, greffier du comité: Honorables sénateurs, en tant que greffier du comité, il est de mon devoir de présider à l'élection du président. Je suis disposé à recevoir les motions à cet effet.
Le sénateur Andreychuk: C'est avec plaisir que je propose le sénateur Marchand.
M. Onu: Comme il n'y a pas d'autres motions, il est proposé par l'honorable sénatrice Andreychuk que l'honorable sénateur Marchand soit président du comité. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
M. Onu: Je déclare la motion adoptée et j'invite le sénateur Marchand à occuper le fauteuil.
Le sénateur Len Marchand (président) occupe le fauteuil.
Le président: Si toutes les élections pouvaient être aussi faciles! Je vous remercie beaucoup de l'honneur que vous me faites. J'ai déjà présidé le comité une fois et je le referai avec plaisir. Je m'attends à beaucoup d'activité.
Le point suivant à l'ordre du jour est l'élection d'un vice-président. Je suis disposé à recevoir les motions à cet effet.
Le sénateur Carstairs: Je propose que le sénateur Andreychuk soit vice-présidente.
Le président: Y a-t-il d'autres motions? S'il n'y en a pas, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: La motion est adoptée.
Le point suivant à l'ordre du jour concerne le Sous-comité du programme et de la procédure, c'est-à-dire le comité directeur. Voici le texte de la motion:
Que le Sous-comité du programme et de la procédure se compose du président, du vice-président et d'un autre membre du comité que le président désignera après les consultations d'usage;
Que le Sous-comité soit autorisé à prendre des décisions au nom du comité relativement au programme et à la procédure;
Que le Sous-comité soit autorisé à inviter les témoins et à établir l'horaire des audiences; et
Que le Sous-comité fasse rapport de ses décisions au comité.
Le sénateur Carstairs: Je fais une proposition à cet effet.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: La motion est adoptée.
Il est ensuite question de la motion en vue d'imprimer les délibérations du comité. On suggère de faire imprimer 500 exemplaires pour distribution. Quelqu'un peut-il faire une motion en ce sens?
Le sénateur Beaudoin: Je fais une motion à cet effet.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: La motion est adoptée.
Le point suivant est l'autorisation de tenir des réunions et de faire imprimer les témoignages en l'absence du quorum. Voici le texte de la motion:
Que, conformément à l'article 89 du Règlement, le président soit autorisé à tenir des réunions pour entendre des témoignages et à en permettre la publication en l'absence de quorum.
Quelqu'un peut-il faire une motion à cet effet?
Le sénateur Pearson: Je fais une proposition en ce sens.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion.
Des voix: Oui.
Le président: La motion est adoptée.
Le septième point à l'ordre du jour concerne le rapport financier. Voici le texte de la motion:
Que, conformément à l'article 104 du Règlement, le président soit autorisé à faire rapport des dépenses faites au cours de la dernière session.
Quelqu'un veut-il proposer la motion?
Le sénateur Taylor: Je fais une proposition en ce sens.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: La motion est adoptée.
Au point 8 de l'ordre du jour figure le personnel de recherche. Il prévoit que les attachés de recherche affectés au comité sont recrutés par l'intermédiaire de la Bibliothèque du Parlement ou à l'extérieur. Voici le texte de la motion:
Que le comité demande à la Bibliothèque du Parlement d'affecter des attachés de recherche auprès du comité; ou/et
Que le comité retienne les services du Centre parlementaire en tant que conseiller du comité; ou/et
Que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à négocier les contrats et à faire appel aux services d'experts-conseils dont le comité peut avoir besoin dans le cadre de ses travaux; et
Que la présidence, au nom du comité, dirige le personnel de recherche dans la préparation d'études, d'analyses et de résumés.
Quelqu'un peut-il proposer une motion à cet effet?
Le sénateur Anderson: Je fais une motion à cet effet.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: La motion est adoptée.
Au point 9 de l'ordre du jour, il est question de l'autorisation d'engager des fonds et d'approuver les comptes à payer. Voici le texte de la motion:
Que, conformément à l'article 32 de la Loi sur la gestion des finances publiques, l'autorisation d'engager les fonds du comité soit conférée au président ou, en son absence, au vice-président; et
Que, conformément à l'article 34 de la Loi sur la gestion des finances publiques et à la directive 3:05 de l'annexe II du Règlement du Sénat, l'autorisation d'approuver les comptes à payer au nom du comité soit conférée au président ou au vice-président et/ou au greffier du comité.
Le sénateur Carstairs: Nous pourrions peut-être débattre de cette question, car elle a posé des problèmes durant la séance d'organisation du comité antérieur. «Et/ou» peut donner l'impression que le greffier a besoin d'une autre signature. Nous avons proposé que soit retiré le mot «et» et qu'il ne reste que le mot «ou».
Le président: Voilà qui est sensé.
Le sénateur Carstairs: Je propose la motion dans sa version modifiée.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: Au point 10 de l'ordre du jour, il est question des frais de déplacement et de subsistance des témoins. La motion se lit comme suit:
Que, conformément aux lignes directrices du Sénat gouvernant les frais de déplacement des témoins, le comité peut rembourser des dépenses raisonnables de voyage et d'hébergement à un maximum de deux témoins d'un même organisme, après qu'une demande de remboursement a été présentée.
Quelqu'un veut-il proposer une motion en ce sens?
Le sénateur Andreychuk: Je fais une proposition à cet effet.
Le président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Le président: Motion adoptée.
Avez-vous quelque chose à dire au sujet de l'heure des séances? J'en ai discuté avec quelques sénateurs.
Le sénateur Carstairs: Trois d'entre nous sont également membres du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. La réunion prévue à 17 heures, le mercredi, ne nous facilitera certes pas la tâche. Si l'autre comité prend plus de temps pour interroger des témoins, nous manquerons les réunions de ce comité-ci.
Je crois savoir qu'une autre heure est peut-être disponible, le mardi matin. J'ignore ce qu'en pensent les autres sénateurs, mais je serais ravie que nos réunions aient lieu le mardi matin, à 9 h 30.
Le sénateur Pearson: Moi aussi.
Le président: Il faut toujours tenir compte de l'horaire des autres comités. Le mardi matin à 9 h 30 serait certes une heure très propice pour moi.
Le sénateur Andreychuk: Malheureusement, quand le présent comité a été formé, il a été ajouté à la liste. Où faut-il le caser? L'horaire affecté à ce comité était le lundi après-midi. Bien sûr, cela posait toutes sortes de problèmes. Nous avons depuis lors négocié avec les whips, les greffiers, les sténographes, et ainsi de suite. C'est ainsi que nous en sommes arrivés à l'heure de 17 h 15. C'est à ce moment que pouvaient être présents les membres du comité, les sténographes et les interprètes. Si vous préférez tenir les réunions les mardis matins, je vous conseille de vous entendre provisoirement, puis de voir si c'est possible.
Le président: Il y a toujours des conflits.
Le sénateur Beaudoin: Il existe peut-être une autre solution. Comme vous devez consulter les whips, nous pourrions peut-être déléguer cette question à un comité directeur, et le président tranchera après avoir rencontré les whips.
Ce n'est peut-être pas la façon dont se prennent de telles décisions, car nous ignorons si les mardis matins sont libres. Je suis disposé à laisser le comité directeur en décider.
Le sénateur Carstairs: Je suis d'accord.
Le président: Le mardi matin, à 9 h 30, est-il acceptable aux membres ici présents?
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le président: C'est déjà un bon point de départ. Nous essaierons de faire changer l'horaire. C'est une bonne heure.
Y a-t-il d'autres questions dont aimeraient discuter les honorables sénateurs?
Le sénateur Andreychuk: Le sénateur Tkachuk, qui assiste à une autre réunion, aurait aimé être ici. Il propose que le comité continue d'étudier le projet de loi S-10 qu'il a déposé selon les mêmes modalités que lorsque ont commencé les délibérations à son sujet. Il y avait un plan d'action, et il aimerait qu'il soit respecté. Cela correspond à ce que le gouvernement a proposé comme façon de faire lorsqu'il a suggéré de reprendre l'étude des projets de loi qui avaient franchi toutes les étapes à la Chambre au point où ils en étaient. Je vous transmets le message.
Le sénateur Carstairs: À ceux qui ne faisaient pas partie du comité durant la dernière session, je précise que le projet de loi S-10 ne nous a pas encore été renvoyé. Nous nous trouvons dans une position particulière, en ce sens que le comité étudie déjà le fond du projet de loi S-10 sans que le projet de loi comme tel lui ait été soumis. Étant donné les circonstances, j'aurais préféré que nous demandions au Sénat de décider si le comité doit, oui ou non, étudier le projet de loi S-10.
Par contre, j'hésiterais énormément à saisir à nouveau le comité du fond du projet de loi S-10. Mes raisons sont, en toute franchise, les mêmes que celles que j'avais données antérieurement: nous créons chez les peuples autochtones qui appuient cette mesure législative des attentes irréalistes. S'il faut étudier le projet de loi, faisons-le. Cessons de faire semblant. Il est absolument essentiel que nous ne perdions pas la confiance des peuples autochtones. J'ai l'impression que c'était là l'objet de tout cet exercice.
Le sénateur Andreychuk: Je pourrais peut-être dire, alors, que l'on hésite à reprendre l'étude là où on l'avait laissée. Cet ordre de renvoi nous a été donné, non parce que le comité avait choisi d'étudier cette question, mais parce que c'est ainsi qu'en avaient décidé les leaders des deux partis, après discussion, et particulièrement les sept sénateurs autochtones. Si c'était ce que souhaitaient les leaders, le Sénat et les sénateurs autochtones, je ne voudrais rien y changer, bien que cela nous crée des difficultés particulières.
Je propose, en toute équité, puisque cette séance d'organisation a été convoquée à la dernière minute, que le sénateur Tkachuk puisse venir ici défendre sa position. Je suis sûre que je le fais mal. Je crois qu'il aimerait pouvoir le faire lui-même.
Le président: Je ne crois pas qu'en tant que comité, nous ayons le pouvoir de faire cela. Il faudrait que l'instruction nous vienne du Sénat.
Le sénateur Roux: Vous excuserez mon ignorance, mais qu'est-ce que le projet de loi S-10?
Le sénateur Andreychuk: Le projet de loi S-10 est une tentative en vue d'en arriver à une entente-cadre au sujet de certaines réserves de l'Alberta qui pourraient alors gérer elles-mêmes leurs affaires -- en d'autres mots, déléguer aux chefs de bande certains pouvoirs qu'exerce actuellement le gouvernement fédéral en vertu de la Loi sur les Indiens et leur permettre de gérer leurs affaires collectivement. Il s'agit d'un cadre collectif. Il pourrait peut-être servir de modèle d'autodétermination aux Autochtones, bien qu'il ne soit pas forcément celui que le gouvernement ait proposé. Nous étudions l'objet du projet de loi.
Le sénateur Pearson: Cette étude nous offre la possibilité de faire circuler des idées dont nous aimerions qu'on tienne compte. Tout d'abord, à ce sujet particulier, j'aurais besoin d'éclaircissements, car j'avais compris que, lorsque le Parlement a été prorogé, tous les projets de loi sont morts au Feuilleton. Je n'irai pas plus loin. Il faut en discuter avec les leaders. De plus, la création d'un précédent m'inquiète, car un autre projet de loi circule quelque part, en ce moment, au Sénat. J'ignore s'il nous sera jamais renvoyé et je n'irais pas plus loin. Les précédents dans le cadre desquels nous étudions le fond de mesures législatives me rendent un peu nerveuse.
En troisième lieu, j'ose espérer que, durant la deuxième session de la législature, nous pourrons examiner les possibilités qui s'offrent aux jeunes autochtones à risque qui ne vivent pas dans les réserves. C'est une question que nous devrions étudier, et je crois qu'elle préoccupe le président tout autant que moi. C'est une question que bon nombre d'entre nous, au sein de ce comité, aimeraient pouvoir étudier afin de voir si nous ne pouvons pas y trouver des solutions. Il existe tout un train de documents que nous pourrions étudier, par exemple le rapport de la Commission royale. Cependant, nous pouvons facilement trouver un document que nul n'examine réellement, un document plus positif. Je crois que l'occasion s'offre ici au Sénat d'établir une solidarité intergénération. Qui plus est, des jeunes pourraient venir nous parler. Bien sûr, ce n'est qu'une suggestion.
Le sénateur Andreychuk: La question figurait déjà dans notre plan de travail. Le projet de loi S-10 était la première et celle-là, la deuxième. La troisième question était, puisque la Commission royale devait déposer son rapport final l'année suivante, la possibilité de rencontrer des gens de la Commission ou d'ailleurs afin de nous aider à comprendre toute la portée de l'étude et du rapport de la Commission de manière à pouvoir faire partie de tout processus visant à faciliter la mise en oeuvre des recommandations. Bon nombre d'entre elles vont au coeur du sujet et sont complexes.
Le sénateur Taylor: Les soins de santé destinés aux peuples autochtones et leur rapport avec cette question m'intéressent. Les soins de santé relèvent des provinces, mais il y a une faille dans le système par laquelle s'échappent les peuples autochtones. Ils sont, paraît-il, la responsabilité du gouvernement fédéral. Pourtant, simultanément, ils habitent dans une province. Je ne crois pas qu'ils obtiennent un traitement équitable en matière de soins de santé. Ils n'obtiennent pas autant qu'ils le devraient en tant qu'habitants de la province, encore moins en tant que peuples autochtones.
Le sénateur Carstairs: Je suis d'accord avec toutes les propositions. Il y en a une autre à laquelle je m'intéresse particulièrement et qui n'absorberait pas beaucoup de notre temps. J'aimerais rencontrer les fonctionnaires du ministère afin d'obtenir une mise à jour du dossier des revendications fondées sur des droits fonciers issus de traités. Dans ma province, nous négocions depuis des années, sans résultat. J'aimerais entendre les explications des fonctionnaires et, au cours peut-être de quelques réunions, essayer de voir où en est le dossier et s'il y a quelque chose à faire. Cette étude mènerait peut-être à d'autres travaux, mais j'aimerais savoir où en sont les dossiers de bon nombre de nos peuples autochtones.
Le sénateur Andreychuk: J'ai une autre suggestion et j'espère qu'elle est opportune. La Commission royale vient tout juste de faire des commentaires sur le système de justice et sur la façon dont il s'applique aux Autochtones. Le gouvernement a amorcé certains changements. Je sais que certains gouvernements provinciaux envisagent la possibilité d'une forme quelconque de cogestion de l'administration de la justice, en rapport soit avec le prononcé de la sentence, soit avec l'administration générale de la justice.
Depuis plus de 30 ans, je m'inquiète du fait que les autochtones sont surreprésentés dans le système judiciaire. J'aimerais peut-être une étude qui nous permettrait de séparer les faits de la fiction de manière à pouvoir être à jour et peut-être jeter un nouvel éclairage sur le fait que nous emprisonnons des gens qui, à mon avis, ne devraient pas l'être.
Le président: Que pensez-vous de la suggestion de le sénateur Carstairs? Avez-vous quelque chose à dire au sujet de sa suggestion voulant que le ministre et les fonctionnaires viennent peut-être nous donner un aperçu? C'est peut-être un point de départ. Est-ce ce que vous envisagiez, sénatrice Carstairs? Ce ne sont pas les questions à étudier qui manquent.
Le sénateur Carstairs: Il faut commencer quelque part. Ce n'est qu'une question. Il conviendrait, je crois, que le comité directeur nous propose un groupe de domaines auxquels nous pourrions attribuer un ordre de priorité, si je puis m'exprimer ainsi.
Le sénateur Pearson: Certains domaines se recoupent. Il y aurait donc peut-être moyen de faire d'une pierre deux coups.
Le sénateur Beaudoin: Je serais certes en faveur d'une proposition à cet effet, car la question est déjà assez compliquée comme cela.
De plus, ces questions soulèvent des problèmes d'ordre juridique et constitutionnel. Il faut être expert pour faire partie de ce comité. Si les experts de l'administration peuvent nous faire un résumé, je serais très favorable à cette idée.
Le président: Nous devrions peut-être faire cela. Il serait peut-être utile que le comité réserve une séance ou deux à une rencontre durant laquelle il pourrait débattre des questions avec les fonctionnaires. Ceux-ci peuvent nous donner un aperçu de l'évolution du dossier. Nous pourrions demander qu'ils se préparent à devoir répondre à toutes sortes de questions, allant de la question du traité au Manitoba au rapport sur la justice, voire à l'état des négociations du traité en Colombie-Britannique. Nous avons besoin de faire le point avant d'arrêter notre choix. Cette façon de faire vous semble-t-elle logique?
Le sénateur Beaudoin: J'ai une autre question. Nous l'ignorons peut-être à ce stade-ci, mais quand prévoyez-vous que la Commission royale déposera son rapport?
Le sénateur Carstairs: La dernière fois que je me suis renseignée, l'échéance était juin 1996. Jusqu'ici, cette échéance a été reportée quatre fois.
Le sénateur Andreychuk: Je croyais qu'il devait être déposé en septembre.
Le sénateur Pearson: J'ai posé la question la semaine dernière, et on m'a répondu que ce ne serait pas avant l'automne. Tout dépend de la personne à qui vous le demandez. Voilà une autre question que nous pouvons poser aux fonctionnaires.
Certaines de ces questions peuvent être confiées à un sous-comité, particulièrement celles qui concernent la jeunesse. D'autres questions intéressent vivement tous les membres, par exemple l'aperçu donné par les fonctionnaires et l'évaluation de certaines questions juridiques et constitutionnelles mentionnées par le sénateur Beaudoin. Ces questions se posent déjà, et elles prennent de l'ampleur. Nous aurons besoin d'éclaircissements très bientôt.
Le sénateur Andreychuk: Certains membres sont absents aujourd'hui. Je propose que nous sollicitions l'avis de tous les membres du comité et que le président dresse une liste approuvée par le comité directeur. Tous les membres du comité pourront alors examiner la liste et classer les questions par ordre d'importance.
Le président: Le sénateur Andreychuk fera partie du comité directeur. Devrions-nous commencer immédiatement à organiser une séance avec le ministre? Cela prend du temps.
Le sénateur Pearson: On ne peut se tromper.
Le président: Pouvons-nous considérer cela comme un feu vert?
Le sénateur Andreychuk: Je le crois.
Le président: Nous organiserons une séance d'information avec le ministre et ses fonctionnaires. Nous pourrons ensuite discuter des autres questions, au fur et à mesure qu'elles se présentent.
La séance est levée.
OTTAWA, le mardi 5 novembre 1996
Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 9 h 30 pour examiner le projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon et la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon.
Le sénateur A. Raynell Andreychuk (vice-présidente) occupe le fauteuil.
La vice-présidente: Honorables sénateurs, nous examinons ce matin le projet de loi C-6, qui vise à modifier la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon ainsi que la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon.
Nous accueillons aujourd'hui M. Beaubier, directeur général de la Direction générale des ressources naturelles et de l'environnement au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, M. Hodgkinson, chef de la Division de la législation minière et de la gestion des ressources, et M. Gilbert Groulx, conseiller juridique auprès des Services juridiques du ministère.
M. Beaubier, vous pourriez peut-être faire une déclaration, après quoi les sénateurs auront sans doute des questions à vous poser.
M. Hiram Beaubier, directeur général, Direction générale des ressources naturelles et de l'environnement, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien: J'aimerais d'abord commencer par vous expliquer pourquoi nous souhaitons apporter des modifications aux lois sur l'extraction du quartz et de l'or dans le Yukon.
Nous avons, à l'heure actuelle, deux lois au Yukon qui empêchent le ministère de gérer les concessions minières et de répondre aux attentes des habitants du Yukon et du Canada. La législation ne prévoit aucune mesure qui permet de réglementer l'impact environnemental des activités d'exploration rattachées à l'exploitation minière des placers ou des mines métalliques, sauf si ces activités touchent les plans d'eau. Ce vide permet aux sociétés d'exploration de défricher les terrains, de creuser des tranchées et d'effectuer des travaux d'excavation préliminaires sur les concessions. Le gouvernement ne dispose d'aucun moyen pour réglementer ces activités.
Je dois toutefois avouer que de nombreux efforts ont été déployés en vue de combler ce vide. Les premiers remontent à la fin des années soixante. On avait proposé à l'époque de remplacer les lois sur l'extraction du quartz et de l'or dans le Yukon par une loi sur les minéraux. Toutefois, ce projet a dû être écarté en raison de la vive opposition qu'il suscitait, ce qui fait que ce vide a continué d'exister jusqu'à aujourd'hui.
Il existe au Yukon des règlements concernant l'utilisation des terres, mais ceux-ci ne s'appliquent pas aux concessions minières. Cette situation a été mise en évidence dans l'affaire Rafferty-Alameda Dams, qui a permis de faire ressortir l'importance du décret sur les lignes directrices concernant le PEEE. Ce décret oblige le gouvernement à s'occuper des questions environnementales dans les secteurs qui relèvent de sa compétence. Toutefois, à l'époque, nous n'avions aucun moyen de faire appliquer ce décret sur les concessions. L'évaluation de l'impact environnemental des activités minières au Yukon ne faisait pas partie de nos responsabilités.
Le ministre de l'époque, M. Siddon, a recommandé qu'on modifie la loi pour combler ce vide. Il a d'abord proposé qu'on modifie la Loi sur les eaux internes du Nord, que nous avons scindée en deux pour créer la Loi sur les eaux du Yukon et la Loi sur les Territoires du Nord-Ouest, et ensuite qu'on modifie les lois sur l'extraction du quartz et de l'or pour faire en sorte que le gouvernement puisse assujettir à un régime de gestion de l'environnement les activités minières menées sur les concessions minières.
Comme il voulait que le Yukon trouve lui-même une solution au problème, il a décidé de créer le Yukon Minerals Advisory Committee, qui réunissait tous les groupes directement visés par le développement minier et la protection de l'environnement au Yukon. Le comité était formé de la Yukon Conservation Society, du Conseil des premières nations du Yukon, du gouvernement territorial, de la Klondike Placer Miners Association, de la Yukon Chamber of Mines et, bien entendu, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
Le comité, qui représentait des groupes d'intérêt différents, a eu de la difficulté à s'entendre sur les moyens à prendre pour gérer les terres et, en même temps, respecter l'environnement. Toutefois, il est parvenu à un consensus et a publié, en 1992, un rapport assorti de recommandations, qu'il a remis au ministre de l'époque. Le rapport a été distribué au grand public, qui a été invité à faire connaître ses commentaires de ce dernier. Le public s'est en général montré favorable au rapport.
Le ministre a ensuite demandé au comité de lui soumettre un texte législatif. Nous avons passé plusieurs années là-dessus. Nous avons partagé des projets de texte avec le comité. Il a eu l'occasion de faire des commentaires sur le libellé du texte.
Les points de vue étaient très variés. Nous n'avons pas été en mesure de nous entendre sur certains points. D'abord, le comité n'a pas réussi à s'entendre sur la question de savoir si des garanties devaient être données et maintenues. L'industrie minière, notamment l'industrie des placers, estimait que ces garanties n'étaient pas nécessaires. La Yukon Conservation Society soutenait le contraire. Nous n'avons pas réussi à nous entendre là-dessus.
En ce qui concerne les peines, la Yukon Conservation Society voulait que toute infraction soit assortie d'une peine d'emprisonnement, ce que refusait l'industrie.
Sur la question des règlements qui accompagnent le projet de loi, on avait des réserves au sujet des seuils associés aux activités exemptées de l'examen préliminaire.
L'introduction et l'adoption de ce projet de loi ont été retardées par l'accord de Charlottetown et la tenue d'une élection. Ces deux événements nous ont empêchés pendant deux ans d'aller de l'avant avec le projet de loi.
Je tiens à dire que les modifications proposées à la loi ne pourront être appliquées isolément. Elles ne visent pas à remplacer une loi fédérale. La Loi sur les pêches de même que la Loi canadienne sur la protection de l'environnement continueront de s'appliquer aux activités menées sur les propriétés minières. La Loi sur les eaux du Yukon continuera de s'appliquer, tout comme les lois territoriales qui visent la protection de la faune et la manutention du combustible et de l'essence.
Il y a donc diverses lois qui sont visées. Notre projet de loi a pour but de combler le vide mentionné plus tôt et porte sur les travaux qui sont effectués sur les terres. Les dispositions de la Loi sur les eaux du Yukon seront appliquées selon les besoins. Si une infraction touchant la pêche ou l'habitat du poisson est commise, la Loi sur les pêches sera appliquée. Si une infraction concernant le traitement des produits chimiques est commise, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement sera appliquée. Je reviendrai sur cette question lorsque je vous parlerai des amendes et des peines.
Je tiens également à vous signaler qu'il existe un lien entre le projet de loi et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Il est important de savoir que toutes les autorisations données en vertu de ce projet de loi seront assujetties à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Autrement dit, si une compagnie minière souhaite obtenir un permis pour entreprendre des activités de type II, le permis et les activités en question feront l'objet d'une évaluation. Ils seront évalués dans le cadre de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Une fois l'évaluation terminée, ils seront assujettis aux règlements, comme le précise le projet de loi, et le permis sera assorti de conditions d'exploitation.
La démarche que nous proposons couvre toutes les activités menées sur les propriétés minières. Des permis pour les activités de type I seront requis pour répondre aux normes et conditions définies dans les règlements. Ils pourront faire l'objet des mesures qui sont définies dans le projet de loi, c'est-à-dire des inspections, des contrôles d'application, des arrêts de travail, et cetera.
En général, nous savons à quel endroit ont lieu les activités de type I, parce que les propriétés sont toutes enregistrées auprès du registraire minier. Les compagnies doivent déposer un rapport d'évaluation, ce qui nous permet de savoir où se déroulent les travaux d'exploration.
D'après le projet de loi, la compagnie qui souhaite mener des travaux d'exploration sur une propriété minière doit obtenir l'autorisation du gouvernement. Il y a quatre types de permis. En vertu des activités de type I, la compagnie exécute tout simplement les travaux qu'elle juge indiqués sur sa propriété. Il y a des seuils qu'elle ne peut dépasser. Si elle respecte ces seuils, elle peut effectuer ses travaux.
Les permis pour les activités de types II, III et IV sont tous assortis de seuils différents. Plus le travail est complexe, plus l'examen du gouvernement sera approfondi.
Le gouvernement doit rendre ses décisions à l'intérieur de certains délais. Ces derniers ont été établis en fonction du processus de consultation que prévoient les règlements territoriaux sur l'utilisation des terres. Les demandes seraient envoyées aux groupes d'intérêt, comme le Conseil des premières nations du Yukon et les sociétés de conservation, afin qu'ils puissent les examiner. Les délais fixés par la loi nous donnent le temps de faire examiner les demandes de permis par les groupes d'intérêt et de les soumettre à l'évaluation du gouvernement.
Le projet de loi contient les dispositions que l'on trouve habituellement dans une loi. Il traite de la délivrance de permis, de la cession du plan d'exploitation et de l'abandon des activités. Il fournit au gouvernement les outils dont il a besoin pour intervenir, si cela s'avère nécessaire, et pour exiger et maintenir des garantis. Il donne aux inspecteurs le pouvoir de procéder à des inspections sur les propriétés et de prendre les mesures qui s'imposent si le plan d'exploitation n'est pas respecté.
Il autorise également les compagnies à contester les instructions données si elles ne sont pas d'accord avec celles-ci. Les compagnies peuvent interjeter appel auprès des fonctionnaires et du ministre.
Voilà qui met fin à mon aperçu général du projet de loi. Nous sommes disposés à répondre à vos questions.
Le sénateur Bonnell: Je ne connais pas tellement bien le Yukon, et encore moins l'industrie minière. Je sais que de jeunes chercheurs sont allés au Yukon en 1898 pour essayer de trouver de l'or. Ils n'ont jamais entendu parler d'une loi qui contrôlerait toutes leurs activités. Pourquoi avons-nous besoin de règles en 1996 alors qu'elles n'étaient pas jugées utiles en 1898?
M. Beaubier: Les ressources sont soumises aujourd'hui à d'énormes pressions. Il y a de plus en plus de personnes qui se les disputent. Les utilisateurs de ces ressources sont en conflit. Les pourvoyeurs gagnent leur vie en transportant dans cette région des chasseurs de gros gibier. Ils craignent que les compagnies minières ne viennent s'installer près de leurs camps pour exercer leurs activités.
On attache aussi beaucoup d'importance aux plans d'eau, ou encore aux valeurs esthétiques, ce qui n'était pas le cas il y a 100 ans. Par exemple, on peut voir à partir de la route de l'Alaska, qui est fortement utilisée par les touristes, les travaux routiers qui ont été effectués et les tranchées qui ont été creusées sur le côté d'une montagne. L'aspect visuel de ces travaux dérange beaucoup l'industrie touristique.
Ce projet de loi ne vise pas à interdire les travaux de ce genre, mais à faire en sorte que les terres sont laissées dans un état acceptable, compte tenu des divers intérêts en jeu.
Le sénateur Bonnell: Donc, on veut tout simplement faire en sorte que tout soit laissé dans le même état. Si vous faites un trou, vous devez ensuite le remplir.
M. Beaubier: On s'inquiète aussi de l'érosion et de l'impact de celle-ci.
Le sénateur Bonnell: Si ce n'était pas des compagnies minières, le Yukon ne serait pas tellement prospère. Ce sont les mines qui l'ont rendu prospère.
M. Beaubier: Vous avez raison.
Le sénateur Bonnell: Ces règles imposent tellement de restrictions que je ne sais pas dans quelle mesure les compagnies minières pourront exercer leurs activités.
M. Beaubier: Le projet de loi contient une disposition qui en définit l'objet. Il met l'accent sur l'importance des activités minières et sur la nécessité de maintenir une industrie saine et active.
Le comité qui a élaboré ce projet de loi a tenu compte du point de vue de la Yukon Chamber of Mines et de la Yukon Placer Mining Association. Lorsque nous avons formulé des recommandations au gouvernement, nous avons envoyé un résumé du projet de loi à plus de 600 personnes au Yukon. Nous avons tenu des réunions à Whitehorse, Mayo et Dawson. Ces deux dernières villes sont situées au coeur de l'industrie minière du Yukon, ou du moins de l'industrie des placers.
L'industrie minière nous a clairement dit qu'elle appuyait le projet de loi.
Le sénateur Bonnell: Les 600 personnes que vous avez consultées étaient toutes d'accord?
M. Beaubier: Non, sénateur, elles n'étaient pas toutes d'accord, mais la majorité l'était.
Le sénateur Bonnell: Si vous pouvez amener un si grand nombre de personnes à s'entendre sur quelque chose, vous êtes plus intelligent que moi.
M. Beaubier: Je ne revendique absolument pas cette victoire.
Le sénateur Bonnell: Les principaux groupes d'intérêt sont d'accord?
M. Beaubier: Oui.
Le sénateur Adams: Combien y a-t-il de personnes qui exploitent des compagnies minières au Yukon à l'heure actuelle?
M. Beaubier: L'industrie d'exploitation des placers compte 500 compagnies. Il s'agit de petites entreprises, souvent familiales, qui exercent leurs activités dans les criques pendant les mois de mai à octobre.
En ce qui concerne les mines métalliques, il y a une grande mine, la Anvil Range, et peut-être une demi-douzaine de mines qui sont au stade de développement et qui produisent de l'or et du cuivre.
Le sénateur Adams: Est-ce que le projet de loi, s'il est adopté, va avoir un impact sur les compagnies minières qui mènent des activités dans cette région?
M. Beaubier: Le projet de loi prévoit une période de transition afin de permettre aux compagnies qui mènent des activités dans cette région de rendre leurs plans et leurs opérations conformes au projet de loi. Elles ont la possibilité et l'obligation de faire en sorte que leurs activités sont conformes aux dispositions du projet de loi.
À mon avis, il n'y a pas beaucoup de compagnies à l'heure actuelle dont les activités sont conformes au projet de loi.
Le sénateur Adams: Avez-vous rencontré les Autochtones du Yukon dont les revendications territoriales viennent d'être réglées?
M. Beaubier: En vertu de l'entente-cadre finale, quatre premières nations ont réglé leurs revendications. Nous étions tenus de consulter ces groupes. D'ailleurs, ils participent actuellement à d'autres consultations sur les règlements.
Des changements sont également envisagés aux textes législatifs touchant les ressources naturelles. Il faudra élaborer un projet de loi sur l'évaluation du développement, dans lequel il sera question de l'évaluation environnementale des projets. Il se peut que d'autres amendements soient proposés au projet de loi par suite de ces discussions. Nous ne sommes pas encore fixés là-dessus.
Le sénateur Adams: Ces amendements pourront être apportés même si le projet de loi est adopté?
M. Beaubier: Les changements découlant des revendications territoriales auront un impact sur la législation actuelle.
Le sénateur Adams: Entre-temps, pour ce qui est des revendications territoriales qui ont été réglées, est-ce que les compagnies minières ont établi des partenariats avec les Autochtones?
M. Beaubier: Des partenariats sont en train d'être établis avec les groupes dont les revendications territoriales ont été réglées. En raison du règlement de ces revendications, les Premières nations ont obtenu des terres sur lesquelles elles possèdent des droits de surface et des droits souterrains. Nous nous attendons à ce que le développement minier sur ces terres s'effectue en fonction des conditions qui seront fixées par les Autochtones.
Le sénateur Pearson: Quelles sont les préoccupations qui ont été soulevées relativement à ce projet de loi lorsqu'il a été examiné par le comité de la Chambre des communes?
M. Beaubier: Le comité a eu recours à un processus novateur. Il a été relié par satellite aux groupes intéressés qui se trouvaient au Yukon. Il a tenu deux journées d'audiences au cours desquelles il a invité toutes les parties intéressées à venir exposer leurs vues sur le projet de loi. Les préoccupations qui ont été soulevées étaient les mêmes que celles que j'ai mentionnées plus tôt. Personne n'est parvenu à s'entendre sur les peines et les amendes qui devaient être imposées ou sur les garanties qui devaient être fournies et maintenues. Certains intervenants estimaient que les activités de type I étaient trop permissives.
Ces préoccupations ont été soulevées au cours des discussions du comité et des audiences publiques, où 600 personnes n'ont pas été en mesure de s'entendre. Elles ont été abordées de nouveau lors des réunions du comité. Ce dernier estimait que le projet de loi constituait la meilleure solution de compromis possible, compte tenu des divergences d'opinion qui existaient.
La vice-présidente: En ce qui concerne le premier groupe d'intervenants qui a été constitué pour examiner cette question en 1990 ou 1992, je crois comprendre que certains des membres ont abandonné ou se sont retirés. Pouvez-vous nous en donner la raison et nous dire quand cela s'est passé?
M. Beaubier: Cela s'est passé en fait à la toute fin, lorsque la recommandation sous forme législative a été transmise au ministre.
La Yukon Conservation Society a jugé, parce que nous n'avions pu nous entendre sur la question des garanties, des sanctions et surtout des seuils, qu'elle ne pouvait plus souscrire à la recommandation. Elle a donné comme motif que le dépôt et l'adoption du projet de loi au Parlement avaient trop tardé.
Lorsque nous nous sommes assis à l'origine en 1992, nous pensions avoir terminé dans un an ou deux. À cause des événements dont j'ai parlé plus tôt, nous n'avons tout simplement pas été en mesure de finir le travail et de faire adopter le projet de loi par le Parlement.
L'organisme a estimé que, même si auparavant il était tout à fait disposé à faire certains compromis pour que le projet de loi soit adopté rapidement et pour que des contrôles environnementaux soient effectués sur les propriétés minières, étant donné tout le temps que le processus a finalement pris et ses objections fondamentales à l'égard de ces questions, il n'était pas prêt à dire qu'il souscrirait au projet de loi. Cependant, cela n'est pas arrivé avant que le projet de loi soit bel et bien rédigé et transmis au gouvernement.
La vice-présidente: Quelle est l'importance de cet organisme?
M. Beaubier: Il ne regroupe pas beaucoup de membres, mais il jouit d'une grande crédibilité au Yukon. Il bénéficie d'un large appui dans un certain nombre de collectivités du Yukon. Il ne s'agit pas d'un organisme basé exclusivement à Whitehorse. J'ignore combien de membres en font partie.
La vice-présidente: Il me semble que la faiblesse du projet de loi, en dépit des bons éléments qu'il comporte, c'est que le seuil est trop bas, surtout en ce qui concerne les activités de type I pour lesquelles les entreprises doivent se conformer à des conditions d'exploitation, mais n'ont pas à notifier le public. La notification des activités n'est pas une façon très publique de faire comprendre aux gens ce qui se passe. Sans notification du public, comment exercera-t-on le contrôle pour éviter que l'activité pose un problème?
M. Beaubier: Premièrement, les seuils figurent dans le règlement plutôt que dans le projet de loi lui-même. Nous prévoyons des activités de type I et nous fixons les seuils dans le règlement. Ce n'est pas vraiment une caractéristique du projet de loi.
En ce qui concerne le contrôle, les feuilles de claims miniers sont des documents publics. N'importe qui peut savoir qui est le propriétaire de quoi. Nous avons expressément fixé les seuils de manière à encourager un certain niveau d'activité que nous avons jugé moins nuisible à l'environnement.
Les gens peuvent pénétrer dans les terres pour effectuer des travaux de forage et pour y creuser des tranchées. Cependant, dans le cas de certains seuils, très peu d'activités sont permises. La quantité de carburant permise au premier niveau est limitée à 5 000 litres, ce qui limite pas mal les activités. Comme la taille des camps de jour est limitée, le niveau d'activités y est très restreint. Ces seuils ont été fixés à dessein pour encourager le transport par hélicoptère et pour éviter la construction de routes et l'utilisation de machinerie lourde.
Comme je l'ai déjà mentionné, nous exercerons un contrôle en fonction des travaux d'évaluation et des claims enregistrés. Nos documents seront accessibles au public. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que nous ne disposerions pas d'un registre pour ces activités particulières. Les gens devraient travailler dur pour les obtenir.
La vice-présidente: Nous avons donc besoin de la diligence raisonnable de la bureaucratie pour ce qui est de l'administration.
M. Beaubier: C'est exact.
La vice-présidente: Et nous avons besoin d'une écosociété vigilante.
M. Beaubier: Ce que nous avons, je dirais, dans les deux cas, bien sûr.
La vice-présidente: Quelqu'un a signalé un autre problème en ce qui a trait au projet de loi. Il s'agit du fait que les montants des garanties ou des dépôts pour certaines des activités de plus grande envergure ne sont pas suffisants ou ne sont pas connus parce qu'ils sont peut-être prévus par voie de règlement. D'habitude, ce ne sont pas les compagnies minières exemplaires dont nous devons nous inquiéter, mais plutôt de celles qui sont délinquantes. Si nous ne pouvons obtenir de ces compagnies l'argent initialement, comment pourra-t-on les faire payer en bout de ligne pour leurs imprudences?
M. Beaubier: Le projet de loi contient des dispositions en ce qui concerne les garanties. On y donne certaines indications quant aux circonstances où une garantie devrait être exigée. Il y est question du risque d'effets environnementaux négatifs et des activités antérieures de l'entreprise. Les entreprises délinquantes devront toujours donner des garanties. Les dispositions permettent au gouvernement d'exiger toutes les garanties nécessaires en ce qui a trait à la propriété, y compris une garantie complète initiale s'il le juge opportun.
La vice-présidente: Je crois comprendre qu'au Yukon on pratique la politique du libre accès. Comment cela vient-il compléter la protection de l'environnement dans ce projet de loi ou s'y oppose-t-on directement au Yukon?
M. Beaubier: Nombreux sont ceux qui considéreraient que l'on s'y s'oppose directement, mais je dirais que le système du libre accès est un système national qui s'applique dans toutes les provinces également. Ce que cela signifie vraiment, c'est que les gens ont le droit de pénétrer dans les terres, de jalonner un claim et d'obtenir certains privilèges qui y sont associés. Si l'accès au terrain est permis, s'il ne fait l'objet d'aucune restriction de la part du gouvernement et si vous respectez les règles régissant le jalonnement, vous avez alors le droit d'acquérir des claims miniers sur cette propriété.
À l'heure actuelle on s'interroge au Canada, et cela inclut le Nord, pour savoir si ce véhicule est approprié pour attribuer les droits. Pour y apporter des changements, il faudrait que l'industrie modifie en profondeur la façon dont elle exerce à l'heure actuelle ses activités au Canada et, dans la plupart des cas en fait, à l'échelle internationale. Tout le processus de la prospection, de même que l'exploitation des propriétés jusqu'à un certain stade par l'entremise de la prospection, seraient grandement compromis si l'on modifiait en profondeur le système du libre accès. Certaines des compagnies plus petites, qui reprennent les propriétés des prospecteurs, les exploitent jusqu'à un certain stade et les remettent ensuite aux grandes compagnies, éprouveraient aussi des difficultés avec un nouveau système. En dépit des problèmes qui y sont associés, vu que vous ne savez jamais à quel moment surgira un conflit entre le jalonnement du claim minier et une ressource tant qu'un particulier ne jalonne pas le claim, c'est l'industrie qui décide vraiment si ces changements sont apportés et de quelle manière ils le sont.
Le gouvernement dispose d'autres moyens pour régler ce problème comme la planification de l'utilisation des terres. Les accords sur les revendications territoriales exigent une planification de l'utilisation des terrains et elle se fera. Le gouvernement peut, en vertu de la Loi sur les terres territoriales, soustraire certains terrains au jalonnement, comme il pourra le faire aux termes de la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon et de la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon. Il peut interdire le jalonnement sur certains terrains. Ainsi s'il y a des ressources en cause, ces terrains peuvent être soustraits au jalonnement et le système du libre accès ne s'applique plus.
Par exemple, toute la région du nord du Yukon, au nord de la rivière Porcupine tout près de la côte Arctique, a été soustraite au jalonnement parce que secteur est considéré comme vulnérable. On a récemment créé deux parcs dans cette région pour protéger le troupeau de caribous de la Porcupine. Étant donné que d'autres animaux utilisent ce secteur, toute la région -- une région plus vaste que l'Île-du-Prince-Édouard -- a été soustraite au jalonnement.
Ces moyens existent pour gérer le système du libre accès ouvert.
La vice-présidente: Je crois que le Yukon était pour ainsi dire la dernière région à disposer de ce genre de mesure législative.
M. Beaubier: C'est la dernière.
La vice-présidente: Comment cette mesure législative se compare-t-elle à celles des Territoires du Nord-Ouest, de la Colombie-Britannique ou de l'Alberta?
M. Beaubier: Elle est très semblable, madame. Dans les Territoires du Nord-Ouest, la Loi sur les terres territoriales s'applique, comme le règlement sur l'utilisation des terres territoriales, à toutes les propriétés minières tandis que j'ai mentionné plus tôt qu'il n'en allait pas de même au Yukon. Elle fonctionne à peu près de la même manière. Le règlement sur l'utilisation des terres territoriales dans les Territoires du Nord-Ouest prévoit deux catégories de permis tandis que nous en avons quatre. Les deux mesures législatives sont assujetties à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Les niveaux en ce qui a trait aux amendes ou aux peines sont similaires. Les différences se situent au niveau des seuils. Nous englobons toutes les activités au moyen des changements proposés ici et la question consiste à savoir ce qui est approprié ou non, si le système de notification est approprié ou non, tandis que dans le règlement sur les terres territoriales, certains niveaux ne se sont pas assujettis à la réglementation gouvernementale.
Dans les provinces, les approches sont très diversifiées. Certaines provinces s'occupent de la gestion de ces types d'activités strictement en vertu des lois environnementales tandis que d'autres le font en vertu des lois minières. Cependant, les processus sont similaires. En Colombie-Britannique, toutes les activités doivent être examinées et approuvées par le gouvernement de sorte qu'il n'y pas d'activités de type I. Ailleurs, les seuils ne s'appliqueraient qu'à un certain niveau d'activités. C'est comparable.
Le sénateur Bonnell: Pouvez-vous me dire, vu que les parlementaires de l'autre endroit, les fonctionnaires du gouvernement et tout le monde font traîner les choses depuis 1992, pourquoi nous devrions adopter maintenant la mesure législative? Qu'apporte-t-elle de bon?
M. Beaubier: Nous sommes aux prises avec de très graves conflits en ce qui concerne les ressources au Yukon, où interviennent des valeurs qui représentent la pensée des peuples autochtones, des agents de protection de la nature et d'autres utilisateurs des ressources. Jusqu'à maintenant nous n'avons pas eu l'occasion de les régler. La frustration est très grande chez ceux qui doivent chasser et piéger pour gagner leur vie, les pourvoyeurs en chasse et pêche, les organisateurs de descentes en eaux vives de même que les gens qui possèdent des résidences tout près des propriétés minières, vu qu'il n'existe tout simplement aucune moyen de régler les problèmes.
L'industrie minière du Yukon reconnaît qu'elle doit vivre au sein de la communauté du Yukon et qu'elle doit faire la paix avec ses voisins de même qu'avec les personnes qui ne partagent pas ses points de vue. Elle est tout à fait prête à le faire et considère que ce projet de loi est le véhicule tout indiqué pour y parvenir.
La Yukon Chamber of Mines a en fait adopté une motion dans laquelle elle dit souhaiter recourir à des contrôles et des règlements environnementaux sur ces propriétés, tout simplement pour régler les conflits et les irritants auxquels leur absence donne lieu. Elle n'aurait pas rédiger la loi tout à fait de la même manière si la tâche lui avait été confiée, mais elle a reconnu que certains compromis étaient nécessaires.
Le sénateur Bonnell: Vous nous dites que, en adoptant cette mesure législative, nous faciliterons la tâche à l'industrie de la chasse, à celles de la conservation de la faune et du tourisme, de même qu'à l'industrie minière. C'est-à-dire, qu'elles connaîtront toutes les règles du jeu.
M. Beaubier: Tout à fait.
Le sénateur Bonnell: Nous devrions donc adopter le projet de loi. S'il contient des erreurs, nous y apporterons des modifications l'année prochaine.
M. Beaubier: Nous espérons qu'il n'y en aura pas, mais on ne sait jamais.
Le sénateur Bonnell: Je n'ai encore jamais vu personne qui n'ait pas fait une ou deux fautes en accomplissant quelque chose. C'est la raison pour laquelle, nous apportons tous les ans de plus en plus de modifications au projet de loi. Nous aurions là un projet de loi d'un nouveau genre si aucun amendement n'était requis.
Je propose que l'on fasse rapport du projet de loi sans amendement.
La vice-présidente: Premièrement, je remercie nos témoins. Monsieur Beaubier, vous avez rendu à coup sûr le projet de loi raisonnable et intelligible. C'est tout à votre honneur et c'est peut-être attribuable à l'information que vous ont fournie vos deux collègues.
La protection de l'environnement est l'affaire de tous les membres de la collectivité. Lorsque des questions importantes sont noyées dans les règlements, la tâche est ardue. Une diffusion constante de l'information concernant les règlements et les sanctions s'impose si cette mesure législative doit recevoir l'appui de la collectivité, ce qui devrait être le cas. J'ose espérer qu'on en prend bonne note.
Honorables sénateurs, le sénateur Bonnell propose que nous passions outre l'étude article par article du projet de loi. Les sénateurs sont-ils d'accord?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Pearson: Je propose que nous fassions rapport du projet de loi sans amendement.
La vice-présidente: Quelqu'un propose que nous fassions rapport au Sénat du projet de loi C-6 sans amendement. Les sénateurs sont-ils d'accord?
Des voix: D'accord.
La vice-présidente: Adopté.
À titre d'information pour les membres du comité, on me dit que nos travaux futurs seront beaucoup plus complexes que ce ne fut le cas au cours des six ou huit derniers mois, parce que nous étudierons les projets de loi suivants: le projet de loi C-39, Loi concernant la première nation de York Factory, relativement à la submersion de terres; le projet de loi C-40, Loi concernant la première nation de Nelson House relativement à la submersion de terres; le projet de loi C-50, Loi de mise en oeuvre de l'Accord Canada-Yukon sur le pétrole et le gaz, et le projet de loi C-51, Loi sur les eaux du Nunavut.
De même, on m'a rappelé que la Commission royale d'enquête déposera son rapport en novembre. Les membres de ce comité devraient décider d'une ligne de conduite. Est-ce que nous voulons convoquer les commissaires? Allons-nous étudier certaines parties du rapport? Comment procéderons-nous? J'ai l'intention de soulever cette question auprès de notre président.
Le sénateur Marchand a aussi rencontré de façon informelle les membres du comité de direction pour indiquer qu'il continuera à demander que le Ministre comparaisse devant nous. Lorsque nous avons recommencé à siéger, nous avons dit que nous voulions commencer avec le ministre. Ces réunions ont été annulées à plusieurs reprises en juin. J'ai indiqué, et je crois que le comité était d'accord, que le ministre devrait être convoqué pour nous dire où en sont les choses en ce qui a trait à la communauté autochtone.
J'avais cru que le sénateur Marchand serait ici. J'ai un certain nombre de questions qui sont toujours en suspens. En ce qui concerne le rapport sur les anciens combattants autochtones, nous avons reçu certaines demandes qui méritaient notre attention. Nous les avons transmises au ministère et avons précisé dans notre rapport que nous accorderions un an aux hauts fonctionnaires du ministère pour faire enquête et nous faire rapport. Nous devons tenir une séance pour entendre les hauts fonctionnaires du ministère nous faire rapport à ce sujet et nous devons examiner les questions relatives aux anciens combattants autochtones. Les choses ont bougé en ce qui concerne certaines de nos recommandations alors qu'il n'en va pas de même pour d'autres.
Le sénateur Pearson: Ceux d'entre nous qui ont regardé la télévision hier soir ont pu voir le dévoilement du monument commémoratif et entendre parler de la bourse d'études.
La vice-présidente: La bourse a été annoncée il y a quelque temps. Il s'agit d'une nouvelle initiative. Nous devrions faire le point à ce sujet de même qu'en ce qui concerne les revendications individuelles.Lorsque la loi concernant la commission des revendications territoriales en Colombie-Britannique est entrée en vigueur, nous avions proposé d'inviter le commissaire à revenir pour faire le point.
Il y avait une autre question en suspens concernant les revendications territoriales au Yukon. Nous avions demandé une mise à jour au sujet des différences d'opinion. Je ne me souviens plus combien de bandes étaient en cause, mais à la fin il y a eu une altercation entre plusieurs d'entre elles qui estimaient que leurs droits n'avaient pas été protégés individuellement tout au long du processus. Elles avaient accepté de revenir et de résoudre le problème. Nous leur avons dit que nous n'avions aucun rôle à jouer parce qu'il s'agissait de questions internes, mais que nous réexaminerions la question pour voir si nous pouvions faire quelque chose.
Ces trois questions sont toujours en suspens; nous avons donc du pain sur la planche. J'ose espérer que nous convaincrons nos autres membres d'assister aux réunions, que le sénateur Marchand sera bientôt de retour et qu'il se portera assez bien pour continuer.
Le comité suspend ses travaux.