Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 8 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 22 octobre 1996
Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 15 h 20 pour discuter de ses travaux à venir.
Le sénateur Leonard J. Gustafson (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, le premier point à notre ordre du jour est l'itinéraire. Je vais demander à M. Blair Armitage de nous l'expliquer. Je pense que nous avons choisi de retenir la deuxième proposition, mais quoi qu'il en soit il peut la revoir avec nous. Nous voudrons peut-être y apporter des changements.
M. Blair Armitage, greffier du comité: J'ai soumis un itinéraire résumé aux membres du comité qui est assez succinct. J'ai pensé que je pourrais y ajouter les quelques points que je n'ai pas pu inscrire avant la réunion.
Le lundi 3 novembre nous proposons une séance d'information pour la délégation à 15 h 30 à l'hôtel. Nous allons demeurer à l'Hôtel MacDonald.
Le lundi nous nous rendrons dans la région de l'Athabasca pour voir le moulin Alberta Pacific. Plus tard, on nous fera faire une visite guidée des opérations forestières de l'Alberta Pacific.
Les activités de la journée suivante n'ont rien de particulier. Nous organisons des discussions avec un panel le matin, ainsi que l'après-midi, qui nous permettront d'examiner quelques perspectives différentes.
Mercredi nous aurons quelques autres réunions. Il s'agira de tables rondes. Le même après-midi vous quitterez Edmonton à 17 h 40 en avion. Ce vol arrive à Saskatoon à 19 h 35, heure locale. Nous passerons la nuit à Saskatoon à l'Hôtel Best Western puisqu'il n'y a pas de correspondance pour Prince Albert. Cet hôtel est relativement proche de l'aéroport parce que le lendemain matin nous quitterons l'hôtel à 7 h 25 pour arriver à Prince Albert vers les 8 heures. Nous monterons ensuite à bord d'une fourgonnette pour nous rendre à Meadow Lake pour y visiter l'installation de Millar Western et les opérations forestières de Mistik Management Limited. Le même soir nous retournerons à Prince Albert en voiture, et nous passerons la nuit au South Hill Inn. Nous aurons le temps la journée suivante de rencontrer les ONG locales et le Conseil d'administration de la forêt modèle.
Au milieu de l'après-midi vers les 15 h 45 un vol direct nous permettra de nous rendre à Winnipeg pour que nous puissions continuer de tenir des réunions le lendemain dans cette même ville. Nous serons à l'Hôtel Fort Garry où nous rencontrerons les représentants des ONG locales. Ces organisations nous ont fait savoir qu'il était préférable pour elles de nous rencontrer le samedi pour que ces réunions n'interrompent pas leur semaine de travail normale.
Pour le dimanche quelques options ont été soumises au comité que le sénateur Gustafson pourra vous expliquer. Ces options auront un effet sur notre emploi du temps plus tard, car l'option retenue aura une incidence sur la durée de notre séjour à Swan River et sur la date de notre retour à Winnipeg.
Le président: On nous a suggéré d'aller en voiture de Dauphin à Swan River afin de pouvoir voir certaines des forêts, idée qui me plaît. Avez-vous des commentaires? Peut-être que certains d'entre vous connaissent mieux la région que moi.
Le sénateur Rossiter: N'oubliez pas que c'est le 11 novembre, le Jour du Souvenir.
Le sénateur Spivak: Je viens de m'en rendre compte.
M. Armitage: Quand j'en ai parlé au départ aux sénateurs individuels qui m'avaient dit qu'ils allaient participer à ces déplacements, ils m'ont dit que cela leur convenait parfaitement. Puis, le comité directeur en a discuté et a dit qu'il n'y voyait pas d'inconvénient. En fait, je pense que j'avais suggéré à ce moment-là que nous pourrions peut-être inclure une brève cérémonie ou faire quelque chose d'autre d'approprié pour la minute de silence, le moment venu, alors que nous serons au moulin. Nous pourrons nous entendre à cet effet avec le personnel du moulin et marquer l'occasion de cette façon.
Le sénateur Rossiter: Il faut penser à la perception du public en l'occurrence.
Le président: À quelle heure allons-nous être en voiture? La plupart des services ont lieu le matin.
Le sénateur Taylor: Ils ont lieu à 11 heures du matin.
M. Armitage: Pendant la matinée du 11, nous rendons visite à l'opération de Louisiana Pacific. Nous pourrions faire en sorte que cette visite se termine avant 11 heures, et nous réunir dans un endroit approprié qu'on pourra choisir avec les représentants de la compagnie.
Le président: Peut-être pourraient-ils même être présents?
M. Armitage: Oui.
Le sénateur Spivak: Combien de temps faut-il pour se rendre de Swan River à Winnipeg?
M. Armitage: Ce n'est pas un vol direct; il y a une escale à Dauphin. Cela prend environ une heure et demie. C'est un vol charter, avec la compagnie Keystone Air.
Le sénateur Spivak: Et en auto, quelle est la distance à parcourir?
Le président: Par l'autoroute, ce n'est pas très long.
M. Armitage: On m'a dit qu'il faudrait environ six heures pour aller de Winnipeg à Swan River. Nous pouvons soit prendre un vol direct pour Swan River, ou prendre un vol sur Dauphin pour raccourcir notre trajet de trois ou quatre heures; puis nous pourrions faire le reste du chemin en voiture à partir de Dauphin.
Le sénateur Spivak: Quelles sortes d'avions prend-on pour aller à Dauphin?
M. Armitage: Le même genre que celui qui part de Swan River.
Le sénateur Spivak: Vous pourriez vérifier auprès des fonctionnaires là-bas, car ils prennent ces avions constamment.
Le président: Devrions-nous avoir une motion à propos de notre voyage de Swan River à Dauphin, à savoir si nous voulons traverser la forêt en voiture?
Le sénateur Spivak: Je propose la motion.
Le sénateur Taylor: Vous voulez dire nous rendre en auto de Dauphin à Swan River plutôt que de prendre l'avion à partir de Dauphin?
Le sénateur Spivak: Nous prendrions l'avion pour aller à Dauphin.
Le sénateur Taylor: Un arbre de la forêt boréale est tout à fait semblable à Peace River et au Yukon ou à Terre-Neuve. Nous n'allons pas voir grand-chose.
Le président: Je suis proche de la terre et j'aimerais donc pouvoir traverser la forêt en voiture et pouvoir la voir de mes yeux.
Le sénateur Spivak: J'aimerais prendre l'auto de Winnipeg.
M. Armitage: L'un des témoins qui étaient sur la liste au départ mais dont le nom n'a pas été retenu après les consultations initiales était d'avis que ce serait une façon intéressante et appropriée d'examiner la zone qui doit faire l'objet d'une coupe pour les opérations de Swan River. Ce témoin nous a aussi dit que le président allait recevoir une lettre d'un des témoins qui figurent à la liste, Mme Eilene Lynxleg. Elle est membre de l'un des groupes des Premières nations qui habite là-bas et veut nous inviter à lui rendre visite.
Le président: Honorables sénateurs, êtes-vous pour la motion du sénateur Spivak portant que nous allions en voiture de Swan River à Dauphin?
Des voix: D'accord.
Le président: Adoptée.
En ce qui a trait à l'itinéraire, voulez-vous qu'on voit la Commission canadienne du blé le 12? Le sénateur Eugene Whelan a dit qu'il aimerait bien être présent; il a dit qu'il pourrait prendre l'avion pour se joindre à nous.
M. Armitage: Nous avons un poste au budget de notre mandat d'agriculture pour cette visite à la Commission canadienne du blé. Nous pourrions demander à d'autres sénateurs qui ne sont pas membres du groupe de travail sur la foresterie de se joindre à nous pour les rencontres avec la Commission canadienne du blé.
Le président: Ce qui importe en l'occurrence c'est de leur communiquer les coordonnés pour qu'ils puissent saisir l'occasion s'ils le désirent.
M. Armitage: Il nous faut une motion pour autoriser la présence de nos adjoints de recherche Mme Dewetering et M. Fréchette.
Le sénateur Hays: Je propose la motion.
Le président: D'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le président: Adoptée.
Le sénateur Taylor: Les opinions sont partagées comme vous le savez à propos de la Commission du blé. Nous pouvons sans doute allouer encore une demi-heure ou trois quarts d'heure maximum à ceux qui sont contre la Commission du blé, pro-commission et anti-commission. Pensez-vous que c'est trop?
Le sénateur Spivak: Je pense que la Grain Exchange devrait certainement figurer à la liste de ceux que nous entendrons. Voulons-nous vraiment entendre Farmers for Justice?
Le sénateur Taylor: Ce n'est pas à eux que je pensais, mais bien à l'Association des producteurs de blé et des producteurs d'orge.
Le sénateur Spivak: Nous avons déjà formé une opinion, n'est-ce pas? Peut-être que non.
Le sénateur Taylor: Nous pensons aussi connaître l'opinion de la commission.
Le président: Avons-nous le temps d'entendre les diverses parties à ce débat très controversé? Nous pouvons presque prédire les positions des divers groupes avant de les entendre.
Le sénateur Taylor: Au cours des quelques derniers mois, j'ai fait une tournée en Alberta pour parler aux gens. Quand je rencontre les représentants de la commission, le même soir, alors que je suis sur le point de m'endormir vers minuit, quelqu'un m'appelle pour me dire: «Pourquoi n'avez-vous pas rencontré les producteurs?» Si je rencontre les producteurs, ce sont des gens de la commission qui m'appellent. Les nouvelles se répandent à une allure vertigineuse.
Le président: Vous devez les rencontrer le même jour. Serait-il possible vu le court temps dont nous disposons de les entendre au même moment?
M. Armitage: Ce mardi matin nous devons inclure des témoins supplémentaires qui désirent nous parler du côté du Manitoba et qui ne figurent pas encore à notre itinéraire. Nous allons être un peu pressés. Je pense que le comité serait mieux servi s'il les rencontrait à Winnipeg le mardi matin plutôt que d'essayer d'inclure tout le monde le samedi. J'espérais inclure quelques personnes supplémentaires le mardi matin; vous pourriez rester là-bas jusqu'au mercredi.
Le sénateur Taylor: Je n'ai pas si envie que cela d'entendre les deux côtés.
M. Armitage: Vous pouvez si vous le désirez prolonger votre séjour là-bas de quelques jours. Il faut voir dans quel état vous serez à la fin d'un voyage assez ardu; est-ce que vous en aurez l'énergie?
Le sénateur Spivak: Certains d'entre nous aurons passé la semaine précédente à voyager avec le comité de l'énergie et ensuite toute la semaine sera consacrée à ce voyage. Je pense que nous aurons sans doute à nous rendre au Sénat le mardi soir. Vous pouvez organiser les choses comme vous le voudrez, mais l'avion que nous devons prendre pour quitter Winnipeg et nous rendre au Sénat part vers 6 ou 7 heures.
Le sénateur Rossiter: Nous n'allons pas siéger cette semaine-là.
Le sénateur Spivak: Vous avez raison; nous ne siégeons pas cette semaine-là.
Le président: En ce qui a trait au groupe d'agriculteurs, je me demande s'ils ne devraient pas comparaître devant le comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes. Normalement lorsqu'ils viennent, ils demandent aussi à être entendus par le comité sénatorial. Avons-nous de l'information à ce propos? Nous entendrons les représentants des pools, des producteurs de blé, d'orge, et les producteurs céréaliers de l'Ouest; ils vont tous comparaître. Je suis sûr qu'ils comparaîtront aussi devant le comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire parce qu'ils ont certaines préoccupations. Vaudrait-il mieux que nous les entendions ici à Ottawa après avoir entendu la Commission du blé, et que nous leur demandions de comparaître ensuite au Sénat? Ainsi, un plus grand nombre de sénateurs du comité de l'agriculture pourraient être présents pour les entendre.
Le sénateur Taylor: Cela me convient.
Le président: Cela vous semble-t-il raisonnable?
Le sénateur Taylor: Oui, je propose que nous adoptions votre suggestion.
Le président: Pour?
Des voix: D'accord.
Le président: Adoptée.
Le sénateur Taylor: J'ai une question à propos du lundi soir, entre le 4 et le 5. Est-ce que nous sommes à Edmonton?
M. Armitage: C'est exact, les deux jours.
Le sénateur Taylor: Je n'en étais pas sûr. Selon l'itinéraire, il n'est pas clair que nous revenions à Edmonton.
M. Armitage: Désolé.
Le sénateur Taylor: Ne vous en faites pas. De fait, vous allez passer devant chez moi. Peut-être vais-je vous servir quelques bons produits agricoles.
Le président: Le deuxième point à l'ordre du jour est la constitution de notre délégation. Il nous faut une motion pour pouvoir inclure le sénateur Corbin.
M. Armitage: Le sénateur Taylor nous a indiqué que le sénateur Corbin aimerait bien accompagner la délégation. Comme il n'est pas membre de notre comité, je pense qu'il serait approprié que le comité propose une motion pour absorber ses dépenses, si vous le désirez.
Le président: Y a-t-il des commentaires?
Le sénateur Spivak: Ce n'est pas inhabituel, n'est-ce pas?
M. Armitage: Rien ne nous en empêche.
Le sénateur Spivak: Il pourrait devenir membre du comité à cette fin, je pense. J'en fais la proposition.
Le président: Tous ceux qui sont pour?
Les honorables sénateurs: D'accord.
Le président: Adoptée. Le comité sera constitué du président et des sénateurs Hays, Anderson, Corbin, Spivak et Taylor. Sommes-nous convenus?
Honorables sénateurs: D'accord.
Le président: Adopté.
Pour les sénateurs qui n'ont pas encore rencontrer Barbara Robson, Barbara est responsable de nos relations avec les médias. Elle a préparé un communiqué de presse. Je vais maintenant donner la parole à Barbara pour qu'elle puisse vous en parler.
Mme Barbara Robson, expert-conseil en communication: Sénateurs, j'ai rédigé ce communiqué de presse dans l'optique d'une tournée de consultation plutôt que de parler de l'étude au complet, en partie parce que je pense que vous voulez répondre à certaines questions en ce qui a trait à l'étude, les audiences à Ottawa, les mémoires écrits et certains autres éléments que vous voudrez peut-être prendre en considération, et nous pourrons émettre un deuxième communiqué de presse plus tard. Avec celui-ci, nous aurons respecté ce qu'on considère généralement être le devoir d'informer le public et les médias à propos de la dépense des deniers publics, et nous les aurons intéressés au travail du Sénat.
Dans le rapport qui porte sur la stratégie de communications, je propose d'autres éléments en ce qui a trait à votre façon de traiter avec les médias, le public et les autres intervenants. Toutefois, je suggère que l'on distribue ceci à ceux qui figurent sur la liste ci-jointe. Le communiqué explique où vous irez et quand, ainsi que le pourquoi de votre voyage, en faisant allusion aux objectifs nationaux en matière de foresterie renouvelable et de la protection de la biodiversité, reconnaissant que l'industrie et les gouvernements à divers paliers ont tenté de tenir compte de ces sujets et ont pris des mesures récemment à cet égard, et que le comité espère faire avancer ce travail en effectuant cette étude.
Vous pourriez ensuite exposer votre mandat. On s'est un peu occupé du fait que le Sénat semble se pencher sur des préoccupations de compétence provinciale. Je pense que nous devrions traiter de cette question. J'en parle au paragraphe en haut de la page 2 en faisant allusion surtout à l'entente-cadre de coopération en foresterie des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.
Vous pouvez proposer des changements au texte si vous le désirez, sénateurs. Il s'agit d'une ébauche que je soumets à votre considération. Le communiqué, sera envoyé, comme la liste de distribution l'indique, à tous les députés et aux sénateurs, ainsi qu'à tous les ministères provinciaux intéressés, aux organismes forestiers et aux groupes environnementaux qui s'intéressent aux questions forestières, à tous les membres des groupes ou témoins individuels que vous allez rencontrer de façon officieuse, et à un certain nombre de médias.
Si le communiqué devait être diffusé au Canada NewsWire, cela coûterait plus cher et le comité désire peut-être voir s'il veut dépenser ses fonds à cette fin. Cela ne coûte rien d'envoyer une copie par télécopieur à la Presse canadienne et au service de nouvelles de Southam. C'est ensuite à eux de distribuer le communiqué s'ils le désirent. L'avantage du Canada NewsWire est que les messages sont transmis directement aux salles de nouvelles des journaux quotidiens. Comme j'ai déjà travaillé dans une salle de nouvelles, je sais que ce qui entre par le biais du Canada NewsWire n'attire pas beaucoup l'attention, mais peut-être voulez-vous vous demander si vous désirez allouer des fonds à ce genre de distribution.
M. Armitage: À propos du Canada NewsWire, je m'en suis servi récemment pour le comité mixte spécial sur le code déontologique. Pour 1 000 $, nous avons pu diffuser notre message à deux reprises. C'est à vous de juger si vous pensez que c'est de l'argent bien dépensé. Nous avons émis un communiqué de presse dont la diffusion nous a coûté 1 000 $ et il a été repris par deux médias.
Le président: Je pense qu'il nous faut une motion.
Le sénateur Spivak: J'ai un petit problème et je suis sans doute la seule à l'avoir; la Constitution parle-t-elle vraiment de «ressources forestières»? Même si c'est le cas, est-ce que nous voulons dire cela? On dit ici: «Bien que selon la Constitution canadienne les ressources forestières relèvent exclusivement de la responsabilité des gouvernements provinciaux», mais bien sûr tout ce qui touche le commerce est de compétence fédérale, et le développement industriel et régional, ainsi que l'environnement, sont des domaines de compétence partagée. Je ne sais pas ce que dit la Constitution. Toutefois, je me demande s'il faut vraiment parler de responsabilités «exclusives». Je soulève la question parce que c'est un sujet délicat. Pourquoi mettre l'emphase là-dessus, même si c'est le cas?
Le président: «Le Sénat vient fureter», a relevé le Alberta Report.
Le sénateur Spivak: Nous avons répondu à cet article. Nous vous avons transmis cette lettre.
Le président: J'en ai pris connaissance.
Le sénateur Spivak: Croyez-vous que nous devrions supprimer le verbe «réserve»?
Le sénateur Hays: Je ne suis pas sûr que ce soit approprié. Comme vous le savez, il y a déjà eu un ministère fédéral des forêts qui a été démantelé pour être remis sur pied à la fin des années 80. Corrigez-moi si je me trompe, mais ne s'agit-il pas d'un secteur où les compétences sont simultanées, à l'instar de l'agriculture? Je ne suis pas sûr qu'il en soit précisément question dans cet article de la Constitution, mais nous pourrions peut-être vérifier.
Le sénateur Spivak: Nous pourrions peut-être reformuler le paragraphe de manière à ce qu'il ne donne pas l'impression que nous nous rendons là-bas pour fureter. Même si c'est vrai, nous ne voulons pas insister là-dessus parce que nous sommes en terrain miné en ce qui a trait à la perception. Je ne suis pas le moins du monde sur la défensive quand on parle d'une étude sur les forêts, qui représentent 90 milliards de dollars en ce qui a trait aux exportations et dont les nombreuses utilisations ne se limitent pas à l'exportation forestière. La province veut exploiter ces forêts. Je m'inquiète au sujet de la perception. Qu'en pensez-vous?
Le président: Quelqu'un peut-il proposer une motion portant que nous acceptons ce communiqué dans sa forme actuelle et que nous nous en remettons à Mme Robson?
La sénateur Taylor: Je ne veux pas présenter une motion. Je veux que nous poursuivions la discussion.
Premièrement, j'aimerais féliciter les gens des communications en ce qui a trait à une lettre signée par le sénateur Spivak et qui figurait dans le rapport. Je crois qu'il s'agit là d'un excellent texte. C'est beaucoup mieux que ce que je rédige étant donné que j'ai le don de me mettre les pieds dans les plats.
Je veux parler de ce paragraphe. Je partage la crainte exprimée par le sénateur Spivak au sujet de l'utilisation de l'expression «réserve... la responsabilité». Cela semble beaucoup trop lourd de sens, je crois, par rapport à ce que ça devrait l'être.
Deuxièmement, dans ce paragraphe, nous passons sous silence la responsabilité du gouvernement fédéral en matière de pêche et d'environnement, des secteurs étroitement liés aux forêts. En fait, les pêches sont le seul hameçon que possèdent la plupart des environnementalistes dans nos provinces à l'heure actuelle pour essayer de mettre un terme à la surexploitation des forêts. Ils recourent toujours aux pêches, à une compétence fédérale, même pour le poisson d'eau douce.
Le sénateur Spivak: Les forêts et les pêches sont des domaines connexes.
Le sénateur Taylor: C'est exact. Je croyais que nous devrions peut-être y ajouter l'environnement et les pêches. Je supprimerais le verbe «réserve». J'en fais la proposition.
Le président: Les sénateurs sont-ils d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
En ce qui concerne les audiences à Ottawa, on a laissé entendre que nous n'aurons pas le temps de les tenir avant que le comité entreprenne sa tournée et que nous serions mieux informés si nous les tenions après coup. Voulez-vous en discuter? Nous serions mieux informés et cela donnerait du temps aux personnes qui veulent se tenir au courant de ce qui se passe. Cela leur donnera aussi l'occasion de demander à comparaître devant le comité du Sénat.
Le sénateur Spivak: Oui. Je le propose.
M. Armitage: Nous aimerions aussi que les membres du comité nous disent combien de temps ils voudraient consacrer à ces audiences. On a laissé entendre, dans le cadre de conversations avec les attachés de recherche, qu'il faudrait peut-être consacrer deux journées complètes d'audience à cette question. Je me demande si le comité veut réserver, pour une semaine précise, des jours où le Sénat ne siège pas normalement, par exemple le lundi ou le vendredi ou quelque chose du genre.
Le sénateur Taylor: L'idée me plaît. Nous devons couvrir l'Ontario et le Québec, qui sont largement couvertes par notre forêt boréale. Je crois que s'il faut deux jours, nous pourrions commencer par une journée et voir ce qu'il en est. Si l'intérêt est le même ici que celui que nous avons suscité dans l'Ouest, il nous faudra deux jours. Il se peut que nous ne puissions rencontrer tout le monde en une seule journée. Nous devrions peut-être nous en remettre à vous: une pleine journée et si nous avons besoin de plus que cela, nous pouvons toujours ajouter une autre séance.
M. Armitage: Préférez-vous un jour de la semaine en particulier?
Le sénateur Spivak: Le lundi.
Le président: Êtes-vous d'accord alors pour que nous essayions de nous réunir un lundi?
Le sénateur Rossiter: Des lundis ou des vendredis consécutifs.
Le sénateur Taylor: J'ai les lundis et les vendredis en horreur. Pouvons-nous choisir un mercredi ou un mardi?
Le sénateur Spivak: Nous verrons.
Le sénateur Taylor: À l'heure actuelle, n'avons-nous pas le même nombre de représentants des deux côtés de la Chambre? Il nous faudrait toutefois obtenir une permission spéciale pour tenir des séances.
Le président: Le prochain point à l'ordre du jour porte sur les travaux futurs du comité. Nous avons déjà discuté d'un voyage à Washington, de la politique agricole du Canada et d'autres pays membres de l'OCDE de même que de la sécurité alimentaire. Nous pourrions commencer par Washington.
Le sénateur Spivak: C'est très dommage que nous n'y soyons pas allés...
Le président: Plus tôt?
Le sénateur Spivak: Non, simplement pendant les élections. Irons-nous à Washington pour examiner la nouvelle loi agricole américaine ou pour nous faire dire ce qu'il en est des questions commerciales? Qu'avez-vous en tête? Je sais que nous pouvons discuter de tous ces sujets, mais que pensez-vous vraiment?
Le président: Personnellement, je crois que les questions commerciales sont les plus importantes. À ce que j'entends dire, les Canadiens n'ont pas encore fait la promotion de cette idée, mais les prix des céréales sont en chute libre. Ce sont nos agriculteurs qui me l'ont dit.
Le sénateur Spivak: Quelle en est la raison?
Le président: Je n'en connais pas vraiment la raison. Ils disent que la récolte a été bonne en Argentine de même qu'en Australie. C'est peut-être que les pays qui achètent les céréales n'ont pas d'argent, mais les agriculteurs me disent dans l'ensemble que le prix du blé dur a baissé de 7,81 à 3,80 $ et que cela n'a pas varié depuis les sept ou huit dernier mois. Ce ne sont toujours pas les chiffres que nous obtenons de la Commission du blé. Nous avons lu des articles dans les journaux où ils posent ces questions. Je crois que les échanges commerciaux revêtiront de l'importance tout comme cette question du marché global. Je n'ai pas l'impression que les Américains ont beaucoup changé leur façon de procéder.
Comment avez-vous suivi cela, sénateur Hays?
Le sénateur Hays: Monsieur le président, en ce qui concerne les céréales, il reste encore, selon moi, des problèmes à régler. J'ai lu la semaine dernière dans le Western Producer que le Congrès songe à une enquête commerciale internationale ou de la Commission du commerce international en ce qui a trait aux importations de boeuf en provenance du Canada. Nous avons toute une série de choses en cours aux États-Unis en ce qui concerne ce qu'on y appelle, je pense, la production planifiée qui remplacerait leurs décrets sur la mise en marché, l'équivalent de notre système de gestion de l'offre.
Il y a toujours beaucoup à apprendre au sujet de la loi agricole américaine et nous avons certaines questions intéressantes en ce qui concerne l'ALÉNA et le GATT. Je ne crois pas que le groupe spécial extraordinaire ait rendu une décision finale en ce qui a trait à l'élimination progressive des tarifs dans l'industrie avicole et dans l'industrie laitière, et il y a beaucoup d'autres sujets d'intérêt. Nous avons toujours beaucoup de dossiers à traiter avec les États-Unis et c'est encore le cas cette fois-ci.
En ce qui concerne la sécurité alimentaire, la Banque mondiale est établie à Washington. Un certain nombre d'autres organismes interviennent dans ce dossier. Ce serait l'occasion de faire quelque chose à cet égard.
Le président: Je ne crois pas que nous manquions de sujets. Le problème sera d'établir le calendrier et de parvenir à rencontrer les bonnes personnes. En toute franchise, à cet égard, j'aimerais que nous rencontrions de nouveau Eugene Moose. Vous souvenez-vous de lui?
Le sénateur Hays: Oui.
Le président: On nous dit que s'il décide que les États-Unis vont vendre des céréales, ils en vendront. S'il est d'avis contraire, ils n'en vendront pas. Je le trouve direct, intéressant et quelque peu impulsif.
Le sénateur Hays: Eugene Moose est le sous-secrétaire de l'Agriculture chargé du Export Enhancement Program, le programme américain visant à stimuler les exportations de blé.
Le président: Il se trouve que j'ai demandé à un représentant du congrès si Eugene Moose avait bien la compétence qu'on lui attribue et il m'a répondu: «S'il décide que nous vendons des céréales, nous en vendons, et s'il décide le contraire, nous n'en vendons pas».
À quel moment irons-nous?
M. Armitage: Selon le comité de direction, la fin de février pourrait convenir.
Nous pourrions consulter le calendrier parlementaire et songer à organiser des séances d'information à l'avance.
Le sénateur Spivak: Y a-t-il un congé parlementaire à peu près à ce moment-là?
M. Armitage: En février, vous serez à peine de retour du congé des fêtes qui se prolonge jusqu'à la première semaine de février.
Le président: J'entends le sénateur Hays proposer des élections en février.
Le sénateur Hays: Je n'ai rien entendu de pareil et je ne l'ai pas dit non plus.
Le sénateur Spivak: J'ai entendu parler d'avril. Pourquoi ne pas faire ce voyage pendant une semaine de relâche, peut-être la première semaine de mars, plutôt que pendant une semaine où le Sénat siège?
M. Armitage: On pourrait aussi partir pour un week-end prolongé?
Le sénateur Spivak: D'accord.
M. Armitage: Tout dépend de la disponibilité des gens que nous voulons rencontrer à Washington.
Le président: Normalement, pouvons-nous organiser des rencontres durant le week-end? Ceux que nous voulons rencontrer seront-ils à Washington à ce moment-là?
M. Armitage: Le comité de direction a demandé au personnel de produire un plan de travail à ce sujet, que nous présenterons avant Noël. Il tiendra compte de nos contacts à Washington.
Le sénateur Spivak: Nous ne devrions pas partir toute une semaine en février alors que les travaux viennent à peine de recommencer. Il vaudrait mieux attendre un congé pour partir.
Le président: C'est une observation judicieuse. Le comité sera-t-il créé? Si le gouvernement reste le même, il n'y aura probablement pas beaucoup de changements, mais il risque d'y en avoir pas mal s'il y a un nouveau gouvernement.
Le sénateur Hays: L'investiture présidentielle a lieu en janvier. En supposant que l'administration sera la même, les changements ne devraient pas être importants, quoiqu'on ne sait jamais.
Nous échangeons surtout avec des membres du Congrès, bien que pas exclusivement. S'il y a une nouvelle administration, il est certain que l'influence d'Eugene Moose peut changer.
Le 5 novembre est aussi un jour d'élections pour le Congrès. Je ne pense pas qu'il y ait de décalage entre l'entrée en fonction des représentants et l'investiture présidentielle, et j'imagine que les travaux auront repris.
Le sénateur Spivak: Puis-je proposer un autre dossier que nous pourrions examiner là-bas? Je sais que vous en mourrez d'envie. Vous connaissez le grand intérêt que soulève la question des pesticides dans les aliments. J'ai rencontré Theo Colborn à l'heure du lunch, grâce à l'amabilité du comité de la Chambre des communes. Le comité discute des perturbateurs endocriniens et des pesticides. Apparemment, la question relève en partie de l'organisme, je ne sais pas lequel, qui administre...
Le sénateur Hays: C'est la Food and Drug Administration aux États-Unis.
Le sénateur Spivak: Je me demande si nous ne pourrions pas inscrire cette question au programme de nos discussions. Je sais qu'on essaie de faire quelque chose ici au sujet des pesticides. On élabore actuellement une mesure législative, mais c'est un long processus. Je ne sais pas comment on l'appelle.
Le sénateur Hays: Est-ce le registre sur les pesticides?
Le sénateur Spivak: Quelque chose comme ça. Je ne me rappelle pas du titre du projet de loi, mais je sais que cela a trait aux aliments et aux pesticides.
Le président: Vous voulez que nous rencontrions des responsables de la question.
Le sénateur Spivak: À Washington, oui.
Le président: Y a-t-il autre chose?
Le sénateur Taylor: J'aimerais signaler, pour que vous ne pensiez pas qu'il y a unanimité, que ça ne m'ennuie pas d'aller à Washington pendant que le Sénat siège, au cas où vous vous demanderiez si le voyage doit être organisé la semaine ou en fin de semaine.
Le président: Je pense qu'il faudrait y aller au moment où les gens que nous voulons voir seront prêts à nous rencontrer, autrement il n'y a pas lieu de s'y rendre.
Le sénateur Taylor: La question des quotas sur le bois d'oeuvre déborde sur l'agriculture, les oeufs et le reste. Nous pourrions en parler également.
Le sénateur Spivak: Vous avez raison. Il ne faudra pas l'oublier.
Le président: Nos attachés de recherche ont entendu les discussions là-bas et je suis sûr qu'ils auront beaucoup de suggestions à nous formuler.
Nous passons au point suivant, «autres affaires». D'autres sujets se présenteront en agriculture une fois que nous aurons organisé ce voyage.
En parlant avec le ministre de l'Agriculture du Manitoba, j'ai appris que les gens de l'Ouest craignaient que les prix du transport ne triplent avec la disparition du tarif du Pas du Nid-de-Corbeau. C'est un problème très grave. En Alberta, c'est avantageux parce que les Albertains peuvent expédier leurs céréales à un prix moindre.
Au Manitoba, le ministre a laissé entendre que les producteurs n'auraient peut-être pas d'autre choix que d'expédier leurs produits par les États-Unis en raison de la hausse des coûts. Il avait des chiffres à ce sujet. Je me rappelle qu'il a été question d'une augmentation de 300 p. 100 par rapport au prix actuel. Il a comparé les prix avec ceux en vigueur à Calgary, qui sont moins élevés et présentent un net avantage. Roy Romanow, de la Saskatchewan, s'occupe aussi de ce dossier.
Le sénateur Spivak: Monsieur le président, pensez-vous que nous devrions écrire au ministre pour lui signaler nos préoccupations une fois que nous aurons obtenu des renseignements sur la situation au Manitoba?
Le président: J'aimerais obtenir les renseignements voulus. J'aimerais que le ministre de l'Agriculture de la Saskatchewan et celui du Manitoba nous fournissent des chiffres, alors qu'il semble que l'Alberta n'est pas trop préoccupée en raison de la distance avec le lac...
Le sénateur Taylor: Je pense que l'Alberta peut avoir un certain nombre de préoccupations. Il faut se rappeler que les aires d'alimentation du bétail étaient concentrées en Alberta dans l'ancien système. Comme les céréales sont maintenant meilleur marché au centre du Manitoba, les centres d'alimentation des bovins pourraient se déplacer au Manitoba étant donné que les céréales y sont un peu moins chères et qu'il y a de l'eau. Le conditionnement des viandes peut même être effectué plus près, à Chicago.
La situation ne devrait pas être aussi désastreuse qu'au Manitoba dans le cas de la culture des céréales fourragères. Les choses devraient bien aller même s'il pourrait y avoir quelques pertes.
Le président: Après la fin de novembre, on devrait peut-être inviter certaines personnes du domaine à comparaître.
Le sénateur Spivak: En passant, j'aimerais savoir si ces changements touchent ou toucheront le porc. J'ai le sentiment que c'est le cas au Manitoba.
Le sénateur Taylor: Est-ce le cas?
Le président: L'industrie du porc est importante au Manitoba.
Le sénateur Spivak: Elle est importante et détruira le système d'alimentation en eau du Manitoba. J'aimerais examiner les prix du transport. Il faudrait qu'ils soient plus avantageux pour que nous puissions cultiver des céréales et non pas élever des cochons.
Le sénateur Taylor: Vous avez un parti pris.
Le sénateur Spivak: Non. C'est un problème pour l'eau de consommation.
Le sénateur Taylor: Nous sommes tous carnivores et nous mangeons du boeuf et du porc. Il serait logique de les élever au Manitoba.
Vous parlez au représentant d'une famille pionnière de cette industrie.
Le sénateur Spivak: Je m'excuse, mais la viande est infecte. Je suis de l'avis de k.d. lang à ce sujet.
Le sénateur Taylor: Son père, dans les années 30 et 40, a été l'un des premiers à découvrir la meilleure zone d'alimentation du bétail au Canada. Je pense que votre père et votre oncle en ont établi jusqu'à Toronto.
Le président: Sénateur Taylor, pour éviter que nous nous éloignions du sujet, je vais mettre fin à ces digressions.
Le sénateur Taylor: Je voulais simplement signaler que les prix des céréales influent sur prix des aliments pour animaux.
Le président: Il y a sûrement des problèmes à ce sujet.
Le sénateur Taylor: Sénateur, vous devez aussi aller nourrir les animaux.
Le président: C'est ce que je fais.
Le sénateur Spivak: Je propose que nous demandions aux attachés de recherche de nous fournir les données nécessaires. Une fois que nous les aurons, nous pourrons écrire au ministre pour lui faire part de nos préoccupations et voir ce que sera la réaction. Il faut faire quelque chose.
Le président: Cela vous convient-il?
Le sénateur Spivak: Je propose que nous demandions aux attachés de recherche d'examiner la situation. Parlez-vous du nord de l'Alberta?
Le sénateur Taylor: C'est au sud que les animaux sont nourris.
Le sénateur Spivak: Nous parlons des prix du transport. Le problème peut exister dans la région de Peace River aussi bien qu'en Saskatchewan et au Manitoba.
Le président: Le problème est plus manifeste dans l'est de la Saskatchewan et au Manitoba. En fait, Moose Jaw est à mi-chemin entre Thunder Bay et la côte Ouest.
Le sénateur Spivak: Nous pourrions aussi en discuter avec les représentants de la Commission du blé quand nous irons à Winnipeg.
Le président: Je suis sûr qu'ils seront renseignés sur le sujet.
La séance est levée.
OTTAWA, le jeudi 28 novembre 1996
Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 9 h 30 pour délibérer sur son ordre de renvoi, portant sur l'étude de l'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts au Canada, examen de la mission d'étude sur la forêt boréale dans les Prairies.
Le sénateur Leonard J. Gustafson (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, l'objet de notre séance est de rendre compte aux membres du comité de la mission d'étude sur la forêt boréale dans les provinces des Prairies. Les sénateurs Taylor et Spivak m'ont accompagné dans cette mission. Malheureusement, le sénateur Taylor est absent. Je crois savoir qu'il se trouve au Groenland, et aussi qu'il est très bien informé de l'état de l'industrie, puisqu'il a été critique du gouvernement de l'Alberta en matière de forêts.
Nous avons visité trois grandes usines, celles d'Athabasca, de Meadow Lake et de Swan River. Deux d'entre elles produisent de la pâte, et celle de Swan River, au Manitoba, produit des panneaux à copeaux orientés. Toutes ces usines sont neuves, car elles ont été construites au cours des quatre dernières années. La plupart sont en exploitation depuis seulement deux ans. Ce sont des installations considérables.
L'usine d'Athabasca, par exemple, qui appartient à Alberta Pacific, a coûté 1,5 milliard de dollars. Elle appartient majoritairement à des intérêts japonais.
Le sénateur Rossiter: Sa construction a donné lieu à une certaine controverse.
Le sénateur Spivak: À une très vive controverse.
Le président: C'est la taille de l'usine qui a prêté à controverse. Lors de notre passage, 75 camions livraient des grumes 24 heures par jour à l'usine. Sa production est phénoménale.
Le sénateur Rossiter: D'où vient le bois?
Le président: De centaines de milles à la ronde. Même de la Saskatchewan. La plupart des arbres sont abattus sur des terrains du domaine public, et une certaine partie sur des boisés privés.
Le sénateur Rossiter: Est-ce qu'il y a du bois qui vient de la Colombie-Britannique?
Le sénateur Spivak: Notre adjoint a dit, je crois, que la zone de coupe était moins grande que le Nouveau-Brunswick. Ce sont les boisés privés de l'Alberta qui fournissent du bois à la Colombie-Britannique, parce que cette province en manque. Ce n'est pas la Colombie-Britannique qui fournit du bois à l'Alberta. Les boisés privés sont presque épuisés. On y pratique la coupe à blanc pour alimenter les usines de Colombie-Britannique, où les règlements sont plus restrictifs.
Le président: C'est une usine géante.
Tout est automatisé, jusqu'au dernier détail. On nous a dit que 35 personnes suffisaient pour exploiter toute l'usine. Tout est informatisé, et deux ou trois personnes surveillent une pleine salle d'ordinateurs. Il faut voir cette technologie; c'est impressionnant.
La grande question est celle de la durabilité.
Nous avons aussi rencontré des Autochtones et des environnementalistes ainsi que des universitaires qui s'y connaissent dans ce domaine. Nous avons entendu des témoins qui nous ont beaucoup impressionnés.
J'invite le sénateur Anderson à faire part de ses impressions au comité.
Le sénateur Anderson: Comme je n'ai pas encore reçu tous mes documents, je ne peux pas livrer un rapport complet, mais je tiens à faire quelques observations.
Je conviens avec le sénateur Gustafson que les trois usines que nous avons visitées sont très impressionnantes. C'était la première fois que je visitais des installations semblables.
J'ai entendu dire que, à Miramichi, au Nouveau-Brunswick, la Eagle Brand Industries Limited avait une usine de panneaux à copeaux orientés, et que 12 bandes indiennes en sont propriétaires à 10 p. 100.
Les audiences nous ont beaucoup donné à réfléchir. La question prête quelque peu à controverse; et c'est peut-être peu dire.
Ainsi, à Athabasca, certains de nos témoins ont dit que les forêts ne sont pas exploitées de façon durable et que, pour l'usine de l'Alberta Pacific, il faut aller chercher le bois très loin, même en Saskatchewan. Un forestier nous a dit que le total des coupes autorisées chaque année en Alberta était trop élevé. Nous avons également appris que l'exploitation forestière avait stimulé de façon extraordinaire l'économie du nord de l'Alberta. Ce forestier estime que l'Alberta Pacific est en avance sur le gouvernement provincial en matière de méthodes de gestion forestière.
Un membre de l'Alberta Fish and Game Association nous a dit que son association s'opposait vigoureusement à ce que le gouvernement fédéral cède aux provinces les compétences en matière de pêche.
Un groupe de représentants des Premières nations venus des réserves situées très au nord d'Edmonton nous ont dit que la population, dans cette région, va doubler en 20 ans, et que le chômage y est excessivement élevé: 95 p. 100. Autre donnée intéressante, 87 p. 100 de la population reste dans les réserves. L'exode est très faible.
Sur le plan social, il a été très troublant d'apprendre que les hommes de ces collectivités n'ont guère de but dans la vie et que les femmes font toujours la majeure partie du travail.
On nous a dit aussi qu'il n'était pas tenu compte des Métis dans la stratégie albertaine de conservation des forêts. Nous y reviendrons plus tard.
Après ce voyage de 10 jours, je possède bien les notions de coupe à blanc, de récolte sélective, de plan de sylviculture et de contamination des sources d'eau.
J'ai trouvé particulièrement intéressant d'entendre parler des centres d'excellence qui ont été mis sur pied aux quatre coins du Canada, grâce à un financement provenant du CSRNG, des provinces et du gouvernement fédéral. Il y a 23 universités qui participent, mais aucune du Nouveau-Brunswick ni de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous avons appris qu'on manquait beaucoup de données sur les méthodes d'exploitation forestière. Ainsi, on nous a dit qu'on avait fort peu de données pour montrer si les aires de coupes de 40 hectares étaient préférables à des aires de 200 hectares.
On nous a dit que la formation intensive en gestion sera une grande priorité pour ces centres d'excellence. Ils formeront les diplômés pour les préparer à travailler dans l'industrie forestière et la gestion des forêts.
Le sénateur Rossiter: Quels sont les centres qui travaillent le plus en sciences forestières?
Le sénateur Anderson: Celui dont nous avons entendu parler collabore avec l'Université de l'Alberta. Je ne peux rien dire des autres provinces, puisque je n'ai pas eu accès à cette information.
Le président: Merci, sénateur Anderson, de cet excellent compte rendu.
Le sénateur Spivak: Tout d'abord, j'ai été absolument renversée par le fait que tout le territoire, presque jusqu'au dernier pouce carré, a été attribué. Comme j'habite au Manitoba, j'avais l'impression que nous avions de vastes espaces inoccupés, mais c'est une erreur. Presque tout a été attribué.
Deuxièmement, l'exploitation se poursuit même dans des zones qui sont censées avoir été mises de côté. L'ampleur de l'exploitation est époustouflante. J'ignore combien de millions de mètres cubes de pâte produisent ces usines, qui tournent 24 heures par jour. On nous a dit qu'il suffisait de 45 personnes pour faire fonctionner ces énormes installations. Je parle de l'usine, pas de l'exploitation forestière. Cela a été pour moi une révélation.
Nous espérons que notre rapport sera aussi marquant que celui du sénateur Sparrow, Nos sols dégradés, dont on parle encore partout au Canada.
Ce qui m'a frappé, c'est que tous -- les compagnies forestières, les experts forestiers, les chercheurs et les environnementalistes -- nous ont dit qu'ils ne savaient pas vraiment ce qu'ils faisaient. Ils ne comprennent pas. Je ne veux pas dire qu'ils ne s'y connaissent pas en exploitation forestière, mais qu'ils ne comprennent pas comment gérer les forêts pour qu'elles soient une ressource durable, que les processus écologiques soient respectés et que les forêts reviennent à leur état initial. Ils ne veulent pas de coupes à blanc, soit le système à deux passages et le système de coupe en damier. Ils ne pensent pas que ce système soit approprié. Ils veulent maintenant une exploitation qui imite les incendies ou les perturbations naturelles. Mais ils ne savent pas ce qu'ils font. Ils tentent des expériences, mais, entre-temps, c'est toute la forêt qui y passe. Les connaissances scientifiques leur manquent, mais l'exploitation se poursuit.
Le sénateur Rossiter: Vous avez dit que le territoire avait été attribué jusqu'au dernier pouce carré. Que voulez-vous dire par là?
Le sénateur Spivak: Il s'agit de la zone verte. Par exemple, 58 p. 100 du territoire albertain est désigné comme «zone verte».
Le sénateur Rossiter: Comment est-ce qu'on attribue les zones de forêt?
Le président: L'Alberta Pacific a 10 p. 100 du territoire de l'Alberta.
Le sénateur Rossiter: Est-elle autorisée à couper les arbres dans certaines circonstances?
Le président: Elle a les droits de coupe.
Le sénateur Rossiter: Y a-t-il des restrictions?
Le sénateur Spivak: Dans toutes les provinces sauf en Colombie-Britannique, le gouvernement précise que les entreprises peuvent prélever des arbres en assurant un rendement soutenu. Elles peuvent couper chaque année l'équivalent de ce qui, selon elles, peut se régénérer. Le problème, c'est qu'elles n'ont jamais exploité de forêts boréales. Elles ne savent pas si les arbres vont repousser. Elles ne savent même pas comment il faut procéder, mais elles vont tout de même de l'avant.
Le président: Elles ont admis que c'était pour elles une expérience d'apprentissage. Elles devraient s'inspirer des modèles des incendies ou de culture. Elles admettent qu'elles sont simplement en train d'apprendre, comme tout le monde.
Le sénateur Spivak: Elles ne s'en cachent pas.
Le président: Nous avons entendu des chiffres différents de divers témoins au sujet de la durée du reboisement; cela va de 80 à 220 ans. Certains disent qu'il faut 200 ans, d'autres 140 pour qu'une forêt se régénère après un incendie.
Une idée semble très populaire en ce moment, dans les universités et l'industrie, celle de s'inspirer du modèle des incendies; on pense que la nature avait une façon de se gérer elle-même avant l'intervention de l'homme.
Le sénateur Spivak: Oui, mais ils ne savent pas comment s'y prendre.
Le président: Dans les cas où ils sont allés sur le terrain et ont reboisé, les arbres ne semblaient pas en très bonne santé. Je n'ai pas été impressionné.
Le sénateur Spivak: Les gouvernements provinciaux n'ont personne pour exercer une surveillance. Il y a des milliers d'acres en jeu.
Nous avons discuté avec des groupes autochtones du Manitoba. Lorsqu'il regarde la carte du Manitoba, le gouvernement provincial ne voit rien; il ne remarque rien. Mais les Autochtones nous ont dit que, en 1942, le gouvernement avait reconnu leurs droits de piégeage et d'utilisation traditionnelle du territoire. Ils ont maintenant tout l'équipement moderne. Ils se servent des systèmes de positionnement global. Ils savent comment utiliser le territoire. Au nord du Pas, on observe l'utilisation la plus intensive du territoire en Amérique du Nord par des Autochtones. Ils gagnent leur vie. Ils ne s'en vont pas dans les villes. Le gouvernement provincial dit: «Ce coin de territoire est pour Louisiana Pacific ou pour Repap.» Le gouvernement fédéral dit aux Autochtones qu'il a cédé la compétence des ressources naturelles aux provinces en 1932 et qu'ils doivent traiter avec elles. Les provinces les renvoient à Repap, qui refuse de traiter avec eux. Il se pose là d'intéressantes questions d'équité et de justice pour les Autochtones. Nous avons du pain sur la planche.
Cette étude sera très précieuse pour le Canada si nous arrivons à nous concentrer sur les faits et à les comprendre avant de tirer des conclusions. Nous ne devrions pas nous faire une opinion avant d'avoir les faits en main.
Nous tenons à connaître les lois provinciales, les coupes permises chaque année et les droits de coupe. Nous voulons savoir quel est le volume des coupes, quelles sont les grandes usines et les méthodes employées dans chaque province, les conditions dont sont assortis les contrats signés avec les grandes sociétés. Par exemple, quelles sont les concessions fiscales qui leur ont été consenties et quelles subventions reçoivent-elles? Quels sont les accords en place et quelle est leur durée? Nous voulons connaître la situation de l'emploi, car il y a beaucoup de chômage dans le secteur forestier. Le nombre d'emplois a énormément diminué à cause de l'automatisation.
Nous voulons savoir comment les diverses lois, quelles qu'elles soient, sont appliquées. Dans quelle mesure s'y conforme-t-on?
Nous voudrions savoir quel est l'état des connaissances sur l'exploitation forestière qui se pratique. Ceux qui travaillent dans ce secteur prétendent savoir ce qu'ils font et que les «amis des arbres» n'ont pas à intervenir. Pourtant, ils nous ont dit qu'ils ne savaient pas trop ce qu'ils faisaient. Nous voulons connaître l'état de leurs connaissances.
Vous avez tous reçu copie de ces demandes. Nous voulons que nos documentalistes donnent suite. M. Armitage a dit que la Bibliothèque du Parlement devrait nous aider.
Le président: À ce propos, le comité a demandé aux sénateurs Taylor et Spivak de proposer des lignes directrices qui pourraient régir l'action du comité. Nous vous en remercions.
J'ai été heureux non seulement de ces lignes directrices, mais aussi de la collaboration des membres du comité sénatorial permanent. Ils y ont mis tout leur coeur. Je tiens à remercier Barbara Robson et Blair Armitage, sans oublier Susan Corey, qui n'est pas parmi nous.
S'il n'y a pas d'autres observations, nous allons passer à l'article suivant à l'ordre du jour, les mesures à venir. Monsieur Armitage, auriez-vous l'obligeance de nous mettre au courant de la séance du comité directeur?
M. Blair Armitage, greffier du comité: Le comité directeur a tenu une réunion cette semaine et a convenu que ce n'était pas la bonne époque pour visiter des usines en Ontario et au Québec, même s'il entend que ces visites aient lieu le plus tôt possible. Les membres du comité voudront peut-être les faire ces visites de leur côté, plus librement. Le comité directeur a également exprimé l'avis que le comité devrait mener une série de séances pour rencontrer les représentants des ministères fédéraux qui participent à cette étude, soit Affaires étrangères, Commerce international, Affaires indiennes et Nord canadien, Environnement, Ressources naturelles et, enfin, Pêches et Océans. Nous voulions également entendre le point de vue des représentants des ministères provinciaux compétents en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, en Ontario, au Québec, au Nouveau-Brunswick et dans toute autre province qui pourra être proposée.
Le sénateur Rossiter: Pourquoi pas Terre-Neuve?
M. Armitage: Effectivement. Nous ajouterions Terre-Neuve et la Colombie-Britannique.
Nous devrions également recueillir l'opinion des organisations-cadres nationales qui se préoccupent d'environnement ou représentent l'industrie ou les groupes autochtones, et convoquer les témoins que la délégation a entendus dans les provinces, c'est-à-dire les groupes locaux qui ont un point de vue différent, étant en prise directe sur les problèmes.
Nous avons parlé de faire appel à un coordonnateur de la Bibliothèque du Parlement pour le reste de l'étude. Il a été proposé d'essayer de nous réunir tous les lundis ou tous les vendredis et aussi à d'autres moments libres dans la semaine. La période d'avant Noël est très prise par l'étude des projets de loi, et d'autres comités essaient également de conclure leurs travaux.
Le sénateur Rossiter: Normalement, nous n'allons pas reprendre avant février. Y aurait-il des objections à ce que nous nous réunissions vers la fin de janvier pendant deux ou trois jours d'affilée pour entendre un certain nombre de témoins?
Le président: Cela me causerait des difficultés en janvier.
Le sénateur Anderson: Nous avons discuté de la possibilité de nous réunir pendant la première semaine de février.
Le sénateur Rossiter: Oui, mais cela dépendait de la date de la reprise.
Le président: Nous ne pouvons prévoir des réunions que si les membres s'engagent à y assister.
Le sénateur Spivak: Nous devrions peut-être prévoir de demander au Sénat un report de la date de notre rapport, ce qui semble très fréquent. Pour l'instant, nous devons faire rapport au Sénat en mars.
Pourquoi ne pas essayer d'entendre quelques témoins maintenant? Au lieu de nous déplacer pendant la première semaine de février, nous devrions peut-être entendre des témoins cette semaine-là, quitte à nous déplacer pendant la deuxième semaine du mois. Toute une semaine de déplacements peut occasionner des difficultés à certains. Ce pourrait même être plus long, car il est important d'avoir le point de vue du reste du pays, maintenant que nous sommes allés dans l'Ouest.
Le président: Excellente idée. Ce serait probablement une grave erreur d'essayer de caser toutes ces activités et de produire un rapport dans des délais très courts.
On nous a parlé d'une bande indienne qui a une société d'exploitation. Nous devrions recueillir aussi le point de vue de ces gens-là.
Le sénateur Spivak: Si nous tenons des réunions auxquelles ne participent que deux ou trois membres, la transcription des délibérations pourra être mise à la disposition des absents.
M. Armitage: Vous êtes autorisés à recueillir des témoignages même s'il n'y a pas quorum.
Le président: Qu'en est-il de la recherche?
M. Armitage: Il vous faut l'autorisation du comité pour travailler avec le comité directeur afin d'inscrire des témoins au programme et d'assurer la coordination avec la Bibliothèque du Parlement, et cetera.
Le sénateur Rossiter: Je propose la motion.
Le président: Tous les membres sont en faveur?
Des voix: D'accord.
Le président: La motion est adoptée.
M. Jean-Denis Fréchette, Division de l'économie, Service de recherche, Bibliothèque du Parlement: Je voudrais des précisions sur que vous attendez du Service de recherche dans les travaux à venir. Voulez-vous qu'il assure le soutien des recherches du comité pour la partie du rapport qui portera sur l'Est?
Le sénateur Spivak: Non. M. Dan Shaw nous a déjà donné des statistiques. Nous devrions toutefois avoir un agent qui a travaillé aux comités des forêts ou de l'environnement. Il nous serait utile d'avoir deux ou trois personnes.
M. Fréchette: Très bien.
M. Armitage: Les agents de recherche qui sont maintenant avec nous, Barbara Robson et Susan Corey, sont en train de nous rédiger un résumé. Il faudrait les consulter.
Le président: D'autres points à soulever?
J'ai reçu du ministère de l'Agriculture de l'information sur le projet de loi C-34.
Selon notre leader au Sénat, ce projet de loi n'a pas encore été adopté à l'étape de la première lecture au Sénat.
Le sénateur Rossiter: Il a été renvoyé au comité des Communes, a été agréé à l'étape du rapport et a été lu pour la troisième fois. Il a été adopté le 5 novembre 1996.
Le président: Sauf erreur, on compte que le projet de loi sera adopté d'ici Noël. Il pourrait nous parvenir d'ici un jour ou deux. Le projet de loi C-34 porte sur les avances en espèces. Le gouvernement éprouve des problèmes dans le recouvrement de ces avances. Je crois que le montant en souffrance est d'environ 90 millions de dollars. Des montants plus faibles sont en souffrance depuis six ans. L'adoption du projet de loi facilitera le recouvrement de ces avances.
J'ai demandé des renseignements sur les mesures législatives portant sur les récoltes qui ont souffert de la neige ou d'autres conditions atmosphériques. On pourrait verser, sur les 50 000 $, un maximum de 25 000 $ ou de 15 000 $ selon les superficies. L'agriculteur ne paiera pas d'intérêt sur ces montants. Mais il devra en payer sur les montants établis en fonction des 250 000 $. Des dispositions du projet de loi portent sur les accords sans lien de dépendance entre familles. J'ai passé tout cela en revue de manière très approfondie avec les représentants du ministère. Les vrais agriculteurs ne sont pas pénalisés. Les deux grands points sur lesquels porte le projet de loi sont les avances en espèces et certains détails juridiques.
Le sénateur Rossiter: Pourquoi sont-ils si pressés de faire adopter le projet de loi avant Noël? Il n'entrera en vigueur que pour la campagne de 1997-1998. Elle débute en août, n'est-ce pas?
Le président: Je n'ai pas posé la question, mais les représentants du ministère souhaitent que le projet soit adopté avant Noël.
Le sénateur Rossiter: Ils ont peut-être dit cela sans savoir ce qui peut se passer par ailleurs.
M. Fréchette: La principale raison est d'ordre budgétaire. Ils veulent en tenir compte dans les prévisions budgétaires. Il faudra tenir compte du fait qu'il n'y aura pas d'intérêts. C'est une innovation. C'est l'une des raisons pour lesquelles ils veulent que le projet de loi soit adopté rapidement, mais ils n'en ont pas vraiment besoin avant Noël. Il pourrait être adopté après, et ils auront quand même l'argent nécessaire.
Comme le président l'a dit, le projet de loi n'est guère litigieux, sauf sur ces deux points. J'ai participé à l'étude de ce projet de loi aux Communes. Les témoins étaient très satisfaits des dispositions du projet de loi.
Le Service de recherche de la Bibliothèque a rédigé des notes d'information. Toutefois, le projet de loi n'a pas encore été renvoyé au Sénat. J'ignore si le greffier peut se procurer ces notes, mais elles devraient être disponibles.
Le président: Le comité voudrait-il convoquer certains des témoins pour étudier le projet de loi C-34 jeudi prochain, pendant la séance du Sénat?
M. Armitage: Si le projet de loi ne nous a pas été renvoyé d'ici là, nous ne pourrons pas le faire.
Peut-être pourrions-nous entendre la semaine prochaine un témoin dans le cadre de l'étude sur les forêts?
Le président: Est-ce que nous convoquerons des témoins la semaine prochaine pour l'étude de l'industrie forestière?
Le sénateur Spivak: Oui, peut-être jeudi matin.
M. Armitage: La Bibliothèque du Parlement ne sera peut-être pas en mesure de rédiger un document d'information et une série de questions d'ici là.
Le sénateur Spivak: Nous pouvons toujours essayer.
M. Armitage: Avec cette mise en garde, peut-être.
Le président: D'autres propositions?
Le sénateur Spivak: Prévoyez-vous que d'autres projets de loi seront renvoyés au comité avant Noël?
Le président: Le sénateur Rossiter a suivi le cheminement du projet de loi C-38, qui porte sur la réglementation concernant l'endettement agricole. Il semble que le projet de loi traite de la réglementation et du coût de la réglementation.
M. Fréchette: Le projet de loi C-38 est la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Les agriculteurs en difficulté peuvent s'adresser au Bureau d'examen de l'endettement agricole. Ils peuvent réduire la taille de leur exploitation ou obtenir de l'aide du gouvernement pour restructurer leur société.
La nouvelle loi propose, au lieu du bureau d'examen, l'intervention d'un médiateur entre les banques, les créanciers et les agriculteurs en difficulté financière.
Le projet de loi pose un problème. Il y avait autrefois ce que nous appelions le «service». Avant que l'agriculteur n'ait de graves difficultés, il pouvait recevoir de l'aide du Bureau d'examen de l'endettement agricole. Le projet de loi ferait disparaître ce service, et certains agriculteurs le déplorent. Il y a cependant des agriculteurs qui croient que, si on a besoin de l'aide du gouvernement, on ne devrait pas être en affaire.
Le sénateur Rossiter: Ce service est éliminé.
Le président: J'ai du mal à accepter cela. Lorsqu'on s'est retiré des affaires, on ne peut plus revenir en arrière. Les agriculteurs ne peuvent pas se permettre les frais juridiques que cela suppose.
Le sénateur Spivak: À un moment donné, nous étions prêts à défendre le principe de l'exploitation familiale. Le gouvernement fédéral s'en tient-il à cette politique?
M. Fréchette: Lorsque le projet de loi a été soumis au comité permanent de l'agriculture de la Chambre des communes, ce comité a demandé aux bureaucrates de reprendre le travail et de proposer des mesures qui satisferaient aux exigences énoncées par les témoins qui avaient comparu devant lui. Les témoins avaient demandé un service pour aider les agriculteurs avant qu'ils ne soient plongés dans des difficultés trop graves.
Le sénateur Rossiter: Le projet de loi a été renvoyé au comité permanent avant la deuxième lecture.
M. Fréchette: C'est exact. Le comité procède aujourd'hui à l'étude du projet de loi article par article.
Le président: Cela soulève une autre question très vaste. Des représentants de l'association des banquiers sont intervenus auprès du comité. Ils réclament une plus grande part du marché du crédit agricole. Ils ont l'impression que la Société du crédit agricole a des privilèges spéciaux et que les banques ne peuvent pas s'implanter sur ce marché. Mais je ne peux pas m'empêcher de faire des réflexions sur les bénéfices que réalisent les banques en ce moment. Ils sont plus élevés que jamais au cours de notre histoire.
Le sénateur Spivak: Je voudrais savoir pourquoi.
Le président: Pendant ce temps-là, des agriculteurs font faillite. Comme vous le savez, le cours des céréales a augmenté il y a quelques mois, mais il est maintenant en train de baisser. Les banques ont profité de la situation, et elles s'emparent maintenant de la majeure partie des bénéfices. Elles réalisent des bénéfices exorbitants. Hier, la Banque de Montréal a déclaré des bénéfices de plusieurs milliards de dollars. La situation est très grave.
Le sénateur Spivak: Il doit certainement y avoir de l'information pour justifier l'augmentation du coût des facteurs de production dont il a été question dans les journaux.
Il semble que le coût de l'entretien des routes au Canada va augmenter de 18 milliards de dollars. C'est ce qu'on a lu dans un journal. Cela est directement attribuable à l'élimination du tarif du Nid-de-Corbeau et à l'abandon d'embranchements ferroviaires. Au Manitoba, il y a eu augmentation du nombre d'usines qui ont une production à valeur ajoutée, ce qui est excellent, bien entendu, mais il y a eu aussi augmentation du nombre de camions gros porteurs sur nos routes. Je crois que l'augmentation a été de 52 p. 100 environ.
Les usines qui fabriquent des produits à valeur ajoutée doivent-ils se faire livrer le grain par gros porteur?
Nous allons tout droit à la catastrophe par notre propre faute, semble-t-il. Nos routes n'ont jamais été conçues pour ces énormes camions. Nous n'avons pas les moyens d'aménager un nouveau réseau routier. Faudra-t-il, pour entretenir les routes, dépenser plusieurs fois plus que ce que coûtait le tarif du Nid-de-Corbeau?
Le président: Je suis persuadé que le sénateur Sparrow a une idée de ce qui se passe à ce propos-là. L'augmentation du nombre de camions sur les routes était inévitable. Il y a quelques lignes ferroviaires sur courte distance, mais j'ai l'impression que ce n'est qu'un moyen transitoire à court terme. Ces lignes ne seront pas entretenues.
Le sénateur Spivak: Nous avons discuté de la question lorsque le tarif du Nid-de-Corbeau a été éliminé. Il serait important de savoir dans quelle mesure le camionnage est subventionné. Si les subventions sont supérieures à ce que coûtait le tarif du Nid-de-Corbeau, nous avons pris une décision stupide. Nous avons supprimé le tarif du Nid-de-Corbeau pour réduire le déficit.
Le président: Toutes les sociétés qui exploitent des silos sont en train de construire des silos terminus. Il est difficile de savoir combien il y en a en ce moment en Saskatchewan, mais ils sont situés le long des lignes ferroviaires principales.
Le sénateur Spivak: Y a-t-il des raccordements avec les lignes sur courte distance?
Le président: Les camions transporteront le grain de 100 milles à la ronde.
Le sénateur Spivak: Autrefois ce n'était que 30 ou 40 milles?
Le président: Plutôt de 9 à 15 milles. Sur la ligne Sioux, il y avait un silo à tous les 9 milles. Dans notre région il y avait aussi une autre ligne 10 milles plus loin, avec des silos espacés de 9 ou 10 milles. Il y a eu de grands changements.
Le sénateur Spivak: Est-ce qu'ils ne pourraient pas avoir des wagons pour charger et expédier ces marchandises?
Le président: Les sociétés ferroviaires ne veulent pas avoir des aiguillages pour prendre deux ou trois wagons dans des petites localités, et les exploitants de silos ne veulent pas y avoir d'installations.
Le sénateur Spivak: Je voudrais savoir si la subvention qui a été enlevée aux chemins de fer et aux agriculteurs a été donnée au camionnage. Il avait été prédit que cela se produirait.
Le président: C'est déjà en train de se produire.
Le sénateur Spivak: Les Canadiens ont l'impression que le déficit est réduit à cause de l'élimination du tarif du Nid-de-Corbeau, mais les collectivités agricoles en souffrent.
Le président: Les oléagineux comme la moutarde, le lin et le canola sont tous transportés par camion vers les usines de transformation aux États-Unis ou la nouvelle usine que Cargill a construite près de Saskatoon.
Le sénateur Spivak: Je n'arrive pas à comprendre. Winnipeg est une ville qui a été construite le long des axes ferroviaires. La production de ses usines est transportée par train.
Notre politique aurait dû être d'éliminer le CN, d'avoir des lignes sur courtes distances et de conserver ainsi un réseau de transport. C'est ce que nous avons demandé, un réseau complet de transport qui ferait appel au camionnage et au chemin de fer de telle manière que les transports ne nous coûtent pas une fortune. Pourquoi n'est-ce pas possible? D'autres pays ont un réseau complet. Ils se servent de camions, de trains ou d'avions selon le mode qui convient le mieux dans les circonstances. Pourquoi ne faisons-nous pas la même chose?
Le sénateur Sparrow: Le coût du transport du grain n'a pas augmenté. Qui paie, voilà ce qui a changé.
Le sénateur Spivak: Ce n'est pas vrai. Au Manitoba, le coût a été multiplié par trois.
Le sénateur Sparrow: Ce n'est plus le gouvernement qui paie, mais l'agriculteur. Les coûts sont essentiellement les mêmes.
Le réseau de petits silos a commencé à disparaître il y a plusieurs années. Les petits élévateurs... Les syndicats du blé ou les compagnies céréalières nationales les ont fermés. Au lieu de transporter le grain sur cinq milles, il a fallu le transporter sur 10 puis sur 15 milles au fur et à mesure que les silos fermaient. Ces fermetures ont entraîné l'abandon d'embranchements. Un réseau de camionnage a été mis sur pied par les agriculteurs eux-mêmes. L'agriculteur devait transporter sa production sur de longues distances.
Comme cette évolution s'est poursuivie pendant un certain nombre d'années, ces distances sont passées à 20 puis à 30 milles. Il a alors fallu faire appel au camionnage commercial. L'agriculteur n'avait pas d'assez gros camions; il a acheté un gros porteur pour transporter son grain.
Est venue ensuite la livraison directe des légumineuses aux usines. Il fallait alors parcourir 100 milles pour livrer les récoltes.
Entre-temps, des embranchements ont été fermés. En tout cas, c'est ce qui s'est produit en Saskatchewan et en Alberta. Les petits embranchements ont été abandonnés parce que les petits silos n'avaient plus assez de grain à faire transporter.
Avec l'encouragement des agriculteurs, des terminus ont été construits à des endroits comme Weyburn. Les compagnies ferroviaires ne demandent pas mieux que de transporter le grain entre ce terminal et la Colombie-Britannique parce qu'elles n'ont pas à utiliser les lignes de courte distance.
Le sénateur Spivak: Je comprends, mais ma question est la suivante: combien ce changement coûte-t-il au contribuable canadien? Il y a aussi une autre question: ces changements étaient-ils inévitables, ou bien aurions-nous pu concevoir un système plus économique? Cela va coûter des milliards de dollars aux contribuables. Les gouvernements provinciaux disent qu'ils ne peuvent pas se débrouiller seuls et que le gouvernement fédéral doit assumer une part de cette responsabilité.
Le président: Pour vous donner une idée des coûts, sénateur, nous expédions le canola de notre exploitation vers une huilerie du Dakota du Nord, à 150 milles. L'usine appartient à une société canadienne de Lloydminster, ADM. La société nous paie en dollars canadiens, mais l'huilerie est située au Dakota du Nord.
Lorsque la société vient chercher mon grain, elle paie le camionnage, mais les coûts sont déduits du prix qui m'est versé pour mon canola. On me fait payer 38c. le boisseau pour transporter le canola sur 150 milles. Je touche donc non pas 9,12 $ le boisseau, mais environ 8,80 $. Voilà comment le système fonctionne.
Le sénateur Spivak: Combien nous coûte l'entretien des routes? Selon des articles parus dans les journaux, cela coûte 18 milliards de dollars dans l'ensemble du Canada. Est-ce exact?
M. Fréchette: Je l'ignore. Le GATT ne permet plus des subventions comme le tarif du Nid-de-Corbeau. La subvention est passée aux contribuables pour l'utilisation des routes, et tout le monde peut circuler sur les routes. On peut dire que c'est une subvention.
Le sénateur Spivak: Pas du tout. Pour commencer, ces routes sont dangereuses. Deuxièmement, qui sont les usagers? Quelques agriculteurs, mais la vaste majorité des gens habitent dans les villes. Ils ne profitent pas du tout des routes.
Le sénateur Rossiter: Êtes-vous en train de dire que les agriculteurs n'ont pas droit à ce qu'on leur construise des routes parce que la grande majorité des gens habitent dans les villes?
Le sénateur Spivak: Ce n'est pas du tout ce que je dis, sénatrice Rossiter. Je suis heureuse qu'on préserve l'exploitation agricole familiale. Nous avons retiré les subventions du tarif du Nid-de-Corbeau pour les accorder au camionnage et au réseau routier. Nous payons tous les routes, mais l'entretien va maintenant nous coûter 18 milliards de plus parce que ces gros porteurs circulent sur des routes qui n'ont pas été conçues pour eux. Voilà le problème.
Le président: L'agriculteur moyen va dire qu'il ne peut pas se permettre d'acheter un camion capable de transporter un chargement sur 150 milles. Il va faire appel à un camionneur qui fait régulièrement ce genre de transport. C'est là une réalité de la vie rurale au Canada.
Le sénateur Spivak: Je comprends. Il me semble important de savoir ce que cela coûte et où va l'argent. Nous avons été roulés. Lorsque le tarif du Nid-de-Corbeau a été éliminé, on nous a dit que le déficit serait réduit, et la charge du contribuable aussi. Mais cette charge est en train de s'alourdir.
Le président: C'est maintenant l'agriculteur qui porte le fardeau.
Le sénateur Spivak: S'ils avaient bien réfléchi à la question et fait ce que beaucoup proposaient, c'est-à-dire une étude complète de la politique des transports, avant de supprimer le tarif du Nid-de-Corbeau, nous ne serions pas dans ce pétrin.
Le sénateur Sparrow: La suppression du tarif n'a pas vraiment changé grand-chose dans le transport du grain.
Le sénateur Spivak: Si.
Le sénateur Sparrow: Pas grand-chose. Ce qui a changé, c'est celui qui paie. Le transport du grain était subventionné. La subvention supprimée, c'est l'agriculteur qui paie.
Les gouvernements provinciaux, et celui de la Saskatchewan ne fait pas exception, disent que, à cause de leur déficit budgétaire, ils ne peuvent pas consacrer d'argent aux routes. Ils font remarquer que c'est la réduction des subventions fédérales qui est à blâmer, pas la suppression du tarif du Nid-de-Corbeau.
Dans l'Ouest du Canada, il faut modifier la planification du réseau pour éliminer la multitude de routes que nous avons. Nous devons construire des routes d'excellente qualité pour rejoindre un grand nombre d'agriculteurs et non dépenser des millions pour satisfaire un seul exploitant. On n'a pas injecté assez de fonds dans les grands axes, alors qu'on savait qu'ils seraient nécessaires pour absorber la circulation.
Le sénateur Spivak: Pourquoi n'ont-ils pas pensé à cela?
Le sénateur Sparrow: Pourquoi n'y ont-ils pas pensé?
Le sénateur Spivak: Il nous faut un plan complet pour le réseau de transport. Les représentants des secteurs de la potasse et du charbon, entre autres, nous ont dit que la fiscalité des sociétés ferroviaires, qui acheminent leur production, est trop lourde. Elles sont désavantagées. Nous n'avons pas fait notre travail correctement.
Le sénateur Sparrow: Vous avez probablement raison. Nous n'avons jamais très bien fait notre travail.
Le sénateur Spivak: Je tiens à savoir ce que cela nous coûtera.
Le président: Les municipalités se contentent de routes qui ne peuvent pas résister aux gros camions.
Le sénateur Spivak: En Alberta, il a été question de convertir une ligne ferroviaire en route pour les gros porteurs.
Le président: Les municipalités rurales sont aux prises avec ce problème depuis des années.
Le sénateur Sparrow: Il faut améliorer la qualité des routes. Si les provinces n'ont pas assez d'argent pour s'occuper des routes, il faut débloquer des fonds fédéraux pour l'entretien ou la construction des routes provinciales.
Le sénateur Spivak: Les provinces refusent l'ingérence du gouvernement fédéral. Je ne suis pas d'accord avec vous. Je ne pense pas que le gouvernement fédéral doive se mêler de construire des routes. Il n'y a pas une solution unique au problème.
Le président: Nous avons amorcé une discussion intéressante.
Le sénateur St. Germain: Monsieur le président, j'ai soulevé la question de l'accord sur le bois d'oeuvre qui a été conclu. Pour être parfaitement juste envers le gouvernement fédéral, je crois qu'il a été acculé à cette position à cause des pressions extrêmement intenses exercées par les grandes sociétés et par la Colombie-Britannique, qui tenaient à avoir un accord pour se protéger, par suite des mesures qui avaient été prises.
Ce n'est pas une question qui va à l'encontre des normes environnementales à respecter, qui est en contradiction ou en opposition avec elles. Ce qui se passe, c'est que le gouvernement est intervenu et a capitulé devant les États-Unis à cause des pressions d'entités comme Louisiana Pacific. Cette société et Georgia Pacific ont formé une coalition et elles étaient sur le point de prendre des mesures contre les producteurs canadiens de bois d'oeuvre. Le gouvernement a été forcé de signer un accord avec les États-Unis. Par conséquent, le développement de diverses régions va être entravé parce qu'il n'y aura aucune croissance.
Environ 80 p. 100 de notre bois se vend aux États-Unis.
Le président: Vous parlez uniquement de la Colombie-Britannique?
Le sénateur St. Germain: Je parle du Québec, de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique. Les autres provinces ne sont pas considérées comme des joueurs importants dans l'industrie forestière. Elles produisent aussi du bois d'oeuvre, mais, pour une raison quelconque, elles n'ont pas été appelées à adhérer à l'accord. Seules les quatre grandes régions de production sont visées.
Le gouvernement a mis en place un régime de contingents semblable à celui qui s'applique en agriculture pour protéger l'exploitation familiale. La seule différence, c'est que les poulets, les dindons, les oeufs et les produits laitiers sont destinés au marché intérieur alors que l'accord sur le bois d'oeuvre vise les livraisons faites aux États-Unis. Georgia Pacific et Louisiana Pacific possèdent les terres qu'elles exploitent. La valeur de leurs terres privées est passée de 10 $ à 100 $ l'acre parce que le prix du bois d'oeuvre est passé de 200 $ US à 475 $ US les mille pieds. Cela, parce que nous avons un système de contingents dans l'industrie du bois-d'oeuvre.
Au Canada, les grandes sociétés sont satisfaites, car des prix élevés leur sont assurés. Elles peuvent couper moins d'arbres et mettre des employés à pied. Dix ou 15 personnes seront mises à pied au moment de Noël cette année, alors que, d'habitude, seulement cinq, au plus, le sont. Si les expéditions aux États-Unis sont contingentées, pas question d'ouvrir une nouvelle scierie.
Le prix des grumes a tellement augmenté à cause du régime de contingentement que des usines comme celles qui produisent des bardeaux dans la vallée du Fraser s'efforcent d'optimiser l'utilisation de la matière première. Au lieu de la réduire en copeaux et de la gaspiller, comme autrefois, elles transforment maintenant la meilleure partie de la grume en bois d'oeuvre. Une grande partie du reste sert à fabriquer des bardeaux de cèdres.
Un propriétaire de scierie qui voudrait s'engager dans cette voie afin d'optimiser l'utilisation de la ressource parce que l'approvisionnement diminue et que les coûts sont élevés peut demander un quota. Il peut dépenser 500 000 $ pour une scierie dans laquelle il va débiter 1,5 million de pieds-planche par mois. Mais son quota peut n'être que de 2 millions de pieds-planche pendant toute l'année. En principe, il devra se retirer des affaires.
Je pense que M. Eggleton et le premier ministre ont été obligés de signer cet accord. Ils auraient pu tenir leur bout et s'adresser à un autre tribunal.
Les grandes sociétés fixent les critères du choix de ceux qui obtiennent les quotas. C'est comme confier au renard la garde du poulailler.
Le gouvernement a conservé un faible pourcentage des contingents. Je crois qu'on a demandé 8 milliards de pieds en excédent. Il y avait moins de 1 milliard de pieds pour la nouvelle croissance.
Ceux qui acceptent les commandes spéciales de bois d'oeuvre vont devoir interrompre leurs activités et, à terme, les grossistes aussi. C'est un cauchemar.
Cet accord empêche l'entrée de tout nouveau venu dans cette industrie.
Le président: En principe, c'est la même chose en aviculture en Saskatchewan. Il y a 13 producteurs dans la province, et personne d'autre ne peut se lancer dans la production avicole.
Le sénateur St. Germain: Il s'agit d'une ressource renouvelable, mais certains sont heureux que nous abattions moins d'arbres.
Je crois que, si nous avions bien géré les forêts au cours des 50 ou 100 dernières années, nous n'aurions aucun problème. Les arbres poussent très vite, en Colombie-Britannique.
Je connais très bien ma province, la Colombie-Britannique, et je connais les pratiques forestières. Si elles sont respectées, nous n'y aurons aucun problème de gestion des ressources.
En ce moment, le gouvernement veut créer des emplois. Nous devrions créer ces emplois et donner un espoir d'avenir. On ne crée pas d'emplois lorsque des cartels s'installent ou qu'il existe des mégalopoles qui empêchent tous les nouveaux venus de se lancer en affaire.
On a demandé au représentant d'une grande société ce qu'il pensait des perspectives de croissance, de l'expansion future. Selon lui, il n'y en aura aucune. S'il n'y a pas d'emplois dans la construction et dans la modernisation des scieries, les sociétés pourront couper presque moitié moins de bois et faire autant d'argent.
Tout le programme est faussé. Il s'agit d'un accord de cinq ans.
Le pire, c'est que nous avons capitulé devant les États-Unis dans ce dossier très important. Nous avons signé un accord de libre-échange dans l'esprit du libre-échange. Le premier ministre va à l'étranger faire la promotion du libre-échange, mais, au même moment, nous signons un accord draconien qui va directement à l'encontre de tout ce que nous essayons de faire au moyen du libre-échange.
Nous avons triomphé dans trois causes contre la coalition. Croyez-moi, Louisiana Pacific et Georgia Pacific ne sont pas nos amis. Si nous faisons quoi que ce soit à propos de ces sociétés dans la forêt boréale, ce doit être de les ficher dehors. Elles sont à l'origine de la coalition.
Le sénateur Spivak: Nous les avons accueillies bras ouverts au Manitoba.
Le président: Dites-vous qu'elles ont monopolisé les quotas?
Le sénateur St. Germain: Louisiana Pacific et Georgia Pacific ont formé la coalition aux États-Unis. Elles ont constamment soutenu que l'industrie canadienne du bois d'oeuvre était injustement subventionnée parce que les droits de coupe ne sont pas assez élevés. Elles ont imposé leurs vues aux États-Unis. Et voici qu'elles se présentent chez nous et font les saintes nitouches. Elles possèdent des terres privées aux États-Unis, dans le secteur de l'industrie forestière, qui sont plus importantes que les terres du domaine public. C'est l'inverse de ce qu'on voit au Canada.
Lorsqu'elles ont obtenu ce régime de contingentement, la valeur de leurs propriétés aux États-Unis a décuplé. Elle a monté en flèche parce qu'il y a des restrictions sur l'entrée de produits qui les ont concurrencées par le passé aux États-Unis. Elles ont forcé Clinton et le gouvernement américain à s'en prendre à nous même si nous avons remporté trois causes dans lesquelles il a été constaté que le Canada ne subventionnait pas injustement son industrie.
Le sénateur Spivak: Y a-t-il des recours juridiques?
Le sénateur St. Germain: Pas lorsqu'on a signé un accord avec son plus important partenaire commercial.
Le sénateur Spivak: Le gouvernement est-il au courant de la situation?
Le sénateur St. Germain: Le gouvernement s'est fait dire: c'est une année d'élection et Clinton va devoir capituler.
J'ai vu des droits de 35 p. 100 imposés sur les bardeaux. Lorsque j'étais député, 90 p. 100 de cette industrie était située dans ma circonscription. Ces droits étaient complètement injustes et stupides. Ils ont littéralement tué notre industrie. Pourtant, les États-Unis ne produisent pas de bardeaux.
Le sénateur Spivak: Ils ont accaparé le marché et multiplié par 10 la valeur de leurs propriétés, et nous avons laissé faire. Que pouvons-nous faire?
Le sénateur St. Germain: Je ne suis pas juriste. Je suis un aviculteur qui s'est tourné vers l'élevage du bétail.
Le sénateur Spivak: Je porterais la chose devant les tribunaux ou je dénoncerais l'accord. Que peuvent-ils faire?
Le sénateur St. Germain: Les Canadiens qui ont obtenu leur quota disent que nous devons nous en remettre au GATT. D'ici que nous fassions étudier l'affaire par les tribunaux du GATT, je serai parti pour un monde meilleur.
Le président: Paradoxalement, nous allons éliminer sur cinq ans les offices de commercialisation, conformément au GATT, et voici que nous imposons ce régime à l'industrie forestière.
Le sénateur St. Germain: Les grands producteurs, surtout en Colombie-Britannique, ont obtenu les quotas qu'ils réclamaient.
Le sénateur Spivak: Même chose pour les usines de transformation du poisson. Les grandes usines obtiennent ce qu'elles veulent et les petites doivent fermer leurs portes.
Le sénateur St. Germain: Cet accord va faire disparaître des emplois, et il sera source d'inflation, car la hausse du prix du bois va se répercuter sur le prix des maisons.
Les associations de constructeurs aux États-Unis se plaignent parce qu'elles n'ont pas voulu affronter la coalition. Maintenant, elles prétendent que l'accord va nuire à l'industrie du bâtiment parce qu'il aura des conséquences inflationnistes. C'est vrai. Mais il est trop tard.
Le président: Faut-il adopter une loi pour mettre l'accord en oeuvre?
Le sénateur St. Germain: C'est chose faite. Les accords ont été signés en avril. Ce qui m'inquiétait, c'était que, si nous capitulions, les Américains considéreraient cela comme un précédent.
Si nous voulons appliquer le libre-échange, n'imposons pas de restrictions par des accords spéciaux.
Le sénateur Spivak: Où se trouve l'information sur tout cela? Aux Affaires étrangères?
Le sénateur St. Germain: Oui.
Le sénateur Spivak: Avez-vous un dossier? Pouvons-nous en avoir copie?
Le sénateur St. Germain: J'en ai un. Je vais vous le procurer.
La séance est levée.