Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Finances nationales
Fascicule 21 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 19 mars 1997
Le comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 17 h 15, dans le but d'examiner le Budget des dépenses, déposé au Parlement, pour l'exercice se terminant le 31 mars 1998.
Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Je tiens d'abord à préciser, aux fins du compte rendu, que nous avons tenu, plus tôt, une fête pour notre greffier, M. John Desmarais, qui a commencé à travailler pour ce comité quand l'honorable Doug Everett en était président. Cela fait quinze ans, ce mois-ci, que John est greffier. Il assistera demain à sa dernière réunion puisque, comme vous le savez, nous ne siégerons pas la semaine prochaine. John prend sa retraite à la fin du mois. Je crois comprendre qu'il va travailler pour l'Institut canadien d'archéologie à Athènes, en Grèce. Il ne passera peut-être pas tout son temps à Athènes, mais je suis sûr qu'il va profiter de son séjour là-bas pour explorer l'Europe à fond.
Nous lui souhaitons bonne chance.
Nous tenons aujourd'hui notre première réunion sur le budget des dépenses déposé devant le Parlement, pour l'exercice se terminant le 31 mars 1998. L'usage veut que nous invitions le président du Conseil du Trésor à comparaître devant le comité, ce qu'il a accepté de faire. Il est toutefois en retard parce qu'il y a un vote à l'autre endroit. Nous allons donc l'attendre.
La séance est suspendue.
La séance reprend.
Le président: Bienvenue, monsieur Massé. Vous avez la parole.
L'honorable Marcel Massé, député, président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure: Honorables sénateurs, je vous fournirai des copies de mon discours après la réunion. Le ministère a également préparé un tableau que je compte vous remettre demain, avec votre permission, dans les deux langues officielles. Je vais m'y référer, mais comme il n'est pas traduit, je ne peux pas vous le remettre ce soir.
[Français]
Honorables sénateurs, aujourd'hui, j'ai l'intention d'être bref et de vous laisser le plus de temps possible pour poser des questions. Il me fera plaisir de vous laisser mon sous-ministre et les autres représentants du Conseil du Trésor présents répondre à vos questions lorsque celles-ci relèvent des détails où ils ont la compétence requise.
[Traduction]
Je suis heureux, en tant que ministre responsable du Conseil du Trésor, d'être le messager de bonnes nouvelles -- et j'hésite ici, en raison de ce qui suit --, pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes. Depuis mon arrivée, le Conseil du Trésor n'a jamais été aussi bien vu. Je suis fier de dire que nous sommes en voie de réaliser les objectifs que nous nous sommes fixés.
Il y a quatre ans, le gouvernement fédéral entreprenait la plus grande transformation jamais vue de l'appareil de l'État et de la façon dont il rend ses services aux contribuables.
[Français]
Nous avons repensé le rôle de l'État en prenant des décisions judicieuses et le Conseil du Trésor a contribué de façon significative à la réduction du déficit national. De plus, nous avons pris les devants et innové dans bien des secteurs de responsabilités inhérentes à notre fonction d'organisme central de la décision.
L'environnement mondial tant sur les plans structurel, économique et qu'humain, a changé et continue de changer rapidement. Nous devions nous y adapter et nous l'avons fait.
Qu'avons-nous tant changé, me direz-vous? Nous sommes en voie de mettre de l'ordre dans les finances publiques. Bien que nous devions attendre la fin de l'année financière pour connaître le résultat final de nos efforts, nous sommes certains que le déficit 1996-1997 sera de moins de 19 milliards de dollars, soit 5 milliards de dollars de moins que l'objectif que nous nous étions fixé.
[Traduction]
Pour l'année financière 1998-1999, l'objectif de 9 milliards de déficit représente une somme que le gouvernement pourra financer sans recourir à de nouveaux emprunts sur les marchés financiers.
Nous avons également réformé le système de gestion des dépenses. Nos prévisions de dépenses de programmes pour l'année financière 1996-1997 sont essentiellement au niveau de 109 milliards de dollars que nous avions prévu il y a un an. Notre planification pour les deux prochaines années financières demeure essentiellement la même. Les dépenses de programmes pour 1997-1998 seront de 105,8 milliards de dollars, une somme légèrement inférieure aux 106 milliards que nous avions prévus l'an dernier.
Je dois dire que, dans toute ma carrière au sein de la fonction publique, je n'ai jamais vu un budget qui se rapprochait autant des prévisions.
À 103,5 milliards de dollars, le niveau de dépenses pour l'année financière 1998-1999 sera en fait inférieur de 2 milliards de dollars à ce que nous avions planifié de dépenser.
Nous avons également entrepris une réévaluation permanente des programmes gouvernementaux. L'Examen des programmes a été mis en oeuvre dès que ce gouvernement a pris en main les affaires de l'État. Notre objectif était simple: il fallait «repenser le rôle de l'État». Et cet objectif demeure notre préoccupation constante. L'Examen des programmes nous a aussi permis de réduire les dépenses de manière plus rationnelle que l'ancienne méthode de coupures arbitraires.
Dans cette optique, nous avons amélioré la prestation de services aux citoyens. Et nous avons aussi clarifié le rôle du gouvernement canadien dans plusieurs domaines d'activité.
[Français]
Nous avons créé un cadre stable de planification à long terme pour les ministères. Les dépenses consacrées aux programmes du gouvernement seront de 11, 9 p. 100 du produit intérieur brut en 1998-1999, une baisse de près de 5 p. 100 depuis l'exercice financier 1993-1994.
Nous avons diminué la taille de la fonction publique de 225 000 à 195 000 employés dans la période s'échelonnant d'avril 1995 à décembre 1996.
[Traduction]
Comme vous le savez, les médias ont laissé entendre que le gouvernement ne serait pas en mesure de réaliser les compressions prévues dans le cadre de l'Examen des programmes. Une mise au point s'impose, car il n'y a rien de plus faux. Les médias se sont attachés à comparer les prévisions faites en 1995 pour la période 1997-1998 aux prévisions qui ont été faites le mois dernier pour la même période. Or, les compressions dans les dépenses de programmes se poursuivent conformément aux objectifs et à l'échéancier fixés. Dans le budget de 1995, nous avions prévu que les dépenses ministérielles s'établiraient à 51 875 milliards en 1994-1995, et à 42, 089 milliards en 1997-1998. Ces chiffres figurent dans le tableau qui fait état des dépenses assujetties à l'Examen des programmes, de même que dans les prévisions budgétaires de 1995.
Selon les nouvelles prévisions, le niveau des dépenses pour 1997-1998 a été fixé à 44 986 milliards de dollars, au lieu de 42 089 milliards, en se fondant sur une comptabilisation uniforme des dépenses. La différence tient surtout aux modestes hausses de dépenses qui reflètent les priorités du gouvernement.
Cela veut dire, monsieur le président, que les compressions effectuées dans les programmes de dépenses des ministères ont suivi la trajectoire prévue. Toutefois, dans les deux derniers budgets, le gouvernement a annoncé des dépenses qui n'étaient pas prises en compte dans le budget de 1995. Mentionnons, par exemple, les 425 millions de dollars qui ont été injectés dans le programme d'infrastructure en voie d'être négocié avec les provinces. Il s'agit d'argent neuf qui, nous l'espérons, permettra d'augmenter les dépenses des divers ministères en 1997-1998.
Toutefois, même si les dépenses ont augmenté par suite des décisions annoncées dans les budgets, celles-ci n'influent pas sur les compressions qui ont été effectuées dans les ministères dans le cadre de l'Examen des programmes. Ces compressions ont été mises en oeuvre selon les objectifs fixés. Les dépenses totales du gouvernement, comme je l'indiquerai quand je commenterai le tableau, sont conformes aux prévisions publiées dans le budget de 1995, qui était fondé sur les données de 1994-1995.
Toutes ces mesures s'inscrivent dans le cadre de planification financière établi par le gouvernement et mis en ouvre en 1993. Nos données indiquent que les dépenses directes de programmes -- c'est-à-dire les dépenses effectuées par les ministères fédéraux --, qui comprennent les nouvelles initiatives de dépenses, accuseront, en 1998-1999, une baisse de 18,6 p. 100 par rapport à celles de 1994-1995.
[Français]
Nous avons aussi amélioré la présentation des rapports sur le rendement que nous déposons au Parlement. L'automne dernier, j'ai déposé à la Chambre à titre d'essai, 16 rapports de performance pour permettre au Parlement d'évaluer les résultats atteints par les ministères. L'information devient ainsi disponible aux parlementaires quelque six mois plus tôt que l'ancienne formule du dépôt de la Partie III. Ces mêmes 16 ministères ont représenté des rapports sur leurs Plans et Priorités déposés à titre de leur Partie III. Ces rapports comportent aussi des documents de projection qui, avant ce projet pilote, étaient déposés séparément.
[Traduction]
Nous avons mis en oeuvre une série d'initiatives et de stratégies d'action dont La Relève constitue le fer de lance du renouveau de la fonction publique. De plus, nous marquons cette année le retour au régime de la négociation collective. Et, dans les prochains mois, nous souhaitons signer des ententes de partenariat tant privées que publiques.
[Français]
Nous avons changé la façon d'administrer les affaires de l'État. Et il nous reste encore beaucoup à faire pour transformer le gouvernement et le marquer du processus du changement continu que nous avons établi.
[Traduction]
Nous effectuerons encore des changements, nous rationaliserons encore davantage nos opérations, et nous tendrons à une plus grande efficacité dans notre processus de prise de décision. En fait, nous avons entrepris un grand virage administratif et nous sommes sur le point d'être sur la ligne droite du XXIe siècle.
[Français]
En conclusion, monsieur le président, je peux affirmer que nous mettons en oeuvre une nouvelle culture de l'administration des programmes du gouvernement du Canada et des services qu'il rend aux citoyens. Je suis fier de ce que nous avons fait.
Nous avons repensé rôle de l'État. Nous offrons un nouveau gouvernement responsable et respectueux des Canadiennes et des Canadiens.
[Traduction]
Le président: Vous avez, à la fin de votre exposé, soulevé un point que j'aimerais clarifier. Vous avez dit que les dépenses de fonctionnement vont diminuer de 18,6 p. 100 environ en 1998-1999. Ce sont des données que nous n'aurons pas avant l'année prochaine. Vous vous attendez à une diminution de quel ordre entre le budget de 1994-1995 et celui de cette année?
M. David Miller, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, Conseil du Trésor: Vous voulez parler du Budget des dépenses ou du plan des dépenses? Il y a une différence entre les deux. Nous avons, d'une part, le Budget des dépenses, et, d'autre part, des réserves pour les dépenses imprévues ou pour les postes qui figureront dans le Budget des dépenses supplémentaire.
Le président: Si les dépenses de fonctionnement vont baisser de 18,6 p. 100 en 1998-1999, quelles sont alors vos prévisions pour l'année en cours? Nous ne verrons pas ces données avant l'année prochaine. Quelles seraient vos prévisions pour l'année en cours?
M. Miller: Nous allons vous fournir ces données dans un instant, sénateur.
Le président: Je vous saurais gré de nous les fournir dès que vous les aurez en main.
Le sénateur Stratton: Je sais que vous êtes porteur de bonnes nouvelles. Vous avez dit que le déficit est de 19 milliards de dollars, alors qu'on avait prévu qu'il atteindrait 24 milliards. Il y a un surplus dans le compte d'assurance-emploi, les cotisations rapportant 5,6 milliards de plus que prévu. Vous vous servez de cet argent pour réduire le déficit et le ramener au montant que vous avez cité, n'est-ce pas?
M. Massé: Il est vrai que les cotisations qui s'accumulent dans le compte d'assurance-emploi sont incluses dans les recettes du gouvernement en vertu du système de comptabilisation actuel. La situation était différente avant 1986, alors que le compte constituait un fonds distinct. Depuis, le vérificateur général a demandé que les prestations d'assurance-chômage soient incluses dans les dépenses du gouvernement, et que les cotisations soient incluses dans les recettes.
Il est vrai que le compte enregistre actuellement un surplus d'environ 5 milliards par année. Toutefois, il ne faut pas oublier que ces données sont comptabilisées pour plusieurs années à l'avance. M. Martin a annoncé dans chacun de ses budgets les prévisions pour l'année en cours et pour les deux années à venir. Celles-ci ont été incluses dans les 24 milliards de dollars.
Vous avez en partie raison. Oui, ces montants sont inclus dans les recettes et ils contribuent à réduire le déficit.
Le président: Ont-ils été inclus dans les recettes lorsque vous avez fait vos prévisions? Est-ce que le montant était le même?
M. Massé: Oui. N'oubliez pas que le compte accusait un déficit de 12 milliards de dollars il y a quelques années. La vapeur a commencé à se renverser lorsque le taux de chômage s'est mis à chuter, passant de 11,4 p. 100 à 9,7 p. 100, qui est le taux actuel.
À un moment donné, il n'y avait plus de déficit net. Le compte a commencé à enregistrer un surplus vers la fin de 1995.
Le sénateur Stratton: Les sommes accumulées à partir de 1995 ont effectivement servi à réduire le déficit.
M. Massé: Oui, et cette pratique est en vigueur depuis que la formule de comptabilisation a été modifiée en 1986.
Le sénateur Stratton: J'en suis conscient, mais pour la première fois, le compte a affiché un surplus et vous avez utilisé cet argent pour réduire le déficit.
Ma question suivante porte sur l'article qui a paru dans le Financial Post et que vous avez clairement dénoncé. Les partis de l'opposition soutiennent que les recettes fiscales ont augmenté de 14 p. 100, qu'elles sont passées de 116 milliards de dollars en 1994-1996, à 132 milliards de dollars en 1997-1998. C'est essentiellement grâce à cette hausse que vous avez pu réduire le déficit. Les gouvernements provinciaux, eux, soutiennent que le gouvernement fédéral n'a pas effectué de coupures dans ses propres programmes, mais qu'il a réduit ses paiements aux provinces de 26 p. 100. C'est ce qu'ils laissent entendre.
Je prends note de ce que vous dites. Toutefois, on continue d'entendre ces arguments. Le ministre des Finances du Manitoba soutient essentiellement la même chose dans son budget de 1996. Il aurait voulu, tout comme les autres gouvernements provinciaux et tout comme les citoyens canadiens, que le gouvernement fédéral reconsidère ses priorités et ne coupe pas aussi massivement dans les programmes sociaux vitaux. Les réductions dans les transferts sociaux vont représenter 77 p. 100 de toutes les compressions fédérales au cours des deux prochaines années. Le premier ministre de l'Ontario a laissé entendre que, entre 1995-1996 et 1998-1999, le gouvernement fédéral réduira les paiements au titre de la santé, de l'éducation et des programmes sociaux de 42,2 p. 100. Les dépenses des autres programmes ne seront réduites que de 1,3 p. 100 au cours de la même période.
Les premiers ministres provinciaux et leurs ministres des finances disent, «Messieurs, vous avez considérablement réduit les transferts sociaux.» Êtes-vous en train de prétendre le contraire?
M. Massé: Oui. Je serais tenté de commencer ma phrase en disant, «En vérité». Toutefois, nous savons qu'il n'y a pas de vérité en politique.
Le sénateur Stratton: Ne dites pas cela. Il faut faire la part des choses.
M. Massé: Il n'y a pas de doute que l'augmentation des recettes et la baisse des dépenses ont contribué à réduire le déficit. C'est comme une paire de ciseaux. Il faut les deux lames pour obtenir des résultats. Toutefois, c'est ce que nous avions prévu. En fait, dans les discours que j'ai prononcé pour expliquer le budget de 1995, j'ai utilisé l'exemple des ciseaux. Nous devons pouvoir compter sur ces deux éléments pour réduire et, à la longue, éliminer le déficit.
Permettez-moi de définir l'expression que j'utilise. Par dépenses totales -- si j'exclus les taux d'intérêt -- je veux parler des dépenses totales de programmes qui s'élèvent à 120,9 milliards de dollars. C'est le chiffre réel.
Nous avions prévu un examen de programmes pour les trois premières années. Cet examen a été prolongé d'une année pour couvrir une période de quatre ans, soit de 1994-1995 à 1998-1999. Nous avions prévu réduire les dépenses réelles -- et je ne veux pas dire par là réduire ce qui avait été autrement prévu, et cetera., mais en termes absolus -- de quelque 18 p. 100. En fait, d'ici cette année, les dépenses de programmes seront passées de 120,9 milliards de dollars à 105,6 milliards de dollars. C'est ce que vous allez voir dans le budget de cette année. Pour 1998-1999, le chiffre que nous prévoyons actuellement et que nous allons atteindre est 103 milliards de dollars environ.
Jusqu'à cette année, les dépenses publiques ont affiché une réduction nette de 15 milliards de dollars, nonobstant l'augmentation de l'inflation et toutes les autres influences. Bien sûr, les effectifs de la fonction publique ont également été comprimés, 55 000 employés ayant été remerciés. Il ne fait aucun doute que la plus grande part des réductions vise effectivement les réductions des dépenses, y compris, bien sûr, la diminution du nombre des fonctionnaires fédéraux.
Votre deuxième question porte sur ce que l'on appelle habituellement le «pelletage dans la cour des provinces.» Bien sûr, des politiciens provinciaux, notamment les premiers ministres, envisagent la situation sous certains angles et nous l'envisageons sous d'autres. Toutefois, il suffit de comparer nos dépenses pour l'exercice 1998-1999 aux dépenses des Conservateurs pendant la dernière année de leur mandat, soit 1993-1994, pour s'apercevoir qu'en fait, nos dépenses, celles effectuées par des ministères comme celui des Transports, de l'Agriculture, et cetera, ont été réduites de quelque 14 p. 100, tandis que le total des transferts aux provinces a baissé de quelque 9,9 p. 100, ce qui signifie que le pourcentage de réduction de nos dépenses est 40 p. 100 plus élevé que le pourcentage de réduction de nos transferts aux provinces.
Les provinces, notamment l'Ontario, prennent l'année où les transferts aux provinces ont été les plus élevés, soit 1995-1996, et la comparent à l'année où les transferts ont été les plus bas, soit deux années plus tard. Nous prenons comme point de départ la dernière année complète du gouvernement précédent et, bien sûr, notre programme a débuté après cette année, ce qui nous semble un point de départ rationnel. Vous vous souviendrez peut-être également qu'à la rencontre des premiers ministres en décembre 1993, juste après notre arrivée au pouvoir, on s'était demandé si oui ou non les gouvernements fédéral et provinciaux essaieraient de continuer sur leur lancée les premières années, même si tout le monde s'entendait pour dire qu'il fallait réduire les dépenses. À ce moment-là, il avait été convenu que le gouvernement fédéral donnerait une marge de manoeuvre de deux ans aux gouvernements provinciaux pour leur permettre de rééquilibrer leurs finances, avant que les paiements de transfert ne commencent à diminuer. C'est la raison pour laquelle 1995-1996 est l'année où les transferts ont été les plus élevés et c'est aussi la raison pour laquelle ces transferts ont diminué au cours des deux années suivantes.
L'année de référence, bien sûr, influe sur le pourcentage, tout comme évidemment la période de temps que l'on prend pour calculer les pourcentages. Plusieurs des chiffres utilisés par les premiers ministres provinciaux sont exacts, mais ils le sont en raison de la base de référence qu'ils utilisent et inversement, nos chiffres sont exacts en raison de la base de référence que nous utilisons.
Avant tout, sénateur, le gouvernement a cherché à diminuer sa taille absolue. Nous n'avions pas d'autre choix. Nous sommes arrivés à la conclusion que, au bout de la période de l'examen de programmes, la taille du gouvernement devait être réduite d'environ 20 p. 100. Toutefois, les paiements de transfert représentent 55,9 p. 100 des dépenses du gouvernement fédéral. Vous ne pouvez pas vous attendre à ce que l'on arrive à réduire la taille du gouvernement de 20 p. 100 sans diminuer les paiements de transfert. Ce pourcentage, bien sûr, est un choix politique que vous pouvez juger d'une façon ou d'une autre. En ce qui nous concerne, nous sommes arrivés à la conclusion que nous devions réduire davantage nos propres dépenses et c'est ce que nous avons fait. Toutefois, nous ne pouvions éviter de diminuer les paiements de transfert aux provinces.
Le sénateur Stratton: D'après ce que j'ai ici, les chiffres pour 1995-1996 approchaient les 29,6 milliards de dollars tandis que les chiffres pour 1997-1998 correspondent à 25,1 milliards de dollars. C'est une réduction de 4 milliards de dollars, n'est-ce pas?
M. Massé: Oui.
Le sénateur Stratton: Pour ce qui est du budget de fonctionnement, vous dites que vous l'avez réduit de 15 milliards de dollars. S'agit-il de la même période de temps?
M. Massé: Oui.
Soit dit en passant, lorsque je comparais les 120,9 milliards de dollars aux 105,6 milliards de dollars, je voulais parler de cette différence de 15 milliards de dollars qui englobe la partie des paiements de transfert et nos propres dépenses ministérielles. Le budget des ministères fédéraux est passé de 51,7 milliards de dollars en 1994-1995 -- et le même tableau figure dans le budget de 1995 -- à près de 44 milliards de dollars, ainsi que je l'ai dit dans mon allocution. Cela comprend les diminutions de 9 milliards de dollars de l'examen de programmes dont le montant est passé de 51,7 milliards de dollars à 42 milliards de dollars. J'ai ajouté les 2 milliards de dollars de dépenses supplémentaires, qui comprennent des dépenses comme les 425 millions de dollars pour les paiements d'infrastructure.
Le président: Ces 44 milliards de dollars sont-ils prévus pour cet exercice ou le prochain?
M. Massé: Pour 1997-1998.
Le président: Qu'en est-il de l'exercice 1996-1997?
M. Massé: Je vais poser la question à mes spécialistes. Avez-vous fait ces calculs?
M. Miller: Malheureusement, non.
J'aimerais ajouter que lorsqu'il a parlé des répercussions, le ministre a indiqué une diminution du budget de fonctionnement de l'ordre de 13,7 p. 100 entre 1994-1995 et 1997-1998.
Le président: Avec tout le respect que nous vous devons, nous essayons de comprendre ce qui se passe. Dans vos réponses, vous mettez les chiffres de 1994, 1996, 1997 et 1998 à la place les uns des autres. Je m'y perds. J'aimerais en fait examiner les chiffres de 1994 et ceux de cette année. Je propose de faire une comparaison par année, ce qui est plus logique, au lieu de parler des diverses années, ce qui ne nous mène à rien. J'aimerais savoir si nous pouvons débrouiller la situation.
Le sénateur Stratton: D'après les tableaux que j'ai ici, les transferts de fonds ont chuté de 7 milliards de dollars au cours de cette période.
M. Massé: Oui.
Le sénateur Stratton: Vous avez augmenté les points d'impôt.
M. Massé: En raison de leur élasticité, le rendement des points d'impôt augmente au fil du temps.
Le sénateur Stratton: Si les provinces ont perdu 7 milliards de dollars de fonds, les points d'impôt ramènent cette perte à une perte totale de 4 milliards de dollars. Est-ce ce que vous voulez dire?
M. Massé: C'est exact.
Monsieur le président, pour revenir à votre question au sujet des années, c'est effectivement difficile, car nous faisons des rajustements chaque année. Si je prends les exercices 1994-1995 et 1997-1998, c'est parce que la période d'examen de programmes avait été en premier lieu fixée à trois ans, si vous vous en souvenez bien. Le tableau des réductions d'examen de programmes dans le budget de 1995 comparait ces deux périodes, le début et la fin de l'examen de programmes, soit une période de trois ans.
Le président: Je le comprends, monsieur le ministre. Je voulais simplement souligner que deux questions ont été posées au sujet de 1996-1997, soit l'exercice en cours. Nous avons obtenu des réponses pour l'exercice 1997-1998, qui est le prochain exercice, mais pas pour l'exercice 1996-1997. Ces chiffres devraient être plus précis que les prévisions pour le prochain exercice.
Quelqu'un peut-il répondre à la question que j'ai posée plus tôt?
M. Miller: La question portait sur l'exercice 1997-1998, d'après ce que j'ai compris, puisqu'il s'agit du budget que nous examinons. C'est les 13,7 p. 100 dont nous avons parlé.
Le président: J'ai posé ensuite la question pour l'exercice en cours.
M. Miller: Comme nous nous occupons essentiellement de l'exercice 1997-1998, je ne crois pas avoir ces chiffres aujourd'hui, mais je les aurai demain.
Le sénateur Milne: Monsieur le ministre, j'ai deux questions rapides à vous poser. Vous savez sans doute qu'un comité sénatorial se penche sur la question de l'enseignement postsecondaire. Il a voyagé dans tout le pays. Ce qui m'inquiète au sujet du budget des dépenses principal, ce sont les paiements d'intérêts et d'obligations liés aux prêts aux étudiants. D'après ce que je comprends, ils ont cette année accusé une légère baisse -- près de 3 millions de dollars -- par rapport à l'année dernière. Au total, ils s'élèvent à 616,4 millions de dollars pour 1997-1998. S'agit-il d'un phénomène récent, ou le programme de prêts aux étudiants coûte-t-il toujours au gouvernement plus d'un demi-milliard de dollars?
M. Massé: Pour 1993-1994, il a coûté 499,2 millions de dollars.
Le sénateur Milne: C'est toujours dans cet ordre de grandeur, mais le coût augmente.
M. Massé: Oui.
Le sénateur Milne: Ce chiffre représente-t-il le coût net du programme de prêts aux étudiants ou, d'éventuels paiements dans le cas d'étudiants qui actuellement ne remboursent pas leurs prêts peuvent-ils contrebalancer ce chiffre? Y a-t-il plus d'étudiants en défaut de paiement et cela explique-t-il l'augmentation de ce coût?
M. Miller: Divers facteurs entrent en jeu. En fait, le plafond des prêts a été relevé en 1994 et nous en voyons aujourd'hui les conséquences. En cas de non-remboursement de ces prêts, nous demandons au Parlement d'en faire remise par l'entremise du Budget des dépenses supplémentaire. En fait, dans le Budget des dépenses supplémentaire que j'ai examiné au sein de ce comité il y a quelques semaines, un montant important est prévu pour faire remise de ces genres de prêts. La différence entre les deux programmes de prêts est la suivante: dans le cas du premier, le gouvernement fédéral garantit les prêts et dans le cas du second, le gouvernement fédéral verse une prime aux institutions financières pour garantir les prêts. On note également un changement en la matière, l'accent étant mis maintenant sur le second programme de prêts.
Le sénateur Milne: Ces chiffres ne reflètent pas du tout le non-remboursement des prêts.
M. Miller: C'est exact.
Le sénateur Milne: Il s'agit de décisions antérieures dont nous voyons maintenant les conséquences.
M. Miller: On peut également parler d'une augmentation du nombre des étudiants.
M. Massé: L'augmentation du coût est en grande partie imputable au nombre d'étudiants. Cette année, il y en a eu 385 000 contre 322 000 en 1993-1994. Le nombre d'étudiants qui bénéficient du programme augmente régulièrement.
Le sénateur Di Nino: Peut-être pourrais-je reprendre ce qu'a dit le sénateur Stratton. Les transferts de fonds aux provinces vont être réduits de quelque 7 ou 8 milliards de dollars à compter de l'an prochain.
M. Massé: Sept milliards.
Le sénateur Di Nino: Toutefois, les transferts réels ont été réduits de 4 milliards de dollars seulement environ à cause des points d'impôt supplémentaires, n'est-ce pas?
M. Massé: Oui. Les transferts aux provinces sont bien sûr calculés en fonction des points d'impôt et diminuent au fur et à mesure qu'augmentent les points d'impôt.
Le sénateur Di Nino: Vous avez également parlé de 5,5 milliards de dollars puisés chaque année à même les charges sociales dans le cadre du programme AE dont le montant est excédentaire à nos besoins en la matière pour l'instant.
M. Massé: Là encore, il ne faut pas oublier l'image de la paire de ciseaux. L'augmentation des recettes entre les mêmes exercices, soit entre 1994-1995 et 1997-1998, équivalait à 119 milliards de dollars au départ; on parle maintenant de 135 milliards de dollars. On arrive donc à une augmentation des recettes de 16 milliards de dollars, y compris les 5 milliards de dollars des cotisations.
Par contre, vous avez eu également une réduction des dépenses de 15 milliards de dollars, puisqu'elles sont passées de 120,9 milliards de dollars à 105,6 milliards de dollars. L'augmentation des recettes et la diminution des dépenses sont donc à peu près égales. Bien sûr, lorsque l'on parle de la réduction des transferts aux provinces, on ne parle que de la diminution des dépenses. On peut donc dire que les besoins totaux du gouvernement ont baissé d'un montant équivalent à l'addition des deux, ce qui nous donne un montant de 30 à 34 milliards de dollars dont la moitié est imputable à une augmentation des recettes et l'autre moitié à une diminution des dépenses.
Le sénateur Di Nino: Permettez-moi de vous poser la question de cette façon: Vous êtes en train de dire que c'est en puisant dans ces deux sources qu'une grande partie du déficit a pu être épongée, n'est-ce pas? Cela s'est fait grâce aux diminutions des paiements de transfert aux provinces et au fait que vous avez pris aux Canadiens 5 milliards de dollars de plus dans le cadre du programme AE. Cela équivaut à 10 milliards de dollars en tout.
M. Massé: La différence entre 42 et 19 milliards de dollars est 23 milliards de dollars. Sur ces 23 milliards de dollars, 10 milliards de dollars proviennent de ces sources.
Le sénateur Di Nino: C'est en fait plus que cela puisque vous réduisez les transferts aux provinces.
M. Massé: Cependant, nos recettes sont fonction des transferts de points d'impôt.
Le sénateur Di Nino: J'en suis conscient.
Dans la même veine, l'examen des programmes et du budget de 1995 prévoyait une réduction de 19 p. 100 d'ici à l'exercice 1997-1998. Si les données qui nous ont été fournies sont bonnes, elles ne représentent une réduction que de 9 p. 100, soit la moitié seulement de ce qui avait été prévu.
M. Massé: Cette donnée est inexacte. C'est pourquoi j'ai fait préparer le tableau.
Le sénateur Di Nino: Nous fournirez-vous un exemplaire du tableau pour que nous puissions en faire une analyse comparative?
M. Massé: Oui. N'oubliez pas que, chaque année, de nombreux changements sont apportés à la manière dont on répond du budget des dépenses. Par exemple, les dépenses du Conseil national de recherches étaient auparavant établies dans les comptes sur une base nette. Le vérificateur général a précisé dans son rapport qu'il conviendrait davantage d'inscrire, d'une part, les dépenses totales et, d'autre part, les recettes qui servent à contrebalancer une partie de ces dépenses. C'est pourquoi le Budget des dépenses principal fait état d'une augmentation des dépenses du Conseil national de recherches qui ne correspond pas à leur croissance réelle. Au bout de quatre ans, il faut produire une page comme celle-ci pour rapprocher les divers comptes.
Nous avons comparé les prévisions que nous avions faites dans le budget de 1995 aux données réelles. Sur quatre ans, l'écart est d'à peine 100 millions de dollars par rapport aux 9,7 milliards de dollars que nous avions prévu économiser grâce à l'examen des programmes.
Le sénateur Di Nino: Pour pouvoir faire notre travail convenablement, il faudrait à tout le moins avoir des renseignements qui nous permettraient de faire des comparaisons entre la première série de chiffres et la seconde. Il est frustrant de tenter de rapprocher les nombres qui nous sont fournis, particulièrement lorsque les normes comptables ou la façon de présenter les rapports et tout le reste ont changé.
Je ne laisse pas entendre, monsieur le ministre, qu'on le fait exprès, mais il serait utile pour nous d'avoir ces renseignements, comme l'a dit le président, pour faire des comparaisons et avoir l'air de mieux maîtriser la matière.
Le président: Monsieur Miller, quand j'ai parlé d'«exercice courant», il y a eu confusion dès le départ. Le ministre a dit que ces chiffres se fondaient sur la période allant de 1994-1995 à 1998-1999. Je souhaitais obtenir ceux de l'année 1997-1998, pour laquelle vous disiez qu'il avait une diminution de 18,6 p. 100. Je commence à y perdre mon latin. Je parlais du pourcentage de cette année, et vous êtes passé à celui de l'année prochaine. J'ignore ce qui arrivera l'année prochaine. Avons-nous ces prévisions?
M. Miller: Sur une période de quatre ans, la réduction serait de 18 ou de 19 p. 100. Dans le Budget des dépenses principal de 1997-1998, sur lequel porte l'examen de ce soir, la réduction prévue est d'environ 13,7 p. 100, pourcentage que le président a mentionné dans un autre contexte, lorsqu'il donnait des précisions. La réduction des dépenses de programme des ministères, de 1994-1995 à 1997-1998, est d'environ 13,7 p. 100, soit de 14 p. 100.
Le président: Les premières prévisions la situaient à combien?
M. Miller: C'est à peu près la même chose.
Le président: Vous voulez dire 13,7 p. 100?
M. Miller: Il faudrait que je m'en reporte au tableau et que je fasse un calcul inverse. Quand il est question de dépenses globales, il faut se rendre compte que le seul chiffre qui paraît dans le budget de 1995 porte sur une partie seulement des dépenses ministérielles. Il faut examiner le budget de 1996 pour interpréter ces chiffres. En réalité, il faut se pencher sur trois documents pour bien comprendre la situation.
Le président: Je comprends cela, mais vous parliez avec une telle assurance de 1998-1999. Il a été question de 18,6 p. 100. Je ne comprends pas pourquoi vous ne pouvez pas être aussi précis pour 1997-1998 et 1996-1997.
M. Miller: Je puis être précis en ce qui concerne 1997-1998, puisque je dis que la prévision actuelle est de 13,7 p. 100. Comme l'a mentionné le ministre, c'est l'objectif que nous visons actuellement. Il faut parfois rajuster le tir un peu.
Le sénateur Stratton: J'ai une question supplémentaire. J'aimerais revenir sur le surplus de 5,6 milliards de dollars de la caisse de l'assurance-emploi et la réduction de 4,5 milliards de dollars des transferts aux provinces, ce qui donne en tout 11,1 milliards de dollars. Il faut y ajouter les compressions effectuées dans le portefeuille des transports qui seraient de 1,8 milliard de dollars. Si on additionne ces montants, ils expliquent 13 des 15 milliards de dollars, n'est-ce pas?
Quand on additionne ces trois montants importants, il semble qu'il n'y ait pas eu beaucoup de compressions ailleurs. J'ai raison? Vous avez convenu avec nous des chiffres avancés pour le surplus de la caisse de l'assurance-emploi et pour la réduction des transferts et, s'il faut en croire le Financial Post, la réduction dans les transports serait de 1,8 milliard de dollars.
M. Massé: À nouveau, il faut prendre garde de ne pas confondre les recettes et les dépenses. Les cotisations à l'assurance-emploi font partie des recettes.
Je vous réponds sans détours. Pareil dégraissage de l'appareil gouvernemental, soit des réductions de 18 p. 100 à 19 p. 100, ne s'est pas vu depuis la Seconde Guerre mondiale.
Le niveau des dépenses fédérales par rapport au produit national brut, c'est-à-dire la meilleure mesure des dépenses totales du gouvernement, est actuellement inférieur à 12 p. 100, pourcentage qui ne s'est pas vu depuis l'exercice 1949-1950. Je fais partie du gouvernement depuis 26 ans. Durant ces 26 années, nous n'avons jamais vu de réductions aussi importantes. Nous n'avons jamais effectué des compressions de plus de 2 p. 100 ou de 3 p. 100. Grâce à l'Examen des programmes, on réalise une réduction, en termes absolus, de l'appareil gouvernemental variant entre 18 p. 100 et 19 p. 100 sur une période de quatre ans. Je parle évidemment des quatre années qu'a duré l'Examen des programmes.
Il ne faut pas se faire d'illusions. Ce que nous avons réussi à accomplir sur le plan des dépenses est sans égal. L'abolition de 55 000 postes de la fonction publique est aussi sans précédent. Cela n'est jamais arrivé depuis la Seconde Guerre mondiale.
Le président: Nous vous félicitons de cet exploit. Donc, vous n'étiez pas censés avoir réduit le déficit de 19 p. 100 en 1997-1998, comme le prétend le Financial Post, n'est-ce pas?
M. Massé: Nous étions censés réaliser des compressions, si je me souviens bien des chiffres avancés dans le budget de 1995, d'environ 18,8 p. 100 durant la période allant de 1994-1995 à 1997-1998.
Le président: Ces prévisions se concrétiseront-elles?
M. Massé: Elles se matérialiseront. Plutôt que d'obtenir une réduction de 18,8 p. 100, comme je l'ai précisé dans le document que vous recevrez dès qu'il aura été traduit, nous économiserons à peine 100 millions de dollars de moins que les 9,786 milliards de dollars prévus. En d'autres mots, la réduction atteindra presque ce que nous avions prévu.
Il y a une explication. Je me souviens des années du groupe Nielsen et des difficultés que causait l'exercice. Ce que nous avons fait, cette fois-ci, n'était pas plus facile. Nous avons décidé du pourcentage de réduction à réaliser dans les divers programmes des ministères et nous avons réduit les enveloppes en conséquence. De la sorte, les ministères n'avaient plus le droit de dépenser les fonds que nous leur avions retirés. Il n'est donc pas étonnant que les résultats soient si près de la cible.
Le sénateur Di Nino: Dans le Budget des dépenses principal, on peut lire que plusieurs dépenses prévues n'ont pas été incluses dans cet exercice. Quelques-unes d'entre elles, qui totalisent environ un milliard de dollars, avaient été prévues par le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire pour le maintien du filet protecteur et approximativement 700 millions de dollars, par le ministère de l'Industrie. Ces renseignements sont flous.
Tout d'abord, pourquoi des postes ou des dépenses qui devaient être affectés durant cette période ne sont-ils pas inclus dans ces documents? Ensuite, combien représentent ces dépenses? Je n'arrive pas à les quantifier à partir de l'information donnée.
M. Massé: Vous posez-là une bonne question. Il existe plusieurs raisons pour lesquelles des montants susceptibles d'être dépensés ne sont pas inclus dans le budget principal. Dans le Budget des dépenses principal, nous ne pouvons préciser que les dépenses qui ont été approuvées par la Chambre, et ainsi de suite. Dans le portefeuille de l'agriculture, le filet protecteur représente un amalgame de programmes visant essentiellement à protéger le revenu des agriculteurs. Ce programme n'a pas été approuvé. Nous savions plus ou moins combien il coûterait, soit 3 milliards de dollars approximativement. Nous avons donc mis ce montant en réserve pour que le Parlement sache à quoi s'attendre. Cependant, nous ne pouvons pas l'inclure dans le Budget des dépenses principal parce que nous n'avons pas l'autorisation de le dépenser.
Autre problème -- le filet de sécurité en est un exemple --, des programmes connexes des provinces, dont le coût est partagé avec le gouvernement fédéral, viennent habituellement compléter ces programmes. Souvent, nous savons que pareils programmes connexes seront mis en place. Nous avons une idée de l'argent qu'il faudra, mais comme nous n'avons pas plus de précisions à leur sujet, nous ne pouvons pas les inclure dans le budget des dépenses principal. Nous les incluons dans le montant global qui est mis en réserve. Par conséquent, le Parlement est informé, mais ces données ne figurent pas dans le Budget des dépenses principal.
En ce qui a trait au montant prévu pour l'Industrie dont vous avez parlé tout à l'heure, la principale raison pour laquelle les deux totaux diffèrent, c'est que nous avions projeté 425 millions de dollars pour le programme d'infrastructure exécuté par des organismes régionaux, montant qui sera inclus dans le budget global d'Industrie Canada. Cependant, comme le montant n'avait pas été inclus dans le budget, nous n'avions pas l'autorisation de le dépenser.
Le sénateur Di Nino: À combien s'élève ce montant?
M. Massé: Il est de 2,606 milliards de dollars.
Le sénateur Di Nino: Obtiendrait-on l'approbation de ces dépenses en présentant un budget des dépenses supplémentaire par la suite?
M. Massé: Oui. Cela figure à la partie I, page 12.
Le sénateur Di Nino: Ces postes de dépense seront-ils autorisés grâce à un budget des dépenses supplémentaire? Est-ce la façon habituelle de procéder? En d'autres mots, seront-ils soumis au même genre d'examen?
M. Miller: Bien sûr. Parfois, comme l'a mentionné le ministre, la loi autorisant les paiements n'est pas adoptée. Dès qu'elle l'est, les paiements deviennent législatifs. Tout poste de dépense exigeant l'autorisation parlementaire grâce à un crédit annuel habituel figurera dans le Budget des dépenses supplémentaire.
Le sénateur Cools: Mes questions semblent répétitives à certains et constantes à d'autres. Vous m'avez impressionnée lorsque vous avez dit que le Conseil du Trésor était en train de repenser le rôle de l'état. Moi-même, je réfléchis beaucoup au rôle du Parlement, comme de nombreux autres. Cela fait partie du problème, le fait qu'on réfléchisse sans jamais passer à l'acte.
Aujourd'hui, nous affirmons que notre processus se fonde sur l'obligation de rendre des comptes au Parlement et que l'obligation ministérielle elle-même repose sur le principe que c'est le Parlement qui contrôle les cordons de la bourse. En réalité, une grande partie de ce que certains d'entre vous faites nous échappe. Cela me préoccupe un peu, surtout quand tant de ministres manifestent ouvertement leur indifférence à l'égard du Sénat et du Parlement. Je ne parle pas uniquement du gouvernement actuel; les archives regorgent d'exemples.
J'ai une question pour vous au sujet de l'enquête sur la Somalie et de l'affaire Airbus. Ces deux dossiers me perturbent. Commençons par l'enquête sur la Somalie.
Comment le Parlement, par votre intermédiaire, peut-il obliger une commission à rendre des comptes ou contrôler les cordons de sa bourse? Tous les feux sont braqués sur la commission d'enquête sur la Somalie actuellement. Je vous parle avec beaucoup de candeur. Cette enquête est devenue une fin en soi. Tout le monde est politisé, de la GRC en passant par les forces policières jusqu'à l'appareil judiciaire. On crée une commission d'enquête et, voilà, elle s'éternise. Le ministre responsable a eu le courage de dire: «C'est assez!» Y a-t-il des limites à l'argent que pareilles commissions peuvent dépenser? Comment contrôlez-vous cela et comment pouvons-nous vous contrôler, vous?
Je suis sûr que vous partagez cette préoccupation. Comme il s'agit d'une question ardue, vous pouvez choisir soigneusement vos mots. Fondamentalement, jusqu'à quand peuvent-elles poursuivre leurs activités si on leur en donne la permission? Pourraient-elles siéger cinq ans ou plus? Qui sait?
M. Massé: Les commissions d'enquête posent un grave problème et il en était aussi ainsi, il y a environ 20 ans, lorsque je travaillais au Bureau du Conseil privé. Une fois qu'elles sont créées, elles volent de leurs propres ailes. Les ministres qui en sont alors responsables les trouvent politiquement impossibles à contrôler. Comme vous l'avez dit, nous en avons eu un bon exemple. Il en va ainsi dans toutes les commissions d'enquête.
La pression est forte pour laisser l'enquête suivre son cours tant que les membres de la Commission, et surtout son président, ne sont pas convaincus d'avoir examiné la question sous tous ses angles. Il est presque impossible de contrôler les sommes qu'elles dépensent ni la façon dont elles passent leur temps.
Les enquêtes sont, par définition, indépendantes. Le gouvernement ne peut ni devrait intervenir dans la façon dont elles accomplissent leur mandat. Toutes les fois que les commissions demandent de nouveaux crédits, si on veut les empêcher de les épuiser, il faut mettre un frein à leurs activités. Si vous le faites, vous êtes alors aux prises avec des problèmes de nature politique. C'est un problème pour lequel il n'y a pas de véritable solution à l'heure actuelle.
Le sénateur Cools: Il y a bien quelques solutions, mais nous pouvons en discuter à un autre moment. C'est le processus qui m'intéresse. J'ai observé les commissaires; certains d'entre eux ont été bien articulés et très politiques. Il ne m'a jamais été donné d'entendre des observations politiques aussi évidentes que celles qui sont sorties de leur bouche. En fait, cela me tracasse tout le temps. À qui rendent-ils compte?
M. Massé: Je serais enchanté que vous me fassiez part de vos options en ce qui a trait au contrôle car nous avons besoin de conseils à cet égard.
Le sénateur Cools: Je voulais les garder en réserve pour les fins de la discussion.
Monsieur le président, je vous fais souvent le coup, mais il s'agit d'une question à laquelle nous pourrions consacrer une réunion complète, sinon deux ou trois. Nous pourrions y examiner les travaux de ces commissions de même que le contrôle parlementaire des fonds qui leur sont versés. C'est une question délicate et difficile. Si nous avions mieux fait face à la situation, nous n'aurions pas eu autant de problèmes.
Le président: Je ne suis pas surpris de cette tendance. Je n'ai jamais vu un programme gouvernemental, encore moins une commission, qui ait respecté un échéancier. On ne peut tout simplement freiner la croissance. C'est dans la nature des choses.
Le sénateur Cools: Ma prochaine question porte sur le contrôle parlementaire d'un ministère. Je pense plus particulièrement à l'affaire Airbus sous le gouvernement Mulroney. Nous avions interrogé le sous-ministre. Certains d'entre nous ont essayé de savoir combien d'argent avait été versé au cabinet d'avocats et à l'avocat. Nous avons eu beaucoup de mal à faire parler le sous-ministre. Bien sûr, il insistait pour se protéger, même s'il n'y est pas parvenu, en invoquant le fait que la question était devant les tribunaux. Comme vous le savez, c'est un non-sens. À d'autres occasions, ils se cachent derrière le secret professionnel, ce qui est également un non-sens.
Dans un cas comme celui-ci, vous êtes notre maître trésorier. Nous sommes censés vous tenir responsable. Vous ne vous sacrifierez pas comme au temps du roi Charles, mais vous devez rendre des comptes. Que peut faire le Parlement pour obliger les ministres et leur personnel à rendre davantage compte de l'argent dépensé?
Nous étions assis ici et nous avons entendu des hauts fonctionnaires nous dire: «Eh bien! nous lui avons versé tel montant.» Nous pourrions penser qu'ils parlent de 5 ou 10 dollars. Cela me préoccupe. C'est une question que je poserai et reposerai tant que je n'aurai pas eu une réponse. Le gouvernement est tenu de dépenser l'argent des contribuables de façon responsable.
M. Massé: Une des meilleures façons de s'assurer que ministres et fonctionnaires sont responsables consiste sans aucun doute à les faire venir à une séance comme celle-ci et à leur poser des questions pointues jusqu'à ce que vous soyez raisonnablement satisfaits des réponses.
Du point de vue du Conseil du Trésor, il s'agit évidemment d'une question primordiale que nous posons de deux façons. Premièrement, y a-t-il une manière de présenter les comptes publics qui permette aux députés et aux sénateurs de savoir avec plus de précision ce que représente un programme et ce qu'est son objectif et qui leur permette, par ailleurs, de pouvoir juger assez rapidement si ce programme est correctement mis en oeuvre? Nous l'avons fait en introduisant le concept de l'évaluation des résultats. Vous en avez été témoins dans les 16 ministères pilotes qui le mettent en application cette année, et, je l'espère aussi, l'an prochain.
C'est par les méthodes comptables et par toute une série de facteurs liés à la mise en oeuvre d'un programme que l'on a toujours évalué les résultats des ministères. Vous avez alors la tâche difficile de dire: «Si vous n'avez pas dépensé ce que vous aviez prévu pour cet article, ce poste ou ce programme, pouvez-vous nous en donner les raisons?»
Nous essayons de faciliter la tâche des députés de manière qu'ils comprennent ce qui se passe, qu'ils posent les bonnes questions et qu'ils forcent les fonctionnaires et les ministres à être responsables. Chaque programme devrait être assorti d'une série de résultats concrets et mesurables pour que l'on puisse en évaluer le succès. Par exemple, s'il s'agit d'un programme d'emploi qui vise à ramener des gens sur le marché du travail, il faudrait avoir des indicateurs montrant que pour tant de dollars, on a pu ramener tant de personnes sur le marché du travail, et cetera.
Ce projet est en cours. C'est un important élément du renouveau du gouvernement. Il est bien sûr question de cette notion de résultats depuis des années. Nous la mettons en application comme il le faut, mais peut-être pas assez rapidement.
Actuellement, 16 ministères ont adopté cette approche fondamentale. J'espère que d'ici 2 ans, le système se sera complètement transformé et aura adopté cette méthode.
Le sénateur Milne: Le ministère de la Santé est-il compris dans ces 16 ministères?
M. V. Peter Harder, secrétaire du Conseil du Trésor et contrôleur général du Canada: Oui, c'est l'un des 16 ministères pilotes qui s'occupe du Projet d'amélioration des rapports au Parlement.
Le sénateur Kelly: Monsieur le ministre, j'aimerais tout d'abord vous féliciter, ainsi que vos fonctionnaires, étant donné que vous répondez parfaitement bien à ce contre-interrogatoire que nous vous faisons subir.
Je voudrais parler de ce que renferment véritablement les livres et ma question se rapporte à celle que le vérificateur général a récemment posée au sujet du moment et de l'année de l'enregistrement d'un élément donné. Je donnerais l'exemple de la Fondation canadienne pour l'innovation. Cette fondation représente 800 millions de dollars pour l'exercice en cours. Ces fonds n'ont pas été dépensés. Le ministre des Finances a dû répondre à des questions à ce sujet. Il s'est exprimé en ces termes: «Prenez leurs profits, mais reconnaissez votre passif.» Je le comprends parfaitement. Bien sûr, le gouvernement n'a pas de bilan. Toutefois, il reconnaît que cette décision qui représente 800 millions de dollars aura un effet sur les années à venir mais pas sur celle-ci. Toutefois, je crois que ce montant figure dans les livres de cette année.
En même temps, l'été dernier, 300 millions de dollars ont été annoncés pour le Programme de partenariats technologiques. Rien de cela n'apparaît dans les livres du présent exercice, mais plutôt dans les livres du prochain exercice.
Quelqu'un de mesquin pourrait dire que nous déplaçons tous ces dollars pour arriver au résultat annuel que nous recherchons.
Bien sûr, je comprends qu'il n'est pas inhabituel pour un fabricant de refiler à ses distributeurs toute la marchandise qui lui reste vers la fin de l'année. Tout va être vendu; en attendant, l'entrepôt du fabricant est vide et ses livres paraissent assez bien pour cette année. Ce n'est pas illégal. Sur une période de quatre ans, tout finit par s'équilibrer. Je le comprends, mais existe-t-il une politique qui vous conseille en la matière?
M. Massé: Ce sont plutôt des principes comptables généraux que je connais assez bien, mais mes fonctionnaires connaissent les règles beaucoup mieux que moi. Selon le principe dont nous avons discuté pour la fondation de recherche et développement, ce qui compte, c'est l'année au cours de laquelle une dépense est non seulement annoncée, mais aussi affectée, selon certaines règles stipulant que le gouvernement ne peut pas intervenir pour réaffecter le montant en question.
Le sénateur Kelly: A-t-il un pouvoir de prélèvement?
M. Harder: La dépense a été faite.
M. Massé: Selon cette règle, si par exemple la fondation est une opération sans lien de dépendance et que nous pouvons lui envoyer le chèque nécessaire pour les dépenses qu'elle va faire au cours de l'exercice, c'est «faisable».
Le sénateur Kelly: Est-ce imputé au budget de cet exercice?
M. Massé: Le contrôleur général pourrait peut-être répondre à cette question.
M. Harder: Nous fermons les livres quelque temps après la fin de l'exercice, vers juillet ou août habituellement. Les comptes publics sont généralement disponibles en septembre. Le ministre a tout à fait raison. Lorsque nous fermons les livres, il est possible d'enregistrer plusieurs éléments si la dépense a été faite au cours de la période en question.
Dans le cadre de leurs discussions, le Bureau du contrôleur général, le vérificateur général et le ministère des Finances respectent les principes comptables généralement reconnus.
Le vérificateur général approuve évidemment les comptes publics, lesquels portent trois signatures. S'il a quelques réserves au sujet des principes comptables ou de la façon dont nous avons procédé, il nous en fait part.
Il n'a pas émis de réserves depuis un bon nombre d'années. Je ne me souviens pas de la dernière fois où il l'a fait. On discute souvent pour savoir si la dépense a été faite et comment les principes qui nous guident -- les principes comptables reconnus -- permettent de répondre le mieux possible aux plans d'action du gouvernement.
Le sénateur Kelly: Cela n'explique pas toutefois les deux programmes que j'ai décrits. Ils sont allés dans deux directions opposées.
M. Harder: Pour ce qui est de la Fondation canadienne pour l'innovation, nous n'avons pas encore décidé quand enregistrer cet élément, parce que la loi n'a pas encore été adoptée. Le vérificateur général et d'autres parties intéressées en débattent actuellement.
M. Miller: Monsieur le sénateur, pour ce qui est du second point, bien que le programme ait été annoncé comme vous l'avez indiqué, ce n'est que lorsque la dépense sera faite que le passif sera indiqué. Dans ce cas précis, des accords de contribution doivent être signés, mais pas avant l'exercice 1997-1998. Cela a été annoncé, mais aucune dépense n'a été faite au cours de 1996-1997. Par conséquent, cette dépense devrait se faire au cours de l'exercice suivant, lorsque ces accords seront signés ou lorsque le passif sera indiqué.
Le sénateur Kelly: Vous pouvez comprendre pourquoi tout cela est déroutant, à première vue.
M. Harder: Vous vous rappelez sans doute des discussions qui ont eu lieu l'année dernière sur le coût de l'harmonisation de la TPS.
Le sénateur Kelly: Oui.
M. Harder: Vous remarquerez que, au bout du compte, le vérificateur général n'a pas émis de réserves. Il a cependant fait quelques observations, car nous étions dans une zone grise; c'est le genre de discussions que nous avons.
Le sénateur Kelly: J'ai eu des discussions intéressantes avec le vérificateur général à ce sujet, parce qu'il vous donne un bon rapport. Il approuve vos comptes, mais finit par publier un document dans lequel il émet toutes sortes de réserves. Cela ne correspond pas à ma façon de penser. Soit le rapport est bon, soit il ne l'est pas.
Le président: Le passif est normalement enregistré lorsqu'une loi -- ou autre chose -- donne effet à tel ou tel programme. Est-ce habituellement à ce moment-là que le passif est enregistré dans les livres?
M. Harder: Si la dépense a été faite et que le gouvernement n'a pas d'autre choix que de payer, il convient de l'enregistrer pour l'exercice en cours.
Le président: Est-ce la raison pour laquelle l'enregistrement relatif à la taxe de vente harmonisée s'est fait l'année dernière?
M. Harder: Oui. Vous vous souvenez sans doute de l'accord conclu entre les gouvernements intéressés au sujet de certaines dépenses.
Le président: Cet accord n'a-t-il pas été conclu en avril?
M. Harder: La dépense a été faite avant le 1er avril, que la loi ait été adoptée ou non.
Le président: La loi n'a pas été adoptée avant cette année, cependant.
M. Miller: On peut citer également l'exemple d'un programme d'aide pour les agriculteurs et les producteurs dont l'annonce a été faite. Le vérificateur général a dit qu'il fallait indiquer ces 800 millions de dollars pour cette année, même si le Parlement n'avait pas approuvé ce programme et qu'il n'avait aucune responsabilité légale en la matière, puisqu'il s'agissait d'une subvention. Cela s'explique par le fait que ces 800 millions de dollars de paiement devaient être calculés en fonction des agriculteurs propriétaires qui avaient produit des récoltes l'année précédente. Au chapitre de la comptabilité, le vérificateur général voulait que le gouvernement reconnaisse ce passif même si, techniquement parlant, il aurait été illégal de faire cette dépense à ce moment-là. Il fallait attendre que le Parlement l'autorise.
Le président: Dans le cas d'un procès comme celui relatif à l'aéroport Pearson, aurait-on enregistré un passif éventuel ou un passif réel en attendant l'issue possible du procès, puisque ce procès durait déjà depuis deux ans? Le gouvernement avait déjà dit qu'il y aurait un passif, mais il n'en connaissait pas le montant. Auriez-vous enregistré cette dépense éventuelle quelque part?
M. Miller: Des passifs éventuels sont effectivement prévus dans les livres du Canada. C'est une compilation des divers procès et des diverses issues auxquelles on peut s'attendre. Bien évidemment, le montant exact n'est pas indiqué tant que le tribunal n'a pas rendu son jugement, mais par mesure de prudence comptable, une réserve ou un montant est mis de côté à cet effet. Cela se fait chaque année.
Le président: Comment arrivez-vous à ces chiffres?
M. Miller: Je n'ai heureusement pas à les calculer. C'est le ministère des Finances qui s'en charge. Il demande à chaque ministère quels sont ses passifs en cours ou passifs éventuels, ainsi que ses cas en instance. Il y a aussi ce que l'on appelle les poursuites sans fondement. Quelqu'un peut glisser sur un trottoir.
Le président: Quel montant est prévu?
M. Miller: Je n'en suis pas sûr. C'est précisé dans les Comptes publics. Je n'ai pas ce document ici, mais nous pourrions probablement vous le dire demain.
Le président: Cela paraîtrait sous quel ministère?
M. Miller: Autant que je sache, c'est pour le gouvernement dans son ensemble, plutôt que pour un ministère en particulier. Cela figure dans les états financiers du gouvernement du Canada.
Le sénateur Kelly: C'est probablement un montant global.
Le président: Ce serait combien, 50 millions de dollars?
M. Miller: Ce pourrait être beaucoup plus élevé. C'est habituellement beaucoup plus élevé, mais je ne connais pas le montant exact.
Le sénateur Taylor: En ce qui concerne les transferts aux provinces pour l'enseignement postsecondaire, les contributions du gouvernement fédéral ont diminué. Avez-vous fait une étude pour savoir si les provinces règlent le problème de ce manque à gagner sur le dos des étudiants, lesquels doivent ainsi faire de plus gros emprunts? En d'autres termes, cette diminution des subventions aux provinces ne se traduit-elle pas par des prêts étudiants plus élevés?
M. Harder: Aucune équation linéaire ne donnerait ce résultat. Vous ne pouvez pas dire que c'est parce que les frais de scolarité ont augmenté que les prêts que demandent les étudiants sont plus élevés. Toutefois, il ne serait pas déraisonnable de dire qu'il y a un lien entre les deux, mais l'équation n'est pas linéaire et cela n'explique pas la raison pour laquelle plus d'étudiants font des demandes de prêts, si ce n'est peut-être que la demande est plus forte.
Il serait faux de dire que les provinces font subir directement et intégralement les conséquences d'une diminution des contributions postsecondaires aux étudiants, et que cela réapparaît dans les comptes du gouvernement du Canada sous forme de demandes de prêts étudiants. Il faut avoir une vision plus globale de l'ensemble des dépenses.
Le sénateur Taylor: Avez-vous pareille vision? Ne sommes-nous pas en train de voler Pierre pour payer Paul, en supposant que Paul est un étudiant?
M. Harder: Nous n'avons pas fait cette analyse au conseil.
M. Massé: C'est une bonne idée. J'aimerais en connaître la réponse.
Le sénateur Taylor: De combien ont augmenté les taux de recouvrement des coûts de l'agriculture ces dernières années? Le recouvrement des coûts est à la mode aux États-Unis et j'imagine que ce mal va bientôt s'étendre sur le Nord.
M. Miller: Dans l'un des 80 volumes qui font partie du Budget des dépenses principal, un tableau répond exactement à la question que vous posez, soit l'évolution des taux de recouvrement des coûts.
Le président: Pourriez-vous nous préciser le volume en question?
Le sénateur Forest: On a beaucoup parlé des compressions, monsieur le ministre, mais je m'intéresse à un ministère qui a bénéficié d'une augmentation de son budget; je veux parler du ministère du Développement des ressources humaines. Je remarque que le budget du programme de sécurité du revenu a augmenté de plus de 400 millions de dollars. Il s'agit essentiellement de la sécurité de la vieillesse, et cetera.
Comment l'expliquez-vous? Est-ce à cause des changements démographiques?
M. Massé: Cette augmentation est essentiellement attribuable aux changements démographiques; on prévoit en fait une augmentation du nombre de bénéficiaires de la sécurité de la vieillesse. L'indexation tient également compte d'une partie de cet écart, mais dans certains cas, l'impact global est compensé par des changements au niveau des caractéristiques des bénéficiaires.
Essentiellement, c'est la pyramide des âges qui explique cette différence, ainsi que l'indexation, bien sûr.
Le sénateur Forest: C'est ma première année au sein de ce comité. Y a-t-il eu une augmentation progressive sur cette période de quatre ans?
Le président: Madame le sénateur, le ministre ne peut pas tout savoir sur l'ensemble du gouvernement. Nous pourrons peut-être aborder cette question demain.
Si j'ai bien compris, le gouvernement devait réduire ses coûts de fonctionnement de 18,6 ou 19 p. 100 entre 1994-1995 et 1997-1998, mais maintenant cela a été reporté à 1998-1999, n'est-ce pas?
M. Massé: Non. Entre 1994-1995 et 1998-1999...
Le président: Nous serons arrivés à une diminution de 18,6 p. 100?
M. Massé: Oui, entre 18,2 et 18,8 p. 100.
Le président: Je voulais être sûr de ne pas me tromper.
Merci, monsieur le ministre et messieurs les fonctionnaires.
La séance est levée.