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Sous-comité de l'éducation postsecondaire au Canada

 

Délibérations du sous-comité de l'enseignement postsecondaire
du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 2 - Témoignages du 31 octobre


OTTAWA, le jeudi 31 octobre 1996

Le sous-comité de l'enseignement postsecondaire du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 9 heures pour poursuivre son examen de l'enseignement postsecondaire au Canada.

Le sénateur M. Lorne Bonnell (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous avons avec nous ce matin M. Doug Lynd, directeur adjoint du Centre des statistiques de l'éducation et M. John Jackson, chef de la section de l'enseignement postsecondaire.

Vous avez la parole.

M. Doug Lynd, directeur adjoint, Centre des statistiques de l'éducation: Monsieur le président, je m'excuse de ne pas avoir apporté de documentation mais nous n'avons appris que vendredi dernier que nous comparaissions aujourd'hui. Vous aurez bien sûr l'occasion de nous poser des questions. Nous nous ferons un plaisir de préparer de la documentation à l'intention du comité, en fonction des questions qui l'intéressent.

Ce matin, nous aimerions vous présenter brièvement notre programme et, plus précisément, des htmects de notre programme susceptibles d'intéresser directement le comité.

Je commencerai par vous faire un bref historique de notre programme et M. Jackson vous donnera des chiffres sur les htmects qui vous intéressent.

Lorsque j'ai entendu parler de votre comité, je me suis d'abord interrogé sur la définition même de l'enseignement postsecondaire, car c'est l'un des htmects qui nous a posé des difficultés au cours des nombreuses années pendant lesquelles j'ai travaillé à notre programme. Manifestement, comme il existe une douzaine de systèmes d'enseignement différents au Canada, dont la structure organisationnelle varie, il est parfois difficile de grouper des programmes similaires dans la catégorie de l'enseignement postsecondaire. Dans bien des cas, nous avons utilisé la classification type internationale de l'éducation élaborée par l'UNESCO et avons essayé de nous y tenir de notre mieux pour définir l'enseignement postsecondaire au Canada.

Cette structure de classification particulière est en train d'être revue, ce qui risque en fait de modifier les programmes que nous inclurons à l'avenir dans l'analyse de l'enseignement postsecondaire, du moins en ce qui concerne les organismes internationaux et les statistiques comparatives internationales.

Voici un bref historique de notre programme à Statistique Canada: selon le mandat que nous confie la Loi sur la statistique, nous sommes chargés de recueillir, d'analyser, de synthétiser et de publier des données statistiques sur l'éducation au Canada. C'est ce que fait la Division de l'éducation de Statistique Canada depuis la création du Bureau fédéral de la statistique en 1919.

Ce programme vise tous les ordres d'enseignement et tous les établissements d'enseignement mais comme le comité étudie l'enseignement postsecondaire, je mettrai l'accent sur cet htmect.

Le président: Vous pourriez peut-être nous donner d'abord la définition de l'enseignement postsecondaire adoptée par Statistique Canada pour que nous sachions de quoi nous parlons.

M. Lynd: À l'heure actuelle, pour Statistique Canada, l'enseignement postsecondaire correspond aux études qui suivent les études secondaires. Par conséquent, on considère que l'ensemble de la formation professionnelle et technique offerte dans des collèges faire partie de l'enseignement postsecondaire. La difficulté qui se pose au Canada, dans certains cas, c'est que la formation professionnelle et technique est offerte au Québec par les commissions scolaires dans le cadre de leur programme de formation des adultes. Cependant, à des fins de statistiques comparatives, nous rangeons les programmes de formation professionnelle et technique offerts par les commissions scolaires dans la catégorie des programmes d'enseignement postsecondaire.

Le sénateur Lavoie-Roux: Pour les adultes et non pour les jeunes.

M. Lynd: Pour les jeunes aussi.

Le sénateur Lavoie-Roux: Êtes-vous en train de dire que la formation qu'ils reçoivent à l'école secondaire est une formation postsecondaire?

M. Lynd: Ils reçoivent un programme semblable. Au Québec, il s'agit de l'éducation des adultes.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je connais bien le système. Au Québec, vous avez l'école primaire et l'école secondaire. À l'école secondaire, à partir de la troisième ou de la quatrième année, vous pouvez décider d'opter pour une formation professionnelle et technique mais à mon avis cela fait partie de l'école secondaire. Certains poursuivent leurs études dans le cadre de la formation générale ou régulière et d'autres...

[Français]

D'autres bifurquent vers l'enseignement professionel, mais ils sont encore considérés comme des étudiants du cours secondaire, et non pas comme des étudiants du post-secondaire. Maintenant, si vous parlez des adultes, c'est une chose différente. Les adultes qui suivent des cours du soir dans les commissions scolaires, qu'ils soient considérés comme des étudiants du post-secondaire, je n'ai pas de problème, mais, que vous commenciez à considérer les enfants comme des étudiants du post-secondaire, c'est un peu surprenant.

Alors, je ne suis pas certaine, en tout cas pour le Québec, que vos statistiques vont être exactes. Dans les autres provinces, est-ce qu'il y en a au niveau du secondaire qui reçoivent de l'enseignement technique ou de l'enseignement professionel?

[Traduction]

M. Lynd: Il existe des programmes de formation professionnelle et technique dans les écoles secondaires d'autres provinces mais ils sont souvent combinés aux programmes de formation générale. C'est la même chose au Québec où un programme d'études secondaires offrira une certaine formation technique, mais les commissions scolaires établissent des catégories séparées de programmes, dont toute une division consacrée à l'éducation des adultes. Cette division offre une formation professionnelle et technique. Certains jeunes peuvent s'inscrire à ce programme pour adultes.

Le sénateur Lavoie-Roux: Poursuivons. J'ai fait partie de la plus grande commission scolaire au Canada pendant des années, donc je sais très bien ce qu'est une école secondaire.

M. Lynd: Je suis persuadé que vous aurez l'occasion de parler aux représentants du ministère de l'éducation du Québec, et ils vous indiqueront que les programmes qui font partie de l'éducation des adultes sont offerts par les commissions scolaires.

Le sénateur Lavoie-Roux: Oui, je sais.

M. Lynd: En ce qui concerne ce programme en particulier, que les étudiants qui suivent les programmes de formation professionnelle et technique soient des adultes -- c'est-à-dire âgés de 18 ou plus -- ou soient plus jeunes, ils sont inclus dans nos statistiques postsecondaires parce qu'il s'agit d'un programme comparable aux programmes similaires offerts dans les collèges du reste du pays.

Le sénateur Lavoie-Roux: Nous avons un système différent au niveau du cégep, qui pourrait peut-être être comparé aux collèges communautaires dans le reste du Canada. Il diffère du programme de formation professionnelle ou technique offert par les écoles secondaires. Comme le cégep n'offre pas tous ces programmes, je ne suis pas sûre que vos statistiques soient vraiment exactes si elles s'appuient sur cette hypothèse.

M. Lynd: Nous espérons qu'elles le sont. Vous avez raison, à cause des définitions, il est parfois difficile de déterminer dans quelle catégorie se rangent ces programmes. Pour qu'il y ait comparabilité dans la définition de l'enseignement postsecondaire, nous devons parfois rajuster les données provenant des systèmes provinciaux parce que les programmes sont offerts à des niveaux différents ou par des établissements différents.

En ce qui concerne le Québec, les programmes dont nous parlons sont offerts par les commissions scolaires. Dans d'autres provinces, ils sont offerts par des structures collégiales qui possèdent des divisions de formation professionnelle ou technique. Pour rassembler des statistiques semblables, nous rassemblons les données sur le taux d'inscription, le personnel et le financement des programmes offerts à différents niveaux.

En ce qui concerne l'enseignement postsecondaire, je me suis demandé si le comité allait examiner les programmes de formation professionnelle et technique qui peuvent être offerts ou non par les commissions scolaires au pays.

Le président: Nous l'espérons. Jusqu'à présent, nous nous en remettons à Statistique Canada pour apprendre ce que fait le gouvernement fédéral dans le domaine de l'éducation.

Le sénateur Lavoie-Roux: Ce sont vos statistiques.

M. Lynd: À des fins d'explication seulement, je diviserai notre programme de statistiques sur l'enseignement postsecondaire en deux parties: la première comporte des enquêtes annuelles destinées à recueillir de l'information provenant des dossiers administratifs des écoles, et la deuxième comporte des sondages destinés à obtenir de l'information de particuliers. Ce sont les deux différentes sortes de données dont nous disposons sur l'enseignement au Canada.

Cette ventilation correspond presque exactement au financement de ces programmes, puisque les enquêtes administratives sont financées à même le budget central de Statistique Canada, et les sondages sont surtout financés au moyen du recouvrement des coûts ou de contrats passés avec nos clients. L'un de nos importants clients dans ce domaine est le ministère du Développement des ressources humaines du Canada.

Nos enquêtes administratives ont lieu chaque année et servent à recueillir des statistiques de flux et de stock sur les étudiants, le personnel enseignant, les revenus et les dépenses des établissements postsecondaires.

Nous faisons des enquêtes spéciales périodiquement, en fonction des besoins en information et de la capacité de financement de nos clients. Il pourrait s'agir dans certains cas de sondages auprès de diplômés récents et d'étudiants pour obtenir de l'information qui ne se trouveraient pas normalement dans les dossiers administratifs des écoles qu'ils fréquentent. On est en train de prévoir des enquêtes supplémentaires pour examiner les transitions chez les jeunes et les tendances que l'on constate chez eux au niveau de la fréquentation scolaire, de leur entrée sur le marché du travail, de leur retour aux études et ainsi de suite. Pour obtenir ce genre de renseignement, il faut habituellement consulter les personnes mêmes, donc faire un sondage plutôt que d'examiner les données administratives des écoles.

Simplement pour vous donner une idée de l'importance de notre programme au sein de Statistique Canada, notre budget est de 5,1 millions de dollars dont 1,7 million de dollars est destiné aux statistiques sur l'enseignement postsecondaire.

Je terminerai en abordant brièvement un fait très récent. Il y a deux jours, le service de Statistique Canada chargé de décrire la situation de l'éducation au Canada était connu sous le nom de sous-division de l'Éducation. Mardi de cette semaine, ce service a officiellement changé de nom et est devenu le Centre des statistiques de l'éducation. En quoi sera-t-il différent? Le Centre des statistiques de l'éducation devra présenter chaque année son plan stratégique en fonction duquel il fournira de l'information sur l'éducation au Conseil des statistiques canadiennes de l'éducation, à titre d'indication et d'orientation.

Le Conseil des statistiques canadiennes de l'éducation se compose du statisticien en chef et des sous-ministres provinciaux responsables de l'éducation. Désormais, notre centre travaillera en collaboration avec les provinces et les territoires, le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada et Statistique Canada.

Après cette très brève introduction de notre programme général, je céderai la parole à M. Jackson qui vous décrira brièvement certaines des statistiques que nous rassemblons et qui pourraient vous intéresser.

M. John Jackson, chef, Section de l'enseignement postsecondaire, Statistique Canada: Suite à un entretien que j'ai eu avec Grant Purves de la Bibliothèque du Parlement, l'attaché de recherche de votre comité, je crois comprendre que le comité s'intéresse à la question de l'endettement de plus en plus grand des étudiants et de son impact possible sur l'accès aux études supérieures. Je me suis donc penché sur cette question en particulier et j'espère que mes renseignements vous seront utiles.

J'aimerais aborder brièvement la question du financement des universités, surtout le rapport entre le montant versé par le gouvernement et le celui versé par l'étudiant. J'aimerais parler de l'inscription dans les universités et collèges au cours des quinze dernières années, soit depuis 1980, puis traiter de certains facteurs, autres que les frais de scolarité, qui influent sur le taux d'inscription: la situation économique et démographique, la taille du groupe qui fait des études, le principal groupe d'âge scolaire et enfin la question des taux de participation, c'est-à-dire la proportion de la population d'âge scolaire qui fait des études.

Pour ce qui est de définir l'enseignement postsecondaire, j'ai examiné principalement les universités et dans une certaine mesure les collèges. Lorsque je parle de «collèges», je parle des programmes de formation professionnelle de deux et trois ans, à l'exclusion des programmes plus difficiles à définir comme les programmes internes ou externes de formation technique et d'éducation des adultes.

En ce qui concerne le financement de l'enseignement postsecondaire, la grande partie du financement des universités provient du gouvernement et le reste des frais de scolarité et d'autres sources comme les dons et les investissements.

En 1980, les subventions du gouvernement représentaient 84 p. 100 des revenus de fonctionnement des universités et les frais de scolarité 13 p. 100 de ces revenus. En 1989, la part du gouvernement représentait 80 p. 100 et celle des étudiants 17 p. 100. Il s'agit d'une hausse assez importante. Bien qu'au cours de cette période, les subventions gouvernementales à l'enseignement postsecondaire aient augmenté d'environ 15 p. 100 en termes réels, les frais de scolarité sont passés à 89 p. 100. On constate donc un certain rééquilibrage.

Cette tendance s'est accélérée au cours des années 90, et en 1995, les subventions gouvernementales avaient été ramenées à 72 p. 100 alors que les frais de scolarité avaient augmenté et représentaient 24 p. 100 de l'ensemble des revenus. Cela reflète une augmentation supplémentaire de 47 p. 100 des frais de scolarité depuis 1989. D'ailleurs, nous avons pu constater récemment dans les journaux et d'après les données de l'IPC rendues publiques il y a environ une semaine, que cette année l'augmentation des frais de scolarité d'une province à l'autre a varié entre 0 et 20 p. 100. Cette augmentation de 20 p. 100 a été enregistrée en Ontario. Donc, l'augmentation moyenne cette année seulement dans l'ensemble du pays a été de 11,8 p. 100.

Dans une autre optique, en 1980, le ratio entre les subventions gouvernementales et chaque dollar perçu en frais de scolarité était de 6,44 $. En 1995, ce ratio a été ramené à 2,97 $, ce qui représente un autre changement important sur le plan de ce rééquilibrage.

En ce qui concerne les collèges, au cours de la même période, ce changement a été beaucoup moins prononcé. Nous n'avons pas de chiffres fiables avant 1984. En 1984, les subventions gouvernementales représentaient 89 p. 100 des revenus de fonctionnement et les frais de scolarité 9 p. 100. En 1993, les subventions représentaient 82 p. 100 des revenus et les frais de scolarité 12 p. 100. Les frais d'inscription au niveau collégial sont également beaucoup moins élevés que les frais d'inscription au niveau universitaire. Par conséquent, même s'ils ont augmenté, il s'agit d'une augmentation sur une base beaucoup plus restreinte.

Le rapport entre les frais de scolarité et le taux d'inscription présente un contraste assez marqué. En ce qui concerne les universités, entre 1980 et 1989, le nombre d'étudiants inscrits à temps plein à l'université a augmenté de 35 p. 100 et ce, malgré une diminution assez importante du nombre d'étudiants d'âge universitaire. Il s'agit du groupe d'âge de 18 à 21 ans et qui va, dans une certaine mesure, jusqu'à 24 ans. C'est donc une hausse très importante de 35 p. 100. L'inscription à temps partiel au cours de la même période a augmenté de 24 p. 100.

Au début des années 90, il semblait de prime abord que les étudiants continueraient de s'inscrire en nombre sans précédent. Cependant, en 1992, pour la première fois en sept ans, le taux de croissance a commencé à fléchir. La tendance s'est poursuivie en 1993 et 1994. Le nombre d'inscriptions a continué d'augmenter à un rythme qui s'est toutefois relâché. Pas plus tard qu'en 1995, le nombre d'inscriptions d'étudiants à plein temps avait diminué d'un peu moins de 1 p. 100. Il s'agit du premier fléchissement depuis 1990.

Dans l'intervalle, l'inscription universitaire des étudiants à temps partiel a connu une baisse spectaculaire, après deux décennies de croissance presque soutenue. Les pertes importantes se sont produites en 1993, 1994 et 1995, alors que le nombre total d'étudiants universitaires à temps partiel en 1995 est revenu en fait au niveau de 1982.

En ce qui concerne les collèges, entre 1981 et 1989, le nombre d'inscriptions à plein temps aux programmes d'une durée de deux ou trois ans s'est accru de 19 p. 100, ce qui est une augmentation moindre que dans les universités. À la différence des universités, toutefois, l'inscription pour les études à plein temps dans les collèges a connu une nouvelle hausse soutenue dans les années 90 -- de 1989 à 1995, on parle de 29 p. 100 -- même si nous avons remarqué qu'à partir de 1993, 1994 et 1995 ce taux d'accroissement a ralenti, pour commencer à plafonner. Même si l'inscription aux programmes à temps partiel a continué de progresser jusqu'en 1994, nous avons commencé à remarquer dans les données préliminaires de 1995 une baisse importante. C'est un tableau intéressant, et j'exprime ici mon point de vue, parce que je viens tout juste d'examiner les données.

En dépit du fait que les frais de scolarité ont commencé à augmenter considérablement à partir de 1981 -- soit dit en passant c'est à ce moment que les frais de scolarité étaient les plus bas par rapport au revenu familial et à la capacité des étudiants de gagner de l'argent -- nous avons aussi constaté une hausse importante des inscriptions. Il ne semble pas y avoir de lien direct, si ce n'est que nous commençons à voir un certain plafonnement.

Ce plafonnement pourrait être attribuable à un certain nombre de facteurs autres que les seuls frais de scolarité. Ceux dont j'aimerais parler sont l'état de l'économie, la démographie et les taux de participation, des facteurs vraiment importants lorsque l'on étudie les tendances générales en ce qui a trait à l'inscription.

En ce qui concerne l'économie, l'augmentation du nombre d'inscriptions était évidente pendant la récession de 1982-1983 de même qu'entre 1990 et 1992. Il semblerait que, en raison du manque de débouchés, le nombre d'inscriptions augmente parce que les jeunes optent pour l'éducation permanente. À l'opposé, lorsque la conjoncture s'améliore, on constate que le nombre d'inscriptions recommence à baisser, les jeunes se tournent vers le marché du travail. Voilà qui pourrait expliquer en partie, plus qu'un lien direct avec les frais de scolarité, cette baisse du nombre d'inscriptions dans les universités.

Il est un peu plus difficile de prendre en compte les données démographiques, parce qu'elles sont légèrement obscurcies par les taux de participation, dont je parlerai dans un instant. Comme je l'ai dit plus tôt, étant donné une diminution importante de la cohorte d'âge pendant les années 80, on pourrait s'attendre à une baisse plutôt qu'à une hausse du nombre d'inscriptions. Au cours des années 90, la cohorte a plafonné, alors que l'on se serait attendu, tout bien considéré, à un ralentissement de l'inscription, mais une fois de plus celle-ci a augmenté puis a un peu décru. Je le répète, il est un peu difficile de voir l'impact de la démographie derrière ce phénomène, même si ce sera un facteur.

Le taux de participation s'entend de la proportion de tout groupe d'âge donné qui fréquente le collège ou l'université. Le groupe d'âge principal est celui des 18-21 ans. En 1980, le taux de participation se situait autour de 10 p. 100. Pas plus tard qu'en 1994, il était passé à 17 p. 100 de sorte que le taux de participation du groupe d'âge-clé des universitaires a beaucoup augmenté, ce qui est très positif pour le Canada. À l'heure actuelle, le Canada occupe le deuxième rang derrière les États-Unis pour ce qui est des taux de participation, devant tous les autres pays de l'OCDE.

Il y a certaines autres questions qui peuvent vous intéresser et que j'aimerais aborder. Si les frais de scolarité augmentent, si l'accessibilité est touchée, est-ce que les étudiants prennent plus de temps pour terminer leurs études parce qu'ils doivent les interrompre pour travailler, parce qu'ils doivent travailler plus longtemps pour mettre l'argent de côté afin de poursuivre leurs études?

L'âge moyen des étudiants universitaires n'a que légèrement augmenté depuis 1980. Par exemple, alors qu'en 1980 un peu plus de 60 p. 100 des étudiants du premier cycle avaient moins de 22 ans, aujourd'hui c'est un peu moins de 60 p. 100. Il s'agit donc d'un très petit changement. Cela semble être dû au fait que les étudiants prennent plus de temps pour obtenir leur diplôme et je parle ici des étudiants qui sont inscrits à plein temps. L'impression est que la concurrence au niveau des études supérieures est telle que les étudiants reprennent des cours pour obtenir de meilleures notes ou prennent peut-être des cours supplémentaires pour être mieux en mesure de suivre des programmes de deuxième cycle ou des programmes professionnels spécialisés.

En 1980, il fallait aux étudiants 3,9 années à temps plein pour obtenir leur baccalauréat. En 1992, il leur fallait 4,2 années. Je le répète, il ne s'agit pas d'un changement important. Cela s'explique davantage semble-t-il par l'intérêt qu'ont les étudiants à améliorer leurs notes. Les mêmes tendances ressortent également au niveau des études supérieures, aux deuxième et troisième cycles.

Il faut également se poser la question suivante: Y a-t-il plus d'étudiants qui doivent emprunter de l'argent et doivent-ils en emprunter davantage pour accéder à des études postsecondaires? J'ai jeté un coup d'oeil à l'Enquête nationale auprès des diplômés qui s'est adressée aux étudiants de 1982, 1986 et 1990, deux ans après qu'ils eurent obtenu leur diplôme. Le pourcentage d'étudiants qui ont recouru à des prêts a bel et bien augmenté entre 1982 et 1990 mais je le répète, très légèrement. Cependant, entre 1982 et 1990 la hausse a été importante chez les étudiants qui fréquentent le collège, alors que le pourcentage de ceux qui ont eu besoin de prêts est passé de 35 à 42 p. 100. Ce taux s'est maintenu jusqu'en 1990 de sorte que les besoins en matière de prêts ont plafonné. Dans l'ensemble, quelque 40 p. 100 des étudiants dépendent à l'heure actuelle des prêts pour financer leur éducation.

Pour les étudiants qui fréquentent le collège, le montant moyen des prêts en 1982, au moment de la collation des grades, était d'environ 3 500 $. Pas plus tard qu'en 1990, il était passé à 5 700 $. Comme il s'agit de dollars constants de 1990, on parle d'une augmentation de près du double en valeur réelle.

Pour les étudiants du premier cycle, la moyenne des prêts est passéE de 5 300 $ en 1982 à 8 700 $ en 1990. On parle à peu près du même niveau au niveau des deuxième et troisième cycles, même si les étudiants fréquentent l'école plus longtemps. Le fait qu'ils puissent gagner de l'argent en faisant de la recherche, de l'enseignement, et cetera signifie probablement que leurs besoins en matière de prêts ont plafonné.

La hausse est importante, non pas parce que plus de jeunes doivent emprunter, mais parce qu'ils doivent emprunter davantage. Il faut alors se demander si cela leur cause des problèmes au moment du remboursement?

Pour les étudiants qui fréquentent le collège, le ratio d'autonomie financière, c'est-à-dire la dette par rapport au revenu, a augmenté énormément entre 1982 et 1990 en passant de 13 à 23 p. 100. Pour les étudiants du premier cycle, on parle de 15 à 30 p. 100. Les hausses sont moins importantes je le répète aux niveaux supérieurs. Le marché du travail et les niveaux de revenu entrent peut-être ici en ligne de compte vu que, en 1992, lorsque les diplômés de 1990 avaient été interviewés, le pays était en récession. Ceux qui avaient un emploi, un emploi bien rémunéré, étaient peut-être moins nombreux ce qui a dû faire baisser les chiffres. La conjoncture était bien meilleure lorsque les diplômés de 1982 ont été interviewés en 1984.

En dépit du changement, à tous les niveaux, les diplômés de 1990 avaient remboursé dans une proportion légèrement moindre leurs dettes que les diplômés de 1986; leur dossier en matière de remboursement est donc resté assez bon. Cette différence, je le répète, est probablement attribuable aux piètres conditions économiques qui sévissaient au moment des entrevues qui ont été effectuées en 1992.

Malheureusement, nous n'avons pas de données pour 1982 à cet égard. Tant pour 1986 que 1992, la plupart des étudiants avaient remboursé plus de la moitié de leurs prêts au cours des deux premières années. Les taux de remboursement étaient beaucoup plus élevés pour les diplômés des deuxième et troisième cycles. Dans l'ensemble, entre 15 et 20 p. 100 des étudiants interviewés ont dit qu'ils avaient du mal à rembourser leurs prêts. Plus de 80 p. 100 ont déclaré qu'ils n'avaient aucun problème à le faire. C'est au chômage et aux revenus insuffisants, en fait le sous-emploi, plutôt qu'à l'endettement déraisonnable, qu'ils ont attribué leurs problèmes de remboursement.

Je le répète, nous n'avons pas remarqué que les augmentations importantes des frais de scolarité entraînaient des effets négatifs sur les inscriptions ou la capacité de remboursement. Ce qui est intéressant, c'est qu'il semble que les étudiants aient été jusqu'ici en mesure d'absorber ces augmentations. Nous n'avons pas de données portant sur la période la plus récente. Les frais de scolarité continuent d'augmenter. Les répercussions de cette tendance sur les inscriptions ressortent de plus en plus et il est bien possible que l'on ait atteint un plateau ou un point de rupture.

L'autre possibilité c'est que, malgré les augmentations des frais de scolarité, ceux-ci ne représentent toujours qu'une partie relativement infime des frais généraux, les plus importants étant les frais de nourriture, de logement et de transport. Il se pourrait que plus d'étudiants qu'avant vivent dans leur famille. Il se pourrait que plus d'étudiants travaillent davantage à temps partiel. Nous ne le savons pas, mais nous espérons pouvoir examiner ces facteurs dans l'avenir et peut-être y trouver une explication.

Si les frais de scolarité n'avaient pas augmenté, nous ne savons pas ce qui ce serait produit au chapitre des inscriptions. C'est difficile à dire, car c'est une question de choix personnel. Malgré ces augmentations, il semblerait que du point de vue des étudiants, il vaut toujours la peine de faire des études universitaires puisque cela aboutit à des emplois intéressants et à une meilleure situation socio-économique.

Le moment est peut-être venu de répondre à vos questions.

Le président: Vous parlez des prêts aux étudiants. Parlez-vous simplement des prêts du gouvernement ou des prêts bancaires? De quels prêts parlez-vous?

M. Jackson: Je parle de toutes les sortes d'emprunts. Cela comprend le Programme canadien de prêts aux étudiants en plus des autres formes d'emprunts.

Le président: Les prêts bancaires et autres types de prêts.

M. Jackson: Je n'ai probablement pas inclus les prêts consentis par les parents.

Le président: Est-ce que Statistique Canada suit le taux d'impayés des prêts aux étudiants? Quel est le pourcentage du taux d'impayés?

M. Jackson: Nous ne faisons pas ce travail, c'est la section du programme des prêts aux étudiants du Développement des ressources humaines qui s'en charge.

Le président: Vous ne tenez pas ces statistiques?

M. Jackson: Peut-être devrions-nous le faire. Je ne sais pas si le taux d'impayés a changé.

Le président: Quand en avez-vous entendu parler pour la dernière fois?

M. Jackson: Je ne le sais pas.

Le président: Comment pouvez-vous savoir s'il a changé ou non, si vous ne le savez pas?

M. Jackson: Et bien, je ne sais pas s'il a changé.

Le président: Est-ce que Statistique Canada a mené une enquête nationale sur les diplômés depuis 1994?

M. Jackson: L'enquête sur les diplômés de 1995 aura lieu en 1997.

Le président: Qu'en est-il des diplômés de 1994?

M. Jackson: Cette enquête se fait tous les quatre ou cinq ans seulement.

Le président: Vous n'avez donc pas les statistiques de 1994?

M. Lynd: Non. À l'origine, cette enquête se faisait tous les quatre ans: diplômés de 1982, diplômés de 1986 et diplômés de 1990; le groupe suivant aurait dû être celui des diplômés de 1994. Le processus d'enquête a été soumis à un examen au cours de cette période et il a fallu reporter la date de l'enquête suivante. On a pris les diplômés de 1995 à la place, car cet examen n'était pas terminé. Par conséquent, l'enquête a été reportée d'une année. L'enquête de 1997 portera donc sur les diplômés de 1995.

Le sénateur Lavoie-Roux: Merci beaucoup pour votre exposé intéressant. Je vais le relire de près en raison des nombreux chiffres qui y figurent.

Comme nous nous intéressons au financement des études, j'aimerais savoir si vous avez fait une comparaison entre le Québec et les autres provinces, ou si vous pouvez le faire. Je prends l'exemple du Québec, parce que c'est la province que je connais le mieux et je pense aussi, peut-être à tort, que le Québec est probablement bien différent des autres provinces.

Par exemple, les collèges communautaires d'une part, et les cégeps québécois d'autre part, ne sont pas exactement la même chose, mais ils sont au même niveau dans un certain sens. Les cégeps sont entièrement gratuits. Vos enquêtes montrent-elles si ce facteur influe sur l'inscription des étudiants au Québec par rapport aux autres provinces et sur les inscriptions à des études complémentaires? Si un étudiant termine le collège communautaire avec une dette -- je pense que vous avez parlé de 5 000 $ -- y pense-t-il à deux fois avant de faire des études complémentaires à l'université? Cela le décourage-t-il d'entreprendre des études universitaires?

M. Jackson: Nous n'avons pas examiné la question de si près. Il semble évident que le fait d'avoir des dettes au moment où l'on s'apprête à faire des études universitaires entrerait en ligne de compte.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je me pencherai davantage sur ce point, lorsque nous rencontrerons l'association des étudiants.

Pour ce qui est de ce facteur de dissuasion qui existe même dans le cas des collèges communautaires et des cégeps, est-ce que la gratuité des études de même niveau au Québec crée une différence dans les inscriptions? Je ne parle de rien d'autre pour l'instant.

Au Québec, vous pouvez aller au cégep. Des frais minimes sont imposés, lorsque les étudiants redoublent après deux ou trois ans. S'ils reviennent pour la même session, il y a des frais peu élevés, mais il n'y a pas véritablement de frais de scolarité par rapport aux autres provinces.

M. Jackson: Je le répète, je crois que ce sont les consommateurs de l'éducation qui seraient les mieux placés pour nous parler de l'effet de la gratuité des études et de l'effet des frais de scolarité.

Le sénateur Lavoie-Roux: Vos statistiques indiquent-elles une différence?

M. Jackson: Non.

M. Lynd: Nous avons cité les chiffres relatifs à l'augmentation des inscriptions dans les collèges de l'ensemble du Canada; on remarque une répartition assez égale dans tout le pays, si bien que la gratuité au Québec, contrairement aux autres provinces, ne semble pas faire de différence. Bien sûr, les frais d'inscription au collège sont bien inférieurs aux frais universitaires.

Vous avez demandé en premier lieu si les dettes contractées pour les études collégiales influent sur la décision d'aller à l'université? Là encore, c'est tout à fait différent dans bien des autres provinces, puisque les programmes collégiaux sont davantage considérés comme une fin en soi; ce n'était par conséquent pas un facteur dans le passé, même si aujourd'hui plus d'étudiants passent du collège à l'université ou de l'université au collège.

Le sénateur Lavoie-Roux: Si j'insiste sur ce point, c'est que je sais que la plupart des associations d'étudiants qui vont comparaître devant nous vont nous demander plus d'argent, plus de subventions, plus de financement, et cetera. Nous savons que les frais universitaires au Québec sont, malheureusement à mon avis, bien inférieurs à ceux des autres provinces, tant et si bien que des étudiants d'autres provinces viennent s'inscrire à McGill. Peut-être viennent-ils pour d'autres raisons, mais c'est un fait que cela leur coûte beaucoup moins cher que s'ils s'inscrivaient dans leur propre province. Avez-vous examiné ce point d'un peu plus près?

Le fait que les frais soient plus élevés à Toronto qu'à Montréal n'est-il pas important? Cela influe-t-il sur les inscriptions d'une façon ou d'une autre?

M. Lynd: Nous avons certainement des statistiques sur les déplacements d'étudiants universitaires d'une province à l'autre. Nous n'avons pas remarqué que le déplacement vers le Québec était disproportionné par rapport au déplacement dans d'autres provinces ou hors d'autres provinces. Cela nécessiterait une étude plus poussée. Je devrais avoir ces statistiques devant moi, mais ce n'est pas le cas; il reste que nous n'avons pas remarqué un déplacement disproportionné d'étudiants vers le Québec. Par conséquent, j'ai l'impression que ce n'est pas un facteur.

Le sénateur Lavoie-Roux: Dans quelle mesure l'augmentation des frais de scolarité décourage-t-elle les étudiants de faire des études? Vous savez qu'ils vont venir nous dire que les frais sont trop élevés, par exemple, en Colombie-Britannique, que les frais devraient diminuer. Avez-vous remarqué si l'augmentation des frais de scolarité a beaucoup d'effet sur les inscriptions?

Au Québec, il est question d'augmenter les frais universitaires en ce moment, et les étudiants, les syndicats et toutes les autres parties visées disent que cela ne peut se faire, car cela revient à empêcher beaucoup plus de gens de faire des études universitaires. D'après ce que vous avez dit, cela ne semble pas être un facteur important, lorsque l'on envisage d'augmenter les frais. Est-ce que je me trompe?

M. Jackson: Cela ne semble pas avoir été un facteur jusqu'à présent. Est-ce que l'augmentation persistante des frais deviendra un facteur important? Ce n'est qu'une supposition pour l'instant. C'est difficile à dire.

M. Lynd: Cette conclusion se fonde sur la croissance et les inscriptions, alors que les frais ont augmenté. Nous ne savons pas si le nombre des inscriptions avait été le double de ce qu'il est aujourd'hui si les frais n'avaient pas augmenté.

Le sénateur Lavoie-Roux: Les frais universitaires au Québec sont en général inférieurs d'un tiers à ceux des autres provinces. N'avez-vous pas examiné si cela favorisait les inscriptions?

M. Jackson: J'ai déjà entendu dire que lorsque les frais au Québec étaient encore plus bas de ce qu'ils sont aujourd'hui, les gens disaient: «Je peux fréquenter McGill, université de grand prestige, sans que mes frais de subsistance et de scolarité ne soient beaucoup plus élevés qu'à Ottawa.»

Toutefois, le Québec a considérablement augmenté ses frais et cet écart est maintenant plus petit entre le Québec et l'Ontario par exemple, bien que cela puisse changer rapidement. La dernière fois que je me suis penché sur la question, un programme de baccalauréat au Québec coûtait 1 700 $, alors qu'il coûtait près de 3 200 $ en Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Lavoie-Roux: La différence est énorme.

M. Jackson: Par contre, les frais en Nouvelle-Écosse sont relativement élevés. En moyenne, un tel programme coûte 2 400 $.

Le sénateur Lavoie-Roux: Voyez-vous une différence dans le nombre des inscriptions des garçons et des filles? J'imagine que nous pouvons toujours les appeler «garçons» et «filles» à cet âge-là. Ce ne sont pas encore des hommes et des femmes.

Le président: Je parlerais de personnes du sexe «masculin» et de personnes du sexe «féminin».

Le sénateur Lavoie-Roux: Non, je déteste ces expressions.

Le sénateur DeWare: «Jeunes hommes» et «jeunes femmes».

M. Jackson: Lorsque le taux de participation a augmenté dans les années 1980 et jusque dans les années 1990, pour passer de 10 à 17 p. 100, c'était essentiellement en raison de l'augmentation de la participation des femmes, tant et si bien que les femmes représentent la majorité des étudiants dans les programmes universitaires de premier cycle.

Le sénateur Lavoie-Roux: Elles deviennent majoritaires dans les programmes de deuxième cycle, également. Empruntent-elles autant ou moins que les garçons?

M. Jackson: Eh bien, cette question est intéressante. Au deuxième cycle universitaire, dans certaines disciplines, les filles finissent par emprunter un peu plus. En général, les emprunts sont comparables à ceux contractés pour le premier cycle. Bien qu'elles tendent à avoir des revenus légèrement inférieurs après leur diplôme, elles remboursent plus que les garçons au bout de deux ans. Je ne sais pas ce que cela signifie.

Le sénateur DeWare: Elles sont plus consciencieuses.

Le sénateur Andreychuk: Ce n'est pas peu dire.

Monsieur Lynd, vous avez dit que le nouveau Centre des statistiques de l'éducation relèvera du statisticien en chef et des sous-ministres provinciaux de l'éducation. L'information dont vous disposez est-elle diffusée aux décisionnaires fédéraux qui élaborent nos politiques sur les stratégies d'emploi, les stratégies commerciales, les stratégies en matière de santé? Se servent-ils de cette information?

M. Lynd: Nous avons bien sûr toujours entretenu d'étroites relations de travail avec d'autres ministères du gouvernement fédéral. J'ai fait mention du Développement des ressources humaines dans mes remarques préliminaires, mais je pourrais également parler des Affaires étrangères, de l'Agence canadienne du développement international et en fait, de tous les ministères fédéraux qui interviennent dans le domaine de l'éducation.

Nous fournissons à ces ministères des tableaux ou rapports annuels depuis des années. La création du Centre de l'éducation vise à rapprocher un peu plus de nous les ministres provinciaux de l'éducation. Dans le passé, nous ne traitions pas officiellement avec les ministères provinciaux et pourtant ce sont eux qui s'occupent du gros de l'éducation au Canada. Nous avons pensé qu'il était nécessaire de s'intéresser davantage à leurs préoccupations, à leurs problèmes et à leurs priorités.

Il y a trois ans, nous avons créé le Conseil des statistiques canadiennes de l'éducation qui comprend le statisticien en chef et tous les sous-ministres de l'éducation. Nous avons travaillé sur quelques projets conjoints, mais à aucun moment ce groupe n'a eu le mandat d'examiner le programme de la sous-division de l'éducation de Statistique Canada.

Avec la création du Centre des statistiques de l'éducation, nous serons maintenant en mesure de présenter chaque année à cet organisme notre plan opérationnel ou plan stratégique en matière d'éducation au Canada et il pourra nous donner des conseils et nous guider pour que nous abordions comme il le faut les questions relatives à l'éducation. En fait, les sous-ministres de toutes les compétences pourront ainsi officiellement nous conseiller au sujet de notre programme. De cette manière, nous espérons faire participer les provinces et aussi continuer à faire le travail que nous avons toujours fait avec les ministères fédéraux et les organisations non gouvernementales.

Le sénateur Andreychuk: Monsieur le président, du point de vue fédéral, même si le partage de l'information est informel, il est important d'officialiser les choses jusqu'à un certain point pour que les politiciens fédéraux se rendent compte de la nécessité de leur travail. Lorsqu'ils élaborent ou approuvent des programmes, ils doivent savoir ce que font les étudiants. Ils doivent savoir ce que vivent les jeunes. Il n'est pas étonnant qu'il y ait parfois des lacunes dans les programmes de formation professionnelle que nous créons, surtout lorsque l'on en arrive aux compétences nécessaires et aux compétences réelles. Peut-être pourrions-nous nous pencher sur la question, pas nécessairement aujourd'hui.

Monsieur Jackson, vous avez souligné que le Canada se place au deuxième rang après les États-Unis d'après les statistiques de l'OCDE. Avez-vous dit que nous arrivons au deuxième rang pour ce qui est du nombre d'étudiants diplômés par habitant?

M. Jackson: Nous nous plaçons au deuxième rang en ce qui a trait au taux de participation de la tranche d'âge des 18 à 21 ans.

Le sénateur Andreychuk: On a dit que les pays qui se concentrent sur la formation de base en ce qui concerne les compétences, les professions, l'expertise technique, notamment dans les sciences, ont un avantage concurrentiel sur les marchés internationaux. Le Japon est cité à titre d'exemple. Avez-vous des statistiques à cet égard?

Nous nous sommes concentrés depuis plusieurs années sur l'enseignement post-secondaire, parce que nous voulions que les gens soient plus éduqués. Ce n'est que récemment que nous nous intéressons davantage à la formation technique dans le cadre de l'enseignement postsecondaire.

M. Jackson: M. Lynd s'occupe davantage des questions internationales.

Le sénateur Andreychuk: Mettons-nous, comme il le faut, l'accent sur l'enseignement postsecondaire de manière à pouvoir être concurrentiels sur ce nouveau marché global, ou continuons-nous à mettre l'accent sur les études générales, laissant aux particuliers le choix de décider comment survivre sur le marché global?

M. Lynd: C'est une bonne question. Je ne pense pas que nous puissions y répondre ce matin. L'OCDE a certainement des données -- sur lesquelles je ne travaille pas -- sur les structures des diverses populations actives. Je ne peux pas vous indiquer de référence non plus, mais je vais essayer d'en trouver une. Je crois que l'OCDE a examiné la composition de la population active et des professions qu'elle occupe. On peut tirer certaines inférences de la production des diverses économies en examinant la composition de la population active. Je n'ai pas personnellement travaillé dans ce domaine particulier, mais je peux essayer de trouver pour vous une référence sur l'OCDE.

M. Jackson: Une tendance se dessine dans les universités et les collèges: il y a moins d'inscriptions dans le programme général d'arts. Les inscriptions semblent augmenter, toute proportion gardée, dans le domaine de l'informatique, du génie et de la biologie. Compte tenu de la structure actuelle de l'enseignement, les changements s'effectuent de manière moins planifiée que si le gouvernement optait, par exemple, pour la technologie. Comme je le dis, cela se produit aux deux niveaux, celui des collèges et celui des universités.

Le sénateur Andreychuk: Vous avez dit que les étudiants prennent plus de temps pour terminer leurs études. Avez-vous des statistiques sur les taux d'achèvement? Est-ce que ceux qui entrent à l'université terminent leurs études universitaires?

Je ne sais pas ce que vous voulez dire par «prennent plus de temps». Cela peut vouloir dire prendre plus de temps pour terminer les études ou tout simplement que les étudiants restent plus longtemps dans le système. C'est important, car nous entendons certains étudiants dire: «Je ne peux pas trouver d'emploi, autant passer une année à l'université pour voir ce que cela peut m'apporter. Si je trouve un emploi, je quitterai l'université.» L'université leur a-t-elle permis de trouver un emploi?

Par ailleurs, y a-t-il des statistiques qui comparent le Canada à d'autres pays? Les étudiants asiatiques semblent aujourd'hui terminer leurs études rapidement, le taux d'abandon est moindre, tandis que nos étudiants prennent plus de temps. Qu'est-ce que cela signifie?

M. Jackson: Par rapport à la population, le Canada a le taux le plus élevé de bacheliers ès arts de tous les pays de l'OCDE.

Il est difficile de répondre à vos autres questions -- et c'est pourquoi nous devrions collaborer davantage avec les provinces --, parce que nous n'avons pas un bon système de suivi. Nous pouvons suivre sans problème le cheminement des étudiants à l'intérieur d'un établissement et entre les domaines d'étude. Toutefois, dès qu'ils commencent à changer d'établissement, ce qui arrive très souvent, ou de province, nous les perdons de vue.

Nous espérons, grâce aux améliorations apportées au sondage universitaire, pouvoir mettre sur pied un système de suivi plus efficace qui nous permettra de tenir compte des années de scolarité des étudiants, des nouveaux programmes d'études auxquels ils s'inscrivent, et pour quelles raisons. Il se peut très bien que les étudiants soient conscients des changements qui s'opèrent dans l'économie et de la demande qui existe pour diverses compétences, et qu'ils quittent alors l'université pour s'inscrire dans un collège, mais nous ne sommes pas sûrs. Il se peut qu'ils changent d'université et qu'ils s'inscrivent dans un domaine d'études complètement différent. C'est une question intéressante.

M. Lynd: J'ajouterais que l'Asie est un exemple très intéressant sur lequel les membres de l'OCDE se sont penchés. Il ne fait aucun doute que les étudiants asiatiques terminent leurs études beaucoup plus rapidement, sans perdre de temps; toutefois, les conditions d'admission sont très sévères. Sur l'ensemble de la population étudiante, seulement cinq pour cent, ou même moins, sont admis dans un établissement d'enseignement supérieur.

Au Canada, aux États-Unis et en Europe, un plus grand pourcentage d'étudiants sont admis. On peut donc s'attendre à ce qu'ils prennent plus de temps pour terminer leurs études ou qu'il y ait un taux d'échecs plus élevé.

Le sénateur Andreychuk: Nous devons obtenir des chiffres là-dessus afin de voir si la prochaine génération sera en mesure de s'adapter aux situations auxquelles elle sera confrontée. Le marché de concurrence aujourd'hui est totalement différent; le gouvernement y est moins présent. Le marché est plus mondialisé. Si nous offrons de la formation, ce ne devrait pas être uniquement pour des emplois au Canada. Nous devrions former les gens pour qu'ils puissent travailler au Canada, mais aussi à l'étranger. De plus en plus, nous comptons sur les exportations plutôt que sur la consommation interne. Il ne semble y avoir aucune donnée statistique là-dessus.

M. Lynd: Vous avez raison. Toutefois, nous participons à diverses activités, que ce soit de façon directe ou indirecte, qui ont pour but d'évaluer l'état de préparation des étudiants. C'est l'objectif d'ailleurs de la récente analyse longitudinale qui concerne les enfants et des jeunes. Elle a pour objet de suivre l'évolution de groupes de personnes sur une base annuelle, d'interviewer leurs enseignants, directeurs et parents sur une période assez longue. Les étudiants seront soumis à des tests dans le but de mesurer la valeur ajoutée, si vous voulez, entre divers points.

Les provinces font actuellement subir des tests aux étudiants, en appliquant les indicateurs de rendement standardisés. Je crois qu'elles évaluent les étudiants de 6e, 9e et 11e années. Il faudra que j'obtienne ces résultats.

Nous effectuons aujourd'hui beaucoup plus d'analyses qu'il y a cinq ans, afin de voir si les élèves qui achèvent leurs études secondaires sont prêts à être admis dans un établissement postsecondaire. Nous n'avons pas encore suffisamment de données là-dessus pour répondre à votre question.

Le sénateur Andreychuk: J'aimerais aborder deux autres points. D'abord, vous avez dit que les frais de scolarité, dans une certaine mesure, varient en fonction des subventions qu'obtiennent les universités. Autrement dit, c'est parce que les universités ont reçu moins d'argent que les frais de scolarité ont augmenté au cours des cinq à dix dernières années.

À l'origine, quand les subventions ont été coupées, la plupart des gouvernements provinciaux ont déclaré qu'ils avaient encore une marge de manoeuvre, que les réductions n'empêcheraient pas nécessairement les universités d'établir, par exemple, leurs propres programmes d'études.

Avez-vous tenu compte de ce facteur dans vos statistiques? On aurait pu contester cet argument dans le passé, mais aujourd'hui, les universités se trouvent dans une situation où elles doivent réduire leurs activités, les rationaliser.

M. Jackson: J'ai constaté de façon générale, et pas seulement à partir des statistiques, qu'au cours des années 80, les subventions ont augmenté, mais pas aussi rapidement que les coûts. Les universités ont beaucoup rationalisé leurs opérations. Elles ont réduit les dépenses consacrées aux installations, à l'entretien, à l'enseignement, à presque tous les domaines. En fait, dès la fin des années 80, on laissait entendre que les universités remettaient à plus tard d'importants travaux d'infrastructure parce qu'elles n'avaient pas les moyens de les financer, et que cette décision reviendrait à la longue les hanter.

La situation s'est aggravée au cours des années 90, bien que je n'aie pas de chiffres. À un moment donné, vous n'avez plus de marge de manoeuvre et vous devez commencer à couper dans l'os.

Au cours de cette période, parce que les budgets n'augmentaient pas aussi rapidement que les inscriptions, on avait l'impression d'être plus efficaces. On dessert un plus grand nombre d'étudiants; donc, le coût par étudiant diminue. Cet argument est valable lorsque les inscriptions sont à la hausse. Or, le taux d'inscription a diminué dans les années 90 et les universités sont aujourd'hui de plus en plus tributaires des revenus des étudiants, de sorte qu'elles risquent de se retrouver dans une situation très difficile. Je dois dire que je ne parle pas au nom de Statistiques Canada. Ce sont des choses que j'ai lues. Les universités risquent de se retrouver dans une position difficile, surtout si les taux d'inscription continuent de diminuer.

L'autre facteur dont il faut tenir compte, c'est l'âge des membres du corps enseignant. L'absence de relève, la diminution du nombre d'étudiants par salle de classe, ainsi de suite, font que l'âge moyen des membres du corps enseignant augmente. Ce qui a pour effet de les faire entrer dans une tranche de revenu plus élevée. Donc, le coût moyen pour chaque membre du corps enseignant a augmenté.

Le sénateur Andreychuk: Ajoutons à cela le fait que les enseignants sont spécialisés dans certains domaines et que les universités ne peuvent les faire passer d'une discipline à l'autre.

M. Jackson: Ce qui constitue tout un défi pour les recteurs d'universités.

Le sénateur Andreychuk: Avez-vous des chiffres sur l'aide financière que les universités ont reçue sous forme de subventions de recherche, ainsi de suite? Quand on parle des universités et de l'enseignement postsecondaire, on ne fait pas uniquement allusion aux étudiants et à la formation qu'ils reçoivent, mais aussi à la recherche et au développement, qui font partie de l'éducation. Avez-vous des chiffres sur les subventions qui sont versées aux établissements, les subventions de recherche qui proviennent de sources privées? On a tendance aujourd'hui à établir des partenariats entre les établissements d'enseignement et les entreprises. Compilez-vous des données à ce sujet pour avoir une idée des activités de recherche et de développement auxquels participent les établissements d'enseignement postsecondaire?

M. Lynd: Oui, nous en compilons. Toutefois, nous ne sommes pas en mesure de vous dire combien de contrats ont été passés ou si le nombre de contrats augmente ou diminue. Les rapports financiers des universités et des collèges donnent une ventilation des revenus et indiquent s'il s'agit de fonds de recherche privés, de fondations, et cetera. Nous sommes en mesure d'établir si le nombre total de dollars augmente ou diminue, mais pas ce que cela représente en termes de contrats.

Le sénateur Andreychuk: Pourrait-on fournir ces données au comité?

Le président: Nous pourrions peut-être leur demander de nous envoyer une copie de ces données à titre d'information.

M. Lynd: D'accord.

Le sénateur Andreychuk: Est-ce que ces données pourraient nous donner une idée des tendances observées? Est-ce qu'elles sont regroupées par discipline ou par établissement? Pouvez-vous nous dire si la majorité des contrats de recherche et de développement visent les sciences dures, les sciences douces ou les sciences informatiques?

M. Lynd: En fait, nous avons des données là-dessus, sauf qu'elles sont établies non pas à partir des contrats eux-mêmes, mais à partir du nombre de personnes qui font partie du corps enseignant des diverses facultés. Les données sont donc réparties au prorata. Les dollars sont répartis en fonction du nombre de personnes qui font partie du corps enseignant. Je crois que c'est de cette façon que les statistiques touchant les contrats de recherche dans le domaine des sciences sont compilées.

Le sénateur Andreychuk: J'aimerais qu'on nous fournisse des comparaisons. Est-ce que les données couvrent une période de 10 ans ou de 20 ans? Il serait intéressant de savoir si les travaux de recherche et de développement dans les universités augmentent ou diminuent. Sont-elles financées par des fonds privés? Des fonds publics?

M. Lynd: Je me ferai un plaisir de vous fournir ces renseignements.

Le sénateur DeWare: Vous avez dit que les changements démographiques n'ont pas eu d'impact. Ils ont dû en avoir entre 1970 et 1980. Vos statistiques partent plus ou moins de 1982. Si la génération issue du baby-boom a fréquenté les établissements postsecondaires dans les années 70 et 80, alors le taux d'inscription aurait dû diminuer au cours des dix dernières années.

M. Jackson: En ce qui concerne le taux d'inscription, nous avons des statistiques qui remontent aux années 60 et 70. Bien entendu, lorsque les gens issus du baby-boom ont commencé à fréquenter l'université, le taux d'inscription a augmenté de façon marquée.

Le sénateur DeWare: Ils ont été pris au dépourvu.

M. Jackson: Je crois que c'est en 1978 qu'on a enregistré la seule et unique baisse, et c'est à ce moment-là que l'ensemble des gens issus du baby-boom poursuivaient leurs études postsecondaires.

Le sénateur DeWare: Cette situation entraînerait une hausse des dépenses à tous les chapitres. Une fois les études terminées, les dépenses, tout comme le taux d'inscription, commenceraient à diminuer, n'est-ce pas?

M. Jackson: C'est là que le taux de participation entre en jeu. Le nombre d'étudiants qui fréquentaient l'université et qui utilisaient les installations continuait d'augmenter.

Le sénateur DeWare: Le sénateur Andreychuk vous a posé une question au sujet du commerce et de la mondialisation de l'économie. Monsieur Jackson, vous avez dit, au début de votre exposé, qu'il fallait modifier les programmes ou les cours afin de pourvoir les postes vacants. Est-ce que nos établissements modifient leurs programmes d'études afin de répondre à la demande, ou est-ce que les étudiants exigent de nouveaux cours pour répondre à la demande qui existe? Les étudiants semblent être mieux renseignés que nous parce que sont eux qui cherchent des emplois. Vous parliez de la situation à l'échelle internationale, mais qu'en est-il de la situation au Canada?

M. Lynd: Il est difficile de dire exactement pourquoi les établissements d'enseignement modifient leurs programmes. Est-ce parce que ce sont les étudiants qui l'exigent, ou est-ce en raison des partenariats établis avec l'industrie? Les établissements eux-mêmes, et surtout les collèges, vont vous dire que c'est en raison des partenariats établis avec l'industrie qu'ils modifient leurs programmes.

Nous constatons, lorsque nous jetons un coup d'oeil sur les diplômés qui trouvent un emploi dans divers secteurs, que toute hausse du taux de chômage chez les diplômés spécialisés s'accompagne, deux ans plus tard, d'une baisse du taux d'inscription. Ce qui donne à penser que ces étudiants exercent une influence importante sur leurs pairs, en parlant tout simplement avec eux, et que les gens ont de la difficulté à trouver un emploi dans une discipline ou un domaine particulier. Je ne peux pas vous dire pourquoi les établissements modifient leurs programmes, mais je crois que les exigences des étudiants y sont pour beaucoup.

Le sénateur DeWare: Certains vont dire, «Pourquoi se donner la peine d'obtenir un baccalauréat? Je ne serai pas en mesure de trouver un emploi». Le baccalauréat vous permet d'élargir vos horizons. Il vous donne l'occasion de passer à autre chose.

Pour ce qui est du secteur commercial, j'ai travaillé dans ce domaine au Nouveau-Brunswick et, à un moment donné, deux industries ont eu besoin de travailleurs qualifiés. Nous avons constaté que l'âge moyen des mécaniciens d'aéronefs était de 55 ans. Il n'y avait personne pour prendre la relève une fois ces travailleurs --la plupart étaient des hommes --, partis à la retraite. Qu'est ce que les collèges ont fait? Ils ont mis sur pied un programme pour former de nouveaux mécaniciens. La même chose s'est ensuite produite dans l'industrie de la chaussure. La demande évolue dans le secteur commercial, mais ce n'est pas la même chose pour les universités.

Le sénateur Andreychuk: C'est là que se situe le problème. On nous a dit dans les années 70 qu'il y avait trop d'ingénieurs. Aujourd'hui, on nous dit qu'il n'y en a pas assez. Les politiciens à l'époque disaient que nous n'avions pas besoin d'autres ingénieurs, que nous avions besoin de ceci et de cela.

Le sénateur Lavoie-Roux: Il y en a encore trop.

Le sénateur Andreychuk: C'est faux.

Le sénateur Lavoie-Roux: La plupart sont au chômage.

Le sénateur Andreychuk: Permettez-moi de ne pas être de votre avis; nous avons besoin de mécaniciens dans biens des domaines.

Est-ce que vous tenez compte du nombre d'étudiants étrangers qui fréquentent nos établissements? Pouvez-vous nous fournir des chiffres là-dessus?

M. Jackson: Oui. C'est un domaine très intéressant parce que, même si nous continuons d'accueillir un plus grand nombre d'étudiants étrangers au Canada en chiffres absolus, notre part du marché diminue. Les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie, notamment, ont augmenté leur part de façon considérable. L'Australie a élaboré une stratégie qui met l'accent sur le marché asiatique.

Pour ce qui est la collaboration avec le gouvernement fédéral, je crois comprendre qu'un réseau interministériel a été mis sur pied dans le but de promouvoir l'éducation canadienne et d'en faire un produit d'exportation.

Le sénateur Andreychuk: C'est exact.

M. Jackson: À bien y penser, nous avons un merveilleux pays et l'idée de venir s'installer au Canada intéresse les étudiants étrangers. Notre système d'éducation jouit d'une excellente réputation. Or, les étudiants étrangers ne viennent pas au Canada en grand nombre pour tirer parti de ce que nous offrons.

Le sénateur Andreychuk: Mis à part ce fait, il y a une raison stratégique pour laquelle nous les voulons ici.

M. Jackson: Oui. Le fait d'accueillir des étudiants étrangers crée des avantages à long terme puisque, quand ils rentrent chez eux, ou qu'ils décident, dans certains cas, de rester ici, ils peuvent transiger avec leur propre pays. J'ai toujours pensé que nous avions un peu encouragé l'exode des cerveaux des pays du tiers monde, de façon presque injuste, parce qu'un si grand nombre d'entre eux décident de rester ici. En fait, il y en a seulement 10 p. 100 qui restent.

Un grand nombre d'étudiants étrangers rentrent chez eux, présentent ensuite une demande à titre de résident permanent, et reviennent au Canada. Apparemment, une fois installés ici, ils se lancent en affaires, souvent avec leur propre pays, et créent ainsi des retombées économiques qui dépassent largement celles qu'ils généreraient s'ils restaient dans leur propre pays. De plus, ils contribuent à améliorer la situation au Canada.

Le sénateur Andreychuk: Ce qui a pour effet de renforcer les liens commerciaux avec ces pays.

M. Jackson: Exactement. J'essaie de faire ressortir l'importance de ce groupe en tant que modèle d'exportation.

Le sénateur Andreychuk: Hier, à la réunion du comité des affaires étrangères -- qui, bien entendu, fait rapport au Parlement --, la Fondation Asie-Pacifique a déclaré qu'elle évaluait le rôle joué par les étudiants étrangers et les retombées immédiates et stratégiques qu'ils nous procuraient sur le plan de la concurrence. Ils constituent une source de revenu, une source de profit mutuel au chapitre des échanges et des investissements. J'espère que Ross vous a parlé de la possibilité de convoquer ces témoins, parce que, à mon avis, cette question intéresse davantage notre comité que l'autre.

Les universités ont toujours dit que les étudiants étrangers permettaient à nos propres étudiants de se sensibiliser aux différences culturelles qui existent. Elles ont toujours été heureuses de les accueillir. Or, voilà que, tout à coup, ils constituent un fardeau pour nos universités, leur formation nous coûte trop cher, ils enfreignent tous les règlements et restent ici, ils ne créent pas de retombées pour leur pays.

C'est tout un revirement d'opinion. Est-ce que ce revirement s'appuie sur des données empiriques? Est-ce que vous tenez compte du nombre d'étudiants étrangers qu'il y a au Canada?

Le président: Pouvons-nous obtenir des données sur le nombre d'étudiants étrangers qui ont fréquenté des établissements d'enseignement canadiens au cours des dix dernières années?

M. Lynd: Oui.

Le président: Vous pouvez les remettre à notre greffier.

M. Lynd: Même si cela n'a rien à voir avec le sujet à l'étude, il serait utile de jeter un coup d'oeil sur le nombre d'étudiants canadiens qui fréquentent des établissements d'enseignement à l'étranger.

Le président: Nous aimerions également avoir ces statistiques.

M. Lynd: Elles sont compilées par l'OCDE et l'UNESCO, mais nous pouvons vous les fournir.

Le président: Pouvez-vous me dire combien d'étudiants, au cours des 10 dernières années, ont travaillé tout en fréquentant l'université? Combien d'étudiants travaillent aujourd'hui, et combien travaillaient il y a 10 ans? Ils sont obligés de travailler à temps partiel. Parmi les étudiants qui travaillent, combien obtiennent de très bonnes notes? Est-ce que le travail à temps partiel influe sur leurs notes? Est-ce que vous avez ces chiffres?

M. Jackson: Je n'en suis pas sûr. J'ai toutefois déjà lu dans une étude que, lorsque les étudiants travaillaient au-delà d'un certain nombre d'heures -- et je ne me souviens pas du chiffre exact --, je pense que c'était un peu moins de 20 heures, leurs notes s'en ressentaient.

Le président: D'où provenaient ces renseignements?

M. Jackson: Je vais essayer de la retrouver. C'était une étude qui avait été publiée dans un document.

Le président: L'avez-vous à votre bureau?

M. Lynd: Oui, je crois que nous l'avons.

Le sénateur DeWare: Moi aussi, j'ai déjà lu cela en quelque part.

Le président: Pouvez-vous nous envoyer un exemplaire de cette étude?

Le sénateur Andreychuk: J'aimerais ajouter, et cette question ne s'adresse peut-être pas vraiment à nos témoins aujourd'hui, que bon nombre des problèmes éprouvés par les étudiants ont été éliminés grâce aux cours d'extension et à la flexibilité des programmes d'études universitaires.

Habituellement, les cours s'échelonnaient sur toute l'année. La plupart des universités canadiennes utilisaient le système semestriel, qui donnait une certaine marge de manoeuvre aux étudiants. Il fallait plus de temps pour compléter les études, mais au moins les étudiants pouvaient travailler.

Il y a ensuite les programmes coopératifs. Par exemple, de nombreux étudiants en sciences informatiques, en administration ou en sciences sociales suivent des cours à l'université pendant un certain temps, et participent ensuite à un stage. Une fois le stage terminé, ils retournent à l'université. C'est peut-être pour cette raison que nos chiffres indiquent que les étudiants prennent plus de temps à compléter leurs études. Nous devrions poser cette question aux universités lorsqu'elles comparaîtront devant le comité. Est-ce qu'elles ont modifié leurs programmes pour ces raisons, ou est-ce que nous mettons vraiment plus de temps à terminer nos études? Cela a certainement un impact sur les services qu'offrent les universités et sur leurs coûts.

Le président: Savons-nous combien d'étudiants reçoivent une aide financière des entreprises; autrement dit, des compagnies qui envoient leurs travailleurs à l'université? Ils suivent des cours, et lorsqu'ils obtiennent leur diplôme, ils sont spécialisés dans leur domaine. Leurs études sont sans doute financées en partie par les entreprises.

Il est possible pour les industries au Canada de financer un plus grand nombre de programmes dans les universités et collèges. Avez-vous des statistiques à ce sujet?

M. Lynd: Encore une fois, je pense que nous pourrions vous fournir des renseignements là-dessus. Lorsque nous avons effectué notre sondage sur l'éducation et la formation des adultes, nous avons demandé aux répondants s'ils avaient participé à des activités éducatives au cours des 12 derniers mois et, le cas échéant, si cette activité avait été financée ou non, et cetera. Nous pouvons vous fournir des renseignements là-dessus, mais il faudrait que je réexamine les données afin de voir si je peux les répartir par industrie ou par groupes.

Le président: Pouvez-vous nous dire aussi quels sont les domaines où il existe des emplois? D'après le ministre du Commerce international, il y a des milliers d'emplois dans le domaine de l'autoroute de l'information. Toutefois, nous n'avons pas au Canada de travailleurs qui ont la formation voulue pour occuper ces postes, pour aller à l'étranger. Le Canada pourrait collaborer davantage avec ces entreprises et peut-être accroître ses échanges avec le pays concerné. On établirait ainsi des réseaux. Si nous savions dans quels domaines il existe des emplois, nous pourrions proposer aux universités de modifier leurs programmes afin de pourvoir les postes vacants. Avez-vous des statistiques à ce sujet?

Le sénateur Andreychuk: Je reviens à ma question initiale: est-ce qu'ils compilent des statistiques qui peuvent nous aider à renforcer notre position concurrentielle? C'est un domaine très nouveau.

Ces témoins ne devraient pas être les seuls à s'en occuper. Le gouvernement devrait dire: «Voici ce dont nous avons besoin.» Ma question visait le gouvernement fédéral lui-même. Je trouve admirable que nous puissions maintenant compter sur la participation des provinces, mais je crois que le gouvernement fédéral a lui aussi un rôle à jouer; il faudrait trouver un moyen de l'amener à remplir ce rôle.

Le ministre réagit à ce qu'il entend, mais il ne va pas plus loin. Il reçoit manifestement des propositions. Dans quelle mesure s'appuient-elles sur des données? Ou est-ce qu'elles reposent sur des intuitions, des conversations? Nous devrons, à un moment donné, rapprocher les deux parties, cerner nos besoins et trouver des moyens d'y répondre.

Le président: Nous verrons, à partir des réponses que nous fournira Statistique Canada, s'ils compilent ou non ces statistiques. Nous pourrons peut-être ensuite leur recommander telle et telle mesure pour élargir la portée de leurs programmes.

Le sénateur Andreychuk: Surtout pas! Notre rôle n'est pas d'élargir l'appareil gouvernemental.

Le président: Nous avons besoin de plus de renseignements. Votre ministère a-t-il des recommandations à formuler au gouvernement du Canada et aux provinces quant aux mesures qu'ils peuvent prendre pour mieux compiler les données? Si nous ne faisons pas ce que nous devrions faire, nous serions fort heureux d'avoir des recommandations à ce sujet.

J'aurais une dernière chose à vous demander. Si nous constatons, plus tard, que nous avons besoin de précisions au sujet des statistiques, accepterez-vous de comparaître de nouveau devant le comité?

M. Lynd: Avec plaisir.

Le sénateur Lavoie-Roux: Monsieur le président, j'ai une dernière question à poser. Vous avez parlé de la nécessité d'établir des liens plus étroits avec les provinces. Le Québec ne serait sans doute pas d'accord, mais je me trompe peut-être. Si tel est le cas, tant mieux. Comme vous compilez des statistiques sur l'éducation, et que l'éducation relève des provinces, est-ce que votre conseil des -- je ne sais pas comment il s'appelle exactement --

[Français]

- Dans quelle mesure pensez-vous qu'il verra le jour?

[Traduction]

M. Lynd: Le Conseil des statistiques canadiennes de l'éducation a été créé il y a trois ou quatre ans. Ce conseil, qui regroupe le statisticien en chef et les sous-ministres de tous les ministères responsables de l'éducation, se réunit deux fois par année. Les représentants de tous les ministres de l'éducation, y compris celui du Québec, sont toujours présents aux réunions.

Ils ont toujours accepté, jusqu'à maintenant, de participer aux réunions du Conseil des ministres de l'éducation et de collaborer avec le Conseil des statistiques canadiennes de l'éducation, autrement dit, avec le statisticien en chef.

Nous avons mis sur pied un certain nombre de projets conjoints avec tous les ministères. Parmi ceux-ci figure le Programme des indicateurs pancanadiens de l'éducation. Je crois qu'un rapport sera déposé demain à ce sujet. Le travail de planification a été effectué par le Conseil des ministres. Ils ont dit que le rapport serait déposé demain. Ce pourrait être la semaine prochaine.

Nous avons effectué plusieurs autres études, dont une sur l'enseignement universitaire, et une autre sur l'enseignement primaire et secondaire. Toutes ces études ont été effectuées sous l'égide du Conseil des statistiques canadiennes de l'éducation, au sein duquel le Québec a joué un rôle très important.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je trouve cela encourageant, parce qu'il est utile que tout le monde collabore ensemble pour avoir une meilleure idée de la situation. S'il n'y a pas d'opposition, tant mieux.

La séance est levée.


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