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Sous-comité de l'éducation postsecondaire au Canada

 

Délibérations du sous-comité de l'enseignement postsecondaire du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 5 - Témoignages - Séance de l'après-midi


VANCOUVER, le lundi 10 février 1997

Le sous-comité de l'enseignement postsecondaire du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 14 heures pour poursuivre son examen de l'enseignement postsecondaire au Canada.

Le sénateur M. Lorne Bonnell (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, notre prochain témoin est Mme Kathryn Barker, Ph.D., présidente de FuturEd Associates.

Les membres du comité pourraient peut-être se présenter afin que Mme Barker et les autres sachent à qui ils ont affaire.

Le sénateur Forest: Je m'appelle Jean Forest et je viens d'Edmonton, en Alberta. Anciennement du Manitoba, je passe maintenant beaucoup de temps en Colombie-Britannique car mes enfants et petits-enfants y habitent. Je m'intéresse depuis longtemps au dossier de l'enseignement. J'ai déjà été enseignante et conseillère scolaire. J'ai été membre du Sénat et du bureau des gouverneurs de l'Université de l'Alberta, dont j'ai aussi été chancelière. J'ai aussi travaillé dans l'industrie de l'accueil et ai fait partie du conseil d'administration de la Société des transports du Nord et du Canadien national.

Je suis ravie de participer aux travaux du sous-comité et d'approfondir mes connaissances de l'enseignement postsecondaire.

Le sénateur Perrault: Je m'appelle Ray Perrault. J'ai déjà été leader du gouvernement au Sénat. J'ai été élu à la Chambre des communes et à l'assemblée législative de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Andreychuk: Je suis le sénateur Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.

Le sénateur Carney: Je suis Pat Carney, de Colombie-Britannique. Je remplace le sénateur DeWare, qui est incapable d'assister à la présente série d'audiences. Je suis ravie de le faire car, avant d'entrer en politique, j'ai été chargée de projet du B.C. Distance Education Planning Group, qui a mené à la création du Open Learning Institute et du Knowledge Network.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je suis un sénateur du Québec. Je me suis toujours intéressée de près à l'enseignement. J'ai enseigné la sociologie et le travail social à l'Université de Montréal pendant un certain nombre d'années. J'ai aussi présidé pendant quelques années le plus gros conseil scolaire au Canada; il regroupait 230 000 élèves à l'époque. J'ai aussi été ministre de la Santé. Il fut un temps où les ressources ne manquaient pas pour la santé et l'enseignement, mais tout cela a changé depuis trois ou quatre ans. À un moment donné, on a décidé d'affecter les ressources à la santé et aux services sociaux, au détriment de l'éducation. On a fait des progrès énormes dans le domaine de l'enseignement depuis mon enfance. Je fais partie de ce comité parce que ce sujet m'intéresse au plus haut point.

Le président: Je m'appelle Lorne Bonnell et je viens de l'Île-du-Prince-Édouard, berceau de notre grand pays. Après ses débuts modestes, nous avons maintenant un pays magnifique dont nous voulons améliorer les normes en matière d'enseignement, avec votre aide.

Mme Barker, je vous invite à donner votre exposé. Nous vous poserons ensuite quelques questions.

Mme Kathryn Barker, présidente, FuturEd Associates: Monsieur le président, honorables sénateurs, je suis venue témoigner devant vous en tant que parent, titulaire de fraîche date d'un diplôme d'études postsecondaires, et futuriste. Un futuriste n'est pas quelqu'un qui sait ce que nous réserve le futur, mais plutôt quelqu'un qui étudie ce que sera l'avenir. C'est comme cela que je gagne ma vie, j'étudie l'avenir et j'essaie de prévoir ce qu'il nous réserve, particulièrement en ce qui concerne les systèmes d'apprentissage au Canada.

Votre examen porte sur l'enseignement postsecondaire, sujet qui englobe les collèges, les initiatives de formation du secteur privé et les universités. Comme bon nombre des observations consignées dans le hansard portent sur les universités, je vais vous raconter une petite histoire pour illustrer mon argument principal avant de passer aux grands points de mon mémoire.

J'aime bien poser la question suivante aux recteurs d'université: On dit que l'université est la dernière institution médiévale. Dans quelle mesure trouvez-vous que c'est un compliment, et dans quelle mesure trouvez-vous que c'est une insulte? Je trouve les réponses très révélatrices. Il y en a beaucoup qui disent que notre système d'enseignement postsecondaire a un devoir envers le passé. Ce à quoi je réponds avec véhémence qu'il a aussi une responsabilité très spéciale envers l'avenir. Ce système doit évoluer de façon radicale si nous voulons qu'il soit ce dont nous avons besoin à l'avenir.

Je sais que vous allez entendre de nombreuses présentations aujourd'hui, la plupart d'organismes qui ont procédé à des consultations poussées avant d'en venir à un consensus sur la teneur de leur présentation. Je représente un consensus d'une personne. J'ai ma propre société de consultation, mais je n'ai consulté personne. J'ai décidé de me présenter pour vous dire ce que je pense à ce sujet. Je suis aussi un parent et une diplômée de fraîche date. Mon alma mater est l'Université de l'Alberta. Comme vous avez reçu mon mémoire, je ne vais donc pas le lire en entier. Je vais plutôt le passer en revue rapidement.

J'ai divisé ma présentation en deux parties. Dans la première partie, je dis qu'il est évident que l'enseignement postsecondaire et les autres systèmes d'apprentissage au Canada sont en pleine évolution. Ceux qui disent que c'est toujours la même chose et qu'il n'y a aucune amélioration devraient y regarder de plus près. Je donne dans mon mémoire 11 changements que j'ai notés.

De fermé qu'il était, le système est en voie de passer à une formule ouverte. Par le passé, nos systèmes s'isolaient du reste de la collectivité. Les institutions et organismes fonctionnaient de façon isolée. Nous commençons à comprendre graduellement que les collèges, universités et systèmes scolaires sont tous reliés entre eux dans un grand système. Nous avons en Amérique du Nord un système d'enseignement qui a plus de choses en commun que de différences d'un État à l'autre, d'une province à l'autre ou d'un pays à l'autre. Nous avons un système d'éducation, tout comme nous avons un système de soins de santé, un régime militaire et politique. Nous sommes enfin capables de parler de l'important.

Dans un système ouvert, il faut tenir compte de l'effet de rétroaction. Autrefois, comme le système était fermé, on ne tenait pas compte nécessairement des critiques ou des suggestions d'amélioration. Le système est maintenant ouvert et c'est dû en grande partie à l'influence des médias et des politiciens.

Un autre changement que l'on note c'est que le système, qui était monopolistique, permet maintenant la concurrence. Le système public, qui a le monopole pour ce qui est de la délivrance de nos titres de compétence, se mesure maintenant à l'Internet et aux systèmes de formation internationaux, de sorte que les titres de compétence ne constituent plus nécessairement le seul critère pour ce qui est de trouver un emploi rémunérateur. Non seulement y a-t-il de la concurrence au niveau de la délivrance des titres de compétence, on se dispute aussi les sources de financement, ce qui ne se faisait pas auparavant. La concurrence est très forte dans les deux cas.

Un autre changement notable est que nous abandonnons un système axé sur la bureaucratie pour en adopter un qui est beaucoup plus individualisé. Un système bureaucratique est typique d'une institution de l'âge industriel. Une des caractéristiques de l'âge industriel est une bureaucratie imposante, une taille importante et la répartition de tout par groupes. Nous devons nous diriger vers l'âge de la connaissance, où nous pouvons profiter des possibilités d'individualisation qui nous sont offertes. En tant que consommateurs d'éducation, de la même façon qu'ils consomment tout le reste, les gens nous disent que non seulement ils s'attendent à ce qu'on leur offre ces services, ils ne voient pas pourquoi ils n'y auraient pas accès. Nous avons la technologie qu'il faut pour le faire.

De normatif qu'il était, le système devient de plus en plus adapté aux besoins. Par le passé, nous nous laissions dire par le système ce qui convenait: «Nous sommes des éducateurs professionnels. Nous allons vous dire ce que vous devez apprendre, puis nous vous évaluerons.» De plus en plus d'étudiants, de gens d'affaires, de syndicalistes et de simples citoyens disent maintenant qu'il serait peut-être bon d'en discuter. Ils sont d'avis qu'on devrait peut-être leur demander ce qu'il leur faut et tenir compte de leurs préoccupations. C'est un important virage qui s'amorce.

Le système était linéaire, mais il est de plus en plus cyclique. Auparavant, notre système était fonction de l'âge et du temps. Tous les enfants commençaient leur première année à six ans et les étudiants obtenaient leur diplôme de premier cycle après quatre ans d'études. Les concepts d'âge et de temps perdent de plus en plus de leur pertinence. On ne peut pas dire qu'ils ne sont plus pertinents, loin de là, mais rien ne nous permet de supposer que toutes les personnes comprises dans une même cohorte d'âge auront les mêmes besoins, les mêmes possibilités et les mêmes responsabilités.

Le système, qui auparavant était axé sur l'évaluation des élèves à des fins de sélection, cherche maintenant à faciliter l'apprentissage, mais nous sommes encore loin du but. À l'heure actuelle, à la fin des 12 premières années de scolarité, le système scolaire sépare les 30 p. 100 des élèves qui sont capables de faire des études postsecondaires des 70 p. 100 qui ne le sont pas. Ils ont été dépistés. On utilise ensuite le système d'enseignement postsecondaire pour faire une sélection parmi les étudiants. Nous tenons pour acquis qu'il y aura des échecs. Selon d'aucuns, notamment des futuristes, c'est inacceptable. Il n'y a pas de raison que tous ne puissent pas réussir, pas nécessairement tous au même niveau et certainement pas tous dans le même laps de temps. Dans un établissement d'enseignement où l'on cherche à faciliter l'apprentissage, il ne devrait y avoir aucune possibilité d'échec.

Un autre changement que l'on note, c'est que l'éducation, qui était considérée comme un privilège, devient de plus en plus une question de droit et de responsabilité. La notion de l'éducation en tant que privilège nous a rendus quelque peu complaisants, mais grâce à des initiatives qui se répandent de plus en plus aux États-Unis et qui se font aussi sentir au Canada, on commence à utiliser des poursuites en recours collectif pour déterminer ce que prévoit la Charte des droits en matière de droits et responsabilités relativement à l'éducation, la formation et l'éducation permanente.

Ce qui était un organisme social coûteux se transforme en industrie qui emploie un nombre considérable de Canadiens et qui a les mêmes besoins en matière de perfectionnement des ressources humaines que toute autre industrie, soit des besoins de leadership, de perfectionnement professionnel, de possibilités de formation, d'adaptation, ainsi que toute autre question qui se rapporte au perfectionnement de la main-d'oeuvre et au développement économique. Il n'est pas clair si on s'attend toujours à ce qu'un système agisse toujours comme ce genre d'organisme social.

Nous passons d'un système à forte concentration de main-d'oeuvre à un système de capital. C'est en partie du fait que la technologie nous permet maintenant d'utiliser des ordinateurs pour la notation, la tenue de dossiers et le testage, ce qu'ils font de façon efficace et très rentable, car cela libère des gens. À cause des nombreuses compressions budgétaires dans le secteur de l'éducation, il a fallu mettre à pied du personnel qui est remplacé par la technologie.

Le système a été conçu de façon à assurer le statu quo. C'est à cause de la notion voulant qu'il s'agit d'un organisme social. Nous savons maintenant que nos systèmes doivent favoriser le changement plutôt que le maintien du statu quo. La difficulté, c'est que l'on ne peut pas parler de changement sans sembler vouloir en faire un modèle. La seule façon que l'on prendra l'éducation au sérieux, c'est si l'on procède à des changements proactifs, basés sur un modèle positif. On ne peut pas dire quelque chose et faire autre chose.

Le dernier changement important que je mentionne dans mon mémoire, c'est que l'éducation et la formation, qui étaient perçues comme étant la responsabilité de la province ou de l'établissement d'enseignement, deviennent des enjeux globaux d'envergure nationale. Il y a certes suffisamment d'initiatives sur le plan national et fédéral pour qu'on le reconnaisse. Certaines questions sont réglées au niveau national alors que d'autres ont toujours été réglées au niveau provincial ou local. Si l'on appliquait le principe de la subsidiarité, si l'on confiait la prise de décisions au niveau le plus approprié, il faudrait faire une certaine reconfiguration.

En fin de compte, le Canada est le seul pays du G-7 qui n'a pas d'organisme national responsable de l'éducation. Quand nous nous mesurons aux autres pays sur la scène internationale et que nous vantons notre système d'éducation, nous avons l'air de parfaits imbéciles avec nos 13 territoires et secteurs de compétence différents, sans une source centralisée d'information, de promotion ou de compréhension.

Si nous savons que le changement est inévitable et que nous voulons qu'il soit positif, il serait bon alors d'avoir un système pour le faire. Pour être en mesure d'apporter ces changements, il faut d'abord comprendre que notre système d'apprentissage est configuré par tout un système d'apports, de processus et de résultats. C'est un processus circulaire: nous y investissons de l'argent, du matériel et des installations et un curriculum; viennent ensuite le processus d'apprentissage, l'évaluation, la surveillance et de gestion, et le résultat est l'acquisition du savoir. Les élèves ont acquis des compétences modifiées auxquelles ils ont ajouté des comportements et des valeurs. Il y a des résultats individuels aussi bien que des résultats sociétaux plus vastes. Un autre résultat est la connaissance acquise, certainement dans le cas des établissements d'enseignement postsecondaire.

Si l'on part du principe que c'est un système, il est bien entendu que si on touche à un secteur donné, tous les autres s'en ressentiront. En Colombie-Britannique, le gouvernement songe à prolonger la journée d'école, sans tenir compte des changements qu'il faudra apporter au système ni de la façon dont cela influera sur les résultats. On se trouve à remanier le système sans tenir compte de sa nature.

Dans le cadre de mes recherches, j'ai formulé des questions qui devraient nous aider à déterminer comment procéder pour changer les choses. Voici la première. Qui sont les clients du système et quels sont leurs besoins véritables? Comme la cohorte dont nous parlons est celle des étudiants de niveau postsecondaire, il s'agit surtout de personnes de 18 à 25 ans, même si l'on sait que la moyenne d'âge des étudiants de ce niveau est plus élevée. Toutefois, si nous tenons pour acquis que la cohorte des 18 à 25 ans forme le groupe primaire, il faut alors chercher à établir quels sont ses vrais besoins. Je n'ai pas la réponse à cette question.

Si nous avions la réponse à cette question, je peux vous garantir que nous nous y prendrions autrement dans le domaine de l'éducation postsecondaire. L'enseignement porterait sur des questions qui préoccupent les jeunes et serait offert d'une façon qui facilite leur apprentissage. Cette expérience d'apprentissage les suivrait tout au long de leur vie et ils n'arrêteraient jamais d'apprendre. Pour l'instant, le système tel qu'il est conçu ne le permet pas. Si l'on tenait compte des vrais besoins des clients, des consommateurs de services d'éducation et de formation -- et ça entre dans les apports au système -- alors, de toute évidence, nous aurions des processus et pratiques différents qui donneraient des résultats différents. En posant cette question, on peut modifier les divers éléments du système. Si, en fin de carrière, on me qualifiait de défenseur des consommateurs en matière d'éducation et de formation, j'en serais fière. Dans nos systèmes d'apprentissage, on n'écoute pas le consommateur, on ne lui donne aucun pouvoir. Ils sont les seuls capables d'apporter des changements positifs si au moins ils savaient quelles questions poser. Mon travail, c'est d'aider les clients à formuler les questions qu'il faut pour recevoir la meilleure éducation, la meilleure formation possible.

Comment un système d'éducation classique pourrait-il préparer les élèves pour l'avenir? Quel contenu, quelles compétences faut-il transmettre? Cette question se rapporte au contenu du curriculum dans nos systèmes d'apprentissage. Les futuristes sont très clairs sur le point suivant. Non seulement on enseigne des choses qu'on ne devrait pas, on n'enseigne pas des choses qu'on devrait. Prenons par exemple la notion de pensée à long terme et de conséquences à long terme. Notre groupe typologique n'a pas évolué de façon à réagir à des dangers à long terme. Nous avons évolué en tant qu'espèce parce que nous réagissions immédiatement au craquement d'une branche ou à un éclair. Nous savons comment réagir à un danger immédiat. Toutefois, nous ne sommes pas capables de réagir à un danger à long terme. Il faut que nos systèmes d'enseignement aident les élèves à comprendre que la vie ne s'arrête pas au premier quart d'un match, qu'elle va au-delà des prochaines élections et de la prochaine année financière. Il faut planifier à long terme et de façon globale. Les futuristes sont d'avis qu'il faut modifier le curriculum, mais les recommandations varient beaucoup. Si l'on modifie le curriculum, ça veut dire qu'il faudra des enseignants différents et les résultats seront certainement différents.

Comment peut-on encourager les professionnels de l'éducation et les aider à transformer ce secteur? Si l'on veut que ceux qui oeuvrent dans le système mettent en oeuvre des changements positifs, ce serait une bonne idée de commencer par leur demander comment ils s'y prendraient. Ça leur serait très difficile, car ils ont les mains liées et sont les produits du système. Ils représentent le meilleur produit du système. Ils ont passé au travers des processus de sélection et sont arrivés au sommet. Ils ont du mal à accepter le changement, c'est pourquoi il faut se demander comment les aider à y arriver. Faut-il faire de l'acquisition de connaissances et leur utilisation le contenu de l'enseignement classique ou le processus?

Nous avions l'habitude de prendre nos jeunes gens pour ces urnes vides à remplir de connaissances qu'ils utiliseraient ensuite. Nous avons appris depuis qu'ils doivent également savoir trouver et utiliser cette information. Personne d'entre nous n'est capable de se rappeler de tout ce qu'il faut savoir. Nous avons quelque part un ordinateur, portatif ou non, dans lequel nous emmagasinons des renseignements que nous oublions dès le fichier sauvegardé, sachant qu'ils sont en mémoire dans l'ordinateur. Celui-ci est en quelque sorte notre mémoire externe. Le champ des connaissances est si vaste que, au lieu d'être des mines de renseignements, nous naviguons dans une mer de connaissances.

On envisage donc de mettre davantage l'accent, dans l'enseignement, sur l'utilisation et l'acquisition des connaissances que sur la connaissance proprement dite. Quelle devrait être la vocation de nos systèmes institutionnalisés d'enseignement et d'acquisition des connaissances? Quels sont les résultats recherchés? Les résultats peuvent être voulus ou non, à court ou à long terme, positifs ou non. À quoi voulons-nous que serve tout cet argent? Il y a bien longtemps que nous ne nous sommes pas penchés sur ces questions au Canada. Les gens espèrent tout le temps que d'autres soulèveront la question, mais personne ne prend l'initiative.

Qu'est-ce que les Nord-Américains, jeunes ou vieux, ont besoin de savoir, et quel est le meilleur cadre d'apprentissage? En effet, tout ne s'apprend pas dans un cadre scolaire. Dans notre vie communautaire, dans notre travail, dans nos lectures, dans nos loisirs, nous apprenons tout le temps. Si cette forme d'apprentissage est valable et que nous voulons en reconnaître la valeur, il y aurait lieu de se demander si, dans notre système institutionnalisé, nous ne faisons pas des choses inutiles, qui font que nous n'apportons pas aux autres moyens d'apprentissage le soutien qu'il faut. Appartient-il à notre système institutionnalisé d'assurer tous ces services ou certains ne pourraient-ils pas être offerts ailleurs? Quelles décisions primordiales doivent être prises en matière d'éducation et où convient-il qu'elles se prennent? C'est le principe de la subsidiarité. Si nous voulons un leadership national, il faut que les questions soient posées à ce niveau. Il faut évidemment que les autorités locales et nationales se concertent quant à la réponse à donner à ces questions et que les responsabilités soient partagées. En effet, l'intention n'est nullement d'enlever quelque autonomie que ce soit à des institutions telles que des collèges ou des universités, mais bien de répartir les responsabilités.

S'il ne ressortait qu'une chose de vos travaux, j'oserais espérer que ce soit une réponse favorable à la question de savoir si nous avons vraiment besoin de leadership fédéral, que ce soit sous la forme d'un conseil national de l'éducation ou de normes nationales. Il y en a parmi nous, dans le monde de l'enseignement, qui le souhaitent ardemment, et j'espère que vous pourrez, dans vos sphères d'influence, faire quelque chose en ce sens.

Le président: Merci beaucoup, Mme Barker, pour cet excellent exposé. Le sénateur Forest, qui vient elle aussi de l'Alberta, aurait quelques questions à vous poser.

Le sénateur Forest: Je suis certaine qu'il y a bien des gens ici présents qui conviennent de la nécessité d'un conseil national et de lignes directrices nationales dans le domaine de l'éducation comme dans celui de la santé. Toutefois, compte tenu du fait que nous vivons dans une fédération et que l'éducation relève de la compétence des provinces, que proposeriez-vous?

Mme Barker: Ma réponse initiale va paraître quelque peu spécieuse. En ce qui concerne les restrictions imposées par l'AANB, il ne faut pas oublier qu'une loi, quelle qu'elle soit, n'est toujours qu'un bout de papier. Une loi, ça se modifie. Trop souvent, cet argument est invoqué pour faire obstacle au changement. Provinces et territoires sont dotés de systèmes comportant des éléments communs et fonctionnent de la même façon. Cela n'a aucun sens, dans un contexte de responsabilité financière, et encore moins dans celui de la mondialisation, d'avoir encore 13 fiefs en matière d'éducation. Il fut un temps où cela était important. À l'époque, il était difficile de considérer le Canada comme une même grande entité à cause des distances, mais ce n'est plus le cas, et il n'y a plus de raison d'avoir 13 ministères de l'éducation qui font tous la même chose tout le temps.

Le sénateur Forest: À votre avis, le conseil des premiers ministres constitue-t-il un moyen de développer une perspective plus nationale, tout en reconnaissant que chacune des provinces est unique et a ses propres besoins?

Mme Barker: J'aimerais croire que c'est possible, car il y a là une somme considérable de pouvoir, d'autorité et de responsabilité. Quand on voit ce que l'effort collectif des premiers ministres a donné au chapitre de la prestation fiscale pour enfants, il y a lieu de croire que c'est possible. C'est un élément important. L'autre se situe à l'extérieur du cercle politique, mais des personnes qui le connaissent bien pourraient occuper des postes clés. C'est l'élément bureaucratique qui garantirait le bon fonctionnement du conseil de l'éducation. Je connais bon nombre de personnes que cela intéresse.

Le sénateur Forest: Vous dites que, par suite des compressions, il ne se créera pas de nouveaux postes et que des postes risquent même d'être abolis. Des postes se sont pourtant ouverts tout récemment dans le milieu universitaire. Un grand nombre de professeurs qui étaient en poste depuis nombre d'années viennent en effet de céder leur place. Il ne s'agit peut-être pas de nouveaux postes, mais le taux de roulement est quand même fort. Cela va sûrement faciliter le changement.

Mme Barker: Vous avez parfaitement raison; il y a effectivement eu roulement du personnel enseignant. Toutefois, le nombre de travailleurs à contrat ou à temps partiel a augmenté considérablement, et les postes à temps plein se font rares. Cela a ses bons et ses mauvais côtés. Les contractuels et les employés à temps partiels sont peut-être les mieux placés pour faire pression pour que les choses changent. Malheureusement, ce que nous sommes en train de créer dans tous nos établissements d'éducation postsecondaire, c'est un système à deux vitesses, selon que les professeurs sont permanents et qu'ils jouissent de la sécurité d'emploi ou pas. S'ils ne se parlaient jamais entre eux, le problème ne se poserait pas; mais ils se parlent, et ils affirment qu'il existe bel et bien un système à deux vitesses.

Le sénateur Forest: C'est dommage, mais c'est un marché concurrentiel. Aux États-Unis, les professeurs obtiennent la permanence. Nous serions incapables d'attirer de bons professeurs d'université sans cela. Ils refuseraient de venir si n'avions rien de mieux à leur offrir qu'un contrat de durée déterminée.

Mme Barker: Cela ne fait aucun doute.

Le sénateur Andreychuk: Les perspectives et les défis nouveaux que vous venez de décrire devraient nous faire voir l'éducation sous un jour nouveau, et je vous en remercie. Vous avez parlé en faveur de la participation du gouvernement national. L'Acte de l'Amérique du Nord britannique a beau n'être qu'un bout de papier, c'est un bout de papier auquel je tiens. Cette loi est très difficile à modifier, et pour cause. Nous avons essayé de le faire il n'y a pas si longtemps. Tous les systèmes comportent des obstacles, qui n'en sont plus une fois qu'on y voit des bienfaits. Comme nous avons une structure fédérale dans laquelle la responsabilité première mais non exclusive en matière d'éducation incombe aux provinces, est-ce que je traduis fidèlement votre pensée en disant que le rôle du gouvernement national serait plutôt celui d'un facilitateur qui, sans intervenir dans ce que les provinces font, unifie les éléments communs?

Nous avons entendu d'excellents exposés ce matin à propos du rôle du gouvernement national en tant que facilitateur quand il s'agit de rationaliser certaines modalités d'attribution de prêts et d'aplanir certaines des difficultés auxquelles se heurtent les étudiants, notamment en favorisant une plus grande mobilité grâce à un consensus national à l'égard des programmes. Vous dites que nous n'avons pas besoin de 13 conseils. Ce serait peut-être une bonne chose, si les 13 avaient des objectifs communs. En matière de politique étrangère, le gouvernement national ne fait pas cavalier seul, même s'il joue un rôle de premier plan. Concevez-vous que, dans l'avenir, dans les limites imposées par la Constitution et les mandats actuels, un organe national puisse jouer le rôle de facilitateur dans les 11 secteurs que vous avez énumérés, et plus particulièrement dans celui de la mondialisation?

Mme Barker: Vous avez raison. Si tous nos efforts tendaient uniquement à faire modifier l'AANB, nous ne ferions aucun progrès dans le domaine de l'éducation. Jetons un coup d'oeil aux htmects positifs maintenant. L'un des rôles fondamentaux que personne ne remplit à l'heure actuelle est celui de communiquer les renseignements. Des innovations prodigieuses, il s'en fait dans toutes les universités et dans tous les collèges canadiens, mais aucun organisme ne répertorie l'information pour l'échanger ensuite avec d'autres. À moins de connaître des gens dans d'autres collèges ou universités, il y a de fortes chances que vous ne sachiez jamais quel merveilleux travail il s'y fait. Il serait utile qu'un organe fasse fonction de centre d'échange d'information, qui recueillerait l'information et la mettrait à la disposition des composantes du système.

Un autre rôle important consisterait à assurer une liaison efficace entre le Canada et la communauté internationale, à servir de point d'entrée, de point de contact de premier niveau auquel les organismes étrangers savent qu'ils peuvent s'adresser. À l'heure actuelle, c'est auprès de 13 ministères provinciaux qu'ils doivent se renseigner.

On ne cherche pas à enlever quelque responsabilité que ce soit aux provinces ou aux établissements; ils sont autonomes. On cherche plutôt à coordonner ces responsabilités et à le faire en fonction de l'intérêt supérieur des Canadiens, pas celui de ces établissements ni des ministères provinciaux.

Si vous faites vos études en Alberta et que votre certificat ne vous permet pas de travailler en Ontario, vous vous trouvez en fait à avoir, dans votre propre pays, des titres de compétence étrangers. C'est inacceptable. Il est inadmissible que des Canadiens ne puissent pas vivre et travailler dans leur propre pays en utilisant les compétences qu'ils ont acquises dans leur propre pays. Il faut accroître la mobilité des personnes, des crédits et des titres de compétence afin de pouvoir fonctionner comme un seul pays. Imaginez un peu ce que cela ferait pour l'unité nationale. Nos titres de compétence nous permettraient de travailler n'importe où au pays. La situation actuelle est très difficile, surtout pour les professionnels.

Le sénateur Andreychuk: Dans vos recherches et vos lectures, êtes-vous tombée sur des études laissant entrevoir comment les choses s'annoncent pour le Canada, comparativement aux autres pays du G-7? Croyez-vous que, compte tenu de tous les problèmes intérieurs que nous avons, les jeunes gens qui sortent de nos établissements, peu importe la province, ont ce qu'il faut pour soutenir la concurrence mondiale aussi bien comme penseurs que comme travailleurs?

Mme Barker: Il n'y a aucun doute là-dessus. Nous avons un système formidable. Certaines améliorations s'imposent, et l'on aurait besoin d'une nouvelle méthode de mesure, mais il n'y pas de doute que nous sommes bien placés pour être des chefs de file dans le domaine des systèmes d'apprentissage. On s'attend d'ailleurs à ce qu'ils deviennent un élément clé de notre développement économique et de notre stratégie en cette matière.

Le sénateur Andreychuk: Pensez-vous que, si nous accordons nos violons et embrassons certaines perspectives nationales, ce que nous aurons à offrir serait vendable?

Mme Barker: Parfaitement.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je ne puis qu'abonder dans votre sens en ce qui concerne les normes nationales. Je ne suis pas sûre cependant que l'AANB constitue un obstacle. L'éducation est le plus délicat des champs de compétence des provinces. La raison en est fort simple: c'est par l'éducation que se transmettent l'histoire, la langue et les valeurs de la société, et ce n'est pas ici, en Colombie-Britannique, que nous allons nous lancer dans un débat pour savoir si, oui ou non, le Québec forme une société distincte. Je me demande ce que cela nous donnerait de plus, si nous avions un conseil de l'éducation qui était centralisé. Je ne sais pas si cela ferait de nous une meilleure société, ou si notre système d'éducation s'en porterait mieux.

Rien n'empêche l'Université de la Colombie-Britannique ou l'Université McGill, à Montréal -- cela se fait déjà à Montréal, dans les quatre universités montréalaises -- d'essayer de coordonner ce qui se fait pour que la main gauche sache ce que la main droite fait. Il y a des gens qui prétendent qu'on a besoin de normes nationales et d'un organe central qui assurera la planification de notre système d'éducation. Je ne suis pas sûre que notre système d'éducation s'en porterait vraiment mieux. Premièrement, je ne suis pas certaine que ce soit faisable et, deuxièmement, je ne sais pas en quoi cela améliorerait la situation.

La responsabilité du gouvernement fédéral en matière d'éducation consiste à en faire une priorité, et pas seulement quand il y a des petits surplus à redistribuer. Il y a des secteurs particuliers, dont la recherche, dans lequel un effort de normalisation à l'échelle nationale s'impose. Encore là, l'éducation offerte au Canada serait-elle meilleure, si nous nous dotions de normes nationales?

Mme Barker: Cela garantirait la mobilité des Canadiens à l'intérieur de leur propre pays.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec vous.

Mme Barker: Si seulement vous aviez pu assister avec moi à la Conférence de la Société du monde futur à Washington l'an dernier; le conférencier principal nous a fait une série de prédictions. Il y avait surtout des Américains dans la salle. Il a prédit l'éclatement du Canada avant l'an 2000. Aux gens assis à la même table que moi qui savaient que j'étais Canadienne, j'ai dit: «Nous n'en parlons pas exactement dans ces termes, au Canada.» Les futuristes trouvent tout naturel de voir de gros conglomérats de pays éclater un peu partout dans le monde et ils présument que c'est ce qui va arriver au Canada. Ceux d'entre nous qui trouvent cette perspective peu réjouissante cherchent des moyens de sensibiliser la population et de promouvoir l'unité nationale. Le fait que les élèves et étudiants aient 13 programmes de cours différents ne contribue pas à l'unité nationale. Les normes nationales ne dicteraient pas exactement ce qu'il faut enseigner et comment le faire, mais elles auraient au moins l'avantage de fixer des buts communs que nous nous efforcerions tous d'atteindre pour que, au Canada, les petits enfants et les jeunes gens sachent, quand ils seront grands, qu'ils font partie d'un ensemble qui s'étend bien en dehors des limites de leur province ou de leur région.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je suis d'accord pour dire qu'il faut éliminer les obstacles interprovinciaux afin de favoriser la mobilité. Le problème de mobilité s'explique en partie par les restrictions que des ordres professionnels comme le Barreau du Québec et le Barreau du Haut-Canada ont imposées. Ces ordres professionnels ne sont pas contrôlés par l'État mais par diverses corporations professionnelles et ils constituent un obstacle majeur à la mobilité des professionnels.

Le sénateur Andreychuk: Statistique Canada entre en jeu parce que nous n'avons pas de ministère de l'Éducation. Les provinces échangent des renseignements en passant par un conseil des ministres parce qu'il n'y a pas de ministère fédéral de l'Éducation. Le rôle du gouvernement fédéral en tant que facilitateur consiste à encourager l'échange d'information. Cela rejoint-il votre pensée ou parlez-vous plutôt d'une présence politique du gouvernement fédéral? Estimez-vous que c'est à eux de s'assurer que tout le monde prend place autour de la table en tant que partenaires égaux?

Mme Barker: Les deux, probablement. S'ils pouvaient animer la collaboration, ce serait merveilleux. Il y a aussi le rôle politique. Il faudrait qu'il y ait des discussions au niveau politique. J'espère de tout coeur que, à un moment donné durant la prochaine campagne électorale, les gens vont commencer à se demander: quelle est la position de tel ou tel parti sur le leadership à l'échelle nationale ainsi que les systèmes d'éducation et d'apprentissage? Cela comporte deux étapes, mais les deux sont possibles et même probables.

Le sénateur Carney: J'enseigne depuis six ans à l'école d'aménagement régional de la faculté des cycles supérieurs de l'Université de la Colombie-Britannique. Durant cette période, j'ai constaté des changements chez mes étudiants: ils sont plus instruits, ils écrivent mieux -- à moins que ce soit le vérificateur orthographique qui fasse toute la différence -- ils sont plus exigeants envers leurs chargés de cours, et la qualité de leur travail s'est grandement améliorée au cours de ces six années. Nous devons faire du bon travail à quelque part, car les progrès sont notables. Je doute que tout le mérite revienne à leurs brillants professeurs, mais nous devons sûrement faire quelque chose comme il faut. Peut-être devrions-nous nous attacher à ce que nous faisons bien.

Ma question se rapporte à l'htmect consommation dont vous avez parlé dans votre excellent exposé qui donne à penser. Vous soutenez que l'éducation est un service aux consommateurs et que tout le monde peut consommer, avoir droit à l'éducation postsecondaire. Cela suppose que tout le monde sait ce qu'il veut comme produit, ce qu'il attend du système d'éducation. Je ne crois cependant pas que ce soit le cas des jeunes gens à qui j'ai parlé. Souvent, ils continuent d'étudier parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils veulent faire justement. Dans notre société, les gens ont des chances inégales de faire l'expérience de diverses professions, compétences, exigences, et nous ne savons pas comment prévoir les aptitudes requises.

J'ai demandé à Mme Roberta Bondar si elle recommanderait aux femmes d'aller en sciences, et elle m'a répondu qu'elle ne le ferait pas nécessairement, ne sachant pas si, à la fin de leurs études, ces femmes trouveraient du travail en sciences. Pourriez-vous nous dire, avant que cette séance prenne fin, comment vous feriez pour limiter les dépenses d'éducation dans une société où tous les consommateurs ont droit à l'éducation? Que faites-vous du fait que tout le monde ne sait pas ce qu'il veut consommer?

Mme Barker: Tant que l'éducation est plus ou moins gratuite, que les gens n'ont pas à trop débourser de leur poche, alors les étudiants pourraient se permettre de perdre une année ou deux. Ils pourraient passer deux ou trois ans à explorer les possibilités qui s'offrent à eux, comme bien d'autres l'ont fait avant eux, sans être trop pénalisés. Sachant combien les étudiants doivent emprunter chaque année, je ne suis pas sûre que nous puissions leur donner le loisir de s'endetter indéfiniment pendant qu'ils décident ce qu'ils souhaitent faire dans leur vie adulte. Pour ce qui est des limites à imposer, je pense qu'il reviendrait à la population de décider que l'éducation sera subventionnée par l'État seulement jusqu'à un certain point.

Les bénéficiaires de ce système subventionné par l'État au Canada sont pour la plupart des entreprises et des secteurs industriels, qui ne semblent pas forcément payer pour le produit qu'ils obtiennent, à savoir des Canadiens très instruits.

Comment allons-nous aider les jeunes à mieux savoir ce qu'ils veulent? À Ottawa, j'ai travaillé pour la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre, qui a établi des normes nationales de formation recommandées. Ces normes constituent presque des truismes inattaquables mais, ensemble, elles donnent une description de l'excellence en formation. Elles regroupent des déclarations simples comme celle-ci: la formation doit être assurée par des gens qui possèdent la compétence et la crédibilité qu'il faut pour être des chargés de cour. Nous tenons cela pour acquis, mais un jeune ou un étudiant qui commence sa formation peut ne pas savoir quelles questions poser. Si on leur fournit une description de l'excellence, ils pourront poser des questions en vue d'atteindre à l'excellence. Nous sommes en train de rédiger un guide sur l'enseignement et la formation à l'intention des consommateurs. Il renferme les questions qu'on devrait poser avant de choisir entre cinq collèges communautaires, trois universités, 18 maisons d'enseignement privées, de même que les programmes disponibles sur l'Internet. Ce guide aidera les consommateurs à poser les bonnes questions. Il leur permettra de réduire au minimum les risques de ne pas en avoir pour leur argent ou de perdre une partie de leur investissement, mot que j'emploie de façon très péjorative.

Le sénateur Perrault: Vous brossez un tableau de fin du monde pour beaucoup de professionnels de l'enseignement lorsque vous déclarez ceci:

Tellement de ces fonctions peuvent désormais être assumées plus vite et à moindre coût par la technologie. Tellement d'autres sont assumées par des groupes de collaboration au profit de chacun. Allié à des compressions budgétaires, cela va entraîner une réduction massive des dépenses de capital humain, c'est-à-dire des mises à pied dans le secteur de l'enseignement à la grandeur de l'Amérique du Nord. Une stratégie d'aide à l'adaptation de l'industrie s'impose manifestement ici.

C'est vraiment là un scénario très sombre. Je me demande quel genre de collaboration vous obtiendrez des enseignants si vous prédisez qu'ils seront supprimés du système en très grand nombre.

À la page 10 de votre mémoire, vous citez l'ouvrage intitulé: Restructuring Schools: The Next Generation of Educational Reform, par Richard Elmore et associés, qui prétendent qu'il faut multiplier les récompenses pour les enseignants, accroître les possibilités de diriger les efforts de changement, améliorer la responsabilité au moyen de l'évaluation. Cela ne constitue pas un sombre scénario, mais une bonne occasion pour les enseignants de gagner davantage d'argent et d'avoir leur mot à dire dans ces changements. Pouvez-vous clarifier cela pour nous? Il semble y avoir une contradiction ici.

Mme Barker: Ce sont là deux sources d'information.

Le sénateur Perrault: Êtes-vous d'accord avec les deux?

Mme Barker: Je le suis. Les mises à pied se feront à partir du système actuel parce que certaines fonctions ne seront plus nécessaires. Cela ne veut pas dire que nous n'aurons pas besoin d'enseignants. Nous en aurons besoin pour faire d'autres choses. La technologie peut se charger de la notation, de l'évaluation et de la gestion. Dans le système actuel, beaucoup de gens assument ces fonctions. Moins de gens seront nécessaires à cet égard, mais nous aurons encore besoin de monde pour accomplir d'autres fonctions.

Le sénateur Perrault: Ce n'est pas tant une question de faire des mises à pied massives qu'une question de développer et d'enseigner de nouvelles compétences pour les enseignants?

Mme Barker: C'est une restructuration.

Le sénateur Perrault: Envisagez-vous des mises à pied massives?

Mme Barker: J'ose croire que nous pourrons éviter les mises à pied massives, car cela serait extrêmement perturbateur pour beaucoup de monde. Il faut changer le système de l'intérieur et encourager les gens à participer à l'instauration de changements. Nous craignons que beaucoup de nos enseignants et professeurs ne soient pas aussi compétents en informatique que les jeunes auxquels ils enseignent. Prennent-ils le temps de vraiment se familiariser avec la technologie? Ou croient-ils qu'on n'apprend pas à un vieux singe à faire la grimace? Dans ce dernier cas, tenons-nous vraiment à ce qu'ils enseignent à nos jeunes?

Il faut les encourager d'une façon ou d'une autre -- soit par la force ou la menace de mises à pied, qui est la méthode la moins désirable, soit en leur donnant l'occasion de suivre d'autres programmes de formation, pas seulement en technologie, mais toutes sortes d'autres programmes -- à participer à un système différent d'apprentissage où ils ne se voient pas comme possédant toutes les connaissances, mais comme aidant des gens à comprendre, à utiliser et à générer des connaissances.

Le sénateur Perrault: Vous ne voyez pas les enseignants faire la queue aux banques d'alimentation parce qu'ils auront été congédiés. Vous les voyez assumer de nouvelles responsabilités; est-ce bien cela?

Mme Barker: D'après des spécialistes en prospective, nous nous lèverons un bon matin et le système scolaire tel qu'il est maintenant n'existera plus parce que ces gens-là auront refusé de changer.

Le sénateur Perrault: Je me suis entretenu avec le ministre des Affaires étrangères d'un pays du Pacifique qui participait à une conférence à Vancouver, l'an dernier. Comme son pays se compose d'un millier d'îles, il est très difficile d'assurer l'éducation de tous les jeunes. La technologie du lointain Canada vient à leur secours, quoique la chose en soit encore au stade expérimental. Une petite antenne parabolique située juste au-dessus de l'équateur transmet les cours d'un enseignant aux enfants qui vivent dans le millier d'îles qui constituent l'Indonésie.

Le sénateur Carney: C'est notre Open Learning Institute, en Colombie-Britannique, qui assure cet enseignement.

Le sénateur Perrault: Au lieu d'envoyer des enseignants dans chaque petit district, on veille à ce que des assistants, qui n'ont peut-être pas le statut professionnel, aident les jeunes au niveau local en s'assurant qu'ils passent les examens et fassent leurs travaux. Cela aura une incidence colossale sur l'enseignement si cela s'étend à d'autres pays.

Mme Barker: Absolument. Vous parlez de deux choses. La première est notre capacité à produire et à commercialiser des biens de consommation que d'autres achètent, et nous sommes considérés comme des chefs de file mondiaux à cet égard. L'autre est la portée que cela a pour les Canadiens au Canada. Grâce à la formation à distance, il est désormais possible d'obtenir un grade, un diplôme ou un certificat sans quitter la maison.

Le sénateur Perrault: Je crois savoir que l'Université Queen's fait passer des messages publicitaires à CKNW encourageant les étudiants à s'inscrire à son cours d'administration des affaires. Je voudrais savoir quel genre de diplôme elle offre. Ce serait une source de revenus. Je suppose que le premier ministre de l'Ontario et sa politique budgétaire amènent les maisons d'enseignement à se trouver d'autres sources de revenus.

Mme Barker: Cela repose encore sur l'idée que nous voulons tous acquérir des titres de compétence. Aujourd'hui, ce ne sont pas tous les employeurs qui s'intéressent aux titres de compétence. Ce qui les intéresse, c'est l'apprentissage. Ils veulent que les gens aient des compétences, des connaissances et des attitudes, mais pas nécessairement des titres de compétence, et ils ne sont pas convaincus que certains titres de compétence assurent des compétences, des connaissances et une attitude.

Nous connaissons l'histoire miraculeuse du jeune qui quitté l'école secondaire, qui est allé en Californie et qui fait des millions de dollars avec les ordinateurs Apple. C'est un peu exagéré. Mon fils, qui a 21 ans, n'a pas terminé son cours secondaire et il a du mal à s'en sortir à l'heure actuelle. Il en est là et il n'est pas le seul. Il fait partie de ces innombrables jeunes qui se demandent s'ils devraient retourner à l'école pour obtenir un diplôme ou développer leur propre talent d'entrepreneur. Mon fils a des aptitudes monnayables. Il est motivé et il a un rêve. Il me demande s'il devrait retourner à l'école ou essayer de réaliser son rêve. Je crois que beaucoup de parents sont dans le même cas au Canada.

Le président: Merci, madame Barker, pour votre excellent exposé.

Nous entendrons maintenant des représentants du University Presidents' Council of British Columbia. Monsieur Jago, auriez-vous l'obligeance de présenter vos collègues, de faire votre exposé et de vous préparer à répondre aux questions?

M. Charles Jago, président, University of Northern British Columbia: Monsieur le président, honorables sénateurs, le secrétaire du conseil, Dean Goard, va répondre à toutes les difficiles questions techniques que vous pourrez vouloir poser. Le vice-recteur à l'enseignement et doyen de l'Université de la Colombie-Britannique, M. Daniel Birch, est aussi présent avec nous. Nous allons résumer notre mémoire, soulever d'autres points, puis garder du temps pour des questions et des échanges de vues.

Nous voulons vous donner une idée de ce qui se passe ici afin de faire ressortir des caractéristiques propres aux universités de la Colombie-Britannique. En même temps, nous allons soulever un certain nombre de questions intéressant l'ensemble des universités, où qu'elles se trouvent. Nous allons effleurer des thèmes qui ont été soulevés par d'autres universités, l'AUCC, le Conseil des recteurs des universités de l'ouest canadien et d'autres témoins qui ont comparu devant vous.

Le University Presidents' Council of British Columbia a été établi en 1987. Jusqu'en 1994 environ, il était connu sous le nom de Tri-Universities Presidents' Council. Il y a maintenant plus que trois universités en Colombie-Britannique. Le nouveau nom de l'association reflète le contexte très dynamique dans lequel les universités évoluent en Colombie-Britannique.

M. Birch vous parlera plus longuement de la nature du système postsecondaire dans la province et de la place des universités dans ce système, et il vous exposera les principales réalisations des universités au cours des dernières années et vous informera notamment de l'incidence de l'enseignement universitaire sur l'économie de la Colombie-Britannique.

M. Daniel Birch, vice-recteur à l'enseignement et doyen, Université de la Colombie-Britannique: Monsieur le président, c'est pour moi un plaisir d'être ici avec mes collègues du University Presidents' Council of British Columbia.

Le système d'enseignement supérieur de la Colombie-Britannique est remarquablement intégré et cohérent. Sa capacité générale d'accueil est considérablement moins grande que celle de la plupart des autres provinces eu égard à la population. Sa cohérence est une caractéristique remarquable. Le système comporte 28 maisons d'enseignement dont trois universités bien établies. Une quatrième université est désormais sur les rails. Même si elle s'appelle la University of Northern British Columbia, elle est presque située dans le centre géographique de la province et dessert de nombreux étudiants du centre-sud de même que du nord de la province.

Avec le transfert par le gouvernement fédéral de la Royal Roads University, le nombre des universités à vocation spécifique a augmenté. Celle-ci a été établie en tant qu'université provinciale se consacrant exclusivement aux programmes d'enseignement technique et professionnel offerts selon une variété de façons.

Au nombre de nos collèges, dont les programmes scolaires sont bien intégrés avec ceux des universités, cinq sont devenus ces dernières années des collèges universitaires. Ils gardent leur mandat général, dispensant toute une gamme de programmes d'enseignement technique et professionnel mais, depuis cinq ou six ans qu'ils offrent des diplômes en collaboration avec les universités, ils se sont vu confier par voie législative le mandat d'offrir leurs propres diplômes.

Cela a entraîné, du jour au lendemain ou presque, une hausse considérable du nombre de maisons d'enseignement offrant des programmes menant à un diplôme. C'est ainsi qu'elles sont passées de quatre, soit les trois universités du Sud et l'Open Learning Agency, à 14 maisons autorisées à accorder des diplômes. Cela veut dire qu'un défi plutôt intéressant nous attend dans la coordination de la mise au point de programmes menant à des diplômes et du maintien de la complémentarité entre ces maisons d'enseignement.

Nous voyons donc une vaste gamme de diplômes -- non seulement le B.A. et le B.Sc. mais, dans une plus grande mesure, le B.Tech. dans des domaines précis -- s'offrir dans toute la province; des diplômes en tourisme; des diplômes qui étaient associés de façon très spécifique à l'économie régionale et provinciale. Ceux-ci supposent une variété intéressante de tâches. Le ministère, les collèges, les instituts et les universités ont établi ensemble un comité d'examen des programmes menant à un grade qui, au cours de la dernière année, a examiné 51 nouveaux programmes proposés et en a approuvé 25.

Si l'on peut maintenir une cohérence, une complémentarité et une mobilité continue raisonnables, le système de l'enseignement postsecondaire en Colombie-Britannique demeurera de qualité et améliorera sa capacité. Les secteurs universitaire et collégial collaborent bien. Les deux secteurs sont représentés au B.C. Council of Admissions and Transfers, une tribune où ils collaborent à la solution des problèmes. Il existe 40 000 ententes environ. Il n'y a pas 40 000 cours mais, comme un cours est accepté par une vingtaine de maisons d'enseignement, il ne faut pas longtemps pour qu'il y ait 40 000 ententes de transfert dans tout le système. À la fin de ces audiences, nous allons vous remettre le rapport annuel à jour du secteur universitaire. Je suis persuadé qu'il vous intéressera.

Ce n'est que récemment que nous avons commencé à recueillir des données en vue de déterminer la mesure dans laquelle la fréquentation de l'université a marqué la vie des diplômés d'université. Nous nous adressons directement aux diplômés. Nous avons des données sur l'emploi, les revenus, et la croissance du secteur qui offre de l'emploi aux diplômés de divers programmes. Ce n'est que récemment que nous avons commencé à mener des enquêtes sur nos diplômés en collaboration avec les maisons d'enseignement et le ministère. En 1995, presque 7 500 diplômés ont répondu, soit plus de 80 p. 100 de la promotion. Une proportion beaucoup plus grande de ceux qui ont été rejoints ont fait part de leur intention de répondre. Comme vous pouvez vous y attendre, nous constatons une intégration importante à la main-d'oeuvre active et un degré élevé de satisfaction à l'égard des programmes de la part des étudiants. Les diplômés souhaitent toujours beaucoup rehausser le rapport qui existe entre leur formation et le monde du travail.

Ce n'est pas par hasard que les programmes d'alternance travail-études constituent le secteur universitaire où la croissance est la plus forte. Au cours des trois dernières années, le nombre des étudiants qui participent à ces programmes dans les universités de la Colombie-Britannique a plus que doublé. Le nombre des étudiants qui, dans le cadre de ces programmes, acceptent un emploi dans l'un ou l'autre des pays du Pacifique augmente rapidement et il y a un renforcement mutuel entre les programmes d'alternance travail-études et la tendance à l'internationalisation de nos universités.

Nous sommes maintenant à interviewer les diplômés de 1991, soit ceux d'il y a cinq ans, au sujet de leur expérience. Nous partagerons ensuite nos conclusions avec vous.

M. Jago: Monsieur le président, je veux effleurer quelques généralités en matière de responsabilité fédérale et provinciale, et parler du mandat du comité, à savoir examiner l'évolution des programmes et des techniques dans l'enseignement universitaire. Je vais dire aussi quelques mots au sujet du mémoire qui a été présenté sur l'aide financière aux étudiants.

Nous sommes aussi touchés que les universités des autres provinces par la réduction des paiements de transfert fédéraux. En Colombie-Britannique, nous nous estimons très chanceux que le gouvernement provincial n'ait pas refilé cette réduction aux universités. Nous sommes protégés. Les subventions aux universités ont été bloquées cette dernière année et nous nous attendons à un traitement similaire l'an prochain. Le blocage de la réduction des subventions a été le bienvenu. Tout étant relatif -- et je suis dans le circuit depuis assez longtemps pour être étonné -- je pourrais me réjouir d'un blocage des subventions. Celui-ci s'accompagne d'un blocage des frais de scolarité, de telle sorte que nous n'avons pas pu hausser les frais de scolarité cette année et que nous n'allons pas les hausser l'an prochain. Il y a un blocage relatif et accessoire des frais imposés aux étudiants.

Le gouvernement provincial a exigé une productivité accrue de la part des universités de la province. Les inscriptions ont grimpé; la subvention provinciale n'a pas changé; les frais de scolarité n'ont pas augmenté; et il nous faut composer avec une certaine inflation. Les pressions inflationnistes sont probablement quelque peu différentes et plus marquées pour les universités que ne l'indique l'indice des prix à la consommation.

Nous estimons avoir été bien traités, mais nous craignons que cette situation ne puisse pas durer très longtemps. Compte tenu de notre revenu en termes réels, on nous demande de faire plus avec moins. Nous avons bien fait savoir au gouvernement que cette situation ne peut pas durer. Nous craignons que, lorsque la situation commencera à se détériorer, cela ait une incidence marquée, dans un sens ou dans l'autre, sur ce que les étudiants devront débourser pour leur éducation.

Il y a la question de la planification de l'enseignement universitaire dans la province. Récemment, le gouvernement provincial a approuvé un plan pour les secteurs collégial et des instituts. Comme nous ne sommes pas visés par ce plan, des discussions sont en cours pour une planification provinciale du système universitaire. Nous nous attendons à une beaucoup plus grande obligation de rendre compte.

Dans un rapport, le vérificateur général de la Colombie-Britannique définit l'obligation de rendre compte des ministères, des sociétés d'État et des organismes subventionnés, y compris les universités. Nous accueillons très favorablement cette démarche et nous sommes impatients de collaborer avec le vérificateur général.

Ce que nous craignons le plus, c'est une trop grande ingérence de la part du ministère. Nous sommes très fiers de la spécificité des universités et de l'autonomie dont nous bénéficions. Nous estimons que cette autonomie nous permet d'innover et de réagir aux pressions et aux possibilités. Cela m'amène à parler de la modification du programme universitaire et des nouvelles techniques.

J'ai qualifié au départ le système de la Colombie-Britannique de très dynamique, et c'est vrai. Les universités de la Colombie-Britannique sont des chefs de file dans le secteur de ce qu'on avait l'habitude d'appeler la «formation à distance». On parle aujourd'hui d' «instruction à distance». Mettre au point des cours sur le web, utiliser la télévision interactive, offrir de la formation aux collectivités éloignées, la University of Victoria fait cela en travail social et en nursing. La University of Northern British Columbia met au point des programmes de formation professionnelle à l'intention des habitants des localités éloignées. Nous pourrons vous citer d'autres cas au cours de la période des questions.

Je vous ferai remarquer que, avec le B.C. Net, le réseau pédagogique provincial, le partage électronique des ressources documentaires et toute une gamme d'autres moyens, nous vivons dans un contexte très dynamique, et les universités jouent un rôle clé dans le développement de la formation à distance en Colombie-Britannique.

Je tiens à m'inscrire en faux contre une chose qu'a dite le témoin précédent. La formation à distance n'est pas une panacée; elle coûte extrêmement cher, l'investissement initial est extrêmement élevé, il en coûte extrêmement cher pour offrir les cours et ceux-ci demandent quand même beaucoup d'attention de la part des personnes qui les donnent. Cela ne va pas réduire le coût de l'éducation. Cela va certes donner aux gens une occasion plus grande que jamais d'apprendre de façon structurée, ce qui nous enthousiasme beaucoup, tout comme nous enthousiasme le fait que la Colombie-Britannique répond à ces besoins spécifiques par l'intermédiaire de quelques-unes des nouvelles maisons d'enseignement et quelques-uns des programmes menant à un grade. Nous offrons maintenant des baccalauréats en technologie appliquée qui répondent aux besoins de l'industrie, et Royal Roads est un bon exemple de nouvelle maison d'enseignement qui répond aux besoins des nouveaux marchés.

Quant aux questions fédérales, nous appuyons fermement l'exposé que vous a fait l'AUCC. Nous estimons qu'une présence fédérale très forte est nécessaire en enseignement postsecondaire dans un certain nombre de secteurs, dont la recherche, y compris le financement de la recherche. Il faut absolument que le gouvernement fédéral continue d'appuyer fortement la recherche au Canada, aide les universités et réponde favorablement à certaines des propositions que l'AUCC a présentées récemment en ce qui concerne notamment l'infrastructure de recherche et le transfert de technologie. Les universités jouent un rôle clé dans la recherche et le développement. C'est nettement le cas en Colombie-Britannique. C'est même vrai d'une maison d'enseignement aussi jeune et dynamique que la UNBC. Notre rôle au niveau de la recherche dans le Nord est en train de devenir absolument essentiel au développement économique de cette région. J'espère que vous soulignerez dans votre rapport l'importance du rôle du gouvernement fédéral dans ce domaine.

M. Birch a effleuré la question de notre participation à l'éducation planétaire. Beaucoup de nos étudiants participent à des programmes internationaux d'échange. Beaucoup de nos maisons d'enseignement commercialisent leurs programmes scolaires à l'étranger. Il importe que le gouvernement fédéral appuie les universités dans cet effort et au niveau des mécanismes établis visant à promouvoir les universités canadiennes à l'étranger et à donner aux étudiants des universités canadiennes la possibilité d'étudier à l'étranger.

Un autre sujet que je voudrais aborder est celui de l'aide financière aux études. Ici, je parle à deux titres, car je siège aussi au comité de l'AUCC sur le financement. J'ai été enthousiasmé par les suites récentes d'un rapport présenté en commun au gouvernement fédéral par les universités, les associations de professeurs et les groupes d'étudiants. Cette action concertée confirme certes qu'il y a vraiment une crise dans le secteur de l'aide financière aux étudiants. En Colombie-Britannique, le gouvernement a très bien réagi en offrant un programme de bourses aux étudiants de première et deuxième années et un programme d'exemption de remboursement de prêts après obtention du diplôme. L'appui du gouvernement provincial est bon, mais une meilleure coordination des programmes provinciaux et fédéraux d'aide aux étudiants s'impose vraiment au Canada. J'espère que vous mettrez l'accent là-dessus dans votre rapport. Ces trois secteurs mis à part, quel est le rôle du gouvernement fédéral dans l'enseignement universitaire? Je crois que le gouvernement fédéral doit rassembler les gens et les provinces, définir clairement une norme nationale, favoriser, encourager et promouvoir. L'enseignement supérieur relève de la compétence provinciale, mais j'espère que nous ne deviendrons pas provinciaux dans notre approche. Je veux parler ici de la mobilité des étudiants. Il est essentiel que nous continuions à appuyer la capacité des étudiants à aller étudier où ils le veulent au Canada et à ne pas être confinés à une seule province. Il importe que les compétences provinciales soient respectées -- je ne le conteste pas -- mais il est essentiel que le gouvernement fédéral établisse une norme et affirme que l'éducation ne doit pas limiter, mais plutôt ouvrir les horizons, et que la présence du gouvernement fédéral dans l'enseignement supérieur est légitime.

M. Birch: Je voudrais partager avec le comité quelques graphiques et tableaux qui l'intéresseront peut-être, particulièrement en ce qui a trait à la Colombie-Britannique par rapport au reste du Canada.

Le premier graphique illustre la situation de l'emploi en Colombie-Britannique, par niveau d'instruction, pendant deux décennies. Vous remarquerez, en regardant ce tableau, que le nombre de personnes qui travaillent après avoir terminé ou pas des études primaires ou secondaires est resté à peu près le même en 20 ans, soit 600 000 ou 700 000. Le nombre de celles qui ont emploi après avoir entrepris mais pas terminé des études postsecondaires a augmenté de 50 p. 100 environ, passant de un peu plus de 100 000 à près de 200 000.

Viennent ensuite les travailleurs qui ont un diplôme professionnel ou technique, dont le nombre a doublé, et ceux qui ont un diplôme universitaire, dont le nombre a triplé. On voit noir sur blanc que le secteur d'emploi à la croissance la plus rapide est celui des gens qui ont fait des études postsecondaires.

Le deuxième graphique montre l'envers de la situation. La ligne du bas donne le pourcentage des diplômés d'université qui sont au chômage, soit, comme on pouvait s'y attendre ou un peu plus, 5,5 p. 100 environ. Ce taux est demeuré relativement constant au cours des dernières années. Le plus haut taux de chômage se retrouve chez les personnes qui n'ont pas fait d'études postsecondaires. Les trois autres groupes sont très proches les uns des autres.

L'autre graphique illustre ce qu'on pourrait appeler le «retard universitaire». La ligne du bas, celle avec les carrés, indique le nombre de diplômés qui sortent chaque année des universités de la Colombie-Britannique. Vous pouvez constater qu'il y en a un peu plus de 10 000 par année. Si vous regardez à la ligne du nombre d'emplois chaque année pour ces diplômés, vous verrez que, à l'exception des trois années où la récession a été plutôt marquée, la demande de diplômés universitaires excède l'offre de façon absolument saisissante.

La dernière page montre deux choses. Dans le tableau d'en haut, prenons d'abord les colonnes des universités, soit le nombre des diplômés et le nombre de diplômés requis pour les emplois disponibles. Vous pouvez voir que, de 1977 à 1981, il y a eu 6 600 diplômés et près de 12 000 emplois. Le ratio demeure le même, sauf pour une période de cinq ans, entre 1987 et 1991, où il s'emballe un peu. Au cours de la dernière décennie, il y a eu presque 12 000 diplômés et 35 500 emplois disponibles chaque année.

À droite, vous avez la situation pour les diplômés de l'enseignement professionnel et technique. Là aussi, la demande a grimpé en flèche. Cette hausse s'est manifestée quelques années plus tôt et est demeurée à peu près constante. Je n'ai pas les données en ce qui concerne les diplômés de l'enseignement professionnel et technique. En regardant le tableau du bas, sur cette page, vous remarquerez deux choses. Pour ce qui est du pourcentage de diplômés universitaires de 15 ans et plus, vous remarquerez que l'Ontario mène avec 15,3 p. 100, suivi par la Colombie-Britannique avec 14,7 p. 100 et par l'Alberta avec 13,2 p. 100. À droite, vous avez le nombre de diplômes universitaires accordés par 100 000 habitants de 20 à 29 ans. Avec 4 100, la Nouvelle-Écosse en a au moins deux fois plus que la Colombie-Britannique. La Colombie-Britannique vient au dernier rang, produisant le plus petit nombre de diplômés universitaires par 100 000 habitants de 20 à 29 ans. Contrairement aux autres provinces du Canada, nous ne suivons pas la tendance à la hausse.

Le groupe des 19 à 24 ans, que l'on considère souvent comme la cible traditionnelle des universités, augmente chaque année de 4 000 personnes. Si seulement 25 p. 100 d'entre elles fréquentaient l'université, il nous faudrait prévoir 1 000 places d'université de plus chaque année rien que pour tenir compte de la croissance démographique.

Ce qu'il y a d'intéressant dans ce tableau, c'est que si vous regardez la colonne de gauche, vous verrez que le bassin est national. La mobilité existe. C'est manifestement une bonne raison pour le gouvernement fédéral de faire attention aux possibilités qui sont offertes aux jeunes. La Colombie-Britannique n'a aucun mal à attirer les jeunes diplômés. Il a été tellement facile, au fil des années, d'en attirer des autres provinces et de l'étranger que nous ne nous sommes pas occupés d'offrir aux jeunes de chez nous des possibilités de faire des études supérieures. Voilà ce qui ressort du dernier tableau.

Le sénateur Andreychuk: D'après les graphiques, le déséquilibre entre les diplômés et ceux qui n'ont pas fait d'études postsecondaires est resté constant, mais les perspectives d'emploi ont fluctué. Il me semble que, en tant que pays commercial, c'est ce à quoi nous allons être confrontés à l'avenir dans le contexte de l'économie et des échanges internationaux, que nous parlions de personnel non qualifié ou qualifié. Il n'est pas important pour nous de produire 3 000 ingénieurs d'ici l'an 2000, par exemple; la formation proposée devrait être équilibrée de manière à pouvoir répondre aux exigences de l'avenir. N'ai-je pas raison?

Je crois qu'il est même plus important d'organiser des genres de forums nationaux pour partager nos idées et nos ressources en tant que pays et être ainsi l'Équipe Canada de l'enseignement comme nous avons été l'Équipe Canada du commerce.

M. Birch: Dans le cadre de la planification de nos ressources humaines, poursuivre un objectif qui consiste à produire un nombre précis de compétences particulières serait catastrophique. Il est intéressant de noter que, d'après le comité des doyens de l'UBC, tout diplômé de cette université, indépendamment de son domaine, devrait avoir les compétences et les connaissances suivantes: faculté de travailler au sein d'un groupe, de définir les problèmes, de comprendre les différences culturelles, d'avoir un sens de l'éthique et d'y être sensible. Ce qui m'a étonné au bout du compte, c'est de voir jusqu'à quel point ces compétences et ces connaissances se rapprochent de celles définies par le Conference Board du Canada en matière d'employabilité. Ce document du Conference Board sur l'éducation a probablement été le plus recherché ces dernières années. Des millions d'exemplaires ont été demandés.

Je pense que vous avez raison de dire que nous devons faire preuve de souplesse pour nous adapter au changement.

Le sénateur Andreychuk: Les étudiants qui ont comparu devant le comité ce matin se demandent essentiellement comment entrer dans des établissements d'enseignement postsecondaire et comment payer leurs études. Selon eux, il n'y a tout simplement plus d'emplois d'été et d'emplois à temps partiel.

C'est en 1967 que j'ai obtenu mon dernier diplôme. Les étudiants ont toujours eu un avantage sur les étudiantes, car ils pouvaient obtenir des emplois de manoeuvres sur les routes ou dans des chantiers de construction et gagner assez d'argent pour payer leurs études universitaires. De nos jours, ces emplois ne sont plus disponibles. Cette méthode traditionnelle de payer ses études a disparu. Ce bassin de personnel non qualifié ne fluctue pas comme auparavant. Cela s'applique-t-il à la Colombie-Britannique ou est-il encore possible d'entrer temporairement dans ce bassin de personnel non qualifié pour gagner quelque argent?

M. Jago: La durée des études augmente. A l'heure actuelle, il est rare qu'un étudiant inscrit à un programme de quatre années termine effectivement ses études en quatre ans. Plus souvent, il lui faut cinq ou six ans pour le faire. Cela s'explique en partie par le fait que beaucoup d'étudiants de notre province suivent un enseignement coopératif. Nous mettons fortement l'accent sur un tel enseignement. Les étudiants acquièrent de l'expérience de travail dans le cadre de leurs études postsecondaires. Comme il n'y a pas d'emplois d'été et d'emplois à temps partiel, les étudiants abandonnent leurs études pendant une année pour faire un travail non qualifié et gagner un peu d'argent.

Un nombre important d'étudiants travaillent à temps partiel pendant leurs études. Il leur est donc pratiquement impossible de faire leurs études à plein temps. Est-ce une bonne ou une mauvaise chose? Je ne tiens pas à me prononcer à ce sujet. Cette formule a des points positifs. Beaucoup de personnes qui se trouvent dans ce bassin de personnel non qualifié sont en train de devenir qualifiées.

Le sénateur Carney: Nous avons parlé plus tôt de la prévision des compétences exigées à l'avenir. Le tableau représentant le nombre de diplômés nécessaires par rapport aux perspectives d'emplois et le nombre réel de diplômés, montre qu'il y a moins de diplômés que de perspectives d'emplois, ce qui semble indiquer un déficit en matière de compétences. Vous avez expliqué que ce problème se règle en partie par la mobilité de la main-d'oeuvre. Peut-on effectivement ou virtuellement prévoir les compétences exigées sur le marché du travail? Il semble qu'il existe une approche s'appuyant sur une formule qui permet de prévoir le nombre de forestiers ou d'informaticiens nécessaires.

Compte tenu des exigences en matière de permanence, de la réalité de la dotation universitaire et des obstacles administratifs et syndicaux, pouvez-vous dispenser l'enseignement requis? Ces deux questions sont assez pratiques.

M. Birch: Pour répondre à votre première question, dans toute économie, la tradition du développement des ressources humaines est sombre. Elle est encore pire lorsque les frontières du pays ne font pas une énorme différence. Le vrai problème qui se pose est celui du particulier qui se trouve au sein d'une économie globale.

Le sénateur Carney: Votre réponse n'est pas très claire. Pouvez-vous prévoir les compétences?

M. Birch: Non. Vous ne pouvez pas prévoir un domaine particulier d'emploi. Vous pouvez développer des compétences qui sont plus génériques et plus flexibles. C'est l'objectif qu'il faudrait viser le plus possible, en admettant que les gens acquerront d'autres compétences particulières tout au long de leur carrière.

Le sénateur Carney: Voulez-vous parler de compétences comme l'art de la communication, la résolution de problèmes, et cetera?

M. Birch: Oui.

Le sénateur Carney: A mon avis, il ne s'agit pas de compétences, mais plutôt de disciplines.

M. Birch: L'approche de Roslyn Kunin me paraît fort intéressante. Elle raconte l'histoire du fils d'un ami qui vient la voir et lui dit: «Roslyn, je suis désespéré. J'ai envoyé 100 curriculum vitae et je n'ai rien reçu. Je suis allé dans un bon établissement, l'UBC. J'ai choisi une bonne discipline, le génie, et je l'ai fait en connaissance de cause, puisque mon père est ingénieur. Je tiens absolument à trouver du travail. Y a-t-il des emplois?» Elle lui a répondu: «Tu me poses la mauvaise question; il y a du travail, mais il n'y a pas d'emplois.» Les choses ont changé; en effet, les personnes qui cherchent un emploi doivent maintenant se demander de quelles compétences elles peuvent se servir pour tel ou tel emploi. Roslyn Kunin raconte alors que ce jeune homme -- et je sais que c'est anecdotique -- est revenu la voir neuf jours plus tard avec un contrat de 18 mois qui lui permettait de gagner plus que son père ingénieur à BC Hydro avec 25 ans d'ancienneté.

Je sais qu'on ne peut pas multiplier cet exemple à l'infini et que, en tant que professeurs permanents, nous ne sommes pas très crédibles lorsque nous disons aux jeunes de ne pas s'inquiéter à propos du marché du travail. Toutefois, c'est ce qui se produit dans le cas de nombreux diplômés universitaires. J'en ai été témoin dans ma propre famille, et je suis sûr que vous aussi.

Au sujet de l'emploi, les choses changent; il ne s'agit plus d'occuper un seul emploi et d'en gravir les échelons tout au long de sa carrière, mais plutôt de développer d'autres compétences et d'occuper d'autres postes au cours de sa carrière, sans que cela ne se fasse nécessairement dans une seule et même société.

Le sénateur Carney: Pouvez-vous véritablement dispenser ce genre d'enseignement, compte tenu de vos ressources humaines, de vos obstacles institutionnels et du fait que vous remettez des titres de compétence? Les titres de compétence ouvrent la porte aux emplois et aux promotions.

M. Birch: Permettez-moi de vous donner plusieurs exemples. Notre département de la science du bois est excellent sur le plan universitaire. On y fait de remarquables travaux de recherche. Le seul problème c'est que, il y a quelques années, aucun étudiant ne s'y inscrivait. Des tables rondes ont été organisées à l'échelle nationale avec des employeurs auxquels on a demandé de délimiter les besoins dans ce domaine. Les fabricants de produits du bois ont ainsi lancé une initiative éducative nationale et organisé un concours national. Nous avons remporté ce concours parce que nous nous sommes intéressés à ces questions; nous offrons maintenant un programme avancé de transformation des produits du bois qui est orienté vers une industrie des produits du bois à valeur ajoutée. On en a désespérément besoin, non seulement en Colombie-Britannique, mais aussi dans tout le Canada.

Je pourrais citer des douzaines de programmes qui ont essayé de répondre aux besoins de l'économie, à l'échelle provinciale, nationale et internationale; ces programmes, qui dispensent un enseignement assez générique, ont examiné les possibilités offertes. La Colombie-Britannique est en train de doubler le nombre de ses parcs et réserves naturelles intégrales. Notre faculté des sciences forestières offre maintenant un programme de conservation qui est plus populaire que son programme traditionnel de sciences forestières. Tout en utilisant beaucoup des mêmes compétences et connaissances, elle offre un programme qui est à l'écoute des questions internationales et nationales plutôt qu'un programme qui, comme par le passé, préparait les étudiants à des professions bien précises.

Je suis optimiste quant à la capacité de changer.

Le sénateur Carney: Je suis cliente et admiratrice de la clinique de médecine sportive de l'UBC. Dans le groupe du lundi matin, un professeur de votre université, qui était l'enseignant principal l'année dernière, m'a dit que l'UBC a fusionné l'océanographie, les sciences de la terre, la géophysique et l'astronomie pour obtenir une masse critique d'étudiants afin de transmettre l'expertise dans ce domaine. Est-ce le genre de situation dont vous parlez?

M. Birch: Il ne s'agit pas uniquement d'obtenir une masse critique d'étudiants; il faut aussi tenir compte du fait que la terre, les océans et l'atmosphère interagissent et que si nous voulons comprendre le monde dans lequel nous vivons, nous devons procéder de façon beaucoup plus intégrée, non seulement dans le domaine de la recherche, mais aussi dans celui de nos programmes d'enseignement. Oui, c'est effectivement le genre de situation dont je parle.

Le sénateur Carney: Pensez-vous que les universités de Colombie-Britannique le font et qu'elles changent leur produit interne?

M. Birch: L'établissement de M. Jago fixe la norme en ce qui concerne les programmes intégrés.

Le sénateur Carney: Pouvez-vous nous donner un exemple?

M. Jago: Je peux vous en donner de nombreux. Permettez-moi de vous en donner un et de montrer qu'un programme intégré est capable de répondre à des besoins particuliers. Nous avons une faculté de ressources naturelles et d'études environnementales. Au sein de cette faculté, nous enseignons les sciences forestières, la biologie, la géologie, la géographie et nous avons un laboratoire SIG sur le campus. Il s'agit d'études environnementales, tant du point de vue des sciences sociales que du point de vue des sciences environnementales. Les loisirs axés sur les ressources naturelles et le tourisme font tous partie de cet ensemble. Ce sont des unités distinctes, mais elles font appel aux autres programmes pour créer un programme intégré. Vous ne pouvez pas faire de sciences forestières sans vous intéresser aux questions environnementales, à la durabilité et à l'utilisation des forêts à des fins de loisirs. Vous ne pouvez pas non plus vous occuper de questions forestières à l'UBC, sans vous occuper des questions relatives aux Premières nations. Tout cela est intégré. Les étudiants qui terminent notre programme de planification environnementale sont des planificateurs agréés qui peuvent non seulement faire de la planification de l'utilisation des terrains, mais aussi s'occuper de tout un éventail de questions connexes.

Nous nous intéressons actuellement à l'industrie pétrolière et gazière dans la région de Fort St. John, où l'évaluation et la planification environnementales sont essentielles. En collaboration avec Northern Lights College, nous allons offrir quatre nouveaux cours dans le programme de planification environnementale pour précisément répondre aux besoins de l'industrie pétrolière et gazière.

Je suis en pourparlers avec la Mining Association of British Columbia pour essayer d'adapter des éléments de ce programme à ses besoins. L'essentiel est de ne pas perdre de vue notre vocation d'enseignants. Nous enseignons aux étudiants comment planifier, communiquer et penser de manière critique. Il est possible d'adapter les sciences et sciences sociales de base de manière à répondre aux besoins d'industries particulières.

À mon avis, dire que les universités ne sont pas sensibles aux besoins est une accusation montée de toutes pièces. Elles le sont, mais ne veulent pas sacrifier le fondement de l'éducation, c'est-à-dire, les sciences, la lecture, l'écriture et l'art de la communication de base. Nous allons maintenir ces priorités qui, bien sûr, peuvent permettre beaucoup d'adaptation. Nous produisons de nouveaux diplômés dans de nouveaux domaines qui répondent à de nouveaux besoins économiques et les approbations relatives aux nouveaux programmes témoignent du dynamisme du système universitaire de notre province.

Le sénateur Carney: J'aimerais dire à mes collègues pourquoi j'ai souri lorsque vous avez parlé du Northern Lights College. Lorsque j'ai participé au projet de l'enseignement à distance, le directeur du collège, Barry Moore, était extrêmement novateur. Il avait décidé que Northern Lights College avait beaucoup à offrir aux étudiants, mais pas trop aux étudiantes. Le collège se résumait à une caravane mobile de prothésiste dentaire où l'on formait des hygiénistes dentaires. Il a en fait scellé cette caravane et a formé presque tous les habitants de la région de Fort St. John-Dawson Creek en hygiène dentaire avant de les envoyer dans toute la province. Je suis heureuse de voir que cet état d'esprit continue à se manifester dans les établissements du Nord.

Le sénateur Perrault: À la page 7 du mémoire, lorsque vous parlez des réductions des dépenses, vous dites:

Nous avons amélioré notre productivité en acceptant des inscriptions plus nombreuses, de plus gros effectifs de classe et en diminuant les services offerts. En même temps, comme on nous a demandé de faire plus avec moins, nos coûts inflationnistes exacerbent la situation. On ne peut pas vraiment s'attendre à beaucoup plus de productivité.

C'est une analyse plutôt inquiétante de la situation. Les critiques ont-ils raison de dire que les normes de nos universités et collèges de Colombie-Britannique sont en train de baisser à cause des réductions?

M. Jago: Vous voudrez probablement que chacun de nous réponde brièvement à cette question. Nous sommes coincés actuellement du fait que nous ne pouvons pas augmenter le financement de nos programmes d'enseignement de base, alors que nous devons les offrir à plus d'étudiants et qu'ils nous coûtent plus cher. Nous disons donc très clairement au gouvernement provincial que les normes vont se dégrader.

D'après le classement de MacLean's, les établissements de notre province sont en très bonne position. Nous avons atteint un très haut niveau. Nous ne voulons pas le sacrifier, mais si la situation actuelle perdure, nous craignons d'assister à une dégradation des normes. À l'heure actuelle, les pressions sont bien réelles; toutefois, je ne pense pas que nous soyons parvenus à un point de dégradation intense. Nous prévenons les autorités que cela pourrait effectivement se produire.

Le sénateur Perrault: S'il y a une seule recommandation que notre comité peut faire, c'est que l'on mette un terme aux disputes qui n'en finissent plus. Vous demandez le dialogue plutôt que les disputes. Comment faire la paix?

M. Jago: On n'y arrivera jamais compte tenu du régime fédéral canadien. Je suis pessimiste à cet égard. Je tiens à souligner que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard. Il doit rassembler les provinces et fixer un objectif national en matière d'enseignement et de recherche. Il ne s'agit pas strictement d'une question provinciale et nous ne nous limitons pas à un point de vue provincial. Le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer -- cela peut susciter davantage de controverse, mais j'en serais fort satisfait -- dans la mesure où il déclare que l'enseignement est une question d'importance nationale. Les statistiques que mon collègue vous a présentées soulignent effectivement que l'enseignement est une question d'intérêt national.

Le sénateur Perrault: Le nombre des inscriptions dans les universités et collèges de Colombie-Britannique a-t-il augmenté cette année par rapport à l'année dernière, dans tous les cas?

M. Birch: Oui. À l'Université de Colombie-Britannique, les inscriptions en premier cycle ont augmenté de 6 p. 100 par rapport à l'année précédente.

Le sénateur Perrault: Est-ce généralement la tendance dans tous les établissements?

M. Birch: Oui.

Le sénateur Perrault: Est-ce que des jeunes doués pour les études ne peuvent pas fréquenter nos universités en raison des coûts?

M. D. Goard, secrétaire, University Presidents' Council of British Columbia: Étant donné la gamme d'options offertes, les jeunes qualifiés qui devraient voyager pour aller à l'université, peuvent suivre leur programme dans un collège communautaire. La question qui se pose, c'est de savoir combien parmi eux finiront par obtenir un diplôme. D'après les statistiques fournies par M. Birch, le nombre de diplômés diminue. Dans notre système, bien que les étudiants aient accès aux études, il se peut fort bien qu'ils n'obtiennent pas leur diplôme. C'est un point sur lequel il faudrait s'attarder.

M. Birch: Alors qu'il était président de l'Université de Victoria, Howard Petch est parti en croisade pour que les jeunes de Colombie-Britannique puissent faire des études universitaires et obtenir un diplôme. Nous avons fait des progrès considérables en ce qui concerne l'égalité des chances. Il n'y a encore pas si longtemps, si vous habitiez à l'extérieur du Lower Mainland, ou de Victoria sur l'Île de Vancouver, vos chances de suivre des études postsecondaires étaient diminuées de moitié. Il suffit de parcourir la province pour s'apercevoir que dans chaque région, le taux de participation dans l'arrière-pays est deux fois plus bas que celui que l'on retrouve dans le centre.

Le sénateur Perrault: Est-ce une question d'accessibilité?

M. Birch: Exactement.

Le sénateur Perrault: Pensez-vous que la révolution électronique qui permet la transmission de l'information d'une université à l'autre, d'un collège à l'autre, menace les emplois des enseignants?

M. Jago: D'après moi, c'est une activité à forte intensité de main-d'oeuvre et d'investissement qui va peut-être modifier le rôle des enseignants, mais je ne pense pas qu'elle puisse causer d'importants changements.

M. Birch: Le nombre des enseignants diminue dans divers programmes par suite de l'attrition. Dans le cas de programmes comme celui de l'étude des procédés miniers et minéraux que nous offrons à l'UBC, le coût par étudiant est au moins le triple que le coût par étudiant en génie électrique, car il s'agit d'un programme de modeste importance où le nombre de professeurs est peu élevé. Il est à peine viable. L'Université de l'Alberta offre un programme encore plus restreint. Grâce à la technologie naissante, nous pourrons offrir un programme d'étude des procédés miniers et minéraux sur plusieurs sites, ce qui se traduira par un meilleur travail d'équipe entre établissements.

Je m'aperçois qu'à l'UBC -- et je sais que cela s'applique également à d'autres établissements dans la province -- la volonté de collaborer avec d'autres établissements dans l'ouest du Canada, ainsi qu'aux États-Unis, avec l'Université de Washington, diminue le double emploi et permet d'offrir de meilleurs programmes qui sont plus viables. La collaboration s'étend rapidement.

Le sénateur Perrault: Est-ce que l'Université Queen's vous avait prévenus avant de lancer sa campagne publicitaire?

M. Birch: Nous étions au courant. Des douzaines de programmes de MBA sont offerts à distance dans cette province. L'Université Queen's en est l'un des participants. Le programme qu'elle offre est sélectif, peu étendu, ciblé et les coûts sont entièrement recouvrés. C'est un bon programme, comme celui offert par Western, en Ontario.

Le sénateur Perrault: Cela revient à empiéter dans le domaine de l'autre.

Le sénateur Lavoie-Roux: J'ai été surprise d'entendre que les collèges que vous appelez collèges universitaires accordent des baccalauréats. Avant d'accorder des diplômes comme le baccalauréat ès lettres, une université doit respecter certaines conditions. Des conditions ont-elles été fixées pour ces collèges? Dans la négative, les diplômes universitaires risquent d'être dévalorisés.

M. Birch: C'est évidemment un point de préoccupation. Dans le cas de quatre ou cinq collèges universitaires, les conditions ont été fixées il y a sept ou huit ans afin de leur permettre d'accorder des diplômes en collaboration avec les universités. Il s'agissait de plans conjoints. L'UBC a participé pendant six ou sept ans aux baccalauréats ès sciences et ès lettres à Kelowna et au University College of the Cariboo, à Kamloops; en outre, toutes les nominations du personnel enseignant, l'approbation et les politiques relatives aux diplômes ont été décidées conjointement et approuvées par le sénat de l'UBC. Nous avons conclu des ententes qui permettent à ces collèges de devenir progressivement indépendants. Nous en sommes maintenant arrivés au point où ces collèges souhaitent offrir beaucoup plus de matières principales; la province a donc créé un comité d'examen du programme de préparation à un diplôme, qui est chargé d'examiner la situation de près. Ce processus est fort utile.

La crainte relative à la dévaluation des diplômes existe bel et bien, mais, en général, la situation évolue méthodiquement. Toutefois, il ne faut pas oublier que cela s'explique par le fait que ces collèges ont pendant 20 ou 25 années offert les deux premières années de ces diplômes. Il s'agit donc d'une base solide, sans compter la collaboration avec les universités.

Le sénateur Lavoie-Roux: Ayant donné à ces collèges une vocation d'université, croyez-vous que l'accès à l'enseignement postsecondaire s'en trouve facilité pour un plus grand nombre de personnes?

M. Birch: Le nombre d'étudiants qui commencent un diplôme ès lettres au Okanagan University College est équivalent à celui de l'Université de Victoria. Ces programmes ont rendu les études universitaires beaucoup plus accessibles. Il vaut maintenant davantage la peine de s'inscrire dans ces collèges en première et deuxième années si on peut y terminer son diplôme. Les études sont rendues beaucoup plus accessibles.

Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce un modèle suivi par d'autres provinces? Il y a en effet des régions éloignées dans toutes les provinces.

M. Jago: L'Association des universités et collèges du Canada a récemment accepté l'adhésion du University College of the Cariboo; c'est le premier de ces collèges universitaires à devenir membre de l'association sans toutefois être le premier institut du genre à le faire. En effet, on peut citer l'exemple du Collège universitaire du Cap-Breton. L'importance des collèges universitaires en Colombie-Britannique est tout à faire remarquable et exceptionnelle. Ils ont certainement facilité l'accès aux études universitaires.

M. Birch: Les technologies naissantes ont amélioré la qualité. Le sénateur Carney était en avance sur son temps, lorsqu'elle s'est occupée de l'enseignement à distance dans notre province. Aujourd'hui, les cours offerts sur le web permettent aux étudiants de Kamloops de suivre un cours d'informatique avancé mis au point à l'UBC ou dans l'un des autres établissements, mais dans ce cas précis, à l'UBC, et d'améliorer la qualité de leur programme en ayant accès à toute une gamme de cours qui n'auraient pas pu être offerts en un seul endroit.

Le sénateur Lavoie-Roux: Vous dites que la réduction des paiements de transfert fédéraux a eu un effet négatif sur l'enseignement postsecondaire. Quel en a été l'effet sur la recherche? En matière de recherche et développement, le gouvernement fédéral a joué un rôle important. Si nous faisons une recommandation à cet égard, nous aimerions être précis. Je ne connais pas la gravité du problème ni les mesures à prendre dans ce domaine.

M. Jago: Nous souscrivons entièrement aux propositions présentées par l'Association des universités et collèges du Canada. Nos institutions-membres ont activement participé à la rédaction de ces propositions, lesquelles reflètent nos inquiétudes en ce qui concerne les compressions dans les organismes subventionnaires fédéraux et l'appui du gouvernement fédéral pour la recherche. Selon nous, la recherche relève autant de la compétence provinciale que fédérale. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans le financement de la recherche. L'UBC est une université à fort coefficient de recherche, mais il reste que nous sommes tous engagés dans la recherche. Pour une université comme l'UBC, qui jouit d'une renommée internationale en matière de recherche, un appui fédéral est absolument fondamental.

M. Birch: Nous demandons plus particulièrement que l'on renforce l'intérêt du gouvernement fédéral à l'égard du programme d'infrastructure de recherche. Si, par ailleurs, on insistait auprès des provinces pour également obtenir leur appui dans ce sens, et auprès du secteur privé pour encourager sa participation, les avantages en seraient multipliés.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je ne veux pas revenir sur la nécessité d'avoir une politique nationale clairement définie ni sur la responsabilité du gouvernement fédéral. Puisque vous nous avez fait des propositions, puis-je vous en faire une également? Pourquoi cette initiative ne vient-elle pas des universités elles-mêmes et pourquoi ces dernières ne présentent-elles pas une approche indépendante, sans mettre les gouvernements en cause? Si les universités arrivaient à un consensus, il leur serait beaucoup plus facile de le faire accepter.

M. Jago: Par l'entremise de l'AUCC, les universités jouent un rôle de leader dans ce domaine. D'après nous, cette question ne relève pas uniquement de la compétence des universités. L'enseignement supérieur est une question d'intérêt beaucoup plus vaste. C'est certainement une question intéressant les leaders des provinces. C'est également une question intéressant le gouvernement fédéral. C'est une question qui doit rassembler nos gouvernements. Nous demandons en fait que s'instaure un partenariat efficace entre les divers paliers de gouvernement et les universités. Cela se produit déjà maintenant de plusieurs façons. Récemment l'AUCC a indiqué le rôle éventuel que pourrait jouer le gouvernement fédéral. Le programme relatif à l'infrastructure en matière de recherche ou le document récent sur l'aide aux étudiants sont deux exemples de l'initiative prise par l'AUCC. Les gouvernements doivent maintenant réagir et assumer leurs responsabilités.

Le président: Merci, messieurs Jago, Birch et Goard, pour votre excellente présentation.

Nous invitons maintenant MM. Szostak et Meech, de la Confederation of Alberta Faculty Associations. Nous sommes impatients de vous entendre.

M. R. Szostak, président, Confederation of Alberta Faculty Associations: Monsieur le président, honorables sénateurs, la Confederation of Alberta Faculty Associations vous remercie vivement d'avoir entrepris cette étude. Nous représentons 4 000 professeurs de cinq universités de l'Alberta. Ces dernières années, la qualité de l'enseignement postsecondaire a beaucoup souffert dans cette province. Les budgets de nos établissements ont été réduits de 20 p. 100 en trois ans. Cette situation a inévitablement eu pour effet d'accroître le nombre d'étudiants par classe. Lorsque j'envoie des étudiants à la bibliothèque, ils ne peuvent trouver aucune publication récente. Cela se passe à l'Université de l'Alberta, qui possède toujours une des plus grandes bibliothèques universitaires dans le pays. Je frémis en pensant à la situation qui existe dans d'autres établissements.

En 1985, le ratio personnel enseignant et étudiants dans les universités albertaines était de 1 à 12. Cette année, il est de 1 à 18. Les étudiants ont inévitablement moins d'accès au personnel enseignant, ils n'ont pas autant de temps pour s'entretenir avec les professeurs et les bibliothécaires qu'ils peuvent consulter à la bibliothèque sont moins nombreux.

Outre les problèmes de réduction des fonds et de hausse des frais de scolarité dont d'autres personnes ont parlé, en Alberta, le gouvernement a pris des mesures qui menacent l'économie de nos universités d'une manière très particulière. Nous soutenons certes que le gouvernement a un rôle très important à jouer dans l'enseignement, mais la voie que le gouvernement albertain semble suivre, avec des indicateurs de rendement très précis, constitue à notre avis une menace qui détériorera encore davantage la qualité de l'enseignement en Alberta. Les htmects les plus faciles à mesurer sont le coût par étudiant et le nombre d'étudiants qui passent par l'université. Ces indicateurs de rendement permettent très peu de mesurer la qualité.

En Alberta, l'emploi du terme «crise» n'est pas exagéré pour décrire la situation. Les problèmes sont certes sérieux. Nous avons demandé en vain au gouvernement fédéral d'intervenir d'une façon plus énergique, car c'est important qu'il le fasse. Nous avons été très enthousiasmés d'entendre que le Sénat avait entrepris cette étude.

Je sais que vous avez tous lu notre mémoire. Je souhaiterais que mes étudiants fassent toujours leurs devoirs avec autant d'empressement que les membres du comité. J'ai eu l'avantage de suivre les derniers exposés.

Le gouvernement de l'Alberta compare souvent nos établissements avec ceux des autres provinces. Cependant, nous avons pu souligner que, s'ils étaient autrefois parmi les meilleurs dans le pays, ils sont actuellement parmi ceux qui sont le moins financés, ce qui s'est manifestement répercuté sur la qualité de notre enseignement. Il faut tenir compte d'une comparaison encore plus importante, à savoir avec les États-Unis. En Ontario, la commission Smith a consacré une partie de son attention à effectuer cette comparaison et a compilé des chiffres plutôt bouleversants. Celui qui m'a le plus frappé, c'est que, en Ontario, les recettes par étudiant représentent environ les trois quarts des recettes qu'obtient une université américaine moyenne.

Le sénateur Lavoie-Roux: C'est beaucoup plus coûteux dans une université américaine que canadienne.

M. Szostak: À quel égard?

Le sénateur Lavoie-Roux: En ce qui concerne la valeur de l'argent et les frais. Les frais y sont beaucoup plus élevés.

M. Szostak: Je ne sais pas au juste d'où provenaient les chiffres. Cependant, je sais que, lorsque nous tentons d'embaucher des gens, il est difficile d'en attirer des États-Unis, à moins qu'ils ne désirent vivement habiter le Canada. Nos salaires ne sont absolument pas concurrentiels. Cette situation va s'aggraver. La plupart des provinces canadiennes réduisent leur financement au titre de l'enseignement postsecondaire, tandis que 40 des 50 États ont accru leur financement ces dernières années. Cela nous amène à souscrire à la notion que, au Canada, l'enseignement postsecondaire doit être abordable, financé par l'État et exhaustif. Des signes dangereux nous montrent que nous perdons une partie ou la totalité de ces qualités en Alberta.

La Confederation croit fermement que la mobilité des étudiants est importante à bien des égards. Cette mobilité n'existe pas beaucoup en Alberta. Environ 90 p. 100 des étudiants albertains qui poursuivent des études universitaires le font en Alberta. C'est plutôt déplorable, car les étudiants ont avantage à côtoyer des gens des autres provinces. Si nous voulons parvenir à l'unité nationale, il est important de nous connaître les uns les autres et, une façon de le faire, c'est d'encourager les étudiants à fréquenter les universités des autres provinces. Nous devons certes dissuader les gouvernements provinciaux d'élever des obstacles à la libre circulation des étudiants.

Nous appuyons également la transférabilité des crédits. Cependant, nous savons que, comme pour toute bonne chose, il y a des risques d'exagération. Tous nos établissements s'efforcent de maintenir la qualité de leurs programmes, ce qui les oblige à imposer des restrictions sur les crédits dont ils sont disposés à accepter le transfert chez eux. Néanmoins, il est clair que certains établissements parlent de protéger des principes, alors qu'ils essaient tout simplement de maintenir le nombre d'inscriptions.

Encourager les étudiants de certains des pays pauvres à fréquenter nos universités fait depuis longtemps partie de la politique étrangère du Canada. Pourtant, le gouvernement fédéral accorde très peu de fonds directs aux provinces pour les encourager en ce sens. Comme l'aide étrangère relève manifestement du gouvernement fédéral, et que nos étudiants bénéficieraient d'un contact avec des étudiants de l'étranger, nous invitons le gouvernement à examiner cet htmect de la situation. Le gouvernement fédéral devrait encourager l'inscription d'étudiants pauvres venant de pays du tiers monde. Beaucoup d'universités tentent de faire venir des étudiants riches d'autres pays et leur imposent les pleins frais de scolarité, ce qui est une autre histoire.

J'aborderai brièvement la question de la recherche, que j'ai entendu mentionner précédemment. La théorie économique laisse clairement entendre que les gouvernements provinciaux sont malheureusement enclins à sous-financer la recherche scientifique, pour la simple raison que, si bon nombre des avantages de la recherche profitent aux localités, il est évident qu'elle transcende assez facilement les frontières provinciales. Les gouvernements provinciaux ont la détestable manie de penser qu'ils peuvent se croiser les bras, sous-financer la recherche et bénéficier de celle qui est effectuée dans les autres provinces. Bien que la recherche transcende également les frontières internationales, le gouvernement fédéral est beaucoup moins enclin à la sous-financer.

Parmi les nombreux objectifs énoncés dans les notes d'information initiales qu'a préparées le sénateur Bonnell pour le comité, nous estimons que la recherche est une question importante que le comité devrait examiner dans le cadre de son mandat. La véritable raison, et peut-être la plus évidente, pour laquelle le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle dans la recherche, c'est qu'elle est actuellement sous-financée au Canada. Les gouvernements provinciaux ne semblent pas être sur le point d'accroître considérablement les fonds consacrés à cette fin. Le gouvernement fédéral semble être la source de fonds la plus probable. Tout le monde parle de l'importance de la recherche pour notre avenir, mais très peu de gens accordent l'argent nécessaire.

Aujourd'hui, on a discuté du rôle que le gouvernement fédéral devrait idéalement jouer. Selon notre Constitution, l'enseignement relève des provinces. Cependant, depuis la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement fédéral a admis avoir un rôle à jouer dans l'enseignement postsecondaire, et il a utilisé son pouvoir de dépenser dans ce domaine. Malheureusement, contrairement à d'autres domaines dans lesquels le gouvernement a utilisé son pouvoir de dépenser, il n'a assorti d'aucune norme les fonds qu'il transfère aux provinces. Nous voudrions bien que les transferts augmentent, mais il semble que même les transferts actuels devraient être assortis de conditions; ainsi, le gouvernement fédéral obtiendrait un meilleur rendement sur son investissement. Il faudrait établir des normes nationales, mais je ne voudrais surtout pas que le gouvernement fédéral se lance dans la microgestion et impose aux provinces leurs programmes d'enseignement. Si nous croyons à la valeur fédérale selon laquelle tous les étudiants devraient avoir les moyens financiers de fréquenter l'université, tout comme nous croyons à la valeur nationale voulant que tous les Canadiens devraient avoir accès à de bons soins de santé, nous pourrions établir une norme nationale régissant l'enseignement postsecondaire et en faire dépendre les transferts.

Pour ce qui est de la mobilité, les provinces ne devraient pas pouvoir élever des obstacles artificiels à la mobilité entre les provinces. Nous pourrions même adopter des normes d'excellence. Un des orateurs précédents a parlé des titres de compétence. Si nous accordons des fonds aux provinces, nous pouvons à tout le moins nous assurer qu'elles rémunèrent des personnes qui possèdent les qualités voulues pour enseigner.

Nous insistons sur la recherche. Tout établissement qui se dit universitaire doit mener de la recherche. Le gouvernement fédéral peut jouer un rôle légitime à cet égard, en veillant à ce que tout établissement qu'il finance indirectement prenne cet htmect au sérieux et fasse de la recherche une partie importante de son mandat. Nous avons également proposé une sorte de formule de financement en contrepartie. Au cours de la journée, on a dit que, à de nombreuses reprises dans le passé, les gouvernements provinciaux ont à peine complété les transferts fédéraux. Au cours de certaines années, dans certaines provinces, 80 ou 90 p. 100 des fonds consacrés à l'enseignement postsecondaire provenaient du gouvernement fédéral, et les gouvernements provinciaux y ajoutaient 5, 10 ou 15 p. 100 et s'attribuaient tout le mérite du financement de l'enseignement postsecondaire. Il faudrait peut-être encourager les provinces à accroître leur financement.

Le financement des organismes subventionnaires, qui financent une grande partie de la recherche qui a lieu dans notre pays, revêt également de l'importance. Ce financement a été réduit. Le plus facile serait de supplier le gouvernement pour qu'il augmente ce financement au niveau où il se situait il y a quelques années. Au Canada, un nombre incroyable de chercheurs travaillent à des projets de recherche, dont les résultats seraient fort utiles, mais ils ont besoin d'un financement, et il ne vient pas.

Une autre initiative a suppléé un peu à cette situation, bien qu'elle ne puisse jamais remplacer les fonds qui sont accordés directement par l'entremise des organismes subventionnaires. Il s'agit d'une initiative du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui a mis sur pied un programme intéressant, il y a un an ou deux, avec la collaboration du Conseil de recherches en sciences humaines. Une caisse a été créée pour financer la recherche sur des questions qui préoccupaient vivement le ministère. On pourrait encourager d'autres ministères du gouvernement fédéral à faire de même, à savoir, conclure des ententes avec les conseils subventionnaires pour stimuler la recherche dans des domaines liés à d'importantes préoccupations concernant la politique gouvernementale. Enfin, nous sommes également d'accord avec les orateurs précédents pour dire qu'il existe un problème dans l'infrastructure de nos universités, notamment dans l'infrastructure nécessaire pour effectuer de la recherche. Certaines rumeurs veulent que le gouvernement fédéral soit sur le point de mettre sur pied un autre programme d'infrastructures. Si tel est le cas, les universités sont peut-être les meilleurs endroits où investir une grande partie des fonds.

Le président: Nous vous remercions beaucoup de cet excellent exposé. Une des personnes qui posent des questions aujourd'hui est une ancienne de l'Alberta qui n'attend que l'occasion de pouvoir le faire.

Le sénateur Forest: Je vous remercie beaucoup, Rick. Votre alma mater est fière de vous. D'après ce que vous dites, vous voulez que la présence ou la participation du gouvernement fédéral soit plus importante et, selon vous, une façon de le faire, outre d'augmenter les fonds, c'est d'établir un ensemble de lignes directrices comme celles que nous avons dans le domaine de la santé; ainsi, si nous n'établissons pas de normes nationales, nous aurons au moins des buts et des objectifs.

M. Szostak: C'est exact.

Le sénateur Forest: J'ai toujours été préoccupée par la question des étudiants étrangers. En tant que pays nanti, nous avons une obligation d'agir à cet égard. Quel pourcentage d'étudiants étrangers fréquentent actuellement l'Université de l'Alberta?

M. Szostak: Au niveau du premier cycle, ils sont une poignée. On me dit que le pourcentage varie entre 1 p. 100 et 2 p. 100.

Le sénateur Forest: Il s'élevait à 6 p. 100 il y a 20 ans. C'est déplorable.

M. Szostak: L'université déploie des efforts pour recruter des étudiants en Asie et compte payer tous leurs frais de transport. Cependant, nous ne pouvons pas oublier les étudiants d'Afrique et d'Amérique latine qui n'ont pas les moyens de payer 20 000 $ pour fréquenter l'Université de l'Alberta.

Le sénateur Forest: Ces efforts sont liés à notre aide étrangère et à notre politique étrangère.

En ce qui concerne la recherche, il ne fait aucun doute que, si des mesures ne sont pas prises bientôt, nous serons en passe de perdre une génération de chercheurs. Nous devons éviter que cela se produise.

Pour ce qui est de la mobilité des étudiants, nous remportons un énorme succès à la Faculté Saint-Jean. Avec l'arrivée d'étudiants du Québec, l'enseignement est donné en français. J'ai lu dans The Globe and Mail qu'on a l'intention de créer un quartier francophone à Edmonton, autour de cette faculté. C'est là un objectif louable.

Je suis heureuse que les diverses associations aient traité de la nécessité d'une infrastructure de recherche, car je suis très optimiste qu'il est possible d'agir dans ce domaine, où le gouvernement fédéral peut accorder de l'aide sans déclencher une querelle de compétence avec les provinces. Quelles seraient les priorités à l'égard d'une infrastructure de recherche?

M. Szostak: Les priorités diffèrent selon la discipline. Dans les sciences exactes et le génie, on a souvent désespérément besoin de machinerie. Il y a quelques années, nos étudiants en génie ont tenu un vote pour augmenter volontairement leurs frais afin de créer un fonds spécial destiné à l'achat de machinerie pour la faculté de génie. Ils en avaient assez de recevoir leur enseignement sur des machines qui étaient désuètes depuis 10 ans. Si on interroge les ingénieurs et les scientifiques, ils affirmeront que le matériel de laboratoire pose un grave problème. Par ailleurs, des chercheurs comme moi veulent désespérément que la bibliothèque ne disparaisse pas complètement.

Le sénateur Forest: Dans le cas des arts et des sciences humaines, la priorité serait les installations de bibliothèque.

M. Szostak: C'est exact.

Le sénateur Andreychuk: Une des questions que nous, au comité, devons examiner, c'est la nécessité de financer la recherche. Je suis certaine que les provinces ne seraient pas en désaccord pour dire que la recherche est une question nationale, étant donné particulièrement les réductions des fonds en provenance des instituts nationaux. Dans un autre comité, on a discuté de l'avantage concurrentiel, sur le plan mondial, et des produits à valeur ajoutée qui découlent de la recherche effectuée par le Conseil national de recherches. Je me ferai l'écho des observations de le sénateur Forest selon lesquelles nous ne devrions pas perdre des chercheurs, mais en accroître le nombre, si nous voulons nous imposer sur le marché mondial.

Quoi qu'il en soit, la recherche appliquée semble se faire surtout au niveau provincial. Par exemple, le nord de la Colombie-Britannique s'occupe des forêts, et la Saskatchewan, des céréales, du transport et de la potasse. Une grande partie de la recherche appliquée découle de l'entente de financement exceptionnelle qui existe entre les entreprises et les universités. À mon avis, cela se produit aux dépens de la recherche fondamentale. Lorsque les gouvernements examinent les chiffres mondiaux, ils doivent également considérer ceux qui concernent la recherche. Estimez-vous que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle accru dans la recherche fondamentale et que le financement de l'infrastructure devrait être ciblé vers cette recherche?

Puisque nous finançons désormais la recherche appliquée de façon beaucoup plus créative, pouvez-vous nous dire si, d'un point de vue éthique, ce financement renforce une université ou y porte atteinte? Nous tâchons d'élaborer un code d'éthique pour la recherche financée par les entreprises.

M. Szostak: Il est important que les universités effectuent de la recherche tant fondamentale qu'appliquée. L'histoire de la technologie constitue un de mes intérêts en matière de recherche. Les historiens de la technologie soulignent souvent que, bien que nous ayons toujours été portés à croire que la science est arrivée en premier lieu et que la technologie a suivi, en fait, si on étudie l'histoire de près, on constate que beaucoup d'inventions scientifiques importantes étaient des ramifications de progrès technologiques. Au XIXe siècle, on a mené un grand nombre d'expériences en chimie pour tenter de découvrir pourquoi certaines teintures tenaient et d'autres pas, ce qui a eu de nombreuses ramifications.

Pour faire avancer la recherche, certains universitaires devraient effectuer la recherche la plus fondamentale et la plus ésotérique, sans se préoccuper de ses effets pratiques, et les mêmes personnes, ou peut-être d'autres, devraient faire de la recherche appliquée pour déterminer si ces progrès scientifiques ont des applications pratiques. Simultanément, à cette frontière de la technologie, ils pourront cerner les problèmes qui existent dans le monde réel et retransmettre cette information aux spécialistes des sciences fondamentales. Nous avons besoin de cette circulation de l'information. Nous devons faire de la recherche à la fois fondamentale et appliquée. Une université qui ne ferait que l'une ou l'autre commettrait une erreur.

Vous avez raison de dire qu'il est beaucoup plus probable que les gouvernements provinciaux verront des avantages à financer la recherche appliquée qui peut profiter à leurs industries locales. Vous avez également raison de dire que le gouvernement fédéral a plus de lacunes à combler lorsqu'il s'agit de financer la recherche fondamentale. Quant aux dangers inhérents à cela, ils dépendent d'un certain nombre de facteurs. J'ai assisté à des conférences où les universitaires ont exprimé leur inquiétude au sujet d'une prise en charge d'entreprises par des universités. À mon avis, étant donné qu'un peu de recherche appliquée est utile, il s'agit de savoir dans quelle mesure elle est utile.

Il est absolument indispensable d'avoir un financement de base de la recherche libre par l'intermédiaire de nos conseils subventionnaires. Si nous perdons ce financement dans nos universités, nous aurons de graves difficultés. Effectuer un peu de recherche financée par les entreprises ne pose pas de problème.

Le sénateur Andreychuk: Que dire de lignes directrices, d'un code d'éthique au niveau national?

Le sénateur Lavoie-Roux: Il peut également y en avoir au niveau universitaire.

M. Szostak: Les trois conseils subventionnaires ont examiné ensemble des codes d'éthique qui régiront ceux qui reçoivent leurs subventions. La plupart des universités ont également leur propre code d'éthique. Le problème avec les codes d'éthique, c'est qu'il faut les faire respecter, et il n'est pas toujours aussi facile qu'on peut le penser de surveiller les activités d'un chercheur dans son laboratoire.

Le sénateur Andreychuk: Vous avez exprimé votre préoccupation au sujet du financement d'étudiants étrangers venant de pays pauvres. Je m'intéresse entre autres aux étudiants étrangers. S'ils peuvent payer leurs frais de transport, cela aide assurément les universités et le pays, mais beaucoup d'universités font l'inverse et ouvrent des filiales dans d'autres pays. Ils placent des étudiants à la fois dans les pays du tiers monde et dans les pays développés. Par exemple, la Malaisie compte des filiales d'universités américaines et allemandes.

Dans quelle mesure appuyez-vous cette méthode? Considérez-vous qu'elle permet de résoudre certains problèmes concernant les étudiants étrangers?

M. Szostak: J'ai acquis la majeure partie de mes connaissances à cet égard au cours d'un voyage en Malaisie et en Thaïlande que j'ai effectué avec mon épouse il y a quelques années. C'est à ce moment-là que j'ai constaté cette situation. Dans une certaine mesure, elle m'apparaît semblable à la situation qui existe dans les universités et les collèges de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, où l'on essaie de permettre aux étudiants de poursuivre leur première ou leurs deux premières années d'études universitaires dans un collègue local, au lieu de les obliger à s'installer dans une grande ville. Si je comprends bien les programmes offerts en Asie du Sud-Est, ils permettent aux étudiants de poursuivre leur première ou leurs deux premières années d'études universitaires dans leur pays, où ces études leur coûtent évidemment beaucoup moins cher, tout en ayant des liens étroits avec une université de l'Amérique du Nord.

Le grand problème que pose la transférabilité des crédits, c'est que l'établissement d'accueil doit s'assurer que l'établissement d'origine enseigne les bons programmes; sinon, les étudiants échoueront lorsqu'ils avanceront dans leurs études. Si j'ai bien compris, cette solution peut très bien fonctionner si elle est bien appliquée. Si on cerne quelques-unes des matières de base à enseigner la première année, et que des gens de ces pays peuvent les enseigner comme nos étudiants du Canada les apprennent, alors cela fonctionnera. La situation devient risible si les établissements d'origine sont incapables de suivre.

Le sénateur Andreychuk: Si nous voulons pénétrer le marché mondial et exercer nos activités dans ces pays, nous devons les comprendre. Si nous voulons faire des échanges mondiaux, nous devons comprendre la langue et les cultures d'autres pays, et les étudiants étrangers ont beaucoup à offrir à cet égard.

M. Szostak: Un des avantages qu'on oublie souvent, c'est que, lorsque ces étudiants obtiennent des diplômes de nos établissements, puis retournent dans leur pays, ils gardent généralement de très bons souvenirs du Canada et deviennent là-bas les alliés de notre pays. Des gens qui sont disséminés partout dans le monde doivent leur réussite professionnelle à l'enseignement qu'ils ont reçu à l'Université de l'Alberta. Lorsque notre président visite leur pays, ils l'inondent de cadeaux.

Il s'agit là d'un autre investissement dans l'avenir. Ce n'est pas seulement une aide étrangère, mais quelque chose dont nous bénéficierons plus tard.

Le président: Sénatrice Lavoie-Roux.

[Français]

Le sénateur Lavoie-Roux: Merci, monsieur le président. Je me souviens qu'on est un pays bilingue, avec deux langues officielles. Je vais vous poser ma question lentement.

C'est assez étrange, lors d'une autre tournée avec un autre comité dans l'Ouest canadien, le seul endroit où une personne s'est adressée à nous dans un français parfait c'était un médecin hollandais. Je n'en revenais pas. On était à Saint-Boniface, près de Winnipeg. Je vois qu'il y a, à l'Université d'Edmonton, une section française.

M. Szostak: Oui, la Faculté Saint-Jean.

Le sénateur Lavoie-Roux: À la Faculté Saint-Jean, il y a combien d'étudiants? Quel est le pourcentage d'étudiants par rapport à l'ensemble de l'université?

M. Szostak: Il y a 400 étudiants.

Le sénateur Lavoie-Roux: Quatre cents étudiants? Et l'ensemble de l'université, il y a combien d'étudiants?

M. Szostak: Trente mille.

Le sénateur Lavoie-Roux: Ah! Mon Dieu. C'est un petit appendice. Est-ce qu'il y a beaucoup d'étudiants qui viennent du Québec parmi ces 400 étudiants? Quel serait le pourcentage de ceux qui viennent du Québec?

M. Szostak: La moitié, je pense.

Le sénateur Lavoie-Roux : Vous parlez de mobilité et on a vu ce qui s'est passé à Québec, cela va probablement diminuer la mobilité des étudiants des autres provinces, s'ils ne viennent plus au Québec vous aurez plus d'étudiants chez vous. Mais quels sont les frais de scolarité de ces étudiants qui viennent d'une autre province par rapport à vos étudiants de l'Alberta?

[Traduction]

M. Szostak: À l'heure actuelle, il n'y a pas d'écarts dans les frais imposés en Alberta. Ils paient les mêmes frais que les étudiants venant de l'Alberta.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je ne poserai pas mes autres questions en français, car ce serait trop compliqué.

M. Szostak: Comme ma femme est diplômée de la Faculté Saint-Jean, elle m'en a appris beaucoup.

Le sénateur Lavoie-Roux: Vous devriez peut-être lui parler en français ce soir.

M. Szostak: Nous sommes sur le point d'avoir notre premier enfant. Elle m'a dit que, si je voulais parler à notre enfant, je devrai le faire en français; alors, j'essaie de l'apprendre le plus rapidement possible. Certes, beaucoup de francophones du Québec viennent en Alberta en ayant à l'esprit une idée très précise de ce à quoi ressemble Edmonton. Leur premier choc est de s'apercevoir qu'il y a des francophones à Edmonton. Ensuite, ils découvrent les nombreuses facettes de la vie dans la province, et certains d'entre eux s'y établissent. Ma femme est d'avis que, à tout le moins, ils retournent au Québec en ayant une meilleure idée du reste du Canada.

[Français]

Le sénateur Lavoie-Roux: Je pense que les échanges, la mobilité c'est excellent, de toutes les provinces.

[Traduction]

Le sénateur Forest: Deux de mes enfants sont diplômés de la Faculté Saint-Jean. Ils entretenaient d'excellentes relations avec les étudiants du Québec. J'estime qu'il s'agit là d'une merveilleuse occasion de créer des liens.

[Français]

Le sénateur Lavoie-Roux: Maintenant, à la page 5 de votre mémoire, vous parlez du rôle du fédéral dans l'éducation postsecondaire.

[Traduction]

Nous sommes absolument convaincus que la participation continue du gouvernement fédéral dans l'enseignement postsecondaire est avantageuse pour les Canadiens de toutes les provinces; nous voudrions que cette participation soit à la fois réexaminée et renforcée; en fait, nous voudrions qu'elle soit incorporée dans les lois fédérales. À maintes reprises, notre histoire montre que ce sont les initiatives du gouvernement fédéral qui ont stimulé l'avancement de nos universités et de nos efforts de recherche nationale.

Je suis peut-être en accord avec la deuxième partie, en ce qui concerne la recherche, mais je ne considère pas que le gouvernement fédéral ait été un tel stimulateur.

M. Szostak: Mes connaissances de l'histoire portent sur une période antérieure, mais, si je comprends bien, au cours des années 50 et 60, le gouvernement fédéral a commencé à transférer des fonds aux provinces parce qu'il estimait que les locaux étaient insuffisants. Il a reconnu que les universités plutôt petites que nous avions en place dans les années 50 étaient nettement insuffisantes pour nous permettre de fonctionner. Peut-être les gouvernements provinciaux auraient-ils agi ainsi de toute façon. C'était certes un effort de collaboration. Néanmoins, il y a plusieurs décennies, le gouvernement fédéral a investi des fonds dans les universités. Vous et moi n'avons peut-être pas reçu le même enseignement en histoire à l'école.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je pense que oui. Je sais que, au Québec, l'Université McGill a été fondée par la famille McGill, et l'Université Laval, par l'Église. Les choses sont peut-être différentes dans les autres provinces.

M. Szostak: Même McGill et Laval ont connu une croissance. Si on compare leur taille au cours des années 50 avec celle des années 70, on constatera qu'elles ont connu une croissance considérable au moment même où le gouvernement fédéral a commencé à injecter beaucoup d'argent dans les provinces. Au cours de la même période, on a établi le réseau de l'Université du Québec, ainsi que l'Université de Sherbrooke. Même dans ce cas-là, cette affirmation est peut-être valable, mais je ne prétends pas être expert en histoire. Je crois que c'est Allan qui a rédigé cette phrase.

Le sénateur Lavoie-Roux: Dans le mémoire, vous indiquez aussi clairement les domaines que vous voudriez voir incorporés dans les lois fédérales. Vous mentionnez l'aide, la mobilité des étudiants et la transférabilité des crédits universitaires. Comme nous savons qu'on taquine souvent les universités au sujet de leur autonomie, que penseriez-vous si le gouvernement fédéral prenait des décisions au sujet de la transférabilité des crédits universitaires?

M. Szostak: C'est manifestement la question la plus délicate. Il y a un instant, les orateurs de la Colombie-Britannique ont parlé de leur mécanisme de transfert. En Alberta, nous en avons un qui suppose des milliers d'inscriptions dans un petit livre, et il a fallu des années de négociations. Encore une fois, cela semble souhaitable. Dans mon département d'économie, nous nous demandons quelquefois si tous les collèges enseignent les bons principes d'économie et nous nous plaignons parfois au sujet des étudiants qui viennent à nous. Comme nous attirons des étudiants qui ont commencé leurs études en Saskatchewan et en Colombie-Britannique, nous espérons certes que ce système sera élargi au-delà des frontières provinciales. Cependant, lorsque je siège aux réunions du conseil du département d'économie, je suis consterné par les ententes qui ont été conclues avec les collèges. Je crains que nous n'allions trop loin dans cette voie.

Le sénateur Lavoie-Roux: Accepteriez-vous, par exemple, que le gouvernement fédéral contribue à encourager les universités des différentes provinces à discuter de cette question et que la décision vienne des universités elles-mêmes et, au besoin, qu'elle soit incorporée dans les lois fédérales? Si on procède de façon inverse, cela risque de déclencher une guerre.

M. Szostak: Il est assez facile de définir une norme et de la faire respecter. Cependant, dans ce cas-ci, nous aurions une vague définition d'une opinion à l'égard de la transférabilité et de la façon dont le gouvernement fédéral pourrait en fait conférer un pouvoir aux gouvernements provinciaux. Dans ce sens, je suis un peu moins sûr que cette norme sera facile à définir et à faire respecter.

Le sénateur Perrault: Monsieur le président, ce mémoire renferme d'excellents renseignements. Il faudra du temps pour l'assimiler entièrement. Le mémoire critique implicitement les deux paliers de gouvernement de ne pas consacrer suffisamment de fonds à la tâche qui devrait être accomplie. Cette critique est parfaitement légitime. Avez-vous récemment demandé à rencontrer le premier ministre Klein pour discuter de cette question avec lui et a-t-on acquiescé à cette demande?

M. Szostak: La CAFTA a été conçue comme groupe de pression provincial et, pourtant, nos membres ont été unanimes à penser que nous devrions nous adresser à votre comité.

Le sénateur Perrault: Parce que c'est important.

M. Szostak: Pour ce qui est de rencontrer le premier ministre Klein, nous avons porté davantage notre attention sur son ministre de l'Enseignement supérieur et les fonctionnaires de ce ministère. Les groupes d'étudiants ont un meilleur accès que nous au premier ministre, mais ils n'ont pas eu beaucoup de succès à lui faire admettre qu'il existe un problème.

Le sénateur Perrault: Y a-t-il eu récemment des indications qu'il desserrera peut-être la vis après cette période difficile?

M. Szostak: Oui. En Alberta, nous traversons une de ces périodes favorables où les recettes provenant des ressources ont encore une fois monté en flèche et le gouvernement cherche des secteurs où les dépenser. Cela l'encouragera probablement à faire quelques réinvestissements. Comme nous l'avons souligné plus tôt, la crise dans notre régime de santé a reçu beaucoup plus d'attention médiatique que celle de notre régime d'enseignement postsecondaire, de sorte que nous viendrons peut-être en deuxième lieu. Cependant, nous sommes mieux placés que les Albertains qui bénéficient de l'assistance sociale. Ils n'ont reçu aucune attention médiatique et ont souffert eux aussi.

Le sénateur Perrault: Dans vos premières observations, vous avez laissé entendre que le budget des bibliothèques avait été réduit aux dépens des universitaires. Y a-t-il eu une réduction ou simplement un gel dans votre budget consacré aux bibliothèques?

M. Szostak: Le budget des universités a été réduit de 20 p. 100. Sauf erreur, chaque université de la province réduit d'abord ses coûts d'administration dans une plus grande proportion que ceux de l'enseignement, puis fait un effort particulier pour protéger les bibliothèques. Des compressions ont eu lieu, mais elles n'ont pas été de 20 p. 100 dans les bibliothèques. Ces dernières années, le coût des revues universitaires a monté en flèche; ainsi, même si notre budget était demeuré le même, notre capacité d'acheter des livres aurait diminué.

Le sénateur Perrault: Les coûts des livres sont tout simplement énormes, n'est-ce pas?

M. Szostak: C'est exact.

Le sénateur Perrault: A-t-on maintenant accès par voie électronique à des renseignements qui n'auraient autrement été accessibles que dans des livres et à un coût plus élevé?

M. Szostak: On utilise certes des renseignements provenant de cette source. Beaucoup de revues sont maintenant accessibles sur Internet, ce qui pourrait susciter un changement important. Très peu d'éditeurs publient leurs ouvrages sur Internet. Cependant, dans un domaine comme le mien, les livres sont indispensables.

Le sénateur Perrault: Rien ne pourra jamais remplacer un livre.

M. Szostak: J'espère que non. Je ne voudrais certes pas passer devant un écran d'ordinateur toutes les heures que je consacre à lire des ouvrages au cours d'une journée.

Le sénateur Perrault: Ce serait un stress insupportable pour les yeux, en plus de tout le reste.

L'Alberta et la Colombie-Britannique sont extrêmement bien placées pour se rendre compte de certains avantages que présente l'expansion du commerce canadien dans les pays en bordure du Pacifique.

M. Szostak: Exactement.

Le sénateur Perrault: Avez-vous fait des observations sur l'accessibilité à une formation linguistique, pour que les entreprises de votre province puissent profiter de certaines de ces perspectives commerciales, autrement dit, une façon pratique d'apporter plus de recettes à l'Alberta?

M. Szostak: Non. Pour en revenir encore une fois au fait que les gouvernements provinciaux ont tendance à s'enthousiasmer plus facilement pour la recherche appliquée en sciences, l'argument que nous tentons de faire valoir en Alberta, c'est exactement cela, à savoir le développement général des arts libéraux dans les universités. Notre gouvernement nous emballe avec l'idée que nous devrions enseigner le japonais aux étudiants pour qu'ils puissent communiquer avec le Japon. Il en va de même pour le chinois. À l'Université de l'Alberta, nous avons un groupe assez dynamique d'études de l'Asie orientale qui enseigne ces langues, entre autres.

Le sénateur Perrault: Oui, j'en ai entendu parler.

M. Szostak: C'est le genre d'argument qui peut être accepté et qui l'est effectivement en Alberta. Lorsque je vole au-dessus des montagnes en avion pour me rendre chez moi, je suis toujours étonné que notre province soit considérée comme faisant partie de la région du Pacifique, mais c'est ainsi.

Le sénateur Perrault: Vous avez demandé des réductions fiscales et des allégements fiscaux, ce qui me semble être une idée intéressante. En avez-vous évalué le coût?

M. Szostak: Je ne l'ai pas fait. Le consortium national a présenté un document qui proposait une foule de changements. Je souligne encore une fois que, bien que j'estime que certaines modifications fiscales importantes des REÉÉ peuvent être mises en oeuvre, ces régimes aideront surtout les enfants de familles assez aisées à fréquenter l'université. Je répugnerais à ce que nous décidions de consacrer de 200 millions de dollars à des allégements fiscaux destinés aux membres assez aisés de la société canadienne.

Le sénateur Perrault: Ce n'est pas votre grande priorité, mais c'en est quand même une?

M. Szostak: Cela fait certes partie des mesures qui devraient être prises, mais je détesterais que ce soit la seule qu'on prenne.

Le sénateur Perrault: Si vous siégiez à notre comité, quelle serait votre première recommandation? Porterait-elle sur les frais de scolarité? Nous ne pouvons pas tout examiner en même temps.

M. Szostak: À mon avis, si les bonnes institutions sont mises en place, avec le temps, la politique ira dans la bonne direction. Je crois à des normes nationales. C'est pourquoi nous y avons consacré une grande partie de notre mémoire. Nous avons désespérément besoin d'argent. Nous en sommes actuellement au point où nous remercierons gentiment le gouvernement provincial s'il nous donne dix sous. Cependant, à long terme, la meilleure solution serait d'établir des normes nationales et de permettre au gouvernement fédéral de pousser les provinces dans la bonne direction.

Le sénateur Perrault: Nous avons les mêmes problèmes de compressions en Colombie-Britannique. Nous nous battons pour bénéficier d'allégements.

Enfin, une question que je ne devrais pas poser: combien de diplômes honorifiques votre premier ministre a-t-il obtenus de l'université cette année? Est-il prévu qu'il en obtiendra?

M. Szostak: Notre université s'est chargée de ce problème. Le sénat de l'université a maintenant pour règle de ne pas décerner de diplômes honorifiques à des politiciens en poste.

Le sénateur Lavoie-Roux: C'est une bonne idée.

Le sénateur Perrault: Bonne idée.

Le président: Je vous remercie, sénateur Perrault. Nous avons dépassé notre horaire d'une demi-heure. Je remercie nos témoins de l'Alberta. Nous avions envisagé de vous demander de vous rendre à Ottawa, mais nous avons présumé qu'il serait plus facile pour vous de nous rencontrer de l'autre côté des montagnes. Nous vous savons gré de vos observations. Si vous avez d'autres renseignements qui pourraient nous être utiles, notre greffier sera heureux de les recueillir.

Nous accueillons maintenant Mme Margaret Hildebrand, de l'Alberta. Je remercie Mme Doreen Godwin, qui a bien voulu céder sa place pour que Mme Hildebrand puisse témoigner avant de prendre l'avion pour retourner en Alberta. Veuillez commencer, madame Hildebrand.

Mme Margaret Hildebrand, adjointe administrative, comité des présidents (collèges de l'Alberta): Monsieur le président, honorables sénateurs, je suis très heureuse d'être parmi vous. Je voudrais transmettre les regrets du président du Conseil des présidents, M. Dan Cornish, qui n'a pas pu venir ici, car il devait se rendre à Ottawa. Je vais tenter de le remplacer, mais ce ne sera pas une tâche facile.

Je voudrais prendre quelques instants pour vous faire connaître le Conseil des présidents, de même que les collèges publics et le système des instituts de technologie en Alberta.

Le Conseil des présidents est un organisme provincial qui représente 17 collèges publics et instituts de technologie de l'Alberta. Ces 17 établissements regroupent 11 collèges publics, quatre collèges professionnels et deux instituts de technologie. Le système dessert environ 43 000 étudiants à plein temps, 29 000 à 30 000 étudiants à temps partiel inscrits à des programmes avec crédits, 12 000 apprentis et environ 15 000 personnes inscrites à des programmes sans crédits. Il s'agit là d'une partie importante du système d'enseignement postsecondaire de l'Alberta.

En vertu de la Colleges Act et de la Technical Institutes Act de l'Alberta, une gamme exhaustive de programmes sont offerts dans ces établissements. Cela fait partie des conditions de financement. Dans les collèges publics, par exemple, on trouve des programmes d'un an menant à un certificat, des programmes de deux ans menant à un diplôme professionnel, des programmes compensatoires comme l'enseignement de l'anglais langue seconde, des programmes d'alphabétisation des adultes et de perfectionnement des connaissances des adultes, des programmes de passage à l'université, d'éducation permanente et de service communautaire, l'achèvement d'études payées par des entreprises, qu'on a entendu mentionner plus tôt, de même que des programmes d'obtention de baccalauréats en sciences ou en arts appliqués et des programmes d'obtention de diplômes universitaires.

De plus en plus, les collèges de l'Alberta reçoivent un grand nombre de demandes d'inscription d'étudiants qui possèdent déjà des diplômes universitaires. Par exemple, en septembre 1995, le Mount Royal College de Calgary a reçu plus de 100 demandes d'étudiants qui détiennent déjà un baccalauréat. Bon nombre des collèges et des universités envisagent maintenant d'offrir des programmes partagés; ainsi, à la fin de ses études, un étudiant pourrait obtenir un diplôme universitaire et un diplôme collégial. Les établissements collaborent davantage en ce sens.

Les collèges et les instituts de technologie jouent un rôle important dans le développement économique de l'Alberta, et la recherche menée dans cette province indique que, au cours de la prochaine décennie, environ 65 p. 100 de notre main-d'oeuvre aura besoin de diplômes postsecondaires et, de ce pourcentage, environ 50 p. 100 devra être munie de certificats et de diplômes décernés par des collèges et des instituts de technologie, et 15 p. 100 aura besoin de diplômes universitaires. Les programmes axés sur la carrière remportent un énorme succès pour ce qui est de trouver des emplois à la fin des études.

Tous les établissements enregistrent systématiquement un taux d'emploi de plus de 90 p. 100, ce qui devient, j'ose dire, un indicateur de rendement clé en Alberta et ailleurs.

Le conseil voudrait cerner quelques questions pour que vous les examiniez. Je sais que vous êtes au courant de la société infoculturelle et de l'évolution rapide du changement. En cette nouvelle ère de changement rapide, l'information devient une ressource stratégique. L'argument que fait valoir Peter Drucker à cet égard me plaît beaucoup; il dit que la productivité du savoir est déjà devenue la clé de la productivité, de la position compétitive et du succès économique, et que le savoir est devenu l'industrie primaire, qui fournit les ressources essentielles et centrales de la production.

Je voudrais souligner les points saillants que soulève le conseil, ainsi que ses recommandations. Le Conseil des présidents estime que, dans cet environnement économique mondial, notre avenir économique ne peut être assuré que par un engagement important envers la création, la recherche et l'acquisition du savoir, ainsi que par une main-d'oeuvre très spécialisée, adaptable et plus autonome. L'éducation et la formation sont indispensables à la prospérité des gens, des provinces et du pays. Je pense qu'il est impossible de contester ces arguments. C'est dans ce contexte que se situent les autres recommandations.

Pour ce qui est du développement des ressources humaines dans ce nouvel environnement économique ou dans cette société infoculturelle, l'éducation et la formation continueront d'offrir à tous les Canadiens un moyen d'atteindre leurs objectifs personnels. Le conseil estime toutefois que l'éducation et la formation doivent jouer simultanément un plus grand rôle dans le développement des ressources humaines pour répondre aux besoins de développement économique. Le Conseil des présidents appuie la position selon laquelle l'éducation et la formation doivent être explicitement liées aux besoins à venir des gens et aux besoins du pays en ressources économiques et humaines.

En cette ère de l'information, nous devons tous préconiser le perfectionnement continu, mais il devient évident que, si beaucoup de grandes entreprises s'engagent à former leurs employés et à financer cette formation, les petites et les moyennes entreprises du Canada n'ont pas une mentalité axée sur la formation. Il faut développer et favoriser une mentalité axée sur la formation et un engagement envers le perfectionnement continu, et les gouvernements doivent jouer un rôle de premier plan pour inculquer cette mentalité.

La société et les individus doivent considérer l'éducation et la formation comme un investissement et non une dépense. Ainsi, le Conseil des présidents souligne que l'éducation est un processus continu et que, de nos jours, toutes les parties intéressées par l'apprentissage chez les adultes ont toutes les raisons de collaborer en utilisant des moyens nouveaux au profit de tous les apprenants.

Tous les paliers de gouvernement doivent avoir des rôles importants à jouer pour inculquer une mentalité axée sur la formation aux entreprises de toutes les tailles. L'Alberta a eu beaucoup de chance, notamment parce que ses collèges et ses instituts de technologie ont établi avec succès des partenariats avec les entreprises et l'industrie. Un de ces partenariats concerne le Programme coopératif, qui s'est révélé très fructueux en ajoutant aux études scolaires cette dimension pratique qu'est le milieu de travail.

Le conseil estime que le secteur privé a un rôle à jouer en assumant une plus grande responsabilité à l'égard de l'investissement dans le développement des ressources humaines et en participant davantage au financement de ces programmes, car, en substance, il s'agit là de sa main-d'oeuvre. Cette main-d'oeuvre reçoit une formation de l'État et, à mon avis, on estime généralement que le secteur privé a une certaine responsabilité à assumer dans le financement de bon nombre des programmes du secteur public.

Le Conseil des présidents encourage donc le gouvernement du Canada à appuyer des partenariats au moyen de mesures comme des subventions de contrepartie et des encouragements fiscaux, afin d'inciter les entreprises de toutes les tailles à établir des partenariats réguliers avec les collèges publics et les établissements d'enseignement postsecondaire en général.

Vous avez beaucoup entendu parler de la transférabilité des crédits et de l'élaboration de normes nationales. C'est également une question qui préoccupe vivement le Conseil des présidents. Avec la mobilité géographique et sociale qui caractérise la vie moderne, le transfert des crédits constitue un droit important. Aucun programme d'études ne devrait être considéré comme un obstacle à des études plus poussées, pas plus qu'il ne devrait être perçu comme une base inutile d'études dans une discipline différente ou à un niveau plus avancé. La reconnaissance d'études antérieures au moyen d'un système reconnu d'évaluation de niveaux de compétence acceptés, et la reconnaissance de ces compétences, peu importe la façon dont elles ont été acquises, permettront de transférer les crédits et les titres de compétence dans tous les établissements de toutes les provinces et, ainsi, de réduire les périodes d'études requises. Le Conseil des présidents soutient qu'il faut cerner la nécessité d'une plus grande transférabilité, dans tout le pays, des titres de compétence et des crédits obtenus.

Par ailleurs, le conseil demande l'élaboration, la mise en oeuvre et l'élargissement continus de normes nationales d'excellence à tous les niveaux et dans tous les domaines d'éducation et de formation. Ces normes pourraient servir de mécanisme permettant d'évaluer tous les diplômés. Pour ouvrir une parenthèse susceptible de vous intéresser, le Southern Alberta Institute of Technology, à Calgary, offre actuellement des garanties avec plusieurs de ses programmes. Si un employeur estime que les compétences d'un diplômé de l'un de ces programmes laissent à désirer, cet établissement redonnera gratuitement une formation à cet étudiant pour s'assurer qu'il possède toutes les compétences voulues. Les diplômés sont désormais accompagnés d'une garantie, initiative qui s'accentuera considérablement en Alberta au cours des quelques prochaines années.

Les collèges et les instituts de technologie publics sont les principaux dispensateurs d'une éducation systématique, comptant environ 12 000 apprentis à plein temps dans la province. Le Conseil des présidents reconnaît l'importance d'un système efficace de formation d'apprentis et encourage une plus grande participation, dans tout le pays, à ces programmes d'apprentissage. Le système de formation d'apprentis devrait élargir le Programme du sceau rouge ou son équivalent, assurant ainsi la transférabilité des crédits.

Le Conseil des présidents recommande également qu'on encourage les apprentis qui ont été mis à pied par leurs employeurs à se recycler dans un élément de la formation ou un autre programme à contrat. Les gens que je connais qui reçoivent une formation d'apprenti appuient fortement le Programme du sceau rouge. En ce qui concerne la transférabilité nationale des titres de compétence, il s'agit d'un modèle qui pourrait être examiné plus attentivement. Il permet à ceux qui possèdent ce titre de compétence d'exercer librement leur métier dans la province, ce qui est profitable pour eux, pour leur employeur et pour la société.

Le sénateur Forest: Pourriez-vous expliquer ce qu'est au juste le Programme du sceau rouge?

Mme Hildebrand: Si je comprends bien, il s'agit d'un ensemble d'examens offerts à l'échelle nationale dans certains métiers. Les apprentis qui ont atteint le niveau de compagnon peuvent passer ces examens et, qu'ils soient passés en Alberta, en Ontario ou dans l'Île-du-Prince-Édouard, si les candidats les réussissent, ils obtiennent un titre de compétence du Programme du sceau rouge. Cela permet à l'apprenti d'exercer son métier n'importe où au Canada, sans autre qualification ou conditions de la province où il cherche un emploi.

Le sénateur Andreychuk: Je crois savoir que ce programme a été mis sur pied avec la collaboration des provinces, le gouvernement fédéral ayant assumé un certain rôle de leadership.

M. Hildebrand: Exactement. Je crois que le gouvernement fédéral a assumé un rôle de leadership.

Le conseil croit fermement qu'il faut continuer à «internationaliser» l'éducation et la formation au Canada. Les Canadiens doivent apprendre à reconnaître l'importance de l'éducation internationale, par l'accueil d'un plus grand nombre d'étudiants étrangers et le soutien d'autres étudiants canadiens pour qu'ils poursuivent des études à l'étranger.

Les établissements d'enseignement postsecondaire doivent sensibiliser davantage les étudiants aux études internationales en élargissant leurs programmes d'études. Par conséquent, le Conseil des présidents est d'avis que l'internationalisation de l'éducation constitue un investissement important pour le Canada et devrait être encouragée à l'aide de subventions ainsi que de bourses d'études et d'entretien.

Il s'agit là d'une occasion en or d'accroître les échanges commerciaux. Nous avons conçu certains programmes exceptionnels et nous pouvons certes échanger, vendre et exporter bon nombre de ces programmes et de ces services à l'étranger. Il faut également trouver un équilibre dans les efforts pour attirer de nombreux étudiants de l'étranger, car ils sont souvent perçus comme une vache à lait. Beaucoup paient des frais de scolarité deux ou trois fois plus élevés que ceux que paient les Canadiens. J'aimerais croire que l'internationalisation est plus importante que la simple production de recettes. Au moment où les établissements accroissent leurs efforts pour attirer ces étudiants, le besoin de services d'aide est énorme. Si nous voulons offrir des services à ces étudiants étrangers, nous devons non seulement lorgner leur portefeuille, mais également élaborer et offrir les services de soutien dont un grand nombre d'entre eux ont besoin lorsqu'ils arrivent au Canada.

Le comité a entendu les orateurs précédents de l'Alberta dire que, depuis 1994, les subventions des établissements d'enseignement ont été réduites de 21 p. 100. En même temps, on prévoyait que 10 000 nouvelles places seraient créées dans les établissements d'enseignement postsecondaire. Cette situation a présenté un défi énorme. À mon avis, les établissements ont affronté ces restrictions en déployant beaucoup d'efforts, et ces efforts ont été couronnés de succès. Bien sûr, je parle ici des collèges et des instituts de technologie. Ils ont dû se battre, mais la majorité d'entre eux diront que ces efforts ont mené à une meilleure collaboration et à une plus grande efficience. Cela ne veut pas dire que le processus s'est déroulé sans mal, mais il a donné certains résultats positifs.

En ce qui concerne les modifications de la politique des frais de scolarité en Alberta, on a doublé les frais de scolarité des étudiants étrangers et les recettes provenant des frais sont portées à 30 p. 100, à condition que ce taux ne soit pas atteint avant l'an 2000. On s'attend que les étudiants du niveau postsecondaire paient une plus grande proportion de leurs coûts d'éducation et, comme vous le savez tous, bon nombre termineront ces programmes en ayant accumulé une dette considérable.

Le Conseil des présidents encourage le gouvernement du Canada à amorcer les modifications du programme de prêts aux étudiants pour tenir compte de ces coûts accrus et pour mettre en oeuvre des programmes de remboursement fondé sur le revenu et d'allégement de la dette des étudiants.

Le conseil félicite l'Association des collèges communautaires du Canada pour la position qu'elle a présentée au sujet de l'allégement de la dette des étudiants. Il y a quelques autres propositions que nous estimons valables, comme le report éventuel des intérêts sur les prêts aux étudiants. Une fois qu'un étudiant a trouvé un emploi, ces déductions acquièrent une plus grande importance. Ces intérêts pourraient être déductibles de son revenu imposable, mais reportés jusqu'au moment où il trouve un emploi.

Le conseil encourage également le gouvernement fédéral à apporter des modifications qui s'appliqueraient à l'apprenant continu, et appuie la disposition visant à accorder des subventions aux étudiants défavorisés. Le conseil estime également indispensable que le gouvernement maintienne les crédits d'impôt pour études et pour frais de scolarité et le crédit d'impôt pour dons de bienfaisance, afin d'encourager l'investissement dans l'éducation et la formation.

Le dernier point concerne l'apprentissage à distance. Je sais qu'on s'intéresse beaucoup à l'utilisation des technologies de pointe. La demande d'éducation, de formation et de recyclage a certes augmenté sur le plan à la fois quantitatif et qualitatif. Cette demande découle d'une plus grande prise de conscience de la nécessité d'étendre et d'améliorer l'apprentissage pour réussir dans la nouvelle société infoculturelle. Il est possible de répondre à une partie de cette demande accrue en recourant aux technologies de pointe, simplement parce qu'elles permettent de supprimer les obstacles que sont le temps, l'espace et la distance.

En Alberta, le ministère de l'Enseignement supérieur et du Développement des carrières s'est engagé à débourser 10 millions de dollars par année, au cours des trois prochaines années, afin de mieux intégrer les technologies dans la province. Le conseil se réjouit de cet effort. C'est un bon début. Cependant, des ressources supplémentaires s'imposent manifestement, notamment pour mettre les technologies en place; ce qui est peut-être encore plus important, il faut faire de la recherche et du développement dans l'utilisation de ces technologies et trouver le meilleur moyen de s'en servir pour offrir un apprentissage efficace, soit l'acquisition du savoir et le maintien de l'acquis.

Le conseil demande donc au gouvernement de faire preuve de leadership et d'aider à payer le coût de l'établissement d'une autoroute électronique et de la modification des programmes d'études pour les offrir à distance. Un investissement dans ces nouveaux moyens d'enseignement augmentera l'accessibilité aux possibilités de s'instruire et à de meilleurs modèles d'apprentissage pour tous les Canadiens.

Honorables sénateurs, c'était là le mémoire du Conseil des présidents. Je ne crois pas que nous ayons fait des déclarations très révolutionnaires, mais nous appuyons très fortement votre groupe de travail. Nous présentons ce mémoire en toute humilité. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de le faire et serais très heureuse de répondre à toutes vos questions.

Le président: Vous n'avez pas besoin d'être humble, car vous avez présenté un excellent mémoire. Il nous a beaucoup plu. Notre sénatrice de l'Alberta est très impatiente de vous poser des questions. J'ai remarqué qu'elle vous a interrompue à l'occasion pendant votre exposé.

Le sénateur Forest: Je représente l'Alberta au Sénat.

Vous avez mentionnez le passage d'étudiants de l'université au collège. Pouvez-vous me donner un exemple d'un programme de diplôme universitaire et de diplôme collégial?

Mme Hildebrand: À titre d'exemple, le Collège communautaire de Lethbridge et l'Université de Lethbridge ont un programme conjoint en études environnementales. Les étudiants obtiennent leur diplôme après avoir terminé deux années d'études dans chaque établissement.

Le sénateur Forest: C'est intéressant. J'ai également été intéressée par le fait que 90 p. 100 des étudiants des collèges et des instituts de technologie trouvent un emploi. L'Alberta commence à sortir de la récession. Des entrepreneurs, notamment dans le domaine de la construction, m'ont dit qu'il existe une grave pénurie d'apprentis en ingénierie. Étant donné les compressions dans tout le système, estimez-vous pouvoir accueillir le flot plus considérable d'étudiants qui voudront s'inscrire à ces programmes maintenant que les emplois disponibles sont peu nombreux?

Mme Hildebrand: Partout où il y a une vague de prospérité en Alberta et, au cours des dernières années, elle a eu lieu dans le nord-ouest de la province, le nombre d'étudiants dans ces établissements diminue. Les étudiants sont tellement attirés par les emplois bien rémunérés -- ils peuvent, par exemple, faire partie d'une équipe de prospection géosismique -- qu'ils retardent leurs études postsecondaires. Au bout du compte, cependant, les choses semblent s'équilibrer.

En ce moment, dans le nord de la province, Syncrude et Suncor participent à d'énormes travaux d'expansion dans les sables bitumineux et cherchent des hommes de métier qualifiés et divers compagnons. L'âge moyen du compagnon est actuellement de plus de 50 ans, et l'on craint qu'il n'y ait pas suffisamment d'inscriptions aux programmes de formation d'apprentis.

Dans un effort pour accroître le nombre de ces inscriptions, le système d'enseignement secondaire de l'Alberta offre plusieurs nouveaux programmes de formation de jeunes apprentis. Je ne crois pas qu'il y ait une crise. Le nombre d'étudiants augmente régulièrement. Il existera probablement toujours des domaines où le nombre d'employés sera insuffisant et d'autres où il sera trop élevé, mais il semble qu'ils finissent par s'équilibrer.

Le sénateur Forest: Je suis certes en accord avec la plupart des hypothèses que vous formulez dans votre mémoire. Notre premier ministre a souvent parlé de l'avantage que possède l'Alberta, notamment en ce qui concerne l'établissement d'entreprises dans la province, mais je soutiens que nos ressources humaines constituent notre plus grand avantage et, si nous ne commençons pas bientôt à réinvestir des fonds dans notre système d'enseignement, nous perdrons cet avantage.

Mme Hildebrand: C'est une affirmation extrêmement juste, et je l'appuie entièrement.

Le sénateur Carney: Vous avez mentionné plus tôt que des diplômés universitaires s'inscrivaient à des programmes de formation professionnelle et technique en Alberta.

Mme Hildebrand: C'est exact.

Le sénateur Carney: Les représentants des présidents de l'Université de la Colombie-Britannique nous ont laissé un rapport traitant des avantages économiques de la formation et des études postsecondaires en Colombie-Britannique, de même que des évaluations des résultats. Les auteurs soulignent que l'inscription pluridisciplinaire va dans les deux sens: 4,9 p. 100 des étudiants inscrits à des programmes de formation technique et professionnelle possédaient des diplômes universitaires, tandis que 7,8 p. 100 des étudiants universitaires détenaient des diplômes d'établissements de formation technique et professionnelle. Ainsi, on ne peut pas dire qu'un établissement soit plus important que l'autre, car les étudiants qui possèdent des diplômes d'établissements de formation professionnelle vont à l'université et ceux qui détiennent des diplômes universitaires fréquentent des établissements de formation professionnelle. Est-ce la même chose en Alberta?

Mme Hildebrand: Je ne connais pas les pourcentages.

Le sénateur Carney: Il y a également des inscriptions pluridisciplinaires?

Mme Hildebrand: Absolument. Lorsque nous parlons de programmes de transfert de crédits, on s'attend que le transfert ait lieu d'un collège à une université, mais, ce qui se produit de plus en plus, c'est que les étudiants passent d'une université à un collège. Un grand nombre d'étudiants du niveau collégial inscrits à des programmes de transfert de crédits universitaires en sont à leur première ou deuxième année d'université. Un autre point intéressant, c'est l'effort concerté qu'on déploie pour transférer les crédits du programme de deux ans menant à un diplôme; ainsi, si un étudiant s'inscrit à un programme axé sur la carrière, ses crédits sont transférables à un autre programme.

Le sénateur Carney: D'après ces chiffres, nous ne pouvons pas présumer d'emblée que la formation professionnelle et technique est préférable à la formation universitaire pour ce qui est des perspectives d'emploi; est-ce exact?

Mme Hildebrand: Je ne sauterais pas à cette conclusion.

Le sénateur Carney: Le deuxième point intéressant, c'est que cette étude menée en Colombie-Britannique a montré que les femmes qui s'inscrivent à des programmes de formation professionnelle à court terme dans la province n'obtiennent absolument aucune hausse de salaire pour leur effort. À la page 26, on dit que les femmes qui suivent la plupart des programmes de formation technique ne gagnent pas un salaire supérieur à celui qu'elles auraient reçu si elles avaient seulement terminé leurs études secondaires. J'attire votre attention sur ce point, car cette discrimination fondée sur le sexe est peut-être également évidente en Alberta. Elle n'est pas aussi manifeste à l'université, mais cette étude montre que les femmes de la Colombie-Britannique ne tirent aucun avantage à avoir terminé une formation technique et professionnelle.

Mme Hildebrand: C'est vrai dans le cas de bien des programmes de l'Alberta. Dans certains des programmes menant aux emplois les mieux rémunérés, comme l'entretien d'avions ou le génie pétrolier, le nombre de femmes est très minime.

Le sénateur Carney: Mais même celles qui sont inscrites à ces programmes ne gagnent pas des salaires plus élevés. Il s'agit là d'un htmect intéressant de l'étude. Je voulais savoir si c'était également le cas en Alberta.

Le président: Je vous remercie beaucoup d'avoir comparu devant notre comité aujourd'hui.

Nos prochains témoins font partie de l'Association canadienne de l'enseignement coopératif. Mme Doreen Godwin a cédé sa place plus tôt, afin que Mme Hildebrand puisse prendre son avion. Nous la remercions de l'avoir fait. Sur cette entrée en matière, veuillez commencer.

Mme Doreen Godwin, présidente de l'Association canadienne de l'enseignement coopératif: Je tiens à remercier le gouvernement fédéral d'aider et d'encourager l'enseignement coopératif à atteindre les niveaux auxquels il se trouve actuellement. Des études montrent que les fonds sont bien dépensés et que les diplômés des programmes coopératifs ont une meilleure estime de soi. Ce qui réjouit notamment les praticiens, c'est de voir que ces étudiants atteignent un niveau remarquable de confiance et d'estime de soi. C'est un changement merveilleux à constater. Leurs taux d'emploi sont plus élevés et leur travail leur procure une plus grande satisfaction. Dans une étude que nous avons menée, nous leur avons demandé d'indiquer leur satisfaction au travail en utilisant une échelle allant de 1 à 10. Les non-diplômés de programmes coopératifs ont classé leur premier emploi au niveau trois, et les autres au niveau sept. J'ai trouvé ce résultat fort intéressant et très révélateur. Ces programmes les aident assurément à payer leur formation, et le fait que leurs dettes soient moins élevées en témoigne.

Les étudiants inscrits à des programmes coopératifs recourent aux services de counselling qui leur sont offerts. Nous apprenons à les connaître et nous répondons aux questions qu'ils peuvent avoir au sujet de problèmes familiaux, de choix de cours et de tout ce qu'on peut imaginer. Si nous sommes incapables de résoudre un problème, nous renvoyons l'étudiant à un autre conseiller qui pourra l'aider.

Ils obtiennent de meilleurs résultats et de meilleurs succès scolaires. L'enseignement coopératif n'en est qu'à ses débuts. Nos étudiants se trouvent dans une situation exceptionnelle, travaillant dans une entreprise un jour et fréquentant l'université le lendemain. Nous suivons l'étudiant dans les deux cas.

Nous tenons compte de la réalité. Même si un étudiant obtient systématiquement des A+, il risque de ne pas trouver d'emploi s'il n'a pas d'aptitudes en relations humaines. Nous faisons une formation holistique.

On a mentionné plus tôt que les étudiants munis de diplômes universitaires fréquentent des collèges. Comme vous le savez, les étudiants qui passent du collège à l'université sont habituellement la norme. Ce que j'ai trouvé intéressant, c'est le nombre de diplômés universitaires qui retournent aux études et qui obtiennent un deuxième diplôme du premier cycle. Je m'en suis rendu compte pour la première fois lorsqu'ils venaient à mon bureau et que je leur demandais pourquoi ils n'étaient pas en train de chercher un emploi. Ils m'ont souvent dit qu'ils ne pouvaient pas en trouver et qu'ils voulaient participer à un programme coopératif. J'ai mené une petite enquête préliminaire et découvert que plus de 700 étudiants sont dans la même situation à l'université Simon Fraser seulement. Je ne pouvais pas dire au juste combien d'entre eux étaient diplômés de programmes coopératifs mais, selon ma meilleure estimation, le taux est inférieur à 1 p. 100. Il s'agit là d'un énorme ghtmillage de l'argent des contribuables, ainsi que du temps et de l'argent des étudiants. Sauf erreur, c'est de cela dont nous sommes ici pour parler.

En quoi consiste l'enseignement coopératif? D'abord, le programme de cours est très différent des autres programmes. Les étudiants n'acceptent pas nécessairement les propos que tient leur professeur. J'ai été très heureuse qu'un professeur me dise combien il avait aimé enseigner son cours, car les questions des étudiants avaient ajouté de nombreuses dimensions à la matière.

Le deuxième htmect qui est différent, c'est le choix de cours pour les étudiants. Je crois qu'il est plus souple. Par exemple, un étudiant ayant beaucoup d'aptitudes en sciences avait été dirigé dans ce domaine. Cependant, il s'est retrouvé dans un milieu de travail avec des gens qui s'occupaient de commercialisation, et il s'y est plu énormément. À tel point qu'il a modifié son choix de cours, ce qui lui a permis d'explorer plus d'un domaine.

En raison de notre étroite association avec les entreprises, elles nous fournissent des entrées directes. Nous avons modifié le langage de l'un de nos cours en informatique à cause des entrées directes. Nous avons ajouté à notre programme de communications un nouveau cours qui traite des divers besoins en communications de différentes collectivités. Nous avons revu et modifié un volet entier de notre programme de kinésiologie, en raison des entrées directes des entreprises. Des changements peuvent se produire plus rapidement si les entrées des programmes coopératifs sont utilisées judicieusement.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous tenons compte de la réalité. Si un étudiant a un objectif irréaliste par rapport aux efforts qu'il est disposé à faire, nous sommes directs avec lui. Nous lui expliquons la réalité et lui disons qu'il doit modifier son objectif ou faire un autre choix. Nous sommes toujours prêts à accorder notre aide aux étudiants lorsqu'ils en ont besoin.

Un étudiant qui présentait son curriculum vitae voulait s'entretenir avec moi. Il m'a dit qu'il refusait de travailler à l'extérieur de la ville et ne voulait pas un emploi d'utilisateur ultime. Je lui ai remis son curriculum vitae et suis retournée à mon pupitre. Il est resté immobile, l'air très gêné. Il a enfin mentionné que je n'avais pas pris son curriculum vitae. Je lui ai dit que je ne connaissais aucune entreprise qui emploierait une personne difficile. Il a alors dit qu'il pourrait être plus souple. Je l'ai donc invité à s'asseoir et lui ai expliqué ce qu'il pouvait faire ou non et, si cela ne lui convenait pas, il pouvait partir. C'était son choix. Cela lui a causé un choc, mais il s'en est remis. Son cas s'est finalement traduit par une réussite.

Il y avait un autre étudiant que j'appelais «le charmeur». Il avait l'habitude de faire les choses à sa manière. Je lui ai expliqué très clairement que je voulais des faits, et non être charmée. Je lui ai demandé quelle note il s'attendait à obtenir pour ses cours; il m'a répondu une moyenne de B. Je lui ai demandé de revenir dans un certain nombre de semaines et de me montrer son dossier. Il est revenu avec une moyenne de B. Il a obtenu son diplôme cette année. Il est revenu plus tard pour me dire qu'il avait été consterné parce que je l'avais coincé. Il ne croyait pas pouvoir obtenir une moyenne de B mais, comme je l'avais mis au défi, il l'avait relevé. Il est actuellement employé dans une entreprise très prospère.

Il y a également l'autre côté de la médaille. Un étudiant s'est présenté à moi. Il avait connu beaucoup de succès dans le domaine de la construction, mais voulait maintenant obtenir un diplôme universitaire. Il ne voulait pas mentionner dans son curriculum vitae l'expérience qu'il avait acquise dans le domaine de la construction. Il a finalement avoué qu'il s'agissait d'un travail de col bleu et qu'il voulait trouver un emploi de col blanc. Il croyait que quiconque lirait son curriculum vitae le traiterait avec condescendance. Il m'a fallu faire beaucoup d'efforts pour le convaincre que son expérience de travail pourrait constituer un atout. Je vais aller le voir à Statistique Canada dans environ deux semaines. Il m'a envoyé par courrier électronique un message disant que mes paroles l'avaient réellement aidé à décrocher son emploi et que son expérience l'aidait également dans son travail. Il est sur la bonne voie.

La timidité est peut-être le plus grand problème. Il se peut qu'un étudiant veuille vraiment décrocher un emploi, mais il a peur de dire ce qu'il pense. Une étudiante qui avait été invitée à passer une entrevue a réagi lorsqu'on lui a affirmé que l'emploi qu'elle postulait ne l'intéressait pas. Elle s'est soudainement rendu compte qu'elle donnait l'impression, non pas d'être timide ou craintive, mais de ne pas être intéressée par le poste.

Ces étudiants reviennent chez nous pour parler à nos autres étudiants.

Il y a également tout l'htmect de la responsabilité. J'ai proposé que les universitaires parcourent les ouvrages des années 70, les journaux, revues et autres publications. Au cours de cette période, on n'utilisait le terme «responsable» que pour désigner une personne responsable d'une autre. Les choses ne se passent pas ainsi de nos jours. Nous devons être responsables de nous-mêmes et nous devons donner aux étudiants la capacité et le savoir-faire d'être responsables. Ce n'est qu'à ce moment-là que l'apprentissage continu donnera des résultats positifs.

Depuis 15 ans ou plus, les étudiants entrent dans la classe, s'assoient et attendent que le professeur leur dise quoi faire. Leurs aptitudes à résoudre des problèmes reposent sur la résolution d'un problème bien défini en 15 minutes. Ce n'est pas ainsi que les choses se passent dans la vie. L'enseignement coopératif leur donne les aptitudes leur permettant de chercher sur place des solutions aux problèmes.

Les employeurs disent que les étudiants sont incapables de résoudre des problèmes. Or, la plupart d'entre eux peuvent très bien résoudre des problèmes de calcul différentiel et intégral et mener des expériences. Ils reçoivent une formation pour accomplir des choses de ce genre, mais beaucoup d'entre eux n'ont pas de moyens pour reconnaître un problème et y chercher une solution. Lorsqu'ils sont en train de faire des photocopies, ils ne regardent pas toujours autour d'eux pour savoir quels problèmes doivent être réglés.

Je me demande ce qui a changé et pourquoi. Autrefois, lorsque nous étions seuls sur le terrain, nous devions résoudre nos propres problèmes. Aujourd'hui, même nos activités sociales sont organisées. Nous avons des clubs de patinage et divers autres clubs. Les enfants ne peuvent même pas organiser leurs propres jeux.

Grâce à une subvention du gouvernement de la Colombie-Britannique, nous avons pu travailler à l'élaboration d'un cours en résolution des problèmes, en aptitudes interpersonnelles et en apprentissage autoréglementé. Nous avons un excellent collaborateur sur ce chapitre. Nous ignorons si nous parviendrons à offrir un cours qui commencera à traiter de quelques-unes de ces questions, mais j'estime qu'il s'agit là d'un pas dans la bonne direction. Cela ne peut pas se faire uniquement dans la salle de cours. Il faut tenir compte de ce qui se passe dans le milieu de travail. L'apprentissage situationnel est très différent de l'apprentissage en classe et, comme nous le savons depuis de nombreuses années, il y a certaines matières que nous ne pouvons pas apprendre sans suivre nos programmes d'apprentissage, nos programmes de médecine et nos programmes professionnels. Je pense que cela s'applique à beaucoup d'autres programmes en plus de ceux auxquels nous pensons habituellement. Je ne crois pas que beaucoup d'entre nous aimeraient se faire opérer par un chirurgien qui a seulement entendu ou lu la théorie de la médecine. Nous devons encourager les gens à faire preuve d'initiative. Ce seront eux qui feront un apprentissage continu.

De bonnes aptitudes en communication constituent un autre htmect de l'apprentissage qui fait défaut. Ce n'est pas que les étudiants ne savent pas écrire ou ignorent quels mots utiliser; ils ignorent ce qu'on attend d'eux.

Les notions de clarté et de concision ont changé. Dans un certain sens, beaucoup d'emplois sont liés au réseau Internet. Le langage utilisé pour communiquer sur le réseau est très différent de celui qu'on emploie dans d'autres environnements. Cette différence doit désormais être intégrée à leurs techniques de résolution de problèmes.

Notre système d'enseignement favorise-t-il l'esprit d'équipe ou la concurrence? Il évolue, mais les Canadiens doivent manifester un esprit d'équipe s'ils veulent que le Canada soit riche à l'avenir. Nous avons besoin de l'enseignement coopératif à longueur d'année, pas seulement lorsque cela convient à l'établissement scolaire. Nous sommes en mesure de faire une contribution, et je voudrais offrir nos services au comité.

Nous interagissons avec beaucoup d'entreprises et beaucoup d'étudiants. Nous sommes conscients de ce qui se passe dans le monde du travail, mais nous ne prenons pas le temps de documenter cet htmect. Nous pourrions probablement utiliser l'information beaucoup mieux. Dans les recommandations exposées dans notre mémoire, nous vous demandons de continuer d'appuyer la notion d'enseignement coopératif. Le gouvernement fédéral possède un excellent dossier pour ce qui est non seulement d'embaucher des étudiants, mais également de leur donner des conseils et une formation. Les étudiants donnent également quelque chose en retour. Ils créent de nouvelles perspectives. Un étudiant qui a travaillé pour le compte des Lignes aériennes Canadien International a fait économiser environ un million de dollars à cette société parce qu'il a eu une idée nouvelle et brillante. C'est une relation réciproque.

Nous voudrions que le gouvernement fédéral continue de mentionner l'enseignement coopératif chaque fois que cela est opportun et de confirmer qu'il fait partie intégrante de la vie scolaire normale. Mon université offre un programme spécial appelé «Stepping Out». Les étudiants doivent débourser 90 $ pour s'y inscrire, car il ne fait pas partie des programmes courants. J'espère qu'il sera bientôt classé parmi ces derniers.

À mon avis, l'enseignement coopératif devrait être offert à tous ceux qui le désirent. Nous devrions coordonner les fonds; ainsi, au lieu de les ghtmiller, nous devrions les orienter judicieusement pour offrir des perspectives de travail, utiliser les partenariats coopératifs afin de recueillir les tendances et les renseignements en matière d'emploi, et soutenir les employeurs en tant que partenaires. On reproche souvent aux employeurs de ne pas faire leur part. Or, nous connaissons d'excellents employeurs qui ont consacré une grande partie de leur temps de supervision à donner une formation à des étudiants, et ils ne reçoivent aucun témoignage de reconnaissance.

Nous pouvons offrir une subvention par l'entremise du gouvernement de la Colombie-Britannique. Les établissements coopératifs décident du bénéficiaire de cette subvention, et nous sommes très exigeants. Les subventions seront accordées aux étudiants qui en ont besoin. Elles ne seront pas remises à ceux qui gagnent déjà un salaire dans une entreprise.

Nous encourageons la coordination entre les gouvernements fédéral et provinciaux et les exhortons à accorder directement les fonds d'enseignement coopératif aux établissements. Lorsque les fonds sont versés dans l'ensemble de la caisse, nous en perdons la trace.

Le président: Je vous remercie beaucoup de cet excellent mémoire, qui nous invite à la réflexion.

Le sénateur Perrault: Votre programme remporte beaucoup de succès.

Le sénateur Carney: Je crois que vous avez bien illustré le fait que beaucoup d'étudiants ne savent pas comment cerner un problème et, partant, ne peuvent pas y trouver une solution. Leur expérience ne leur enseigne pas beaucoup à déceler la nature du problème qu'ils sont censés résoudre. C'est un htmect très important.

En examinant vos recommandations, je tiens à souligner que les encouragements fiscaux sont hors de question ces temps-ci, en ce sens qu'ils ne s'inscrivent pas dans la doctrine financière à laquelle adhère quelque gouvernement que ce soit, car ils ouvrent la porte à beaucoup trop d'autres demandes d'encouragements fiscaux. Cependant, nous admettons qu'il faudrait encourager les employeurs à participer. J'ai découvert deux obstacles à la participation des employeurs. Le premier, c'est que leur temps de gestion est réduit, ce qui coûte très cher.

Mme Godwin: Cela coûte cher à l'employeur.

Le sénateur Carney: Le deuxième obstacle, c'est qu'une entreprise risque de donner une formation à un futur concurrent. Rien n'empêche le stagiaire de quitter l'entreprise et d'aller travailler pour un concurrent.

Étant donné ces obstacles, à votre avis, qu'est-ce qui encourage les employeurs? Nous pourrions peut-être encourager l'utilisation de ce programme. De toute évidence, vous avez des solutions, car les employeurs sont favorables à ce programme.

Mme Godwin: On me reproche souvent d'être une mère qui demande toujours de l'aide. Les entreprises bénéficient beaucoup du programme parce que les étudiants y contribuent.

Nous pouvons utiliser ce programme d'un certain nombre de façons. Par exemple, nous pourrions lancer un système de mentors. Je lisais récemment que certaines gens parmi nos Premières nations ont des difficultés car, en tant qu'étudiants, ils doivent souvent passer à de nouveaux domaines où il n'y a personne pour les superviser. Je souligne que nous avons un groupe de personnes à la veille de la retraite qui possèdent un énorme bagage de connaissances et d'expérience. Si nous pouvons y avoir recours pour élaborer un système de mentors, nous pourrions offrir de nouvelles perspectives à nos étudiants dans les domaines où la concurrence est faible.

Le sénateur Carney: Le comité devrait songer au système de mentors, car il met à contribution le savoir-faire que nous possédons.

Mme Godwin: Si des fonds sont disponibles, ils pourraient peut-être servir à couvrir les dépenses de ceux qui se joindront au programme en tant que mentors.

Le sénateur Lavoie-Roux: Avez-vous entendu parler du programme à Sherbrooke?

Mme Godwin: Oui.

Le sénateur Lavoie-Roux: Est-il semblable au vôtre?

Mme Godwin: Oui.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je crois qu'il existe depuis de nombreuses années.

Mme Godwin: Oui, il s'agissait de l'un des programmes initiaux.

Le président: Madame Godwin, nous tenons à vous remercier vivement pour votre excellent mémoire.

Le sénateur Perrault: De première qualité.

Le président: Nous collaborerons peut-être avec vous à un programme coopératif.

Mme Godwin: Je l'espère.

Le président: Notre prochain point à l'ordre du jour doit être examiné à 18 heures. Quelqu'un désire-t-il poser des questions ou formuler des observations?

Le sénateur Andreychuk: Monsieur le président, comme vous le savez, le comité sénatorial permanent des affaires étrangères se trouvait récemment à Vancouver dans le cadre de son étude de la région de l'Asie-Pacifique. Au cours de ses audiences, plusieurs témoins ont abordé la question de l'éducation, et ils en ont traité d'une manière différente de celle dont en traitent nos théoriciens et nos professeurs universitaires. Ils ont discuté de la formation en cours d'emploi et de ce que les étudiants ont besoin pour réussir dans un environnement mondial et concurrentiel. Je crois que leur témoignage a un rapport avec l'étude entreprise par notre comité. Par conséquent, je demande s'il convient de présenter une motion pour que nous prenions connaissance du compte rendu de leur témoignage dans le cadre de notre étude. Notre greffier pourrait peut-être se réunir avec M. Pelletier pour cerner ce qui nous intéresse. Nous aurions ainsi une perspective différente de toute la question sans avoir besoin de convoquer tous ces témoins.

Le sénateur Forest: Le comité des affaires étrangères accepterait-il de faire circuler le compte rendu de ce témoignage?

Le sénateur Andreychuk: Les audiences des deux comités étaient publiques.

Le sénateur Carney: Puisque les audiences du comité des affaires étrangères étaient publiques, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de présenter une motion. Je pense que notre comité pourrait librement avoir accès à ces renseignements.

Le sénateur Perrault: Nous devrions peut-être consulter le président de l'autre comité.

Le sénateur Andreychuk: Bien sûr.

Le sénateur Carney: Les témoins n'ont pas été appelés à comparaître devant notre comité. La solution la plus facile serait de faire circuler les documents publics du comité des affaires étrangères. Il pourrait s'agir d'une question de dossiers publics.

Le sénateur Andreychuk: Je crois qu'il est inutile de faire circuler le compte rendu en entier, étant donné que beaucoup de témoins n'ont pas abordé la question de l'enseignement postsecondaire ou de l'éducation. Nous pouvons faire un tri.

Le sénateur Carney: Bien entendu.

Le sénateur Lavoie-Roux: Monsieur le président, je crois que nous devrions commencer par rédiger notre ébauche de rapport; une fois qu'il aura été révisé, nous pourrions examiner les témoignages présentés devant l'autre comité. Je ne crois pas que nous devrions intégrer tout le compte rendu dans notre rapport de comité.

Le sénateur Andreychuk: Je conviens que nous ne devrions pas intégrer tous ces témoignages. À mon avis, nous devrions choisir ceux qui portent sur l'éducation et les examiner. Nous pourrons utiliser les renseignements publics pour nos propres fins.

Le sénateur Carney: Le président pourrait peut-être simplement demander au greffier de faire circuler parmi les membres de notre comité tous les renseignements pertinents qui proviennent des audiences de l'autre comité. Nous pourrions ensuite décider d'insérer une référence à ces renseignements dans notre rapport.

Le président: Je crois que nous devrions demander au greffier de l'autre comité de faire en sorte que chaque membre de notre comité obtienne ce document public. Nous pourrions ensuite utiliser tous les renseignements pertinents.

Honorables sénateurs, je vous remercie d'avoir été aussi attentifs. J'ai hâte de vous revoir tôt demain matin.

La séance est levée.


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