Délibérations du sous-comité de l'enseignement
postsecondaire
du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 10 - Témoignages - Séance du matin
Halifax, le mercredi 19 février 1997
Le sous-comité de l'enseignement postsecondaire du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, se réunit aujourd'hui à 9 heures pour poursuivre son étude de l'enseignement postsecondaire au Canada.
Le sénateur M. Lorne Bonnell (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Nous en sommes à notre deuxième journée d'audiences à Halifax, la capitale de la Nouvelle-Écosse. Nous reprenons notre étude de l'enseignement postsecondaire au Canada, que le Sénat du Canada a confiée au Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Le comité a constitué un sous-comité et nous sommes ici à Halifax aujourd'hui. L'ordre de renvoi se lit comme suit:
Que, dans le respect des attributions constitutionnelles des provinces, le comité soit autorisé à faire enquête et rapport sur l'état de l'enseignement postsecondaire au Canada, ce qui englobe l'examen:
a) des objectifs nationaux, régionaux, provinciaux et locaux du système d'enseignement postsecondaire au Canada;
b) de l'importance de l'enseignement postsecondaire au Canada sur les plans social, culturel, économique et politique;
c) des rôles des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux;
d) de la capacité des universités et collèges canadiens de s'adapter au nouveau marché de l'enseignement qui est en train d'émerger, et notamment à l'évolution des programmes d'études, aux nouvelles technologies, au télé-enseignement, à l'éducation permanente et à l'alternance travail-études, ainsi qu'à l'éducation des adultes et aux études à temps partiel;
e) du Programme canadien de prêts aux étudiants et des différents programmes provinciaux et territoriaux d'aide financière aux étudiants, ainsi que des préoccupations croissantes au sujet de l'endettement des étudiants;
et à cerner les domaines où une plus grande coopération est possible entre tous les niveaux de gouvernement, le secteur privé et les établissements d'enseignement;
Que le comité soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres personnes nécessaires pour mener à bien son étude;
Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les ajournements du Sénat;
Que le comité puisse se déplacer au Canada lorsqu'il entamera son étude;
Que le comité soit autorisé à permettre le reportage électronique de ses audiences publiques, celles-ci étant perturbées le moins possible;
Que le comité présente son rapport final au plus tard le 28 février 1997; et
Que, sans égard aux pratiques habituelles, si le Sénat ne siège pas lorsque le rapport final du comité sera terminé, le rapport puisse être déposé auprès du greffier du Sénat et qu'il soit considéré comme ayant été déposé devant cette Chambre.
Nous avons obtenu que la date de présentation de notre rapport soit reportée au 15 mai, au lieu du 28 février, car il nous est impossible de terminer notre rapport dans un délai aussi court.
Nous avons avec nous ce matin, M. David Cameron et M. Daniel Godbout de la Commission de l'enseignement supérieur des provinces Maritimes.
M. David Cameron, président intérimaire, Commission de l'enseignement supérieur des provinces maritimes: Honorables sénateurs, je m'appelle David Cameron. J'ai le grand honneur d'assurer la présidence par intérim de la Commission de l'enseignement supérieur des provinces maritimes. Je suis accompagné de Daniel Godbout qui est l'administrateur en chef des opérations pour la Commission. J'aimerais faire quelques remarques préliminaires, puis laisser amplement de temps aux questions et à la discussion.
Tout d'abord, j'aimerais vous dire un mot à propos de la Commission. C'est une institution unique au Canada, mise sur pied en 1973 au moyen de lois identiques dans les trois provinces maritimes. Son rôle est de conseiller les trois gouvernements et les universités, afin d'améliorer l'efficacité et l'efficience de l'enseignement supérieur dans les provinces maritimes. La Commission se compose de représentants des établissements d'études supérieures, des étudiants, des membres du grand public et du gouvernement.
J'aimerais ajouter que la déclaration que je vais faire ce matin et le mémoire que nous vous avons remis reflètent les vues de la Commission et pas nécessairement celles du gouvernement que nous conseillons. Je sais qu'au moins une de nos recommandations a causé une certaine consternation parmi les provinces. Vous pourrez en savoir plus en lisant le Globe and Mail de ce matin.
J'aimerais mettre l'accent sur trois htmects qui préoccupent particulièrement la Commission. Notre mémoire renferme de nombreuses données et analyses. Il présente 17 recommandations précises. Comme je l'ai dit, j'aimerais d'abord mettre l'accent sur trois grandes préoccupations qui découlent des réductions actuelles, passées et futures des dépenses gouvernementales, tant au niveau fédéral que provincial. Nous sommes tout à fait conscients du problème de la dette et du déficit avec lequel le Canada est aux prises. Nous craignons toutefois que certaines des mesures prises dans le domaine de l'enseignement postsecondaire aient frappé assez durement et de façon disproportionnée nos universités et collèges.
Nous considérons que l'enseignement postsecondaire représente effectivement un investissement dans l'avenir, dans l'avenir de chaque membre de la société et dans notre avenir collectif. Nous devons prendre garde à ne pas adopter des mesures à court terme pour équilibrer les budgets, qui risquent d'avoir des conséquences à long terme que nous regretterons par la suite. Car une fois que nous aurons sapé les fondements de l'enseignement supérieur ou de l'enseignement postsecondaire, il sera difficile de changer de cap.
La question qui nous préoccupe le plus, ce sont les frais de scolarité et en particulier les conséquences de l'augmentation des frais de scolarité sur le niveau d'endettement des étudiants. Nous avons constaté ces dernières années que la proportion du financement universitaire que représentent les frais de scolarité est passée de 14 à 28 p. 100 dans les budgets de fonctionnement des universités. Nous avons constaté au cours des 10 dernières années dans les Maritimes une augmentation des frais de scolarité moyens qui sont passés d'environ 1 700 dollars à près de 3 000 dollars. Les Maritimes affichent les frais de scolarité moyens parmi les plus élevés au Canada.
Nous constatons que la majeure partie du financement de l'enseignement supérieur que n'assument plus les gouvernements est en train d'être compensée par une augmentation des frais de scolarité. Cette augmentation, conjuguée à la difficulté d'obtenir un emploi d'été rémunérateur, crée une situation qui oblige pratiquement les étudiants à contracter des emprunts pour payer la majeure partie de leurs frais d'études postsecondaires, ce qui comprend entre autres les frais de scolarité.
Il y a une dizaine d'années, l'aide aux étudiants dans les Maritimes s'élevait en moyenne à 2 700 dollars, dont 900 dollars étaient versés sous forme de bourse non remboursable. Aujourd'hui, depuis 1994-1995, ce montant a doublé et est passé à 5 800 dollars, dont la totalité, à l'exception de la modeste somme de 300 dollars dans le cas du Nouveau-Brunswick, est versée sous forme de prêt.
Ce qui nous inquiète, c'est que nous ne savons pas vraiment quelles seront les conséquences à long terme de ces hausses de frais et de l'augmentation massive de l'endettement des étudiants. Nous ignorons s'ils pourront rembourser ces prêts. Nous ignorons les répercussions de dettes qui peuvent maintenant facilement dépasser 20 000 dollars pour un étudiant qui obtient son diplôme après un programme de premier cycle de quatre ans. Nous ignorons quelles en seront les conséquences pour ces étudiants, pour leurs familles ou même pour l'économie. C'est une grosse dette à assumer pour quelqu'un qui commence à travailler. Nous ignorons quelles en seront les incidences sur les taux d'inscription. Jusqu'à présent, l'inscription se maintient malgré la hausse des frais, mais on a l'impression d'être au bord du précipice. Nous sommes en train de nous aventurer sur un terrain glissant et si les frais de scolarité augmentent alors que les taux d'inscription diminuent, la situation risque de s'aggraver. Tout est possible.
Nous avons été ravis d'apprendre hier les mesures budgétaires prévues par le gouvernement fédéral pour alléger davantage le fardeau des étudiants, entre autres par des réductions d'impôts et une période de dispense de remboursement pour les étudiants qui ont de la difficulté à rembourser leurs prêts. Mais il n'empêche que nous ne savons toujours pas où nous allons.
La Commission a décidé d'entreprendre une étude importante des obstacles à l'accessibilité en mettant en partie l'accent sur les obstacles d'ordre financier. Notre rapport devrait être prêt d'ici deux mois. Nous nous ferons un plaisir de vous en fournir un exemplaire puisqu'il devrait être prêt avant que vous terminiez le vôtre.
En fait, les obstacles à l'accessibilité sont le deuxième htmect qui nous préoccupe. Comme l'indique votre ordre de renvoi, monsieur le président, depuis pratiquement la Deuxième Guerre mondiale, l'enseignement postsecondaire au Canada est un partenariat entre le gouvernement fédéral et les provinces. Nous reconnaissons les responsabilités constitutionnelles des provinces dans ce domaine et nous reconnaissons également l'importance du rôle joué par le gouvernement fédéral pour appuyer les divers htmects de l'enseignement postsecondaire.
Nous constatons avec beaucoup d'inquiétude les barrières en train d'être érigées entre les provinces; par exemple, la décision du Québec d'imposer des frais plus élevés aux étudiants venant d'autres provinces. Bien que nous comprenions la situation particulière dans laquelle se trouve cette province et reconnaissions qu'elle a réussi au fil des ans à maintenir ses frais de scolarité bien en deçà de la moyenne nationale, nous considérons qu'il s'agit d'une mesure très inquiétante car pour la première fois, nous aurons un gouvernement qui impose aux étudiants canadiens venant d'une autre province des frais plus élevés qu'aux étudiants de la province même. Nous espérons que cette mesure ne se répercutera pas sur les autres provinces mais nous craignons qu'elle ait de graves conséquences. Elle n'est pas dans l'intérêt des étudiants ni dans celui du Canada. C'est pourquoi nous estimons qu'il s'agit d'une question importante dont le gouvernement fédéral devrait s'occuper.
Nous avons formulé une recommandation assez controversée, à savoir que le gouvernement fédéral envisage sérieusement d'imposer des pénalités aux provinces qui imposent des frais excessifs aux étudiants hors province. La mobilité des étudiants tant à l'intérieur d'une province que d'une province à l'autre est une question qui relève incontestablement du gouvernement fédéral.
Le troisième htmect qui nous préoccupe concerne la recherche. La recherche est l'un des éléments clés de la croissance économique et de la prospérité. Pourtant, par suite de mesures prises récemment par les gouvernements des deux paliers, nous risquons d'étrangler la poule aux oeufs d'or. L'infrastructure de la recherche au Canada laisse nettement à désirer. Nous avons été ravis d'apprendre que le budget de M. Martin propose la création d'une fondation canadienne pour l'innovation. Cependant, il faudra plus qu'une seule initiative, aussi valable soit-elle, pour régler le problème.
Le caractère unique du partenariat qui existe entre le gouvernement fédéral et les provinces en matière de recherche présente un double risque pour les universités à fort coefficient de recherche. Comme vous le savez, le gouvernement fédéral limite l'aide qu'il fournit à la recherche commanditée à ce que nous appelons les coûts directs, de sorte que les coûts d'infrastructure ou les coûts indirects de la recherche doivent être financés par d'autres sources au sein des établissements et de la province. La diminution des paiements de transfert fédéraux complique et aggrave la situation résultant des réductions des subventions fédérales puisqu'elle limite encore plus la capacité des provinces et des universités à assumer les coûts indirects qui ne sont toujours pas payés par les conseils subventionnaires fédéraux.
Dans une province moins bien nantie, comme les trois provinces maritimes, il s'agit d'un double fardeau puisque la réduction de l'aide financière du gouvernement fédéral fait augmenter le coût de la recherche que doit assumer la province, ce qui oblige les gouvernements et les établissements provinciaux à en assumer une proportion encore plus forte.
Dans des provinces comme les nôtres, qui comptent moins d'organismes de recherche privés que les autres provinces, nous dépendons d'une façon disproportionnée des universités pour nos activités de recherche et de développement. Sans la présence d'un secteur privé robuste, nous sommes triplement touchés par les réductions de l'aide financière fédérale à la recherche.
De plus, nous ne sommes pas sûrs que le gouvernement fédéral soit pleinement conscient des répercussions générales des compressions apportées dans les ministères, qui risquent d'entraîner une diminution de l'aide que le gouvernement fédéral verse à certains organismes de recherche oeuvrant dans les domaines de l'agriculture, des pêches, des transports, et cetera. En d'autres mots, notre petit secteur de la recherche non universitaire dépend de l'aide du gouvernement fédéral. Or, ces dernières années, cette aide a été réduite et cette réduction s'ajoute aux compressions dont ont fait l'objet les conseils subventionnaires et à la diminution des paiements de transfert aux provinces.
Voilà les principales questions qui nous préoccupent dans l'immédiat, honorables sénateurs. Nous sommes préoccupés par la hausse des frais de scolarité, surtout par l'endettement de plus en plus lourd que cette hausse impose aux étudiants et par l'avenir incertain qui nous attend maintenant que nous voulons faire porter à nos diplômés une partie importante du fardeau de notre dette nationale.
Nous sommes préoccupés par les obstacles que les provinces sont en train d'ériger entre elles tant sous la forme de frais supplémentaires imposés aux étudiants hors province -- et nous reconnaissons ici encore le caractère unique de la situation du Québec -- et sous la forme de critères de résidence pour l'aide aux étudiants. Nous sommes préoccupés par la recherche et l'importance de la recherche pour le développement économique, surtout dans cette région du Canada, et par l'effet complexe et combiné des réductions de l'aide fédérale à la recherche.
Nous félicitons le ministre des Finances et le premier ministre des mesures budgétaires qu'ils ont prises. Nous les incitons à poursuivre dans cette voie et à rétablir le niveau d'investissement dans l'enseignement postsecondaire et à le maintenir à un niveau suffisant et stable dans le cadre du partenariat établi entre les gouvernements fédéral et provinciaux, qui a contribué à la vigueur de l'enseignement postsecondaire au Canada.
M. Godbout et moi-même nous ferons un plaisir d'élaborer sur les htmects qui vous intéressent ou de répondre à vos questions.
Le président: Monsieur Cameron, vous représentez les provinces maritimes. Pourquoi Terre-Neuve ne s'est-elle pas jointe aux provinces maritimes? Est-ce parce que vous n'aimez pas Terre-Neuve ou que Terre-Neuve ne veut pas se joindre à vous comme région du Canada atlantique?
M. Cameron: M. Godbout voudra peut-être vous donner plus de précisions à ce sujet mais l'explication est simple. Lorsque la Commission a été constituée par le Conseil des premiers ministres des Maritimes, suite au rapport de l'étude sur l'union des provinces maritimes, à chacune de ces occasions Terre-Neuve a préféré s'abstenir de participer. Il existe maintenant un organisme parallèle, le Conseil des premiers ministres des provinces de l'Atlantique, dans le cadre duquel les quatre ministres de l'Éducation de la région de l'Atlantique se réunissent régulièrement mais n'ont pas encore jugé utile de transformer la Commission en un organisme de l'Atlantique. Cela pourrait se faire plus tard mais pour l'instant nous représentons les trois provinces.
Le président: Donc un mécanisme quelconque sera mis sur pied pour examiner la situation économique des provinces de l'Atlantique?
M. Cameron: Les premiers ministres de l'Atlantique se réunissent régulièrement, effectivement.
Le président: Ont-ils un mécanisme pour l'ensemble de ces gouvernements? Il me semble que nous ayons dans la région Atlantique du Canada un troisième palier de bureaucratie qui ghtmille l'argent du contribuable et Dieu sait que ce n'est pas vraiment nécessaire puisqu'il s'agit de petits gouvernements provinciaux. Puis, avoir des gouvernements dans les Maritimes qui viennent alourdir l'appareil bureaucratique qui auparavant ne coûtait que quelques dollars et qui maintenant coûte des millions. La même chose est-elle en train de se produire dans le secteur de l'éducation dans les Maritimes?
M. Cameron: Le point de vue diffère selon l'endroit où vous vous trouvez. Les membres de la Commission ont tendance à considérer qu'un organisme pour trois provinces est plus efficace et efficient que trois organismes, c'est-à-dire un pour chaque province. C'est une question dont les provinces discutent constamment.
Nous nous entendons très bien. Les relations de travail entre les ministères provinciaux et la Commission sont très bonnes.
Le président: Nous avons une sénateur du Québec ici, le sénateur Lavoie-Roux, qui aimerait vous poser quelques questions concernant les étudiants qui vont étudier au Québec et sont obligés de payer des frais de scolarité plus élevés.
Le sénateur Lavoie-Roux: Même si je n'étais pas partisane de cette augmentation, elle n'est pas vraiment tragique. Je pense que vous savez que malgré cette augmentation, il est moins cher pour les étudiants ontariens d'étudier à McGill qu'à l'Université de Toronto. Je le répète, je n'étais pas en faveur de cette mesure.
M. Cameron: Je tiens à répéter que ce ne sont pas précisément les mesures prises par le gouvernement du Québec qui nous inquiètent. C'est l'établissement d'un principe que nous désapprouvons pour l'ensemble des provinces.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je suis heureuse que vous ayez apporté cette précision. Tout d'abord, je tiens à vous remercier pour votre rapport que je lirai plus attentivement. Il contient des données qui seront très utiles.
Les deux principaux problèmes qui nous ont été signalés à plusieurs reprises, que ce soit dans l'Ouest ou dans les Maritimes, sont le financement de la recherche et le problème des frais, des prêts aux étudiants et du niveau d'endettement des étudiants.
Hier, dans le budget, deux mesures ont été proposées pour aider les étudiants. D'abord, le montant pouvant être déduit par les étudiants passera de 100 à 200 $. Je ne suis pas sûre du montant. Ensuite, la période de report sera prolongée. Les étudiants pouvaient reporter le remboursement de leur prêt de 18 mois. Cette période sera portée à 30 mois. Ces chiffres ne sont peut-être pas exacts.
Je ne sais pas si c'est une bonne chose. Les étudiants se sentiront peut-être soulagés parce qu'ils pourront reporter le remboursement de leur prêt de 30 mois, mais ils devront aussi verser de l'intérêt pendant plus longtemps. Je ne sais pas quel impact cela peut avoir sur l'endettement des étudiants.
M. Cameron: Je crois que c'est beaucoup plus. Je pense qu'ils peuvent déduire presque le double de ce qu'ils paient en frais de scolarité au titre du crédit d'impôt.
Le sénateur Lavoie-Roux: C'est ce que je voulais savoir.
M. Cameron: Des changements ont également été apportés au régime enregistré d'épargne-études. Ils correspondent à ce que nous avions proposé dans notre mémoire. Nous sommes heureux de voir que M. Martin les a acceptés avant même que nous ayons eu la chance de les formuler. Nous en sommes très fiers.
Le sénateur Lavoie-Roux: Au Québec, la dette des étudiants varie entre 7 000$ et 10 000$ par année. Est-ce que ces changements vont aider ces étudiants?
M. Cameron: Toutes ces mesures sont utiles. Elles aideront les générations futures d'étudiants à économiser pour leurs études postsecondaires. Elles contribueront à alléger le fardeau que représentent les frais de scolarité élevés. Elles aideront des étudiants à rembourser leur prêt. Toutefois, les étudiants vont continuer à emprunter de l'argent, et le gouvernement va continuer à prendre des mesures pour les aider à rembourser leur prêt. Le fardeau de la dette restera. Il sera tout simplement moins lourd.
Nous aimerions que les gouvernements fassent encore plus pour réduire le niveau d'endettement, mais pour cela, il faudrait qu'ils investissent davantage.
Le sénateur Lavoie-Roux: Nous avions entendu dire, avant le dépôt du budget, que des changements allaient être annoncés dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. Je suppose que tout petit geste peut aider. Toutefois, si l'on se fie à ce que nous avons entendu au cours des audiences, le problème est assez grave et ce n'est pas en reportant de 20 ou de 30 mois le remboursement des prêts que nous allons le régler. Comme je l'ai dit, les étudiants devront payer plus d'intérêts du fait que le délai sera prolongé. C'est tout.
M. Cameron: Je crois que ces initiatives méritent d'être appuyées dans une certaine mesure, car les familles à revenu élevé peuvent sans doute se permettre de financer une plus grande part des études de leurs enfants. Toutefois, nous devons évaluer l'impact qu'auront ces mesures sur les diplômés qui ne peuvent compter sur l'aide de parents bien nantis.
Le nombre d'étudiants qui dépendent de l'aide fédérale et provinciale dans les Maritimes est particulièrement élevé. En effet, ces étudiants peuvent se retrouver avec des dettes qui dépassent largement l'avoir total de leurs parents, la valeur de leur maison, par exemple. Si une famille compte trois ou quatre enfants et des dettes énormes, le fardeau peut-être très lourd. De nombreux étudiants ont peut-être atteint, ou presque, la limite de leur capacité de rembourser des prêts qui atteignent des proportions alarmantes.
Le sénateur Lavoie-Roux: Combien de jeunes se trouvent dans l'impossibilité de faire des études supérieures en raison des coûts que cela peut entraîner plus tard?
M. Cameron: Nous ne le savons. Statistique Canada, dont les enquêtes accusent un certain retard, a beaucoup de données sur la situation des étudiants qui ont obtenu leur diplôme il y a quatre ans, mais pas sur l'impact des récentes hausses. Nous allons nous pencher là-dessus dans notre étude. Nous espérons être en mesure, dans quelques mois, d'avoir des données sur l'impact qu'ont sur les étudiants les frais de scolarité et les coûts d'emprunt.
On a remarqué que le taux d'inscription s'est stabilisé dans les provinces Maritimes, mais que le montant des prêts consentis aux étudiants a légèrement diminué. Or, nous craignons que ce ne soient surtout les étudiants riches qui fréquentent les universités. Nous risquons de revenir au système d'enseignement élitiste qui existait au XIXe siècle, un système que le Canada s'est efforcé de modifier durant la période de l'après-guerre. On se trouverait à faire un pas en arrière.
Le sénateur Lavoie-Roux: Savez-vous combien d'étudiants abandonnent l'université à cause du fardeau financier qu'ils doivent assumer?
M. Cameron: Les seules données que nous avons pour l'instant sont des données non scientifiques. D'après les économistes, l'enseignement supérieur demeure, malgré les coûts, un bon investissement pour l'étudiant au chapitre de l'emploi, du revenu.
Nous avons, cette année, mené un sondage auprès des étudiants qui ont obtenu leur diplôme l'année dernière. Ils se sont dits très satisfaits de leurs études postsecondaires. Leur niveau d'emploi est beaucoup plus élevé que celui de la population en général. Toutefois, nous n'avons beaucoup de données à ce stade-ci sur le nombre d'étudiants qui abandonnent leurs études. Nous croyons cependant qui nous continuons dans la même voie, la situation risque de s'aggraver.
Le sénateur Lavoie-Roux: Il y a, à la page 2 de votre mémoire, un tableau qui fait état des taux de chômage par niveau de scolarité. Ce tableau correspond plus ou moins aux données qu'on nous a fournies. Presque 6 p. 100 des étudiants qui ont un diplôme universitaire sont au chômage. Cela n'est pas très encourageant pour ceux qui font des pieds et des mains pour emprunter de l'argent et s'inscrire au collège ou à l'université. Six pour cent, ou, 5,7 pour être plus précise, c'est beaucoup.
M. Cameron: Bien entendu, ces chiffres ne font pas état du nombre d'étudiants qui sont sous-employés, qui occupent des postes pour lesquels ils sont trop qualifiés.
Le sénateur Lavoie-Roux: Savez-vous combien d'étudiants ont obtenu un diplôme dans un domaine en particulier, mais travaillent dans un autre secteur?
M. Cameron: Nous avons beaucoup de renseignements à ce sujet pour les provinces maritimes. Nous vous fournirons volontiers les résultats d'un sondage que nous avons mené en 1996 auprès d'étudiants qui ont obtenu leur diplôme en 1995. Ce sondage ne couvre pas les étudiants des autres provinces. Toutefois, vous pouvez ajouter ces résultats aux données de Statistique Canada.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je pense que les statistiques pour le Québec sont similaires. Il serait intéressant de les avoir.
Le sénateur Forest: En ce qui concerne les mesures proposées dans le budget, nous espérions que le gouvernement en fasse plus. Je tiens toutefois à signaler que les étudiants pourront reporter le remboursement de leur prêt de 30 mois. Ils disposent déjà d'une période de grâce de six mois, ce qui veut dire qu'ils auront jusqu'à trois ans pour gérer leurs prêts. Le gouvernement assumera l'intérêt au cours de cette période, de sorte que les étudiants ne paieront aucun intérêt sur ces prêts pendant les trois premières années. C'est déjà beaucoup.
Le sénateur Lavoie-Roux: Ce n'est pas ce qu'ils ont dit, hier, dans le budget. Ils ont annoncé que la période serait prolongée.
Le sénateur Andreychuk: De six mois.
Le sénateur Lavoie-Roux: Peu importe le nombre de mois.
Le président: Nous pouvons discuter du budget ailleurs.
Le sénateur Lavoie-Roux: Tous les étudiants qui ont comparu devant nous, ou leurs représentants, ont dit qu'ils devaient payer de l'intérêt sur leurs prêts et que cela constituait pour eux un énorme fardeau. Êtes-vous en train de dire qu'ils n'auront plus à assumer l'intérêt sur leurs prêts?
Le président: Si vous lisez le budget, vous allez constater que le sénateur Forest a raison.
Le sénateur Lavoie-Roux: C'est un point important.
Le sénateur Forest: Je suis du même avis. J'aimerais parler de la mobilité des étudiants. Partout où nous sommes allés, les étudiants ont dit qu'ils voulaient que leurs crédits et leurs prêts soient transférables.
Ils ont dénoncé les frais plus élevés qu'impose le Québec aux étudiants des autres provinces, comme vous l'avez mentionné. Toutefois, comme l'a dit le sénateur Lavoie-Roux, c'est au Québec que les frais sont les moins élevés et que le programme de prêt est le mieux structuré. C'est donc un bon point. Nous craignons toutefois que les étudiants des autres provinces ne soient, dans certains cas, obligés de payer des frais plus élevés que les étudiants étrangers.
De plus, l'Alberta, la Colombie-Britannique et l'Ontario, si je ne m'abuse, se sont fait critiquer, à juste titre, parce que leurs prêts ne sont pas transférables. Je crois qu'ils devraient l'être.
On a également critiqué l'Alberta pour la façon dont elle applique le régime d'assurance-maladie. Toutefois, il existe des lignes directrices qui permettent au gouvernement fédéral de dire, «Voici les lignes directrices. Si vous les respectez, vous obtenez des subventions. Si vous ne les respectez pas, vous n'y avez pas droit.»
Comment pouvons-nous améliorer la mobilité des étudiants, le transfert de leurs crédits et de leurs prêts? Comment le gouvernement fédéral peut-il intervenir dans ce domaine, tout en respectant la compétence des provinces en matière éducation et la diversité de leurs programmes?
M. Cameron: Vous venez, en fait, d'établir un parallèle entre le régime d'assurance-maladie et les transferts fédéraux. On pourrait adopter une approche similaire dans le domaine de l'enseignement postsecondaire, c'est-à-dire pénaliser les provinces qui créent des obstacles à la mobilité. Le gouvernement fédéral continue de verser des sommes énormes aux provinces. Il devrait s'en servir comme monnaie d'échange pour les obliger à respecter les principes qui sous-tendent le régime d'assurance-maladie.
Nous n'avons pas encore mis au point les détails. Nous proposons tout simplement qu'un mécanisme parallèle soit établi dans le domaine de l'enseignement postsecondaire pour faire en sorte que les transferts fédéraux soient réduits en fonction des obstacles qu'érige une province pour empêcher la mobilité des étudiants.
Le sénateur Forest: Cela figure dans votre rapport.
M. Cameron: Oui.
Le sénateur Forest: Nous n'avons pas encore eu l'occasion de le lire.
M. Cameron: Je crois que c'est la recommandation 7.
Le sénateur Andreychuk: Je vous félicite d'avoir entrepris une telle étude, parce que plus nous poussons nos recherches, plus nous serons en mesure de nous sensibiliser aux problèmes qui existent dans le domaine de l'enseignement. Il y a beaucoup de mythes qui entourent certains de ces problèmes. Je tiens à vous remercier de nous avoir fourni des statistiques qui remontent à 1982, parce que certaines personnes se plaisent à faire des déclarations sans preuves à l'appui.
Toutefois, d'après certains représentants du milieu universitaire, les frais de scolarité comptent pour 30 p. 100 du budget de fonctionnement de l'université, tout comme c'était le cas dans les années 50 et 60. À l'époque, on voulait que les étudiants paient leur juste part des dépenses consacrées à leur éducation. Les frais de scolarité correspondaient donc au tiers environ du budget de fonctionnement de l'université. En échange, les étudiants pouvaient obtenir des bourses, décrocher un bon emploi à temps partiel, un emploi d'été, et enfin un emploi intéressant une fois leurs études terminées.
J'aimerais d'abord savoir si, en fait, dans le passé, les étudiants payaient des frais de scolarité plus élevés, mais qui aboutissaient à des emplois intéressants.
Ensuite, croyez-vous que le Canada devrait adopter, à l'égard de l'enseignement, une approche qui tienne compte de tous ces facteurs? Nous ne sommes pas tellement conséquents dans nos actions. Les frais de scolarité augmentent et diminuent. Nous avons des programmes de prêts pour les étudiants, mais nous ne concertons pas nos efforts pour gérer cet investissement.
M. Cameron: Vous avez fort bien résumé le problème. Il est vrai que, en dollars constants, les frais de scolarité commencent à peine à dépasser le plafond qu'ils atteignaient dans les années 50, alors qu'ils représentaient environ le tiers des dépenses de fonctionnement. Dans ce sens, vous avez parfaitement raison. Toutefois, nous devons non seulement tenir compte des coûts additionnels et de la difficulté qu'ont les étudiants à gagner, pendant l'été, suffisamment d'argent pour payer leurs frais de scolarité et autres dépenses, mais aussi du fait que de plus en plus d'étudiants travaillent à temps partiel pendant l'année scolaire, ce qui veut dire qu'ils ont moins d'énergie à consacrer à leurs études. Ils travaillent très souvent quatre, cinq, six heures par jour.
Nous avons coupé la plupart des programmes de bourses, et certaines provinces les ont complètement supprimés, de sorte que seuls des prêts sont maintenant offerts aux étudiants. Nous ne pouvons pas faire fi des progrès énormes que nous avons réalisés dans le domaine de l'enseignement postsecondaire durant les années 60 et 70, non seulement par le biais de frais de scolarité moins élevés, qui ont eu un impact sur l'accessibilité, mais aussi par suite de l'expansion du réseau collégial, qui a permis de créer de nouveaux débouchés. Voulons-nous vraiment revenir aux années 50, à l'époque où les frais de scolarité étaient relativement élevés, mais où seulement un très petit groupe d'étudiants pouvait se permettre de fréquenter l'université?
Il est vrai que ceux qui fréquentaient l'université dans les années 50 en tiraient des avantages énormes. Toutefois, nous aurions tort de revenir en arrière. Oui, nous voulons que le gouvernement fédéral et les provinces collaborent ensemble sur la question du financement de l'enseignement postsecondaire, y compris l'aide aux étudiants, le financement de la recherche, de l'infrastructure.
Le sénateur Andreychuck: Serait-il juste de dire qu'en attendant que cette collaboration se concrétise, les mesures qui ont été prises ne régleront qu'une partie infirme d'un problème qui ne cesse de prendre de l'ampleur?
M. Cameron: Oui. Il vaut mieux prendre des mesures modestes que de ne pas en prendre du tout. Nous applaudissons aux progrès accomplis. En fait, nous vous encourageons à redoubler d'efforts.
M. Daniel Godbout, chef de l'exploitation, Commission de l'enseignement supérieur des provinces maritimes: Je tiens à dire, pour votre information, que l'annexe 2 vous donne une idée du pourcentage que représentent les frais de scolarité des dépenses générales de fonctionnement.
Le sénateur Andreychuck: Ce qui m'amène à vous parler de la recherche et du développement. Vous avez parlé des problèmes que vous avez, du fait que les entreprises sont peu nombreuses. Or, ce problème n'est pas unique aux provinces maritimes. C'est un problème qui touche toutes les régions d'un pays de 30 millions d'habitants répartis sur un territoire qui, en superficie, fait du Canada le deuxième pays du monde. Notre base industrielle est plutôt restreinte. Nous sommes uniques en ce sens qu'une bonne partie de l'effort de recherche se fait dans les universités. Il serait donc ridicule de penser que les entreprises pourraient en quelque sorte assurer la relève dans ce domaine. Par exemple, les progrès réalisés jusqu'ici dans le secteur de la biotechnologie constituent un pas dans la bonne voie et peut-être qu'il y en aura d'autres, mais nous sommes nombreux à nous demander quel rôle les universités ont joué à ce chapitre. Comment pouvons-nous venir à bout de cette situation?
M. Cameron: De nombreuses études, surtout de l'OCDE, montrent que le Canada accuse du retard par aux autres pays industrialisés, du fait qu'il dépend trop des universités pour la recherche.
Les Maritimes comptent encore plus sur les universités que les autres provinces. On entend souvent dire qu'il y a de moins en moins d'universités qui sont en mesure de soutenir la concurrence dans ce domaine. D'après certains, elles ne seront bientôt plus qu'une douzaine. Nous estimons qu'il devrait y en avoir au moins une dans les provinces maritimes parce qu'elles risquent de perdre un avantage concurrentiel énorme si la région ne compte pas au moins un ou deux établissements de recherche.
Le sénateur Andreychuk: La plupart des fonds que les entreprises consacrent à la recherche servent à établir des partenariats avec les grandes universités ou à financer des programmes uniques. Le problème ne tient pas vraiment aux grandes entreprises, mais aux entreprises petites et moyennes. Quelles mesures devons-nous prendre pour encourager les efforts de recherche dans les petites et moyennes universités et aider celles-ci à obtenir leur juste part des fonds?
M. Cameron: Nous donnons, dans notre rapport, quelques exemples, y compris celui de l'Île-du-Prince-Édouard -- la province la plus petite --, de partenariats qui ont été établis entre une université et le secteur privé. L'Université de l'Île-du-Prince-Édouard est peut-être petite et il est vrai qu'elle se concentre surtout sur les programmes d'études de premier cycle, mais elle abrite également le centre régional de médecine vétérinaire et effectue des recherches fondamentales et appliquées dans ce domaine.
Notre commission doit, en partie, sa raison d'être au fait que nous sommes capables de rationaliser les programmes d'études dans les trois provinces et de mettre l'accent sur les points forts de chacune des provinces pour réduire au minimum les dédoublements entre universités. La taille importe peu quand il est question de concurrence. L'important, c'est d'avoir une stratégie bien ciblée.
Les efforts déployés par le gouvernement fédéral, par exemple, pour établir des partenariats entre ses propres établissements de recherche et les universités, pour récompenser les partenariats entre les universités et le secteur privé, encouragent ce genre d'initiatives.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool: J'ai peut-être deux questions ou deux commentaires, aux pages 14 et 16 de votre rapport, en langue francelaise. À la page 14, sur le sondage des diplômés, j'aime bien les diplômés de 1995, dans les Maritimes. J'ai enseigné au Nouveau-Brunswick dans les écoles secondaires. Je vois là nos jeunes qui sont très débrouillards parce que 64 p. 100 des jeunes des provinces maritimes ont vu à leur financement. Et je vois là aussi la situation financière des parents. Dans le paragraphe du haut, on fait la différence aussi du campus de Shippagan où les étudiants, en plus grande majorité, ont vu à leur propre financement. Ceci est une comparaison avec les autres universités anglaises de l'Atlantique, des Maritimes. Comment ceci se compare-t-il ailleurs au Canada avec les autres étudiants du Canada? Est-ce que vous auriez une réponse à ce sujet?
[Traduction]
M. Cameron: Non.
Le sénateur Losier-Cool: Très bien. J'aime les réponses brèves.
M. Cameron: Le sondage ne visait que les trois provinces Maritimes. Statistique Canada effectue, à l'occasion, des études de ce genre. Toutefois, il n'existe pas de données comparables pour les diplômés de 1995. Nous sommes donc en avance sur les autres provinces à ce chapitre. Il y a des provinces et des universités qui réalisent des sondages. Je sais que la Colombie-Britannique, par exemple, effectue régulièrement des sondages auprès des diplômés. Il y en a peut-être d'autres qui le font. Les données ne sont pas tout à fait comparables, mais si nous pouvions faire ce genre d'études avec Statistique Canada, cela nous serait très utile.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool: Alors cela m'amène peut-être à ma deuxième question et je m'en vais à la page 16 où l'on parle de recherche et où vous demandez qu'on insiste beaucoup sur la recherche. Tout le monde est d'accord. Est-ce que votre Commission supérieure des provinces maritimes, ou encore le groupe des provinces atlantiques, avez déjà pensé à ce qu'on pourrait appeler un projet de recherche? Je pense qu'on ne peut plus demander de faire des recherches sur la question des pêches parce qu'il n'y a plus de poisson. On le sait.
Vous avez vu dans le budget hier qu'il y a une partie pour le tourisme. Sur l'écotourisme, comment une recherche au niveau fédéral pourrait-elle être innovatrice? Cela pourrait apporter des emplois, cela pourrait aider nos diplômés. Notre région est encore si belle et pas encore polluée. Je pense à une autre chose qui me venait tout à l'heure avec cela quand vous avez parlé des diplômés. Quelle sera la contribution économique? Et cela serait intéressant, la contribution économique des diplômés endettés à la société. Et je vous pose toutes ces questions parce qu'au cours de nos discussions hier, de nos rencontres avec les étudiants, on a parlé de cela. Et je voudrais savoir si vous auriez un projet de recherche?
[Traduction]
M. Cameron: J'hésiterais à proposer des projets de recherche précis. Il est préférable de laisser cela aux chercheurs et aux utilisateurs. Il est difficile d'effectuer des recherches dans des domaines qui ne répondent pas vraiment aux besoins du secteur privé et des chercheurs. Nous n'avons pas de place pour la médiocrité.
Il a été question, hier, dans le budget, de la création de la Fondation canadienne pour l'innovation, qui, si j'ai bien compris, contribuera à favoriser la recherche. Elle disposera d'un fonds qui lui permettra de fournir près de 80 millions de dollars de plus, par année, à la recherche. Cette mesure, si elle permet de répondre aux besoins des chercheurs et de l'industrie, et d'encourager l'innovation et la collaboration, sera fort utile.
Mais, pour l'instant, je proposerais qu'on cesse de s'attaquer à l'effort de recherche. Nous sommes en train de régresser au lieu d'avancer. Il est de plus en plus difficile pour les universités, par exemple, de rivaliser pour les subventions de recherche. Nous n'encourageons pas nos jeunes à se tourner vers des carrières qui mettent l'accent sur la recherche et le développement lorsque nous coupons dans la recherche. Nous avons perdu le programme fédéral qui encourageait les jeunes femmes à poursuivre une formation dans des domaines non traditionnels. Toutes ces mesures sont négatives. Si nous pouvions arrêter cette tendance, ce serait déjà beaucoup.
Le sénateur Losier-Cool: J'aimerais bien que quelqu'un prenne les rênes et dise, «Nous voulons faire des recherches sur ce sujet.»
M. Cameron: Je vous conseille de ne pas trop vous aventurer sur cette voie, parce que notre expérience dans ce domaine n'a pas été très concluante. Vous devez communiquer avec la base, dans un sens, pour comprendre quel genre de recherche convient le mieux à une université, dans un secteur donné. Les universités savent très bien quelles sont les recherches qui seraient utiles aux collectivités locales et provinciales, à la région, à l'ensemble du Canada, si les fonds étaient disponibles.
Le sénateur Losier-Cool: Donc, les universités seraient bien placées pour assumer ce rôle.
M. Cameron: Oui.
Le sénateur Andreychuk: Nous avons des centres d'excellence, et maintenant nous avons une Fondation pour l'innovation. Est-ce qu'elle va remplir un rôle différent, ou s'agit-il tout simplement d'une première étape vers la reconnaissance de la recherche et de l'excellence?
M. Cameron: Ce sont deux initiatives formidables. Le réseau des centres d'excellence est unique en ce sens qu'il favorise la recherche dans des domaines particuliers, mais avec la participation de chercheurs de diverses universités qui n'abritent pas nécessairement un centre d'excellence. Il s'agit d'une initiative formidable et unique.
Comme vous l'avez dit, de grandes distances nous séparent. Toutefois, cela n'empêche pas les groupes de chercheurs de travailler ensemble. Toutefois, malgré tous ces efforts, nous continuons de réduire les fonds consacrés à la recherche. Ce que nous donnons de la main gauche, nous le reprenons de la main droite.
Le sénateur Perrault: Monsieur le président, nous avons entendu, lors de nos déplacements, des histoires terribles de la part d'étudiants qui affirment avoir des dettes de 40 000$. Vous avez, à juste titre, qualifié cela de problème majeur. Avez-vous déjà songé à mettre sur pied des programmes de travail communautaire pour aider les étudiants à faire face à leurs obligations? Les États-Unis et d'autres pays y ont pensé.
M. Cameron: C'est une solution qui offre toutes sortes de possibilités. Cette mesure a été proposée dans le rapport du groupe d'étude auquel j'ai participé, en Ontario. L'Université de Dalhousie est la première au Canada à offrir un programme d'aide en utilisant, en fait, les fonds qui proviennent des frais de scolarité et d'autres sources.
Les universités privées aux États-Unis ont l'habitude d'offrir des programmes d'aide qui permettent à l'étudiant d'acquérir de l'expérience pratique en travaillant, par exemple, dans un laboratoire dans son propre domaine de spécialisation, comme aide-enseignant, ou dans une bibliothèque. Les étudiants obtiennent non seulement une aide financière, mais ils ont également la possibilité de travailler, ce qui est bon et pour l'université, et pour leur éducation.
Je crois comprendre qu'au cours des dernières élections à l'Île-du-Prince-Édouard, un des partis politiques a proposé un programme qui consistait à encourager les diplômés du secondaire à effectuer du travail communautaire pour lequel ils seraient rémunérés, ce qui les aideraient à payer leurs frais de scolarité. Je pense qu'il s'agit là d'une excellente idée, mais à la condition qu'on ne les exploite pas, qu'on les paie honnêtement et qu'on leur donne la possibilité de choisir de participer ou non au programme.
Le sénateur Perrault: Est-ce que les étudiants et les étudiantes sont traités également?
M. Cameron: Dans l'ensemble, il y a beaucoup plus d'étudiantes que d'étudiants dans le système. On remarque des changements notables dans certains domaines, comme le droit et la médecine. Toutefois, les femmes continuent d'être peu présentes dans certains secteurs, comme les sciences en général et le génie en particulier.
Le sénateur Perrault: Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dites au sujet des étudiants étrangers. Leur présence nous est très utile. Toutefois, vous dites dans votre mémoire que «ceux qui cherchent à obtenir des visas pour étudier au Canada ont souvent des difficultés avec les autorités fédérales.» Le gouvernement fédéral, à première vue, appuie cette mesure, mais il y a des problèmes. Pouvez-vous nous dire quels sont certains de ces problèmes, quels sont les obstacles qui devraient être supprimés?
M. Cameron: Ce sont surtout les délais entourant la délivrance des visas qui posent problème. L'étudiant présente une demande pour suivre des cours à l'université, est accepté, mais n'entre au Canada que deux mois après le début du programme d'études.
Le sénateur Perrault: Il faut accélérer le processus. C'est le principal problème.
M. Cameron: Oui.
Le sénateur Perrault: Il n'y a pas de frais de scolarité en Australie, seulement des programmes de prêt. Est-ce qu'il serait possible d'instituer un régime comme celui-là au Canada?
M. Cameron: Il faut voir dans quel contexte ce régime a été institué. L'enseignement avait toujours été gratuit. Les frais de scolarité ont été introduits lorsque le gouvernement a mis sur pied le régime de remboursement en fonction du revenu. Ce régime a été mis sur pied dans le but d'accroître le nombre d'inscriptions dans les universités australiennes.
Leur objectif est bien en deçà de ce que nous avons déjà atteint, du point de vue de l'accessibilité. Ils se sont donc rapprochés du modèle canadien. Nous avons déjà atteint notre objectif. Toutefois, si nous adoptions le régime australien, les conséquences ne seraient pas les mêmes.
Le sénateur Perrault: Ce n'est donc ni faisable, ni souhaitable?
M. Cameron: Il faudrait qu'on réduise nos frais d'environ 30 p. 100 pour qu'ils correspondent à ceux qui étaient en vigueur en Australie au moment où le gouvernement a mis sur pied son programme.
Le sénateur Forest: Notre attaché de recherche, qui a eu le temps d'examiner le budget, m'a indiqué qu'il existe deux programmes d'aide pour les étudiants qui doivent rembourser un prêt, une fois leurs études terminées: au cours des six premiers mois, les étudiants ne font aucun paiement pendant qu'ils essaient de trouver un emploi. Toutefois, l'intérêt sur le prêt s'accumule au cours des six premiers mois et doit habituellement être payé à partir du septième mois.
Une fois les six mois écoulés, l'étudiant, s'il est au chômage ou s'il est sous-employé, peut demander une exemption d'intérêt pour une période d'au plus 18 mois, sur cinq ans. Si l'étudiant travaille pendant une année et perd ensuite son emploi, il peut toujours présenter une demande d'exemption d'intérêt. C'est cette période qui a été portée à 30 mois. L'étudiant ne paie pas d'intérêt pendant 36 mois consécutifs. Le gouvernement fédéral assume l'intérêt pendant 30 mois, et non pas pendant 36 mois.
M. Cameron: C'est ce que j'ai cru comprendre, mais je n'osais pas contredire le sénateur.
Le sénateur Forest: Vous auriez dû le faire. C'est le rôle des témoins.
Le sénateur DeWare: J'aimerais vous féliciter pour votre mémoire. J'ai fait partie de la Commission il y a 11 ans. Elle existe donc depuis longtemps.
Je trouve la recommandation no 16 fort intéressante. Nous avons eu l'occasion d'entendre le témoignage de professeurs d'université il y a quelques semaines. Ils ont dit que leurs fonds de recherche ont diminué au point qu'ils ont de la difficulté à recruter des jeunes étudiants titulaires d'un doctorat. Comme les fonds diminuent, les étudiants s'en vont. C'est ce qu'on appelle un exode de cerveaux. Ils se rendent aux États-Unis, outre-mer, ainsi de suite.
Les professeurs nous ont également dit qu'ils doivent également, en plus de faire de la recherche, donner des cours, que le nombre d'étudiants dans les salles de classe a augmenté au point où ils doivent délaisser la recherche pour se consacrer davantage à l'enseignement. L'effort de recherche au Canada a beaucoup diminué; il est presque au point mort.
Les professeurs ont affirmé qu'ils ont besoin de 1,4 p. 100 du PNB pour poursuivre leurs activités, même si ce chiffre est inférieur à celui de certains autres pays, qui consacrent 2 p. 100 ou plus de leur PNB à la recherche. La recommandation no 16 nous aiderait à garder nos jeunes au Canada. Elle les aiderait à se lancer dans la recherche. Je crois que c'est une excellente recommandation.
Que pouvons-nous faire pour aider les jeunes qui entreprennent leur première année d'études à l'université? Les banques nous ont cité un pourcentage -- je ne sais pas si un des membres du comité s'en souvient, mais nous pourrions le retrouver. Elles ont constaté qu'au bout des deux premières années, les étudiants abandonnent leurs études après avoir accumulé une dette de 6 000$, parce qu'ils estiment ne pas être en mesure de continuer. Comment pouvons-nous les aider?
Vous avez dit que nous risquons de commencer à perdre des étudiants, que les taux d'inscription vont diminuer. Que pouvons-nous faire pour aider ces étudiants pendant les deux premières années de leurs études?
M. Cameron: Le groupe d'étude en Ontario s'est également penché sur cette question. Il a recommandé, entre autres, et le gouvernement de l'Ontario a accepté sa proposition, du moins en partie, qu'on mette de côté un pourcentage des frais de scolarité, s'ils continuent d'augmenter, pour créer un fond d'aide pour les étudiants.
Il me semble qu'il est dans l'intérêt du gouvernement fédéral de prévoir des mesures, comme celles qui ont déjà été annoncées dans le budget, pour alléger la dette ou reporter le remboursement du prêt. De cette façon, si les étudiants sont obligés d'emprunter, ils pourront au moins poursuivre leurs études jusqu'au bout et non pas les abandonner à mi-chemin. Nous sommes conscients de ce problème.
Ce que nous ne savons pas, et c'est ici que vous pouvez nous être utiles, c'est combien d'étudiants reprennent leurs études. Vous pourriez nous aider à encourager les gouvernements et les établissements comme le nôtre à établir un système de suivi pour compiler des données sur la mobilité des étudiants, les décrocheurs, les étudiants qui reprennent les études, que ce soit par le biais d'un numéro d'assurance sociale ou d'un numéro d'identification. Cela nous aiderait à élaborer des politiques d'intérêt public dans ce domaine.
Le sénateur DeWare: La Commission a-t-elle déjà envisagé la possibilité d'établir un passeport pour les étudiants?
M. Cameron: Oui. C'est ce que nous sommes en train de faire. Les universités des quatre provinces de l'Atlantique, l'Atlantic Association of Universities, est en train de mettre sur pied un programme de reconnaissance des crédits menant à l'obtention d'un diplôme universitaire, que les cours soient suivis dans les provinces de l'Atlantique ou ailleurs. Les étudiants seront munis d'un passeport qui leur permettra de transférer leurs crédits. Ils obtiendront ainsi un diplôme unique qui sera offert part l'association plutôt que par une institution autonome.
Le sénateur DeWare: Ils seraient transférables?
M. Cameron: Absolument. Vous pourriez faire une année d'études à l'Université de la Colombie-Britannique, suivre trois cours au University College du Cap-Breton, d'autres cours encore à l'Université du Nouveau-Brunswick et obtenir un diplôme de l'association.
[Français]
Le sénateur Lavoie-Roux: Monsieur Godbout, vous parlez français?
M. Godbout: Oui.
Le sénateur Lavoie-Roux: Hier, au moment du budget, il y avait des gens qui s'attendaient à ce qu'il y ait une augmentation dans les transferts de paiements pour l'éducation, pour la santé. Mais parlons de l'éducation, on est en éducation. Vous êtes peut-être incapable de me répondre à ce moment-ci, mais si cela nous parvenait plus tard, ce serait la même chose. Dans les cinq ou six dernières années, au moment où on a commencé à couper dans l'enseignement supérieur, dans les universités et tout cela, est-ce que vous auriez un tableau des mesures d'austérité que les provinces ont prises? On va parler des provinces maritimes, des mesures que vos provinces ont prises. Tout le monde essayait de diminuer les dépenses et cetera. Quelle partie de ces mesures sont dues aux transferts que les provinces ont faits aux universités, de la diminution des transferts de paiements. Est-ce que vous avez un tableau à cet effet?
M. Godbout: Il est assez difficile de répondre directement, mais on a une indication dans le rapport, de l'envergure des diminutions dans les transferts fédéraux et de ce que les provinces ont été obligés de réduire. Et puis on indique, au cours de la période de 1983 à 1984, à la page 6 en anglais que les transferts fédéraux en dollars pour l'éducation postsecondaire ont augmenté de 25 millions de dollars durant cette même période. Les transferts provinciaux aux universités ont augmenté de 119 millions. Alors je pense que cela donne une indication de l'effort des provinces et des mesures qui ont peut-être été prises au niveau fédéral. Les provinces auraient pu faire mieux si les transferts avaient augmenté davantage. Si les transferts fédéraux aux provinces avaient...
Le sénateur Lavoie-Roux: Il y en a même qui ont diminué.
M. Godbout: Cela, c'est la portion pour le postsecondaire seulement.
Le sénateur Lavoie-Roux: Il y a des transferts en éducation, la totalité des transferts en éducation a diminué en provenance du fédéral et c'est un peu ce qui a causé le problème, et par voie de rebondissement, les provinces vers les institutions et ainsi de suite. À différents endroits, on nous a souvent parlé de cela. On espérait que dans le budget d'hier, il y ait peut-être un redressement qui aurait enfin permis de solutionner une partie des problèmes. Cela prendrait beaucoup de sous pour les solutionner tous.
La deuxième chose, je regardais cela, vous avez un beau titre, vous représentez les universités. Il y a au moins deux universités francophones dans les Maritimes. Il y a Moncton et Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse. Est-ce qu'il y en a d'autres?
M. Godbout: Non.
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils ont des problèmes particuliers ou s'ils n'ont pas de problèmes? Jamais personne n'en parle.
M. Godbout: Je pense qu'ils ont des problèmes. L'université de Moncton, par exemple, mentionne l'endettement des étudiants. L'université telle qu'elle est un peu s'inquiète de la diminution de la population étudiante. Je pense qu'à ce moment-ci, ils sont très inquiets à ce sujet surtout. Ils essaient de prendre les mesures nécessaires pour le recrutement.
En ce qui concerne la mobilité des étudiants, la mesure que la province du Québec a prise peut avoir un impact sur l'Université de Moncton, peut-être un impact positif, selon les coûts. Les étudiants vont décider. Mais peut-être que certains francophones hors Québec, les Nouveau-Brunsickois vont demeurer au Nouveau-Brunswick et les étudiants de Nouvelle-Écosse vont demeurer chez eux parce que les frais de scolarité à l'Université de Moncton sont encore assez élevés. Mais je pense qu'ils sont inquiets de la diminution de la population francophone et de leur population étudiante.
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce que la diminution des étudiants francophones serait surtout due au fait qu'ils s'en vont au Québec ou est-ce simplement une diminution de la population?
M. Godbout: Je pense que c'est surtout une question d'endettement. Mais l'étude de la commission devrait pouvoir fournir l'information au sujet de cette cause. Mais moi je pense que l'endettement peut être la cause principale.
Le sénateur Lavoie-Roux: Parce qu'il n'y a pas personne...
[Traduction]
Le président: Nous réglerons tout cela plus tard. Nous tenons à vous remercier pour votre excellent exposé. Si les sénateurs ont d'autres questions à vous poser, nous vous les ferons parvenir. Nous espérons que vous allez y répondre. Si vous souhaitez aborder d'autres points, surtout après avoir examiné le budget, n'hésitez pas à communiquer avec nous.
Honorables sénateurs, nous accueillons maintenant Mme Jacqueline Thayer-Scott, qui est la présidente du Comité des organismes d'éducation nationale.
Madame Thayer-Scott, vous avez la parole.
Mme Jacqueline Thayer-Scott, présidente, Comité des organismes d'éducation nationale: J'ai trouvé la discussion fort intéressante. Je préside un organisme qui dessert une région où plus de la moitié des foyers ont des revenus inférieurs au seuil de pauvreté national et où l'étudiant diplômé a une dette moyenne de 16 000$. Je n'ai jamais vu en cinq ans, une affiche invitant les étudiants à passer leur congé d'études en Floride. J'ai trouvé la discussion sur les programmes d'aide aux étudiants très intéressante.
C'est à titre de présidente du Comité des organismes d'éducation nationale que je comparais devant vous aujourd'hui. Je sais que notre organisme n'est pas tellement connu. Je vais donc vous en dire quelques mots. Nous sommes en fait une coalition nationale d'organismes d'éducation et de formation, qui a vu le jour il y a cinq ou six ans. Nous nous intéressons de près aux questions de perfectionnement de la main-d'oeuvre. Nous avons eu l'occasion de travailler sur ce dossier avec d'autres intervenants au sein de la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre.
Beaucoup de nos membres vous sont très connus. L'Association des collèges communautaires du Canada, l'Association des universités et collèges du Canada, que je représente au sein de ce groupe, l'Association canadienne des administrateurs et administratrices scolaires, l'Association pour l'éducation permanente dans les universités du Canada, la Canadian Coalition of Community-based Trainers, l'Association canadienne des commissions/conseils scolaires, la Fédération canadienne des enseignantes et enseignants et l'Association nationale des Collèges Carrières. En d'autres termes, nos membres représentent toute la gamme des associations d'enseignement et de formation publiques et privées nationales, de la maternelle à la 12e année en passant par le cycle postsecondaire et diverses formes d'éducation des adultes.
Nous avons été la première entité à regrouper toutes ces associations. Il y a eu plusieurs mouvements ces cinq dernières années, mais nous représentons de nouveau le seul regroupement de toutes ces associations. Quelques groupes de défense sont également membres du COEN: l'Association canadienne pour la reconnaissance des acquis professionnels, association relativement récente, la Canadian Association for Adult Education, qui a une longue tradition de défense des intérêts des adultes, et le Rassemblement canadien pour l'alphabétisation. L'Association canadienne d'éducation siège au sein de notre groupe en tant qu'observateur, le COEN étant essentiellement un groupe d'élaboration de politiques.
Comme vous pouvez l'imaginer, la préparation de tout genre de position pour un groupe comme le nôtre signifie que chacune de ces associations membres doit approuver la position présentée. Alors que vous entendrez le témoignage de beaucoup de nos membres à propos de certaines des questions dont vous êtes saisis, je présente ici un document consensuel portant sur toute une gamme de sujets.
Je vais brièvement parcourir notre mémoire pour tout d'abord souligner que le secteur national de l'enseignement et de la formation a examiné des documents publiés par ce comité au sujet de certaines questions et qu'il souscrit aux points de vue présentés.
Si vous avez une copie du mémoire, à la page 3, nous énumérons les opinions partagées par notre comité, notamment, que l'enseignement postsecondaire au Canada est en période de crise. Le mot «crise» est bien sûr très fort et il faut éviter tout risque d'exagération. Toutefois, il suffit d'examiner les très fortes pressions démographiques, économiques et sociales qui s'exercent sur l'enseignement supérieur et postsecondaire en général, pour s'apercevoir que l'on peut vraiment parler d'une crise. Certains de ces points seront repris au cours de notre discussion.
Nous sommes également convaincus qu'il est logique que le gouvernement fédéral joue un rôle en matière d'enseignement postsecondaire, car celui-ci prépare les jeunes et les étudiants plus âgés à entrer sur le marché du travail et à devenir des citoyens à part entière, deux éléments qui relèvent justement du gouvernement.
Nous convenons également qu'il faudrait prévoir des principes nationaux pour l'enseignement postsecondaire. Au cours de nos discussions, nous avons établi certains de ces principes qui, selon nous, sont partagés par l'ensemble du secteur de l'enseignement et de la formation, ainsi que par toutes nos associations membres: l'enseignement postsecondaire doit être abordable et accessible; la mobilité des étudiants d'une province à l'autre doit être possible; le système d'enseignement postsecondaire doit être polyvalent de manière que les Canadiens puissent poursuivre leurs études dans leur propre pays; les cours similaires et équivalents doivent être transférables d'un établissement à l'autre du Canada; l'enseignement postsecondaire doit offrir une vaste gamme de champs d'étude; l'enseignement postsecondaire doit offrir des programmes interdisciplinaires, des possibilités de mise en application des connaissances et de stages en milieu de travail; une partie de l'enseignement postsecondaire doit être subventionnée par l'État; la presque totalité de l'enseignement postsecondaire doit être subventionnée par des organes publics sans but lucratif ou par des organismes d'État autonomes.
Il s'agit de principes assez vastes et vous voudrez peut-être en discuter davantage à la fin de cet exposé.
Nous sommes également d'accord avec certains des points relevés dans des documents déjà publiés par le comité, notamment la nécessité de réviser la relation entre l'enseignement et le marché du travail. L'enseignement et la formation sont -- et continueront d'être -- les principaux moyens de créer une société et une économie innovatrices et productives. Nos membres, parce qu'ils s'intéressent aux questions de perfectionnement de la main-d'oeuvre, sont d'avis qu'il faut explorer davantage la nature de la transition entre les études et le milieu du travail et essayer d'améliorer cette relation au profit des étudiants canadiens.
Nous croyons qu'il faut étudier et structurer le rôle que les entreprises et les organismes communautaires doivent jouer dans l'enseignement postsecondaire. Il ne s'agit pas pour eux d'apporter uniquement un appui financier, mais plutôt de participer aux processus de planification, d'offrir aux étudiants des possibilités d'apprentissage en milieu de travail et d'aider les enseignants du secteur public et privé à contrôler et évaluer leurs programmes.
Nous n'accordons pas une importance égale à toutes les questions soulevées par les sénateurs. Pour les membres du COEN, il est urgent de comprendre comment bien appliquer et utiliser au maximum la technologie de l'information dans l'enseignement postsecondaire pour faciliter les échanges d'information et la collaboration entre les établissements et pour faire face aux modifications que connaît la profession de l'enseignement; il est aussi extrêmement important de savoir comment commercialiser et exporter les biens et services de l'enseignement postsecondaire. J'aimerais revenir sur ce point au cours de notre discussion, si vous le permettez. Il est enfin urgent de savoir tirer parti au maximum de la diversité et des points forts de tous les responsables de l'enseignement postsecondaire au Canada, tant dans les établissements publics que privés, et de contribuer de façon directe et originale à l'unité nationale par le dialogue et le partage de valeurs.
Beaucoup de ces questions ont été récemment explorées dans le cadre d'un rapport auquel nous allons faire référence un peu plus tard. À l'origine, nous devions présenter ce mémoire plus tôt, mais le comité a dû se pencher sur d'importantes questions, ce qui explique que nos audiences ont été reportées. Par conséquent, le rapport auquel nous allons faire référence un peu plus tard dans notre mémoire a été publié il y a une ou deux semaines; il s'agit d'une étude -- qui a duré une année -- sur le secteur de l'enseignement et de la formation au Canada et sur les façons dont le secteur peut mieux résoudre certains des problèmes économiques auxquels il fait face.
Si vous le désirez, monsieur le président, nous pourrons faire parvenir des exemplaires de ce rapport aux sénateurs.
Le président: Certainement.
Mme Thayer-Scott: Comme vous pouvez vous en douter, nous ne partageons pas nécessairement certaines des opinions exprimées par les membres du comité ou figurant dans des documents du comité. Par exemple, nous ne croyons pas, en général, qu'il existe des problèmes graves au niveau de l'accessibilité -- au sens strict du terme --, de la souplesse et de l'imputabilité dans le secteur de l'enseignement postsecondaire. Nous reconnaissons que certains problèmes se posent, mais pensons que parfois l'analyse n'est pas aussi complète qu'elle pourrait l'être. On laisse entendre que les problèmes sont créés et perpétués par le système lui-même, mais il faut souligner la présence d'autres intervenants.
Dans une très grande mesure, l'enseignement postsecondaire de notre pays a été étroitement lié au gouvernement, qu'il s'agisse des gouvernements provinciaux, fédéral ou autres, à divers moments. D'après nous, ce qui empêche surtout ce secteur de devenir plus compétitif au plan international et national, ce sont les règlements trop restrictifs imposés par le gouvernement, les normes rigides de financement, l'ingérence de l'État dans les mécanismes de négociation collective et les politiques désuètes qui entravent l'accessibilité, empêchent toute souplesse et ne définissent pas un cadre d'imputabilité valable.
Nous remarquons que souvent, les établissements privés d'enseignement et de formation ont la réputation d'être plus accessibles et responsables de leurs actes. Ceux qui appartiennent aux établissements publics d'enseignement et qui connaissent bien les questions de perfectionnement de la main-d'oeuvre sont d'accord à ce sujet, car justement les établissements privés n'ont pas à subir les réglementations que les gouvernements ont imposées aux établissements publics. Nous ne prétendons pas que les établissements publics d'enseignement postsecondaire n'ont aucune responsabilité à cet égard; nous disons simplement que les intérêts des deux secteurs ont été si entremêlés au fil des ans qu'il est difficile de cerner les problèmes systémiques, qui sont effectivement dus à l'ingérence et à la réglementation du gouvernement. Selon nous, c'est dans un tel contexte qu'il faut analyser toute réforme envisagée.
Autre point au sujet duquel nous ne sommes peut-être pas d'accord avec toutes les opinions exprimées, bon nombre de nos membres rejettent l'affirmation selon laquelle les établissements d'enseignement supérieur doivent trouver des moyens originaux de régler leurs problèmes financiers. Tel qu'il a été mentionné dans certaines de vos discussions, particulièrement dans l'analyse économique de le sénateur Andreychuk, il est très difficile de trouver d'autres sources de financement, par exemple auprès de l'entreprise privée, dans une région où il n'existe pratiquement pas d'infrastructure commerciale ou industrielle digne de ce nom et où il n'y a pas d'entreprises canadiennes.
La créativité est une solution que nous encourageons certes chez tous nos membres. Cependant, elle soulève d'innombrables questions sur la nature très publique des établissements communautaires, sur l'incidence des conventions collectives au sein de ces établissements et sur l'ingérence, à titre de tierce partie, du gouvernement dans les conventions collectives, sur les compétences et les ressources requises au sein des établissements pour justement faire preuve de créativité. Nous maintenons que le l'enseignement postsecondaire est une entreprise communautaire.
Il ne faudrait pas confondre créativité et responsabilité. Ce n'est pas uniquement au système de l'enseignement supérieur que doit revenir la responsabilité des problèmes financiers et l'obligation de les résoudre. Nous ne voulons pas dire que la créativité est inutile, mais il faut reconnaître que les établissements d'enseignement publics sont en grande partie le fruit des politiques publiques qui les ont mis sur pied et qui les ont financés. Il faut savoir également que la générosité du secteur privé et des entreprises n'est pas la même selon que l'établissement se trouve dans une grande ville ou dans une région rurale ou isolée.
Tous nos membres ne sont pas d'accord, par ailleurs, qu'il est essentiel et suffisant d'avoir une stratégie nationale en matière d'enseignement supérieur. Établir une stratégie nationale sans tenir compte des programmes nationaux, sociaux et industriels risque d'aggraver encore plus la crise actuelle.
On dit que la qualité de l'enseignement supérieur décline. C'est à cette assertion que les membres s'opposent le plus. La gamme des services a certes diminué, mais aucune étude ne permet de dire que la qualité en a souffert. En fait, étant donné qu'aucune politique ne la définit, la qualité est impossible à mesurer. On peut supposer que la qualité s'évalue en fonction de l'atteinte des objectifs fixés. Toutefois, comme l'ont fait remarquer un certain nombre de sénateurs, les objectifs de l'enseignement supérieur ne sont définis dans aucune politique publique. À notre avis, il faut d'abord en définir avant de pouvoir se prononcer sur la qualité de l'enseignement.
Nous aimerions vous proposer d'autre matière à réflexion. D'autres témoins en ont peut-être déjà parlé.
Les diverses tendances qui influent sur l'enseignement et la formation prodigués au Canada sont d'une importance incroyable. Dans le rapport que nous avons publié récemment et que nous vous ferons distribuer, vous trouverez une excellente analyse de l'incidence de certaines d'entre elles.
Pour vous le résumer très brièvement, le rapport fait ressortir que le nombre d'emplois a diminué dans un grand nombre de secteurs, surtout dans le secteur manufacturier et primaire. Il note l'apparition de nouveaux emplois, différents, dans le domaine des industries fondées sur la technologie et le savoir, en particulier dans le domaine des logiciels et de l'électronique.
Il fait aussi état de la nécessité de reconnaître d'autres formes de travail, soit le bénévolat, le travail au sein d'organismes internationaux et mondiaux, et ainsi de suite. Le nombre de jeunes qui entrent sur le marché du travail diminue, la population active vieillit, elle compte davantage de femmes, beaucoup de jeunes Autochtones et des membres de minorités visibles. Tous ces nouveaux éléments lancent des défis nouveaux et imposent des exigences très différentes pour la survie à long terme du secteur canadien de l'enseignement et de la formation.
À notre avis, il faut que les gouvernements reconnaissent qu'il n'est plus possible de fixer les normes pour ce secteur comme ils le faisaient naguère. Ainsi, on entend encore parfois les ministres de certaines provinces dire qu'ils n'autoriseront pas l'ouverture de certains genres d'établissements d'enseignement dans leur province. La plupart de ces établissements sont déjà présents dans la province grâce à Internet. Les provinces ne peuvent pas les empêcher de s'implanter.
À mesure que progresse la mise en oeuvre de l'ALÉNA, certains nouveaux règlements étant prévus cette année, les effets de la concurrence sur notre système d'enseignement supérieur seront plus palpables. Pourtant, d'après notre sondage, aucun gouvernement ou groupe de chercheurs n'a analysé les conséquences de l'ALÉNA ou de l'Accord sur le commerce intérieur sur le système d'enseignement et de formation. Ce secteur fait vivre plus d'un million d'employés à temps plein au Canada. Nous estimons qu'il y a peut-être eu là un léger oubli que nous vous encourageons vivement à réparer.
En résumé, sénateurs, nous faisons face à de nombreux défis. L'un consiste à développer des marchés d'exportation pour bon nombre de nos produits. Notre clientèle n'est tout simplement pas assez nombreuse pour financer l'infrastructure actuelle. À mesure que s'intensifie la mise en oeuvre de l'ALÉNA, de nombreux géants de l'enseignement et de la formation des États-Unis, tant publics que privés, pourront répondre à de nombreux besoins canadiens à un coût marginal. S'il importe que nous conservions un système fort et sain d'enseignement aux adultes et d'enseignement supérieur, il faudra prendre plusieurs mesures pour améliorer les perspectives de compétitivité et de viabilité à long terme du secteur.
C'est ici que s'arrête mon exposé, monsieur le président. Le mémoire est plus long, mais je sais que le comité a pris un léger retard et j'aimerais voir le temps de répondre à vos questions et de discuter avec vous.
Le sénateur Lavoie-Roux: On peut lire, à la page 3 de votre mémoire: «Il est logique que le gouvernement fédéral joue un rôle en matière d'enseignement supérieur, car celui-ci prépare les jeunes à entrer sur le marché du travail et à devenir des citoyens à part entière, deux éléments qui relèvent justement du gouvernement». Je ne suis pas sûre d'être d'accord avec cette affirmation. Actuellement, en enseignement supérieur, le gouvernement fédéral voit à la recherche et au développement, aux Autochtones en raison de son obligation particulière à leur égard, au financement des études grâce à des prêts aux étudiants, et ainsi de suite. Si l'on pousse le raisonnement jusqu'au bout, il faudrait aussi qu'il s'implique aux niveaux primaire et secondaire parce que nous avons vu que la plupart des étudiants arrivent sur le marché du travail à la fin de leurs études secondaires. Ce n'est pas la majorité qui fait des études universitaires. Le même raisonnement s'appliquerait donc ici.
De plus, en ce qui concerne la formation de citoyens à part entière, il vaudrait mieux commencer dès le primaire plutôt que d'attendre au niveau universitaire. Quoiqu'il en soit, si ce sont là les deux seules raisons que vous pouvez invoquer pour justifier votre position, je ne suis pas tout à fait d'accord.
À la fin du mémoire, vous posez aussi des questions sur lesquelles vous êtes passée assez vite. Ainsi, vous dites qu'il y a un grand nombre de questions qui restent sans réponse et qui n'ont pas été débattues. En ce qui concerne les normes et les principes nationaux régissant les examens d'entrée, vous demandez: «Qui est en faveur de normes nationales et pourquoi? Qui n'est pas d'accord? Qui devrait établir les normes nationales en matière d'examens d'entrée et d'enseignement supérieur?»
S'il faut faire des recommandations, autant en faire qui rapprocheront les Canadiens, plutôt que de les diviser davantage. J'aimerais que vous précisiez votre pensée au sujet de la norme nationale, de qui devrait se charger de l'élaborer et du fait qu'elle sera dictée en quelque sorte par tout le contexte, y compris par les États-Unis.
Mme Thayer-Scott: Pour en revenir à votre premier point, la plupart de nos membres diraient effectivement que le gouvernement fédéral a, en règle générale, un plus grand rôle national à jouer sur le plan de l'enseignement. Ils seraient d'accord avec votre hypothèse selon laquelle une partie de cette formation s'amorce aux niveaux primaire et secondaire. Comme vous le savez, nous sommes un des seuls pays membres de l'OCDE à ne pas avoir d'office national de l'enseignement. Pourquoi sa création pose-t-elle un problème?
Le sénateur Lavoie-Roux: Il conviendrait tout d'abord de s'interroger sur la raison pour laquelle nous n'en avons pas.
Mme Thayer-Scott: Les arrangements constitutionnels canadiens ont toujours fait obstacle à cet égard.
Je vous donne un exemple du genre de problème auquel nous sommes souvent confrontés comme association. Nous travaillons de près avec les nouveaux conseils sectoriels mis sur pied par un grand nombre d'entreprises canadiennes grâce auxquels le patronat et le syndicat se concertent pour élaborer des politiques en matière de ressources humaines et pour répondre à ces besoins. En fait, l'étude que nous venons de terminer et dont je vous ai parlé a été entreprise suite à ce que nous avaient dit ces organismes, il y a trois ou quatre ans.
D'autres employeurs nous disent que leur plus grande source de frustration est la grande fragmentation du système d'enseignement et de formation. Si vous avez des usines en Ontario, en Colombie-Britannique et au Nouveau-Brunswick, vous devez composer avec trois compétences provinciales distinctes qui ont toutes un mode différent d'organisation et de mise en oeuvre des divers régimes de formation. C'est sans compter les compétences partagées entre gouvernements et entre établissements, de même que d'autres formes de dévolution.
À notre dernière réunion, le Conseil des ressources humaines de logiciel -- selon lequel il est pressant de régler ces questions à l'échelle nationale -- s'est plaint et s'est dit extrêmement frustré. D'après ses membres, auparavant, ils pouvaient s'adresser au ministère du Développement des ressources humaines du Canada et, au bout de six ou huit mois de négociations, ils arrivaient à s'entendre avec des courtiers au sujet d'une action nationale. Maintenant, il leur faut cogner à dix portes différentes qui ont toutes des systèmes différents. C'est extrêmement frustrant. En toute franchise, il est de plus en plus facile pour eux de s'adresser à des fournisseurs des États-Unis parce qu'ils n'ont pas, à ce moment-là, à surmonter les obstacles avec lesquels sont aux prises les établissements d'enseignement et de formation canadiens. C'est un véritable problème, un problème avec lequel peuvent sympathiser ceux d'entre nous qui participent au perfectionnement de la main-d'oeuvre.
Nous sommes conscients que notre opinion ne changera pas les arrangements constitutionnels nationaux. C'est pourquoi nous nous sommes concentrés davantage sur ce que nous pouvons faire au sein du secteur pour contourner le gouvernement, pour contourner les obstacles, car le Canada n'a tout simplement pas les moyens d'en faire les frais.
Voilà qui nous amène fort naturellement à la deuxième question concernant les normes et les principes nationaux régissant les examens d'entrée et l'enseignement supérieur. La plupart des consommateurs de services d'enseignement et de formation en réclament, qu'ils soient des entreprises, des commerces ou des parents inquiets du fait que leurs enfants instruits dans une province ne peuvent se trouver du travail dans une autre province.
Dans le secteur de l'enseignement et de la formation, on est de plus en plus déterminé à régler cette question. En fait, vous connaissez peut-être le document traitant des normes de formation qui a été publié, il y a un an environ, par la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre. Le COEN et tous ses membres ont participé activement à l'élaboration de ces normes de formation, tout comme ils ont pris part à l'élaboration des normes récemment adoptées en matière d'évaluation et de reconnaissance des acquis professionnels.
Nous aimerions voir ce genre de normes nationales adoptées volontairement. Encore une fois, elles déplaisent parfois aux provinces qui veulent y ajouter leur grain de sel en changeant une ligne quelque part, mais au sein même du secteur, on est de plus en plus disposé à régler certaines de ces questions parce c'est ce que réclament les consommateurs de nos services.
Le sénateur Lavoie-Roux: En termes d'enseignement, je suis en faveur de tout cela, si l'industrie veut bien se concerter avec les provinces et planifier tout ce que vous avez décrit. Toutefois, c'est une question très délicate. Le système actuel n'est pas né d'un simple caprice constitutionnel. La culture a beaucoup d'influence. C'est pourquoi il faut aborder cette question avec un soin tout particulier.
Mme Thayer-Scott: Je comprends ce que vous en train de dire. La question est effectivement extrêmement délicate. Je me contente de souligner qu'il existe d'âpres divergences à ce sujet au pays. Bien que ce ne soit pas notre rôle d'avoir des opinions particulières à ce sujet, nous devons composer avec les répercussions, c'est-à-dire avec des consommateurs mécontents et des clients qui ne comprennent pas pourquoi il est si difficile d'obtenir les services demandés au Canada.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je crois qu'il existe d'autres solutions.
Mme Thayer-Scott: Nous sommes nombreux à y consacrer beaucoup d'heures. Je suis d'accord.
Le sénateur Perrault: Voilà un document fort utile. Les sujets dont vous traitez nous intéressent vivement. Vous parlez de la coopération avec le secteur privé à la page 11. Vous laissez entendre qu'il existe des possibilités, de même que des écueils. De quelle sorte d'écueils parlez-vous?
Nous avons rencontré les porte-parole d'un collège de l'Ouest du Canada. Deux banques ont collaboré pour lui fournir des ordinateurs. L'un se trouve à l'extrémité nord de l'immeuble, l'autre à l'extrémité sud. Tout ce que demandent les banques en retour, c'est que, chaque matin, un bref message publicitaire paraisse à l'écran lorsque les ordinateurs sont mis en marche. Il s'agit de la Banque royale et de la Banque canadienne impériale. Elles ont certes les moyens de faire des dons. Elles sont plutôt en bonne santé actuellement. Il n'est certes pas nécessaire d'organiser une levée de fonds pour leur venir en aide.
Le programme de coopération a souvent remporté beaucoup de succès. Pouvez-vous nous définir les domaines où il pourrait y avoir des écueils?
Mme Thayer-Scott: J'en vois probablement deux. La première objection de nos membres aurait trait à l'âge auquel les étudiants sont exposés à ce genre de publicité. La plupart des enseignants et des formateurs ne s'opposeraient pas à de la publicité au niveau postsecondaire parce que les étudiants sont des adultes ou sur le point de le devenir. Par contre, le désaccord risque d'être un peu plus vif au niveau secondaire parce que d'aucuns voient cette période comme une transition vers le marché de travail, et ainsi de suite. Au niveau primaire, on serait unanime à dire qu'il ne devrait pas y avoir de publicité. Les enfants n'ont pas encore le discernement voulu pour faire la différence entre les divers messages qui leur sont destinés.
Bien que l'entreprise ait toujours un rôle à jouer dans l'enseignement au primaire, nous estimons qu'il faut appliquer des normes et des critères sévères à ce genre de coopération.
Le sénateur Perrault: L'avènement de la nouvelle technologie a obligé plusieurs commissions scolaires à conclure des ententes dans le cadre desquelles ces entreprises fournissent les programmes aux étudiants en échange d'espaces publicitaires. Êtes-vous opposés à cette idée, en règle générale?
Mme Thayer-Scott: Oui, en règle générale, nous y sommes opposés, en ce sens qu'on n'a pas encore vraiment réfléchi dans le secteur aux protocoles et au code d'éthique qu'il faudrait prévoir. Vous parlez ici d'élèves très jeunes.
Le sénateur Perrault: De toute évidence, ces entreprises veulent inciter les jeunes à consommer divers produits, n'est-ce pas?
Mme Thayer-Scott: C'est exact. La clé ici réside dans une certaine forme de surveillance. De plus en plus, on constate le besoin d'assurer ce genre de suivi en radiodiffusion publique. Je crois que les parents et les enseignants voient le même genre d'écueils dans les salles de classe d'élèves aussi jeunes.
Le sénateur Perrault; Avez-vous élaboré une politique détaillée à cet égard au pays?
Mme Thayer-Scott: On s'est peu penché sur la question jusqu'ici. On commence à s'y intéresser. Il ne faudrait pas grand chose pour mousser l'intérêt.
Le sénateur Perrault: Il faudrait peut-être le faire.
Mme Thayer-Scott: Oui.
Le sénateur Perrault: Nous avons en place un accord de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique. Par contre, nous butons continuellement contre des barrières internes au libre-échange. Il existe aussi au Canada beaucoup de barrières internes à l'équivalence des crédits universitaires.
Mme Thayer-Scott: Pas si vous allez au University College du Cap-Breton. Évidemment, je parle ici en tant que membre de cet établissement.
Le sénateur Perrault: Le fait qu'une université refuse de reconnaître les crédits d'une autre université et qu'elle oblige l'étudiant à reprendre le cours ne pose-t-il pas un problème? Nous aidons des familles à se réinstaller partout au Canada. Les parents ne tardent pas à découvrir que leurs enfants sont parfois obligés de reprendre certains cours parce qu'une province refuse de reconnaître l'enseignement d'une autre. Croyez-vous que ce soit-là un problème grave?
Mme Thayer-Scott: Cela demeure un problème grave mais certaines initiatives sont prises pour y remédier. Dans bien des provinces, y compris celle-ci, les universités se sont entendues pour accepter les crédits de première et de deuxième années.
Le sénateur Perrault: C'est un pas dans la bonne voie.
Mme Thayer-Scott: Là où la transition demeure le plus difficile, c'est d'un collège à l'autre et d'une université à l'autre. Je ne prétends pas que tous les problèmes aient été réglés au niveau universitaire mais on y travaille.
Au niveau collégial, il y a des problèmes. Par exemple, certains collèges communautaires en Ontario ne reconnaissent pas les programmes d'autres collèges communautaires et c'est sans doute le cas dans bien des provinces.
Le sénateur Perrault: C'est ce que nous avons constaté. C'est une question très délicate.
Mme Thayer-Scott: Je pense que nous avons encore du chemin à faire pour régler les problèmes d'articulation du collège à l'université et vice-versa, car de plus en plus, c'est ainsi que fonctionnent les étudiants.
J'ai mentionné tout à l'heure le Conseil des ressources humaines de logiciel. Il s'agit d'un cas intéressant. Le Conseil a commencé à établir les profils des compétences recherchées par les employeurs dans cette industrie en particulier. À l'occasion d'un sondage auprès des employeurs, on leur a demandé de décrire le candidat idéal. Ils ont indiqué qu'il devait détenir un baccalauréat d'une université, puis avoir fait un an d'études dans un collège qui offre un programme de haute technologie. Je comprends pourquoi ils trouvent cette combinaison si intéressante mais dans la pratique cela n'est pas facile à accomplir pour un étudiant sans qu'il doive y consacrer beaucoup de temps et d'argent.
Le sénateur Perrault: Certains commentateurs, dont des journalistes, considèrent que la qualité de l'enseignement est en train de diminuer à cause de ce problème d'argent, que les classes sont trop grandes et que nous frôlons la crise. Est-ce le cas selon vous dans les provinces atlantiques et maritimes?
Mme Thayer-Scott: Je pense qu'en ce qui concerne la taille des classes, les provinces atlantiques et maritimes ont une excellente fiche. Tous les établissements de la région qui ont mis l'accent sur les études de premier cycle se sont réellement efforcés de privilégier les petites classes.
Quant à la qualité de l'enseignement postsecondaire, je crois que ce que nous avons essayé d'indiquer dans notre mémoire, peut- être maladroitement, c'est que nous nous méfions instinctivement de la plupart des évaluations qui s'y rapportent parce qu'on n'a jamais défini ce qu'on entend par qualité. Comment peut-on alors déterminer si elle a diminué ou non? Pour l'instant, nous ne disposons que d'indices approximatifs et inadéquats, comme la taille des classes. Qui peut dire qu'un étudiant qui suit un cours de psychologie dans une classe de 500 étudiants obtiendra de moins bons résultats qu'un étudiant qui suit le même cours dans une classe de 50? Aucune recherche n'a été faite à ce sujet.
Le sénateur Perrault: On ne peut donc pas généraliser dans les circonstances?
Mme Thayer-Scott: Non.
Le sénateur Perrault: Passons maintenant à la question de l'université virtuelle. J'étais à l'Université Simon Fraser il y a quelques mois où on a procédé avec beaucoup de tapage au lancement de l'université virtuelle qui sera offerte sur l'Internet et utilisera la communication par satellite, je suppose. Quel est l'avenir de l'éducation suite à cette révolution dans le domaine des communications?
Cinquante-cinq millions de gens ont maintenant accès à l'Internet. Cela pourrait finir par complètement disparaître dans un trou noir électronique car ce phénomène prend une ampleur incroyable, 20 millions de personnes ont un accès immédiat aux machines. Selon vous, quel rôle cette nouvelle technologie peut-elle jouer dans l'amélioration de nos normes d'enseignement, le cas échéant?
Mme Thayer-Scott: Elle joue un rôle extrêmement important. C'est pourquoi nous sommes très préoccupés par les possibilités d'exportation des établissements canadiens car nous avons été plus lents que certains autres pays à investir dans ce type de technologie. Il est maintenant extrêmement facile pour un Canadien à Yarmouth ou à Prince Albert de suivre un programme d'études postsecondaires très spécialisé, dispensé par une université américaine ou australienne, ou une université britannique.
Le sénateur Perrault: Par Internet ou par satellite.
Mme Thayer-Scott: C'est exact. J'ignore combien de ces programmes sont disponibles maintenant. La dernière fois qu'un groupe dont je faisais partie a tâché de les répertorier, c'est-à-dire il y a environ huit ou neuf mois, on avait recensé 200 diplômes universitaires complets qu'il était possible d'obtenir sur Internet.
Le sénateur Perrault: Rien ne vaut les contacts personnels en éducation, n'est-ce pas?
Mme Thayer-Scott: Oui, effectivement. En ce qui concerne les initiatives prises par les États-Unis dans ce domaine, vous avez peut-être lu un entrefilet dans le journal, il y a une semaine ou deux, indiquant que les gouverneurs de l'Ouest des États-Unis viennent de prendre des mesures pour créer une université virtuelle de l'Ouest.
Le sénateur Perrault: Je n'ai pas vu cela. J'aimerais consulter le Web pour en savoir plus à ce sujet.
Mme Thayer-Scott: Il s'agit d'un énorme investissement de leur part parce qu'ils sont convaincus que pour réussir sur le plan économique, chaque citoyen, peu importe l'endroit où il se trouve et le temps dont il dispose, doit avoir la possibilité d'améliorer ses connaissances.
Au Canada, où la population est plus faible et vieillissante, et est dispersée sur un vaste territoire, c'est une question à laquelle nous devons, nous aussi, accorder une grande importance. Nous n'avons pas le genre de structures et de cadres organisationnels qui nous permettent d'en faire une priorité nationale comme le fait le Bureau américain de l'éducation dans l'exemple que je viens de vous donner à propos des gouverneurs de l'Ouest.
La question des contacts personnels est également intéressante car de plus en plus, un grand nombre de ces technologies incorporent également ce contact personnel grâce au service de bavardage offert aux internautes, aux vidéoconférences, qui permettent aux gens de communiquer entre eux pendant leurs études. Il existe de nombreux moyens d'assurer ce genre de contacts.
Le sénateur Perrault: Il y a donc une interaction entre les deux.
Mme Thayer-Scott: C'est exact.
Le sénateur Perrault: Cela vous intéressera peut-être. Avant de quitter Vancouver, j'ai été stupéfait, un matin, d'entendre à la radio de la publicité pour l'Université Queen's. On disait: «Obtenez votre maîtrise en administration des affaires de l'une des excellentes universités du Canada, Queen's», et on indiquait que des cours étaient en train d'être mis sur pied à Vancouver, donnés en partie sur Internet et comportant des travaux pratiques en laboratoire. Manifestement, Queen's a déterminé qu'il s'agissait d'une source possible de revenus et tant mieux pour elle. Ce genre de situation existe-t-il ici aussi? Est-ce que l'Université Queen's offre des cours dans les Maritimes?
Mme Thayer-Scott: Oui. Mais en ce qui concerne l'Université Queen's, pas vraiment.
Le sénateur Perrault: L'Université de Toronto en offre quelques-uns.
Mme Thayer-Scott: Le marché n'est pas suffisamment important ici, mais de plus en plus on fait la promotion énergique de programmes de maîtrise en administration des affaires et de programmes spécialisés comme ceux-là, comme le font d'ailleurs de nombreux établissements dans les Maritimes.
Le sénateur Perrault: J'ai été stupéfait d'entendre une chose pareille à la radio privée. C'était une annonce publicitaire percutante. C'est un véritable phénomène. Je n'ai jamais rien entendu de pareil. Est-ce de la concurrence déloyale pour les universités sur place?
Mme Thayer-Scott: Cela dépend à qui vous posez la question. Personnellement, je trouve cela très bien.
Le sénateur Perrault: Vous avez une bonne école de commerce à Dalhousie et ailleurs.
Mme Thayer-Scott: Nous avons plusieurs bonnes écoles de commerce dans les Maritimes.
Le sénateur Andreychuk: Pour poursuivre sur ce qui a été dit à propos de l'exportation d'une province à l'autre, j'appuie la promotion et l'exportation de notre système d'enseignement postsecondaire pour concurrencer ce qui se fait déjà ailleurs. Cependant, certains sénateurs et des représentants de certains secteurs ont dit craindre que cela porte atteinte à d'autres cultures et considèrent que nous ne devrions pas exporter notre système d'enseignement mais que notre rôle devrait consister plutôt à bâtir des infrastructures d'enseignement indigènes. Qu'en pensez-vous?
Mme Thayer-Scott: C'est une question intéressante parce qu'il ne s'agit pas de choisir entre ces solutions mais bien de les conjuguer. Je vais m'exprimer maintenant en tant que présidente du University College du Cap-Breton. Même si notre établissement est relativement petit, le taux de natalité au Cap-Breton et en Nouvelle-Écosse ne nous permettrait pas de survivre. C'est pourquoi nous avons beaucoup misé sur l'exportation. Par exemple, cette semaine nous avons des gens au Kenya en train d'ouvrir un bureau auxiliaire du University College du Cap-Breton. Le gouvernement du Kenya nous a accueillis parce que nous sommes des Canadiens et non pas des Américains ou des Britanniques. Ils ne considèrent pas que nous bafouons leur culture. Ils considèrent que les Canadiens sont très ouverts et réceptifs aux autres cultures, relativement parlant, dans la hiérarchie des puissances coloniales susceptibles de les aider.
Il s'agit d'un gouvernement qui envoie 100 000 étudiants à l'étranger pour y faire des études postsecondaires. Nous nous sommes engagés à travailler avec eux pour les aider à développer leur propre structure et pour promouvoir notre établissement. Je pense que nous pouvons être de bons Canadiens, conscients de nos responsabilités sociales et survivre aussi économiquement et que ces deux htmects ne sont pas incompatibles.
Le président: Madame Thayer-Scott, nous tenons à vous remercier d'être venue dans cette région de la Nouvelle-Écosse nous faire part de vos réflexions.
Nous avons avec nous deux représentants de la Confédération des associations de professeurs d'université de la Nouvelle-Écosse. Veuillez vous présenter et nous dire qui vous représentez. Vous avez une quinzaine de minutes pour le faire après quoi nous vous poserons des questions.
M. John D'Orsay, directeur exécutif, Confédération des associations de professeurs d'université de la Nouvelle-Écosse: Je m'appelle John D'Orsay. Je suis le directeur exécutif de la Confédération des associations de professeurs d'université de la Nouvelle-Écosse, une organisation qui représente neuf associations de professeurs d'université de la Nouvelle-Écosse. Je suis accompagné de Sonia Thon, qui est présidente de notre comité des relations avec les gouvernements et membre du corps enseignant de l'Université Acadia. Elle vous fera une présentation générale.
Mme Sonia Thon, présidente, Comité des relations avec les gouvernements, Confédération des associations des professeurs d'université de la Nouvelle-Écosse: Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de comparaître devant le sous-comité de l'enseignement postsecondaire. Nous croyons bon de rappeler que le Sénat vous a confié l'étude des objectifs nationaux, régionaux, provinciaux et locaux de l'enseignement postsecondaire. Nous avons été témoins de trop d'appels à l'action gouvernementale et nous avons participé à trop de débats qui n'ont pas réussi à définir les objectifs visés; une véritable épidémie de myopie dystéléologique.
Passons maintenant aux objectifs nationaux. Même s'il y a un demi-siècle que le gouvernement fédéral subventionne de façon importante l'enseignement postsecondaire, on ne parvient toujours pas à trouver un énoncé des objectifs visés. On peut partir du principe que les voies maritimes, les gazoducs, les lignes aériennes, les autoroutes et les universités font tous partie de la stratégie de développement d'un pays mais on dispose de si peu de données à ce sujet qu'il est arrivé qu'on présente l'ingérence du gouvernement fédéral comme une entourloupette constitutionnelle. Malheureusement, l'évolution du Financement des programmes établis et du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux n'a pas favorisé la prise en compte d'objectifs nationaux, de sorte qu'il n'existe aucun lien entre les paiements de transferts et les résultats obtenus.
Par contraste, les États-Unis ont, depuis 1947, fixé à 35 p. 100 le taux de participation de la cohorte d'étudiants de 18 à 24 ans. Dans les années 80, Terrel Bell, le secrétaire de l'Éducation de Ronald Regan, a dirigé une commission qui a fixé à 30 p. 100 le pourcentage d'adultes qui devraient détenir un diplôme universitaire. Au cours des dix dernières années, de nombreux États américains et de pays européens ont établi des plans prévoyant une augmentation de 50 p. 100 ou même de 100 p. 100 des taux d'inscription. Tout au long des années 80, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a prévu, et a certainement établi des budgets en conséquence, un taux d'inscription stable ou à la baisse même en tenant compte d'une demande constante de la part du public, ce qui a entraîné une augmentation de 60 p. 100 du taux d'inscription. Notre taux de participation a atteint 35 p. 100, et environ 15 p. 100 de la population détient un diplôme universitaire. Aujourd'hui, nous serions classés parmi les cinq derniers des États américains.
Le premier accord de libre-échange aurait dû s'accompagner d'un engagement à réduire l'écart entre le niveau de scolarité des Canadiens et celui des Américains. Tout comme le gouvernement fédéral a donné l'impulsion à cet accord, il aurait dû aussi montrer la voie en s'efforçant de rétablir l'équilibre en matière de scolarité. Le Canada aurait dû fixer à 25 p. 100 le pourcentage d'adultes devant détenir des diplômes universitaires. Pour y arriver, il faudrait qu'une partie du financement assuré dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux soit consacrée à relever le niveau de scolarité dans chaque province.
L'évolution de la composition de la main-d'oeuvre au cours des dix dernières années témoigne d'une transition vers une économie axée davantage sur le savoir. Une bonne partie de la croissance économique des dix dernières années est attribuable à une hausse du niveau de scolarité de la main-d'oeuvre. C'est un phénomène qu'il faudrait encourager davantage grâce à une stratégie de développement économique axé sur le savoir. Cela suppose entre autres d'éliminer progressivement les incitatifs au développement axé sur les matières premières et d'orienter plutôt les ressources vers des programmes fondés sur le savoir pour appuyer la recherche, l'éducation et le recyclage. Comment pouvons-nous autoriser des déductions d'impôt de l'intérêt sur l'argent emprunté pour investir dans des actions sans accorder un traitement équivalent à ceux qui utilisent les prêts étudiants pour investir dans le capital humain?
Passons maintenant aux objectifs régionaux. La région des Maritimes a une longue tradition de coopération régionale en matière d'enseignement postsecondaire, grâce à la Commission de l'enseignement supérieur des provinces maritimes. Elle a permis d'assurer un financement continu aux provinces qui accueillent des étudiants dans des programmes régionaux de médecine dentaire, de médecine, de pharmacologie, de foresterie et de médecine vétérinaire. La Commission a également établi des arrangements qui permettent aux étudiants de la région de poursuivre leurs études ailleurs au pays dans les disciplines, comme l'optométrie, qui ne sont pas offertes dans la région.
Comme certaines provinces craignaient que les étudiants d'autres provinces accaparent les places subventionnées dans leurs établissements, la Commission a prévu un type d'arrangements pour assurer un transfert réciproque de fonds, ce qui permet aux établissements de se spécialiser et d'offrir des programmes distincts. Dans certaines disciplines, comme la médecine dentaire, un plus large bassin de recrutement régional pourrait être préférable.
Le rôle des organismes régionaux devrait consister à s'assurer que les étudiants ont accès à un vaste éventail de programmes sans que cela influe sur la répartition des subventions provinciales. On favoriserait ainsi le développement de centres de spécialisation, même si dans les faits l'absence de programmes de langue et d'études régionales porte à croire que cette stratégie n'a pas obtenu tout le succès escompté.
Abordons maintenant les objectifs provinciaux. À notre avis, chaque province devrait établir des objectifs pour relever le niveau d'instruction postsecondaire. Pour les encourager dans cette voie, il faudrait que l'aide financière du gouvernement fédéral soit attribuée en fonction de l'efficacité avec laquelle chaque province atteint cet objectif. Les provinces ont une responsabilité constitutionnelle et peuvent adopter des méthodes novatrices pour atteindre ces objectifs. En misant sur les petits collèges, notre région profite des avantages qu'offrent la différenciation des programmes et la concurrence fondée sur la qualité.
Les provinces devraient également viser à assurer l'égalité d'accès au moyen de programmes d'aide. Le Programme canadien de prêts aux étudiants peut en être le pivot central mais il faut que les collectivités déterminent les obstacles financiers et culturels à l'obtention d'un diplôme universitaire et prennent des mesures pour y remédier. Les Acadiens de la Nouvelle-Écosse n'ont pas forcément les mêmes besoins que ceux du Nouveau-Brunswick. Les besoins des collectivités noires et autochtones de la Nouvelle-Écosse sont différents de ceux des collectivités de l'Ontario. Weymouth Falls n'est pas Windsor. Après une dizaine d'années passées à essayer d'attirer l'attention sur le faible taux de participation de la population des côtes sud et sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, nous en déduisons que les décideurs n'ont pas encore pris conscience de la nécessité de tenir compte des circonstances particulières de ces collectivités.
En ce qui concerne les objectifs locaux de l'enseignement postsecondaire, nous considérons qu'ils relèvent de chaque établissement. Nous proposons deux objectifs: améliorer la qualité grâce à l'innovation et assurer la diversité. Dans une province où les établissements se consacrent à favoriser l'accès des femmes et des Acadiens, nous estimons que l'égalité d'accès ne doit pas être un objectif local ou institutionnel. Pour le comprendre, il suffit de prendre comme exemple l'Université Mount Saint Vincent, qui se compose en majeure partie de femmes, ou Sainte-Anne qui est un établissement francophone.
Je vais vous parler maintenant de l'importance sociale, culturelle, économique et politique de l'enseignement postsecondaire. Comme promoteurs de «Beyond the Campus» -- il s'agit d'une étude à laquelle a travaillé la CAPUNE et que nous mettons ici à votre disposition -- nous avons beaucoup parlé sur ce sujet. Assurons-nous que la contribution de l'enseignement postsecondaire à la participation politique, au changement social et au renouveau culturel ne se perd pas dans une approche économique réductrice.
Reconnaissons aussi les réalités économiques: les universités engendrent beaucoup d'activités économiques. Les recettes d'exportation des universités de la Nouvelle-Écosse les classent avant tous les autres secteurs des ressources naturelles à l'exception des pêches. Le taux de rémunération du capital investi par le gouvernement dans ce genre de développement dépasse celui des particuliers. Il faut insister là-dessus comme point de départ à des discussions continues sur les fardeaux et les avantages que représente l'enseignement postsecondaire, par exemple les frais de scolarité par rapport aux subventions d'exploitation comme sources de revenu. Si notre but est d'encourager l'acquisition d'un diplôme universitaire, il faudra miser davantage sur les subventions.
Du point de vue économique, la hausse constante des inscriptions malgré l'augmentation des frais est beaucoup attribuable à l'effondrement du marché de l'emploi pour les diplômés du secondaire, ce qui a réduit les coûts d'opportunité. J'aimerais que John D'Orsay vous explique cette notion après que j'aurai terminé mon exposé.
Dans quelle mesure devrions-nous compter sur un marché du travail déprimé pour combler un vide dans la politique gouvernementale? Comment le besoin pour une éducation périodique au niveau postsecondaire peut-il être financé dans les contextes actuels d'aide et de frais? Cela tient bien sûr au fait que les étudiants qui obtiennent leur diplôme d'études secondaires n'ont pas beaucoup d'espoir de gagner un revenu vu qu'ils n'ont pas de chance de dénicher un emploi. Au lieu d'aller travailler, ils vont à l'université. Ils n'ont donc plus l'occasion de gagner de l'argent. On comprend alors pourquoi le taux d'inscriptions est si élevé en dépit de l'augmentation des frais d'inscription et de la situation en ce qui a trait aux subventions de fonctionnement. C'est la seule chose que les gens peuvent faire.
Je vais maintenant aborder la question du financement adapté aux besoins. La CAPUNE a recommandé l'adoption de mécanismes financiers adaptés aux besoins en remplacement des systèmes de financement global utilisés entre le gouvernement fédéral et les provinces et aussi entre les provinces et les universités. Nous nous sommes aussi opposés aux «couloirs d'inscription» et aux mandats prescrits pour les institutions de la province, parce que nous croyons que la concurrence donnera lieu à l'innovation, à la création de programmes et à l'amélioration de la qualité.
Si nous nous fondons sur notre expérience des dix dernières années, nous constatons que le gouvernement est beaucoup plus inflexible que les universités. Par exemple, les programmes d'aide aux étudiants sont conçus pour répondre aux besoins du groupe des 18-24 ans et les hypothèses d'épargne excluent ceux qui veulent sortir du milieu du travail pour retourner aux études. Nous avons été témoins récemment des compressions dont ont fait l'objet les programmes qui encourageaient les prestataires d'aide sociale à aller à l'université. Ne dirige-t-on pas les chômeurs indemnisés vers une formation à court terme plutôt que vers une éducation à long terme? Pourquoi? Afin de pouvoir les licencier de nouveau lorsque ces compétences deviendront dépassées.
La question de l'endettement des étudiants nous ramène aux problèmes de l'équité et du taux de rendement. Ce qui surprend le plus au sujet des prêts étudiants au Canada c'est que 60 p. 100 d'entre eux n'en reçoivent pas. Un grand nombre des étudiants qui ont eu droit à des prêts sont très peu endettés lorsqu'ils obtiennent leur diplôme. Le fardeau de l'endettement est donc concentré sur une population dont les besoins sont connus et mesurés au départ. Le mouvement d'abandon des bourses a considérablement alourdi le fardeau de ce groupe.
Un petit éclaircissement en passant. Les deux tiers des étudiants n'ont pas besoin de prêt. Quant à l'autre tiers, sa dette est de 10 000 $ en moyenne. Un sixième des étudiants qui n'ont pas d'autre choix que d'y recourir doivent en moyenne 20 000 $, ce qui représente environ 100 000 personnes qui éprouvent vraiment des difficultés. Il serait donc très utile de recenser ce secteur de la population pour trouver une solution au problème. Il ne s'agit pas de tout le monde, mais d'un sixième de la population étudiante.
Enfin, le mandant du sous-comité a ouvert la discussion sur de nombreux sujets auxquels la CAPUNE a manifesté un intérêt marqué. Nous nous inquiétons toutefois de ce qu'il n'y soit pas fait mention du produit conjoint de l'enseignement universitaire, à savoir la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Nous espérons que le comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie s'attachera à cette question. Pour enraciner une stratégie de développement économique basée sur le savoir, il faut à tout prix renforcer la capacité des universités tant en ce qui a trait à l'éducation qu'à la recherche.
Le sénateur Perrault: J'ai remarqué un point à la page 2 du mémoire et j'aimerais vraiment que le témoin précise sa pensée.
C'est un phénomène qu'il faudrait encourager davantage grâce à une stratégie de développement axée sur le savoir. Cela suppose entre autres d'éliminer progressivement les incitatifs au développement axés sur les matières premières et d'orienter plutôt les ressources vers des programmes fondés sur le savoir pour appuyer la recherche, l'éducation et le recyclage.
Vous voulez que l'on supprime progressivement les incitatifs axés sur les matières premières; auriez-vous l'obligeance d'expliquer exactement ce que cela signifie?
M. D'Orsay: Nous pouvons énumérer un certain nombre de choses et nous avons eu des discussions par le passé avec le comité des finances de la Chambre des communes à ce sujet. L'idée de base c'est que la déduction pour épuisement et les incitatifs pour l'émission d'actions accréditatives dans le secteur minier par exemple sur lesquels on compte pour stimuler l'exploitation des ressources sont un moyen moins efficace de procéder. Si vous avez l'intention d'utiliser de façon stratégique les ressources gouvernementales, vous devriez vous concentrer davantage sur les approches basées sur la connaissance en matière de formation, d'éducation et de recherche. Cela ne veut pas dire que le secteur minier ne pourrait pas profiter des investissements dans la recherche entre autre pour mettre au point des processus environnementaux.
Il y aurait aussi le crédit d'impôt pour dividendes qui se fonde sur l'idée que les gens ont besoin d'un incitatif fiscal pour investir dans du capital-actions, une idée qui a peut-être été valable il y a 30 ou 40 ans. Nous disons qu'à l'heure actuelle, il n'est pas aussi essentiel pour le développement économique du Canada d'encourager l'utilisation des fonds de cette manière mais plutôt de canaliser les fonds de manière à encourager les gens à parfaire leur éducation et leur formation.
Le sénateur Perrault: Si ces industries réussissent, elles produiront des revenus fiscaux qui pourraient être dirigés vers l'aide à l'éducation.
M. D'Orsay: C'est le problème avec lequel vous êtes aux prises. Dans tous ces cas, vous investissez des fonds publics -- l'argent des contribuables dans ce sens -- dans un programme de développement économique et, la meilleure façon de l'investir, selon nous, c'est dans le développement fondé sur les connaissances.
Le sénateur Perrault: Il y a toujours une opinion contraire sur le sujet.
M. D'Orsay: Il y a l'exemple des ressources dont je viens tout juste de parler. Il n'y aurait pas de mal à ce que le secteur des ressources concentre ses efforts sur la recherche et la formation de sa main-d'oeuvre de manière à faire progresser son industrie.
Le sénateur Perrault: Vous avez ici un autre paragraphe qui exige vraiment, à mon avis, des explications.
L'Accord de libre-échange aurait dû s'accompagner d'un engagement à réduire l'écart entre le niveau de scolarité des Canadiens et celui des Américains. Tout comme le gouvernement fédéral a donné l'impulsion à cet accord, il aurait dû aussi montrer la voie en s'efforçant de rétablir l'équilibre en matière de scolarité.
Que voulez-vous dire par là? Certains collèges américains ne sont pas des modèles exemplaires en matière d'enseignement supérieure.
M. D'Orsay: Oui c'est vrai. Nous voulons dire par là qu'une main-d'oeuvre dont 23 ou 24 p. 100 des participants possèdent un diplôme universitaire a un avantage par rapport à une main-d'oeuvre pour laquelle ce taux est de 15 ou 16 p. 100 et que nous devrions supprimer cet écart.
Le sénateur Perrault: Vous voulez donc dire par là que davantage de gens devraient fréquenter les universités?
M. D'Orsay: Ce serait l'idée d'accroître le niveau d'instruction. Lorsque nous comparons, un autre htmect ressort plus particulièrement et c'est le nombre d'Américains par rapport aux résidents de notre région qui ont terminé l'école secondaire. Nous affichons un déficit important à cet égard également. Je comprends votre préoccupation au sujet de la qualité de l'éducation dans certaines autres provinces et la comparaison est difficile à faire.
Le sénateur Perrault: Vous avez ici un assez bon système, je crois.
M. D'Orsay: Oui et nous sommes heureux de le maintenir et d'en faire la promotion.
Vous avez demandé des explications. En fait, au moment de la négociation de l'Accord de libre-échange, nous avions préparé un document de 10 pages sur l'ère du libre-échange. Nous y avons fait des comparaisons sur les taux de financement, d'inscription et d'obtention des diplômes.
Le sénateur Perrault: Nous le mettrons de côté aux fins de documentation pour le comité. C'est excellent.
Le sénateur Forest: J'ai remarqué, dans la conclusion de votre document, que vous dites ce qui suit:
Nous nous inquiétons du fait qu'il n'y soit pas fait mention du produit conjoint de l'enseignement universitaire -- la recherche fondamentale et la recherche appliquée.
Cela n'a peut-être pas été mentionné explicitement, mais un assez grand nombre de témoins ont abordé devant nous cette question. Nous avons été heureux de l'annonce faite dans le budget de la future Fondation canadienne pour l'innovation qui prêtera main-forte dans le domaine de la recherche. Une fois de plus, c'est un début nous l'espérons, étant donné que nous sommes très inquiets de l'incidence qu'aura le manque de financement, tant de la part des conseils subventionnaires que des divers paliers de gouvernement, sur les capacités de recherche, surtout les jeunes chercheurs. Certains témoins qui vous ont précédé ont recommandé l'octroi de subventions aux jeunes chercheurs pendant les trois premières années de leur carrière.
M. D'Orsay: Je suis convaincu qu'il s'agit là d'une façon pour les gens d'essayer de rendre votre mandat maniable, parce qu'il y a un certain nombre de questions que vous pourriez examiner en ce qui a trait à la recherche. Il va s'en dire que j'ai été assurément impressionné, du moins dans le cadre de mes contacts avec des députés et Paul Martin lui-même sans compter l'engagement qu'ils ont pris hier à l'égard de la recherche dans les universités.
Le sénateur Forest: Je suis sûr que nous avons entendu toutes les associations à cet égard.
M. D'Orsay: Nous aimerions le prétendre, mais nous savons que nous ne sommes pas les seuls à le dire. Nous croyons comprendre que le monde des affaires appuie aussi fortement la recherche fondamentale dans les universités.
Le sénateur Forest: Si nous avions publié notre rapport un tout petit peu plus tôt nous y aurions probablement aussi prétendu.
Le sénateur DeWare: À la page 3, vous parlez des objectifs provinciaux. J'aimerais que vous m'expliquiez ce qui suit:
Les provinces ont, non seulement une responsabilité constitutionnelle, mais elles doivent aussi recourir à des approches équivalentes et innovatrices pour atteindre ces objectifs.
J'aimerais entendre vos recommandations à l'égard de cette proposition ou ce que vous en pensez?
M. D'Orsay: L'une d'entre elles porte sur un modèle que nous appliquons dans cette région-ci pour un certain nombre d'établissements éparpillés sur le territoire. Nous nous sommes attachés à l'accessibilité géographique et à la qualité des études de premier cycle dans ces établissements. Ce modèle est quelque peu différent de ce qui est offert et de ce qui est suivi dans certaines autres provinces. Il s'agit là d'un exemple.
Un autre domaine où vous pourriez parler d'innovation, c'est celui des programmes d'aide aux étudiants. Nous ne savons pas vraiment ce qui marchera et nous devrions inciter les provinces à redoubler leurs efforts pour trouver des solutions de rechange, faire diverses tentatives et mettre ensuite en pratique ce qui fonctionne pour intensifier la participation. De même, par exemple s'occuper de segments de leur population qui sont désavantagés dans un système homogène afin de mettre au point des programmes qui s'adressent à eux -- dans notre cas, par exemple, les Autochtones et les Noirs.
Le sénateur DeWare: Croyez-vous que nous en avons fini avec les compressions?
M. D'Orsay: Il est possible que certaines provinces croient que d'autres compressions inciteront à l'innovation. D'après les prévisions de financement sur quatre ans dans notre province, nous en sommes à la dernière année de compressions. C'est un engagement que nous aimerions voir respecter. De même, l'annonce d'hier concernant la recherche indique qu'il y a peut-être un certain mouvement dans l'autre direction de la part du gouvernement fédéral. Nous espérons que les portes s'ouvrent et que nous pourrons faire avancer les choses.
Le sénateur DeWare: Croyez-vous que cela aiderait d'avoir un ministre d'État à l'éducation au Canada?
M. D'Orsay: Je crois que notre organisation nationale a proposé à peu près l'équivalent.
Le sénateur DeWare: Si nous ne pouvons avoir un ministre de l'éducation, pourquoi pas un sous-ministre alors?
M. D'Orsay: Ils ont proposé l'idée d'un organisme consultatif fédéral. Il va sans dire que le soutien que gouvernement fédéral apporte à l'enseignement post-secondaire en particulier est à un niveau qui justifie ce genre d'attention.
Le sénateur DeWare: Tous nos témoins, et plus particulièrement les étudiants, s'inquiètent du niveau d'endettement et du fait que depuis huit ou 10 ans on demande aux établissements de réduire leurs dépenses. Sans l'équipement et les installations nécessaires, les universités sont incapables de fonctionner efficacement et de se maintenir à niveau. Ce sont les étudiants qui ont souffert de ces compressions. En effet, à mesure que les fonds s'amenuisent les frais de scolarité augmentent. Il faut y mettre un frein à un certain moment.
M. D'Orsay: Nous avons fait remarquer que les frais de scolarité n'ont pas eu l'effet prévu, qu'ils chassent la clientèle. Je crois que vous pouvez soutenir qu'ils ont fait baisser le taux de participation à un niveau inférieur à ce qu'il aurait atteint autrement, en raison d'autres facteurs économiques comme les possibilités d'emploi. Cependant, la conjecture est maintenant favorable. Des changements s'imposent si l'on veut réduire le chômage. Des problèmes se posent en ce qui a trait à l'accès à l'éducation dont nous avons tous besoin.
En ce qui a trait à votre question concernant le ministre d'État à l'Éducation, nous avons un peu parlé de la question des responsabilités constitutionnelles et du fait que nous sommes vraiment à une époque où cela devrait être une responsabilité conjointe du gouvernement fédéral et des provinces, c'est-à-dire que des institutions fédérales devraient intervenir dans les discussions touchant l'enseignement postsecondaire. C'est le modèle suivi pas d'autres fédérations comme l'Allemagne, l'Australie et les États-Unis. Nous avons de nouveau examiné à fond cette question et nous avons certaines propositions à faire. Nous sommes heureux de vous faire profiter du fruit de nos recherches.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool: À la page 2, vous parlez de «national goal» ou bien du but, d'objectif national. Et vous dites que le but visé est d'atteindre un certificat universitaire pour 25 p. 100 de notre population. J'aimerais connaître votre opinion sur les normes nationales. Est-ce que cette population avec une instruction universitaire doit avoir des connaissances assujetties à des normes nationales? Êtes-vous d'accord avec des normes nationales?
[Traduction]
M. D'Orsay: Nous avons également eu l'occasion de nous pencher sur cette question et, même si je n'ai pas apporté de documents qui en traitent, nous croyons que nous devrions parler de l'accès à des établissements agréés qui sont en fait assujettis à des processus d'agréments nationaux ce qui aurait pour effet de dégager des normes nationales. Je le répète, ce modèle est en place dans d'autres fédérations où le gouvernement fédéral finance l'enseignement postsecondaire.
Le sénateur Losier-Cool: On nous a demandé de répondre à cette question et c'est la raison pour laquelle nous essayons d'obtenir des réponses de diverses sources.
Le président: Pourriez-vous nous préparer un document sus le sujet et nous en faire parvenir un exemplaire avant le 1er mai.
M. D'Orsay: Oui, avant le 1er mai, c'est possible.
Le sénateur Lavoie-Roux: En ce qui a trait aux réalisations professionnelles, nous avons des normes nationales parce que les professions en ont établies.
M. D'Orsay: Oui et nous avons déjà des programmes d'agrégation, comme vous le dites, pour bien des professions dont le génie, la médecine, la dentisterie, la pharmacie. C'est une question de reconnaissance officielle d'autres programmes.
Le sénateur Lavoie-Roux: La profession comptable a des examens nationaux.
M. D'Orsay: C'est exact. Jusqu'à maintenant le système a été érigé en partie autour des établissements et des résultats que chacune d'entre elles a obtenus à ses examens, du pourcentage de diplômés en comptabilité qui réussissent trois ans après avoir réussi l'examen et du pourcentage des diplômés en médecine, en pharmacie, en art dentaire qui réussissent leurs examens. Il va sans dire que ceux et celles qui s'inscrivent, par exemple, au programme de pharmacie, examinent soigneusement ces résultats. Je ne pense pas que vous voudriez d'un mécanisme de ce genre pour mesurer les autres diplômes du premier cycle. Je pense qu'il faut recourir ici à un mécanisme d'agrégation différent.
Le sénateur Andreychuk: Nous avons beaucoup entendu parler de la mobilité et du transfert des crédits d'une province à l'autre. Croyez-vous qu'il incombe au gouvernement fédéral ou aux provinces d'établir la transférabilité et l'acceptation des crédits ou que cela revient plutôt à l'ensemble des établissements d'enseignement du Canada?
M. D'Orsay: Nous croyons raisonnable de penser qu'il faudrait que cela revienne aux établissements d'enseignement. Lorsque de telles propositions sont faites, le danger c'est qu'on en vienne à penser qu'un diplôme universitaire est un ensemble disparate de cours. Nous devons vraiment bien enraciner bien ce concept au sein des universités et nous assurer qu'après avoir terminé un programme, l'étudiant a acquis un ensemble cohérent de connaissances. La plupart des mécanismes qui ont résulté d'initiatives gouvernementales sont allés à l'encontre de ce cela.
Le sénateur Andreychuk: Simple post-scriptum, quand les étudiants se plaignent, par exemple, d'avoir tant de difficultés à passer de l'Université de la Colombie-Britannique à l'Université de Toronto, croyez-vous que de telles difficultés sont inhérentes au système et qu'elles ne sont pas forcément mauvaises?
M. D'Orsay: À certains égards, nous éprouvons de la difficulté à concevoir que le passage d'un étudiant de première année de l'Université de la Colombie-Britannique à l'Université de Toronto soit difficile. Par contre, se présenter à l'Université de Toronto avec 19 crédits en main pour y suivre un seul cours en vue de pouvoir obtenir un diplôme de cet établissement peut poser problème.
Le sénateur Perrault: Plusieurs étudiants que nous avons entendus ont dit qu'à leur avis, la rareté des ressources a provoqué une baisse des normes. Selon eux, il arrive parfois, dans les très grandes classes, qu'il soit impossible de rencontrer le professeur. L'interactivité est alors à un minimum. D'autres nous ont affirmé qu'ils aimeraient que l'on trouve un moyen plus efficace d'évaluer le rendement des enseignants, chargés de cours et professeurs, idée à laquelle certains membres de la profession sont vivement opposés. J'aimerais savoir ce que vous pensez.
M. D'Orsay: Nous avons effectivement consacré du temps à documenter la baisse des normes quand, par exemple, le ratio étudiants-professeur augmente. Beaucoup de faits montrent que c'est vrai. Ainsi, nous avons aussi la preuve que, dans des cours comme l'anglais de première année, où l'objectif devrait être d'apprendre à communiquer et de faire beaucoup de travaux écrits, le nombre de travaux exigés des étudiants a baissé au cours de la dernière décennie, passant habituellement de 10 à 6, à peu près. Le nombre d'étudiants par classe est aussi passé de 35 à 50. Ces tendances sont contraires au principe d'un enseignement de qualité. Il existe certes des établissements qui, délibérément, font construire de plus grandes salles de classe afin d'accroître le nombre d'étudiants par classe et d'imposer les épreuves uniques. Voilà qui nous semble aller à l'encontre des grands objectifs qui sont d'améliorer la formation en communication et ainsi de suite.
J'ignore si le comité est au courant, mais il existe un fort bon rapport rédigé à cet égard dans le cadre d'une évaluation de l'Université de Western Ontario par rapport à d'autres établissements. Vous pouvez peut-être la convaincre de vous en remettre un exemplaire. L'étude a été effectuée par des consultants externes qui ont notamment comparé la façon dont elle réalise ses programmes par rapport à d'autres.
L'autre htmect est un peu plus encourageant. Il s'agit de la bibliothèque et de l'accès aux ressources documentaires. Le rythme d'acquisition des ressources, par exemple, le nombre de revues en bibliothèque, n'a pas augmenté aussi vite qu'auparavant. Bon nombre de ces collections se sont détériorées et sont donc moins utiles. Toutefois, les bibliothécaires peuvent répliquer qu'avec l'avènement des cédéroms et de la nouvelle technologie, ils sont capables d'offrir aux étudiants un meilleur accès aux documents qu'ils ont et qu'en fait, au cours de la dernière décennie, les compétences fondamentales en recherche que l'enseignement universitaire de premier cycle en particulier est censé développer se sont améliorées.
Le sénateur Perrault: Ont-ils mis la plus grande partie de cette information sur des cédéroms?
M. D'Orsay: Oui, c'est le genre de choses qu'ils font, particulièrement l'indexage et l'accélération du processus d'indexage.
Le sénateur Perrault: Y a-t-il un niveau raisonnable de coopération entre les universités et collèges canadiens en ce qui concerne les ressources documentaires?
M. D'Orsay: C'est une autre question qu'il faudrait poser aux Néo-Écossais, en particulier. Nous avons en place, ici, un réseau appelé Novanet qui relie entre elles toutes les bibliothèques, sauf une. Vous pouvez descendre à la bibliothèque, ici, et savoir quels ouvrages se trouvent dans n'importe quelle bibliothèque de la province, sauf une.
Mme Thon: Le fait que vous trouviez le titre de l'ouvrage ne signifie pas forcément que vous pourrez l'emprunter.
Le sénateur Perrault: Il a peut-être disparu.
Mme Thon: Exactement. Par conséquent, nous avons effectivement la technologie voulue, mais nous n'obtenons pas toujours les livres. L'accès n'est pas facile. Quand le professeur demande à sa classe de 40 étudiants de lui rédiger une dissertation, il faut être extrêmement rapide pour mettre la main sur le seul ouvrage disponible.
Le sénateur Perrault: Il a peut-être déjà été emprunté ou il a disparu.
M. D'Orsay: Autre élément, ces outils de recherche sont de plus en plus frustrants, quand on voit par exemple l'état des collections de revues. Ainsi, vous découvrez non seulement que l'université à un ou deux numéros qui vous intéressent, mais aussi qu'elle n'a pas les 20 ou 30 autres. La clientèle devient plus exigeante.
J'aimerais aussi m'attarder un peu à votre question concernant l'évaluation. Un des grands mystères des universités, c'est qu'on consacre beaucoup de temps à évaluer le corps professoral. Nous avons certes, dans cette région-ci, une pratique uniforme d'évaluation des enseignants, soit par sondage auprès des étudiants ou au moyen d'observations individuelles dans la salle de classe. Ces évaluations sont prévues dans les conventions collectives, qui en sont le fondement. Les dossiers d'enseignement utilisés dans les universités révèlent à tous ce que vous faites en classe, ils contiennent des exemples du travail des étudiants, certains de vos plans de cours. On fait un effort consciencieux en vue de comparer ces éléments. On insiste beaucoup sur le rendement de l'enseignant. Cependant, il existe une lacune au niveau du programme, en ce sens que vous pouvez offrir beaucoup d'excellents cours donnés par un corps professoral très compétent sans, en bout de ligne, obtenir les résultats escomptés. On n'a pas vraiment cherché jusqu'ici à savoir si l'enseignement est cohérent, à jour, s'il correspond à ce dont on a besoin. Cela nous ramène à cette idée d'accréditation, où les programmes seraient évalués par des gens de l'extérieur, en vue de cerner les problèmes. C'est le genre de choses que nous préconisons. Je crois que l'on devrait s'inquiéter davantage du niveau des étudiants visés que du rendement de l'enseignant.
Par ailleurs, toute personne placée dans un contexte difficile n'aura pas un très bon rendement. Il n'est pas à la portée de tous de donner des cours magistraux dans une grande salle. Cette méthode n'est peut-être pas la meilleure de toute façon, et il faudrait peut-être s'en écarter.
Le président: Le témoin suivant est M. Harley D'Entremont, recteur de l'Université Sainte-Anne, qui parlera au nom du Regroupement des universités de la francophonie hors Québec.
[Français]
M. Harley D'Entremont, recteur, Université Sainte-Anne : Je vous remercie de votre intérêt envers le secteur de l'enseignement postsecondaire au Canada. Nous ne doutons pas que l'intérêt du Sénat à l'égard de ce secteur découle de l'importance de celui-ci pour le développement économique et social de notre pays. Il va de soi que l'enseignement universitaire revêt une grande importance pour le pays dans son ensemble. Ceci est même plus important pour une communauté de langue francelaise ou langue officielle minoritaire comme les francophones hors Québec.
Le Regroupement des universités de la francophonie hors Québec comprend les douze universités oeuvrant en milieu minoritaire francophone. Ces universités ont décidé d'unir leurs forces pour renforcer l'enseignement universitaire qu'elles dispensent en travaillant sur des priorités communes et en solutionnant des problèmes communs.
Le Regroupement, bien qu'il réunisse des universités de sept provinces canadiennes, ne veut surtout pas se replier sur lui-même. Au contraire, nous, les membres du Regroupement, cherchons par tous les moyens possibles à établir des ponts et à bâtir des partenariats avec les organismes pouvant nous aider à faire avancer les dossiers que nous pilotons.
Si je fais référence aux communautés de langue francelaise hors Québec, c'est pour vous rappeler l'engagement du gouvernement canadien à cet égard. La Loi sur les langues officielles prescrit l'obligation, pour le gouvernement fédéral, d'offrir des services dans les deux langues officielles. Cette loi engage également le gouvernement fédéral, ainsi que tous ses ministères et toutes ses institutions, à voir au développement et à l'épanouissement des communautés minoritaires de langue officielle. Le gouvernement fédéral a toujours reconnu la dualité linguistique comme étant une caractéristique essentielle de l'identité canadienne. La dualité linguistique est un fondement du pays et elle est présente partout, que ce soit à l'Est, au Centre, à l'Ouest ou dans le Nord du pays.
En promulguant la Loi sur les langues officielles il y a 27 ou 28 ans, le Canada choisissait de s'éloigner d'une définition territoriale de la dualité linguistique. De fait, la loi reconnaît l'existence des communautés et de leurs droits, et ce, dans l'ensemble du pays. En effet, depuis 1988, la partie VII de la loi reconnaît également l'engagement du gouvernement fédéral et de ses ministères à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement.
En août 1994, le gouvernement fédéral approuvait «l'établissement d'un cadre de responsabilité» pour la mise en oeuvre des articles 41 et 42 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Ces nouvelles dispositions législatives visent les institutions clés qui oeuvrent dans les domaines de l'économie, de la culture et des ressources humaines. On retrouve, pour la plupart, les mêmes institutions et ministères qui contribuent à l'aide fédérale à l'enseignement postsecondaire. Une série de mesures est proposée à ces institutions pour qu'elles puissent satisfaire aux nouvelles exigences de la loi. Le ministère du Patrimoine canadien (MPC), maître d'oeuvre du cadre de responsabilités, est identifié comme une institution clé.
Il y a un très grand besoin pour un développement accru de l'enseignement postsecondaire en francelais en dehors du Québec. Le financement global de ces institutions, y compris l'argent dépensé par les gouvernements fédéral et provinciaux à ce chapitre, est nettement inférieur au poids démographique de ces communautés. Nous devons donc constater avec consternation une situation de sous-développement à ce chapitre et le besoin de rattrapage si l'on veut assurer à ces communautés une participation égale dans l'avenir de ce pays. Cet état de sous-développement est dû à plusieurs facteurs, y compris un faible taux de participation aux études universitaires, qui s'explique possiblement par le caractère plutôt rural de ces communautés, et le manque d'institutions universitaires. Quoiqu'il en soit, nous ne sommes pas ici pour faire le procès du passé ni d'assigner le blâme; nous devons constater ces inégalité dans la prestation des services publics et le grand besoin de rattrapage.
Le Regroupement des universités de la francophonie hors Québec ne s'oppose pas à un examen des programmes sociaux en général ni aux diverses propositions venant d'autres associations d'universités telle que l'AUCC pour le maintien d'une présence fédérale forte dans le domaine de la recherche. Au contraire, nous sommes d'accord avec les revendications de ces organismes quant aux besoins de changements en ce qui concerne la recherche et l'aide aux étudiants. Cependant, nous exigeons que toute réforme dans ce domaine tienne compte du besoin de rattrapage des communautés de langues officielles minoritaires hors Québec et des engagements et obligations du gouvernement canadien en vertu de la Loi sur les langue officielles, surtout les articles 41 et 42 de la partie VII de cette loi. Les modalités pour assurer ce développement ne se trouvent probablement pas dans les modifications au financement des programmes établis. Quoiqu'il en soit, je vous exhorte à vous pencher sérieusement sur cette question et d'y suggérer des mesures acceptables afin de ne pas nuire davantage au développement de ces communautés et de leurs universités. Dans un monde de plus en plus basé sur le savoir et la technologie, il est essentiel que les universités qui desservent ces communautés se développent.
Nous ne demandons pas un traitement de faveur; nous demandons tout simplement un traitement équitable. Le financement public du secteur universitaire francophone hors Québec est depuis toujours inadéquat. Le concept d'équité (surtout l'équité verticale) suggère qu'une attention toute particulière soit accordée à l'impact des propositions du gouvernement fédéral sur les universités de la francophonie hors Québec afin de ne pas nuire à la vitalité et au développement de ces communautés d'expression francelaise hors Québec.
La situation universitaire de la francophonie hors Québec n'est pas encore équivalente -- ni en termes de participation générale aux études et à l'expérience universitaire dans sa langue maternelle, ni en termes d'accessibilité à des programmes d'étude en francelais -- à celle dont bénéficient les anglophones de n'importe quelle des provinces canadiennes, incluant le Québec.
Il reste beaucoup de place pour la consolidation et l'enrichissement des programmes d'études, des activités de recherche et des services qui existent déjà en français dans les provinces autre que le Québec; et il en reste encore plus pour certaines initiatives très ciblées -- telles que, par exemple, le partage d'expériences et d'instruments didactiques visant à accroître la maîtrise de la langue française, l'accroissement de l'accessibilité de certains programmes comme les sciences administratives, certaines disciplines de la santé, et cetera. -- dont les francophones minoritaires canadiens auraient sans doute grand besoin pour mieux assurer leur sécurité culturelle et mieux ancrer leur développement économique, social et communautaire.
Cette entreprise de consolidation, d'enrichissement et d'accroissement de l'accessibilité à l'expérience universitaire en francelais dans l'ensemble de la francophonie hors Québec, s'impose car si le Canada veut maintenir la dualité linguistique comme une valeur nationale fondamentale, il se doit d'investir dans la formation des ressources humaines en francelais d'un océan à l'autre et de tâcher d'enrayer ainsi la tendance à la hausse des transferts linguistiques du francelais vers l'anglais qui se manifeste depuis le recensement de 1971 chez les jeunes francophones âgés de 15 à 24 ans.
Il se trouve par ailleurs qu'en raison des nouvelles technologies de transmission de l'information, cette entreprise de consolidation, d'enrichissement et d'expansion est davantage réalisable aujourd'hui qu'elle ne l'était dans le passé, pour peu que les gouvernements y consentent les investissements nécessaires au «réseautage» électronique des universités de la francophonie hors Québec, et que celles-ci y mettent le temps nécessaire pour développer une planification nationale scolaire axée sur la concertation interétablissements.
C'est dans cette perspective que le Regroupement a décidé de se doter d'instruments nécessaires pour poursuivre systématiquement les objectifs suivants:
Faciliter les échanges de cours entre les établissements du Regroupement;
Faciliter l'accès à des programmes universitaires en francelais aux communautés francophones qui ne sont présentement pas desservies par un établissement membre du Regroupement;
Faciliter la production, la diffusion, en partenariat entre les établissements universitaires et les entreprises privées de matériaux didactiques multimédiatisés;
Faciliter l'éclosion d'initiatives conjointes susceptibles de consolider l'espace que les établissements du Regroupement occupent présentement sur la scène universitaire canadienne, et de faire éclore une communauté de savoir plus axée sur la réalité des francophones minoritaires et les relations interculturelles.
Pour appuyer la poursuite de ces objectifs, les établissements du Regroupement veulent se doter d'un instrument efficace de concertation et d'échange. Pour que cet instrument soi réellement efficace, il faut qu'il donne lieu à des échanges aussi instantanés que possible, relativement peu coûteux à mettre en oeuvre et à utiliser par la suite, et être le plus convivial possible eu égard aux besoins des corps professoraux et des clientèles étudiantes. Or, à cet égard, tout suggère la mise sur pied d'un réseau de pointe fondé sur les technologies modernes de transmission de l'information tels que les réseaux télématiques, l'audio et la vidéoconférence et cetera.
Le Regroupement est convaincu que la constitution d'un réseau national de concertation et d'échange entre ses établissements est un instrument devenu nécessaire, non seulement pour consolider et enrichir les acquis actuels des francophonies minoritaires canadiennes en matières universitaires, mais aussi pour assurer leur sécurité et leur épanouissement à plus long terme, et conforter ainsi une certaine vision du pays. Mais la constitution d'un tel réseau et les produits éducatifs susceptibles d'en découler pourraient aussi avoir des retombées plus concrètes pour ce pays en termes de développement de ses ressources humaines et d'une expertise -- éventuellement monnayable à l'étranger -- en matière d'enseignement multimédiatisé à distance.
Bref, là il nous semble que la constitution de ce réseau est un projet correspondant tout à fait à la décision, prise par le cabinet fédéral au cours de l'été 1994, de poursuivre les objectifs et les moyens énoncés aux articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles dans le cadre d'une coordination interministérielle axée sur trois secteurs prioritaires: la culture, l'économie et le développement des ressources humaines. C'est pourquoi le Regroupement souhaite que le ministère du Patrimoine canadien, avec lequel il est associé depuis sa fondation en 1990, se donnera les moyens d'appuyer financièrement l'implantation de ce réseau et, aussi, de lui servir de mentor dans le but d'obtenir, auprès d'autres ministères, des contributions pour appuyer des projets particuliers de cette entreprise.
Si j'ai été un peu dans les détails en ce qui concerne le projet d'un réseau national pour les universités de la francophonie hors Québec, c'est pour vous démontrer l'importance de cette initiative pour nous. Compte tenu de l'éparpillement de notre population d'un côté à l'autre et de la petite taille de plusieurs de nos institutions, nous avons besoin de ce genre de réseau afin de maximiser notre potentiel et de livrer les meilleurs services possibles à notre clientèle à des coûts acceptables.
Nous souhaitons que le rapport de votre comité fera état du besoin urgent des universités de la francophonie hors Québec. Les francophones hors Québec sont en droit de recevoir une formation universitaire de qualité afin de pouvoir pleinement participer au développement socio-économique du Canada, un développement de plus en plus axé sur le savoir.
Et je peux répondre à des questions dans n'importe quelle langue, mais seulement en anglais ou en français.
[Traduction]
Le président: Avez-vous déjà envisagé la possibilité, en tant qu'université francophone de la région atlantique du Canada et du fait que le français est une langue romane, d'enseigner et de faire rayonner l'espagnol, compte tenu des accords de libre-échange passés avec le Mexique et des pays d'Amérique du Sud. De cette façon, beaucoup de jeunes Canadiens de la région pourraient peut-être se trouver un emploi là-bas.
M. D'Entremont: En tant que président du conseil de l'Université Sainte-Anne, je puis vous assurer qu'il n'y a pas beaucoup d'idées qui n'ont pas été explorées. Un membre du corps professoral a déjà enseigné l'espagnol, mais dans un collège classique. Nous avons même un professeur allemand, mais nous n'offrons pas encore de cours en allemand.
Je prends bonne note de ce que vous avez dit. L'Université Sainte-Anne et les autres établissements membres du regroupement ont ceci en commun que nos diplômés, à la fin de leurs études, sont bilingues parce qu'ils ont accès à l'enseignement dans les deux langues. L'Université Sainte-Anne attire des Québécois, entre autres parce qu'ils veulent apprendre l'anglais. Nous sommes d'accord que l'enseignement dans les deux langues n'est qu'un début. J'ai assisté à une conférence internationale où j'étais assis à côté d'un Polonais qui parlait sept langues. Le fait de n'en parler que deux me donnait l'impression d'être plutôt stupide. L'enseignement dans les deux langues, comme point de départ, est bon, et, de toute évidence, compte tenu de l'Accord de libre-échange nord-américain, il serait très sensé d'enseigner l'espagnol dans toutes nos universités.
Le sénateur Andreychuk: Je suis heureuse de la façon dont vous abordez les difficultés avec lesquelles vous êtes aux prises. Je remarque particulièrement votre commentaire selon lequel vous ne réclamez pas un traitement spécial, mais plutôt un traitement équitable. Dans ce contexte, dans quelle mesure a-t-on soit ignoré la situation ou y a-t-on accordé trop peu d'attention? En cette période de compressions budgétaires, vos problèmes sont-ils exacerbés par cette tendance ou existaient-ils auparavant?
M. D'Entremont: Ils existaient déjà. Pour ce qui est de l'équité, je n'ai pas les données ici, mais la Fédération des communautés francophones et acadiennes du Canada dont le siège social est à Ottawa a organisé une table ronde pour examiner la situation des collèges communautaires et des universités. J'y ai participé longtemps. Nous avons fait des comparaisons. Par exemple, nous avons comparé la situation d'un million de francophones hors Québec environ -- soit un peu plus que la population anglophone du Québec -- à celle des universités anglophones du Québec. La comparaison soit au prorata, soit par tête, avec des universités anglophones au Québec ayant le même genre de clientèle est intéressante. Ainsi, si la francophonie hors Québec avait des ressources universitaires comparables à ce dont dispose la population anglophone au Québec -- l'Université McGill et l'Université Bishop --, cela représentait entre 40 et 50 p. 100 à peu près de plus que ce qu'elle a actuellement. De plus, une comparaison à l'échelle nationale a permis de déterminer que le ratio de l'argent consacré à l'enseignement en français à l'extérieur du Québec par rapport à la population était bien inférieur. Encore une fois, la comparaison avec le Québec illustre la situation d'une minorité identique qui se plaint d'être maltraitée. En terme de dollars réels, si on compare la population anglophone du Québec à une population de même taille à l'extérieur du Québec, même si l'on tient compte que McGill est une université d'ordre mondial et tout le reste, les ressources par étudiant ou par tête d'habitant demeurent inférieures à l'extérieur du Québec.
Le sénateur Andreychuk: Je vous demandais si vous faisiez déjà face à cette situation quand ont commencé les compressions budgétaires et si le phénomène des compressions a exacerbé le problème?
M. D'Entremont: Il l'a effectivement exacerbé. Cependant, même si elle existait depuis 109 ans, ce n'est que durant les années 70 que l'Université Sainte-Anne a renoncé au modèle du collège classique et qu'elle a commencé à se transformer en université plus contemporaine. L'Université de Moncton a été fondée en 1963. Elle est donc beaucoup plus récente. Avant le ralentissement de l'économie, nous avions un long passé, mais nous n'avions pas eu autant de possibilités de nous développer pleinement. Dans la région atlantique, les deux universités n'en étaient qu'à leurs débuts, alors que d'autres universités ont connu de l'expansion durant cette période. Quand les compressions ont commencé, nous en étions donc à un stade différent de développement.
Le problème existait effectivement auparavant. Cependant, il a probablement été exacerbé parce que nous n'avions pas de base à partir de laquelle prendre de l'expansion. Par exemple, les fonds de dotation de nos universités étaient très inférieurs à ce qu'ils sont dans les grandes universités établies qui prenaient déjà de l'expansion à partir d'une base solide dès les années 40 et 50.
Le sénateur Andreychuk: Les universités ont certes l'obligation d'être au service de la collectivité qui les entoure. Vous avez très élégamment fait remarquer comment les universités hors Québec ont servi de base et de coeur à ces collectivités. Croyez-vous, comme moi après ce que j'ai vu à l'Université de Regina en particulier, qu'en l'absence de l'attention accordée au phénomène linguistique, bon nombre des retombées pour la collectivité francophone de la Saskatchewan n'auraient été ni appuyées ni encouragées, que cette base universitaire est souvent cruciale à la survie et à l'existence des collectivités?
M. D'Entremont: Quand, par exemple, les gouvernements ne font rien de précis à cet égard au sein des collectivités, souvent, les universités -- à nouveau, je connais mieux la situation de Moncton où j'ai enseigné pendant 13 ans et celle de Sainte-Anne dont je préside le conseil -- grâce à l'Institut de formation linguistique de Regina géré en grande partie par des francophones, devenaient l'un, si ce n'est le seul grand moteur de développement de ces localités. Vous constaterez que c'est particulièrement le cas dans l'Est, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, où des centres obtiennent de Sainte-Anne des services de perfectionnement linguistique et pédagogique. Nous avons essayé de beaucoup faire et nous sommes responsables de faire davantage parce que, bien souvent, nous sommes peut-être la seule université de la province à s'occuper de cette clientèle. En comparaison avec d'autres universités qui peuvent être plus élitistes en terme d'exigences d'admissibilité ou de programmes, il faut s'efforcer de faire plus, y compris de travailler avec la collectivité, parce que nous sommes un des seuls établissements de la Nouvelle-Écosse où tout se déroule réellement en français, en dépit de notre petite taille. Toujours en contexte néo-écossais, Sainte-Anne est un établissement francophone très important pour la collectivité. C'est pourquoi, en notre absence, je ne crois pas que la collectivité francophone aurait connu le développement qu'elle a connu. Quels que soient les problèmes avec lesquels elle se débat, l'université a manifestement une très, très grande influence.
Le sénateur Andreychuck: Depuis quelque temps, je lis des articles au sujet de la France, où une grande partie des technologies utilisées sur Internet sont en anglais. Elle estime donc qu'elle est en train de perdre du terrain par rapport à la concurrence. Croyez-vous que le Canada a mis en valeur sa dualité linguistique? Avons-nous cherché à vanter nos technologies dans les stratégies adoptées pour mener des missions commerciales à l'étranger, étant donné que, dans certaines collectivités, nous possédons une base francophone à partir de laquelle prendre un essor? Si vous ne pouviez faire qu'une seule recommandation au gouvernement fédéral concernant la commercialisation de nos technologies à partir de la base francophone des universités, de la recherche qui s'y effectue, que serait-elle?
M. D'Entremont: Une partie de la solution consiste à faire valoir notre dualité linguistique. Bien qu'elle n'ait rien eu de scientifique, à un certain moment donné, j'ai vu les résultats d'une enquête au sujet du programme de MBA en commerce international. J'ai été consterné d'apprendre que, si je me souviens bien, les programmes de MBA internationaux des États-Unis exigent plus de langues que les programmes canadiens, même ceux qui se spécialisent en affaires internationales. Nous sommes peut-être en train de perdre une partie de notre avantage concurrentiel en n'insistant pas plus sur le bilinguisme comme exigence d'admission à l'université, par exemple. Si vous comparez notre situation à celle des Européens, la plupart des Européens sont polyglottes.
En ce qui concerne les technologies, j'avoue qu'en termes de recherche, il est intéressant de noter qu'il y a quelques années -- en réalité, cela a moins à voir avec la technologie qu'avec la langue de travail en sciences --, il y avait eu un petit pépin à l'Institut Pasteur, à Paris. De ce que je me souviens, ce sont en réalité des universités et des chercheurs québécois qui ont fait des pressions pour que le français reprenne sa place comme langue de recherche et de science à l'Institut Pasteur, à Paris. Il était quelque peu déconcertant pour nous de constater qu'en France, on avait tendance à adopter l'anglais comme langue de travail en science, bien qu'il semble depuis quelque temps que le gouvernement français cherche un peu plus à rétablir l'usage du français en science et en technologie.
Bien des choses que l'on trouve sur Internet -- je ne navigue pas beaucoup, car je n'en ai pas vraiment le temps -- sont dictées et dominées par les Américains. Cela veut simplement dire, cependant, que nous devons chercher encore plus à assurer une présence francophone importante. Je crois que le Canada a un rôle très important à jouer à cet égard parce qu'on nous perçoit comme des leaders de la communication. Il me semble donc que ce point a peut-être de l'importance.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool: Merci d'avoir accepté de venir faire connaître au comité le caractère particulier des universités francophones hors Québec. Ma question porte plutôt sur le cri d'alarme qu'on a entendu de tous les étudiants jusqu'à maintenant, que ce soit à Ottawa, que ce soit dans l'Ouest du pays et hier, ici aussi, sur la question du haut niveau d'endettement des étudiants. En raison de la situation géographique de nos élèves, cette population est assez bilingue. Il y a eu, je me souviens quand j'étais à l'école secondaire, certaines sollicitations. Je veux savoir si c'est encore significatif. Il y a eu une certaine sollicitation des universités anglaises et je sais que le UMB est venu chercher à Bathurst des bons élève, parce que cela coûtait moins cher d'aller au UMB. Alors est-ce significatif dans vos institutions ou bien est-ce que les élèves vont choisir en fonction du financement?
Ma deuxième question se rapporte un peu à ce que la Commission supérieure nous a dit ce matin sur la question de la provenance du financement des élèves. Est-ce que les Acadiens, les élèves de l'Université de Moncton, de collèges ou même encore tous les francophones hors Québec sont plus endettés que les autres?
M. D'Entremont: Il semble y avoir un peu plus d'endettement chez les francophones, surtout si on regarde dans notre région, c'est cela que je peux comprendre. Dans beaucoup de cas, les étuditants des universités viennent des milieux ruraux où peut-être les revenus sont moins élevés. Même si les parents font moins d'argent, l'université n'en est pas moins dispendieuse. Donc je sais que le pourcentage d'étudiants dans les Maritimes qui demandent de l'aide financière est plus élevé à Moncton et à Sainte-Anne qu'elle ne l'est dans la moyenne des Maritimes.
Au niveau du recrutement du côté anglophone, c'est moins pour des raisons financières, mais en partie. Pour cette raison, il est nécessaire de parler des besoins de développer un peu plus nos institutions. Moncton au Nouveau-Brunswick, Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse. sont les seules institutions universitaires en français dans cette province, si le choix de programmes est trop limité, déjà là, cela encourage les gens d'aller ailleurs. Si nos services ne sont pas adéquats, c'est plus le collège classique où à l'âge de douze ans, ton père ou ta mère choisit ton collège classique. On t'envoie là et tu n'as pas de choix. Maintenant, les jeunes ont des options et il faut offrir des services, non seulement de qualité, mais des services modernes avec tout l'éventail des produits, si on peut dire, que les jeunes et même les moins jeunes s'attendent à recevoir.
Donc c'est un des problèmes, ce n'est pas seulement l'argent. C'est le besoin du développement de l'infrastructure universitaire hors Québec. Comme je le disais tantôt, on commence à se développer, et puis la crise depuis quelques années a freiné ce développement. La crise économique ne fait pas de bien non plus. Ce n'est pas facile à reprendre l'élan lorsque, dans le cas de Moncton et Sainte-Anne, par exemple, on a perdu des inscriptions depuis quelques années. Ce qui se perd en deux ans, cela prend dix ans à le reprendre. C'est plus facile à perdre qu'à reprendre, selon nos expériences.
Le sénateur Losier-Cool: Puis pour les Acadiens, par rappport à l'Université Laurentienne à Sudbury, est-ce que c'est à peu près les même questions de financement, d'endettement?
M. D'Entremont: Oui. Je crois que ce qu'on devrait faire, tantôt on parlait de rapports qu'on pouvait vous envoyer, alors je vais prendre note de ces questions. Il existe des documents avec beaucoup plus de détails sur, soit l'endettement, soit les taux de participation, ce qui est toujours un problème. Si une société de savoir se développe, bien elle se développe. Et que la francophonie hors Québec emboîte pas le pas dans cet élan, comme je disais tantôt, là vraiment, on va avoir beaucoup de difficultés. Dans les Maritimes, par exemple, si des régions de pêches, des régions rurales, si les industries primaires sont en perte de vitesse et si on n'embarque pas dans le développement de l'institution du savoir, ceci veut dire qu'on est quand même voué à avoir des problèmes dans l'avenir. Par exemple, il me semble que sans faire une étude scientifique, deux plus deux égale quatre.
Le sénateur Lavoie-Roux: D'abord, je veux vous dire combien je suis heureuse qu'enfin on entende parler de l'enseignement universitaire francophone. Ce matin, j'ai posé une question à un groupe qui vous a précédé et qui soit-disant regroupait les universités des Maritimes, toutes les universités des Maritimes. Puis on m'a empêché de poser ma question. Alors je suis contente, parce que c'est une préoccupation que j'ai depuis toujours, depuis mon enfance, quand on entendait parler des développements des services aux Acadiens et tout cela.
J'ai une question très précise sur l'Institut de formation linguistique de l'université de Regina. On m'a dit qu'ils étaient très pénalisés depuis qu'on était passé du APS aux transferts de paiements. Et d'ailleurs, je veux en saisir la ministre du Patrimoine, parce qu'apparemment cela lui appartient. Alors au lieu des drapeaux, elle pourrait peut-être s'occuper de cela. Je voudrais savoir si cela vous a affecté? C'est qu'ils ont subi apparemment des coupures, mais les provinces n'ont pas toutes réagi de la même façon. Il y a des provinces qui ont fait porter alors que d'autres les ont absorbées.
M. D'Entremont: Je suis pas au courant des détails de l'Institut de formation linguistique qui par ailleurs est un membre associé du Regroupement. Ils n'ont pas atteint le niveau de développement requis, selon notre constitution, pour leur permettre d'être membre à temps plein. Je suis au courant qu'à Saint-Boniface, on avait un problème majeur au niveau des langues officielles. On pensait perdre quelque chose comme 700 000 $ ou 800 000 $ suite à des coupures fédérales. Donc, je présume qu'à Regina, c'était le même genre d'affaires. Il est certain que les réductions du fédéral nous affectent tous au niveau des programmes de péréquation, pour les programmes de transferts pour l'éducation. Mais ce qui nous affecte le plus, c'est que les programmes, par exemple, des langues officielles, ont également été coupés. C'était ma référence, pas le plus mais autant, tantôt à d'autres sources de financement. Je sais que dans la plupart de nos institutions universitaire hors Québec, nous recevons moins d'argent via ces véhicules. Alors je suis pas au courant des détails de Regina, mais je sais que Saint-Boniface avait vécu des problèmes majeurs l'année dernière qui ont été finalement rétablis, mais non sans avoir occasionné une lutte entre l'université et le gouvernement.
Le sénateur Lavoie-Roux: Pour nous, il ne s'agit pas non plus d'intenter une lutte à qui que ce soit. Mais par contre, on se gargarise tellement, et de fait, on a fait beaucoup de progrès aussi dans les services d'éducation aux minorités francophones. Et en passant, entre parenthèses, cela doit être tentant de se comparer avec McGill, Concordia. Mais à ce moment, il faudrait passer une semaine ensemble puis faire de l'histoire. Si McGill a atteint un tel degré de développement, elle a été la première université au Canada, ce développement par McGill a toute une histoire. Tandis que dans l'histoire des Acadiens en particulier, qui a été tellement tragique, il y a toutes sortes d'autres facteurs qui ne sont pas nécessairement dus à la générosité des uns ou à la mesquinerie des autres. Là, je parle du moment actuel.
M. D'Entremont: Vous avez bien raison d'ailleurs, puis je pense que c'est Laval qui est la première université en Amérique du Nord et non pas McGill. Mais de toute façon, c'est vrai que McGill, c'est McGill. Le seul point qu'on visait nous autres, c'est lorsqu'on évaluait le tout en termes de poids démographique.
Le sénateur Lavoie-Roux: Puis ensuite, lorsqu'on regarde les CEGEP anglophones au Québec, puis que l'on regarde les collèges communautaires francophones dans les autres provinces, la comparaison ne tient plus.
M. D'Entremont: Parfois l'argument est que par étudiant, vous êtes pas pénalisés. En somme, c'est l'oeuf et le poule. Parfois, si tu as un plus faible taux de participation, c'est en partie parce qu'il n'y a pas les infrastructures, les ressources nécessaires, les programmes pour attirer la clientèle et pour développer le secteur universitaire. Donc on dit, une fois que vous aurez plus d'étudiants, vous aurez plus d'argent et tout cela. Mais lorsqu'on regarde le taux de participation, puis que l'on regarde en termes du poids démographique de la francophonie hors Québec, est-ce que cela contribue au côté public pour l'enseignement postsecondaire? Est-ce que cela est raisonnable en fonction du poids démographique, nonobstant la comparaison avec d'autres? Et on conclut facilement que cela l'est pas. Vous parliez de McGill, mais à Dalhousie ou dans d'autres universités, nos fonds de dotation sont beaucoup moins élevés par rapport au fait qu'il y a pas cet historique d'appui du 19e siècle et du début du 20e siècle. Donc, il n'y a pas ce un, deux ou trois pour cent de revenus additionnels qui viennent des investissements, par exemple. Souvent, cela fait une grosse différence. Pour l'institution qui peut retirer trois pour cent de son budget de revenus d'investissement versus cinq, six, sept pour cent, ces deux ou trois pour cent font beaucoup de différence au niveau des bourses et des équipements.
Le sénateur Lavoie-Roux: Monsieur D'Entremont, j'aimerais revenir à la question des transferts fédéraux de paiements. Vous avez parlé de Saint-Boniface, il y a un problème. Là, on sait que l'Institut linguistique de Regina en connaît un et peut-être vous, dans une moindre mesure. Est-ce qu'il y aurait moyen -- sans vous obliger à une recherche qui vous prendrait un mois, si vous contactez ces gens -- de savoir de quelle façon les transferts fédéraux les ont favorisés ou les ont défavorisés. Ce serait intéressant parce que si on veut, disons faire un chapitre spécial ou enfin quelque chose de spécial pour les universités francophones, si on avait ces données, ce serait très utile. Je vais me dépêcher parce que je vais me faire gronder, cela prendra pas de temps. Le groupe de la Commission de l'enseignement supérieur des provinces maritimes m'a quand même répondu un tout petit bout avant qu'on se fasse interrompre. Ils m'ont dit qu'on notait dans les institutions francophones, une diminution de la population. Alors vous parliez que peut-être votre sort s'améliorerait si vous augmentiez vos effectifs. Pouvez-vous me dire quelles sont les causes de cette diminution? Puis il y en a une sur laquelle j'aimerais que vous nous donniez votre réaction. Est-ce que la proximité du Québec, surtout au Nouveau-Brunswick, un peu moins en Nouvelle-Écosse, mais ce n'est quand même pas très loin, fait que les gouvernements provinciaux ont tendance à dire: bon, bien ici on n'a pas ceci, on n'a pas cela, mais allez au Québec, ils vont vous recevoir? Puis cela les dispense de faire des efforts. Est-ce que vous vous souvenez de toute ma question?
M. D'Entremont: Je peux répondre dans le cas de Moncton et de Sainte-Anne, je peux moins répondre pour Moncton. Ce sont des cas un peu différents, mais dans les deux cas, on constate un certain nombre de choses. La question économique y est pour quelque chose, la question des coûts. Nos coûts et nos frais augmentent. Je crois qu'il y a moins de finissants des écoles secondaires. Donc certainement, si le taux de participation n'augmente pas, le taux de finissants des écoles diminue. Disons que cela explique la situation en partie.
Il y a aussi ce que le sénateur Losier-Cool disait tantôt. Il y a également plus de compétition. Il y a plus de mobilité chez nos étudiants et étudiantes des écoles secondaires, peut-être pour le Québec, et même pour les universités anglophones et cetera. On a vu au Nouveau-Brunswick, au cours des 10 ou 15 dernières années, un développement intéressant des collèges communautaires. Donc il y a maintenant des programmes de deux ans, de trois ans au niveau technologique, qui sont très intéressants et de haute qualité, en français. Donc, ce ne sont plus des écoles vocationnelles. Pour un certain nombre d'étudiants, le collège communautaire est leur premier choix, avec raison. Il y a des gens qui peuvent faire des études intéressantes et qui débouchent sur des carrières intéressantes. Donc, il y a moins d'étudiants et plus de compétition.
Dans le cas de Sainte-Anne particulièrement, en plus de cela, on subit également l'impact des décisions rationnelles qui sont prises pour l'ensemble du secteur universitaire. Donc en Nouvelle-Écosse, on a réduit sept programmes de baccalauréats en éducation à quatre programmes. On a par contre éliminé les programmes intégrés (BA et BED), que l'on recrutait dans les écoles secondaires. Dans le cas de Sainte-Anne, c'était notre plus gros programme, celui qui se vendait le mieux. C'était un programme intégré de BA et de BED. Donc, on réduit de sept à quatre. Sainte-Anne a soi-disant gagné la bataille parce qu'on a maintenu le programme. Mais on a éliminé un programme intégré et la règle est qu'on ne peut pas favoriser nos propres étudiants pour admission au BED pour éviter que l'Université Dalhousie soit pénalisée.
Donc, pour l'ensemble des institutions anglophones, c'était une bonne règle de dire le BED après le baccalauréat. Et donc on n'a pas de favoritisme pour les étudiants qui sont sur le campus et d'ailleurs, la demande est grande. Dans le cas de Sainte-Anne spécifiquement, cela nous a enlevé notre meilleur outil de recrutement dans les écoles secondaires, qui était de les amener pour quatre ans ou cinq ans dans une séquence qui incluait le BED.
Donc, ce n'est pas le cas de Moncton. C'était peut-être une bonne décision au niveau du secteur et de la province, mais pour nous autres, parce que l'éducation représentait je pense 60 p. 100, du programme intégré, de nos inscriptions. Enlever la possibilité de recruter du secondaire pour une séquence de quatre, cinq ans, incluant le BED, c'est dire qu'on a gagné la bataille pour le BED, mais cette décision nous affecte beaucoup. Donc, il faut maintenant tout revoir nos autres programmes de baccalauréat, refaire notre recrutement, pour pouvoir accommoder les changements au niveau des sciences de l'éducation. Cela s'applique à Sainte-Anne, mais quand même cela aide à expliquer une chose. C'est que les petites institutions minoritaires sont plus vulnérables. C'est peut-être marginal pour une institution de 10 000 étudiants; en perdre 200 ici ou 100 là. Mais dans notre cas, une règle aussi banale que cela, abolir un programme d'une durée de quatre ou cinq ans et introduire une politique disons de non favoritisme nous nuit. Et dans notre cas, on ne rencontre même pas nos quotas parce que le bassin de population francophone n'est pas si élevé que cela.
Donc même si on admettait les étudiants chez nous du secondaire pour un BA pour ensuite faire un BED, on ne serait pas en train de priver personne d'autre d'admissions. Donc, ce sont des choses comme cela. Parfois, c'est la question structurelle, la compétition, l'argent, le manque d'étudiants. Parfois des décisions bien fondées ou des décisions de la majorité sont bien fondées, mais elles nous affectent.
Que ce soit nous autres ou à Saint-Boniface, plus nous sommes petits, plus il est difficile de surmonter ces décisions néfastes. Et dans le cas de Sainte-Anne on est en train de discuter à savoir comment on va combattre cela. Il nous faut un minimum d'appui pour maintenir les facilités, l'infrastructure de base pour par la suite pouvoir utiliser cela comme tremplin pour se développer davantage.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je termine, monsieur le président. Mais c'est la première fois qu'on en a un qui peut tout nous raconter cela en français. Pouvez-vous me dire si la population acadienne des provinces maritimes diminue ou si elle se maintient?
M. D'Entremont: En Nouvelle-Écosse, elle diminue un peu. Du côté de l'assimilation, je crois que le taux est en train de réduire. Le taux d'assimilation, je crois, est moins grave qu'il ne l'était. Mais il y a quand même, si on regarde le recensement de 1991 versus 1981, quelques Acadiens de moins qui se déclarent. Au Nouveau-Brunswick, cela dépend des régions, mais il y a beaucoup moins d'assimilation au Nouveau-Brunswick qu'en Nouvelle-Écosse. Et là où il y a l'assimilation, c'est beaucoup plus dans des régions comme Fredericton, Saint-Jean et le Sud-Est. Il y a beaucoup plus de francophones dans le Nord-Est et le Nord-Ouest. Il y a même au Nouveau-Brunswick beaucoup de Smith et de Ferguson qui sont des francophones, ce sont des anglophones assimilés.
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a eu, disons dans la dernière année, je ne veux pas remonter à plus loin que trois ans, une réflexion écrite qui a été faite sur l'état de l'éducation pour les francophones, que ce soit dans les Maritimes ou que ce soit pour les francophones hors Québec? Pour nous permettre de bien saisir, on peut bien se lancer dans des grandes envolées, mais je pense qu'il nous faut des données un peu plus rigoureuses. Et si vous aviez quelque chose que vous pourriez nous faire parvenir, je l'apprécierais beaucoup.
M. D'Entremont: Certainement, il y a le rapport des tables de concertation du postsecondaire. C'est un comité des jeunes Canadiens-français et les francophones acadiens. Ce rapport date de seulement deux ans, je pense. Et donc, il y a pas mal de données au niveau des budgets, par exemple, par secteur. Même les fonds de dotation démontrent qu'on est plus pauvres parce qu'on est moins riches. C'est peut-être évident, mais parce qu'on a moins d'argent à la banque, on a moins de revenus d'investissement. Donc, tout cela inclut les chiffres, je pourrais vous envoyer cette copie.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je vous remercie beaucoup. Je pourrais vous questionner longtemps, vous savez.
M. D'Entremont: De toute façon, je vais revenir cet après-midi.
[Traduction]
Le sénateur Forest: J'aimerais donner un peu plus de détails historiques sur la Faculté Saint-Jean, car j'étais membre du conseil de la faculté et du conseil d'administration de l'Université de l'Alberta lorsqu'elle a été intégrée grâce à la collaboration des gouvernements fédéral et provincial, des Oblats et de l'université. Le conseil d'administration était très préoccupé à l'époque. Le résultat du vote quant à l'intégration a été très serré. Quelques années plus tard, il est merveilleux de constater le résultat. Il faut répandre la bonne nouvelle.
Depuis l'intégration, l'université n'offre pas beaucoup de programmes, mais ceux qu'elle offre sont excellents. Elle attire pas mal d'étudiants du Québec, et il est merveilleux de voir comment les deux cultures peuvent cohabiter. Récemment, l'université a reçu des subventions fédérales qui lui permettent de moderniser ses installations. Un quartier d'Edmonton s'appelle la Cité francophone parce qu'on y trouve des librairies françaises. C'est un milieu en pleine effervescence. Il faut donc reconnaître que de grands progrès ont été faits. Nous sommes toujours à court de ressources, nous n'avons pas beaucoup d'étudiants, mais je crois que ce genre de programme offert partout au Canada est un atout fantastique non seulement pour les francophones, mais aussi pour les anglophones. La présence de pareils organismes importe beaucoup, également, pour l'unité du pays.
Vous semblez pessimiste, monsieur, mais les nouvelles ne peuvent être que mauvaises. Il faut aussi annoncer les bonnes nouvelles. Nous sommes tous à court de fonds, mais voyez-vous une lueur au bout du tunnel?
M. D'Entremont: Tout d'abord, à l'automne, le regroupement a tenu son assemblée annuelle à la Faculté Saint-Jean. J'ai pu voir par moi-même ce qu'on y avait accompli, et vous avez raison. Je suis rarement accusé de pessimisme. En fait, c'est habituellement moi qui, même face à un déficit d'un demi-million de dollars, dirai: «Bon, faisons une collecte; il nous reste huit jours avant la fin de l'exercice». On m'a rarement accusé de broyer du noir. Toutefois, vous avez raison. Par exemple, l'initiative fédérale qui a permis de verser de l'argent à la Faculté Saint-Jean, à l'Université Sainte-Anne et à l'Université de Moncton pour leur école de droit a été très utile, et le moyen de le faire était intéressant en ce sens que l'argent était mieux ciblé. Si les moyens sont limités, c'est une question de déterminer les priorités. À cet égard, nous estimons que, si la dualité linguistique est une caractéristique fondamentale de ce pays et qu'il existe un certain sous-développement par rapport au passé, par exemple, il faudrait peut-être qu'en dépit de ces moyens limités, cette question soit une priorité.
Vous avez raison. Au fil des ans, particulièrement des quelques dernières années, on a pris des mesures spéciales pour favoriser la gestion scolaire et l'enseignement postsecondaire. On a injecté 34 millions de dollars dans l'enseignement postsecondaire, y compris dans les collèges communautaires de l'Ontario, à Moncton, à Sainte-Anne et, je crois, à Saint-Jean. Je ne voulais pas donner l'impression que rien de bon ou d'utile ne se fait. C'est tout simplement qu'en dépit de toutes les bonnes nouvelles, il reste encore beaucoup à faire. À nouveau, je précise que le financement a en règle générale souffert, en partie à cause de la crise des finances publiques. Quand l'économie change, qu'elle n'a pas atteint la maturité, cela fait un peu plus mal. C'est ce que j'essayais de faire valoir. Cependant, vous avez parfaitement raison.
Le sénateur Forest: Je tenais simplement à souligner un autre point. Je constate une attitude différente dans les universités, en ce sens qu'elles se lancent dans d'énormes levées de fonds. Trois millions de dollars de ces fonds seront réservés à la création d'une chaire à la Faculté Saint-Jean. Je crois qu'il faut parler un peu plus des bons côtés.
M. D'Entremont: Il existe un excellent esprit de coopération entre toutes les universités, au sein de l'Association des universités et des collèges du Canada. Les témoins qui m'ont précédé ont parlé des Acadiens en Nouvelle-Écosse, les syndicats de professeurs ont parlé du besoin, bien que nous en soyons un très faible élément et qu'il s'agisse de la francophonie hors Québec, depuis la création du regroupement en 1990, que les universités du Québec assistent à toutes nos réunions. Elles participent même aux réunions de notre comité exécutif. Quand nous avons fondé le groupe, à Sudbury, en 1990, Michel Gervais, président du conseil de Laval, était aux prises avec une grève qui avait commencé le jour même. Cela ne l'a pas empêché de venir à Sudbury. Essentiellement, il a dit qu'il avait promis d'être avec ses collègues à l'extérieur du Québec, et il est venu.
Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas contre quoi que ce soit, au contraire, et nous avons adopté une approche positive. Nous entretenons aussi d'excellentes relations avec l'Université de l'Alberta, l'Université York et d'autres établissements du Québec et à l'extérieur de celui-ci.
Le président: Je vous remercie de cet excellent exposé fait dans les deux langues officielles. Si nous avons d'autres questions à vous poser, nous communiquerons avec vous.
La séance est levée.