Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Banques et du commerce
Fascicule 25 - Témoignages pour la séance du matin
TORONTO, le jeudi 30 juillet 1998
Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 9 heures pour examiner la situation actuelle du système financier au Canada (Loi sur les prêts aux petites entreprises).
Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Nos premiers témoins d'aujourd'hui représentent l'Association canadienne de financement et de location. Monsieur Simmons et monsieur Powell, nous vous remercions de votre présence.
Merci pour le mémoire que vous venez de nous remettre. Je vous demanderai de commencer par le résumer. Ensuite, nous aimerions avoir une discussion avec vous à son sujet.
M. Tom Simmons, président, Association canadienne de financement et de location: Au nom de l'Association canadienne de financement et de location, je voudrais remercier le comité de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue sur la Loi sur les prêts aux petites entreprises.
Notre exposé, comme notre mémoire, sera divisé en trois parties. La première sera une brève description de l'industrie du financement basé sur l'actif et du crédit-bail et de son importance croissante pour l'économie canadienne.
La deuxième partie examinera les questions soulevées par le comité dans son aide-mémoire du 22 juin 1998.
La troisième partie soulèvera certaines questions fondamentales qui ne sont pas abordées dans la consultation engagée cette année. Selon nous, la LPPE reste un programme conçu au début des années 1960 qui est peu en mesure de faire face à l'évolution de plus en plus rapide des systèmes de prestation, des produits et des services du secteur des services financiers d'aujourd'hui.
Nous terminerons sur quelques réflexions au sujet de la façon dont le gouvernement pourrait atteindre ses objectifs en matière de financement des PME en tenant compte à la fois des besoins de celles-ci, de ses propres limites et des techniques de financement plus modernes.
Je demanderai maintenant à David Powell, le président de l'ACFL, d'aborder nos deux premiers points -- en décrivant d'abord brièvement notre industrie, puis en abordant certaines des questions spécifiques soulevées par le comité.
M. David Powell, président, Association canadienne de financement et de location: Votre comité, probablement plus que tout autre comité parlementaire, connaît l'Association canadienne de financement et de location et l'industrie qu'elle représente; permettez-moi néanmoins de vous décrire brièvement ce que nous considérons comme notre situation actuelle en deux minutes.
Notre association comporte plus de 160 membres actifs dans l'industrie du financement basé sur l'actif et de la location d'équipement et de véhicules au Canada. Nous avons des membres dans l'ensemble du secteur des services financiers, depuis les banques, les compagnies d'assurance, les compagnies de fiducie et les courtiers en valeurs mobilières jusqu'aux sociétés de financement des fabricants et aux sociétés de crédit-bail indépendantes. Les clients de cette industrie sont des PME canadiennes aussi bien que des consommateurs. Ses fondateurs sont les fonds de pension, les compagnies d'assurance et les banques.
Ses services complètent ce qu'offrent traditionnellement les banques et les autres institutions de prêt en ajoutant des capitaux supplémentaires aux sommes disponibles pour le crédit au Canada.
Nos membres créent des coentreprises, pratiquent l'impartition et établissent des partenariats ou des alliances pour le partage des risques financiers. C'est ainsi qu'aujourd'hui les banques canadiennes confient les transactions de crédit-bail avec leurs clients, y compris les PME, à des membres de l'ACFL. Les banques envisagent également de leur confier d'autres services financiers. À de nombreux égards, nos membres symbolisent les changements que connaît actuellement le secteur des services financiers, et, par le caractère novateur de leurs produits et de leurs services, ils encouragent la transformation des services financiers.
Selon nos estimations, les transactions financières conclues par notre industrie avec des clients et des consommateurs canadiens atteignent actuellement un montant situé entre 80 et 100 milliards de dollars.
D'après Statistique Canada, les entreprises canadiennes ont investi 55,3 milliards de dollars dans de nouvelles usines et de nouveaux équipements en 1996. D'après nos estimations, environ 25 p. 100 de ces investissements ont été financés par notre industrie. C'est un net progrès par rapport au chiffre de 5 p. 100 ou moins qui prévalait il y a une dizaine ou une douzaine d'années. Il s'agit de l'équipement.
Pour ce qui est de la location de véhicules, le nombre total de véhicules de tourisme, de camionnettes et de fourgonnettes vendus au Canada en 1996 était de 1,1 ou 1,2 million; donc 45 p. 100, soit plus d'un demi-million, ont été loués. Quarante-six pour cent des véhicules loués l'ont été par des entreprises, principalement pour les ventes, les livraisons, le service et l'entretien.
Les véhicules loués par des entreprises représentent donc près de 25 p. 100 de tous les véhicules neufs vendus au Canada. Les membres canadiens de l'ACFL sont donc des partenaires clés des entreprises canadiennes.
J'insiste sur ce point parce que je sais que certains domaines ont été exclus des discussions portant sur l'ACFL, notamment la question des véhicules. Certains ne se rendent pas compte de l'importance du rôle des véhicules dans le fonctionnement des entreprises.
Le Conference Board a présenté l'année dernière une étude révélatrice des réalités financières du secteur des PME intitulée: «What's New in Debt Financing for Small and Medium-Sized Business?»
Deux constatations importantes sont ressorties de cette étude. L'une d'entre elle est que les méthodes que nous utilisons actuellement pour observer le financement des petites entreprises au Canada négligent environ 50 p. 100 de ce qui se passe réellement sur le marché. En d'autres termes, les moyens utilisés pour déterminer la quantité de financement utilisé réellement par les petites entreprises permettent seulement de noter la moitié de ce qui se passe réellement. La deuxième constatation importante est que notre industrie fournit une bonne partie des 50 p. 100 restant.
Ces constatations du Conference Board soulignent un point très important: l'incapacité des moyens traditionnels de collecte de statistiques et d'analyse de l'activité des services financiers à donner une idée complète de ce qui se passe en réalité. Ce phénomène amène à se demander si la planification de la politique gouvernementale repose sur des informations satisfaisantes. Nous nous demandons si l'attitude du gouvernement au sujet de l'application de la LPPE a été déterminée par des renseignements incomplets. Ce programme est conçu en fonction d'une série d'hypothèses qui reflètent de moins en moins les réalités actuelles du financement.
Je voudrais maintenant passer brièvement à certaines des questions soulevées dans votre aide-mémoire de juin. Vous avez posé six questions spécifiques au sujet de l'examen actuel du programme, et nous commenterons brièvement trois d'entre elles.
La première question était la suivante: faudrait-il étendre l'application de la LPPE aux entreprises axées sur la connaissance?
D'après notre expérience, il est clair que ce domaine est en forte croissance, aussi bien pour ce qui est de la création de nouvelles entreprises que du développement de produits, de services et de processus novateurs. Nous serions d'accord pour qu'on veille particulièrement à ce que le programme offre un soutien efficace aux entreprises axées sur la connaissance sans négliger les PME admissibles d'autres secteurs.
La deuxième question que vous avez posée était la suivante: faut-il maintenir le montant maximum actuel des prêts ou le modifier?
Nous ne sommes pas convaincus de la nécessité de réduire la taille maximale des prêts. L'amélioration de l'efficacité et les pressions résultant de la concurrence entraînent souvent une diminution du coût des nouvelles technologies, de l'équipement de production industrielle et des véhicules spécialisés, mais la réduction du montant maximal des prêts impose au financement des PME un obstacle supplémentaire que ne semble pas justifier le coût réel d'exploitation des entreprises.
L'aide-mémoire du comité signale que «les défauts de paiement sont plus fréquents et se produisent plus rapidement pour les prêts importants (entre 150 000 et 250 000 $) que pour les prêts plus petits, ce qui augmente les coûts du programme», mais une simple réduction du montant maximal éligible des prêts ne constitue peut-être pas la solution à ce problème. Il serait peut-être plus productif de réexaminer les procédures d'approbation des prêts et la structure d'ensemble du programme.
La troisième question -- la dernière que nous souhaiterions commenter -- était la suivante: -- a-t-il des dispositions de la loi qui pourraient être modifiées pour faciliter l'administration de la LPPE? Aujourd'hui, les financements d'un petit montant, qu'il s'agisse de prêts ou de baux, constituent des services financiers de haute technologie, fortement automatisés, à faible intervention humaine et effectués en grand nombre.
Les sociétés de financement basé sur l'actif et de location ont, comme les banques, de plus en plus recours à la technologie pour procéder automatiquement à l'approbation d'un crédit avec une intervention minimale. C'est l'antithèse de la structure de la LPPE, qui se refuse à adopter les communications de pointe, impose un lourd fardeau bureaucratique et nécessite qu'on accorde une attention considérable et coûteuse à chaque transaction.
M. Simmons va maintenant passer à la partie suivante de notre exposé.
M. Simmons: Monsieur le président, nous avons l'impression que, dans le cadre de ce processus, certaines questions fondamentales ne sont pas posées: le programme actuel optimise-t-il l'accès à un financement approprié? Augmente-t-il la disponibilité du crédit? Renforce-t-il le choix des fournisseurs de financement et des produits de financement? Le programme réagit-il à l'évolution rapide des systèmes de prestation, des produits et des services du marché des services financiers?
Les discussions actuelles favorisant l'aménagement du programme existant ont tendance à mettre l'accent sur le recouvrement des coûts et la limitation des risques du gouvernement au lieu d'améliorer véritablement la disponibilité de fonds pour les PME.
On parle aujourd'hui de prolonger le programme LPPE existant probablement jusqu'en 2004. Si, pendant l'été 2003, nous discutons à nouveau ici de la façon de continuer à modifier ce programme, nous pensons que le gouvernement aura laissé échapper d'importantes possibilités d'améliorer la situation.
De notre point de vue, le programme actuel pose trois problèmes fondamentaux dont on ne parle pas. Premièrement, la LPPE fausse le processus décisionnel des PME. Deuxièmement, elle n'est pas à la hauteur de la technologie nouvelle. Troisièmement, elle ne tient pas compte des nouvelles techniques de financement.
Passons brièvement au premier problème fondamental. Le programme LPPE actuel a pour effet d'encourager les PME à privilégier les formes d'endettement admissibles au titre de ce programme, qu'il s'agisse ou non de la forme la plus appropriée pour une entreprise donnée. Ce programme encourage essentiellement les PME à s'endetter au moment où elles peuvent le moins se le permettre. En les obligeant à contracter un emprunt auprès d'une banque, il exclut d'autres options de financement qui pourraient permettre la constitution d'un portefeuille d'endettement plus équilibré.
En d'autres termes, les limitations même du programme servent à fausser ou influencer le processus décisionnel des PME et à limiter leurs choix en matière de financement.
Le programme actuel n'est pas à la hauteur des nouvelles technologies. Conçu au début des années 60, la LPPE n'est pas en mesure de faire face à l'évolution de plus en plus rapide des systèmes de prestation, des produits et des services du secteur des services financiers.
Le programme de la LPPE ne tire pas profit des nouvelles sources et techniques de financement. Il n'utilise pas les avantages des programmes de financement des vendeurs offerts par ce qu'on appelle les filiales de financement «captives» des fabricants d'équipement et de véhicule ou par des sociétés de financement indépendantes qui collaborent avec ces fabricants; le programme ne reflète pas non plus l'utilisation croissante de la titrisation pour avoir accès à des sources nouvelles de capitaux à court et à long terme, en particulier sur le marché des prêts basés sur l'actif.
Nous aimerions examiner brièvement le troisième domaine qui pose des problèmes, les sources et les techniques nouvelles de financement, en particulier le financement par le vendeur et la titrisation.
Ces programmes offerts par les filiales financières des fabricants d'équipement et de véhicule et par des sociétés de financement indépendantes qui collaborent avec ces fabricants génèrent aujourd'hui une croissance importante de capitaux.
Les entreprises manufacturières fortement capitalisées qui ont d'importants revenus mettent à profit leurs propres actifs et leurs compétences de base au lieu de s'adresser aux institutions financières traditionnelles.
Environ 20 p. 100 des membres de l'ACFL sont des sociétés «captives» ou des filiales créées par les fabricants pour financer l'achat des produits de leur société mère par les consommateurs. Certaines de ces sociétés captives sont très grosses: Ford Motor Credit, GMAC, IBM Finance, Hewlett-Packard, Xerox Leasing, et cetera. Il est intéressant de noter que ces sociétés commencent par offrir le financement des produits de leur société mère, mais, une fois qu'elles comprennent comment fonctionne ce type d'activité, beaucoup visent plus loin et financent non seulement des produits identiques fabriqués par d'autres entreprises, mais également des produits que leur société mère ne fabrique pas du tout.
Nos membres deviennent de plus en plus les prêteurs de premier recours des PME. C'est seulement quand nos membres ont refusé de leur accorder un crédit parce qu'elles ne répondent pas à leurs critères que les PME se tournent vers les prêts bancaires couverts par la LPPE. Faudrait-il permettre aux PME de bénéficier des possibilités de plus en plus nombreuses offertes par ce type de financement?
La deuxième technique novatrice de financement est la titrisation. Pour les sociétés de financement basé sur l'actif et de crédit-bail, la titrisation constitue une option rentable de financement. La structure de la LPPE n'encourage pas l'utilisation de cette technique pour avoir accès à des sources non traditionnelles de fonds. En outre, le transfert de la garantie gouvernementale à un tiers posant certains problèmes, cette technique de financement ne convient guère aux prêts couverts par la LPPE.
Pour conclure, monsieur le président, si la politique gouvernementale a pour but de permettre aux PME d'obtenir un financement et si le problème consiste à faciliter le financement de montants considérés comme trop faibles pour justifier leur coût d'administration ou de prêts présentant un risque trop élevé, il existe de nouvelles solutions qu'il faudrait examiner à fond. Le gouvernement rend un mauvais service aux PME en excluant des produits financiers dont l'utilité et la valeur ont fait leurs preuves.
Une option que le gouvernement pourrait envisager, en particulier pour le financement basé sur l'actif qui reflète l'utilisation élargie de la titrisation, serait une sorte de prototype de mise en commun de la titrisation pour les prêts et la location aux PME. Il pourrait s'agir d'une initiative publique et privée conjointe, dans le cadre de laquelle les fonds mis en commun seraient structurés et gérés par le secteur privé, et le gouvernement renforcerait les facilités de crédit.
À ce titre, le gouvernement examinerait périodiquement le portefeuille de prêts au lieu d'examiner et d'administrer chaque transaction. Les institutions financières participantes qui émettraient les prêts et les baux devraient assumer une proportion prédéterminée de toute perte pour assurer l'application initiale des processus d'évaluation du crédit.
À notre avis, le mariage entre de nouvelles sources de capitaux et l'amélioration de l'efficacité due aux technologies plus récentes en matière d'ouverture des transactions, d'administration et de communication offrirait des possibilités supplémentaires de financement dans des conditions meilleures.
Le risque auquel le gouvernement serait exposé serait limité à sa part prédéterminée de l'ensemble des pertes, qui diminuerait petit à petit au fur et à mesure que les investisseurs institutionnels et les marchés des capitaux accepteraient plus facilement les valeurs basées sur l'actif des PME.
Il est à l'avantage de toutes les entreprises, en particulier les PME, de pouvoir disposer des options de financement adossé, des conditions souples de paiement, de la connaissance des produits et de l'expertise de remise en marché offertes par le bailleur.
Ce dernier est alors beaucoup plus qu'un simple fournisseur de crédit. Il fournit une valeur ajoutée tout au long de la chaîne de fabrication, de distribution et de consommation.
On part du principe que, sans la LPPE, les PME qui peuvent actuellement bénéficier du programme seraient incapables d'obtenir un prêt bancaire. Même, en l'absence d'un programme satisfaisant, il leur restera impossible d'obtenir aussi un financement basé sur leur actif ou un crédit-bail.
Dans le contexte de la LPPE, il est nécessaire de placer les prêts et les baux sur un pied d'égalité pour offrir davantage d'options aux utilisateurs ultimes. Ces dernières années, l'industrie du crédit-bail a fait preuve d'une agilité remarquable, d'une aptitude prodigieuse à faire preuve de créativité et d'imagination et à élaborer des solutions individualisées. Les PME devraient avoir les mêmes avantages que les grosses entreprises en matière de financement. C'est à cet égard qu'il faut créer des conditions égales pour tous.
Selon l'ACFL, en élargissant le programme d'aide financière aux PME pour refléter les réalités de l'évolution de plus en plus rapide des services financiers, on pourrait obtenir les résultats suivants: davantage de PME obtiendraient un financement; les PME obtiendraient davantage de financement; elles PME pourraient bénéficier de conditions de financement différentes et elles pourraient profiter de davantage de dispositions plus intéressantes pour elles.
Il ne faut pas se méprendre sur le point de vue de l'ACFL. L'industrie du financement basé sur l'actif et du crédit-bail ne cherche à obtenir aucune espèce d'aide financière gouvernementale. C'est plutôt le marché qui offre de nouvelles façons de structurer le financement des PME et de nouvelles sources de financement, non utilisées auparavant, pour les PME.
Ici prend fin notre exposé, monsieur le président. Nous répondrons avec plaisir aux questions que le comité pourrait vouloir nous poser.
Le président: Avant de donner la parole à mon collègue, je me demande si je peux vous demander de réfléchir à l'idée suivante, qui découle, en fait, de la troisième partie de votre exposé et de ce que vous expliquez à partir de la page 8 de votre mémoire.
Oublions un instant les limitations ou la structure de la LPPE actuelle. Ce que vous dites réellement est qu'il faut trouver une façon, au moins à titre expérimental, d'essayer de permettre aux PME de bénéficier d'une aide gouvernementale pour louer différentes choses.
À la page 14 de votre mémoire ainsi que dans vos commentaires, monsieur Simmons, vous avez, de fait, proposé une façon spécifique de le faire, c'est, en gros, ce que vous appelez le partenariat entre le secteur public et le secteur privé.
Étant donné qu'il est peu vraisemblable qu'un gouvernement quelconque lance véritablement un tel programme sans réaliser un projet pilote d'une nature ou d'une autre ou sans le mettre d'abord à l'essai à petite échelle pour voir comment il fonctionne, pouvez-vous nous dire quelle forme prendrait un projet pilote, c'est-à-dire un programme de nature expérimentale? De quelles sommes aurait-on besoin pour vérifier raisonnablement comment ce programme fonctionnerait, et cetera?
M. Simmons: Je dirai d'abord que je ne suis pas spécialiste de la titrisation, mais nous aimerions qu'il y ait le plus grand nombre possible d'émetteurs de prêts et de baux. Je crois que tel serait le but du gouvernement?
Le président: Par émetteurs, vous entendez prêteurs?
M. Simmons: Dans notre milieu, celui du crédit-bail basé sur l'actif, nous considérons l'émission, la gestion et le financement comme des fonctions distinctes qui peuvent être exécutées séparément. Tout le monde connaît bien l'émission de prêts. Certains connaissent bien la gestion des prêts et des baux. Ensuite, il y a le mécanisme de financement qui consiste à titriser des prêts et des baux, que ce soit dans les transactions privées ou sur les marchés des capitaux.
Nous avons donc pensé à un concept, mais, je le répète, c'est quelque chose de purement expérimental pour le moment. Supposons qu'on a divers prêteurs, disons 50 ou 100, le plus grand nombre possible. Ces prêteurs ont mis au point des modèles de cotation extrêmement perfectionnés. Initialement, par l'intermédiaire de leurs vendeurs ou directement, les prêteurs soumettraient la demande de prêt ou de bail à leur modèle de cotation du crédit.
Étant donné les paramètres de la LPPE, les entreprises sont, généralement, axées sur la connaissance ou existent seulement depuis deux ans. Si les critères de crédit du prêteur sont tels qu'il faut que l'entreprise existe depuis au moins cinq ans, la demande sera rejetée. Tous ces émetteurs de prêts ou ces prêteurs directs rejettent donc de nombreuses demandes.
De nombreux prêts sont refusés à cause d'une mauvaise cote de crédit, mais ce n'est pas de ce genre d'entreprise que nous parlons. Il est évident que le gouvernement ne s'intéresse pas aux entreprises de ce genre, mais aux nouvelles entreprises.
Nous prendrions donc toutes les demandes rejetées, et un nouveau modèle de cotation du crédit serait élaboré conjointement par notre industrie et le gouvernement. Il déterminerait le profil des PME que le gouvernement souhaite aider.
Le président: Permettez-moi de vous interrompre ici... nous avons, vous et moi, quelque chose à apprendre dans ce domaine. Vous nous dites que vous soumettriez une demande une première fois au modèle et que, si elle est acceptable, le secteur privé s'en occuperait.
M. Simmons: Absolument.
Le président: Parmi les demandes rejetées la première fois, il y a celles qui continueraient de l'être et celles qui sont plus risquées que ce que le secteur privé est prêt à accepter mais pas au point d'être considérées comme un investissement stupide.
M. Simmons: Absolument.
Le président: C'est de cette dernière catégorie que nous parlons maintenant.
M. Simmons: Revenons à la première catégorie. Pour les demandes auxquelles on ne veut pas donner suite, il existe des prêteurs -- c'est ce que nous appelons le financement non conventionnel et les prêteurs pour clients marginaux -- dans le secteur du crédit-bail pour les véhicules et l'équipement qui s'intéressent à ce genre de cas. Les prêteurs de ce type pourraient donc accepter certains de ces gens.
Mais, dans l'ensemble, tous les prêteurs sachant que le crédit-bail fait partie du programme, on comparerait les demandes rejetées -- pas les postulants marginaux, mais toutes les autres demandes rejetées qui font partie de la catégorie suivante -- avec le profil de crédit élaboré conjointement par l'industrie et le gouvernement.
Le problème que cela pose est que nous n'avons pas de données de référence à partir desquelles élaborer un modèle de crédit; il faudrait donc apprendre au fur et à mesure. Par exemple, à ma connaissance, les sociétés de crédit hypothécaire prêtent de l'argent depuis 100 ans. Grâce aux données accumulées, elles connaissent donc, par exemple, le pourcentage d'échecs et les caractéristiques des prêteurs ou des emprunteurs. Nous pourrons donc en faire autant au fil du temps; nous pouvons élaborer une base de données au fil du temps si nous faisons de notre mieux pour cela.
Nous pouvons le faire une fois que nous avons un grand nombre de prêts approuvés... l'émetteur du prêt continuera d'assumer la responsabilité de la première partie des pertes, et le chiffre actuel serait d'environ 15 p. 100.
Le président: C'est exact.
M. Simmons: Il y a ensuite l'élément d'amélioration du crédit, qui relève du gouvernement. Le modèle serait basé sur le niveau de perte souhaité. En d'autres termes, si on veut que les pertes se montent à 400 points de base, le modèle sera conçu en fonction de ce chiffre; si on choisit 600 points de base, le modèle sera conçu en conséquence. Voilà l'élément d'amélioration du crédit.
Je répète que je ne suis pas un expert, mais prenons, par exemple, un montant de 1 000 $. On met d'office 15 p. 100 de côté. Sur le marché, le reste est constitué de valeurs A1 ou AAA dans lesquelles les institutions financières canadiennes, les fonds de pension et les sociétés d'assurance investissent très volontiers. Elles le font maintenant. Elles accordent des taux préférentiels, aussi bien pour les prêts à taux variable que pour les prêts à taux fixe, et il y aurait divers modèles de titrisation.
La société gérant ce processus, quelle qu'elle soit, émettrait d'abord des effets subordonnés, la partie qui présente le plus de risques, puis elle prendrait des garanties supérieures à la normale pour couvrir les premières pertes.
Je le répète, je ne suis pas expert en la matière, mais cela peut se faire. Des membres de notre industrie le font actuellement. Au départ, le gouvernement y serait associé, mais, au fil du temps, au fur et à mesure que le marché apprendrait à connaître cette structure, ce type d'investissement prendrait de plus en plus d'ampleur et je pense que le risque assumé par le gouvernement diminuerait progressivement.
Nous ne parlons pas d'une transformation totale du programme existant. Il pourrait s'agir d'un produit qui s'appliquerait seulement au financement basé sur l'actif.
Je vais demander à M. Powell de faire un commentaire.
M. Powell: Je dirai simplement qu'à notre avis, il serait bon d'en parler avec le gouvernement, mais cela ne doit pas nécessairement remplacer le programme existant.
Le problème que nous pose le programme existant est que nous n'arrivons pas à adapter nombre des choses que nous faisons à la structure actuelle.
Le président: D'accord. Je n'ai jamais eu l'impression qu'avec cette proposition, vous pensiez à abandonner le programme existant. C'est quelque chose qui s'ajouterait.
Le sénateur Tkachuk: Quand vous parlez du nombre de demandes rejetées, en dehors des gens qui présentent des risques élevés parce qu'ils ne paient pas leurs dettes, cela ne veut-il pas simplement dire que certains se lancent dans ce type d'activité et font payer plus à ces gens-là pour un tel bail?
M. Simmons: Dans la pratique, cela ne se passe pas réellement ainsi. Cela peut arriver pour un prêt direct consenti par une banque, mais pour ce qui est du financement basé sur l'actif, quand le contact est établi entre le vendeur et le client, si ce dernier répond aux critères de crédit, sa demande est acceptée. Nous parlons d'un gros volume d'activités utilisant les techniques de pointe et nécessitant peu d'intervention, et la plus grosse partie de ce financement est traitée par plus de 300 vendeurs qui font partie d'une organisation donnée.
Notre industrie pratique beaucoup le bail direct car il y a un contact avec le client et, à l'heure actuelle, le mécanisme d'établissement du prix repose sur l'acceptation d'un certain risque. Mais on ne procède normalement pas ainsi pour les transactions initiées par les vendeurs. On a généralement un modèle de cotation du crédit. Si la demande répond aux critères qu'il prévoit, elle est acceptée; sinon, elle est rejetée.
Je ne connais pas la proportion de refus; elle varie probablement d'une société à l'autre. Elle sera peut-être de 30 p. 100 dans une société et de 20 p. 100 dans une autre, et cetera, mais les demandes rejetées sont assez nombreuses, même, j'en suis sûr, pour les prêts directs des banques.
Est-ce que je réponds bien à votre question?
M. Powell: Permettez-moi de continuer. On utilise donc beaucoup la cotation de crédit. Nous avons parlé du financement effectué par les vendeurs. Dans votre mémoire, vous citez aussi l'exemple d'un petit magasin de photocopie qui achète une photocopieuse et de la façon dont cela se passe. Il faut procéder étape par étape... par exemple en expliquant les avantages que le crédit-bail offre à une entreprise. À ce qu'on me dit, les demandes des entreprises qui existent depuis moins de deux ans sont presque toujours rejetées. Il ne s'agit pas d'augmenter le taux de bail pour tenir compte de conditions particulières; les demandes sont tout simplement rejetées.
Le sénateur Tkachuk: Le taux de rejets est donc basé sur le fait que vous avez un modèle qui fonctionne de façon si automatique que vous rejetez les gens comme le fait une machine? N'y a-t-il pas un élément humain qui intervient?
M. Simmons: Il y a un élément humain; les critères peuvent être ajustés vers le haut ou vers le bas; on examine la situation. Notre industrie sait toutefois par expérience -- je suis sûr que le gouvernement a de meilleures statistiques que nous -- que les nouvelles entreprises, celles qui existent depuis moins de deux ans, ont plus tendance à faire faillite que celles qui existent depuis cinq ans.
Par conséquent, si vous voulez limiter vos pertes à, disons, 300 points de base, votre modèle de cotation du crédit en tiendra compte, et vous n'accepterez pas les demandes présentées par les entreprises lancées il y a moins de deux ans. C'est simplement une considération pratique si vous voulez limiter votre coefficient de perte. Le recouvrement de dettes est également plus fréquent pour les entreprises de moins de deux ans.
Toutefois, du même coup -- ne vous méprenez pas -- notre industrie existe pour servir les vendeurs qui trouvent les clients, qu'il s'agisse d'un concessionnaire de poids lourds ou d'un vendeur d'ordinateurs. Nous essayons de répondre à leurs besoins. Donc, dans notre industrie, nous voulons les aider à vendre leurs produits, et nous essayons de faire autant d'acquisitions que possible.
Toutefois, nous devons éviter de faire faillite. Nous devons réaliser un profit et nous en tenir à un certain coefficient de perte. Sinon, nous ne pourrions pas obtenir les fonds dont nous avons besoin parce que les investisseurs institutionnels et les banques veulent que nos coefficients de perte restent à un niveau acceptable... niveau qui varie normalement d'une industrie à l'autre. Personne ne souhaite qu'il dépasse, disons, 100 points de base, si c'est un objectif raisonnable.
Le président: Permettez-moi de dire simplement, à l'intention de nos téléspectateurs -- cette séance est diffusée sur CPAC -- que 100 points de base correspondent à 1 p. 100 et 200 points de base à 2 p. 100. J'espère que cela facilitera la compréhension des termes techniques.
Le sénateur Tkachuk: En tant que législateurs, le problème que nous avons est qu'en fait, ce programme expose les contribuables à un risque; il faut que quelqu'un paie. Donc, nous devons payer la note de ces risques, vous et moi. Nous répartissons simplement le risque sur 30 millions de gens et sur toutes les entreprises du pays.
Ce programme me pose de nombreux problèmes d'ordre philosophique, mais parlons simplement un peu du crédit-bail. Les gens de ce secteur ne pourraient-ils pas réaliser un projet pilote pour déterminer quel serait le taux de faillite, sans participation du gouvernement, pour ces modèles à risque élevé et nous présenter dans trois ans les résultats de cet effort conjoint?
Donc, au lieu de demander au gouvernement d'assumer le risque pour les activités à venir, les sociétés comme GMAC, Ford, pour n'en citer que quelques-unes, pourraient peut-être se regrouper pour réaliser un projet pilote. Peut-être même le résultat vous surprendra-t-il.
Si vous accordiez un peu plus d'argent aux gens qui présentent un risque élevé, cela pourrait même vous rapporter, parce que c'est comme ça que vous avez initialement commencé, je suppose. Les banques et les autres institutions ne répondaient pas aux besoins des entreprises, et les sociétés de crédit-bail ont alors prospéré parce qu'elles pouvaient satisfaire des besoins uniques en matière de financement.
Ultérieurement, peut-être dans deux ou trois ans, nous pourrions examiner les résultats et voir si on peut non pas gaspiller, mais investir l'argent des contribuables dans ce programme et déterminer s'il a un avenir pour les petites entreprises.
M. Powell: Nous ne voulons pas de ce programme. Nous avons comparu à diverses reprises devant divers comités et nous avons dit que nous ne voulions pas de ce programme.
Il nous paraît poser un double problème: premièrement, il existe seulement pour un des produits de nos concurrents, nous sommes donc défavorisés... mais c'est notre problème, et cela ne préoccupe peut-être pas trop le gouvernement.
Le président: Je vais vous interrompre. Quand vous dites qu'il existe pour un des produits de vos concurrents, ce que vous voulez réellement dire est qu'il existe pour les prêts, mais pas pour le crédit-bail.
M. Powell: C'est exact. Notre autre préoccupation est que, en venant ici aujourd'hui, nous n'avions pas l'intention de dire au gouvernement d'éliminer ce programme. Nous l'avons déjà dit; on ne nous a pas encore écoutés. Nous supposons donc que le gouvernement veut maintenir ce programme. À cet égard, nous tenons à signaler que des changements importants se sont produits dans le secteur des services financiers depuis le moment où le programme a initialement été conçu, et nous pensons que les PME ne peuvent pas profiter des possibilités qui existent à cause de la façon dont le programme est conçu.
Donc, si vous voulez poursuivre ce programme, si vous voulez élargir la gamme des produits disponibles pour les PME, nous pensons que le gouvernement devrait examiner d'autres façons de le faire, voilà tout. C'est notre principal message aujourd'hui.
Le sénateur Oliver: Avez-vous préparé des projets d'amendements pour modifier la loi telle qu'elle existe actuellement afin d'atteindre le but que vous recherchez?
M. Powell: Nous avons récemment examiné la loi actuelle de concert avec Industrie Canada. Par exemple, si on dit au logiciel de changement de texte de remplacer le mot «prêt» par «bail», on n'obtiendra pas le résultat souhaité. Ce sont des produits totalement différents; ils sont financés de façon différente.
Nous avons l'impression que, si le gouvernement décide d'aller de l'avant, nous devrons chercher d'autres moyens, une autre façon de structurer ce programme. Cela ne veut pas dire que c'est impossible, mais simplement qu'il faut le faire d'une façon différente.
M. Simmons: Si vous me le permettez, j'ajouterai qu'il y a plusieurs membres de notre industrie et de notre association qui pratiquent la location de véhicules et qui mettent l'accent soit sur la location non conventionnelle soit sur le crédit-bail pour les clients marginaux. Parmi ces derniers, on trouve un peu de tout. Il peut s'agir de gens qui ont une mauvaise cote de crédit, ou bien de sociétés ou de particuliers, surtout des sociétés, qui sont en activité depuis moins de deux ans. De plus en plus de sociétés ont recours aux prêts et au crédit-bail non conventionnels aussi bien pour l'équipement que pour les véhicules. Donc, dans une certaine mesure, ce marché est desservi. Les entreprises paient un taux d'intérêt beaucoup plus élevé tant pour le crédit-bail que pour les prêts, mais le marché est raisonnablement bien desservi.
Le sénateur Angus: Ma question découle de ce qu'a avancé le président en disant que vous ne cherchiez pas à faire éliminer le programme LPPE.
Puis-je déduire de vos propos que vous préféreriez qu'il soit éliminé?
M. Powell: Nous avons toujours dit que nous ne sommes pas d'accord avec ce programme, et cela reste notre point de vue.
Le sénateur Angus: Très bien.
Premièrement, vous avez fait certaines observations excellentes. De façon générale, vous avez dit de différentes façons dans votre mémoire que cette loi remonte au début des années 60, qu'elle est dépassée, qu'elle ne prend pas en considération toutes les évolutions du secteur des services financiers, et cetera, les progrès technologiques.
Avez-vous discuté des idées que vous présentez si clairement dans votre mémoire avec les fonctionnaires d'Industrie Canada?
M. Powell: Nous leur avons certainement envoyé de l'information, oui. Je n'ai pas l'impression que cela ait beaucoup retenu leur intention ou leur intérêt. Tous les six mois environ, on nous dit qu'une nouvelle étude est en cours, et quelqu'un vient nous rendre visite. Nous l'envoyons rencontrer plusieurs de nos membres, et cette personne passe trois ou quatre jours à examiner des dossiers, et cetera. Elle s'en va, et rien ne se passe. Puis il y a une nouvelle étude.
Dans notre mémoire, nous faisons allusion à l'accent mis sur le recouvrement des coûts et sur les taux de perte du gouvernement. Le rapport de décembre a défini les priorités du ministère, et c'est tout ce sur quoi il met véritablement l'accent.
Le sénateur Angus: Suite à l'intervention du sénateur Kenny et au fait que le président souhaite que nos téléspectateurs comprennent bien ce qui se passe -- on a dit que ce comité est non partisan -- je veux que vous sachiez que les sénateurs de ce côté-ci de la table ne prennent pas du tout parti pour le gouvernement actuel et que nous sommes donc tout à fait d'accord avec vos commentaires.
M. Simmons: Je voudrais simplement ajouter une chose à propos d'Industrie Canada. Ce sur quoi nous avons principalement insisté lors de notre dernière réunion avec Industrie Canada est que les membres de notre industrie sont les prêteurs auxquels s'adressent de nombreuses PME en premier recours et non pas en dernier recours. Si une PME veut se procurer un camion, du matériel, n'importe quoi, pour augmenter son volume d'activités, le crédit-bail est un moyen approprié parce qu'elle peut gérer son encaisse. Elle connaît le revenu supplémentaire découlant de cet actif et elle peut gérer le coût supplémentaire. Nous aidons la PME à gérer cet actif.
Nous cherchons d'abord à nous assurer qu'elle cherche à se procurer un actif dont elle a vraiment besoin, qu'il s'agisse d'un ordinateur, d'un avion, d'une pelle mécanique, et qu'elle gère ensuite pendant toute sa durée de vie; puis nous l'aidons à revendre cet actif ou à payer la valeur résiduelle, en particulier dans le cas des baux d'exploitation. Les sociétés indépendantes et les prêteurs captifs font la même chose.
Quand une entreprise a besoin d'un actif pour améliorer sa gestion, quel que soit cet actif, elle s'adresse le plus souvent d'abord au concessionnaire du fabricant, et ce financement est sollicité auprès de nos membres. C'est seulement quand elle essuie un refus, parce qu'elle ne répond pas aux critères de crédit, qu'elle s'adresse aux banques. Je voulais simplement répéter cela.
Le sénateur Kenny: Le sénateur Angus continue simplement la belle tradition d'absence d'esprit partisan au sein de ce comité, et je l'en félicite.
Dans quelle mesure les modèles de cotation que vous décrivez sont-ils publics? Sont-ils affichés à la porte? Avant d'entrer chez vous, un client a-t-il une idée du nombre ou de la nature des obstacles qu'il aura à franchir avant d'avoir une chance d'être accepté?
M. Simmons: Non. Je pense que chaque société a son propre système de cotation du crédit.
Dans le cas d'un véhicule à moteur ou d'une camionnette, il existe des débouchés pour la revente. Je ne sais pas ce qu'il en est pour d'autres sortes d'équipement... par exemple, s'il existe des débouchés pour les avions. Ce que je connais, c'est le secteur automobile.
Le modèle de cotation examinera donc attentivement l'actif en jeu. Il examinera les dossiers de remboursement. Il examinera toutes les caractéristiques accumulées par notre industrie en 30 ou 40 ans.
Le vendeur donnera des conseils au locataire potentiel en lui disant, par exemple: «Nous pensons que votre demande a 90 p. 100 de chances d'être acceptée», ou «Les chances sont seulement de 30 p. 100. Nous savons que cette société va probablement vous approuver, mais à cause d'un problème de crédit antérieur, nous devrons probablement nous adresser à telle autre pour obtenir une approbation.»
Le sénateur Kenny: Monsieur le président, ma question est un peu hors sujet, mais quand leur demande est rejetée, les gens ressentent une certaine frustration, en partie parce qu'ils ne savent pas ce qu'il faut pour que la demande soit acceptée. Je me demande pourquoi on ne fait pas plus d'efforts pour sensibiliser les gens ou leur dire clairement quelles sont les conditions à remplir. En d'autres termes, si quelqu'un essuie un refus parce que son entreprise n'est pas en activité depuis deux ans, il serait bon qu'il le sache avant de présenter une demande.
M. Powell: Pour renforcer ce qu'a dit M. Simmons, de nombreuses entreprises ont des façons différentes d'aborder cela et, à ma connaissance, leurs modèles ne sont pas rendus publics.
Il faut comprendre que ce système a pris forme pour permettre de se prononcer très rapidement sur l'accord d'un crédit, littéralement en quelques minutes. La société de financement apprend généralement à ses vendeurs à expliquer la structure du financement. Par conséquent, le vendeur, après une discussion avec un acheteur potentiel, saura si cette transaction présente un risque acceptable. Le vendeur peut suggérer à l'acheteur de se rendre à la banque voisine.
M. Simmons: Permettez-moi d'ajouter une chose. En même temps, sénateur, les choses ne sont pas aussi tranchées. La cotation automatique du crédit peut dire oui ou non, mais le vendeur peut alors dire: «Bon, au lieu d'un dépôt de 10 p. 100, nous pourrions conclure l'affaire avec un acompte de 20 p. 100.»
Là encore, l'industrie est au service des vendeurs du fabricant, et nous essayons donc de permettre la réalisation de la transaction. Nous essaierions de trouver des conditions permettant d'établir le bail ou le prêt.
Bien entendu, dans certains cas, il est tout à fait impossible de le faire, à cause des antécédents du requérant, mais nous essayons de conclure le prêt ou le bail parce que nous devons répondre aux attentes de nos vendeurs.
Le sénateur Kenny: Y a-t-il des raisons commerciales en vertu desquelles ces renseignements ne sont pas facilement disponibles?
M. Simmons: Je ne peux pas vous répondre. Pour ce qui est des consommateurs, les lois provinciales relatives aux dossiers de crédit des consommateurs veillent à ce que chacun puisse consulter son dossier.
Le sénateur Kenny: Non. Je parle du profil nécessaire pour obtenir une décision favorable.
M. Simmons: Là encore, je pense que c'est une question de concurrence; chaque entreprise consacre beaucoup de temps, d'argent et de recherche à l'élaboration de son modèle de cotation. On peut se procurer un système générique auprès de Dun & Bradstreet ou d'autres entreprises commerciales qui vendent un tel système en se fondant sur la base de données qu'elles ont accumulée au fil des ans. Qu'il soit ou non publié, je pense qu'il y en a sans doute de nombreuses variantes dans chaque société. Chacune aborde la question différemment, je le répète, et les conditions peuvent varier selon le bien financé et donné en garantie.
M. Powell: Cette industrie a prospéré pour deux raisons essentielles: premièrement, la nouvelle technologie et, deuxièmement, d'énormes accumulations de capitaux qui n'avaient pas encore été mis à la disposition du marché des prêts et auxquels on peut maintenant avoir accès, come les fonds de pension et les compagnies d'assurance.
La plupart de ces sociétés, je pense, considèrent sans doute que c'est la nouvelle technologie qui les maintient en activité. C'est un domaine extrêmement concurrentiel et que beaucoup considèrent sans doute comme un des plus importants actifs concurrentiels.
Il y a peut-être une façon d'élaborer une sorte de norme générique pour la publication de renseignements, mais je pense qu'à l'heure actuelle cela susciterait une énorme résistance.
Le président: Pour que je comprenne bien, quand vous parlez de nouvelle technologie, vous voulez dire la technologie qui leur a permis de pratiquer la cotation du crédit, qui constitue, en fait, une analyse statistique des prêts antérieurs.
M. Simmons: C'est en partie cela, mais aussi la transmission électronique de la transaction entre le vendeur et le siège de l'entreprise du bailleur.
M. Powell: Il s'agit donc des technologies des communications et de l'information, les calculs.
Le président: Les calculs permettent d'effectuer la cotation du crédit, et la technologie de la communication permet d'établir un lien entre les locataires et les bailleurs.
Le sénateur Kolber: Quelle sorte de taux vos membres facturent-ils par rapport à, disons, une banque?
M. Simmons: Cela dépend de la taille de l'actif; il pourrait valoir 5 000 $, 50 000 $ ou, disons, 100 000 $. Je suis convaincu que notre industrie est tout à fait concurrentielle par rapport aux banques.
Le sénateur Kolber: Qu'est-ce qui représenterait un taux typique?
M. Simmons: Comme je l'ai dit, cela varie, selon les garanties, l'actif, le prix total. Ça couvre toute la gamme.
Le sénateur Kolber: Quel serait le taux comparé à celui d'une banque?
M. Powell: Je pense qu'il faudrait examiner les transactions actif par actif.
Le sénateur Kolber: Vous dites constamment que, si vous les éconduisez, ils peuvent s'adresser à une banque.
M. Powell: Non. Il faut examiner les transactions actif par actif. Par exemple, un ordinateur. Un ordinateur a une durée de vie variant entre deux ans et demi et trois ans. À l'expiration du bail, il ne vaut peut-être absolument plus rien. Donc, le coût du bail pour cet ordinateur sera différent du coût du bail d'un camion qui possède peut-être encore le tiers de sa valeur à l'expiration du bail. Les facteurs de coût sont différents.
Nous ne l'avons jamais fait, mais je pense qu'il faudrait le faire actif par actif. Généralement, le facteur clé pour la plupart des entreprises est qu'elles veulent savoir combien elles devront payer chaque mois.
Le sénateur Kolber: Je sais, mais cela se traduit par un taux.
M. Powell: Dans l'ensemble, vous constaterez qu'un bail n'est certainement pas nécessairement meilleur marché.
Le sénateur Kolber: Je ne m'attends pas à cela.
M. Simmons: Malheureusement, il y a d'autres services qui ont une incidence sur le taux. Par exemple, pour les baux concernant des véhicules, le taux peut être de 1 p. 100 au-dessus du taux de base pour un bail de trois ans, mais d'autres services de gestion sont fournis -- la revente de l'actif, l'entretien du véhicule, et cetera --, si bien que 1 p. 100 serait peut-être ajouté pour les services administratifs.
Donc, si on calcule ce que cela rapporte, le taux peut paraître élevé, mais les services de gestion sont inclus dans ce taux.
Le sénateur Kolber: Êtes-vous en train de me dire que vous effectuez réellement des prêts au taux de base plus 1?
M. Simmons: Je n'en sais rien. Le coût des fonds pour la location d'un véhicule, domaine que je connais bien, serait certainement le taux de base plus 1 pour le bailleur d'un véhicule. À cela, s'ajouterait le service.
Le sénateur Kolber: Je suis loin de vouloir contester vos propos, mais cela m'étonnerait énormément.
Quoi qu'il en soit, merci beaucoup.
Le sénateur Meighen: Vous avez signalé que la LPPE est censée, je suppose que nous sommes tous d'accord, encourager l'octroi de prêts aux PME et en augmenter le nombre, mais que les mécanismes qu'elle comporte datent d'il y a plusieurs années et ne prennent pas en considération l'évolution du marché financier. Vous avez expressément mentionné que si nous ne supprimons pas ce programme, nous devrions peut-être chercher une façon d'y inclure le crédit-bail.
Qu'en est-il de la participation au capital? Prenons pour hypothèse qu'il n'est pas question de le supprimer, mais qu'il serait possible de tenir compte de votre suggestion à propos du crédit-bail. Seriez-vous contre l'inclusion également de la prise de participation?
M. Simmons: Envisage-t-on actuellement les prêts de fonds de roulement?
M. Powell: Quand vous parlez de prise de participation, voulez-vous dire que le gouvernement prendrait véritablement une participation au capital d'une petite entreprise?
Le sénateur Meighen: Ou permettrait à d'autres de le faire alors que, sans cela, ils ne l'auraient pas fait.
M. Powell: Notre association n'a aucune opinion à ce sujet. Tout ce que je pourrais dire constituerait plutôt un avis personnel.
M. Simmons: Vous proposez un système de capital-risque.
Le sénateur Meighen: On pourrait peut-être incorporer un encouragement de cette nature dans la loi, puisque vous avez dit que vous voudriez aussi inclure ou ajouter une catégorie pour encourager le crédit-bail.
M. Simmons: Là encore, et je dis cela à titre purement personnel, il y a beaucoup de sociétés d'investissement en capital-risque qui s'occupent des petites entreprises; elles sont ravies de proposer des actions. Beaucoup de ces sociétés peuvent fournir des capitaux de lancement. Toutefois, le gouvernement peut décider d'étendre le programme pour, comme vous le dites, accorder peut-être une garantie à une société d'investissement en capital-risque afin d'aider une petite entreprise.
Le sénateur Meighen: Il y a une loi qui existe, pour le meilleur ou pour le pire. Il me semble qu'on ajoute un élément artificiel au marché en encourageant le financement par emprunt. Vous avez dit: «Eh, nous ne sommes pas inclus! S'il vous plaît, incluez-nous.» Je ne dis pas: «Qu'en est-il de la prise de participation?» Avez-vous une objection contre cela?
M. Powell: Non, je ne pense pas.
M. Simmons: De nombreux baux n'apparaissent pas au bilan, ce qui les rend attrayants pour le locataire et lui permet de maintenir son ratio d'endettement à un niveau raisonnable. C'est une pratique tout à fait acceptée. Le client demande souvent qu'un bail soit considéré comme un bail d'exploitation du point de vue comptable, alors qu'il peut constituer un crédit-bail pour l'impôt.
Le sénateur Oliver: En réponse à une des questions que le comité a été chargé d'examiner -- c'est-à-dire le fait de savoir si le montant maximal actuel des prêts devrait être conservé ou modifié -- vous avez répondu que vous ne pensiez pas qu'il devrait être réduit. Vous n'avez toutefois pas indiqué s'il faudrait l'augmenter.
Lors de nos audiences dans le Canada atlantique, à Charlottetown et en Nouvelle-Écosse, plusieurs personnes actives dans le secteur du tourisme ont comparu devant nous. Selon elles, le chiffre de 200 000 $ ne suffisait pas pour le genre de choses qu'elles doivent faire, et plusieurs ont proposé 500 000 $.
Qu'en pensez-vous? Faudrait-il corriger la loi pour que le montant maximal soit de 500 000 $?
M. Simmons: Nous n'aurions certainement aucune objection à cela. Le vérificateur général a dit que le gouvernement subit des pertes plus élevées sur les prêts plus importants, ceux qui se montent à environ 250 000 $. N'est-ce pas ce qu'il a laissé entendre?
Le sénateur Oliver: Si.
M. Simmons: Cela dépendrait des garanties données pour le prêt de 500 000 $. Si c'est seulement un crédit de fonds de roulement, le gouvernement encourrait un risque élevé, mais si le prêt est assorti d'une garantie, nous n'aurions aucune objection à cela.
M. Powell: On se rend compte également que certains types d'équipement dont les entreprises ont besoin -- qu'il s'agisse de matériel de télécommunication, de matériel téléphonique, de matériel informatique, et cetera -- deviennent de plus en plus coûteux et de plus en plus perfectionnés.
La question est la suivante: le gouvernement a-t-il envie d'assumer des risques? Et quelles limites devrait-il fixer du point de vue de ses responsabilités politiques? Il ne fait aucun doute que plus l'équipement est perfectionné, plus son prix augmente.
Le sénateur Oliver: Il coûte plus cher maintenant que quand ce programme a commencé.
M. Simmons: Exactement, depuis les années 1960.
Le président: Quand j'ai demandé, au début, à M. Simmons de décrire à quoi ressemblerait un programme pilote, il nous a dit en détail comment il serait élaboré, et c'était une explication très utile.
Je n'ai toutefois aucune idée est du temps qu'il faudrait pour qu'il tourne à plein régime. Vous avez dit qu'il fallait élaborer un profil de risque et que le gouvernement devait décider quel niveau de risque il était prêt à accepter. Combien de temps faudrait-il pour qu'un programme pilote tourne à plein régime?
Deuxièmement, pouvez-vous nous dire approximativement combien d'argent le gouvernement devrait investir dans un tel programme, en tenant compte du fait qu'il en récupérerait une partie et qu'il ne perdrait pas tout? Je pense que vous avez laissé entendre qu'il durerait trois ans.
En quoi consisterait un programme pilote raisonnable pour qu'à la fin, on puisse déterminer s'il fonctionne?
M. Simmons: Les membres de notre industrie qui sont experts en matière de titrisation et d'élaboration de modèles de cotation de crédit devraient faire une étude de faisabilité en collaboration avec Industrie Canada -- je pense que ce serait Industrie Canada -- pour déterminer si cela leur paraît intéressant. Je ne pense pas qu'il faudrait très longtemps pour mettre en place un projet pilote.
Le président: Avez-vous une idée de l'argent que cela pourrait coûter?
M. Simmons: Je n'en ai aucune idée pour le moment.
M. Powell: Cela dépendrait de combien le gouvernement veut investir. Là encore, il faudrait regrouper certains de nos spécialistes. Le milieu des gens qui font cela est relativement restreint. Ils se connaissent tous.
Si Industrie Canada était intéressé à promouvoir cela, je suis sûr qu'on pourrait élaborer des modèles et les soumettre aux principaux bailleurs de fonds, qui, en dernière analyse, sont ceux qui joueront un rôle clé.
Le président: Pour reprendre une chose que vous avez dite il y a une minute, monsieur Powell, vous avez l'impression qu'Industrie Canada vous en a parlé périodiquement, mais sans manifester un intérêt réel. Ce que vous dites, en fait, est qu'il ne faut pas s'engager sur la voie de l'élaboration d'un projet pilote si celui-ci ne suscite pas véritablement un intérêt réel, n'est-ce pas?
M. Powell: C'est exact.
Le président: Jusqu'à présent, vous avez l'impression que la bureaucratie n'est pas intéressée.
M. Simmons: Sénateur, pourrais-je vous demander comment vous envisageriez un projet pilote? Concernerait-il une industrie déterminée? Comment le concevez-vous?
Le président: Je vous le demandais parce que je ne le sais pas exactement. Il me semble que le danger, si on se limite à un secteur -- les automobiles, les ordinateurs ou je ne sais quoi -- est que cela ne donnera peut-être pas une référence réaliste.
M. Simmons: Je répète que je ne suis pas un expert, mais j'ai l'impression que, pour que le projet soit valable, il faudrait qu'il porte sur tous les actifs dont s'occupe notre industrie.
Le président: Exactement. Sinon, vous pourrez peut-être conclure que le projet donne de bons résultats pour les véhicules, mais pas nécessairement pour l'industrie du crédit-bail.
M. Simmons: Absolument. Collaborer sur un projet pilote avec le gouvernement nous intéresserait beaucoup.
Le président: Monsieur Simmons, monsieur Powell, merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous rencontrer ce matin.
M. Simmons: Je vous renouvelle mes remerciements pour nous avoir donné l'occasion de venir ici.
Le président: Honorables sénateurs, pendant que nous changeons de témoins, permettez-moi de dire aux téléspectateurs quelle est la nature du rôle de notre comité, puisque CPAC ne diffusait pas la séance quand nous avons commencé ce matin.
Nous sommes le comité sénatorial permanent des banques et du commerce et nous tenons des audiences au sujet de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, qui doit être mise à jour par le Parlement cet automne. Nous essayons de déterminer dans quelle mesure il faudrait modifier les conditions applicables aux prêts, s'il faut en étendre l'application à un programme de crédit-bail, et cetera.
Le comité fera connaître les résultats de ses discussions au ministre de l'Industrie au cours des prochaines semaines. Nous avons tenu des audiences à Halifax, Charlottetown, Montréal, Calgary, Vancouver et, bien entendu, ici à Toronto.
Nos prochains témoins forment un groupe composé de représentants de la Banque de Nouvelle-Écosse, de la Banque Royale du Canada, de la Banque Canadienne Impériale de Commerce et de la Banque Hongkong du Canada. Je leur demanderai de bien vouloir prendre place à la table.
Je demanderai à chacun d'entre vous de faire une brève déclaration liminaire, si vous le souhaitez, puis nous passerons à une discussion générale.
Je demanderai d'abord à chacun d'entre vous de s'identifier pour que cela figure au procès-verbal.
M. Dieter Jentsch, premier vice-président, Services bancaires commerciaux canadiens, Banque de Nouvelle-Écosse: Je m'appelle Dieter Jentsch. Je suis premier vice-président, responsable des services bancaires commerciaux canadiens à la Banque de Nouvelle-Écosse.
M. Charles Coffey, division des services bancaires aux entreprises, Banque Royale du Canada: Je m'appelle Charlie Coffey. Je dirige la division des services bancaires aux entreprises de la Banque Royale.
M. Kelly Shaughnessy, premier vice-président, Banque Canadienne Impériale de Commerce: Je m'appelle Kelly Shaughnessy. Je suis premier vice-président de la CIBC.
M. Robert Paterson, directeur général, Banque Canadienne Impériale de Commerce: Je suis Robert Paterson, directeur général, responsable du secteur des PME à la CIBC.
M. James Howden, premier vice-président, gestion du risque, Banque Hongkong du Canada: Je suis Jim Howden, premier vice-président de la Banque Hongkong du Canada, responsable de la gestion du risque.
Le président: Par curiosité, êtes-vous basé ici ou à Vancouver?
M. Howden: Ici à Toronto.
M. Jentsch: C'est avec plaisir que je comparais devant le comité pour continuer le dialogue sur les changements qu'on envisage d'apporter à la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Nous avons eu l'occasion d'avoir des consultations avec Industrie Canada au sujet des principaux problèmes et nous sommes heureux d'avoir la possibilité d'en parler avec vous aujourd'hui.
Nos clients ont abondamment recours au programme de la LPPE pour financer le lancement de nouvelles entreprises et l'expansion d'entreprises existantes quand ils ont besoin de plus de souplesse. Les banques canadiennes sont un élément clé de la prestation de ce programme, comme le montrent les résultats d'études récemment publiées, d'après lesquelles une des sept grandes banques est la principale institution financière de 72 p. 100 des PME du Canada.
Entre 45 et 50 p. 100 des nouveaux clients de notre banque sont, par définition, des entreprises en train de se lancer. Au cours des cinq dernières années, la Banque de Nouvelle-Écosse s'est toujours classée première ou deuxième pour ce qui est du nombre de nouveaux comptes ouverts au titre de la LPPE parmi tous les prêteurs désignés dans cette loi.
Nous appuyons vivement le maintien de ce programme, et il faut s'assurer qu'il continue à répondre aux besoins des consommateurs, des prêteurs et de la population canadienne. En vertu des directives de la Banque de Nouvelle-Écosse, les prêteurs doivent respecter les mêmes normes de soin et de diligence raisonnable pour les prêts souscrits en vertu de la LPPE que pour toute autre transaction.
À notre avis, la LPPE devrait rester axée sur le marché général et chercher le moins possible à satisfaire d'autres créneaux du marché ou des mécanismes ou des systèmes de prêts différents. Si, dans le cadre de sa politique économique, le gouvernement souhaite appuyer certains secteurs, il serait peut-être mieux de le faire en dehors du programme de la LPPE.
Nous partageons avec le gouvernement la responsabilité de réduire les pertes et les coûts subis par la population canadienne du fait de prêts; par conséquent, l'élargissement de ces programmes à des modalités de prêt entraînant par nature des risques plus élevés devrait être étudié avec soin et peut-être faire initialement l'objet d'un projet pilote.
Je voudrais aborder brièvement quatre domaines souvent discutés et proposés comme amendements éventuels à la LPPE. Le premier est l'amélioration des fonds de roulement.
Le financement des fonds de roulement est déjà largement disponible sur le marché au moyen de produits comme les prêts d'installation, qui sont généralement utilisés pour financer les comptes débiteurs et les stocks. Le gouvernement fédéral offre déjà aux sociétés qui présentent un profil de risque plus élevé un accès à des avances et un financement supplémentaire du fonds de roulement par l'intermédiaire de la Banque de développement du Canada ainsi que des programmes de prêts pour la croissance et l'exportation.
Si le gouvernement décide de renforcer le fonds de roulement, il devrait créer un programme distinct, car c'est fondamentalement différent des prêts pour un actif fixe. Dans le cadre d'un tel programme, on devrait semblablement s'attendre à une augmentation des taux de défaut de paiement, des pertes sur les prêts et des coûts administratifs.
Le deuxième domaine est l'application au secteur bénévole et aux sociétés à but non lucratif.
Il ne nous semble pas que l'élargissement du programme de la LPPE au secteur bénévole et à but non lucratif réponde à un besoin du marché. Néanmoins, les prêts à ce secteur imposent des exigences particulières en matière d'analyse et de documentation du crédit ainsi que de garantie qu'il ne serait pas facile d'intégrer dans les paramètres actuels du programme. Les questions touchant la garantie personnelle, le nantissement et le recouvrement exigent toutes des politiques et des procédures spéciales dans ce domaine. Les banques assumant actuellement les risques des prêts consentis à ces secteurs, nous recommandons que le programme de la LPPE ne s'étende pas dans cette direction.
Le troisième domaine est le crédit-bail.
Ses caractéristiques -- par exemple le financement à 100 p. 100, le risque résiduel, la détention du titre de l'équipement par le prêteur -- ne concordent pas avec la politique présidant actuellement aux prêts consentis en vertu du programme de la LPPE. En outre, les prêts peu importants -- j'entends, de façon générale, par cela ceux qui sont inférieurs à 100 000 $ -- ne sont généralement pas offerts aux entreprises récemment créées à cause de leurs besoins d'un financement à 100 p. 100 et du risque résiduel correspondant, et leur taux est généralement bien supérieur aux montants maximaux prévus par la LPPE pour compenser le niveau plus élevé du risque.
En conséquence, étant donné que les radiations seraient sans doute plus nombreuses dans un portefeuille donné et que la structure même des baux est différente de celle des prêts à terme, nous recommandons que, par souci de simplicité, le crédit-bail ne soit pas incorporé au programme de la LPPE. Il faudrait plutôt favoriser la création d'un programme distinct garanti par le gouvernement sous la forme d'un projet pilote... qui, à mon avis, pour être réaliste, devrait durer environ six ans et nécessiterait un portefeuille d'approximativement un milliard de dollars.
Je voudrais également souligner que la Loi sur les banques impose certaines restrictions à celle-ci, des restrictions différentes de celles auxquelles est assujettie l'industrie du crédit-bail pour ce qui est du risque résiduel qu'elles peuvent assumer au niveau de chaque transaction et à celui du portefeuille.
Le quatrième domaine est l'amélioration des conditions offertes pour la création d'entreprises.
Nous utilisons abondamment ce programme à cette fin. Nos clients ne considèrent pas que les taux ou les critères d'admissibilité que nous exigeons sont abusifs. Il ne nous paraît pas nécessaire de réduire ce que rapportent les prêts relevant de la LPPE étant donné qu'à notre avis, l'élément clé pour les petites entreprises est l'accès à un prêt et non pas son prix. Les conditions de remboursement et le rapport prêt-valeur sont déjà généreux, et il ne nous paraît pas nécessaire d'améliorer encore le programme et de semer éventuellement la confusion dans ce domaine pour ce qui est des critères applicables.
Pour conclure, je voudrais répéter que la LPPE est traditionnellement un outil important pour l'organisation du financement des PME canadiennes par les banques. Nous encourageons le gouvernement à maintenir ce programme et nous soulignons qu'il faut définir clairement tout changement apporté aux paramètres existants et ne pas compliquer davantage l'octroi de prêts en vertu de ce programme.
Sur ce, je passerai la parole à M. Coffey.
M. Coffey: Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous parler de ce programme, qui nous paraît revêtir une grande importance stratégique. En plus de traiter des questions concernant la LPPE, nous pourrons peut-être dissiper certains des mythes relatifs aux banques et aux banquiers.
Le président: J'espère que nous pourrons aujourd'hui nous limiter à la LPPE. Nous aurons amplement le temps de rencontrer vos collègues du secteur bancaire lors des audiences que nous tiendrons cet automne sur le rapport du groupe de travail McKay. Concentrons-nous donc aujourd'hui seulement sur la LPPE.
M. Coffey: Merci, monsieur le président; je comprends.
Pour situer la participation de la Banque Royale dans son contexte, en 1997, nous avons accordé pour plus de 415 millions de dollars de nouveaux prêts en vertu de cette loi, ce qui représentait environ 21 p. 100 de l'ensemble des prêts consentis en application de la LPPE en 1997. Ce chiffre représente moins de 5 p. 100 des prêts accordés par la Banque Royale en 1997 au marché des PME, qui a une grande importance stratégique. Ce pourcentage est faible à certains égards parce qu'à la Banque Royale, nous avons cherché des façons nouvelles et novatrices de répondre aux besoins variés des entreprises récemment créées et en expansion.
Par exemple, au cours des deux dernières années, nous avons présenté plusieurs nouvelles solutions en matière de financement pour ce marché. Nous avons présenté la «Ligne de crédit pour la PME» fin 1996. C'était le premier système de crédit renouvelable fonctionnant au moyen d'une carte offert aux petites entreprises au Canada.
En 1996 et 1997, nous avons pratiqué une forte expansion de nos programmes de capital-risque pour une partie de ce marché et constitué six partenariats avec le gouvernement du Canada, par l'entremise du ministère de l'Industrie, pour fournir un financement à risque élevé aux sociétés axées sur la connaissance.
En 1997, nous avons lancé «Bricks and Mortar», un financement hypothécaire à long terme pour les PME, ainsi que «No Hassle Leasing» et «Lease Lines», deux systèmes de crédit-bail. En 1998, nous avons créé pour les PME «connect@ffaires», qui permet d'avoir accès à peu de frais aux dossiers de dépôt et de prêt via Internet et de réaliser un site Web pour les ventes électroniques de produits et de services.
Comme ces solutions, le programme de la LPPE possède des caractéristiques répondant aux besoins d'un groupe de clients appartenant aux PME. En même temps, comme vous le savez très bien, 48 p. 100 des prêts consentis au titre de la LPPE concernent des sociétés qui ont été récemment créées ou en sont en leur première année d'activité. Quatre-vingts-douze pour cent des fonds accordés étaient destinés à l'équipement et aux locaux, en particulier aux baux immobiliers. Le montant moyen des prêts de ce programme était de 65 000 $. Pour ce qui est de la Banque Royale, le montant moyen des prêts est, depuis la création du programme, de 52 000 $ compte tenu de l'encours des baux à la fin mars. En 1997, le chiffre moyen était de 75 000 $.
À la Banque Royale, il nous paraît donc clair que ce programme joue un rôle clé pour le financement des entrepreneurs canadiens. Dans leur ouvrage sur les modalités novatrices de financement offertes aux entrepreneurs canadiens, Allan Riding et Barbara Orser ont signalé que la LPPE permet, et je cite:
...aux petites entreprises canadiennes de pouvoir contracter des emprunts à des taux raisonnables par rapport aux normes internationales. À presque tous les autres égards, la participation du gouvernement est «transparente» pour l'emprunteur commercial.
Forte de son expérience de la collaboration avec les entrepreneurs et de la LPPE, la Banque Royale examine comment améliorer l'administration du programme et offrir des possibilités plus nombreuses de réussite aux nouvelles entreprises.
À notre avis, il ne s'agit pas seulement d'avoir accès à des capitaux. L'existence de programmes de formation portant sur la compétence et les aptitudes en gestion d'entreprise contribuet de façon déterminante à maintenir et augmenter le nombre d'entreprises créées au Canada. En collaboration avec tous les paliers de gouvernement, les universités et l'industrie, la Banque Royale participe à pas moins de 16 initiatives différentes pour renforcer l'esprit d'entreprise chez les jeunes Canadiennes et Canadiens. Nous sommes en train d'élaborer un programme interactif d'enseignement de la gestion offert sur le Web pour aider les personnes qui demandent un emprunt couvert ou non par la LPPE à améliorer les chances de réussite de leur nouvelle entreprise.
En même temps, nous avons amélioré le traitement des demandes et des documents concernant les prêts couverts par la LPPE. Ces modifications font gagner du temps aux entrepreneurs et à nos gestionnaires de comptes, si bien qu'ils peuvent avoir un dialogue plus constructif. Par exemple, l'exploitation d'une entreprise récemment créée impose certains besoins opérationnels qui évoluent rapidement et qu'il faut un certain temps pour satisfaire. Grâce à l'aide de leurs banquiers et à leurs connaissances plus étendues, les entrepreneurs sont mieux à même de prendre des décisions bien fondées.
Je vais maintenant passer rapidement en revue, monsieur le président, les idées de la Banque Royale à propos de plusieurs questions clés liées à l'avenir de la LPPE.
Nous sommes en faveur de l'élargissement de la LPPE au financement des actifs fixes du secteur bénévole. Les organisations de bienfaisance à but non lucratif et autres font partie intégrante de l'économie canadienne. Les bénévoles qui créent des entreprises les gèrent souvent en collectant des fonds auprès du secteur public et, de plus en plus, du secteur privé.
Pour ce qui est de l'exclusion potentielle de certains types de financement, nous pensons que le directeur général devrait examiner en permanence les résultats du portefeuille et être habilité à ajuster les pourcentages d'actifs pouvant être financés.
Cette méthode de gestion de portefeuille devrait bien sûr être appliquée dans le cadre stratégique d'un programme autofinancé.
Pour ce qui est de la taille maximale des prêts, nous proposons une réduction du ratio du pourcentage d'actifs financiers à la taille du prêt.
Comme je l'ai indiqué, le montant moyen des prêts accordés au titre de la LPPE est de 65 000 $, et un fait important est que ce programme cible les entreprises nouvelles ou existant depuis moins d'un an. L'expérience nous a appris que les personnes qui doivent emprunter plus de 100 000 $ possèdent généralement suffisamment de fonds propres pour donner à leur entreprise une structure financière concurrentielle.
La LPPE fournit un financement à terme principalement pour les locaux, les machines et l'équipement, et constitue donc une source importante de financement pour les nouvelles entreprises. Le crédit-bail devrait être inclus parmi les options en matière de financement à terme.
La LPPE est assez souple pour encourager tous les nouveaux entrepreneurs dont les besoins financiers correspondent à ce que nous avons expliqué. C'est ainsi que nos entreprises axées sur la connaissance peuvent bénéficier de ce programme pour l'achat, l'installation et l'amélioration des logiciels qu'elles utilisent.
On a soulevé la question des garanties personnelles. La disposition actuelle autorise, sans l'imposer, l'exigence de garanties personnelles pouvant atteindre 25 p. 100 de la valeur du prêt. À notre avis, le programme devrait conserver cette souplesse. Il arrive souvent que le propriétaire d'une entreprise choisisse de fournir une garantie partielle au lieu d'une participation à son capital.
La nécessité de fournir des garanties et certaines quittances avant d'obtenir un prêt entraîne des frais et des retards pour le demandeur. Nous pensons qu'il faudrait seulement exiger des garanties pour les hypothèques mobilières et les prêts avec garantie hypothécaire.
Une préoccupation constante est l'importance des démarches administratives et des coûts imposés au propriétaire d'une PME. Pour réduire les frais juridiques encourus par les clients, les prêteurs devraient être autorisés à prélever des droits fixes pour s'occuper eux-mêmes des garanties.
En outre, il faudrait éliminer les quittances prouvant l'utilisation des fonds. Dans le cas des améliorations locatives, un certificat d'inspection émis par l'agent de prêt devrait suffire.
Tous les prêteurs qui fournissent une gamme complète de programmes de financement pour les PME devraient avoir accès au programme.
Comme vous le savez certainement, nous sommes d'avis, la Banque Royale et moi, que nous n'avons pas le choix, nous devons chercher des façons d'améliorer les possibilités offertes aux autochtones du Canada. Pour commencer, on pourrait étendre la LPPE au financement d'organisations telle que la Société autochtone de financement. Il faudrait bien sûr pour cela que la LPPE inclue les prêts accordés aux autochtones vivant dans des réserves.
À notre avis, la LPPE contribue de façon déterminante au financement des PME nouvelles et en forte croissance qui sont la base de notre économie. Nous n'avons aucun doute à ce sujet. Jusqu'à présent, sa réussite tient à son aptitude à faire preuve de souplesse et à évoluer en même temps que les besoins des Canadiennes et des Canadiens qui en bénéficient. Ce programme peut se suffire à lui-même et conserver des tarifs concurrentiels si tous les prêteurs qui y participent et le directeur gèrent bien leur portefeuille.
Si vous avez besoin de renseignements supplémentaires à propos des idées que j'ai avancées, je répondrai avec plaisir à toute question que vous pourriez avoir.
M. Shaughnessy: Aujourd'hui, nous voudrions vous faire part de l'expérience acquise par la CIBC et de son point de vue en tant que fournisseur important de produits et de services aux PME du Canada. Nous voulons répondre aux questions spécifiques posées par votre comité aux témoins au sujet de la Loi sur les prêts aux petites entreprises et faire des commentaires généraux à propos de plusieurs autres questions.
La CIBC est déterminée à servir les petites entreprises, et nous sommes fiers des efforts que nous engageons pour appuyer ce secteur essentiel de notre économie. Ces efforts ont contribué à faire de la CIBC un des principaux fournisseurs de services aux PME du Canada, puisque plus de 330 000 d'entre elles comptent parmi ses clients. Les crédits autorisés accordés à des PME par la CIBC se montent à 12 milliards de dollars, dont approximativement 8,3 milliards de dollars restent à rembourser. Le montant moyen des encours de crédit des petites entreprises qui ont contracté un emprunt auprès de notre banque est de 69 000 $. Dans leur grande majorité, les PME faisant partie de notre clientèle empruntent donc des montants relativement limités.
Nous continuons à chercher de nouveaux moyens de répondre aux besoins des PME. Parmi les exemples récents, on peut citer l'initiative An 2000, qui inclut l'éducation, la sensibilisation et l'évaluation de l'état de préparation et de la vulnérabilité, ainsi que les réductions offertes aux fabricants et aux revendeurs de matériel et de logiciel informatiques.
Le 1er août, nous allons lancer une offre de crédit pour les PME qui simplifie considérablement le processus d'approbation du crédit et n'exige qu'une garantie limitée. Les initiatives prises par la CIBC pour appuyer les petites entreprises qui sont nos clientes sont mentionnées dans la trousse d'information que nous avons distribuée ce matin.
Pour nous, le programme constitué en application de la Loi sur les prêts aux petites entreprises fait partie intégrante du portefeuille de services que nous fournissons à nos clients. Le crédit est un élément de base essentiel pour les PME; s'il n'est pas uniformément accessible, cela risque de compromettre l'esprit d'entreprise au Canada ainsi que la croissance économique.
La LPPE nous permet d'offrir un financement à des clients qui ne répondent pas aux critères traditionnels. Comme l'indique la directive de la LPPE aux prêteurs, la raison d'être du programme est, et je cite:
...d'augmenter les possibilités d'emprunt offertes aux propriétaires d'entreprises commerciales pour permettre la création, l'expansion, la modernisation et l'amélioration des PME.
La CIBC est en faveur de ce programme et considère que, conformément à ses objectifs, il contribue à satisfaire les besoins de certains propriétaires de PME relativement au financement de leurs immobilisations. Nous pensons que, de façon générale, il donne de bons résultats pour le secteur qu'il dessert. Notre crainte est que, si on modifie ce programme, il ne devienne plus lourd à administrer ou moins efficace pour le secteur qu'il dessert actuellement.
Ces audiences ont lieu à un moment opportun pour procéder à un examen important de la LPPE ainsi que des besoins et des préoccupations des PME. Votre comité a demandé aux témoins de commenter un certain nombre de questions de façon précise. La trousse d'information que nous avons distribuée contient un résumé de nos recommandations.
La première question soulevée dans l'aide-mémoire du comité concerne l'élargissement de ce programme aux entreprises axées sur la connaissance. Les immobilisations et les améliorations locatives constituent une partie importante des actifs d'une petite entreprise de l'économie traditionnelle, ce qui n'est guère le cas pour les entreprises axées sur la connaissance et pose un problème aux prêteurs pour ce qui est de leur accorder un financement. En fait, au début de leur existence, ces entreprises ont besoin d'un financement pour leurs dépenses non tangibles tels que le développement des marchés, la recherche et le développement, l'embauche et l'élaboration de prototypes. Les demandes de financement qu'elles présentent et qui posent des problèmes particuliers incluent souvent les frais de recherche et de développement et de pré-commercialisation.
C'est la raison pour laquelle nous avons créé une équipe spécialisée dans les prêts à ces entreprises. Notre expérience montre qu'il est essentiel pour elles d'avoir accès à des capitaux patients, c'est-à-dire à des emprunts comportant des conditions beaucoup plus souples en matière de remboursement de garantie que celles des emprunts traditionnels.
Pour ce qui est de savoir si ce programme devrait prévoir l'accord de prêts aux entreprises axées sur la connaissance, nous pensons qu'une lacune existe dans la phase de pré-commercialisation, durant laquelle les capitaux patients sont une solution qui convient mieux à ces entreprises qu'un prêt accordé en vertu de la LPPE.
Le gouvernement fédéral a déjà mis en oeuvre des programmes de capitaux patients qu'il offre par l'entremise de divers organismes de développement comme l'Agence de diversification de l'économie de l'Ouest. Ces fonds sont fournis par des institutions financières dans le cadre d'un accord sur le partage des pertes résultant des prêts conclu avec ces organismes.
La deuxième question soulevée dans l'aide-mémoire du comité concerne l'application de la LPPE au secteur bénévole. Certaines organisations à but non lucratif empruntent actuellement de l'argent aux banques. Leur structure financière empêche toutefois souvent les banques de répondre à l'ensemble de leurs besoins financiers. Ainsi, certaines de ces organisations n'ont pas d'actifs tangibles ni une source régulière et fiable de revenus permettant de leur accorder un financement.
Par conséquent, le programme de prêt aux petites entreprises, qui répond actuellement aux besoins des propriétaires de celles-ci, n'est apparemment pas le moyen le plus approprié. Si le gouvernement est convaincu qu'il faut créer un programme de crédit pour le secteur bénévole, ce programme devrait être offert indépendamment de la LPPE, qui cible les entreprises privées.
Pour ce qui est de la taille maximale des prêts, 85 p. 100 des emprunteurs commerciaux actuels de la CIBC empruntent moins de 250 000 $. Comme nous l'avons dit précédemment, le montant moyen de nos prêts aux PME est d'environ 69 000 $. La limite paraît donc adéquate, puisque les besoins d'emprunt des petites entreprises sont, dans la grande majorité des cas, inférieurs à ce plafond.
Pour ce qui est des garanties personnelles, nous sommes d'avis que le risque devrait être réparti entre toutes les parties concernées... le propriétaire, la banque et le gouvernement. De ce fait, la CIBC est d'avis que les responsables d'une entreprise devraient fournir une garantie personnelle. Nous estimons qu'une garantie personnelle de 25 p. 100 confirme l'engagement manifesté par le propriétaire d'une PME envers son entreprise.
Il existe une demande pour un mode de financement des fonds de roulement des PME, mais ce n'est pas la même chose que le financement basé sur l'actif. Les conditions concernant les garanties, le contrôle et les précautions à prendre sont différentes, ce qui fait qu'il est plus coûteux d'offrir de tels prêts. Par conséquent, nous avons des craintes au sujet des tentatives visant à inclure les fonds de roulement dans le programme de la LPPE. Leur financement est fourni par toutes les banques et par un grand nombre d'institutions financières, y compris la Banque de développement du Canada et la Société pour l'expansion des exportations. Nous sommes donc d'avis que le marché fournit des possibilités de financement des fonds de roulement dans des conditions adéquates.
Pour ce qui a trait aux améliorations nécessaires, il convient de réexaminer l'administration de l'encaissement des quittances et des chèques ainsi que le mode de règlement des réclamations. Le système actuel nécessite un gros travail d'administration, ce qui augmente le coût de ce programme pour le gouvernement, les prêteurs et les emprunteurs.
Monsieur le président, depuis son entrée en vigueur, le programme des prêts aux petites entreprises fournit un service important aux PME. Grâce à des examens réguliers comme celui que nous effectuons aujourd'hui, nous pouvons tous faire en sorte que ce programme continue de répondre aux besoins des PME.
Merci. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.
M. Howden: Monsieur le président, je souhaite être bref.
La Banque Hong-Kong est en faveur du programme de prêts aux petites entreprises. Il est intéressant de signaler que 85 p. 100 de nos clients actuels sont des PME qui empruntent moins de 1 million de dollars. Nous avons donc un grand nombre de petits clients qui traitent avec nous. Bien entendu, ils ne contractent pas tous des emprunts dans le cadre de ce programme.
Vous avez demandé s'il faillait étendre l'application de la LPPE pour cibler les entreprises axées sur la connaissance. Le terme «cibler» n'est probablement pas approprié. À l'heure actuelle, ce programme, comme nous le savons, met l'accent sur le financement des biens durables. S'il devait inclure les entreprises axées sur la connaissance, il faudrait en modifier fondamentalement l'orientation pour qu'il finance non pas les biens durables, mais les biens intangibles comme la recherche et le développement et couvre aussi éventuellement certains de leurs besoins de trésorerie. S'il ne s'agit plus du financement de biens durables, la garantie offerte par ce programme devient en fait un remplacement des fonds propres des PME.
La deuxième question était la suivante: «Faut-il étendre le programme au secteur bénévole?» Nous sommes d'accord avec l'idée qu'on pourrait y inclure les organisations à but non lucratif. Nous sommes toutefois d'avis qu'on pourrait réduire le montant maximal du financement accordé à ces organisations pour compenser l'absence de garantie offerte par celle-ci et limiter ainsi quelque peu le risque entraîné par ces prêts.
La troisième question posée était la suivante: «Faut-il conserver ou modifier le chiffre actuel de 250 000 $ par emprunteur?» D'après les statistiques, 85 p. 100 des emprunteurs qui s'adressent aux banques empruntent moins de 250 000 $. Si cette limite était portée à 500 000 $, cela augmenterait le marché cible de, disons 5 ou 6 p. 100, mais augmenterait également les encours de façon démesurée, probablement d'un tiers. Je pense donc qu'il faudrait probablement s'en tenir à la limite de 250 000 $; sinon, le coût du programme risque réellement d'augmenter fortement.
Ceux qui empruntent une somme importante rechignent aussi à payer des droits de 2 p. 100. Ils sont certainement en mesure de financer leurs activités à des taux d'emprunt inférieurs à ceux qui sont généralement offerts dans le cadre du programme de prêt aux petites entreprises.
Nous sommes également d'accord pour ce qui est des garanties personnelles. Nous avons la profonde conviction qu'en matière de prêt, les propriétaires doivent assumer la responsabilité de leur entreprise, c'est-à-dire offrir des garanties et d'autres actifs afin de pouvoir intervenir si l'entreprise souffre d'un manque de trésorerie. Sinon, en l'absence de garanties, si les parties prenantes ou les propriétaires ont perdu leur argent ou ont perdu leurs avoirs initiaux, ils ont tendance à abandonner l'entreprise. Je pense donc qu'il faudrait conserver la garantie.
La question des fonds de roulement est délicate. Je le répète, le programme des prêts aux petites entreprises est conçu pour financer les immobilisations. Une fois qu'on passe à des prêts d'exploitation d'un niveau relativement faible, le problème qui se pose est celui du contrôle. Les garanties sont difficiles à obtenir, et ce programme financerait essentiellement des prêts sans garantie. Donc, s'il y avait un programme pour les fonds de roulement, je pense qu'il devrait être constitué séparément, peut-être sur la base d'une garantie résiduelle fournie par le gouvernement.
Pour ce qui est de l'inclusion du crédit-bail pour l'équipement dans ce programme, les entreprises font beaucoup appel au crédit-bail pour financer leurs activités, et nous sommes en faveur de l'expansion de ce programme au crédit-bail pour l'équipement, même si nous n'avons pas actuellement de programme pour les baux de montant limité.
Pour ce qui est des modalités normales et des procédures à suivre, il faudrait réduire le plus possible les formalités et les exigences techniques imposées dans le cadre du programme pour que les propriétaires de PME puissent plus facilement y avoir accès et pour encourager les prêteurs et le ministère à en faire la promotion.
Le sénateur Callbeck: Nous avons récemment tenu des audiences à l'Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse au sujet de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, et un des commentaires que nous avons entendus à de multiples reprises était que le secteur touristique manquait de possibilités de financement, y compris au titre de la LPPE. D'après la Tourism Association of Nova Scotia, la Restaurant Association of Prince Edward Island et, en fait, un témoin, si les banques ne changent pas d'attitude à l'égard des entreprises axées principalement sur le tourisme, tout ce secteur sera en proie à une crise. Certains ont dit que leur situation est devenue de plus en plus difficile et que certaines banques ont changé d'attitude en ce qui concerne les prêts accordés au titre de la LPPE aux entreprises axées sur le tourisme.
J'aimerais savoir si vous êtes ou non d'accord avec ces témoins.
Une autre préoccupation était que la majorité des propriétaires de PME ne sont pas au courant de ce programme. En tant que banquiers, pensez-vous avoir une responsabilité quelconque à cet égard? Qui a la responsabilité de mettre les gens d'affaires, les propriétaires de PME, au courant de l'existence de ce programme?
M. Shaughnessy: Vos commentaires au sujet du secteur touristique et de la LPPE reflètent une difficulté que posent les prêts à ce secteur. C'est une activité très saisonnière, comme l'a dit l'honorable sénateur. Le tourisme subit l'influence de facteurs tels que le temps et les choses de ce genre. C'est donc probablement un secteur qui pose des risques particulièrement élevés.
Cela dit, notre banque accorde des prêts au secteur touristique... un point c'est tout. Nous prenons sans doute un peu plus de précautions à l'égard du secteur touristique qu'à l'égard d'une industrie qui fonctionne 365 jours par an et a des rentrées d'argent plus prévisibles.
Pour ce qui est de la connaissance de l'existence du programme, si un de nos clients actuels ou potentiels avait un besoin particulier, nous essaierions d'abord d'y répondre sans faire appel à ce programme. Je pense que M. Coffey a dit quel pourcentage de son portefeuille ces prêts représentaient. Dans notre cas également, il est inférieur à 10 p. 100; il se monte à 8 p. 100 de notre portefeuille. Nous essaierions donc de servir le client d'une autre façon. Si nous ne pouvions pas le faire, nous lui offririons ce programme si la transaction envisagée, bien que dépassant notre tolérance normale en matière de risque, restait raisonnable.
M. Jentsch: Je voudrais souligner ce qu'a dit M. Shaughnessy et m'en faire l'écho dans une large mesure. Les deux principales choses que nous examinons quand nous préparons un crédit sont la stabilité de l'encaisse et la capacité de celle-ci à servir la dette, ainsi que les références de l'équipe de direction en matière de gestion et de crédit. Donc, si un client éventuel a du mal à rembourser et a une mauvaise cote de crédit, je ne pense pas que qui que ce soit ici recommanderait de lui accorder un prêt, qu'il soit ou non garanti par le gouvernement.
Par conséquent, l'élément fondamental quand nous examinons un prêt est que, si le client a des antécédents ou un plan d'affaires qui montre qu'il peut rembourser cet emprunt, et s'il a une bonne cote de crédit, nous le lui accordons.
Si nous jugeons que les fonds propres de l'entreprise ne sont pas suffisants ou qu'elle n'a peut-être pas encore eu le temps de faire ses preuves -- si, par exemple, elle vient d'être créée -- nous ferons alors appel au programme de prêts aux petites entreprises.
Dans certains cas, dans le secteur touristique, une somme de 200 000 $ ou 250 000 $ ne suffit pas à répondre aux besoins de l'entreprise. C'est très rare, mais il peut arriver, comme dans tous les secteurs, qu'un montant de 250 000 $ soit insuffisant. Toutefois, nous chercherons une façon de rendre cette entreprise viable s'il y a une possibilité de le faire.
Pour ce qui est de la publicité proprement dite du programme, nous sommes d'accord avec ce que dit la CIBC: nous chercherons d'abord à couvrir le risque de la banque. Bien souvent, les taux d'intérêt sont plus faibles et à l'avantage du client, et nous essayons alors de l'en faire bénéficier.
M. Coffey: À la Banque Royale, nous sommes tout à fait au courant des commentaires présentés durant vos audiences dans les provinces atlantiques. Si vous vous rendiez dans certaines parties de l'Ontario en dehors de Toronto, vous entendriez des préoccupations semblables.
À la Banque Royale, nous sommes d'avis que le tourisme est une industrie stratégique dans notre pays et nous avons collaboré très étroitement avec la Commission canadienne du tourisme pour chercher des façons de financer ces activités.
Comme je l'ai dit dans mon exposé -- et je veux vous expliquer très brièvement ce que j'entends par là -- je ne pense pas que le problème concerne réellement l'accès aux capitaux. Pour moi, c'est plutôt le transfert des connaissances. Je veux dire par là que les banques et les organisations gouvernementales ont un rôle à jouer pour aider les entreprises, celles du secteur touristique ou d'autres, à croître et à prospérer grâce à l'échange d'idées, et cetera. Sur cette base, quand on connaît le fonctionnement d'une entreprise et ses cycles, et cetera, et cetera, les capitaux disponibles sont illimités. L'accès aux capitaux n'est qu'un élément d'une question beaucoup plus vaste.
Les banques et les autres prêteurs -- vous avez entendu un autre groupe ici tout à l'heure et vous en entendrez d'autres dans la suite de la journée -- ont beaucoup à faire pour trouver, en collaboration avec vous et d'autres institutions, une façon de faire passer le tourisme à un tout autre niveau dans notre pays.
Le pourcentage que celui-ci représente est en régression par rapport aux autres pays du monde industrialisé. Pourquoi? Les Américains viennent actuellement en grand nombre à cause du dollar, mais les chiffres de la Commission canadienne du tourisme constituent à nos yeux une source de préoccupation. Il faut améliorer les infrastructures.
J'accepte donc les critiques exprimées à l'Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse et, à la Banque Royale, nous allons mettre l'accent sur la recherche de solutions. Je n'ai aucune solution précise à vous proposer aujourd'hui, sénateur, mais je serais prêt à vous faire régulièrement savoir ce que nous envisageons de faire.
M. Howden: Notre banque n'est pas représentée à l'Île-du-Prince-Édouard, mais nous avons une filiale en Nouvelle-Écosse. Toutefois, dans l'ensemble, partout au Canada, nous prêtons de l'argent à toute entreprise qui présente un plan d'affaires raisonnable lorsque les promoteurs ont des avoirs suffisants pour assurer la réussite de l'entreprise.
Nous ne pensons pas qu'il soit bon de financer une entreprise qui a de grandes chances de faire faillite. Cela crée de gros problèmes aux promoteurs eux-mêmes. Une faillite ne se passe jamais sans difficultés.
Le tourisme ressemble beaucoup à l'hôtellerie... il faut avoir des fonds propres importants pour soutenir l'entreprise quand elle traverse des moments difficiles. Les garanties ne sauraient s'y substituer.
Le sénateur Callbeck: Je déduis donc de vos propos que les banques n'ont pas changé d'attitude à l'égard des entreprises axées principalement sur le tourisme, parce que c'est certainement ce qu'on nous a dit.
M. Coffey: Ce n'est pas ce que dit la Banque Royale, ni ce que je dis.
Le sénateur Callbeck: Je suis heureuse de l'entendre. J'espère certainement que les entreprises axées sur le tourisme recevront davantage de prêts parce que c'est certainement important pour le Canada atlantique.
M. Coffey: Toute transaction présentant des risques raisonnables peut être financée, dans tous les cas.
Le sénateur Meighen: Je réside partiellement au Nouveau-Brunswick et je ne veux pas que vous oubliiez -- je sais que vous oubliez le tourisme dans son ensemble -- le Nouveau-Brunswick si vous vous intéressez éventuellement au tourisme. Il n'y a pas que l'Île-du-Prince-Édouard et la Nouvelle-Écosse.
M. Coffey: Monsieur le président, étant né et ayant grandit à Woodstock, au Nouveau-Brunswick, je ne pourrais jamais oublier cette province.
Le sénateur Meighen: Vous voyez, il se sent coupable maintenant parce qu'il n'a pas mentionné le Nouveau-Brunswick.
Tournons notre attention pendant une minute vers les industries où les choses ne vont pas de soi; celles qui n'ont pas de bienss durable qu'on peut prendre en garantie... tout le monde accorde avec plaisir un prêt qui sera remboursé à coup sûr. En d'autres termes, tournons notre attention vers les industries axées sur la connaissance et le secteur bénévole.
M. Shaughnessy a mentionné le recours aux capitaux patients lors de la phase de précommercialisation des entreprises axées sur la connaissance. Je suppose que cela veut dire avant qu'elles n'aient des biens durables.
M. Shaughnessy: Avant qu'une entreprise ne soit commercialement viable.
Le sénateur Meighen: Très bien. Que sont des capitaux patients? Sont-ils prêtés à plus long terme? Si c'est le cas, je pense que le comité vous a notamment demandé si vous seriez en faveur d'une extension de la période de dix ans. Je suppose que oui, tout au moins pour les industries axées sur la connaissance, n'est-ce pas?
M. Shaughnessy: L'expression «capitaux patients» n'inclut pas seulement la durée du remboursement. Les capitaux patients seront souvent subordonnés à des capitaux garantis. Souvent, les capitaux patients, compte tenu des risques encourus, assumeront des droits sur la production future et les choses de ce genre.
Les capitaux patients ne sont donc pas la même chose qu'un prêt à terme normal comme on en voit tous les jours. Il peut privilégier la constitution d'avoirs propres et de choses de ce genre. On entend parler des «anges», les investisseurs providentiels qui apportent ce type de capitaux et les choses de ce genre.
Toutefois, dans certains cas, comme pour la DEO que j'ai citée tout à l'heure... nous participons à deux programmes à ce titre..., le gouvernement ajoute une réserve pour pertes à un fonds d'emprunt. Là encore, même dans ces programmes, on peut examiner la viabilité commerciale de l'entreprise.
Pour ce qui concerne particulièrement les entreprises axées sur la connaissance, lorsque quelqu'un a une idée, il a besoin de capitaux pour essayer, disons, d'élaborer un logiciel, de construire un nouveau matériel et des choses de ce genre. L'entreprise n'a donc aucune valeur commerciale tant que personne ne veut l'acheter ou qu'il n'y a aucune demande pour ses produits. Les gens qui fournissent les capitaux pour la financer insisteront donc beaucoup plus sur les rentrées de fonds potentielles pour atténuer ce risque que dans le cas d'un prêt à terme traditionnel dont l'intérêt est fixé au taux de base plus x.
Le sénateur Meighen: Je crois savoir, d'après d'autres sources... et je comprends ce que vous dites, et cela me paraît sensé..., que le secteur touristique, qui connaît des hauts et des bas très marqués, ou les entreprises axées sur la connaissance n'ont pas accès à cela.
M. Shaughnessy: Nous parlions de la phase de précommercialisation de ces dernières.
Le sénateur Meighen: La même chose ne s'applique-t-elle pas dans ce cas-là?
M. Shaughnessy: Non, pas nécessairement. La difficulté que posent les prêts au secteur touristique est l'imprévisibilité de l'encaisse. Bien souvent, l'actif est là. Au Canada, à l'exception de certaines de nos destinations les plus populaires, Banff et Vancouver, par exemple, le tourisme fonctionne souvent pendant une saison seulement. Vous devez donc rembourser votre dette pendant 12 mois de l'année en ne gagnant un revenu que pendant trois ou quatre mois.
Si vous êtes associé à une station de ski, par exemple, et s'il y a peu de neige pendant un hiver, ou même pas du tout, vous devez rembourser cette dette pendant 24 mois. C'est différent des capitaux patients dont nous parlions au sujet des entreprises axées sur la connaissance parce que le profil de risque du modèle du tourisme est quelque peu différent.
Le sénateur Tkachuk: Serait-ce comme l'agriculture en Saskatchewan?
M. Shaughnessy: Non. J'ai constaté -- et le portefeuille agricole relevait de moi -- que le secteur agricole est aujourd'hui très stable au Canada.
Le sénateur Tkachuk: J'ajouterai simplement quelque chose. Vous avez dit que, quand il n'y a pas de neige, il n'y a pas de rentrées d'argent; mais s'il n'y a pas de pluie, il n'y a pas de récolte. La même chose arrive aux gens qui vendent des machines agricoles. S'il n'y a pas de pluie, ils ne peuvent rien vendre. Dans notre province, s'il n'y a pas de pluie, les vendeurs d'automobile des petites villes ne peuvent rien vendre.
Quelle différence y a-t-il entre l'absence de neige dans une station de ski, ce qui peut se produire, et l'absence de pluie à Estevan et donc l'absence de récolte?
M. Shaughnessy: À mon avis -- mes collègues peuvent intervenir s'ils le souhaitent -- la différence est que le secteur touristique a de gros besoins en capitaux. Les hôtels et les choses de ce genre ont un fort endettement, beaucoup plus que celui qu'ont actuellement les agriculteurs canadiens.
On aurait peut-être pu dire autre chose il y a 10 ou 15 ans, mais le bilan des agriculteurs d'aujourd'hui a énormément changé par rapport à ce qu'il était il y a une dizaine ou une vingtaine d'années.
Le sénateur Meighen: Tout le monde est-il d'accord pour dire que, dans certains cas, il serait utile d'accorder des prêts pour une durée supérieure à 10 ans, qu'on appelle cela des capitaux patients ou je ne sais quoi?
M. Coffey: Je vous répondrai, sénateur Meighen, si vous le permettez. À la Banque Royale, nous examinons le cycle de vie d'une entreprise. Nous essayons d'aider de jeunes entrepreneurs à leurs débuts pour les accompagner dans le cycle de vie de leur entreprise en continuant notre association avec eux même pendant les moments difficiles.
Dans le secteur agricole, comme le sénateur l'a appris de groupes de l'Ouest, il y a des hauts et des bas.
Il existe divers programmes pour la précommercialisation et, là encore, ce type de financement n'est pas conçu en laboratoire. Il faut constituer une structure de gestion pour profiter des vastes enseignements tirés des recherches effectuées dans notre pays.
Le sénateur Meighen: Excusez-moi, quand vous dites qu'il existe beaucoup de programmes, parlez-vous de ceux de la Banque Royale ou de ceux du gouvernement?
M. Coffey: Je peux seulement parler au nom de la Banque Royale, qui travaille en collaboration avec d'autres, y compris le gouvernement du Canada, dans le cadre de programmes comme FEDNOR, BFDR(Q) ou DEO. Nous avons plusieurs alliances avec la Banque de développement du Canada. Nous avons des programmes avec les universités pour fournir une structure de gestion. Pour nos chercheurs, c'est comme s'il s'agissait d'une «entreprise prête à l'emploi» ou d'une «opération financière canadienne prête à l'emploi». Ils mettent l'accent sur la recherche.
Oui, les capitaux patients en font partie, et il y a des sources pour cela, mais ces entreprises ont également besoin d'une structure de gestion pour faire en sorte que leurs recherches et leurs technologies trouvent des débouchés commerciaux. À la Banque Royale, nous sommes convaincus que nous avons un rôle à jouer à cet égard, dans le domaine du transfert de connaissances dont j'ai parlé tout à l'heure.
M. Jentsch: Pour ce qui est de savoir si une durée de 10 ans est satisfaisante, pour moi, l'esprit du programme de prêts aux petites entreprises... nous devons examiner si la prolongation de cette durée entraînerait des pertes ou des coûts. Si on pense à l'amortissement pour réduire les problèmes d'encaisse, un chiffre de 15 à 20 ans est peut-être approprié. Une période plus longue pourrait également être appropriée dans certains cas, mais cela entraîne un coût parce que, dans certains cas, le risque augmente. Je crois que, dans l'esprit du programme, on doit procéder selon le principe du recouvrement des coûts.
S'il s'agit du tourisme ou de l'agriculture, en tant que prêteurs, nous sommes tenus de veiller à limiter nos pertes au minimum tout en essayant de permettre aux entreprises de continuer à fonctionner de façon viable.
Bien souvent, le programme doit être plus souple pour faire face aux situations auxquelles vous faites peut-être référence, et prévoir une durée d'amortissement supérieure à 10 ou 15 ans. Elle pourrait être plus courte, pour s'assurer que le prêt soit examiné en temps voulu, mais il faut alors tenir compte des pertes potentielles et de leurs répercussions sur le programme dans son ensemble.
M. Coffey: Si vous me le permettez, monsieur le président... je demande à mon collègue d'excuser mon interruption.
Pour revenir à ce que vous disiez, sénateur, en 1997, 18,7 p. 100 de tous les prêts de ce programme ont été accordés au secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Le secteur qui vient après le tourisme, celui du commerce de détail, en a reçu 13,6 p. 100.
Les statistiques figurant dans les rapports présentés au vérificateur général à propos de la LPPE démentent donc que ce programme ne servirait pas le secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Je pense que vous dites que les banques doivent faire plus d'efforts pour comprendre la situation de ce secteur, mais je pense, sans vouloir vous offenser, que les faits sont très éloquents.
Le sénateur Meighen: La Banque Royale et la CIBC nous ont dit qu'elles accordaient respectivement 5 et 8 p. 100 de leurs prêts à des PME dans le cadre de ce programme.
M. Coffey: Non. Notre portefeuille de prêts à rembourser inclut 19,9 milliards de financement accordé à des PME. Le total des montants à rembourser par les PME est de 13,6 milliards de dollars, et les prêts correspondant à ce programme représentent en tout 1,14 milliard de dollars depuis 1961.
Le sénateur Meighen: Je ne m'y retrouve pas dans tous ces milliards. Ce que je voudrais que vous me disiez de façon très générale est la chose suivante: quel est le pourcentage des prêts que vous consentez aux PME qui relèvent de ce programme? J'ai entendu 8 p. 100 dans un cas et 5 p. 100 dans l'autre, ce qui ne correspond pas nécessairement à une très grosse différence en argent.
Le sénateur Tkachuk: S'agit-il des montants ou du nombre de sociétés et de particuliers? En d'autres termes, quand vous dites 5 p. 100... je m'intéresse à la même chose, parce que cela crée beaucoup de confusion. En 1997, 5 p. 100 de tous les prêts ont été accordés à des petites entreprises. S'agit-il de leur valeur en dollars?
M. Coffey: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Qu'est-ce que cela donne pour ce qui est du nombre de demandes?
M. Coffey: S'il vous plaît, donnez-moi un moment. Je ne connais pas ces chiffres par coeur.
M. Jentsch: Dans notre organisation, étant donné que nous mettons fortement l'accent sur les entreprises récemment créées, entre 45 et 50 p. 100 de notre portefeuille de prêts aux PME sont répartis à raison de 60 p. 100 pour les prêts à terme garantis par le gouvernement et 40 p. 100 pour ceux dont la banque assume le risque. Il s'agit des prêts à terme pour les actifs durables, compte non tenu, bien entendu, des fonds de roulement, pour lesquels cela ne s'applique pas. Mais pour les prêts à terme, ce serait la répartition d'ensemble.
On aurait donc 60 p. 100 pour le financement à terme relevant de ce programme et 40 p. 100 pour les prêts consentis par la banque à ses risques.
M. Shaughnessy: Dans notre cas, 8 p. 100 des montants à rembourser relèvent de ce programme. Je ne connais pas le nombre d'emprunteurs, mais nous pourrions peut-être l'obtenir.
M. Jentsch: Pour ce qui est des montants à rembourser, cela représente moins de 15 p. 100 de notre portefeuille. Toutefois, pour ce qui est de la dynamique du marché et de ce que font nos prêteurs, telle est la répartition.
M. Coffey: Je pense qu'une autre distinction importante est que nous avons des liens très poussés avec tous nos clients qui bénéficient de ce programme. Nous finançons leurs besoins en fonds de roulement. Je peux vous dire que les PME confient près de 15 millions de dollars de dépôts à notre organisation. Ils utilisent également le commerce électronique et les activités de gestion de leurs fonds.
Le programme des prêts aux petites entreprises fait partie d'une approche globale, si vous voulez, qui consiste à permettre aux PME de croître et de créer une plus-value.
Le sénateur Meighen: Je pense que nous avons une idée générale de la situation.
Je crois avoir entendu M. Jentsch dire que le critère essentiel n'est pas le prix, mais la disponibilité. Compte tenu de cela, monsieur le président, nous avons souvent entendu au cours de ces audiences et lors d'autres audiences que les PME disent qu'elles ont besoin d'avoir accès à des capitaux et qu'elles sont prêtes à payer plus cher, mais que les banques ou les prêteurs refusent de leur accorder un prêt même à un taux plus élevé.
Dans d'autres pays -- et je pense principalement aux États-Unis, sans recommander pour autant que nous adoptions des taux d'intérêt élevés -- certains prêts sont consentis à des taux considérablement plus élevés que ce que nous appellerions le taux de base, ce qui semble constituer l'exception plutôt que la règle au Canada.
M. Coffey: Je ne suis pas d'accord.
Le sénateur Meighen: L'intérêt est-il plus élevé pour couvrir le risque?
Le sénateur Kolber: Le coût moyen d'un petit prêt est de 4 p. 100 au-dessus du taux de base. Ceux qui ont parlé de 1 p. 100 disaient tout simplement n'importe quoi.
M. Coffey: Non, non, pas 4 p. 100 de plus que le taux de base.
Le sénateur Kolber: Pour les petites entreprises.
M. Coffey: Non, sénateur.
D'après une enquête récente effectuée dans notre secteur -- les autres banques peuvent parler de leurs propres pourcentages -- 93 p. 100 de toutes les demandes de crédit présentées par les PME ont été approuvées par la Banque Royale.
Bon, nos détracteurs, comme ils l'ont fait dans le passé, insisteront sur les 7 p. 100 qui n'ont pas eu accès à des capitaux. Nous prenons un engagement vis-à-vis des PME. Si nous disons non, nous remplirons notre engagement à essayer de les aider à trouver un crédit.
Le sénateur Oliver: Et vous leur direz pourquoi?
M. Coffey: Oui, monsieur, absolument. Et, pour les prêts aux PME, la marge n'est pas de 4 p. 100 au-dessus du taux de base.
Le sénateur Kolber: Quel est ce taux?
M. Coffey: Nous ne pouvons pas imposer un tel taux aux gens des petites entreprises. Ils traverseront simplement la rue pour s'adresser aux centaines de concurrents que nous avons. Cela dépend du profil de risque de l'emprunteur. S'il est très bon, le taux est plus faible.
Le sénateur Kolber: Quel est le chiffre moyen?
M. Coffey: Probablement 1,5.
Le sénateur Kolber: Il faut que je vous dise que j'ai fait quelques appels ce matin et que j'ai reçu des renseignements diamétralement opposés à ce que vous dites.
Le sénateur Meighen: Quand vous dites «traverser la rue», à qui ces entreprises s'adressent-elles, à des institutions étrangères?
M. Coffey: À des banques, à des sociétés de financement, à AT&T, à Newcourt. Il y a plus de 2 500 prêteurs dans notre pays. Les banques représentent juste un peu moins de 50 p. 100 de l'ensemble du marché du financement commercial au Canada.
Le sénateur Meighen: Avez-vous dit 15 ou 50?
M. Coffey: Cinquante; juste un peu moins de 50 p. 100. Certains ont dit que le chiffre était plus élevé, mais je suis très fier de pratiquer une gestion fondée sur les faits, et ce chiffre est le bon.
Le sénateur Meighen: Je ne veux pas mal interpréter vos propos. Êtes-vous en train de me dire que, si je suis prêt à payer un taux d'intérêt plus élevé, je peux, de façon générale, trouver une autre source de financement?
M. Coffey: Sénateur, à mon avis, les capitaux ne manquent absolument pas dans notre pays. Je le répète, en faisant référence à l'évidence exprimée par le sénateur Kolber, tout prêt qui mérite d'être accordé peut être financé au Canada.
M. Shaughnessy: M. Coffey a cité l'enquête réalisée par notre industrie, et nos taux d'approbation de prêts sont tout aussi élevés que ceux de la Banque Royale. Certains détracteurs disent que c'est une étude réalisée par l'ABC; ce n'est pas vrai. Elle a été réalisée par une société qui s'appelle Thompson Lightstone & Company. Nous l'avons financée, mais c'est une enquête indépendante. Les grandes lignes des résultats sont très semblables à ce qu'ont constaté d'autres organisations, y compris la FCEI.
Les prêts -- et ce sont des prêts à terme -- sont accordés en vertu de la LPPE. Ils visent, dans l'ensemble, à aider une société à acquérir un actif. M. Powell et M. Simmons, qui étaient ici tout à l'heure, nous font fortement concurrence sur ce marché des prêts à terme. Ils ont indiqué qu'ils ont des programmes de financement des vendeurs.
Un client de la CIBC ou de toute autre banque représentée ici qui veut acheter un actif reçoit souvent une offre de financement à cette fin avant que nous sachions même qu'il est en train de chercher à se procurer cet équipement. Il y a une énorme concurrence dans notre pays pour les prêts relevant de ce programme.
Le sénateur Kolber: En ce qui concerne les prêts aux entreprises axées sur la connaissance, on dirait... et ce n'est pas votre problème, mais le nôtre... que vous vous lancez, le gouvernement et vous, sur le marché des capitaux à risque. Vous dites vous-même que c'est un type de prêt très incertain.
Pensez-vous que notre comité et le gouvernement canadien devraient examiner différentes façons d'envisager ce qui constitue fondamentalement une transaction faisant intervenir du capital-risque?
Je ne connais pas toutes les règles qui existent aux États-Unis, mais on me dit qu'il y a une grande différence. Il y a là-bas beaucoup de capital-risque qui ne vient pas des banques.
Même dans le secteur du tourisme... j'ai travaillé dans le domaine des investissements et je me rappelle qu'il y a une trentaine d'années, nous avons formé un groupe réparti dans le monde entier pour investir dans des actions. Le résultat a été le Club Méditerranée. Ce groupe n'aurait pas pu obtenir quatre sous auprès d'une banque, mais cela s'est avéré être une excellente affaire.
Ne pensez-vous pas qu'il pourrait y avoir des façons d'encourager les gens à investir du capital-risque par des mesures fiscales ou probablement une centaine d'autres moyens?
M. Coffey: Oui, à tous égards, sénateur.
Le sénateur Kolber: Par exemple, un contribuable du Québec qui prend un risque et réalise un profit a un taux d'imposition de 42 p. 100 au lieu de 15 p. 100 dans l'État de New York, c'est-à-dire presque trois fois moins.
Il me semble que cela constitue un peu un obstacle à la prise de risque. C'est également un obstacle aux déplacements de fonds. Devrions-nous étudier cela? Les banques devraient-elles dire quelque chose à ce sujet?
M. Coffey: Je pense que nous l'avons fait. En fait, la Banque Royale est active sur le marché du capital-risque depuis 1984. Nous avons actuellement un portefeuille de 300 millions de dollars axé sur les PME. Bon, ce sont de petites transactions.
M. Jentsch: S'agit-il du montant à rembourser?
M. Coffey: Ce sont les fonds que nous avons engagés. Nous avons un total de 300 millions de dollars de capital-risque disponibles.
Les banques pratiquent traditionnellement des prêts à faible risque, mais, comme vous le savez bien, il y a de l'argent à gagner si on fournit des fonds à haut risque ou du capital-risque par l'intermédiaire d'une organisation distincte.
Le sénateur Kolber: Quand vous effectuez un prêt qui constitue, en fait, un investissement de capital-risque, vous prenez en contrepartie une certaine participation au capital; c'est bien ce que font les investisseurs de capital-risque, n'est-ce pas?
M. Coffey: Vous pouvez le faire. C'est soit uniquement des actions, soit une dette subordonnée avec une participation. Les paiements de redevances deviennent de plus en plus populaires. Je conviens avec vous qu'il faut examiner le régime fiscal pour encourager la prise de risque. Je le répète, les capitaux ne manquent pas au Canada.
Le sénateur Kolber: Bien sûr que non, mais comment peut-on encourager ce type d'investissement?
M. Coffey: Je pense qu'il faut que nous en parlions. Cela sort du cadre de la LPPE, me semble-t-il. Cela pourrait très bien faire l'objet d'une autre audience.
Le sénateur Kolber: Ce que je dis est que la LPPE ne convient pas pour faire beaucoup de ces choses.
M. Coffey: Je suis d'accord.
M. Shaughnessy: Sénateur, comme vous pouvez le voir dans le document que nous vous avons remis, la troisième recommandation de la CIBC est que le gouvernement devrait examiner sa politique actuelle d'imposition des gains en capital pour encourager le financement de PME par les «angel investors», les «investisseurs providentiels», et les investisseurs de capital-risque.
Les capitaux sont abondants au Canada, mais, comme vous l'avez souligné à juste titre, il faut encourager les investisseurs à participer à ce marché.
Nous nous intéressons aussi aux sociétés axées sur la connaissance. Par l'intermédiaire de banquiers très spécialisés qui leur consentent des prêts, nous les aidons à préparer leur bilan et des choses de ce genre... et ces banquiers, comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, participent également à des fonds de capitaux patients. Mais, vu la politique canadienne d'imposition du gain en capital, il est beaucoup plus intéressant d'investir dans des «BCD» que dans une petite société axée sur la connaissance.
M. Coffey: Si vous me le permettez, monsieur le président. Nous avons beaucoup mis l'accent sur les aspects négatifs; c'est peut-être le fait qu'il y a eu certaines pertes sur des prêts qui inspire votre comité. Je pense que nous devons parler un peu des bons côtés, c'est-à-dire du fait que quand quelqu'un sollicite un prêt en vertu de ce programme, il a en moyenne cinq employés. D'après les renseignements fournis par les entrepreneurs et les prêteurs, l'appui fourni par le programme permet de créer 2,4 emplois supplémentaires.
Alors, comment prendre en considération les avantages extrêmement positifs que le Canada retire d'un programme comme celui-ci grâce à la création de richesses, à la création d'emplois et au bien-être économique? Oui, il y a eu des pertes, et on pourrait dire qu'elles sont trop élevées et que nous devons seulement prendre des mesures pour les réduire.
Pour ce qui est du capital-risque, de grosses quantités de richesses sont créées par de jeunes entrepreneurs qui investissent dans des idées nouvelles, et cetera, qu'il s'agisse du Club Méditerranée ou d'un disque, comme d'autres l'ont fait dans le passé.
J'aimerais entendre les commentaires au sujet des avantages positifs des partenariats entre le secteur privé et le secteur public, c'est-à-dire, dans ce cas-ci, entre les prêteurs et le programme de prêts aux petites entreprises.
Le sénateur Kenny: Quelle différence cela ferait-il pour l'économie canadienne si ce programme n'existait pas? Plus précisément, quelle différence cela ferait-il pour les petites entreprises?
Les témoins ici présents ont d'abord présenté une série d'annonces publicitaires pour les programmes novateurs lancés par chaque banque. Ces programmes existent, j'en conviens. Pourquoi avez-vous besoin de la LPPE?
M. Jentsch: D'après ce que je vois, 45 ou 50 p. 100 des nouveaux emprunteurs sont des entreprises récemment créées, depuis moins d'un an, qui ont besoin de financement à terme; nous ne ferions pas ce financement à terme sans ce programme.
En d'autres termes, si la LPPE n'existait pas, entre 5 000 et 9 000 entreprises n'auraient pas accès à un financement à terme.
Le sénateur Kenny: Mais on nous a dit que les capitaux ne manquent pas. On nous a dit que si quelqu'un a une proposition viable, quelqu'un d'autre la financera.
M. Jentsch: Ce qui compte est que nous acceptons un profil de risque et un nombre d'entreprises nouvelles plus élevés. Le taux maximal des prêts que nous accordons en vertu de ce programme est le taux de base plus 3, et il peut aussi être inférieur. Voilà notre politique générale. Nous cherchons à faire en sorte que les prêts soient remboursés et que la marge d'intérêt soit équitable, qu'elle ne dépasse pas le taux de base plus 3. En général, nous voulons nous assurer que le prêt survive à l'entreprise.
Donc, en effet, le taux d'intérêt peut être plus élevé ailleurs. Dans certaines organisations au Canada, c'est le taux de base plus 8, mais notre organisation ne le fait pas.
M. Coffey: Monsieur le président, je répondrai au sénateur Kenny. Je regarde le rapport présenté par le directeur général pour la période 1993-1995. Le programme ayant été doté plus généreusement, les prêts sont passés très rapidement de 2,5 milliards de dollars à 4,4 milliards de dollars. Comme vous le savez, des modifications y ont été apportées en 1995, et son utilisation a chuté brutalement.
Pour répondre directement à votre question, je pense que, par l'entremise de programmes de ce genre, le secteur privé et le secteur public peuvent jouer un rôle en s'unissant pour aider les petites entreprises à croître et à prospérer.
Pour ce qui est de l'accès, du capital, oui, il y a des capitaux en abondance, mais les gens ne sont pas prêts à les investir si le niveau de risque leur paraît plus élevé que ce qu'ils pourraient obtenir ailleurs ou si des avantages fiscaux ne les incitent pas à le faire.
Je crois que c'est Willy Sutton qui, quand le juge qui l'avait condamné lui a demandé pourquoi il avait attaqué une banque, a répondu: «Eh bien, c'est là que l'argent se trouve.» Beaucoup de gens se tournent donc vers les banques. Cependant, ce que je veux dire, c'est qu'il existe beaucoup d'autres prêteurs et que notre rôle est peut-être de faire le lien entre l'offre et la demande, pour ainsi dire.
Le sénateur Kenny: C'est une sorte de subvention, et vous souhaitez obtenir la garantie et la subvention que le gouvernement vous donne.
M. Coffey: Je ne considère pas cela comme une subvention, mais comme un partenariat stratégique pour aider les PME à croître et à prospérer.
Le sénateur Kenny: C'est une façon codée de désigner une subvention, je pense.
M. Coffey: Pas dans mon esprit.
M. Shaughnessy: Sénateur, je crois que ce programme permet aux banques d'accepter un risque légèrement plus élevé qu'elles ne le feraient normalement. Dans mon esprit, ce n'est pas une subvention parce que, si nous avions conçu ce programme, nous devrions probablement dire tout simplement «non» à certains emprunteurs. Je pense que ce programme n'est donc pas à l'avantage des banques, mais des emprunteurs.
Le sénateur Kenny: Vous diriez tout simplement non. Vous ne chercheriez pas à vous mesurer à vos concurrents?
M. Shaughnessy: N'oubliez pas que les banques sont principalement des intermédiaires financiers. Nous acceptons des dépôts et nous prêtons de l'argent. Nous devons conserver un profil de risque approprié; sinon, nous n'attirerons ni les épargnants ni les déposants. Nous devons donc limiter les pertes dues aux prêts de façon à ce que les investisseurs et les déposants puissent déposer leur argent à la banque et investir à la banque sans inquiétude. Nous ne pouvons pas accepter des risques trop élevés. Nous ne pouvons pas nous comporter comme une société de financement ou quelque chose de ce genre, parce que la population canadienne ne nous permettra pas de le faire. Les gens ne déposeront pas leur argent dans une banque comme cela.
Donc, en toute franchise, nous accordons des prêts à faible risque. Ce que fait ce programme... M. Coffey a cité le pourcentage de son portefeuille, et j'ai cité le nôtre; ce programme n'inclut pas la totalité de nos prêts aux PME.
Grâce à un programme comme celui-ci, nous avons pu accorder des prêts, en partenariat avec le gouvernement du Canada, à des petites entreprises qui présentent un profil de risque viable supérieur à celui qui convient à un prêteur prudent comme une banque.
Le sénateur Kenny: Mais pour les garanties, vous êtes limités aux hypothèques mobilières et aux prêts sur nantissement, des choses concrètes. Si vous vous aventuriez à accepter des garanties qui ne soient pas de nature concrète, je comprendrais mieux.
M. Shaughnessy: Ce programme nous permet de prendre pour garantie des choses comme les améliorations locatives. Lorsque nous devons réaliser notre garantie -- ce que nous ne considérons pas comme une situation très agréable -- la valeur de réalisation d'une amélioration locative se situe souvent aux alentours de zéro.
M. Coffey: Je dirai également qu'à part ce programme, nous fournissons, en fait, d'autres formes de financement, c'est-à-dire des fonds de roulement, qui sont importants pour la vie d'une entreprise, comme vous le savez bien. Nous assumons donc des risques importants. Ce programme constitue un partage du risque pour les transactions présentant un profil de risque élevé.
Le sénateur Kenny: Monsieur Coffey, vous avez parlé de la question des garanties dans votre déclaration. Le comité se demande toutefois pourquoi vous recommandez que ce programme soit limité aux hypothèques mobilières ou aux prêts avec garantie hypothécaire. Pourriez-vous brièvement commenter cela?
Monsieur Coffey, vous avez également dit qu'il faudrait éliminer l'exigence de quittances pour prouver l'utilisation des fonds, et je ne vois pas très bien pourquoi. Pourriez-vous également commenter cela, s'il vous plaît?
Monsieur Shaughnessy, le point 4 du «Résumé des recommandations» de la CIBC au sujet du programme de prêts aux petites entreprises dit, au point 4:
Le gouvernement et les prêteurs devraient chercher davantage à informer les propriétaires de petites entreprises au sujet des sources non traditionnelles de financement.
À quoi pensez-vous, et pourriez-vous être plus précis?
On lit ensuite, à la troisième puce du point 7:
Il ne faudrait pas accepter les grosses factures payées comptant (au-dessus de 500 $), car cela ouvre la porte à de nombreux abus dans le cadre du programme.
Pourriez-vous nous donner une idée du type d'abus dont il s'agit?
M. Coffey: Permettez-moi de parler rapidement de la question des quittances. Si, par exemple, nous financions, dans le cadre de ce programme, un gros bien d'équipement, nous nous assurerions qu'il ne fait pas l'objet d'un privilège et nous prendrions une hypothèque mobilière sur lui. Pourquoi faut-il obtenir des quittances, procédure lourde et coûteuse, pour prouver que l'emprunteur a réellement acheté ce bien, s'il est là et si nous avons une hypothèque mobilière sur lui et si l'enregistrement montre qu'il n'est assujetti à aucun autre privilège? Vu l'honnêteté et l'intégrité des responsables de PME, il est raisonnable de supposer que l'argent a été utilisé pour acheter cet équipement.
Nous constatons que le fait de devoir fournir des quittances de 5 ou 10 $ impose des frais et des efforts extraordinaires, ce qui se rattache à votre question au sujet des droits fixes prélevés sur un équipement ou un bien et de leur enregistrement auprès des autorités compétentes.
Nous cherchons des façons d'améliorer la productivité et l'efficacité du système, et je ne crois pas qu'entre autres choses, la présentation de quittances y contribue. Cela augmenterait plutôt les coûts.
M. Shaughnessy: En ce qui concerne les petites entreprises qui sont nos clientes, notre code de déontologie nous fait obligation de dire aux emprunteurs auxquels nous ne pouvons pas offrir nos services quels autres moyens de financement sont disponibles. En d'autres termes, nous leur disons: «Notre banque ne peut pas vous aider, mais il y a d'autres sources de financement vers lesquelles vous devriez vous tourner.»
D'après certaines enquêtes, nos gestionnaires de comptes ont l'impression de communiquer ce message, mais les emprunteurs ne le perçoivent pas. Donc, de toute évidence, nous devons faire plus d'efforts pour faire connaître les autres moyens de financement. Notre banque le fait. Notre industrie le fait. Nous le faisons dans la presse écrite. Nous le faisons sur nos sites Web et en nous adressant aux groupes sectoriels, et en faisant d'autres choses de ce genre, mais nous pouvons le faire encore mieux, comme les emprunteurs nous le disent.
Le sénateur Kenny: Cela nous ramène à la question que j'ai précédemment posée à l'autre groupe de témoins, quand je leur ai demandé de parler un peu plus longuement du modèle de cotation du crédit. Si un emprunteur connaissait d'avance le modèle qu'utilise votre institution, il ne perdrait pas de temps à s'adresser à vous s'il savait déjà qu'il ne correspond pas au profil que vous recherchez. Que pensez-vous de cela?
M. Shaughnessy: Comme nous l'avons signalé tout à l'heure, Charlie et moi, nos taux d'approbation de prêts sont largement supérieurs à 90 p. 100... ce n'est pas une statistique interne.
Le sénateur Kenny: Vous pensez donc que la plupart des gens sont au courant?
M. Shaughnessy: Non, non; je dis que la vaste majorité des prêts sont approuvés.
Ce que je dis est que nous devons faire plus d'efforts pour signaler les autres sources de financement aux emprunteurs dont la demande de prêt n'est pas acceptée.
Le sénateur Kenny: Je suppose que, si vous avez un taux d'approbation de 90 p. 100, la plupart des gens qui demandent un prêt savent déjà quels sont les facteurs nécessaires pour obtenir un prêt de votre part; par conséquent, beaucoup de gens ne viennent pas vous demander un prêt s'ils savent quel est votre modèle.
M. Shaughnessy: On utilise la cotation du crédit pour les prêts aux PME, mais ce n'est pas la seule chose qu'on utilise. Il y a l'évaluation subjective du risque. Je dirai à la plupart de nos clients des PME que, si leur société a un bon plan d'entreprise viable et si leur capital est bien structuré, leur demande sera probablement approuvée. C'est ce que démontrent les statistiques.
M. Jentsch: J'ajouterai à ce qu'a dit M. Shaughnessy qu'aucune organisation n'est prête à divulguer à une autre quelle technologie elle utilise pour la cotation du crédit et pour la pondération et l'analyse statistiques qui vont de pair avec elle. Ce modèle représente un avantage concurrentiel. Une organisation doit consacrer beaucoup de temps, d'énergie et de ressources pour parvenir à une pondération satisfaisante des variables lui permettant d'accepter sans réticence le profil de risque ainsi produit.
Cela dit, il y a des caractéristiques générales qu'on utilise pour cela -- par exemple les antécédents de quelqu'un en matière de crédit -- et nous disons à nos clients que ce sont des variables importantes dans la procédure d'approbation. Pour ce qui est de leur pondération proprement dite dans une analyse statistique, nous ne le savons souvent même pas parce que nous achetons également ces modèles à un autre fournisseur, et il veut donc protéger ses droits sur la composition statistique du modèle. Notre industrie va toutefois mieux signaler à nos clients les variables en jeu dans l'approbation d'un prêt, parce que la cotation n'en est qu'une petite partie. C'est un des outils que nous utilisons. Notre industrie doit mieux faire connaître ces variables.
M. Coffey: Sénateur, très brièvement, le dialogue que vous avez eu tout à l'heure avec les témoins au sujet de la cotation du crédit m'a beaucoup intéressé.
Je trouve parfois inquiétant qu'on la considère comme une panacée. Quand on traite avec des entrepreneurs, l'aspect technique compte, mais l'aspect humain aussi. Les rapports avec un client au sujet d'un seul produit ne m'intéressent pas. Un prêt est un produit. Ces gens déposent leur argent chez nous. Ils ont besoin de toutes les autres choses dont j'ai parlé avec vos collègues tout à l'heure. Comme mes collègues l'ont dit, la cotation du crédit est un outil. Certains n'utilisent rien d'autre; comme vous l'avez entendu tout à l'heure, si vous venez de créer votre entreprise ou si elle est en activité depuis moins de deux ans, le modèle peut vous éliminer automatiquement. Ce n'est pas ce que nous cherchons à faire.
Ce sont les jeunes entrepreneurs, ceux qui lancent une entreprise, qui nous rapporteront de l'argent à plus long terme si nous les conservons comme clients pendant tout le cycle de vie.
M. Shaughnessy: Si vous me le permettez, monsieur le président, je demanderai à M. Paterson de répondre, parce qu'il connaît mieux ce domaine.
M. Paterson: Sénateur, quand nous avons pris toutes les précautions nécessaires dans le cadre de la procédure de règlement des réclamations, nous constatons que, dans cette catégorie, certains renseignements sont souvent falsifiés, si bien que nous examinons généralement les chiffres pour valider les valeurs marchandes indiquées. C'est pour cette raison que nous avons inclus cet élément dans nos recommandations.
Nous sommes d'accord avec M. Coffey au sujet des transactions portant sur un faible montant. Nous avons choisi de ne pas descendre en dessous de 50 $, ce qui correspond à la durée du travail administratif nécessaire pour valider les transactions de ce genre.
Le sénateur Tkachuk: Ce sont les banques qui administrent ce programme, vos commentaires nous seront donc extrêmement utiles.
Quand vous parlez des 5 p. 100 de prêts accordés dans le mémoire de la Banque Royale, s'agit-il du nombre de personnes ou de la valeur en dollars?
M. Coffey: Si j'ai accordé, par exemple, en 1997, 100 millions de dollars de prêts sur le marché des PME, il y aurait 5 milliards qui correspondraient au programme des prêts aux petites entreprises et 95 millions de dollars pour lesquels j'assumerais moi-même le risque.
Le sénateur Tkachuk: Quel rapport y a-t-il entre ces chiffres et les niveaux d'application?
M. Coffey: Voulez-vous parler du nombre de comptes?
Le sénateur Tkachuk: Oui.
M. Coffey: Il est beaucoup plus faible.
Le sénateur Tkachuk: De combien?
M. Coffey: Comme je l'ai dit, le montant moyen des prêts était de 75 000 $ en 1997. Il y a eu 5 527 prêts en 1997, pour un montant total de 415 millions de dollars, ce qui correspond, je crois, à environ 75 000 $. Il y en a moins de 5 p. 100 aussi bien en volume qu'en nombre de comptes.
Le sénateur Tkachuk: Est-ce que c'est 3 p. 100, 2 p. 100?
M. Coffey: C'est inférieur à 5 p. 100. Je peux obtenir le chiffre exact à votre intention.
Le sénateur Tkachuk: Il serait important pour nous de connaître ce chiffre.
M. Coffey: Je suis désolé, je ne sais pas de quoi il retourne. Est-ce trop ou trop peu?
Le sénateur Tkachuk: Je cherche à déterminer le nombre de demandes, parce que je pense qu'il est important de savoir combien de clients ont recours à ce programme par rapport au nombre de petites entreprises que vous avez comme clientes dans ce secteur de vos activités commerciales.
M. Coffey: Si vous avez besoin d'un chiffre précis, je vous le communiquerai plus tard, monsieur le président. Toutefois, il est inférieur à 5 p. 100 pour le nombre de comptes et d'environ 5 p. 100 pour le volume. Ce que je veux dire est que nous prenons nous-mêmes en charge 95 ou 96 p. 100 du volume et du nombre de comptes.
Le sénateur Tkachuk: Pour ces 5 p. 100 de prêts accordés aux petites entreprises en vertu de ce programme, si on laisse de côté le gouvernement, quelle est la valeur en dollars des actifs que vous détenez en contrepartie de ces prêts? À moins que l'emprunteur ne soit un très bon client de la banque, vous prenez une garantie personnelle de 25 p. 100 sur le prêt, plus la valeur des actifs. Quelle est la valeur des actifs que vous détenez en contrepartie de ces prêts? Quel est le montant du risque que vous assumez?
M. Coffey: Nous prenons une garantie conformément aux directives établies en vertu de la Loi.
Le sénateur Tkachuk: Quelle en est la valeur?
M. Coffey: Nous prenons une garantie conformément au règlement. Si vous me demandez de vous indiquer la valeur marchande de la garantie que nous détenons pour les prêts à rembourser accordés en vertu de ce programme, je ne possède pas ce renseignement. Nous ne sommes pas obligés de prendre des garanties atteignant ce pourcentage. Dans certains cas, nous le faisons.
Comme je l'ai dit précédemment, en plus de ce programme, dans pratiquement 100 p. 100 des cas, nous accordons également régulièrement d'autres prêts à nos clients et, comme vous l'avez dit, la plupart sont de bons clients. J'irais jusqu'à dire que tous sont de bons clients.
Le sénateur Tkachuk: Les banques nous fournissent les renseignements qu'elles choisissent de communiquer, mais je veux des renseignements qui sont importants pour les législateurs que nous sommes. Je vous ai posé deux questions dont, je pense, vous devriez connaître la réponse.
Quelle serait la garantie moyenne que vous détenez en contrepartie de tous vos prêts à des PME?
M. Jentsch: Nous n'avons pas ce renseignement. Nous l'avons dans chaque dossier de prêt, mais nous ne regroupons pas ces données dans un système d'information de gestion d'où nous pourrions les extraire. Cela ne fait pas partie des renseignements qui sont regroupés initialement dans nos systèmes d'information.
Nous savons combien de clients nous avons à tout moment. Nous connaissons les conditions de remboursement des prêts, les dates d'expiration, et nous avons tous les renseignements comptables. Toutefois, nous n'avons jamais regroupé l'information de gestion sur la valeur des garanties. Nos systèmes n'ont pas été conçus pour faire cela. Cela figure dans chaque dossier individuel, mais nous n'avons pas regroupé tous les renseignements concernant nos, disons, 1 200 centres d'affaires de l'ensemble du Canada.
Le sénateur Tkachuk: Pourquoi le client paie-t-il les frais d'administration?
M. Jentsch: Les frais d'administration sont versés au gouvernement.
Le sénateur Tkachuk: Prélevez-vous également des frais d'administration?
M. Jentsch: Non.
Le sénateur Tkachuk: Ne déduisez-vous aucun frais?
M. Jentsch: Non. Le programme ne nous autorise pas à le faire.
M. Coffey: Le programme des prêts aux petites entreprises ne nous autorise pas à prélever de frais.
M. Jentsch: Ils sont versés à l'administration du programme qui s'occupe de la gestion au jour le jour pour les éventuelles réclamations en cas de défaut de paiement. Nous traitons la demande initiale, mais les frais sont transmis au gouvernement.
M. Coffey: Quand un prêt est accordé, sénateur, nous prenons une garantie qui nous paraît assurer le remboursement du prêt au cas où nous devrions la réaliser. Comme vous le savez bien, la valeur de celle-ci peut augmenter ou diminuer, selon la conjoncture.
Je comprends que vous voulez obtenir des renseignements supplémentaires, je vais donc y réfléchir et consulter mes collègues pour voir ce que nous pouvons faire pour répondre à la question très sérieuse et très importante que vous posez.
M. Shaughnessy: Premièrement, dans le cas d'un prêt accordé en vertu de ce programme, la garantie serait en général constituée par les actifs acquis au moyen de ce prêt.
Le sénateur Tkachuk: N'y a-t-il pas de garantie personnelle?
M. Shaughnessy: Comme nous l'avons dit dans notre mémoire, nous recommandons de prendre une garantie personnelle allant jusqu'à 25 p. 100, mais ce n'est pas une garantie tangible ou concrète. Nous ne grevons pas par exemple les biens de quelqu'un d'une hypothèque.
Deuxièmement, vous avez posé une question plus générale au sujet des prêts aux PME. Nous avons tendance, dans notre industrie, à nous concentrer sur les prêts d'un montant relativement faible, jusqu'à 100 000 $ dans notre cas. Je crois que M. Coffey a cité son produit basé sur l'utilisation d'une carte et dans le cadre duquel nous exigeons des garanties personnelles pour le prêt. Nous ne prenons souvent aucune forme tangible de garantie. C'est parce que, pour le client, la procédure de demande est très simple. C'est presque comme une demande de carte de crédit.
Le sénateur Kolber: Comment pouvez-vous dire que vous ne placez pas un privilège sur sa maison?
Le sénateur Meighen: Il n'a pas dit cela.
Le sénateur Kolber: Si un client garantit 25 p. 100 du prêt et si ses actifs incluent notamment sa maison, vous aurez un intérêt dans la maison.
M. Shaughnessy: Non, pas moi. Je ne suis pas un créancier garanti.
Le sénateur Kolber: Vous n'avez peut-être pas un morceau de papier attestant que vous avez un privilège sur la maison, mais vous y avez certainement accès.
M. Shaughnessy: Je ne suis pas un créancier garanti.
Le sénateur Kolber: Vous jouez sur les mots. Le fait est que vous avez des droits sur la maison.
M. Shaughnessy: Cette personne a peut-être une première hypothèque sur cette maison.
Le sénateur Kolber: Vous pourriez avoir une deuxième hypothèque.
M. Shaughnessy: D'accord, mais je ne suis pas un créancier garanti.
Le sénateur Tkachuk: Vous pourriez avoir un billet à ordre comme garantie du prêt.
M. Shaughnessy: Comme je l'ai dit, en général, quand nous prenons la garantie personnelle de 25 p. 100 pour un prêt accordé en vertu de ce programme, nous ne prenons pas en plus une garantie hypothécaire.
Le sénateur Tkachuk: À moins que vous n'en ayez besoin.
M. Shaughnessy: Non, nous ne le faisons pas dans le cadre de ce programme.
M. Jentsch: Dans le marché des PME, les gens ne font souvent pas de distinction entre leur entreprise et eux-mêmes. Ils emmêlent leurs activités. Dans certains cas, aucune garantie n'est nécessaire parce que l'affaire est solide et se suffit à elle-même. Dans d'autres cas, vu leur situation particulière, ils choisissent de gérer leur entreprise en mettant, en fait, les actifs et les profits sous leur nom. Cela dépend des circonstances.
Avant de dire qu'il faut éliminer toutes les garanties ou les rendre toutes obligatoires, il faut d'abord examiner la structure du marché des PME, ce qui nous amènera à conclure qu'il n'est pas structuré. Aucune structure organisationnelle ne s'applique à l'ensemble de ce marché. Les choses varient selon les circonstances et la façon dont chacun gère son entreprise.
Le sénateur Tkachuk: Quel est le pourcentage des prêts accordés en vertu de ce programme qui ne sont pas assortis d'une garantie personnelle de 25 p. 100?
M. Jentsch: Je ne comprends pas votre question.
Le sénateur Tkachuk: Vous avez dit que vous avez parfois une garantie personnelle de 25 p. 100 et parfois non. Quel est le pourcentage des prêts pour lesquels vous n'avez pas cette garantie de 25 p. 100?
M. Jentsch: Je n'ai pas accès à un fichier regroupant tous ces renseignements. En règle générale, dans notre organisation, il y a un certain engagement personnel, qu'il soit de 5 p. 100 ou de 10 p. 100, et que le prêt soit ou non garanti par le gouvernement.
J'entends constamment dire que le programme est basé sur le recouvrement des coûts, qu'il a pour objectif d'assurer aux entreprises un accès à un financement dont elles ne pourraient peut-être pas disposer normalement, à des taux raisonnables, et que, quand le système déborde, on peut récupérer les pertes.
Certains pourraient dire qu'il faudrait éliminer du programme la garantie personnelle. Toutefois, cela aurait pour effet d'accroître les pertes, et il faudrait revoir tout le système du recouvrement des coûts.
Le sénateur Tkachuk: Tel n'est pas l'objet de ma question. Vous avez déclaré que ces garanties ne sont pas nécessairement requises. Je vous ai alors demandé pour quel pourcentage de prêts elles ne l'étaient pas.
M. Jentsch: Je ne connais pas la réponse à cette question.
Le sénateur Tkachuk: Comment pouvez-vous faire cette déclaration si vous ne possédez aucun renseignement?
Le président: Pour être juste, je pense que le témoin disait qu'il y a des prêts, dont le pourcentage est inconnu, pour lesquels sa banque n'exige pas la garantie de 25 p. 100. Il peut faire cette déclaration. Vous lui avez demandé s'il connaissait ce pourcentage. Je déduis de votre réponse qu'il y en a au moins certains pour lesquels ces 25 p. 100 ne sont pas exigés.
M. Jentsch: Absolument.
Le président: Vous ne connaissez simplement pas le pourcentage.
M. Jentsch: C'est exact.
M. Coffey: À ce propos, en 1994, Industrie Canada a chargé Allan Riding, George Haines et l'Université Carleton de réaliser une étude détaillée de ce programme. Ils ont fait des enquêtes sur le nantissement, et cetera. Je suppose que les tendances qu'ils ont constatées sont encore valables aujourd'hui. Si vous me le permettez, je remettrai ce document au greffier pour que les sénateurs puissent l'examiner. Il est peut-être temps que M. Riding et d'autres le mettent à jour.
Le sénateur Tkachuk: Êtes-vous en faveur d'étendre l'accès à ce programme aux associations bénévoles?
M. Jentsch: Dans l'ensemble, oui. Pour que ce programme reste simple à utiliser pour l'ensemble de sa clientèle, je préféferais que le secteur bénévole soit traité de façon différente parce qu'il faut le prendre en considération de façon différente. On prendrait des garanties différentes, on appliquerait des règles différentes et on procéderait à une analyse différente. Si on ajoutait ce secteur à ce programme, celui-ci deviendrait monstrueux.
Je suis en faveur de l'utilisation du programme de la LPPE par le secteur bénévole, mais, dans la pratique, par souci de simplicité, je recommanderais que cela se fasse en dehors du programme existant.
Le sénateur Tkachuk: Des garanties personnelles devraient-elles alors être fournies?
M. Jentsch: On ne pourrait pas obtenir des garanties personnelles, et il faudrait donc envisager différemment les analyses et les mesures de précaution requises.
Le sénateur Tkachuk: À moins d'exiger une garantie de la part des administrateurs.
M. Jentsch: Ce serait une option. Je ne sais pas dans quelle mesure on pourrait le faire.
Le sénateur Tkachuk: Ce programme rapporte-t-il aux banques?
M. Jentsch: Le programme de prêts aux petites entreprises et l'ensemble des services bancaires offerts aux PME sont d'un bon rapport pour les banques. Ce programme est un élément important qui nous permet de participer activement à ce marhé.
Le sénateur Tkachuk: Avez-vous besoin de ce programme?
M. Jentsch: Oui.
Le sénateur Tkachuk: S'il n'existait pas, cela changerait-il réellement quelque chose dans l'économie? Cela changerait-il quoi que ce soit dans le monde?
M. Coffey: Je crois que oui. Dans mon mémoire, j'ai signalé que ce programme a un objectif très utile, qui est d'aider les petites entreprises canadiennes à croître et à prospérer. Peut-on y apporter des modifications? Oui, et c'est ce que nous proposons.
Le sénateur Tkachuk: Nous avons entendu plusieurs témoins à Calgary et à Vancouver. Dans la région de Vancouver, nous avons entendu, je crois, une nouvelle alliance composée de sept sociétés représentant des fabricants, des importateurs et des exportateurs. Ils venaient tous de créer leur entreprise, mais ils n'étaient pas au courant de l'existence du programme et ils n'y avaient jamais eu recours. Ils ont appris son existence quand ils ont reçu notre lettre. Cela me paraît très étrange.
M. Coffey: En 1997, 9 p. 100 des entreprises du secteur manufacturier ont bénéficié de prêts accordés en vertu de ce programme, pour un montant total d'environ 179 millions de dollars. Le pourcentage n'est pas très élevé, mais il est relativement important. J'aurais peut-être quelque chose à redire au sujet d'un taux d'approbation de 93 p. 100. Les banques trouvent d'autres façons d'aider les sociétés de ce genre sans compter seulement sur ce programme.
Le sénateur Tkachuk: C'est ce que je veux dire. Avez-vous besoin de la LPPE?
M. Coffey: Je pense que nous en avons besoin pour l'avenir immédiat. Si vous voulez revenir dans cinq ans et en discuter à nouveau, comme le Sénat pourrait certainement le faire, notre réponse serait peut-être différente. Toutefois, aux yeux de la Banque Royale, ce programme possède une grande importance stratégique pour l'avenir prévisible.
Le sénateur Kolber: Je vous ai posé tout à l'heure une question au sujet du coût moyen des prêts. Vous l'avez peut-être mal comprise. Vous m'avez indiqué le coût moyen des prêts relevant de ce programme, mais j'aimerais connaître le coût moyen des prêts consentis au secteur des PME.
M. Coffey: Sans vouloir vous offenser, monsieur, je ne suis pas sûr que cela soit inclus dans le mandat de votre comité.
Le sénateur Kolber : Ce renseignement nous donnerait une certaine idée de ce que fait le gouvernement. Vous n'êtes pas obligé de me répondre. Je crois que j'ai déjà ma réponse.
M. Coffey: Je crois que vous avez dit que vous aviez effectué un sondage téléphonique ce matin. Je suis content que vous reveniez à cette question parce que je vous ai donné un chiffre qui s'appliquait seulement à ce programme. Sans vouloir vous offenser, je n'aime guère divulguer les marges que je pratique sur ce marché.
Le président: Il vous est tout à fait loisible de dire que c'est un renseignement confidentiel et que vous ne voulez pas le rendre public. Le fait que le sénateur Kolber vous pose cette question ne me pose aucun problème. Si vous ne voulez pas rendre ce renseignement public, c'est à vous d'en décider.
Le sénateur Eyton: Le marché des PME est-il un marché concurrentiel? Est-ce une clientèle que les banques et les autres institutions financières cherchent à attirer? Il peut y avoir toutes sortes de réponses à cette question. Peut-être ce marché ne vous enthousiasme-t-il pas réellement, mais vous le desservez parce que c'est un service public, un service que vous fournissez à la collectivité, et que c'est une partie de l'ensemble de vos activités. C'est peut-être un marché sur lequel vous faites de gros efforts pour vous implanter, et il s'insère bien dans vos stratégies d'affaires dans le cadre de l'ensemble des activités de vos institutions.
Cela se mesure, me semble-t-il, à la part de marché. Ma question est double. Elle ne porte pas spécialement sur la part de marché des banques par rapport à celle des autres institutions financières qui sont actives sur ce marché. J'aimerais connaître la part de marché de chacun. Je voudrais savoir, par exemple, ce que fait la Banque de Nouvelle-Écosse par rapport à la Banque Royale ou à la CIBC. Je parle des prêts aux PME. Il me semble que certaines banques manifestent peut-être un peu plus d'enthousiasme que d'autres et font peut-être un peu plus d'efforts que d'autres.
Si certaines banques font plus d'efforts et obtiennent de meilleurs résultats dans ce secteur, quelle recommandation pouvons-nous faire pour encourager non seulement les banques, mais aussi d'autres institutions à faire plus d'efforts pour chercher à accorder des prêts dans ce secteur? Comment pouvons-nous les inciter à s'y intéresser davantage?
M. Coffey: Les PME représentent plus de 98 p. 100 de l'ensemble des activités commerciales au Canada. C'est elles qui comptent le plus au Canada. C'est à cela que pense la Banque Royale en répondant à cette question. Nous avons une passion pour les PME, nous croyons en elles. Ce secteur est un important créateur de richesses, d'emplois et d'impôts. Pour notre part, nous ne nous contentons pas de lui prêter de l'argent, nous entretenons avec lui des rapports holistiques.
Durant l'automne 1994, le gouvernement du Canada a créé un comité sur l'industrie à la Chambre des communes pour étudier les rapports entre les banques et les PME. Nous sommes plusieurs ici à avoir comparu devant ce comité il y a deux mois seulement. De toute évidence, les choses ont beaucoup changé. Nous avons divulgué notre part de marché à ce comité, c'est donc un renseignement public.
Le sénateur Eyton: Cela m'intéresserait.
Ma question concernait les PME qui utilisent la LPPE. D'après vos déclarations et celles de M. Shaughnessy, il y en a très peu. Qui est concurrentiel dans ce domaine? Quelles sont vos parts de marché respectives? Quelles sont les tendances?
M. Coffey: Notre part de ce programme est inférieure à notre part du marché des PME au Canada. Nous assumons davantage de risques commerciaux nous-mêmes au lieu de nous reposer sur la LPPE. En 1997, la Banque Royale a accordé 21 p. 100 de tous les prêts relevant de ce programme. Mes collègues peuvent vous dire quelle est leur part de marché.
M. Jentsch: Par rapport aux banques ou au programme?
M. Coffey: Au programme. C'est un outil que nous avons pour aider les petites entreprises. L'année dernière, 5 p. 100 de tous mes prêts sont passés par ce programme.
Le sénateur Eyton: Le chiffre est à la hausse ou à la baisse? Je cherche à connaître les tendances.
M. Coffey: Il est stable. Ces quatre ou cinq dernières années, nous avons augmenté notre part du marché de ce programme, mais moins que nous n'avons augmenté notre part du marché plus générale des PME, aussi bien pour ce qui est des sommes engagées que du nombre de comptes.
M. Shaughnessy: Le marché des PME est marqué par une concurrence intense au Canada. Comme mes deux collègues l'ont expliqué, nous l'envisageons dans une optique holistique. Nous ne voulons pas conclure simplement des prêts isolés avec les gens des PME. Nous voulons pouvoir répondre à tous leurs besoins. Nous voulons pouvoir répondre à leurs besoins personnels aussi bien que leurs besoins commerciaux.
Si on tient compte de toute la gamme des produits ou services dont ils ont besoin, c'est un marché très compétitif et qui rapporte beaucoup.
Un banquier qui décide de négliger le marché des PME n'obtiendra pas les mêmes résultats que celui qui ne le néglige pas.
Pour répondre directement à la question sur la LPPE, le prêt est le produit de base pour un petit entrepreneur, qu'il emprunte ou non. Il veut traiter avec une institution financière dont il sait qu'elle est là aujourd'hui et qu'elle sera là demain s'il se trouve avoir besoin d'un prêt. C'est un peu différent des produits personnels. Les gens savent qu'ils auront besoin d'un prêt à un moment donné, et l'institution financière à laquelle ils veulent s'adresser est celle qu'ils connaissent sur le marché. Premièrement, il faut avoir une présence et, deuxièmement, on est présent parce que c'est une bonne chose.
M. Howden: Dans le cas de la Banque Hongkong, en fait, un fort pourcentage de nos clients des petites entreprises n'empruntent pas d'argent auprès de nous. Une forte proportion d'entre eux sont, en fait, des déposants nets. Nous utilisons le programme de prêts aux petites entreprises pour satisfaire les besoins de ces clients quand ils décident d'agrandir leur entreprise. Nous ne cherchons pas nécessairement à ouvrir des comptes à ce titre, mais nous servons notre clientèle existante. Nous espérons que les clients de nos concurrents vont s'adresser à nous et que nous pourrons les servir.
Ce programme fonctionne de la même façon dans notre banque que chez nos concurrents. Les règles sont les mêmes.
Le sénateur Eyton: C'est peut-être une réponse, mais je n'en suis pas sûr
Le président: Le témoin suivant est M. Brien Gray de la FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Certains d'entre vous se souviennent peut-être que M. Gray a déjà comparu devant notre comité quand nous étudiions les institutions financières de la Couronne. Vous vous rappelez que notre comité a recommandé certains changements de structure, notamment la suppression des agences régionales, ce qui nous a valu de sévères critiques de la part de nombre de nos collègues. Quoi qu'il en soit, M. Gray, vous nous avez été d'une grande aide dans cette étude.
Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps de nous rencontrer aujourd'hui. Vous nous avez remis un mémoire. Vous pourrez peut-être faire une déclaration liminaire, puis nous passerons aux questions.
M. Brien Gray, vice-président principal, politique et législation, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante: Je vais mettre en relief certains éléments de ma déclaration, puis je serai prêt à répondre à toutes les questions que vous voudrez éventuellement me poser.
La FCEI répond avec un grand plaisir à l'invitation que lui a faite le comité sénatorial des banques de donner son avis sur certains aspects de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Nous présentons un point de vue qui nous paraît unique. Notre organisation représente environ 90 000 petites et moyennes entreprises de l'ensemble du pays. Elles sont actives dans tous les secteurs et dans tous les recoins de notre vaste pays. Nous observons, contrôlons et évaluons la Loi sur les petites entreprises depuis plus de 25 ans et, de ce fait, nous pensons avoir acquis une bonne connaissance du programme du point de vue des utilisateurs, les dizaines de milliers -- ou les centaines de milliers maintenant -- de petites entreprises qui y ont éventuellement eu recours.
Au fil des ans, nos enquêtes et des études indépendantes ont montré que ce programme est l'un des plus efficaces dans son genre. D'après nos membres, c'est le programme fédéral ou provincial de ce type qu'ils connaissent et comprennent le mieux et qu'ils utilisent le plus.
Il y a plusieurs raisons à cela. Son objectif est resté relativement constant: il est censé aider les nouvelles petites entreprises à obtenir des prêts à cause de l'insuffisance des investissements dans cette partie du marché. Ce programme rend compte de ses activités. Son fonctionnement est examiné régulièrement pour s'assurer de son efficacité. Les problèmes sont réglés, et les nouveaux besoins, s'ils sont justifiés, sont satisfaits. Enfin, dans une large mesure, ce programme donne de bons résultats parce qu'on n'a laissé aucune considération politique influencer un programme indépendant et fondamentalement bien conçu.
Même si ce programme et son rôle auprès des PME jouissent de notre appui, il nous paraît important pour sa survie qu'il s'en tienne à ses principes fondamentaux. Les efforts visant à l'en détourner l'ont mis en danger, comme cela va se produire encore. Nous ne pensons pas, par exemple, que le jeu en vaille la chandelle. Quand on lit le document de consultation, on est frappé par la gamme des nouvelles applications proposées pour le programme, et la FCEI tient à rappeler au gouvernement qu'il devrait conserver ce programme sous sa forme actuelle.
Nous disons publiquement depuis longtemps qu'il ne devrait pas couvrir les besoins concernant les fonds de roulement parce que ce qui s'est passé dans d'autres pays montre que cela pourrait entraîner sa ruine. Les prêts destinés aux fonds de roulement sont une autre paire de manches, et si le gouvernement est déterminé à s'engager sur cette voie, il devrait tester ce programme sur ses propres mesures pour voir ce qu'il donne.
En fin de compte, nous nous inquiétons pour la durabilité à long terme de ce programme. Il nous paraît dangereux de chercher à lui faire couvrir tous les besoins imaginables.
Enfin, le gouvernement doit rejeter l'idée selon laquelle la seule façon d'inciter les banques à prêter de l'argent aux sociétés d'exportation, aux sociétés axées sur la connaissance, aux micro-entreprises ou au secteur bénévole est de leur offrir un système de garantie de crédit. Pour aussi utile que soit ce programme, les banques ne doivent pas l'utiliser pour répondre à leur façon aux problèmes généraux de financement que connaissent la majorité des petites entreprises de notre pays.
Je pense qu'il est important de parler d'un certain nombre de questions précises et j'ai donné un aperçu de quelques-unes d'entre elles.
Pour ce qui est des chiffres, la FCEI s'inquiète depuis quelques années du nombre de prêts accordés en vertu de ce programme. Pendant les années 1980, il était le plus souvent compris entre 16 000 et 17 000 par an. Suite aux modifications intervenues en 1993, ce nombre a augmenté rapidement jusqu'à son niveau maximum de 68 000 en 1994-1995. Depuis lors, notamment à cause des modifications de 1995, ce chiffre est redescendu à environ 30 000 et il est même, je crois, inférieur à cela maintenant.
En 1994, nous avons écrit au ministre, M. Manley, pour lui faire part de nos préoccupations au sujet de certains aspects de la LPPE sur lesquels nous pensions qu'il fallait se pencher. Nous trouvions particulièrement inquiétant que la proportion de l'ensemble des prêts aux petites entreprises financés en vertu de ce programme ait atteint jusqu'à 16 p. 100 depuis les réformes de 1993. Pour la FCEI, ces chiffres restent trop élevés et risquent même d'augmenter encore si on accepte certaines des propositions actuelles visant une expansion du programme.
En ce qui concerne ses paramètres, la FCEI est d'avis que, du fait de leur générosité excessive, les acceptations ont été plus nombreuses que prévu, et le ministère a dû solliciter des fonds supplémentaires durant le quinquennat.
Par le passé, nous avons demandé un resserrement de ces paramètres. En 1994, le montant moyen emprunté par les membres de la FCEI était d'environ 50 000 $. Ce chiffre est monté à 90 000 $ en 1997. La valeur moyenne des prêts accordés en vertu de ce programme est actuellement d'environ 65 000 $. En outre, la limite étant plus élevée, des problèmes peuvent résulter du fait que des grosses entreprises pourraient essayer d'abuser du système.
Pendant plusieurs années, la FCEI a invité le gouvernement à abaisser le plafond de ses prêts de 250 000 $ à 150 000 $. Au vu des délibérations actuelles, il nous a paru important de demander à nouveau à nos membres ce qu'ils en pensaient. Je dois vous signaler aujourd'hui que 49 p. 100 ont recommandé de conserver le chiffre de 250 000 $. Toutefois, les résultats du vote étant serrés, nous en concluons qu'il serait mal avisé de relever ce plafond. Si, comme certains l'ont proposé, il était porté à 500 000 $, cela créerait d'énormes problèmes pour les coffres de l'État et pour le programme et pourrait même en compromettre la survie. Ne l'oublions pas, le montant moyen des prêts est nettement inférieur à 100 000 $.
À notre avis, le plafond fixé pour le volume de ventes est également trop élevé.
Le président: Monsieur Gray, puis-je vous interrompre pour vous poser une question? Quel est le plafond actuel pour le volume de ventes?
M. Gray: Il est actuellement de 5 millions de dollars, mais je signalerai que 7 p. 100 de nos membres ont un volume de ventes égal ou supérieur à 5 millions de dollars et que celui de 18 p. 100 d'entre eux dépasse 2 millions de dollars. Les chiffres de Statistique Canada le confirmeront. Selon nous, ceux qui affirment qu'il faut maintenir les grandes entreprises et les prêts d'un gros montant dans ce programme pour le subventionner font fausse route. Il s'agit de savoir si, pour obtenir un prêt, ces entreprises ont besoin de garanties comme celles qu'offre la LPPE, et la FCEI est d'avis que les prêts aussi importants ne sont pas conformes aux objectifs fondamentaux du programme.
Une autre question, celle du nombre de demandes et de la durabilité du programme, met en jeu les types d'entreprise admissibles. Il serait difficile de prétendre que les détenteurs de franchises importantes, les gens qui exploitent un parc de véhicule, les dentistes, et cetera en ont besoin. En outre, selon nous, si le secteur bénévole ou les OFC ont besoin qu'on les aide, il faudrait le faire en dehors de ce programme, et on peut se demander si les banques devraient être transformées en prestataires de programme pour appliquer n'importe quelle idée imaginable.
Le sénateur Meighen: Qu'est-ce qu'une «OFC»?
M. Gray: Une opération financière canadienne.
Pour les micro-prêts, la FCEI craint que certains prêteurs n'incluent la majorité de leurs micro-prêts dans ce programme. En effet, si on veut un micro-prêt, on peut en obtenir un, mais il doit faire l'objet d'une garantie de crédit. À notre avis, il faudrait compiler des statistiques et les analyser pour déterminer si les chiffres sont démesurés ou non.
Pour ce qui est des transferts d'une colonne du bilan à l'autre, la FCEI continue à être préoccupée par la façon dont les banques transfèrent sous l'égide du programme des prêts qui devraient être traités en dehors de celui-ci pour n'avoir pas à en assumer le risque. Nous avons fait part de ces préoccupations aux ministres responsables du programme, et la comparaison entre les chiffres de 1980 et ceux de 1990 semble montrer qu'il y a anguille sous roche. M. Coffey a mentionné tout à l'heure le rapport de M. Riding, où il en est question. Nous avons l'impression qu'il faudrait établir des critères d'évaluation du programme pour surveiller constamment les niveaux d'augmentation des prêts relevant de ce programme, en analysant également ce que fait chaque institution.
La transparence: la FCEI est d'avis que ceux qui ont reçu des fonds en vertu de ce programme doivent être mis au courant de ce fait. D'après plusieurs sources, de nombreux demandeurs de prêts ne savent pas qu'ils reçoivent de l'argent en vertu d'un programme garanti par le gouvernement qui leur coûte plus cher. Par conséquent, ce n'est peut-être pas en connaissance de cause qu'ils décident de se prévaloir du programme ou d'y rester.
Le formulaire de demande doit être parfaitement transparent, et les préposés aux prêts doivent être tenus d'expliquer complètement les avantages et les coûts de ce mode de financement. Le gouvernement doit se voir reconnaître un certain mérite pour le programme qu'il fournit.
La collecte et le contrôle des données ont une grande importance. Les méthodes utilisées pour évaluer le programme sont déterminantes. Par le passé, un de ses points faibles était qu'on n'établissait pas de statistiques pertinentes. Il est indispensable de contrôler et d'évaluer le programme avec plus de rigueur. Par exemple, dans quelle mesure savons-nous aujourd'hui quels éléments des modifications apportées en 1993 et 1995 ont porté fruit? Dans quelle mesure pouvons-nous en mesurer les effets?
Par ailleurs, juger le programme de prêts aux petites entreprises en fonction du nombre d'emplois créés est, à nos yeux, davantage une mesure politique qu'une véritable mesure de sa réussite. Utilisons plutôt comme mesure le nombre d'entreprises qui n'ont plus besoin de ce programme, leur taux de croissance, leurs besoins en matière de financement et d'autres choses de ce genre.
Pour ce qui est de la souplesse de la réglementation, la FCEI comprend que les pouvoirs publics doivent pouvoir agir rapidement lorsque le programme pose des problèmes auxquels il faut remédier, par exemple, si des abus sont commis par certaines sociétés. Il peut alors être justifié d'intervenir par la voie réglementaire; toutefois, pour les choses qui ont une importance fondamentale pour le programme, par exemple les modifications structurelles comme l'habilitation des prêteurs, le montant maximal des prêts, les bénéficiaires admissibles, il faudrait agir par la voie législative et non pas réglementaire pour garantir l'imputabilité et la transparence du programme.
À notre connaissance, certains prêteurs ont demandé à pouvoir facturer des frais de service en sus des frais qui font partie intégrante du programme. Ils justifient cette proposition en disant qu'une telle politique serait plus conforme aux procédures bancaires normales. La FCEI s'oppose à ce que l'on ajoute ces frais au programme de prêts aux petites entreprises. Nos membres se sont toujours plaints des frais de service, de leur application arbitraire et de leur montant, ainsi que de l'absence de corrélation entre ces frais de service et la valeur du service correspondant. Nous pensons qu'il n'est pas approprié que le gouvernement fédéral ajoute des frais de ce genre à ce programme.
Enfin, comme nous l'avons signalé dans la partie intitulée «Transparence», nous avons l'impression qu'il est important de faire une distinction entre les prêts accordés au titre de ce programme et ceux qu'on considère comme des prêts «normaux».
Pour ce qui est du crédit-bail, la FCEI, pour être franc, n'a entendu personne réclamer à cor et à cri que ce mode de financement soit offert dans le cadre de ce programme. Le besoin n'en a pas été clairement démontré et, à notre avis, Industrie Canada devrait déterminer l'ampleur de ce besoin et tester différentes options avant de décider qu'il convient d'inclure ce type de prêt dans ce programme pour répondre à la demande.
Je vais passer brièvement à la disposition relative aux investissements de capitaux parce qu'après tout, ce programme a été en partie mis sur pied à cause du manque de capitaux disponibles sur le marché. On ne peut pas discuter de ces questions sans discuter également de la possibilité d'avoir accès à des capitaux. Ces 20 dernières années, on a prêté beaucoup trop peu d'attention, au Canada, à cette question en ce qui concerne les PME. Le niveau de capitalisation des PME continue de subir les effets à retardement de la récession. Face à l'affaiblissement de l'état du marché et à des réductions souvent massives des prêts aux petites entreprises, beaucoup d'entre elles ont été contraintes de puiser dans leurs fonds propres pour survivre. Avec la reprise, l'application de mesures fiscales différentes a empêché ces petites entreprises de reconstituer facilement leurs fonds propres, et, vu leur capitalisation réduite, beaucoup d'entre elles ont du mal à emprunter davantage. À nos yeux, il en résulte que la création d'emplois est inférieure à ce qu'elle devrait être.
La panoplie d'outils dont on dispose actuellement pour régler ce problème laisse fortement à désirer. D'après un sondage effectué auprès de nos membres en 1997, les sources les plus appropriées d'investissements dans le capital des PME étaient, pour 56 p. 100 d'entre eux, leurs économies personnelles et, pour 45 p. 100, une réduction des impôts ou une rétention accrue des bénéfices.
Par contre, ils étaient peu nombreux à mentionner les investisseurs providentiels passifs (5,2 p. 100), les sociétés de capital-risque (4,1 p. 100) et les sociétés de capital-risque des travailleurs (1,1 p. 100).
Il est clair que les problèmes de notre secteur ne peuvent pas être résolus à coup de programmes et de fonds de capital-risque des travailleurs. «Franchir les obstacles», le rapport du groupe de travail sur les petites entreprises publié en 1994, a identifié ce problème. Ce groupe, nommé par deux ministres, MM. Martin et Manley, recommandait d'utiliser les instruments de la politique fiscale pour remédier au manque de fonds propres des PME. Il faut chercher plus vigoureusement à trouver des solutions convenant à celles-ci. Si on y parvient, cela contribuera fortement à assurer non seulement la santé financière des entreprises, mais également leur aptitude à croître et à contribuer à l'économie en créant des emplois et de la richesse. Cela se traduirait aussi par un recours moindre à des programmes de garantie de crédit subventionnés par le gouvernement comme celui des prêts aux petites entreprises.
Je manquerais à mon devoir si je ne faisais pas référence à nos préoccupations concernant les propositions de fusion et leurs effets sur ce programme. Il est difficile d'examiner un programme de financement dont la prestation auprès des PME est assurée dans une large mesure par les grandes banques à charte du Canada sans se pencher sur les répercussions éventuelles des fusions envisagées entre plusieurs banques.
La FCEI a consulté certains chiffres récents concernant ce programme et remarqué qu'en Ontario, par exemple, s'il n'y avait plus que deux banques au lieu de quatre, elles détiendraient plus de 75 p. 100 du nombre des prêts consentis en vertu de ce programme et plus de 75 p. 100 de leur valeur en dollars. Bien entendu, ces chiffres seront plus élevés à certains endroits. Dans la mesure où ce programme et les prêts qui en dépendent visent les petites entreprises récemment créées et étant donné que ces entreprises fournissent la majorité des nouveaux emplois nets dans l'économie, la vaste majorité des emprunts de ce type seraient monopolisés par deux méga-institutions.
Il nous paraît essentiel que, dans le cadre de votre examen, vous collectiez des données auprès des banques pour évaluer les répercussions possibles de leur fusion sur ce programme.
La FCEI a exposé son point de vue et ses préoccupations au sujet du programme de prêts aux petites entreprises, et nous avons également mentionné certaines d'entre elles à diverses occasions. Nous vous encourageons à lire les lettres que nous avons déjà envoyées aux ministres. Certains de leurs éléments sont dépassés, mais d'autres sont encore pertinents. Nous sommes d'avis que nombre des préoccupations que nous avons exprimées sont encore valables.
Pour conclure, le programme de prêts aux petites entreprises est, à notre avis, défini et administré avec rigueur et il continuera à jouer un rôle très important pour le développement et la croissance du secteur des PME au Canada comme il le fait depuis bien des années. Nous vous recommandons de n'envisager qu'avec une prudence extrême d'apporter des modifications structurelles au mode de fonctionnement de ce programme. En fait, s'il marche bien, n'y touchez pas. Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette: En termes de ratio dette-équité, est-ce que la situation des petites et moyennes entreprises s'est améliorée ou est-ce le statu quo? C'est quand même un peu la base de tout l'avenir des petites et moyennes entreprises.
Est-ce que la situation dans les cinq dernières années s'est améliorée, selon vous? Si l'on parle de ce programme et des autres mesures du gouvernement, on veut procéder de façon équilibrée. Ce qui met en danger l'avenir des entreprises, c'est souvent un fardeau de dettes trop élevé. Si on continue à encourager l'endettement et que l'on n'a pas les outils pour équilibrer le ratio dette-équité, croyez-vous que l'on a tous les outils à l'heure actuelle pour aider et assurer non seulement la croissance, mais également la survie des PME?
M. Gray: C'est justement cela que je viens de dire; c'est-à-dire que la situation d'approvisionnement d'équité auprès des PME à travers le Canada est un problème. On parle beaucoup de fonds que l'on appelle en anglais «sponsored venture capital corporations» et des «angel investors». Mais les chiffres nous ont indiqué récemment que c'est vraiment une toute petite partie du marché.
Selon nous, la façon la plus utile -- et cela estt réitéré dans le rapport «Breaking the Barriers» sur les outils fiscaux -- est d'encourager la protection de l'équité à l'intérieur de l'entreprise, à savoir, une réduction du fardeau fiscal sur les entreprises. Ces entreprises sont tellement petites qu'elles n'ont pas l'occasion d'aller dans les marchés publics, soit les «venture capital corporations» ni aux «angels». Alors, c'est très difficile pour eux d'avoir accès à une autre source de financement, côté équité, et c'est pour cela que je l'ai mentionné. Cela fait des années depuis qu'il y a eu des changements. On a beaucoup d'incitations à faire des investissements dans IBM Canada ou une compagnie semblable mais il n'y a pratiquement rien pour encourager les Canadiens à faire un investissement dans une PME. C'est là justement le problème.
Le sénateur Hervieux-Payette: Vous ne parlez pas nécessairement du propriétaire ou de l'entrepreneur, mais des Canadiens qui souscriraient dans un fonds qui pourrait donner des bénéfices fiscaux, et ces fonds seraient dirigés dans les PME.
M. Gray: Mais, effectivement, les marchés informels d'équité au Canada sont beaucoup plus vastes que les marchés formels. Il faut changer le système de taxation afin d'inciter les Canadiens à faire des investissements dans les PME, qui sont effectivement des créateurs d'emplois dans toutes les régions du Canada. Le problème est que surtout depuis les années 80, l'ensemble de la taxation au Canada a beaucoup changé. Auparavant nous avions un système qui dépendait surtout des impôts progressifs; maintenant ils sont plutôt régressifs. C'est-à-dire que l'on se concentre sur les taxes sur la masse salariale et des taxes semblables qui réduisent essentiellement les retombées ou diminuent la retenue des gains par l'entreprise, et c'est cela le problème. On doit changer les incitations à l'investissement dans des fonds d'équité dans les PME.
Le sénateur Meighen: Est-ce que la taxe sur les gains de capitaux a un effet défavorable sur l'investissement d'équité dans les PME, à votre avis?
M. Gray: C'est important, sénateur Meighen, mais je dois dire que ce n'est qu'une partie du tout. Il y a plusieurs éléments à considérer. Il faut avoir la capacité de retenir les fonds dans l'entreprise, d'une année à l'autre. Alors, si j'ai été bouleversé pendant la récession et que j'ai dû consommer la partie équité de mon entreprise, le problème d'aujourd'hui, en comparaison aux années 80, cause des changements dans l'ensemble de la taxation. Maintenant, j'ai moins de capacité à retenir les fonds dans mon entreprise afin de la faire grandir. De cette manière, j'ai beaucoup plus besoin d'aller chercher la dette, afin de financer mon entreprise. Les gains de capitaux sont importants mais ce n'est qu'une petite portion de cela.
Le sénateur Hervieux-Payette: De toute façon, je trouve important que l'on doive regarder ces mesures dans leur ensemble plutôt que sur une base individuelle, parce qu'une entreprise a besoin de tous ces outils pour assurer sa croissance.
Je sais que vos membres sont très variés. Vous avez entendu tantôt des témoins nous dire que certains secteurs sont plus difficiles à financer; dont un en particulier. Évidemment le ministre nous a demandé de consulter les entreprises du savoir. Pensons aux domaines de la biotechnologie et de l'informatique. À votre avis, les entreprises de ces secteurs appartiennent-elles à une association comme la vôtre ou êtes-vous plutôt reliés au secteur manufacturier?
M. Gray: Non, ils sont membres de notre association. Nous avons beaucoup de membres venant de ces secteurs. Nous avons 90 000 membres à travers le Canada. On a un peu de tout dans le membership, mais il faut dire que la raison pour laquelle on l'a suggéré, si vous regardez ce secteur individuellement, les banques elles-mêmes vont admettre que ce n'est que récemment qu'elles ont pu comprendre comment accorder des prêts à ce marché. C'est un marché extrêmement unique. Cela devient un peu comme du capital au jour le jour, du «working capital» pour ces entreprises. C'est une façon de prêter qui est extrêmement différente de ce qui était envisagé pour ce programme-ci. On avait alors suggéré de faire un test pilote au LPPE; on devrait le faire, mais pas à l'intérieur de ce programme. Autrement, j'ai l'impression que l'on va peut-être mettre à risque ce programme-ci qui fonctionne actuellement extrêmement bien.
Le sénateur Hervieux-Payette: Les banques ont peu d'expérience dans les secteurs dont on vient justement de parler, dont celui des industries du savoir, et j'aurais tendance à croire, comme vous, que cette situation n'existe pas nécessairement à travers le pays. L'expertise n'est pas uniforme dans tous les centres, dans toutes les petites villes à travers le Canada. Les grands centres sont certainement mieux équipés pour évaluer les risques et donner une réponse assez rapide. Si on part d'une petite ville et qu'il faut aller au siège social ou à un autre endroit pour faire l'analyse, cela demande beaucoup de déplacements, de changements et ainsi de suite. L'évaluation coûte trop cher et on n'aide pas vraiment ces entreprises. Ce sont, à mon avis, les entreprises de l'avenir.
Donc, pour faire des recommandations au ministre, votre préférence serait que les entreprises du savoir aient un programme expérimental temporaire, quitte à évaluer quelles sont les mesures ou la nature d'un programme optimal que l'on pourrait mettre en place pour que celui-ci n'affecte pas les autres entreprises dans le programme régulier. Le programme qui est en place répond, pour vous, aux besoins du secteur traditionnel?
M. Gray: Oui, mais il faut vraiment reconnaître que d'accorder des prêts au secteur du savoir est bien différent que de faire des prêts normaux. Avec cette reconnaissance, comme vous venez de le dire, il y a des centres dans les banques concernant le secteur du savoir, et ils ne sont pas situés partout. On devrait peut-être se tourner vers un programme qui prend conscience de cet aspect. C'est pour cela que l'on suggère qu'on devrait le tester séparément. Et si on peut trouver une solution différente pour ce secteur, il faudrait le faire. J'aimerais ajouter que l'aspect équité est extrêmement important pour ce secteur.
Le sénateur Hervieux-Payette: Mon humble avis est que peut-être les fonds de capital de risque sont, dans le cas de certains d'entre eux, mieux spécialisés, et ils ont également l'expertise pour faire une meilleure analyse dans ce domaine. Mais là encore, ils ne sont pas nécessairement présents dans toutes les petites communautés à travers le pays; ils sont situés dans les grands centres et peut-être moins disponibles.
Ma collègue parlait du secteur touristique. Je sais qu'il y a un effort massif du gouvernement canadien pour coordonner ses efforts avec les provinces et avec le secteur privé pour donner un essor nouveau au domaine du tourisme. Je pense que le potentiel touristique du Canada est vraiment sous-développé. Par contre, on voit quand même que tous les efforts n'ont peut-être pas été faits. Est-ce que votre fédération est en contact avec le regroupement de l'industrie touristique et les gouvernements qui sont chargés d'étudier comment aider ces industries qui demandent autant d'investissements que les entreprises du savoir? Avez-vous travaillé avec eux? Quels sont vos suggestions pour aller de l'avant dans ce secteur?
M. Gray: Nous faisons affaires souvent avec le domaine touristique et plusieurs compagnies touristiques sont membres de notre organisation. Quand j'étais avec Phil O'Brien, le coprésident du rapport «Breaking through Barriers», il y avait beaucoup d'entreprises touristiques qui étaient extrêmement convaincues que nous devrions maintenir la Banque Fédérale de Développement parce que c'était, d'après eux, la seule source de financement de dettes pour ces entreprises dans les années 90. Voilà un élément qui, à ce jour, a été extrêmement efficace auprès de cette industrie. Je n'ai pas les chiffres sur la disponibilité des fonds de LPPE auprès du secteur touristique, je ne peux donc pas vous répondre à ce sujet.
J'aimerais revenir au thème de l'équité. Si, comme Canadien, je vois une occasion dans le marché d'aider l'entreprise touristique dans ma communauté, pourquoi est-ce que je n'aurais pas une incitation pour assister cette entreprise? C'est cela effectivement que je dis: on doit inciter les Canadiens et les Canadiennes à travers le pays à faire des investissements pour supporter les entreprises qu'ils connaissent très bien.
Le sénateur Hervieux-Payette: Est-ce que par vos propos je pourrais interpréter qu'un programme comme le Régime d'épargne-actions du Québec, qui donne certains bénéfices fiscaux, pourrait mettre en place des fonds d'investissement dans des secteurs, soit de haute technologie, soit dans le domaine touristique, et permettre par le fait même à un investisseur d'aller dans les secteurs à plus haut risque, et également de bénéficier de l'ensemble de la croissance de ce secteur? Toutes les entreprises n'auront pas nécessairement des difficultés.
M. Gray: Je suis d'accord qu'il est important d'examiner le Régime d'épargne-actions comme un outil. Le gouvernement devrait examiner en profondeur l'accès à l'équité pour toutes les PME du Canada, via le Régime d'épargne-actions et autres, c'est-à-dire d'offrir une incitation d'investir des fonds qui sont en dehors du Régime d'épargne-actions, afin d'orienter les fonds d'investissement vers les PME du Canada. Effectivement, ce sont des créateurs d'emploi et il faut les assister.
[Traduction]
Le sénateur Callbeck: J'aimerais que vous précisiez ce que vous voulez dire, à la première page, quand vous déclarez que le programme ne devrait pas être étendu au financement des fonds de roulement. Est-ce parce que ce programme s'autofinance et qu'à votre avis, si les fonds de roulement sont inclus, il faudrait augmenter les frais?
M. Gray: Je pense cela parce que nous avons examiné les programmes d'autres pays qui comportent des systèmes de garantie du crédit et qui ont essayé d'inclure des mesures d'aide concernant les fonds de roulement. Le fait est que ces programmes ont explosé. C'est parce que le risque inhérent aux prêts destinés aux fonds de roulement est bien différent de celui qui est inhérent aux prêts à terme.
Notre organisation, tout comme, je crois les banques, a toujours conseillé de ne pas inclure les fonds de roulement parce que cela pourrait faire exploser le programme. Si vous voulez tester cela, faites un projet-pilote indépendant de ce programme pour déterminer si c'est faisable parce que, pour être franc, il faudra procéder à une évaluation dans une autre optique.
Le sénateur Callbeck: Je ne vois aucune mention de la disposition actuelle concernant la garantie personnelle pouvant aller jusqu'à 25 p. 100.
M. Gray: Cela ne figure pas dans notre mémoire. La fédération défend depuis toujours l'idée qu'il ne devrait pas y avoir de garantie personnelle parce que, si le gouvernement assume la totalité du crédit, on peut supposer que les sommes engagées par les banques sont couvertes et qu'une garantie personnelle est inutile.
Le «compromis», si je peux l'appeler ainsi, conclu à l'issu des négociations a été ce niveau de 25 p. 100. Au cours de la période immédiatement postérieure, certaines institutions -- et je ne sais pas si elles étaient mal intentionnées -- demandaient, pour se couvrir, une garantie de 25 p. 100 à chacun des quatre partenaires d'une entreprise et obtenaient ainsi une garantie personnelle additionnelle de 100 p. 100. Nous avons dénoncé ce fait, et la chose a été éclaircie et corrigée.
Je crois que l'intention des ministres responsables du programme -- et je suppose que les banques les ont convaincus -- était qu'il fallait avoir une preuve quelconque qu'un emprunteur s'emploierait sérieusement à rembourser son prêt et que, dans cette mesure, une participation personnelle était nécessaire.
Le sénateur Kenny: Votre organisation considère maintenant cela comme un élément important. Elle ne se plaint pas de ces 25 p. 100.
M. Gray: Nous nous en passerions volontiers, et nous n'entendons pas beaucoup de gens clamer que c'est une exigence injuste.
Le sénateur Kenny: Si vous prêtiez de l'argent, vous seriez probablement content de savoir que votre débiteur se sent directement concerné.
M. Gray: C'est probablement vrai.
Le président: Je pourrais ajouter pour les besoins du procès-verbal qu'au Canada atlantique et dans l'Ouest, plusieurs témoins du monde des affaires ont avancé le même argument que le sénateur Kenny, c'est-à-dire qu'en exigeant un élément de garantie personnelle, on obtient la preuve d'un certain engagement personnel de l'emprunteur envers son entreprise, et, en fait, il nous ont encouragés à ne pas supprimer cette exigence. C'était des gens qui avaient contracté des emprunts dans le cadre de ce programme.
M. Gray: Eh bien, je pense qu'une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas mentionné cela dans le mémoire lui-même était que nous avions l'impression que c'était, de fait, un élément du programme qui n'avait pas à être modifié.
Le sénateur Kolber: Y a-t-il dans cette salle quelqu'un qui s'est adressé à une banque et à qui on n'a pas demandé une garantie personnelle? Si vous voulez de l'argent, vous devez signer.
Le sénateur Callbeck: Certains témoins que nous avons entendus dans le Canada atlantique ont dit qu'ils désiraient un terme plus long. Avez-vous des idées à ce sujet?
M. Gray: Nous n'avons pas posé cette question spécifique à nos membres, mais c'est une bonne remarque.
Le sénateur Angus: Vous avez fait certains commentaires très intéressants, monsieur Gray. Étiez-vous dans la salle quand nous avons entendu les premiers témoins de l'Association du crédit-bail?
M. Gray: Non. Je n'étais pas là quand ils ont comparu.
Le sénateur Angus: Un de leurs commentaires consistait à dire que cette loi est tout à fait démodée, qu'elle n'a pas su évoluer au rythme de la technologie moderne pour ce qui est, de façon générale, de l'application de celle-ci à l'industrie des services financiers et, plus particulièrement, qu'elle n'a pas su s'adapter à certaines des méthodes de financement de pointe actuellement disponibles sur le marché.
J'essaie de concilier ces commentaires avec ce qui me semble être votre idée de base: si ça marche, n'y touchez pas. Atténuez un peu certaines choses; réduisez-en la portée. Ce programme vous convient. Vos membres ne s'en plaignent pas à cor et à cri. Est-ce juste?
M. Gray: En deux mots, ce que nous pensons de ce programme est que les banques et les institutions financières qui traitent avec les PME ont le rôle et le devoir d'offrir la vaste majorité des prêts accordés dans notre pays. Toutefois, si nous croyions que tout ce qui existe sous le soleil devait faire l'objet d'une garantie de crédit, nous serions en bien mauvaise posture.
Nous adoptons, dans l'ensemble, une attitude inspirée du point de vue généralement modéré de nos membres: faites en sorte que ce programme fonctionne, qu'il soit efficace, mais laissez les marchés privés fonctionner normalement.
Nos membres ne nous ont pas dit que le crédit-bail leur posait problème et qu'ils ont besoin d'un système de garantie de crédit pour y avoir accès.
Des représentants de ce secteur m'ont dit que, vu qu'on utilise la cotation de crédit, on ne peut pas déterminer de façon satisfaisante, au cours des deux premières années suivant la création d'une entreprise, si celle-ci ne pose aucun risque, si bien que les sociétés de financement ne sont alors pas prêtes à lui accorder un bail. Je leur réponds en leur demandant si leur proposition concerne les entreprises créées depuis deux ans ou moins. Si c'est ce besoin qui existe sur le marché, leur proposition devrait donc être limitée à satisfaire ce besoin. Nous devons déterminer de quoi le marché a besoin, comprendre la situation et voir ensuite quelle est la solution appropriée.
Le sénateur Angus: Il y a deux ans, notre comité a étudié plusieurs organisations gouvernementales de financement comme l'APECA, et les idées générales qui présidaient à nos travaux étaient que ces organisations avaient été créées à un moment où le crédit faisait défaut à certains secteurs de l'économie et où il était approprié de mettre sur pied une sorte de mécanisme d'aide, mais qu'il ne devait toutefois pas devenir un élément permanent dans l'ensemble du système qui existe dans notre pays.
Vous avez aiguisé ma curiosité en disant qu'une des principales raisons de la création de ce programme au début des années 60 était qu'il y avait à l'époque un manque de crédit pour investir dans les PME et que le marché financier privé ne parvenait pas à satisfaire totalement ces besoins. Avez-vous l'impression qu'il en est encore ainsi?
M. Gray: Comme je l'ai dit tout à l'heure au sénateur Hervieux-Payette, le problème que pose la capitalisation des petites entreprises est, à notre avis, très grave. Je n'ai pas souvenir qu'il ait été examiné sérieusement par une institution gouvernementale quelconque, et je représente les PME depuis près de 20 ans.
Comme j'ai essayé de l'expliquer en français, clairement, j'espère, l'incidence de diverses mesures fiscales a changé. Avant les nombreuses réformes de ce système intervenues dans notre pays au cours des années 1980, il était plus ou moins fondé sur un mode progressif d'imposition. Les sociétés étaient plus lourdement imposées, mais on se reposait beaucoup moins sur d'autres impôts, que je qualifierais de «régressifs», comme les charges sociales. Ces dernières années, le RPC a beaucoup augmenté. Au Québec, les retenues pour l'assurance-maladie ont plus que doublé au cours des 10 dernières années.
Pour sortir d'une période économique difficile, il faut faire des compromis. Auparavant, vous pouviez puiser dans votre solde, vos fonds propres. Ensuite, vous pouviez réinvestir vos bénéfices dans votre entreprise et vous doter d'un solide capital vous permettant de traiter plus facilement avec les banques. Aujourd'hui, la situation est bien différente de ce qu'elle était alors.
En 1994, quand Phil O'Brien a présenté des recommandations au gouvernement, nous avions encore pour objectif de lutter contre le déficit, et je pense que nous devrions continuer à le faire.
Il me paraît opportun d'examiner de façon très détaillée les niveaux de capitalisation des petites entreprises de notre pays. Pour la plupart, leurs propriétaires sont loin d'être riches. Leur contribution à notre pays est énorme, mais ils ne gagnent pas beaucoup d'argent. En fait, certains vivotent à peine, mais ils persévèrent. Notre obligation envers eux est d'examiner cette question de l'investissement dans le capital des entreprises pour les aider à continuer à fournir à notre pays les emplois et la richesse dont nous avons besoin.
Le sénateur Angus: Peut-être, à la suite de notre étude va-t-on notamment supprimer ce programme et recommander un autre type de petit véhicule soutenu par le gouvernement. Que penseriez-vous d'une telle recommandation?
M. Gray: Je pense qu'il faut le conserver tant que cette lacune existe et je pense que, dans le proche avenir, elle va exister. Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas réaliser cet examen.
Les petites entreprises ne peuvent pas s'adresser aux marchés publics. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, les sociétés de capital-risque, les fonds de travailleurs, même les investisseurs providentiels, constituent un groupe très restreint. Cela fait bien de mentionner ces sources, mais elles ne constituent pas un recours réaliste utilisable par les gens que nous représentons. Nous soutenons que le régime fiscal est le meilleur moyen pour que les entreprises ne distribuent pas tous leurs bénéfices et les réinvestissent et pour encourager les autres Canadiens à investir leurs économies dans les sociétés en train de se développer.
Le président: Je déduis de votre réponse au sénateur Angus et de votre intervention que, même si vous ne voulez pas que le crédit-bail soit inclus dans le programme, vous ne trouveriez rien à redire à un programe pilote conçu pour répondre à ce besoin. Cela étant, comment devrait-on répondre à ce besoin?
M. Gray: Le gouvernement examine constamment les différentes façons d'essayer de comprendre les changements qui se produisent dans l'économie. Je pense qu'il conviendrait de tester cela avant de lancer un programme.
Le président: C'est ce que j'entendais par «programme pilote».
Quant à votre question au sujet de la réduction du volume de ventes, pouvez-vous nous donner une idée de ce qu'il devrait être? Vous avez dit que le chiffre de 5 millions de dollars était trop élevé, mais vous n'avez pas proposé une autre option raisonnable.
M. Gray: Si 25 p. 100 des entreprises ont des ventes égales ou supérieures à 2 millions de dollars, on doit alors se demander quelle corrélation ce programme établit entre le volume des ventes et le besoin? À mon avis, vous ne devriez pas céder à une envie éventuelle d'augmenter ce chiffre. Je pense que vous pourriez probablement le conserver et que le programme continuerait à bien fonctionner.
Le président: Par «bien», voulez-vous dire «sans trop de risques»?
M. Gray: Je ne pense pas que cela changerait beaucoup le programme, mais vous constateriez peut-être une diminution du problème posé par les grosses entreprises qui subdivisent leurs prêts pour pouvoir en bénéficier.
Le président: Votre point de vue ne m'a pas étonné: si ça marche, n'y touchez pas; mais j'aurais pensé que bon nombre de vos membres seraient des entreprises axées sur la connaissance, ne serait-ce qu'à cause de l'énorme accroissement du nombre des petites entreprises de ce type. Premièrement, font-elles partie de votre organisation?
Deuxièmement, en supposant que vous avez des renseignements à leur sujet, y a-t-il des choses qu'il faut faire différemment pour les entreprises axées sur la connaissance qui ne possèdent pas certains des actifs mobiliers détenus par d'autres?
M. Gray: Pour répondre à votre première question, oui, elles font partie de nos membres et, oui, nous essayons, quand nous faisons des enquêtes sur le système bancaire, d'analyser leur expérience du mieux que nous pouvons. J'enverrai avec plaisir à votre comité les dernières que nous avons réalisées.
Toutefois, pour ce qui est de ce programme et des entreprises axées sur la connaissance, il faut des compétences particulières pour leur accorder des prêts. Elles ne peuvent pas en obtenir auprès des banques autrement que par l'entremise de ce programme. Les banques sont prêtes à reconnaître qu'elles n'ont compris que depuis peu comment accorder des prêts à ce secteur. Dans la mesure où elles le font, c'est surtout le fait de quelques centres de services bancaires commerciaux à certains endroits.
Ce programme repose sur le principe d'une large distribution à un grand nombre d'entreprises, mais le risque que posent les entreprises de ce genre est différent.
Le président: Il est différent parce que, fondamentalement, vous pariez sur quelqu'un et sur une idée qui ne constituent pas un actif tangible. Il n'y a pas d'actif mobilier qu'on pourrait saisir si les choses tournent mal.
M. Gray: C'est exact. Une des recommandations que nous avons présentées au comité Berger était qu'on devrait encourager, par exemple, l'ICCA à créer ce que j'appelle une section «TI». L'Association du Barreau canadien en a une. Ces gens connaissent très bien certains éléments spécifiques de ce type de prêts et, je pense, qu'ils pourraient contribuer intellectuellement à déterminer comment évaluer, comment traiter et comment fournir un mécanisme de financement approprié à ce secteur. Je pense pas qu'il s'inspirerait de la LPPE. C'est pourquoi nous pensons que vous devriez envisager de le concevoir autrement.
Le président: C'est manifestement un secteur important du monde de la petite entreprise canadienne et il a peut-être besoin d'un type de programme différent.
M. Gray: Absolument. L'accès à des capitaux est d'une importance capitale pour ce secteur.
Le sénateur Tkachuk: J'étais d'accord avec vos commentaires au sujet du problème global concernant la façon dont notre pays peut faire en sorte qu'un financement soit fourni aux PME. Je me rends compte que la fiscalité pose un problème en dissuadant les petites entreprises d'accumuler leurs bénéfices non répartis. Les gens de ce secteur nous disent qu'ils veulent ce programme, non pas parce qu'ils pensent que c'est un bon programme, mais parce que, vu les problèmes que nous avons dans d'autres domaines, c'est la seule option qu'ils ont.
M. Gray: Ce programme a été mis en oeuvre pour aider les petites entreprises récemment créées, et leur création récente était souvent plus importante que leur taille. Les petites entreprises ont toujours eu du mal à obtenir des capitaux. Au début, elles sont souvent sous-financées, et les banques, jusqu'à un certain point à juste titre, ne leur prêteront pas d'argent si elles ont des fonds propres insuffisants. Le programme de garantie les aide à combler cette lacune au début de leur existence.
On pourrait espérer qu'en prenant de l'ampleur, une entreprise peut conserver une part de ses bénéfices, les réinvestir et quitter le programme. C'est ce qui était prévu au départ. Nous pensons que le besoin de combler cette lacune existe toujours sur le marché, et c'est pourquoi nous continuons à appuyer ce programme. Dans un monde parfait, il serait inutile.
Le sénateur Tkachuk: En Saskatchewan, certaines entreprises ont un taux d'imposition de 37 p. 100 ou même de 50 p. 100. Au-dessus de 200 000 $, le taux est de 50 p. 100 et, au-dessous de 200 000 $, il est de 37 p. 100. Les petits entrepreneurs retirent de leur entreprise tout ce qui dépasse 200 000 $ parce que rien ne les incite à conserver cet argent dans l'entreprise. Cela empêche également les PME de prêter à d'autres entreprises comme elles, alors que c'est ce qu'aiment faire les entrepreneurs. Ce marché n'existe plus. Autrefois, les gens lançaient une entreprise avec l'aide de leurs amis, de leurs associés et d'autres gens d'affaires, mais pas nécessairement celles des banques.
Si nous portions la limite à un demi-million de dollars au lieu de 250 000 $, il y aurait une demande. Cela créerait l'offre d'argent et le crédit.
Ce que je veux dire est que je ne pense pas que ce programme soit un bon programme. Il y a d'autres façons de faire cela sans que le contribuable ait à assumer le risque. Nous voulons savoir comment nous pouvons résoudre ce problème.
Les petits entrepreneurs aiment-ils ce programme parce qu'ils pensent qu'il est nécessaire pour l'économie du pays ou parce que les autres options sont si peu attrayantes que c'est le seul programme qu'ils peuvent utiliser?
M. Gray: Je pense que les deux vont ensemble. S'il n'existait pas, cela créerait un problème pour l'économie.
Les petites entreprises se disputent les investissements. Il y a maintenant tellement de stimulants fiscaux qui se disputent mon argent qu'en tant qu'investisseur, j'aurais intérêt à investir ailleurs que dans une PME. Investir dans une petite entreprise n'est pas à la mode, ce n'est pas séduisant, ce n'est pas prestigieux, contrairement aux investissements dans d'autres secteurs.
Pour être franc, les petites entreprises sont les abeilles ou les fourmis ouvrières de notre pays, et nous devons nous mettre à les aider de façon plus cohérente à obtenir des capitaux. Je pense que cela améliorerait énormément l'activité économique de notre pays. Les grandes entreprises éliminent des emplois, elles rationalisent. Pour assurer l'avenir de notre pays, il faut fournir des sources de capitaux aux PME pour les encourager à reprendre leur croissance et pour revenir à la façon dont, comme vous l'avez dit, on investissait autrefois.
Le sénateur Oliver: Vous nous avez dit qu'il y a certaines pratiques bancaires courantes consistant à facturer des frais pour les demandes de prêts, les renouvellements et d'autres transactions. Vous nous avez également dit que vos membres se plaignent régulièrement des frais de service, du caractère arbitraire de leur application et de leur niveau, et du manque de corrélation entre ces frais et la valeur des services correspondants. Avez-vous des lettres, des documents ou des statistiques pour étayer ces déclarations très énergiques?
M. Gray: Oui. Nous avons publié une myriade de rapports à ce sujet, dont le dernier est sorti au début de l'année. Je vous en remettrai un exemplaire avec plaisir.
Le président: Monsieur Gray, merci beaucoup pour votre aide.
La séance est levée.