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BANC - Comité permanent

Banques, commerce et économie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 41 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 24 novembre 1998

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce, qui a été chargé du projet de loi C-20, modifiant la Loi sur la concurrence et d'autres lois en conséquence, se réunit ce jour à 9 h 30 pour étudier le projet de loi.

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous recevons aujourd'hui des responsables du Bureau de la concurrence d'Industrie Canada qui sont venus pour traiter du projet de loi C-20. Ces témoins reviendront à nouveau pour clore la série de témoignages sur le projet de loi, de sorte que nous aurons une autre occasion de leur poser des questions.

Monsieur von Finckenstein, voulez-vous commencer?

M. Konrad von Finckenstein, directeur des enquêtes et recherches, Bureau de la concurrence, Industrie Canada: Merci de nous avoir invités à venir vous parler du projet de loi C-20. Comme vous le savez, nous avons une très bonne Loi sur la concurrence dans notre pays. Au Canada, la population bénéficie d'une plus grande liberté de choix pour les produits et les prix que celle de nombreux autres pays. Mais nous tenons à garder la législation à jour. Ainsi, le projet de loi qui vous est soumis, traite de trois domaines importants qu'il faut mettre à jour. Le premier est le télémarketing trompeur, le deuxième un nouveau régime civil pour la publicité trompeuse et d'autres infractions, et le troisième la simplification des procédures de fusionnement.

J'aborderai ces trois sujets et passerai ensuite en revue pour vous les modifications qui ont été apportées au projet de loi à la Chambre des communes.

[Français]

Premièrement, en ce qui concerne les modifications au projet de loi vis-à-vis le télémarketing trompeur, notre objectif principal est de donner au Bureau des moyens rapides et efficaces afin de s'occuper des fraudeurs qui utilisent le télémarketing. Les fraudeurs utilisent l'anonymat du télémarketing afin de frauder les Canadiens. Ils cherchent à abuser tous les membres dans cette société, mais ils visent en général les plus vulnérables, c'est-à-dire nos aînés. C'est vraiment une tragédie, parce que si nos aînés perdent leur capital, ils perdent leur source de revenu complémentaire et franchement, ils n'ont pas d'autres possibilités d'obtenir une nouvelle source de revenu.

Pour cette raison, nous voulons combattre ce type de crime. Nous estimons que pour le moment, quatre milliards de dollars sont perdus chaque année à cause du télémarketing trompeur. Cela inclus les fraudes comme la déclaration illégale sur les prix, les loteries, les fraudes en matière de crédit, et cetera.

[Traduction]

Ce genre de délits jettent également une ombre sur notre secteur tout à fait légitime du télémarketing qui représente 40 milliards de dollars par an. C'est une activité commerciale tout à fait légitime, mais sa réputation est ternie par les fraudeurs qui utilisent le téléphone pour s'en prendre aux personnes âgées.

L'amendement proposé concernant le télémarketing trompeur fera de l'utilisation du téléphone pour des ventes interactives illicites une infraction criminelle. Nous serons habilités à pénaliser ces personnes et à prévoir des injonctions afin de faire cesser cette activité.

Le deuxième amendement porte sur la publicité trompeuse et autres inventions. Nous faisons essentiellement de ces infractions criminelles des infractions civiles. Dans le cas de la publicité trompeuse, il s'agit très souvent de dépasser les limites. Une fraude n'est pas réellement commise. Si quelqu'un subit un préjudice, il faudrait interrompre cette activité et obtenir une injonction. Toutefois, les pénalités criminelles ne sont pas indiquées en l'occurrence. La législation nous permettra donc d'entamer des poursuites au civil, d'obtenir rapidement une injonction et de mettre un terme à cette activité.

Les sanctions criminelles restent encore possibles en vertu de la loi, mais elles seront réservées aux affaires les plus monstrueuses et nous n'hésiterons pas dans ce cas à poursuivre.

La troisième partie du projet de loi qui vous est soumis traite de la simplification de l'examen des fusionnements. Comme vous le savez, nous connaissons actuellement une vague sans précédent de fusions, et elle ne semble pas donner des signes de ralentissement. Les dispositions du projet de loi rendront le processus plus simple. Elles garantiront également que nous recevrons l'information dont nous avons besoin et non pas celle dont nous n'avons pas besoin. Elles permettront au Bureau de la concurrence d'obtenir des ordonnances provisoires de sorte que la clôture des transactions pourra être reportée pendant la durée de l'examen. Elles nous permettront aussi de faire en sorte que l'on s'occupe des fusions importantes en évitant la paperasserie inutile. De plus, elles réduiront aussi la paperasserie pour les entreprises.

Une fois qu'elles auront été mises en oeuvre, nous nous attendons à ce que ces dispositions réduisent le nombre de transactions auxquelles nous devons nous intéresser d'environ 15 p. 100. Cela veut dire que nous nous attacherons aux plus importantes et que nous ne nous occuperons pas des plus petites. Ou plutôt, nous nous occuperons des plus petites beaucoup plus rapidement, de façon plus simple et efficace.

[Français]

Il y a d'autres modifications secondaires dans le projet de loi C-20. On n'a pas, par exemple, l'élargissement du pouvoir de vente et d'ordonnance afin d'éviter les poursuites dans le cas d'infractions moins graves, le titre du directeur des enquêtes et des recherches est changé pour celui de commissaire de la concurrence afin de refléter davantage son rôle en matière de politique et d'application des lois. On va officialiser les responsabilités du directeur pour l'application de certaines lois en matière d'étiquetage.

[Traduction]

Lorsque le projet de loi a été soumis au comité de la Chambre des communes, il a été soigneusement étudié. De nombreux témoins ont été convoqués et le comité a apporté certaines modifications.

J'aimerais les passer en revue à votre intention. La première concerne l'écoute électronique. En vertu du projet de loi C-20, le recours à l'écoute électronique -- c'est-à-dire l'interception de communications privées sans le consentement des intéressés -- est ajouté à l'article 183 du Code criminel. L'article 183 précise maintenant les infractions pour lesquelles on peut avoir recours à l'écoute électronique. On mentionnera donc également le télémarketing trompeur, le complot et le trucage des offres désormais, conformément à la Loi sur la concurrence.

Lorsque j'ai témoigné à la chambre, j'ai précisé que nous avions l'intention d'utiliser ces articles pour les complots relatifs à la fixation des prix et au partage du marché. Le comité a accepté cela et a adopté un amendement qui permet à la législation d'en tenir compte. Bien sûr, il nous faudra passer par les procédures normales consistant à convaincre un juge que les pouvoirs actuels sont insuffisants et qu'il y a des motifs raisonnables de procéder à une écoute électronique. Lorsqu'on passe par toute cette procédure et que l'on place une écoute électronique, si c'est en vertu de l'article 45, il faut que ce soit pour un complot visant la fixation de prix ou le partage du marché.

Deuxièmement, si c'est pour le télémarketing, il faut que ce soit pour une infraction en vertu du paragraphe 52(1)(3), qui mentionne des actions trompeuses délibérées. On ne peut faire une écoute téléphonique concernant le défaut de communiquer des renseignements; il faut qu'en l'occurrence vous soupçonniez que quelqu'un essaie de tromper délibérément des personnes en utilisant le téléphone pour les faire acheter, participer à des loteries ou autre. Ce sont les précisions apportées à l'écoute électronique par le comité.

Le comité a aussi précisé que les personnes qui s'engagent dans des activités de collecte de fonds dans un but charitable ou dans un but non lucratif seront considérées comme faisant la promotion d'une entreprise dans l'optique du télémarketing. Ainsi, si des fonds sont sollicités pour un objectif prétendument charitable, mais que ce n'est pas le cas et que l'on trompe certaines personnes, on peut aussi intenter des poursuites en vertu de la loi. On est ainsi sûr que la personne qui donne des indications tout comme celle qui est responsable de les faire donner sont considérées comme trompant le public.

Imaginons qu'un organisme de bienfaisance engage un professionnel du démarchage et que celui-ci donne des indications fausses et trompeuses. On peut poursuivre le démarcheur, mais on peut aussi poursuivre l'organisation qui l'a engagé ainsi que la personne au nom de laquelle il donne ces indications fausses.

Troisièmement, il y a une disposition concernant le double étiquetage dans la loi qui nous semble dépassée. Après tout, tout commerçant qui a un tant soit peu de bon sens et qui vend un produit sur lequel figure deux prix, fera payer le plus bas. Sinon, il aura un client mécontent qui risque de ne pas revenir à son magasin. Nous avons pensé que cette disposition n'était plus nécessaire. Mais le comité a jugé qu'il pouvait être utile de la conserver au cas où ce comportement changerait. Cet article est donc resté dans la loi.

Enfin, le comité a ajouté une disposition de protection. Il s'agit d'un encouragement exprès de la part du Parlement à faire connaître la Loi sur la concurrence. Si un employé constate que son employeur enfreint la Loi sur la concurrence, il peut nous le signaler sous le sceau de la confidence. Si l'employeur renvoie cet employé, ou prend des mesures disciplinaires à son endroit, il peut être jugé responsable d'une infraction criminelle.

Le juge Dubin, anciennement de la Cour suprême de l'Ontario, a étudié la question. Il a indiqué qu'il y a toutes sortes de protections qui existent dans le droit du travail, les conventions collectives et la législation provinciale. Le comité a retenu en gros les recommandations du juge Dubin et proposé une modification qui rende responsable d'une infraction criminelle ceux qui prennent des mesures disciplinaires à l'endroit de leurs employés qui ont fait une dénonciation relative à la Loi sur la concurrence. Il nous faut cependant faire une enquête et porter une accusation. C'est une protection que le comité a jugée suffisamment importante pour l'ajouter aux dispositions de la Loi sur la concurrence.

Lorsque j'ai comparu devant le comité de la Chambre, j'ai également déposé les lignes directrices qui seront mises en oeuvre si la loi est adoptée. J'ai tenu à le faire pour que l'on comprenne bien la position du Bureau de la concurrence et son attitude. Il y a quatre séries de lignes directrices. La première concerne la façon dont nous allons utiliser les dispositions relatives au marketing trompeur. La deuxième indique comment nous allons choisir entre un procès au criminel et au civil dans les cas de publicité trompeuse. La troisième concerne la façon dont nous allons interpréter les dispositions relatives aux indications concernant le prix habituel. La dernière précise comment nous allons utiliser les dispositions relatives à l'écoute électronique sans consentement, si elles nous sont accordées.

Nous avons aussi déposé le règlement provisoire découlant des nouvelles dispositions relatives au fusionnement. Tous ces documents feront l'objet de consultations supplémentaires et le règlement sera publié à l'avance. Je vous en remets également une copie pour que vous puissiez comprendre notre attitude. Nous voulons que toutes ces dispositions soient aussi claires et transparentes que possible.

Enfin, je souhaite vous parler du passage du régime criminel au régime civil. Les avocats étant ce qu'ils sont, il est possible que le public dise: «Le Parlement veut quelque chose de différent. En passant du régime criminel au civil, on change vraiment la portée de ces articles.» Ce n'est pas là notre intention. Nous voulons être sûrs de pouvoir poursuivre les responsables de ces infractions au criminel ou au civil, mais non remettre en doute toute la jurisprudence qui existe.

En conséquence, conformément à la recommandation du groupe consultatif, je vous exhorterais, vous et le comité de la Chambre des communes, à mettre une déclaration dans votre rapport définitif. Cette déclaration devrait indiquer que: «Lorsque le droit est raisonnablement établi à l'égard des dispositions actuelles, il ne devrait pas y avoir possibilité que les précédents soient modifiés simplement à cause du passage d'une juridiction criminelle à une juridiction civile de nature judiciaire.» Il sera ainsi clair que la masse de droit que nous possédons va continuer à être valable, même si nous parlons maintenant d'une infraction civile plutôt que d'une infraction criminelle.

Monsieur le président, mes collègues et moi serons très heureux de répondre aux questions éventuelles.

Le sénateur Oliver: Je tiens à vous remercier, comme je l'ai fait lorsque j'ai pris la parole au Sénat, d'avoir envoyé des hauts responsables à mon bureau pour expliciter le projet de loi et répondre à plusieurs questions que j'avais à son sujet.

J'aimerais aborder trois domaines principaux aujourd'hui. Le premier porte sur le même sujet que celui que j'ai discuté avec vos responsables dans mon bureau -- à savoir l'article 206 du Code criminel.

J'aimerais commencer par une lettre envoyée à notre président, le sénateur Michael Kirby, par l'Association du Barreau canadien, en date du 18 novembre. On nous dit que lorsque les représentants de l'association comparaîtront, ils vont presser le comité sénatorial des banques de recommander la suppression de l'article 47 du projet de loi C-20 parce que l'écoute électronique est l'un des outils qui porte le plus atteinte à la vie privée que l'État puisse utiliser pour enquêter sur les activités de ses citoyens. Ils estiment qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultations. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?

Ma deuxième question porte sur la dénonciation. À ce sujet, on dit dans la lettre qu'on aimerait que le comité supprime les paragraphes 66.1 et 66.2 et les renvoie au Bureau de la concurrence pour étude et consultation publique dans le cadre de la prochaine série d'amendements à la Loi sur la concurrence. On nous dit qu'il faut: «Reporter la chose et donner à la population l'occasion d'en discuter avant d'adopter une mesure qui constitue une telle ingérence.»

On dit encore -- contrairement à ce que vous avez dit au comité -- que la question a été discutée par l'honorable juge Dubin. Selon l'association, il a indiqué que la législation relative à la dénonciation dans d'autres juridictions avait eu peu de répercussions, et qu'il n'est pas nécessaire d'adopter un tel article car la protection existe dans d'autres dispositions en vigueur. Il dit en d'autres mots que l'article est redondant et qu'il n'est pas nécessaire de se répéter. C'est ce que l'Association du Barreau canadien nous dira lorsqu'elle comparaîtra.

Pouvez-vous traiter de ces trois sujets successivement?

M. von Finckenstein: Commençons par l'écoute électronique.

Nous essayons d'obtenir des dispositions à l'égard de l'écoute électronique essentiellement pour régler le problème du télémarketing. Nous voulons mettre un terme à ce genre de comportement qui a cours actuellement. Des personnes s'en prennent non seulement aux personnes âgées, mais également à d'autres, en les appelant pour établir une relation personnelle, en exploitant leur solitude, et en leur vendant des produits ou des prix faux ou en leur demandant des prêts ou des dons injustifiés. Elles ne le font pas qu'une seule fois -- elles le font deux ou trois fois. Elles sont très intelligentes et s'échangent les listes entre elles. Lorsque leurs pertes atteignent 30 000 ou 40 000 $, les victimes comprennent tout à coup que c'est le pays de cocagne.

Permettez-moi de vous expliquer comment fonctionne l'escroquerie. Quelqu'un vous téléphone en vous disant: «Sénateur Oliver, comment allez-vous?» Cela se fait en général vers le milieu de l'après-midi lorsque les personnes âgées sont seules à la maison. Une certaine relation s'établit lorsqu'on vous dit par exemple que vous avez gagné un prix, peut-être une voiture. On vous explique tout -- c'est-à-dire on vous dit de quelle couleur elle est, quelles options vous pouvez choisir et le reste. Mais on ajoute: «Nous allons vous la livrer demain matin, mais nous ne pouvons pas payer la TPS à votre place. Le gouvernement ne le permet pas. Nous enfreindrions la loi si nous le faisions et nous sommes une organisation respectueuse de la loi. Nous voulons vous donner cette voiture aussi vous demandons-nous de payer la TPS avant que nous venions vous la livrer.»

La personne paie donc la TPS. La voiture n'arrive jamais et une semaine plus tard, on dit à la victime: «Le modèle n'est plus disponible. Nous avons un modèle plus luxueux, mais il vous faudrait payer davantage.» La victime se fait alors avoir une deuxième fois. On peut ajouter d'autres trucs et profiter de la personne une troisième fois.

Si rien de tout cela n'a marché et que la personne raccroche finalement, quelqu'un l'appelle en disant: «Je suis de la GRC. Je crois que quelqu'un a profité de vous. Racontez-moi ce qui s'est passé. Dites-moi tout.» La personne a vraiment l'impression d'avoir été victime et quelqu'un lui offre de l'aide, elle explique donc tout. Lorsqu'elle s'est déchargée, l'interlocuteur lui dit: «Nous récupérerons votre argent avec intérêt, mais vous savez combien la GRC est mal financée à l'heure actuelle. Nous n'avons pas les moyens de faire ce genre de choses. Nous avons besoin de surveillance spéciale et d'argent pour cela.» La personne se fait donc avoir une dernière fois.

Voilà le genre d'individus dont je veux interrompre les activités. Pour pouvoir les attraper, il vous faut enregistrer leurs boniments. Les témoins ont généralement de vagues souvenirs. Ils vont dire une chose et la personne incriminée en dira une autre. Certains ne font pas de bons témoins alors qu'ils ont été véritablement victimes. Je peux me rendre auprès d'un juge et lui dire: «Voilà, j'ai autorité pour saisir des dossiers et faire des recherches. On peut forcer les gens à répondre à nos enquêtes sous serment et le reste, mais de tels pouvoirs ne sont pas suffisants en l'occurrence. Dans ce cas, nous savons que cette personne fait ce genre de choses. Permettez-nous de l'intercepter.» En vertu des dispositions de la loi, si le juge dit oui, nous allons en prendre note et nous l'aurons alors noir sur blanc.

La loi stipule maintenant que lorsque vous faites du télémarketing, vous devez expliquer qui vous êtes et ce que vous vendez. S'il s'agit d'un produit, vous devez donner un prix raisonnable pour le produit. Si c'est une loterie, vous ne pouvez pas demander à vos interlocuteurs de payer à l'avance, et cetera. Il faut que ce soit un événement très particulier.

Le sénateur Oliver: Avez-vous largement consulté le public avant de proposer un recours qui présente une telle ingérence? Avez-vous procédé à de nombreuses consultations?

M. von Finckenstein: Non, pas vraiment, mais nous avons eu deux audiences parlementaires. La première devant la Chambre des communes et la seconde ici maintenant. Le projet de loi a été déposé il y a plus d'un an et on a eu amplement le temps d'en discuter.

J'ai également parlé personnellement à de nombreux membres du barreau. Je suis allé à Toronto à deux reprises pour rencontrer les principaux dirigeants du barreau et de l'industrie pour leur expliquer exactement ce que nous essayons de faire.

L'article 183 du Code criminel précise les infractions pour lesquelles on peut procéder à une écoute électronique. Il y a les infractions criminelles habituelles, mais il y a aussi toute une série d'infractions économiques -- telles que les faillites frauduleuses, les déclarations douanières frauduleuses, et cetera, Il s'agit en l'occurrence d'une infraction économique, et je ne vois pas en quoi elle diffère des autres infractions économiques. Nous prenons une mesure qui existe en vertu du Code criminel et nous disons: «Nous vous demandons d'ajouter à la liste trois nouvelles infractions précises en vertu de la Loi sur la concurrence: le télémarketing, le complot et la fixation de prix.»

On s'est beaucoup inquiété du fait que la notion de «complot» était trop vaste. C'est pourquoi nous avons publié les lignes directrices. Le comité de la Chambre des communes a estimé que, si on n'avait recours à l'écoute électronique que pour la fixation de prix et le partage du marché, on pourrait préciser cela dans la loi et c'est ce qu'il a fait.

Pourquoi en avons-nous besoin pour ces infractions? Parce que lorsqu'il y a un complot pour fixer un prix et partager un marché, il est arrivé à quelques reprises que des témoins se présentent en nous disant qu'ils faisaient partie du complot et qu'ils voulaient devenir témoins transfuges. Pour avoir la preuve -- et une réunion doit avoir lieu la semaine suivante à Vancouver -- on demande au témoin si on peut lui faire porter un micro-émetteur de poche et il répond en général: «Je ne veux pas faire ça.» Or nous savons que cette infraction est perpétrée et c'est donc dans ces rares cas que nous y aurons recours.

Le sénateur Oliver: Pour la dénonciation, pouvez-vous répondre au barreau lorsqu'il dit que ce que vous essayez d'obtenir est vraiment redondant?

M. von Finckenstein: Certainement. Nous avons commandé des études au juge Dubin. Il en a fait deux à notre intention et elles figurent toutes deux sur notre site Web. Nous avons examiné toutes les dispositions législatives concernant la dénonciation qui existe au Canada. Et il y en a pas mal, surtout dans le domaine de l'environnement et des relations de travail.

Le sénateur Oliver: Elles ne sont en général pas très efficaces.

M. von Finckenstein: On n'y a guère recours. On ne sait pas si elles sont effectivement dissuasives et si telles qu'elles existent actuellement, elles dissuadent de punir les dénonciateurs.

J'ai demandé au juge Dubin de faire une deuxième étude pour nous. Si le gouvernement décidait de s'occuper de la dénonciation, comment devrait-il procéder? La conclusion de cette deuxième étude est que si on le fait, il faut vraiment que ce soit de façon ciblée, comme c'est le cas dans ce projet de loi -- en en faisant effectivement une infraction criminelle. Le fait que cette disposition existe montrera davantage que l'on encourage la dénonciation. Elle est protégée par la loi et elle vous donne le moyen de punir ceux qui prennent des mesures disciplinaires à l'égard des dénonciateurs ou qui usent des représailles envers eux.

J'ai témoigné devant la Chambre des communes et je dois vous dire que j'étais neutre sur ce sujet. Je ne suis pas sûr que ce soit efficace. La société canadienne est généralement respectueuse de la loi. Il ne fait pas de doute que si l'on a des dispositions qui interdisent une chose, cela va dissuader d'avoir ce comportement. Il est toutefois difficile de trouver un moyen de mesurer l'effet dissuasif. La présence de cette disposition va-t-elle décourager ce comportement ou non? Cette disposition législative pèche en gros par excès de prudence. Nous l'avons placée dans le projet de loi pour éviter même qu'on y pense.

Le sénateur Oliver: Venons-en à l'article 206 du Code criminel. Ce que je crains, c'est que les organisations de bonne foi, telles que les banques et les autres groupes, utilisent les loteries pour obtenir de l'argent pour des oeuvres de bienfaisance importantes, et elles pourraient ne plus pouvoir le faire maintenant à cause des dispositions que vous proposez. Pourriez-vous nous parler du conflit qu'il semble y avoir entre le Code criminel et cette loi?

M. von Finckenstein: Je laisserai mon conseiller juridique répondre à cela. Je parle des loteries frauduleuses faites par téléphone et par des personnes qui appellent pour essayer d'obtenir de l'argent en prétendant qu'elles travaillent pour une loterie et que la victime a gagné quelque chose. On utilise le téléphone comme moyen de promotion pour ces loteries frauduleuses. Comme vous l'avez dit, les banques ne font pas ce genre de choses. Je parle des personnes sans scrupules qui essaient de voler des citoyens innocents.

Nous avons pris garde à faire la différence entre le télémarketing légitime qui représente une partie énorme de notre économie et qui ne cherche pas à causer de torts d'une part et les activités frauduleuses de l'autre. Nous voulons faire disparaître les spécialistes de la fraude. Nous avons donc dit que quiconque a des activités légitimes dans ce secteur n'aura aucun problème à s'identifier s'il vend quelque chose à un prix raisonnable et s'il s'occupe d'une loterie, il ne demandera pas un paiement avant. En conséquence, cela ne devrait pas poser de problème pour ces personnes-là et c'est ainsi que le texte de loi est rédigé. Maintenant, monsieur Côté, souhaitez-vous répondre à la question précise concernant l'article 206?

M. François Côté, avocat principal et directeur, Services juridiques, Industrie Canada: Il me semble que l'article 206 interdit les loteries, les tombolas ou les systèmes selon lesquels pour participer à une loterie, il faut verser une somme d'argent. Vous achetez un ticket pour participer à ma loterie -- tout le monde achète un ticket pour participer à ma loterie. Après cela, je tire au sort un ticket pour connaître le gagnant.

Ces choses sont interdites en vertu de l'article 206 du Code criminel, mais en vertu de l'article 207, elles sont autorisées si elles sont effectuées avec l'autorisation des responsables du gouvernement provincial précisément chargés des loteries. Au sous-alinéa 52.1(3)b)(i) nous avons un exemple de loterie, mais il n'y a pas de paiement à faire pour participer à cette loterie.

Ça me semble être un concours publicitaire où l'on essaie d'obtenir le plus de participants possible à la loterie. L'objet est de montrer vos articles et il ne s'agit donc pas de payer pour participer à la loterie. Mais si vous gagnez la voiture toute neuve qui est prévue pour cette loterie, avant de vous la livrer, on va vous demander de payer ceci et cela. Tel est l'objectif de l'article du projet de loi que vous avez sous les yeux. Ce sont deux choses différentes.

Le sénateur Kolber: Je pense que de façon générale il s'agit d'un bon projet de loi. J'aimerais des précisions sur l'aspect oeuvres de bienfaisance cependant. En tant que consommateur, lorsque je suis chez moi le soir, ma femme et moi recevons sans doute quatre à cinq appels téléphoniques par semaine pour nous inciter à donner pour tel et tel organisme de charité. Nous sommes une cible tout indiquée car nous avons une fondation charitable.

À l'occasion, j'essaie de voir ce qui se fait par la suite car cela semble bien lorsqu'on vous appelle au téléphone; ils vont donner aux enfants pauvres ou à une autre oeuvre de ce genre. En général, je dis: «Voici mon numéro de télécopieur au bureau. Envoyez-moi l'information et je vous répondrai.» De temps à autre on m'envoie une télécopie, mais la plupart du temps je ne reçois rien. Lorsqu'ils envoient quelque chose, je demande aux personnes de ma fondation de vérifier. Dans la plupart des cas, ils n'ont pas de numéro d'organisation de bienfaisance et personne ne répond au numéro de téléphone indiqué.

Comment contrôler cela? Admettons par exemple que quelqu'un souhaite lancer une entreprise charitable à l'aide du télémarketing et qu'il s'avère, lorsque tout l'argent a été envoyé, que 1 p. 100 est en fait donné à des oeuvres de bienfaisance et 99 p. 100 servent à payer les dépenses. Ça n'a pas l'air illégal; ça n'est pas bien, mais ça n'est pas illégal. Y a-t-il un contrôle de ce genre de choses? Ne peut-on y remédier que par des dénonciations?

M. von Finckenstein: La personne qui appelle a-t-elle un numéro d'organisation charitable de Revenu Canada ou non?

Le sénateur Kolber: Non. Est-ce vraiment une chose nécessaire? Ça l'est pour moi, mais est-ce que cela rend la chose illégale s'ils n'ont pas de numéro?

M. von Finckenstein: Pas si l'on parle d'organisations charitables sans but lucratif. L'année dernière, pendant les inondations du Manitoba, certaines personnes ont prétendu agir au nom d'une organisation appelée le «comité de secours de la rivière Rouge». Je n'en ai jamais entendu parler; ça n'existe pas. Elles demandaient qu'on envoie de l'argent ou qu'on leur donne le numéro de carte Visa pour qu'elle puisse faire immédiatement un don.

Le sénateur Kolber: Comment avez-vous découvert cela?

M. von Finckenstein: Nous avons reçu une plainte de la part d'une personne qui avait été appelée au téléphone et qui leur avait donné quelque chose. Ce monsieur nous a dit: «Je les ai appelés. J'ai essayé de trouver cette organisation, mais elle n'existe pas. Je ne la vois mentionnée nulle part et je pense que je me suis fait avoir.» Nous avons un numéro 1-800 que l'on peut appeler pendant les heures de bureau. C'est de cette façon que nous recevons des informations de ce genre et nous les vérifions ensuite.

Le sénateur Kolber: Que dites-vous de mon exemple où l'on perçoit de l'argent pour en donner une fraction infime à des oeuvres de bienfaisance ou à une autre bonne cause à laquelle il est prévu de donner? Ça n'a pas l'air illégal.

M. von Finckenstein: Je ne vérifie pas le statut de l'oeuvre de bienfaisance d'une personne. C'est une responsabilité de Revenu Canada. Si c'est le cas, les organisations charitables enregistrées risquent de perdre leur statut d'organisation de bienfaisance, mais je ne m'occupe pas du tout de cela.

Nous parlons du fait qu'il s'agit d'une indication fausse ou non. Cela dépend de ce que ces personnes vont vous dire lorsqu'elles vous adressent la parole. Si elles vous disent qu'elles représentent une oeuvre de bienfaisance, et qu'elles donnent 99 p. 100 de leurs fonds aux pauvres, en ne gardant que 1 p. 100 pour l'administration interne, et qu'en réalité c'est l'inverse qui se produit, il est clair que c'est une indication fausse. Nous pourrions alors entamer des poursuites et nous le ferions effectivement.

Le sénateur Stewart: J'ai une question sur les fusions. Je regarde à la page 2 de votre Document d'information sur le Bureau de la concurrence. Il y a un paragraphe intitulé «L'examen des fusionnements». Quelle est l'importance de votre compétence? Disons que deux grandes sociétés d'une même province se proposent de fusionner. Une telle situation relève-t-elle de la compétence fédérale?

M. von Finckenstein: Oui. Nous devons être recevoir un préavis pour les fusionnements qui se produisent au Canada dans un secteur qui n'est pas réglementé ou lorsqu'il s'agit d'entreprises qui n'ont pas été exemptées de la Loi sur la concurrence et qui dépassent un certain seuil. Si elles sont en dessous de ce seuil, elles n'ont pas besoin de nous en aviser. Mais nous pouvons les prendre en compte et voir si la fusion aura un effet anticoncurrentiel ou, selon la terminologie législative, si elle pourrait entraîner une réduction importante de la concurrence.

Le sénateur Stewart: Je ne vous demande pas de nous donner les détails. Vous dites à ce paragraphe que cela vous donne le temps d'examiner la transaction afin de déterminer si elle aura pour effet de diminuer ou d'empêcher sensiblement la concurrence. Comment décidez-vous à l'avance?

M. von Finckenstein: Sénateur, à quel document faites-vous référence?

Le sénateur Stewart: Il s'agit de celui qui porte le titre «Document d'information» publié par Industrie Canada.

M. von Finckenstein: Mon collègue pourra vous donner des détails. En gros, nous regardons le secteur et nous parlons aux parties qui souhaitent fusionner, à leurs clients et à leurs concurrents pour avoir une idée de la situation actuelle du secteur. Nous faisons intervenir des experts au besoin et nous essayons de voir ce qui sert de moteur à ce secteur, quels sont les produits clés et le marché, tant en ce qui concerne le produit que la situation géographique. Nous faisons ensuite une analyse économique pour voir si cette fusion risque d'entraîner une réduction importante de la concurrence. Y a-t-il d'autres personnes qui risquent de pénétrer ce marché? Y a-t-il des solutions étrangères? Y a-t-il des produits de remplacement qui pourraient être utilisés si ce produit devenait trop cher?

Mais M. Lancop peut répondre à cette question.

M. Robert Lancop, sous-directeur adjoint des enquêtes et recherches, Direction des fusionnements, Bureau de la concurrence: Nous essayons en gros d'évaluer la situation concurrentielle avant la fusion et après. La loi nous donne un assez grand nombre d'indications. Il y a une liste non exhaustive de facteurs que le tribunal peut prendre en compte, comme par exemple les obstacles à la participation. S'agit-il d'un marché sur lequel d'autres concurrents pourraient assez facilement entrer? À la suite de cette fusion, y aura-t-il encore concurrence sur le marché? Quelle part du marché cela représentera-t-il si les deux sociétés se regroupent? Voilà le genre de questions que nous nous posons.

Le sénateur Stewart: C'est une question qui m'intéresse depuis un certain temps. Nous entendons parler de constructeurs automobiles, pas tellement au Canada, mais à l'étranger, qui fusionnent. Nous entendons parler de banques et de compagnies d'assurance qui fusionnent.

C'est une question posée au cours d'une émission sur CBC samedi ou dimanche qui a suscité à nouveau mon intérêt. Elle traitait du secteur du porc, plus particulièrement à l'Île-du-Prince-Édouard. Il semblerait que le prix que l'éleveur obtient pour son produit ait nettement diminué, peut-être de 60 p. 100; or, le prix n'a pas baissé dans les grands magasins qui étaient mentionnés dans l'émission, ce qui me fait déduire qu'il n'y a pas de concurrence suffisante. Vous n'avez pas besoin d'un gros complot lorsque vous avez trois ou quatre acteurs dans le secteur. Ils s'entendront pour dire qu'il n'est pas souhaitable de se lancer dans cette guerre de baisse des prix. Autrement dit, personne n'y gagne à part le consommateur, mais il ne compte pas. Je dis cela à titre d'exemple. Je ne cherche pas à avoir des détails sur la façon dont cette concentration s'est faite.

Mais essayez-vous de vérifier par la suite si les prix ont souffert des fusions que vous avez autorisées et êtes-vous allé voir ce qu'il en était dans les magasins ou chaînes d'alimentation qui ont pris part à cette affaire particulière? Je crois comprendre qu'il s'agit d'une affaire récente.

Le sénateur Oliver: Cela vaut également pour le boeuf, pas uniquement pour le porc.

M. von Finckenstein: J'ai trois choses à dire à ce sujet.

Premièrement, lorsqu'on procède à l'examen d'un fusionnement, notre travail consiste uniquement à voir ce qui va se passer du fait de la fusion, et non à essayer de voir si le secteur avait déjà une concurrence réduite. Nous ne sommes pas là pour rectifier les choses. Notre travail consiste à veiller à ce que les choses n'aillent pas plus mal.

Deuxièmement, vous avez déclaré que lorsqu'il y a trois acteurs dans un secteur, il y a une «entente» -- je crois que c'est le mot que vous avez utilisé. En vertu de la loi, s'il y a ce que nous appelons un parallélisme conscient -- c'est-à-dire que plusieurs personnes alignent leurs prix les unes sur les autres sans qu'il y ait entente ni accord quelconque entre elles -- c'est un comportement commercial tout à fait normal. Elles ont tout à fait le droit de faire cela. Mais lorsqu'elles s'entendent pour le faire, lorsqu'il y a un accord entre elles, quelle que soit la façon dont il se fait, lorsqu'il est clair qu'elles agissent de concert, c'est à ce moment-là qu'elles contreviennent à la loi, et nous pouvons étudier l'affaire en vertu des dispositions criminelles et civiles.

En ce qui concerne les magasins d'alimentation, c'est une affaire dont nous sommes saisis en permanence, je crains donc de ne pas pouvoir vous dire grand-chose sinon que nous étudions ces fusions conformément aux dispositions de la loi, que nous les examinons et que nous essayons de voir l'effet qu'elles ont sur le marché, que nous tâchons de veiller à ce que si ces fusions se font, elles n'entraîneront pas une réduction importante de la concurrence ou ne l'empêcheront pas, car c'est un moyen d'évaluation qui existe dans la loi.

Le sénateur Angus: Je vous félicite, monsieur von Finckenstein, ainsi que vos collègues. Je suis tout à fait d'accord pour dire que ce genre de législation doit être mis à jour de façon régulière. Il doit être révisé de façon approfondie.

Je ne puis m'empêcher de vous demander pourquoi vous voulez changer votre nom et devenir «commissaire». Il y aura alors une plus grande ressemblance avec la GRC ou avec le base-ball.

M. von Finckenstein: Le directeur a en fait un double rôle. Il a un rôle en matière d'application de la loi et de politique et nous faisons de nombreuses interventions. Le titre de «commissaire» est normalement utilisé au gouvernement pour ceux qui ont ce double rôle d'appliquer et d'administrer la loi et également de faire des recommandations politiques. Vous avez le Commissaire aux langues officielles, par exemple. Vous avez le Commissaire de la GRC, qui a également un rôle politique.

Le titre «directeur des enquêtes et recherches» est tout à fait trompeur. Pour commencer, je ne fais pas de recherche du tout et ensuite, on a l'impression que je suis un libraire de second rang qui fait de la recherche. Lorsque je vais à des rencontres internationales, ceux qui voient mon titre se demandent ce que je fais exactement. Ils se demandent ce que j'ai à voir avec la concurrence. C'est un titre mal choisi et c'est pourquoi nous le corrigeons.

Le sénateur Angus: Est-ce vous qui l'avez demandé?

M. von Finckenstein: Je l'ai suggéré, oui.

Le sénateur Angus: Les représentants du barreau nous ont également parlé de ce sujet. Ils estiment qu'étant donné que nous sommes dans une période de réduction des coûts, il serait très onéreux de changer tous les documents qui utilisent le titre de «directeur». Peu importe pour moi qu'on vous appelle roi, reine ou autre, mais ça se voit comme le nez au milieu de la figure.

M. von Finckenstein: Je puis vous garantir que nous n'allons pas refaire tous nos papiers à en-tête. Nous utiliserons les anciens dans la mesure du possible. La plupart de nos communications à l'heure actuelle se font sans fil et par l'intermédiaire des sites Web; il s'agit alors simplement d'avoir recours à la fonction de recherche et de substitution. Cela prend deux secondes.

Le sénateur Angus: Votre réponse est assez conforme à ce que j'attendais, mais le barreau continue à dire, comme d'autres, qu'il n'y a pas vraiment d'explication satisfaisante à ce changement. J'ai lu la transcription. On vous a déjà posé la question. Il n'y a pas d'autre raison profonde, sombre ou superficielle, claire?

M. von Finckenstein: Non. J'ai répondu à votre question.

Le sénateur Callbeck: Je remercie le directeur d'avoir envoyé de hauts responsables à mon bureau avant que je ne présente le projet de loi.

J'aimerais revenir sur ce qu'a dit le sénateur Stewart sur le prix du porc. On m'a demandé à plusieurs reprises pourquoi, alors que le coût de production qui revient à l'éleveur a nettement diminué, les consommateurs ne voient aucun changement dans le prix du détail.

Vous dites que c'est une question de concurrence. À qui peuvent s'adresser ces consommateurs s'ils se posent des questions?

M. von Finckenstein: Je ne connais rien au secteur du porc. Je ne sais pas s'il est régi par un office de commercialisation ou s'il s'agit d'un secteur réglementé. Si ce n'est pas le cas, alors les prix du porc sont une question d'offre et de demande du marché.

Mon collègue me dit qu'il est réglementé; le consommateur devrait donc aller voir l'organisme chargé de la réglementation.

Pour un secteur non réglementé, le consommateur devrait s'adresser à nous. Nous avons un numéro 1-800. Vous pouvez nous appeler, nous écrire ou nous envoyer des télécopies. Lorsqu'il y a un comportement qui n'est pas concurrentiel et qui n'est pas logique, comme le prix des intrants qui diminue et le prix du détail qui ne suit pas le même chemin, nous étudierons la situation pour voir si le comportement entre les acteurs du marché empêche les prix de s'adapter à la demande.

M. Lancop: Le porc est une denrée vendue sur le marché international. Les prix internationaux du porc ont baissé très nettement. C'est un secteur réglementé. Les offices provinciaux de commercialisation ont le pouvoir de commercialiser le porc aux transformateurs. Au-dessus de cela, il s'agit de concurrence, mais les prix des offices provinciaux de commercialisation ont en fait maintenu le prix au Canada à un niveau supérieur à celui des marchés internationaux.

Nous n'avons pas compétence sur ce genre de choses car il s'agit d'un secteur réglementé qui a les pouvoirs voulus pour fixer les prix grâce à ses offices de commercialisation. Nous ne pouvons intervenir dans ce processus et l'arrêter. Mais s'il y avait un comportement anticoncurrentiel en aval, au niveau de la transformation ou au niveau du détail, nous pourrions certainement étudier la question.

Le sénateur Callbeck: Quel est votre numéro 1-800?

M. Mercer: Il s'agit de 1-800-348-5358.

Le sénateur Callbeck: Lorsque vos hauts responsables étaient dans mon bureau pour me parler du projet de loi, le sénateur Oliver a parlé de certaines critiques adressées par quelques personnes qui estiment qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultations, surtout en ce qui concerne l'écoute électronique.

Vous avez dit que vous avez parlé à certains groupes. Quelle a été l'ampleur de ces discussions? Avez-vous pu changer la façon de voir de ces groupes qui étaient très opposés à l'écoute électronique?

M. von Finckenstein: Non, je n'ai pas pu changer leur point de vue. Ils estiment que l'écoute électronique constitue une ingérence et n'a rien à voir avec les affaires. Je suis d'accord pour dire qu'elle n'a rien à voir avec les affaires, mais elle a beaucoup à voir avec les infractions. Malheureusement, certaines infractions sont effectuées dans le cadre des affaires. Si des gens conspirent pour fixer les prix, ce sont tous les consommateurs qui en souffrent. Si certaines personnes utilisent le téléphone non pas pour faire du télémarketing légitime, pour voler les économies de certains, j'estime que l'on a tout à fait le droit de poursuivre.

Personne n'a jamais présenté d'objection importante en dehors de l'absence de consultations. Nous vivons dans un pays démocratique. Au cours de deux audiences parlementaires, un citoyen concerné peut venir dire ce qui ne lui semble pas logique. En dehors de demander davantage de consultations, personne n'a pu montrer qu'il y avait préjudice éventuel. Le recours à l'écoute électronique est très sévèrement limité. Nous utilisons une technique qui existe et qui ne diffère absolument pas de toutes les autres possibilités d'écoute téléphonique qui pourraient être autorisées.

Il faut convaincre un juge de l'insuffisance des pouvoirs existants. Dans notre cas, ce ne sera pas facile car nous avons des pouvoirs assez étendus. L'autorisation elle-même est sujette à toutes sortes de limites. Lorsque l'on aura recueilli les preuves et qu'on les aura présentées au tribunal, il y aura invariablement une motion de rejet pour une raison quelconque. Le juge peut décider que la procédure est admissible, en fonction de sa pertinence, et voir si elle a été dûment obtenue des quatre secteurs d'autorisation.

Les garanties qui ont pris corps dans le droit jurisprudentiel en ce qui concerne l'écoute téléphonique s'appliqueront dans ce cas. Je n'arrive pas à comprendre de quoi l'on s'inquiète. Ceci dit, vous avez raison, je n'ai pas réussi à les convaincre.

Le président: Merci. Comme convenu, vous reviendrez jeudi pour clore la série des témoignages.

Nos prochains témoins représentent le Conseil canadien du commerce de détail et Ford Motors.

M. Peter Woolford, Conseil canadien du commerce de détail: Monsieur le président, ce matin, M. Stewart et moi portons tous deux notre chapeau habituel de représentants. Nous avons aussi été membres du comité consultatif qui a conseillé le directeur de l'époque, qui est maintenant le commissaire, sur les changements législatifs. Nous avons pensé utile pour le comité de poser des questions à quelques personnes qui ont participé à ce processus consultatif concernant les conclusions et l'équilibre que nous avons essayé d'atteindre dans les amendements que nous avons examinés.

Vous avez notre mémoire qui vous a été présenté au nom du Conseil canadien du commerce de détail. Je n'ai pas l'intention de le passer en revue de façon détaillée. En ce qui concerne le processus d'amendement, les membres du comité consultatif ont estimé qu'il fonctionnait très bien. Il a permis une discussion approfondie et équilibrée. Les divers groupes d'intérêt -- les consommateurs, les entreprises et le barreau -- connaissaient bien la façon dont la loi est appliquée par le bureau. De son côté, le bureau avait une bonne idée de la façon dont on fait des affaires au Canada. Cela a donc été une occasion utile d'échanges. L'une de nos plus importantes recommandations est qu'il serait bon de répéter cette opération chaque fois qu'on modifiera cette loi.

Au nom du comité consultatif, je dois dire que ce texte de loi est arrivé là où il devrait être. Il offre un ensemble de changements équilibrés et justes à la loi qui tiennent compte de l'évolution récente du marché. C'est pourquoi, nous encourageons les sénateurs à adopter le projet de loi C-20. Les éléments généraux de l'ensemble répondent aux besoins du marché et de tous ses acteurs.

Le groupe a essayé d'arriver à un équilibre entre les intérêts des consommateurs et ceux des entreprises, et également entre les intérêts des divers concurrents du marché. Il devrait y avoir un juste équilibre pour l'ensemble du marché concurrentiel afin de garantir la concurrence. Nous estimons y être parvenus.

M. Norm Stewart, Ford Motor Company of Canada: Mon rôle dans tout ce processus a commencé à la mi-juin 1995. Je représentais l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada et la Chambre de commerce du Canada lors de certaines discussions initiales avec le bureau.

M. Woolford et moi-même avons fait l'expérience d'autres types de consultations dans le passé qui ont assez bien fonctionné. L'information était intéressante pour le bureau car il voulait mettre au point un processus qui rassemble vraiment les intéressés afin qu'ils s'entendent sur les diverses questions. Le désir de rejoindre les collectivités plus larges d'intéressés au fur et à mesure du processus pour que le bureau soit suffisamment convaincu que le public serait généralement favorable aux différentes ententes auxquelles nous sommes parvenus sur diverses questions était tout aussi important. Ce fut véritablement aussi un avantage très grand et tangible.

Grâce à ce processus, nous en sommes venus à beaucoup mieux comprendre le travail du bureau, les ressources qu'il doit déployer et les limites qui sont imposées à ces ressources. À son tour, le bureau a mieux compris la collectivité des affaires et ce qu'elle essaie de réaliser pour les diverses questions discutées.

Pour finir, nous avons obtenu un ensemble qui pouvait être présenté sous forme de législation générale, qui répondait aux besoins des intéressés et qui nous permettait de constituer une base pour permettre à de nouvelles discussions de se dérouler.

Dans l'optique des entreprises, l'idée d'examens périodiques de la législation cadre telle que la Loi sur la concurrence nous plaît. Si vous vous en souvenez, autrefois, les examens étaient beaucoup plus espacés et étaient de nature beaucoup plus générale. De ce fait, il y avait beaucoup de déceptions contenues dans le milieu des affaires et les législateurs étaient également frustrés lorsqu'il s'agissait d'essayer de changer quelque chose. À la façon dont on procède maintenant, en attaquant des parties importantes de façon plus fréquente, peut-être tous les trois ou cinq ans, cela nous permet de maintenir la législation beaucoup plus à jour et de faire qu'elle tient compte des désirs des consommateurs canadiens. À ce titre, nous pensons que c'est un processus excellent.

Le président: Pour la question de l'écoute électronique, pourriez-vous m'aider à comprendre pourquoi certains segments de la communauté des entreprises s'opposent à l'écoute électronique? J'aurais cru qu'une entreprise légitime jugerait souhaitable toute mesure prise par les autorités pour interrompre des activités commerciales non légitimes. Étant donné que ce n'est pas la première fois que nous avons un texte de loi qui porte sur l'écoute électronique au Canada, car des dispositions existent déjà pour d'autres choses à cet égard, pouvez-vous m'aider à comprendre ce qui est à l'origine de cette opposition?

M. Stewart: Je crois qu'elle vient en partie d'un malentendu. La plupart des praticiens de ce secteur ne sont pas nécessairement des avocats spécialistes du droit criminel qui ont l'expérience des dispositions concernant l'écoute électronique prévues dans le Code criminel.

Le président: Les praticiens de quel secteur?

M. Stewart: Les praticiens qui s'occupent de la législation sur la concurrence, qu'il s'agisse d'avocats indépendants ou de conseillers juridiques internes qui travaillent dans ce domaine. Ils n'ont pas l'habitude de s'occuper des dispositions sur l'écoute électronique prévues dans le code. Si vous regardez le code, et je sais que vous l'avez fait, vous constatez que ce sont des dispositions générales qui y figurent concernant l'écoute électronique. Vous constatez aussi qu'il y a suffisamment de garanties et de contrôles pour qu'un entrepreneur raisonnable n'ait pas à s'en inquiéter, surtout s'il ne se livre pas à des actes de type criminel.

C'est là la première inquiétude. La deuxième concerne une mauvaise compréhension de certains éléments du milieu des affaires qui pensent que le processus consultatif que nous avons entrepris dans le but de proposer l'essentiel de ce qui figure dans le projet de loi porterait sur tout et qu'il n'y aurait pas d'autres discussions sur d'autres questions. C'est tout à fait irréaliste. La roue tourne et le gouvernement doit s'occuper des autres questions qui se présentent. La législation existait; le gouvernement a jugé qu'il y avait là un besoin et a donc introduit ces dispositions dans le projet de loi C-20.

Lorsqu'on a compris cela, on a eu aussi l'occasion de voir les lignes directrices provisoires que le directeur a mises au point à ce sujet et qui ont un peu rassuré. Les amendements apportés par le comité de la Chambre des communes s'attachaient aux situations où l'écoute électronique, pour la fixation des prix et le trucage des offres, et cela a encore rassuré davantage.

En définitive, il reste maintenant un groupe plus restreint et ce sont en général des praticiens qui estiment encore que l'on ne devrait pas prendre ces dispositions maintenant mais qu'il faudrait les étudier au prochain examen. Dans l'optique des entrepreneurs, je crois que l'on devrait les adopter telles qu'elles sont actuellement libellées.

M. Woolford: Il est clair qu'au cours des consultations que j'ai eues avec les détaillants, et avec certains membres de la communauté juridique dont a parlé M. Stewart, les inquiétudes soulevées étaient celles qui viennent de vous être indiquées.

Le troisième élément qui est apparu est que les entreprises sont toujours très nerveuses et prudentes lorsqu'il est question de la confidentialité de leurs propres affaires internes. L'idée d'ingérence gêne certaines entreprises, et bien sûr certaines plus que d'autres. Chose intéressante, comme vous pourrez le constater en feuilletant notre mémoire, le Conseil canadien du commerce de détail a conclu qu'il n'y avait pas d'inquiétude à ce sujet.

Nous avons travaillé sur la question avec nos membres. Nous avons eu des discussions utiles avec des représentants du bureau et nos membres ont été suffisamment rassurés pour finir et ont pensé qu'on n'y aurait recours que lorsque des infractions sont effectivement commises et non pour des affaires confidentielles normales. En mettant cela au point avec le directeur, ils en sont arrivés à la conclusion qu'ils pouvaient comprendre la distinction que le directeur essayait de faire.

Je pense que certains autres éléments du milieu des affaires n'ont pas pris le temps et n'ont pas fait les efforts voulus pour comprendre et mettre vraiment au clair cette distinction que le bureau a essayé de faire à ce sujet. C'est sans doute en partie pour cela qu'ils continuent à être encore mal à l'aise et il faut ajouter à cela le fait qu'il y a eu un processus consultatif exemplaire pour l'ensemble des dispositions. Étant donné que la vie continue, qu'il y a d'autres problèmes qui se présentent, surtout dans le domaine du télémarketing, on peut imaginer que le ministre a jugé nécessaire d'agir et il a donc décidé d'aller de l'avant avec ce document supplémentaire. À notre avis, cela se comprend; on ne peut tout laisser en suspens en attendant d'effectuer encore tout un processus.

Le sénateur Meighen: Monsieur Stewart, êtes-vous membre de la section de la législation nationale en matière de concurrence du barreau canadien?

M. Stewart: Non, mais les deux avocats qui m'accompagnent en sont membres.

Le sénateur Meighen: Je veux bien admettre ce que vous dites, mais je constate dans le mémoire de la section qu'on dit effectivement que l'on continue à s'opposer à l'introduction des dispositions concernant l'écoute électronique dans la législation sans un débat public suffisant concernant sa nécessité. Je crois comprendre que vous estimez tous deux que le débat a été suffisant. À votre connaissance, un débat a-t-il eu lieu dans la section?

M. Stewart: Il y a eu un débat dans la section. Il y a eu un débat entre les divers groupes d'entreprises, la chambre, l'alliance, le conseil du commerce de détail, et d'autres qui avaient participé activement au processus consultatif original. Le directeur est allé rencontrer des groupes dont j'étais -- par exemple la Chambre de commerce du Canada -- à quelques occasions. Je sais qu'il a eu des conversations privées avec plusieurs entrepreneurs et avocats d'entreprises. Lorsqu'on considère la chose, on constate que ce qu'il faisait là était sans doute la forme la plus traditionnelle de consultation à la suite du dépôt d'un projet de loi. La différence, comme je l'ai déjà dit, est qu'au cours de ce processus consultatif, on a approfondi plusieurs domaines clés et on les a soumis au Cabinet pour qu'il envisage d'en faire un texte législatif. Certains ont commencé à croire que l'on examinerait tout. Voilà le véritable problème.

Le sénateur Meighen: Vous avez été assez louangeur à l'égard du processus consultatif. D'après votre expérience, était-il différent de ce qui se faisait autrefois?

M. Stewart: C'est le premier de ce genre que je vois de la part du bureau. J'ai participé aux processus qui ont eu lieu dans les années 80 et ils étaient excellents. À cette époque-là, les discussions entre le bureau et les intéressés étaient réellement nouvelles. Cette façon de voir a été beaucoup plus généralisée et s'est prêtée à un élargissement à la collectivité en général. C'est là son plus grand succès.

Je peux vous donner un exemple. Lorsque le bureau a publié son document de travail en juin 1995, il étudiait la publicité trompeuse, et même cette partie du processus a été bien faite. Il a indiqué qu'il y avait différentes façons de procéder: on peut conserver le processus criminel actuel qui présente des avantages et des inconvénients; on peut passer un processus purement civil; ou envisager peut-être un hybride. La réaction immédiate du milieu des affaires a été partagée. Certains ont dit qu'ils n'aimaient pas le processus criminel, mais il représentait en fait un mal que l'on connaissait. Ils se disaient: «On le connaît depuis plusieurs années, laissons-le; nous craignons les changements qui pourraient lui être apportés.» D'autres groupes ont estimé que le processus criminel était trop sévère pour la plupart des affaires de publicité trompeuse, qu'ils préféreraient un processus purement civil. Au départ, personne dans le milieu des affaires n'aurait opté pour un hybride. Les gens ne s'y seraient plus retrouvés.

Ce processus a permis une bonne discussion au sein du groupe, une bonne divulgation dans le milieu des affaires plus étendu. Lorsque le document de travail a été publié, le milieu des affaires pensait généralement qu'il s'agissait d'une façon bien meilleure de traiter ce genre de choses. Je ne pense pas que nous serions arrivés à ce genre de conclusion sans ce processus consultatif.

Le sénateur Meighen: Vous dites dans votre mémoire qu'il y a un malaise persistant en ce qui concerne la possibilité que le bureau suive l'une ou l'autre voie afin de voir ce que cela donnera et de ce fait les entreprises hésitent à collaborer avant de connaître la voie choisie.

M. Woolford: Je dois préciser que le mémoire que vous avez reçu ce matin provient du Conseil canadien du commerce de détail, vous ne pouvez donc pas vous en prendre à M. Stewart à son sujet.

Ce choix constitue une inquiétude persistante pour certains de nos membres. Nous comprenons les deux façons de voir et nous avons essayé d'en tenir compte dans notre mémoire. Le directeur craint un peu d'opter trop rapidement pour une voie, éliminant ainsi la voie criminelle dans le cas où des preuves supplémentaires laisseraient entendre qu'il y a eu tentative délibérée d'escroquer quelqu'un. Nous comprenons ce danger que peut voir le directeur.

De même, les entreprises s'inquiètent de devoir donner trop de renseignements et pensent qu'elles participent à un processus civil plus coopératif uniquement pour être prises plus tard.

Nous en avons discuté assez longuement avec nos membres. Nous pensons pour finir qu'avec le temps et l'expérience, les deux groupes opposés auront une idée assez claire de la façon dont cet équilibre aura été atteint et dont le directeur agira.

Je pense que les lignes directrices constituent une tentative sincère et honnête de fournir des renseignements supplémentaires sur la façon dont ce choix sera fait. Je ne suis pas sûr qu'elles soient si utiles en définitive. Ce n'est que l'expérience qui rassurera suffisamment.

Le sénateur Meighen: À ce propos -- je crois que M. Stewart y a fait allusion -- on peut penser à un processus consultatif permanent. Le comité consultatif va-t-il être maintenu ou peut-on le reconstituer lorsqu'on le veut ou lorsqu'on en a besoin?

M. Stewart: La raison d'être du comité consultatif a disparu lorsque la législation a été déposée. S'il doit y avoir d'autres séries d'amendements éventuels à la loi, le bureau devra envisager de le reconstituer, de le réorganiser ou de trouver un autre mécanisme.

Le président: Étant donné vos remarques concernant les avantages d'une mise à jour permanente de la loi, ne pourrait-on pas envisager -- ailleurs que dans la loi -- un processus en vertu duquel un groupe de gens comme vous qui comprennent le sujet se réunirait quelques jours avec le bureau une fois par an ou tous les deux ans pour approfondir les questions qui posent des problèmes?

Si j'ai bien compris votre réponse au sénateur Meighen, l'initiative d'envisager des changements afin de tenir compte de l'évolution à l'avenir revient au gouvernement. Ne devrait-on pas envisager un processus d'examen, même si au bout de la réunion vous concluez qu'il n'est sans doute pas nécessaire d'apporter des changements et que l'on devrait conserver ce qu'on a pendant un certain temps? J'essaie de donner corps à votre idée d'une éventuelle mise à jour régulière.

Dans la Loi sur les banques, par exemple, et maintenant dans la Loi sur les compagnies d'assurance, il y a une disposition explicite de temporisation. L'examen est obligatoire parce que la loi cesse d'exister. Je ne veux pas parler ici de disposition de temporisation, mais nous avons constaté au comité que ce genre de choses a l'avantage de contrer la tendance naturelle de toute grosse organisation comme le gouvernement à ne pas changer les choses.

M. Stewart: Nous en avons parlé au sein du comité consultatif, et certains ont suggéré qu'on l'officialise dans la législation. Mais le consensus auquel nous sommes arrivés pour finir est que, pour l'instant, nous ne devrions pas l'officialiser en exigeant un examen à échéance régulière.

De façon officieuse, et d'une façon relativement structurée, le bureau a mis au point un ensemble d'amendements. Il a l'intention d'étudier sérieusement la législation tous les trois ou quatre ans et de proposer des changements.

Dans l'intervalle, l'un des avantages invisibles de cet exercice passé est qu'il y a une discussion officieuse, mais presque officielle, qui se déroule. Le dialogue avec le bureau est bien meilleur qu'il ne l'a jamais été. Je crois que cela commence à se voir.

Par exemple, la Chambre de commerce du Canada s'inquiète en permanence des seuils financiers prévus pour le préavis de fusionnement. On peut en discuter de façon régulière avec le bureau. Si l'on s'entend pour proposer quelque chose à ce sujet peut-être au cours de l'une de ces opérations plus officielles de modification ayant lieu tous les trois ou quatre ans, cela pourrait se faire.

Je préfère ce que nous avons mis au point à une structure officielle. Toutefois, s'il s'avère que cela ne fonctionne pas, votre suggestion pourrait être bonne.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: J'ai bien connu l'ambiguïté de la compétition et du télémarketing dans le domaine téléphonique et je me demandais si vous aviez touché ce secteur?

L'ambiguïté résidait dans le fait que les gens ne savaient pas où porter plainte: au CRTC ou au bureau de la compétition. Pensez-vous que le projet de loi va rendre la tâche plus facile aux consommateurs? Où vont-ils loger leurs plaintes? Par exemple, on leur dit: on vous offre un service, c'est merveilleux, cela ne coûte pas cher, mais demain matin on va vous déconnecter du réseau Bell. La personne ne le sait pas et on ne lui dit pas. Dans la nouvelle législation, est-ce plus clair?

Je sais que vous ne représentez pas les consommateurs, mais ceux qui vendent les services et qui veulent avoir une bonne réputation auprès des consommateurs. Est-ce que le projet de loi va régler cette ambiguïté? Le consommateur aura-t-il plus de facilité à soumettre sa plainte au Bureau?

M. Woolford: Nous estimons que la nouvelle loi et les amendements établissent des exigences pour ceux qui font du télémarketing. Nous estimons que cela aide à éclairer les consommateurs. On pourrait aviser le consommateur des exigences de la loi. Les articles du nouveau système sont assez clairs pour éduquer les consommateurs.

Nous estimons que c'est probablement du domaine du Bureau de la concurrence parce que c'est en effet de la fraude. Le directeur ce matin a souligné la différence entre les affaires et les crimes. Ce que l'on touche avec la loi, c'est de la fraude. Selon nous, le «Consultative panel» considère les crimes auxquels les directeurs font face. Dans ce cas-ci, c'est de la fraude.

Nous estimons nécessaire d'être en mesure de contacter le Bureau facilement. Le président ce matin a suggéré un numéro plus facile ou plus simple à signaler, comme 1-800-FRAUDE. Il est nécessaire d'informer les consommateurs de leurs droits et de leurs responsabilités.

C'est un peu difficile d'identifier d'autres moyens de protection dans la loi. C'est la responsabilité des autres «télémarketeurs» de se conformer à la loi. Nous espérons créer une atmosphère dans laquelle nous saurons comment recevoir un appel de télémarketing. Et si l'on reçoit quelque chose de différent, d'un peu étrange, on doit demander plus de renseignements.

Le sénateur Hervieux-Payette: Est-ce que votre association va bien informer ses membres sur ce qui est permis par la nouvelle loi? Il est important aussi que vos membres connaissent les limites publicitaires permises.

M. Woolford: Nous avons consulté nos membres concernant les amendements. Dans le domaine du détail, beaucoup de gens ne font pas de télémarketing et, bien sûr, beaucoup en font. The Canadian Direct Marketing Association représente ses compagnies directement et on fait des efforts à ce sujet.

Nous avons essayé d'éduquer nos membres sur les amendements avant leur adoption. Nous continuerons ensuite à identifier les exigences de la loi et à les respecter.

[Traduction]

Le sénateur Oliver: À la page 4 de votre mémoire, vous dites que vous êtes d'accord de façon générale avec le projet de loi C-20. Toutefois, vous continuez en faisant la même recommandation de changement et d'amendement que vous avez faite à la Chambre des communes. Là-bas, vous avez dit que la définition du télémarketing proprement dit n'était pas claire. Vous dites aussi que l'Association du Barreau canadien, et d'autres groupes, ont également indiqué que l'on pouvait la préciser.

Si j'ai bien compris, l'éclaircissement que vous souhaitez reviendrait à ajouter l'expression «en direct». Pour le bien de tous ceux qui sont ici, pourriez-vous expliquer en quoi cette expression est magique?

M. Woolford: L'élément magique pour nous est que, pour l'instant du moins, avec un texte de loi relativement nouveau comme celui-ci, on devrait le limiter aux cas où il y a effectivement une personne qui parle à l'autre bout du fil et qui fait cet appel de télémarketing.

Là où nous voulions en venir, c'est que la manipulation du consommateur se fait généralement en faisant appel à l'intelligence humaine. Nous craignons que si l'on n'est pas très clair sur ce point, certains systèmes de répondeurs automatiques et certains systèmes d'appel automatiques pourraient être couverts par la loi. Le directeur du bureau a dit à de nombreuses reprises, et cela est prévu dans ses lignes directrices, que l'intention était de traiter les appels en direct. Il faut que ce soit une personne au téléphone qui appelle un consommateur et qui essaie de le manipuler en lui donnant de faux renseignements.

Le sénateur Oliver: Autrement dit, selon votre définition, on ne pourrait pas utiliser un message enregistré.

M. Woolford: C'est exact. Il nous semble que la technologie n'en est pas encore arrivée au point où elle peut agir de façon suffisamment interactive avec un être humain pour lui donner de faux renseignements et l'escroquer.

J'ai fait partie du comité consultatif qui s'est occupé du télémarketing. Nous avons admis qu'un jour les machines pourraient avoir une intelligence suffisante pour être utilisée à des fins frauduleuses. Nous estimons que ce n'est pas encore le cas et que cet aspect de la question exige qu'on y réfléchisse davantage.

Nous n'avons pas de sentiments très religieux sur la question. Nous avons pensé qu'il était souhaitable de rendre la législation plus claire.

Le président: Messieurs, nous vous remercions d'être venus.

Notre dernier témoin de la matinée est M. John Gustavson, président et chef de la direction de l'Association canadienne du marketing direct. M. Gustavson nous a distribué un mémoire assez court.

Vous avez la parole, monsieur.

M. John Gustavson, président et chef de la direction, Association canadienne du marketing direct: Monsieur le président, nous représentons la plupart des principales organisations qui font du télémarketing légitime, ainsi que d'autres formes de marketing informatique comme le commerce électronique sur Internet. Notre association est la plus importante organisation de marketing de notre pays et compte 750 sociétés et 3 000 particuliers environ comme membres. Elle compte des institutions financières importantes, des producteurs de catalogues, des éditeurs, des organismes de charité et toute personne qui fait du télémarketing par relation avec le client.

L'année dernière, les Canadiens ont acheté pour 12,4 milliards de dollars de produits aux télévendeurs directement. Cela représente une augmentation de 12 p. 100 par rapport à l'année précédente.

Nos membres utilisent divers médias, dont évidemment le téléphone, plusieurs médias électroniques, les journaux, la radio, la télévision, et cetera.

En ce qui concerne le télémarketing, il est important de savoir que même si c'est un processus parfaitement intégré, les centres téléphoniques emploient des dizaines de milliers de Canadiens.

Les achats à domicile sont devenus très pratiques pour les Canadiens qui ont un emploi du temps très chargé. Ce n'est pas simplement pratique pour de nombreux Canadiens; c'est essentiel notamment pour les personnes âgées et les handicapés. Les consommateurs doivent pouvoir traiter par téléphone interposé avec confiance, et un comportement éthique est essentiel à tout cela. Nous pensons que ce comportement éthique est indispensable pour gagner la confiance du consommateur, ce qui est indispensable pour faire des affaires.

Nous nous autoréglementons depuis longtemps. Notre Code de déontologie et nos Normes de pratique ne constituent pas un code modèle; nos membres sont dans l'obligation de les suivre. Ils doivent s'engager à le faire chaque année en signant.

Le télémarketing frauduleux cause de véritables préjudices à de nombreux Canadiens. Il est clair que tous les télévendeurs n'appartiennent pas à notre organisation. L'adhésion est volontaire. Bien que nous représentions 80 p. 100 des ventes de marketing direct qui se font dans notre pays, de nombreuses personnes sont attirées par l'expansion rapide de notre secteur et se livrent à un comportement non éthique et frauduleux. Elles se lancent dans ce secteur parce qu'on a réussi à accroître la confiance du consommateur. C'est devenu une technique de vente de plus en plus efficace pour de nombreuses entreprises.

Ces personnes vont malheureusement s'en prendre aux plus vulnérables de notre société. Elles constituent non seulement un danger pour leurs victimes directes, mais également pour les dizaines de milliers d'emplois canadiens qui sont créés par le télémarketing légitime dans notre pays.

À notre avis, le projet de loi C-20 constitue un important pas en avant. Il améliore le cadre qui existe déjà. Il fournit aux organismes chargés d'appliquer les lois les outils d'enquête nécessaires pour réprimer la fraude. Nous sommes heureux des dispositions concernant l'écoute électronique, du processus d'injonction plus rapide, des sanctions plus sévères et des exigences de communication des renseignements.

Il y a cependant deux domaines qui nous causent des inquiétudes. Le premier concerne les dispositions relatives à l'écoute électronique. Il se trouve que je suis aussi membre de l'Association du Barreau canadien. Je dois avouer respectueusement que je ne suis pas d'accord avec mon association professionnelle à cet égard.

Je crois que les dispositions relatives à l'écoute électronique sont tout à fait indiquées. J'ai eu affaire directement à ces personnes. J'ai écouté les enregistrements et j'ai vu de quelle façon elles manipulent le public. J'ai examiné les plans originaux qu'elles proposent à la population. La disposition sur l'écoute électronique doit encore être appliquée. Et cela ne doit pas se faire selon l'humeur du moment. Ces gens s'en prennent aux plus vulnérables de notre société. Tout bien pesé, et après avoir procédé aux consultations voulues, nous estimons que les dispositions relatives à l'écoute électronique devraient être adoptées.

Je sais que le sénateur Oliver dans ses remarques au Sénat a exprimé quelques inquiétudes concernant la question des appels en direct et l'exigence de communiquer certains renseignements qui figurent dans le texte de loi. Il serait donc peut-être bon d'aborder ces sujets.

Peu importe le nombre de lois que vous adoptez et de règlements que vous appliquez en vertu de la législation, il y aura toujours des fraudeurs et des victimes. Ce projet de loi constitue un bon pas en avant; mais il ne représente pas la réponse. La meilleure protection contre la fraude du télémarketing reste le consommateur informé et prudent. Il y a beaucoup de choses qui se passent.

Nous avons participé à une opération appelée «Gare aux escrocs... Raccrochez!», organisée en collaboration avec le gouvernement de l'Ontario, le projet «Phonebusters» et des groupes de personnes âgées. Nous avons contribué à l'élaboration de la vidéocassette de mise en garde contre l'arnaque qui a été distribuée dans de nombreux foyers de personnes âgées. Nous avons travaillé avec Bell Canada. Le CRTC a adopté des dispositions essentielles qui figurent dans notre code de déontologie et qui sont des exigences en matière de télémarketing. Nous avons participé activement au groupe de discussion sur la prévention du télémarketing trompeur dont le travail sera lancé en janvier 1999 à titre de programme intergouvernemental. Mais il reste encore beaucoup à faire.

Les messages sont simples. Il faut avoir trois choses à l'esprit. Premièrement, ne faites pas affaire avec des entreprises que vous ne connaissez pas. Deuxièmement, ne vous laissez pas pousser à acheter immédiatement -- tout télévendeur légitime sera heureux de vous envoyer des renseignements. Et troisièmement, si vous avez des doutes, consultez vos amis, vos voisins et vos parents. Si on garde ces trois choses à l'esprit, on peut éviter de devenir victime.

Il nous reste encore une tâche importante, c'est celle d'éduquer les consommateurs pour qu'ils sachent se protéger. En attendant malheureusement, les consommateurs ne posent pas toujours ces questions.

Nous croyons que le projet de loi C-20 constitue un progrès important pour nous permettre de réaliser ce que nous devons faire pour empêcher certains des escrocs les plus monstrueux parmi les télévendeurs d'agir.

Le président: J'aurais quelques questions à vous poser sur vos activités. De nombreux groupes d'entreprises ont comparu devant nous, mais voilà un certain temps que nous ne vous avons pas vu. Vous avez dit qu'il y avait eu 12,4 milliards de dollars de ventes réalisées l'année dernière. Pouvez-vous nous dire à peu près quelle partie de ce chiffre représente les ventes par télémarketing et quelle autre partie par Internet? Si vous pensez aux diverses façons de faire du marketing direct, comment ces ventes se répartissent-elles à peu près entre elles?

M. Gustavson: Malheureusement, vous m'avez posé une question à laquelle il m'est impossible de répondre. On ne sait pas ce qui sert de mécanisme de déclenchement pour la vente. On peut avoir vu l'offre à la télévision et composer un numéro 1-800; on peut recevoir un catalogue, remplir un coupon et envoyer la commande. C'est l'entreprise de télémarketing qui fait la vente mais c'est pour une compagnie pour laquelle vous avez acheté quelque chose au détail et qui aimerait maintenant vous vendre une assurance. Il n'y a aucun moyen de savoir ce qui a effectivement déclenché la vente.

Nous pouvons vous dire, d'après une étude fédérale-provinciale réalisée il y a quelques années, que l'on estime que les trois quarts du télémarketing ne se font pas par des appels téléphoniques à froid aux consommateurs.

Le président: Vraiment?

M. Gustavson: C'est en effet le cas. Ce sont les appels faits par une compagnie que vous connaissez déjà parce que vous avez déjà fait affaire avec elle auparavant ou les appels de clients à un centre téléphonique qui représentent presque 50 p. 100 de tous les appels de télémarketing.

Le président: Les appels de clients, c'est lorsqu'on fait un numéro 1-800 que l'on a vu à la télévision et où pour demander un disque, un CD, par exemple?

M. Gustavson: C'est juste. C'est une autre forme de publicité qui vous a poussé à faire cet appel.

Le président: Il s'agit en général d'un appel interurbain gratuit?

M. Gustavson: C'est exact.

Le président: Et la moitié des transactions sont faites à la suite d'appels de clients?

M. Gustavson: Oui. Si vous demandez à la grande majorité de vos membres ce qu'ils font, ils ne vous répondront certainement pas qu'ils ont une entreprise de marketing direct, ils diront: «Je suis éditeur, producteur de catalogue, assureur ou banquier.» Il se trouve que parmi les diverses opérations de marketing qu'ils font, il y a le marketing direct. Ils emploient souvent une compagnie de l'extérieur -- c'est-à-dire un centre téléphonique -- souvent située en dehors du Canada central. Avec les moyens de télécommunications qu'on a actuellement, il n'est pas nécessaire d'être au Canada central. Elle peut se trouver au Nouveau-Brunswick, au Manitoba ou ailleurs. De ce fait, c'est une compagnie de l'extérieur qui le fait. Pour la plupart de ces entreprises, les grands centres téléphoniques de télémarketing auxquels ont recours les principales entreprises de marketing sont également membres de l'association.

Le président: Vous dites que votre taux de croissance a été de 12 p. 100 de 1996 à 1997. Donnez-moi le taux pour quelques années précédentes. Est-ce une tendance qui se maintient?

M. Gustavson: Oui, elle se maintient cette année. L'année dernière, nous avons connu une légère baisse en raison de la grève postale mais la moyenne est pratiquement de 10 p. 100 pour les cinq dernières années.

Le président: Vous dites que le CRTC a adopté votre code de déontologie. Quel rôle de réglementation, s'il en a un, le CRTC peut-il jouer pour vos activités? Je n'aurais pas imaginé qu'il soit concerné dans votre cas.

M. Gustavson: Le pouvoir du CRTC porte sur l'utilisation des lignes téléphoniques à des fins commerciales. Il établit un cadre réglementaire; si vous voulez utiliser votre ligne téléphonique pour certaines activités commerciales, il y a des lignes directrices à suivre. Le CRTC a adopté dans ses règlements relatifs à l'utilisation des lignes téléphoniques une bonne partie de notre code de déontologie concernant le télémarketing. Par exemple, si vous dites à un télévendeur que vous ne voulez pas qu'il vous rappelle, il est censé ne pas vous rappeler pendant trois ans. C'est un règlement du CRTC. Chose curieuse, malgré notre demande, il a refusé de limiter les heures d'appels, ce qui figure dans notre code de déontologie. C'est l'un des secteurs où il a refusé de suivre notre code de déontologie. De nombreux télévendeurs appellent à n'importe quelle heure du jour et de la nuit. Nous n'avons pas encore compris pourquoi.

Le sénateur Oliver: Le CRTC va tenir une série d'audiences publiques pendant deux semaines pour savoir s'il devrait réglementer le commerce électronique sur Internet. Hier, M. Colville a indiqué qu'il ne voulait pas introduire de règlements qui constituent une sorte d'ingérence. Voilà un autre exemple de compétence que le CRTC pourrait vouloir assumer concernant Internet.

M. Gustavson: C'est exact.

Le sénateur Oliver: Je crois qu'il faut vous féliciter pour le travail que vous faites en essayant d'éduquer les consommateurs. Je suis heureux que vous en ayez parlé et je suis heureux d'apprendre que cela représente une partie aussi importante du travail que vous faites.

Lorsque je regarde la liste de vos sociétés, je vois certaines des grandes compagnies canadiennes, par exemple, les banques et Sears et d'autres, qui ont des choses à vendre et qui pourraient les vendre par télémarketing. J'aimerais savoir ce que vous pensez des dénonciations et si certaines des compagnies avec lesquelles vous êtes associé ont éventuellement eu des inquiétudes face à cette de dénonciation. Lorsque vous m'aurez répondu à cette question, je vous parlerai du rapport Dubin.

M. Gustavson: Nos compagnies n'ont pas exprimé d'inquiétudes.

Le président: J'aimerais que vous expliquiez votre référence au rapport Dubin pour que cela figure au procès-verbal.

Le sénateur Oliver: Si une compagnie fait quelque chose de mal et qu'un employé de la compagnie décide d'en parler, on dit qu'il y a «dénonciation» et cela veut dire que l'employé qui le fait est protégé, qu'on ne peut pas lui imposer de mesures disciplinaires ni le renvoyer.

M. Gustavson: Sur le plan interne, bien que l'on soit toujours nerveux face à une disposition législative qui permet à des employés de révéler des renseignements commerciaux confidentiels, notre association estime que, tout bien pesé, le problème est suffisamment grave pour l'emporter sur ces inquiétudes. Nous croyons donc que les dispositions de dénonciation sont très importantes. Les fraudeurs menacent et intimident leurs propres employés, et pas seulement leurs victimes. Nous pensons que cette protection encouragera les gens à faire des révélations et à aider le Bureau de la concurrence à dévoiler de nombreuses activités dont il connaît l'existence, mais contre lesquelles il ne peut rien faire sans cela.

Le sénateur Oliver: Avez-vous un avis sur le problème que me pose l'article 206 du Code criminel concernant les conflits?

M. Gustavson: Je trouve l'explication du directeur satisfaisante. Je ne crois pas qu'il y ait nécessairement conflit. Je ne prétends pas être expert en matière de conflit législatif, mais j'ai écouté ce qu'a dit le directeur pour rassurer et je crois qu'il comprend bien la chose. Je ne pense pas qu'adopter cette mesure pose un problème.

Le sénateur Oliver: Quelle est pour vous la différence entre quelque chose qui figure dans une loi, quelque chose qui fait partie de la common law et quelque chose qui figure dans les DORS -- les Décrets, ordonnances et règlements statutaires, c'est-à-dire dans un texte d'application de la loi?

M. Gustavson: Dans le premier et le dernier cas, la loi et le règlement ont la même force de loi, tout le poids de la loi et de l'application qui en découlent. Le fait qu'une chose figure dans la loi revient à une déclaration publique. Il ne s'agit pratiquement pas d'une question juridique mais d'une question de relations publiques. Le fait qu'il s'agisse de l'une des lois du pays, qu'elle a été clairement formulée par le Parlement et que l'intention de ce dernier est amplifiée par le règlement, les personnes morales savent ce que l'on attend d'elles.

La common law, pour qui j'ai un très grand respect mais qui est un processus plus mystérieux, n'est pas aussi connue, certaine ou claire. Si les décisions de la common law où l'on interprète la loi deviennent plus nombreuses avec le temps, le Parlement doit intervenir et les codifier ou corriger l'interprétation de la loi faite par les tribunaux. Une déclaration claire du Parlement de son intention contribue beaucoup à faire comprendre aux entreprises ce qu'elles doivent faire.

Le sénateur Meighen: Ma question n'a peut-être pas rapport au texte de loi que nous étudions ce matin. Je suis au courant des efforts de l'ACMD face à la publicité non sollicitée qui parvient aux ménages et la possibilité qui est offerte à ces derniers d'interrompre le processus. Mais par expérience personnelle -- et je sais que vous avez travaillé fort et efficacement à cet égard -- je trouve que cette efficacité n'est pas suffisante en ce qui concerne les offres non sollicitées et, dans mon cas particulier, non souhaitées envoyées par télécopieur par des publicitaires.

Souvent -- et c'est peut-être à votre instigation -- il y a un numéro de téléphone qui est mentionné au bas de la page et que les destinataires peuvent appeler pour demander qu'on arrête cette pratique. J'ai essayé de le faire à plusieurs occasions, mais ça n'a pas eu vraiment d'effet perceptible. Pouvez-vous me dire si l'ACMD s'occupe de cette question et, dans la négative, si elle a l'intention de le faire?

M. Gustavson: Vous avez tout à fait raison. Nous avons été moins qu'efficaces dans ce domaine. Les principaux télévendeurs, qui appartiennent tous à notre organisation, n'envoient pas de télécopies non sollicitées parce qu'elles ne sont pas efficaces. Elles irritent davantage qu'elles ne profitent. C'est pourquoi nous offrons un service pour ceux qui demandent qu'on n'envoie pas de courrier publicitaire ou qu'on ne fasse pas d'appels téléphoniques publicitaires. Mais nombreux sont ceux qui sont tout à fait heureux de répondre à la publicité qu'ils ont vue à la télévision ou dans une revue. Vous ne voulez donc pas vous les aliéner en vous lançant dans des pratiques qui pourraient les agacer. C'est pourquoi la plupart de nos membres n'utilisent pas le télécopieur pour diffuser leurs offres.

Nous permettons aux intéressés d'inscrire le numéro de téléphone et nos membres doivent les éliminer de leurs programmes de marketing. Malheureusement, la plupart des sollicitations spontanées par télécopieur et par téléphone sont faites par de petites entreprises locales qui n'appartiennent pas à notre association.

Avec Bell Canada, nous sommes allés demander au CRTC de faire une proposition qu'il a accepté de faire. Cette proposition concerne l'imposition de certaines limites à la diffusion par télécopieur. L'une de ces limites est de s'entendre pour adopter des heures d'appels limitées comme prévues dans notre code de déontologie pour les télécopieurs. Une autre limite exige de supprimer les numéros de téléphone des particuliers qui souhaitent disparaître de la liste d'envois par télécopieur. Une entreprise qui envoie des télécopies doit respecter cette demande. Autrement, la sanction pour non-respect, si c'est une pratique courante que d'ignorer ces demandes, consiste à supprimer les lignes téléphoniques de ces entreprises. Il y a un numéro que l'on peut appeler pour se plaindre et que le CRTC sera heureux de vous donner.

L'une des conditions que nous avons demandées est d'exiger qu'il y ait le numéro exact de l'expéditeur. Mais si cette demande n'est pas efficace, je serais heureux de vous transmettre l'accès à ce secteur de plaintes qui s'occupe des règles de diffusion par télécopieur.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Je veux vous féliciter de la qualité de votre matériel en français, visuellement et dans son contenu. Il est toujours rafraîchisssant de voir une association nationale qui a un chapitre provincial, qui ne croit pas que cela fonctionne seulement au Québec en français et qui nous donne de la documentation française.

Vous êtes un des secteurs le plus sur la sellette. J'aimerais remercier votre groupe pour avoir appuyé des changements. Vous avez contribué à améliorer ce secteur et à protéger une clientèle assez vulnérable.

On a changé les règles en ce qui concerne la possibilité de faire des enquêtes, d'avoir de l'écoute électronique. Est-ce que vous croyez que nous avons l'expertise et que nous pourrons avoir des résultats? Il faut quand même être capable de retracer les appels et sur le plan technologique pouvoir repérer les sources. Ces gens peuvent opérer de plusieurs endroits. Comme législateur, on a de bonnes intentions, mais du côté technique, on ne peut pas appliquer la loi. Est-ce qu'on dispose des moyens pour procéder à des enquêtes en profondeur qui nous amèneront à une écoute électronique? Croyez-vous qu'on a les moyens de le faire?

[Traduction]

M. Gustavson: Certainement. Cette législation a été créée après une période prolongée de consultations avec plusieurs organisations qui y sont favorables et qui croient qu'elle changera vraiment les choses. Malheureusement, elle ne va pas régler tous les problèmes.

L'une des difficultés vient de ce que les victimes qui peuvent être des personnes âgées plus simples ou parfois tellement embarrassées qu'elles ne vont pas oser divulguer l'affaire. Il est souvent trop tard pour qu'elles nous autorisent à enregistrer l'appel téléphonique. Les personnes qui se lancent dans ces pratiques frauduleuses ne reviennent pas solliciter la même personne.

Le projet «Phonebusters» confirme que le plus gros problème qu'on rencontre, c'est le refus des personnes qui ont été escroquées de parler de leur histoire parce qu'elles sont gênées. Elles n'en parlent pas à leurs parents ni à leurs amis et elles ne vont pas en parler à un organisme qui est chargé d'appliquer la loi.

Une des dispositions essentielles de ces amendements consiste à obtenir un pouvoir indépendant pour procéder à des écoutes électroniques sans le consentement de l'une des parties escroquées au moins. Sans cela, il est difficile de prendre le contrevenant.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Les entreprises qui vont faire partie de l'organisation ne sont pas celles visées? Avant même que les infractions soient commises, on peut recevoir quelques plaintes, mais comment arrêter la plainte? Ceux qui vont commettre l'infraction ne seront pas faciles à repérer.

Votre association a recommandé l'écoute électronique parce que ce ne seront pas vos membres qui seront les principaux criminels dans cette question. Ceux qui abuseront ne seront pas nécessairement à l'intérieur de nos frontières et ils pourront changer de numéro et d'adresse continuellement, donc ils seront difficiles à repérer.

Est-ce qu'on a mis une disposition que l'on pourra utiliser? Est-ce que technologiquement, on sera capable de les repérer? Vos membres qui ont des opérations légitimes n'auraient aucun intérêt à abuser et ne seraient pas en affaire très longtemps.

[Traduction]

M. Gustavson: Il est aussi important de repérer ceux qui prennent part à des plans d'achats internationaux. De nombreuses personnes nous demandent de l'aide parce qu'elles ont envoyé un chèque ou un mandat à une boîte postale à Las Vegas, généralement sans avoir aucune idée de l'endroit où allait leur argent ni de la personne qui allait le recevoir. Normalement, elles ont entendu un boniment au téléphone, signé un chèque et l'ont envoyé ou ont envoyé par courrier électronique leur numéro de carte de crédit dans le cyberespace par Internet.

Il n'y a aucun recours contre ce genre de comportement idiot. Je suis désolé d'employer ces termes un peu forts, mais c'est ce que c'est. C'est pourquoi l'éducation des consommateurs est la meilleure protection contre ce genre d'activités.

À l'intérieur de nos frontières, nous n'avons pas d'excuses de ne pas intervenir auprès de ceux qui se livrent à ces activités dans notre pays. Oui, ils ferment leur entreprise et ils recommencent ailleurs, mais on connaît en général ces individus. La plupart du temps, ils changent le nom de la compagnie. Le consommateur ne le sait pas, mais ceux qui sont chargés d'appliquer la loi ont une assez bonne idée des personnes qui dirigent ces entreprises. La police les a à l'oeil si elles commencent à se lancer dans ces programmes de télémarketing qui durent en général un certain temps. Il est peut-être trop tard pour obtenir l'autorisation d'une personne qui a été déjà victime. Mais une fois qu'on commence à recevoir des plaintes, on a une assez bonne idée de la compagnie concernée. On peut alors se livrer à des écoutes téléphoniques utiles.

Le sénateur Callbeck: J'ai une question sur cette brochure concernant le Code de déontologie et les Normes de pratique. Vous avez dit que le CRTC signale aux vendeurs directs qu'ils ont à faire certaines choses et que l'essentiel figure dans ce document, mais pas tout. Vous dites aussi que le respect de ce code est obligatoire pour vos membres. Comment savez-vous qu'ils le respectent effectivement? Y a-t-il des gens qui s'en occupent?

M. Gustavson: Non, nous supposons que nos membres, comme la majorité de la société, sont des citoyens respectueux de la loi jusqu'à ce qu'on reçoive des plaintes, et c'est seulement alors qu'on a l'occasion de faire des enquêtes.

Nous avons un comité de la déontologie et des renseignements personnels. Lorsque nous recevons des plaintes de la part de consommateurs, nous essayons de voir si quelqu'un a fait une erreur ou s'il y a comportement fautif qui se répète.

Il nous est arrivé souvent de constater qu'un petit comité constitué de membres qui discutent avec le membre en question découvre que cette personne a un comportement qui n'est pas illégal, qui n'est même pas contraire à la déontologie, qu'elle a des pratiques commerciales mauvaises qui sont dues à sa simple ignorance et qu'elle aimerait en fait qu'on l'aide et qu'on l'éduque. Nous procédons ensuite à des vérifications auprès de ces membres. Nous avons pour habitude de retourner voir le membre pour vérifier qu'il est effectivement en train d'améliorer ses pratiques.

Nous avons un processus de contrôle du respect, mais il est déclenché par une plainte. Nous n'avons pas d'équipe volante de vérificateurs qui arrive brusquement chez un membre ou qui écoute ses conversations.

Le président: Monsieur Gustavson, nous vous remercions infiniment de l'intérêt que vous portez à la question. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir.

La séance est levée.


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