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DEVC - Comité spécial

La Société de développement du Cap-Breton (spécial)

 

Délibérations du comité spécial du Sénat sur
la Société de développement du Cap-Breton

Fascicule 2 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 19 novembre 1997

Le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton se réunit aujourd'hui à 15 h 20 pour étudier les rapports d'activité de la Société de développement du Cap-Breton et d'autres questions connexes.

[Traduction]

Le sénateur John G. Bryden (président) occupe le fauteuil.

Le président: Honorables sénateurs, l'audition des témoins représentant les quatre organisations prévues cet après-midi va subir un changement; les témoins représentant United Mine Workers passeront en dernier.

Vous avez la parole.

M. Angus Grant, président, section locale 4504, Travailleurs canadiens de l'automobile: Sénateurs, je suis le président de la section locale des TCA employés à la SDCB et je représente un certain nombre des préposés à l'abattage à l'explosif, des contrôleurs des mines et d'autres employés qui y travaillent. Nous avons rédigé un court mémoire à l'intention des sénateurs et des autres groupes qui sont ici aujourd'hui. C'est de tout coeur que nous sommes venus ici inciter le gouvernement fédéral, par votre entremise, à s'impliquer dans l'exploitation de la mine Donkin, dans l'île du Cap-Breton, pour y produire du charbon.

Je travaille moi-même depuis 40 ans dans l'industrie du charbon. J'ai été sauveteur dans les mines et je suis membre de la Commission de sécurité dans les mines de charbon, qui opère sous l'égide du ministère fédéral du Travail. Nous sommes chargés d'agréer et d'autoriser l'exploitation souterraine à la SDCB. Je suis aussi l'un des 15 membres du conseil d'administration des Travailleurs canadiens de l'automobile, qui compte quelque 210 000 membres au Canada.

Laissez-moi maintenant vous présenter Richard Daigle, qui va exposer notre mémoire devant le Sénat.

M. Richard Daigle, président du conseil d'administration, Travailleurs canadiens de l'automobile: Le syndicat des Travailleurs canadiens de l'automobile représente quelque 140 travailleurs employés par la Société de développement du Cap-Breton. Nous comptons parmi nos membres des travailleurs de bureau, des contrôleurs de mines souterraines, des préposés à l'abattage à l'explosif, des géomètres, et cetera. Ces travailleurs sont syndiqués depuis 1960. Nous avons assisté à de nombreux changements depuis cette date, notamment à une diminution du nombre de nos membres, qui sont passés de 500 au chiffre actuel.

Tout au long de notre histoire, nous avons appris à faire confiance au gouvernement fédéral, dont l'intervention s'est révélée si nécessaire pour appuyer l'économie du Cap-Breton. Lors de la crise de l'OPEC, c'est le charbon de la SDCB qui a aidé la Nova Scotia Power Corporation à éviter pratiquement la ruine financière, et grâce aux efforts des mineurs et d'autres travailleurs de soutien, nous avons réussi à faire la preuve que l'on pouvait utiliser le charbon de manière rentable et que les mineurs pouvaient établir des records en matière d'exploitation du charbon.

La seule constante dans les charbonnages, c'est que le jour où l'on ouvre une nouvelle mine, il faut se préparer à sa fermeture inévitable. Ce que nous souhaitons, cependant, c'est que l'exploitation de la mine suive son cours normal pour que l'on puisse extraire les réserves de charbon prévues. Malheureusement, il ne peut y avoir aucune garantie. La Société a déjà dû fermer plus tôt que prévu le puits no 26 de la mine Lingan ces dernières années, et nous faisons face aujourd'hui à la fermeture de la mine Phalen.

Il est décourageant pour les mineurs et leur famille de penser que la Société, même si elle s'en défend, envisage de ne pas rester dans l'industrie du charbon. Nous comprenons que l'objectif en fin de compte est celui de la privatisation et qu'il est possible qu'on y parvienne; mais ce n'est pas toutefois la seule priorité. Surtout, ce ne peut pas être la priorité à cette période de notre histoire.

Pour une raison ou pour une autre, la mentalité réformiste, qui veut que moins il y ait de gouvernement, mieux on se porte, semble prévaloir dans l'ensemble du gouvernement fédéral actuel. Nous sommes venus vous dire aujourd'hui que nous ne sommes pas d'accord avec ce genre de conception. Ce programme «de droite», qui veut éloigner le gouvernement des affaires, peut éventuellement avoir du succès dans des grandes villes comme Toronto, Montréal ou Vancouver; il ne tient pas compte cependant de la démographie de notre pays.

L'économie du Cap-Breton est traditionnellement la pire au pays. Notre taux de chômage est officiellement de 20 p. 100 et je n'hésiterais pas à dire qu'en réalité il s'approche plutôt de 40 p. 100. Cela crée de nombreux problèmes sociaux dans notre région. Les suicides, les mauvais traitements infligés aux conjoints et la criminalité sont à la hausse. Nos familles éclatent et l'on voit des visages désespérés chez nos enfants. Nous assistons à un exode en masse de familles, qui vont s'installer dans d'autres régions du pays. C'est scandaleux. Les gens ne devraient pas avoir à quitter leur foyer et leur famille pour trouver du travail.

Les secteurs d'activités traditionnels du Cap-Breton sont la pêche, la fabrication de l'acier et l'exploitation du charbon. Le secteur de la pêche a été si mal géré que l'on a vu disparaître les réserves de morue du nord. On a confié au gouvernement fédéral et à la province le soin de gérer cette précieuse ressource et il en est résulté des milliers d'emplois perdus, les gens étant obligés d'aller se réinstaller ailleurs.

L'industrie de l'acier de Sydney a été elle aussi soumise aux aléas de la politique pendant de nombreuses années. La main-d'oeuvre dans ce secteur est passée de 4 000 à quelques centaines d'ouvriers, et les travailleurs de l'acier ainsi que leurs familles ont dû faire concession sur concession pour garder quelques emplois.

L'industrie du charbon est la seule survivante aujourd'hui et notre syndicat est fermement convaincu qu'il y a un avenir pour les mines au Cap-Breton. Cet avenir réside dans l'ouverture de la mine Donkin. Les conditions géologiques qui règnent à la mine Phalen exigent que l'on se prépare immédiatement à l'entrée en service de la mine Donkin. Il est encore plus important, à notre avis, que cette entreprise soit placée sous la responsabilité de la Société de développement du Cap-Breton. Le coût de mise en service d'une nouvelle mine de charbon peut être rapidement amorti, et nous savons tous que les mines nouvelles sont des mines rentables.

La Société de développement du Cap-Breton a l'obligation morale de continuer à assurer l'exploitation, et nous estimons qu'il faut que le gouvernement fédéral reconnaisse et accepte cette obligation d'aider le Cap-Breton en cette période difficile. Jamais, au cours de l'histoire de notre île, nous n'avons vu notre économie dans un état aussi précaire. Par le passé, nous pouvions toujours nous replier sur l'acier ou sur la pêche. Toutefois, ces possibilités ont disparu.

Les TCA se joignent aux autres syndicats de la SDCB pour vous implorer de faire usage de votre compétence ainsi que de votre influence afin que le projet d'exploitation de la mine Donkin soit mis en oeuvre dans les meilleurs délais, et cela sous l'égide de la Société de développement du Cap-Breton.

Nous avons besoin de votre appui dès maintenant. Le temps nous manque et tout retard remettra sérieusement en cause nos chances de succès. Notre main-d'oeuvre est déterminée et il nous faut maintenant pouvoir compter sur un employeur déterminé.

Pour conclure, le syndicat des TCA remercie le comité de lui avoir donné l'occasion de faire connaître son point de vue, et nous vous prions instamment de faire usage de tous vos pouvoirs afin que nous puissions vivre et travailler dans la dignité.

M. Angus McEachern, président, Syndicat canadien de la fonction publique: Je suis le président de la section locale 2046 du SCFP, qui représente les contrôleurs, le personnel infirmier, le personnel de sécurité et les répartiteurs des transports ferroviaires de la SDCB. J'ai à mes côtés mon camarade Brian Kanne, secrétaire-trésorier de la section locale, et ma camarade Bonnie Ferguson, attachée de recherche à notre bureau national, ici à Ottawa.

Je tiens à vous remercier de nous donner ici l'occasion d'intervenir au nom de la section locale 2046 du SCFP.

Nombre de nos membres ont passé la plus grande partie de leur vie active au Cap-Breton et à l'emploi de la SDCB. J'ai travaillé à la SDCB pendant 19 ans, d'abord comme mineur, puis comme contrôleur. Mon père et mon grand-père ont travaillé à la mine. Mon père a travaillé au fond pendant près de 27 ans. Mon grand-père y est resté pendant 52 ans. Mon grand-père a pris sa retraite à 65 ans et n'a pas vécu assez longtemps pour voir arriver son premier chèque de pension par la poste.

Comme chacun sait ici, l'industrie du charbon et la participation du gouvernement fédéral à cette industrie sont des constantes dans l'histoire de l'industrialisation du Cap-Breton. À l'heure actuelle, les membres de notre section locale sont soumis quotidiennement aux aléas de la demande et à l'incertitude qui entoure l'exploitation des mines de charbon au cours des années 90. Nous n'en considérons pas moins que les mines de charbon ont un avenir et qu'il appartient en priorité à la SDCB de ménager cet avenir. Malheureusement, les initiatives et les annonces récentes, et même les discussions qui ont eu lieu ici même hier m'amènent à me demander si cet objectif est partagé par le conseil d'administration de la Société de développement du Cap-Breton et par le gouvernement du Canada.

La mine Donkin est l'un des principaux éléments d'actif de la SDCB et son potentiel est particulièrement intéressant en vue d'une mise en exploitation future. La Société a signé un protocole d'accord susceptible d'entraîner la vente de la mine Donkin en vue d'une exploitation par le secteur privé. Il semble en outre que l'étude préliminaire effectuée par la société privée DRL, Donkin Resources Limited, sera financée dans une large mesure par l'APECA. Étant donné que cette exploitation minière est la propriété à l'heure actuelle du gouvernement du Canada et qu'il semble que les crédits soient disponibles, comment se fait-il que le projet d'étude de la mise en valeur de la mine Donkin ne fasse pas partie du plan d'entreprise de cette société d'État?

Nous considérons que le plan d'entreprise de la SDCB ne devrait pas se proposer exclusivement de «remettre la maison en ordre», mais prévoir une planification à long terme, notamment la possibilité d'étudier la mise en exploitation de la mine Donkin. Même l'objectif étroit de l'énoncé de mission révisé, «devenir une société minière rentable», n'aura pas grand sens pour les habitants de Cap-Breton si, au bout de quelques années, lorsque la SDCB retrouvera la rentabilité, elle ferme ses portes.

La privatisation n'est pas la solution pour l'industrie du charbon au Cap-Breton. Dans l'analyse qui va suivre, je vais exposer un certain nombre de raisons militant en faveur du maintien de la propriété publique de la SDCB et de tous ses éléments d'actif.

J'évoquerai rapidement les différents points sur lesquels est intervenu le SCFP et je me ferai un plaisir de répondre ensuite aux questions que vous voudrez me poser.

En mai 1996, le SCFP est intervenu et a présenté des mémoires écrits à votre comité. Notre intervention avait porté à l'époque sur le fardeau imposé en matière de pensions par la dette non provisionnée en raison des projets devant être entrepris par la SDCB. Comme vous l'avez appris, la situation relative à cette dette non provisionnée concernant les pensions a changé, mais le fardeau de la dette continue à reposer sur les épaules du gouvernement fédéral. Lors de son intervention devant votre comité en mai 1996, le SCFP a soutenu que le gouvernement du Canada devait assumer la responsabilité de la dette encourue envers les membres du régime dans le cadre du régime de pensions non contributif de la SDCB. La dette non provisionnée s'élevait en 1995 à 67,5 millions de dollars au sein d'un régime non contributif.

Parallèlement, la Société a mis en application un barème de remboursement accéléré visant à rembourser la dette non provisionnée concernant les pensions en 1998, grâce à des paiements annuels de plus de 20 millions de dollars. Nous avons appris hier que la question de la dette non provisionnée concernant les pensions a été réglée, mais à un coût élevé pour ce qui est de l'avenir de la SDCB et de l'économie du Cap-Breton. Si le gouvernement fédéral avait assumé ses responsabilités sur le plan des pensions, la Société aurait été bien mieux placée pour garantir les emplois et investir dans la mise en exploitation de nouvelles mines.

La question de la dette non provisionnée concernant les pensions a par ailleurs été abordée par Tom Kent lorsqu'il est intervenu devant votre comité en mai 1996. M. Kent a joué un rôle majeur dans l'établissement des régimes de pension pour les mineurs qui, jusqu'au début des années 70, se limitaient aux droits au Régime de pensions du Canada. Il s'est exprimé en ces termes:

Nous n'avons pas établi un régime de pension très généreux, mais je crois que l'on peut dire en toute justice qu'il a complètement changé le climat social de Cap-Breton. J'ai toujours prétendu que la majeure partie du coût de ce régime de pension ne faisait pas vraiment partie intégrante du déficit de la SDCB.

Dans son rapport publié en juin 1996, le comité sénatorial s'est expressément référé à cette question du déficit actuariel des pensions et a recommandé que:

Le gouvernement du Canada verse un crédit de 41,25 millions de dollars pour couvrir la moitié de la radiation de la dette non provisionnée occasionnée par le régime de pension non contributif et les anciens régimes de préretraite et de retraite anticipée.

Comme vous le savez, le gouvernement n'a pas adopté la recommandation du comité sénatorial spécial. En réalité, c'est un prêt de 79 millions de dollars qui a été consenti à la SDCB. La dette envers le régime de pension a tout simplement été remplacée par une nouvelle dette envers le gouvernement fédéral.

Ces 18 derniers mois, il s'est produit un certain nombre d'événements qui ont directement remis en cause les perspectives d'avenir de la SDCB. Les orateurs précédents ont évoqué un certain nombre d'entre eux: éboulements de rochers et explosions de gaz, pondérations, infiltrations d'eau et profondeur de la mine, tous ces facteurs amenant à conclure que l'avenir de la mine Phalen est incertain et que son exploitation pourrait se terminer bien plus tôt que prévu.

Il semble qu'en 1998 la SDCB pourra réaffecter 17 millions de dollars ou davantage qui ont été alloués au remboursement de la dette non provisionnée du régime de pension non contributif. Cet argent pourra être dégagé afin d'être affecté à des investissements étrangers pour assurer, par exemple, la mise en valeur d'autres mines à l'avenir.

En dépit des difficultés actuelles à la mine Phalen, les changements apportés à l'exploitation courante ont parfois produit des résultats dépassant les espérances. La SDCB possède à l'heure actuelle un équipement minier pouvant servir à mettre en exploitation la mine Donkin si les études le justifient. Cette mine pourrait entrer progressivement en pleine production au bout d'une période de cinq à sept ans.

Les éléments d'actif de la société, en incluant l'équipement disponible, se composent d'une usine de traitement de 3 millions de dollars à Lingan, du matériel de levage, de l'équipement des parois et du matériel d'étayage des galeries, des machines d'abattage sur les plans horizontaux et inclinés, de l'équipement de transport du matériel et du personnel et bien d'autres choses encore. Les activités d'exploitation existantes de la SDCB ne souffriraient pas de l'utilisation de ces appareils et de cet équipement à la mine Donkin. L'un des principaux éléments d'actif de la SDCB est sa main-d'oeuvre qualifiée et expérimentée.

Pour toutes ces raisons, il serait justifié de réviser le plan d'entreprise de la SDCB pour prévoir la possibilité de mettre en valeur la mine Donkin et d'envisager par ailleurs d'autres options. Malheureusement, ce n'est pas ce que nous avons entendu hier dans le cadre des présentations faites devant votre comité, et c'est ce qui nous amène à vous poser un certain nombre de questions.

Pourquoi la SDCB n'a-t-elle pas d'argent pour mettre en valeur la mine Donkin alors que des crédits semblent pouvoir être mis à la disposition des sociétés privées? Pourquoi n'a-t-on procédé à aucune consultation au sujet de la privatisation de l'un des principaux éléments d'actif de cette société d'État? Pourquoi a-t-on signé si précipitamment un protocole d'accord alors que le comité sénatorial était justement en train de procéder à une étude qui influe directement sur cette décision? Comment se fait-il que la société engagée par DRL, l'acheteur potentiel, a aussi été chargée de déterminer la valeur de l'un des principaux éléments d'actif de la SDCB, la mine Donkin?

Il y a aussi nombre d'autres questions auxquelles on ne pourra éventuellement apporter une réponse qu'après la rencontre avec le ministre en décembre. La discussion d'hier ne nous a pas indiqué clairement quelles seront les exigences de remboursement du prêt de 79 millions de dollars du gouvernement. Comme nous l'avons indiqué au début de notre exposé, la décision prise par le gouvernement d'acheter la SDCB grâce à un prêt, plutôt que de prendre en charge une partie au moins de la dette non provisionnée du régime de pension, a limité les perspectives futures de la Société et a imposé de manière injustifiée un lourd fardeau aux travailleurs de la SDCB et aux collectivités du Cap-Breton. Ce serait en fait la goutte d'eau qui fait déborder le vase si le gouvernement fédéral devait imposer des conditions de remboursement remettant en cause d'exploitation future des mines par la SDCB.

Si l'intention d'Ottawa est d'étouffer toute velléité d'exploitation à l'avenir et d'imposer de force une privatisation, il semble que ce soit réussi. La privatisation de la mine Donkin va vraisemblablement entraîner la vente des éléments d'actif de l'État à un prix très inférieur à leur valeur. Étant donné par ailleurs que l'on n'aura pas à rendre compte à l'avenir des décisions dans le cadre d'une exploitation privée, cela risque de signifier dans la pratique que l'on va exploiter les meilleures veines de charbon et cesser l'exploitation lorsque les profits diminueront. Une société d'État ayant des objectifs plus larges peut en faire bien davantage tout en continuant à exploiter avec profit.

Il suffit de jeter un coup d'oeil sur les changements apportés à la définition de la mission de la SDCB pour tout comprendre. Selon la documentation fournie par la SDCB, sa mission se limite à l'heure actuelle à devenir une société charbonnière rentable alors qu'il y a deux ans encore on trouvait dans son énoncé de mission les objectifs suivants: «tenir compte de la protection de l'environnement, de l'intérêt des actionnaires, des employés et de la collectivité, et veiller au bien-être économique à long terme du Cap-Breton.»

La fin de l'exploitation minière au Cap-Breton marquerait la fin d'un mode de vie et d'une culture qui sont les nôtres depuis trois siècles. Nous sommes convaincus qu'avec une bonne planification, la SDCB a un avenir à long terme. Nous considérons que le succès à long terme de l'exploitation des mines de charbon de la société de développement au Cap-Breton fournirait par ailleurs des emplois aux industries annexes, qu'il redonnerait leur dignité aux habitants de l'une des régions économiques les plus sinistrées du Canada, et surtout que les mères, les pères, les grands-mères et les grands-pères de cette région pourront voir leurs fils et leurs filles ainsi que leurs petits-enfants avoir la chance de vivre à l'avenir chez eux, au Cap-Breton.

Le sénateur MacDonald: Je n'ai pas un exemplaire de votre mémoire, mais je crois que vous avez mentionné qu'il n'y a pas d'argent disponible dans le plan d'entreprise; pouvez-vous nous répéter ce que vous avez dit précisément sur ce point?

M. McEachern: On a affecté environ 20 millions de dollars en 1998 pour rembourser la dette non provisionnée; toutefois, étant donné l'état actuel du régime de pension non contributif, il est plus que probable que l'on n'aura pas à affecter en 1998 ces 20 millions de dollars à peu près à la dette non provisionnée.

Le sénateur MacDonald: C'est ce que vous avez voulu indiquer?

M. McEachern: Oui.

M. Darrell King, International Association of Machinists: J'appartiens à la section locale 684 de l'International Association of Machinists. Je n'ai malheureusement pas rédigé de mémoire, nous n'avons appris la tenue de cette réunion qu'il y a peu de temps et nous n'avons pu que prendre rapidement des dispositions pour venir ici. Si vous avez des questions à me poser, je m'efforcerai d'y répondre.

Je voudrais parler aujourd'hui de l'avenir de la Société de développement du Cap-Breton. Les membres de la section locale 684 de l'International Association of Machinists estiment qu'il est de la toute première importance que le comité insiste auprès du gouvernement sur l'intérêt de la mise en valeur de la mine Donkin. Étant donné les problèmes que nous pose actuellement notre mine Phalen, nous pourrions éprouver de sérieuses difficultés dans quelques années.

En tant que membres du secteur des transports, nous estimons que la société aurait tout intérêt à livrer son charbon par chemin de fer. En procédant à une étude approfondie, nous avons constaté qu'il fallait poser une nouvelle voie sur 22 milles entre le centre ferroviaire de la SDCB et la mine Donkin à un coût d'un million de dollars par mille. Étant donné toutefois le coût inférieur de la livraison du charbon par chemin de fer comparativement à la route et l'importance des réserves de charbon à la mine Donkin, ce projet de chemin de fer serait amorti en quatre ou cinq ans. Sur un plan écologique, il serait aussi préférable de transporter le charbon par chemin de fer plutôt que par la route.

Grâce à l'ouverture de la mine Donkin, nos membres, qui ont en moyenne 45 ans et entre 20 et 25 années d'ancienneté, verraient s'ouvrir de bonnes perspectives d'avenir au Cap-Breton; elle serait susceptible aussi de garantir des emplois à l'avenir pour nos fils et nos filles au Cap-Breton. J'espère que votre comité sénatorial insistera auprès du gouvernement sur l'importance que revêt pour nous la mine Donkin, face à un avenir qui nous apparaît assez sombre. Je tiens ici à remercier le comité et les sénateurs.

M. Steven Drake, président, Section locale 26, United Mine Workers of America: Honorables sénateurs, United Mine Workers of America possède 1 350 employés qui travaillent pour le compte de la Société de développement du Cap-Breton. En leur nom, je tiens à remercier les sénateurs de l'intérêt qu'ils ont toujours accordé à l'industrie du charbon du Cap-Breton.

Nous considérons que la mine Donkin pourrait jouer un rôle très important au sein de la SDCB, mais nous estimons par ailleurs que quelques personnes ayant des intérêts particuliers refusent d'en faire la promotion. Il y a un an et demi environ, 13 000 résidents du Cap-Breton ont signé un document revenant essentiellement à appuyer l'exploitation de la mine Donkin au sein de la SDCB dans le cadre d'une société d'État exploitant trois mines. En octobre de cette année, lors du 39e Congrès de l'UMWA, les délégués ont adopté à l'unanimité cette même motion revenant essentiellement à conserver la mine Donkin à l'intérieur de la SDCB dans le cadre d'une société d'État exploitant trois mines.

Nous avons apporté au Sénat une pétition signée la semaine dernière. Elle comporte quelque 700 noms de personnes qui travaillent à la SDCB, notamment les gens de l'UMWA, des membres des TCA, des membres de l'IMA, des membres du SCFP ainsi que des membres des catégories d'employés réservés. Les questions qui se posent à l'heure actuelle au sujet de la SDCB revêtent un grand intérêt pour tout le monde au Cap-Breton.

Je vais maintenant ébaucher les grandes orientations qui, aux yeux de notre syndicat, doivent être prises aujourd'hui, et j'aborderai ensuite rapidement, en donnant plus de détails, la question du gaz de l'île de Sable et celle de la mine Donkin.

L'un des gros problèmes actuels de la Société de développement du Cap-Breton est le manque de confiance entre la direction et les syndicats. Pour illustrer ce manque de confiance actuel, je remonterai à 1994. À la fin 1994 et au début de 1995, la Nova Scotia Power, son principal client, a notifié à la Société de développement du Cap-Breton qu'elle allait arbitrairement baisser le prix du charbon payé à la SDCB dans une proportion de l'ordre de 20 p. 100. À l'époque, le président de la société, M. Ernie Boutillier, a laissé entendre qu'une telle baisse revenait essentiellement à décimer notre industrie. M. Boutillier a indiqué que l'exploitation souterraine allait être abandonnée à la mine Prince et que l'exploitation en surface allait retomber à zéro, la mine Phalen devenant le fournisseur attitré de la Nova Scotia Power. Personne ne voyait quel était l'intérêt commercial d'un tel projet.

À l'époque, les syndicats se sont joints à la bataille et l'on s'est félicité de voir que nous luttions aux côtés de la société. Les syndicats se sont joints à la société pour repousser l'attaque de la Nova Scotia Power, le conseil d'administration et la direction de la SDCB luttant essentiellement avec les syndicats pour atteindre les mêmes objectifs. Nous avons assez bien réussi à l'époque.

La SDCB est allée jusqu'à traduire en justice la Nova Scotia Power pour rupture de contrat. Je crois que c'est ainsi que la SDCB a qualifié la chose. D'après l'information fournie par la SDCB à tous les syndicats, nous pensions que son dossier était excellent et que la Nova Scotia Power ne pouvait pas réduire arbitrairement le prix du charbon. La bataille s'est poursuivie jusqu'en juin 1995. C'est alors que l'administration de la SDCB a changé et que le président est parti. Il a quitté l'industrie, c'est l'explication officielle.

Nous avons désormais une nouvelle administration. M. Joseph Shannon a été nommé président de la société et du conseil d'administration. M. Shannon a entrepris de négocier le contrat avec la Nova Scotia Power. Lors de la dernière consultation de la SDCB qui a eu lieu le 12 novembre 1997, M. Shannon a indiqué qu'il menait personnellement les négociations avec la Nova Scotia Power. Aucun représentant juridique, aucun membre du conseil d'administration et aucun membre du personnel de direction de la SDCB n'était présent autour de la table des négociations. Je précise en passant que tous les syndicats étaient présents lors cette réunion. M. Shannon a indiqué par ailleurs «...qu'il ne se souvenait plus si le conseil d'administration avait déjà vu les clauses révisées du contrat de 33 ans ou si cette question avait simplement été évoquée lors des réunions du conseil.»

Le syndicat a quelque peu perdu sa foi et sa confiance dans le mécanisme et dans l'orientation donnée par la direction à ce moment-là.

Pendant huit mois environ, l'administration précédente avait collaboré avec l'UMWA à la promotion du projet de la mine Donkin et à l'étude de la viabilité de cette mine pour l'avenir de la SDCB. Le syndicat avait élaboré un plan détaillé visant à mettre en place un projet d'exploitation à petite échelle de la mine Donkin pour répondre à des conditions d'urgence telles que celles que nous voyons aujourd'hui. Il y a près de deux ans et demi que nous avons présenté ce projet à la SDCB. Les responsables de la société, notamment le conseil d'administration, la direction et certains ingénieurs, ont accepté de travailler avec le syndicat pour que ce projet voie le jour. La SDCB est même allée jusqu'à prendre certaines parties de notre plan pour les faire vérifier par U.S. Bureau of Mines.

Lorsque M. Shannon est arrivé à la tête de la société en 1995, la coopération au sujet de la mine Donkin a cessé. C'est à peu près en 1995 que l'on a lancé le projet Donkin, que l'on a entrepris la démarche qui nous amène ici aujourd'hui. Nous sommes déçus que la direction ait pris une telle décision.

Étant donné le manque de confiance, qui maintenant a eu largement le temps de s'envenimer, la situation à la SDCB est devenue invivable. Certes, il ne peut y avoir de relations parfaites entre les syndicats et la direction. Nous avons fait tout notre possible ces deux dernières années pour que les relations avec la SDCB soient plus positives.

L'UMWA est allée rencontrer à Ottawa Alfonso Gagliano, qui était alors ministre du Travail. Nous sommes restés en contact avec le personnel de son bureau parce que nous avions le désir, et nous avons tenté, de mettre en place un programme intitulé Relations par objectifs, par l'entremise du gouvernement fédéral, pour que celui-ci soit informé de l'intérieur et soit le premier au courant de ce qui se passe au niveau des relations du travail à la SDCB.

George White, le président de la Société de développement du Cap-Breton, a envoyé une lettre au ministre, ou au bureau du ministre, pour lui dire que la SDCB préférait agir comme elle l'entendait. S'il lui fallait remettre de l'ordre dans l'entreprise, elle préférait le faire à sa manière. C'est ainsi qu'elle a procédé, et elle a engagé l'entreprise Ernst and Young à grand frais pour la Société. Ce plan s'intitule Au-delà de l'an 2000. C'est un nouveau plan auquel nous avons affaire. Ce n'est pas ce que le syndicat souhaitait. Ce n'est pas ce qu'avait appuyé le syndicat.

L'une des choses qui nous paraît négative, en tant que dirigeants du syndicat, dans les relations de travail et les conséquences qui en découlent, c'est que nous avons l'impression que la SDCB s'efforce d'écarter les dirigeants au niveau du district et de traiter directement avec les dirigeants locaux sur nombre de questions de portée générale. De plus, une lettre d'entente intitulée «Partenariat» a été rédigée. C'est la première lettre d'entente de notre convention collective, et nos membres l'ont acceptée. C'est un document très détaillé qui préconise la collaboration. On y laisse entendre que nous sommes prêts à collaborer avec l'entreprise sur pratiquement tous les sujets si cette dernière, en contrepartie, nous respecte et nous traite avec dignité. C'est l'engagement que nous avons pris envers la Société.

Les problèmes de la SDCB sont très complexes, mais une bonne partie d'entre eux peuvent être attribués au fait que les responsables de la SDCB ont omis de rendre des comptes et de se montrer responsables envers les mandataires en dernière analyse de la SDCB, en l'occurrence les contribuables canadiens. Bien souvent, des décisions importantes ont été prises par le conseil d'administration et la direction de la SDCB sur la foi d'informations très lacunaires. Ce fut le cas de l'accord portant sur la mine Donkin et aussi celui de l'accord avec la Nova Scotia Power; c'est aussi ce qui s'est passé lorsqu'on a arrêté les pompes à Quarry Point, ce qui a amené l'inondation de la mine Lingan au-dessus de la mine Phalen. Il nous faut maintenant consacrer des millions de dollars par an au pompage dans la mine Phalen.

Toutes ces décisions ont été prises par la direction. Les syndicats n'ont pas eu leur mot à dire. Par contre, lorsque les syndicats se réunissent avec les responsables de la Société pour essayer de régler efficacement ces questions, les réponses de la SDCB sont très vagues. Les responsables restent évasifs et cherchent constamment à écarter la vérité lorsque cela ne correspond pas à leurs objectifs.

Les principaux indicateurs du programme quinquennal de la SDCB sont la production, la mise en valeur et les stocks. Aucun de ces objectifs n'a été atteint. Lorsqu'on a demandé à la SDCB une analyse rendant compte de ces questions et des résultats correspondants, la direction a cherché avant tout à nous égarer; elle a renié ses engagements. Elle n'a pas respecté ses objectifs.

Si l'on en juge par les audiences qu'a tenues le Sénat en 1996, nous ne comprenons pas quelle est la position de la Société. Elle a indiqué que des plans d'urgence seraient prévus pour compenser les problèmes de la mine Phalen et que les objectifs seraient respectés. Il ne devait pas s'agir à ses yeux d'un plan mis en oeuvre pour des raisons de commodité, mais d'un plan qu'il était possible de réaliser. En dépit du fait que les mineurs, tous les syndicats et la plupart des gens concernés souhaitaient sincèrement atteindre ces objectifs, cela ne s'est pas fait. Je crois que la Société et que le gouvernement fédéral sont mal placés pour nous demander d'y croire encore.

La SDCB ne peut réussir que si des gens compétents sont en place. Seul un bon gouvernement peut faire avancer les choses. Il convient que le gouvernement fédéral revoit les témoignages apportés lors des trois audiences sénatoriales sur la Société de développement du Cap-Breton et fasse le nécessaire pour garantir un avenir à long terme à la SDCB et aux familles du Cap-Breton qui vivent de l'industrie du charbon.

On ferait un pas dans la bonne direction en revoyant la vérification quinquennale effectuée par le vérificateur général. On a demandé au ministre de publier ce document. Il pourrait être utile que le Sénat l'examine. Nous croyons savoir que seul le conseil d'administration de la SDCB a pu le consulter. Je ne sais pas exactement pour quelle raison. Je termine là mon exposé, mais je sais qu'on va nous poser des questions sur la mine Donkin et sur le gaz de l'île de Sable.

Le sénateur Butts: Un point commun, sur lequel tout le monde a insisté, c'est la nécessité de la mise en valeur de la mine Donkin. Ai-je raison de dire cela? Vos témoins n'appartiennent pas tous au même syndicat, mais ils sont unanimes à le réclamer. Vous êtes tous les trois d'accord. Est-ce que cela a quelque chose à voir avec les difficultés actuelles de la mine Phalen?

M. King: Les problèmes de la mine Phalen n'ont rien à voir avec l'ouverture de la mine Donkin. Les problèmes de la mine Phalen sont des problèmes géologiques et miniers. Ils sont graves. M. Drake peut vous parler du projet; il y a les mineurs, mais l'ouverture de la mine Donkin est un projet de rechange.

Le sénateur Butts: Il y a donc un lien.

M. King: Si la mine Phalen ferme demain, les employés de la SDCB seront en difficulté. Nous n'aurons plus d'emplois.

Le sénateur Butts: Il y a donc urgence.

M. Drake: On a publiquement laissé entendre que la tentative faite par les syndicats pour que l'on ouvre la mine Donkin est une réaction intempestive due à la situation dans la mine Phalen. Il n'en est rien. Nous préconisons l'ouverture de la mine Donkin depuis 15 ans.

Lors des trois années et demie qui viennent de s'écouler, l'UMWA a élaboré un projet d'exploitation à petite échelle de la mine Donkin. Voilà trois ans que l'on en parle constamment dans le public. La question de la mine Donkin est très importante. Je le répète, 13 000 personnes de la région ont signé une pétition visant à faire ouvrir la mine Donkin dans le cadre de l'exploitation de trois mines.

Aujourd'hui encore, on continue à mettre l'accent sur la mine Donkin. La question n'est pas devenue davantage d'actualité du fait des problèmes enregistrés à la mine Phalen, parce que presque tout le monde autour de cette table prévoyait au cours de ces trois dernières années et demie qu'il y aurait des difficultés à la mine Phalen. Ce n'est pas nouveau. Nous avons rencontré ces difficultés à peu près à la même profondeur, soit à 700 mètres, il y a bien des années au puits no 26, et avant que la mine Lingan ne soit fermée lorsque nous avons atteint à peu près la même profondeur, nous commencions à éprouver ces mêmes difficultés. Nous pouvions déduire ces problèmes à partir de l'information que nous avions recueillie il y a 10 ou 15 ans au puits 26 et à la mine Lingan.

Le sénateur Butts: Ne croyez-vous pas cependant que c'est devenu plus urgent?

M. Drake: Oui.

M. Grant: On parle d'essayer d'ouvrir la mine Donkin, et j'aimerais à ce propos revenir sur ce qui s'est passé dans notre industrie. En 1973, nous avons perdu le puits no 12 en raison d'un incendie. Nous avons perdu tout l'équipement. La mine a été évacuée immédiatement. En fait, l'un des mineurs est resté sous terre. Il y est toujours. En 1984, nous avons perdu le puits no 26 en raison d'un incendie. Aucun équipement n'a pu en être retiré. En 1994, la mine Lingan a été perdue en raison d'une inondation et la même chose s'est produite. Si jamais la mine Phalen devait être fermée en raison d'éboulements ou d'une explosion de gaz, on pourrait au préalable retirer tout le matériel, y compris le treuil de surface. Il y a aussi un treuil de surface à la mine Lingan. Ce matériel a énormément de valeur.

Si l'on ouvre la mine Donkin, tout l'équipement utilisé actuellement à la mine Phalen peut être récupéré -- ainsi, les machines d'abattage du charbon, les machines de percement et les gros transformateurs électriques, tout ce matériel utilisé sous terre pourrait être transféré au projet de la mine Donkin au cas où l'on perdrait la mine Phalen en raison d'un incendie, d'une inondation ou d'une autre catastrophe, alors que sinon le coût de ce matériel serait énorme comparativement à ce qu'il était il y a quelques années. Le fait est que cet équipement est là et qu'il vaut des millions de dollars.

Le sénateur Forrestall: Laissez-vous entendre par là que ce serait la solution la plus sage, retirer dès maintenant l'équipement de la mine Phalen, faire en sorte que la SDCB conserve la mine Donkin et chercher à savoir ce qu'elle contient?

M. Grant: La SDCB va faire un certain nombre de forages d'exploration et elle est d'ailleurs prête à commencer. Si les forages révèlent que les conditions géologiques ne se prêtent pas à la poursuite de la mise en valeur de la mine Phalen, la Société saura alors vers quoi se retourner. Elle pourra récupérer l'équipement, valant des millions de dollars, qui se trouve dans cette mine, et lancer le projet de la mine Donkin. Je ne cherche pas à faire fermer la mine Phalen, mais s'il le faut, il le faut, et nous devrons l'accepter à un moment donné. En supposant toutefois que si l'on ne perd pas la mine Phalen en raison d'un incendie ou d'une inondation, si on la perd en raison d'un éboulement ou d'une explosion de gaz, nous pourrons retirer cet équipement sans aucune difficulté et s'en servir dans la mine Donkin.

Le sénateur Forrestall: Vos collègues sont-ils d'accord avec cette solution?

M. Drake: Ces dernières années, l'exploitation de la mine Phalen a eu des succès divers selon les conditions géologiques. Cette situation va se poursuivre tant que l'exploitation de la mine Phalen sera possible, viable et rentable. Il n'en reste pas moins qu'à un moment donné, si nous continuons à rencontrer ces difficultés, quelqu'un, pas la fatalité mais probablement un comptable, va nous dire que l'exploitation de la mine Phalen n'est plus rentable. Si cela se produit dans les trois ou cinq années à venir, il n'y aura aucune solution de rechange si la mine Donkin n'est pas prête.

Que va-t-il advenir des 1 700 personnes qui travaillent à la Société de développement du Cap-Breton? Que va-t-il advenir des 6 000 personnes et des familles qui vivent de l'exploitation des mines de charbon du Cap-Breton? Rien n'est prévu pour les aider. Il faut que la mine Donkin soit ouverte sous l'égide de la SDCB. Une société privée qui n'offre que 250 emplois n'est pas la solution. La mine Phalen restera finalement en exploitation tant qu'elle offrira des garanties de sécurité et qu'elle sera économiquement rentable. Ce ne sont pas les syndicats qui la feront fermer, ce sera quelqu'un muni d'un crayon.

M. McEachern: La mine Donkin est sur la sellette. Si vous prenez le meilleur scénario de la SDCB et si rien ne change à la mine Phalen, il reste peut-être entre cinq et sept années d'activité. Dans cinq ou sept ans, si la mine n'est pas mise en exploitation, que va-t-on faire du personnel? C'est plus urgent que jamais.

Le sénateur Butts: Cet automne n'est pas comme les autres. J'ai été frappée de voir à quel point vous avez su surmonter l'adversité auparavant, relancer la production et satisfaire toutes les exigences. Les mineurs et les travailleurs de la SDCB ont fait preuve d'une grande réussite. Toutefois, l'attitude est aujourd'hui complètement différente; ai-je raison de dire cela?

M. Drake: Tout le monde reste déterminé à faire avancer les choses, mais lorsqu'on a un vieux tacot tout rafistolé et que l'on emprunte la piste Cabot, on ne va pas toujours arriver au bout. La mine Phalen a déjà été bien rafistolée par le passé. Nous nous efforcerons de continuer. Nous continuerons à le faire mais, à un moment donné, nous aurons besoin d'une nouvelle voiture.

Le sénateur Butts: C'est donc pour vous bientôt le moment d'acheter une nouvelle voiture?

M. Drake: Oui.

M. King: Nous avons ici une jetée toute neuve qui n'a pratiquement jamais été utilisée parce que nous avons abandonné le marché à l'exportation. Si la SDCB a abandonné le marché à l'exportation, c'est en raison des difficultés de la mine Phalen. Nous ne pouvions pas extraire le charbon destiné à l'exportation à l'étranger. Nous avons perdu d'énormes débouchés à l'étranger. Si toutefois la mine Phalen ferme pour être remplacée par la mine Donkin, nous pourrons relancer le marché à l'exportation. La SDCB amortira ses coûts très rapidement.

Environ 4 millions de dollars de marchandises étaient auparavant exportées par l'intermédiaire de cette jetée, mais aujourd'hui il n'y a plus rien. Cette jetée a coûté 15 millions de dollars; elle a été construite pour accueillir de gros navires et aujourd'hui elle ne sert plus à rien. C'est du gâchis.

Le président: On peut fort bien monter la côte dans un tacot qui ne tourne pas très bien, si l'on sait qu'une nouvelle voiture nous attend là-haut -- et à condition d'être certain que la nouvelle va démarrer. En à juger par le rapport Boyd et par d'autres sources, le charbon de Donkin sera très difficile à extraire. Il pourrait aussi être très difficile à commercialiser. Pour préserver la crédibilité du comité, et celle des personnes que vous représentez, il est extrêmement important de ne pas ouvrir la porte à des «experts» qui pourraient affirmer que la couche de Donkin présente des caractéristiques telles qu'il vous faudra l'extraire en utilisant une technologie particulière, dont on ne sait même pas si elle donnera des résultats.

M. Brendon MacIntyre, United Mine Workers of America: La crédibilité est le noeud du problème. Tous les employés que nous représentons, nos membres et tous ceux qui sont ici présents, croient que l'exposé que vous a présenté la société n'a aucune crédibilité si Donkin n'en fait pas partie. Le plan de la société précisait que la mine Phalen resterait en exploitation pendant encore 15 ou 20 ans, mais six ou huit mois plus tard la Phalen éprouvait de graves difficultés. La mine existe depuis à peu près sept ans, dix si l'on pousse un peu. L'exploration et toutes ces choses sont basées sur la spéculation. Est-ce que l'on peut vraiment continuer à planifier l'industrie du charbon en se fondant sur des spéculations? Donkin doit jouer sur les marchés outre-mer. Cela fait partie de la crédibilité de notre plan.

Le président: Vous avez répondu de ce point de vue, mais simplement pour dire que Donkin réglera tous nos problèmes si nous investissons 100 millions de dollars ou une somme quelconque, peut-être 400 millions de dollars, pour vérifier s'il s'agit d'une solution de rechange crédible. Il y a bel et bien du charbon là-bas, mais on peut se demander si cette réponse est suffisante.

M. Drake: Nous sommes des mineurs; nous faisons bien notre métier. Pour l'aspect technique, nous demanderons l'avis d'un ingénieur. J'ai certains renseignements ici. J'espère qu'ils nous permettront de régler la question. Si vous lisez les rapports des audiences du Sénat, vous constaterez que ce point a été discuté en détail.

J'ai en main un rapport de 1979 intitulé «Energy...A Plan for Nova Scotia». Le sénateur Buchanan le connaît certainement très bien. On y affirme que:

La plus importante mise en valeur des terrains houillers du Cap-Breton viendra de la mine Donkin.

M. Joseph Shannon a collaboré aux travaux du comité de planification, à l'époque, ainsi qu'un dénommé William S. Shaw. La Société d'ingénierie Montréal a réalisé en 1979 une étude technique sur le bloc Donkin, et les auteurs ont déclaré:

Le bloc Donkin ne présente aucune anomalie majeure; les risques à Donkin ne diffèrent pas de ceux que comporte tout autre projet du genre.

Nous avons ouvert 100 mines de charbon en 300 ans au Cap-Breton, et d'après les auteurs de l'étude cette mine n'est pas différente des autres.

En 1981, le cabinet Kilborn Engineering réalisait une autre étude pour le compte de la SDCB au sujet du bloc Donkin. Dans cette étude, on concluait:

La zone ne présente aucune faille notable, et on pourrait s'attendre à une production annuelle de 3,8 millions de tonnes, qui serait économiquement réaliste, si la mine Donkin est mise en exploitation.

En 1984, l'Associated Mining Consultants Limited soutenait que:

Une exploitation à petite échelle du site Donkin ne nécessiterait que des installations de surface minimales. Il conviendrait de prévoir une exploitation sélective, pendant une période d'essai, au rythme de 500 000 tonnes par année, pour passer ensuite de façon ordonnée à une exploitation par longue taille.

Ce sont des aspects que nous faisons valoir depuis trois ans et demi.

Il faut voir ce que l'on disait dans le rapport annuel de la SDCB en 1985. M. Joe Shannon était à l'époque président du conseil d'administration et il était président intérimaire de la société:

L'analyse des 2 700 tonnes de charbon extraites du projet Donkin-Morien était particulièrement encourageante.

L'échantillon indiquait que l'exploitation sélective -- c'est-à-dire en laissant une partie de la couche de charbon comme plancher et comme toit et en exploitant 70 p. 100 d'une veine de 3,4 mètres -- permettrait de ramener à un pour cent la teneur en soufre.

Hier, le sénateur Butts a demandé si les techniques d'exploitation sélective étaient dangereuses. En 1995, un rapport intitulé «Assessment of Horizon Control» a été produit par Travaux publics Canada. On y signale que:

Un certain nombre de techniques en cours de développement pourraient permettre une exploitation sélective à Donkin.

C'est ce qu'affirmait en 1979 Alan Craven, de P. Engineering, AMCL. En 1984, M. Craven a collaboré avec l'Associated Mining Consultants à la rédaction d'un rapport sur Donkin. En 1997 M. Craven déclarait:

Donkin est un superbe bloc de charbon et il faut l'exploiter. Il ne présente pratiquement aucune faille et, d'après les indicateurs, pourrait se prêter à une exploitation pendant 10 ou 15 ans. Le charbon de Donkin aurait une faible teneur en soufre.

On pratique l'exploitation minière sélective au Cap-Breton depuis 100 ans. Cela n'est pas nouveau, ni pour nous ni dans le monde.

La couche de Donkin est haute de 12 pieds. Il y a 12 pieds de charbon là, près du havre. La partie supérieure de la couche présente une forte teneur en soufre, et la partie inférieure aussi. Dans le centre, le charbon contient très peu de soufre. Lorsque la SDCB collaborait avec nous dans ce dossier, nous avons reçu des données en ce sens. C'est un processus très simple. Vous pouvez le mener sans aucun équipement perfectionné, en laissant au plafond de la couche entre un pied et demi et deux pieds de charbon à forte teneur en soufre. Dans la partie centrale, quelque sept pieds, le charbon serait de bonne qualité. La difficulté vient du plancher, et il existe des techniques déjà au point ou en cours de développement pour y remédier.

Pour exploiter Donkin, on pourrait utiliser les installations de lavage de Victoria Junction. Si le charbon est mélangé et lavé à l'usine de Victoria Junction, la teneur en soufre sera encore réduite. En outre, l'usine de Point Aconi applique l'une des techniques les plus récentes. Cette technique est appelée combustion en lit fluidisé, et elle permet de réduire encore plus la teneur en soufre. Dans le monde entier, les industries houillères mettent au point des techniques vertes. C'est l'une des recommandations que nous ferons ici à la fin de la journée.

À une certaine époque, on fondait beaucoup d'espoir sur la mine Donkin. Il y a de nombreuses années, on affirmait que cette mine était tout à fait semblable aux autres mines exploitées au Cap-Breton, mais le climat politique a changé, et personne ne voulait écouter tout ce que les syndicats affirmaient avec logique. On nous a mis des bâtons dans les roues, on a rejeté nos idées, mais les arguments présentés étaient très faibles et nous ne croyons pas qu'ils résisteraient à un examen.

Nous avons soumis l'offre au président du conseil et président intérimaire de la SDCB à l'époque, M. Shannon, pour susciter un débat public. Nous n'avons reçu aucune réponse. Toutefois, l'argument relatif à l'exploitation sélective et à la qualité du charbon de Donkin, en autant que nous le sachions, n'a guère de valeur. J'espère que cela répond à vos questions.

Le président: Est-ce qu'une analyse des coûts a été réalisée pour déterminer à peu près ce que nous devrions dépenser pour arriver au point où il serait décidé de mettre en valeur la mine Donkin? On a déjà consacré 80 millions de dollars à creuser quelques puits de mine et des galeries, et cetera, mais je suppose qu'à partir de maintenant, il faudra dépenser encore plusieurs millions pour parvenir à un point où, effectivement, la situation est viable. Est-ce que vous avez des chiffres à nous proposer?

M. Drake: M. Steve Farrell, président de Donkin Resources Limited, a collaboré avec UMWA en 1994, en 1995 et en 1996, pour élaborer un plan applicable à la Donkin. L'investissement initial, pour la première année, serait d'une dizaine de milliers de dollars. Avec cet argent, on érigerait une infrastructure de surface à très petite échelle, pour les hommes, on viderait les puits et on y rétablirait la sécurité. Il faut assurer l'approvisionnement en air pur, en air comprimé, en eau douce, et veiller à ce que les chemins soient en bon état. Il faudrait prévoir pour cela de 12 à 14 mois. M. Farrell est arrivé aux mêmes chiffres de son côté.

Au cours de la deuxième année, les coûts s'élèveraient sans doute à 25 millions de dollars au titre de l'achat d'équipement et de choses semblables. Nous savons tous à peu près de quel équipement la SDCB dispose, l'équipement qu'elle possède déjà et que nous pourrions utiliser dans la mine Donkin. Il y en a une bonne quantité. Les coûts s'en trouveraient notablement réduits. Au cours de la troisième année, il faudrait sans doute prévoir de 40 à 50 millions de dollars. Le coût total pour une exploitation minimale de Donkin s'établirait entre 100 et 125 millions de dollars sur une période de trois ans à trois ans et demi.

M. Farrell a mûrement réfléchi à ces chiffres. Il nous a fallu huit ou neuf mois pour obtenir l'information, puis nous l'avons présentée au conseil d'administration. À l'époque, les membres du conseil collaboraient avec nous à ce projet.

Le sénateur Buchanan: Je suis parfaitement d'accord avec M. Drake au sujet de tout ce qu'il vient de dire. Les études dont il parlait se trouvent toutes dans le cahier qu'il a devant lui. Ces études ont été commandées par nous, en 1979-1980. Il est important pour les membres du comité de tenir compte de ceux qui participaient à l'étude. Il ne s'agissait pas d'une étude d'amateur. Elle a été réalisée sur une longue période, en collaboration avec certains des ingénieurs des mines les plus compétents au pays, pas seulement au Cap-Breton ou en Nouvelle-Écosse, mais au Canada. Ces personnes ont consacré de nombreux mois au projet. La Société d'ingénierie Montréal et la Kilborn Engineering sont deux des meilleurs cabinets de génie au pays. C'est pourquoi nous leur avons passé cette commande.

Bill Shaw, d'Antigonish, est sans doute l'un des géologues les plus connus au Canada Atlantique pour ce qui est du charbon et du gaz offshore. Cela, personne ne le conteste. Il a dirigé un groupe de travail et le groupe qui a produit le rapport.

Par la suite, en 1981, la Kilborn Engineering a pris le relais. En 1984, c'est l'Associated Mining qui a été consultée. Alors pour ce qui est de déterminer la faisabilité de Donkin, cela a été fait. Il n'y a plus à discuter. C'est pourquoi la province, en 1979, a acheté un bateau de forage pour repérer les couches dans les champs houillers Sydney, à Donkin. Ces travaux ont été réalisés au coût de six millions de dollars.

Puis, sous les auspices du gouvernement fédéral, en particulier au tout début, dans les années 80, à l'époque d'Allan J. MacEachen, de concert avec le gouvernement provincial, nous avons veillé à ce que les deux puits soient construits au coût de 80 millions de dollars sous la direction de la Société d'ingénierie Montréal, de la Kilborn et d'autres. La faisabilité du projet Donkin est indéniable.

J'étais à Antigonish dimanche dernier et j'ai rencontré Bill Shaw pendant plus de deux heures et demi. Il est encore parfaitement convaincu que le projet Donkin est réalisable. Ce que M. Drake a dit au sujet des couches est tout à fait exact. Vous le trouverez dans les rapports. Le plancher et le plafond ont une forte teneur en soufre. Le centre est excellent, car la teneur en soufre y est faible. Le charbon du plancher que vous allez extraire peut être lavé à l'usine de Victoria Junction, et vous en tirez un très bon produit. Il n'est pas difficile d'extraire ce charbon, d'après la Kilborn, la Société d'ingénierie Montréal et l'Associated Mining -- c'est ce que tout le monde dit.

Je ne comprends pas pourquoi il y a tant de personnes aujourd'hui qui remettent en question la faisabilité de la mine Donkin. Ce gisement est incroyablement riche. Il ne s'agit pas de quelques millions de tonnes de charbon, mais bien de 100 millions de tonnes de charbon exploitable, sinon plus. C'est faisable, et le charbon est là.

J'ai beaucoup d'estime pour le président actuel du conseil de la SDCB. C'est un excellent homme d'affaires, originaire du Cap-Breton et qui connaît le Cap-Breton. Dans les années 80, il a affirmé que le projet Donkin était tout à fait réalisable, et que l'analyse des 2 700 tonnes de charbon -- et tous les rapports disaient la même chose à l'époque -- n'était pas seulement encourageante, elle prouvait qu'il s'agissait d'un excellent charbon. Nous devrions cesser de discuter de la faisabilité du projet Donkin. Donkin est réalisable et Steve Farrell, un des ingénieurs des mines les plus respectés du Cap-Breton, l'a affirmé; il accepte les conclusions de tous ces rapports, ceux de 1979, de 1981 et de 1985.

Certains ont cru que l'inondation des puits sonnait le glas de la mine Donkin. C'est plutôt ce qui l'a sauvée. Il a été prouvé qu'il fallait inonder les puits pour stopper la détérioration. Comme M. Drake et d'autres le savent maintenant, cette eau peut être pompée en quelques mois, puis l'exploitation peut commencer. C'est à ce point que nous en sommes maintenant. Lorsque l'eau est extraite, le charbon peut être exploité. Lorsque vous commencez à mettre en valeur le reste de la mine, vous vendez le charbon extrait à l'étape du développement et vous utilisez les profits pour réduire les coûts totaux, c'est aussi ce que disent tous les rapports que M. Drake a devant lui. Alors cessons de tergiverser.

Trois menaces concrètes planent sur la SDCB et sur l'industrie houillère du Cap-Breton, et par conséquent sur l'industrie houillère de la Nouvelle-Écosse. La première découle des problèmes de Phalen. Les témoins et les hommes et les femmes qu'ils représentent méritent des félicitations pour ce qu'ils ont fait à Phalen ces dernières années. Ils sont parvenus à sauver la mine Phalen, mais on ignore pour combien de temps. Comme me le disait Bill Shaw dimanche dernier, ces coups de toit peuvent s'avérer très dangereux, et il faut s'attendre à de nouvelles chutes. Celle qui s'est produite il y a deux ans était grave, mais elle aurait pu être pire. Alors la mine Phalen constitue une menace.

La seconde menace vient du manque d'initiative au sujet de la nouvelle mine Donkin. C'est un reproche que l'on peut adresser au gouvernement et à la SDCB. Je ne parle pas par partisanerie politique, car le gouvernement précédent a aussi évité la question. Nous l'avons poussé à prendre une décision, mais sans succès.

La troisième menace en ce qui concerne l'avenir du charbonnage au Cap-Breton et l'avenir de la SDCB vient du gaz naturel qui, en raison des coûts, pourrait remplacer l'exploitation houillère dans la région. J'affirme depuis longtemps que l'avenir de la SDCB est tributaire de la rentabilité de la mine Donkin dans les années à venir. Il y a deux semaines encore, le premier ministre MacLellan affirmait la même chose: l'avenir de la SDCB et l'avenir du charbonnage au Cap-Breton sont liés à la mine Donkin.

Il y a tant de personnes qui ont déclaré cela, et tant de rapports produits par les ingénieurs et les géologues les plus compétents qui soient le corroborent, que je ne comprends tout simplement pas pourquoi rien ne se fait. En outre, aucun de ces rapports n'indique des coûts de l'ordre de 400 millions de dollars. Si vous examinez les sommes prévues dans ces rapports, vous constaterez qu'il faudrait moins de 200 millions de dollars pour mettre en valeur le reste de la mine Donkin.

Est-ce exact, M. Drake?

M. Drake: Tout est fonction de la taille de l'exploitation que vous envisagez. Steve Farrell et moi-même avons discuté à fond de l'exploitation de la mine Donkin et de ce chiffre de 400 millions de dollars que certains avancent. M. Farrell a affirmé ce qui suit:

Toute analyse de coût réaliste de la mine Donkin doit tenir compte du fait que l'époque des mégaprojets est révolue. La mine Donkin peut être mise en valeur à petite échelle pour moins de 100 millions de dollars si nous utilisons le matériel que la SDCB possède déjà. Les sommes nécessaires à une exploitation complète peuvent être injectées selon les besoins, à long terme. Il est tout à fait farfelu de suggérer qu'il en coûterait 400 millions de dollars pour exploiter la mine Donkin.

Ceux qui appuient la vente de la mine Donkin n'ont véritablement fourni aucune preuve concrète ni aucune donnée critique pour appuyer l'hypothèse que la SDCB pourrait se maintenir à long terme sans la mine Donkin.

Est-ce qu'il vaudrait la peine de montrer quelques diapositives traitant simplement de la mine Donkin?

Le président: Je n'y vois pas d'objection, mais je vais d'abord laisser le sénateur Buchanan poser sa question.

Le sénateur Buchanan: L'an dernier, Joe Shannon et George White ont déclaré que l'espérance de vie de la mine Phalen était de 12 à 20 ans. C'était l'an dernier. La semaine dernière, à la télévision, je les ai entendus dire que cette espérance de vie n'était plus que de cinq à 12 ans -- plus probablement de sept ans. Si l'espérance de vie était de cinq ans, la Nova Scotia Power Corporation dirait simplement qu'il faut trouver un autre combustible pour les centrales de Lingan, de Point Aconi et de Point Tupper, parce qu'il n'y aura pas assez de charbon. Cela sonnerait le glas de l'industrie houillère, et c'est pourquoi le premier ministre MacLellan a affirmé la semaine dernière que l'avenir de l'activité houillère de la SDCB était tributaire de la mine Donkin. C'est ce que nous disons depuis des années, mais personne ne nous écoute.

La SDCB compte une main-d'oeuvre d'environ 2 200 personnes qui travaillent à l'extraction du charbon au Cap-Breton. Multiplié par un facteur de 3,5 en emplois indirects, cela donne plus de 7 000 emplois. Multiplié par le nombre de membres par ménage, cela donne plus de 20 000 personnes qui, dans le Cap-Breton industrialisé, seront touchées si l'industrie houillère disparaît d'ici cinq ou six ans parce que rien ne viendra remplacer la Donkin ou qu'on se convertira au gaz naturel. C'est un aspect qu'il ne faut pas oublier.

Est-ce exact, M. Drake?

M. Drake: C'est assez exact.

Permettez-moi de vous montrer quelques diapositives à ce sujet. L'une présente les marchés de la SDCB. En passant, il y a une copie de cette diapositive dans la trousse que nous vous avons fournie. Une partie de la stratégie de commercialisation ou de l'étude de M. Farrell englobe le marché de l'Europe de l'Est. Le Cap-Breton offre le port d'Amérique du Nord le moins éloigné des marchés d'Europe de l'Est. Nous commercialisons notre charbon dans tous ces pays, où nous entretenons d'excellentes relations depuis 15 ou 18 ans. Toutefois, M. Farrell ne se rend pas là-bas simplement pour examiner les marchés qu'occupe déjà la SDCB. Ces marchés resteront fidèles à la SDCB, et la Donkin devrait elle aussi demeurer au sein de la SDCB.

La deuxième diapositive est une photo du puits à Donkin. Il s'agit de la face, qui est à quelque 11 000 ou 12 000 pieds de profondeur. À cet endroit exact, dans la mine, dans le havre, il y a deux puits identiques à cette photo. Ces puits ont 25 pieds de diamètre. Ce sont des puits très modernes. Essentiellement, il s'agit d'en pomper l'eau et de rétablir la sécurité avant de reprendre l'exploitation. Il faudrait à peu près trois mois pour l'étape du pompage et de huit à dix mois pour établir une zone dans laquelle on peut se déplacer en toute sécurité.

La dernière diapositive est intitulée «L'avenir du charbon au Cap-Breton». Elle portait auparavant le titre de «Ressources houillères de la Nouvelle-Écosse», mais nous l'avons modifié. Dans la partie jaune du diagramme en secteurs, on peut lire «Remaining, 278». C'est-à-dire qu'il reste 278 millions de tonnes de charbon, et cela englobe les comtés de Pictou et d'Inverness ainsi que d'autres régions de la Nouvelle-Écosse où le charbon est exploité depuis 300 ans. La partie en rose du graphique, où l'on peut lire «Other Sydney, 850», indique qu'il reste 850 millions de tonnes de charbon dans les couches des terrains houillers Sydney, que nous exploitons depuis 1685. Nous avons ouvert 110 mines de charbon dans les terrains houillers appelés «Other Sydney», comme on le constate dans la partie rose.

Nous avons, je le répète, réussi à ouvrir 110 mines de charbon dans ce secteur. Nous avons commercialisé et vendu tout ce charbon. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas ouvrir une autre mine de charbon dans les mêmes terrains houillers et en commercialiser le produit sans difficulté.

Au bas du graphique, dans la partie bleue, on voit la Donkin, soit 1,578 milliard de tonnes de charbon. On estime que ce charbon peut être exploité à 50 ou 60 p. 100, ce qui représente plusieurs millions de tonnes de charbon que nous pouvons extraire dans les terrains houillers de Donkin.

La Donkin est donc un projet à long terme qui nous permettra de préserver l'industrie et de garder tous ces gens au travail; mais nous ne parlons pas seulement d'emplois au Cap-Breton. Le charbon est une source d'énergie dans la province de la Nouvelle-Écosse. Devrions-nous compter uniquement sur le gaz naturel? Cela n'est pas logique sur les plans économique ou commercial. À notre avis, la mine Donkin est viable.

Le président: Par curiosité, la plupart des sénateurs qui sont membres du comité viennent aussi du Canada Atlantique; nous savons donc ce que c'est que de vivre à la ferme, de compter sur le poisson, et cetera. Si ce que vous dites est exact, et je le crois, et que nous avons déjà exploité et réussi à commercialiser tout ce charbon, pourquoi les contribuables canadiens ont-ils l'impression que l'industrie houillère du Cap-Breton est un gouffre dans lequel ils doivent constamment jeter de l'argent? De toute évidence, si cette industrie avait connu du succès au fil des ans, comme nous le souhaitions tous -- indépendamment des erreurs de gestion, des couches peu rentables ou quoi que ce soit --, nous ne serions pas dans cette situation; nous aurions un excédent et nous aurions l'argent nécessaire pour mettre en valeur la mine Donkin.

Qu'y a-t-il de nouveau, maintenant, qui me permettrait de me présenter devant mes pairs et devant la population et d'affirmer, «Très bien; il nous faut encore 100 millions de dollars pour exploiter cette ressource et en faire une entreprise économique rentable.» Notez que nous parlons d'entreprise économique, pas d'entreprise socio-économique.

M. Drake: Premièrement, un des grands problèmes de la SDCB c'est le manque de responsabilité pour des décisions qui coûtent régulièrement des millions de dollars aux contribuables. La SDCB doit donc d'abord faire enquête pour découvrir où va l'argent. Nous avions 168 millions de dollars en 1990, et la SDCB était presque autosuffisante. Nous touchions au but en 1995 quand le contrat avec la Nova Scotia Power a été négocié, et nous avons perdu 30 millions de dollars. C'était encore un coup dur, cette perte de 30 millions de dollars.

Le contrat de la Nova Scotia Power précise qu'en vertu des conditions du contrat de la SDCB, le prix du charbon destiné aux centrales de Lingan, de Point Tupper et de Point Aconi sera réduit annuellement, de sorte que le prix à compter du 1er janvier 1997 est de 18 p. 100 inférieur au prix payé pour le charbon le 31 mars 1995.

L'ancienne direction de la SDCB voulait porter la question devant les tribunaux. Nous avions fait notre part; tous les syndicats et les employés de confiance de la SDCB avaient fait leur part pour parvenir à l'autosuffisance. Et voilà que l'on négocie ce contrat et que l'on accepte des réductions de prix si rapides que nous ne croyons pas possible d'arriver à payer les factures.

Nous n'avons pas pris les décisions relatives aux 30 millions de dollars. Nos techniques d'extraction du charbon sont sans doute les meilleures au monde. Nous sommes des spécialistes de ce domaine, c'est notre métier. Si nous avions une équipe de direction et un conseil d'administration qui devaient rendre des comptes aux contribuables du Canada, l'industrie serait rentable. Nous ne pouvons pas continuer de jeter par la fenêtre des millions de dollars en raison de mauvaises décisions, comme celles touchant la mine Donkin, le contrat de la Nova Scotia Power et les questions de ce genre.

L'industrie houillère du monde entier élabore des plans sur dix ou 15 ans, parfois même sur 30 ans comme on l'a vu hier. Si vous êtes le fournisseur d'une société énergétique comme la Nova Scotia Power et que vous élaborez un plan quinquennal alors que la centrale, elle, est construite pour durer 30 ans, quelque chose ne va pas. Les plans de la SDCB changent chaque année. Chaque fois, la SDCB modifie son orientation. Nous ne pouvons plus la suivre. Si nous avions établi une orientation pour les 10 ou 15 prochaines années, la mine Donkin n'est peut-être pas la solution, elle ne règle peut-être pas tous les problèmes de l'île du Cap-Breton, mais elle nous aiderait à stabiliser l'économie du Cap-Breton et nous ferions des progrès. C'est un argument de poids.

Le sénateur Buchanan: Je suis d'accord avec M. Drake. Si vous reprenez toutes ces études, si vous transposez les coûts d'immobilisation de la mine en dollars de 1997, l'amortissement de cet investissement et les coûts d'exploitation de la mine seront couverts par la vente du charbon.

L'un des problèmes des mines du Cap-Breton, c'est qu'elles s'étendent si loin sous la mer qu'il est très coûteux de ramener le charbon à la surface. Je suis descendu dans ces puits pendant leur excavation et je sais qu'il y a du charbon. Dans l'hypothèse où la mine est mise en exploitation dans les deux ans et demi, il en coûtera très cher de sortir le charbon, mais ces coûts sont encore faibles si on les compare au coût des mines actuelles; vos coûts sont donc inférieurs, et vous pouvez amortir les coûts d'immobilisation, qui sont de moins de 200 millions de dollars, sur plusieurs années; c'est ce que l'on affirme dans les études de la Kilborn et de la Société d'ingénierie Montréal.

En vertu de la Mineral Resources Act de la Nouvelle-Écosse, aucune concession touchant les ressources minérales de la Nouvelle-Écosse ne peut être accordée sans le consentement exprès de la province. Les ressources minérales de la Nouvelle-Écosse, y compris le charbon, sont la propriété du gouvernement de la Nouvelle-Écosse; par conséquent, les concessions de la Donkin visent une ressource de la Nouvelle-Écosse. Ces concessions appartiennent au gouvernement provincial et elles ne peuvent pas être transférées sans le consentement écrit du gouvernement de la province -- autrement dit, le gouvernement actuel, dirigé par le premier ministre Russell MacLellan, qui n'a pas caché son mécontentement dans ce dossier.

Est-ce que vous êtes d'accord avec moi, M. Drake?

M. Drake: Oui.

Le sénateur Losier-Cool: J'aimerais changer de sujet un instant; y a-t-il des femmes mineures qui descendent dans les mines?

M. Drake: Il y en a une. Nous en embaucherons le plus possible dès que la mine Donkin ouvrira.

Le sénateur Losier-Cool: Y a-t-il des femmes parmi les membres de la direction?

M. Drake: Non.

Le sénateur Losier-Cool: Je viens de Bathurst, au Nouveau-Brunswick. C'est aussi une ville minière. J'ai acquis de l'expérience au sein d'un syndicat d'enseignants, et mes questions portent essentiellement sur les relations de travail.

Hier, M. White et M. Shannon ont affirmé qu'au moins, un des aspects positifs de la situation était l'amélioration des relations de travail. Est-ce que vous êtes de cet avis, depuis votre dernière comparution ici, devant le comité? Si oui, que font les syndicats pour améliorer les relations de travail?

M. John MacLeod, United Mine Workers of America: Comme l'a mentionné M. Drake, nous avons tenté d'améliorer les choses, en particulier UMWA, qui est le plus important syndicat, mais nous avons échoué. Lorsque la SDCB a été informée de la façon dont il convenait de mener le processus, nous avons recommandé que UMWA y participe. À cette époque, George White ne voulait pas que nous lancions indépendamment un processus, à l'interne. Toutefois, il admettait que nous devrions aller de l'avant, le cabinet Ernst and Young ayant été choisi comme observateur du processus. La SDCB a fait appel à Ernst and Young dès le début pour améliorer la qualité de la gestion. Nous n'avions pas l'impression que la société allait intervenir ni qu'elle allait lancer le processus à moins que nous soyons tous d'accord quant au cabinet d'experts-conseils à utiliser.

C'est alors que nous avons proposé que UMWA et la direction se réunissent et définissent un processus que nous étions disposés à suivre, après quoi nous aurions fait participer les autres. Cela ne s'est pas produit. George White a mis sur pied ses équipes de gestion de la qualité. Il a constitué les équipes. Nous ne nous y sommes pas opposés, toutefois, parce que nous avions l'impression que ce genre de processus était adapté. Les employés auraient leur mot à dire quant aux machines à acheter ou à modifier. Le processus n'a pas donné de bons résultats, et nous avons proposé de nombreuses améliorations pour le prochain front de taille ainsi que des améliorations globales à réaliser à Phalen. C'est ainsi qu'une équipe a été constituée pour examiner diverses possibilités.

La direction cherchait à lancer un processus, et nous ne nous y sommes pas opposés. La seule chose à laquelle nous nous objections, c'était qu'à titre de cadres de district, nous n'avons pas été informés de ce qui se faisait quotidiennement; nous n'étions pas informés de ce qui était examiné. La communication avec le bureau de district ne se faisait pas.

Le sénateur MacDonald: Les relations se sont détériorées.

M. MacLeod: Pour ce qui est de la communication avec le bureau de district, en effet.

Le sénateur Losier-Cool: Vous n'acceptez donc pas ce qui a été dit hier?

M. MacLeod: Je reconnais que la direction s'efforce ou semble s'efforcer, au niveau local, de faire bouger les choses, même s'il y a sans doute très souvent un manque de communication; mais certains problèmes persistent, bien que le concept d'équipe donne de bons résultats.

Le sénateur MacDonald: J'ai l'impression que le problème serait en partie réglé si l'on éliminait la direction de la SDCB. Croyez-vous que cela serait utile?

M. Drake: Oui, si le gouvernement fédéral considérait la SDCB comme un investissement et ordonnait à la direction de la SDCB d'assumer la responsabilité de ses décisions et de rendre des comptes; si la direction prenait des décisions valables, cela aiderait. Je ne suis pas certain que le licenciement de tous les membres de la direction soit très utile; c'est ce que nous avons fait à trois ou quatre reprises, et cela n'a pas aidé, parce que les nominations à la direction de la SDCB sont des nominations politiques, et cela n'est pas la façon d'aller chercher les personnes les plus compétentes de l'industrie.

Le sénateur Forrestall: Ces gens sont toujours là.

M. Drake: Il y a quelques exceptions. Nous avons eu certains spécialistes des mines. Jim McLellan oeuvre dans l'industrie depuis 50 ans. Il est membre du conseil d'administration. C'est un homme intègre et je ne mets pas en doute ses compétences.

Par contre, il y a à la SDCB certaines personnes qui semblent mieux connaître les contes de fée que l'industrie minière. Elles ne savent pas ce qui se passent et elles prennent des décisions qui ont des répercussions à long terme sur la viabilité de notre entreprise. Si le gouvernement fédéral pouvait surveiller plus étroitement la SDCB et ce qui s'y passe, cela aiderait sans doute beaucoup notre industrie à survivre. Si l'on renvoie toute l'équipe, nous devrons traiter avec un nouveau groupe.

Le sénateur Losier-Cool: Les grands problèmes de la SDCB ne viennent pas des syndicats mais de la gestion, c'est-à-dire du gouvernement fédéral; est-ce cela que vous nous dites?

M. Drake: Il ne peut pas y avoir de relations parfaitement harmonieuses entre les syndicats et la direction.

Le sénateur Losier-Cool: Des relations harmonieuses, cela serait demander beaucoup.

M. Drake: Les syndicats ont des problèmes. La direction a des problèmes. J'imagine que nous avons aussi des problèmes quant à la façon dont le gouvernement fédéral semble laisser la bride sur le cou à la SDCB. On pourrait resserrer un peu les contrôles et cela nous aiderait énormément à régler une partie des problèmes.

Nous avons rencontré les représentants d'Alfonso Gagliano, le ministre du Travail, et le ministre lui-même, et nous avons honnêtement essayé d'obtenir que le gouvernement fédéral participe au processus. Toutefois, la SDCB a déclaré qu'elle voulait régler ses problèmes à sa façon. C'était là une nouvelle erreur.

M. King: Je ne crois pas que nous soyons ici pour régler nos comptes avec la direction ou les syndicats de la SDCB. Nous sommes ici pour ouvrir la mine Donkin. La direction a son idée à ce sujet. Notre avenir est lié à l'ouverture de la mine Donkin. La direction a des problèmes, le SCFP a des problèmes et le TCA en a aussi, mais ces problèmes peuvent être réglés.

Je mène des activités syndicales depuis dix ans. Je compte 21 ans d'expérience à la SDCB. Nous avons eu des conflits avec les gestionnaires, les bons et les mauvais. Nous avons défendu notre point de vue. Je ne demande pas au Sénat de régler mes problèmes avec la direction. Je demande au Sénat de m'aider à protéger mon emploi en ouvrant la mine Donkin.

Le sénateur Losier-Cool: Vous avez mal compris ma question. Vous convenez que tout plan d'entreprise a plus de chances de réussir si les relations entre les travailleurs et la direction sont bonnes.

M. Drake: C'est indéniable.

Le sénateur Losier-Cool: Croyez-vous qu'il y ait de bonnes relations entre les travailleurs et la direction?

M. King: Dans la mesure où nous en sommes responsables, les relations de travail sont bonnes. Parfois, nous avons des accrochages avec la direction au sujet du chemin de fer, mais depuis plusieurs années, en raison des problèmes que nous connaissons à la SDCB, il suffit de regarder les livres pour constater que tout à la SDCB démontre que la société peut extraire le charbon à meilleur marché, grâce aux négociations, grâce à la modification des habitudes de travail, à des facteurs de ce genre. Nous avons réduit l'effectif à tel point que notre coût de revient est inférieur à ce qu'il était il y a cinq ou six ans, sinon dix ans. Chaque année, nous apportons des améliorations.

Les relations se tendent peut-être parfois, mais si nous exploitions la mine Donkin à l'heure actuelle, compte tenu des ressources houillères qu'elle contient, je crois qu'avec la main-d'oeuvre dont nous disposons nous pourrions être rentables et le gouvernement n'aurait pas à nous aider. Nous afficherions un profit.

Le sénateur Forrestall: Je me demande simplement au sujet des emplois, si Donkin doit être ouvert. S'il y a plus d'un milliard de tonnes de charbon sous la mer, devant le cap, s'il y a une importante quantité de charbon là-bas, il sera ramené à la surface d'une façon ou d'une autre. Est-ce que vous nous dites que la SDCB est le seul groupe en mesure de le faire?

M. Drake: N'importe quelle société minière pourrait prendre en main l'exploitation de la Donkin et réussir. La méthode la plus sûre serait d'exploiter les ressources de la Donkin au maximum au profit de la société d'État, de la SDCB.

Le sénateur Forrestall: Est-ce que vous préféreriez une société d'État que vous pouvez critiquer ou une entreprise qui produit du charbon et crée des emplois? La SDCB n'a pas bien géré le dossier. J'ai participé à la mise sur pied de la SDCB. Faire ouvrir la mine et l'exploiter me semble constituer notre première préoccupation.

M. Drake: Nous ne sommes pas ici pour critiquer une société d'État. Si la société d'État fonctionne bien, il n'y a rien à redire; mais nous sommes des contribuables comme tous les autres, nous avons le droit de demander à quoi servent nos impôts, et dans le cas de la SDCB, régulièrement, l'argent des contribuables n'est pas bien dépensé. C'est déplorable.

Nous ne serions pas ici aujourd'hui si le gouvernement fédéral avait dit à la SDCB, «Vous devez nous rendre des comptes». Nous serions déjà en train d'exploiter la mine. Nous prendrions des décisions fondées sur les principes reconnus dans l'industrie, de concert et en collaboration avec la direction de la SDCB. Malheureusement, cela n'est pas le cas.

Si vous connaissez bien l'histoire des mineurs de charbon du Cap-Breton, vous savez que nous ne cherchons pas la bagarre; mais lorsqu'un problème se pose et qu'il faut se battre, nous n'hésitons pas et nous allons droit au but. Le fonctionnement de la Société de développement du Cap-Breton laisse à désirer. La SDCB commet de graves erreurs et n'assume pas ses responsabilités.

Si le gouvernement fédéral le reconnaissait et si la SDCB devait rendre des comptes et assumer la responsabilité de ses décisions, 95 p. 100 des problèmes de relations de travail seraient réglés et 95 p. 100 des questions contractuelles le seraient aussi. Il n'y aurait pas d'acrimonie, rien de ce genre.

Lorsque la SDCB prend une décision, par exemple économiser 50 000 $ au poste des salaires, mais perd ensuite 20 millions ou 10 millions ou cinq millions de dollars en raison d'une erreur de gestion et d'une mauvaise décision, alors les questions importantes sont celles dont nous discutons, et ce sont essentiellement celles pour lesquelles nous critiquons la SDCB.

Quelqu'un doit forcer la société à réagir. En l'occurrence, nous ne voulions pas assumer ce rôle. Aucun des syndicats ne voulait se présenter comme opposition. Nous voulons travailler et extraire du charbon, c'est ce que nous faisons de mieux. Si quelqu'un doit forcer la société à rendre des comptes et que ce n'est pas le gouvernement fédéral, alors la responsabilité en incombera aux contribuables du Canada. Si la SDCB rend des comptes et assume ses responsabilités et si nous pouvons travailler avec elle, en équipe, nous le ferons; mais nous ne nous contenterons pas d'assister au naufrage de notre industrie et au départ inutile de nos familles vers l'Ouest du Canada.

Le sénateur Forrestall: Le charbon est dans le sol. Il est difficile à extraire. C'est de l'emploi. Hier soir, j'ai demandé à Joe Shannon s'il était possible de rappeler certains des premiers travailleurs licenciés, en particulier ceux qui n'avaient pas encore 45 ans, si l'on pouvait compter sur eux au cas où la Donkin serait ouverte sous la direction de la SDCB. Shannon m'a donné l'impression qu'il ne ferait rien au sujet de la Donkin tant que ceux qui ont présenté une soumission n'auront pas eu l'occasion de prouver leur capacité ou de retirer leur offre. Je considère que c'est dommage, parce qu'entre-temps, il ne se passe rien et il y a le risque d'inondation à Phalen, et l'inondation nous ferait perdre tout ce matériel.

M. Drake: Ce serait possible.

Le sénateur Forrestall: Très facilement. Il est possible de résoudre le problème, à condition de serrer les dents, de fermer Phalen et d'ouvrir Donkin. Si vous essayez de garder les deux mines ouvertes et que cela marche, très bien; dans le cas contraire, vous allez vous retrouver avec un montant initial d'au moins 100 millions de dollars et par la suite, de 115 à 120 millions de dollars, probablement.

M. Grant: Donkin devrait certainement être prise en main par la SDCB. Hier, la SDCB nous a dit que l'âge moyen des employés était de 46 ans. Sans Donkin, des employés qui ont 20 à 25 ans d'ancienneté vont se retrouver à la rue. Je toucherai moi-même une pension, mais pas eux. Je représente des employés qui vont se retrouver dehors alors qu'ils ont investi de 20 à 25 ans de leur vie dans la société. Si c'est Steve Farrell qui prend la relève et qui recrute ses 250 employés parmi les personnes qui ont vraiment besoin d'un emploi au Cap-Breton, les 1 700 employés de la SDCB n'auront plus leur place. Je représente des travailleurs qui ont consacré 20 à 25 ans de leur vie à cette industrie du charbon. C'est la raison pour laquelle Donkin devrait continuer à en faire partie.

Le sénateur Forrestall: Sous la direction de la SDCB.

M. Grant: Oui.

Le sénateur Forrestall: Voilà pour l'essentiel. Je compatis. Je comprends parfaitement ce que vous dites de la situation au cas où cela ne marcherait pas, mais cela ne résout pas le problème que pose Donkin. Si la SDCB décide d'aller de l'avant, qu'arrivera-t-il à tous ceux qui ont accepté un départ anticipé à la retraite? Certains d'entre eux pourront-ils revenir? J'ai demandé s'il y aurait un système de formation permanente, ou si l'on ferait venir des gens capables de former les autres et j'ai aussi voulu savoir qui constituerait l'équipe de formation. Shannon a dit qu'ils ne s'occupaient pas de ce genre de choses.

M. Grant: Si, comme vous le dites, nos jeunes et ceux qui ont de 20 à 25 ans d'expérience se retrouvent à la rue et sont obligés d'aller chercher du travail dans l'ouest du Canada ou en Ontario, on ne pourra plus compter sur eux si quelqu'un décide un jour d'ouvrir Donkin. Ce que nous voulons, c'est que Donkin ouvre sous le contrôle de la SDCB et sous les auspices du gouvernement fédéral, de manière à ce que nos gens puissent avoir un emploi dans l'industrie minière pour les années à venir. Nous en avons besoin au Cap-Breton.

Le sénateur Buchanan a déjà dit que l'ouverture de Donkin toucherait plus de 20 000 personnes dans l'île du Cap-Breton; c'est la raison pour laquelle nous sommes ici. Cela ne concerne pas seulement quelques personnes et moi-même. Nous représentons tous les travailleurs de l'île du Cap-Breton; nous voulons que Donkin figure dans les plans de la SDCB car c'est la survie de l'île du Cap-Breton qui est en jeu.

Le sénateur Forrestall: Vous n'avez donc guère d'espoir que le secteur privé réussisse, que Steve Farrell trouve l'argent nécessaire?

M. Grant: Le gouvernement fédéral a investi de 80 à 90 millions de dollars dans le creusement de puits à Donkin. Si Steve Farrell veut extraire du charbon, qu'il aille le faire à Inverness. Pourquoi viendrait-il nous le voler?

M. King: On a pu observer au Cap-Breton, comme dans l'ensemble du Canada, qu'après avoir pris le contrôle de certaines industries le secteur privé les a laissées exsangues. L'aciérie de Sydney en est un parfait exemple, En 1964 et en 1965, elle avait, entre autres équipements, un laminoir à rails et un laminoir à tôles fortes. Elle a alors été reprise par le secteur privé qui s'en est allé en emportant tout. Aujourd'hui, l'industrie de l'acier est pratiquement inexistante au Cap-Breton.

À mon avis, si une société privée assume le contrôle de la mine Donkin, elle va en extraire le charbon le plus rapidement et le plus économiquement possible. Elle va détruire l'industrie. Elle va essayer de gagner des millions de dollars et puis, dans quelques années, elle s'en ira. En outre, si c'était la SDCB qui s'en occupait, l'exploitation minière se ferait de manière beaucoup plus sûre. Nous pourrions extraire beaucoup plus de charbon et l'opération durerait beaucoup plus longtemps que si c'était une industrie privée qui s'appropriait la mine Donkin. Voilà mon avis.

Le sénateur Forrestall: Dites-moi ce que vous savez de la lettre d'intention. Quand avez-vous appris que la mine Donkin avait fait l'objet d'une offre?

M. Drake: Le jour où cela a été annoncé à la radio. Nous n'en savions rien auparavant. Nous l'avons entendu à la radio et la nouvelle a été reprise dans les journaux du lendemain. C'était tout à fait soudain. Cela s'est produit immédiatement après les audiences du Sénat, comme on l'a dit hier. Les syndicats n'ont jamais été consultés. Selon des articles du Cape Breton Post et du Halifax Herald, M. Farrell aurait déclaré qu'il avait été surpris par la rapidité et l'esprit de décision manifesté par la SDCB à propos de la signature de cette lettre d'intention.

Le même jour, je crois que c'était le 16 ou le 17 avril, nous avons demandé à notre avocat de vérifier si cette société était enregistrée. Il n'a pas réussi à la trouver sur Internet. À notre connaissance, elle n'a pas encore été enregistrée.

À notre avis, une enquête devrait être effectuée sur le cas de la mine Donkin et nous avons quelques recommandations à faire à ce sujet. Voici la première. Le gouvernement fédéral devrait enquêter sur les circonstances qui ont conduit à la décision hâtive du conseil d'administration de la SDCB d'approuver la vente de la mine Donkin.

Nous estimons également que le gouvernement fédéral devrait étudier attentivement le climat économique régnant au Cap-Breton, qu'il devrait revoir sa position au sujet de la SDCB et de Donkin et qu'il devrait décider immédiatement d'ouvrir cette mine sous le contrôle de la SDCB.

Nous estimons également que l'étude de 300 000 $ commandée par le gouvernement, que M. Steve Farrell, de Donkin Resources, effectue actuellement, devrait être poursuivie et menée à sa conclusion. Lorsqu'elle sera terminée, cette étude devrait être remise à la SDCB et au gouvernement fédéral pour qu'ils puissent l'évaluer en fonction de la situation actuelle à la mine Phalen. C'est la seule façon pour nous de faire confiance à l'arrangement envisagé avec Donkin.

Le sénateur MacDonald: Tous les témoins qui ont comparu devant ce comité, sans exception, étaient partisans de l'ouverture de la mine Donkin. Notre comité l'a recommandée. Il n'y a qu'un problème. C'est que nous ne pouvons pas obtenir l'argent nécessaire pour le faire. Le gouvernement fédéral ne veut pas le fournir; cela ne fait pas partie du plan directeur; et le gouvernement provincial ne veut pas non plus fournir l'argent nécessaire. Nous pourrons continuer à nous lamenter tant que vous voulez, ou épiloguer sur Paul Martin et le déficit, mais cela ne changera rien à rien.

La seule personne qui se soit présentée jusqu'à présent, encouragée par la rencontre du ministre avec notre comité, le 20 mars dernier, appartient au secteur privé. Il s'agit de Steve Farrell, un spécialiste du secteur minier dont vous avez fait l'éloge. Vous avez accordé beaucoup de crédit aux vues qu'il a exprimées au sujet du potentiel de la mine, sauf sur un point; vous dites, «Ne le laissez pas faire.» Vous déclarez que si nous lui donnons 400 000 $, il se contentera d'étudier les données existantes pour essayer de déterminer le potentiel de la mine Donkin. Il effectue actuellement une étude de faisabilité. Seul le sénateur Buchanan et vous-même avez exprimé des idées au sujet de la rentabilité de la mine. Personne d'autre n'en a apparemment parlé. Le problème, c'est que vous naviguez au jugé.

M. Drake: Au jugé, sénateur?

Le sénateur MacDonald: Lorsque vous parlez du coût.

M. Drake: Qui calcule le coût au jugé? Pas moi. Je sais que ce cela coûterait d'ouvrir la mine Donkin. Cela coûtera 100 millions de dollars. Je l'ai clairement déclaré aux fins du compte rendu aujourd'hui, et je l'ai également fait en 1996.

Le sénateur MacDonald: Si vous me le permettez, c'est très joli de dire que vous savez combien cela coûte. Qu'est-ce qui nous prouve que c'est vrai?

M. Drake: Il faudra me faire confiance, sénateur. Je ne suis pas un menteur!

Le sénateur MacDonald: Nous parlons précisément des données que Farrell recherche, d'études selon lesquelles le coût serait de l'ordre de 500 millions de dollars.

M. Drake: Nous en sommes très loin, sénateur. C'est une erreur. Vous vous trompez.

Le sénateur MacDonald: Comment puis-je savoir que le sénateur Buchanan ne se trompe pas?

M. Drake: Je crois que je sais où vous voulez en venir. Permettez-moi d'expliquer la situation encore une fois.

Si vous examinez les comptes rendus des premières audiences du Sénat, vous verrez que nous avons expliqué en détail l'analyse des coûts d'exploitation de la mine Donkin. Ces chiffres ont été établis par Steve Farrell, pas par Steve Drake. Ils nous ont été fournis par Steve Farrell, à l'époque où il travaillait pour UMWA. M. Farrell a intérêt à ce que la SDCB demeure opérationnelle puisqu'il a une société de construction mécanique qui lui vend du matériel -- du matériel minier. M. Farrell était sincère.

Nous avons passé ces chiffres en revue et nous avons effectué quelques comparaisons. En ce qui concerne la controverse au sujet des coûts -- on trouve cela dans les rapports de 1986, 1987, 1988 de la Société de développement du Cap-Breton -- où on précise que la nouvelle mine Phalen est en exploitation et que le budget a été respecté. Les immobilisations sont calculées au prix coûtant. Le coût total actuel est de 185 928 000 $ pour cette mine.

Phalen est une mine où tout était à faire, qui est pleinement opérationnelle aujourd'hui. Cela signifie que nous sommes obligés de forer les puits et de tout faire, y compris acheter du matériel nouveau pour 186 millions de dollars.

Le rapport annuel de 1995 de la société précise que le coût d'acquisition de la mine Prince pendant la durée de vie du projet est de 150 millions de dollars, également en partant de rien. Nous sommes obligés de forer les puits et d'acheter du matériel neuf.

En dépit d'un manque manifeste de sécurité, la mine Westray, elle aussi, est partie de rien. On a foré les puits et on l'a mise en exploitation, ce qui a coûté 100 millions de dollars. Les dépenses couvraient toutes les installations de surface, un lavoir de charbon, l'équipement minier et le creusement des puits.

Comme l'a dit Angus Grant, nous détenons un pourcentage élevé des installations de surface à la mine Lingan. Nous sommes propriétaires d'une partie du matériel d'exploitation à la SDCB. Nous sommes actuellement propriétaires de tout cela. Nous avons un lavoir de charbon; et les puits ont déjà été forés. C'est ce qui coûte le plus cher dans une exploitation minière; nous avons dépensé 80 millions de dollars pour le faire.

L'estimation originale faite en 1979 pour la mine Donkin comportait les éléments suivants qui constituaient une part importante des coûts d'immobilisation -- et le coût le plus élevé que nous avons pu trouver était de 400 millions de dollars pour l'ouverture d'une mine à Donkin en partant de zéro: Cette estimation prévoyait le creusement de quatre puits. Nous en avons deux. Cela représentait une réduction considérable des dépenses par rapport au coût original de 400 millions de dollars. En ce qui concerne le creusement souterrain et l'équipement, nous avons une usine d'extraction de méthane, à la mine Lingan, qu'il serait possible de remettre en état, un lavoir et une extension, le tout compris dans ces 400 millions de dollars. Nous avons un lavoir de 150 millions de dollars, propriété de l'État, qui attend en ce moment même sur la route de Sydney à Glace Bay.

En ce qui concerne les installations de surface, je crois que ce sont les représentants de Kilborn Engineering qui ont dit que l'on aurait besoin d'installations de surface minimales à Donkin pour faire démarrer une exploitation à petite échelle. D'autre part, la plus grande partie de la préparation du site de surface a été faite au début des années 80, lorsque nous avons décidé de creuser le puits. Cela représente un autre montant très important à déduire des 400 millions de dollars.

Si vous ajoutez à cela que les deux puits existent déjà, que nous sommes propriétaires de tout cet équipement, vous comprendrez pourquoi je suis fermement convaincu que nous sommes capables d'ouvrir cette mine pour un montant de 100 à 125 millions de dollars, ce qui est exactement ce que j'ai dit aux fins du compte rendu, la dernière fois. Les 25 millions de dollars supplémentaires entreraient en ligne de compte si l'on ne capitalisait pas le charbon que nous produisons. Tous ces chiffres provenaient du rapport de Steve Farrell et non de Steve Drake.

Dans son rapport annuel de 1995, la Société de développement du Cap-Breton précise qu'elle a inclus dans les immobilisations le montant de 80 678 000 $ au titre des coûts d'achat pour les puits d'accès du projet Donkin. Même si Donkin devait coûter 200 millions de dollars, il ne faut pas oublier que nous avons déjà dépensé 80 millions de dollars. Notre objectif n'est pas d'entreprendre un mégaprojet du genre de Phalen. Notre objectif est d'entreprendre un projet aussi peu coûteux que possible dans l'intention d'avoir plus tard une exploitation à grande échelle à la mine Donkin afin de permettre à la SDCB de continuer à jouer son rôle de bienfaitrice de notre île sur le plan économique.

M. Farrell a dit que toute analyse de coût réaliste pour la mine Donkin devrait tenir compte du fait que la belle époque des mégaprojets est terminée et qu'il sera possible d'entreprendre le développement à petite échelle de la mine Donkin pour nettement moins de 100 millions de dollars si nous utilisons les actifs dont la SDCB est déjà propriétaire. Il a dit que les coûts d'une exploitation à grande échelle pourraient être couverts au coup par coup, à long terme. Il a ajouté que le coût de 400 millions de dollars pour Donkin est purement fantaisiste.

À notre avis, les promoteurs de la mine Donkin n'ont pas présenté d'arguments valables pour justifier le coût de cette mine. Il est totalement exclu de dépenser 400 millions de dollars. D'autre part, comme on l'a dit hier, ces gens-là n'ont pas du tout d'argent. Ils n'avaient pas les 300 000 $ nécessaires pour assurer le démarrage du projet. Où donc trouveraient-ils les 100 millions de dollars supplémentaires pour le mener à bien?

Comme le sénateur Butts le demandait hier, si nous sommes obligés de cesser de développer certains secteur de la mine Phalen, y aurait-il de l'argent que nous pourrions utiliser pour d'autres projets? Je ne connais pas le budget de développement de la SDCB pour la mine Phalen. Peut-être le Sénat pourrait-il déterminer à combien se chiffre exactement le plan de développement quinquennal de cette mine. Normalement, il devrait être de l'ordre de 10 millions à 20 millions de dollars par an.

Si la SDCB donne suite à ce projet, et si les travaux d'exploration révèlent que l'on ne peut pas aller plus loin à la mine Phalen, il y aura là une réserve de ressources que nous pourrons utiliser. Comme je l'ai déjà dit, il y a 10 millions de dollars prévus pour la première année pour le développement de Donkin sous le contrôle de la SDCB. Nous pourrions alors utiliser ces autres ressources pour ce projet.

Je crois vous avoir fourni les données nécessaires. Je suis un mineur et je crois que je connais bien mon affaire. Comme je ne suis pas spécialiste de toutes ces questions, j'ai cherché des personnes qui l'étaient. J'ai des documents fournis par des personnes très respectées dans le secteur de l'exploitation minière à Cap-Breton, dans tout le Canada et aux États-Unis. Tous ces gens sont fermement convaincus qu'il suffirait de 100 à 125 millions, selon l'usage que vous ferez de cet argent, pour ouvrir une mine Donkin.

Le sénateur MacDonald: Peu importe ce que vous pensez de l'exploitation de Donkin par Donkin Resources Limited; cette société dispose maintenant de 400 000 $, chiffre que vous accepterez probablement, pour développer la mine.

M. Drake: Si M. Farrell demeure fidèle à ce qu'il dit depuis deux ans et demi, il parviendra probablement à un chiffre similaire à celui que nous avons donné aujourd'hui.

Le sénateur MacDonald: Quoi que vous puissiez penser de la proposition de Donkin Resources pour le long terme, personne, ici, n'a critiqué M. Farrell.

M. Drake: Steve Farrell est un expert de l'exploitation minière, un point c'est tout. C'est un expert dans son domaine.

Le sénateur MacDonald: Vous avez assisté à la réunion d'hier. Nous avons été très surpris par la proposition concernant Donkin.

M. Drake: Nous aussi.

Le sénateur MacDonald: Nous avons eu une discussion assez vive. Qu'arrivera-t-il lorsque les 400 000 $ auront été dépensés? Nous n'avons même pas encore entendu Steve Farrell, mais d'après ce que nous a dit la SDCB, l'information qu'elle détient devrait être rendue publique. Il faut qu'elle présente ses plans financiers. Il faut qu'elle fournisse des renseignements sur les administrateurs de la société et sur le montant de leur investissement. Ensuite, il faudra qu'elle trouve des gens près à investir et à exploiter la mine. La tâche qui confronte la SDCB est énorme, et sans vouloir me montrer pessimiste, je me demande vraiment comment elle va s'en sortir.

Nous en sommes donc maintenant à la question de savoir où la SDCB va trouver l'argent nécessaire.

M. Drake: Je viens de vous présenter une option qui me paraît raisonnable et qui est fondée sur les coûts de développement de la mine Phalen. Si l'exploration ne prouve pas que Phalen a une durée de vie utile de 15 à 20 ans, la SDCB a prévu de l'argent dans son budget au titre du développement. Le Sénat pourra probablement obtenir ces chiffres demain de Merrill Buchanan, vice-président chargé des finances de la Société de développement du Cap-breton. On saura ainsi quel est le budget de développement exact pour la mine Phalen et quelles sont les nouvelles immobilisations susceptibles de ne pas être utilisées au cours de l'exécution du plan quinquennal si l'exploration s'avère infructueuse.

Le sénateur MacDonald: Bonne idée. J'ai également noté vos remarques au sujet du matériel qui serait alors disponible. Les puits ont-il été forés à Phalen sous le contrôle de la SDCB?

M. Drake: Oui.

Le sénateur MacDonald: C'est pour déterminer exactement quelle est la situation à Phalen?

M. Drake: Oui.

Le sénateur MacDonald: Donc, si les nouvelles sont mauvaises -- à Dieu ne veut! -- la SDCB pourrait immédiatement passer au plan B. Ce serait certainement une bonne raison d'entreprendre le développement de la mine Donkin.

M. Drake: Si la SDCB tient toujours à vendre la mine Donkin, il n'y aura pas de plan B. Notre plan B, c'est une mine Donkin dont l'exploitation serait chapeautée par la SDCB. Tant que la SDCB ne disposera pas de données incontestables, je ne crois pas qu'on devrait l'autoriser à vendre cet actif. Tous les mineurs ainsi que beaucoup d'habitants du Cap-Breton qui connaissent bien le secteur minier, sont de mon avis. C'est un des actifs les plus importants que possède actuellement la SDCB, en dehors du capital humain représenté par les travailleurs.

Le sénateur MacDonald: Cela semble être l'opinion générale. Cependant, en effectuant ces sondages de recherche, la SDCB donne, en quelque sorte, l'impression de vouloir prendre la température de la mine Phalen.

M. Drake: Il y a longtemps qu'elle le fait.

Le sénateur Forrestall: Nous essayons d'atteindre le chiffre magique de 100 millions de dollars. Pendant les trois ou quatre années qui s'écouleront avant que la mine entre en exploitation, combien de personnes seraient employées? Leur nombre serait relativement petit. Il y aurait aussi quelques travaux d'infrastructure. Mais ce n'est qu'au bout de la troisième ou de la quatrième année, que l'on aura vraiment besoin de beaucoup d'argent, il me semble.

M. Drake: Aux alentours de la troisième année, en effet.

Le sénateur Forrestall: Vous disposeriez donc de trois ans. Peut-être existe-t-il une solution d'ordre interne que la SDCB ne s'est pas donnée la peine d'étudier. Les dépenses pour ces trois années et le montant prévu par la SDCB dans son budget, commencent donc à représenter une somme assez coquette, n'est-ce pas?

M. Drake: C'est un des points les plus importants que nous puissions soulever aujourd'hui. Il faut que la SDCB examine toutes les options qui s'offrent à elle. Compte tenu de la situation à la mine Phalen et de la vie utile projetée de cette mine, il serait peut-être bon que la SDCB n'abandonne pas l'idée de se rabattre plus tard sur Donkin. La SDCB devrait examiner tous les moyens possibles de trouver l'argent nécessaire.

M. Ernie Boutillier était le dernier des ex-présidents de la Société de développement du Cap-Breton. Juste avant que le nouveau conseil d'administration n'entre en fonctions, M. Boutillier avait déclaré que Donkin avait toujours fait partie des projets d'avenir de la SDCB. Il avait dit que si Donkin était exploitable et si l'on en arrivait au point où Phalen ou Prince devaient cesser de fonctionner, il ne serait pas trop difficile de trouver l'argent nécessaire, car il y aurait toujours un moyen de couvrir les coûts de démarrage de Donkin.

M. Boutillier travaillait pour le gouvernement fédéral. Je ne pense pas qu'on puisse dire ce genre de chose sans directive des autorités fédérales. Il faudrait donc que quelqu'un étudie toutes les possibilités de mise en exploitation de Donkin sous le contrôle de la SDCB.

En tant que porte-parole du plus grand syndicat, regroupant environ 1 350 employés, je tiens à déclarer ici que si la SDCB veut reprendre les négociations avec notre syndicat et étudier un mode de coopération en vue de l'établissement d'une proposition de financement, nous sommes prêts à coopérer à 100 p. 100. Cependant, lorsque la SDCB ferme la porte au nez des syndicats, lorsque des questions aussi importantes se posent, nous sommes bien obligés d'aller porter le combat ailleurs, que ce soit devant le public, le Sénat, les politiciens, ou dans tout autre forum. Ce qui est en jeu, c'est notre industrie, et elle est absolument vitale pour l'économie du Cap-Breton.

Le sénateur Moore: Au bas de la première page de votre mémoire, vous écrivez:

Il est décourageant pour les mineurs et leurs familles d'entendre la société déclarer constamment qu'elle n'a pas l'intention de demeurer dans le secteur minier.

J'ai du mal à comprendre. Pourriez-vous m'expliquer cela de manière constructive. Si la société dit qu'elle a l'intention de rester dans le secteur. Voulez-vous qu'elle le nie? Je ne comprends pas ce que vous essayez de nous dire.

M. Grant: Selon moi, la SDCB ne dit pas qu'elle va cesser de travailler dans le secteur minier. Ce qu'elle dit, c'est qu'il y aura deux mines et qu'elle vendra ou cédera les actifs de Donkin et continuera à fonctionner. Mais nous qui sommes des mineurs, nous savons bien que la SDCB ne peut pas continuer à exister sans que le projet Donkin ne se réalise. On dit qu'il est faux qu'elle a l'intention d'abandonner le secteur minier; à notre avis, c'est pourtant ce qu'elle va faire. Lorsqu'elle vendra ses actifs de Donkin, qu'elle laissera la mine Phalen cesser son exploitation et la houillère Prince fonctionner jusqu'à épuisement de ses ressources, il ne lui restera plus aucune issue, à moins qu'on n'exploite la mine Donkin. La SDCB soutient actuellement qu'il est faux qu'elle a l'intention d'abandonner le secteur minier. Elle nous dit qu'elle tient à avoir une main-d'oeuvre stable composée d'un certain nombre de travailleurs, mais nous savons fort bien que pour elle, Donkin ne fait pas partie des projets à long terme du secteur minier au Cap-Breton.

Le sénateur Moore: Ce n'est pas ce que j'ai entendu dire hier. Avez-vous assisté à l'audience d'hier après-midi?

M. Grant: Oui.

Le sénateur Moore: Je n'ai entendu personne dire que la SDCB allait abandonner le secteur minier.

M. Grant: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que la SDCB nie avoir l'intention de s'en retirer. Elle déclare qu'elle est là pour le long terme.

Le sénateur Moore: C'est bien ce que je pensais.

M. Grant: Ce que nous vous disons, sénateur, et cela s'adresse également à la SDCB, c'est que la société ne peut pas continuer à travailler dans le secteur minier au Cap-Breton sans exploiter la mine Donkin, car l'avenir de la mine Phalen ne me paraît pas très rose. La SDCB nous dit qu'elle n'a pas l'intention d'abandonner le secteur minier, qu'avec un effectif stabilisé à 1 400 travailleurs, nous aurions une main-d'oeuvre solide et nous pourrions poursuivre l'exploitation. Voilà ce qu'elle nous dit. Elle refuse de nous avouer qu'elle va abandonner le secteur minier, alors que nous sommes convaincus qu'elle le fera, si elle n'a pas Donkin.

Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais j'ai fait de mon mieux.

Le sénateur Moore: J'ai ici des chiffres sur le développement de Donkin qui varient de 100 millions à 400 millions de dollars. Étant donné que les contribuables canadiens ont déjà dépensé plus de 1,5 milliard de dollars pour la SDCB, pourquoi croyez-vous que si Donkin appartenait à des intérêts publics et était exploitée par eux, ce serait préférable pour les contribuables et pour le Cap-Breton à une mine appartenant à des intérêts privés et exploitée par eux?

M. Grant: J'ai déjà parlé des houillères qui ont fermé sous la SDCB. Un beau matin du 3 mars 1973, nous avons appris au réveil qu'il n'y avait plus de puits 12. Mille emplois s'étaient ainsi évanouis en fumée. Le 6 ou 8 avril 1984, cela a été au tour du puits 26. Nous avons perdu 1 200 emplois. En 1994, nous avons perdu environ 800 emplois à la mine Lingan. Nous avons été attaqués de tous les côtés.

Nous n'essayons pas d'en faire porter la responsabilité au gouvernement fédéral, mais en tant que mineurs du Cap-Breton et citoyens canadiens, nous avons besoin qu'on nous donne une autre chance en poursuivant le projet Donkin. Nous avons survécu aux importants arrêts d'exploitation causés par la fermeture des puits 12, 26 et de la mine Lingan. Nous avons réussi à assimiler en peu de temps les travailleurs qui s'étaient retrouvés sans travail. Je crois que le sénateur a demandé comment nous pourrions en transférer à Donkin. Nous avons été obligés de faire la même chose à Phalen, lorsque le puits 26 a fermé. Un certain nombre de travailleurs se sont retrouvé à la rue pendant longtemps, mais après quelques tours de passe-passe, nous avons finalement réussi à tous les réintégrer dans notre industrie. Les coups ne nous ont pas été épargnés depuis 1973, et la SDCB n'est devenue une société d'État qu'en 1968.

Nous considérons donc qu'il est justifié d'investir dans le projet Donkin: la survie de l'île du Cap-Breton en dépend.

M. King: On entend constamment parler du coût de fonctionnement de la SDCB. Et l'argent qu'elle injecte dans l'économie du Cap-Breton? Nous payons des impôts. Nous travaillons pour la SDCB et nous payons des impôts. Les employés des épiceries où nous achetons ce dont nous avons besoin, paient aussi des impôts. Si nous redevenons actifs sur le marché étranger grâce à Donkin, la SDCB récupérera des devises étrangères. Lorsque nous vendons notre charbon outre-mer nous sommes payés en dollars américains, ce qui constitue un profit supplémentaire pour nous. Tout cela, c'est de l'argent qui reviendra au Canada. Ces dernières années, lorsque nous vendions sur le marché étranger, nous gagnions de l'argent. Cela nous avait peut-être coûté 25 millions de dollars au départ, mais nous ramenions des devises étrangères au Canada.

Ce 1,5 milliard de dollars fourni par les contribuables n'a pas été dépensé en vain. Les contribuables en ont tiré profit. À l'époque, l'opération n'était peut-être pas rentable, mais il y avait des raisons pour cela.

Si vous considérez tous les impôts qui sont payés, et cetera, la SDCB rapporte de l'argent à long terme.

Le sénateur Moore: Tout à fait d'accord.

M. Drake: Il y a quelques semaines, on a annoncé que le gouvernement provincial de la Nouvelle-Écosse investirait environ 25 millions de dollars pour créer des emplois chez Michelin. Beaucoup de gens ont dit que c'était un mauvais investissement puisqu'il s'agissait d'une énorme société multinationale gagnant des milliards de dollars. Le premier ministre a déclaré que nous récupérerions cet investissement à long terme. Nous le récupérerons sous forme de paiements au titre du RPC, au titre de l'assurance-emploi, grâce aux impôts, à la TCSPS, et cetera. J'ai entendu ce genre de déclarations de la part du gouvernement fédéral à de nombreuses reprises, lorsqu'il voulait dépenser de l'argent quelque part.

Prenons le cas de la SDCB. Le gouvernement fédéral ne s'en est pas débarrassé. Il a investi 1,5 milliard de dollars dans une société d'État qui ne diffère en rien de la Société canadienne des postes, de CN Rail ou de n'importe quelle autre société d'État dans laquelle le gouvernement fédéral investit encore aujourd'hui.

Je ne crois pas que quelqu'un ait jamais fait d'étude sur la SDCB sans déclarer, «Nous ne dépensons plus d'argent pour la société car nous lui avons déjà donné 1,5 milliard de dollars.» Eh bien, n'oubliez pas que cet investissement était rentable. Il y a actuellement au Cap-Breton 6 000 personnes qui touchent une pension de la SDCB. Tous ces gens-là ont une famille. Il y a là 1 700 mineurs, et leurs familles. Tout l'argent qu'ils touchent, ils le dépensent.

L'argent gagné à la mine ne reste pas dans la poche des mineurs. À la différence des entreprises privées, qui réservent l'argent à leurs actionnaires et à leurs comptes bancaires, l'argent rapporté par les mines est dépensé dans toute la Nouvelle-Écosse, et c'est notre économie qui en profite.

Peut-être le Sénat pourrait-il nous donner un chiffre que nous pourrions utiliser pour confirmer cela. Si le gouvernement fédéral a investi 1,5 milliard de dollars dans la SDCB et les mineurs du Cap-Breton, qu'en a-t-il retiré? J'aimerais bien qu'on me donne un chiffre. Je n'en ai pas, et je n'ai ni les moyens ni la capacité nécessaires pour le trouver.

La SDCB représente un investissement dans le Canada et dans les Canadiens. À notre avis, elle ne mérite pas d'être abandonnée comme un objet sans valeur.

Le sénateur Forrestall: Mes chers collègues, nous avons un peu d'argent; pourquoi ne pas commander une étude là-dessus? Il y a des années que le sénateur Butts s'occupe de ces questions. Avons-nous suffisamment d'argent pour engager quelqu'un afin de faire cette étude?

Le président: Je ne peux pas vous répondre immédiatement, mais nous allons y réfléchir.

Le sénateur Moore: Personne ne conteste les avantages pour la collectivité. Nous sommes tout à fait conscients du fait que le trésor public récupère de l'argent sous forme de taxes et impôts divers et que l'économie est stimulée par les dépenses des employés de la SDCB. Ma question portait sur la différence qu'il y aurait entre une société privée et une société publique. C'était ce que je demandais. Les réponses ne me donnent pas entièrement satisfaction.

M. Ron Coté, membre du comité, section locale 26, United Mine Worker's of America: Sénateur, avez-vous dit qu'on a investi 1,5 milliard de dollars dans la SDCB?

Le sénateur Moore: Oui.

M. Coté: Où avez-vous trouvé ce chiffre? Vous dites que c'est la SDCB qui l'a fourni. J'ai travaillé pendant 28 ans cette société. Un des administrateurs m'a dit que lorsqu'il était directeur d'une des mines, il y a quelques années, le Canada avait conclu un accord de vente de blé avec la Russie. En contrepartie, la SDCB avait été obligée d'acheter du matériel d'exploitation minier désuet.

Quant à l'obligation de rendre pour la SDCB des comptes, nous considérons qu'à l'époque, c'était un organisme d'État et que le gouvernement n'avait pas de comptes à rendre. Aujourd'hui, il doit rendre des comptes sur la manière dont il utilise son argent. Nous jugeons ce projet minier réalisable. Comme le disait le sénateur Forrestall, pourquoi a-t-on dépensé tant d'argent pour la SDCB. Pourquoi ne pas l'utiliser pour permettre à 7 000 employés de continuer à travailler pour un salaire décent?

Si j'étais un homme d'affaires et que je venais vous dire, «Voici un plan qui permettra de conserver vos employés âgés et de les traiter avec respect et dignité, tout en continuant à réaliser un profit,» pourquoi ne l'accepteriez-vous pas?

Le sénateur Moore: Je suis d'accord. Ce que je voudrais savoir c'est la différence entre l'utilisation des deniers de l'État et la prise en charge par une société privée?

M. Coté: La différence est que vous avez là des employés âgés qui travaillent pour la SDCB depuis 20 ou 25 ans. Pourquoi ne pas leur donner la possibilité de toucher plus tard une retraite puisque cette mine est exploitable? Si Donkin Resources prend la relève, il n'est pas question qu'on nous embauche. Cette société recrutera des jeunes, sans aucune obligation. Vous vous retrouverez cependant avec 7 000 personnes sans travail et sans pension, si bien qu'en fin de compte, cela coûtera plus cher au gouvernement.

Le sénateur Forrestall: Et si une des conditions de la vente était que Donkin Resources Limited achète la SDCB?

M. Coté: Pouvez-vous le garantir?

Le sénateur Forrestall: C'est peut-être totalement stupide, mais si l'on n'étudie pas les diverses options, nous ne pourrons pas vous donner de réponse.

M. Drake: Je crois que ce que vous vouliez savoir c'est la différence entre l'ouverture de Donkin par une société privée et son ouverture, par la Couronne.

Le sénateur Moore: Oui, à condition que, dans un cas comme dans l'autre, la société privée et l'État soient prêts à dépenser l'argent nécessaire pour le développement de la mine.

M. Drake: C'est une question pertinente et j'espère pouvoir y répondre.

Actuellement, 1 742 personnes travaillent à la Société de développement du Cap-Breton. C'est le chiffre que la SDCB nous a fourni la semaine dernière; il est donc assez précis. L'âge moyen de la plupart de ces travailleurs est de 45 ou 46 ans. Si Donkin Resources ouvre une nouvelle mine au Cap-Breton, elle emploiera 250 personnes. Elle l'a déjà bien précisé. C'est en 1992 que nos ventes de charbon ont atteint un chiffre record, au bout de 15 à 18 ans de développement du marché. Nous avons alors vendu 1,8 million de tonnes. M. Farrell disait que la production atteindrait 1,5 million de tonnes de charbon; autrement dit, on aura besoin d'à peu près 250 employés. Nous pouvons laisser cela de côté un instant si une société privée ouvre une mine et engage 250 travailleurs.

Les 1 742 personnes qui travaillent à la SDCB sont employées dans deux mines anciennes, la mine Prince et la mine Phalen. Phalen n'a que 11 ans, mais elle a été rapidement épuisée parce que nous l'avons exploitée très activement. Je ne sais pas exactement combien de temps cela a pris, mais il a fallu très longtemps avant que l'on atteigne 700 mètres de profondeur au puits 26, alors qu'il n'a fallu que 11 ans à Phalen. Phalen est aujourd'hui une mine de charbon épuisée.

Je ne sais pas comment la SDCB pourra tenir ses promesses. Il y a trois ans qu'elle se livre à des spéculations. À une réunion du 12 novembre 1997, nous avons interrogé l'adjoint exécutif de George White, le président de la Société de développement du Cap-Breton, au sujet des 10 à 15 années de vie utile de la mine Phalen. Il a déclaré que dans le plan antérieur, cette durée avait effectivement été fixée à 15 à 20 ans, d'après les données dont on disposait. Il a déclaré, et je cite: «L'information rendue publique l'an dernier n'était pas fondée sur une exploration approfondie de la mine Phalen.» Brendon MacIntyre a dit que la SDCB avait fondé sur de simples spéculations le programme quinquennal proposé à Ottawa.

Il y a longtemps que la SDCB agit ainsi, sans jamais être capable de confirmer ses arguments. Quand quelqu'un démolit ces arguments, qu'il s'agisse du Sénat, des syndicats ou du public, la SDCB est totalement incapable de répondre. Elle postule l'avenir des 1 742 employés sur ce qui se passe à Phalen et à Prince. Nous sommes absolument convaincus qu'ils ne seront plus là dans 20 ans. Notre moyenne d'âge est de 46 ans. Que se passera-t-il si quelque chose arrive à Phalen et si Donkin est privatisée?

La différence, sénateur, est que si Donkin devient une société d'État au lieu d'une société privée, nous emploierons plus de 250 personnes. Nous serons peut-être capables de compenser le préjudice social causé par la fermeture d'une de ces mines, alors que si Donkin est privatisée, nous ne pourrons pas le faire.

Vous trouverez une lettre dans la trousse de documentation que nous vous avons remise. Je crois que le sénateur McDonald l'a citée, hier. Il s'agit de Donkin. Essentiellement, ce que dit cette lettre -- et je suppose que c'était légèrement sarcastique -- c'est que la vente de Donkin est comparable à l'achat d'actions de Bre-X.

Dans un rapport interne du 6 octobre 1983, les représentants de la SDCB ont présenté les données suivantes relatives à la mine Donkin à la Seconde conférence des exploitants de mines de charbon à Sydney, en Nouvelle-Écosse. Ce document était intitulé «The Donkin-Morien Mine: Building the Mine of the Future». On pouvait y lire ceci:

On juge qu'il est possible et économiquement réalisable de produire 4,507 millions de tonnes par an...

C'est la SDCB qui dit cela.

...L'application d'un facteur de récurrence afin de tenir compte des contingences pratiques, permet de projeter une extraction brute de 3,831 tonnes par an, ce qui fera de Donkin-Morien une des plus grandes mines de charbon souterraines du monde. Lorsqu'il fonctionnera à pleine capacité, le complexe Donkin-Morien fournira 1 284 emplois.

Cette étude a été présentée par J.C. Marsh, directeur adjoint de projet.

Les chiffres concernant une mine Phalen profitable et les prévisions qui ont été présentés au Sénat et au gouvernement par la SDCB, l'an dernier, montraient que Phalen produirait 2 281 millions de tonnes de charbon et emploierait une main-d'oeuvre de 716 personnes. À ce niveau, ce serait rentable.

Quant aux tonnages qui pourraient être produits par la mine Donkin, le chiffre de 3,3831 millions de tonnes par an, nous paraît possible, à pleine capacité. Nous savons pertinemment qu'avec la technologie moderne, on n'a pas besoin de 1 284 travailleurs dans une mine; il est donc évident que les chiffres seront inférieurs aux estimations de 1983. Les 716 employés de la mine Phalen produisent 2,2 millions de tonnes de manière rentable selon les projections et les chiffres de la SDCB; si quelque chose arrivait à Phalen et que le personnel était transféré à Donkin ou la production atteindrait 3,381 millions de tonnes par an, cela représenterait 1,6 million de tonnes par an de plus avec le même effectif. Ce serait une véritable mine d'or.

On propose 250 travailleurs, ce qui n'est pas ce dont nous avons besoin à Donkin. Ce qu'il nous faut c'est une exploitation qui fonctionnera à plein régime et qui permettra de compenser les préjudices qui seraient subis en cas de fermeture de la mine Phalen.

Le sénateur Moore: Comment atteindre ces chiffres? Comment doubler la production, étant donné l'exemple cité par vous?

M. Drake: Vous auriez une couche de 12 pieds.

Le sénateur Moore: Avec un meilleur matériel?

M. Drake: Non. Le même type de matériel d'exploitation. Les conditions ne sont pas les mêmes que chez nous, mais je vais utiliser notre cas comme exemple. Il n'est pas impossible, pour 400 mineurs de produire 100 à 150 000 tonnes par mois. C'est le nombre projeté par une société d'ingénierie, et les tonnages projetés par la SDCB. À la mine Donkin, il y a trois couches exploitables. Je ne suis pas un spécialiste de l'exploitation simultanée de plusieurs couches, mais cela se fait dans le monde entier. Ces chiffres viennent tout droit des registres de la SDCB.

La différence entre une société privée et une société d'État est que la seconde peut employer plus de personnel, et qu'au lieu d'aller grossir le compte en banque de quelqu'un, au Canada ou à l'étranger, les profits seraient réinjectés dans l'économie sous forme d'emplois.

Le sénateur Moore: Manque de transparence, manque de confiance et un changement de direction, autant d'éléments qui ont été mentionnés à plusieurs reprises aujourd'hui. On a également dit que peu importaient les personnes qui étaient à la tête de la SDCB, cela ne changeait rien. S'agit-il simplement d'un cas classique de mésentente entre le syndicat et la direction? Depuis quelques années, tout ce que je lis m'indique que les choses s'arrangent entre les syndicats et les patronats.

Cela est très différent de ce que j'ai entendu aujourd'hui, en particulier de vous, M. Drake. L'entreprise doit présenter un rapport aux actionnaires ici à Ottawa et leur rendre des comptes. Ce n'est pas comme si elle n'était pas tenue de rendre des comptes. Vous voudrez peut-être répondre à mes commentaires.

M. Drake: Si la SDCB a de mauvaises nouvelles à communiquer, la direction les escamote dans son rapport. Nous surveillons cela depuis des années. Les dirigeants de l'entreprise sont venus ici et ont dit que tout allait bien. Ils ont dit qu'ils avaient négocié des conventions collectives avec les syndicats et que, pour la première fois en 21 ans, ils n'allaient pas être obligés d'aller en conciliation. Il y a, en plus de la convention collective, un système de primes qui a été négocié. Cela représente un gros avantage pour l'entreprise. Tout le monde s'entend très bien grâce au plan «Au-delà de l'an 2000».

J'ai écouté M. Shannon présenter son exposé. Il a mentionné toutes sortes des choses positives mais il n'a pas parlé de charbon.

Le sénateur Moore: M. White nous en a parlé de façon détaillée.

M. Drake: Je parle de l'exposé de M. Shannon; je ne parle pas de M. White.

Nous avons lu le rapport annuel de la SDCB. Il ne parle pas suffisamment des problèmes que nous connaissons dans ce secteur, des grands problèmes mondiaux qui nous touchent tous les jours en tant que mineurs, et que vous ne pouvez pas voir parce que vous êtes ici à Ottawa.

Nous avons parlé des ABM-20 la dernière fois que nous sommes venus. La SDCB a payé 6 millions de dollars pour l'achat de deux machines d'extraction et notre productivité a chuté de plus de 40 p. 100 avec ces machines. Nous avons fait tout ce que nous avons pu pour nous opposer à cet achat. Ces machines sont inutilisées, elles vont rester à la mine Phalen en attendant qu'on décide quoi en faire.

Quant aux microproblèmes de relations de travail, nous en résolvons près de 96 p. 100 de façon régulière. Il y a parfois de vives discussions mais bien souvent, il n'y en a pas. Nous résolvons ces questions. Il est par contre très difficile de résoudre les questions importantes parce qu'on nous ferme la porte au nez. Nous pensons que les gens qui prennent des décisions doivent rendre des comptes. Cela fait 20 ans que nous le répétons.

Vous allez pouvoir constater une chose aujourd'hui, et cela figure dans le hansard de cette année et dans celui de 1996, c'est que nous ne sommes pas des girouettes. Nous n'avons rien à gagner à critiquer la direction de la SDCB.

M. Grant: Nos gens qui travaillent dans les mines s'entendent très bien avec le personnel de surveillance qui se trouve les lieux, avec les superviseurs. Il y a toujours des problèmes mais nous ne sommes pas obligés d'aimer d'amour le directeur ou le président de la SDCB; nous les rencontrons tous les jours et nous nous retrouvons parfois devant un arbitre. Mais lorsque nous, les dirigeants syndicaux, apprenons par les journaux que la SDCB est en train de faire cadeau de la mine Donkin, cela est difficile à accepter.

Vous avez demandé comment Donkin Resources allait trouver des capitaux. Je ne sais pas où ils vont en trouver mais ils ont déjà obtenu 300 000 $ du gouvernement. C'est comme cela que cette entreprise s'est procuré un premier montant de 300 000 $ pour effectuer l'étude.

Hier, le comité a entendu des témoins parler de pensions et de mise à jour de la comptabilité pour ce qui est des pensions. Nous venons tout juste de découvrir, au cours des trois dernières semaines, que pour ce qui est de notre régime de pension contributif, où nous versons 5 p. 100 des salaires, la SDCB avait lancé une campagne de recrutement en 1997 et qu'elle avait convaincu 93 travailleurs à se joindre à ce régime et qu'elle avait pour cette raison cessé de verser des cotisations. Les responsables ont découvert qu'ils pouvaient ne rien verser en 1997 et éviter ainsi de payer des cotisations s'élevant à 800 000 $ dans notre régime de pension contributif. La SDCB ne vous en a pas parlé hier mais c'est de là que vient cette méfiance; c'est à cause des questions vraiment importantes.

Nos gars sont en train d'extraire du charbon, ils nettoient 3 Centre aujourd'hui, ils vont essayer de mettre en route 4 Deep, et il n'y a aucune tension entre les travailleurs et les superviseurs. C'est contre l'attitude de la haute direction de la SDCB que nous en avons, ce sont eux qui ont décidé de faire cadeau de la Donkin, ce sont eux qui ne versent pas 800 000 $ de cotisations dans le régime de pension contributif parce qu'ils ont réussi à recruter 93 nouveaux membres en 1997.

Le sénateur Moore: Est-ce qu'ils encouragent les nouveaux membres à s'inscrire au régime de pension contributif?

M. Grant: Nous reconnaissons qu'il est préférable d'avoir le plus d'employés qui cotisent au régime de pension. Nous avons appuyé la décision qu'avait prise la SDCB d'essayer de recruter de nouveaux membres non seulement auprès des TCA mais parmi tous les travailleurs de la SDCB. Il y a eu des réunions spéciales en soirée pour expliquer aux employés et à leur conjoint les avantages du régime.

Quatre-vingt-treize nouveaux membres se sont joints à ce régime cette année. Nous sommes d'accord avec cela. Nous n'avons toutefois pas été d'accord quand nous avons vu qu'après avoir recruté ces membres, l'entreprise avait cessé de faire des versements.

Le sénateur Moore: Il ne fait aucun doute dans mon esprit que le métier de mineur est le plus difficile au monde.

M. Grant: C'est même encore plus difficile que celui de sénateur.

Le sénateur Moore: Les mineurs canadiens sont probablement les meilleurs mineurs au monde. Je comprends ce que vous disiez tout à l'heure à propos des avantages pour la collectivité mais vous ne pouvez pas jouer sur les deux tableaux. Vous serez toujours amenés à vous opposer à la direction sur certaines questions. Dans ces cas-là, il vous faudra trouver des solutions. Je ne sais pas si vous avez un comité paritaire qui travaille sur ces questions mais il y a beaucoup d'entreprises qui en ont de nos jours; ils diffusent l'information d'intérêt général. C'est peut-être une chose que vous pourriez essayer de mettre sur pied. Vous ne pouvez pas jouer en même temps le rôle du syndicat et celui de la direction. Vous devez accepter cela.

M. Drake: Ce n'est pas ce que nous essayons de faire, monsieur le sénateur; loin de là. Si la direction administrait les mines, nous nous occuperions du charbon et cela irait très bien mais si nous nous occupons du charbon et que la direction n'administre pas l'entreprise, nous aurons toujours des problèmes.

M. MacIntyre: Lorsqu'ils ont annoncé l'entente relative à la Donkin, nous nous trouvions dans le même hôtel à un autre étage. Ils n'ont même pas eu la courtoisie de venir nous dire que la Donkin allait être vendue.

Le sénateur Buchanan: Le sénateur MacDonald a parlé du coût en capital de la nouvelle mine Donkin. J'ai pris un moment pour me rafraîchir la mémoire au sujet des rapports que nous avions demandés. Les rapports préparés par Montreal Engineering, par Kilborn Engineering, par Associated Mining et le rapport de Steve Farrell rédigé pour le compte des UMW, montrent tous que pour poursuivre le développement de la mine Donkin jusqu'aux deux parois, il va falloir investir près de 125 millions de dollars, en dollars de 1996. Tous ces gens ne peuvent se tromper.

Quelqu'un a mentionné l'étude Boyd. Savez-vous que l'étude Boyd mentionne certes la mine Donkin mais elle ne contient aucune analyse approfondie de la mine Donkin?

Est-ce bien exact, monsieur Drake?

M. Drake: En mai 1997, le sénateur Murray a clairement indiqué que l'étude Boyd n'accordait aucune importance à la mine Donkin. L'étude a peut-être coûté 500 000 $, mais c'est 50c. qu'ils ont dépensé sur la Donkin. Ils ont à peine étudié cette mine. Le rapport contenait en outre certaines contradictions sur la question de la mine Donkin.

Le sénateur Buchanan: Cela est très différent de ce que l'on peut lire dans les rapports de Montreal Engineering, de Kilborn Engineering, d'Associated Mining et de Steve Farrell.

Il est important de voir quelles sont les personnes qui ont participé à cette étude. Steve Farrell est un des meilleurs ingénieurs des mines qui existe. Coady Marsh et Bill Shaw ont également participé à cette étude. Ces gens savent de quoi ils parlent. Ce n'est peut-être pas mon cas mais c'est le cas de ces gens: Coady Marsh, Ewart Blanchard, M. Kirkpatrick de Power Corporation, Armand Pinard, Steve Rankin, Joe Shannon, Bill Shaw, D. G. Brown, Kingsley Brown, Al Carroll, John French, Victoria Harnish, Richard Hornby, John Smith, Arthur Turner. Ce sont des ingénieurs, des professionnels qui travaillent dans le secteur des charbonnages et ils ont pris beaucoup de temps pour préparer ce rapport.

On trouve dans ce rapport une analyse approfondie des coûts d'exploitation de la mine Donkin; elle a été préparée par Montreal Engineering et s'intitule «Étude de faisabilité de la mine Donkin.»

Je crois que vous l'avez, monsieur Drake?

M. Drake: Oui.

Le sénateur Buchanan: Ils affirment que, selon les critères fixés, ce projet devrait permettre de récupérer le capital investi et offrir un rendement permettant d'assumer le coût du financement fédéral fixé à 10 p. 100 par an; avec les prix établis par ces personnes, l'étude de Montreal Engineering montre que le charbon semble être concurrentiel par rapport aux autres solutions. Il s'agit de la mine de charbon Donkin.

Le sénateur MacDonald avait raison: on a mentionné aujourd'hui la question de la faisabilité de la mine mais pour dire que la faisabilité de cette mine avait déjà été démontrée. Il faut maintenant se mettre au travail et vider les puits puis calculer combien cela va coûter en dollars 1996 en nous fondant sur tous ces rapports d'ingénieurs.

Les sénateurs Moore et MacDonald s'inquiètent manifestement de ce que cela peut coûter mais je dirais que l'on pourra récupérer ces fonds. Montreal Engineering a déclaré qu'en amortissant le coût en capital sur 25, 30 ou 40 ans, les recettes vont permettre de rembourser ces coûts ainsi que tous les coûts associés aux prêts consentis par le gouvernement fédéral.

J'aurais une question concernant la Cape Breton Alliance. J'ai parlé à deux ou trois de ses membres. Ils ont demandé à Bill Shaw d'effectuer une analyse du projet de l'île de Sable et de déterminer les répercussions, tant négatives que positives que ce projet pourrait avoir sur l'industrie de Cap-Breton et sur l'industrie minière.

Monsieur Drake, êtes-vous membre de cette Cape Breton Alliance?

M. Drake: Oui.

Le sénateur Buchanan: Que pense votre syndicat du projet de l'île de Sable et des répercussions qu'il pourrait avoir sur le secteur des charbonnages? N'oubliez pas que Power Corporation a déjà déclaré qu'elle a l'intention de conclure un accord avec les producteurs du gaz de l'île de Sable pour la centrale de Tuft's Cove à Halifax. Ce n'est pas une mauvaise chose parce que, le sénateur Forrestall le sait d'ailleurs fort bien, les résidus du pétrole polluent l'air depuis des années. Nous avons reçu beaucoup de plaintes à ce sujet. Le gaz naturel va grandement améliorer l'environnement dans la région de Halifax-Dartmouth en mettant fin à l'utilisation du pétrole brut dans cette centrale.

J'ai parlé la semaine dernière aux gens de Power Corporation, à ceux du projet de l'île de Sable et ils ont mentionné qu'apparemment le gaz naturel ne serait pas compétitif par rapport au charbon si l'on voulait l'utiliser dans l'industrie du Cap-Breton, à Lingan 1, 2 et 3 et à Point Aconi. Voilà une bonne nouvelle pour les charbonnages.

M. Drake: Nous avons effectué un peu de recherche mais de façon très limitée parce que nous n'avons pas les moyens d'approfondir cette question. C'est pourquoi nous nous sommes regroupés dans la Cape Breton Alliance.

J'attire votre attention sur le tableau intitulé «Énergie commercialisée en BTU».

Une livre de charbon représente environ 13 000 BTU. C'est sa valeur énergétique. Une tonne métrique contient 2 200 livres. Une tonne de charbon est l'équivalent de 28,6 millions d'unités thermiques britanniques ou MBTU.

Nova Scotia Power soutient que, selon le prix du gaz, elle pourrait convertir sa centrale thermique de Tuft's Cove qui peut produire 350 mégawatts pour qu'elle puisse brûler 60 000 MBTU de gaz par jour et une unité de 150 mégawatts de Trenton qui consommerait 30 000 MBTU de gaz naturel par jour.

Quatre-vingt-dix mille MBTU de gaz naturel par jour représente l'équivalent de 3 146,8 tonnes de charbon par jour.

Dans le dernier tableau, nous avons pris le chiffre de 90 000 MBTU de gaz naturel, quantité que Nova Scotia Power a déclaré vouloir utiliser chaque jour à Tuft's Cove, et nous l'avons multiplié par 365 pour obtenir l'équivalent énergétique par an. Nous en arrivons à une valeur énergétique de 1 148 millions de tonnes de charbon par an.

Nova Scotia Power a déclaré qu'elle entendait procéder à cette conversion. On a parlé hier de l'accord avec le projet de l'île de Sable et de la façon dont ce gaz pourrait être utilisé à Tuft's Cove. Comme l'a déclaré M. White hier, et je suis à peu près sûr qu'il ne se trompe pas là-dessus, Nova Scotia Power va commencer par brancher sa centrale la plus efficace. D'après les indications contenues par le rapport du comité d'examen de l'île de Sable, il semble que Nova Scotia Power utilise ce qu'on appelle une centrale électrique à cycle combiné à Tuft's Cove, c'est-à-dire qu'ils ajoutent un cycle de brûlage supplémentaire avant de produire l'électricité, ce qui a pour effet d'augmenter l'efficacité.

D'après ce que nous croyons savoir, Tuft's Cove est une centrale peu rentable et qui pollue beaucoup à cause du pétrole à haute teneur en soufre qu'elle utilise. Nova Scotia Power a décidé de sous-utiliser Tuft's Cove. Nous ne connaissons pas exactement la puissance produite par cette centrale mais on peut l'évaluer à environ 100 mégawatts. Sa capacité totale est de 350 mégawatts. Si Nova Scotia Power met en oeuvre le projet décrit ci-dessus et transforme la centrale de Tuft's Cove en une centrale à cycle combiné, l'efficacité de cette centrale passera de son maximum actuel qui est de 350 mégawatts à près de 834 mégawatts. Ce sont des amis qui travaillent dans cette entreprise qui nous ont fourni ces chiffres.

Cela veut dire que si Nova Scotia Power produit à l'heure actuelle 100 mégawatts à la centrale de Tuft's Cove qui est sous-utilisée, et que, si sa production passe à 834 mégawatts, cette entreprise va être obligée de vendre quelque part ce surplus de puissance; elle ne peut en effet se contenter de la produire. Si elle ne peut augmenter sa part de marché d'un équivalent correspondant à 834 mégawatts, elle va devoir réduire sa production ailleurs. Tout indique que ce serait la production de la centrale électrique de Lingan à New Waterford et à Point Aconi du côté nord qui serait réduite. Nova Scotia Power pourrait être amenée à réduire la puissance produite actuellement à Point Aconi et Lingan, que l'on peut évaluer à l'heure actuelle à environ neuf ou dix, et la ramener à huit, sept ou même six, selon la quantité d'électricité qu'elle aura réussi à vendre. Le chiffre exact dépendra des décisions de Nova Scotia Power. Il est impossible de prédire quelle seront ces décisions.

Ce que nous savons par contre, c'est que cela aura des répercussions importantes pour nous. Cela représente à l'heure actuelle un tiers de notre production de charbon. Nous réussirons peut-être à produire 300 millions de tonnes par an. Cela représente un tiers de nos emplois. Cela pourrait toucher 500 emplois sur un total de 1 500.

En outre, d'après les rapports que nous avons reçus au sujet des centrales électriques à cycle combiné, si le gaz naturel se rend dans la partie continentale de la Nouvelle-Écosse et que Nova Scotia Power décide qu'au lieu de construire une nouvelle centrale au charbon, elle va construire une centrale alimentée au gaz, celle-ci serait construite sur la partie continentale et non pas au Cap-Breton. Cette électricité supplémentaire serait distribuée sur le réseau de Nova Scotia Power. Là encore, cela aurait des répercussions négatives sur le secteur du charbon.

La déréglementation va devenir une réalité au Canada. Nova Scotia Power va sans doute subir la concurrence d'Ontario Hydro, d'Hydro-Québec et de l'électricité produite à Boston à partir du gaz de Nouvelle-Écosse provenant de l'île de Sable. Les Américains n'auraient qu'à renverser la vapeur et nous renvoyer cela sur nos lignes de transmission. La déréglementation leur permettrait de le faire.

Nova Scotia Power va-t-elle être en mesure de faire concurrence à ces autres fournisseurs ou va-t-elle être obligée de réduire davantage sa production? Dans ce cas-là, quelles seront les centrales touchées? Il y a beaucoup de questions auxquelles le comité d'examen du projet de l'île de Sable n'a pas vraiment répondre.

Avant d'en terminer avec la question du gaz de l'île de Sable, je tiens à consigner au procès-verbal quelques recommandations extraites de la proposition de mise en valeur conjointe de la Nouvelle-Écosse de 1983, qui était en fait un rapport sur le projet d'exploitation conjointe du gaz naturel. Au chapitre contenant les «Recommandations» se trouvait la recommandation no 1 qui se lisait:

Que soit préparée une étude d'impact socioéconomique qui évaluerait les avantages que pourrait entraîne pour la Nouvelle-Écosse, et en particulier pour l'industrie du Cap-Breton, les décisions que le gouvernement pourrait prendre à l'égard de la conversion au gaz naturel des centrales thermiques.

Le rapport recommandait ensuite:

Que soit préparée une étude comparative des effets et des avantages globaux associés à des bases d'approvisionnement extracôtières à Halifax, Dartmouth, dans le détroit de Canso et le Cap-Breton industrialisé.

En 1997, dans le rapport sur le projet de l'île de Sable, la première note ajoutée sous l'expression «Évaluation socioéconomique» énonce:

Les impacts sociaux d'un projet sont les changements qui touchent les citoyens dans les collectivités où ils vivent. Ces changements peuvent concerner la situation économique, l'emploi, la santé, l'éducation, les organismes sociaux ainsi que les valeurs et les perceptions relatives à la qualité de la vie.

Planification et conception: Lorsqu'il est tenu compte dès le début des répercussions sociales, il est possible d'intégrer au projet des mesures d'atténuation des effets et de renforcement des avantages.

Le public a reçu des renseignements détaillés et complets concernant le projet et les trois rondes de discussions tenues dans les trois zones d'évaluation communautaires ont fourni à la population la possibilité de poser des questions, d'obtenir des réponses et d'exprimer ses préoccupations.

Les trois zones socioéconomiques dont ils parlent sont: Country Harbour, Point Tupper et Halifax-Dartmouth. Ils ne mentionnent même pas Cap-Breton dans cette évaluation alors que c'est pourtant le Cap-Breton qui va être le plus touché par les répercussions socioéconomiques négatives du projet de l'île de Sable, s'il se réalise.

En 1983, lorsqu'ils ont examiné la Loi sur l'évaluation environnementale pour déterminer le sens des expressions «étude socioéconomique» et «évaluation environnementale», ils ont interprété ces définitions comme si elles voulaient dire: «il faut faire une étude portant sur le Cap-Breton.» Ce que nous n'arrivons pas à comprendre, c'est pourquoi, en 1997, lorsqu'ils ont examiné la même Loi sur l'évaluation environnementale, ils ont conclu qu'elle voulait dire «il n'est pas nécessaire de faire une étude sur le Cap-Breton.»

Je ne sais pas si le moment est bien choisi mais si vous permettez, j'aimerais consigner au procès-verbal les recommandations qu'ont formulées les UMW au sujet du projet de l'île de Sable:

1. Que Mobil et les proposants fassent l'objet d'un avis émanant du comité d'examen du projet de l'île de Sable relevant l'insuffisance de l'étude des effets socioéconomiques du projet de l'île de Sable sur l'industrie du Cap-Breton.

2. Que Mobil et les proposants soient tenus d'effectuer une étude détaillée des impacts socioéconomiques, tant positifs que négatifs, du projet de l'île de Sable sur l'industrie du Cap-Breton. Cette étude devrait notamment traiter des répercussions sur l'industrie du charbon.

3. Troisièmement, que Mobil et les proposants élaborent un plan global destiné à atténuer les conséquences négatives que pourrait avoir le projet de l'île de Sable sur l'économie et les générations futures du Cap-Breton industrialisé.

Si vous avez des questions sur le projet de l'île de Sable, j'essaierai d'y répondre.

Le sénateur Butts: Le sénateur Buchanan et moi connaissons des ingénieurs. Il connaît tous ceux qui sont excellents et je connais quelques-uns des mauvais. Cela me paraît faire problème.

Vous avez dit que l'étude Boyd n'était pas d'une grande utilité mais elle a donné cinq raisons précises qui militaient contre l'exploitation de la mine Donkin. Une de ces raisons était l'impossibilité de faire de l'extraction sélective, et c'est la raison pour laquelle j'ai posé cette question hier soir. La direction a reconnu avec moi que cela était difficile. Il n'y a pas de niveaux repères, ce sont les termes utilisés dans le rapport Boyd. Si cela n'est pas précis, je ne sais pas ce qu'il vous faut.

Un autre ingénieur, un de mes amis, qui n'a pas comparu devant le comité m'a déclaré en 1988, que, lorsqu'ils ont inondé la mine Donkin, ils l'ont en fait condamnée à jamais. Nous n'avons pas parlé de cela. Il m'a dit qu'il leur avait demandé à genoux de ne pas le faire. En outre, il m'a mentionné que si l'on pompait l'eau qui se trouve dans cette mine depuis 1988, elle est tellement noire et polluée que l'on va encore se retrouver avec une décharge de goudron. Voilà ce que l'on m'a dit.

M. Drake: Devrais-je répondre à cela?

Le sénateur Butts: J'aimerais d'abord faire deux ou trois commentaires. On nous a dit que le prix de la tonne de charbon extraite par la SDCB est supérieur de 8 $ à 10 $ au prix mondial. Vous sentez-vous tenu d'assurer la rentabilité commerciale de la SDCB?

M. Drake: Sur la question de la mine Donkin, les éléments qui démontrent que l'inondation de ces galeries était la chose à faire l'emportent largement sur ce que peuvent affirmer une ou deux personnes. À l'époque, nous étions également contre mais pour une autre raison. Nous nous opposions à cette mesure parce que nous voulions que l'on ouvre la mine immédiatement. Il n'existait aucune donnée pouvant démontrer que cela n'était pas la chose à faire. La plus grande partie de l'eau qui se trouve dans la mine Donkin à l'heure actuelle vient des nappes souterraines; c'est de l'eau qui a filtré à partir de la surface ou des couches inférieures. Il n'y a eu aucune activité minière depuis cette époque.

Nous avons une installation de traitement de l'eau d'une valeur de 2,5 millions de dollars que la société a installé à la mine Lingan en 1982. Elle a été utilisée pendant sept jours et ensuite, elle a été fermée. C'est une installation toute neuve qui utilise une technologie de pointe. Elle n'a jamais servi. Il serait facile de déplacer cette installation de traitement de l'eau à la mine Donkin. Même s'il fallait reprogrammer l'ordinateur parce que ce n'est pas le même type d'eau -- l'essentiel de l'usine est là, cela a coûté 2,5 millions de dollars -- cela ne coûterait pas grand-chose.

Le sénateur Butts: J'aimerais pouvoir être aussi optimiste mais la personne qui m'a déclaré ceci est également un ingénieur minier et il a assisté à l'inondation. C'est le problème que je vais ramener avec moi. Il serait simple de vider cette eau mais il y a l'acide.

M. Drake: C'est à cela que servent les installations de traitement de l'eau, à savoir, traiter l'eau pour qu'elle ne nuise pas à l'environnement.

Le sénateur Butts: Vous n'êtes pas le seul à connaître l'existence de cette installation de traitement de l'eau.

M. Drake: La SDCB a payé pour la construire.

Le sénateur Butts: C'est exact. Ils l'ont construite.

M. Drake: Tout le monde sait qu'elle est là, oui.

Le sénateur Buchanan: La SDCB a déclaré qu'il ne serait pas difficile de vider ces galeries.

Le sénateur Butts: Je n'ai pas entendu cela. Je l'ai entendu d'un autre ingénieur.

M. Drake: La plupart des renseignements dont nous disposons, même ceux fournis par M. Farrell, indiquent que le pompage d'une mine est une opération courante dans cette industrie. Cela se fait dans le monde entier de façon régulière.

Le sénateur Butts: Il est facile de pomper l'eau mais qu'allez-vous en faire quand vous l'aurez pompée? Il faudra lui donner un traitement tellement complet que cela va ajouter des millions de dollars au coût de l'opération.

M. Drake: Non.

Le sénateur Butts: Eh bien, je dois avoir choisi les mauvais ingénieurs et les mauvais amis.

M. Drake: La deuxième partie de la question concernait la responsabilité des employés à l'égard du prix de la tonne de charbon produite par la SDCB.

Si vous regardez les déclarations officielles, vous constaterez que nous avons toujours répété qu'un des principaux problèmes de la SDCB était le prix de la tonne et que tout le monde doit faire sa part pour réduire ce prix-là. Cela est officiel. Au cours des audiences, des sénateurs ont félicité les syndicats d'avoir choisi d'assumer cette responsabilité.

La Société de développement du Cap-Breton fermait habituellement ses portes pendant trois semaines pour les congés des mineurs. Au cours de cette période, il est possible d'extraire du charbon pendant un certain nombre de jours. Traditionnellement, les mineurs passent leurs congés au Cap-Breton. Nous avons accepté dans notre convention collective, en nous fondant sur des renseignements fournis par la SDCB, de renoncer à ce que l'on ferme l'usine pendant les congés d'été des mineurs de façon à permettre à cette société de stabiliser sa production. La société peut aujourd'hui agir comme elle le souhaite. C'est une disposition de la convention. Elle représentait une concession importante de la part de nos travailleurs. Ils ont en fait renoncé aux droits de prendre des congés pendant ces trois semaines. Ils doivent maintenant planifier leurs vacances. Cela est encore volontaire. Si la société ne recrute pas suffisamment de volontaires pour travailler pendant les congés des mineurs et extraire le charbon, si cela est nécessaire, alors elle a le droit d'imposer cela aux mineurs. Voilà quelque chose que nous avons fait.

Le prix de la tonne comprenait également un autre coût, à savoir celui d'un régime de primes qui variaient d'une année à l'autre. C'était une des grandes questions qu'il fallait régler, comme l'a mentionné M. Shannon l'année dernière, si l'on voulait mieux contrôler le prix de la tonne pour éviter qu'il varie. Tous les syndicats ont accepté d'intégrer ces primes dans les salaires garantis aux membres des syndicats. Cela permettait à la SDCB de mieux contrôler cette variable. La Société de développement du Cap-Breton n'offre plus de régime de primes.

Voilà deux choses que la SDCB voulait que nous fassions. Nous avons reconnu qu'il fallait les accepter et c'est ce que nous avons fait; nous avons agi comme des employés responsables. Nous avons eu du mal à convaincre nos membres, mais nous avons réussi à le faire et nos membres l'ont accepté. Il s'agissait là de mesures générales.

Sur une échelle plus petite, nous avons introduit plusieurs mesures visant à réduire le coût de la tonne pour la société. Avant la fermeture de la mine Lingan, nous avions formé une équipe de récupération qui était très efficace. Nous prenions des machines qui étaient inutilisées depuis des années, des semaines ou des mois. Nous les remettions à neuf pour que l'on puisse les utiliser à nouveau. Cela a permis à la société d'épargner des sommes importantes.

Depuis quelque temps, cette idée a été pratiquement abandonnée. Il y a deux ans, nous avons abordé cette question avec les dirigeants de la société et nous avons redémarré ce projet à la mine Phalen, ce qui a permis d'épargner des sommes importantes. Voilà des idées que l'on peut mettre en application pour réduire le prix de la tonne de charbon.

De sorte que, oui, nous reconnaissons qu'en tant qu'employés, nous devons faire notre part. Si vous pouviez visiter la mine Phalen aujourd'hui, vous constateriez que nous voulons vraiment préserver cette industrie. Nous ferons ce qu'il faut faire mais nous avons besoin d'aide. C'est pourquoi nous sommes ici et c'est pourquoi nous espérons que le gouvernement fédéral va examiner les déclarations qui ont été faites aux trois audiences du Sénat et qu'il va dire: «Oui, nous pouvons faire quelque chose ici. Ces gens ont de bonnes idées. Mettons-les en pratique et essayons de rentabiliser cette industrie.»

Le sénateur Forrestall: Quelle est l'ampleur du problème de l'eau à la mine Phalen? À combien l'évalueriez-vous sur une échelle de 1 à 10?

M. Allie MacLean, membre de United Mine Workers Association: Sur une échelle de 1 à 10, je dirais 2,5. Nous pouvons nous résoudre ce problème d'eau.

Le sénateur Forrestall: Dès que vous arrivez à la roche, est-ce que cela ne complique pas les choses?

M. MacLean: Nous ne savons pas à quoi nous attendre tant qu'il n'y a pas eu d'exploration.

M. Drake: Pour résumer, nous avons dit beaucoup de choses aujourd'hui, tout comme nous l'avons fait les dernières fois que nous avons comparu devant le Sénat. Nous ne prétendons pas que tout ce que nous disons est exact à 100 p. 100 ou juste à 100 p. 100, mais ce sera à vous d'en décider lorsque vous formulerez vos recommandations. Nous appuyons plusieurs recommandations qui ont déjà été faites par le comité du Sénat. Si vous partez aujourd'hui en étant disposés à réfléchir à ce que nous avons dit aujourd'hui, cela ne pourra qu'être bon pour l'industrie parce que le Sénat est mieux placé que nous lorsqu'il s'agit de convaincre le gouvernement fédéral.

Voici un morceau de charbon du Cap-Breton. C'est mon père qui les fabrique pour les vendre comme souvenir. Il a travaillé 40 ans comme mineur. Il les donne à ses amis. Pour comprendre l'industrie du charbon du Cap-Breton, il faut comprendre la psychologie du mineur de Cap-Breton. Nous ne sommes pas simplement des gens qui travaillent sous la terre. Nous ne nous considérons pas comme des gens qui vont sous la terre pour extraire du charbon. Cela fait 300 ans que nous apprenons à nous entraider dans ce secteur.

Lorsque vous êtes à huit kilomètres sous terre, vous faites le travail le plus dangereux du monde. Le gars qui est à côté de vous fait partie de votre famille et nous sommes en train de protéger notre famille en ce moment. Que feriez-vous si quelqu'un faisait mal à quelqu'un de votre famille?

Pour les mineurs du Cap-Breton, ceci n'est pas un morceau de charbon. Cela représente la famille, la dignité et un mode de vie. Nous devrions tous essayer de préserver cela.

Le président: Vous avez abordé de nombreux sujets et exprimé de nombreuses préoccupations; vous avez également apporté un certain nombre de réponses. Nous allons examiner tout cela très sérieusement.

J'aimerais que vous partiez en sachant que tous les sénateurs qui ont participé à cette enquête sont des gens qui savent ce que vous voulez mais qui partagent aussi vos origines. Dans une grande mesure, ce sont les mêmes.

Vous parlez de l'entraide qui s'est développée entre mineurs pendant trois siècles. Si vous pensez à ce qui est arrivé aux pêcheurs de la région de l'Atlantique et si vous dites «faisons quelque chose avec ces pêcheurs, nous allons les former pour qu'ils fassent autre chose.» On aurait pu les déplacer mais il y a le fait que la pêche n'est pas uniquement un mode de vie comme un autre, c'est une façon de vivre pour la plupart des habitants qui vivent dans la région de l'Atlantique. C'est ce qui nous donne notre force et fait de nous ce que nous sommes. Des liens se sont tissés au cours des générations et même dans certains cas, au cours des siècles à cause des difficultés que nous avons connues et des problèmes que nous avons vécus.

Notre communauté, notre groupe, s'en est sortie. Les choses ne sont pas ce qu'elles étaient il y a 30 ou 40 ans, à l'époque où les employés se dressaient contre les employeurs, les syndicats contre la direction. Cela ne s'appliquait pas uniquement au secteur du charbon mais partout. Le marché s'est mondialisé dans presque tous les domaines. Et cela l'est de plus en plus.

Cet esprit de confrontation -- et croyez-moi, lorsque je vous dis que j'ai passé beaucoup de temps à travailler dans le mouvement syndical et à représenter les syndicats. Cette attitude de confrontation, une dynamique qui m'englobait totalement, tend à transformer la SDCB, en tant qu'organisme, et le syndicat, en tant que représentant de ses membres et des employés, et les amène à agir ensemble contre la concurrence mondiale. Cela le sera encore davantage comme l'indique ce que vous avez dit au sujet de la concurrence que peut apporter le gaz naturel.

Je trouve très encourageant que les travailleurs aient la volonté de régler les problèmes, de faire mieux, de devenir plus concurrentiels à l'échelle du monde.

L'essentiel de nos recommandations -- et nous ne formulons que des recommandations, nous n'élaborons pas de politiques -- c'est que nous sommes en faveur de votre industrie, des travailleurs et des collectivités; nous sommes pour une amélioration de votre mode de vie et nous voulons que vous demeuriez un secteur dynamique de ce qui, nous le savons, est une partie importante de la région de l'Atlantique.

Au nom des sénateurs -- et certainement en mon nom personnel -- je peux vous dire que nous apprécions ce que vous nous avez apporté. Nous apprécions ce que vous, votre industrie et vos gens veulent dire pour la région de l'Atlantique.

La séance est levée.


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