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DEVC - Comité spécial

La Société de développement du Cap-Breton (spécial)

 

Délibérations du comité spécial du Sénat sur
la Société de développement du Cap-Breton

Fascicule 4 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 3 décembre 1997

Le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton se réunit aujourd'hui à 15 h 30 pour étudier les rapports d'activité de la Société de développement du Cap-Breton et d'autres questions connexes.

Le sénateur John G. Bryden (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Aujourd'hui, nous avons avec nous l'honorable Ralph Goodale, ministre des Ressources naturelles. Avant de faire votre déclaration, monsieur le ministre, vous pourriez peut-être présenter vos collègues. Nous passerons ensuite aux questions.

M. Ralph Goodale, C.P., député, ministre des Ressources naturelles Canada: J'ai le plaisir de vous présenter Mme Linda Keen, sous-ministre adjointe, Secteur des minéraux et des métaux, et M. Denis Lagacé, directeur général, Direction de la politique des minéraux et des métaux, Secteur des minéraux et des métaux, Ressources naturelles Canada.

Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous rencontrer. Je sais que les contraintes de temps posent toujours des difficultés. Comme les honorables sénateurs le savent, je suis en train de me préparer à partir pour Kyoto afin d'assister à la conférence sur le changement climatique. Je suis toutefois heureux d'avoir pu réserver une heure pour participer aux délibérations de votre comité.

Je m'excuse d'avoir dû annuler notre rencontre prévue pour le lundi de cette semaine et je vous suis reconnaissant d'avoir pu m'accueillir aujourd'hui.

Je commencerai par vous louer de votre intérêt dans la Société de développement du Cap-Breton et de votre souci évident et sincère de l'avenir économique du Cap-Breton. Je suis heureux d'avoir l'occasion de discuter de la position du Canada sur cette question et d'autres questions connexes.

Je tiens tout d'abord à préciser que je partage vos préoccupations concernant la région du Cap-Breton. Je suis troublé par les taux inadmissibles de chômage sur l'île, surtout chez les jeunes. Je suis également préoccupé par la situation économique à long terme et les progrès sociaux de cette région du Canada.

En tant que ministre des Ressources naturelles, je suis tout à fait conscient de la mesure dans laquelle les régions rurales partout au Canada, dont un grand nombre au Cap-Breton, dépendent d'industries primaires solides pour leur bien-être économique. Au Cap-Breton, l'exploitation du charbon a longtemps été le pivot de l'économie.

Comme vous l'avez appris au cours des audiences précédentes, Devco doit devenir autosuffisante d'ici 1995-1996. Nous estimons qu'il s'agit d'une mesure nécessaire pour assurer la survie tant de la société que de la tradition du charbonnage au Cap-Breton. Les gouvernements ne sont plus intéressés à financer des mégaprojets, ni à subventionner les entreprises et l'industrie; l'autosuffisance économique est devenue un facteur d'une importance primordiale.

Vous savez également que l'objectif d'autosuffisance établi pour Devco n'a pas été atteint à la date prévue. À la suite d'une évaluation technique et opérationnelle de Devco par la John T. Boyd Company et de vastes consultations au sein de la collectivité, Devco a soumis un plan d'entreprise au gouvernement visant à la rendre viable sur le plan commercial d'ici 1999-2000. En fonction de ce plan d'entreprise, le gouvernement a décidé de continuer à aider Devco. Par conséquent, nous lui avons consenti un prêt d'exploitation jusqu'à concurrence de 69 millions de dollars sur trois ans. La société a géré ses activités efficacement dans les limites de ce niveau de financement.

Cela dit, nous savons tous que Devco continue de connaître des problèmes géologiques, particulièrement à la mine Phalen. L'équipe de gestion de Devco ne s'en est pas cachée. Elle craint en particulier qu'un problème de dégagement de grisou risque de nuire à la survie de la mine Phalen. La société s'est engagée publiquement à envisager toutes les solutions possibles à ces problèmes.

Ce qui est certain, c'est que les problèmes à la mine Phalen seront pris en compte lorsque Devco procédera à la planification annuelle de ses opérations. Nous prévoyons que Devco présentera d'ici les trois ou quatre prochains mois, un plan d'entreprise révisé qui renfermera des recommandations sur l'orientation future de la société. M. Joseph Shannon, le président de Devco, a indiqué que tous les débouchés commerciaux seront envisagés dans le nouveau plan d'entreprise de la société.

Je ne peux pas bien entendu prédire quelles seront les recommandations concernant l'avenir de Devco. Cependant, la viabilité commerciale continuera d'être l'objectif premier de la société.

Comme le comité le sait, l'avenir de la mine Donkin a fait l'objet de nombreuses discussions ces derniers mois. Lors de votre deuxième série d'audiences sur Devco en mars dernier, ma prédécesseure, l'honorable Anne McLellan, avait indiqué que le gouvernement du Canada était disposé à accueillir des propositions du secteur privé pour déterminer la faisabilité de développer la mine Donkin, et cela demeure notre position aujourd'hui.

À la suite de ces audiences, la ministre McLellan avait reçu un avant-projet de Donkin Resources Limited, ou DRL, pour l'exécution d'une telle étude. Comme Devco est propriétaire de Donkin et que le développement d'une nouvelle mine de charbon au Cap-Breton pourrait avoir d'importantes retombées commerciales pour la société, le ministre a transmis la proposition à M. Shannon.

On a demandé à Devco d'étudier la proposition en fonction de sa stratégie commerciale générale et de fournir une réponse directement à M. Steve Farrell, président de Donkin Resources Limited. Comme vous le savez, Devco et DRL ont par la suite signé une lettre d'intention en vue de la négociation d'une entente détaillée au sujet de l'aliénation des terrains et des concessions associées à la mine Donkin. DRL a ensuite entrepris une série d'études préliminaires afin de déterminer s'il était possible d'exploiter la mine commercialement.

Comme M. Shannon l'a indiqué lors de sa comparution devant le comité, Devco vient de recevoir les études de DRL sur la qualité commerciale du charbon et le plan conceptuel de la mine. La négociation de l'entente détaillée a été suspendue jusqu'à ce que la société examine ces rapports et que l'évaluation des actifs de la mine Donkin soit terminée.

Pour l'information du comité, notre gouvernement a donné à Devco des lignes directrices très claires concernant la négociation de toute entente pour la vente de la mine Donkin. Il faut également souligner qu'il appartient au gouvernement de prendre la décision finale concernant cette entente puisqu'il s'agirait d'un écart important du plan d'entreprise quinquennal de Devco, qui a été approuvé. Lorsque nous recevrons le plan d'entreprise révisé de Devco au cours de la nouvelle année, notre gouvernement étudiera soigneusement ses incidences pour la Société, pour les travailleurs et pour l'économie du Cap-Breton. Nous étudierons toutes les options en temps voulu. Nous considérons Donkin comme une mine commerciale en bonne et due forme dont le développement, qu'il soit assuré par Devco ou par le secteur privé, doit se fonder sur des principes commerciaux solides.

Monsieur le président, le comité a également soulevé des questions à propos des projets gaziers de l'Île de Sable et de leurs incidences pour Devco et l'économie du Cap-Breton. J'aimerais aborder brièvement cette question avant de répondre aux questions des sénateurs.

Certains habitants du Cap-Breton craignent que le projet extracôtier de l'île de Sable nuise à l'industrie du charbon de la région. En particulier, on craint que l'utilisation possible du gaz naturel pour produire de l'électricité en Nouvelle-Écosse risque de compromettre un marché clé pour le charbon du Cap-Breton. Je tiens à informer le comité que la commission mixte constituée par les gouvernements du Canada et de la Nouvelle-Écosse pour examiner les projets gaziers de l'Île de Sable a conclu que ces projets entraîneront des avantages socio-économiques importants pour la région atlantique du Canada. La commission a formulé un certain nombre de recommandations portant sur les répercussions possibles des projets de l'Île de Sable sur la Nouvelle-Écosse, y compris l'île du Cap-Breton.

Entre autres, elle a proposé que la province élabore une stratégie industrielle à long terme pour s'assurer que la population de la Nouvelle-Écosse profite pleinement des retombées économiques et sociales du projet de l'Île Sable. Le gouvernement a une confiance absolue dans le travail de la commission fédérale-provinciale mixte d'examen. Ces recommandations s'appuient sur de vastes discussions avec plus de 125 intervenants, dont des représentants de la municipalité régionale du Cap-Breton et des représentants du Cape Breton Island Building and Construction Trades Council. La commission a fait un travail minutieux. Le gouvernement a étudié les recommandations de la commission, et nous ferons connaître notre réponse officielle cet après-midi.

Pour terminer, je tiens à assurer le comité que notre gouvernement maintient pleinement son engagement envers Devco et la population du Cap-Breton. Notre objectif est d'assurer le succès économique à long terme et le progrès social de l'ensemble de la région. Je sais que le comité appuie cet objectif et je tiens à remercier les membres du comité et ceux des comités précédents du Sénat, qui ont étudié les questions relatives à Devco, de leur importante contribution, passée et présente, au débat. Toute recommandation qui découlera de ces audiences sera sérieusement étudiée par l'ensemble des parties intéressées, y compris le gouvernement du Canada.

Monsieur le président, je me ferai un plaisir maintenant de répondre aux questions des sénateurs.

Le président: Juste avant que nous passions aux questions des sénateurs, avez-vous indiqué que le gouvernement du Canada ferait connaître sa réponse au rapport de la commission mixte d'examen du projet gazier de l'Île Sable cet après-midi?

M. Goodale: C'est exact, monsieur le président. Simplement pour vous situer le contexte, comme les honorables sénateurs le savent, le processus de réglementation concernant les pipelines et les projets énergétiques est un processus très bien établi mais relativement complexe, qui est respecté tant à l'échelle nationale qu'internationale pour son intégrité et pour la façon dont il a été exécuté par le passé au pays.

La commission mixte a terminé ses travaux à la fin de l'été et son rapport a été rendu public vers la fin d'octobre. Comme vous le savez, elle a étudié certaines questions environnementales et socio-économiques liées au projet gazier de l'Île Sable. Le gouvernement du Canada est tenu de répondre au rapport de la commission, tout comme le gouvernement de la Nouvelle-Écosse en ce qui concerne bien entendu les questions de compétence provinciale. La réponse est préparée par les organismes de réglementation compétents, fédéraux ou provinciaux, et est approuvée par le gouvernement du Canada. Nous prévoyons communiquer notre réponse au rapport de la commission cet après-midi.

En un mot, nous acceptons les recommandations de la commission sauf quelques exceptions. La commission a formulé, je crois, 46 recommandations concernant les projets. Dans un cas, nous avons accepté l'esprit de la recommandation en question mais estimé que sa mise en oeuvre pourrait différer légèrement de ce que proposait la commission; dans un autre cas, nous avons trouvé que la recommandation du groupe manquait de fermeté et nous l'avons rendue plus ferme. Sur les 46 recommandations formulées par le groupe, ce sont les deux seules pour lesquelles le gouvernement a proposé des changements.

Une fois que le rapport de la commission sera présenté et que le gouvernement du Canada y répondra, il sera envoyé à l'Office national de l'énergie qui déterminera s'il doit délivrer des certificats de commodité, ce qui représente l'étape suivante du processus de réglementation. Si l'Office national de l'énergie considère qu'il y a lieu de délivrer ces certificats, il faudra que gouverneur en conseil donne alors son approbation.

C'est un processus assez long. La réception du rapport de la commission et la réponse officielle du gouvernement du Canada aux recommandations de la commission ne sont qu'une étape du processus. L'affaire sera alors renvoyée à l'Office national de l'énergie, qui s'occupera des étapes suivantes.

Si cela intéresse les sénateurs, je peux demander à mes collaborateurs de faire le nécessaire pour vous fournir des photocopies du communiqué et du document d'information appropriés dès cet après-midi.

Le président: Nous vous en serions reconnaissants, monsieur le ministre.

Le sénateur Murray: Pour commencer, monsieur le ministre, j'aimerais appuyer l'observation que vous avez faite selon laquelle Devco gère ses affaires très efficacement. L'autosuffisance commerciale qu'elle doit atteindre est un mandat suffisamment difficile compte tenu du contexte que nous connaissons tous et de certains fardeaux qu'elle a dû assumer. Sa situation a été rendue d'autant plus difficile par les problèmes géologiques qu'elle a connus surtout à Phalen et dont vous avez parlé. Chaque fois qu'elle s'extirpe d'un problème géologique et j'utilise l'expression «qu'elle s'extirpe» presque littéralement, elle se trouve aussitôt aux prises avec un autre problème.

Les efforts de la direction et des hommes ont été héroïques et relativement fructueux. La direction a dû faire preuve de beaucoup de souplesse, d'imagination et de compétence pour surmonter ces problèmes. J'appuie sans réserve votre commentaire à ce sujet. Certains d'entre nous ici présents ont peut-être eu des divergences d'opinions avec la direction de Devco sur des questions de principe, mais c'est une autre histoire.

Je suis heureux de ce que vous venez de nous apprendre. Je ne voulais pas me raccrocher à n'importe quoi mais j'espérais être rassuré, surtout en ce qui concerne la mine Donkin et je crois que je le suis, mais vous me pardonnerez si je vous demande certaines précisions.

Vous dites que les problèmes auxquels fait face la mine Phalen seront pris en compte lorsque Devco vous présentera son plan d'entreprise révisé d'ici les trois ou quatre prochains mois. Vous dites également que M. Shannon a déclaré que Devco tiendra compte, dans la préparation de ce plan, de toutes les possibilités d'affaires qui existent. Je crois qu'il est implicite dans ce que vous avez dit que l'une de ces possibilités d'affaires pourrait être la mine Donkin. Vous avez correctement cité les propos de votre prédécesseur, Mme McLellan, lorsqu'elle a comparu devant notre comité le printemps dernier. Vous avez relaté l'histoire de la proposition de Donkin Resources Limited. La lettre d'intention a été signée par la direction et le conseil d'administration de Devco. Cependant, vous avez également dit que la décision finale appartient au gouvernement. J'en conclus d'après les commentaires que vous avez faits aujourd'hui, que l'on continue d'envisager toutes les options possibles, dont le développement et l'exploitation de la mine Donkin par Devco au moment voulu. Est-ce une interprétation correcte de votre déclaration?

M. Goodale: Sénateur Murray, je vous remercie d'avoir mentionné les efforts héroïques déployés par la direction et les employés de Devco pour relever les défis auxquels ils font face. Ce sont des défis de taille et ils ont tous travaillé très fort pour redresser la situation et jeter des assises plus solides pour l'avenir de Devco. C'est pourquoi je suis convaincu que la direction de Devco saura gérer les activités de la société dans le cadre du mandat qui lui a été confié.

Je suis également tout à fait d'accord avec mon prédécesseur, la ministre McLellan, qui avait déclaré que Devco devait mettre l'accent sur sa viabilité commerciale et se conformer à son plan d'entreprise, même si c'est un défi de taille.

Des progrès ont été réalisés et ces progrès doivent continuer. Nous devons nous assurer que l'objectif premier, à savoir la réussite commerciale de Devco, ne soit pas compromis et que la direction et les employés peuvent continuer à s'orienter dans la bonne voie.

La ministre McLellan a indiqué qu'elle serait prête à recevoir des propositions du secteur privé pour le développement de Donkin parce que le développement de Donkin ne fait pas partie du plan d'entreprise de Devco. Une soumission du secteur privé a été reçue. On est en train d'étudier et d'analyser cette proposition. Une fois ce travail terminé et tous les renseignements nécessaires réunis, ils seront évidemment étudiés très attentivement par la direction et le conseil d'administration de Devco. Au bout du compte, en raison du rapport juridique, il appartiendrait au gouvernement du Canada de prendre la décision finale. Nous verrons en temps voulu.

Je tiens à favoriser la réussite de Devco et du Cap-Breton et je n'ai pas l'intention d'exclure certaines options du revers de la main. J'attendrai d'avoir tous les faits devant moi et en fonction des faits et des renseignements disponibles je tâcherai de prendre, en consultation avec mes collègues du Cabinet et les directeurs de Devco, la meilleure décision possible dans les circonstances pour favoriser leur réussite.

Le sénateur Murray: Je pense que vous comprenez le problème que vit le Cap-Breton à l'heure actuelle. La mine Phalen emploie environ 800 personnes, la mine Prince environ 500. Depuis quelque temps, l'avenir de ces deux mines semble incertain. À un certain moment à l'automne de 1995, Devco planifiait exploiter la mine Prince à temps partiel et avait demandé une réévaluation complète de l'avenir de la mine Phalen. Depuis, la situation de la mine Prince semble s'être légèrement améliorée mais celle de la mine Phalen s'est nettement aggravée. C'est l'hypothèse la plus pessimiste, mais en fonction des problèmes géologiques de la mine Phalen, selon M. Shannon, cette mine n'en aurait plus que pour sept à 10 ans.

Compte tenu de ce contexte et de l'importance que représente Devco pour le Cap-Breton, je trouve extrêmement inquiétante la perspective que la propriété que vous avez en réserve en prévision de sa mise en valeur éventuelle, Donkin, puisse être cédée au secteur privé par la direction et le conseil d'administration de Devco avec l'accord du gouvernement du Canada. À ce stade, une telle mesure signifierait l'arrêt de mort de Devco. Nous savons tous qu'une fois que la mine Phalen sera fermée, si Donkin est cédée à d'autres propriétaires, cela marquera la fin de Devco.

Je sais que je ne peux m'attendre à rien de plus de vous aujourd'hui. Je me contenterai donc de l'engagement que vous nous avez donné. J'en déduis que toutes les options sont encore à l'étude, que vous attendez un plan d'entreprise révisé de la direction et du conseil d'administration de Devco et que vous n'écartez pas la possibilité que Devco puisse elle-même mettre en valeur la mine Donkin au moment voulu.

Ce que j'aimerais vous demander, toutefois, c'est si la lettre d'intention signée par M. Shannon et M. White au nom de Devco en ce qui concerne Donkin Resources Limited crée certains problèmes. S'agit-il d'un document ayant force obligatoire? Tout d'abord, ils s'engagent à communiquer toutes les études et tous les renseignements concernant Donkin. Puis, à la fin de la première étape, Devco procède à l'aliénation des terrains, ce qui ferait partie de l'offre aux investisseurs. De plus, Devco s'engage, à la fin de la deuxième étape, après avoir obtenu toutes les approbations nécessaires concernant l'exploitation minière et les aspects environnementaux, de céder les baux des réserves de charbon. Ensuite, au cours des 60 jours qui suivront, ils doivent négocier une entente d'aliénation des terrains et des concessions avec DRL.

Vous dites, et je suis heureux de vous entendre le confirmer, que le gouvernement du Canada aura le dernier mot à ce sujet. Cette lettre d'intention renferme-t-elle quoi que ce soit qui risque d'exclure certaines des options que peut exercer le gouvernement, ou êtes-vous lié par cette lettre d'intention?

M. Goodale: Sénateur Murray, en ce qui concerne les incidences juridiques particulières de toute clause que vous avez mentionnée, je serai heureux de consulter nos conseillers juridiques pour tâcher d'éclaircir les aspects en question.

En ce qui concerne la question plus générale, comme je l'ai dit plus tôt, je suis tout à fait convaincu que la direction et le conseil d'administration de Devco prendront les décisions rationnelles qui s'imposent dans les circonstances pour assurer l'avenir de Devco et des retombées positives pour le Cap-Breton.

Comme vous venez de l'indiquer, nous tenons à examiner toutes les options jusqu'à ce que nous obtenions des renseignements plus précis. Les décisions commerciales appropriées pourront être prises par la suite. J'estime également important que rien ne vienne entraver les débouchés susceptibles de favoriser la réussite des initiatives du secteur privé. La réussite que nous espérons pour Devco et le Cap-Breton peut, dans les circonstances appropriées, être assurée grâce aux activités de Devco ou aux activités d'entrepreneurs du secteur privé, ou une combinaison des deux. J'estime important que ceux qui envisagent à l'heure des initiatives du côté du secteur privé aient toutes les chances de réussir.

Je me méfie toujours de ce qui pourrait nuire au processus, d'une façon ou d'une autre.

Le sénateur Murray: Monsieur le ministre, en tant que conservateur, je suis par définition partisan de l'entreprise privée. Je ne peux toutefois m'empêcher de faire remarquer qu'en ce qui concerne l'entrepreneuriat dont vous parlez au Cap-Breton, il y a un montant de 400 000 $ prévu à cette fin, dont 300 000 $ provient de votre gouvernement. C'est un encouragement extrêmement important qui semble avoir d'une certaine façon échappé à la politique dont vous avez parlé dans votre déclaration préliminaire, à savoir que le rôle du gouvernement n'est pas de subventionner les entreprises.

Vous avez mentionné les directives que vous avez données à Devco pour la négociation. Êtes-vous en mesure de nous dire en quoi elles consistent?

M. Goodale: Je n'ai pas la documentation avec moi cet après-midi. Si vous me le permettez, je consulterai M. Shannon et d'autres personnes afin de voir s'il est possible de mettre ce document à votre disposition. Je tiens à fournir toute l'information possible au comité et aux autres intéressés. Je vais donc vérifier s'il est possible de mettre cette information à votre disposition.

Le sénateur Murray: Je suis assez satisfait de la déclaration la plus importante faite par le ministre, à savoir que la décision finale appartient au gouvernement.

Le président: Sénateur Murray, j'ai déjà vendu de l'assurance et on m'a appris qu'il vaut mieux se retirer du jeu pendant qu'on a l'avantage.

Monsieur le ministre, nous sommes tout à fait conscients que ces directives ne peuvent pas être mises à notre disposition sans doute pour des raisons commerciales ou autres, et nous comprenons très bien. La direction de Devco a fait preuve d'une très bonne coopération à notre égard et a mis divers documents à notre disposition, ce dont nous lui sommes d'ailleurs reconnaissants.

Le sénateur Butts: Je n'arrive pas à comprendre pourquoi Devco serait l'intermédiaire chargée d'examiner les constatations de DRL puisqu'on part du principe qu'elle est déjà au courant des renseignements qui seront communiqués par DRL. On nous a dit que DRL examinerait toutes les études faites par Devco qui ont entraîné la décision de ne pas exploiter la mine Donkin. Je me demande pourquoi Devco doit examiner les constatations et dans quelle mesure Devco aura voix au chapitre une fois qu'elle en aura pris connaissance.

M. Goodale: Sénatrice Butts, l'actif en question ici, les biens Donkin, appartiennent à Devco. Juridiquement, comme le conseil d'administration de Devco est chargé de la gestion et des activités de la société, ce serait à lui de s'occuper de la transaction commerciale concernant les activités de Devco. De toute évidence, la décision d'exploiter une mine ou au contraire d'aliéner la propriété minière, serait une décision importante de la part de la société à laquelle, selon l'usage en vigueur dans les sociétés, en vertu des règles prévues, participerait l'actionnaire qui, dans ce cas, est le gouvernement du Canada.

En ce qui concerne les activités de premier plan, il incomberait au conseil d'administration et à la direction de s'occuper de la relation, d'abord et avant tout. Le gouvernement du Canada jouerait le rôle ultime d'actionnaire dans les cas où la décision prise ou proposée par la société est d'une telle ampleur qu'elle nécessite automatiquement la participation de l'actionnaire.

Pour l'instant, la décision d'ouvrir une nouvelle mine à Donkin ou de vendre la propriété minière ne relèverait pas du plan d'entreprise de Devco. Si Devco propose de déroger à ce plan d'entreprise, un changement d'une telle importance nécessiterait une décision de la part du gouvernement du Canada. Nous ne sommes pas encore arrivés là. On est en train d'analyser la situation. D'après ce que je crois comprendre, la proposition du secteur privé est en train de faire l'objet d'une analyse poussée et je serai très intéressé d'entendre le pronostic final une fois que l'on disposera de tous les renseignements voulus.

Dans ces circonstances, il appartient au conseil d'administration et à la direction de Devco de s'occuper de la situation en première ligne.

Le sénateur Butts: Je vous ai entendu dire que Donkin devra être viable sur le plan commercial ou être un bon projet d'affaires. Cette partie du plan inclut-elle au moins un nombre minimum d'employés?

M. Goodale: Comme je l'ai dit, je m'attends à recevoir le plan d'entreprise révisé de Devco, et M. Shannon a indiqué que toutes les options et tous les débouchés commerciaux seront examinés dans le cadre de l'établissement de ce nouveau plan d'entreprise. Je ne suis vraiment pas en mesure aujourd'hui de faire des prédictions quant à la teneur du plan. Il appartient à la direction de Devco, avec l'approbation de son conseil d'administration, de le présenter en temps voulu, mais j'espère qu'ils tiendront compte autant que possible de leur main-d'oeuvre et des intérêts du Cap-Breton en général. Ils doivent bien entendu vivre selon leurs moyens financiers et s'acheminer vers la viabilité commerciale. Ce sont des gens sensibles qui comprennent l'importance de cet enjeu pour la Nouvelle-Écosse et l'île du Cap-Breton en particulier. Je m'attends donc à ce qu'ils fassent de leur mieux compte tenu des contraintes auxquels ils sont soumis.

Le sénateur Butts: Nous avons beaucoup entendu parler de privatisation durant les audiences. Est-il question d'une privatisation ou d'un partenariat?

M. Goodale: Il est impossible d'envisager sérieusement une privatisation de la Devco tant qu'elle ne sera pas rentable. Le sénateur Murray, entre autres, a déclaré qu'il a eu du progrès -- ce avec quoi je suis d'accord --, que des efforts héroïques ont été entrepris pour surmonter les obstacles géologiques et autres, mais nous n'avons pas encore atteint le seuil de la rentabilité. La possibilité d'une privatisation relève donc de la pure conjecture.

Je suis sûr que nous préférerions tous que Devco soit une entité prospère, capable de se passer d'aide gouvernementale, qui créerait de l'emploi et serait un moteur de croissance économique. Ce rêve n'est pas encore une réalité. Je suis sûr que tous lui souhaitent le succès de l'entreprise, mais la question à ce stade-ci est tout à fait hypothétique puisque, sans rentabilité, la privatisation n'est tout simplement pas une option.

Le sénateur Butts: On m'a fait comprendre, en termes non équivoques, que DRL sera rentable seulement si elle conclut un partenariat avec la Devco pour l'utilisation de ses quais et de ses usines de lavage, et cetera.

M. Goodale: Sénateur, j'hésiterais à commenter les attentes commerciales d'une autre entité. Le gouvernement du Canada aura en temps et lieu l'occasion d'examiner en détail les propositions commerciales sérieuses susceptibles de lui être faites, mais il serait imprudent de ma part de commenter d'éventuelles transactions. Je réserve ma décision tant que je ne suis pas en mesure de me prononcer sur le tout, ce que je ne peux manifestement pas faire aujourd'hui, car je ne possède en réalité que les mêmes bribes d'information que vous. En temps et lieu, nous aurons plus d'information et nous pourrons alors la commenter.

Le sénateur Buchanan: Trois membres du comité travaillent au dossier de la Devco depuis longtemps: le sénateur Butts, le sénateur Murray et moi-même. En fait, j'étais membre de l'assemblée législative de la Nouvelle-Écosse quand la Devco a été créée. On pourrait aller jusqu'à dire que, pendant un quart de siècle, Devco et Sysco ont envahi nos vies et jusqu'à nos rêves et que nous avons dû, malheureusement, assisté à leur déclin.

Le sort de la Devco m'intéresse personnellement. Mes deux grands-pères étaient mineurs à l'ancienne mine Caledonia et à la mine Dominion 1-A. Mon père a travaillé pour les charbonnages, tout comme je l'ai fait avant de faire mes études universitaires. La situation de la Devco n'a donc pas de secret pour moi.

En 1979 ou 1980, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a effectué des carottages pour les charbonnages Donkin dans les terrains houillers de Sydney. De concert avec des personnes comme Allan J. MacEachen, nous avons travaillé au développement de deux grandes galeries qui sont encore là. Nous suivons la situation de près depuis lors.

La mine Donkin a été étudiée à qui mieux mieux. Durant les années où j'étais premier ministre de la Nouvelle-Écosse, nous avons lancé et financé de nombreuses études sur la mine Donkin effectuées par Montreal Engineering, Kilborn Engineering et j'en passe. À l'époque, la mine Donkin était une exploitation commerciale faisable et viable. Je reconnais qu'il faudrait mettre à jour une partie de cette information.

Je suis heureux d'entendre que vous n'excluez pas la possibilité que le gouvernement fédéral procède à la mise en valeur de Donkin. Ce que vous avez dit, semble-t-il -- je n'étais pas là quand vous l'avez dit --, c'est que la décision finale appartient au gouvernement du Canada. Cette possibilité existe-t-elle encore?

M. Goodale: Avant de prendre une décision de cette ampleur, comme je l'ai dit à le sénateur Butts, il faudrait certes obtenir le consentement et l'appui de l'actionnaire, soit du gouvernement du Canada.

Le sénateur Buchanan: Il y a un an environ, Joe Shannon et les autres dirigeants de la Devco nous ont dit que l'on s'attendait que Phalen puisse être exploitée pendant 12 à 15 ans. Il semble maintenant que cette durée utile soit passée à sept ans ou moins si les coups de toit et d'autres situations persistent. Si le charbonnage de Phalen est graduellement abandonné et fermé, il faudra que la Power Corporation, qui achète 85 p. 100 de toute la production de Devco, fasse ce qu'elle a fait l'an dernier, c'est-à-dire qu'elle achète 50 000 tonnes de charbon américain. Elle n'a pas renoncé à cette option.

La situation pourrait être la même à la mine Prince, non pas en raison des coups de toit, mais parce que la Power Corporation ne courra pas le risque de manquer de charbon dans ses centrales du Cap-Breton.

Nous en sommes au point, dans l'histoire de la Devco, où il faut décider d'opter pour la mine Donkin. Elle est viable; M. Farrell le dit lui-même. Je suis sûr que l'information mise à jour le confirmera.

M. Farrell a affirmé que DRL ne pouvait pas y arriver seule, mais il a aussi déclaré qu'elle pourrait y arriver en partenariat avec la Devco si l'entente inclut, comme l'a fait remarquer le sénateur Butts, les quais de Sydney, l'usine de lavage de Victoria Junction, les voies ferrées de l'ancienne S & L Railway, soit de l'actuel chemin de fer Devco. Elle inclurait probablement, aussi, l'injection par le gouvernement du Canada de fonds de capital pour la mise en valeur de la mine.

C'est le genre de partenariat que j'envisage. De nos jours, il serait très difficile à une entreprise privée comme DRL de réunir les fonds nécessaires pour mettre la mine en production. Le montant en jeu est loin d'atteindre 400 millions de dollars. Si l'on actualise le coût cité dans les études effectuées entre 1980 et 1985, il se situe aux alentours de 200 millions de dollars, moins les 80 millions qui ont déjà été dépensés. Comme l'a affirmé UMW -- je ne crois pas que Steve Farrell le conteste --, la mise en production de la mine coûterait probablement entre 120 millions et 180 millions de dollars. Toutefois, DRL ne sera peut-être pas capable de réunir ces fonds sur les marchés en raison du passé de la Devco et de l'industrie du charbonnage.

Si l'entreprise est privatisée, le partenariat devra comprendre l'usine de lavage de Victoria Junction, les quais, le chemin de fer et une certaine aide financière.

M. Goodale: Comme vous le savez, le plan d'entreprise actuel ne prévoit pas d'injection de fonds supplémentaires, exclusion faite du prêt mentionné plus tôt. La Devco a, du moins jusqu'ici, réussi à s'en sortir dans les limites de ses contraintes financières, compte tenu du prêt. L'exploitation de la mine Donkin par la Devco et l'injection par le gouvernement du Canada de capital représenterait un changement de cap draconien du plan d'entreprise. En toute franchise, ce genre d'investissement n'est tout simplement pas envisagé. Je ne vois pas où l'on pourrait trouver ce genre de fonds.

Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, les gouvernements se retirent des mégaprojets du secteur des ressources naturelles. Je m'attends que cette tendance va se maintenir. D'autres, plus optimistes que vous, ont laissé entendre qu'on pourrait peut-être trouver les fonds requis sur les marchés privés. Tout comme les membres du comité, je ne voudrais pas dire ou faire quoi que ce soit qui empêche de trouver dans le secteur privé les fonds requis.

Le sénateur Buchanan: Si, pour d'excellentes raisons, la Devco décide qu'il faut fermer ou graduellement cesser la production de Phalen, il faudrait que la Nova Scotia Power Corporation se trouve une autre source de combustible. Auparavant, elle importait le charbon des États-Unis et, naturellement, elle peut toujours opter pour le gaz naturel. Le danger que l'industrie du charbon ne survive pas est donc très réel.

Il faudra décider si l'on ouvre la mine Donkin ou pas dans d'assez brefs délais, peut-être même au cours des quelques prochains mois.

Il faudrait envisager sérieusement la possibilité d'une privatisation, plus particulièrement d'un partenariat avec la Devco. Quand Joe Shannon a témoigné devant notre comité, il a dit, si je ne m'abuse, que la Devco était toute disposée à travailler en étroite collaboration avec l'entreprise qui exploite la mine Donkin en vue d'utiliser l'usine de lavage de Victoria Junction, le chemin de fer et les quais. Un partenariat serait alors possible. M. Steve Farrell a également dit qu'un partenariat entre Donkin Resources Limited et Devco était possible.

Le président: Sénateur Buchanan, votre hypothèse de départ est peut-être incorrecte. Si j'ai bien compris, si la mine Prince était fermée, le charbon de Donkin remplacerait celui de Prince parce qu'il a la même teneur en anhydride sulfureux, entre autres. Cependant, si la mine Phalen ferme, le charbon de Donkin ne peut être substitué à son produit parce que la Nova Scotia Power Corporation ne pourrait pas continuer de rejeter dans l'atmosphère les quantités de dioxyde de soufre qu'elle émet actuellement.

Le sénateur Buchanan: Oui, elle pourrait le faire.

Le président: Ce n'est pas ce que nous indiquent les témoignages.

Le sénateur Buchanan: Monsieur le président, c'est inexact. Le plancher et le toit de la mine Donkin sont composés de charbon à haute teneur en soufre. Par contre, au centre, le minerai est différent et il pourrait être mis en valeur. Les études effectuées il y a longtemps l'ont prouvé. De plus, si le charbon est lavé et mélangé à d'autres charbons, il satisfera indubitablement aux normes environnementales prévues dans l'accord canado-américain et dans l'entente intervenue entrer les gouverneurs de Nouvelle-Angleterre et les premiers ministres de l'Atlantique.

Le président: Nous pourrons en discuter plus tard. Cependant, le fait que vous ayez fait cette affirmation plusieurs fois et que nous ne soyons pas tous d'accord avec vous me préoccupe.

Le sénateur Buchanan: Interrogez quelqu'un du Cap-Breton. Il vous dira que le danger est réel parce que la Nova Scotia Power Corporation n'accepte peut-être pas de courir le risque de n'avoir qu'une seule mine de charbon ouverte au Cap-Breton, ce qui laisse planer la possibilité d'arrêts de production. Quand il y a eu un arrêt de production, l'an dernier, la Power Corporation a importé 50 000 tonnes de charbon américain, situation que je n'aurais jamais cru voir se produire à Cap-Breton. La seule autre fois où cela s'est produit, les circonstances étaient différentes. Il a fallu à l'occasion importer du charbon métallurgique pour l'aciérie de Sydney, mais cette situation était acceptée.

Si le charbonnage de Phalen est fermé ou qu'il est graduellement mis hors de production, pour quelque raison que ce soit, il ne sera pas du tout facile de convaincre les administrateurs de la Nova Scotia Power, qui est maintenant une entreprise privée, de courir le risque d'avoir une seule source d'approvisionnement.

Je crois que nous nous comprenons au sujet de la situation de Donkin.

Ma dernière question concerne le gaz de l'Île de Sable. Je note avec plaisir que le gouvernement fédéral a fait connaître sa réaction. Nous pouvons donc aller de l'avant avec ce projet. C'est un rêve que nous caressons depuis le début des années 80, si ce n'est avant.

Bien sûr, tous ne sont pas pour le projet gazier de l'Île de Sable. La Cape Breton Alliance semble incapable de se prononcer au sujet des avantages du projet. Elle dit, d'une part, que le gaz de l'Île de Sable serait un plus pour le Cap-Breton, puis elle affirme, d'autre part, qu'il pourrait nuire à l'économie du Cap-Breton. La commission d'examen mixte n'a pas précisé qu'il faudrait construire un embranchement latéral jusqu'au Cap-Breton; cependant, on peut en décider plus tard, car cette décision relève de la province.

On nous a affirmé que le gaz issu de ce projet pourrait passer en douce au Cap-Breton et que nous n'aurions pas à payer le même tarif. Je ne suis pas convaincu que ce serait le cas. Tout ce que je sais, c'est que le gaz naturel pourrait menacer l'industrie du charbonnage telle que nous la connaissons depuis plus de 150 ans au Cap-Breton.

Vous avez dit que la décision finale concernant la privatisation de Donkin sera prise par le gouvernement du Canada, ce qui est en partie vrai. Cependant, vous savez qu'en vertu de la loi sur les ressources naturelles de la Nouvelle-Écosse, le transfert de ces baux exige le consentement du gouvernement provincial. L'actuel premier ministre de la province, M. MacLellan, a très bien fait comprendre qu'il faut respecter les dispositions de la loi sur les ressources naturelles. Actuellement, il voit la mine Donkin comme une source d'avenir pour la Devco et il n'est pas encore convaincu des mérites de la privatisation, mais il pourrait l'être.

M. Goodale: Monsieur le président, j'aurais quelques observations à faire. Exclusion faite de ce qui se trouve dans le communiqué de presse et dans la documentation qui a été distribuée aux membres du comité au sujet de l'île de Sable, même si je souhaitais faire des conjectures au sujet du gaz et de tout le reste à Cap-Breton, je rappelle qu'un procès actuellement en cours touche à certaines de ces questions. Au mieux, je puis donc vous répondre: «Sans commentaire pour l'instant». J'espère, sénateurs, qu'au cours des trois ou quatre prochains mois, à mesure que la Devco appliquera son plan d'entreprise révisé, qu'elle prendra les bonnes décisions d'affaires et qu'elle planifiera son avenir, les inquiétudes qu'expriment les sénateurs aujourd'hui seront peut-être dissipées jusqu'à un certain point.

Comme je l'ai dit plus tôt, j'accueillerai avec joie tous les conseils et suggestions susceptibles de contribuer au succès de la Devco ou du Cap-Breton. Je suis sûr que je ne suis pas le seul à en rêver.

Comme je l'ai dit plus tôt, M. Shannon, président du conseil, les directeurs et les administrateurs de la Devco ont toute ma confiance. J'espère qu'ils s'acquitteront de leurs responsabilités comme il convient et qu'ils obtiendront pour nous tous, mais plus particulièrement pour la population du Cap-Breton, les meilleurs résultats à long terme. En fait, j'y compte.

Le sénateur Moore: Monsieur le ministre, durant des réunions précédentes du comité, on s'est dit préoccupé de la reddition de comptes et de la responsabilité de la Devco auprès de l'actionnaire, c'est-à-dire du gouvernement. J'aimerais que vous nous disiez, monsieur le ministre, si vous le pouvez, quelles structures, quels mécanismes de reddition de comptes sont en place et si vous êtes satisfait des comptes rendus par la Devco à votre ministère.

M. Goodale: Sénateur Moore, de toute évidence, le gouvernement a à coeur la responsabilité de la gestion dans ce cas particulier, mais dans tous les autres aussi, et nous estimons que les mécanismes en place conviennent pour l'instant.

Tout d'abord, bien sûr, il faut se conformer à la Loi sur la gestion des finances publiques qui décrit avec beaucoup de précision diverses mesures que doivent prendre les sociétés d'État pour répondre de leur régie et de leurs décisions. Ainsi, chaque société d'État est tenue de soumettre à l'approbation du gouvernement, chaque année, le plan d'entreprise ainsi que ses budgets de fonctionnement et d'immobilisation pour l'exercice suivant. La présentation de plans d'entreprise résumés est maintenant pratique courante. De plus, les budgets de fonctionnement et d'immobilisation sont déposés au Parlement en vue de renseigner les députés et les sénateurs. Un rapport de vérification accompagne les états financiers de chaque société. Tous les cinq ans, le vérificateur général effectue un examen spécial et détaillé des systèmes de contrôle de la gestion et des finances.

Soit dit en passant, si le vérificateur remarque quoi que ce soit qui mérite d'être porté à l'attention du Parlement, il existe aussi un mécanisme pour le faire. Le vérificateur général ferait une note pertinente ou une mention dans le rapport annuel portant sur la société. L'information est rendue publique si le vérificateur général estime que c'est important et essentiel. Comme nous le savons tous, M. Desautels, tout comme les autres vérificateurs généraux, n'a pas froid aux yeux. Donc, si un fait mérite d'être souligné, il le fera.

De plus, chaque société d'État prépare un rapport annuel qui est déposé au Parlement. En plus de ces pratiques courantes qui s'appliquent à toutes les sociétés d'État, la Devco produit actuellement des rapports de rendement trimestriels et elle a pris l'habitude de consulter au moins deux fois par année ses divers actionnaires. Elle a également en place un système de communication interne avec ses employés.

Toutes ces mesures sont extrêmement positives et elles me sembleraient satisfaisantes et suffisantes dans les circonstances pour obtenir la reddition de comptes exigée.

Le sénateur Murray: La Devco ne peut pas ouvrir la mine Donkin, pas plus qu'elle ne peut la vendre, sans l'approbation du gouvernement fédéral. Le sénateur Buchanan a une opinion quant à la date à laquelle il faut se décider au sujet de la mise en valeur de Donkin. J'accepte cela. Cependant, le comité et ses prédécesseurs ne sont jamais allés plus loin que de dire qu'ils souhaitent obtenir de l'information à jour sur la géologie et la rentabilité de la Donkin de manière à savoir si la proposition est viable à long terme.

Étant donné ce que vous avez dit au sujet de la répugnance du gouvernement à investir beaucoup de fonds dans un projet -- j'espère que cette déclaration ne nuira pas à M. Shannon, aux directeurs et aux administrateurs de la Devco --, je vous inviterais simplement à confirmer que les gestionnaires et les administrateurs de la Devco, lorsqu'ils réviseront leur plan d'entreprise, pourront faire n'importe quelle proposition qui cadre avec le mandat d'autosuffisance commerciale. Vous n'excluez pas au départ des possibilités, je suppose.

M. Goodale: Tel que je comprends ce qu'a dit M. Shannon, tant devant votre comité qu'ailleurs, il examinera sérieusement toute proposition qui peut mener à la rentabilité et il entend profiter de toutes les aubaines commerciales qui se présentent.

Comme je l'ai dit, je fais beaucoup confiance à M. Shannon, au conseil d'administration et à son équipe de gestion; je suis sûr qu'ils s'acquitteront de leur mandat et qu'ils prendront les bonnes décisions. J'ai bien hâte de voir leur prochain plan d'entreprise et j'espère y trouver certaines idées qui permettront de fixer le cap pour l'avenir. J'espère aussi y trouver la réponse à certaines questions qui ont été soulevées aujourd'hui et auxquelles je n'ai pas la réponse et que ces solutions seront financièrement saines et responsables sur le plan budgétaire, compte tenu, comme je l'ai dit au départ, que le gouvernement n'est plus un bailleur de fonds pour les mégaprojets ou les entreprises. À long terme, ce n'est tout simplement plus possible.

Le sénateur Murray: Vous faites de l'investissement.

M. Goodale: J'essaie toujours d'obtenir un bon rendement des investissements, qu'ils soient privés ou publics.

La séance est levée.


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