Aller au contenu
APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 4 - Témoignages du 8 mai 2001


OTTAWA, le mardi 8 mai 2001

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, auquel a été renvoyé le projet de loi S-24, Loi visant à mettre en oeuvre l'entente conclue par les Mohawks de Kanesatake et Sa Majesté du chef du Canada concernant l'exercice de pouvoirs gouvernementaux par ceux-ci sur certaines terres et modifiant une loi en conséquence, se réunit aujourd'hui à 9 h 35 pour l'étude du projet de loi.

Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Bonjour, monsieur Goyette. Je dois vous présenter mes excuses car je parle très mal français. Je sais toujours chanter en français, mais mes compétences pour ce qui est de parler la langue sont limitées.

Soyez le bienvenu à cette importante audience. Depuis de nombreuses années, je m'occupe des revendications territoriales des Autochtones, mais je constate qu'il s'agit en l'occurrence d'un règlement et d'une loi tout à fait particuliers. C'est très important parce que, selon moi, cela va établir un précédent pour les autres revendications territoriales, ce qui est une bonne chose. Cela prouve que nous envisageons toutes sortes de solutions au problème des revendications territoriales des Autochtones.

J'aimerais commencer. Nous vous écoutons.

[Français]

M. Pierre Goyette: Madame la présidente, je vais faire mon intervention en français puisque mes notes sont en français. Mon intérêt pour ce projet de loi est que j'habite, avec mon épouse, une résidence dans la municipalité d'Oka depuis une vingtaine d'années. Je ne représente ici personne d'autre que moi-même et je ne fais état que de mon propre intérêt pour ce projet de loi et pour l'entente qui était à l'origine de ce projet de loi.

Le projet de loi S-24 a été déposé au Sénat le 27 mars, et il a pour objet de mettre en oeuvre l'entente signée le 21 décembre 2000 entre le Conseil de bande Mohawk de Kanesatake et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. Cette entente est intitulée «Entente concernant l'exercice de pouvoirs gouvernementaux par Kanesatake sur son assise territoriale provisoire». Cette entente et le projet de loi comportent plusieurs aspects sur lesquels j'aimerais faire des commentaires et des recommandations.

Le projet de loi S-24 permet au Conseil de bande de Kanesatake de légiférer sur un nombre important de sujets sur un territoire situé à l'intérieur de la municipalité d'Oka. Pour désigner celle-ci, à plusieurs occasions, je vais utiliser l'expression «l'ex-village». La municipalité d'Oka résulte de la fusion relativement récente du village d'Oka et de la municipalité de la paroisse d'Oka, qui entourait le village. Maintenant, c'est une seule municipalité. La partie 12 de l'entendu du 21 décembre 2000, intitulée «Relationship of laws», ainsi que l'article 17 du projet de loi font état que:

Les dispositions de la présente loi et des lois des Mohawks de Kanesatake l'emportent sur les dispositions incompatibles des lois provinciales visées par l'article 88 de la Loi sur les Indiens et des règlements municipaux.

De plus, au même article 17 du projet de loi, on mentionne et je cite:

Les dispositions des lois des Mohawks de Kanesatake l'emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre loi provinciale.

Et, assez ironiquement, toujours à l'article 17 du projet de loi:

Les dispositions des lois fédérales l'emportent sur les dispositions incompatibles des lois des Mohawks de Kanesatake.

Il m'apparaît pour le moins étonnant que le ministre des Affaires Indiennes, d'une part, et le Parlement du Canada d'autre part, accordent, par une entente dans le cas du ministre et par une loi dans le cas du Parlement, le droit à un conseil de bande indienne de faire des lois qui auraient préséance sur celles du gouvernement du Québec, et sur les règlements de la municipalité d'Oka. Cela sans que le gouvernement du Québec et la ville d'Oka ne fassent partie de cette entente ratifiée par le projet de loi.

Le sénateur Joan Fraser, dans sa présentation du projet de loi, le 29 mars dernier, mentionne que, et je la cite:

Le gouvernement du Québec a été consulté et renseigné sur l'entente et a donné son appui général. La municipalité d'Oka donne aussi son aval à l'entente.

Par ailleurs, le sénateur Jean-Claude Rivest, dans son intervention du 5 avril indique:

[...] le gouvernement du Québec n'avait pas encore reçu de réponses adéquates aux questions techniques qu'il avait posées parce qu'il n'a pas fait partie du processus.

Il est clair cependant, que malgré ces apparentes divergences de vue, ni le gouvernement du Québec ni la municipalité d'Oka ne sont signataires de l'entente du 21 décembre 2000. Et pourtant, en décembre 1996, il y a eu une entente qui mettait sur pied un service policier à Kanesatake, laquelle entente était convenue entre trois parties: Kanesatake, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec. On aurait dû suivre, à mon avis, l'exemple et le précédent de décembre 1996, et faire en sorte que le Québec fasse partie de l'entente du 21 décembre 2000, entente portant sur des sujets beaucoup plus larges - plus larges que les services policiers dont il était question dans l'entente de décembre 1996 - et dont la plupart sont de juridiction provinciale.

Mon deuxième commentaire porte sur l'article 2 du projet de loi, qui laisse entendre qu'il pourrait y avoir des droits ancestraux existants ou issus de traités des Mohawks de Kanesatake. Jusqu'à preuve du contraire, je ne crois pas qu'il existe de tels droits. Il me semble, cependant, que des recherches historiques et juridiques sérieuses pourraient éclairer le sujet.

Troisièmement, bien que le préambule de l'article 7(1) mentionne que les Mohawks peuvent légiférer en matière d'utilisation et de mise en valeur du territoire, la suite de l'article traite essentiellement de législation portant sur des sujets autres que l'utilisation du territoire. Ce sont des pouvoirs et des compétences très étendus qui seraient accordés et qui plus est, ne sont pas limités. En effet, la dernière phrase du préambule de l'article 7(1) se lit, et je cite:

Cette compétence s'étend notamment à ce qui suit: [...]

Et en anglais:

[...] including in relation to [...]

Des 11 compétences qui suivent ce préambule, quatre de celles-ci portent sur l'utilisation et la mise en valeur du territoire. Les autres portent sur d'autres aspects comme, par exemple, la santé et la qualité de vie. Comme les 11 compétences mentionnées ne sont pas limitées, à cause des mots «notamment» et «including», cela signifie que la juridiction ou les compétences s'étendent à plusieurs autres sujets non mentionnés.

D'ailleurs, les Mohawks, dans un texte explicatif de l'entente, au moment de la présenter à la communauté, indiquent que:

[Traduction]

Les questions énumérées sont des exemples de domaines qui relèvent de la compétence de Kanesatake. Cela ne limite pas la compétence de Kanesatake.

[Français]

En réalité, on accorde des pouvoirs de légiférer dans une assise territoriale qui ne constitue pas une réserve - c'est clair dans le projet de loi - et qui n'est pas un territoire unifié. On voit qu'il n'y a pas de territoires unifiés sur la carte.

Au sujet de l'exercice de différentes compétences sur les quelque 50 lots, le texte explicatif parle de «formerly the 57 lots», qui sont tous ceux ici dans l'ex-village. Pour ces quelque 50 lots dans l'ex-village, ce sera très difficile et parsemé d'embûches. L'entente d'harmonisation avec la municipalité d'Oka prévue à l'article 13, ne traite exclusivement que de zonage et non pas de toutes les compétences prévues à l'article 7(1).

Mon quatrième commentaire a trait aux pouvoirs des Mohawks de Kanesatake de légiférer et les compétences qui leur sont accordées en vertu de l'article 7(1), et le pouvoir de créer des infractions, prévues à l'article 7(2), portent sur le territoire provisoire décrit à l'annexe du projet de loi.

En examinant les cartes - dont vous avez également des copies - qui décrivent le territoire provisoire, les parties en vert étant dans l'ex-village, on s'aperçoit que le territoire est éparpillé parmi celui de la municipalité d'Oka. La municipalité d'Oka étant beaucoup plus grande que ce territoire, elle se termine ici, sur le côté ouest et un peu plus loin sur le côté est. Cet éparpillement est particulièrement frappant pour les quelque 50 lots situés dans l'ex-village d'Oka. On peut facilement imaginer la difficulté d'exercer les nombreuses compétences sur les propriétés isolées au milieu de l'ex-village d'Oka ou même d'y créer des infractions alors que l'ex-village, me dit-on à la municipalité, compte quelque 1 300 lots. C'est peut-être 1 300 propriétés, mais on m'a dit 1 300 lots.

L'entente du 21 décembre 2000 entre les Mohawks et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien comporte une annexe B qui détermine la forme d'utilisation, et fixe les normes d'implantation pour les quelques propriétés mohawks situées dans l'ex-village. Ces règles de zonage ont été fixées par les Mohawks et le ministre, sans que la municipalité d'Oka ne soit partie à l'entente. On me dit cependant qu'elle a été consultée.

L'article 13 du projet de loi fait état de la possibilité d'une entente d'harmonisation entre les Mohawks de Kanesatake et la municipalité d'Oka, mais seulement et uniquement si les formes d'utilisation et les normes d'implantation pour ces propriétés mohawks sont sensiblement différentes de celles de l'annexe B de l'entente du 21 décembre 2000.

Les règles de zonage édictées par cette annexe B engage la municipalité dans trois secteurs, qui ne contiennent qu'une petite fraction de propriétés mohawks, et ne permettent pas de modifications par la municipalité qui seraient contraires à l'annexe B de l'entente. Il y a actuellement des formes d'utilisation de terres qui diffèrent de celles permises à l'annexe B. J'ai toujours référé seulement qu'aux lots de l'ex-village.

Mon dernier commentaire porte sur l'article 19(1) du projet de loi qui permettrait par décret du gouverneur en conseil d'ajouter des terres non mentionnées dans l'annexe du projet de loi, suite à une entente éventuelle entre le Conseil de bande de Kanesatake et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. Le projet de loi comporte le mot «provisoire» quant au territoire de Kanesatake dans le titre abrégé et à plusieurs endroits dans le texte du projet de loi. Le territoire provisoire de Kanesatake est celui mentionné à l'annexe du projet de loi et par conséquent, fait l'objet d'une loi à être approuvée par le Parlement du Canada. Toute addition à ces terres ne ferait l'objet, elles, que d'une approbation du gouverneur en conseil sans possibilité d'un examen par le Parlement ni par le gouvernement du Québec. Cela pourrait être extrêmement lourd de conséquences.

En effet, l'assise territoriale est considérée comme provisoire et présumément, devrait s'étendre.

Les Mohawks continuent de réclamer des droits sur toute la Seigneurie du Lac des Deux-Montagnes. Il faut se rappeler que la Seigneurie du Lac des Deux-Montagnes était un territoire d'environ 500 kilomètres carrés qui s'étend le long du Lac des Deux-Montagnes, de Pointe-Calumet à Saint-Placide - je regrette pour ceux qui ne sont pas familiers avec le Lac des Deux-Montagnes - et vers le nord jusqu'au nord de Saint-Colomban. Ce territoire inclut donc, en plus d'Oka, les municipalités de Pointe-Calumet et une litanie de municipalités: Saint-Placide, Saint-Benoît, Saint-Joseph-du-Lac, Sainte- Scolastique, Saint-Hermas, Saint-Canut, Sainte-Monique, Saint-Augustin et Saint-Colomban, ainsi que l'aéroport international de Mirabel.

Il m'apparaît inadmissible que des territoires additionnels d'une telle importance puissent être ajoutés, sans recours au Parlement du Canada et sans l'accord du Québec.

En conclusion, honorables sénateurs, je vous soumets les six recommandations suivantes - excusez-moi si c'est un peu osé -; je recommande le retrait des articles 17(1) et 17(2) qui donnent priorité aux lois des Mohawks de Kanesatake sur les lois du Québec et sur les règlements de la municipalité d'Oka.

Je recommande que les représentants du gouvernement du Québec soient entendus par cette Chambre, s'ils le veulent bien, à défaut de ne pas avoir fait partie de l'entente du 21 décembre 2000.

Troisièmement, je recommande que l'article 3(2) me paraît déplacé ou inutile, en ce sens qu'il laisse présumer que le Parlement reconnaît aux Mohawks des droits ancestraux ou issus de traités.

Quatrièmement, l'article 7(1) accorde des pouvoirs de légiférer sur un trop grand éventail de sujets et devrait se limiter à l'utilisation et la mise en valeur du territoire. De plus, le préambule de ce paragraphe devrait être restrictif et limitatif.

Cinquièmement, l'assise territoriale ne devrait pas comprendre les quelques 50 lots situés dans l'ex-village d'Oka. Par conséquent, les références aux terres mohawks avoisinantes, à l'annexe B de l'accord territorial du 21 décembre 2000, à l'entente d'harmonisation avec la municipalité d'Oka, devraient être supprimées.

De plus, le paragraphe 1 de l'annexe du projet de loi devrait être modifié pour éliminer du territoire de l'assise territoriale les quelques lots dans l'ex-village d'Oka. En somme, ces lots dans l'ex-village ne doivent pas constituer des terres réservées pour les Indiens au sens du point 24, de l'article 91, de la Loi constitutionnelle de 1867.

Enfin, l'article 19(1) devrait être éliminé ou modifié, de façon à ce que toute terre d'importance ajoutée éventuellement soit en mesure de faire l'objet d'une loi du Parlement du Canada.

Le sénateur Fraser: Monsieur Goyette, concernant les articles 17(1) et 17(2) où on traite des priorités des lois mohawks provinciales, fédérales, municipales et où on établit la priorité des lois, je ne sais pas si vous avez compris que le régime établi dans ces articles est en parallèle exact avec le régime qui existe déjà pour les territoires autochtones couverts par la Loi sur les Indiens.

M. Goyette: Oui.

Le sénateur Fraser: Ce n'est pas un nouveau régime qu'on impose à qui que ce soit. Nous suivons un régime bel et bien établi partout et dans je ne sais combien d'endroits au Québec. Je ne vois pas en quoi cela vous gêne tellement.

M. Goyette: C'est que ce n'est pas un territoire de réserve, ce sont des terres réservées pour les Indiens en vertu du projet de loi. Par conséquent, - je ne suis pas un spécialiste du droit autochtone - ce que vous dites s'applique particulièrement dans le cas de réserves comme à Kahnawake, pour prendre un cas plus près.

Le sénateur Fraser: La Loi sur les Indiens s'applique aux réserves. Ce projet de loi établit un régime semblable. Il me semble que c'est plutôt un avantage puisque étant un régime semblable, on a déjà établi un peu partout comment cela fonctionne. Tout le monde comprend comment cela fonctionne. En tout cas, vous persistez?

M. Goyette: Non, ce n'est pas le point majeur de ma présentation. J'ai compris que le droit constitutionnel et la Loi sur les Indiens applique ce genre de choses. J'ai eu de M. Walling, gracieusement, une copie de l'article 88 dont il est question au paragraphe 17(1). J'ai un peu de difficulté à comprendre l'article 88, mais je comprends l'essentiel qui va dans le sens de ce que vous me dites. Je m'imaginais que n'étant pas une réserve, cela pouvait être adapté différemment.

Le sénateur Fraser: Vous dites que ce n'est pas le point majeur de votre présentation. Le point majeur, si je comprends bien, ce sont les lots de territoires dans le village d'Oka. Est-ce exact?

M. Goyette: C'est un des points majeurs. Que pour les quelques 1 300 lots éparpillés sur cette carte, les compétences puissent être exercées sur des petits lots individuels. On parle ici de compétence de traitement des eaux, «wildlife and fish», et cetera. Il y a des lots qui sont en bordure de l'eau. Ils pourront adopter des lois ayant préséance sur les lois du Québec dans un territoire qui est considéré comme réservé aux Indiens et, par conséquent, auront priorité sur toutes ces lois et ce, sur des sujets vraiment embêtants à réglementer ou à appliquer.

Le sénateur Fraser: Il y a quand même des mesures assez impressionantes et innovatrices pour obliger les deux parties à harmoniser leur façon de contrôler et d'aménager leurs territoires avoisinants. Cela ne vous satisfait pas? J'ai été vraiment très impressionnée quand j'ai lu ce qui a été établi comme levier réciproque afin, justement, qu'on ne fasse pas des choses nocives les uns envers les autres.

M. Goyette: L'entente d'harmonisation va porter seulement sur des questions de zonage et non pas sur toutes les compétences et juridictions prévues à l'article 7(1). Les lots qui sont démontrés ici font partie de l'annexe dans l'ex-village. Ce sont les lots du paragraphe 1: «Kanesatake Indian lands number 16 ». C'est ce qu'on m'a dit, «the formerly 57 lots». Donc, toute l'entente, toute l'assise territoriale comprend ces 57 lots. L'article 7(1), qui donne des pouvoirs et des compétences de légiférer sur une foule de sujets porte sur le territoire provisoire, «the Kanesatake Mohawk interim land base », qui est défini comme étant celui de l'annexe 1 de la loi. L'entente d'harmonisation prévue à l'article 13, auquel vous faites référence, ne porte que sur des questions de zonage. J'ai ici un agrandissement de cette section et j'ai marqué en jaune les terrains en question.

Il y a des sections déterminées dans l'entente du 21 décembre, qui doivent être utilisées pour des maisons unifamiliales, pour le «commercial establisments», pour des duplex dans tel ou tel secteur. Les «land use» et «standards» font aussi partie de l'entente. L'entente dit combien de «set back from the street you should have your building». L'entente d'harmonisation à laquelle cela fait référence est très limitative. Il n'y a pas d'entente d'harmonisation prévue dans le projet de loi sur tous les autres sujets où il pourrait y avoir des conflits.

Le sénateur Fraser: Mais que craignez-vous?

M. Goyette: Par exemple, une des compétences prévues, qui pourrait être appliquée par des lois du Conseil de bande de Kanesatake, porte sur le statut de résident, sur les services de protection contre les incendies, sur la possibilité d'installations d'approvisionnement en eau. Cela n'a aucun sens de donner un pouvoir à quelqu'un où il y a un territoire passablement unifié, et de donner aussi ces droits et de faire des lois sur des choses qui sont tout éparpillées ici. Par exemple, cela étend la juridiction sur le maintien de l'ordre et la prévention de conduites répréhensibles. Est-ce qu'ils vont envoyer les policiers de Kanesatake alors que les services policiers dans la région seront exercés par la Sûreté du Québec? Cela va juste créer des embêtements pour un territoire ridiculement petit proportionnellement. Je parle toujours évidemment de ceux inscrit sur ce plan.

[Traduction]

Le sénateur Fraser: Il sera donc dit que nous sommes en désaccord, monsieur Goyette.

[Français]

Selon moi, il est tout à fait normal que les territoires mohawks soient gérés par les Mohawks de Kanesatake. D'après ce qu'on a vu depuis quelques années, il semble que la coopération avec les autorités municipales d'Oka a été grandement améliorée et on peut espérer que cela continuera dans le même sens. Je comprends mieux maintenant votre point de vue.

M. Goyette: Je suis d'accord avec vous pour ces territoires. Il y a une tentative d'unification. Il y a déjà eu passablement d'unification de territoires. Un conseil de bande actif, des installations communautaires, une nouvelle école d'immersion en construction, une maison pour personnes âgées, un centre de désintoxication font maintenant partie du territoire. Il y a beaucoup d'installations communautaires et un conseil de bande qui bénéficient d'un support. Cela m'apparaît normal qu'ils puissent avoir des droits de légiférer sur des territoires, mais mon point porte sur les territoires qui sont en voie d'unification.

Le sénateur Gill: Je vous remercie, M. Goyette pour votre présentation. Mon premier point concerne votre troisième commentaire. Vous dites que l'article 3(2) vous paraît déplacé ou inutile en ce sens qu'il laisse présumer que le Parlement reconnaissait aux Mohawks des droits ancestraux issus de traités. Vous savez que c'est lors du rapatriement de la Constitution qu'on a reconnu des droits ancestraux. Les Mohawks font partie des nations indiennes au Canada. À mon sens, c'est une confirmation des droits qui ont été reconnus lors du rapatriement de la Constitution. Pourquoi dites-vous que l'article est inutile?

M. Goyette: Je connais les amendements sur les droits ancestraux traités lors du rapatriement de la Constitution en 1982, mais c'est sur les droits ancestraux existants ou qui peuvent être prouvés. L'article 3(2) dit, et je cite:

La présente loi est sans rapport avec les droits ancestraux ou issus de traités des Mohawks de Kanesatake: elle n'a pas pour effet d'y porter atteinte ni d'entraîner leur reconnaissance par Sa Majesté du chef du Canada.

Cela ne dit pas que des droits ancestraux sont reconnus. L'utilisation en français de l'article défini «les» laisse supposer qu'il y en a. Selon mes consultations et mes recherches, je pense que le texte anglais qui mentionne «any Aboriginal or treaty rights», est plus indéfini. C'est le point que je soulevais. Cela laisse entendre, en tout cas dans le texte français, qu'il y en a. Je ne pense pas qu'il y en ait. S'il y en a, ils sont reconnus par la Constitution de 1982.

Le sénateur Gill: Vous pensez qu'il n'y a pas de droits aboriginaux pour les Mohawks de Kanesatake?

M. Goyette: Il y a peut-être des droits aboriginaux, mais pas des droits ancestraux.

Le sénateur Gill: Vous faites une différence entre les deux?

M. Goyette: J'ai lu un document d'une décision rendue par la Cour suprême de 1997, dans lequel on faisait une grande différence entre les droits ancestraux et les droits aboriginaux.

Le sénateur Gill: Vous ne pensez pas qu'en tant qu'Indiens, ils ont des droits particuliers, peu importe qu'ils soient aboriginaux ou ancestraux, concernant le Québec?

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk: Pouvez-vous conclure votre réponse relative à la décision de la Cour suprême sur la différence entre les droits ancestraux et les droits autochtones?

La présidente: Sénateur Tkachuk, vous êtes le prochain sur la liste.

Le sénateur Gill: J'ai oublié ce que je voulais dire.

La présidente: Vous parliez des droits ancestraux, sénateur Gill.

[Français]

Le sénateur Gill: Je vous ai demandé si, en tant qu'Indiens, vous ne pensiez pas qu'ils avaient des droits particuliers, que ce soient des droits aboriginaux ou ancestraux?

M. Goyette: Oui, c'est évident.

Le sénateur Gill: Dans votre quatrième commentaire, vous parlez de l'article 7(1), qui accorde des pouvoirs de légiférer sur un trop grand éventail de sujets alors qu'il devrait se limiter à l'utilisation et à la mise en valeur du territoire. Vous dites que le préambule de ce paragraphe devrait être restrictif et limitatif. Pourquoi dites-vous cela? Voulez-vous dire que les Mohawks, comme peuple ou comme groupe, ne peuvent pas légiférer ou ne peuvent pas considérer une législation sur les sujets qui sont mentionnés dans ce paragraphe?

M. Goyette: Sur plusieurs sujets, oui. Au début du paragraphe (1) de l'article 7, on dit qu'ils peuvent légiférer en matière d'utilisation et de mise en valeur du territoire.

[Traduction]

En anglais, on dit: «to the use and development of the lands in the Kanesatake Mohawk interim land base...»

[Français]

On devrait se limiter à cela: «utilisation et mise en valeur du territoire.» Cependant, on énumère des compétences. Il y en a quelques-unes qui sont en matière d'utilisation et de mise en valeur du territoire comme:

[Traduction]

g) la construction, l'entretien, la gestion et l'exploitation d'ouvrages de nature locale...

h) la construction et la transformation de bâtiments, y compris l'inspection des travaux;

i) le zonage;...

[Français]

Si on parle de la protection et la gestion des ressources fauniques et le maintien de l'ordre, il ne s'agit pas de l'utilisation des terres.

C'est dans ce sens que je dis que cela devrait être limité à ce que le préambule décrit. Deuxièmement, je soulève que cela définit 11 compétences qui vont de A à K.Au début de cette liste, on dit : «s'étend notamment à ce qui suit». Ce qui laisse croire, et les Mohawks sont de cet avis puisqu'ils l'ont écrit dans un texte, que ce n'est pas limitatif et que leurs compétences pourraient s'exercer sur une foule d'autres compétences. C'est dans ce sens que j'ai fait ma recommandation numéro 4, à l'effet que cela devrait se limiter à l'utilisation et la mise en valeur du territoire, comme tel que décrit dans le préambule, et que cela ne devrait pas dire «notamment». Cela devrait seulement décrire des choses qui portent sur l'utilisation et le développement du territoire.

Le sénateur Gill: Si je comprends bien, tantôt vous avez dit que vous étiez d'accord avec l'ensemble de l'entente, sauf que vous n'étiez pas d'accord sur le fait de considérer l'ex-territoire, l'ex-Oka.

M. Goyette: L'ex-village.

Le sénateur Gill: Est-ce que je vous interprète bien lorsque je dis cela?

M. Goyette: Oui. Je suis d'accord pour des pouvoirs d'utilisation et de développement du territoire dans le grand territoire. Je parle du territoire principal qui finit au cimetière d'Oka, et qui finit aussi à la Pointe-aux-Anglais, à la municipalité. Je pense bien qu'il pourrait encore y avoir un effort d'unification. Je suis d'avis qu'au sujet de l'article 7, les juridictions devraient porter sur ce territoire, mais seulement en matière de «land use and development of the lands».

Le sénateur Gill: Pourquoi?

M. Goyette: Parce que cela nous donne des pouvoirs, genre de municipalité d'importance, sans être une municipalité soumise à une autorité provinciale.

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk: Ces 50 lots situés dans l'ex-village d'Oka appartiennent-ils à la réserve?

La présidente: Il n'y a pas de réserve.

Le sénateur Tkachuk: À qui appartiennent-ils?

M. Goyette: Ils appartiennent au gouvernement fédéral et figurent à l'annexe qui se trouve à la toute dernière page du projet de loi. Les terres indiennes no 16 de Kanesatake englobent ces terres qui appartiennent au gouvernement du Canada.

Le sénateur Tkachuk: Sont-elles habitées à l'heure actuelle?

M. Goyette: Oui.

Le sénateur Tkachuk: Vous ne proposez pas de reprendre ces terres à leurs propriétaires, mais simplement de faire en sorte qu'elles soient considérées au même titre que les terres avoisinantes?

M. Goyette: C'est cela.

Le sénateur Tkachuk: En d'autres termes, ce terrain - qui est ce qu'il est - en ville peut tomber sous la compétence de la municipalité mais sans toutefois lui appartenir. À mon sens, cette question est source de confusion, comme cela s'est déjà produit dans de nombreuses autres ententes. Je comprends ce que vous voulez dire.

Que se passe-t-il lorsque la police est appelée à intervenir? À quel service fait-on appel? S'il existe une force de police municipale juste à côté, celle-ci refuse-t-elle de répondre à l'appel en attendant que les autres policiers interviennent?

Ont-ils droit à des services? Payent-ils de l'impôt? Vont-ils payer de l'impôt là-dessus?

M. Goyette: Je suppose qu'ils payeront un montant tenant lieu d'impôts.

Le sénateur Tkachuk: Ils paieront selon un système de rémunération des services.

Comment obtiennent-ils de l'eau?

M. Goyette: Par la municipalité.

Le sénateur Tkachuk: Doivent-ils la payer?

M. Goyette: Je n'en ai aucune idée. Sans doute que oui, ou alors c'est le gouvernement fédéral qui paie. Je crois savoir que ces propriétés sont occupées par des Indiens, mais je ne suis pas certain que toutes le soient. J'ai lu que toutes ces propriétés appartiennent au gouvernement. La plupart d'entre elles ont été achetées par le gouvernement fédéral au fil des ans, bon nombre depuis 1990, et les terres sont occupées par des Indiens et louées à bail.

Le sénateur Tkachuk: Je voulais poser des questions au sujet de la compétence car tout cela m'échappe.

Si les terrains sont répartis dans toute la ville, pourquoi ne sont-ils pas assujettis à la réglementation municipale, comme n'importe quel autre terrain privé, que ce soit vous, moi, eux ou le gouvernement fédéral qui en soient propriétaires? Il doit exister une sorte d'organisation pour la gestion des terrains.

M. Goyette: On a dit, et on le dira encore, qu'il existe un vide juridique si une entente comme celle-ci n'est pas signée et que l'on n'adopte pas de loi à ce sujet. Toutefois, il n'y a pas de vide juridique pour ces petites propriétés qui sont assujetties aux règlements municipaux. Ces terrains sont visés par la législation provinciale et fédérale ainsi que par le Code criminel.

Une affaire a été portée devant la Cour d'appel et la Cour suprême. M. Simon possédait des petites propriétés et il a construit une maison sur un terrain situé dans la rue principale de la ville. Sa maison avait deux ou trois étages, ce qui allait contre le règlement municipal. C'était contraire au règlement municipal adopté dans l'entente conclue en décembre entre le Conseil des Mohawks et la municipalité parce que dans le secteur un, on ne peut construire que des maisons unifamiliales, isolées ou jumelées, des maisons en rangée ou des chambres d'hôtes d'au plus trois chambres. M. Simon construisait un immeuble d'appartements.

Il y a eu un procès et Simon a perdu devant la Cour d'appel. La Cour suprême a statué que cette affaire ne relevait pas de sa compétence. Cela a réglé la question et l'immeuble n'est plus là.

Il n'existait pas de vide juridique. Il existait un règlement municipal. L'affaire s'est terminée là. Toutefois, si cela fait désormais partie de l'assise territoriale provisoire de Kanesatake, alors les dispositions de cette loi et de l'entente s'appliqueront.

Ce que je veux dire, c'est que le zonage est une question négociable et qu'il existe une entente d'harmonisation entre les propriétés indiquées en jaune et les terrains avoisinants. Il y aura une nouvelle entente d'harmonisation aux termes de l'article 13 du projet de loi.

À mon avis, il est inutile d'élargir tout le champ de compétence. Il suffit de s'en tenir à l'entente de zonage.

Le sénateur Tkachuk: Si cela peut vous consoler, dans notre province de la Saskatchewan, nous sommes allés encore plus loin. Il y a des réserves en milieu urbain qui n'étaient pas des réserves auparavant mais faisaient partie de règlements de revendications territoriales négociées. Bon nombre de ces questions se sont posées et ont été réglées parce que les voisins doivent vivre en bonne intelligence. Ils se réunissent. Ils ne veulent pas se battre. Ils s'entendent. S'ils ne veulent pas se bagarrer dans la rue, ils concluent des ententes semblables.

En bout de ligne, cela sera pareil partout. Ils régleront le litige lié aux services de police et d'incendie, comme nous l'avons fait à Saskatoon.

Il y a certains problèmes importants qui sont en suspens, notamment une station-service de 24 postes exonérée de taxe.

Je ne sais pas comment on va résoudre ce problème, mais je pense que des voisins animés de bonnes intentions ont réussi à résoudre ces problèmes dans les secteurs qui relèvent de la compétence fédérale, provinciale et municipale. Parfois les gens s'entendent pour résoudre leurs problèmes. J'ai toujours été convaincu que c'est ce qui se passera, en fin de compte, si les gens font preuve de bonne volonté.

M. Goyette: En fait, une entente a été conclue en décembre 1996 pour que les services policiers soient assurés par la police de Kanesatake, et cela donne de bons résultats. Toutefois, le gouvernement provincial était partie à l'entente.

Le sénateur Tkachuk: Je suis sûr que c'est ce qui va se passer dans ces régions. Les gens responsables de l'assise territoriale feront le nécessaire pour que les gens jouissent de la protection de la police, laquelle sera peut-être assurée par un autre corps policier car il sera difficile de faire régner l'ordre sur un terrain ou à l'égard d'un groupe de gens qui occupent un immeuble résidentiel au beau milieu d'un secteur protégé par un autre corps policier. Je crois que, en bout de ligne, on va trouver une solution mais je n'ai jamais cru que ce genre d'accord réglait tous les problèmes. On fait toujours ce genre de choses. Cela me dépasse, mais les gens réussissent à surmonter les erreurs du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, à passer outre aux pouvoirs en place et à résoudre les problèmes eux-mêmes.

La présidente: C'est une question intéressante.

Le sénateur Rompkey: Je suis enclin, madame la présidente, à m'en tenir à cela parce que j'ai trouvé encourageants les commentaires du sénateur Tkachuk. Il a exprimé mon point de vue. Il y a moyen de s'entendre. Il faut s'entendre. Ceux qui vivent dans le voisinage ne cherchent pas à faire la guerre, ils veulent la paix, et donc ils s'organisent pour s'entendre.

Pour ce qui est des 50 maisons, en principe, il me semble que ceux qui y sont logés doivent avoir les mêmes droits que les autres personnes autochtones. Ne croyez-vous pas que leurs droits doivent bénéficier de la même protection que les droits des autres? Il me semble que le terme clé est «harmonisation». La municipalité et la bande doivent harmoniser. C'est là le principe fondamental.

Par ailleurs, en fin de compte, il me semble qu'il y a des Autochtones qui habitent ces 50 lots et qui ne sont pas comme tous les autres. Ils sont des Autochtones et la Constitution leur garantit certains droits. Ces droits sont inscrits dans la Constitu tion. Les tribunaux statuent à maintes reprises depuis plusieurs années que les Autochtones ont des droits. Ne croyez-vous pas qu'il nous incombe de nous assurer que ces droits sont protégés? Croyez-vous qu'il est important de protéger les droits des 50 qui habitent ces logements?

M. Goyette: Je crois qu'il faut protéger les droits de ceux qui habitent un périmètre plus large.

J'ai un document publié en 1986 par le gouvernement du Québec et qui porte sur les nations autochtones au Québec. Il est truffé de cartes géographiques. Je n'en trouve aucune qui montre un terrain indivis. Si on examine toutes les cartes, on constate que tous les terrains sont unifiés.

Il ne s'agit donc pas de la partie unifiée de Kanesatake. C'est exclu de la partie principale. Ils ont des droits, tout comme les autres résidents d'Oka, mais il leur faudrait s'installer dans la partie plus unifiée afin d'avoir un plus grand nombre de droits. On ne compte pas beaucoup d'habitants sur ces 50 lots ou terrains.

Le sénateur Rompkey: Il y a une autre chose qui me vient à l'esprit, madame la présidente, au sujet de la restriction de l'harmonisation qui se limiterait au zonage. M. Goyette a parlé de la faune et de la pêche, mais il me semble qu'il s'agit de deux domaines pour lesquels les tribunaux ont toujours statué que les peuples autochtones avaient des droits particuliers. La faune a toujours fait partie de leur culture, de leur tradition. Il y a toujours eu un lien très spécial entre les peuples autochtones et certaines espèces sauvages. Ils ont toujours eu accès à la faune. Ça remonte à leurs origines.

Ne croyez-vous pas qu'il est nécessaire de protéger la faune et la pêche à l'intention des peuples autochtones peu importe s'ils vivent dans la zone occupée par la bande ou dans une des 50 maisons?

M. Goyette: Dans la liste des compétences au paragraphe 7(1), il y a probablement des secteurs qui pourraient répondre soit au critère d'utilisation ou bien au critère de mise en valeur du territoire, pour reprendre les termes qui se trouvent dans cet article. On y parle «d'utilisation et de mise en valeur du territoire». Les règlements qui touchent la faune et la pêche se situent probablement entre ces deux notions d'utilisation du territoire. C'est probablement un des cas limites.

J'ai dressé une liste des 11 compétences énumérées au paragraphe 7(1) et parfois il y en avait quatre et parfois cinq qui, selon moi, représentaient l'utilisation et la mise en valeur du territoire. Celui-là se trouvait entre les deux. Vous avez probablement raison.

La présidente: Monsieur Goyette, vous avez fait une très bonne présentation, mais nous discutons de personnes, de Blancs comme d'Autochtones, de particuliers et de voisins et certaines choses se produisent. Je suis une Métisse. Nous sommes propriétaires de plus de 99 terrains dans la ville d'Edmonton et nous travaillons très étroitement avec la municipalité afin de respecter tous les règlements municipaux. Il s'agit d'un droit commun qui s'applique partout au Canada.

Les lots dont nous discutons, que vous cherchez à faire quitter par ceux qui y sont installés, appartiennent aux Mohawks. Les Mohawks sont les propriétaires et il leur faut un règlement quelconque afin de pouvoir s'occuper de ces terrains situés dans le village d'Oka. Le sénateur Tkachuk a fait état de la situation. Les voisins ne veulent pas se quereller mais le propriétaire, c'est-à-dire le Grand Conseil des Mohawks, doit avoir son mot à dire quant à la gestion et à l'entretien de la propriété.

[Français]

Le sénateur Gill: J'aimerais soulever deux ou trois points. Pour les communautés autochtones, entre autres au Québec, vous avez aussi des morcellements sur la Côte-Nord, par exemple à Sept-Îles. Des gens se sont installés et cela a créé des morcellements dans les communautés. Il y a donc d'autres communautés, à part Oka, où il y a du morcellement.

M. Goyette: Je pense qu'il y en a Sept-Îles.

Le sénateur Gill: Oui, on retrouve la ville et la réserve indienne à côté, puis il y en a une autre plus loin, alors il y a des résidences non autochtones et des résidences autochtones, et cetera.

Vous savez qu'il y a un protocole d'entente pour les juridictions, qui a été signé entre la Sûreté du Québec, la police amérindienne et la police d'Oka pour, justement, travailler ensemble et être capable de passer à travers les différentes juridictions. Cela est très bien couvert. Vous vous rappelez ce qu'on appelle la crise d'Oka. Il y a eu des mortalités, précisément des batailles entre policiers. Il existe maintenant un protocole d'entente et nous sommes en mesure de régler certains conflits.

M. Goyette: Il y a eu une entente, en 1996, entre le Conseil de bande, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec sur les services policiers. Suite à cette entente, ils ont installé un service de police à Kanesatake. Ils ont leur zone de patrouille.

Le sénateur Gill: Cela fonctionne assez bien depuis ce temps?

M. Goyette: Oui, il ne semble pas y avoir de problèmes.

Le sénateur Fraser: Je reviens aux questions de l'éparpillement des lots à l'intérieur du village. Il me semble que nous vivons, depuis toujours au Québec, avec des éparpillements de juridiction. Par exemple, sur l'île de Montréal, - que je connais mieux que la région d'Oka - on a eu des terres fédérales, des terres provinciales et des terres appartenant à l'Église. On avait des régimes différents selon l'ordre religieux. On a d'abord eu les commissions scolaires confessionnelles et ensuite, les commissions scolaires linguistiques qui ont des territoires qui se chevauchent. On a, pour le moment, un bel assortiment de municipalités. Certaines sont entourées par d'autres municipalités et cela fonctionne merveilleusement bien. Cela fonctionnera moins bien lorsque ce sera disparu, mais c'est un autre sujet.

Étant donné que toute notre histoire, depuis des siècles, consiste justement à avoir différentes juridictions pour différentes circonstances, je n'arrive pas à comprendre pourquoi cela vous gêne tellement dans ce cas-ci. Cet éparpillement existe et reflète la réalité. Est-ce parce que ce sont des Mohawks que cela vous fait peur? Est-ce à cause de la crise de 1990? Ou est-ce par principe que vous voulez que tout soit uniforme d'un bloc à l'autre?

M. Goyette: Je suis de l'avis de ceux qui disent que «we are overgoverned». On établirait, par ce projet de loi, un autre ordre du gouvernement sur ces quelques petits lots. Je me suis dis d'accord avec un autre ordre du gouvernement pour cela, mais pas pour des lots éparpillés comme ceux-ci, 50 lots sur 1 300. C'est une autorité de plus. Ils ont déjà l'autorité de deux niveaux de gouvernement et d'une municipalité, qui règlementent tout ce qui se passe dans ce petit secteur. On n'a pas besoin d'un quatrième niveau pour faire des lois uniquement pour 57 lots. Ce n'est pas un éparpillement de différentes autorités gouvernementales auquel vous faites référence, c'est l'éparpillement de quelques lots à l'intérieur de beaucoup d'autres lots avec un autre pouvoir de faire des lois.

[Traduction]

Un autre ordre de gouvernement pour faire des lois.

Le sénateur Tkachuk: Je peux vous garantir qu'au bout du compte les avocats auront plusieurs centaines d'heures à facturer.

La présidente: Nous vous remercions, monsieur Goyette. Il est important que les comités du Sénat, en examinant des projets de loi, entendent tous les aspects de la question. Il nous incombe de savoir ce que vous pensez, ainsi que ce que pensent tous les autres. Nous vous remercions.

La séance est levée.


Haut de page