Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 13 - Témoignages du 5 mars 2002
OTTAWA, le mardi 5 mars 2002
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 9 h 35 pour examiner l'accessibilité, l'éventail et la prestation des services, les problèmes liés aux politiques et aux compétences, l'emploi et l'éducation, l'accès aux débouchés économiques, la participation et l'autonomisation des jeunes et d'autres questions connexes.
Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Les questions autochtones ont été examinées en long et en large. Il nous faut maintenant mettre au point un plan d'action de concert avec les collectivités et les organismes autochtones de tout le pays. Nous pourrons ainsi nous regrouper pour déterminer ce qui doit être fait dans les collectivités en partenariat avec toutes les collectivités autochtones. Voilà pourquoi ce plan d'action revêt tant d'importance.
Je souhaite aujourd'hui la bienvenue à nos témoins, M. Scott Broughton, M. Claude Rocan, M. Keith Conn et Mme Wendy Birkinshaw. Monsieur Broughton, vous avez la parole.
[Français]
M. Scott Broughton, sous-ministre adjoint, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique, ministère de Santé Canada: Je suis accompagné aujourd'hui de monsieur Claude Rocan, directeur général du Centre de développement de la santé humaine et de la Direction générale de la santé de la population et de la santé publique, de monsieur Keith Conn, directeur général intérimaire de la Direction des programmes de la santé communautaire et de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada, et de Wendy Birkinshaw, analyste principale en politique de la Division de l'enfance et de l'adolescence.
M. Ian Green, notre sous-ministre, m'a chargé de vous transmettre ses excuses, car il ne pourra pas être ici aujourd'hui. Il m'a demandé de faire cette présentation en son nom. J'ai le plaisir d'être ici avec vous aujourd'hui pour vous faire part des contributions de Santé Canada à la santé et au bien-être des jeunes Autochtones vivant en milieu urbain. Je vais tout d'abord décrire le contexte dans lequel nous offrons des programmes et des services à cette population. Je passerai ensuite à une discussion plus détaillée sur notre participation à la stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain du gouvernement canadien, les types de programmes offerts par notre ministère aux Autochtones, les activités offertes pour la promotion du développement en santé des enfants et des adolescents, et les autres initiatives du ministère au profit des jeunes Autochtones du Canada vivant en milieu urbain.
[Traduction]
Alors que Santé Canada offre un nombre limité de programmes destinés spécifiquement aux jeunes Autochtones vivant en milieu urbain, le ministère offre un large éventail d'activités, de programmes et de services accessibles aux Autochtones et qui leur sont destinés. Le ministère vise la prévention en vue de promouvoir le développement de la santé humaine, particulièrement durant la petite enfance pour prévenir des problèmes qui pourraient survenir plus tard dans le développement.
Fidèle à l'adoption de l'Approche sur la santé de la population dans le cadre de laquelle nous cherchons à repérer et à aborder les nombreux facteurs qui ont une incidence sur la santé des populations, Santé Canada a choisi de mettre en oeuvre une grande variété de programmes et d'activités destinés aux enfants, aux jeunes et aux familles dont la situation est précaire, ce qui rejoint très bien les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain. Les programmes et services de Santé Canada axés sur les Autochtones sont tout d'abord destinés aux membres des Premières nations qui habitent dans les réserves et aux Inuits qui habitent dans les collectivités inuites. Les Autochtones vivant en milieu urbain ou hors des réserves reçoivent des services des provinces et des territoires ou par l'entremise d'initiatives fédérales-provinciales-territoriales.
Cependant, le niveau élevé de mobilité des Autochtones, tant au palier familial qu'individuel, présente des problèmes en ce qui a trait à la conception et à la mise en oeuvre des politiques et des programmes. La mobilité entraîne une confusion quant aux limites de compétence entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires. D'autres ministères vous ont déjà présenté des données sur la structure de la population, la croissance, la mobilité et divers indicateurs socioéconomiques. Je suis incapable de vous fournir des données similaires sur le profil de santé des jeunes Autochtones vivant en milieu urbain. Alors qu'il est assez facile d'établir avec exactitude l'état de santé de la population autochtone habitant dans les réserves, il n'en va pas de même pour ceux qui habitent les régions du Nord et hors des réserves. Il n'existe aucun moyen pour l'instant de séparer les données sur les Autochtones du Canada de celles de la population dans son ensemble.
Nos enquêtes nationales sur la santé des enfants et des jeunes ne nous permettent pas de recueillir de données sur l'origine ethnique. Lorsqu'elles le font, la taille des échantillons est trop petite pour permettre une interprétation significative des données pour la population autochtone. Dans la plupart des cas, la base de données et registres provinciaux n'incluent pas de renseignements sur le statut des Autochtones. Cela se répercute grandement sur la conception des politiques et des programmes.
Je vais passer maintenant à la quatrième diapositive.
[Français]
Santé Canada participe activement dans le moment à la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain afin de maximiser l'efficacité des ressources actuelles grâce à une meilleure coordination interne et à l'établissement d'ententes de partenariats avec les provinces, les municipalités et les organismes autochtones.
À l'échelle nationale, Santé Canada contribue aux initiatives interministérielles qui supportent la Stratégie, comme par exemple l'élaboration d'un guide sur les programmes et services destinés aux Autochtones vivant en milieu urbain.
À l'échelle régionale, Santé Canada participe à la mise en oeuvre de la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain par l'intermédiaire de comités composés de hauts dirigeants fédéraux.
À Vancouver par exemple, le Centre de santé offre un premier point de contact 24 heures sur 24 pour les personnes qui cherchent temporairement un peu de répit de la rue, les jeunes Autochtones y compris.
Toujours à Vancouver, Santé Canada a établi un partenariat avec Justice Canada, la ville de Vancouver, le service de police de Vancouver et la GRC afin d'appuyer un programme visant à sensibiliser les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain et à leur permettre de retrouver leur patrimoine culturel grâce à un voyage en canoé. Santé Canada reconnaît que l'identité et le patrimoine culturels, en tant que déterminant de la santé, sont essentiels pour cette population.
À Winnipeg, Santé Canada a pris un rôle de direction dans la convention tripartite entre les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux qui vise à satisfaire les priorités de la population autochtone de la ville, les jeunes Autochtones y compris.
En Alberta, les bureaux régionaux de Santé Canada et les organismes autochtones tiendront une conférence sur les jeunes Autochtones pour la province en mai 2002.
[Traduction]
Santé Canada offre un grand nombre de programmes et de services destinés spécifiquement aux Autochtones et qui comprennent un volet consacré aux jeunes. Alors que la majorité de ces programmes et services sont offerts aux membres des Premières nations qui habitent des réserves et aux Inuits vivant dans les collectivités inuites, il y a certaines initiatives qui sont davantage de nature panautochtone. Par exemple, la Stratégie canadienne sur le diabète fournit du financement pour 40 projets pour les Métis, les Inuits des milieux urbains et les Autochtones hors réserve; la majorité de ces projets visent les jeunes et leurs familles. De plus, dans le cadre de cette stratégie, la Fondation des maladies du coeur a reçu des fonds pour l'adaptation du programme d'éducation en milieu scolaire pour en augmenter la pertinence auprès des enfants autochtones.
La Semaine nationale de sensibilisation aux toxicomanies, tenue par le Nechi Institute d'Edmonton, met l'accent sur tous les jeunes Autochtones et leurs collectivités afin d'aborder la question des toxicomanies et leurs incidences. L'approche de Santé Canada à l'égard de la prévention et du traitement de l'abus de solvants vise particulièrement les jeunes Autochtones. Environ 20 p. 100 des jeunes admis dans les neuf centres de traitement contre l'abus de solvants financés par Santé Canada proviennent de milieux urbains.
Nous passons à la sixième diapositive: le Programme de bourses d'études des carrières de la santé pour Indiens et Inuits fournit 500 000 $ par année pour appuyer les jeunes Autochtones du Canada qui choisissent de poursuivre des études postsecondaires dans le domaine de la santé. Depuis le milieu des années 80, Santé Canada finance le programme «Modèle de comportement autochtone» pour encourager les jeunes Autochtones à adopter un mode de vie sain en suivant l'exemple d'autres jeunes Autochtones d'origine canadienne, dont un grand nombre sont très connus pour leurs réalisations dans divers domaines.
Santé Canada appuie le prix Jeunesse dans le cadre des prix nationaux annuels d'excellence décernés aux Autochtones; le prix Jeunesse vise à encourager les jeunes Autochtones d'origine canadienne à se dépasser. Santé Canada met davantage l'accent sur les programmes de ventes subventionnées destinés aux populations autochtones qui portent principalement sur le syndrome d'alcoolisme foetal, l'usage non traditionnel du tabac et le diabète. Les jeunes sont souvent la cible première de ces activités de sensibilisation. Plusieurs produits sont rendus accessibles à tous les Canadiens grâce à la diffusion sur les réseaux Autochtones, spécialement sur Aboriginal Peoples Television Network.
Je vais maintenant passer à la diapositive sept. Santé Canada a financé un segment de 30 minutes de la série télévisée Seekers; ce segment fait la promotion de la santé mentale et du bien-être des jeunes Autochtones d'origine canadienne. Santé Canada a fourni des fonds pour le Réseau jeunesse autochtone en vue de la création d'un site Web comprenant de l'information de pointe sur les questions de santé et de mode de vie, comme par exemple les abus, le langage corporel, le sexe, la grossesse, le tabagisme et la toxicomanie.
Le Programme des services de santé non assurés de Santé Canada fournit une gamme de prestations sanitaires à près de 700 000 membres des Premières nations et Inuits admissibles, sans égard à leur lieu de résidence, afin de compléter les régimes provinciaux et ceux offerts par des tiers. Le régime englobe les médicaments d'ordonnance, une assurance de soins dentaires, de l'équipement médical, le transport, des soins de la vue, des primes versées en vertu de régimes provinciaux d'assurance-maladie en Colombie-Britannique et en Alberta, ainsi que du counselling, à court terme et en cas de crise.
Nous allons maintenant passer à la huitième diapositive.
[Français]
Les activités de Santé Canada visant le développement en santé des enfants et des adolescents présentent des avantages importants pour les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain. Premièrement, elles font la promotion du développement en santé durant l'enfance pour préparer la voie à une adolescence saine. Deuxièmement, elles aident à créer des comportements permanents favorables à la santé chez les adolescents. Troisièmement, elles aident les jeunes qui attendent un enfant et ceux qui sont parents.
[Traduction]
Neuvième diapositive: le ministère offre une série de programmes communautaires visant à s'assurer que les enfants puissent grandir en santé. Un grand nombre de ces programmes mettent l'accent sur les compétences parentales et la nutrition; ces éléments ont une incidence sur toutes les étapes de la croissance et du développement des enfants et contribuent à en faire des adolescents plus en santé. Les programmes impliquent un niveau élevé de contrôle communautaire en termes d'établissement des priorités, de la conception et de la mise en oeuvre des programmes offerts.
Le Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP) finance des organisations communautaires pour élaborer ou améliorer les programmes offerts aux femmes enceintes à risque. Le Programme d'action communautaire pour les enfants (PACE) accorde un appui financier à long terme aux coalitions communautaires pour qu'elles dispensent des services axés sur les besoins de santé et de développement social des enfants d'âge préscolaire qui vivent dans des conditions de risque. Tant le PNCP que le PACE accorde aux femmes et aux enfants autochtones une attention toute particulière étant donné que la plupart des protocoles entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux/ territoriaux comprennent un programme ou une priorité en matière de financement à cet égard.
Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones (PAPA) est un programme d'intervention immédiate axé sur les enfants et les familles autochtones vivant en milieu urbain et dans les importantes collectivités du Nord. Alors que le PAPA vise principalement les enfants d'âge préscolaire et leurs parents, on note aussi des répercussions positives sur leurs frères et soeurs plus âgés. Par leur participation au programme, les parents améliorent leurs compétences parentales à l'égard des enfants plus âgés. On note de plus une amélioration des habitudes alimentaires de la famille.
L'initiative Syndrome d'alcoolisme foetal/effets de l'alcool sur le foetus du ministère vise aussi à promouvoir la santé des femmes enceintes et à améliorer la santé des bébés naissants. Les femmes autochtones en âge de procréer et leurs partenaires sont visés en grande partie par ce programme.
Permettez-moi maintenant de passer à la dixième diapositive. En plus des programmes communautaires, le ministère participe à plusieurs initiatives de recherche sur les déterminants du développement en santé des enfants et des adolescents. La recherche est entreprise au palier du ministère, passée à contrat auprès d'organismes non gouvernementaux et d'universités, et appuyée par les activités de partenariat. Santé Canada participe aux enquêtes et aux études internationales et nationales menées auprès de l'ensemble de la population, ainsi qu'aux études plus spécifiques fournissant des données inestimables sur la santé des adolescents. Très peu de ces études fournissent toutefois de l'information se rapportant spécifiquement aux populations autochtones.
Santé Canada a lancé en octobre 2000 les Centres d'excellence pour le bien-être des enfants. Les centres sont chargés de mener des recherches ciblées traitant de questions clés relatives à la santé, au bien-être et au développement des enfants et des adolescents; de fournir des conseils en vue de l'élaboration de politiques; de produire de l'information et de la communiquer et enfin, de créer des réseaux locaux, nationaux et internationaux. Parmi les principes directeurs des centres, il est fait mention que les centres prêteront une attention particulière aux besoins qui sont proposés aux enfants canadiens autochtones, à leurs familles et à leurs collectivités.
Trois des centres d'excellence accordent la priorité à des questions importantes pour les collectivités autochtones. Le Centre d'excellence pour la protection et le bien-être des enfants appuiera l'étude canadienne sur l'incidence des mauvais traitements envers les enfants afin de repérer et de décrire les données se rapportant spécifiquement aux populations des Premières nations. Le Centre d'excellence pour les collectivités centrées sur les enfants et les jeunes des Prairies enquêtera sur les facteurs qui ont une incidence sur le développement en santé des enfants, en mettant l'accent spécifiquement sur les enjeux uniques que posent les collectivités autochtones en milieu urbain. Pour terminer, le Centre d'excellence pour les enfants et les adolescents ayant des besoins spéciaux se concentrera sur les collectivités rurales et du Nord, en mettant l'accent sur les enfants ayant des besoins spéciaux. Il se penchera sur l'élaboration de nouvelles techniques pour améliorer les soins de santé offerts à ces populations.
Nous passons à la diapositive 11. L'adolescence est une période au cours de laquelle les jeunes doivent prendre davantage de risques. Les inciter à participer à des sports de compétition, à assumer un rôle de leadership au sein de la communauté ou à s'exprimer par les arts peut les aider à trouver leur identité et à s'affirmer. Par contre, des comportements nuisibles sont aussi associés à ce groupe d'âge. Santé Canada fournit de l'information et encourage l'adoption de saines habitudes de vie pour s'assurer que les adolescents et leurs familles sont préparés à faire face à cette période de la vie.
La Stratégie canadienne antidrogue a comme objectif de réduire les méfaits associés à l'alcool et aux autres drogues chez les individus ainsi que dans les familles et les communautés. Le Programme de traitement et de réadaptation en matière d'alcoolisme et de toxicomanie, qui fait partie de la stratégie, offre aux provinces et aux territoires des fonds pour améliorer l'accès à de nouveaux programmes de traitement et de réadaptation des alcooliques et des toxicomanes. Les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain sont l'un des principaux groupes ciblés par ce programme.
Dans le cadre de la Lutte contre le tabagisme, Santé Canada a mis sur pied le Comité d'action des jeunes chargé de donner des conseils sur les moyens efficaces de lutter contre le tabagisme chez les jeunes. Les membres du comité, qui compte cinq jeunes Autochtones, participent activement aux activités et programmes au niveau national et régional pour aider les jeunes à ne pas fumer et faire la promotion d'un environnement sans fumée à la maison et dans la communauté. Ce concept de participation des jeunes aux décisions qui les concernent est de plus en plus adopté dans les programmes du ministère visant les jeunes.
Santé Canada collabore avec les provinces et les organismes autochtones pour évaluer l'ampleur du VIH/sida et des comportements à risque associés chez les consommateurs de drogues par injection, parmi lesquels on retrouve beaucoup d'Autochtones, afin de recommander des mesures de prévention et de contrôle. À l'échelle nationale, Santé Canada collabore avec le groupe de travail national autochtone chargé de la surveillance et de l'épidémiologie du VIH pour améliorer la collecte des données de surveillance et mieux comprendre et utiliser ces données. De plus, le Programme d'action communautaire sur le sida du ministère permet aux communautés autochtones en milieu urbain d'offrir du soutien, de l'information, des services d'action sociale et d'entraide pour que soient prises des mesures de prévention adaptées à la culture qui pourraient avoir une incidence sur le comportement des jeunes Autochtones vivant en milieu urbain.
En ce qui a trait à l'hépatite C, le ministère a versé des fonds à des organismes autochtones nationaux ainsi qu'à des groupes communautaires et de jeunes pour connaître les besoins en matière d'information, distribuer de la documentation et entreprendre des activités de prévention. Depuis quelques années, ce sont chez les jeunes Autochtones âgés de 15 à 24 ans qu'on enregistre les plus hauts taux de maladies transmises sexuellement et le plus haut taux d'augmentation du nombre de cas. Santé Canada collabore avec les provinces, les territoires et les communautés autochtones pour développer les capacités et éliminer les obstacles à la surveillance, à la recherche, à la promotion de la santé, à la prévention et au traitement des maladies transmises sexuellement auprès de la population.
Dans le domaine de la santé mentale, le ministère a appuyé la production d'un documentaire pilote sur le web pour permettre aux jeunes Autochtones d'explorer des sujets tels que l'étiquetage ainsi que les transitions et les conflits culturels. En faisant la promotion d'une vie active, le ministère a organisé avec les provinces et les territoires une table ronde sur les peuples autochtones pour discuter de questions sociales et de santé liées à la sédentarité. La table ronde a donné l'occasion d'élaborer une déclaration faisant la promotion d'une approche holistique de l'activité physique. Un groupe de travail mixte élabore actuellement des stratégies pour donner suite aux recommandations formulées à l'occasion de la table ronde.
[Français]
Santé Canada offre un vaste éventail d'activités qui ne sont pas axées spécifiquement sur les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain, mais qui présentent des avantages pour eux à bien des égards.
L'Initiative de lutte contre la violence familiale, dirigée par Santé Canada pour le compte de 13 ministères fédéraux, aborde la question de la violence familiale dans les collectivités autochtones par la création et la distribution d'un grand nombre de publications et de ressources vidéo à l'intention des prestataires de services et des chercheurs. Parmi les sujets abordés, mentionnons les abus sexuels, la violence familiale et la violence envers les enfants dans les familles et les collectivités autochtones.
Le Fonds pour l'adaptation des services de santé a été créé pour encourager et appuyer la prise de décisions fondées sur les résultats en matière de réforme des soins de santé. Parmi les domaines sur lesquels le Fonds pour l'adaptation des services de santé fait porter son attention, mentionnons la santé des Autochtones et la santé des enfants. Les projets liés à ces éléments comprennent les programmes d'intervention précoce et la mise à l'essai de modèles intégrés de prestation de service pour les populations défavorisées dans les quartiers des centres-villes.
Le Fonds pour l'adaptation des soins de santé primaire, créé pour accélérer le renouvellement des soins de santé primaire, comprend une enveloppe spéciale pour appuyer les initiatives autochtones. De cette façon, le Fonds pourra tenir compte des besoins de santé primaires les plus pressants des populations autochtones en faisant la promotion de changements durables à grande échelle afin d'améliorer les accès aux services de santé primaire intégrés.
[Traduction]
Le Fonds pour la santé de la population finance de nombreux projets destinés aux jeunes Autochtones vivant en milieu urbain en tant que membres de l'ensemble de la population des jeunes. De plus, 17 projets particuliers aux jeunes Autochtones des villes s'attaquent à des questions comme la lutte contre le tabagisme, l'adaptation et la réussite scolaire, la santé des jeunes femmes, l'intégration sociale des jeunes à risque, l'itinérance, une sexualité saine, l'abus d'alcool et de drogues, les loisirs et la promotion de la santé.
Les Centres d'excellence pour la santé des femmes financent des projets de recherche ayant des incidences sur la santé des jeunes femmes d'origine autochtone. Par exemple, des fonds ont été versés pour examiner la question des besoins en mieux-être des femmes autochtones vivant à Montréal. Le projet avait pour but d'identifier les obstacles qui les empêchent d'avoir accès aux services dont elles ont besoin en milieu urbain et de faire des recommandations à ce sujet. Une autre étude visait à évaluer la santé des femmes autochtones vivant en milieu urbain en Nouvelle-Écosse et à déterminer comment tenir compte de leur contribution aux décisions en matière de soins de santé.
Deux des Instituts de recherche en santé du Canada, les IRSC, portent un regard particulier sur les jeunes Autochtones. L'Institut de la santé des Autochtones met l'accent sur la santé mentale chez les enfants et les jeunes Autochtones, et examine des questions comme le tabagisme, l'alcoolisme, l'abus de drogues et d'autres substances et le suicide. Par ailleurs, l'Institut du développement et de la santé des enfants et des adolescents s'intéresse aux priorités de recherche pour les jeunes Autochtones. Ce mois-ci, ces deux instituts vont commanditer un symposium sur le syndrome d'alcoolisme foetal, qui réunira des chercheurs afin de définir clairement les priorités de recherche dans ce domaine.
Santé Canada contribue à faire la promotion de la santé des jeunes Autochtones du Canada vivant en milieu urbain, et ce avant et pendant l'adolescence. Le ministère insiste sur la prévention et met l'accent sur les premières étapes du développement de l'enfant pour préparer la voie à une adolescence saine. Grâce au partenariat, à la recherche, à l'élaboration de politiques et aux interventions de programmes, nous allons chercher à améliorer la santé de cette population très souvent à risque, pour nous assurer que les jeunes Autochtones reçoivent les ressources et le soutien nécessaires depuis l'enfance jusqu'à l'âge adulte.
Nous répondrons volontiers aux questions que vous voudrez bien nous poser.
La présidente: Merci de cet exposé très détaillé.
Mes années de travail communautaire dans les régions urbaines et rurales m'ont appris que d'excellents programmes ne donnent souvent pas les résultats escomptés parce que les employés de votre ministère, au niveau local et régional, aiment mieux contrôler les Autochtones que travailler en partenariat avec eux.
J'aimerais savoir ce que vous faites à ce sujet. Donnez-vous une formation pour sensibiliser vos employés aux différences culturelles? Les communautés autochtones ont énormément évolué. Il y a des Autochtones instruits qui sont toujours victimes de discrimination de la part des employés fédéraux dans ces communautés.
Ensuite, j'aimerais parler du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones. J'ai entendu parler de plusieurs problèmes de la part des Métis, qui trouvent que les responsables de ce programme négligent la culture métisse au profit de celle des Premières nations. C'est ce que des groupes de Métis participant à ce programme m'ont dit en Colombie-Britannique, en Alberta et en Saskatchewan.
Quelles sont vos relations avec les différents groupes culturels historiques du Canada? Il y a trois groupes autochtones distincts selon la Constitution, les Inuits, les Métis et les Premières nations, qui comptent 52 peuples différents.
Je pense qu'il faut s'intéresser à cette question, pas seulement au niveau local, mais aussi au sein de votre ministère, pour que les fonctionnaires soient sensibilisés aux différences culturelles qui existent entre les communautés autochtones du pays.
Je viens de passer une semaine et demie en Alberta, et j'ai rencontré un groupe à Edmonton, qui est composé de Métis, d'Indiens non inscrits et d'Autochtones vivant en milieu urbain, qui viennent de la rue. Le groupe s'organise. Les Autochtones vivant à l'extérieur de la réserve ont pour ainsi dire rejoint les Métis, dans la ville d'Edmonton. Ces jeunes ont connu les gangs de rue et la prostitution. Ils veulent changer maintenant.
Quels sont les programmes que je pourrais leur suggérer, qui s'adressent à eux dans leur milieu? Ces jeunes ont été à l'école de la rue. Un groupe de pairs leur serait vraiment utile. Quels groupes de ce genre avez-vous dans cette région?
M. Claude Rocan, directeur général, Centre de développement de la santé humaine, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique: Nous reconnaissons assurément l'importance des partenariats dans la mise en oeuvre de ces initiatives. Comme M. Broughton l'a dit, les trois principaux programmes du ministère à l'intention des enfants sont tous des programmes communautaires: le Programme d'action communautaire pour les enfants, le Programme canadien de nutrition prénatale et le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones. Ces programmes sont fondés sur des partenariats, et leurs activités s'organisent surtout au niveau local.
Du côté de Santé Canada, ce sont nos bureaux régionaux qui assument un rôle de direction dans la prestation de ces programmes. Les bureaux régionaux forment des comités qui regroupent des représentants des administrations provinciales et municipales ainsi que des organismes communautaires, y compris des organismes communautaires autochtones, pour définir, concevoir et mettre en oeuvre les programmes.
Nous essayons de nous assurer que les besoins particuliers des communautés sont pris en compte.
Pour ce qui est du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, je n'ai rien entendu au sujet des préoccupations dont vous parlez. Nous pouvons sûrement examiner la question. C'est un de nos principaux programmes communautaires. Comme M. Broughton l'a dit dans son exposé, ces programmes sont des mesures de prévention très importantes. Ils s'adressent non pas aux jeunes Autochtones vivant en milieu urbain, mais aux enfants, et nous espérons qu'ils leur offriront des bases solides pour qu'ils puissent échapper plus tard à certains des problèmes auxquels sont confrontés les jeunes Autochtones, et ne pas adopter les mêmes comportements à risque. Ce programme est extrêmement important.
La culture est aussi importante. Les programmes doivent rendre les enfants fiers de leurs origines culturelles. C'est un des principaux objectifs de cette mesure.
Je prends évidemment note du problème concernant les Métis, et je vais essayer de le régler avec nos bureaux régionaux et les autres personnes concernées. Je pense que c'est une question importante.
Pour ce qui est du groupe de jeunes Métis et de jeunes autochtones vivant en dehors des réserves qui s'organisent et veulent être utiles, il faudrait vérifier si Santé Canada est en mesure de travailler avec eux. Il y a peut-être d'autres ministères fédéraux qui peuvent le faire. Leur intervention peut être plus directe que la nôtre étant donné, comme je l'ai déjà dit, que nous mettons l'accent sur la prévention.
La présidente: Vous ne m'avez toujours pas dit si vous donnez une formation à vos employés des régions pour les sensibiliser aux différences culturelles?
Mme Wendy Birkinshaw, analyse principale de la politique, Division de l'enfance et de l'adolescence, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique: Il y a quelques années, j'ai eu le privilège de travailler pour Santé Canada dans la région de la Saskatchewan. Quand j'étais là-bas, tous les employés appelés à travailler avec les Autochtones suivaient des cours de sensibilisation aux différences culturelles, donnés soit par la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, soit par d'autres directions du ministère dont les programmes communautaires les mettaient en contact avec les Autochtones.
Les aînés et d'autres Autochtones venaient nous montrer comment répondre aux questions des employés et nous aidaient à trouver les moyens de communiquer avec les Autochtones pour mieux répondre à leurs besoins. C'était la méthode adoptée en Saskatchewan. J'imagine qu'on l'a fait ailleurs au pays.
La présidente: Le mot «Autochtone» est général. Prenons l'exemple de la Saskatchewan. Vous renseignait-on sur la culture et l'histoire des Métis? Vous renseignait-on sur les Cris et les Saulteaux de la Saskatchewan?
Tout le monde utilise le mot «Autochtone». Les peuples ont perdu leur identité parce que leur langue, leur histoire et leur culture n'ont pas été reconnues. Voilà pourquoi c'est si important.
Tout le monde pense que les Métis sont simplement une bande de sang-mêlé sans importance. Ce n'est pas vrai. Nous avons une histoire et une langue bien à nous.
C'est ce que je veux dire par des cours de sensibilisation aux différences culturelles. J'ai eu l'occasion de donner des ateliers de ce genre avec Stephen Brant il y a plusieurs années, et j'ai été étonnée de constater que les participants ne connaissaient pas les différents peuples. Il n'y a pas seulement les Autochtones ou les aînés; il y a toute une histoire à expliquer si on veut établir de bons rapports.
Le nombre de suicides augmente, tout comme l'alcoolisme, et la grossesse chez les adolescentes. Malgré tous vos programmes, je ne vois pas les chiffres baisser. Comment travailler en partenariat avec les communautés autochtones pour examiner ce qui se passe?
D'après mon expérience, nous avons l'impression que nous ne sommes pas capables. Or, nous pouvons réussir grâce aux compétences des Autochtones instruits et au savoir des communautés. C'est ce que je voulais dire.
M. Rocan: Nous prenons note de ce que vous faites remarquer. Vous avez souligné l'importance de travailler avec les organismes communautaires autochtones. Nous pouvons sûrement faire appel à leurs ressources pour poursuivre notre travail dans le domaine.
La présidente: Il faut espérer que ce plan d'action aidera aussi votre ministère à favoriser la collaboration et l'entraide entre les Canadiens.
Le sénateur Callbeck: Je ne fais pas partie du comité, mais je vous remercie de votre exposé.
Vous avez présenté beaucoup de programmes. Un bon nombre ont sont de nature préventive. Y a-t-il des mesures de suivi dans le cadre des programmes? Depuis combien de temps les programmes existent-ils? Assurez-vous un suivi tous les trois ou cinq ans? Comment savez-vous s'ils sont efficaces?
M. Rocan: Je vais parler précisément des programmes destinés aux enfants et auxquels j'ai fait allusion, les trois principaux programmes communautaires qui font constamment l'objet d'études d'évaluation.
Il y a entre autres le Programme de nutrition prénatale. Nous sommes sur le point de procéder à une évaluation nationale du programme qui s'étendra sur l'année.
Je crois comprendre que le programme a fait l'objet d'évaluations au niveau régional où l'information obtenue a été utilisée pour apporter certains aménagements à l'exécution du programme. Nous savons précisément, en ce qui a trait à ce programme, que les indicateurs clés laissent entrevoir des tendances prometteuses. Par exemple on constate une amélioration en ce qui a trait à l'allaitement naturel et à sa durée. Il en va de même relativement au poids à la naissance des bébés que nous avons suivis. Selon des données probantes, l'initiative donne en fait des résultats positifs.
Pour ce qui est du Programme d'action communautaire axé sur les enfants, des évaluations régulières permettent de vérifier l'efficacité du programme.
Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones remonte à 1995 et dès 1996, des projets ont été mis de l'avant. Aucune évaluation officielle n'a été faite jusqu'à maintenant car nous avons eu du mal à concevoir des mesures culturellement appropriées pour ce programme. Celles que nous avions examinées auparavant n'ont pas été considérées suffisamment sensibles aux cultures particulières de la population que nous prenions en charge. Nous croyons être en train de mettre certaines mesures au point et nous sommes presque en mesure de fournir une évaluation plus détaillée de ce programme également.
Nous essayons de suivre l'évolution des programmes et des initiatives afin de vérifier s'ils ont l'incidence voulue.
Le sénateur Callbeck: Procédez-vous ainsi pour chaque programme ou mettez-vous en place des programmes qui sont appliqués interminablement, sans faire l'objet d'aucune évaluation ou sans qu'aucun changement n'y soit apporté?
M. Rocan: Comme vous l'avez dit, il y a un certain nombre d'initiatives dont nous avons parlé ici. Je ne peux parler avec assurance de chacun d'entre eux, mais vous pouvez être certain que toutes les initiatives dont je suis au courant doivent faire l'objet d'une évaluation.
Le sénateur Callbeck: En ce qui concerne les besoins des Autochtones en matière de services sociaux, de protection de l'enfance, de santé mentale et autres domaines, il ne semble pas y avoir de programme structuré pour appuyer la formation et le développement professionnel de ces populations. Que fait votre ministère à cet égard? Il existe peut-être un programme structuré dont j'ignore que je ne connais pas.
M. Keith Conn, directeur général intérimaire, Programme de santé communautaire, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, Santé Canada: Le Programme de bourses d'études des carrières de la santé pour Indiens et Inuits constitue un de ces programmes structurés. Le ministère l'administre à l'heure actuelle de concert avec la Fondation nationale des réalisations autochtones. À l'heure actuelle, Santé Canada fournit 500 000 $ en bourses d'études qui profitent à de jeunes étudiants qu'ils soient des Métis, des membres des Premières nations ou des Inuits qui fréquentent des établissements postsecondaires. Ce programme encourage les étudiants autochtones à poursuivre leurs études dans des carrières de la santé, ce qui les amènera vers des professions dans ce domaine, par exemple la médecine, les soins infirmiers, la radiothérapie. Ce programme est réputé être un succès au sein de notre ministère. Nous avons de nombreux appuis multisectoriels et beaucoup de diplômés qui ont profité du programme poursuivent leurs études.
Nous accordons en moyenne entre 116 ou 120 bourses par année. D'après les dernières statistiques dont nous disposons, la plupart de ceux qui ont bénéficié du programme, environ 87 p. 100, étaient de descendance métisse.
Nous estimons qu'il s'agit d'un programme solide. C'est certain que nous aimerions faire encore plus. Le ministère cherche certainement à mettre au point, pour le long terme, une stratégie plus complète relativement aux ressources dans la santé humaine. Nous estimons que ce programme s'insère dans un plus grand ensemble. Il est certain que la commission royale a beaucoup parlé de la demande et des besoins futurs de 10 000 travailleurs de la santé et travailleurs sociaux. Ce programme est considéré comme un pas vers cet objectif. De plus, nous voyons que le ministère des Affaires indiennes et du Nord, par l'entremise de son secteur de l'éducation, encourage les Inuits et les Premières nations à entreprendre des études postsecondaires et les amène à choisir des professions de la santé.
Le sénateur Callbeck: Depuis quand ce programme de 500 000 $ existe-t-il?
M. Conn: Je crois qu'il a été mis en place vers 1982.
Le sénateur Callbeck: C'est la seule initiative?
Le sénateur Pearson: Puis-je ajouter quelque chose à ce sujet? Je voulais mentionner en passant la bourse d'études Diana Fowler LeBlanc pour la formation de travailleurs sociaux autochtones, qui n'existe que depuis deux ans. Je crois que cela aiderait également. Santé Canada n'a rien à voir avec cette fondation. Je ne sais pas qui s'en occupe.
M. Conn: C'est exact.
Le sénateur Pearson: Il s'agit d'une autre prise de conscience du besoin.
Le sénateur Callbeck: Votre programme a été lancé en 1982?
M. Conn: Il faudra que je le confirme, mais c'est ce que je crois comprendre.
Le sénateur Callbeck: Il ne s'agit vraiment que de la seule initiative qu'a prise le ministère?
M. Conn: Il s'agit d'une approche très ciblée visant à aider et encourager les jeunes à choisir des professions dans le domaine de la santé. Il complète d'autres programmes et activités visant à encourager les jeunes à entreprendre des études postsecondaires qui ont été mis de l'avant par le ministère des Affaires indiennes et du Nord. Je n'ai aucun chiffre à cet égard, mais nous pouvons certainement demander à nos collègues du ministère des Affaires indiennes et du Nord de nous fournir leurs chiffres sur les investissements relatifs au secteur de l'éducation et, si possible, ce que l'on compte faire ou ce qu'ils comptent faire en ce qui a trait aux professions de la santé et aux services sociaux.
La présidente: Je dois sincèrement m'excuser auprès de nos témoins. Le sénateur Callbeck et moi-même sommes convoquées à une séance spéciale du Sénat. Le sénateur Sibbeston me remplacera au fauteuil.
Le sénateur Nick G. Sibbeston (président suppléant) occupe le fauteuil.
Le sénateur Pearson: Cela semble une liste impressionnante de programmes. On se demande toujours pourquoi cela ne semble pas avoir plus de résultats. Nous ne semblons pas disposer des données pour indiquer où les résultats sont tangibles, mis à part le Programme canadien de nutrition prénatale par exemple, un programme concret aux objectifs concrets. Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones connaît un très grand succès, mais il est plus difficile de déterminer à quel niveau se situe le succès.
Je m'intéresse à un certain nombre de questions dont certaines dans les domaines de la petite enfance, de l'abus sexuel et de l'exploitation. Vous vous souvenez de l'étude effectuée par Cherry Kingsley et Melanie Mark sur l'abus et l'exploitation sexuels chez les populations autochtones. Leurs travaux et d'autres ont fait ressortir que pour les Autochtones vivant en milieu urbain, les besoins étaient les suivants: l'hébergement en famille, des centres de désintoxication, un accroissement du nombre de travailleurs des services d'approche et des fournisseurs de services, plus particulièrement des gens ayant de l'expérience — pas le genre d'expérience que vous avez — mais de l'expérience dans le genre d'exploitation dont ces jeunes sont l'objet. Ils font d'excellents sympathisants mais ne sont pas des professionnels qui ont bénéficié de ces bourses parce qu'ils ont passé leur adolescence à se faire exploiter pas à être éduqués de la façon traditionnelle.
Cela nous mène à l'observation faite au sujet du Programme national de lutte contre l'abus d'alcool et des drogues chez les Autochtones. Dans quelle mesure avez-vous songé sérieusement à appuyer et à encourager la présence de jeunes d'expérience pour résoudre les problèmes et participer à ces programmes?
La tension est constante entre la culture du prestataire du service et celle du jeune qui participe au programme. Ils ont des façons très de régler les problèmes. Il arrive souvent que le prestataire des services se sente grandement menacé lorsqu'il s'agit de s'associer aux jeunes avec qui il travaille. Je dis simplement cela pour voir si l'un d'entre vous peut nous donner des exemples de nouveaux programmes. Vous avez déjà dit que les gens commencent à reconnaître la nécessité de faire participer les jeunes. Comment répondriez-vous à cela surtout en ce qui a trait à cette question des abus sexuels qui constitue un énorme problème dans la population autochtone — en toute franchise, comme dans bien d'autres populations — comme le sont par exemple l'exploitation, les drogues et les questions qui s'y rattachent.
M. Conn: La Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits a deux investissements cruciaux en ce qui a trait aux programmes, à savoir le programme relatif à la prévention et au traitement de l'abus des solvants qui vise les jeunes Autochtones de 12 à 19 ans. Nous avons à l'heure actuelle neuf centres de traitement dans diverses régions du Canada qui accueillent des patients hospitalisés. Le Programme national de lutte contre l'abus d'alcool et des drogues chez les Autochtones dessert quelque 550 collectivités. Environ 730 travailleurs y sont engagés, ce qui représente 6 700 lits à l'échelle nationale dans 57 centres de traitement d'un bout à l'autre du pays. Nous soignons en moyenne entre 3 500 et 5 000 patients par année.
On examine le programme à l'échelle nationale en vue de remanier ou de redéfinir son mandat et ses services pour tenir compte des jeunes et des femmes. Dans l'ensemble, on peut dire que les programmes de traitement liés à l'abus d'alcool et de drogues chez les Autochtones s'adressaient plus ou moins aux jeunes hommes. Or, en partenariat avec les Premières nations, les centres de traitement et d'autres intéressés, on envisage la possibilité de réorganiser certains centres pour qu'ils puissent répondre aux besoins de l'ensemble des jeunes. C'est un projet qui est à l'étude au moment où on se parle. Nous espérons que les choses s'orientent en ce sens.
Dans les centres de traitement d'abus de solvants ou encore d'alcool et de drogues, il y a des intervenants très bien formés dans différents domaines, qui sont en mesure de déceler les cas d'abus sexuel. Il est possible d'intervenir et d'aider à ce niveau.
Le sénateur Pearson: Je me demande combien il y a des travailleurs qui ont eux-mêmes été victimes d'abus sexuel. Il y a bon nombre de jeunes gens en mesure d'apporter une aide précieuse à ce sujet.
M. Conn: Ce serait difficile à dire.
Le sénateur Pearson: Oui. Beaucoup seraient bien disposés à parler et à offrir leurs services, mais ils n'ont pas les diplômes voulus.
M. Conn: J'ai eu l'occasion d'assister à des rencontres et à des conférences en circuit fermé où des travailleurs ont raconté leur expérience personnelle. Ils ont surmonté leurs problèmes et guéri leurs blessures. Ils ont reçu tout le soutien nécessaire et sont devenus des intervenants en prévention et en toxicomanie, mais je ne peux pas préciser leur nombre.
Le sénateur Pearson: Je conseille fortement qu'on songe à faire appel à ces jeunes et qu'on laisse tomber certaines autres exigences. Je vous encourage vivement à demander aux jeunes qui suivent votre programme de vous aider, de travailler avec vous pour venir en aide à cette population. Il y a quelques exemples dont on commence à entendre parler, comme cette jeune femme de Winnipeg qui est en train d'ouvrir un refuge pour jeunes filles. Celles-ci ont besoin de sentir que la personne à qui elles s'adressent a vécu la même chose et sait de quoi elles parlent. J'admire tous les spécialistes très qualifiés, mais ils ne savent pas ce que c'est. C'est ce que je voudrais pour tous les programmes s'adressant aux jeunes, que vous fassiez appel aux jeunes pour qu'ils puissent croire que leur expérience pourra ensuite servir à en aider d'autres. Voilà ce qu'ils veulent faire. Ils veulent empêcher d'autres jeunes d'être victimes d'abus. C'est un défi, mais je voulais en parler.
Le sénateur Tkachuk: Quel est le coût du programme fédéral de soins de santé destiné aux Autochtones, c'est-à-dire les Indiens vivant dans les réserves ou les Indiens visés par un traité?
M. Conn: Essentiellement, le budget que le gouvernement fédéral accorde à Santé Canada pour les Premières nations, les Inuits et les Premières nations vivant dans les réserves est d'environ 1,3 milliard de dollars. Il y a à peu près 700 000 clients admissibles dans l'ensemble du pays, y compris dans les territoires.
Le sénateur Tkachuk: Cela comprend-il les programmes de médicaments délivrés sur ordonnance?
M. Conn: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Si vous enlevez ce à quoi les Canadiens en général n'ont pas droit, comme les médicaments délivrés sur ordonnance ou les soins de la vue, quel serait le coût?
M. Conn: Sur le montant global de 1,3 milliard de dollars, il y a un montant d'environ 658 millions qui est destiné aux programmes de santé communautaire — les programmes de toxicomanie, d'aide préscolaire, et cetera.
Voulez-vous que je soustraie le coût des soins de santé non assurés, c'est-à-dire les soins dentaires et de la vue et les médicaments sur ordonnance?
Le sénateur Tkachuk: Oui. Quel est le coût de ces services qui est inclus dans le 1,3 milliard de dollars, ou est-ce qu'il s'ajoute à ce montant?
M. Conn: Il y a environ 588 millions de dollars sur le 1,3 milliard de dollars qui couvrent ces services. À cela, il faut ajouter 27 millions de dollars pour les services hospitaliers et environ 96 millions de dollars pour la prestation des programmes.
Le sénateur Tkachuk: Il y a ensuite tous les programmes autochtones des Métis qui relèvent des provinces, n'est-ce pas? Je remarque que vous avez des programmes s'adressant aux Métis. Sont-ils conjoints? Que faites-vous dans le cas des Indiens non inscrits et des Métis? Je constate qu'il y a des programmes pour les Métis, mais pourquoi les Métis seraient-ils différents de moi, en Saskatchewan, par exemple?
M. Rocan: Dans le cas des Métis et des Indiens non inscrits qui vivent à l'extérieur des réserves, les soins de santé relèvent des gouvernements provinciaux, comme pour tous les autres Canadiens.
Le sénateur Tkachuk: Il s'agirait de programmes spéciaux parce que le gouvernement fédéral a constaté qu'il y avait des besoins particuliers et qu'il veut offrir un programme avec les provinces. Est-ce ainsi que cela fonctionne? Le Québec fait-il comme la Saskatchewan?
M. Rocan: Les trois principaux programmes dont j'ai parlé plus tôt au sujet des enfants ne sont pas des programmes de soins de santé. Comme je l'ai déjà dit, ces programmes visent à prévenir des problèmes susceptibles de survenir plus tard dans la vie. Ils sont financés par le gouvernement fédéral, mais nous les offrons en collaboration et en partenariat avec les gouvernements provinciaux et les organismes communautaires.
Le sénateur Tkachuk: Le syndrome d'alcoolisme foetal ne frappe pas seulement les Autochtones; c'est un problème social auquel il faut s'attaquer. Combien dépensez-vous pour cela en plus du 1,3 milliard de dollars?
M. Rocan: Parlez-vous précisément du syndrome d'alcoolisme foetal?
Le sénateur Tkachuk: Non. Je parle des autres programmes faisant partie des dépenses liées aux Autochtones.
M. Rocan: Je ne connais pas le montant total, mais je peux vous donner quelques chiffres pertinents. Par exemple, le budget annuel du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones vivant en milieu urbain et dans les régions du Nord est de 22,5 millions de dollars. Dans le cas du Programme canadien de nutrition prénatale, dont j'ai parlé, le budget prévu pour l'exercice 2000-2001 était d'environ 27 millions de dollars. Dans ce cas, le programme ne s'adresse pas précisément aux Autochtones, mais ils y ont accès et sont nombreux à y participer dans les provinces de l'Ouest.
Le sénateur Tkachuk: C'est un programme national qui s'adresse à tout le monde, pas seulement aux Autochtones. Vous ne faites pas la différence?
M. Rocan: Ce sont des programmes universels. C'est la même chose pour le Programme d'action communautaire pour les enfants, qui a un budget annuel de 59 millions de dollars. C'est un programme universel accessible aux Autochtones, surtout dans l'ouest du Canada.
Le sénateur Tkachuk: Si le gouvernement fédéral dépense 1,3 milliard de dollars aujourd'hui, combien dépensait-il il y a 10 et 20 ans?
M. Conn: Nous avons des données historiques que nous pouvons vous fournir.
Le sénateur Tkachuk: Dépensait-il moins?
M. Conn: Beaucoup moins.
Le sénateur Tkachuk: Avons-nous des informations sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas? Quelles réserves ont de meilleures normes de santé? Avons-nous des informations de ce genre? Examinons-nous pourquoi une réserve en particulier, comme celle de Davis Inlet, a tellement de problèmes? Pourquoi une réserve n'a pas autant de problèmes de santé et n'est pas autant frappée par le syndrome d'alcoolisme foetal? Avons-nous fait des études comparatives?
Est-ce que le gouvernement fédéral fait ce travail dans le cas de la prestation des soins de santé aux Autochtones, et comment pouvons-nous réduire les coûts pour améliorer l'efficacité du programme?
M. Conn: Je crois comprendre qu'on a entrepris des recherches pour faire des comparaisons entre les communautés en matière de santé. Ces travaux sont effectués en partie par les Instituts de recherche en santé du Canada.
Je ne sais pas s'il existe des recherches qui comparent les communautés. Nous pouvons sûrement vérifier auprès de nos réseaux de recherche à Santé Canada et ailleurs, pour vous revenir là-dessus.
Le sénateur Tkachuk: Au sujet du débat sur les soins de santé, qui est dirigé par M. Romano, votre ministère présentera-t-il son point de vue sur le Programme de soins de santé à l'intention des Autochtones au Canada?
M. Broughton: Nous allons rencontrer la commission, mais je ne sais pas si nous discuterons précisément des questions autochtones.
Le sénateur Tkachuk: En Saskatchewan, le budget de santé était de 1,3 milliard de dollars pour l'ensemble de la province à la fin des années 80. Vous devez évidemment participer à la discussion. Vous dépensez plus que la Nouvelle- Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick pour les soins de santé aujourd'hui.
Pourquoi le gouvernement fédéral offre-t-il des services de santé non assurés, comme les soins de la vue ou les soins dentaires?
M. Conn: C'est la politique du ministère de la Santé. La politique est bien importante pour tous les citoyens de toutes les provinces. Les provinces offrent des services assurés aux citoyens, y compris aux Autochtones. Dans le cas des Premières nations vivant dans des réserves, nous avons pour politique d'offrir des services de santé non assurés, pour la vue et les dents, afin de répondre aux besoins de la communauté.
Le sénateur Tkachuk: S'est-on demandé si les gens s'occuperaient un peu plus de leur santé s'ils devaient payer pour obtenir les services? Discutez-vous de vos politiques, ou est-il impossible de le faire?
M. Conn: L'ensemble de l'administration fédérale discute actuellement de la capacité de chacune des Premières nations de payer pour obtenir certains services. Nous examinons aussi la situation socio-économique des communautés et des particuliers. C'est la politique du ministère de fournir des services de santé en fonction des besoins.
Le sénateur Tkachuk: Si c'est en fonction des besoins, est-ce que tout le monde est admissible?
M. Conn: Essentiellement, toutes les Premières nations, les Indiens inscrits et les Inuits ont accès à des services de santé non assurés, peu importe leur lieu de résidence.
Le sénateur Tkachuk: Et peu importe leur revenu?
M. Conn: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Est-ce une bonne chose?
M. Conn: Je ne sais trop comment répondre à cette question.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne faites pas de politique. Je comprends.
M. Conn: Effectivement.
Le sénateur Tkachuk: Je m'adresse à vous à titre de professionnel. Est-ce une bonne chose? Vous m'avez dit que les services étaient offerts en fonction des besoins, en ajoutant ensuite que tout le monde y avait accès; ils ne sont donc pas offerts en fonction des besoins.
M. Conn: Il a été convenu qu'il serait plutôt difficile de fournir les services en fonction d'un critère de revenu. Dans l'ensemble, on estime que, compte tenu notamment des conditions socio-économiques et des taux d'emploi, il vaut mieux fournir les services. Ce qu'on se demande surtout, c'est si, au lieu de concentrer nos efforts sur le traitement de problèmes de santé récurrents, il ne faudrait pas plutôt accorder plus d'importance à la promotion de la santé, à la prévention, à l'initiative personnelle, aux soins de santé primaires et à une meilleure prestation des services pour réduire le fardeau imposé au système. C'est actuellement le changement qui est à l'étude pour ce qui est des orientations et des investissements futurs.
Le sénateur Léger: J'entends souvent dire, à propos des statistiques, des programmes et des stratégies que vous avez, que les jeunes Autochtones sont inclus. Or, bien souvent, l'incidence des maladies et des problèmes de santé est plus élevée dans leur cas. Est-ce que les fonds de ces programmes et stratégies sont affectés en proportion des besoins, c'est- à-dire sont-ils deux, trois ou 6,6 fois plus élevés pour les Autochtones? Autrement dit, votre ministère verse-t-il plus si le problème est plus grave?
M. Rocan: D'abord, il y a un certain nombre de programmes. Il est difficile de généraliser pour toutes les mesures que nous offrons. Dans certains cas, les programmes ciblent précisément, comme nous disons, la population autochtone. Dans d'autres cas, il s'agit de programmes universels auxquels les Autochtones ont accès, et auxquels ils participent peut-être beaucoup, selon la région du pays où ils vivent.
Je vais m'en tenir à cela.
Le sénateur Léger: Nous parlons aujourd'hui des Autochtones, qui font partie de l'ensemble de la population et qui causent de vives inquiétudes. Or, j'ai quand même le sentiment que votre ministère devrait faire autant pour résoudre tous les autres problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui.
Qu'entendez-vous par «transition culturelle»? On dirait qu'un Autochtone qui va s'installer dans un milieu urbain doit amorcer une transition pour adopter notre culture. Est-ce le sens de «transition culturelle»?
M. Rocan: Sûrement pas, et ce n'est pas ce que nous avons voulu dire. Mme Birkinshaw pourrait peut-être retrouver où cette expression a été utilisée au cours de l'exposé.
Mme Birkinshaw: Je ne me rappelle pas que ces mots aient été utilisés. Vous rappelez-vous où il en a été question?
Le sénateur Léger: J'ai oublié mais, quand ces mots ont été prononcés, je me suis demandée ce qu'ils voulaient dire. Vous pouvez me dire ce qu'ils signifient même si vous ne retrouvez pas le contexte. Je suis heureuse de savoir qu'ils n'ont pas le sens que je pensais.
M. Rocan: Sûrement pas, et nous reconnaissons que c'est important. Cela rejoint certaines des questions que le sénateur Chalifoux a posées plus tôt. Pour nous, il est important que les Autochtones préservent leur culture, qu'ils l'assument et en soient fiers. D'ailleurs, un certain nombre d'initiatives du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones le prouvent bien. Ce programme vise entre autres à rendre les enfants fiers de leur histoire et de leurs origines.
Le sénateur Léger: Comme le sénateur Pearson l'a dit, seuls les peuples autochtones peuvent développer ce sentiment de fierté face à leur culture. C'est à ce sujet que je trouve que les groupes de pairs peuvent être utiles. Ils peuvent beaucoup nous aider.
M. Rocan: Je crois comprendre que les membres de la communauté sont très heureux d'offrir leurs services au Programme d'aide préscolaire aux Autochtones. Par exemple, les aînés viennent parler aux enfants et créent des liens avec eux, et d'autres Autochtones sont invités à faire la même chose. C'est un aspect très important du programme.
Le sénateur Léger: La culture doit être transmise par les Autochtones eux-mêmes. Votre ministère détient le contrôle, mais il est important qu'il en partage une partie.
J'aimerais savoir si le «nous» qu'on utilise souvent ici comprend les pairs, ceux qui connaissent la culture. C'est quelque chose qui m'inquiète. Je sais que nous devons être efficaces, et agir sans trop d'émotivité, mais ils sont les seuls à pouvoir s'aider eux-mêmes.
M. Rocan: Oui. C'est principalement la raison pour laquelle nous jugeons qu'il est important de créer des liens avec les membres de la communauté et de travailler avec les organismes communautaires pour avoir le sentiment de mettre en oeuvre des mesures utiles.
Le sénateur Pearson: Je reviens aux statistiques effarantes concernant l'abus de solvants et aux explications de M. Conn sur les programmes de traitement en matière d'alcoolisme et de toxicomanie. Nous savons, par les médias et certaines de nos relations, que les jeunes toxicomanes qui sont traités à l'extérieur de leur milieu recommencent à consommer quand ils retournent chez eux. Cela nous ramène à la question des meilleures pratiques et à ce qui pour moi devient de plus en plus important, à savoir que les politiques gouvernementales concernant les enfants devraient développer l'autonomie des familles. Nous devrions nous préoccuper d'aider les familles à s'occuper de leurs enfants parce qu'elles peuvent le faire mieux que l'État, si je puis dire. L'État n'est pas un bon parent.
Dans le cas des programmes de désintoxication, comment préparez-vous la famille à retrouver son enfant? Avez- vous des commentaires à faire à ce sujet?
M. Conn: Oui, c'est une excellente question. Comme je l'ai dit, dans le cadre de l'examen du Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones, il a été fortement recommandé d'examiner, dans le cas des traitements en établissement, non pas seulement les besoins du toxicomane, mais ceux de la famille et du milieu. Vous avez souligné le fait qu'il est souvent difficile de sortir quelqu'un de son milieu, de lui offrir un traitement et de le retourner chez lui. On commence à préconiser qu'il y ait du soutien dans la communauté, des centres familiaux et des services pour répondre aux besoins de toute la famille, et même de la communauté. Il y a beaucoup de projets sur le terrain, y compris des camps, dans le cadre desquels on invite la famille élargie à apporter le soutien nécessaire. On organise des activités plus générales pour répondre aux besoins de la communauté et de la famille.
Nous savons qu'il y a beaucoup de projets intéressants financés par la Fondation pour la guérison des Autochtones dans le but de réunir les gens, les familles et les communautés. Il faut beaucoup de soutien pour aider les gens à guérir. On commence à se rendre compte qu'on ne peut pas nécessairement traiter une personne en l'isolant.
Le sénateur Pearson: C'est encourageant parce que le changement est assez récent. Pour ceux qui s'intéressent à la politique d'intérêt public, un dénommé Potter a publié un livre intéressant sur l'élaboration de la politique d'intérêt public à ce sujet. Cependant, à un moment donné, il faut examiner les meilleures pratiques avant d'investir énormément dans une vaste politique. Il faut examiner ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et comment évaluer la chose. Cela m'encourage, ainsi que le fait que vous semblez avoir de meilleurs indicateurs pour évaluer le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones. J'aimerais bien les connaître quand vous serez en mesure de les expliquer.
M. Rocan: J'aimerais aussi signaler que l'aide à la famille est aussi un aspect du Programme canadien de nutrition prénatale dont j'ai parlé. Les femmes à risque viennent consulter. Elles peuvent obtenir des conseils sur la nutrition, la façon de régler leurs problèmes personnels, l'éducation des enfants et bien d'autres choses, ce qui devrait aider la famille. Depuis quelques années, ce programme s'occupe aussi du syndrome d'alcoolisme foetal et des effets de l'alcool sur le foetus. Ces mesures visent à aider la famille et à favoriser l'autonomie fonctionnelle.
Le sénateur Pearson: Je suis toujours prudente et, en fait, les recherches ont commencé à montrer que certains des programmes offerts à différents groupes sur le métier de parent ne donnent pas nécessairement les résultats escomptés parce qu'il faut tenir compte de tout le contexte familial. Les gens seraient de meilleurs parents s'ils réglaient les autres problèmes auxquels ils font face, et il faut parfois rajuster les priorités. Un programme sur les responsabilités familiales n'atteint donc pas nécessairement l'objectif visé, d'après ce qu'indiquent les recherches. Cependant, si on aide la famille à mieux s'organiser, les parents assumeront mieux leur rôle que si on leur dit quoi faire. Dans l'ensemble, vos propos m'encouragent.
Le sénateur Tkachuk: J'ai une question complémentaire à poser au sujet du 1,3 milliard de dollars. Pourriez-vous nous indiquer les chiffres par province quand vous nous enverrez les données? Vous avez dit que vous nous enverriez les chiffres des 20 dernières années. Il serait utile que vous les ventiliez par province.
Le président suppléant: Comme il n'y a pas d'autres questions, je vais vous remercier de la présentation que vous avez faite aujourd'hui et du temps que vous avez consacré à la préparer.
La séance est levée.