Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 22 - Témoignages
OTTAWA, le jeudi 22 novembre 2001
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 8 h 30 pour examiner le commerce international des produits agricoles et agroalimentaires et les mesures à court et à long termes pour la santé du secteur agricole et agroalimentaire dans toutes les régions du Canada.
Le sénateur Leonard J. Gustafson (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Ce matin, nous recevons M. Kevin Doyle, gestionnaire, Intégration des politiques fédérales, Secrétariat rural, et M. Bob Cumming, gestionnaire, Coordination ministérielle, Secrétariat rural, Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Messieurs, nous sommes heureux de vous accueillir parmi nous ce matin. Je suis certain que nous aurons de nombreuses questions à vous poser sur la situation dans les régions rurales du Canada. Nous commencerons par écouter votre exposé. Je crois comprendre que M. Doyle parlera en premier.
M. Kevin Doyle, gestionnaire, Intégration des politiques fédérales, Secrétariat rural, Agriculture et Agroalimentaire Canada: Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir invité le Secrétariat rural à comparaître et à vous faire part de certains de nos travaux.
J'aimerais donner la parole à d'autres collègues qui se sont joints à moi aujourd'hui, si vous le permettez. Je vous présente Mme Heather Clemenson, qui est la gestionnaire chargée de la recherche rurale et Mme Pat Moore, gestionnaire chargée de nos programmes d'envergure moyenne.
En préambule, Monsieur le Président, je fonderai mon intervention sur un court document d'information dont des copies ont été distribuées aux honorables sénateurs. Ce document donne un aperçu du Partenariat rural canadien, qui représente l'essentiel des travaux entrepris par le Secrétariat rural.
Je commencerai à la page 2, pour vous donner un bref aperçu, puis je vous communiquerai un peu plus de détails sur chaque élément du Partenariat rural canadien. Le schéma à images de la deuxième page donne un instantané des différentes composantes des travaux que nous réalisons dans le cadre du Partenariat rural canadien, qui constitue la stratégie de soutien du développement du Canada rural mise en place par le gouvernement du Canada.
Nous avons mis au point un certain nombre de méthodes visant à promouvoir efficacement cette stratégie dans les nombreux ministères du gouvernement fédéral. Il est très important de souligner que notre programme n'est pas un programme traditionnel au sens ministériel du terme. Nous avons des responsabilités à l'égard de plusieurs ministères. Notre rôle principal consiste à coordonner les travaux qui se répartissent sur environ 30 ministères différents et qui ont des répercussions sur le Canada rural. Nous nous efforçons de renforcer les efforts constructifs du gouvernement fédéral en améliorant la cohérence de l'ensemble. Les différentes actions que nous entreprenons sont décrites sur cette page.
Reportez-vous à la page 3; je vais vous faire part de la pierre angulaire du partenariat, qui est véritablement présent dans tout le gouvernement. Notre priorité est d'9uvrer auprès de tous les ministères du gouvernement fédéral pour mieux faire comprendre les questions rurales et les difficultés qui se posent, ce qui améliorera l'efficacité et l'efficience de ce que chaque ministère réalise dans le cadre de son mandat pour affronter ces difficultés.
Pour y parvenir, nous avons créé un certain nombre d'outils interministériels. Il existe un groupe de travail interministériel, qui constitue une tribune permettant à tous les ministères de discuter de questions rurales, de transmettre et de diffuser des renseignements et de provoquer des discussions sur les mesures à prendre pour relever plus efficacement les défis qui se posent à nos collectivités rurales.
Dans chaque province et dans les trois territoires, nous avons créé une structure semblable, nommée «équipe rurale de fonctionnaires fédéraux». Il s'agit d'une tribune au sein de laquelle les fonctionnaires fédéraux se réunissent pour se concentrer sur les difficultés qu'éprouve le Canada rural et où ils peuvent mettre en commun leurs instruments de programmation et les programmes et services dont ils sont responsables afin de résoudre le plus efficacement possible ces difficultés.
Bien sûr, nous voulons également bâtir des partenariats avec les collectivités. Nous sommes en train d'établir de bonnes relations de travail avec de nombreux organismes représentant les collectivités rurales et les citoyens de ces régions. Il s'agit véritablement de partenariats, car nous 9uvrons de concert pour que nos instruments de programmation permettent de résoudre le plus efficacement possible les difficultés des collectivités rurales.
À la page 4, l'un des principaux outils que nous avons utilisés est ce que nous appelons le dialogue rural, qui nous amène à déployer les efforts nécessaires pour comprendre la complexité des enjeux existant dans nos collectivités rurales. Il s'agit clairement d'un exercice d'écoute et d'apprentissage. Nous voulons engager les citoyens ruraux dans un échange sur les difficultés qu'ils éprouvent. Il est très important que nous, au sein du Secrétariat, comprenions ces questions. Notre rôle consiste notamment à échanger sur ces questions avec nos partenaires du ministère. Mieux nous comprenons les questions rurales, plus ces partenaires seront en mesure de résoudre les difficultés qu'éprouvent les collectivités rurales.
Nous avons entamé le dialogue en 1998. C'est un processus continu et permanent. Que nous participions à des conférences nationales, à des ateliers régionaux ou à des tables rondes communautaires locales, le processus se poursuit régulièrement de manière à nous permettre d'enrichir nos compétences et à nous sensibiliser à ce qui se passe dans nos collectivités rurales et aux questions que nous devons porter à l'attention de nos collègues pour les aider à concevoir le plus efficacement possible leurs instruments de programmation.
À la page 5, sont décrites les 11 priorités que nous avons dégagées de notre dialogue, qui sont insérées dans le Cadre d'action fédéral pour le Canada rural. Elles sont fondées sur nos conversations avec les populations des collectivités rurales, qui nous ont fait part de leurs difficultés et de celles que connaissent leurs collectivités, des possibilités de progrès et des obstacles; ce sont des domaines dans lesquels nous travaillons en étroite collaboration avec les autres ministères afin d'essayer de garantir l'efficacité maximale des mesures ministérielles, quelles qu'elles soient.
À la page 6, nous décrivons un autre ensemble d'actions, ce que l'on appelle la «lentille rurale». Il s'agit là de voir les choses avec les yeux des populations vivant dans le Canada rural et d'être en mesure de partager ce regard avec les autres ministères fédéraux afin de les sensibiliser à la nature des enjeux et de les aider à concevoir toute mesure envisagée dans une optique rurale afin de garantir que les mesures, programmes, services ou règlements proposés tiennent compte de leurs retombées sur nos collectivités rurales. La lentille rurale est vraiment l'une des pierres angulaires de notre action. Une partie fondamentale de la responsabilité du Secrétariat rural consiste à aider les ministères fédéraux à comprendre et à connaître les enjeux ruraux. La lentille rurale est un outil essentiel pour y parvenir.
Passons maintenant à la page 7: notre petit programme de projets pilotes représente un autre outil efficace du Partenariat rural canadien. Notre objectif est de collaborer étroitement avec les collectivités et partenaires ruraux et les autres ministères fédéraux pour déterminer si nous pouvons trouver des façons novatrices de traiter les questions rurales. Il s'agit véritablement d'un effort visant à bâtir des partenariats autour de ces questions, en reconnaissant que de nombreux enjeux de nos collectivités rurales ne peuvent pas facilement être divisés en aspects économiques, sociaux, environnementaux ou culturels, mais qu'ils sont globaux. Le partenariat vise à apporter une réponse concrète, à collaborer avec les ministères, les intervenants des collectivités, voire avec d'autres paliers gouvernementaux pour trouver cette approche novatrice et pour perfectionner nos modes d'action à l'échelle locale.
Quels sont les enjeux et les avantages qu'il y a à collaborer étroitement avec nos collectivités rurales?
La page 8 comporte une description de nos recherches rurales. Là encore, le Secrétariat a pour responsabilité fondamentale d'être le point de mire du gouvernement fédéral pour les questions rurales. Si nous voulons être utiles et constructifs lorsque nous travaillons avec nos partenaires, nous devons être en mesure de leur fournir les meilleurs renseignements possible, que nous obtenons grâce à nos recherches. Nous le faisons en collaboration avec d'autres ministères, paliers gouvernementaux et intervenants. L'objectif général est de mieux connaître, comprendre et transmettre ces renseignements, de manière à améliorer l'efficacité de notre effort global.
En page 9 se trouve une brève description de l'aspect communicationnel de notre action. Il est important que les ministères fédéraux communiquent efficacement sur ce qu'ils font, et qu'ils le fassent de manière appropriée. L'un de nos rôles consiste à veiller à ce que nos interlocuteurs ministériels soient conscients du fait que la transmission d'un message destiné aux collectivités rurales requiert parfois des outils et mécanismes différents de la communication avec des populations urbaines. Nous voulons également transmettre à nos collectivités rurales les connaissances et les informations relatives aux actions du gouvernement fédéral grâce à tout un éventail de programmes et de services mis à leur disposition.
La page 10 comprend la description d'une initiative particulière découlant des fonds du ministère de l'Agriculture. Il s'agit d'un programme créé spécialement pour répondre aux besoins des collectivités rurales agricoles, et qui reconnaît que les collectivités sont perturbées par les changements et qu'elles ont parfois besoin d'aide pour gérer leur avenir. Les fonds proviennent du ministère. Le Secrétariat rural a été chargé de la gestion de ce programme en raison de notre connaissance et de notre expérience des questions de développement rural. L'accent est mis sur les besoins des collectivités agricoles.
En page 11 se trouve la description d'une nouvelle initiative, quelque peu semblable à celle de la page précédente. Elle est également centrée sur les collectivités agricoles. Elle met l'accent sur les collectivités linguistiques minoritaires et a beaucoup d'objectifs communs avec la précédente. Cette initiative découle de la responsabilité du gouvernement fédéral prévue aux articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles, en vertu desquels il doit aider les collectivités linguistiques minoritaires à se développer.
À la page 12, mes remarques préliminaires sont reprises en conclusion. Pour résumer, notre travail, au Partenariat rural canadien du Secrétariat rural, consiste à 9uvrer horizontalement dans les ministères du gouvernement pour unir les efforts collectifs de tous les ministères autour des questions rurales. C'est là le rôle principal que nous jouons au sein du Secrétariat rural.
Le sénateur Stratton: Merci d'être là. Le Partenariat existe depuis l'exercice 1998-1999. Est-ce à cette époque que vous avez commencé?
M. Doyle: Oui. Le Partenariat rural canadien a été créé en 1998.
Le sénateur Stratton: Depuis cette date, y a-t-il eu des recherches significatives sur les raisons pour lesquelles certaines régions et villes rurales réussissent et d'autres pas?
M. Doyle: Oui, bien sûr. Monsieur le président, comme cette question porte sur la recherche, j'aimerais inviter ma collègue, Heather Clemenson, qui est la gestionnaire de notre programme de recherche, à y donner une réponse plus précise et plus détaillée. Oui, nous avons entrepris des recherches sur ce thème.
Mme Heather A. Clemenson, gestionnaire, Analyse et recherche rurales, Secrétariat rural, Agriculture et Agroalimentaire Canada: Je m'appelle Heather Clemenson. Je suis la gestionnaire chargée de la recherche et de l'analyse au Secrétariat rural.
Nous n'avons pas réalisé nos propres études, mais nous soutenons les recherches portant sur les différences entre nos collectivités rurales. Au Canada, nous avons la Fondation canadienne sur la restructuration rurale. Il s'agit d'un groupe de recherche composé de chercheurs universitaires et de praticiens qui travaillent sur ce qu'ils appellent la «nouvelle économie rurale». Ils étudient les collectivités qui sont en tête et celles qui sont «à la traîne», les différences entre les deux et les raisons qui font que certaines sont en plein essor et d'autres, en déclin.
Le Secrétariat soutient ces recherches. Certains résultats sont disponibles, et nous pouvons les fournir à votre comité; il s'agit des travaux effectués par la Fondation canadienne sur la restructuration rurale, qui a récemment changé de nom et s'appelle désormais Fondation canadienne pour la revitalisation rurale. Son sigle est inchangé. Nous pouvons fournir ces renseignements au comité, si cela intéresse les membres.
Le sénateur Stratton: J'apprécierais énormément que vous nous les transmettiez. Quand les premiers résultats seront-ils prêts? Quand les recherches seront-elles terminées?
Mme Clemenson: Les travaux de la Fondation constituent un projet à long terme composé de différents éléments. Actuellement, certains de ces éléments sont disponibles et nous pouvons vous les communiquer mais, comme je vous l'ai dit, c'est un projet à long terme. Je ne sais pas avec certitude quand il sera terminé, parce que nous ne faisons qu'y contribuer. Nous ne finançons pas ces recherches en totalité. Ce sont des travaux de grande envergure.
Le sénateur Stratton: Je comprends. Je pensais qu'on avait une date limite en tête.
De nos jours, étant donné l'importance de l'apport du secteur agricole à notre pays, il est surprenant qu'aucune recherche n'ait été effectuée avant cela. Y a-t-il eu quelque chose avant ces recherches récentes? Il est atterrant que nous n'ayons pas étudié les raisons pour lesquelles certaines collectivités réussissent et d'autres pas.
C'est comme ça depuis des années. On étudie les villes sous toutes les coutures. Je suis extrêmement surpris que ce soit la première fois qu'on se penche sur les collectivités rurales. C'est bien exact?
Mme Clemenson: Je dirais qu'il y existe une masse considérable de recherches, pas nécessairement sur les collectivités agricoles, mais sur les collectivités à vocation unique, notamment sur leur déclin et leur histoire.
Nous étudions les collectivités rurales en général, pas spécialement les collectivités agricoles. À ma connaissance, très peu de travaux ont été réalisés sur ce thème auparavant.
Le sénateur Stratton: J'imagine que lorsqu'on entre dans ce partenariat, on se concentre sur la santé à long terme dans les zones et régions rurales.
Il devient de plus en plus évident que la qualité des soins de santé est beaucoup moins bonne dans le Canada rural que dans d'autres zones. Ce sont des on-dit, mais néanmoins, c'est ce qu'on lit dans les journaux. L'éducation, l'infrastructure des transports, les routes et, particulièrement, l'emploi des jeunes sont sources de préoccupation.
Comment pouvez-vous contribuer à améliorer cette situation? Comment, en étudiant les collectivités rurales, intervenez-vous pour inciter les gens à faire quelque chose ensemble? Donnez-moi un exemple, je vous prie. Avez-vous un scénario de ce genre?
M. Doyle: Nous pouvons jouer ce genre de rôle de bien des façons. Par exemple, en réalisant de nombreuses recherches avec d'autres ministères sur ces questions afin de mieux les comprendre. Nous aidons les ministères fédéraux à en apprendre davantage sur ces enjeux et nous les encourageons à les comprendre. Ce n'est là qu'une partie des travaux du Secrétariat rural.
Grâce à nos équipes rurales sur le terrain, nous étudions ces questions en collaboration avec les gestionnaires régionaux des ministères fédéraux afin de déterminer ce qui peut être fait dans le cadre des programmes et services existants. Dans l'immédiat, pouvons-nous réagir plus efficacement? Pouvons-nous appliquer avec succès les instruments et outils dont nous disposons?
Nous apportons aussi notre contribution par l'intermédiaire de notre modeste programme de projets pilotes, dans le cadre duquel nous collaborons avec les collectivités sur une question précise ou à une occasion particulière, qui peut leur causer des difficultés. Nous jouons le rôle d'intermédiaire, utilisant nos fonds comme des catalyseurs permettant d'attirer d'autres ministères et échelons gouvernementaux dans un projet déterminé.
Tout cela se fait plutôt à l'échelle microscopique, mais nous étudierons certaines questions particulières afin de déterminer s'il existe une meilleure façon de les aborder et si nous sommes aptes à réagir. Nous diffuserons des renseignements sur cet exercice d'apprentissage. C'est le rôle de nos projets pilotes.
Le sénateur Stratton: Cette question m'intéresse. D'après vos travaux, qu'est-ce qui influe le plus sur la prospérité d'une zone ou collectivité rurale? Est-ce le leadership? Dans ma province, le Manitoba, je vois des exemples de collectivités qui se développent, notamment certaines qui n'avaient aucun accès aux lignes de chemin de fer. Elles étaient isolées à cause de l'absence d'accès au réseau ferroviaire et maintenant, elles prospèrent. Pour quelle raison?
La seule réponse qui me vient à l'esprit, c'est que, dès le début, elles n'avaient pas de voie ferrée et très peu de routes. Elles étaient seules au monde et elles ont décidé d'agir de leur propre initiative. Est-ce l'élément le plus important?
M. Doyle: S'il y avait une solution miracle, je pense qu'on l'aurait déjà trouvée.
Le sénateur Stratton: Je comprends. Je ne dis pas qu'il y a une solution miracle. À mon avis, il semble que ce n'est pas un seul individu mais un petit groupe central qui dirige les événements.
M. Doyle: Nos travaux des quatre dernières années nous ont appris que le leadership et l'aptitude d'une collectivité à prendre son avenir en main sont des éléments essentiels. Certains appellent cela la «mise en valeur du potentiel de la collectivité». Cela peut être d'une grande aide. Il y a parfois d'autres éléments, mais celui-ci, nous l'avons repéré. Nous pourrions dire, en accord avec votre constat, que le leadership est très important.
Mme Clemenson: J'aimerais ajouter que nous avons récemment bénéficié du témoignage d'un collègue européen venu nous parler des travaux réalisés en Europe. Les chercheurs ont examiné de nombreuses collectivités en Europe qui progressaient ou déclinaient et ont fait une étude comparative afin d'évaluer les facteurs qui étaient à l'origine de l'essor ou du déclin.
Ils ont notamment conclu que le succès dépend de facteurs non tangibles qui ne sont pas réellement quantifiables: le leadership, la constitution de réseaux et le capital social de la collectivité. Ces éléments contribuent de manière très importante au changement dans la collectivité. Bien sûr, l'investissement, l'infrastructure et l'accès au financement sont aussi des facteurs essentiels. Cependant, il y a un ensemble de facteurs impalpables qui contribuent de fait à la croissance d'une collectivité.
Le président: Dans votre préambule, vous avez parlé de transmission de messages. Je me demande s'il n'est pas plus important de recevoir les messages du Canada rural que de lui en transmettre. Cela me fait penser à quelqu'un qui, dans sa tour d'ivoire à Ottawa, «transmettrait le message» et nous dirait comment le Canada rural doit être structuré pour survivre.
Je viens de la Saskatchewan et je peux vous dire que si vous n'y êtes jamais allés, ce serait le moment de venir. Vous pourriez «recevoir» le message, parce que la situation y est préoccupante.
Selon Statistique Canada, nous allons perdre encore 125 000 agriculteurs au cours de la prochaine décennie. Le Canada ne compte plus que 250 000 agriculteurs. Importe-t-il de transmettre aux régions urbaines le message sur la situation dans le Canada rural ou bien alors de recevoir le message des ministères sur la façon dont ils pensent structurer le Canada? Voilà comment nos populations rurales voient la situation.
M. Doyle: Je suis d'accord avec vous. Pour une bonne part, la responsabilité du Secrétariat rural consiste à «recevoir» le message, comme vous dites. Le dialogue rural est conçu spécialement pour cela, pour inviter les citoyens des collectivités rurales à s'exprimer clairement et à nous faire part des enjeux et des difficultés qu'ils éprouvent. Il nous incombe de transmettre ces renseignements à nos collègues, ici, à Ottawa, afin qu'ils améliorent leur compréhension de la réalité du Canada rural.
Il y a des différences entre le Canada urbain et le Canada rural. Il y a, au sein du Canada rural, des différences, et nous devons veiller à ce que nos collègues les comprennent de manière à pouvoir réagir efficacement.
Le président: Au cours de vos recherches, avez-vous recueilli des chiffres sur le revenu moyen de la population rurale? Je veux dire, pas seulement le revenu brut, parce que, souvent, les renseignements sont fondés sur le revenu brut, ce qui ne veut rien dire à cause des dépenses. Avez-vous des chiffres sur le revenu net dans les zones rurales, afin de comparer avec le revenu net dans les centres urbains? Avez-vous des données chiffrées là-dessus?
Mme Clemenson: Certainement, nous pourrions vous communiquer des chiffres sur le revenu par habitant, le revenu brut ainsi que les paiements de transfert. Statistiques Canada dispose sans aucun doute de ces renseignements.
Le président: Pourriez-vous présenter ces documents à notre comité ou nous en envoyer des exemplaires?
Mme Clemenson: Oui, bien sûr.
Le sénateur Fairbairn: Je considère la question du Canada rural comme l'un des enjeux les plus déterminants de ce que sera notre pays dans le siècle qui commence. Au début, le Canada était une vaste parcelle rurale. Il a changé de manière spectaculaire pour un certain nombre de raisons que nous connaissons tous.
Je suis inquiète. Je viens d'une zone agricole, mais c'est de tout le Canada rural que nous parlons ici. Nous ne parlons pas seulement des raisons qui motivent les populations à aller vers les villes; c'est parce qu'ils les préfèrent. Nous parlons des raisons pour lesquelles le Canada rural connaît une telle tension.
Le Labrador, par exemple, vivait grâce à la pêche, qui s'est effondrée. Dans le centre de la Nouvelle-Écosse et au Cap-Breton, il y a des zones rurales qui ont été bâties autour des mines de charbon. Ces mines ont été fermées. Le secteur du bois d'9uvre est en train de connaître une situation aussi catastrophique. Des villes entières se sont construites autour de cette industrie. J'ai l'impression qu'il y a de nombreux changements qu'on ne peut arrêter. Il y a dans la nature beaucoup d'évolutions qu'on ne peut maîtriser.
Dans certains de vos documents, le mot «accès» apparaît sans arrêt. Il me semble que c'est un mot capital si nous voulons maintenir la vie rurale au Canada. La solution ne consiste pas seulement à permettre l'accès au gouvernement. Il ne s'agit pas seulement de l'accès à quelqu'un qui dira ce qui est le mieux pour une collectivité. Au Canada atlantique, nous avons décidé de créer davantage d'entreprises, en pensant que cela marcherait. Le plus souvent, cela n'a pas été le cas.
Il y a peut-être un point commun entre de nombreuses régions dont la prospérité dépendait de ressources et d'industries primaires et qui sont aujourd'hui en difficulté, c'est le manque d'accès au savoir. Les gens de notre pays sont des spécialistes des activités de la terre et de la mer. Ce sont des spécialistes. Ils sont extraordinaires, mais leurs habiletés, qui ont été perfectionnées au fil des générations, n'étaient pas nécessairement centrées sur l'apprentissage institutionnel. Nous essayons aujourd'hui de donner au Canada rural l'occasion d'accéder à de nombreux domaines autres que l'expérience traditionnelle.
J'ai remarqué que l'éducation n'était pas très loin du bas de la liste des actions du Secrétariat rural. Quand on travaille avec les collectivités rurales, on est sensible aux connaissances spécialisées. Est-ce votre cas? Comment cette sensibilité est-elle transmise à tous les ministères du gouvernement? Allons-nous dire aux gens qu'ils doivent faire autre chose parce que ce qu'ils ont toujours connu n'existe plus et qu'ils doivent apprendre de nouvelles techniques et s'intéresser à des secteurs nécessitant une nouvelle formation?
Chacun sait que je m'intéresse à l'alphabétisation et à l'apprentissage. N'est-ce pas une préoccupation centrale pour le Canada rural? Dans l'affirmative, comment le Secrétariat rural et la nouvelle priorité peuvent-ils réformer le Canada rural et contribuer à l'amélioration de ces questions dans les collectivités?
Les membres des collectivités apportent le leadership, mais ils ont besoin de réseaux. Ils ont besoin d'aide. La technologie est utile, mais il existe de nombreuses façons de former les gens. Jusqu'à quel point cet aspect s'inscrit-il dans vos activités?
M. Doyle: Cela fait effectivement partie de nos activités. Vous avez tout à fait raison, l'accès est un point fondamental. Certains de nos partenaires se penchent sur la question. Le Programme d'accès communautaire permet aux collectivités rurales d'être reliées à Internet. Nous collaborons avec d'autres services de Développement des ressources humaines Canada qui sont chargés de l'apprentissage et de l'alphabétisation afin de permettre une application judicieuse de leurs instruments de programmation à l'échelle communautaire.
Vous avez décrit des modes d'apprentissage non institutionnels, notamment la création de réseaux entre collectivités. Nous y contribuons lorsque nous essayons de réunir les collectivités. Nous nous efforçons de collaborer avec des organismes communautaires pour ce faire. En Ontario, nous travaillons avec le Conseil ontarien des affaires rurales. En Nouvelle-Écosse, nous travaillons avec le Coastal Communities Network. Nous nous efforçons de répondre aux besoins en apprentissage et de mettre en 9uvre des outils, de la même manière que vous l'avez décrit.
C'est un enjeu primordial. Certains aspects sont intangibles: la création de réseaux et la construction d'un capital social dans les collectivités rurales, de façon que ces dernières puissent utiliser les atouts dont elles disposent, malgré les énormes changements qui touchent toutes les industries primaires à l'échelle communautaire.
Le sénateur Fairbairn: Les gens doivent se rappeler que par le passé, dans les zones rurales, il n'existait pas d'accès à l'apprentissage institutionnel comme dans le Canada urbain, et il n'y en avait pas besoin. Nous parlons d'Internet et d'autres techniques, mais les membres des collectivités doivent savoir les utiliser. La technique a quelque chose de magique, mais l'ordinateur est encore un moyen de communication écrite. Pour l'utiliser efficacement, il faut savoir lire et écrire.
Tout comme le président et de nombreux autres membres du comité, je suis extrêmement inquiète de ce qui se passe dans notre collectivité agricole. Beaucoup des événements en question sont indépendants de notre volonté. La frustration aussi. Elle est cependant présente dans ma région. Nous avons sans doute connu la pire sécheresse au siècle dernier. Nombreux sont ceux qui ne veulent pas prendre leur retraite, mais qui n'ont pas le choix. Ils ne peuvent pas travailler leur terre. Il n'y a pas d'eau. Il n'y a rien à faire.
Outre la question de trouver des solutions de rechange pour les collectivités, il y a celle des soustractions de terres à la culture, pour les raisons que j'ai évoquées. Jusqu'à quel point en tenez-vous compte dans vos relations avec les collectivités agricoles? Pensez-vous que les collectivités veulent avoir une vocation agricole, mais que quelque chose les en empêche? Comment l'établissement d'un lien avec les questions rurales à tous les paliers gouvernementaux peut-il aider ceux qui prennent leur retraite mais pas à cause de leur âge? Ces personnes ne veulent pas rester inactives. Si nous ne pouvons pas y remédier, nous perdrons les collectivités. Et quand on perd les collectivités, on perd l'âme du pays. Comment, dans votre nouveau mandat, pouvez-vous contribuer à éviter cela?
M. Doyle: J'aimerais demander à mon collègue, M. Cumming, de répondre à cette question.
M. Bob Cumming, gestionnaire, Coordination ministérielle, Secrétariat rural, Agriculture et Agroalimentaire Canada: On peut dire que le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire connaît parfaitement la situation des collectivités agricoles de tout le pays. Le ministre et ses collègues provinciaux examinent activement ce dossier. Nous, au Secrétariat, recueillons l'information et la transmettons au ministère de l'Agriculture qui l'intègre aux programmes qui sont en cours d'élaboration.
Le sénateur Fairbairn: Je comprends. Le mandat du ministère de l'Agriculture, c'est l'agriculture. Cela ne fait aucun doute. Certes, le ministère fera tout son possible pour atténuer les difficultés des agriculteurs et leur apporter son aide. Ce que je dis, c'est que vous avez vraiment la possibilité de trouver diverses solutions pour que les collectivités continuent de fonctionner mais à un autre niveau alors que dans le passé, elles ont toujours été tributaires de la communauté agricole environnante.
À mon avis, c'est un de vos grands défis. Vous allez avoir besoin d'aide et de soutien à l'extérieur du ministère de l'Agriculture de la part d'autres volets du gouvernement. Est-ce que vous cherchez activement à obtenir de l'aide gouvernementale d'autres sources que de l'Agriculture?
M. Doyle: La réponse est oui. Nous travaillons avec d'autres ministères qui pourront nous faire profiter de leur expérience au niveau communautaire. Par exemple, la Diversification de l'économie de l'Ouest s'occupe du développement économique communautaire. Nous travaillons avec ce ministère et avec Ressources naturelles Canada. Nous travaillons avec tous les ministères qui peuvent offrir des outils utiles au niveau communautaire et nous aider à trouver une nouvelle orientation ou à créer une industrie qui repose sur ses atouts.
Mis à part l'impact des changements sur l'économie fondée sur les ressources naturelles, les collectivités ont effectivement des atouts. Elles ont parfois besoin d'être aidées et orientées pour les repérer. Ces atouts ne remplaceront peut-être jamais ce qui est en train de changer, mais ils peuvent offrir d'autres solutions. Sur la côte Est, dans nombre de collectivités, le tourisme offre d'excellentes possibilités. Autre exemple, les pêches ouvrent la porte à de petits créneaux pour divers produits. Nous travaillons avec des ministères qui possèdent le savoir et l'expérience qui aideront les collectivités, qui leur transmettront leurs connaissances pour qu'elles puissent franchir les premiers pas sur la voie du changement, ce qui est parfois essentiel.
Le sénateur Fairbairn: Je vous en félicite. Dans certains cas, c'est vraiment ce qui détermine la survie ou la disparition d'une petite agglomération.
Le président: J'aimerais ajouter un commentaire sur la voie indiquée par le sénateur Fairbairn. Les ressources naturelles qui contribuent à enrichir notre pays sont les pêches, le bois d'9uvre, l'agriculture, le pétrole et le gaz, l'eau, le bétail, le charbon et la potasse, et cetera, toutes des ressources qui proviennent des régions rurales du Canada. Lorsque j'ai été élu pour la première fois à Ottawa, Alvin Hamilton, qui était un grand agriculteur et probablement l'un des plus grands ministres de l'Agriculture que nous n'ayons jamais eus, a dit qu'il y avait une guerre non déclarée entre le Canada urbain et le Canada rural pour s'approprier les richesses, et que nous étions les perdants de cette bataille.
Toutes ces ressources proviennent du Canada rural mais rien n'y est investi en contrepartie. On a appris aux nouvelles hier soir la fermeture des mines au Cap-Breton. Nous connaissons la situation actuelle des pêches et de l'agriculture. Elle est grave. Les gouvernements ne semblent pas le reconnaître et j'en accuse également mon propre gouvernement, le gouvernement conservateur dont je faisais partie. Le gouvernement actuel n'est pas conscient de la grave situation qui existe dans les collectivités rurales aujourd'hui. Ces collectivités sont la force sur laquelle on a construit notre pays.
Les Américains semblent le comprendre mieux que nous. Ils parlent du «c9ur de l'Amérique» quand ils parlent d'agriculture. Les gens de New York parlent du «c9ur du pays», mais pas nous, au Canada.
Comment les régions rurales peuvent-elles participer à la prospérité qu'elles contribuent à créer?
M. Doyle: C'est une très bonne question et tout un défi pour notre société.
Le président: Si vous me permettez d'insister, il me semble qu'on peut produire beaucoup de documents à Ottawa - à un salaire de 50 000 $ par année - mais on ne semble pas recanaliser ces revenus dans les collectivités rurales, qui sont le moteur de tout le pays. Notre comité, le Comité sénatorial de l'agriculture, a la responsabilité de faire passer ce message aux gens des ministères et à vous aujourd'hui.
M. Doyle: Je comprends.
Le sénateur Tunney: J'aimerais poser quelques questions.
En me reportant au bas de la page 7 de votre exposé, je crois comprendre que le financement de 321 projets pilotes a été approuvé sur quatre ans, avec un maximum d'environ 50 000 $, qui serait votre contribution. Pouvez-vous me donner quelques exemples de ces projets que vous et d'autres financez?
Je suis surpris que nous ayons ce genre d'organisme au sein d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Je ne savais pas que vous existiez. Ça ressemble à un autre programme fédéral, que je connais bien, et qui est destiné au développement rural, l'Initiative fédérale du développement économique du Nord de l'Ontario, FedNor. M. Andy Mitchell en est le ministre. Je le rencontre toutes les semaines au caucus. Tout son ministère semble faire exactement ce que vous prétendez faire. Je me demande si vous travaillez en équipe ou si vos activités se chevauchent, ou si vous collaborez? Si les deux organismes collaborent, pourquoi font-ils la même chose?
Le sénateur Stratton: Est-ce une nouvelle structure bureaucratique?
Le sénateur Tunney: C'est à se le demander. Si deux organismes ont le même mandat sans que vous le sachiez, il y a lieu de se demander s'il s'agit d'un dédoublement de structure bureaucratique.
À la page 4 de votre exposé, monsieur Doyle, vous parlez de l'opposition à la création de superporcheries et des besoins des personnes qui s'établissent dans ces régions, sans pratiquer l'agriculture, les «citadins transplantés» - les gens de la ville qui veulent vivre à la campagne mais qui ne peuvent tolérer les superporcheries. Le même problème se pose avec la volaille. Est-ce que vous vous impliquez là-dedans?
M. Doyle: Je vais répondre aux questions dans l'ordre où vous les avez posées.
Votre première question portait sur des exemples de projets pilotes. Permettez-moi de vous donner des exemples de projets que nous avons réalisés. À Terre-Neuve, un projet portait spécifiquement sur les services de soutien aux micro-entreprises dans une collectivité. Je vais vous lire brièvement la description du projet, ne serait-ce que pour vous donner une idée des résultats de ce projet.
Le sénateur Oliver: Est-ce que nous avons cette information dans nos trousses?
M. Doyle: Cette information spécifique n'est pas dans vos trousses, mais nous nous ferons un plaisir de la transmettre au comité. Il s'agit d'un projet de soutien aux micro-entreprises mené à Terre-Neuve pour répondre aux besoins des propriétaires de petites entreprises qui s'entraident pour en lancer de nouvelles et améliorer celles qui existent déjà.
C'est essentiellement une firme artisanale de marketing. Un service de prêt aux micro-entreprises qui rassemble les dirigeants d'entreprises en groupes de quatre à sept membres, utilisant les ressources collectives pour aider ces dirigeants à atteindre leurs objectifs. En général, ces entreprises sont trop petites pour être membres de chambres de commerce ou de grandes associations locales, et souvent elles ont de la difficulté à obtenir du financement. Le service de prêt est exploité par la Newfoundland and Labrador Federation of Cooperatives et offre des garanties aux institutions financières de l'endroit pour les petits prêts, jusqu'à concurrence de 5 000 $.
Le programme met également des coordonnateurs régionaux au service des groupes pour encourager les membres à s'entraider et à trouver des solutions aux problèmes de comptabilité, de gestion de l'inventaire, de réseautage et de marketing. Ce projet de partenariat a réuni 100 000 $ sur un coût total de près de 300 000 $. Voilà un exemple d'un petit projet d'apprentissage à Terre-Neuve.
Le sénateur Tunney: Est-ce que les gens vous présentent une demande ou si vous prenez les devants et vous leur faites part de l'idée dont vous assurez ensuite le suivi?
M. Doyle: C'est eux qui nous en font la demande.
Il existe un deuxième projet pilote en Colombie-Britannique, le projet pilote sur le Centre d'appel virtuel à Nelson. Ce projet aide financièrement l'embauche de 25 personnes qui recevront une formation d'agents de centre d'appel et établiront chez eux un mini-centre d'appel résidentiel. Ils absorbent le trop-plein d'appels des principaux centres d'appel d'entreprises comme Sears Canada, Ticketmaster et le Réseau de téléachat. Ce projet pilote veut vérifier l'applicabilité de ce genre de travail dans les collectivités rurales. Les gens peuvent ainsi travailler à la maison dans un nouveau type d'activité.
Nous avons versé 15 000 $ par l'entremise du Fonds du Partenariat rural canadien. Le coût total du projet se situait aux environs de 700 000 $ et son objectif était de trouver une nouvelle façon de permettre aux gens des collectivités rurales de travailler à la maison en utilisant la technologie moderne. C'est un autre exemple d'un projet pilote.
Le sénateur LeBreton: J'aimerais poser une question complémentaire. En quoi le fait de travailler à la maison permet-il de régler les problèmes des habitants des collectivités rurales au Canada? Ces projets pilotes sont des projets de télétravail, mais pour faire quoi? À partir de quel moment ces projets permettent-ils d'aborder les problèmes auxquels doivent faire face les Canadiens et Canadiennes qui vivent dans les régions rurales?
M. Doyle: Ces personnes n'auraient pas d'emploi autrement.
Le sénateur LeBreton: Pouvez-vous me décrire ce qu'elles font.
M. Doyle: Il s'agit de centres téléphoniques virtuels. Les gens reçoivent des appels pour Sears Canada, ou pour Ticketmaster, ils répondent aux appels qui peuvent venir de n'importe où. Ils peuvent demeurer dans leurs collectivités rurales et y travailler.
Le sénateur LeBreton: Ils peuvent rester dans la collectivité rurale, mais ils ne font rien d'autre que d'occuper un emploi qui spécifiquement améliore leur vie.
M. Doyle: Si ces gens-là peuvent rester dans leurs collectivités, ils peuvent participer à la vie communautaire. Ils sont peut-être membres du Club Lions ou de la Chambre de commerce de l'endroit, ce sont peut-être aussi des bénévoles dans des associations communautaires. C'est ça qui permet de bâtir une collectivité. Faute d'emplois, ces gens partiraient. Et si les gens partent, la collectivité commence à se désagréger parce qu'il n'y a plus de tissu social qui retient tous les éléments ensemble. Ce sont là des exemples de façons nouvelles de fournir des emplois. Sans les emplois, les collectivités disparaîtront.
Le sénateur Oliver: Vous avez dit que ce projet coûte 700 000 $ et que vous y avez participé à hauteur de 15 000 $. D'où viennent les 700 000 $?
M. Doyle: Les autres partenaires du projet sont la Société d'aide au développement des collectivités de l'endroit, Développement des ressources humaines Canada, AT&T Canada et le programme régional de développement de haute technologie de la Colombie-Britannique au Collège Selkirk. Le but de l'Initiative des projets pilotes du Partenariat rural canadien est d'impliquer d'autres partenaires. Nous sommes un catalyseur et rarement le principal bailleur de fonds. Nous réunissons tous les éléments nécessaires pour conclure une entente de financement.
Le sénateur Tunney: Dans ma région, il y a des centaines de milliers de travailleurs de bureau qui travaillent pour de grandes entreprises tout en restant chez eux. Il y a beaucoup de gens qui parcouraient 80 milles chaque matin pour aller travailler dans un bureau à Toronto et qui maintenant travaillent chez eux pour les mêmes entreprises pour lesquelles ils ont fait le trajet pendant des années. C'est la même chose partout.
M. Doyle: Ce sont là plusieurs exemples de projets pilotes. Je vais vous en donner un autre, qui est un projet centré sur l'agriculture en Nouvelle-Écosse. C'est un projet de compostage à la ferme qui combine les déchets de volaille et de porc avec des déchets du secteur institutionnel et des déchets organiques. C'est là un exemple d'un partenariat entre les collectivités rurales et les producteurs de bétail. Le projet favorise le travail conjoint des résidents des collectivités rurales et des agriculteurs, dans la mise en commun des ressources locales pour régler le problème des déchets organiques des deux groupes.
Les déchets organiques proviennent des foyers, des industries, des commerces et des institutions dans les petites collectivités et sont jumelés à ceux des exploitations de compostage de fumier à la ferme. Il y a plusieurs partenaires dans ce projet: Agriculture et Agroalimentaire Canada, le ministère des Pêches et de l'Agriculture de la Nouvelle-Écosse, Développement des ressources humaines Canada, le ministère de l'Environnement et du Travail de la Nouvelle-Écosse, l'Agence de développement économique de la collectivité de Kings - qui est une agence de développement municipal, le Conseil du comté de Kings et une organisation qui s'appelle Nova Farm. Notre contribution, grâce à notre programme de projets pilotes, a été de 30 000 $. Le coût total du projet est de 70 000 $. C'est un exemple d'un projet réalisé au sein d'une collectivité agricole.
Votre deuxième question était de savoir si notre organisation doublait les activités de FedNor. Il se trouve que nous avons le même ministre, M. Mitchell, qui est le ministre responsable du développement rural. Il est aussi le ministre responsable de FedNor. Le mandat de FedNor touche le Nord de l'Ontario. C'est ce que nous appelons une agence de développement quasi régional.
Notre responsabilité, puisque nous ne sommes pas une agence de développement régional, est d'assurer la coordination au sein du gouvernement. Nos activités s'étendent à tout le pays, et pas seulement au Nord de l'Ontario. Elles peuvent s'apparenter aux activités de FedNor dans certains aspects, mais il y a des distinctions majeures entre les deux également. Nous travaillons en très étroite collaboration avec FedNor.
Le sénateur Tunney: Est-ce que vous connaissez une société à Trenton, une filiale de Domtar, qui s'appelle Norampac? Elle a mis au point un nouveau processus, qui est la chose la plus emballante dont j'ai entendu parler depuis des années en ce qui concerne la gestion des déchets. Si vous n'en avez pas entendu parler, vous devriez vous renseigner. On vient de commencer les travaux d'excavation pour y bâtir une toute nouvelle usine. C'est dans ma circonscription, tout juste à côté de celle du ministre Vanclief. Le ministre devrait être au courant.
Le sénateur Oliver: Quel est ce processus?
Le sénateur Tunney: Le processus devrait éliminer 99 p. 100 des déchets. Les déchets vont tout simplement disparaître.
Le sénateur Stratton: Est-ce qu'ils sont brûlés?
Le sénateur Tunney: Non, je n'ai pas les détails avec moi, mais je les ai à la maison. Vous connaissez certainement les chaudières qui brûlent les déchets, mais le processus est plus développé que cela. On y brûlera tout, des déchets nucléaires aux déchets municipaux ordinaires. Ce processus réduira les résidus d'une tonne de déchets au contenu d'un sac à magasinage. C'est difficile à comprendre.
Le sénateur Stratton: Pourriez-vous obtenir l'information à ce sujet?
Le sénateur Tunney: Je me ferai un plaisir de le faire. Je pense que notre comité a tout intérêt à comprendre ce processus.
M. Doyle: J'invite mon collègue, M. Cumming, à répondre à votre troisième question.
M. Cumming: Je pense que vous parlez de l'emplacement des porcheries, ce genre de problèmes. Ça ne nous touche pas directement. La plupart de ces questions relèvent de la planification de l'utilisation des terres, généralement des enjeux provinciaux ou municipaux. Le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire s'intéresse à certains aspects de la question, mais ça ne nous concerne pas directement.
Si vous permettez que j'élude cette question, je reviendrai à la discussion précédente sur le projet pilote, soit la gestion des déchets animaux des porcs et de la volaille. Plusieurs projets concourent à régler certains de ces enjeux.
Le sénateur Tunney: Il y a suffisamment de personnes qui essaient de gérer cette pollution porcine actuellement.
Le sénateur Fairbairn: J'aimerais vous faire part d'un exemple à l'échelle locale, et je crois que le sénateur Tunney s'en souvient aussi. Lorsque vous parlez des innovations en matière de compostage en Nouvelle-Écosse, on peut également se reporter au Centre de recherche de Lethbridge, qui est l'un des plus importants, après celui d'Ottawa. Nous avons visité ce centre et nous avons constaté, à notre grand étonnement, d'agréables odeurs. La recherche donne parfois d'appréciables résultats.
Le sénateur Hubley: Je vais poser ma question d'abord et je vous ferai ensuite mes commentaires.
Si les collectivités agricoles, ou nos agriculteurs qui alimentent notre pays, étaient assurés d'avoir un rendement équitable sur leurs produits pour le travail qu'ils y consacrent, est-ce que nombre des problèmes dont nous discutons ici aujourd'hui disparaîtraient? Je vous pose la question parce que je connais peut-être la réponse.
Lorsque vous tenez vos ateliers, et vous avez probablement des discussions avec des groupes ou des organismes agricoles, des groupes de femmes, des groupes communautaires, des agriculteurs eux-mêmes et des gens d'affaires de la collectivité, quel est le problème qui est le plus souvent soulevé? Quelle est la chose qui, à leur avis, pourrait les aider à régler certains de leurs problèmes? Ont-ils des problèmes financiers, environnementaux, de santé, de stress et ainsi de suite?
J'aimerais simplement relever un commentaire du sénateur Stratton, à savoir pourquoi une collectivité semble avoir du succès alors que l'autre semble lutter pour survivre. Je viens de l'Île-du-Prince-Édouard, une très petite collectivité qui met en évidence les différences entre les régions urbaines et rurales. Nous tentons constamment de garder aux collectivités urbaines et aux collectivités rurales leur caractère propre, non seulement pour l'industrie agricole, mais pour l'industrie qui sous-tend tout cela, c'est-à-dire le tourisme. Et certaines des collectivités de l'Île-du-Prince-Édouard qui semblent avoir du succès sont celles qui présentent un tissu religieux très solide - je ne m'en excuse pas - ou un patrimoine culturel très fort. Je ne sais pas si les Prairies bénéficient du même héritage mais je pense qu'on pourrait faire le parallèle.
La dernière chose qui me dérange vraiment, c'est la question des attitudes. Il me semble que les Canadiens n'aiment pas les collectivités agricoles. Ils veulent acheter leurs aliments à un certain prix et ils veulent obtenir la meilleure qualité, mais si la collectivité agricole a des problèmes bien souvent indépendants de sa volonté, comme des problèmes d'environnement, les agriculteurs s'affaissent et s'accusent: «Eh bien oui, c'était mieux l'année dernière» ou «On peut toujours s'en tirer», «Nous avons la peau dure», les raisons ne manquent pas.
Notre dernier témoin était de l'Union européenne. Cette attitude est suffisamment blessante sans avoir à la subir d'un pays étranger qui constate que les Canadiens ont une bien piètre attitude à l'égard de leurs agriculteurs. Et on nous rétorque que leurs propres agriculteurs sont très appréciés dans leur pays. On a peut-être le droit de ne pas se respecter soi-même, mais lorsque quelqu'un d'autre dénigre notre attitude, ça fait mal. Si on est gêné de parler à ceux qui nous alimentent - et on envisage déjà que notre prochain conflit sera celui du ravitaillement - alors nous avons beaucoup de travail à faire.
Voilà, j'ai dit beaucoup de choses aujourd'hui. Je vous remercie de m'avoir écoutée.
M. Doyle: Il y a trois questions ici. Je vais tenter de répondre à chacune d'elles et j'invite mes collègues à faire aussi des commentaires.
Votre première question portait sur les revenus équitables tirés des produits agricoles et je ne connais pas la réponse à cette question. Je pense que c'est un problème. Ça fait probablement partie de votre préoccupation générale au sujet des attitudes à l'égard des collectivités rurales. Bien sûr, une partie du travail que nous tentons de réaliser est de mieux faire comprendre, non seulement au gouvernement, mais à l'extérieur, l'importance, la valeur, la contribution qu'apportent les collectivités rurales à notre société et à notre pays. Il s'agit d'un vaste enjeu qui a de nombreuses ramifications. Je crois savoir que le ministre Vanclief comparaîtra devant le comité la semaine prochaine et peut-être, en ce qui concerne l'aspect du revenu agricole, que cela serait une bonne question à lui poser.
Vous avez posé une question sur les enjeux suivants: quelles sont les questions les plus urgentes soulevées dans le milieu rural? Cela varie énormément d'une collectivité à l'autre, d'une province à l'autre, d'une région à l'autre. Les 11 priorités qui sont décrites dans le document et qui font partie de notre cadre fédéral tentent de résumer ce que pensent les gens des collectivités rurales. Elles ne représentent pas nécessairement l'ordre de préférence que chaque collectivité aurait établi. Parfois, les collectivités sont préoccupées par l'accès aux capitaux, parfois par l'accès au savoir et à l'information, par le leadership dans la collectivité. Parfois les préoccupations peuvent porter sur des enjeux touchant la santé dans les régions rurales ou pourquoi les jeunes quittent les régions rurales. Ce sont là des enjeux avec lesquels nous travaillons tous les jours en collaboration avec nos ministères partenaires à Ottawa.
Par exemple, nos recherches nous amènent à participer à une étude sur la migration des jeunes hors des régions rurales du Canada atlantique afin de mieux comprendre les problèmes et d'aider les ministères à trouver des solutions. Les enjeux varient et nos discussions nous permettent de mieux faire comprendre aux ministères les préoccupations des agriculteurs dans chaque région. Nous nous concentrons parfois sur les problèmes des collectivités elles-mêmes et tous ces efforts contribuent à sensibiliser les gens à Ottawa sur la situation particulière du Canada rural, situation qui est différente d'un endroit à l'autre.
Le président: J'aimerais poser une question supplémentaire sur le sujet que le sénateur Hubley a si bien décrit. J'ai l'impression que nous avons perdu notre sens pratique. Je sais pertinemment que chaque agriculteur embaucherait quelqu'un, ce qui serait une solution pratique. Au lieu d'inventer une solution artificielle, si l'agriculteur avait seulement l'argent nécessaire pour payer un salaire décent à un employé, l'employé pourrait être engagé pour travailler aux récoltes, peu importe.
J'ai lu un article écrit à ce sujet par un économiste qui dit qu'il y a seulement deux façons de créer de la richesse: créer un produit ou un service. Si on crée un service, nous voilà avec un programme de création d'emplois qui annonce l'ouverture d'un poste à 30 000 $ par année. Pourquoi ne pas payer une vraie personne pour effectuer un vrai travail? Ce qu'on a maintenant, ce sont des agriculteurs d'une part et des chômeurs agricoles de l'autre, chacun désespéré, et nos jeunes qui abandonnent l'agriculture. Il y a crise au Canada - et j'aimerais que l'on me cite à cet égard partout au pays. Nous sommes en crise à moins que quelqu'un ne prenne la situation en main.
Je vais expliquer la situation de cette façon: ce matin, ma femme m'a demandé pourquoi je perds mon temps en agriculture depuis 20 ans quand rien n'a changé. «T'es une personne pratique». C'est ce qu'elle m'a dit. Elle a ajouté: «Bon sang, abandonne, ça ne va pas changer».
Je refuse d'abandonner. Nos jeunes agriculteurs abandonnent. C'est un problème très grave, parce que nous sommes en train de perdre une génération de personnes qui comprennent ce dont notre pays a besoin.
Ce sera mon dernier message ce matin. Si on s'attaque au c9ur du problème, il va y avoir de nombreux emplois. Il y a des agriculteurs - qui ont 65 et 70 ans et qui devraient se retirer - qui travaillent plus fort aujourd'hui qu'ils n'ont jamais travaillé parce qu'ils n'ont pas les moyens d'engager de bons employés. C'est très malheureux.
Le sénateur Oliver: Je viens de la Nouvelle-Écosse. Il y a environ 15 ans, lorsque nous avions encore du poisson de fond dans la région de l'Atlantique, je me rappelle avoir lu un rapport indiquant qu'il y avait plus de personnes qui travaillaient au ministère des Pêches à Ottawa qu'il n'y avait de pêcheurs dans la région de l'Atlantique.
J'aimerais en savoir un peu plus sur votre organisation au ministère. Pouvez-vous me dire combien de personnes y travaillent et à quel niveau, quel est votre budget annuel, et comment ce budget est réparti à l'échelle régionale? Quelle portion du budget de votre ministère est consacrée au Canada atlantique et combien de personnes travaillent sur des questions touchant les collectivités rurales de la région de l'Atlantique à votre ministère?
M. Doyle: Entre 75 et 80 personnes travaillent au Secrétariat rural.
Notre budget global pour le Partenariat rural canadien se situe entre 10 et 11 millions de dollars.
En ce qui concerne la répartition régionale de ces crédits, je ne peux pas vous donner cette information aujourd'hui. Je peux expliquer notre structure et nous pourrons vous donner les chiffres à cet égard.
Nous avons dans tout le pays environ une douzaine de conseillers régionaux. Le c9ur du Secrétariat rural est à Ottawa et les gens qui y travaillent font partie du Secrétariat et non pas du ministère de l'Agriculture, qui a ses propres activités régionales. Il y a à peu près trois personnes par province qui travaillent pour nous, au mieux, et nous pourrons vous donner les chiffres du budget.
Le sénateur Oliver: Est-ce que ces 10 ou 11 millions de dollars incluent ce que j'appelle les coûts d'infrastructures comme les bureaux, le travail de secrétariat, les ordinateurs et vos salaires?
M. Doyle: Ça inclut tout. Ça inclut également notre programme de projets pilotes et nos activités menées dans le cadre du Partenariat rural canadien. Nous sommes une très petite organisation qui a un budget modeste.
Le sénateur Oliver: Il y a environ trois ou quatre semaines, j'étais en Nouvelle-Écosse, et j'ai lu un article dans notre journal provincial disant que M. Andy Mitchell se trouvait à un endroit nommé Cornwallis dans le comté de Digby, en Nouvelle-Écosse, où il tenait une série de colloques sur des enjeux touchant les collectivités rurales au Canada, y compris les mesures qui pourraient être prises pour stimuler l'investissement dans ces régions. Est-ce que ces colloques sont tenus en parallèle avec votre travail ou s'il s'agit d'une activité distincte?
M. Doyle: Cela s'inscrit dans la poursuite de notre dialogue avec les collectivités rurales. Cette année, M. Mitchell a tenu quatre conférences régionales, à Cornwallis en Nouvelle-Écosse, en Colombie-Britannique, dans le Nord et en Ontario. Cela fait partie de la poursuite du dialogue avec les collectivités, avec les citoyens des collectivités rurales pour comprendre leurs défis. Cela fait partie de notre travail.
Le sénateur Oliver: Y a-t-il un compte rendu du dialogue qui s'est tenu à Cornwallis, en Nouvelle-Écosse, et est-ce qu'on le trouve sur un site Web quelque part? Y a-t-il un moyen d'accéder aux décisions qui ont été prises à cette conférence?
M. Doyle: Je ne crois pas que le rapport soit encore prêt, mais nous le ferons parvenir au comité. La plupart des rapports de nos dialogues avec les collectivités rurales sont disponibles. Par hasard, j'en ai un ici d'un autre dialogue qui a eu lieu à Sydney, en Nouvelle-Écosse, il y a environ un an.
Le sénateur Oliver: Est-ce que ces rapports aboutissent à des recommandations au ministère?
M. Doyle: En général, ces rapports font état de la nature des enjeux. Nous les transmettons à nos ministères partenaires pour les aider à concevoir leurs programmes et leurs services. Ils ne contiennent pas de recommandations spécifiques. Ce sont des rapports sur ce que les gens ont exprimé, dans ce cas-ci, en Nouvelle-Écosse.
Il y a un autre dialogue dans les Territoires du Nord-Ouest. Par hasard, j'ai le rapport d'un dialogue avec la communauté rurale de Chapleau dans le Nord de l'Ontario.
Nous nous efforçons de publier les conversations avec les collectivités rurales et les citoyens et de transmettre les comptes rendus à tous les ministères pour clarifier la perspective rurale. Pour nous, c'est un outil essentiel.
Les ministères nous demandent ce que nous entendons par «rural». «Quels sont les problèmes auxquels les gens font face»? Ce sont là des enjeux que les gens ont soulevés, des problèmes concrets qui nous aident à concevoir nos politiques et nos programmes.
Nous allons tâcher de diffuser le compte rendu de la séance de Cornwallis le plus rapidement possible.
Le président: Quand sera-t-il disponible?
M. Doyle: Je vais devoir m'informer, Monsieur le Président. Je ne le sais pas.
Le sénateur Oliver: Dans vos commentaires aujourd'hui, vous avez mentionné le Coastal Communities Network, en Nouvelle-Écosse. J'aimerais que vous nous disiez ce que c'est, comment vous collaborez avec cette organisation et comment vous la financez.
Vous avez également parlé du projet sur la migration des jeunes hors des régions rurales en Nouvelle-Écosse. De quoi s'agit-il?
M. Doyle: Je vais laisser ma collègue, Mme Clemenson, vous expliquer le projet concernant les jeunes dans les régions rurales.
Le Coastal Communities Network est une organisation de la Nouvelle-Écosse dont le but est de rassembler les collectivités locales pour créer un réseau entre les collectivités côtières afin de les aider à régler leurs problèmes. Nous avons souvent travaillé avec ces collectivités dans le cadre du Partenariat rural canadien et de son prédécesseur afin de leur permettre de financer des colloques et des ateliers pour réunir les collectivités pour qu'elles discutent de leurs problèmes. Notre objectif est de favoriser une organisation communautaire en Nouvelle-Écosse, comme nous le faisons dans d'autres provinces pour les collectivités et les citoyens afin de les amener à se concentrer pour clarifier ces enjeux.
Le sénateur Oliver: Est-ce que cela peut directement permettre d'améliorer les revenus de la ferme?
Mon voisin est un producteur de b9uf. En quoi vos projets l'aideraient-ils à obtenir plus d'argent pour son b9uf?
M. Doyle: Au départ, le Coastal Communities Network concentrait ses activités sur les collectivités de pêche. Celui de la Nouvelle-Écosse a maintenant élargi ses activités pour essayer de s'intéresser aux collectivités d'autres secteurs.
En quoi cela aiderait-il votre voisin? Cela lui profiterait indirectement parce que cela aiderait la collectivité à mieux gérer son avenir, en comprenant et en reconnaissant les possibilités de développement communautaire. Ce serait plus un avantage indirect pour votre voisin producteur de b9uf.
Le sénateur Oliver: J'espère que cela n'est pas seulement une étude qui va examiner combien de jeunes quittent les régions rurales pour savoir où ils s'en vont. J'ai bien hâte d'en savoir davantage.
Mme Clemenson: L'étude que nous avons entreprise l'année dernière constituait la première phase d'une recherche sur les jeunes. Le départ des jeunes est une préoccupation majeure pour nombre de collectivités rurales au Canada.
La première partie de notre étude a été réalisée avec Statistique Canada pour faire justement ce que vous venez de décrire, c'est-à-dire pour voir combien de jeunes s'en vont, combien restent et combien reviennent dans les collectivités rurales. L'étude a été menée partout au Canada, mais l'APECA, plus particulièrement, en a financé une partie avec nous. Un volet spécifique de cette étude porte plus précisément sur la situation qui règne dans la région de l'Atlantique. Voilà pour la phase un de l'étude que nous pouvons remettre au comité.
La phase deux, qui est en cours actuellement, porte sur les jeunes des régions rurales eux-mêmes.
De fait, tous les organismes régionaux contribuent au financement de cette étude avec nous. Nous menons une série d'entrevues et de groupes de discussion dans tout le Canada avec des jeunes des régions rurales pour connaître essentiellement leurs recommandations quant à la façon dont ils voient leur avenir dans les collectivités rurales, et quant aux mesures qu'il faudrait adopter au sein de leurs collectivités pour les aider à y rester. Nous cherchons à comprendre ce problème du point de vue des jeunes eux-mêmes. Nous avons entrepris ce volet, et les résultats de cette étude seront disponibles en mars 2002.
Si le comité veut les consulter, nous affichons nos études et nos renseignements sur notre site Web lorsqu'ils sont disponibles. L'un des membres du comité a demandé si l'information est disponible sur le site Web. Oui, bien sûr, de même que les renseignements sur le dialogue et certains autres documents, c'est publié sur le site Web des collectivités rurales. L'information à ce sujet se retrouve dans les documents qui ont été remis aux honorables sénateurs aujourd'hui. Quand l'étude sur les jeunes des collectivités rurales sera terminée, ses résultats seront également publiés.
Le président: J'aimerais poser une brève question dans la même ligne de pensée que le sénateur Oliver. J'ai remarqué que la province de Québec obtient des résultats supérieurs aux autres provinces canadiennes en ce qui concerne les régions rurales. Vous êtes-vous penchés là-dessus? Pourquoi en est-il ainsi? Je remarque que même les membres du Québec sont assez satisfaits de ce qui se passe actuellement en agriculture et de la façon dont le développement rural est abordé au Québec. Avez-vous examiné les mesures favorables que le Québec a prises? Nous avons entendu de nombreux témoins du Québec, et ils sont les premiers à le reconnaître. En fait, ils nous ont même suggéré de tirer profit de l'expérience du Québec. Nous devrions le faire. Qu'en pensez-vous?
M. Doyle: Nous n'avons pas examiné la situation en détail.
Le président: Avez-vous constaté ce fait? J'ai peut-être tort.
M. Doyle: Je pense que vous avez probablement raison. Il y a des différences et ces différences peuvent être spécifiques au Québec. Vous avez probablement raison de dire que l'on peut en tirer profit et appliquer les mesures ailleurs.
Le sénateur Tunney: Pour faire suite à ce que le président vient de dire, cela est absolument vrai, si je me fie à mes années d'expérience. Les agriculteurs du Québec se tirent beaucoup mieux d'affaire en période de prospérité comme en période de difficulté, parce que le gouvernement du Québec accorde plus d'attention et certainement plus de soutien aux régions rurales que les autres provinces du Canada. C'est peut-être plus facile pour le Québec de le faire que pour le Manitoba ou la Nouvelle-Écosse.
Il ne faut pas oublier qu'un très large pan de l'agriculture au Québec fonctionne selon le régime de la gestion des approvisionnements. L'industrie laitière du Québec représente la moitié de l'industrie laitière du Canada. Il y a des exploitations avicoles extrêmement importantes au Québec. Le crédit n'en revient pas au gouvernement du Québec, mais au gouvernement fédéral qui a établi ces plans nationaux. Il se trouve simplement qu'il y a beaucoup plus d'agriculteurs au Québec dans ces deux secteurs de l'agriculture. Cependant, pour les autres, et à leur regret peut-être, le Québec a exagéré à certains égards. Il a accordé plus de prêts, plus de subventions et de financement à de très grandes exploitations porcines et d'élevage de b9uf également. Le Québec ne produit pas de céréales et d'oléagineux comme le reste du Canada. Il achète des céréales à bon marché aux autres provinces, principalement bien sûr à l'Ontario et aux Prairies, ce qui l'avantage par rapport à nous. En outre, le Québec possède indéniablement les lobbyistes les plus crédibles et les plus actifs au Canada. Le syndicat est l'Union des producteurs agricoles, l'UPA.
Le sénateur Tkachuk: Comment un agriculteur de la Saskatchewan pourrait-il en profiter? Pourrait-il établir une petite ferme laitière? Comment ça fonctionnerait? Est-ce que je devrais obtenir un quota et payer plus que ce que vaut la ferme?
Le président: Notre discussion est très intéressante.
Le sénateur Hubley: À la page 4 de votre dialogue sur les régions rurales, j'ai remarqué à la quatrième année que vous prévoyez tenir des conférences régionales. Est-ce fait actuellement?
M. Doyle: Oui, il y en a eu. Une à Cornwallis, dont a parlé le sénateur Oliver au sujet de la région de l'Atlantique. Il y en a eu une en Ontario, une dans les Territoires et une en Colombie- Britannique. Nous avons organisé des conférences régionales. Il y aura une conférence nationale au printemps et M. Mitchell la prépare actuellement.
Le sénateur Hubley: C'était ma deuxième question. Je me demande si vous pourriez envoyer l'invitation au président afin que certains d'entre nous puissent y assister.
M. Doyle: Nous allons transmettre cette demande à M. Mitchell.
Le sénateur Tunney: J'ai assisté à la conférence de North Bay en juillet qui était parfaitement réussie. Je propose qu'on assiste à ces conférences.
Le sénateur Oliver: Est-ce que des recommandations ont été formulées?
Le sénateur Tunney: Oui. Le ministre Mitchell était là. C'est un voisin. Il représente la circonscription voisine.
Le président: Avez-vous assisté à des réunions de municipalités rurales dans les provinces de la Saskatchewan, de l'Alberta et du Manitoba? Elles ont toutes des réunions annuelles dans les collectivités rurales. J'ai assisté à celles de la Saskatchewan. Ces réunions sont très enrichissantes. Les conseillers ruraux ont une très bonne idée de ce qui se passe dans la collectivité rurale.
M. Doyle: Nos conseillers régionaux y assistent. Mon collègue qui travaille à Winnipeg couvre la Saskatchewan et le Manitoba. Il assiste régulièrement aux réunions de l'Association des municipalités urbaines de la Saskatchewan, l'AMUS, en Saskatchewan.
Le président: L'AMUS s'intéresse aux villes et villages, mais les collectivités rurales ou les conseillers ruraux y assistent. Les deux y sont bien représentés, donc ils représentent les régions rurales du Canada.
M. Doyle: Nous assistons à ces réunions.
Le président: Pouvez-vous y participer et obtenir de la rétroaction?
M. Doyle: En général, nous faisons le suivi. M. Mitchell est parfois invité à y prendre la parole. Nous y assistons parce que, comme vous l'avez dit, elles sont une très bonne tribune pour comprendre les enjeux et une partie des renseignements qu'on y recueille est très utile.
Le président: Honorables sénateurs, s'il n'y a pas d'autres questions, je vais remercier les témoins d'être venus comparaître ce matin. J'espère que l'échange a été positif et avantageux pour les régions rurales du Canada. Je vous encourage à continuer le travail, à informer vos ministres au gouvernement et à exercer toute l'influence que vous avez pour aider les collectivités rurales parce que nous faisons face à de nombreux défis. Je vous remercie d'être venus témoigner aujourd'hui.
La séance est levée.