Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule 19 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 17 octobre 2001
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce s'est réuni aujourd'hui à 16 h 10 pour examiner la situation actuelle du régime financier canadien et international.
Le sénateur E. Leo Kolber (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, nous nous réunissons aujourd'hui pour examiner et faire rapport sur la situation actuelle du régime financier canadien et international. Nous entendrons aujourd'hui comme témoin M. Denzil Doyle, de Capital Alliance Ventures Incorporated, qui a déjà comparu devant ce comité à une autre occasion.
M. Denzil Doyle, président du conseil d'administration, Capital Alliance Ventures Inc.: J'ai relu la documentation relative aux témoignages que j'ai rendus en 1999 et depuis ce temps certaines choses ont changé pour le mieux tandis que d'autres n'ont pas changé du tout. Le taux d'impôt applicable aux gains de capital a changé pour le mieux - il a été réduit à deux reprises.
Le président: Accepteriez-vous d'en accorder crédit au comité?
M. Doyle: Certainement, quelqu'un mérite d'en être crédité. J'ai surtout souligné il y a deux ans que les premières lignes du spectre d'investissement avaient été rompues. Il est très difficile au Canada de lancer une nouvelle entreprise de haute technologie. Pour ce faire, il faut pouvoir compter sur les investisseurs du secteur privé, parce que les sociétés d'investissement en capital de risque ne le font pas, nonobstant ce que disent plusieurs d'entre nous qui oeuvrent dans l'industrie du capital de risque. Dans les faits, il n'est pas profitable de partir à zéro dans le secteur de l'industrie de haute technologie, c'est pourquoi nous nous fions sur les investisseurs privés pour le faire. La réduction de l'impôt applicable aux gains de capital a évidemment beaucoup aidé.
Les nouvelles dispositions relatives aux transferts en franchise d'impôt se sont avérées positives, alors qu'il est maintenant possible de transférer un gain de capital d'une société privée contrôlée par des Canadiens pour l'investir dans une autre entreprise à l'intérieur d'un délai prévu et ainsi reporter la taxe sur le gain de capital.
Cette disposition a été changée à deux reprises. Je crois que dans le premier cas il s'agissait d'une disposition de transfert libre d'impôt portant sur approximativement 250 000 $ et que par la suite ce plafond a été augmenté à quelques millions de dollars, ce qui, évidemment, est conforme à ce qui se fait depuis longtemps aux États-Unis et en Grande-Bretagne.
Au cours des quelques dernières années, la taxe sur les options d'achat d'actions a aussi été modifiée pour qu'une personne ne soit pas tenue responsable lorsqu'elle exerce une option d'achat même si elle n'a encore fait aucun profit. Il s'agit là d'un changement pour le mieux.
Le programme de crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, que j'ai déjà décrit de façon très négative mais aussi de façon très juste, est maintenant administré par un nouveau conseil de direction qui a adopté une approche novatrice à l'égard du concept de la recherche expérimentale et du développement. Ce programme fonctionne assez bien et est avantageux pour les contribuables canadiens. Ce n'est pas comme si les entreprises de haute technologie détroussaient les contribuables canadiens, parce que le programme est assujetti à des règles bien comprises et est maintenant bien administré.
Je me suis aussi montré plutôt sévère à l'égard du Programme canadien d'investissement communautaire qui a avait été mis en place. Il s'agissait d'un programme pilote dans le cadre duquel approximativement 20 communautés canadiennes ont bénéficié de subventions du gouvernement fédéral afin d'améliorer la communication entre les «investisseurs providentiels» locaux - il s'agit de personnes qui financent le démarrage d'entreprise. Le problème, c'est que les personnes qui démarrent des entreprises sont généralement très jeunes et ne communiquent habituellement pas avec les personnes plus âgées, comme moi, qui sont souvent des investisseurs providentiels. Il y avait donc un problème de communication.
Ce programme avait pour objectif de faciliter la communication entre les investisseurs providentiels et les entrepreneurs. Je l'ai critiqué surtout parce que je croyais qu'il fallait en premier lieu régler le problème de base - pour que les investisseurs providentiels s'impliquent, il fallait que leur participation en vaille la peine. C'est un peu comme avoir un pied sur l'accélérateur et l'autre sur le frein - il s'agissait de motiver les communautés à favoriser la communication entre les deux parties alors que, dans les faits, les investisseurs providentiels se voyaient dès le départ confrontés à d'importants facteurs dissuasifs.
Certaines initiatives ont bien fonctionné et il ne faut pas en diminuer l'importance. Il existe certains secteurs qui méritent toujours notre attention. Il serait important que nous favorisions la participation de ce que j'appellerais des «récepteurs à propriété canadienne». À l'heure actuelle, lorsqu'une entreprise est formée, c'est un groupe d'investisseurs providentiels qui, la plupart du temps, s'unissent pour la lancer. Ces derniers investissent dans sa croissance pendant une ou deux années pour permettre d'augmenter le volume des ventes et les sociétés d'investissement en capital-risque entrent par la suite en jeux pour améliorer le bilan de façon à pouvoir avoir accès au crédit banquier. Les banques entrent ensuite dans le portrait.
Il y a quelques années je vous ai parlé de divers intervenants et vous ai décrit la façon dont ils participent à ce spectre d'investissement. Éventuellement, il devient souhaitable de lancer un appel public à l'épargne, ce qui vous permet de vendre vos actions au public sur le marché boursier. Or, pour plusieurs raisons, le marché boursier ne fonctionne pas lorsqu'il s'agit de haute technologie. Les marchés boursiers canadiens n'offrent vraiment aucun débouché aux investisseurs en capital-risque et aux investisseurs providentiels.
Si vous n'avez pas d'objection, j'aimerais vous relater une histoire personnelle qui peut illustrer plusieurs des points que j'ai soulevés jusqu'à maintenant, et d'autres que j'entends soulever plus tard. Cette histoire illustre plus particulièrement la situation des récepteurs.
À l'heure actuelle, si vous réussissez à faire augmenter les ventes d'une entreprise jusqu'à 20 millions de dollars, vous devriez normalement pouvoir lancer un appel public à l'épargne sur les marchés boursiers, qu'il s'agisse de la Bourse de Toronto ou du CDNX. Par contre, le volume des transactions dans le domaine de la haute technologie est très faible. En d'autres mots, la communauté des investisseurs ne se sent pas encore suffisamment à l'aise lorsqu'il s'agit d'acheter ou de vendre des actions de haute technologie. Le pauvre vieil investisseur en capital-risque court le risque de ne plus être propriétaire que de 20 ou 30 p. 100 de la société au moment où elle devient publique, pour ensuite s'apercevoir que la valeur de ses actions va s'effondrer s'il essaie de les vendre sur le marché.
Ainsi, de plus en plus d'investisseurs en capital-risque hésitent à faire appel public à l'épargne. À l'heure actuelle, le marché boursier souffre d'une telle confusion qu'il n'est même pas question de faire appel public à l'épargne dans ce cas là, mais les investisseurs en capital-risque ont même commencé il y a un an ou deux à envisager d'autres stratégies pour éviter de faire appel public à l'épargne sur le marché boursier.
Il s'agit là d'un problème sérieux. Il nous faut pouvoir attirer des récepteurs canadiens. J'ai toujours dit que si nous avions davantage de sociétés importantes de la taille de Nortel, par exemple, nous pourrions acheter ces sociétés, ce qui fournirait un exutoire aux investisseurs.
En 1983, j'ai fondé une société en partenariat avec une autre personne. Nous avons investi environ 400 000 $ de notre argent dans cette entreprise et l'avons fait prospérer pendant une période de 18 mois. Nous l'avons fait croître jusqu'au point où le produit se vendait bien, et il nous a alors fallu trouver davantage d'argent. Je suis allé voir un groupe de mes amis - environ 15 à 20 soi-disant investisseurs providentiels - qui ont investi un autre 400 000 $ dans la société. Croyez-le ou non, c'est là tout l'argent qu'il a fallu investir dans cette entreprise. Aujourd'hui cette société emploie un peu plus de 100 personnes. Pendant cette période de 18 ans, excluant la TPS, l'entreprise a généré environ 25 millions de dollars en impôt des sociétés et en impôt des particuliers pour les deux paliers de gouvernement. La société s'est avérée rentable, mais tous les profits ont été réinvestis dans l'entreprise. C'est typiquement ce qui se passe dans le cas des entreprises de haute technologie où l'on ne déclare habituellement pas de dividendes. Ni mon partenaire ni moi-même ne souhaitions l'administrer; il a donc fallu trouver des administrateurs professionnels. Nous avons versé à ces administrateurs des salaires élevés en plus de leur consentir des actions de la société.
La société en est maintenant rendue au point où, normalement, il pourrait être possible de faire appel public à l'épargne sur le marché boursier canadien. Les Canadiens pourraient alors faire des profits en achetant ou vendant ces actions. Compte tenu des possibilités actuelles, le seul exutoire pour cette société serait de faire de la publicité pour qu'elle puisse être vendue à une société américaine. J'ai regret de le dire, mais voilà où nous en sommes rendus.
Le sénateur Oliver: À combien se chiffrent les ventes annuelles brutes?
M. Doyle: Approximativement 20 millions de dollars. Cela représente tout un changement par rapport à il y a 20 ans, alors que ceux qui montaient des entreprises lançaient des appels publics à l'épargne sur les marchés boursiers et c'est cela qui constituait leur porte de sortie. Ce n'est maintenant plus le cas. Dieu seul sait ce que les Américains vont en faire. Ils vont probablement tout chambouler pour laisser un peu de R-D au Canada, à cause des incitatifs fiscaux dans ce domaine. Par contre, la vente et la commercialisation se feront au sud de la frontière et tous les bons emplois de gestion se déplaceront en conséquence.
C'est un peu tragique. Si je voulais insister sur une chose dans l'exposé que je vous présente cet après-midi, ce serait sur une solution aux problèmes des récepteurs. À l'heure actuelle, nous sommes de plus en plus perçus comme une «équipe-école» par l'industrie de la haute technologie des États-Unis. Si c'est ce que nous voulons, disons-le. Par contre, nous pouvons faire beaucoup mieux que cela au Canada.
En fait, nous essayons entre autres désespérément d'attirer le capital de risque étranger et américain - non seulement le capital de risque mais aussi le financement par fonds de roulement - au Canada. Il y a un groupe de représentants d'Industrie Canada qui voyage autour de la planète afin d'attirer l'investissement vers l'industrie de la haute technologie. Ma question est la suivante: Pourquoi n'allez-vous pas à Toronto pour enseigner aux gens de Toronto comment investir dans la haute technologie? La communauté d'investisseurs de Toronto peut vous dire comment financer une mine d'étain en Bolivie, mais pensez-vous qu'ils peuvent acheter ma société de haute technologie? Ils devraient pouvoir le faire, parce que ceux qui achètent ma société de haute technologie aux États-Unis ne sont pas des spécialistes du domaine technique, mais plutôt des financiers. Il s'agit de personnes qui mettent en commun des capitaux et forment une société de portefeuille. Cette société de portefeuille a acheté un certain nombre de soi-disant sociétés de communication sans fil, qui sont toutes complémentaires les unes avec les autres. Ils vont former un conglomérat de sociétés.
Pourquoi ne pouvons-nous pas favoriser ce type de développement avec notre argent canadien plutôt que de nous en servir pour investir dans les mines d'étain en Bolivie? Je ne sais pas s'ils cherchent ou non des mines d'étain dans ce pays, mais j'ai l'impression que c'est ce qu'ils font avec leur argent. Cet argent n'est certainement pas investi dans l'industrie de la haute technologie. Pour souligner l'importance de ce point, aux États-Unis, l'industrie du capital de risque se finance à 60 p. 100 grâce aux régimes de retraite. Au Canada seulement 5 p. 100 de notre argent nous vient de fonds de retraite. Nous disposons d'énormes fonds de capitaux qui servent de toute évidence à autre chose qu'à investir dans la nouvelle économie.
Je vais conclure mon exposé là-dessus. J'espère que vous avez des questions.
Le sénateur Oliver: Comme vous, j'ai relu le compte rendu de votre dernier témoignage. Je pense que vous avez fait des commentaires très utiles. Il y a quelques points que vous avez soulevés la dernière fois mais sur lesquels vous n'avez fait aucun commentaire aujourd'hui. Vous étiez inquiet pour les investisseurs providentiels qui pouvaient être tenus responsables alors que les directeurs d'entreprises ne disposent que de peu de moyens pour se défendre. Depuis ce temps, ce comité a adopté un projet de loi qui autorise la défense de diligence raisonnable et qui permet aussi de répartir la responsabilité. Étiez-vous au courant de cela? Est-ce que cela soulage ou atténue certaines de vos inquiétudes concernant la possibilité que des investisseurs providentiels puissent être tenus responsables s'ils participent au démarrage d'une entreprise émergente?
M. Doyle: Croyez-le ou non, cela se trouve dans mon dossier de lecture pour la fin de semaine. Je ne connais pas la réponse à votre question, mais il est encourageant de constater que l'on reconnaît maintenant qu'il s'agit là d'un autre obstacle majeur. Je ne saurais vous dire si cette mesure est positive ou non.
Le sénateur Oliver: Vous avez aussi émis des commentaires sur les gains de capitaux. Comme notre président l'a signalé, ce comité a joué un rôle important pour persuader le ministre des Finances de réduire le taux d'inclusion.
Pour ce qui est de vos préoccupations concernant l'injection de nouveaux fonds dans la nouvelle économie, est-ce que cette réduction s'est avérée suffisante? Est-ce que cette mesure est efficace dans ce contexte? Ou ne s'agit-il que d'une première étape?
M. Doyle: Si vous me permettez de me vanter pendant quelques secondes, mon partenaire et moi-même avons injecté 400 000 $ dans cette société. Si nous n'avions pas investi ce 400 000 $, le Canada n'aurait pas perçu en impôt, au cours des dernières 18 années, ces 25 millions de dollars. Cette société aurait été bâtie aux États-Unis. Pourtant, il m'a fallu attendre 18 ans pour récupérer mon argent. J'ai l'impression de ne même plus posséder la moitié de cette société. Au fil des ans, en bâtissant ces entreprises, il m'a fallu donner une partie de mes actifs aux partenaires providentiels auxquels je m'étais associé, il m'a fallu aussi consentir aux gestionnaires des options d'achat d'actions, en plus d'offrir un régime d'actionnariat privilégié aux employés de la société. Je serais embarrassé de vous dire combien peu d'actions il me reste de cette société aujourd'hui, même s'il n'a pas été nécessaire d'avoir recours à du financement externe, alors qu'il m'a fallu attendre tout ce temps.
Si l'on permettait aux investisseurs providentiels de récupérer au moins les capitaux de lancement grâce à une quelconque formule, cela servirait mieux les intérêts du Canada. Par exemple, 400 000 $ ont été injectés dans cette société dans ce cas particulier. Si cet investissement produit 1 million de dollars d'impôt pour les paliers les plus élevés de gouvernement, permettez-moi de partager ce revenu d'impôt et remettez-moi 400 000 $ de sorte que je puisse le réutiliser pour profiter d'une autre occasion semblable. Bien que j'avance en âge, j'investirai probablement une bonne partie de l'argent reçu dans un autre investissement providentiel la semaine prochaine. Vous devez profiter de nous. Si nous sommes suffisamment bêtes pour agir de cette façon, vous devriez nous encourager à continuer.
Le sénateur Oliver: Vous avez dit qu'il n'existait aucune stratégie de sortie pour l'investisseur en capital-risque qui pourrait éventuellement posséder jusqu'à 20 ou 30 p. 100 des actions d'une société qui serait sur le point de lancer un appel public à l'épargne, alors qu'au Canada ces sociétés orientées vers la nouvelle économie hésitent à choisir cette option. À part le placement initial de titres, quelles sont les autres stratégies de sortie que vous aviez envisagées?
M. Doyle: Vous pouvez vendre à une société américaine.
Le sénateur Oliver: Je cherchais plutôt une solution canadienne.
M. Doyle: Vous pourriez l'inscrire au Nasdaq. C'est là que les choses vont bouger. Malheureusement, ça bouge un peu trop au Nasdaq. Le Nasdaq est bien connu pour le nombre de ventes à découvert qui s'y font. Lorsqu'une action est inscrite au Nasdaq, les vendeurs à découvert en font gonfler la valeur. Si une action est inscrite à la bourse à une valeur de 10 $, ils vont en faire grimper la valeur à 20 $ en répandant des rumeurs positives, mais lorsque l'action aura atteint la valeur de 20 $ ils se mettront à ternir l'image de la société en question et la valeur de l'action tombera à 5 $. En parallèle, il existe une autre industrie aux États-Unis. Certains avocats attendent que la haute direction de la société fasse un commentaire négatif ou émette une opinion erronée pour ensuite prétendre qu'elle a présenté de manière inexacte la situation financière de la société. Ces avocats se spécialisent dans les recours collectifs portés par des groupes d'investisseurs qui ont perdu de l'argent suite à la baisse des cours.
Je ne connais pas les statistiques actuelles parce que le Nasdaq a pris des mesures pour lutter contre la vente à découvert. Pourtant, en 1995, j'ai lu un rapport attestant que 90 p. 100 des nouvelles sociétés inscrites au Nasdaq étaient visées par un recours collectif dans la première année. En général, ce n'est pas un endroit de tout repos pour les petites entreprises de haute technologie. Je pourrais probablement inscrire ma petite société au Nasdaq, mais je ne veux pas avoir à affronter cette réalité.
Le sénateur Fitzpatrick: J'ai deux questions au sujet de ce problème de fonds à amasser. Je soupçonne qu'il n'y a pas beaucoup d'investisseurs providentiels de ce temps-ci compte tenu de ce qui est survenu aux titres de haute technologie au cours de la dernière année. Vous avez abordé la question de la difficulté de faire appel public à l'épargne. Une partie de cette difficulté, d'après moi, est attribuable aux exigences à satisfaire pour s'inscrire à la cote, et une fois que vous êtes inscrit, par exemple, à la Bourse de Toronto, les exigences sont passablement dispendieuses pour les entreprises plus petites.
J'aimerais savoir ce que vous pensez des règlements que vous devez respecter au sujet des bourses. Je dois vous signaler d'ailleurs que le comité ne peut rien faire à ce sujet. Vous avez fait une proposition en vertu de laquelle vous pouvez récupérer les capitaux de démarrage à l'aide de facilités de paiement ou de facilités non fiscales. À mon avis, le véritable problème se situe maintenant au niveau de la disparition des investisseurs providentiels conjuguée aux difficultés de s'inscrire aux bourses au Canada et d'y rester.
M. Doyle: Vous avez tout à fait raison. Il n'y a certainement plus autant d'investisseurs providentiels qu'auparavant. Ils s'évanouissent rapidement à mesure que se poursuit l'effondrement. Cependant, si vous allez dans des endroits comme en Alberta, il y a encore des gens qui font de l'argent avec le pétrole. Vous pourriez peut-être aider ces gens à investir dans la haute technologie. C'est l'une des choses que ce programme d'investissement communautaire a réalisées. Il y aura toujours des investisseurs providentiels, si vous voulez. Soyons bons à leur endroit.
Le point que vous soulevez au sujet des règlements lorsque vous faites appel public à l'épargne, je ne pense pas qu'ils soient aussi dispendieux que le laissent entendre les gens. Vous entendez des entreprises s'en plaindre énormément. Cependant, si une entreprise est bien gérée, la plupart des rapports qu'elle doit produire à la bourse sont ceux qu'elle aurait à produire quand même en tant qu'entreprise privée.
J'insiste sur le fait que notre petite entreprise fait rapport tous les mois au conseil d'administration, du moins pour ce qui est de certains paramètres importants tels que les ventes, les commandes, les stocks et tout le reste. Bien entendu, nous avons nos rapports trimestriels. À toutes fins utiles, cette petite entreprise se comporte comme si elle était une société faisant appel public à l'épargne, et elle n'en souffre pas le moins du monde.
Il est vrai que certaines autres stipulations concernant l'octroi d'options d'achat d'actions et l'approbation des actionnaires coûtent un peu plus cher si vous êtes une entreprise faisant appel public à l'épargne. Cependant, je ne pense pas que cela vous empêche de fonctionner.
Le sénateur Fitzpatrick: Je pense davantage à la circulaire d'information que vous devez fournir à la gestion ainsi qu'au prospectus et à son coût. Ce qui se passe en Alberta, c'est que de nombreux Albertains qui ont fait de l'argent en mettant sur pied et en vendant leurs sociétés pétrolières restent maintenant dans le secteur privé. Ils ne s'intéressent plus à devenir des sociétés ouvertes en raison des problèmes liés aux responsabilités des administrateurs, sans oublier ceux qui ont trait aux règlements des bourses et des commissions des valeurs mobilières. Je pense qu'ils se disent, «nous allons essayer de rester une compagnie fermée et être à l'affût des acquisitions par quelqu'un d'autre».
M. Doyle: C'est sous cet aspect que les entreprises de haute technologie sont différentes de celles des ressources, par exemple. S'il s'agissait d'une entreprise de l'industrie des ressources qui me versait des dividendes, je ne m'en départirais jamais. Cependant, elle ne paie pas de dividendes et je veux ravoir mon argent et tout l'argent de mes investisseurs providentiels qui ont coinvesti avec moi il y a près de 20 ans. La situation est un peu différente dans le cas des entreprises de haute technologie. La seule façon pour nous de récupérer notre argent c'est le gain en capital.
Le sénateur Angus: Le point que soulève le sénateur Fitzpatrick est tout à fait fondé. Les coûts d'un placement initial aujourd'hui au Canada dans le cas des entreprises de démarrage du secteur de la technologie, ou des entreprises quel que soit leur domaine, sont supérieurs à 100 000 $. L'argent provenant des investisseurs providentiels - ou l'argent provenant de n'importe quelle source de placement privée - coûte tellement cher que, comme l'a dit le sénateur Fitzpatrick, même dans le secteur pétrolier ils ne le font plus. Je ne pense plus que cela se fasse nulle part. C'est absolument étouffant.
Si vous aviez une suggestion à cet égard, nous vous en serions reconnaissants. Ce n'est pas tellement le problème des règlements, mais plutôt celui des honoraires professionnels pour les comptables, les avocats, ainsi que les coûts pour obtenir des décisions et des mesures visant à protéger l'investisseur public.
M. Doyle: Il y a aussi le financement qui se greffe à cela. Vous pouvez obtenir ce que nous appelons du «financement secondaire» en vertu duquel, immédiatement avant de faire appel public à l'épargne, vous pouvez vous présenter devant une entreprise de placements à risque et dire: «J'ai besoin de tout cet argent pour rédiger mon prospectus et tout le reste, et il n'y a pas d'argent dans l'entreprise.»
C'est ce que l'on appelle le financement secondaire et cette partie du champ d'activités au Canada est surchauffée. Il y a trop d'activités là-dedans. C'est dispendieux, mais je ne crois pas que ce soit prohibitif. Cette petite entreprise dont je parle a dû se défendre l'année dernière contre une poursuite à hauteur de 600 000 $. Nous sommes devenus tellement dominants dans un des marchés qu'un grand concurrent américain a dit, «nous devons arrêter ces gars-là». Ils ont prétendu que nous avions enfreint un de leurs brevets, ce qui n'avait aucun sens. C'est comme un fabricant de brouettes qui enfreint un brevet du domaine de l'automobile. Nous savions que nous avions raison. Nous nous sommes défendus et nous avons gagné, mais cela nous a coûté 600 000 $. C'est une entreprise très rentable. Si votre entreprise est rentable, vous devriez n'avoir aucun problème à faire appel public à l'épargne.
Le sénateur Angus: Je pense que vous avez raison. Idéalement, si vous avez un chiffre d'affaires de 20 millions de dollars, vous ne devriez avoir aucune difficulté.
M. Doyle: Votre point est tout à fait fondé. Cela coûte trop cher.
Le sénateur Angus: De toute évidence, il y a de nombreux facteurs qui interviennent de nos jours. Apparemment, notre économie tourne très au ralenti, pour ne pas prononcer le mot en «R». Nous avons eu les incidents du 11 septembre et tout ce qui s'est produit depuis.
Il me semble que les sources d'argent se sont complètement taries. J'exerce le droit à Montréal. Il n'y a plus une petite entreprise qui paie son loyer. Elles sont acculées au mur. C'est tout simplement la catastrophe.
Une des choses que votre comité essaie de réaliser grâce à cette étude, c'est de mettre en évidence le fait qu'il y a quelque chose qui ne va pas au Canada pour attirer les investissements nécessaires pour que ces jeunes entreprises démarrent et produisent et, par conséquent, évitent que nos bons voisins du Sud viennent chercher nos cerveaux, nos talents et nos idées.
M. Doyle: Je n'hésite pas à vous suggérer d'examiner ce que j'appelle le «programme de crédit d'impôt pour investisseurs providentiels». Il comporte plusieurs sous-produits. Les faussaires pourraient s'en donner à coeur joie. Des gens vont mettre sur pied de nouvelles entreprises et demander des crédits d'impôt. Nous devons trouver une façon d'éviter cette situation.
Cependant, ce que j'aimerais pour ce qui est de donner un crédit d'impôt aux investisseurs providentiels qui leur permettrait de récupérer leur argent au bout de trois ou quatre ans en partageant les recettes fiscales du gouvernement, cela obligerait les investisseurs à vraiment faire preuve de sérieux dans la création d'entreprises. Comme nous le savons aujourd'hui, de nombreux investisseurs providentiels ne font que lancer de l'argent à un paquet de jeunes pour s'en débarrasser, et ils n'ont aucun incitatif.
Je pense que dans ce cas-ci, l'investisseur dirait: «Si je dois récupérer mes 400 000 $ sous la forme d'un crédit d'impôt étalé sur quatre ans, cela vaut peut-être la peine pour moi de mettre sur pied un bon conseil d'administration et d'y consacrer des efforts.» Cela s'appliquerait uniquement à la toute première tranche d'argent investie dans une entreprise. L'incidence de ce mécanisme serait qu'il leur faciliterait la tâche pour amasser la première tranche d'argent et que ce serait un peu plus difficile par la suite, ce qui est parfait. En ce moment, c'est tout simplement l'opposé. Plus vous montez dans l'échelle, plus c'est facile.
Le sénateur Angus: Je trouve votre exposé fascinant. La première fois que vous avez témoigné, vos propos nous ont été très utiles.
Pourriez-vous m'expliquer le concept des récepteurs à propriété canadienne, à l'aide d'un exemple concret?
M. Doyle: Dans des cas comme Northern Telecom et d'autres grosses entreprises de la haute technologie, une façon d'obtenir des liquidités c'est d'acheter des petites entreprises, de les absorber et d'en faire de nouvelles gammes de produits.
Le sénateur Angus: Est-ce le concept d'une grosse entreprise biopharmaceutique qui fait l'acquisition d'une petite?
M. Doyle: Tout à fait.
Le sénateur Angus: Elles s'entendent sur une gamme de produits. Ces grosses entreprises se font habituellement critiquer pour tuer les petites et voler leurs idées.
M. Doyle: Vous remarquerez que j'ai dit «récepteurs à propriété canadienne». Il est intéressant de constater que les personnes qui achètent mon entreprise ne sont pas des spécialistes de la haute technologie. Ce n'est pas une entreprise comme Nortel ou quoi que ce soit du genre. En réalité, ce sont des banquiers. Ils ont décidé de regrouper des capitaux, d'acheter ces entreprises et de voir à leur bonne gestion. Ils veulent avoir toute une panoplie de ces entreprises.
Ils sont particulièrement intéressés à cette entreprise parce qu'elle possède une technologie sans fil tout à fait unique. Ils ont déjà acheté une entreprise au Maryland qui possède une technologie complémentaire. Pourquoi ne pouvons-nous pas faire cela avec nos capitaux canadiens au lieu d'acheter des mines d'étain en Bolivie? J'espère que nous achetons effectivement des mines d'étain en Bolivie, mais je suis convaincu que vous voyez ce que je veux dire.
Il y a quelques années, j'ai assisté à un exposé à Toronto. Un type parlait de la magnifique occasion d'investir qui s'offrait aux Canadiens pour aider à construire l'aéroport à la Havane. Pour construisons-nous des aéroports à La Havane alors que nous ne savons pas financer une nouvelle économie au Canada? C'est le problème fondamental.
Le sénateur Kroft: Avant de passer à un autre sujet, j'aimerais vous suggérer qu'il y a peut-être un envers à la médaille. Il y a de nouvelles entreprises qui sont en train de se développer et il y a des entreprises qui se sont développées et qui sont prêtes pour un autre niveau d'investissement. Un des aspects favorables que j'ai observés au fil des ans, c'est que les entrepreneurs et les promoteurs de ces entreprises n'ont plus les attentes extravagantes qu'offraient les marchés gonflés de la fin des années 90. En réalité, nous avons un marché plus réaliste dans lequel l'investisseur privé qui s'est attaché aux valeurs plus traditionnelles pourrait avoir l'occasion de voir quelques-unes de ces entreprises alors que ce n'était pas le cas auparavant parce qu'ils se dépêchaient à profiter des marchés énormément surévalués. Ce n'est qu'une observation personnelle.
L'aspect auquel j'aimerais m'attarder, ce sont les fonds de capital de risque des travailleurs. Vous en avez parlé lors de votre dernier passage. Si je comprends bien, vous étiez alors et êtes toujours à la tête de l'une de ces entreprises.
M. Doyle: Oui, je suis le président de Capital Alliance Ventures.
Le sénateur Kroft: Vous avez de toute évidence connu le succès. Ce fut en quelque sorte une histoire à succès et insuccès. Vous avez laissé entendre que cette formule comportait des lacunes ou des problèmes et vous nous en aviez parlé lors de votre témoignage précédent.
J'aimerais que nous en reparlions. Les statistiques quant à ce qui est arrivé à la disponibilité des fonds de risque au Canada avant l'arrivée des fonds de capital de risque des travailleurs et après sont passablement étonnantes. Il nous faudrait une meilleure analyse pour déterminer si la totalité ou une portion de cette croissance des fonds de capital de risque disponibles était attribuable aux fonds de capital de risque des travailleurs, mais c'était sûrement une partie très importante.
Les fonds de capital de risque disponibles ont connu un très grand essor tout au long des années 90, période pendant laquelle les fonds de capital de risque des travailleurs ont pris de l'ampleur. Je parle maintenant d'un point de vue régional - qui constitue une part importante de notre responsabilité en tant que sénateurs. Nous avons entendu de nombreux témoignages au sujet de ce projet et d'autres qui mentionnaient que la disponibilité des fonds de risque est très inégale, selon la géographie. Divers témoins qui ont comparu devant nous ont consacré beaucoup de temps et d'énergie à analyser cette situation. Ils ont laissé entendre qu'il y a énormément de capitaux de risque disponibles pour les bons projets si vous vous trouvez à Toronto, à Montréal, à New York, à Chicago, ou même peut-être à Vancouver. Cependant, à quelques rares exceptions, lorsque vous vous trouvez dans des petits centres, c'est beaucoup plus difficile, et c'est directement proportionnel.
Étant de Winnipeg, je suis au courant de cette réalité. Je suis au courant de l'énorme succès que remporte le fonds de capital de risque des travailleurs au Manitoba, le «Crocus Fund», non seulement pour ce qui est de l'industrie mais aussi sur le plan du profil qu'il a acquis dans des projets d'investissement très publics. Ce fonds est un intervenant majeur dans la construction d'un nouveau stade au centre-ville de Winnipeg et d'autres projets pour lesquels il y a un niveau de risque élevé, mais une orientation communautaire.
J'aimerais que vous fassiez le point sur l'aspect régional. Que pensez-vous des fonds de capital de risque des travailleurs aujourd'hui? Nous diriez-vous plus particulièrement si vous pensez qu'ils pourraient jouer un rôle spécial dans les régions du pays où les fonds privés ne sont pas facilement disponibles?
M. Doyle: Le fonds de capital de risque des travailleurs constitue un excellent programme. Il est un peu lourd sur le plan administratif. Dans notre propre fonds, nous avons amassé environ 50 millions de dollars sur cinq ans. À cette date-ci l'année dernière, ces 50 millions de dollars valaient environ 95 millions de dollars. Aujourd'hui, c'est environ 75 millions de dollars. Nous avons été le fonds de capital de risque des travailleurs le plus performant, que je sache, quoique Crocus a très bien fait également.
Cependant, c'est lourd sur le plan administratif. J'ai 13 000 actionnaires et il m'en coûte 20 000 $ chaque fois que nous montons une campagne de publipostage auprès d'eux. De plus, nous avons beaucoup de rapports à produire pour les deux paliers de gouvernement. L'administration est un peu lourde.
Un des défis pour le gouvernement pourrait être de se fier à toute l'expérience acquise. Le fonds de capital de risque des travailleurs a créé une véritable expertise dans la gestion des capitaux de risque. Nous devrions maintenant trouver des façons d'encourager les fonds de pension à affecter des fonds communs d'immobilisation à ces gestionnaires. Par exemple, dans ma propre entreprise, une société de gestion, Capital Alliance Management Inc., gère l'argent mis en commun. Ce serait magnifique si Capital Alliance Management Inc. pouvait convaincre un fonds de pension de lui laisser gérer 20 ou 30 millions de dollars de ses fonds.
Le défi pour le gouvernement serait de trouver le deuxième niveau de fonds de risque des travailleurs parce que tous ces capitaux investis dans les fonds de pension n'interviennent pas dans la nouvelle économie. Ils n'interviennent aucunement dans les capitaux de risque.
Sur le plan de la régionalisation, le Crocus Fund, par exemple, a créé à Winnipeg une culture du capital de risque. C'est un pas dans la bonne direction, mais je n'ai pas de solution rapide pour décentraliser l'industrie du capital de risque au Canada.
J'aimerais la comparer à l'industrie du capital de risque aux États-Unis. Là-bas, dans les années 50, lorsqu'on a inventé le capital de risque, tout se jouait à Wall Street. Si vous étiez à Boston ou à Chicago et vous vouliez du capital de risque, vous deviez vous rendre à Wall Street. Lorsque l'activité s'est déplacée vers Boston, ensuite vers Silicon Valley, l'industrie du capital de risque a suivi. Si vous allez aux États-Unis aujourd'hui, vous ne trouverez aucun capital de risque sur Wall Street parce qu'il est complètement réparti dans toute l'industrie de la haute technologie.
Par contre, au Canada - et cela me fait vraiment mal de le dire -, la plus grande partie du capital de risque est encore à Bay Street. Je ne suis pas certain de la solution à ce problème, mais je vous lance le défi. Si vous êtes sur Bay Street à la recherche d'investissements dans le capital de risque, il est peu probable que vous cherchiez du côté du Manitoba voyez-vous. Je n'ai pas de bonne solution à ce problème.
Le sénateur Kroft: J'ai une autre question sur le sujet des fonds de capital de risque des travailleurs. Dans votre portefeuille d'entités émettrices, y a-t-il beaucoup de situations dans lesquelles, selon vous, les investisseurs traditionnels du capital de risque n'auraient pas investi?
M. Doyle: Oui.
Le sénateur Kroft: La caractéristique unique des fonds de capital de risque des travailleurs est que l'argent va à l'entreprise.
M. Doyle: Oui, je pense que la gestion des fonds de capital de risque des travailleurs ajoute beaucoup de valeur. De toute évidence, nous nous intéressons activement à nos entités émettrices en faisant partie de leurs conseils d'administration et en disant doucement au président qu'il devrait se retirer et chercher un autre emploi pour que quelqu'un d'autre puisse gérer l'entreprise.
Nous avons investi dans près de 25 entreprises en tout. Nous en avons perdu quatre et les 21 qui restent sont toujours la raison d'être du cours supérieur de notre valeur, si vous voulez. De ces 21 entreprises, je pense qu'il y en a au moins trois ou quatre qui n'auraient pas reçu de financement si nous n'étions pas intervenus. Une entreprise d'Ottawa, qui fabrique des caméras nucléaires pour les diagnostics dans le domaine biomédical, est en train de mettre au point une caméra qui, selon nous, décèlera le cancer du sein chez les femmes de deux à cinq ans plus rapidement que les actuels systèmes de détection. Une femme peut avoir le cancer du sein pendant neuf ans avant que le problème soit connu, et l'actuelle technologie ne peut pas le déceler plus tôt. Avec cette nouvelle caméra, nous croyons que nous pourrions le faire de deux à cinq ans plus tôt.
Une entreprise de ce genre comportait un risque élevé pour nous. Nous avons dépensé beaucoup de temps à mettre en place de bons gestionnaires et de bons procédés, mais nous croyons que ce sera une entreprise gagnante. Les fonds de capital de risque des travailleurs ont réussi à faire en sorte que l'argent se rapproche des gestionnaires. Dans certains cas, si vous ne savez pas ce que vous faites, vous pouvez causer plus de tort que de bien à une entreprise. Cependant, nous pensons que nous savons ce que nous faisons.
Le président: Merci, monsieur Doyle.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.