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SECD - Comité permanent

Sécurité nationale, défense et anciens combattants

 

Délibérations du comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense 

Fascicule 14 - Témoignages de l'après-midi


OTTAWA, le lundi 6 mai 2002

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 14 heures afin d'examiner, pour ensuite en faire rapport, sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nous sommes le premier comité sénatorial permanent à recevoir le mandat d'examiner les questions de la sécurité et de la défense. Nous avons récemment conclu une étude, menée sur sept mois, des grands enjeux auxquels se trouve confronté le Canada, étude qui a donné lieu à un rapport intitulé: L'état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense. Au cours de cette étude, qui nous a amenés à tenir 170 heures de réunions, nous avons rencontré 204 personnes d'un bout à l'autre du pays ainsi qu'à Washington.

Au fur et à mesure que l'étude avançait, il devenait de plus en plus clair que l'orientation et la coordination des activités par l'exécutif sont nécessaires en cas d'incident de portée nationale, qu'il s'agisse de catastrophes naturelles, comme des tempêtes de glace, des inondations ou des tremblements de terre, des accidents, tels que des déraillements entraînant le déversement de substances toxiques, ou d'actes terroristes prémédités, comme les événements du 11 septembre.

Nous avons constaté qu'il n'existe aucune politique de sécurité nationale permettant aux organismes à tous les paliers de gouvernement de coordonner efficacement leurs efforts.

Vu l'importance des questions liées à la sécurité nationale et la nécessité d'avoir des politiques et procédures en place avant que des incidents se produisent, notre comité a recommandé qu'une étude soit menée en vue d'élaborer une politique de sécurité nationale qui tienne compte du rôle de tous les paliers de gouvernement.

Le Sénat était d'accord avec notre recommandation et a demandé au Comité de la sécurité et de la défense nationales d'examiner l'opportunité d'une politique de sécurité nationale. C'est ainsi que nous lançons aujourd'hui cette étude.

Nous accueillons cet après-midi M. Fantino, chef de police de la Ville de Toronto, qui compte l'une des plus importantes polices municipales de toute l'Amérique du Nord. La Police de Toronto compte plus de 5 000 agents et plus de 2 000 employés civils qui sont chargés d'assurer des services de police et de maintien de l'ordre à presque 2,5 millions de personnes.

L'un des éléments de l'étude que nous menons sur la politique de sécurité nationale consiste à examiner le rôle de tous les paliers de gouvernement. En tant que premier intervenant, M. Fantino nous entretiendra des défis auxquels se trouve confrontée une importance force de police dans des situations exigeant une intervention d'urgence.

Le chef Julian Fantino, Service de Police de Toronto: Honorables sénateurs, je voudrais d'entrée de jeu vous remercier de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de comparaître devant le comité pour vous faire part de mes vues et de mon expérience touchant des questions qui me semblent être pertinentes pour l'importante étude menée par votre comité.

Je voudrais également vous remercier de m'avoir fait parvenir votre rapport. Il ouvre de nouvelles perspectives sur la situation actuelle et il m'a fait grandement apprécier le travail qui est accompli dans ce domaine.

Comme je vous l'ai indiqué dans ma lettre du 27 mars 2002, à mon avis, l'étude menée par le comité sur la sécurité nationale doit également porter sur des questions analogues qui sont jugées très pertinentes par les polices locales. Dans ma lettre du 14 février 2002, que j'ai fait parvenir aux sénateurs et députés, ainsi qu'aux députés de l'Assemblée législative de l'Ontario représentant la région de Toronto, j'avance des arguments qui me semblent assez convaincants sur les raisons pour lesquelles des polices locales, comme la Police de Toronto, ne peuvent pas et ne doivent pas être exclues d'un projet national de grande envergure visant à attaquer de front la menace du terrorisme et à répondre aux préoccupations de tous les Canadiens en matière de sécurité.

Il a été observé, à juste titre, que les événements tragiques du 11 septembre 2001 ont considérablement influencé notre attitude à l'égard de notre sécurité et notre vulnérabilité, en nous faisant comprendre avec quelle rapidité nous pouvons nous trouver plongés dans une situation terrifiante et catastrophique.

Les événements inimaginables du 11 septembre nous ont forcés à confronter une nouvelle réalité concernant les forces du mal qui existent parmi nous — forces que nous n'avons jamais vraiment connues directement — et à nous interroger sur la possibilité que ces mêmes forces du mal infligent de nouveau à des gens innocents les mêmes horreurs, traumatismes et scènes de destruction et de chaos.

Il faut se rendre compte que malgré les procédés internationaux de collecte de renseignements les plus sophistiqués qui soient et les efforts exhaustifs déployés par des organismes dans le monde entier pour contrer le terrorisme et d'autres activités semblables, 19 personnes relativement peu sophistiquées, armées de petits couteaux — rien de plus — ont pu monter une des attaques les plus brutales de toute l'histoire jamais connue en temps de paix. Cette attaque a fait presque 3 000 victimes innocentes, y compris 25 Canadiens, 343 pompiers et 71 policiers.

Les pertes matérielles, et la perte de familles et de leur avenir sont des choses qu'il est impossible de calculer. Nous ignorons encore toutes les conséquences qu'a pu avoir cet événement.

En songeant à notre vulnérabilité à bien des égards, j'avoue être très préoccupé par l'absence apparente d'un plan national d'intervention en cas de terrorisme qui soit bien intégré. Ce qui m'inquiète tout particulièrement, c'est que les instances supérieures semblent avoir décidé que des villes vulnérables telles que Toronto, devront dans la grande majorité des cas, faire cavalier seul.

Les États-Unis ont également été obligés d'examiner cette question. La United States National Commission on Terrorism, en préparant un rapport publié en l'an 2000, n'a pas demandé l'avis d'un seul chef de police, maire ou gouverneur. Le gouverneur Keating avait déclaré à l'époque qu'il ne fallait pas faire comme si toute l'action antiterroriste devait se coordonner et s'exécuter à Washington, D.C.

Il convient de noter que si jamais un acte de terrorisme est commis au Canada, c'est l'une de nos grandes villes qui est la plus susceptible d'être l'objectif des terroristes. Les premiers intervenants seront donc les policiers, pompiers et personnel médical locaux.

Avec le temps, et étant donné que nous n'avons pas fait l'objet d'autres attaques terroristes depuis le 11 septembre les gens, surtout au Canada, s'inquiètent moins de la menace du terrorisme. Or c'est dangereux, puisque cela favorise une attitude complaisante et un faux sentiment de sécurité.

Nous savons fort bien que les terroristes peuvent attaquer à n'importe quel moment et n'importe où. Les kamikazes constituent une menace particulièrement grave. Les éléments qui peuvent inciter un terroriste à lancer une attaque sont tout autour de nous, y compris au Canada, notamment dans un milieu où le terrorisme a le potentiel de se développer, tel que la ville de Toronto et d'autres grandes villes.

Refuser d'admettre cette réalité ou vouloir fermer les yeux là-dessus témoignerait d'une attitude à la fois dangereuse et peu prévoyante. L'ex-gouverneur de la Pennsylvanie, Tom Ridge, directeur de l'Office of Homeland Security nouvellement constitué aux États-Unis, insiste beaucoup sur le rôle que joueront les polices locales. La réponse nationale au terrorisme aux États-Unis a été l'opération intitulée Enduring Freedom.

Mes homologues des forces policières américaines sont tout à fait convaincus de leur vulnérabilité, comme le sont leurs dirigeants politiques à tous les paliers de gouvernement. Vous avez peut-être eu l'occasion de vous en rendre compte pendant vos voyages et vos discussions avec vos homologues aux États-Unis.

Le sénateur Bill Frist a récemment déclaré que «le terrorisme biologique continue de constituer une menace sérieuse pour les États-Unis». Le procureur général américain, John Ashcroft, a récemment dit ceci:

Ici au ministère de la Justice, notre plus grande priorité consiste à prévenir les attentats terroristes; cependant, aucun organisme, ministère, État ou gouvernement local n'est en mesure d'accomplir seul cette tâche. Pour gagner la guerre contre le terrorisme, il faut assurer une collaboration efficace entre les différents organismes fédéraux et les responsables d'État et locaux qui devront ensemble mener cette bataille aux premières lignes.

Malheureusement, ces concepts américains ne sont aucunement reflétés dans l'approche ou la vision des instances supérieures canadiennes. Les forces de police canadiennes ont le désir et la volonté de collaborer et de conjuguer leurs efforts dans la lutte contre le terrorisme; cependant, les instances supérieures ne se sont pas suffisamment intéressées à la question en vue de répondre aux besoins et d'éliminer les points de vulnérabilité locaux. Nous trouvons cela fort regrettable.

Ce qui est ironique, c'est que le documentaire diffusé dimanche 28 avril 2002 sur 60 Minutes représentait le Canada comme un refuge pour les terroristes. Cette représentation aura pour effet de confirmer la réputation du Canada comme un pays qui est très recherché par les criminels organisés, y compris les terroristes.

Je voudrais maintenant parler de l'importance de l'apport des polices locales en tant que partenaires égaux dans le cadre d'un réseau national bien intégré de lutte contre le terrorisme.

L'un des effets immédiats des événements du 11 septembre sur la Police de Toronto a été la convocation du Groupe mixte du renseignement, le GMR, qui était centré au sein de l'Unité de soutien au renseignement de la Police de Toronto. Cette initiative a permis de réunir des policiers de Toronto avec leurs collègues de police des régions avoisinantes et les représentants du Service canadien du renseignement de sécurité, du ministère de la Défense nationale, de la GRC, la Police provinciale de l'Ontario, Immigration Canada et le FBI. Nous avons nous-mêmes pris cette initiative. Toronto représentait une bonne base logistique pour mener des opérations, en raison de notre réseau de communications bien établi, notre accès centralisé aux organismes membres, notre capacité de nous organiser rapidement, notre proximité des opérations et activités des gouvernements local et régional et d'autres considérations encore.

Ainsi entre le 12 septembre 2001 et le 19 février 2002, cette unité a reçu plus de 2 300 appels liés aux événements du 11 septembre, dont plus de 600 appels, soit 30 p. 100, concernaient directement la ville de Toronto. Avec le temps, et grâce à l'information recueillie, il est apparu clairement que des activités d'ordre terroriste de grande envergure, ainsi que les réseaux susceptibles d'organiser de telles activités, étaient présents dans certains quartiers de Toronto et dans la région du Grand Toronto elle-même.

Malheureusement, nous ne disposions pas de ressources financières et humaines suffisantes pour permettre à la police de Toronto de faire suite à cette enquête et de tirer des conclusions définitives concernant ces appels. L'information a depuis été transmise à la GRC et au SCRS pour que des enquêtes plus exhaustives puissent être menées, si besoin est.

Entre le 11 septembre 2001 et le 31 décembre 2001, la Police de Toronto a consacré plus d'un million de dollars à des enquêtes liées au terrorisme. Ce montant ne comprend pas les appels de service additionnels qui ont suivi les événements du 11 septembre.

À cause des attentats du 11 septembre, nous avons compris que des attentats perpétrés dans n'importe quelle grande ville du Canada auraient des conséquences très considérables pour la population locale et la stabilité financière des zones touchées, voire même pour l'ensemble du pays, bien entendu. Les cibles les plus évidentes, où l'impact au Canada serait semblable à celui de l'attentat de New York, serait Toronto, Montréal, Ottawa, Vancouver, et dans une moindre mesure, d'autres capitales provinciales.

Ces villes non seulement sont les plus peuplées, mais représentent le centre financier de la majorité des grandes entreprises. On y trouve également les bureaux des administrations municipales, provinciales et fédérale qui assurent des services à la population.

On peut dire que Toronto correspond plus ou moins à l'équivalent canadien de la ville de New York. Il s'agit du centre financier et commercial du pays. Toronto est une cible intéressante avec ses 2,5 millions d'habitants et une population de plus de 5,2 millions dans la région du Grand Toronto. Toronto est la plus importante municipalité au Canada et la cinquième plus importante en Amérique du Nord. C'est une ville qui a l'une des populations les plus variées du monde, avec ses 122 synagogues, ses 18 temples hindous et ses 34 mosquées. Toronto est également le siège du gouvernement de l'Ontario, et de l'Assemblée législative. De nombreuses opérations fédérales se déroulent également dans bon nombre de bâtiments qui s'y trouvent. Toronto compte 90 consulats étrangers qui ont chacun leur personnel. Il s'agit du centre financier du Canada et du quatrième plus important centre financier d'Amérique du Nord. La Bourse de Toronto est la troisième bourse d'Amérique du Nord pour le volume de ses transactions.

La RGT est le moteur économique qui tire les autres secteurs de l'économie canadienne. L'infrastructure économique canadienne n'est pas aussi bien protégée ou diversifiée que celle des États-Unis. Notre capacité limitée de nous remettre d'un grand attentat ayant des conséquences catastrophiques fait que toute l'économie canadienne serait menacée. Toronto abrite 90 p. 100 des banques étrangères canadiennes et 80 p. 100 des plus importantes sociétés de recherche et de développement, d'avocats, de publicité et de haute technologie. Presque toutes les banques canadiennes et entreprises financières ont leur siège social à Toronto. Cette ville compte 75 000 entreprises ayant 1,2 million d'employés, soit un sixième de tous les emplois au Canada.

Toronto dispose d'un des meilleurs réseaux de télécommunications à cause du fort pourcentage de câbles à fibres optiques qui y sont installés. Toronto a le quatrième aéroport d'Amérique du Nord, et le deuxième système de transport en commun d'Amérique du Nord, derrière New York, avec 6 000 kilomètres d'itinéraires où circulent 450 millions de passagers par année. Cette ville est la plaque tournante d'un réseau de transport régional et national par route, rail, air et eau. Par conséquent, je suis d'avis qu'en cas d'attentat terroriste, Toronto serait la cible canadienne la plus probable.

Au plan national, d'autres cibles logistiques comprennent l'infrastructure qui soutient les installations pétrolières et gazières, les lignes de transport d'électricité et installations de génération de l'électricité, les centres de transport par air, rail et route, d'importants équipements de communications, l'approvisionnement en eau et notre infrastructure bancaire et monétaire.

Dans la foulée des événements du 11 septembre, la constatation des responsables dans bien des pays du monde, c'est que de nombreux groupes terroristes se financent grâce à l'activité criminelle. Comme les terroristes peuvent facilement s'intégrer et se cacher dans les grandes villes, les polices municipales ont à remplir les fonctions essentielles de détection et de prévention.

Notre capacité technique actuelle en matière de détection et de prévention est extrêmement faible, et j'insiste donc sur la nécessité de faire des progrès dans ce domaine. Pour citer un exemple précis, l'intervention immédiate du fédéral relativement à la question de l'accès légal est tout à fait essentielle pour stopper l'érosion de la capacité des polices d'intercepter légalement les communications et de mener des opérations d'écoute électronique lorsque ces dernières sont autorisées.

Pour exécuter avec succès une campagne nationale antiterroriste vraiment efficace, les polices locales doivent pouvoir participer en tant que partenaires égaux plutôt que de jouer un rôle purement symbolique dans le cadre d'initiatives financées par les autorités fédérales et provinciales. Les polices locales sont aux premières lignes et sont donc les premiers éléments à intervenir en cas d'attentat terroriste, et à ce titre, elles doivent participer de façon proactive à l'examen et à la prévention de futurs attentats terroristes. Les policiers locaux connaissent à fond leur collectivité et entretiennent des rapports étroits avec une vaste gamme de personnes et de groupes. Ils sont très bien placés pour entendre parler d'activités terroristes et pour rechercher ce genre d'information.

De plus, dans l'exercice de leurs fonctions quotidiennes — par exemple, effectuer des patrouilles, diriger la circulation, répondre à des appels et d'autres activités de ce genre dans la collectivité — les agents de police se trouvent en contact avec toutes sortes de personnes dans toutes sortes de circonstances. S'ils sont bien formés, savent ce qu'il faut chercher et quelles questions il faut poser, les policiers locaux peuvent constituer une source importante de renseignements touchant le terrorisme et contribuer ainsi à renforcer considérablement la sécurité globale de notre nation.

S'ils sont bien équipés et disposent de renseignements à jour sur les activités terroristes tout en ayant accès à des systèmes d'information et des bases de données, les policiers locaux peuvent apporter leur contribution à la collecte efficace de renseignements en exerçant leurs fonctions au jour le jour. La guerre contre le terrorisme — et il s'agit bien d'une guerre — doit se mener sur deux fronts, c'est-à-dire la prévention et la gestion des incidents.

À part leurs capacités de collecte de renseignements, les agents de police locaux et autres secouristes et intervenants locaux seront les premiers à assurer l'intervention d'urgence en cas d'attentat terroriste dans nos collectivités respectives, bien que cette réalité n'ait pas encore été bien assimilée par les autorités fédérales et provinciales. Les instances supérieures aux deux derniers paliers de gouvernement ont cherché à répondre à la menace du terrorisme essentiellement en augmentant les ressources de leurs organismes policiers respectifs, sans vraiment s'intéresser à la situation des polices locales et sans comprendre la nécessité d'appliquer de bonnes mesures de prévention, d'acquérir du matériel de sécurité, de former le personnel de première intervention et d'élaborer des plans d'intervention d'urgence complets afin d'être bien préparés et prêts à intervenir en cas de menace terroriste.

Les événements catastrophiques du 11 septembre ont considérablement modifié l'orientation et les priorités des opérations policières. À cause de ces événements, nos ressources déjà rares sont utilisées au maximum. Par exemple, l'Unité de lutte contre les crimes motivés par la haine de la Police de Toronto a enregistré une augmentation de 66 p. 100 des crimes haineux entre 2000 et 2001, le nombre de plaintes étant passé de 204 à 338. On a attribué 90 p. 100 de cette augmentation, soit 121 incidents, aux activités terroristes du 11 septembre.

La communauté musulmane de Toronto a fait état de 57 crimes haineux signalés à la police en 2001, par rapport à un seul en l'an 2000. Environ 45 des incidents signalés en 2001 étaient jugés être le résultat direct des événements du 11 septembre. La communauté musulmane s'est donc malheureusement jointe aux autres groupes de Toronto qui font depuis longtemps l'objet d'activité de type haineux.

Pour la première fois, 200 menaces de bioterrorisme ont fait l'objet d'enquêtes par la Section de la sécurité de la Police de Toronto, toutes ces menaces étant liées aux activités terroristes du 11 septembre. Des investissements importants de personnel et d'équipement ont été nécessaires pour réagir à non nombre de ces incidents. Ils ont également gravement perturbé les activités quotidiennes de la ville de Toronto, en raison de la nécessité d'appliquer des procédures appropriées d'évacuation et de décontamination.

Depuis le 11 septembre — d'ailleurs, c'est toujours le cas en 2002 — l'Unité de lutte contre les crimes haineux a observé une intensification de la peur des membres des communautés qu'elle dessert. Les attentats du 11 septembre ont aggravé l'anxiété de ces dernières, si bien qu'elles s'attendent — ce qui est normal, à ce que la police s'intéresse davantage à chaque crime haineux qui lui est signalé.

Le fait d'avoir à répondre à la demande accrue de services et à assumer une charge de travail plus lourde à cause des événements du 11 septembre a gravement nui à notre capacité de répondre aux nombreuses et diverses attentes légitimes du public en matière de sécurité et de qualité de la vie, et ce à tous les niveaux.

J'ai de graves préoccupations du fait que les administrations fédérale et provinciales n'ont pas bien coordonné leurs efforts en vue de répondre à la menace du terrorisme. Je suis particulièrement déçu de constater que les décideurs n'ont pas tenu compte du rôle unique et précieux que peuvent jouer les polices locales dans toute initiative antiterroriste fructueuse. Un tel oubli est non seulement naïf mais inadmissible. La sécurité de tous les Canadiens, dont 5,2 millions habitent la région du Grand Toronto, ne doit pas relever exclusivement des organismes policiers fédéraux et provinciaux.

Supposons que vous soyez le maire ou le chef de police d'une grande ville canadienne. Votre responsabilité légale consiste sans aucun doute à assurer la sécurité de vos citoyens. Cependant, le fait est que vous avez sous-traité la responsabilité de protéger vos citoyens au gouvernement fédéral et aux divers organismes qui relèvent de sa responsabilité. La sécurité de vos citoyens est donc entre les mains de personnes qui n'habitent pas votre ville et dont la responsabilité première est de desservir toute la nation, plutôt que simplement votre ville.

En vue d'apporter notre contribution aux importants travaux de votre comité, je présente les recommandations suivantes qui, dans le contexte actuel, permettront à mon avis d'améliorer grandement la sécurité de tous les Canadiens.

D'abord, je recommande que le gouvernement fédéral effectue une vérification nationale en vue de déterminer quelles mesures de sécurité ont été prises dans toutes les régions du pays depuis le 11 septembre 2001, dans quelle mesure ces mesures sont efficaces, ainsi que dans quels secteurs et de quelle façon les crédits disponibles ont été utilisés.

Deuxièmement, le gouvernement fédéral devrait créer un organe de contrôle et de coordination composé d'intervenants clés des niveaux fédéral, provincial et local pour garantir l'adoption d'une approche antiterroriste intégrée dans tous les organismes concernés.

Enfin, les administrations fédérale et provinciales devraient accorder des ressources adéquates aux polices locales, notamment dans les grands centres urbains, pour leur permettre d'appliquer des programmes efficaces de lutte contre le terrorisme et d'améliorer leurs capacités d'intervention.

Le sénateur Banks: Chef Fantino, merci infiniment de votre présence. Fidèle à ma coutume, je vais vous poser une question que je pose à tous les témoins qui comparaissent devant nous. Elle concerne les catastrophes et les mesures d'intervention en cas d'événement du genre dont vous nous avez parlé. Il s'agit essentiellement de savoir qui est le premier à devoir intervenir.

Dans l'éventualité d'une catastrophe nationale — pas nécessairement de la même nature mais de la même ampleur que les événements du 11 septembre — qui est chargé de diriger les activités d'intervention sur le terrain? Si un incident de ce genre devait se produire dans votre ville, qui serait chargé de tout coordonner?

M. Fantino: Vous me posez une très bonne question, sénateur. Dans le sens le plus immédiat, ce serait les personnes chargées d'assurer les services d'urgence et, en fin de compte, le maire. Mais au fur et à mesure que la situation évoluerait, d'autres services seraient appelés à intervenir. Les personnes les plus susceptibles d'être appelées à intervenir immédiatement sur la première ligne seraient le chef du service d'incendie, le médecin hygiéniste, le chef de police et le maire, qui pourrait ou non décider de faire appel à d'autres organismes.

Le sénateur Banks: À Toronto, est-ce que ce serait au maire d'assurer la coordination et de chapeauter l'équivalent municipal de l'instance collégial du chef d'état-major?

M. Fantino: C'est lui qui en aurait l'ultime responsabilité. Le 11 septembre, nous avons fait participer le maire à nos efforts pour coordonner une réponse à des événements dont nous savions peu de choses ce jour-là. Il a participé étroitement à ce travail de coordination. Du moment qu'il s'agit d'opération importante d'intervention d'urgence, le maire et les autres dirigeants civiques doivent absolument participer au processus décisionnel.

Le sénateur Banks: Trouvez-vous correct, normal, raisonnable et prudent que les premières autorités appelées à intervenir en cas d'incident à Toronto, quel qu'il soit, soit le chef de police, le chef du service d'incendie et le personnel d'intervention d'urgence de Toronto?

M. Fantino: C'est tout à fait inévitable, sénateur; nous devons être là. C'est comme ça. Nous sommes appelés à intervenir, quelle que soit la situation. C'est notre responsabilité. Nous devons être équipés, bien formés et prêts à réagir à toutes ces choses-là, dès le départ. Il faut réagir immédiatement. On ne peut pas se permettre de simplement installer un cordon jaune de sécurité, en attendant que les autres services arrivent. Il faut qu'on intervienne tout de suite. C'est d'ailleurs ce que j'affirme depuis toujours, mais on n'en a pas tenu compte.

Le sénateur Banks: Il y a quelques minutes, vous disiez que la sécurité de vos citoyens — vous nous demandiez en quelque sorte de nous mettre à la place du chef de police — est entre les mains de personnes qui n'habitent pas votre ville et dont la première responsabilité s'exerce vis-à-vis de toute la nation. Je n'arrive pas à faire concorder ces deux choses. Est-il vrai que les services d'intervention locaux doivent être les premiers à intervenir?

M. Fantino: Oui, tout à fait mais étant donné toutes les difficultés auxquelles nous sommes confrontés, nous sommes dans l'impossibilité d'intervenir efficacement sans l'aide des deux paliers supérieurs de gouvernement. Voilà ce que j'essaie de vous faire comprendre. Les deux paliers de gouvernement ont pris des initiatives tout à fait louables — et j'insiste bien là-dessus. Cependant, pour ce qui est de coordonner le travail du personnel de première intervention, nous avons été plus ou moins abandonnés. Ce que j'essaie de vous dire, c'est qu'en cas de véritable catastrophe ou de menace importante pour les Canadiens, dont 2,5 millions habitent Toronto, nous devons absolument participer étroitement aux mesures d'intervention nationales.

Le sénateur Banks: Notre rapport cautionnait cette position-là. Mais la question de la coordination n'est pas vraiment liée à l'autre chose que vous avez mentionnée, c'est-à-dire les ressources financières.

Expliquez-moi pour quelles raisons un habitant de Lumsden, en Saskatchewan, ou de Rosewood, en Alberta, devrait avoir à payer des mesures d'intervention qui, comme vous l'avez mentionné vous-même, seront prises face à une situation touchant inévitablement l'une des grandes villes du Canada?

M. Fantino: Eh bien, pour les mêmes raisons que nous payons tous nos soldats pour combattre le terrorisme dans d'autres pays. On ne peut pas se permettre de fermer les yeux sur la situation des habitants de Toronto, pas plus que je ne pourrais fermer les yeux sur la situation des habitants de la Saskatchewan ou d'une autre région du pays. En tant que pays, nous avons une seule préoccupation, à savoir la sécurité nationale. Si Toronto — permettez-moi de faire marche arrière.

Le sénateur Forrestall: Vous avez failli le dire. Si Toronto disparaît, la nation disparaît — c'est bien ça?

M. Fantino: Nous ne pouvons nous permettre de fermer les yeux sur le fait que toutes les collectivités canadiennes ont besoin de se protéger. C'est pour cela que nous avons des instances supérieures, dont la responsabilité consiste à agir dans l'intérêt de tous. Il n'est pas possible de dire: «Ce n'est pas mon problème.» C'est notre problème, voilà qui est certain. En tant que nation, nous ne pouvons nous permettre d'ignorer notre devoir et notre responsabilité vis-à-vis de chaque citoyen canadien, responsabilité qui consiste à s'assurer qu'ils bénéficient tous de la même protection et des mêmes services, et qu'ils se sentent tous en sécurité. Tel est leur droit.

Le sénateur Banks: Mais l'inverse est également vrai — c'est-à-dire que les citoyens de Toronto paient des impôts dont une partie sert à financer les subventions dans les secteurs agricoles et des pêches.

M. Fantino: C'est pour cela que nous ne pouvons pas nous permettre de travailler en vase clos. Nous travaillons tous dans le même milieu.

Le sénateur Wiebe: Quelle augmentation la Ville de Toronto a-t-elle accordée à votre service au cours des six derniers mois pour vous permettre de régler les problèmes auxquels vous avez fait allusion? La ville de Toronto a-t-elle commencé à faire sa part? Et la province de l'Ontario a-t-elle aussi fait sa part?

M. Fantino: C'est une très bonne question. Dès le départ, c'est-à-dire le 11 septembre, nous estimions qu'il nous incombait de faire le nécessaire pour répondre aux besoins des citoyens dans ce domaine. Entre le 11 septembre et le 31 décembre, par exemple, à partir du budget de fonctionnement, dont je disposais à l'époque, plus d'un million de dollars a été consacré aux enquêtes touchant le terrorisme. Nous avons dû réordonner nos priorités. Nous avons réaffecté le personnel à droite et à gauche, et on peut donc dire que notre contribution a été importante. Depuis, nous essayons d'acheter du matériel de sécurité pour notre personnel de première intervention. Certains crédits nous ont été affectés pour nous aider à assurer des cours de formation.

Toutefois, il convient que toutes ces ressources soient intégrées dans l'intérêt de la nation toute entière. Il y a du double emploi dans certains secteurs du gouvernement; en ce qui me concerne, c'est bien pour cette raison qu'il convient de tout réexaminer. Voilà maintenant huit mois que ces événements se sont produits, et je quémande toujours des choses qui me semblent essentielles pour protéger ma collectivité et les habitants de ma ville.

Le sénateur Wiebe: Vous avez parlé de crédits qui vous sont affectés; est-ce au sein même de votre service?

M. Fantino: Oui, c'est à partir des ressources dont nous disposons actuellement.

Le sénateur Wiebe: Donc, la Ville de Toronto ne vous a pas accordé de nouveaux crédits?

M. Fantino: Non, personne ne nous a accordé de nouveaux crédits.

Le sénateur Wiebe: Si je vous pose la question, c'est parce que Toronto représente en quelque sorte la grande ville canadienne, du fait de la présence de grandes sociétés, de son rôle de centre de télécommunications, de plaque tournante pour le transport aérien et ce genre de choses. La Ville de Toronto perçoit des impôts importants auprès de ces sociétés, contrairement à ces petites villes dont nous parlait le sénateur Banks. Quand il y a un problème, il est toujours facile de rejeter la responsabilité sur l'administration provinciale qui, à son tour, la rejette sur les autorités fédérales. Mais le gouvernement fédéral est l'ultime instance au Canada.

Vous avez demandé aux administrations provinciale et fédérale de vous donner des crédits. À mon avis, la Ville de Toronto devrait faire sa part.

M. Fantino: Les deux paliers de gouvernement ont affecté certaines ressources à la Ville de Toronto pour lui permettre de réagir face à ce problème, et la Ville de Toronto doit en investir autant. La responsabilité est donc partagée. Mais comme je vous l'expliquais tout à l'heure, en ce qui concerne la police, à part quelques rares exceptions, nous n'avons essentiellement rien obtenu de plus.

Le président: Chef Fantino, vous avez dit que vous avez affecté un million de dollars à partir de votre budget. Pourriez-vous nous dire à combien se monte votre budget global et quelles sommes vous ont été accordées par les administrations fédérale et provinciale, sommes que la ville devra également vous fournir selon la formule de jumelage?

M. Fantino: Cette année, en 2002, notre budget se monte à presque 600 millions de dollars. Le gouvernement fédéral a affecté plusieurs centaines de milliers de dollars à la formation de personnel chargé d'activités lourdes de recherche et de sauvetage, et le gouvernement provincial a prévu certaines sommes pour l'équipement, les tenues de protection contre les matières dangereuses, et cetera. Le gouvernement fédéral a également offert de participer à une équipe d'enquête mixte dirigée par la GRC. Cette subvention permet aussi de financer un poste au sein du Service de police de Toronto. Les autorités provinciales ont également offert d'assurer le financement de deux personnes qui feraient partie d'une équipe d'enquête dirigée par la police provinciale de l'Ontario.

Encore une fois, nous avons deux unités distinctes. J'insiste depuis le début sur le fait que tout cela doit être intégré. Nous faisons face aux mêmes menaces et nous rencontrons les mêmes difficultés. J'ai devant moi les annonces faites par les deux paliers de gouvernement au sujet de leur réponse au terrorisme. Dans les deux cas, il est question de collecte de renseignements, et cetera, et de sommes qui ont été réservées. Ils sont bien intentionnés, et nous apprécions ce qu'ils font, mais ils n'ont pas cherché à bien intégrer leurs activités d'intervention.

Le sénateur Banks: C'est ce que nous constatons de plus en plus à mesure qu'avancent nos travaux. Cependant, ai-je raison de croire que depuis septembre dernier, le gouvernement du Canada et le gouvernement de l'Ontario ont affecté de nouvelles ressources financières pour financer des mesures de sécurité à Toronto?

M. Fantino: Oui, c'est exact.

Le sénateur Banks: Et vous nous avez dit que la Ville de Toronto ne l'a pas fait?

M. Fantino: Non, je parlais du service de police. À part quelques mesures de dotation du personnel, nous n'avons rien.

Le sénateur Banks: Chef, à la page 9 de votre mémoire, vous dites ceci:

Notre capacité technique actuelle en matière de détection et de prévention est extrêmement faible, et j'insiste donc sur la nécessité de faire des progrès dans ce domaine. Pour citer un exemple précis, l'intervention immédiate du fédéral relativement à la question de l'accès légal est tout à fait essentielle.

Que voulez-vous dire et que cherchez-vous à obtenir au juste?

M. Fantino: Les progrès technologiques sont tels que les forces de police ne sont plus en mesure d'intercepter légalement les communications.

Le sénateur Banks: Vous parlez de communications et non d'effectuer des fouilles chez les gens, n'est-ce pas?

M. Fantino: Oui, je parle de communications. Les progrès technologiques sont tellement considérables que nous ne sommes plus à même d'intercepter légalement les communications.

Le sénateur Banks: Ce n'est pas la loi qui fait défaut, mais plutôt les fonds qui vous permettraient de mener vos opérations et d'intercepter les communications sans enfreindre les lois actuelles; c'est bien ça?

M. Fantino: Il faut à notre avis adopter des règlements pour faire en sorte que, quels que soient l'évolution de la technologie ou le degré de progrès accompli, les forces de police pourront intercepter les communications grâce aux moyens technologiques les plus avancés. Autrement dit, il est essentiel que nous ayons cette capacité. À l'heure actuelle, l'encodage est tellement généralisé que nous n'y arrivons plus. Les groupes criminels et certainement les terroristes ont largement recours à cette pratique.

Le sénateur Banks: Vous nous dites donc que si vous pouviez invoquer une ordonnance de la cour vous autorisant, en vertu des lois déjà en vigueur, à intercepter les communications entre deux criminels, vous n'auriez pas les moyens technologiques de le faire même si la loi vous reconnaissait ce droit?

M. Fantino: C'est exact.

Le sénateur Banks: Donc, ce n'est pas un règlement modifié qu'il vous faut, mais plutôt des fonds pour acheter du matériel, n'est-ce pas?

M. Fantino: À notre avis, il faudrait adopter des règlements qui nous donnent le droit en vertu des lois actuelles, quels que soient les progrès technologiques, de recourir légalement à ces mêmes technologies, auxquelles nous ne pouvons accéder actuellement dans bien des cas.

Le sénateur Banks: Vous nous dites donc que même si vous aviez actuellement les moyens de décoder une communication entre deux criminels, certaines dispositions de la législation actuelle vous empêchent de le faire?

M. Fantino: Non, ce n'est pas la législation qui pose problème, mais les technologies de pointe.

Le président: Autrement dit, au fur et à mesure que de nouvelles technologies sont mises en marché, vous voulez que ce soit obligatoire de fournir une clé pour permettre d'accéder à ces technologies et de suivre leur évolution. Autrement dit, chaque fois qu'une nouvelle technologie est mise au point, le chef voudrait que le fournisseur de cette technologie soit également tenu de fournir le code à la police. C'est bien ça?

M. Fantino: Oui, sénateur, vous avez parfaitement raison.

Le sénateur Cordy: Il est important que le comité connaisse les vues des responsables municipaux sur la sécurité.

Mes questions concernent la collecte de renseignements. Dans vos remarques liminaires, vous avez très bien décrit une journée typique dans la vie d'un agent de police. Vous avez parlé des rapports étroits entre les agents de police et les membres de leur localité, en précisant que ces derniers sont très bien placés pour se tenir au courant de la situation.

Communiquez-vous régulièrement avec d'autres responsables municipaux, ou même des agents fédéraux au sein du SCRS ou de la GRC, ou travaillez-vous plutôt seuls?

M. Fantino: Nous avons de bonnes relations de travail avec tous les divers organismes. Les échanges d'information sont fréquents. Nous menons toujours nos activités dans l'intérêt supérieur de la population. Nous collaborons avec eux — et eux font de même — à l'échelle tant nationale qu'internationale.

Le sénateur Cordy: Travaillez-vous avec des collectivités aux États-Unis et dans d'autres régions?

M. Fantino: C'est-à-dire que nous travaillons avec les forces de police des États-Unis, oui.

Le sénateur Cordy: Comment le gouvernement fédéral pourrait-il vous aider à améliorer votre capacité locale de collecte de renseignements?

M. Fantino: Ce que je voudrais, c'est que l'on adopte une approche véritablement intégrée en matière de collecte de renseignements, si bien que les représentants de tous les différents organismes policiers et de sécurité nationale seraient assis à la même table, dans la même salle — j'essaie de vous créer une image mentale du concept — comme nous l'avons fait pour le Groupe mixte des renseignements. Nous ressentions vraiment le besoin d'ouvrir un bon dialogue et d'assurer une bonne intégration, et il a donc été décidé de mettre tout le monde dans la même salle. Nous avions tous nos propres systèmes de collecte de renseignements, nos ordinateurs, et cetera. Essentiellement, tout le monde était réuni dans un même centre de planification.

En ce qui me concerne, c'est ainsi qu'il faut mener le combat contre le terrorisme ou le crime organisé. Peut-être faut-il mandater une telle démarche. À mon avis, on ne peut pas simplement laisser le soin aux amis et collègues de s'arranger entre eux.

Le sénateur Cordy: Est-ce que cela permettrait d'éliminer une partie du double emploi qui existe actuellement?

M. Fantino: Oui, absolument. En réalité, nous poursuivons les mêmes personnes, nous cherchons les mêmes informations, et nous faisons face à la même menace. Les frontières et les zones de responsabilité n'ont plus aucune importance. Elles existent pour des raisons purement politiques. En ce qui concerne la menace pour la sécurité du public que pose le crime organisé et le terrorisme, par exemple, nous sommes les seuls à nous intéresser à des questions de frontières et de zones de responsabilité. Il faut éliminer toutes ces barrières. Voilà pourquoi je suis fermement convaincu que la sécurité nationale intéresse tout le monde.

Le sénateur Cordy: Vu cette réalité, êtes-vous d'avis que ce serait au gouvernement fédéral de jouer un rôle de chef de file pour assurer la collaboration de tous?

M. Fantino: Oui. J'ai parlé à des responsables politiques aux deux paliers de gouvernement, et on me dit toujours la même chose: «C'est la responsabilité de quelqu'un d'autre.» Mais il est grand-temps que nous nous organisions collectivement, pour faire front commun contre toutes ces choses qui menacent la sécurité nationale.

Le sénateur Cordy: Vous avez recommandé entre autres la création d'un organisme de contrôle central ayant une représentation municipale, provinciale et fédérale. Vous n'en avez parlé que brièvement. À votre avis, quel serait le mode de fonctionnement de cet organisme?

M. Fantino: Par exemple, il existe ce genre d'organismes qui traitent de questions comme le crime organisé, où tous les représentants se mettent ensemble pour essayer collectivement de contrer cette menace. Il convient que tout le dossier de la sécurité nationale soit piloté par les autorités nationales et que des représentants de divers secteurs de responsablité participent aux activités.

Pour revenir sur ce que je disais tout à l'heure, nous pouvons apporter une contribution importante à cet effort; nous devrions être à la table. Malgré ces nombreux communiqués de presse annonçant de nouvelles initiatives et ressources, personne ne m'a jamais appelé pour me demander mon avis.

Le sénateur Cordy: S'agissant de compétence, si ce genre d'organisme était créé, relèverait-il de la responsabilité du gouvernement fédéral, ou à votre avis, cela dépendrait-il de la situation que vous examiniez?

M. Fantino: S'agissant de sécurité nationale, je dirais que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle de chef de file dans certains dossiers. Il y en a d'autres qui touchent davantage les responsables locaux, mais là je vous parle de sécurité nationale. Je considère que Toronto fait partie de la nation et que la Police de Toronto peut contribuer à l'effort général en permettant de présenter un front uni et en joignant ses efforts à ceux des autres pour contrer toutes les menaces qui pèsent sur nous au Canada.

Le sénateur Atkins: D'abord, comme j'habite Toronto depuis une quarantaine d'années, je dois vous féliciter ainsi que vos prédécesseurs pour la qualité extraordinaire de votre force de police.

M. Fantino: Merci, sénateur.

Le sénateur Atkins: Il y a presque un an, nous avons reçu les témoignages de deux ex-agents de la force publique à la retraite. Il s'agissait de l'ex-commissaire de la GRC et de l'ex-directeur du SCRS. Nous leur avons parlé de la possibilité de coordonner les activités des forces en vue d'appliquer ce concept de sécurité intérieure globale. Ni l'un ni l'autre n'étaient en faveur d'une telle démarche.

Il y a cette notion de chasse gardée. Ils sont convaincus qu'ils peuvent travailler de façon indépendante et collaborer aussi. Mais vous parlez plutôt de cette notion qui sous-tend les activités du gouverneur Ridge. Est-ce que cet organisme compte des représentants municipaux?

M. Fantino: Ils ont connu certaines douleurs de croissance aux États-Unis, puisque les polices locales n'avaient pas le privilège d'accéder aux informations rassemblées par les autorités fédérales. Mais toutes ces barrières tombent rapidement à cause de la volonté politique qui se manifeste actuellement.

Je dois dire que je ne suis pas d'accord avec ceux qui préconisent qu'une agence fédérale, quelle que soit sa nature, soit la seule à être chargée de la sécurité nationale. C'est fort simple: étant donné ce que nous savons maintenant sur la menace que constituent les groupes terroristes, je conçois mal qu'une grande ville ne puisse pas être considérée comme un partenaire égal qui doit apporter sa contribution à la protection de la sécurité de la nation toute entière. Pour moi, ce serait tout à fait illogique.

Le sénateur Atkins: Êtes-vous en faveur d'un organisme du genre qui serait chargé d'assurer la sécurité intérieure?

M. Fantino: Absolument. J'ai assisté à plusieurs réunions depuis qu'on a mis toutes ces questions sur le tapis. Nous jouons un rôle essentiel au niveau de la défense intérieure. Les menaces potentielles qui pèsent sur nous n'ont jamais été plus présentes. Nous subissons les conséquences résiduelles des crimes motivés par la haine. Vous ne pouvez tout simplement pas fermer les yeux sur notre capacité d'apporter une contribution très importante à la sécurité globale des Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

Le sénateur Atkins: De quelle façon votre démarche policière a-t-elle changé depuis le 11 septembre?

M. Fantino: Elle a beaucoup changé. Par exemple, immédiatement après le 11 septembre, nous nous sentions vulnérables. Nous faisions face à toutes sortes de difficultés. J'ai commencé à faire de la recherche pour découvrir ce que j'aurais dû savoir et ce que je dois savoir. Le 24 septembre, j'ai écrit au président de la Commission des services de police pour lui faire part de mes préoccupations concernant le fait que nous ne possédions pas certaines informations qui étaient néanmoins facilement accessibles.

À mon avis, personne ne s'imaginait que l'arme de destruction massive que privilégieraient les terroristes serait des avions à réaction chargés de carburant et de passagers. Beaucoup d'information sur les activités terroristes au Canada était connue.

Par conséquent, j'ai commencé non seulement à me renseigner sur la situation canadienne, mais à beaucoup collaborer avec mes homologues américains, les chefs de police des grandes villes, dont Toronto fait partie. Il s'agit d'un groupe de chefs de police municipale et de shérifs de grandes forces de police aux États-Unis et au Canada. J'ai également fait beaucoup de recherche concernant notre propre Service canadien du renseignement de sécurité.

Mes préoccupations découlent de cette analyse. Il est de mon devoir de parler publiquement de ces questions et de faire de mon mieux pour avancer de bons arguments en faveur de l'inclusion des polices locales comme premières intervenantes dans la lutte contre le terrorisme et dans les activités de prévention. Nous devons aussi participer aux efforts d'intervention dans l'éventualité d'événements tragiques qui pourraient toucher notre ville.

Le sénateur Atkins: Je suppose que cette attitude est présente dans tous les segments de la société. On observe une polarisation dans les différentes communautés culturelles.

Souhaitez-vous faire un commentaire à ce sujet?

M. Fantino: Dès le départ, je me suis rapidement rendu compte de la situation de la communauté musulmane à Toronto, et j'ai donc voulu établir le contact. J'ai rencontré bon nombre de leurs dirigeants ainsi que d'autres personnes. À ce moment-là, il s'agissait d'incidents dans les écoles, où de jeunes musulmans étaient la cible d'attaques et d'abus. J'ai ensuite entamé des discussions avec les différents conseils scolaires.

Vous avez raison. Nos synagogues ont été couvertes de graffiti inspirés par la haine. Il y a 122 synagogues à Toronto. Nous avons également reçu énormément d'appels au sujet de la poudre blanche. Il a fallu répondre à tous ces appels. Les communautés ethniques étaient très perturbées.

La situation s'est calmée depuis. Ce que je crains le plus, c'est ce qui risque d'arriver maintenant. Personne ne sait à mon avis ce que ce sera.

Le sénateur Atkins: Les dirigeants de ces communautés coopèrent-ils avec la police?

M. Fantino: Oui, absolument. Ce sont des gens fantastiques, et nous entretenons d'excellents rapports. Nous sommes à leur écoute pour parler de leurs problèmes et de leurs préoccupations. Nous avons de bons contacts avec eux, et eux avec nous.

Le sénateur Atkins: Parlons de recrutement et de formation. J'aurais cru que votre force comptait plus d'agents que vous n'en avez en réalité. À propos, votre budget me surprend. J'aurais pensé qu'il dépasserait 600 millions de dollars.

M. Fantino: Nous subissons des compressions budgétaires depuis plusieurs années. Nous avons tâché de nous en sortir en révisant au minimum les conséquences négatives. Nous avons appris à faire les choses de façon plus économique, mais nous ne faisons plus ce que nous faisions autrefois. Il a été nécessaire d'abandonner bon nombre de services que le public s'attendait à recevoir. Par exemple, les policiers ne font plus leurs rondes de surveillance comme autrefois.

Notre effectif a sensiblement diminué au fil des ans. À présent nous avons plusieurs centaines d'agents de moins qu'en 1992. Par conséquent, les problèmes auxquels nous sommes confrontés prennent des dimensions considérables.

Le sénateur Atkins: Est-ce en raison des compressions budgétaires?

M. Fantino: Oui, sénateur.

Le sénateur Banks: J'ai besoin d'aide pour comprendre les chiffres. Depuis plusieurs mois, nous nous entretenons avec des militaires et c'est vraiment agréable de rencontrer quelqu'un qui peut mobiliser et déployer 5 000 agents armés d'un seul trait.

M. Fantino: Ça représente quand même tout un défi.

Le sénateur Banks: Votre force de police assure des services dans l'ensemble de la RGT, n'est-ce pas?

M. Fantino: Notre force assure des services dans la ville de Toronto, sénateur.

Le sénateur Banks: Dont la population est de 2,5 millions. Si vous avez 5 000 agents, il y aurait donc un agent pour 500 habitants. C'est ça?

M. Fantino: Le ratio est assez variable dans les quartiers plus éloignés du centre, à cause de la façon dont nos services sont organisés.

Le sénateur Banks: Je sais que les besoins sont plus lourds là où il y a une forte densité de population. Mais il reste qu'il y a un agent pour 500 habitants.

M. Fantino: Oui.

Le sénateur Atkins: Votre approche de formation a-t-elle changé depuis le 11 septembre?

M. Fantino: Oui. Nous commençons à nous préoccuper de la sécurité de nos agents lorsqu'ils sont appelés à intervenir. Nous devons acquérir de nouveaux équipements et adopter de nouvelles procédures. Autrement dit, nos exigences sont beaucoup plus rigoureuses pour ce qui est de garantir la sécurité de notre personnel. Si nous sommes dans l'impossibilité de garantir la sécurité de nos agents, nous ne pourrons assurer la sécurité optimale du public. Ces besoins sont maintenant beaucoup plus importants.

Le sénateur Atkins: Est-ce que vous exigez que les nouvelles recrues aient des compétences supérieures?

M. Fantino: Oui, nous appliquons actuellement des normes très rigoureuses en ce concerne le niveau d'instruction et la forme physique. Il y a beaucoup de gens plus âgés qui deviennent agents de police. Nous avons parmi nos nouvelles recrues des gens qui pratiquaient un autre métier, et qui sont très instruits. Nos normes n'ont jamais été aussi rigoureuses. Il y a bien des gens qui veulent devenir policiers.

Le sénateur Atkins: Des militaires?

M. Fantino: Dans certains cas, oui. Nous avons un certain nombre de policiers qui sont d'anciens militaires. D'ailleurs, beaucoup de policiers sont des volontaires dans l'armée. À l'heure actuelle, une mission de maintien de la paix se déroule au Kosovo; plusieurs de nos agents sont sur place pour travailler avec la police civile.

Le sénateur Atkins: Quelle est l'interaction entre votre force et Mesures d'urgence Ontario (MUO)?

M. Fantino: Mesures d'urgence Ontario est surtout chargé d'élaborer des politiques et mesures d'intervention. C'est une unité très efficace qui essaie de coordonner les mesures d'intervention face à toute menace importante pour notre sécurité, c'est-à-dire des terroristes ou des catastrophes de tout genre. Mesures d'urgence Ontario a bénéficié d'un apport additionnel de fonds assez important du gouvernement provincial afin d'améliorer sa capacité d'intervention.

Le sénateur Atkins: S'agit-il d'un organisme fédéral?

M. Fantino: Non, c'est provincial. Il y a aussi l'organisme fédéral, soit le BPIEPC.

Le sénateur Atkins: Je me rappelle que lors de l'incident de Mississauga...

M. Fantino: Le déraillement de train.

Le sénateur Atkins: — la coordination a été assurée par le solliciteur général et le procureur général; donc, c'était le gouvernement provincial.

M. Fantino: C'est exact. Comme je viens de vous le dire, cet organisme a bénéficié d'un apport important de crédits pour lui permettre de réagir plus efficacement à des situations de ce genre.

Le sénateur Day: Monsieur Fantino, vous cherchiez vos notes sur Mesures d'urgence Ontario, n'est-ce pas?

M. Fantino: Oui, merci, sénateur. La province a décidé de doubler le budget de MUO qui est donc maintenant de 3 millions de dollars par an.

Le sénateur Day: Vous avez parlé de l'organisme de coordination fédérale, soit le BPIEPC, c'est-à-dire le Bureau de protection de l'infrastructure essentielle et de protection civile. Avez-vous des contacts avec ce bureau-là et, dans l'affirmative, quelle est la nature de vos rapports?

M. Fantino: Par l'entremise du chef du service d'incendie, un plan a été élaboré en vue de permettre au Service d'incendie de Toronto d'effectuer des opérations lourdes de recherche et de sauvetage, et c'est cet organisme-là qui assure une partie des services d'aide et de coordination.

Le sénateur Day: Vous parlez de la formation?

M. Fantino: Oui, de la formation aussi.

Le sénateur Day: Et du matériel?

M. Fantino: Oui, je pense que cela comprend certains types de matériel.

Le sénateur Day: En ce qui concerne la force de police, vous ne recevez pas de fonds ni pour la formation ni pour l'achat d'équipement?

M. Fantino: Pas encore. Mais je fais pression pour obtenir qu'au moins une partie de notre personnel bénéficie de cette formation et de ce matériel. On m'a dit que je devrais pouvoir obtenir un peu des deux.

Le sénateur Day: Entretenez-vous des rapports avec la force de police ou le service d'incendie d'Ottawa, étant donné le rôle de direction qu'ils jouent en ce qui concerne la formation du personnel de première intervention?

M. Fantino: Nous entretenons des contacts avec eux, mais je n'ai pas étudié leurs modèles spécifiques d'intervention. Il va sans dire que nous allons examiner tous les modèles. Nous devons commencer à nous préparer sérieusement.

Le sénateur Day: Si vous ne vous êtes pas préparés jusqu'à présent, est-ce en raison d'un manque de fonds?

M. Fantino: Oui, absolument.

Le sénateur Day: Existe-t-il maintenant un organisme qui soit chargé de coordonner les mesures de première intervention avec la force de police et la collectivité médicale?

M. Fantino: Oui, tout à fait. Nous essayons de préparer une réponse intégrée. Nous tâchons aussi d'éviter tout double emploi entre les rôles et responsabilités des uns et des autres. Ce travail est actuellement en cours. Il nous a fallu tout ce temps pour obtenir un engagement de financement. Nous avons attendu longtemps pour obtenir les engagements qui nous permettraient d'élaborer un premier plan.

Le sénateur Day: Et quels sont ces engagements qui vont vous permettre de le faire — s'agit-il d'un engagement de financement de la part de la province?

M. Fantino: Des gouvernements provincial et fédéral.

Le sénateur Day: Cet argent est-il destiné exclusivement à la police de Toronto, les intervenants médicaux de Toronto et le service d'incendie?

M. Fantino: Oui. L'unité chargée des opérations lourdes de recherche et de sauvetage sera également en mesure d'intervenir ailleurs, en dehors de la ville, un peu comme le fait le FEMA aux États-Unis. Vous êtes peut-être au courant. Voilà ce que nous avons offert. Comme Toronto est un très grand centre, nous pourrions faire en sorte que Toronto devienne le principal centre de coordination des mesures d'intervention en cas d'incident majeur en dehors de notre secteur particulier.

Le sénateur Day: Et qui prendrait la décision de faire de Toronto un centre d'expertise chargé d'assister Mississauga, Oshawa et Hamilton?

M. Fantino: C'est l'offre que nous avons faite. Je devrais préciser que le gouvernement provincial a transféré cette responsabilité à la Police provinciale de l'Ontario, qui compte à présent une nouvelle unité antiterroriste dotée d'un personnel deÇ 24 agents qui travailleront en partenariat avec les polices municipales et les organismes fédéraux d'exécution de la loi. Cette unité bénéficiera d'un financement de 3,5 millions de dollars par année et se chargera de mener des opérations de collecte de renseignements visant plusieurs secteurs de responsabilité. Il existe également une unité d'intervention d'urgence en cas de déversement de matières dangereuses.

Ce qu'il faut retenir, c'est qu'étant donné que cette entité est responsable de toute la province, en cas d'incident, ce sont mes agents, les pompiers et spécialistes médicaux locaux qui seront appelés à intervenir. Ça c'est une bonne structure d'appui, mais c'est nous qui serons appelés à intervenir en premier lieu.

Le sénateur Day: On peut supposer que des unités d'intervenants de première ligne devront être mises sur pied dans diverses régions de la province et du pays.

M. Fantino: Oui, certainement. Mais dans la ville de Toronto, nous estimons qu'il est tout à fait critique que nous soyons bien formés, bien équipés et capables de réagir en cas d'incident à titre d'intervenants de première ligne, pour garantir la sécurité de notre personnel.

Bien sûr, d'autres personnes seront appelées à participer à ces efforts. En ce qui nous concerne, cela va de soi. Mais voilà ce qui nous inquiète: à quoi serons-nous préparés, dès que nous recevrons l'appel ou qu'il y aura un incident et que nous devrons intervenir? Comme je vous l'ai déjà dit, nous ne pourrons pas nous contenter d'installer un cordon de sécurité jaune en attendant que d'autres arrivent. Nous devrons être des intervenants de première ligne.

Le sénateur Day: Est-ce que cela suppose que tous vos agents reçoivent certains cours de formation?

M. Fantino: Oui. Les forces de police des États-Unis sont en train de former et d'équiper tout leur personnel, dans la mesure du possible, pour qu'il soit en mesure d'intervenir de façon sécuritaire en cas d'incident de cette nature.

Le sénateur Day: Avez-vous préparé un budget? Savez-vous ce que cela coûtera?

M. Fantino: Nous avions un budget, mais il a été écarté.

Le sénateur Day: Il était tellement considérable qu'on l'a écarté, c'est ça?

M. Fantino: Nous avons préparé un budget qui tenait compte des besoins de tous les services d'urgence — les services de santé, d'incendie, d'ambulance et de police. En fin de compte, des sommes ont été affectées aux services d'incendie, de santé et d'ambulance, mais la police n'a rien obtenu, à part quelques postes pour des employés détachés.

Le sénateur Day: À part la Police provinciale de l'Ontario, existe-t-il un organisme de coordination ou une association de chefs de police en Ontario?

M. Fantino: Oui. L'Association des chefs de police de l'Ontario a élaboré une proposition détaillée ainsi qu'un plan d'intervention. Certaines de nos idées ont été retenues. Par exemple, nous avions proposé une conférence sur le terrorisme, et cette conférence a eu lieu. D'autres initiatives que nous avions suggérées ont également été prises.

Ce qui s'est produit essentiellement, sénateur, c'est que le gouvernement fédéral a versé des fonds aux organismes fédéraux et le gouvernement provincial a affecté des fonds aux organismes provinciaux. On peut toujours parler de financement, mais dans la ville de Toronto, il n'y a tout simplement plus de crédits disponibles dans ce domaine.

Le sénateur Day: En ce qui nous concerne, ce serait utile de pouvoir prendre connaissance de propositions qui ne sont pas confidentielles, et qui pourraient donc être rendues publiques; donc, si vous êtes en mesure de nous communiquer les budgets proposés et d'autres propositions qui auraient été faites soit par l'Association des chefs de police de l'Ontario, soit par la police de Toronto, ce serait bien utile.

M. Fantino: Je peux vous les faire parvenir.

Le sénateur Forrestall: Merci, chef Fantino, d'avoir pris cette initiative. Vous êtes la première personne, occupant un poste comme le vôtre, à venir parler de faits concrets concernant ce qui se fait dans votre localité, ce que vous faites pour vous en sortir et les lacunes du système actuel.

Avant de comparaître devant le comité, avez-vous consulté le chef du service d'incendie en prévision de la préparation de votre mémoire, et cetera?

M. Fantino: J'ai eu des discussions avec lui, oui.

Le sénateur Forrestall: Pourquoi n'est-il pas là aujourd'hui? Évidemment je ne m'attends pas à ce que vous me répondiez.

M. Fantino: Je suis sûr qu'il serait ravi d'être là.

Le sénateur Forrestall: Vous avez parlé de l'Association provinciale des chefs de police. Mais qu'en est-il de l'Association canadienne des chefs de police? Ce serait bien utile qu'un organe national prépare un mémoire sur le sujet.

M. Fantino: Je suis convaincu que les responsables de cette association seraient tout aussi désireux que moi de communiquer au comité leurs vues sur la question.

Le sénateur Forrestall: Peut-être pourriez-vous le leur suggérer?

M. Fantino: Je veux bien en glisser un mot aux responsables des deux organismes, si vous le souhaitez. Je siège au Conseil d'administration de l'Association des chefs de police de l'Ontario et je suis membre de l'Association canadienne des chefs de police. Je suis sûr que ces deux organismes seraient ravis de vous faire part de leurs observations.

Le sénateur Forrestall: En ce qui nous concerne, ce serait bien utile de pouvoir prendre connaissance de leurs observations ou de tout commentaire qu'ils voudraient bien nous faire sur la question. Tout ce qui permet d'élargir le débat, et de nous éloigner de la notion selon laquelle tout doit relever de la responsabilité du fédéral, afin que d'autres puissent jouer un rôle dans ce domaine, est forcément positif.

En ce qui concerne la fréquence des incidents depuis le 11 septembre, je dois dire que c'est non seulement étonnant mais inquiétant. Est-ce que la situation s'est stabilisée? Avez-vous observé une baisse du nombre d'incidents?

M. Fantino: Oui, nous avons observé une baisse importante. Pendant un bon moment, nous réagissions constamment à un nouvel incident. Mais le niveau d'activité a progressivement diminué.

Le sénateur Forrestall: Êtes-vous au courant des mesures qui ont dû être prise en réponse à des appels?

M. Fantino: Oui. Par exemple, les nombreux appels au sujet d'une poudre blanche ont complètement bouleversé la ville. Nous avons traité chaque incident avec sérieux. Ça perturbe sérieusement la vie de tous les jours. Les gens ont très peur. Il y a des marginaux dans la société qui profitent de ces incidents pour faire des mauvais coups.

Collectivement, nous avons tous fait un excellent travail — je veux dire par là le service d'incendie, d'ambulance, médical et le médecin hygiéniste — pour ce qui est de bien renseigner les citoyens afin d'atténuer leur angoisse. Nous avons fait l'impossible pour réagir efficacement à chacun de ces appels, sans idées préconçues et sans jamais sous- estimer leur importance. Voilà qui a considérablement rassuré les citoyens.

Le sénateur Forrestall: Je m'intéresse à votre capacité de communiquer avec les services d'incendie et de santé, les instances fédérales et d'autres services qui sont présents sur le terrain; disposez-vous tous de la capacité technique voulue pour assurer ce genre de communications efficaces

M. Fantino: Oui, tout à fait. Par exemple, je rencontre régulièrement mes homologues des services d'urgence. Nous comprenons très bien nos rôles et responsabilités respectifs. Nous travaillons en collaboration pour coordonner tous les éléments de notre intervention compte tenu de nos besoins et des défis que nous avons à relever depuis le 11 septembre.

Le sénateur Forrestall: Autrement dit, les chiffres que vous venez de nous donner ne concernent que Toronto. Quelle est la population de la région du Grand Toronto et quel est l'effectif policier?

M. Fantino: La RGT compte plus de 5 millions d'habitants, et probablement 2 500 policiers.

Le sénateur Forrestall: Est-ce qu'un de vos policiers patrouilleurs peut communiquer depuis sa voiture avec une voiture de la PPO?

M. Fantino: Non. Il faut qu'on passe par un centre d'acheminement des appels. Il ne nous est pas possible de leur parler directement.

Le sénateur Forrestall: Il faut qu'un centre vous passe la communication?

M. Fantino: Oui.

Le sénateur Forrestall: Est-ce pour assurer votre propre sécurité?

M. Fantino: Non, c'est le système qui a évolué ainsi. Nos systèmes sont différents. Comme nous sommes des forces de police indépendantes, nous prenons les mesures qui nous semblent appropriées pour nos collectivités respectives. Souvent, il n'y a pas de possibilité de communication.

Le sénateur Forrestall: Êtes-vous en mesure de communiquer avec la GRC?

M. Fantino: Pas directement, non.

Le sénateur Banks: Et avec le service d'incendie?

Le sénateur Forrestall: Je suppose que vous êtes tout de même en mesure de communiquer avec le service d'incendie.

M. Fantino: Nous pouvons établir une liaison téléphonique avec le service d'incendie.

Le sénateur Forrestall: Vous avez parlé de «liaison téléphonique».

M. Fantino: Oui.

Le sénateur Forrestall: Donc, vous ne pouvez pas les appeler directement?

M. Fantino: Avec le nouveau système que nous avons installé, si. Cependant, les agents individuels ne sont pas raccordés. Nous devons convertir l'ensemble du système pour être en mesure d'intégrer l'ensemble des communications dans la ville.

Le sénateur Forrestall: Mais cela peut se faire, n'est-ce pas?

M. Fantino: Oui, ça peut se faire.

Le sénateur Forrestall: Assez rapidement?

M. Fantino: Oui.

Le sénateur Forrestall: Ça prendrait combien de temps?

M. Fantino: Quelques minutes. Il faudrait une autorisation en bonne et due forme. Au départ il faudrait qu'il s'agisse d'une urgence, et ensuite il faudrait une autorisation pour faire le raccordement avec l'autre système.

Le sénateur Forrestall: Et qui donnerait l'autorisation?

M. Fantino: Nous — c'est-à-dire soi moi, soit un autre membre de l'équipe de commandement.

Le sénateur Forrestall: Et êtes-vous en mesure de communiquer avec l'armée?

M. Fantino: Non, nous pouvons communiquer uniquement par téléphone. Quand nous avons établi cette Unité d'enquête mixte, nous avons éliminé toutes ces barrières, si bien que nous pouvons communiquer les uns avec les autres, du moins au niveau du commandement.

Le sénateur Forrestall: À votre avis, la vérification que vous proposez abordera-t-elle ce genre de préoccupation?

M. Fantino: J'imagine que nous tâcherions d'élaborer une démarche ou plan d'intervention qui permette de tenir compte de tous ces besoins en situation d'urgence.

Le sénateur Forrestall: S'agissant de formation, ai-je raison de penser que vous souhaitez que vos agents reçoivent une formation spécialisée qui leur permette de savoir comment réagir face à des menaces biologiques et à des formes d'hostilité autres que les criminels, et cetera?

M. Fantino: Oui.

Le sénateur Forrestall: Et quelle est l'ampleur de la formation que vous préconisez?

M. Fantino: Il faudrait que les intervenants de première ligne soient suffisamment bien formés pour savoir utiliser les bons équipements en cas d'intervention d'urgence. Les intervenants de première ligne auraient les compétences voulues pour faire une bonne analyse de la situation. Nous ne nous attendons pas à ce que ces intervenants assument la responsabilité d'une situation pendant longtemps. Le problème, c'est que lorsqu'un incident se produit, les premiers à devoir intervenir seront ceux qui se trouvent déjà sur la route ou les pompiers qui répondent à un appel.

Le sénateur Forrestall: Vous parlez de la nécessité d'améliorer leurs compétences pour qu'ils sachent, en observant la situation, qu'ils ont besoin d'un chef ou d'autres intervenant spécialisés; c'est ça?

M. Fantino: Oui, ou encore pour qu'ils sachent se mettre en tenue appropriée et se comporter d'une façon qui va garantir la sécurité de tous.

Le sénateur Forrestall: Il serait très important que votre association nationale et n'importe quel autre groupe que vous pouvez intéresser à la question de communiquer avec nous — même si cette communication prend la forme d'une simple lettre adressée au président.

M. Fantino: Je suis à votre service. Je serais très heureux de les inciter personnellement à communiquer avec le comité.

Le sénateur Forrestall: Nous vous invitons officiellement à le faire.

M. Fantino: Je vais certainement les encourager personnellement et insister sur le fait qu'ils devraient comparaître eux-mêmes pour vous communiquer directement leurs points de vue. Il ne s'agit pas de faire les prophètes de malheur. Cette question nous préoccupe tous au plus haut point. Des gens qui occupent des postes comme le mien ont le devoir de définir clairement les difficultés qu'on rencontre. Je ne prétends pas avoir raison dans tous les cas, mais il nous incombe de vous mettre au courant des problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Le sénateur Forrestall: Oui, c'est absolument essentiel. Il importe aussi... par exemple, j'ose espérer que Holland College est un coin aussi éloigné et sécuritaire qu'on le croit. J'habite une localité très sûre. Personne ne m'attaquera là- bas. Il n'y a que des forêts et de l'eau salée.

Les écoles de police ont-elles actualisé leurs programmes d'études pour aborder des questions telles que la détection des activités terroristes et les communications?

M. Fantino: Non, je ne crois pas. L'école de police de Toronto dispense certainement de cours spécialisés sur la gestion, et cetera. Mais je ne suis pas au courant de tous les cours qui sont offerts. Je sais que nous essayons de mettre à niveau notre cours de formation des nouvelles recrues. Malheureusement, sénateur, je ne sais pas vraiment ce qui a été fait dans ce domaine.

Le sénateur Forrestall: Quand vous dites que vous essayez de «mettre à niveau le cours de formation des nouvelles recrues», parlez-vous surtout des compétences?

M. Fantino: C'est le cours qui est dispensé aux agents de police du niveau d'entrée.

Le sénateur Forrestall: Et quel est le niveau de formation à l'heure actuelle?

M. Fantino: Nos recrues arrivent à l'âge de 21 ans. Il y a deux niveaux de formation. Le Collège canadien de police assure une formation spécialisée centrée sur la gestion, qui comprend des cours sur l'analyse des empreintes digitales, la neutralisation des bombes, et ce genre de choses.

Mais moi je vous parle de la formation des nouvelles recrues. Le collège de police n'assure pas la formation des nouvelles recrues. Cela se fait à Aylmer, en Ontario. Dans le cas de la GRC, la formation est dispensée à Regina. Il y a deux niveaux de formation.

Je suis convaincu que dans les circonstances actuelles, tout le monde revoit et réexamine les programmes de formation pour voir ce qu'il convient d'y incorporer.

Le sénateur Forrestall: Merci, chef, pour le leadership et l'initiative dont vous avez fait preuve en comparaissant aujourd'hui.

Le sénateur Wiebe: Je vais vous poser une question que j'ai posée à toutes les forces de police qui ont comparu devant le comité ces derniers temps. Nous avons reçu des témoignages d'un grand nombre d'entre elles. Au Canada, nous avons une vaste gamme de forces policières différentes. Il y a les agents de police municipaux, provinciaux et fédéraux, de même que ceux qui assurent la sécurité aux ports d'entrée et frontières. Nous avons tous les types de forces policières possibles et imaginables au Canada.

Je constate cependant qu'il y a beaucoup de double emploi. Je constate qu'il existe toutes sortes de niveaux de formation différents. Dans certains cas, il y a des lacunes très importantes en ce qui concerne les informations dont doivent disposer les agents pour bien faire leur travail. Dans tous les cas, il y a une pénurie grave de ressources, si bien que les policiers ne peuvent pas faire le travail qui correspond à leur mandat.

De plus, il y a de graves lacunes au niveau des communications alors qu'il est si indispensable de nos jours que les forces policières puissent partager rapidement des informations essentielles.

Qu'y aurait-il de mal à former une force de police nationale? Pourquoi ne pas confier la responsabilité de toutes ces questions à une seule force de police?

Supposons que la GRC devienne la force de police nationale du Canada. Elle serait chargée de protéger les ports, nos villes et nos provinces. Elle aurait à s'assurer que l'ensemble des agents de toutes les régions du pays reçoive la bonne formation. Il n'y aurait pas de double emploi sur le plan des ressources.

Dans votre cas, puisque vous êtes le chef de police de Toronto, vous deviendriez le sous-commissaire de la Division T. Vous auriez les mêmes responsabilités qu'à l'heure actuelle, en tant que chef de police de Toronto, mais vous feriez partie d'une force plus importante qui vous fournirait la possibilité de communiquer immédiatement avec toutes les régions du pays. Cette force assurerait le même niveau de formation que toutes les autres forces de police et collectivités.

Si tout le monde parlait la même langue, tous ceux qui feraient partie de cette force seraient en mesure de se comprendre. Je n'ai pas l'impression que c'est le cas actuellement.

Vu les ressources considérables dont disposent les criminels, il est d'autant plus important que nous puissions échanger de l'information rapidement. Ils sont déjà bien plus avancés que nous. À l'heure actuelle, nous accusons de plus en plus de retard.

J'espère que vous ne prendrez pas en mauvaise partie ce que je vais vous dire, mais j'ai l'impression qu'il se crée de petits empires dans les divers services et forces de police du Canada. Il y a trop de double emploi, et cela nous coûte très cher.

Quelle serait donc votre réaction si le comité recommandait que nous créions une seule force de police au Canada, et le gouvernement décidait de donner suite à cette recommandation?

M. Fantino: Sénateur, vous me posez une question très directe qui mérite une réponse tout aussi directe. Il n'y aurait pas de mal à faire ce que vous proposez.

En ce qui concerne le bien public, dans tous les domaines — qu'on parle de l'intégration, de la possibilité de faire front commun ou d'assurer une plus grande efficacité — il est certain que les résultats seraient certainement excellents. Je n'ai absolument rien contre, mais cela pourrait se révéler difficile pour des raisons politiques.

Vous êtes peut-être au courant du système en vigueur au Royaume-Uni. Là ils ont la notion de Home Office; donc, même s'il existe des polices différentes, toutes relèvent d'une même structure.

En ce qui me concerne, et certains de mes collègues n'apprécieront peut-être pas cette observation, l'idée de rationaliser le système, d'éliminer le double emploi, de rassembler nos énergies et ressources collectives et de conjuguer nos efforts pour nous attaquer à un problème en est une que je n'hésite aucunement à cautionner. Nous souhaitons assurer le meilleur service possible à la population tout en garantissant la sécurité et une qualité de vie optimale pour tous.

Si c'était possible de faire ce que vous proposez, je suis bien d'accord pour dire que le résultat serait certainement extraordinaire.

Le sénateur Wiebe: Je vais parler à mes collègues au cours des prochaines semaines pour les convaincre de faire une telle recommandation. Mais pour savoir si j'ai réussi ou non, vous devrez lire le rapport.

M. Fantino: Je le ferai, sénateur. Certains se sentiront menacés. Leur réaction sera de dire: «Plus gros, ce n'est pas forcément mieux.» Vous avez déjà entendu ce genre de choses.

Mais d'un point de vue purement pragmatique, par rapport à ma façon de concevoir mon rôle et mes responsabilités vis-à-vis du public que je sers, je dois dire que c'est une idée que j'accueille très favorablement.

Le président: Monsieur Fantino, nous avons été très heureux de vous recevoir aujourd'hui et de connaître vos vues sur la question. Vos observations sont d'une grande utilité dans le cadre des travaux du comité. Nous espérons vous revoir bientôt.

M. Fantino: Merci.

Le président: Nous accueillons maintenant M. Robert Wright. Fonctionnaire de carrière, M. Wright a occupé divers postes supérieurs au ministre des Affaires étrangères, au Bureau du Conseil privé et à Agriculture Canada avant de devenir sous-ministre de Revenu Canada et commissaire de la nouvelle agence. L'Agence canadienne des douanes et du revenu est responsable de l'application de 70 lois et d'une cinquantaine d'ententes. Il y a 479 points de services douaniers, dont 412 se trouvent à la frontière.

Depuis le début de notre étude, de nombreuses questions se posent au sujet de la sécurité de nos frontières. Nous avons donc invité le commissaire Wright à comparaître devant le comité pour parler du travail de l'Agence et des mesures qui ont déjà été prises ou sont en préparation pour garantir l'intégrité de nos frontières.

M. Robert Wright, commissaire, Agence des douanes et du revenu du Canada: Je vais faire quelques brèves remarques liminaires et je serai ensuite à votre disposition pour répondre à vos questions. Je tiens à vous dire d'entrée de jeu que je suis très fier d'avoir aujourd'hui l'occasion de représenter les Douanes canadiennes, et je suis très content de savoir que vous pourrez visiter Lansdowne demain. Si je ne m'abuse, vous avez pu, dès le début de votre étude, rencontrer des membres de notre personnel à Halifax et à Vancouver. Ils font un excellent travail sur la première ligne. Quand les législateurs ont la possibilité d'observer eux-mêmes la situation sur la première ligne, ça encourage toujours nos employés, et je tiens donc à vous remercier d'avoir pris le temps de faire cette visite et de rencontrer les personnes qui travaillent si efficacement en notre nom. Je suis très fier de ce qu'ils font. Je sais qu'il en va de même pour le ministre. Le premier ministre, le vice-premier ministre et le greffier du Conseil privé ont tous saisi l'occasion de rendre hommage à la diligence démontrée par nos employés, notamment depuis le 11 septembre. Donc, votre présence ne fait que renforcer ce message.

Nous avons commencé il y a quelques années à revoir l'ensemble de nos programmes douaniers de fond en comble. Comme un accord de libre-échange était déjà en place à l'époque depuis plus d'une décennie, le moment semblait opportun pour moderniser nos procédures douanières afin de mieux relever les défis liés à la frontière que nous partageons avec les États-Unis. Les déplacements entre nos deux pays ont augmenté de façon exponentielle au cours des 10 dernières années et nous voulons nous assurer que nos procédures évoluent au même rythme.

M. Lefebvre a coordonné un programme d'approche, qu'on a appelé l'Exercice d'élaboration du plan directeur des Douanes, en vue de consulter les intervenants clés, comme les courtiers en douane et les entreprises canadiennes, pour savoir ce que nous devrions faire pour moderniser nos procédures à la frontière. Nous avons ensuite élaboré un plan d'action pour les Douanes à l'intention du ministre de l'époque qui traitait des différents changements que nous souhaitions apporter au système. Ce rapport a été très bien accueilli par le gouvernement et les entreprises en général, et nous avons donc commencé à le mettre en oeuvre.

C'est alors qu'ont eu lieu les événements du 11 septembre, dont le résultat a été une intensification des préoccupations de tous et chacun à l'égard de la sécurité de nos frontières et un désir accru de réexaminer les procédures que nous étions en train d'appliquer pour nous assurer qu'elles étaient aussi sûres et efficaces que possible. Après avoir consulté les entreprises et d'autres intervenants clés, même si nous n'avons pas changé d'orientation, nous avons décidé d'accélérer le processus de mise en oeuvre de certains changements importants à notre frontière avec les États-Unis et dans d'autres secteurs, et c'est ce que nous avons fait.

M. Lefebvre a travaillé activement à la préparation du projet de loi S-23, qui a permis de moderniser notre système de traitement des envois commerciaux et des humains à la frontière en nous fournissant d'importants nouveaux outils de sécurité pour mieux gérer nos opérations. Après le 11 septembre, il semblait nécessaire d'accélérer le plus possible la mise en application de ces nouveaux outils.

Dans vos remarques liminaires, monsieur le président, vous avez fait mention de quelques questions clés de contrôle stratégique touchant cet important dossier de la sécurité. D'abord, le budget qui a suivi l'événement du 11 septembre nous fournissait des crédits importants pour financer une vaste gamme d'initiatives s'inscrivant dans un projet cadre coordonné. Il s'agissait entre autres de l'accroissement considérable de nos ressources, pour nous permettre d'accélérer l'application de ces nouvelles mesures de sécurité et formalités modernes de frontière. Deuxièmement, une semaine après le dépôt du budget, la rencontre du gouverneur Ridge et de l'actuel vice-premier ministre Manley a donné lieu au plan d'action en 30 points. Nous avons été considérablement touchés par ce plan d'action. Nous participons à une quinzaine des initiatives et c'est nous qui pilotons huit d'entre elles.

En fait, mercredi, M. Lefebvre et moi nous rendrons aux États-Unis pour rencontrer nos collègues des services américains de l'immigration et des douanes. Il s'agira de ma neuvième rencontre avec le commissaire Bonner, des douanes américaines, depuis six mois. Nous travaillons en étroite collaboration pour moderniser notre démarche afin de garantir la stabilité de notre économie et un environnement plus sûr pour les citoyens des deux pays.

Nous travaillons activement à la préparation de six ou sept initiatives particulières, et ce dans trois grands domaines: pour améliorer la sécurité tout en accélérant le passage à la frontière des marchandises et des gens, moderniser nos procédures de dédouanement commercial, et collaborer sur la scène internationale en vue de renforcer l'environnement général dans l'ensemble du monde en ce qui concerne la sécurité des conteneurs en particulier, mais dans d'autres domaines également.

Je peux vous faire un bref résumé de ce en quoi consiste les initiatives prises dans ces trois domaines. En ce qui concerne la sécurité des personnes, nous essayons d'accélérer le plus possible l'élargissement d'un projet pilote sur l'utilisation d'une carte à puce pour l'identification des voyageurs à faibles risques. Plus de 100 millions de personnes traversent la frontière canado-américaine chaque année. Nous souhaitons par conséquent identifier les voyageurs qui posent très peu de risques et peuvent faire l'objet de contrôle de sécurité dans les deux pays. Ces personnes recevraient une carte à puce leur permettant d'effectuer des voyages dans les deux sens. Voilà déjà plusieurs années que nous mettons à l'essai le programme CANPASS pour les déplacements vers le Canada. Les États-Unis ont créé leur propre programme, qui s'appelle INSPASS.

De plus, l'année dernière à Sarnia-Port Huron, nous avons mis à l'essai un programme qui s'appelle NEXUS. Ce programme prévoit l'utilisation d'une seule carte et le recours à un seul processus d'inscription. Les voyageurs à faibles risques peuvent demander à y participer, faire l'objet de contrôles effectués à l'aide de trois ensembles de données et divers organismes de sécurité des deux côtés de la frontière, en vue d'obtenir une carte. Les deux pays suivent de près les progrès et les deux sont très satisfaits des résultats. Par conséquent, le ministre Manley et la ministre Caplan ont annoncé il y a quelques semaines que nous envisageons d'élargir le programme NEXUS dans les plus brefs délais, pour l'offrir en Colombie-Britannique et dans le sud de l'Ontario.

La meilleure façon d'identifier les voyageurs à faibles risques consiste à les traiter à part et à se concentrer sur l'inconnu, et voilà justement ce que nous faisons. Cette semaine, nous allons rencontrer nos collègues américains pour en discuter.

Nous examinons la possibilité d'adopter l'approche de la carte à puce pour les déplacements en avion à faibles risques. Au Canada nous avons huit centres de prédédouanement des personnes voyageant en avion vers les États- Unis. Si je ne m'abuse, 80 p. 100 des voyageurs partant de l'Aéroport Dorval ont pour destination les États-Unis.

M. Denis Lefebvre, sous-commissaire, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada: À l'Aéroport Dorval, 10 millions de passagers transfrontaliers arrivent en avion depuis les États-Unis chaque année.

M. Wright: Si nous sommes en mesure d'utiliser une carte biométrique pour identifier les voyageurs à faible risque et accélérer leur traitement, nous pourrons à ce moment-là nous concentrer sur l'inconnu. Donc, en ce qui concerne le mouvement des personnes, nous réalisons de bons progrès de pair avec les États-Unis. Notre objectif est le même, c'est- à-dire d'identifier les voyageurs à faibles risques et de nous concentrer sur l'inconnu.

Du côté commercial, nous avons annoncé des changements très importants l'année dernière, et en décembre, nous avons commencé à mettre en oeuvre un programme que nous appelons le Programme d'autoévaluation douanière. Rappelez-vous que le libre-échange est en vigueur au Canada depuis plus de 10 ans et que les 100 plus grandes compagnies sont à l'origine de plus de 40 p. 100 des importations vers le Canada. Les 1 000 plus importantes entreprises sont à l'origine de plus de 70 p. 100 des échanges. Comme vous le savez peut-être, l'ADRC procède à des vérifications, et pour ce qui est du dédouanement des marchandises commerciales, nous préférons recourir à un système de vérification des marchandises après leur entrée au Canada, plutôt que d'essayer de suivre de près chacune des 11 millions de transactions commerciales chaque année.

Nous avons offert aux compagnies plus importantes ou plus sûres qui sont prêtes à faire des investissements pour devenir des partenaires sur le plan de la sécurité d'utiliser un processus de vérification des marchandises après l'entrée au Canada. Les entreprises étaient très intéressées et tout à fait disposées à faire les investissements requis. Les États- Unis suivent aussi les progrès dans ce domaine. À cet égard, nous travaillons très fort avec les douanes américaines, et la ministre Caplan a fait savoir qu'elle voudrait être en mesure d'exécuter un programme dont les conditions seraient les mêmes dans les deux sens. Ainsi nous collaborons avec nos collègues américains à la définition d'une démarche harmonisée qui traduira notre volonté commune d'accélérer les échanges tout en cernant l'inconnu pour pouvoir mieux cibler nos efforts. Nous essayons d'établir des partenariats fructueux avec nos collègues des entreprises privées qui sont prêtes à investir dans la sécurité pour que nous puissions ensemble rehausser la sécurité des échanges dont ils bénéficient.

Nous avons également conclu toute une série d'accords de coopération avec les États-Unis touchant la sécurité, la fraude commerciale et la communication réciproque d'information sur les voyageurs à risques élevés. Nous envisageons d'élargir également nos initiatives dans ces divers domaines.

Enfin, les États-Unis et le Canada sont des membres de l'Organisation mondiale des douanes qui sont à mon avis très estimés. M. Lefebvre est vice-président de l'Organisation pour la région des Amériques. Nous souhaitons nous attaquer à diverses questions internationales grâce à la collaboration avec les autres pays membres de l'Organisation.

Vous avez abordé la question des conteneurs et du transport maritime dans un rapport antérieur. Bon nombre des solutions que nous cherchons à définir pour améliorer la sécurité globale des échanges reposent sur une démarche internationale qui suppose une information plus complète à l'avance, la conclusion de protocoles avec les principaux ports du monde pour nous renseigner sur la nature des envois avant qu'ils quittent le port, et ce encore une fois, pour nous aider à nous concentrer sur les envois qui semblent préoccupants avant même d'avoir quitté le port d'origine.

Nous avons un programme très vaste et important de projets coopératifs à entreprendre avec les États-Unis. Je suis à même de discuter de n'importe quel aspect de ce programme qui pourrait vous intéresser. Je tiens à répéter, d'ailleurs, à quel point nous sommes heureux de votre décision d'aller dans les régions pour observer vous-mêmes le travail des agents qui sont sur la première ligne. Tous les jours sur la première ligne, nous témoignons de l'esprit de collaboration qui existe entre nos deux pays et que nous essayons de communiquer dans nos réunions avec la Commission Bonner et les dirigeants des douanes américaines.

Le sénateur Atkins: Comme vous le savez, la Chambre des communes est actuellement saisie du projet de loi C-55. Dans quelle mesure ce projet de loi vous aidera-t-il à vous acquitter de vos responsabilités?

M. Wright: Il y a des problèmes en ce qui concerne l'échange d'information.

M. Lefebvre: Le projet de loi C-55 a pour objet d'accorder certains pouvoirs que requièrent d'autres ministères. Que je sache, ce projet de loi ne nous confère aucun pouvoir additionnel. Une toute petite disposition du projet de loi, qui compte environ deux lignes, nous accorde le même pouvoir que prévoyait le projet de loi S-23, mais il ne s'agit pas d'une disposition habilitante. Elle a simplement pour objet d'éliminer une anomalie de la législation actuelle. Sinon, le projet de loi C-55 n'influera pas sur le travail de l'Agence.

Le sénateur Atkins: Vous permettra-t-il d'avoir accès aux listes de passagers?

M. Lefebvre: Aux termes du projet de loi S-23, qui modifiait la Loi sur les douanes, nous sommes autorisés à obtenir de l'information auprès des compagnies aériennes très tôt, même avant le départ, ou par voie électronique; donc, nous détenons déjà ce pouvoir grâce au projet de loi en question. Du moment qu'il s'agit d'un moyen de transport public, nous avons le droit de demander que l'équipage nous remette au préalable le manifeste de passagers. C'est ce que nous appelons les renseignements anticipés sur les passagers ou les fiches d'information ou les fiches signalétique.

Le sénateur Atkins: Avez-vous suffisamment de personnel pour examiner les manifestes lorsqu'on vous les fournit — par exemple, pour un vol en provenance de Boston et à destination de Halifax?

M. Lefebvre: Nous n'aurions pas suffisamment de personnel pour examiner manuellement les manifestes, s'il fallait le faire de cette façon. À présent nous disposons d'outils électroniques permettant de faire une recherche dans les manifestes pour repérer les noms de personnes qui nous intéressent ou qui figurent déjà dans notre banque de données grâce à l'information que nous avons reçue d'autres organismes d'exécution de la loi ou du service d'immigration. Les technologies de l'information dont nous disposons aideront donc nos équipes d'agents à analyser ces données.

Le sénateur Atkins: Toujours sur la question de l'effectif, lorsque nous étions à Halifax, on nous a fait part de certaines préoccupations concernant la formation limitée que reçoivent les douaniers et le personnel de l'immigration. Les témoins en question nous ont vivement exhortés à insister pour qu'il y ait plus de formation et, bien entendu, plus de personnel. Quelle est votre réaction?

M. Wright: D'abord, pour répondre à votre dernier point, l'ADRC investit autant dans les technologies de l'information que la troisième banque la plus importante. Nous sommes très heureux d'avoir maintenant la possibilité d'utiliser de tels outils, qui nous permettent de profiter au maximum de l'information contenue dans les manifestes de passagers qui nous sont donnés par anticipation.

Pour ce qui est du niveau général de nos ressources, nous étions très contents des crédits supplémentaires très importants affectés au ministère au dernier budget, soit 400 millions de dollars au cours de l'exercice financier, somme qui va nous permettre de faire plusieurs choses. Nous avons acquis des technologies de pointe que nous comptons utiliser surtout dans les aéroports et dans les ports maritimes. Au chapitre de la formation, nous sommes fiers de notre excellent bilan à l'ADRC. Nous consacrons chaque année environ 6 p. 100 de notre masse salariale à la formation et l'apprentissage. Un nouveau douanier reçoit huit semaines de formation interne à notre collège de Rigaud, au Québec.

Il y a toujours moyen de faire davantage, et depuis septembre, nous envisageons de créer un programme permanent de formation régulière. Mais même s'il y a moyen de faire plus, nous avons déjà beaucoup de ressources. Nos analyses de rentabilisation sont solides. Pour ce qui est de la frontière terrestre, nous avons maintenant de 25 à 30 p. 100 de personnel de plus. Il s'agit plutôt de savoir comment on peut mieux utiliser ces ressources. La formation est une nécessité absolue. Nous voulons investir dans nos agents de première ligne. Nous sommes très sensibles à cet argument, sénateur, mais je voudrais dire que dans ce domaine le verre est déjà assez bien rempli.

Le sénateur Atkins: Et qu'en est-il des employés temporaires?

M. Wright: Vous parlez des étudiants?

Le sénateur Atkins: Oui.

M. Wright: Nous engageons moins de 300 étudiants pendant l'année, alors que nos douaniers de première ligne sont au nombre de 4 000. Donc le nombre d'employés de ce genre que nous recrutons durant l'année est assez minime. En été, nous en avons plus de 1 000. Il s'agit exclusivement d'étudiants d'université, qui constituent une excellente source de futurs employés. Ne serait-ce que pour cette raison, nous tenons à conserver ce programme. Ils font un excellent travail. Ils bénéficient de trois semaines de formation.

Mon premier emploi au gouvernement était justement un emploi de douanier lorsque j'étais encore étudiant. C'est un bon emploi; il permet de travailler dans un environnement professionnel. Nos douaniers de première ligne ne travaillent pas seuls. Ils font partie de toute une équipe. Ils sont conseillés par les surveillants et d'autres douaniers. Les étudiants représentent une excellente source de futurs douaniers, et bon nombre d'entre eux ne s'arrêtent pas au programme des douanes. En ce qui nous concerne, c'est important, même s'ils ne peuvent aucunement remplacer des douaniers professionnels à plein temps.

Le sénateur Atkins: Nous avons également entendu dire qu'un seul douanier peut être affecté aux points d'entrée moins actifs; on nous a fait valoir qu'il faut affecter deux douaniers à certains de ces points d'entrée, et intensifier peut- être la coopération avec les États-Unis.

M. Wright: Nous déployons des efforts considérables pour élargir nos efforts coopératifs avec les douanes américaines. D'ailleurs, nous partageons des locaux. Nous avons fait construire des installations mixtes à certains points d'entrée et nous souhaitons élargir de telles initiatives. Nous avons un protocole en vertu duquel nous appliquons un système de jumelage des deux côtés de la frontière, et c'est une formule qui intéresse au plus haut point les États-Unis. Nous avons signé des protocoles avec toutes les polices locales. Cela représente un élément essentiel de notre partenariat. Je sais que le commissaire Zaccardelli essaie de mettre en place des équipes intégrées d'exécution à la frontière. Il est en train de créer 14 équipes. Nous participons à cet effort, ainsi que les services d'immigration américain et canadien, le SCRS et les polices locales avec leurs homologues américains.

Nous avons 70 points d'entrée dotés d'un seul douanier. Donc, c'est encore le cas à certains points d'entrée. Pendant des périodes où la sécurité est renforcée, nous prenons diverses mesures, cependant. Pendant un certain temps, nous avons doublé l'effectif à ces points d'entrée. Nous avons cessé de faire ça. Nous pourrions aussi décider de prévoir que certaines équipes d'intervention mobiles intensifient leurs visites pour soutenir le personnel de ces points d'entrée; mais il y a environ 40 ou 50 points d'entrée dotés d'un seul douanier, et si on double les effectifs, étant donné que les douaniers sont des travailleurs postés et toutes les autres complications, on parle de l'équivalent de plus de 200 personnes. Nous avons discuté avec nos employés et les syndicats de la mesure dans laquelle ce serait une bonne utilisation de nos ressources. À notre avis, ce n'est pas le cas. Il y a d'autres façons d'utiliser ces ressources et d'autres moyens de renforcer la sécurité. C'est un dossier que nous suivons régulièrement, et il est prévu que nous discutions cette semaine, d'ailleurs, avec nos homologues américains.

Le sénateur Atkins: Ce qui m'agace, c'est de voir des membres armés de la National Guard américaine à la frontière. Cela m'offusque, et pour tout dire, j'ai l'impression que ce n'est pas nécessaire. Que pensez-vous du port d'armes?

M. Wright: Je n'ai pas d'opinion sur ce que font les Américains.

Le sénateur Atkins: Je parle de nos agents.

M. Wright: Nous avons assuré à nos employés une formation sur la protection personnelle. De plus, ils détiennent à présent des pouvoirs accrus, et peuvent donc arrêter des conducteurs en état d'ébriété, par exemple. Selon les conseils professionnels que nous avons reçus, ils ont besoin d'outils additionnels pour être à même de traiter des cas de ce genre. Nous leur fournissons des matraques et du gaz poivré une fois qu'ils ont reçu une formation complète. Ils font preuve d'une grande compétence dans l'exercice de leurs fonctions. À notre avis, il n'est pas nécessaire de donner des armes à feu aux douaniers canadiens, même si notre syndicat ne soit pas du même avis et exerce des pressions pour en obtenir. À notre avis, les faits ne démontrent pas l'utilité d'un tel changement.

Voilà donc notre avis sur la question, mais comme c'est notre habitude dans un cas de ce genre, nous suivons de près la situation; je précise, cependant, qu'un cas ne s'est jamais présenté où le port d'armes aurait été justifié, même lorsqu'il s'agissait d'incidents sérieux. Plus de 100 millions de voyageurs entrent au Canada depuis les États-Unis, et certains d'entre eux ne sont pas particulièrement sympathiques. Nous devons former nos agents pour qu'ils sachent réagir face à des gens comme ça. Pour ce qui est de donner des armes à feu à 4 000 douaniers, le fait est qu'on ne peut pas simplement leur distribuer des armes de poing. Il faut qu'ils reçoivent une formation complète et qu'ils soient autorisés à utiliser ces armes. Selon nous, les faits, tels que nous les connaissons, ne justifient pas une telle mesure, même si nous continuons à explorer toutes les possibilités. Nous estimons que nos agents sont bien formés et qu'il n'est pas nécessaire à l'heure actuelle de leur fournir des armes.

Le sénateur Atkins: Quand nous étions à Washington, nous avons rencontré certains membres du personnel du gouverneur Ridge. Nous avons été très impressionnés. J'avais l'impression qu'ils avaient la ferme volonté de collaborer étroitement avec le Canada. Que pensez-vous de l'idée de créer une agence qui serait chargée de la sécurité intérieure? Est-ce une bonne idée selon vous?

M. Wright: À mon avis, ils font un excellent travail au niveau de la coordination des mesures prises par suite des événements du 11 septembre.

Le sénateur Atkins: Oui, mais faut-il une agence de ce type au Canada, à votre avis?

M. Wright: Je pense que nous nous débrouillons très bien en ce moment pour ce qui est de coordonner les mesures d'intervention canadiennes. Le vice-premier ministre a une équipe au Bureau du Conseil privé qui coordonne les activités et maintient un bon dialogue avec le service du gouverneur Ridge, de façon à faire progresser notre plan d'action. Le Canada s'est attaqué avec vigueur à cette question et assure une bonne coordination des efforts afin de profiter au maximum de cette nouvelle relation.

Le sénateur Atkins: Nous venons de recevoir M. Fantino, chef de la Police de Toronto, qui estime que les municipalités ne sont pas mises à contribution.

M. Wright: Ce n'est pas à moi de dire de qui relève la responsabilité de s'assurer qu'une municipalité aussi importante est tenue au courant des faits nouveaux.

En ce qui concerne la protection régulière de la frontière, le commissaire Zaccardelli est vivement en faveur d'une initiative intégrée. Dans nos équipes, établies suite à l'initiative du solliciteur général, l'exécution par les agents locaux est tout à fait critique. En Ontario et au Québec, ce sont les forces de police locale qui doivent coordonner l'intervention de seconde ligne. C'est très important. La nuit dernière, il y a eu un incident dans le nord-ouest de l'Ontario. La PPO a assuré le soutien qu'il nous fallait pour faire face au problème. Donc, notre démarche est sans aucun doute une démarche intégrée. S'il y a moyen de l'améliorer encore, on peut envisager de faire davantage à ce chapitre, mais telle est déjà notre approche.

Le sénateur Atkins: Enfin, qu'avez-vous pensé de la recommandation du comité voulant qu'on fasse enquête sur la situation dans les ports de Montréal, Halifax et Vancouver?

M. Wright: Le rapport du comité était très important, et nous aidera certainement à mieux orienter nos efforts relativement à cette priorité. Je ne suis pas convaincu de la nécessité de faire une enquête. Il ne convient pas d'attendre qu'une initiative de ce genre soit prise. Il faut nous attaquer au problème dès maintenant et prendre les mesures qu'il nous est possible de prendre. Voilà ce que nous faisons de concert avec les États-Unis. Pour vous dire la vérité, cela ne m'a pas du tout convaincu que d'autres efforts s'imposaient dès maintenant. Dès lors que l'impulsion est donnée de façon définitive, nous sommes à même d'élaborer un programme d'action et de mettre à profit les ressources que nous recevons. Nous possédons à présent des moyens technologiques très intéressants. Nous voulons nous équiper. Nous voulons aussi collaborer avec nos collègues américains en établissant des exigences plus rigoureuses en matière de renseignements anticipés et une procédure de ciblage plus raffinée, et en démontrant notre capacité d'accomplir un travail collégial avec nos collègues du gouvernement pour réaliser dès maintenant des progrès. Voilà ce sur quoi nous voulons axer nos efforts.

Le sénateur Atkins: Certains sont d'avis que nos recommandations et notre analyse n'allaient pas assez loin.

M. Wright: Qui sont ces personnes? C'est un dossier important. Dans le cadre du travail réalisé de concert avec les États-Unis au cours des cinq dernières années, mais surtout depuis un an ou deux, nous avons établi des comparaisons de bon nombre de nos procédures. Il ne s'agit pas d'un concours, évidemment, mais ces études comparatives ont l'avantage de vous faire savoir quelle contribution vous pouvez apporter. Je dirais que les procédures canadiennes se comparent très bien aux programmes américains. Cependant, dans les deux cas, nous souhaitons élargir notre champ d'action. Il y a lieu d'améliorer notre performance à ce chapitre. À notre avis, c'est possible et nous comptons nous y mettre pour améliorer la situation. Nous avons fait une comparaison de nos formalités aux aéroports et nous sommes actuellement en train de faire la même chose pour les ports maritimes. La comparaison est tout à fait favorable. Cependant, aux États-Unis et au Canada, nous tenons à améliorer nos systèmes. Votre rapport global nous donnera une incitation supplémentaire à faire le nécessaire.

Le sénateur Wiebe: Je suis sûr que d'autres membres du comité ou d'autres sénateurs auront des questions à vous poser au sujet de la sécurité portuaire. Je vais donc leur laisser le soin de vous interroger à leur guise. Toutefois, s'agissant de nous comparer aux Américains, pour moi, la sécurité portuaire aux États-Unis est abominable. Si nous sommes au même niveau, cela signifie que la sécurité portuaire chez nous est tout aussi abominable. Nous avons donc beaucoup de chemin à faire au Canada pour rehausser suffisamment la sécurité portuaire pour que je n'hésite pas à affirmer aux gens de la Saskatchewan qu'elle est suffisante. Je ne comptais pas vous interroger là-dessus cet après midi et, de toute façon, cela n'a pas vraiment beaucoup de rapport avec la défense et la sécurité.

M. Wright: Pour moi, le mot «abominable» est trop fort. Je ne dirais pas que la sécurité portuaire aux États-Unis est «abominable». Il y a toujours lieu d'apporter des améliorations. Mais il ne fait aucun doute que les ports canadiens ont un bon programme. Du côté des douanes, nous avons un excellent programme. Il y a moyen d'améliorer encore les choses, toutefois, et c'est ce que nous comptons faire. Encore une fois, le dernier budget nous accordait des ressources additionnelles considérables. Nous avons déjà acquis des technologies intéressantes qui évoluent rapidement et qui devraient renforcer davantage la sécurité. Cependant, je ne voudrais pas que l'on donne l'impression que la sécurité portuaire au Canada dans le cadre du programme des douanes est abominable. C'est faux. Il y a certes moyen de l'améliorer. Dans la foulée des événements du 11 septembre, il convient certainement de l'améliorer — en fait, c'est une nécessité absolue. Il reste que nous avons déjà une très bonne base, par rapport à ce qui existe sur le plan international.

Le sénateur Wiebe: J'ai dit que la sécurité portuaire aux États-Unis était abominable et que le fait de se comparer favorablement aux États-Unis signifie pour moi que c'est pareil au Canada. Mais je ne vais pas trop insister là-dessus. Je sais qu'il y en a d'autres qui voudraient faire des observations à ce sujet.

J'ai fait plusieurs voyages à l'étranger ces dernières années. J'ai d'ailleurs constaté une grande différence depuis le 11 septembre, par rapport à mes expériences antérieures, et je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que nos douaniers font un excellent travail.

M. Wright: Merci.

Le sénateur Wiebe: J'ai été surpris et très heureux les trois dernières fois — et ce n'était pas le même douanier, étant donné qu'il s'agissait de trois aéroports différents — de me faire dire à mon arrivée: «Bienvenue, nous sommes heureux de vous accueillir dans votre pays.»

M. Wright: C'est fantastique.

Le sénateur Wiebe: Je ne sais pas si vous avez donné l'instruction à votre personnel de faire ce genre de chose, mais je peux vous assurer que cela fait beaucoup d'effet. Et si vous ne l'avez pas fait, faites-le, je vous en prie.

Nos douaniers aux aéroports sont sans doute les agents qui sont les plus agressés de tous. Ils ont affaire à des gens qui ont passé des heures dans des avions, qui très souvent ont dû marcher très longtemps avant d'arriver au poste des douanes, et cetera. Les voyageurs n'ont pas la possibilité de se rafraîchir, d'aller aux toilettes, de s'asseoir pour se détendre un peu ou de fumer, quand il s'agit de voyageurs qui fument. De plus, il faut parfois faire la queue pendant longtemps pour passer la douane, surtout si deux avions sont arrivés à la même heure.

Je crois savoir que les locaux utilisés par les douanes sont loués à l'autorité aéroportuaire. Les murs sont toujours peints en blanc, noir ou gris, comme dans les institutions. Mais quelle merveilleuse occasion de faire de la publicité sur le Canada. Pourquoi ne pas avoir des peintures murales qui racontent l'histoire du Canada ou au moins quelques panneaux qui disent «Bienvenue au Canada»? Il y aurait moyen d'embellir la zone douanière et de la rendre plus intéressante pour les touristes. Nous avons bien des raisons d'être fiers au Canada. Pourquoi ne pas nous vanter un peu? En votre qualité de commissaire, y a-t-il quelque chose que vous pouvez faire pour donner une meilleure première impression du Canada dès l'arrivée dans les aéroports?

M. Wright: Je voudrais certainement comparaître de nouveau devant le comité pour répondre à des questions de ce genre. Je dois dire que je suis très fier du travail que nous accomplissons, et je vous remercie pour vos observations concernant notre personnel de première ligne, sénateur. Ils sont toujours heureux d'accueillir de nouveaux visiteurs et surtout les Canadiens qui reviennent chez eux.

L'accueil à l'aéroport de Vancouver est fantastique. C'est certainement grâce aux efforts de l'administration aéroportuaire, mais l'image qu'on donne du Canada est importante.

Nous cherchons toujours de nouvelles façons de présenter cette image. À Toronto, il y a les drapeaux et le panneau qui dit «Bienvenue au Canada». Peut-être faut-il quelque chose de plus grand et plus audacieux, et on peut certainement envisager autre chose.

Mais encore une fois, j'affirme que le Canada a l'une des meilleures administrations douanières du monde. Ça, c'est un fait. L'autre fait important, c'est que cela ne suffit pas. Je suis très fier de faire partie d'une organisation qui est parmi les plus performantes. Ce qui nous enthousiasme le plus, c'est de savoir que notre équipe veut s'améliorer. Le plus souvent, même à Toronto, on arrive à passer la douane avant même que les bagages ne soient prêts. À mon avis, vous ne seriez pas tellement plus satisfaits si vous deviez attendre aux bagages pendant 10 minutes au lieu de cinq.

Cependant, il y a un certain nombre d'initiatives qu'on peut prendre. Une carte à puce pour les voyageurs fréquents accélérerait les formalités pour bien des gens et nous laisserait libres pour nous concentrer sur l'inconnu. Les fumeurs et les non-fumeurs seraient tous les deux moins agités, sénateur.

Le sénateur Banks: Notre rapport — et je soupçonne que vous l'avez lu — formulait de vives critiques à l'égard de la situation dans certains ports canadiens. Bien des gens ont eu l'air complètement déconcertés par ces critiques. On dirait qu'elles ont surpris et choqué bien des gens.

Avez-vous été surpris ou choqué?

Là je fais surtout allusion aux observations du comité concernant les ports canadiens et la criminalité dans ces ports. Ces observations vous ont-telles surpris?

M. Wright: Elles ne m'ont pas choqué. Voilà un bon moment que nous sommes conscients de certaines difficultés dans les installations portuaires, notamment en ce qui concerne la douane et la sécurité. C'est un problème qui existe depuis un bon moment.

Je n'ai pas été choqué parce que ce sont plutôt les événements du 11 septembre qui m'ont choqué. Je suis sûr que tout le monde a adopté une attitude constructive à l'égard de notre rapport, dans l'idée de savoir dans quels domaines nous devons intensifier nos efforts. Il ne fait aucun doute que nous devons améliorer la sécurité dans nos ports. Nous avons déjà certaines idées concernant les améliorations possibles. À mon avis, c'était un rapport constructif. Je sais qu'il y a un certain nombre de problèmes que nous devons régler. Mais ce ne sera pas facile.

Comme les États-Unis et d'autres administrations douanières, nous avons recours à des techniques de ciblage sélectif à l'égard des envois et d'éléments inconnus. Mais nos ressources sont rares. Nous devons donc nous concentrer sur les secteurs à haut risque.

Nous estimons qu'il est temps que nous exigions de façon plus systématique des renseignements anticipés sur chaque conteneur qui arrivent au Canada. Nos collègues américains sont exactement du même avis. Nous avons donc présenté une proposition, et de concert avec les États-Unis, nous comptons élaborer une proposition en vue de la soumettre à la prochaine réunion de l'Organisation mondiale des douanes.

Le sénateur Banks: Pourriez-vous nous donner d'autres détails à ce sujet? S'agirait-il d'identifier et de sceller les conteneurs dans les ports, avant qu'ils ne soient expédiés en Amérique du Nord, et de faire en sorte qu'on puisse les repérer à l'aide d'un système de positionnement global?

M. Wright: Il n'y a pas de formule magique. Nous voulons simplement connaître le contenu de chaque conteneur. Les agents transitaires possèdent cette information-là. Elle devrait nous être fournie par voie électronique, et nous pourrons à ce moment-là nous en faire un usage très efficace, toujours par voie électronique.

Nous en avons parlé avec nos collègues au G-8. À la conférence dont le Canada est le pays hôte, nous souhaitons parler de certaines des exigences que doit actuellement remplir la communauté commerçante, afin de communiquer notre désir d'obtenir de l'information à l'avance pour pouvoir connaître les importateurs réguliers et sûrs. Nous voulons surtout nous concentrer sur les cas impliquant un importateur qui n'a pas la réputation d'être sûr. Les États- Unis voudraient collaborer avec nous à ce projet.

La ministre Caplan et le commissaire Bonner ont annoncé il y a quelques semaines un accord de réciprocité visant à prévoir des échanges de personnel dans les grands ports pour soumettre à une vérification les conteneurs qui sont en transit vers le Canada depuis les États-Unis, ou vers les États-Unis depuis le Canada, afin que nous les examinions une fois. Les États-Unis sont favorables à cette approche, et voudraient éventuellement étendre cet accord à d'autres pays disposant de grands ports.

Il y a toute une série de questions à examiner. Nous avons conclu une série de protocoles avec le Port de Vancouver, par exemple. Nous participons à l'initiative Partenaires pour la protection, un projet lancé dans la foulée de l'initiative de l'Organisation mondiale des douanes. Les États-Unis viennent aussi d'annoncer une initiative importante du nom de CTPAT.

M. Lefebvre: Il s'agit du sigle du programme «Customs-Trade Partnership Against Terrorism»>.

M. Wright: Oui, c'est ça. Nous sommes d'avis qu'il faut établir un protocole qui précise toutes les initiatives qui seront visées par le partenariat et les mesures à prendre pour en profiter au maximum.

Le sénateur Banks: Voilà. Nous en avons justement parlé dans notre rapport. L'un des aspects importants du travail d'examen des conteneurs sera de faire en sorte que notre contrôle des conteneurs s'enclenche aux points d'origine — c'est-à-dire avant qu'ils ne soient expédiés en Amérique du Nord, n'est-ce pas?

M. Wright: Je pense que nous y arriverons un jour.

Le sénateur Banks: La partie impolie de ma question concerne le fait que vous êtes très présents dans les ports. Vous avez dit il y a quelques minutes, dans vos remarques liminaires, que vous prenez des mesures pour améliorer la situation dans les installations portuaires.

Voilà donc une question semi-impolie: Au moment de définir ces mesures, n'avez-vous tenu compte d'aucune des recommandations que nous avons faites? N'étiez-vous pas au courant de l'activité criminelle — dans certains cas, assez grave — dans plusieurs installations portuaires du Canada et qui est la source des préoccupations qui auraient été exprimées à cet égard? Et dans l'affirmative, les efforts que vous envisagez de faire maintenant pour améliorer la situation avez-vous commencé à les déployer il y a quelque temps? Ou ce travail est-il plus récent?

M. Wright: Permettez-moi, encore une fois, de vous signaler deux choses. D'abord, votre rapport a pu nous inciter à examiner de plus près encore l'ensemble de nos opérations. Les événements du 11 septembre ont également eu cet effet.

Par exemple, aux postes frontaliers terrestres nous avons lancé un nouveau programme commercial d'autoévaluation douanière en décembre dernier. En prévision du lancement et de la mise en oeuvre de ce programme, nous avons dû pour la première fois à la frontière entre le Canada et les États-Unis effectuer un travail de pré-contrôle et de pré- approbation des chauffeurs pour nous assurer que ces derniers répondaient aux critères d'admissibilité et n'avaient pas de casiers judiciaires. Avant le 11 septembre, cette initiative suscitait des préoccupations considérables dans les milieux concernés. Depuis le 11 septembre, cependant, nous avons le sentiment que la communauté commerçante est prête à devenir un véritable partenaire pour que nous opérions ensemble des changements valables et efficaces.

Ce n'est pas comme si nous nous montrions passifs avant le 11 septembre ou avant la publication de votre rapport; toutefois, nous avons l'impression que l'environnement est maintenant propice à des changements très positifs et significatifs qui vont nous permettre de progresser. La convergence entre ces rapports et l'esprit de coopération que manifestent les entreprises sont deux phénomènes dont nous voulons vraiment profiter.

Le sénateur Banks: Êtes-vous d'accord pour reconnaître que si nos ports ne contribuent pas à assurer notre sécurité dans tous les sens du terme — notre sécurité étant déjà plus rigoureuse dans les circonstances actuelles — et que les ports américains améliorent de façon considérable la sécurité de leurs installations portuaires, les nôtres seront gravement défavorisées à l'échelle internationale? Par conséquent, il faut absolument prendre cette orientation-là.

M. Wright: Oui, certainement. Même si cela ne supposait pas qu'on soit défavorisé sur le plan économique, je ne me sentirais pas à l'aise à l'égard des responsabilités que je suis appelé à remplir si des expéditeurs présentant un risque élevé voulait passer par le Canada. Ce n'est pas ce que souhaitent les Canadiens. Nous devons chercher à multiplier nos gains.

Pour en revenir à ce que disait le sénateur Wiebe, nous ne sommes pas en situation d'infériorité vis-à-vis des ports américains. Absolument pas, mais cela ne suffit pas. Nous devons absolument améliorer la sécurité dans les installations portuaires, et ce travail est déjà en cours. Les améliorations que nous apporterons au système sur ce plan- là seront substantielles.

Beaucoup de conteneurs sont expédiés vers le Canada depuis les États-Unis. Environ 50 p. 100 des conteneurs qui arrivent à Montréal sont transbordés aux États-Unis. Dans le cas de Halifax, il s'agit de 30 p. 100 du trafic, par rapport à 20 p. 100 pour Vancouver. C'est une activité importante pour les administrations portuaires et les chemins de fer, qui permet de rehausser l'efficacité globale de nos systèmes de transport. Nous ne voulons certainement pas compromettre cette activité. Les chemins de fer et les expéditeurs ne veulent pas non plus la compromettre. Dans ce domaine, nous devons nous assurer de bien cibler notre action.

Le sénateur Banks: C'est quelque chose qui préoccupe beaucoup les Américains aussi.

M. Wright: Ils apprécient beaucoup ce qu'on fait. Nous sommes de solides partenaires. Ils tiennent à travailler avec nous, et ils sont tout à fait disposés à reconnaître l'utilité de ce partenariat.

Le sénateur Banks: Vous avez dit que 90 p. 100 de votre effectif est composé d'employés permanents.

M. Lefebvre: Quel pourcentage?

Le sénateur Banks: Il me semble que vous avez parlé de 90 p. 100.

M. Wright: Non, je n'ai pas parlé de 90 p. 100. Je vous ai dit que nous embauchons des étudiants dans le cadre de notre programme des douanes — environ 300 durant l'année, et jusqu'à 1 200 pendant l'été. Je n'ai pas donné de pourcentage précis.

Le sénateur Banks: Dans ce cas, je vous pose directement la question: Quel pourcentage de vos employés à plein temps — et là je ne parle pas d'étudiants qui sont embauchés pour l'été — sont permanents et quel pourcentage sont des employés nommés pour une période déterminée?

M. Wright: Au sein du programme des douanes?

Le sénateur Banks: Je parle des douaniers.

M. Wright: Je dirais environ 90 p. 100.

Le sénateur Banks: Le personnel de première ligne, quoi.

M. Wright: La plupart des employés au programme des douanes sont permanents. Il y a aussi un certain nombre d'étudiants, mais la plupart des employés sont des employés permanents. Il y a peut-être aussi un certain nombre de postes de durée déterminée.

Du côté de l'impôt, l'effectif d'employés nommés pour une durée déterminée est beaucoup plus important, en raison du caractère saisonnier du traitement des déclarations d'impôt. La plupart des employés qui occupent des postes de durée déterminée travaillent à l'impôt.

Le sénateur Banks: Moi je vous parle de ceux qui travaillent à la frontière et dans les ports. Si je vous pose la question, c'est parce que les représentants de votre syndicat nous ont fait savoir, si ma mémoire est bonne... en tout cas, certains membres de votre personnel qui sont douaniers aux postes frontaliers terrestres et maritimes et dans les aéroports nous ont dit que selon leurs estimations, un fort pourcentage de leurs collègues était des employés nommés pour une période déterminée. Ils nous ont également dit qu'à leur avis, seulement un infime pourcentage de ces personnes ont reçu les huit semaines de formation à Rigaud dont vous parliez tout à l'heure.

M. Lefebvre: Permettez-moi d'apporter quelques précisions à cet égard. La plupart de nos employés sont des employés permanents qui travaillent à plein temps. Nous avons un certain nombre d'employés occupant des postes de durée déterminée. Pendant un certain temps, leur nombre était excessivement élevé. Sans que ce soit nécessairement le pourcentage exact, il est possible que la proportion ait dépassé les 10 p. 100 à un moment donné parce que nous avions accusé un certain retard pour ce qui est de former nos douaniers. Par conséquent, les douaniers qui occupent des postes de durée déterminée ont conservé leurs postes non permanents un peu plus longtemps que la normale — c'est-à-dire pas juste quelques mois de plus mais, dans certains cas, pendant plus d'un an avant qu'on puisse leur trouver des postes permanents. Nous avons depuis triplé le taux de participation à Rigaud. Le retard que nous avions accusé a presque disparu. Donc, il n'y aura pas un fort pourcentage d'employés occupant des postes de durée déterminée.

Le sénateur Banks: Vous dites donc que la grande majorité des douaniers de première ligne ont reçu les huit semaines de formation.

M. Lefebvre: C'est exact.

Le président: Avant de passer au prochain intervenant, serait-il possible de nous fournir quelques chiffres, et l'historique de cette situation? Les témoignages reçus par le comité à cet égard sont contradictoires. Nous vous saurions donc gré de bien vouloir nous faire parvenir des statistiques pour les cinq dernières années, mettons.

M. Wright: Avec plaisir.

Le président: Vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'espère?

M. Wright: Pas du tout. C'est important. L'une des pommes de discorde entre nous et le syndicat concernait le recours aux étudiants et la supposition selon laquelle il était possible, à n'importe quel moment, que presque tous les douaniers de service soient des étudiants.

Je précise que nous embauchons des étudiants pour permettre aux gens de prendre congé en été. Nous essayons de garder un certain équilibre pour toujours avoir accès à un certain nombre de douaniers professionnels à plein temps, encore une fois pour maintenir une charge de travail bien équilibrée. En fait, M. Lefebvre a travaillé à la préparation d'un protocole qui devait nous permettre de savoir quelles proportions correspondaient au bon équilibre sur une base permanente. Nous allons vous transmettre ces données pour que vous formiez votre propre opinion à ce sujet.

Le sénateur Cordy: Je tiens à répéter ce que vous-même avez dit, et ce que d'autres sénateurs ont également affirmé, à savoir que les douaniers que nous avons rencontré pendant notre périple à Halifax et à Vancouver font un excellent travail. Je suis convaincu qu'ils doivent trouver le travail assez stressant. Je tiens donc à les féliciter et j'aimerais que vous leur transmettiez mes félicitations.

Je voudrais passer quelques minutes à parler des manifestes des navires ou des conteneurs qui sont destinés aux différents ports. Les inspecteurs canadiens contrôlent seulement 3 p. 100 des conteneurs, et c'est déjà un plus fort pourcentage qu'aux États-Unis. Bien sûr, on effectue des inspections au hasard, mais de façon générale, on peut supposer que vous vous concentrez sur les marchandises que vous jugez être à haut risque. Il reste que d'après ce qu'on nous a dit, les manifestes sont très souvent rédigés en termes très vagues.

M. Wright: C'est exact.

Le sénateur Cordy: Ainsi vous ne savez pas vraiment ce qui se trouve dans le conteneur.

Deuxièmement, le nom du pays qui figure sur le manifeste n'est pas forcément le pays d'origine. Il peut s'agir simplement d'un pays par lequel les marchandises ont transité, mais pas nécessairement du pays d'origine des marchandises. Serait-il possible d'adopter une loi ou de faire en sorte que les manifestes permettent aux douaniers de se faire une idée plus précise des marchandises qui arrivent à nos ports dans des conteneurs?

M. Wright: Vous posez une très bonne question. Notre taux de contrôle est d'environ 3 p. 100, ce qui est déjà plus élevé que dans la plupart des autres pays. Nous n'effectuons pas de contrôle au hasard. Nous préférons procéder par ciblage. Nous avons un centre de ciblage à Halifax et dans chacun de nos grands ports. Ils font un excellent travail. Ils se servent d'outils très valables que nous leur fournissons, outils qui reposent dans la plupart des cas sur un apport d'information. À l'heure actuelle, certaines données qui figurent sur le manifeste sont très générales.

Il y a trois choses qu'on peut faire. Nous avons déjà convenu, au sein de l'Organisation mondiale des douanes, de travailler à l'élaboration d'une série commune d'éléments de données qui ne constitueront pas un fardeau trop lourd pour la communauté commerçante mais seront toujours les mêmes d'un pays à l'autre. C'est un travail qui demandera certainement du temps, mais il faut absolument un ensemble d'information de base qui sont les mêmes, quel que soit le pays concerné.

Deuxièmement, nous voulons mettre la main sur cette information dans les plus brefs délais. Nous savons pertinemment qu'à l'heure actuelle, dans ce milieu, les transitaires en particulier obtiennent cette information-là. Nous voulons qu'ils nous la fournisse. Nous voulons faire en sorte qu'ils soient tenus de nous la fournir le plus tôt possible.

Le Canada ne peut pas annoncer à tous les pays du monde que les marchandises ne pourront plus être expédiées à nos ports en l'absence de cette information. Mais nous sommes disposés à exercer des pressions auprès de bon nombre de nos collègues de l'Organisation mondiale des douanes pour obtenir cette information. Encore une fois, les technologies existent. Cela ne représenterait pas un fardeau trop lourd pour la communauté commerçante. Il faut donc commencer dès maintenant à préparer cette initiative. Nous voulons trouver la meilleure façon de collaborer avec nos collègues américains dans ce sens.

Enfin, il nous faut des outils qui nous permettrons de former une opinion éclairée concernant les 2 ou 3 p. 100 que nous allons contrôler. Il nous faut des outils qui réduisent le fardeau des sociétés de négoce, comme par exemple les grands appareils de balayage au cobalt qui vérifient le nombre de caries de même que la présence de contrebande. C'est une technologie qui marche très bien. Le port de Vancouver a conclu un protocole avec le fabricant de cet appareil pour qu'on nous soumette de bonnes idées. Nous avons mis à exécution certaines d'entre elles. Ces éléments-là nous permettraient certainement d'améliorer la sécurité, mais l'information est certainement essentielle.

M. Lefebvre: Je voudrais simplement ajouter que l'une des initiatives prévues au plan d'action des douanes, lancée en avril 2000, s'appelle Restructuration des activités des transporteurs. Cette initiative est maintenant désignée sous le nom Renseignements commerciaux anticipés. Dès lors qu'il s'agit de transporteurs qui ne sont pas pré-approuvés et à faibles risques, nous voulons obtenir une série commune de données bien à l'avance par voie électronique, que les conteneurs soient transportés par air, par mer ou par route.

Le sénateur Cordy: Je trouve intéressant que vous disiez que le Canada ne peut pas faire cavalier seul dans ce domaine. Je ne savais même pas qu'il existait une Organisation mondiale des douanes. Parlez-moi de cette organisation.

M. Wright: Cette organisation regroupe des responsables des douanes du monde entier. Le commissaire américain des Douanes, Robert Bonner, et moi-même devons faire un exposé sur des séries d'initiatives visant à élargir la coopération internationale à la réunion de l'Organisation mondiale des douanes prévue pour le mois de juin.

Le sénateur Atkins: N'est-il pas vrai que l'un des problèmes que pose le manifeste, c'est que vous n'êtes pas en mesure de connaître le point d'origine du conteneur?

M. Wright: Exactement.

Le sénateur Atkins: Comment donc régler ce problème?

M. Wright: Si on peut obtenir qu'on nous fournisse une série commune d'éléments de données, eh bien cette série comprendrait le pays d'origine du conteneur.

Le sénateur Atkins: On peut donc supposer que le manifeste ne comporte pas actuellement cette information-là.

M. Wright: Cela ne fait pas actuellement partie de nos exigences en matière d'information, mais ce que nous espérons faire accepter par l'entremise de l'Organisation mondiale des douanes, c'est que l'un des éléments d'information communs à tous les pays participants serait le pays d'origine.

Le sénateur Atkins: Ce serait utile.

M. Wright: En effet.

Le sénateur Cordy: Ma prochaine question concerne l'information fournie aux inspecteurs qui procèdent au premier interrogatoire aux points d'entrée. Vous avez dit aujourd'hui que vous avez maintenant accès à des informations qui sont plus à jour grâce aux manifestes de passagers. La vérificatrice générale disait cependant que l'information fournie — je ne veux pas dire «actuellement» parce que j'espère que ce n'est plus le cas — aux agents préposés au premier interrogatoire aux points d'entrée (PIAPE) n'était pas toujours très récente. Déployez-vous des efforts pour corriger ce problème? Avez-vous maintenant accès à des informations plus à jour, étant donné, comme vous nous l'avez fait remarquer, que les manifestes de passagers contiennent ce genre d'information?

M. Wright: Sénateur, peut-être faites-vous allusion à l'observation touchant la capacité des agents de première ligne à assurer l'intégration de tous les outils dont ils disposent en matière de technologie de l'information. Encore une fois, au dernier budget, nous avons obtenu des crédits pour nous permettre de garantir que tous les bureaux de première ligne peuvent intégrer les outils qui reposent sur les technologies de l'information pour travailler plus efficacement.

Le sénateur Cordy: C'est un bon investissement de fonds. On nous a fait savoir à l'automne que les personnes qui travaillent sur le terrain étaient préoccupées par cette question.

Je m'interroge au sujet de la déclaration sur la frontière intelligente signée par le gouverneur Ridge et le ministre Manley. A-t-on déjà commencé à mettre en oeuvre certains éléments de ce plan d'action?

M. Wright: Il y a eu des progrès à l'égard de bon nombre d'entre eux. La ministre Caplan a fait l'annonce, avec le commissaire Bonner, de l'initiative touchant les conteneurs en transit. Elle a également annoncé l'élargissement du projet pilote NEXUS, qui sera donc lancé en Colombie-Britannique. En mai ou juin, nous espérons être en mesure de présenter un bilan des progrès réalisés dans le cadre de ce programme et des autres initiatives que nous devrions entreprendre ensemble. Mais comme je viens de le dire, il y a déjà eu beaucoup de progrès.

Je dois dire que je suis très encouragé d'avoir pu tenir neuf rencontres en six mois avec un collègue. Cela permet d'avoir une idée claire de sa mission. Mes autres collègues font également de bons progrès et présentent des rapports à notre ministre. Elle est très contente et reste en contact avec nous, de même qu'avec le commissaire Bonner et le commissaire Zigler, et les services d'immigration. Nous réalisons de bons progrès. Nous n'avons pas encore atteint notre objectif, mais nous laisserons le soin à notre ministre et au vice-premier ministre de se prononcer publiquement sur l'état actuel des progrès.

Le sénateur Forrestall: Merci, messieurs. Je suis un peu surpris de voir à quel point vous vous portez bien.

M. Wright: La saison des déclarations d'impôt est terminée.

Le sénateur Forrestall: C'est vraiment la pagaille — vous le savez, moi je le sais, et tous qui sont concernés par la situation le savent. Mais ce n'est pas ça qui compte. C'est la pagaille depuis des années, un milieu totalement corrompu — il n'y a pas d'autres termes. Je suis donc content que nous ayons enfin décidé de prendre des mesures.

Les conteneurs me préoccupent, mais ce n'est pas tant l'endroit où l'on a rempli de marchandises qui m'intéresse autant que la personne qui l'a rempli de marchandises. Quels colis dans ce conteneur ont été conditionnés par Robert Wright, par exemple? Quels colis se trouvaient dans ce conteneur? À qui était-il destiné? Et par quels ports sont-ils passés à partir du moment où le conteneur était partiellement chargé? Ce genre de choses se produit fréquemment en Malaisie et dans d'autres pays. N'est-il pas possible de s'adresser, non pas au port où le conteneur a été chargé et scellé, mais au vendeur? Est-ce possible? Il faut bien que quelqu'un vende ces marchandises à une personne au Canada ou aux États-Unis — c'est-à-dire le producteur ou le fabricant.

M. Wright: Il y a toujours moyen de se renseigner. Nous cherchons donc à créer une piste d'information pour mieux effectuer notre ciblage. Encore une fois, pour être en mesure de trouver une aiguille dans une botte de foin, il faut commencer par réduire la taille de la botte de foin. Il s'agit donc de repérer les commerçants en qui vous avez confiance et de traiter à part cette activité-là. De cette façon, vous pouvez vous concentrer sur les éléments inconnus.

Encore une fois, l'information constitue un outil très précieux, et nous voulons savoir ce qui se trouve dans le conteneur, quel que soit le nombre de personnes qui achètent ces marchandises. Il est possible d'utiliser efficacement cette information et certaines des technologies que nous possédons maintenant aux postes frontaliers. Mais nous voulons tous aller un peu plus loin. S'il était possible de conclure un protocole pour faire contrôler les éléments à plus hauts risques et pour que tout port de chargement soit visé par l'initiative de partenariat pour la protection, l'idée étant de garantir que des contrôles soient effectués à l'étranger, ce serait très bien. Certains parlent de possibilités plus radicales, comme l'idée de prévoir un transpondeur actif pour chaque conteneur en transit. Mais il faut bien se rendre compte qu'il y a 50 millions de conteneurs. Ça donne le vertige de penser à ce que pourraient représenter les contrôles à cette échelle-là. Bien sûr, c'est par pragmatisme qu'on songe à sécuriser les lignes de navigation et de prévoir des transpondeurs pour ces lignes-là. Ainsi nous serions à même de nous concentrer sur les risques plus graves ou les éléments inconnus.

Mais c'est surtout l'information qui va être la plus avantageuse pour nous dans l'immédiat pendant que nous orientons nos activités de ciblage et que nous examinons d'autres solutions technologiques, y compris les sceaux intelligents. Il faut chercher à récolter les premiers fruits et dans ce contexte, l'information est essentielle.

Le sénateur Forrestall: Vous serait-il possible d'utiliser les ports de Singapour et de Rotterdam pour les contrôles? Ce serait beaucoup plus simple que d'équiper les conteneurs de balises.

M. Wright: Plus simple que quoi?

Le sénateur Forrestall: Plus simple que de faire de la surveillance.

M. Wright: Je suis tout à fait de votre avis. Nous entretenons d'excellents rapports avec les autorités hollandaises. Rotterdam est un port moderne et efficace. S'il devenait possible de conclure un protocole commun sur la sécurité dans les grands ports, Rotterdam voudrait certainement y participer. À ce moment-là, si nous avions des inquiétudes en raison d'information obtenue pendant que le produit se trouvait encore à Rotterdam, nous pourrions demander à nos collègues hollandais de faire des contrôles de sécurité avant le départ des marchandises.

Il y a donc toutes sortes de possibilités de collaboration élargie dont nous allons discuter en juin et dans les mois qui viennent avec nos collègues des grands ports. Je pense que Singapour serait également disposé à envisager d'accélérer l'adoption de l'approche «Partenaires pour la protection» en concluant un protocole de sécurité pour les ports.

Le sénateur Forrestall: Je suis très content de l'apprendre.

Vous avez des gens sur le terrain à Halifax. Est-ce que tout va bien? Pourriez-vous nous décrire un petit peu leur journée?

M. Wright: Il est encore tôt. Ça fait seulement deux mois que c'est en place. Vous parlez des agents de ciblage américains, je suppose?

Le sénateur Forrestall: Oui.

M. Wright: Il y en a deux à Halifax, deux à Montréal et trois à Vancouver. Nous avons des agents canadiens qui travaillent de l'autre côté de la frontière aussi. C'est une formule qui donne de bons résultats. Encore une fois, nous essayons de comparer nos techniques pour avoir de bonnes stratégies de ciblage. Cela a donné un regain d'énergie et d'enthousiasme au deux équipes. Nous suivons de près les progrès, mais jusqu'ici, on peut dire que c'est un succès.

Le sénateur Forrestall: Donc, ils travaillent bien ici au Canada. Les résultats sont-ils aussi satisfaisants aux États- Unis?

M. Wright: Oui, tout à fait.

Le sénateur Forrestall: Les choses ont-elles progressé au point où les agents qui sont aux États-Unis prennent des dispositions pour y installer leur famille, ou est-ce encore trop tôt?

M. Lefebvre: Pour l'affectation initiale, nous avons dû recruter des gens assez rapidement. Pour l'instant, ce n'est pas une affectation de longue durée.

Le sénateur Forrestall: Donc, leurs familles n'y sont pas encore.

M. Wright: C'est exact, pas encore.

Le sénateur Forrestall: Poursuivez vos efforts dans ce domaine, parce que Dieu sait que c'est un problème particulièrement épineux.

Le président: Pourriez-vous nous dire quel pourcentage de conteneurs sont inspectés au départ des ports canadiens, par opposition à l'arrivée?

M. Lefebvre: Très peu. Les contrôles s'effectuent exclusivement dans un contexte de ciblage ou en raison d'information indiquant que des conteneurs contiennent des marchandises, technologies ou informations volées ou du matériel qui ne devrait pas être exporté, ou pour lequel il faut un permis d'exportation alors qu'il n'y en a pas. Nous avons un programme de ciblage pour les exportations, mais nous n'effectuons pas de contrôle systématique ou au hasard des conteneurs destinés à l'exportation, comme nous le faisons pour les conteneurs d'importation. Telle est d'ailleurs la pratique dans le monde entier.

Le président: Ma question concerne la proposition de M. Wright; c'est bien de ça qu'on parle?

M. Lefebvre: M. Wright vous expliquait que s'il devenait possible d'échanger de l'information à l'avance avec d'autres pays, à ce moment-là, nos collègues — et ils pourraient nous faire la même demande — seraient à même de nous communiquer des renseignements qui nous inciteraient à contrôler plus de conteneurs destinés à l'exportation.

Le sénateur Meighen: Nous a-t-on confirmé ou infirmé le chiffre dont nous discutions tout à l'heure?

Le président: Nous avons parlé de 3 p. 100, et le commissaire a précisé que la proportion se situait entre 2 et 3 p. 100. Je ne sais pas quel chiffre est plus exact.

M. Lefebvre: Les chiffres fluctuent légèrement d'un port à l'autre d'année en année.

Le sénateur Meighen: Quel est le chiffre pour Halifax, par exemple?

M. Lefebvre: L'an dernier, c'était entre 2 et 3 p. 100.

Le sénateur Meighen: Vous fixez-vous un objectif précis à cet égard?

M. Lefebvre: Oui, avant le début de l'année, notre service du renseignement a préparé une évaluation globale des risques. Ainsi nous demandons à nos bureaux régionaux de consacrer leurs ressources aux modes qui sont jugées les plus à risque. L'an dernier, la proportion de conteneurs inspectés se situait entre 2 et 3 p. 100 parce qu'au début de l'année, le service en question s'est engagé à inspecter cette proportion-là de conteneurs.

Le sénateur Atkins: Si vous inspectez un conteneur destiné à l'exportation, comment pouvez-vous savoir si la voiture qui se trouve dans ce conteneur a été volée ou s'il s'agit d'une exportation légitime?

M. Wright: L'expansion des mesures d'échange d'information et les protocoles de coopération touchant les exportations et les importations sont des idées qui ont bien du mérite.

Le sénateur Day: Monsieur Lefebvre, je n'ai pas bien compris ce que vous avez dit il y a quelques instants, à savoir qu'avant le début de l'année, l'objectif fixé en matière d'inspection repose sur une analyse statistique des risques. Est-ce qu'on tient compte des ressources disponibles? Est-ce que les risques augmentent et diminuent de 1 p. 100? Établissez- vous un objectif global pour le nombre de conteneurs qui seront contrôlés suivant les résultats de l'analyse des risques?

M. Lefebvre: Nous avons un plan d'amélioration de la conformité. Ainsi au début de l'année, nous rassemblons tous les différents services — vérification postérieure, renseignement, et cetera — pour évaluer les résultats en matière de conformité. Ensemble nous fixons des priorités et ensuite, nous consultons les autres ministères à qui nous assurons des services en leur demandant de définir leurs priorités. Nous voulons concentrer nos ressources dans les secteurs où les risques sont les plus élevés et l'incidence sur la société où l'économie est la plus importante. Ensuite nous coordonnons nos activités avec les régions pour nous assurer d'utiliser judicieusement nos ressources.

Le sénateur Day: Je déduis de votre réponse que l'objectif de 2 ou 3 p. 100 est obtenu en partie en tenant compte des ressources disponibles pour effectuer les contrôles. Est-ce exact?

M. Lefebvre: Nous répartissons les ressources en fonction de l'évaluation des risques. Si nous étions d'avis que les risques à un port en particulier étaient très élevés, nous pourrions prévoir que 6 p. 100 des conteneurs soient contrôlés. Cela influerait forcément sur le nombre de contrôles qu'on ferait ailleurs. Mais c'est la nature de nos activités qui l'exige. Nous évaluons les risques en cours. Grâce aux sommes additionnelles que nous avons reçues, qui seront surtout affectées aux ports et aéroports, nous sommes d'avis que par rapport au niveau de risque actuel, nous disposons de ressources suffisantes pour bien nous acquitter de nos responsabilités à l'égard de la protection de la sécurité des Canadiens.

Le sénateur Day: Pourriez-vous nous communiquer l'analyse des risques qui vous a permis d'aboutir à ce chiffre de 2 ou 3 p. 100? C'est le président qui vous aurait demandé ça normalement, puisque c'est sa question favorite, mais je me permets de formuler la demande à sa place cette fois-ci. Sans vouloir vous offusquer, il me semble que les réponses qu'on nous fait sont toujours assez nébuleuses. Il nous serait donc utile d'en prendre connaissance pour déterminer si votre objectif tient compte des ressources disponibles et s'il repose sur des statistiques réelles.

M. Lefebvre: Il n'y a pas de formule parfaite. Dans notre secteur d'activité, tout s'articule autour des renseignements et de la gestion des risques. Cependant, nous consultons les agences d'inspection des aliments au début de l'année. Nous préférons nous concentrer sur les secteurs qui suscitent le plus de préoccupations. Nous préférons donner la priorité aux produits qui sont jugés à plus haut risque. Nous tenons compte de notre expérience au cours des cinq dernières années et nous avons accès à des sources d'information et des agents dans tous les différents ports et régions du Canada.

Notre analyse des risques nous permet de savoir qu'en raison de la présence de certains produits et certains intervenants dans des régions particulières, les risques entourant ces produits sont plus élevés dans certains ports que dans d'autres. Nous tenons compte de plusieurs facteurs en déterminant ce sur quoi nous devons axer nos efforts.

Le sénateur Day: Avez-vous quelque chose par écrit qui nous expliquerait votre méthodologie?

M. Lefebvre: Il s'agit de renseignements opérationnels qu'on ne peut pas communiquer librement étant donné qu'ils ont pour objet de nous aider à cibler les secteurs ou activités à plus hauts risques. Nous effectuons des vérifications et nous faisons toutes ces autres choses que je viens de vous décrire — il n'y a vraiment pas de formule magique.

Le sénateur Day: Est-ce ainsi que vous calculez le pourcentage de conteneurs à contrôler?

M. Lefebvre: Oui.

Le sénateur Forrestall: Laissez-vous entendre par là que c'est ça qui aurait incité certains à prétendre que le Port de Halifax serait le point d'entrée privilégiée de ceux qui veulent faire passer de la drogue sans encombre? Cela ne vous a- t-il pas fait changer d'avis au sujet du nombre de conteneurs qui devraient être contrôlés? Avez-vous modifié votre objectif? Rappelez-vous les remontrances que cela nous a values de la part de nos chers amis américains? Certains affirmaient — et ils n'étaient pas les seuls à le faire — que le nôtre était le port privilégié par les passeurs de drogues.

M. Lefebvre: On entend toutes sortes de choses. Je voudrais tout de même faire une observation en réponse à votre question.

Le sénateur Forrestall: J'aimerais bien que vous répondiez à sa question, et à la mienne aussi. Je suis de Halifax et ce n'est pas très agréable d'être poursuivi par ce genre d'accusations.

M. Lefebvre: L'année dernière, nous avons contrôlé entre 2 et 3 p. 100 des conteneurs.

Le sénateur Forrestall: Je vous ai posé une question au sujet de l'accusation formulée à propos du Port de Halifax. Est-ce qu'elle vous a fait modifier le pourcentage que vous vous étiez fixé comme objectif en matière de contrôle?

M. Lefebvre: Nos pourcentages ne changent pas en fonction des affirmations des uns et des autres, à moins que celles-ci ne soient fondées; mais pour répondre à votre question, oui, si nous possédons des informations dont l'exactitude a été démontrée, nous modifierons nos opérations et l'affectation des ressources en conséquence.

Le sénateur Forrestall: Rejetez-vous cette accusation? Je l'espère; voilà justement ce que j'ai envie d'entendre.

M. Wright: C'est un élément important pour ce qui est de déterminer l'ampleur et l'orientation des activités de ciblage. Notre budget global est fixe, et nous répartissons les ressources en fonction des contrats de responsabilisation conclus avec les divers services, qui s'engagent donc à obtenir certains résultats. C'est ainsi que nous établissons une projection pour les contrôles à effectuer. Nous ne demandons pas à tout le monde de contrôler de 2 à 3 p. 100 des conteneurs. Nous réaffectons les ressources et réorientons nos activités en fonction des secteurs où les risques nous semblent les plus élevés — et non en fonction des affirmations de gens — c'est-à-dire, lorsque nous avons de bonnes raisons de vouloir prouver le bien-fondé de certaines préoccupations. C'est l'équipe de M. Lefebvre qui gère ce processus sur une base annuelle.

Nous serons à présent à même de mieux gérer la situation. Nous possédons des outils très intéressants, des machines qui nous permettent d'effectuer des contrôles plus rigoureux, et il nous est possible de déplacer ces machines si une situation nous semble préoccupante. Nous pourrons aussi nous adapter plus facilement aux circonstances qui se présentent. Cependant, nous sommes un grand ministère; quand nous fixons les objectifs pour chaque port, c'est au début de l'année que cet exercice se déroule, et les résultats obtenus sont comparés à la fin de l'année aux normes établies.

Le sénateur Day: Si rien ne change d'une année à l'autre au niveau de votre analyse des risques au port de St. John, par exemple, et qu'après avoir contrôlé 3 p. 100 des conteneurs au cours de la première année, vous constatez qu'un seul conteneur posait problème, est-ce que vous contrôlerez le même pourcentage l'année d'après?

M. Wright: Eh bien, nous pourrions décider d'affecter certaines ressources à un secteur à plus hauts risques, mais je ne sais pas vraiment ce que nous ferions.

M. Lefebvre: C'est essentiellement ça qu'on ferait.

M. Wright: Nous tenons compte non seulement des efforts déployés mais des résultats obtenus.

Le sénateur Meighen: Laissons de côté la question des ressources. Avez-vous constitué une documentation, ou avez- vous des données qui laissent supposer — pour reprendre l'exemple du sénateur Day — que si le fait de contrôler 3 p. 100 des conteneurs vous a permis d'en attraper un, vous pourriez vous attendre à en attraper deux si 6 p. 100 des conteneurs étaient contrôlés.

M. Lefebvre: Je vais essayer de vous expliquer ça d'une autre façon. Dans ce contexte, il faut se laisser guider par la loi des rendements décroissants. Chaque jour, quand les envois arrivent, nous fixons nos objectifs en fonction des critères convenus à l'avance qui correspondent au degré de risque potentiel. Si nous avons établi un objectif de 2 ou 3 p. 100, c'est parce que l'expérience nous a appris que si nous en contrôlons 12 p. 100, nous trouverons rien après avoir inspecté les deux ou trois premiers conteneurs à haut risque.

Donc, nos décisions reposent sur certains principes. Si on faisait sans arrêt des découvertes de contrebande, nous multiplierions les ressources. Mais ce n'est pas le cas. Si nous fixons notre objectif à 2 ou 3 p. 100, c'est parce que le nombre de découvertes de contrebande parmi ces 2 ou 3 p. 100 est infime.

Le sénateur Day: Quel pourcentage?

M. Lefebvre: Je n'ai pas de chiffre pour Halifax, mais de façon générale, il y a toujours des fluctuations — qu'on parle des aéroports, des gens ou des conteneurs. Le nombre de cas où nous découvrons de la fraude ou de la contrebande est loin d'être élevé; c'est un très faible pourcentage.

M. Wright: C'est pour cela, sénateur, que nous insistons sur le fait qu'il faut faire des choix éclairés concernant ses priorités, plutôt que de faire des contrôles au hasard. C'est pour cela que les renseignements anticipés sont si importants. À l'aide de techniques plus sophistiquées, nous pourrons renforcer de beaucoup l'effet multiplicateur des contrôles que nous effectuons sur 3 p. 100 des conteneurs. Voilà ce que nous nous efforçons de faire, et c'est là que les gains seront les plus intéressants en ce qui nous concerne. Il y a certainement des secteurs où le nombre global d'inspections devrait être plus élevé, mais il nous semble plus approprié d'investir dans un exercice de réflexion prospective sur les secteurs ou activités qui doivent nous intéresser le plus.

Le sénateur Day: Mais c'est subjectif. Si je comprends bien, vous ne faites appel à aucune méthode objective pour en arriver là. Vous avez de l'expérience, mais rien par écrit — c'est-à-dire pas de normes objectives, n'est-ce pas?

M. Wright: Je dirais que notre stratégie de ciblage est tout de même plus raffinée que ça. Nous sommes convaincus de l'efficacité de ce ciblage, et c'est pour cela que nous aimerions en faire davantage.

Le sénateur Day: Je vous ai demandé si vous seriez en mesure de nous présenter quelque chose qui nous aiderait à vous faire confiance, même si c'est sous forme de résumé. Pourriez-vous nous fournir quelque chose par écrit?

M. Lefebvre: Je peux vous assurer que nous contrôlons chaque conteneur ou chaque personne à propos desquels nous avons lieu de croire que les risques qu'ils posent sont peut-être importants. Nous contrôlons 100 p. 100 de ces cas.

Mais il y a aussi la périphérie. C'est quand vous travaillez à la périphérie qu'intervient la loi des rendements décroissants parce que les indications deviennent de plus en plus faibles. Vous continuez à faire des contrôles au hasard, mais en même temps, vous êtes bien obligé de consacrer vos ressources à autre chose; les risques ne justifient pas tout simplement qu'on y consacre les ressources que cela suppose. Il reste que nous inspectons tous les conteneurs où les critères nous laissent supposer que ces derniers présentent un risque important.

Le président: Comme vous l'avez certainement constaté, les membres du comité ont certaines réticences à l'égard de votre stratégie. Nous comprenons fort bien votre désir de donner la priorité aux contrôles que justifient vos renseignements; autrement dit, si vous avez obtenu de l'information, vous allez faire les vérifications qui s'imposent.

Ce que nous ne comprenons pas, ce sont les contrôles au hasard; à la suite de demandes d'information antérieures, on nous a donné à entendre que l'Agence n'avait pas effectué d'épreuves de sensibilité en vue de savoir quels en étaient les avantages. Le comité voudrait donc tenir certaines assurances concernant l'efficacité de vos procédures et prendre connaissance des résultats de vos épreuves de sensibilité, s'il en existe, qui indiqueraient qu'à mesure qu'augmente le nombre de contrôles, le coût augmente et les résultats positifs diminuent. Si tel est le cas, le comité se sentira probablement plus à l'aise.

M. Wright: Merci pour cette précision. Nous nous engageons à vous fournir quelque chose qui va vous rassurer, et sachez que nous comparons nos procédures et stratégies de ciblage avec celles d'autres organisations douanières qui nous font confiance.

Le sénateur Day: Êtes-vous convaincus que vos douaniers jouissent d'un soutien policier suffisant? Vous avez dit qu'il n'est pas nécessaire, à votre avis, que vos douaniers portent des armes. Êtes-vous donc convaincus qu'ils peuvent toujours compter sur l'appui de la police lorsque c'est nécessaire, et ce aux aéroports, aux ports et aux points frontaliers?

M. Wright: Oui, absolument. À chacun de nos centres opérationnels, nous avons des protocoles d'entente avec la police qui garantissent que nous obtiendrons toujours le soutien nécessaire. Nous avons élargi les paramètres de ces protocoles au moment d'autoriser les douaniers à arrêter les conducteurs en état d'ébriété, parce que ce genre d'incident était considéré comme présentant un risque élevé. Donc, nous cherchons à tout moment à assurer la protection du Canada, et nous soutenons nos agents en leur fournissant de bonnes directives, des cours de formation appropriés, des outils et de solides contacts avec un large réseau de forces de soutien.

Le sénateur Day: Est-ce que ces protocoles d'entente que vous avez signés se sont révélés efficaces chaque fois qu'un douanier a demandé le soutien de la police? Est-ce que les résultats sont bons dans bien des régions?

M. Wright: À mon avis, les résultats sont bons; cependant, il y a encore lieu d'améliorer la situation.

M. Lefebvre: Oui, les résultats sont bons. Ce soutien n'est pas assuré instantanément dans tous les coins du pays, mais nous avons de bonnes relations de travail avec la police et dès lors qu'un problème de communications se manifeste, nous prenons des mesures pour le régler.

Le sénateur Day: Nous allons visiter un poste frontalier demain. Y a-t-il des éléments du plan de la frontière intelligente en 30 points sur lesquels nous devrions nous concentrer davantage à l'occasion de notre visite?

M. Wright: Oui, il y a plusieurs éléments. Rien n'est encore en place — et ce que nous envisageons de faire est en quelque sorte plus facile à mettre en oeuvre à des postes frontaliers très fréquentés comme ceux de la Colombie- Britannique ou du sud de l'Ontario. Ce que nous aimerions faire, c'est traiter à part les voyageurs et les camions à faibles risques qui sont visés par un protocole de sécurité renforcée; l'étape suivante consistera à voir s'il serait possible de créer des voies distinctes pour les voyageurs à faible risque, afin que nous puissions nous concentrer sur l'inconnu. Les personnes à risque ne pourront pas participer à une opération comme celle de Lansdowne ou au programme NEXUS. Le programme NEXUS est déjà en application à Sarnia. Dans le cadre du programme NEXUS, une carte à puce permet de canaliser les voyageurs et camions à faible risque. Une fois que nous aurons une entente avec les États- Unis sur des programmes communs permettant de traiter à part les éléments à faible risque, nous pourrons les intégrer à l'infrastructure. En ce qui concerne les fort volumes de trafic, vous pouvez vous imaginer à quel point la situation s'améliorerait si nous créions une voie distincte pour les voyageurs à faible risque. Toutefois, nous sommes encore loin de la concrétisation de ce projet.

Le sénateur Meighen: J'ai une question à poser — et vous m'arrêterez si vous y avez déjà répondu précédemment. Pour ce qui est de la formation des douaniers, je dois avouer que j'étais un peu surpris d'apprendre qu'un douanier à plein temps suit un cours de neuf semaines au collège de Rigaud. D'abord, est-ce vrai? Et dans l'affirmative, quels autres cours de formation sont dispensés aux douaniers pendant leur carrière, et surtout pendant la première année ou les cinq premières années de service, par exemple?

M. Lefebvre: Le cours de formation de base dispensé à Rigaud vient d'être restructuré. Il s'agissait autrefois d'un cours de 14 semaines qui s'appuyait surtout sur l'apprentissage au moyen de manuels. Mais à la suite d'une restructuration, nous avons surtout recours à présent à des experts et des responsables douaniers expérimentés pour nous permettre de mieux évaluer les compétences d'un douanier.

Le cours de formation de base dure huit semaines. Après d'autres cours sont offerts, selon le mode le plus pertinent pour l'agent en question. Lorsqu'un agent est affecté à un poste frontalier terrestre, un aéroport ou un port maritime, il bénéficie d'une formation supplémentaire qui touche le mode concerné, qui peut durer d'une à trois semaines. Si un douanier change de mode à n'importe quel moment, il reçoit une autre formation pour ce mode-là.

De plus, nous dispensons un cours de formation de deux semaines qui concerne la protection personnelle et les pouvoirs des douaniers. L'objet de ce cours est d'offrir aux agents le genre de formation verbale et physique qu'il leur faut pour être en mesure de se défendre et de faire ce qu'ils ont à faire — c'est-à-dire d'utiliser leur matraque et leur gaz poivré, le cas échéant. De plus, les douaniers sont maintenant habilités à arrêter les conducteurs en état d'ébriété ou aux facultés affaiblies. On leur donne un cours de formation de deux semaines qui porte là-dessus.

Nous dispensons donc de toutes sortes de cours spécialisés. Les douaniers sont également formés dans le maniement d'une arme à feu, puisqu'ils doivent savoir s'en servir. Il s'agit d'un cours d'une demi-journée ou d'une journée complète. De plus, ils bénéficient de formation spécialisée touchant tous les différents secteurs où ils travaillent. À présent nous avons recours aux méthodes d'apprentissage à distance pour leur permettre de maintenir leur niveau de compétences ou de les mettre au courant de faits nouveaux essentiels. Comme vous l'expliquait le commissaire, comme pour d'autres membres de l'Agence, nous consacrons au moins 6 p. 100 de notre budget à ce genre de séances d'information qui permettent à nos agents de rester à niveau.

Le sénateur Meighen: Avez-vous modifié vos cours de formation à l'intention des étudiants?

M. Lefebvre: Jusqu'à tout dernièrement, le programme de formation à l'intention des étudiants était caractérisé par certaines incohérences. Nous avons donc revu avec les cadres régionaux ce en quoi doit consister un cours de formation approprié. Nous nous assurons à présent que cette formation est dispensée de façon uniforme dans toutes les régions du pays. Le cours destiné aux étudiants est d'une durée de trois semaines.

Le président: Monsieur Wright et monsieur Lefebvre, au nom de tous les membres du comité, je voudrais vous remercier pour votre présence cet après-midi. Votre exposé était à la fois instructif et utile. Nous avons hâte de faire notre petite excursion demain — cependant, ce n'est pas le seul poste frontalier que nous comptons visiter dans le cadre de notre étude. Merci infiniment pour votre aide et pour votre offre de nous fournir d'autres informations par écrit.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


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