Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales
Fascicule 1 - Témoignages du 27 février 2001
OTTAWA, le mardi 27 février 2001
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales, auquel a été renvoyé le projet de loi S-6, visant à favoriser la prévention des conduites répréhensibles dans la fonction publique en établissant un cadre pour la sensibilisation aux pratiques conformes à l'éthique en milieu de travail, le traitement des allégations de conduites répréhensibles et la protection des dénonciateurs, se réunit aujourd'hui, à 9 h 32, pour en faire l'examen.
Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.
Le président: Chers collègues, notre ordre de renvoi concerne le projet de loi S-6, mieux connu sous le nom de Loi sur la dénonciation dans la fonction publique. Le projet de loi nous a été renvoyé par le Sénat le 31 janvier. Vous vous rappellerez que, lors de la session précédente, le projet de loi portait le numéro S-13 et que le comité avait tenu trois audiences à son sujet en avril et en mai 2000. Chers collègues, vous devriez avoir devant vous un exemplaire du résumé législatif rédigé par la Bibliothèque du Parlement dans lequel sont résumés les témoignages entendus par le comité précédent au sujet du projet de loi S-13.
Avant de vous demander si vous souhaitez faire l'étude article par article, nous allons entendre le parrain du projet de loi, c'est-à-dire le sénateur Kinsella, qui nous a dit à la dernière réunion qu'un de ses collègues proposerait plusieurs modifications de forme. On a fait circuler le texte de ces modifications la semaine dernière.
Le sénateur Kinsella: Ma collègue, le sénateur Finestone, sera la comotionnaire.
Honorables sénateurs, comme il a été mentionné à la dernière séance du comité, je vous ai effectivement envoyé un exemplaire du projet de loi, un exemplaire des modifications de forme, ainsi qu'une brève récapitulation du projet de loi pour que vous sachiez où nous en étions avant que ne soit prorogé le Parlement
La bonne nouvelle, c'est qu'au Canada, nous avons la chance d'avoir une fonction publique de premier ordre dont peuvent être fiers les Canadiens. Nous contribuons à l'administration publique dans de nombreux pays grâce à nos fonctionnaires auxquels on demande d'aider d'autres fonctions publiques à améliorer leurs pratiques et ainsi de suite.
Grâce au projet de loi S-6, nous aimerions ajouter un chaînon manquant qui ferait de notre fonction publique un organisme moderne et soucieux de l'éthique. Certains autres pays nous devancent légèrement à cet égard, et d'autres commencent à en tenir compte. Le modèle que nous présentons dans le projet de loi à l'étude est équitable à l'égard tant des gestionnaires de la fonction publique que de ses employés. Il est également équitable à l'égard des Canadiens et Canadiennes. C'est pourquoi le projet de loi à l'étude tout entier gravite autour de cette notion d'intérêt public.
L'article 2 énonce l'objet du projet de loi, soit la sensibilisation, suivi d'une description. Nous soulignons que la sensibilisation est l'un des trois piliers du projet de loi.
Le deuxième est un processus de suivi des allégations qui respecte -- il importe de le souligner -- la responsabilité des ministères et des organismes dans la gestion de leurs propres affaires de manière éthique et efficace. Le processus de suivi est tel que le commissaire de l'intérêt public communiquera avec le ministère pour l'aviser d'un problème et pour lui demander comment il projette de le régler. Par conséquent, la responsabilité d'administrer le ministère de manière éthique et efficace demeure entre les mains du sous-ministre et des cadres supérieurs.
Il faut aussi protéger le fonctionnaire. Sa carrière ne devrait pas être compromise du simple fait qu'il a dénoncé des agissements qui ne sont pas éthiques ou qui sont en fait illicites. Le projet de loi à l'étude est innovateur, en ce sens qu'il respecte le droit de la haute direction de gérer, tout en reconnaissant la responsabilité morale du fonctionnaire consciencieux d'avoir en place un mécanisme ou un cadre permettant de cerner les problèmes.
Nous nous sommes interrogés sur le meilleur organe auquel greffer la fonction de commissaire de l'intérêt public et nous avons examiné plusieurs possibilités. Nous en sommes venus à la conclusion que la Commission de la fonction publique était idéale parce qu'elle est responsable de l'application du principe du mérite qui a été jusqu'ici plutôt efficace et a donné de bons résultats, sans quoi notre fonction publique ne serait pas l'une des meilleures du monde.
De plus, la Commission de la fonction publique s'occupe déjà de valeurs, d'éthique et de sensibilisation, des enjeux de la fonction publique contemporaine. Les articles 2 à 5 du projet de loi concernent la nomination du commissaire; l'article 8, lui, décrit plus particulièrement la fonction de sensibilisation. Les articles 9 à 17 traitent du processus de suivi des allégations et les articles 18 à 22 regroupent les dispositions relatives à l'immunité. Je crois que mes collègues connaissent déjà le modèle dont s'inspire le projet de loi.
Les témoignages entendus m'ont porté à conclure que nous serions bien avisés d'apporter deux légères modifications de forme qui permettrait au plaignant ou au dénonciateur qui le souhaite de rendre publique son allégation. Si c'était le cas, il ne commettrait pas d'infraction. En effet, d'après le libellé actuel du projet de loi, le plaignant ne pourrait pas le faire.
Nous proposons donc des modifications aux articles 9 et 20 du projet de loi. La principale modification de l'article 9 aurait pour objet de permettre au dénonciateur qui a demandé que la confidentialité de son identité soit assurée au moment de faire la dénonciation, de retirer par la suite cette demande. Il faudrait qu'il le fasse par écrit.
La modification consécutive de l'article 20 a pour objet de bien préciser qu'il n'y a pas d'infraction si l'identité d'un dénonciateur qui a retiré sa demande de confidentialité est dévoilée.
Voilà, monsieur le président, le projet de loi en bref. Je suis tout à fait prêt à en débattre avec mes collègues si tel est leur souhait.
Le président: Aviez-vous quelque chose à ajouter, sénateur Finestone?
Le sénateur Finestone: C'est pour moi un privilège inattendu de partager ce siège particulier avec mon collègue et, bien que je sois mal préparée, je suis certaine de savoir quoi dire.
Le comité a entendu les porte-parole du Conseil du Trésor chargés de rédiger un énoncé des valeurs et de l'éthique en fonction du rapport Tate et d'autres rapports portés à l'attention du gouvernement concernant la modernisation de la fonction de contrôleur au sein du gouvernement du Canada en 1996. C'était après le dépôt du rapport Tate, et l'énoncé tenait compte des préoccupations exprimées par le vérificateur général.
Après avoir entendu les témoins du Conseil du Trésor, j'étais préoccupée par le fait qu'ils semblaient prendre autant de temps pour énoncer les principes d'éthique et les valeurs. L'exposé du sénateur Kinsella a-t-il ajouté quoi que ce soit en termes de cohésion, de sentiment de bien-être et de valeurs de la fonction publique, à la lumière particulièrement de la nouvelle Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques dont une grande partie porte sur la responsabilité en matière de dénonciation?
Les définitions données dans cette loi ressemblent beaucoup à la terminologie utilisée dans le projet de loi à l'étude. J'ignore si c'était délibéré, mais cela exclut certes la possibilité de conflit entre les deux documents.
J'estimais important que l'équipe de la fonction publique qui est venue témoigner comprenne que le législateur souhaitait qu'elle soit incluse dans toute loi sur les dénonciateurs. Depuis lors, le gouvernement a jugé bon d'inclure un article relatif à la dénonciation à l'intention de l'entreprise privée. Pourquoi n'y aurait-il pas alors des dispositions analogues qui s'appliqueraient au secteur public, qui représente 10 p. 100 environ de la population active? Un principe d'équité et de justice ne devrait-il pas s'appliquer aux deux secteurs? Quand j'y ai réfléchi sous cet angle, cela m'a réconfortée.
J'ai trouvé par hasard cette loi relative aux dénonciations alors que je me préparais pour la réunion d'aujourd'hui. Nous tirerons peut-être, en réalité, de la mise en oeuvre de cette loi des enseignements que nous pouvons appliquer au secteur public.
Par contre, chers collègues, il faudrait effectivement inclure dans le projet de loi à l'étude une disposition de temporisation.
Au Queensland, les Australiens sont préoccupés au plus haut point par les témoignages qu'ils ont entendus au sujet des dénonciateurs. Un nombre d'allégations faramineux a été fait, certaines s'avérant très frivoles en fin de compte. Cela nuit énormément à la personne dénoncée qui se sent peut-être épiée par toute une armée de gens. Si l'allégation s'avère sans fondement, le tort causé au psyché de cette personne, à sa famille et à son entourage est peut-être déjà irréversible.
Je propose que soit envisagée la possibilité d'inclure une disposition sensible au temps pour que la loi puisse être examinée pour en vérifier l'efficacité et pour voir s'il y a lieu de l'appliquer au secteur public, sous la responsabilité partagée du syndicat et de la direction et sous la direction du Conseil du Trésor. C'est la seule observation que j'ai à faire.
Le sénateur LeBreton: À la lecture du projet de loi, j'avais une question au sujet du commissaire de l'intérêt public. Quelle aide juridique est à la disposition du dénonciateur et de la personne dénoncée? Est-ce simplement au commissaire de l'intérêt public de décider quand une plainte est valide ou les gens ont-ils accès à des services juridiques? Plus particulièrement, ont-ils accès à des avocats du ministère de la Justice?
Le sénateur Kinsella: Voilà une excellente question. Actuellement, le coût associé à la dénonciation par un fonctionnaire d'une activité illicite ou immorale est entièrement assumé par ce fonctionnaire. Il faudrait que la personne engage un avocat. Il faut faire attention et se protéger contre des accusations de diffamation et d'éventuelles contre-poursuites.
En fait, c'est arrivé récemment à un dénonciateur, au ministère des Affaires étrangères. Le gouvernement a entamé une contre-poursuite. L'employé a perdu. Le ministère des Affaires étrangères a eu gain de cause. Le montant que la cour a ordonné au fonctionnaire de payer était de plus de 300 000 $, ce qui manifestement l'aurait mis en faillite. En appel, le montant a été réduit à 75 000 $.
Le sénateur Finestone: Le syndicat prend fait et cause pour l'employé.
Le sénateur Kinsella: Comme le dit le sénateur Finestone, actuellement, on peut aussi s'adresser à son syndicat. On peut recourir au mécanisme de grief prévu par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Toutefois, le principe de base de notre projet de loi est qu'il est dans l'intérêt public de laisser les fonctionnaires conscients d'actes répréhensibles les dénoncer. Ils n'auront pas à payer un avocat pour les représenter à cette fin. Par ailleurs, ils ne perdront pas leur emploi ou ne verront pas leur poste bloqué. Le commissaire de l'intérêt public pourrait prendre la question en charge, tout comme la Commission des droits de la personne prend en charge les plaintes de discrimination raciale en milieu de travail, par exemple. De toute évidence, la victime d'une pareille discrimination est sans emploi et n'a pas les ressources voulues pour retenir les services d'un avocat qui l'aiderait à se prévaloir des autres mécanismes. Le commissaire de l'intérêt public en assumerait le fardeau. Cela ne nuit pas à celui qui souhaite aller devant les tribunaux ou qui veut déposer un grief en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Ces recours sont toujours disponibles.
Le sénateur LeBreton: Je ne connais pas à fond l'affaire du ministère des Affaires étrangères, bien que j'aie lu quelque chose à ce sujet. Dans cette affaire, les parties étaient le dénonciateur et le ministre. Les avocats du ministère de la Justice travaillent-ils pour le compte du gouvernement à ce genre d'affaire? N'y a-t-il pas un conflit quand les avocats du ministère de la Justice représentent les deux parties, ou bien faut-il que l'employé engage un avocat de l'extérieur? Quel processus a été suivi?
Le sénateur Kinsella: C'est vraiment une excellente question, sénateur LeBreton. Le modèle actuel est un modèle d'affrontement, mais ce n'est pas ce que propose le projet de loi à l'étude. L'approche mise de l'avant dans le projet de loi veut que nous mettions en place un mécanisme qui encouragera le ministère ou l'organisme à régler lui-même le problème et à ne pas le faire aux frais du fonctionnaire. On évite ainsi l'affrontement.
Nous savons d'expérience que les ministres sont responsables en fin de compte, mais très souvent, le ministre est le dernier à être mis au courant de ce qui se passe dans son ministère. De bien des façons, c'est injuste. Il en ignore tout parce que l'information ne circule pas vers le haut.
Aux termes du projet de loi à l'étude, le ministre en sera informé par le commissaire de l'intérêt public qui l'aidera à assumer sa responsabilité. C'est ce qui rend le projet de loi à l'étude si unique.
En tant qu'ex-sous-ministre à Ottawa, je puis concevoir avec quelles réticences les cadres supérieurs et les gens du Conseil du Trésor, de même que l'organisme de gestion, peuvent avoir lorsqu'ils traitent de dénonciations. Manifestement, ils utilisent les services du ministère de la Justice. La loi les y oblige. Bien qu'il leur répugne peut-être d'avoir affaire à des dénonciations, s'ils lisent notre projet de loi avec soin, ils constateront que contrairement à des projets de loi antérieurs, nous sommes de leur côté. Nous leur donnons la possibilité de gérer de manière à trouver une solution. Le Parlement sera avisé qu'une plainte a été déposée contre un ministère particulier et qu'elle a été réglée. C'est ce que nous voulons entendre. Nous voulons avoir l'assurance qu'aucune carrière ne sera mise en jeu.
Le sénateur Banks: J'ai une liste de questions et je vais les poser jusqu'à ce que vous me demandiez de m'arrêter. Toutes mes questions découlent du document que nous avons reçu et dont je vous suis reconnaissant.
La question a été soulevée par certains témoins durant les audiences relatives au projet de loi S-13 au sujet des définitions de l'article 3 du projet de loi et, plus particulièrement, de la définition, d'une part, de «fonctionnaire» et, d'autre part, de «fonction publique». Elle renvoie à deux lois différentes. On a demandé si en fait cela signifiait que différentes parties de la fonction publique jouissent de protection différente. Faut-il en tenir compte? Faudrait-il harmoniser?
Le sénateur Kinsella: Nous nous sommes demandés quelle serait la meilleure façon de définir le «fonctionnaire» et en sommes venus à la conclusion que, dans le cadre du nouveau modèle, nous aimerions que les définitions soient très pointues. Comme la vaste majorité des fonctionnaires, en fait, tombent sous le coup de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, c'est à ce groupe bien défini de fonctionnaires que s'applique le projet de loi.
Le sénateur Finestone a fait allusion au fait qu'on trouve une disposition relative aux dénonciations dans d'autres textes de loi, comme la Loi sur la protection de l'environnement. D'autres encore s'appliquent à l'entreprise privée. Aux fins présentes, nous avons estimé préférable d'utiliser le groupe bien défini prévu dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Le choix a été délibéré.
Le sénateur Banks: En d'autres mots, vous y avez réfléchi?
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Banks: Pourriez-vous nous commenter les réserves exprimées par les gens du Conseil du Trésor au sujet de l'article 10 parce qu'il semble empêcher que l'on connaisse l'identité de la personne qui nous accuse?
Cela pourrait mener, dans certaines circonstances, à des accusations au criminel. Si j'étais un cadre supérieur accusé de harcèlement, ne devrais-je pas pouvoir connaître le nom de la personne qui m'accuse ou est-il plus important, dans ce cas-ci, que la balance penche en faveur de l'anonymat? Si c'est le cas, n'irait-on pas à l'encontre de la Charte?
Le sénateur Kinsella: Sénateur Banks, je suis très heureux que vous ayez soulevé la question. Selon moi, les porte-parole du Conseil du Trésor avaient tort. Il ne s'agit pas d'une affaire privée entre deux particuliers, mais bien d'un fonctionnaire face au grand public. L'affaire met en jeu, d'une part, un ministère et, d'autre part, un fonctionnaire employé par ce ministère. Si quelque chose cloche au ministère, c'est au ministre qu'en revient la responsabilité en bout de ligne. Elle n'appartient pas à cet agent du ministre. Tous les fonctionnaires sont des agents du ministre.
Si la responsabilité revient en bout de ligne au ministre, nous souhaitons que le ministre soit approché par le commissaire de l'intérêt public parce que c'est dans l'intérêt public et qu'il faudrait donner au ministre la possibilité de savoir ce qui se passe dans son ministère.
En un certain sens, savoir qui a porté l'accusation comme tel est sans pertinence. Le véritable enjeu, c'est que tous les programmes et toutes les activités du gouvernement du Canada soient éthiques. Il y a peut-être des pommes pourries dans le baril, des agents individuels. C'est pourquoi le sous-ministre, par l'intermédiaire du ministre, devrait pouvoir régler lui-même au sein même de son ministère le problème posé par un certain agent qui a mal compris son mandat ou je ne sais quoi encore.
Le sénateur Finestone: Une accusation de harcèlement sexuel cause beaucoup de tort à la famille et à la personne qui est accusée. C'était, je crois, la nature de la question.
Le président: Mon attention a également été attirée par ce passage.
Sénateur Kinsella, le point qu'ont fait valoir les représentants du Conseil du Trésor lorsqu'ils sont venus témoigner devant le comité en mai dernier, c'est que le projet de loi S-13 serait assujetti aux dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée, à moins que nous ne décidions de demander une exemption ou une exclusion. Ils poursuivent en affirmant qu'aux termes de cette loi, vous pouvez protéger le nom d'une personne divulguant les renseignements du grand public, mais que vous ne pouvez cacher à l'accusé le nom de son accusateur, que cette personne a le droit de connaître les faits qui lui sont reprochés et l'identité de la personne qui fait l'allégation ou l'accusation.
Vous dites qu'ils avaient tort. Pourquoi? Avez-vous consulté le conseiller juridique du Sénat?
Le sénateur Kinsella: La réponse à cette dernière question est oui. Nous avons soumis tous les projets de loi à notre conseiller juridique.
Je reviens à ce que j'ai dit au sénateur Banks, soit que le projet de loi sur la dénonciation dans la fonction publique portera sur des actes répréhensibles commis au sein d'un ministère. Le ministère en est responsable.
Le président: Sénateur, ce qu'envisage comme situation le projet de loi à l'étude, c'est le cas de l'employé qui en dénonce un autre, peut-être même son supérieur, qui aurait commis un acte répréhensible ou une omission que le projet de loi, comme vous le savez, définit ainsi:
a) il constitue une infraction à toute loi...
b) il risque d'entraîner un gaspillage considérable de fonds publics;
c) il risque de compromettre soit la santé publique, soit la sécurité, soit l'environnement;
d) il constitue un manquement à une politique ou à une directive publique et confirmée dans les documents de la fonction publique;
e) il constitue un cas flagrant de mauvaise gestion ou d'abus de pouvoir.
Par conséquent, le fonctionnaire dénonce une personne qu'il estime coupable, si je puis m'exprimer ainsi, d'un de ces actes.
Les gens du Conseil du Trésor qui sont venus témoigner nous ont dit qu'on ne peut cacher le nom du dénonciateur à la personne dénoncée. Vous dites qu'ils ont tort.
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le président: Je vous demande si, sur ce point particulier, on a obtenu l'opinion du conseiller juridique. Si vous avez tort -- Dieu nous en préserve -- et que le Conseil du Trésor a raison, alors votre garantie de confidentialité ne vaut pas grand-chose. Ni le grand public ni la personne dénoncée ne saura qui l'a dénoncée.
Le sénateur Kinsella: Le commissaire de l'intérêt public auquel a été faite l'allégation communiquera avec le ministère pour exposer le problème. Il peut s'agir du directeur général d'un programme en particulier qui a mal interprété la politique du ministère. Il n'est pas nécessaire de mentionner des noms. Il suffit d'examiner la politique. On voit l'effet qu'a eu sa mise en oeuvre. Le but recherché n'est pas une chasse aux sorcières, mais bien que les ministères respectent les principes de l'éthique. S'il s'agit d'une question de tort entre particuliers, ils peuvent alors avoir recours aux tribunaux civils.
Si vous souhaitez avoir l'opinion d'un conseiller juridique, un de mes experts est ici. Je vais lui demander de réfléchir à la question et de me remettre une note à ce sujet.
Le président: J'ignore s'il est disposé à émettre une opinion, mais nous pourrions demander au légiste d'examiner la question. Des actes ou omissions répréhensibles commis en milieu de travail sont dénoncés en toute confidence à un commissaire indépendant. Si vous avez raison, alors il n'y a pas de problème. Par contre, si vous avez tort, ceux qui s'apprêtent à profiter de cette loi pour faire une dénonciation devraient savoir que la garantie de confidentialité est limitée.
Le sénateur Banks: Dans le même ordre d'idée, si l'on assume que la confidentialité est essentielle et que nous affirmons à un dénonciateur potentiel que la loi garantit que son nom ne sera pas divulgué, je crains qu'il y ait un conflit sur ce plan entre les dispositions de l'article 10 et celles du paragraphe 5(2). Le paragraphe 5(2) stipule que le commissaire peut divulguer, ou autoriser les personnes agissant en son nom ou sous son autorité à divulguer les renseignements qui, à son avis, sont nécessaires à la tenue d'une enquête.
Mon imagination est peut-être trop fertile, mais je peux très bien voir une situation où le commissaire pourrait déterminer que, dans un cas particulier, l'identité de l'accusateur est si importante, dans le contexte, qu'il la divulgue. Il me semble que ce projet de loi l'autorise à le faire. L'article 10 dit bien que:
Sous réserve de toute obligation légale qui lui est imposée par la loi ou toute autre loi en vigueur au Canada, le commissaire est tenu de garder confidentielle[...]
Cependant, le commissaire sera autorisé, avec l'adoption de ce projet de loi, à divulguer de l'information, laquelle n'exclut pas le nom de l'accusateur. C'est peut-être un très petit détail, mais nous devrions peut-être y réfléchir. Si le projet de loi prétend protéger la confidentialité des renseignements, ceci pourrait y être une faille.
Le sénateur Kinsella: Cet article 5 stipule que le commissaire de l'intérêt public peut divulguer de l'information sous réserve de l'article 10. Il dit bien:
Sous réserve de l'article 10, s'il estime que l'intérêt public le justifie, le commissaire peut rendre publics les renseignements dont il prend connaissance dans l'exercice des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi.
À l'article 10, on lit:
Sous réserve de toute obligation légale qui lui est imposée par la présente loi ou toute autre loi en vigueur au Canada, le commissaire est tenu de garder confidentielle l'identité du fonctionnaire qui lui a présenté une dénonciation...
Le sénateur Banks: La question que je pose est d'ordre juridique, et je ne suis pas avocat. Je ne crois pas que le paragraphe 5(1), où on lit «Sous réserve de l'article 10...» assujettisse le paragraphe 5(2), qui ne contient pas ce préambule. Je pense que le paragraphe 5(2) est indépendant et n'est pas limité par les dispositions de l'article 10. Cette restriction ne s'applique qu'au paragraphe 5(1). Si j'étais avocat, je dirais que le paragraphe 5(2) n'est pas assujetti à l'article 10.
Ma dernière question concerne le paragraphe 12(5), qui traite de la situation où le commissaire conclut que l'objet de la dénonciation est trivial ou frivole. Dans ce cas, le commissaire peut divulguer à la personne qui a fait l'objet de l'accusation au ministre, ou à quiconque d'autre, le fait qu'une telle accusation a été portée contre elle.
Est-ce que cette information englobe l'identité de l'accusateur? Autrement dit, est-ce qu'il ne ferait que divulguer le fait qu'une accusation a été portée, ou désignerait-il l'auteur de l'accusation?
Le sénateur Kinsella: Cela dépendrait s'il est de l'intérêt public de le divulguer. Par exemple, s'il s'agissait d'une allégation au sujet d'un problème concernant le ministère des Transports qui touchait la sécurité, et que cette allégation, même faite de bonne foi, était en fait erronée et que le système fonctionnait bien, il serait de l'intérêt public de le dire clairement. Il est important que le commissaire de l'intérêt public dise, supposons au sous-ministre ou au directeur, que la manière dont ceci est interprété n'est pas claire. Il n'est pas nécessaire de donner le nom de la personne qui a soulevé le doute.
Le sénateur Banks: Mais c'est possible. Est-ce que le paragraphe 12(5) permet au commissaire de dire au sous-ministre que Fred, là-bas ou Louise a porté une fausse accusation, que ce soit ou non avec de bonnes intentions?
Le sénateur Kinsella: Ce n'est pas le but visé. Il pourrait y avoir des circonstances où il serait essentiel de divulguer un nom. Le terme «peut» a été mis là pour laisser la place à un tel jugement.
Là je veux en venir, avec ma question, c'est au concept de confidentialité. La confidentialité est-elle réellement toujours garantie? Si elle ne l'est pas, nous devons faire bien attention à ne pas dire que la confidentialité est toujours garantie. La confidentialité doit être préservée, mais il y a des circonstances, lorsqu'il y a faute criminelle, où il n'est pas de l'intérêt public de préserver la confidentialité. C'est pourquoi le commissaire de l'intérêt public doit être un haut fonctionnaire qui, pour protéger l'intérêt public, peut décider qu'il s'agit d'une telle violation de l'intérêt public que le procureur général devrait en être avisé, et dévoiler le nom de la personne qui pourrait être accusée.
Cependant, ce n'est pas son objectif. Le but visé n'est pas d'appliquer le Code criminel, mais plutôt de constituer un moyen de résoudre les problèmes de faute ou de conduite, au ministère, qui soit contraire à l'éthique. J'ai idée que, comme pour les cas qui concernent les droits de la personne, 99 p. 100 des dossiers seraient résolus au niveau de la conciliation.
Le sénateur Comeau: L'honorable sénateur voudrait-il clarifier le sens du paragraphe 12(1), qui dit que le commissaire clôt le dossier s'il conclut que la dénonciation a été faite en violation du paragraphe 9(4) qui, si je comprends bien, concerne la protection des communications entre un avocat et son client? Qu'est-ce que cela signifie? Le paragraphe 12(1) stipule que le commissaire clôt le dossier s'il remarque une violation au paragraphe 9(4). Est-ce bien cela?
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Comeau: Dois-je comprendre que, s'il y a motif d'inquiétude pour la santé ou la sécurité, ceci ne s'applique pas?
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Comeau: Qu'est-ce que cela signifie?
Le sénateur Kinsella: C'est que si l'agent d'un ministère donné traite avec quelqu'un d'autre, mais que ce qu'il fait est illégal, cette relation, qui peut être semblable à celle d'un avocat avec son client, ne le protège pas contre l'application de la loi. Personne ne peut se cacher derrière elle. La présentation d'allégations au commissaire ne serait pas une violation de quelconques normes professionnelles en vigueur.
Le sénateur Comeau: Ce n'est pas une question de santé et de sécurité. Je ne suis pas sûr que le CSRS soit régi par la Commission de la fonction publique, mais qu'en est-il de la sécurité nationale? Est-ce que ça ne devrait pas figurer au nombre de ces choses que nous ne voudrions peut-être pas voir divulgués?
Le sénateur Kinsella: Je présume que, quelle soit la loi qui régisse le CSRS...
Le sénateur Comeau: Elle aurait préséance sur celle-ci?
Le sénateur Kinsella: Ils ont effectivement déposé une plainte -- et c'est là où la confidentialité est, de toute évidence, très importante -- pour que personne ne puisse prendre des mesures contre une personne qui a violé la confidentialité de l'information en vertu de la Loi sur le CSRS.
Le sénateur Comeau: Étant donné la nature hautement sensible de ce qu'un employé a dévoilé au Commissaire de la fonction publique, ou le Commissaire de l'intérêt public dans ce cas-ci, est-ce que ce commissaire ne devrait pas, lui aussi, faire serment de discrétion? Il pourrait être mis au courant de renseignements extrêmement délicats concernant la sécurité nationale.
Le sénateur Kinsella: C'est pourquoi nous attribuons ce pouvoir au Commissaire de la fonction publique qui, à ce titre, a une attestation sécuritaire de niveau «secret».
Votre question fait ressortir ce problème, ce besoin que nous ressentons d'une espèce de cadre au sein duquel une conduite contraire à l'éthique et illégale doit être révélée et qu'il y soit donné suite -- absolument pas dans le but de crucifier qui que ce soit, ou de miner un programme quelconque ou le ministre, mais plutôt pour permettre au ministre de savoir ce qui se passe dans son ministère et d'avoir un mécanisme qui permettrait la résolution du problème au sein du ministère. Ce ne sera pas un bouclier assez grand pour se cacher et dire: «Je travaille pour les Affaires extérieures et j'ai fait certains serments. Je ne vous dirai rien.» Sous le couvert du secret, des actes contraires à l'éthique et illégaux peuvent avoir lieu, qui pourraient susciter de plus grandes préoccupations sur le plan de l'intérêt public.
Le sénateur Comeau: Si un commando était mis sur place, ça pourrait sortir tout seul au grand jour avec le reste.
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le président: Chers sénateurs, êtes-vous prêts à procéder à l'étude article par article de ce projet de loi? Certaines questions ont été soulevées ici au sujet desquelles nous pourrions recevoir ou non, selon qu'il le jugera pertinent ou non, des commentaires du juriste du Sénat. Aucune des questions soulevées ne laisse entendre qu'il y ait une faille fatale dans le projet de loi.
Le sénateur Kinsella: L'un de mes principaux conseillers, au sujet de ce projet loi, est le conseiller juridique qui a travaillé à la rédaction du projet de loi. Pour que ce soit plus clair pour les membres du comité, peut-être pourrais-je lui demander d'expliquer l'aspect technique que les honorables sénateurs ont trouvé important.
Le président: Monsieur Carson, avez-vous entendu la question du sénateur Banks au sujet des observations des gens du Conseil du Trésor, lorsqu'ils ont comparu devant le comité?
M. Bruce Carson, conseiller en politiques, Caucus conservateur: Oui, j'ai eu l'occasion de m'entretenir de ce sujet avec M. Mark Audcent, le principal rédacteur du projet de loi, après que le sénateur Banks ait posé sa question. La réponse que j'ai reçue de M. Audcent est que ce projet de loi serait appliqué tout à fait conjointement avec la Loi sur la protection de la vie privée et la Loi sur la protection des renseignements. Par conséquent, ces lois seraient assujetties aux dispositions spécifiques de ce projet de loi qui traitent de la confidentialité. Aucune de ces deux lois ne permettrait de divulguer l'identité du plaignant.
Le président: Elle ne serait même pas dévoilée à la personne contre qui la plainte a été déposée?
M. Carson: C'est bien cela.
Le sénateur Banks: Excusez mon ignorance, mais où est-ce que c'est écrit, et comment pouvons-nous être sûrs que ce projet de loi et ses dispositions auraient préséance sur la Loi sur la protection de la vie privée? Ai-je bien compris que c'est ce que vous avez dit?
Le président: Ce qu'il dit, c'est que M. Audcent lui a dit qu'il y a exemption implicite des dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée et de la Loi sur l'accès à l'information. Il y a bien une exemption implicite, n'est-ce pas?
M. Carson: C'est en gros ce que m'a dit M. Audcent. Comme cette loi est postérieure aux deux autres qui sont en vigueur, la manière dont l'article 10 est formulé exclurait spécifiquement la divulgation de cette information en vertu de cette loi.
Le président: J'aurais pensé qu'il y avait une disposition dans la Loi sur la protection de la vie privée ou la Loi sur l'accès à l'information qui dirait quelque chose du genre «Ceci a préséance sur toutes les lois, à moins d'exemption explicite». C'est là que voulaient en venir nos amis du Conseil du Trésor lorsqu'ils ont témoigné devant nous. Ils ont dit qu'il était clair que le projet de loi S-13 s'appliquerait sous réserve des dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée, à moins qu'elle vise à obtenir l'exemption ou l'exclusion d'une telle application. M. Audcent croit que ces dispositions seront en vigueur malgré la Loi sur la protection de la vie privée ou la Loi sur l'accès à l'information, et qu'il y a une exemption implicite là-dedans.
Le sénateur Finestone: Puis-je vous rappeler que la Loi sur la protection de la vie privée ne touche pas le secteur public, et c'est pourquoi j'ai fait mes remarques préliminaires. C'est pourquoi ceci est très important. Dans l'intérêt de l'équité et de la justice, je suggère que les travailleurs du Canada, quel que soit leur employeur -- a part les exceptions prévues par la loi --, ne devraient absolument pas être traités différemment. Je pense que c'est cela, l'enjeu.
Le président: Vous soulevez là un point intéressant, parce que les représentants du Conseil du Trésor disent qu'il est clair que le projet de loi S-13 -- c'est l'ancien numéro donné à ce projet de loi --, serait assujetti aux dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée, à moins qu'il vise à obtenir l'exemption ou l'exclusion de ladite application.
Le sénateur Finestone: Comment cela se peut-il?
Le président: Peut-être devrions-nous le leur demander.
Le sénateur Finestone: Très franchement, j'aimerais bien rassurer les gens du Conseil du Trésor que nous n'allons pas adopter une orientation qui nuirait à la cohésion, ou au sens du développement de l'éthique et des valeurs au sein de la main-d'oeuvre. Abstraction faite de la difficulté qu'ils éprouvent à définir l'éthique et les valeurs, et c'est d'ailleurs pourquoi je suis partie pendant leur présentation, je pense que le Canada a une éthique et des valeurs qui sont dignes d'éloges. Je pense qu'elles sont assez bien comprises de façon viscérale, et encore mieux à tout autre niveau, quelle que soit la façon dont elles sont écrites.
Les Canadiens ne veulent pas que les gens aillent à l'encontre des lois du pays et ils ne veulent pas que quiconque commette des actes qui ne sont pas acceptables dans le cadre de l'éthique et des valeurs du Canada. Je ne vois de différence ici.
Il y a toute une partie des nouvelles lois sur la protection des renseignements personnels et de la vie privée qui traite de la loi canadienne sur les normes, qui comporte dix définitions, et chaque définition est assortie d'un sous-alinéa. Toutes sont assujetties aux dispositions sur la dénonciation que renferme cette loi, au paragraphe 27(1). Il y est très clairement dit que quiconque a des motifs raisonnables de croire qu'une autre personne a contrevenu à l'une des dispositions de la section 1 de la Loi sur les normes, ou a l'intention d'y contrevenir, peut notifier au commissaire -- il s'agit du Commissaire à la protection de la vie privée, donc c'est une autre étape -- les détails sur la question et exiger l'anonymat relativement à cette dénonciation.
Le président: Excusez-moi. Lorsque vous dites que la Loi sur la protection de la vie privée ne s'applique pas au secteur public, vous parlez de ce que nous appelons le projet de loi C-6, qui a été adopté à la dernière législature.
Le sénateur Finestone: Vous et moi avions certaines préoccupations au sujet de ce projet de loi. J'ai reçu votre note. Je vous en remercie. Vous avez raison. C'est de plus en plus curieux.
Le président: Ils parlent ici d'une autre loi, pas de celle-là. C'est peut-être la loi qui a créé le poste de Commissaire à la protection de la vie privée.
Le sénateur Finestone: Est-ce que vous parlez de ce que je viens de lire?
Le président: Vous venez de lire un extrait du projet de loi C-6. Une loi existait déjà avant que celle-là entre en vigueur, et cette loi protège la vie privée des citoyens de la curiosité oisive des gouvernements et autres organismes publics. Cette loi, entre autre, a créé le poste de commissaire à la protection de la vie privée, qu'a occupé Bruce Phillips et qu'occupe maintenant George Radwanski. Les gens du Conseil du Trésor disent que ce projet de loi sera assujetti à cette loi, qui touche effectivement le secteur public.
Le sénateur Banks: Exactement.
Le sénateur Finestone: Je comprends ce que vous dites, mais je ne le pense pas.
Le président: Je sais, d'après des entretiens que j'ai eus en privé avec le vice-président et d'autres personnes, que le comité comptait aujourd'hui procéder à l'étude article par article du projet de loi. Nous pouvons encore le faire. Aucun des problèmes, ni aucune des préoccupations qui ont été exprimés n'indique une faille fatale d'ordre juridique. Néanmoins, sénateur Kinsella, nous n'en sommes qu'au début d'une nouvelle session parlementaire. Pensez-vous qu'il vaudrait mieux que nous prenions le temps d'examiner minutieusement la question avec notre propre légiste et, peut-être, avec les gens du Conseil du Trésor, à ce sujet? La question centrale est de déterminer s'il y a exemption implicite comme le prétend M. Audcent.
Le sénateur Kinsella: Monsieur le président, je tiens à assurer à tous les honorables membres de ce comité que nous avons analysé le projet de loi aussi minutieusement qu'il était possible de le faire. Cependant, si le comité juge nécessaire de l'étudier plus en profondeur, il le faut.
Le président: Est-ce que je peux vous proposer de procéder à l'étude article par article jusqu'à un certain point, et de remettre l'examen du titre et du premier article à une autre séance? Vous pourriez demander à l'un de vos collègues de proposer les deux amendements techniques que vous suggérez. Nous pourrions faire la plus grande partie de l'examen article par article, mais nous ne traiterions pas des articles en question. Cela pourrait devenir trop complexe. Je réfléchissais tout haut, et pas de façon très cohérente, j'en ai peur.
Le sénateur Cools: Monsieur le président, le sénateur Kinsella a dit qu'il pense que le comité devrait réfléchir comme il se doit à la question. Je sais que nous sommes pressés d'aller de l'avant avec ce projet de loi, mais une autre séance pourrait permettre, peut-être, de soulager ces préoccupations particulières. Je pense qu'il vaut mieux procéder ainsi que de faire l'étude article par article pêle-mêle.
Le président: Organisons-nous pour que le juriste puisse venir le plus tôt possible ici discuter de ce projet de loi. Je ne pense pas que nous ayons besoin de nous adresser aux gens du Conseil du Trésor, à moins que le juriste nous donne des informations qui, selon nous, le nécessiteraient.
Le sénateur Cools: Je pense cependant, monsieur le président, que dans l'intérêt d'une utilisation adéquate du temps, nous devrions demander aux gens du Conseil du Trésor d'être prêts à venir, au cas où nous ayons quelque chose à leur demander. Ainsi, nous n'aurions pas besoin de reporter la discussion à un autre jour. Nous n'avons pas besoin de les faire venir, mais au moins, ils devraient être prêts à le faire.
J'avais une petite question à poser, qui m'est venue à l'esprit avec toute cette notion de confidentialité. Je n'étais pas membre du Comité sénatorial spécial sur les affaires Pearson, mais il me semble que certains sénateurs qui sont ici l'étaient. Je me rappelle avoir lu des témoignages et avoir été très alarmée par certains d'entre eux. En particulier, je ne sais pas si le sénateur Kinsella ou le sénateur LeBreton s'en rappelle, mais il y avait le témoignage du sous-ministre de la Justice, M. George Thompson à l'époque. Je pourrais très bien me tromper, parce que je n'ai pas étudié la question depuis de nombreuses années, mais il me semble qu'il a présenté un tableau de la situation qui, en fait, revenait à dire que, puisque les employés du ministère de la Justice étaient des avocats, tout conseil qu'ils pouvaient donner à quiconque était protégé par la relation de l'avocat avec son client et que, d'une façon ou d'une autre, la majorité des employés du gouvernement étaient clients du ministère de la Justice et, par conséquent, ils pouvaient tous être liés par le concept de la relation de l'avocat avec son client. Je vois sourire l'un des membres de ce comité. Tout cela pour dire qu'ils ne sont tenus de rien divulguer.
À ce propos de confidentialité, est-ce que ce projet de loi, sénateur Kinsella, traite de ce genre de problèmes?
Le sénateur Kinsella: Dans la mesure seulement où, lorsqu'une allégation est notifiée au Commissaire de l'intérêt public, personne ne peut se cacher derrière le privilège de protection des relations entre un avocat et son client. Dans cette mesure seulement.
Le sénateur Cools: À ce que vous comprenez, et votre but, c'est qu'aucune faute ne peut être cachée.
Le sénateur Kinsella: Exactement.
Le sénateur Cools: C'est un bon argument à soulever.
Le président: Est-ce que nous en terminerons avec cette question à notre prochaine réunion, à 17 h 45? Nous pourrions peut-être nous réunir à la clôture de la séance du Sénat.
Le sénateur Cools: Le comité sénatorial permanent des affaires légales et constitutionnelles doit se réunir à cette heure-là.
Le président: Plusieurs comités se réuniront à ce moment-là. Nous nous réunissons donc à 17 h 45 demain.
J'ai reçu des lettres au sujet de la possibilité pour notre comité de se réunir après la levée de la séance du Sénat les mercredis. C'est en fait aux whips de décider de ce genre de choses. Si jamais ils en conviennent, notre créneau horaire, le mercredi, serait après la clôture de la séance du Sénat plutôt qu'à 17 h 45. Nous laisserons les whips régler cette question. Cependant, demain, notre réunion aura lieu à 17 h 45, à moins d'indication contraire. Nous en terminerons alors avec cette question. M. Audcent sera ici, et nous demanderons aux représentants du Conseil du Trésor d'être prêts à venir au besoin.
Chers sénateurs, je vais maintenant déclarer la séance levée, mais je vous prie de rester un moment pour poursuivre à huis clos. Nous avons d'autres choses à discuter.
La séance se poursuit à huis clos.