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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales

Fascicule 2 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 13 mars 2001

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 32 pour examiner les dépenses prévues dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l'année financière se terminant le 31 mars 2001.

Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous étudions aujourd'hui le Budget supplémentaire de dépenses (A) pour l'année financière 2000-2201 qui prendra fin dans quelques jours. Nos témoins d'aujourd'hui représentent le Secrétariat du Conseil du Trésor.

Veuillez commencer.

M. Keith Coulter, secrétaire adjoint, Secteur de la planification, du rendement et des rapports, Secrétariat du Conseil du Trésor: Honorables sénateurs, je comparais devant vous aujourd'hui pour vous parler du Budget supplémentaire des dépenses (A) du gouvernement pour l'année financière 2000-2001, qui a été déposé au Parlement le 1er mars 2001. Je suis heureux que M. Andrew Lieff, directeur principal de la Division des opérations et des prévisions des dépenses, se joigne à moi aujourd'hui.

De nombreuses personnes au sein du Secrétariat du Conseil du Trésor travaillent à l'élaboration du Budget supplémentaire des dépenses, en particulier dans nos trois secteurs de programmes. Sous la direction de M. Lieff, la Division des opérations des dépenses et prévisions budgétaires rassemble toutes les données contenues dans les livres bleus déposés au Parlement.

Les montants présentés dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2000-2001 sont conformes aux niveaux de dépenses prévus dans l'Énoncé économique et la mise à jour budgétaire d'octobre 2000. Plus particulièrement, le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2000-2001 vise à obtenir l'autorisation du Parlement de consacrer 2,6 milliards de dollars à des dépenses qui n'avaient pas été identifiées de façon précise ou suffisamment élaborées quand le Budget principal des dépenses ou les mandats spéciaux du Gouverneur général ont été préparés. Les mandats spéciaux étaient nécessaires pour obtenir immédiatement des fonds devant servir à soutenir les opérations du gouvernement lorsque le Parlement a été dissous en prévision de la tenue des élections.

Il convient de noter que sur les 12,9 milliards de dollars totaux en dépenses indiqués dans ce Budget supplémentaire des dépenses (A), 10,3 milliards de dollars sont des rajustements survenus dans les dépenses législatives prévues que le Parlement a déjà approuvées et que les montants sont fournis à titre d'information uniquement.

[Français]

Comme je l'ai déjà mentionné, les sommes totales qui sont prévues au Budget principal des dépenses et au présent Budget supplémentaire des dépenses ne dépassent pas les niveaux de dépenses prévus pour 2000-2001, annoncés par le ministre des Finances dans son Énoncé économique et la mise à jour budgétaire d'octobre 2000.

[Traduction]

Pour ce qui est des crédits votés, il y a un certain nombre de postes touchant plus d'une organisation, dont les deux principaux sont les suivants:

[Français]

Un montant de 195,4 millions de dollars au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada en vue de distribuer aux ministères et aux organismes des montants compensatoires pour les récentes conventions collectives et les rajustements connexes liés aux conditions d'emploi. La négociation collective a repris au début de 1997, et les fonds représentent des coûts rétroactifs et des coûts salariaux supplémentaires pour 2000-2001.

Un montant de 140,8 millions de dollars à 25 ministères et organismes en vertu de la disposition relative au report pour répondre à divers besoins opérationnels prévus à l'origine pour 1999-2000. Cette mesure vise à réduire les dépenses de fin d'exercice et à améliorer la gestion de la trésorerie. Elle permet aux gestionnaires de reporter d'un exercice à un autre jusqu'à concurrence de 5 p. 100 de leur budget de fonctionnement de l'exercice précédent. Le budget de fonctionnement comprend les salaires, les dépenses de fonctionnement et les dépenses en capital secondaires.

[Traduction]

Par ailleurs, il y a un certain nombre de postes qui ne concernent qu'une seule organisation, notamment: 595,4 millions de dollars additionnels à la Défense Nationale pour combler des besoins essentiels de fonctionnement et en capital, notamment la compensation des augmentations économiques des salaires accordées au personnel militaire, les coûts de l'énergie et les dépenses de fonctionnement, l'entretien, la mise à niveau et le remplacement du matériel, les travaux de construction et les grands projets d'immobilisations.

Le montant de 206,7 millions de dollars pour le règlement de trois revendications pour lesquelles Affaires indiennes et du Nord Canada a récemment conclu des négociations: l'entente définitive avec la bande Nisga'a, qui a permis de régler une revendication territoriale en Colombie-Britannique, la revendication particulière de Horse Lake en Alberta et une entente à l'amiable avec la Première nation des Squamish, également en Colombie-Britannique.

Cent quarante millions de dollars à Industrie Canada pour le versement d'un paiement à Génome Canada afin d'améliorer la coordination des activités des centres de recherche sur le génome à l'échelle de notre pays.

Cent seize millions de dollars à l'Agence canadienne de développement international pour venir en aide aux pays en développement qui en ont grandement besoin. Les paiements sont versés aux organisations internationales qui oeuvrent sous les auspices des Nations Unies, afin de témoigner de la volonté du Canada à diriger les efforts multilatéraux d'aide au développement pour combattre la pauvreté dans le monde entier.

Cent un millions de dollars au Secrétariat du Conseil du Trésor pour couvrir les coûts supplémentaires de l'assurance de la fonction publique.

Un montant de 71,3 millions de dollars pour des améliorations aux nouveaux instituts de recherche en santé du Canada, de manière à reconnaître la nécessité de mieux comprendre les éléments qui contribuent à la santé et aux maladies et la nature changeante de la recherche en santé.

Un montant de 64,4 millions de dollars à Santé Canada pour des initiatives prioritaires en santé, comprenant des mesures annoncées dans le Budget fédéral de février 1999 et celui de février 2000. Ces fonds appuient la mise en oeuvre de la Stratégie canadienne sur le diabète et de la Stratégie internationale antidrogue; la mise au point et l'essai de nouvelles technologies de l'information et de la communication pour la prestation des services de santé; le soutien à l'Organisation pour l'avancement de l'état de santé des Autochtones et de l'Institut de la santé autochtone; les initiatives répondant aux besoins des victimes de l'hépatite C, la mise au point d'un programme de prévention des blessures pour les aînés, la conclusion de partenariats avec le secteur de bénévolat et le soutien opérationnel pour le Centre canadien des sciences pour la santé humaine et animale à Winnipeg.

[Français]

Les principaux postes susmentionnés représentent 1,6 milliard de dollars des 2,6 milliards de dollars pour lesquels l'autorisation du Parlement est demandée. Le solde de 1 milliard de dollars est réparti entre un certain nombre de ministères et d'organismes. Des détails précis figurent dans le Budget supplémentaire des dépenses.

[Traduction]

En ce qui concerne les changements apportés aux dépenses législatives prévues, les principaux ajustements sont les suivants: trois milliards de dollars en paiements législatifs en exécution de l'entente sur la parité salariale conclue avec l'Alliance de la fonction publique du Canada. Ces paiements sont versés en vertu de l'article 30 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif; quatre milliards de dollars au ministère des Finances pour les soins de santé, y compris: un montant de 2,5 milliards de dollars afin de verser un supplément unique au Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, tel qu'annoncé dans le budget fédéral de février 2000; un montant de 1,5 milliard de dollars pour aider les provinces et les territoires, tel qu'annoncé dans l'accord de septembre conclu avec les provinces pour le renouvellement des soins de santé, pour aider les provinces et les territoires à acheter et à installer des appareils médicaux de diagnostic et de traitement (1 milliard de dollars) et pour répondre aux besoins du réseau des soins de santé au chapitre des technologies de l'information et de la communication (500 millions de dollars); augmentation prévue de 1,15 milliard de dollars des paiements de transfert versés aux provinces par le ministère des Finances. Cette majoration reflète les modifications apportées aux prévisions sur lesquelles ces paiements sont fondés, notamment en ce qui a trait à la population, aux recettes provinciales, aux disparités fiscales entre les provinces et aux prix des produits de base.

Augmentation prévue de 200 millions de dollars des frais de la dette publique; crédit de 170 millions de dollars pour le Bureau du Directeur général des élections pour les coûts associés à la tenue des élections générales de novembre 2000 et des élections partielles tenues en 2000; un montant de 145,5 millions de dollars pour l'Agence canadienne de développement international aux fins d'encaissement de billets à ordre, afin de respecter les engagements du Canada en matière de renflouement du Fonds africain de développement; augmentation prévue de 79 millions de dollars des paiements de Développement des ressources humaines Canada au chapitre de la Sécurité de la vieillesse, du Supplément de revenu garanti et de l'Allocation, en réponse à des changements mineurs dans les prestations mensuelles moyennes et le nombre prévu de bénéficiaires admissibles.

Diminution prévue de 309 millions de dollars pour Développement des ressources humaines Canada au titre des subventions pour les fiduciaires de Régimes enregistrés d'épargne- études. Cette diminution représente un rajustement du taux de croissance très élevé prévu initialement et établi sur la base du nombre des demandes présentées au moment de la mise sur pied du Programme de subvention à l'épargne-études du Canada.

Diminution prévue de 87 millions de dollars des dépenses au titre du Programme canadien de prêts aux étudiants de Développement des ressources humaines Canada, essentiellement à cause d'un recours plus faible que prévu aux mesures d'aide.

[Français]

Une augmentation prévue de 1,8 milliard de dollars au titre des prêts accordés en vertu du Programme canadien de prêts aux étudiants par Développement des ressources humaines Canada, par suite de la prise en charge, par le gouvernement du Canada, du financement des prêts étudiants à compter du 1er août 2000.

Les principaux postes statutaires susmentionnés représentent un rajustement totalisant 10,2 milliards de dollars. Le solde de 80,6 millions de dollars, réparti entre un certain nombre de ministères et d'organismes, figure en détail dans le Budget supplémentaire des dépenses.

Honorables sénateurs, si vous avez besoin de renseignements supplémentaires à ce sujet, je suis à votre disposition.

[Traduction]

Comme je le disais au début, la préparation du Budget supplémentaire des dépenses représente beaucoup de travail pour le secrétariat du Conseil du Trésor. Nous vous avons soumis autant de données que ce que nous pouvions recueillir en prévision de notre comparution. J'espère que nous pourrons répondre à vos questions sur tous les sujets qui vous intéressent. Si nous ne pouvons pas le faire maintenant, nous nous engageons à vous transmettre ces renseignements par la suite.

Le président: Je vous remercie, monsieur Coulter.

Le sénateur Stratton: L'un de mes sujets favoris est celui du contrôle des armes à feu. Sous la rubrique ministère de la Justice, à la page 14, on trouve un résumé des dépenses supplémentaires prévues pour le ministère. À la page 39, au haut de la page sous «ministère», on donne la somme de 30 millions de dollars pour le Programme de contrôle des armes à feu. À la page 108, sous la rubrique «explication du besoin», on trouve deux sommes, 35 568 millions de dollars et 14 263 millions de dollars pour un total de 49 961 millions de dollars.

Comment concilier cette somme de 30 millions de dollars donnée à la page 39 avec les autres demandes de fonds mentionnées à la page 108.

M. Andrew M. Lieff, directeur principal, Direction des opérations des dépenses et prévisions budgétaires, Conseil du Trésor du Canada: On trouve un renvoi au bas de la page 108. Lorsque nous avançons des fonds aux termes d'un crédit 5, nous justifions cette avance pour les parlementaires. Sur cette somme d'environ 49 millions de dollars affectée au Programme de contrôle des armes à feu, 30 millions de dollars ont été avancés avant le dépôt du Budget des dépenses supplémentaire, et nous vous demandons ensuite d'approuver l'affectation des fonds.

Le sénateur Stratton: Quelle partie de cette somme avons-nous dépensée jusqu'ici? Si vous n'êtes pas en mesure de répondre à cette question maintenant, pourriez-vous me communiquer ce renseignement?

M. Lieff: Si l'on tient compte du Budget supplémentaire des dépenses, je crois que cette somme s'élève à 489 millions de dollars. Je vais m'assurer d'avoir raison.

Le sénateur Stratton: Cela me suffit, monsieur Lieff. Je vous remercie.

Le président: Cette somme est supérieure au budget d'exploitation total du ministère pour une année. Cette somme de 489 millions de dollars s'applique cependant à plusieurs années.

Le sénateur Stratton: On a prévu à l'origine que le programme coûterait 65 millions de dollars; il a coûté jusqu'ici 489 millions de dollars. C'est une somme astronomique. Avez-vous fait des prévisions en ce qui touche vos dépenses pour la prochaine année financière?

Le président: Nous étudierons le Budget principal des dépenses demain, sénateur Stratton.

M. Lieff: Nous savons donc que vous poserez une question là dessus.

Le sénateur Stratton: Pour le ministère de la Défense nationale, à la page 79, à la rubrique «Construction» la somme de 1 063 millions de dollars est prévue en 2000-2001 pour le poste «Rénovation du quartier 65 -- Winnipeg».

J'aimerais une précision de votre part. Il est question depuis un certain temps de réinstaller à la base de Shilo le Princess Patricia Canadian Light Infantry qui se trouve actuellement dans les quartiers Kapyong de la base de Winnipeg. J'aimerais savoir si on compte améliorer les quartiers de Kapyong ou ceux d'une autre base.

M. Lieff: Sénateur, pourriez-vous m'indiquer à quelle page vous trouvez ce renseignement? S'agit-il de la page 79?

Le sénateur Stratton: Oui. Il s'agit de la rubrique intitulé «Forces aériennes» et sous cette rubrique on en trouve une autre qui s'intitule «Construction». Le poste auquel je fais allusion est le premier sous la rubrique «Construction».

M. Coulter: Cette somme ne serait pas indiquée sous cette rubrique si elle se rapportait au PPPCLI. Elle ne se trouverait pas sous la rubrique «Forces aériennes». Cette somme s'appliquera à la partie de la base qui relève des forces aériennes.

Le sénateur Stratton: Je vous remercie.

Le président: À la même page, page 124, sous «Forces terrestres» on trouve une ligne où on lit «408 Escadron -- Edmonton». Ce poste ne devrait-il pas figurer sous Forces aériennes?

M. Coulter: Je ne sais pas exactement ce qu'il en est, mais il s'agit d'un escadron d'appui aux opérations de l'armée. Si je ne m'abuse, il s'agit d'un escadron d'hélicoptères légers.

Le sénateur Banks: Messieurs, dans une vie antérieure à laquelle je reviens parfois, j'étais musicien. J'ai fait beaucoup de travail auprès des orchestres symphoniques et le mot «orchestre symphonique» attire toujours mon attention. Je vois dans le budget des dépenses supplémentaire une dépense inhabituelle de 5 millions de dollars. Il s'agit d'une subvention versée au fonds de dotation de l'Orchestre symphonique de Montréal, un très bon orchestre, et je dirais même l'un des deux meilleurs orchestres au Canada.

Cette subvention a été versée à l'orchestre par l'Agence de développement économique du Canada, ce qui me semble une source inhabituelle de subventions. Puis-je maintenant répandre la nouvelle auprès des orchestres symphoniques qu'ils peuvent désormais présenter une demande de subvention à l'Agence de développement économique du Canada? Ils seront très heureux d'apprendre cette nouvelle. Ce poste figure à la page 100.

M. Coulter: Permettez-moi d'abord de dire que le ministère du Patrimoine canadien accorde une aide financière à l'Orchestre symphonique de Montréal ainsi qu'à 35 autres orchestres canadiens par l'intermédiaire du Conseil des arts du Canada. Le Conseil des arts du Canada accorde 1,3 million de dollars par an à l'OSM et 1,4 million de dollars à l'Orchestre symphonique de Toronto.

Le sénateur Banks: J'ai été membre pendant neuf ans du Conseil des arts du Canada. Je suis donc au courant du rôle que joue le Conseil auprès des orchestres symphoniques et je sais aussi dans quelle situation difficile se trouvent beaucoup d'orchestres. Cette subvention est sans doute justifiée, mais je m'interroge au sujet de sa provenance. Je me demande ce qui explique qu'elle provienne de l'Agence de développement économique du Canada.

M. Coulter: Cette subvention cadre avec le mandat de l'ADECRQ, l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, qui est de favoriser le développement économique des diverses régions du Québec. Cette subvention a été jugée appropriée dans le cas de la stratégie d'action de l'ADECRQ pour le Grand Montréal. Cette stratégie vise à faire de Montréal une destination de choix pour les hommes d'affaires et les touristes de l'étranger. L'octroi de cette subvention a été approuvé parce que la subvention répondait au critère de financement et au mandat de cet organisme.

Pour répondre à votre question, tout organisme semblable pourrait présenter une demande de subvention qui serait approuvée si elle répondait aux critères de financement et correspondait au mandat de cet organisme. La subvention est inhabituelle dans la mesure où ce n'est pas la source habituelle de fonds pour les orchestres symphoniques.

Le sénateur Banks: C'est une très bonne nouvelle et je la répandrai. Je vous remercie.

Le président: Il ne s'agit pas simplement d'une subvention, n'est-ce pas? Il s'agit d'un fonds de dotation auquel l'agence régionale au Québec...

Le sénateur Banks: C'est exactement la question que je posais.

Le président: ... contribue ou que l'agence finance entièrement.

Le sénateur Banks: Il ne s'agit pas d'une subvention d'exploitation. C'est une subvention versée à un fonds de dotation. La plupart des grands organismes artistiques au Canada possèdent des fonds de dotation. C'est ce qui permet à certains de ces organismes de survivre lorsque les temps sont durs. Ces fonds sont constitués à diverses fins. Les théâtres ont recours à ces fonds de dotation pour réparer leur toiture ou pour remplacer les sièges de leurs salles. Tous les théâtres ont des fonds de dotation. Cette subvention n'est cependant pas une subvention d'exploitation mais une subvention versée à un fonds de dotation. Il est inhabituel que le gouvernement accorde ce genre de subvention. Je suis heureux de savoir que c'est possible. Je répandrai la nouvelle.

Le président: Rien ne s'oppose à ce que de bonnes causes reçoivent des fonds de diverses sources gouvernementales et de tous les paliers de gouvernement. On se demande cependant si la coordination est suffisante à cet égard au niveau fédéral. La question qui se pose est toujours de savoir si la main gauche sait ce que fait la main droite.

Il existait à un moment donné un fonds d'initiatives culturelles relevant du ministère des Communications. Je ne m'étendrai pas trop là-dessus, mais ce fonds semblait relever du ministre et de son cabinet. Ce n'est pas ce gouvernement qui a commencé cette pratique. Ce fonds existe-t-il toujours?

M. Lieff: Je n'en suis pas sûr.

Le président: Je crois qu'il s'agissait du programme des initiatives culturelles qui relevait du ministère du Patrimoine.

M. Coulter: Nous nous renseignerons à ce sujet.

Le sénateur Bolduc: Je reviens à la subvention accordée au fonds de dotation de l'OSM. Cette subvention a-t-elle été accordée à l'orchestre à l'issue des négociations difficiles qui ont eu lieu entre l'orchestre et ses musiciens?

M. Lieff: Sénateur, je ne sais pas ce qu'il en est à ce sujet. La subvention a été accordée dans le cadre de la stratégie globale destinée à la région de Montréal et qui vise à développer le potentiel culturel et touristique de cette ville.

Le sénateur Bolduc: Avez-vous les critères relatifs à la stratégie de développement de Montréal?

M. Lieff: Non, sénateur.

Le sénateur Bolduc: Pourriez-vous nous les obtenir? Je me demande vraiment si ce genre d'initiative cadre avec cette stratégie. Cela me rappelle les critères qui étaient utilisés par la Banque de développement qui a fini par financer un bar de danseuses à Hull et à d'autres endroits. J'ai trouvé cela un peu gênant.

M. Lieff: Je vous souligne que la stratégie de développement de Montréal elle-même devait répondre au critère de financement. Comme le sénateur Banks l'a fait remarquer, il s'agit d'un fonds de dotation. Cette somme de cinq millions de dollars sera versée dans un fonds en fiducie et seul l'intérêt qu'elle rapportera pourra être utilisé. Il ne s'agit pas de la seule source de financement du fonds. Certains critères régissent la façon dont ces fonds peuvent être dépensés.

Je vous signale également que si la fondation devait cesser ses activités, cette somme de cinq millions de dollars serait remboursée au gouvernement. La fondation peut garder cette somme tant qu'elle existe et qu'elle crée des retombées touristiques et culturelles.

Je ferai de mon mieux pour vous obtenir les critères de financement.

Le président: Je suppose qu'un ministre ou un haut fonctionnaire a fait une déclaration à l'époque, et vous pourriez peut-être nous la faire parvenir pour nous permettre de comprendre quelle justification a été fournie.

Le sénateur Bolduc: Me permettez-vous, monsieur le président, de revenir aux mandats spéciaux du gouverneur général?

Le président: Bien entendu.

Le sénateur Bolduc: Au sujet de Patrimoine Canada, je remarque que plus de 10 p. 100 du budget du ministère, qui est de l'ordre 800 millions de dollars, relèvent de ces mandats spéciaux pour l'année 2001. Je peux comprendre l'utilité de certains mandats.

Par exemple, en agriculture, cela représente dans les 170 millions de dollars. Nous savons tous que les agriculteurs de l'Ouest ont des problèmes. Toutefois, je suis un peu sidéré de voir que, dans le mois et demi qui a suivi la période électorale, nous avons eu besoin de 10 p. 100 du budget.

Je me trompe peut-être, mais à mon avis, un mandat spécial est là pour répondre au besoin immédiat de fonds. Si nous examinons le résumé des affectations de crédit relatives à ces mandats, il y en a partout. C'est devenu chose courante.

Je veux parler des mandats spéciaux dont il est question au début du livre. Ils sont prévus pour tous les organismes exécutifs du gouvernement. Cela me cause un problème. J'étais bien là dans les années 50 et, à l'époque, lorsqu'on utilisait un mandat du Gouverneur général, c'était pour une raison précise, comme une catastrophe ou une crise économique soudaine. C'est devenu un procédé courant. Il y en a dans les 200 cette fois-ci.

Prenons l'exemple des Affaires étrangères. Vous constaterez que l'explication fournie dans le budget s'applique à pratiquement toutes les divisions du ministère. On en retrouve partout.

Prenons par exemple la page 121. Lorsque vous aurez le temps, lisez là.

Le président: Oui, c'est incroyable.

Le sénateur Bolduc: La politique n'a plus aucun sens. Après tout, il n'y a qu'un mois et demi que les élections sont terminées. Remarquez, je vous en parle mais, en temps normal, j'en parlerais au ministre. Je pense que nous sommes en train de perdre tout bon sens. Bien entendu, je ne siège pas à la Chambre des communes, et le Sénat n'a pas le même rôle de surveillance parlementaire, mais j'ai quand même l'impression que c'est devenu une question où l'approbation du Parlement n'est plus utile, et on se contente de dépenser les fonds et de faire rapport ensuite, et voici le rapport. Il m'est difficile d'adopter une telle formule. Ce n'est pas la bonne façon de faire.

Par exemple, à Patrimoine canadien, et je n'ai rien contre ce ministère en particulier, il y a plus de 12 mandats, et ce ne sont que le nombre total pour chaque organisme. Cela n'est pas normal. Il est difficile de croire que les gens ne peuvent attendre 40 jours, la durée d'une période électorale, avant de dépenser, c'est-à-dire d'attendre jusqu'à ce que le Parlement donne son aval.

Qu'en pensez-vous? Je ne vous reproche rien, mais cela passe bien par vos mains.

M. Coulter: C'est effectivement passé par nos mains.

Le sénateur Bolduc: Je suppose que la ministre faisait campagne à cette époque-là. Est-ce à dire que lorsque la ministre est absente, il est plus facile d'obtenir des fonds du Conseil du Trésor?

M. Coulter: Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Ma réponse est en deux volets.

M. Lieff et moi-même avons beaucoup appris au sujet du régime des mandats ces derniers mois. Aucun d'entre nous n'avait connu de période électorale où l'on avait eu besoin de recourir aux mandats. Nous avons très rapidement appris comment fonctionne ce régime et ce à quoi il sert et ne sert pas.

Au départ, il nous faut continuer à assurer des services aux Canadiens lorsque le Parlement ne siège pas. C'est une question de ponctualité du processus d'approvisionnement. Lors de la dernière période électorale, au moment de l'émission des brefs, nous étions sur le point de déposer un budget des dépenses supplémentaire au Parlement. Cela devait avoir lieu le 3 novembre, si l'on s'en tenait au calendrier normal. Ainsi, au Secrétariat du Conseil du Trésor, il nous a fallu examiner la situation avec objectivité et nous demander quels étaient les véritables besoins de liquidités par ministère. C'est une entreprise énorme.

Je peux dire au comité que gérer le régime des mandats spéciaux lors de la préparation de ce Budget des dépenses supplémentaire et du Budget des dépenses principal a exercé des pressions énormes sur une organisation qui n'a pas les ressources voulues pour mener de front différentes activités.

Nous avons examiné les cas un par un, ministère par ministère, et le processus découle de la Loi sur la gestion des finances publiques qui a été approuvée par le Parlement. Celle-ci prévoit les mandats spéciaux qui doivent remplir certains critères. Au Secrétariat du Conseil du Trésor, c'est un exercice purement administratif. Toutefois, à la fin, il faut que la ministre, qui à l'occasion était en déplacement pour sa campagne, approuve la recommandation bureaucratique selon laquelle ces fonds étaient nécessaires.

Nous avons ensuite émis des mandats à trois reprises et nous avons fini par en arriver à ce chiffre, qui est le bon, à notre avis.

Le sénateur Bolduc: Mais vous prévoyez 3,5 milliards de dollars. C'est énorme. Une bonne partie de cet argent est destiné à la ristourne pour le mazout domestique, un nouveau programme annoncé pendant la campagne électorale. De toute évidence, le ministre était en conflit d'intérêts. D'une part, il disait: «Nous allons vous donner de l'argent», mais d'autre part, il demandait aux fonctionnaires de préparer ces mandats. Grand Dieu, il n'y a plus de limites de nos jours et cela ne plaît pas beaucoup au vérificateur général.

Je vais vous citer un autre exemple. Pour le ministère des Pêches, plus de 200 millions de dollars ont été attribués au cours de cette période. C'est le vérificateur général lui-même qui déclare que le ministère des Pêches a un énorme problème pour ce qui est de la gestion des subventions notamment, et ce sont bien des subventions.

C'est une remarque que je voulais faire. Je dois sans doute vieillir.

M. Lieff: Sénateur, j'aimerais un peu vous expliquer la situation dans le temps. Lorsque les élections sont déclenchées, comme l'a dit M. Coulter, toutes les activités prennent fin et nous passons dans un mode différent pour diriger les opérations du gouvernement. En fait, aucun des mandats n'a été émis pendant la période électorale. Celle-ci était terminée, lorsque le premier mandat a été émis. Il ne s'applique pas simplement à la période électorale. En fait, il doit s'appliquer à la période écoulée depuis l'émission des brefs jusqu'à l'obtention de crédits prévus dans ce Budget des dépenses supplémentaire. Le pouvoir d'émettre des mandats spéciaux est nécessaire pour gérer toutes les dépenses du gouvernement jusqu'à l'adoption par le Parlement du Budget des dépenses supplémentaire, à supposer qu'elle ait lieu.

Le sénateur Bolduc: C'est le gouvernement qui décide du moment où le Parlement revient. Il aurait pu décider de reprendre en décembre, ce qui aurait résolu le problème.

Le président: Vous comprenez que la reprise ne peut pas avoir lieu tout de suite.

Le sénateur Cools: Monsieur le président, je voudrais tout d'abord souligner les préoccupations du sénateur Bolduc quant aux mandats spéciaux du gouverneur général. Je comprends la situation dans laquelle vous vous trouvez, messieurs. Le fait est, honorables sénateurs, que j'ai dû annuler des déplacements à l'automne dernier pour être prête à examiner ce projet de loi de subsides. C'est parce que, dans l'état normal des choses, le Parlement aurait dû être prêt à examiner un projet de loi de subsides, lequel aurait reçu l'examen voulu et fait l'objet d'un vote avant le déclenchement des élections. Après tout, il me semble qu'on peut supposer sans se tromper qu'il incombe au gouvernement de s'assurer que les fonds sont suffisants avant de déclencher des élections. À mon avis, débuter une période électorale en misant sur le recours aux mandats spéciaux ne représente pas une bonne façon d'appliquer la Loi sur la gestion des finances publiques.

Vous n'êtes peut-être pas les personnes auxquelles il convient de poser cette question, messieurs, mais je me demande qui a décidé, et à quel moment, de ne pas proposer un projet de loi de subsides et de déclencher les élections sans disposer des crédits suffisants.

M. Lieff: La Loi sur la gestion des finances publiques prévoit expressément le recours aux mandats spéciaux en période électorale. En fait, c'est le seul moment, conformément à la fameuse modification Milliken de 1997 ou 1998, où l'on peut avoir recours aux mandats. Les années passées, le gouvernement a pu utiliser les mandats spéciaux pendant une période d'ajournement. En fait, on a reproché au gouvernement de l'époque de prolonger les périodes d'ajournement en ayant recours aux mandats spéciaux.

La Loi sur la gestion des finances publiques prévoit expressément le recours aux mandats spéciaux pour maintenir les opérations gouvernementales essentielles en période électorale.

Le président: La dernière fois qu'il y a eu un débat important sur cette question, c'était en 1989, sauf erreur. Il y avait eu des élections en novembre de l'année précédente. Le Parlement a repris ses travaux dès que possible, en décembre, pour adopter l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis.

Comme cela s'était fait juste avant le Nouvel An, nous avons fermé boutique jusqu'à la mi-avril, je crois. C'est à ce moment-là qu'une nouvelle session a débuté. Techniquement, nous étions en période d'ajournement et l'on a eu recours aux mandats spéciaux du gouverneur général. Il y a eu par la suite un important débat sur cette question au Sénat. Je me souviens de m'être reporté à des modifications apportées à la Loi sur la gestion des finances publiques sous le gouvernement Diefenbaker, si je ne m'abuse, etc.

On décrit en détail les critères qui s'appliquent. Toutefois, je ne vois pas la différence entre ce qui s'est fait en 1988-1989 et ce qui s'est fait cette année lorsque vous avez adopté des mandats spéciaux pour faire face aux dépenses pendant toute la période. La seule différence, c'est qu'à l'époque, entre décembre 1988 et avril 1989, nous étions en période d'ajournement. Par contre, entre novembre 2000 et janvier 2001, nous étions toujours en période de dissolution des Chambres, si je puis dire.

La remarque n'est peut-être pas importante, mais vous avez dit il y a quelques instants, que vous aviez jugé suffisamment important de signaler que le gouvernement a le droit d'adopter des mandats spéciaux du gouverneur général uniquement en période électorale, et qu'il ne peut pas le faire pendant un ajournement.

M. Lieff: C'est exact. En outre, pour répondre à la question qui s'est posée en 1988-1989, la modification à la Loi sur la gestion des finances publiques prévoyait expressément que l'on ne pouvait avoir recours aux mandats que lorsque le Parlement avait été dissous en vue des élections. On a prévu dans la loi une date limite précise pour l'utilisation des mandats spéciaux, soit jusqu'à 60 jours suivant le dépôt des brefs d'élection. Si l'on avait appliqué les 60 jours suivant le dépôt des brefs, cela nous aurait mené jusqu'en février. En vertu des règles techniques de ce qui était permis, le gouvernement, en théorie, aurait pu rappeler le Parlement uniquement en se fondant sur ce critère -- plus tard qu'il ne l'a fait -- conformément au délai précis annoncé dans la loi.

Le président: Ni le sénateur Bolduc ni moi ne remettons en cause les principes.

Le sénateur Cools: Je crois savoir également que ces mandats spéciaux ne sont pas censés être utilisés de façon courante. D'après mes renseignements, le critère dont vous avez parlé, notamment pendant la dissolution des Chambres -- sauf erreur, l'un de ces critères est en rapport avec l'urgence de la situation. Il faudrait vraiment faire preuve d'imagination pour penser un seul instant que la Loi sur la gestion des finances publiques a été adoptée pour faire face aux affaires courantes, ou pour remplacer le Parlement. Le rôle fondamental du Parlement, après tout, est d'adopter les crédits. Il y a toute une série de critères qu'il faut remplir pour pouvoir utiliser ces mandats spéciaux.

Je comprends le problème et je suis sensible à la situation dans laquelle le gouvernement et vous vous trouvez. Il y a eu une époque de notre histoire où les ministres craignaient Dieu, ou craignaient d'aller en prison s'ils envisageaient seulement d'avoir recours à ces mandats. À la fin du débat d'aujourd'hui, il est clair comme de l'eau de roche, à nos yeux, que le moment est venu pour notre comité ou un autre d'étudier ce phénomène, comme nous l'avons fait en 1989.

À l'heure actuelle, le simple député à la Chambre des communes et la plupart des ministres n'ont peut-être jamais entendu parler des mandats spéciaux du Gouverneur général. Le moment est venu de leur rafraîchir la mémoire. Je vous remercie de votre franchise et de votre honnêteté.

M. Coulter: Pour ce qui est de l'usage, de la pratique et de l'historique de cette question, nous avons tout passé au peigne fin. Nous pouvons dire que, à notre avis, nous avons appliqué le régime des mandats en respectant pleinement tous les critères relativement à tous les postes pour lesquels nous avons demandé l'émission d'un mandat. La pertinence du régime, le déclenchement des élections et le rappel du Parlement sortent quelque peu de notre champ de compétence administrative.

Le sénateur Cools: Je le comprends.

M. Coulter: Si les honorables sénateurs se penchent sur cette question, vous avez manifestement une opinion sur la question dont il faut tenir compte. Toutefois, de notre point de vue, en tant que fonctionnaire qui s'efforcent de gérer les finances de l'État pendant cette période relativement longue, nous estimons avoir utilisé à bon escient les mandats spéciaux.

Le sénateur Cools: J'en suis consciente et je comprends. Ce que je veux dire c'est que, en principe, il n'est pas normal qu'un gouvernement dise qu'il est inutile de présenter un projet de loi de subsides parce que, après tout, nous pouvons déclencher des élections et nous en remettre à la Loi sur la gestion des finances publiques. C'est contre le principe que je m'inscris en faux. Ce n'est pas à vous de résoudre le problème, mais à vos maîtres politiques.

Le sénateur Bolduc: J'aimerais citer deux autres exemples qui illustrent mon propos. Pour le contrôle des armes à feu, par exemple, on parle d'une somme de 96 millions de dollars qui a été autorisée en vertu des mandats spéciaux. Pour les dépenses publiques, il y a l'acquisition de Canada Place, à Edmonton, pour 98 millions de dollars et l'acquisition de l'Hôtel de Ville d'Ottawa pour 36 millions de dollars. Je ne sais pas pourquoi il a fallu procéder à ces achats au cours de cette période. C'était peut-être inévitable, je n'en sais rien. C'est très étrange.

Le président: Ces transactions sont-elles terminées?

M. Lieff: Oui.

Le président: Il est possible qu'un jour nous examinions tous les critères, et notamment la question de l'urgence, pour voir si les dépenses peuvent être qualifiées d'imprévues. Je me souviens que le terme a été utilisé.

Le sénateur Cools: Il semble que, pendant la dissolution de Chambres, le critère prévoit l'urgence et l'imprévu.

M. Coulter: L'un des critères est l'urgence dans l'intérêt du bien public.

M. Lieff: Lorsque nous avons fait des recherches dans les débats de 1989, nous avons établi que, en fait, le gouvernement de l'époque avait eu recours aux mandats spéciaux pour prévoir le maintien des opérations courantes du gouvernement -- par exemple, pour payer les fonctionnaires ou continuer d'offrir aux Canadiens leurs pensions de RPC ou leurs chèques d'assurance-chômage, et autres choses du même genre. Ces activités permanentes étaient toutes considérées à l'époque comme conformes aux critères du besoin urgent pour le bien public. Les débats, et les avis juridiques formulés à l'époque, notamment un avis provenant du doyen d'alors de la Faculté de droit de Osgoode Hall, ont révélé que l'on pouvait raisonnablement interpréter ce critère de façon à prévoir le maintien des opérations courantes du gouvernement.

Pour ce qui est de l'élément du besoin urgent et de la façon dont les mandats sont émis, vous remarquerez qu'il y a eu trois mandats distincts. Chaque ministre doit attester que ses dépenses sont bien nécessaires. Pour les deux premiers mandats, la période est de 30 jours, conformément à la convention parlementaire, et pour le dernier, le délai est plus long pour permettre à la Chambre des communes et au Sénat d'examiner les subsides.

C'est là que se pose l'élément du besoin urgent. Chaque ministre doit en attester, conformément aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques.

M. Coulter: Trois conditions sont prévues dans la Loi sur la gestion des finances publiques. Elles doivent être remplies avant qu'on puisse émettre un mandat spécial. En premier lieu, le Parlement doit être dissous avant le déclenchement des élections et cela va de la date de la dissolution jusqu'à 60 jours suivant la date prévue pour le retour des brefs d'élection. Deuxièmement, la somme à payer doit être requise d'urgence pour le bien public. Le troisième facteur est qu'il n'existe aucun autre crédit à partir duquel effectuer ce paiement. Ce que nous faisons, entre autres choses, c'est donc épuiser le crédit 5 du Conseil du Trésor avant de passer au régime des mandats. C'est ce que prévoit la Loi sur la gestion des finances publiques. Nous avons ensuit examiné tous les précédents et les avons respectés le mieux possible.

Le sénateur Doody: Vous est-il arrivé de refuser des demandes ministérielles de mandats?

M. Coulter: Oui. C'est une question dont on discute, plutôt que de faire parvenir une série de demandes au Secrétariat du Conseil du Trésor. Il y a eu un dialogue approfondi entre les ministères, avec des hauts fonctionnaires des Finances et d'autres responsables au Secrétariat. Ce dernier a jugé satisfaisante la liste qui a été établie.

Le sénateur Doody: Dois-je comprendre que les critères n'incluent pas les termes «urgent» ou «émergent»?

M. Coulter: Il faut démontrer l'urgence du paiement et sa nécessité dans l'intérêt public. C'est l'un des principaux critères de la Loi sur la gestion des finances publiques. Toutefois, comme l'a dit M. Lieff, nous nous sommes appuyés sur la jurisprudence, les conventions et traditions parlementaires, formule qui se rapproche de la common law.

Le président: Convenons d'envisager de faire un examen plus approfondi de la question. Si les sénateurs ont l'impression qu'il y a trop d'échappatoires, ou que l'interprétation de ces dispositions est trop large, nous pourrons proposer quelques modifications.

M. Lieff: Sénateur, je vous signale qu'il y a certaines choses pour lesquelles le gouvernement se refuse à utiliser les mandats spéciaux et qu'il ne croit pas être habileté à faire en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques. Il est habileté à présenter des budgets supplémentaires des dépenses. Nous ne pourrions toutefois pas créer un tout nouveau crédit. Nous ne modifierions pas le libellé d'un crédit pour donner une autorisation à caractère législatif notamment pour radier des dettes ou relever le plafond des garanties de prêts. Nous n'utiliserions pas non plus les mandats pour accorder des subventions.

Le sénateur Cools: Ma question porte sur le ministère de la Justice, page 109 du Budget supplémentaire des dépenses (A). Je note, au haut de cette page, sous la rubrique «Subventions», une subvention de 140 000 $ à l'Institut national de la magistrature. Voyez-vous ce dont je parle?

M. Coulter: Oui.

Le sénateur Cools: Il me semble que c'est une augmentation considérable des sommes versées à l'Institut national de la magistrature. Que fait cet institut? Qui le dirige? À quoi doit servir cette somme? Pourquoi cette subvention représente-t-elle une si forte proportion du budget de l'institut?

Le président: Cela relève du ministère de la Justice, mais si vous vous reportez à la page 14, vous verrez que le détail n'est pas donné. Le montant est fondu dans le total des subventions.

Le sénateur Cools: Je crois que le directeur exécutif de l'Institut national de la magistrature est l'ancien sous-ministre de la Justice.

M. Coulter: Nous avons là-dessus des informations que nous sommes prêts à vous donner. Ce poste vise à donner au ministère de la Justice la possibilité d'augmenter de 140 000 $ la subvention à l'Institut national de la magistrature pour l'exercice en cours et cela, en respectant niveaux de référence existants.

L'Institut national de la magistrature est l'organisation nationale de pointe pour la formation continue des juges canadiens nommés au niveau fédéral et provincial. Depuis sa création en 1988, l'Institut canadien a joué un rôle déterminant dans l'avancement notable de la formation des juges. Le budget de l'INM est financé intégralement en vertu d'une entente entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Le gouvernement fédéral verse la moitié des fonds requis, les provinces et les territoires se partageant l'autre moitié en proportion du nombre total de juges dont chacun a besoin. Le budget total de l'INM pour 2000-2001 s'élève à 537 000 $, de sorte que la contribution du fédéral est de 268 000 $. Cependant, la subvention fédérale est de 128 000 $ de sorte qu'il fallait verser 140 000 $ de plus au titre de la part fédérale.

Le ministère de la Justice travaille actuellement de concert avec les fonctionnaires du Conseil du Trésor pour mettre au point un mécanisme de financement à long terme de l'INM.

Le sénateur Cools: Le chiffre me semble néanmoins très élevé. Qui dirige l'institut maintenant?

M. Coulter: Nous vous obtiendrons ce renseignement.

Le sénateur Doody: Monsieur le président, le règlement d'équité salariale éveille ma curiosité. Nous en avons parlé longuement quand le comité a examiné il y a quelque temps le Budget principal des dépenses. Je note qu'on prévoit aussi 3 milliards de dollars pour ce poste. Est-ce le total du règlement de l'équité salariale? Sinon, quel est le total? Une certaine somme avait été cachée dans le crédit des salaires du budget principal des dépenses; on ne précisait que c'était au titre de l'équité salariale. On nous a donné comme explication que c'était nécessaire aux fins de la négociation, notamment. Toutefois, nous n'avons jamais pu découvrir le montant exact parce que personne ne savait à l'époque quelle somme serait requise, et cette explication nous semblait raisonnable. Connaissez-vous maintenant la réponse? Ces 3 milliards de dollars s'ajoutent-ils au montant prévu à l'époque -- et je ne sais toujours pas ce qu'était ce montant -- et, si oui, quel est le total?

M. Lieff: Le gouvernement a annoncé que le total du versement rétroactif du règlement d'équité salariale s'élèvera à 3,6 milliards de dollars. Nous prévoyons qu'il n'y aura pas de dépassement. La somme légèrement supérieure à trois milliards de dollars qui figure dans le Budget supplémentaire des dépenses correspond aux sommes effectivement versées aux particuliers jusqu'à maintenant ou qui le seront au cours de l'exercice.

Une partie de ces paiements rétroactifs seront versés au cours du prochain exercice puisque nous tentons de retrouver certains employés qui ont quitté la fonction publique. Nous rajustons certains paiements pour corriger certaines erreurs de calcul qui ont été faites sur certains chèques. Le dossier n'est donc pas clos. Toutefois, cette somme représente la très grande majorité des paiements.

Il y a aussi 47 millions de dollars additionnels au crédit 20 -- Assurances de la fonction publique -- dans ce Budget supplémentaire des dépenses; ce montant correspond aux charges sociales prélevées par certaines provinces sur les salaires versés aux fonctionnaires.

Le sénateur Doody: Le montant de 3,6 milliards de dollars, plus les charges sociales, etc.

M. Lieff: C'est inclus dans les 3,6 milliards de dollars.

Le sénateur Doody: Est-ce le total global?

M. Lieff: C'est exact.

Le sénateur Doody: Ce montant inclut la somme qui figurait dans le Budget principal des dépenses ou dans le Budget supplémentaire des dépenses (A), est-ce bien cela?

M. Lieff: Le montant qui figurait dans le précédent Budget principal des dépenses, et qui figurera dans celui-ci correspond aux coûts permanents de rajustement des salaires des fonctionnaires pour refléter l'incidence de l'équité salariale sur leurs salaires courants plutôt que les sommes qui leur sont dues rétroactivement en raison du règlement.

Le sénateur Doody: Cela n'est pas le total du règlement alors?

M. Lieff: Le Budget supplémentaire des dépenses reflète le règlement total au titre de la rémunération rétroactive due aux fonctionnaires. Les rajustements de la base salariale courante sont compris dans une fourchette de 100 millions à 200 millions de dollars par année.

Le sénateur Doody: Ils sont inclus dans les estimations salariales.

M. Lieff: C'est exact.

Le sénateur Doody: La somme dont nous avons parlé plus tôt est incluse dans ces 3,6 milliards de dollars.

M. Lieff: Non, les 3,6 milliards de dollars qui figurent au Budget supplémentaire des dépenses ne concernent que les versements rétroactifs. Les coûts courants font partie de la base salariale des ministères.

Le sénateur Doody: Comprenez-vous cela?

Le président: Le total des versements rétroactifs s'élève alors à 3,6 milliards de dollars?

M. Lieff: C'est exact.

Le sénateur Doody: Quand nous avons discuté longuement des sommes réservées pour le règlement mais non indiquées explicitement, parce qu'elles étaient enfouies ailleurs, nous étions très contrariés car le Parlement n'avait pas la possibilité de savoir ce au juste pourquoi il votait en votant en faveur de ces rajustements salariaux. Pourquoi étions-nous si contrariés si les 3,6 milliards de dollars ne figurent que dans le Budget supplémentaire des dépenses?

M. Lieff: J'avoue ne pas me souvenir de cette discussion.

Le président: C'était une discussion très vive. On me signale que c'était avant l'arrivée de M. Coulter, mais M. Lieff était là.

M. Lieff: Cela ne doit pas dater d'hier. Si ma mémoire est bonne, à l'époque, l'affaire était devant le tribunal ou le règlement venait tout juste d'être négocié.

Le sénateur Doody: C'est bien cela.

M. Lieff: Nous savions à l'époque que le coût s'élèverait grosso modo aux environs de trois milliards de dollars. Nous ne savions pas comment le total serait réparti et comment cela se refléterait sur les salaires, et nous étions certainement loin d'effectuer les paiements.

Nous inscrivons les sommes prévues dans le budget des dépenses seulement quand nous sommes en mesure de vous indiquer le montant des paiements en vertu d'une autorisation législative. Les sommes n'apparaissaient pas du tout dans le budget des dépenses à l'époque, sauf pour les sommes correspondant aux dépenses courantes, lesquelles étaient comprises dans les niveaux de référence ministériels.

Le président: Je pense que nous devrions relire le compte rendu de la discussion.

Le sénateur Doody: Nous étions outrés à l'idée que le Parlement soit appelé à voter de telles sommes sans connaître les détails.

M. Lieff: Je m'en rappelle, sénateur Doody. Des sénateurs avaient fait observer que le Parlement ne se prononçait pas sur ce montant, puisqu'il s'agissait d'un paiement statutaire. Le pouvoir d'effectuer le paiement avait été accordé aux termes de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, qui permet au ministre des Finances d'effectuer des paiements pour régler des décisions rendues par les tribunaux. Et je me rappelle bien, c'est ce qu'on a dit à ce moment-là.

Le président: On a annoncé que le règlement avait été versé, et la question a été soulevée au comité: D'où vient l'argent?

Le sénateur Doody: C'est bien cela. Les premiers chèques devaient être envoyés à la fin de ce mois-là. Nous avons demandé d'où venait l'argent et l'on nous a dit que c'était dans le crédit pour les salaires, mais le Parlement ne pouvait pas le savoir parce que ce n'était pas identifié comme tel.

Le président: Peu importe d'où venait l'argent, on nous a dit que c'était prévu quelque part dans le budget des dépenses, que l'on avait fait une provision pour cela, par prudence. Il y avait une provision quelque part dans le budget. Nous avons eu une longue discussion à ce sujet.

M. Lieff: Ce n'était pas dans le budget des dépenses. Je me rappelle maintenant de la discussion avec M. Neville. Il en est ressorti que nous avions prévu une charge pour ce règlement dans les comptes du Canada, et non pas dans le budget des dépenses, et les montants avaient été discutés avec le vérificateur général. Nous savions depuis des années qu'une action en justice aurait lieu et des montants ont donc été mis de côté à ce moment-là dans les comptes du Canada, sur un certain nombre d'années, en fait, pour pouvoir payer ce règlement. Cela se trouve donc dans la comptabilité du gouvernement.

En fait, même si ce n'était pas identifié explicitement, les états financiers du Canada qui sont déposés à la fin de l'année avec les comptes publics prévoyaient une marge permettant de débourser cette somme. Bien sûr, nous ne voulions pas divulguer le montant à l'époque, parce que nous avions prévu de l'argent pour un règlement qui n'avait pas encore été conclu. La simple prudence dictait toutefois qu'il fallait mettre de l'argent de côté pour le règlement.

Le président: Nous allons examiner ce qui s'est dit à l'époque. Quand le Parlement l'a-t-il approuvé? Le Parlement l'avait approuvé dans le cadre du budget des dépenses précédent et le montant avait été mis de côté quelque part dans un crédit, même s'il n'était pas identifié comme tel.

Le sénateur Doody: Précisément. Le premier lot de chèques ont été envoyés et ils ont bien dû être défalqués quelque part. Ce n'était puisé à même le compte personnel du ministre.

M. Lieff: Sénateur Doody, la provision qui avait été faite dans les comptes du Canada figurait dans les livres comptables du Canada, mais n'a pas été soumise à l'approbation du Parlement dans le budget des dépenses. Cela a toutefois été déposé au Parlement dans les comptes publics.

Le pouvoir de débourser l'argent est prévu à l'article 30 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif. Nous vous indiquons maintenant le montant de ces paiements à titre d'information.

Si je me rappelle bien, la discussion portait à ce moment-là sur la façon dont le Parlement peut autoriser le gouvernement à débourser une somme aussi importante sans qu'on en demande l'autorisation au Parlement au moyen d'un crédit budgétaire.

Le sénateur Bolduc: Votre réponse est qu'il s'agit d'une dépense statutaire?

M. Lieff: Exactement. Nous précisons maintenant le montant de la dépense effectuée aux termes de ce pouvoir statutaire. À l'époque, nous avions estimé que la dépense serait de l'ordre de 3,6 milliards de dollars. Nous nous en tenons toujours à cette estimation. Nous indiquons maintenant le montant des débours effectués aux termes de ce crédit législatif, mais ce n'était pas compris dans un crédit budgétaire. La portion de cette dépense qui est autorisée par un crédit ne correspond pas à la portion rétroactive du règlement qui, elle, est autorisée aux termes de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et du contentieux administratif. Il s'agit des coûts permanents du rajustement des salaires par suite de l'entente des fonctionnaires qui travaillent actuellement.

Le sénateur Doody: Êtes-vous en train de me dire que les 3,6 milliards de dollars indiqués ici ont déjà été dépensés, que les chèques ont déjà été envoyés?

M. Lieff: Trois milliards de dollars ont déjà été dépensés.

Le sénateur Doody: Trois milliards de dollars ont déjà été dépensés?

M. Lieff: C'est bien cela.

Le sénateur Doody: Vous demandez trois milliards de dollars pour remplacer ce montant?

M. Lieff: Nous indiquons la somme de trois milliards de dollars pour vous faire savoir qu'elle a été dépensée. Nous ne demandons rien.

M. Coulter: Je précise qu'aucun crédit n'est demandé en l'occurrence. C'est indiqué seulement à titre d'information pour le Parlement.

Le sénateur Bolduc: Je ne comprends toujours pas. La décision judiciaire que vous avez mise en oeuvre est fondée sur le principe du salaire égal pour un travail égal. Le salaire égal est très facile à comprendre. C'est quantitatif; on peut régler cela. L'autre élément de l'équation, c'est le travail égal. Le vérificateur général nous a dit que tout le plan de classification du gouvernement est un véritable fouillis, que cela ne fonctionne pas et que personne n'y comprend rien.

Le président: L'expression correcte est «travail d'égale valeur».

Le sénateur Bolduc: On parle couramment de «travail égal». Nous avions coutume de dire «travail égal». Maintenant, nous disons «travail d'égale valeur».

Le président: Il y a une grande différence.

Le sénateur Bolduc: Je comprends que c'est le plan de classification qui établit cela. Le vérificateur général est très critique envers le gouvernement dans ce domaine.

Comment réussissez-vous à vous dépêtrer de ce fouillis?

M. Coulter: Je ne vous donnerai pas mon opinion personnelle, mais disons qu'essentiellement, nous appliquons une décision d'un tribunal. C'est simple quant à la partie rétroactive.

Pour ce qui est du régime de classification, comme vous le savez probablement, nous faisons actuellement beaucoup de travail pour essayer d'établir une formule relativement au régime de classification que nous pourrons mettre en oeuvre et que nous pouvons nous permettre.

Le sénateur Bolduc: Vous y travaillez maintenant depuis 10 ans.

M. Coulter: Nous y travaillons maintenant plus que jamais.

Le sénateur Doody: Je comprends le principe qui est en cause dans tout cela. Je comprends l'élément statutaire. Je comprends aussi que vous nous demandez maintenant de l'argent. Là où je ne comprends plus, c'est que je ne vois pas comment vous avez pu payer tous ces gens-là si vous n'aviez pas les fonds. Si vous aviez les fonds, d'où venait l'argent? Cette question est-elle trop simple?

Le sénateur Bolduc: Il a été ministre des Finances dans sa province.

M. Lieff: Sénateur, nous ne demandons pas les fonds maintenant.

Le sénateur Doody: Alors, où avez-vous pris l'argent?

M. Lieff: L'argent venait du crédit législatif.

Le sénateur Doody: Vous avez un fonds où dorment trois milliards de dollars qui n'attendent qu'à être dépensés, et vous venez ensuite dire au Parlement que vous avez dépensé les trois milliards de dollars.

M. Lieff: Un certain nombre de postes budgétaires importants dont nous sommes venus vous informer sont des dépenses statutaires qui ont en fait déjà été imputées aux budgets des années antérieures. Il s'agit de l'un de ces postes. Le gouvernement, au fil des années, dans le respect le plus strict des principes comptables et après en avoir discuté avec le vérificateur général, établit des prévisions de dépenses pour faire face à ses obligations. Il a été déterminé au fil des années, avant la conclusion de cette entente, que si l'on voulait se montrer responsable, il fallait prévoir dans le cadre financier de ces années-là le versement de ce règlement, quand il a été jugé que les obligations étaient assumées. Par conséquent, pas un sou des trois milliards de dollars identifiés dans ce budget des dépenses supplémentaire n'influe le moindrement sur les prévisions de dépenses de l'année courante. Le montant est entièrement imputé aux surplus et déficits des années antérieures.

Le président: Par contre, l'argent a été approuvé quelque part dans un crédit, monsieur Lieff. Même si ce n'était pas identifié, le montant a été englobé dans un crédit quelconque que le Parlement a bien dû approuver à un moment donné dans le passé.

M. Lieff: Le montant a été approuvé aux termes du pouvoir conféré par l'article 30.1 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif. Il n'a pas fait l'objet d'un vote.

Le sénateur Doody: Non seulement le montant a-t-il été approuvé, mais il a été dépensé. D'où venait donc l'argent, Dieu seul le sait.

M. Lieff: Il venait de ces provisions.

Le sénateur Bolduc: Je sais d'ou il venait; il venait des recettes fiscales. L'argent rentre à la pelle tous les jours que Dieu amène. Il suffit d'ouvrir les portes, l'argent rentre et nous le dépensons.

Le sénateur Banks: J'ai une question supplémentaire. Je veux simplement tirer cela au clair pour être bien sûr de comprendre. Vous avez dit qu'au fil des années qui ont précédé ce règlement, sachant que cela s'en venait, le gouvernement a prudemment mis de l'argent de côté pour n'être pas pris de court le jour où les tribunaux lui diraient: «Il faut payer». C'est bien cela?

M. Lieff: Oui.

Le sénateur Banks: Cet argent qui a été prudemment mis de côté par des gouvernements successifs n'a-t-il pas été approuvé par le Parlement dans le cadre d'un vote sur un crédit budgétaire?

M. Lieff: Non, il ne l'a pas été.

Le sénateur Banks: Il n'a pas pu se matérialiser à partir de rien. Je pensais que le gouvernement ne pouvait pas dépenser de l'argent sans que l'on ait, à un moment donné et d'une manière quelconque, demandé au Parlement d'approuver la dépense en question. Il me semble que vous êtes en train de nous dire que le gouvernement a dépensé de l'argent dont le Parlement n'a jamais approuvé la dépense, et j'ai bien du mal à comprendre cela.

M. Coulter: La procédure d'approbation appliquée en l'occurrence n'est pas le processus de l'approbation des crédits budgétaires. C'est législatif. C'est une loi.

Le sénateur Banks: Je comprends.

M. Coulter: Cette loi nous couvre. La raison pour laquelle M. Lieff et moi-même avons du mal à répondre à cela, c'est qu'il s'agit plutôt d'une question relative aux comptes publics qui ne font pas partie de nos attributions. Nous nous occupons plutôt des crédits budgétaires. Nous nous occupons de crédits votés. Certains éléments de notre processus visent à informer les parlementaires des rajustements apportés aux programmes législatifs. Maintenant, quand vous nous demandez en quelle année telle somme a été comptabilisée et comment cet argent a été imputé aux comptes publics, cela relève en fait d'une autre partie de notre organisation.

M. Lieff: Comme M. Coulter l'a dit, il y a deux manières pour le Parlement d'approuver des dépenses. Il y a d'abord les crédits annuels, qui représentent environ 55 ou 56 milliards de dollars par année, sur les 160 milliards de dollars que dépense le gouvernement chaque année au total. Par ailleurs, un certain nombre de postes ont été approuvés de façon permanente au moyen d'une loi distincte qui a été présentée au Parlement et qui a fait l'objet d'un vote à part, mais nous informons le Parlement à ce sujet dans le Budget des dépenses. Par exemple, les postes de dépenses les plus importants comprennent la dette publique. Il y a des programmes de sécurité du revenu comme la pension de vieillesse. Il y a les paiements de péréquation aux provinces, le TCSP soit le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Il y a les prestations d'assurance-emploi. Des lois distinctes qui ont déjà été adoptées par le Parlement, confèrent en permanence le pouvoir d'effectuer ces dépenses.

L'une de ces lois est la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, qui stipule que si la cour rend une décision défavorable à l'État, le ministre des Finances doit payer. Ce paiement a été fait en application de cette loi.

Le sénateur Banks: Par conséquent, les dépenses ont été, à un moment donné et d'une certaine manière, approuvées par le Parlement.

M. Lieff: Dans le cadre d'une autorisation générale, oui.

Le sénateur Cools: Mais pas à cette fin.

Le président: Je ne pense pas qu'on puisse aller beaucoup plus loin dans cette affaire aujourd'hui. Je vais demander à notre recherchiste de la Bibliothèque du Parlement de passer en revue les témoignages précédents et ceux d'aujourd'hui, après quoi les sénateurs pourront décider s'il y a lieu de poser d'autres questions. Nous vous ferons revenir ou bien nous vous enverrons ces questions par courrier et vous pourrez nous faire parvenir vos réponses. Je vous en remercie d'avance.

Le sénateur Mahovlich: Je pose une question au nom du sénateur Ferretti Barth, qui ne pouvait être présente. Elle m'a demandé d'attirer votre attention sur un crédit qui figure à la page 134. Il s'agit du Vol 111 de la Swissair. Voici sa question: le Canada a-t-il payé en totalité les frais liés à cet accident et à l'enquête?

M. Coulter: En bref, la réponse est oui. En application d'une convention internationale et de la pratique établie, le pays qui mène l'enquête paie. L'accident a eu lieu au large, mais dans nos eaux territoriales.

Le sénateur Mahovlich: Quel fut le résultat de l'enquête? A-t-on conclu que c'était une erreur du pilote?

M. Coulter: L'enquête n'est toujours pas terminée. Nous nous attendons à ce qu'elle se poursuive pendant encore un an.

Le sénateur Mahovlich: Elle se poursuit.

M. Coulter: Oui. Un certain nombre de mesures ont été prises par le National Transportation Safety Board et la Federal Aviation Administration à la suite de cet accident, notamment le recâblage de certains avions, des inspections, etc. L'enquête est très complexe. À mesure que l'on progresse, certaines mesures sont prises à la suite des constatations et conclusions préliminaires de l'enquête. On s'attend à ce que ce processus continue pendant encore assez longtemps. Environ 90 p. 100 de l'aéronef a été retiré du fonds de l'océan. Nous savons qu'il y a eu un incendie dans le poste de pilotage et immédiatement à l'arrière. De temps à autre, le Bureau de la sécurité des transports fait le point sur la marche de l'enquête. Je peux vous dire, en tant qu'ancien pilote moi-même, que c'est un processus très compliqué. La plus grande partie des dépenses était liée à la récupération des débris au fond de l'océan. Cette opération exigeait des compétences que nous ne possédons pas et que nous avons dû nous procurer ailleurs.

C'est le pays qui a juridiction qui assume l'entière responsabilité de la conduite de l'enquête, bien que d'autres pays y contribuent également.

Le sénateur Mahovlich: Ils y contribuent?

M. Coulter: Boeing est également présent.

Le sénateur Mahovlich: Il y a un magnifique monument de marbre qui a été érigé à cet endroit. Qui s'en est chargé?

M. Coulter: Je pense qu'il y a plusieurs monuments. Il y a celui dont vous parlez, et puis il y en a un autre à Peggy's Cove. Vous parlez de celui de St. Margaret's Bay, je crois.

Le sénateur Mahovlich: Oui.

M. Coulter: Je pourrais vérifier et vous faire rapport là-dessus, mais je pense que ça a été fait conjointement par Swissair, la Ville de Halifax et la localité.

J'étais sur place au moment de l'accident, dans les tout premiers jours, et je n'ai jamais vu une collectivité se serrer les coudes autant qu'on l'a fait à Halifax et dans les localités touchées. C'était vraiment réconfortant, en tant que Canadien, de voir une telle réaction.

En bref, pour répondre à votre question, c'est nous qui payons.

Le président: Que vouliez-vous dire quand vous avez dit que d'autres contribuent?

M. Coulter: D'autres intervenants sont intéressés, nommément la Federal Aviation Administration, la compagnie Boeing Aircraft Corporation, qui a perdu un avion, et Swissair. Delta Airlines était partenaire de Swissair dans ce vol. Tous ces intervenants ont contribué de diverses manières à l'effort déployé dans cette affaire. Le Canada était responsable de l'opération de récupération et de l'enquête, entre autres choses. Il est certain qu'un effort de ce genre coûte très cher.

Le président: Cette question a été soulevée quand nous avons discuté du Budget des dépenses principal. Il y a eu une discussion sur le partage des coûts entre les pays dans des situations de ce genre. On a fait valoir que le Canada est particulièrement vulnérable, étant donné l'immensité de notre territoire national. Un nombre considérable d'avions survolent notre territoire et nos eaux territoriales, ce qui nous rend particulièrement vulnérables sur le plan financier. Je pensais qu'on nous avait dit que le gouvernement faisait des efforts pour étudier ce dossier avec d'autres pays.

M. Coulter: Il est peut-être vrai qu'il y a eu des discussions et que l'on a tâté le terrain; mais la réalité, qui nous a été confirmée par l'avis juridique qui nous a été fourni par le ministère de la Justice, c'est que si l'accident a lieu en territoire canadien, c'est nous qui assumons la responsabilité.

Le sénateur Bolduc: C'est ce que dit la convention actuelle, mais je pense qu'à l'avenir, il conviendrait que les Affaires étrangères se saisissent de ce dossier. Il est injuste que la Suisse paie seulement en Suisse et que ce soit nous qui payions tout le reste. Tous les avions décollant de New York et de Chicago survolent le Canada. Nous avons cent fois plus de chances d'écrasement ici qu'ils n'en ont dans la république d'Andorre.

M. Coulter: L'écrasement de l'avion de la Swissair fut l'un des plus compliqués parce que l'avion s'est écrasé dans des eaux assez peu profondes où il est possible de récupérer les débris. C'est l'un des scénarios les plus coûteux que l'on puisse imaginer. Quand un avion s'écrase au sol, tout est normalement beaucoup plus facile. Si l'avion s'écrase dans l'océan, en eau profonde, il est perdu. On ne peut pas le ramener à la surface comme on le fait pour d'anciens navires.

Le sénateur Stratton: À la page 86, à la rubrique du ministère des Finances, il y a le chiffre de 200 millions de dollars. On dit «Législatif -- Frais d'intérêt et autres coûts». Cela s'explique-t-il uniquement par les taux d'intérêt?

M. Coulter: Je ne dirais pas que c'est attribuable seulement aux taux d'intérêt. Mais les taux d'intérêt ont augmenté et ces chiffres ne nous ont donc assurément pas pris par surprise. Le ministère des Finances établit ces chiffres et nous les transmet. C'est lui qui administre la dette publique. Je suis quasiment certain à 100 p. 100 que c'est presque entièrement attribuable à l'augmentation des taux d'intérêt. Comme vous le savez, ils sont en train de redescendre. Il y a donc une certaine fluctuation.

Le sénateur Stratton: À la page 91, à la deuxième ligne, on lit: «Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada». Ce nouveau centre coûte 17 millions de dollars. Monsieur Lieff, peut-être pourriez-vous nous donner une explication à ce sujet. Que fait ce nouveau centre?

M. Lieff: C'est une responsabilité qui était assumée sur une plus petite échelle dans une division du ministère des Finances et dans certains secteurs de Revenu Canada. Fondamentalement, son but est de lutter contre le blanchiment d'argent. Quand l'idée a été lancée de consacrer davantage de ressources à cette initiative, c'était dans le cadre d'une initiative du G8 mettant en cause plusieurs pays en vue de combattre le blanchiment d'argent dans le monde entier. En fait, la stratégie globale a été approuvée par le gouvernement dans le cadre de ses initiatives nationales pour combattre le blanchiment d'argent, et cette organisation est un élément central de cette stratégie. Quand la Loi sur le blanchiment d'argent a été adoptée, cet organisme a été créé.

Le sénateur Stratton: Au sujet du ministère des Finances, on voit aux pages 84 et 85 que le ministère dépense 64,9 milliards de dollars. Il y a des demandes supplémentaires au montant de 89,9 millions de dollars. Plus de la moitié, soit 48,2 millions de dollars, est consacrée à des paiements ou subventions à des organismes financiers internationales, notamment 15 millions de dollars à l'Initiative d'aide aux pays pauvres très endettés de la Banque mondiale, et 33,2 millions de dollars pour le mécanisme visant à réduire la pauvreté et à favoriser la croissance du Fonds monétaire international. Pourriez-vous nous en dire plus long sur ces deux comptes?

M. Lieff: Ce sont deux mécanismes qui ont été créés, respectivement, par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international pour aider les pays les plus endettés du monde à résoudre leurs problèmes d'endettement.

Dans le cadre de l'Initiative d'aide aux pays pauvres très endettés de la Banque mondiale, environ une trentaine des pays les plus pauvres de la planète sont admissibles à du financement concessionnel et à une aide pour l'allégement des dettes dans le cadre de ce mécanisme. La plupart de ces pays se trouvent en Afrique. Le Canada a joué un rôle de premier plan en réclamant la création de cette initiative spéciale au Sommet de Halifax en 1995, et le tout a été renforcé au Sommet de Cologne en 1999.

L'idée est de mobiliser les ressources des pays donateurs pour appuyer les efforts d'aide des créanciers multilatéraux, en particulier ceux de la Banque africaine de développement.

Dans l'ensemble, on prévoit que cette initiative permettra d'accorder environ 45 milliards de dollars d'allégement de dettes. Le chiffre que vous voyez ici est une contribution à cet effort international.

Pour ce qui est du mécanisme de réduction de la dette et de croissance du Fonds monétaire international, un certain nombre de pays peuvent présenter des demandes aux deux programmes, mais les mêmes principes s'appliquent. La liste des pays admissibles est un peu plus longue, si les membres du comité sont intéressés à en prendre connaissance. Le but de ce mécanisme est d'aider les pays en développement et à faible revenu à équilibrer leur balance des paiements. Nous avons convenu de fournir environ 400 millions de dollars en subventions à cette organisation. Cela fait partie de cet effort international.

Le sénateur Stratton: Ce montant fait-il partie des 45 milliards de dollars, ou bien est-ce un poste séparé?

M. Lieff: Un montant est destiné à la Banque mondiale, pour son fonds en fiducie pour les pays pauvres fortement endettés, lequel atteint 45 milliards de dollars si l'on additionne l'apport de tous les autres contributeurs internationaux. La part du Canada est de 400 millions de dollars. Je ne pense pas avoir le total global du montant disponible dans le cadre de ce programme.

Le sénateur Stratton: Cela va. Vous pourrez me le faire parvenir plus tard.

Le sénateur Banks: Ces montants dont vous venez de parler font-ils partie de la radiation de dettes dont on a parlé, ou bien cette radiation de dette est-elle prévue par un poste budgétaire distinct?

M. Coulter: Il s'agit d'un allégement de la dette englobant à la fois la radiation de dettes et d'autres formes d'aide pour que les pays visés puissent s'en sortir.

Le sénateur Banks: J'ai deux questions. La première est précise, tandis que l'autre exige réflexion. À la page 160, il y a un poste budgétaire pour le Bureau d'information du Canada. Dans le Budget des dépenses principal, on avait prévu environ 20 millions de dollars. Dans le budget supplémentaire, on demande une rallonge de 30 millions de dollars. Cette dernière demande représente plus de 150 p. 100 du montant prévu à l'origine. Je me demande ce qui a bien pu se passer d'extraordinaire pour qu'il soit nécessaire d'obtenir les trois cinquièmes des dépenses annuelles dans le budget supplémentaire.

Deuxièmement, pourriez-vous nous entretenir pendant quelques instants d'une question dont le vérificateur général a dit se préoccuper énormément, à savoir tout le dossier des subventions, de façon générale, notamment la supervision, les rapports et les responsabilités en cette matière? Le Conseil du Trésor s'intéresse-t-il activement et en permanence au contrôle des subventions, afin de veiller à ce qu'il serve aux fins pour lesquelles elles étaient prévues au départ et pour s'assurer que ces fonds ne donnent lieu à aucun abus?

M. Lieff: Au sujet du Bureau d'information du Canada, la principale raison qui explique la forte augmentation est que le budget de février 2000 prévoyait des dépenses supplémentaires de 30 millions de dollars par an sur trois ans pour cet organisme. La raison pour laquelle cela ne figurait pas dans le Budget des dépenses principal -- c'est d'ailleurs pour nous une difficulté constante -- est que le budget est habituellement déposé quelques jours ou même une semaine avant les prévisions de dépenses. Étant donné le secret budgétaire et tout cela, un certain nombre de postes budgétaires nous sont inconnus et ne sont pas suffisamment élaborés pour les inclure dans le Budget principal des dépenses. Nous réglons ces petits problèmes dans le Budget des dépenses supplémentaire.

En l'occurrence, le montant supplémentaire de 30 millions de dollars est important par rapport au montant de départ, mais il avait été annoncé dans le budget et j'ai expliqué pourquoi il ne figurait pas dans le Budget des dépenses principal.

Les fonds étaient destinés à trois initiatives. Il y a d'abord une initiative d'information des citoyens, pour laquelle on prévoit 19 millions de dollars par an sur trois ans, c'est-à-dire de 2000-2001 jusqu'à la fin de 2202-2003; l'initiative relative aux foires et expositions, pour 4,6 millions de dollars; et une initiative de communication régionale à hauteur de 5,4 millions de dollars. Cela explique la somme de 30 millions de dollars.

M. Coulter: Au sujet de la deuxième question, le Conseil du Trésor s'intéresse beaucoup à cette question. Nous avons fait un certain nombre de choses. Quand la situation de DRHC a été rendue publique il y a plus d'un an, nous avons réagi fondamentalement de deux manières à cela, à titre d'organisme central. La première initiative consistait à aider DRHC à passer au travers de la crise, et nous avons pris un certain nombre de mesures à cet égard, notamment un dialogue quotidien pour les aider à élaborer des plans d'action. Nous leur avons également envoyé une personne pour les aider à s'acquitter de ce travail et, de façon générale, pour les aider à se remettre d'aplomb plus rapidement possible.

Deuxièmement, nous avons jeté un regard critique sur les aspects de la situation mettant en cause l'ensemble du gouvernement. Nous avons passé en revue chaque ministère et organisme et nous avons fait le point sur les subventions. Nous avons examiné le régime au complet. Nous avons établi certaines préoccupations. Nous avions déjà commencé à travailler à une nouvelle politique pour les paiements de transfert. Ce travail a été accéléré et nous avons mis la dernière main au printemps dernier à une nouvelle politique pour les paiements de transfert, applicable aux subventions et contributions.

Depuis lors, nous avons mis en place une nouvelle politique sur les vérifications et évaluations, qui a été annoncée publiquement il y a environ un mois. Ainsi, nous avons un nouveau mécanisme et nous sommes en train d'établir une nouvelle capacité dans le domaine des vérifications et évaluations.

L'une des dispositions de notre nouvelle politique sur les paiements de transfert est l'exigence d'une évaluation quinquennale de tous les programmes donnant lieu à des subventions. Nous sommes en train de procéder à cela, programme par programme, pour mettre en place les cadres nécessaires. Cela exige beaucoup de travail technique. Cette nouvelle politique sur l'évaluation renforcera d'un cran notre capacité et nous créerons un centre d'excellence au secrétariat pour examiner tout cela et pour prendre l'initiative et appuyer la fonction d'évaluation dans l'ensemble du gouvernement.

L'autre aspect, dont le président du Conseil du Trésor a d'ailleurs parlé publiquement, est la philosophie de fonctionnement que nous avons appelée «surveillance active». Dans le dernier rapport du vérificateur général, qui comprend une vue d'ensemble des 10 dernières années et les réflexions du vérificateur pour l'avenir, ce dernier déclare que le Secrétariat du Conseil du Trésor doit faire davantage dans ce domaine. Nous sommes actuellement en train de mettre au point un plan de mise en oeuvre.

Nous sommes devenus plus actifs dans nos relations avec les ministères et les organismes. C'est en partie une question de mentalité; il s'agit de surveiller les points chauds et de s'attendre au pire. Nous savons qu'il nous faut un meilleur radar au centre de la toile et nous sommes déterminés à en mettre un en place.

Le sénateur Bolduc: Pour le budget 2000-2001, il y a un écart de 16 milliards de dollars. Je crois comprendre que c'est en grande partie un crédit législatif, à hauteur de 65 ou 70 p. 100, mais il reste quand même une différence de 10 p. 100 entre ce que vous aviez prévu et les chiffres qu'on nous présente moins d'un an plus tard. Cet écart est-il dû au fait que nous avons eu cette année deux discours budgétaires, l'un en février et l'autre en octobre? Ou bien est-ce parce que le système canadien confère au gouvernement un pouvoir discrétionnaire étendu lui permettant de décider, par exemple, qu'il faut consacrer quelques dollars de plus à l'administration de la santé?

Le président: Une troisième possibilité est qu'ils avaient fait des prévisions de recettes délibérément prudentes.

Le sénateur Bolduc: Je pense que ce qui s'est passé, c'est que l'argent rentrait tellement vite qu'ils ont décidé qu'il fallait faire quelque chose, qu'il fallait le dépenser. Le budget est un processus secret et même vous, vous n'êtes pas dans le secret. C'est embarrassant. Le public ne sait pas ce que le ministre pense quant à ce que l'avenir nous réserve.

Je pense que le système canadien est en très mauvais état. Ce n'est pas votre faute. Je sais que vous êtes des gens très compétents et que vos prédécesseurs l'étaient aussi. Tous ici présents conviennent que les cadres supérieurs qui ont comparu devant nous dans le passé étaient très bons et continuent de l'être.

Le système a besoin d'une refonte en profondeur, à mon avis. Je voudrais que vous disiez au ministre, et ce message vient d'un ex-fonctionnaire, qu'une erreur de 10 p. 100 sur un an, c'est énorme. Votre ministre fait des prévisions sur cinq ans. Pouvez-vous imaginer le résultat? C'est incroyable.

M. Coulter: Je vais essayer de vous donner une réponse. Notre discipline tourne autour du niveau de dépenses prévu du gouvernement. Le Secrétariat du Conseil du Trésor s'efforce de faire en sorte que les dépenses soient conformes aux prévisions, que nous approuvions tout, et que nous respections le régime.

Quant à la façon dont on établit le niveau de dépenses prévu, cela concerne plutôt le ministère des Finances. Toutefois, pour ce qui est des chiffres que vous avez présentés, notamment ce chiffre de 10 p. 100, nous devons donner à M. Lieff la chance de s'expliquer. Nous pouvons catégoriquement concilier ces documents et les crédits avec le niveau de dépenses prévu et annoncé dans la mise à jour d'octobre dernier.

M. Lieff: Comme M. Coulter l'a dit, le cadre que nous considérons comme acquis et inaltérable, au Conseil du Trésor et dans tout le reste du gouvernement, c'est le niveau de dépenses prévu qui est établi dans les budgets par le ministre des Finances pour l'année.

Dans le budget de février 2000, le ministre des Finances a établi un niveau de dépenses prévu de 158 milliards de dollars. Le Budget principal des dépenses, comme je l'ai déjà expliqué, n'attribue pas réellement la totalité de ce montant aux divers ministères, pour diverses raisons.

Par exemple, s'il y a des fonds qui sont affectés dans le budget et qui exigent encore une approbation législative, nous ne les inscrivons pas dans le Budget des dépenses. Un certain nombre de questions devaient justement être présentées au Parlement pour examen, notamment la Loi canadienne sur les soins de santé.

Un montant considérable de dépenses prévues dans le budget ne se retrouvaient pas dans le Budget principal des dépenses. En fait, le Budget principal des dépenses prévoyait des dépenses budgétaires de 155,7 milliards de dollars à l'époque et nous avions un niveau de dépenses prévu de 158 milliards de dollars. Vous avez tout à fait raison de dire que dans la mise à jour financière et budgétaire d'octobre, le ministre des Finances et le gouvernement ont ajouté une autre tranche de 3,9 milliards de dollars aux dépenses totales pour l'année en cours, de sorte que les dépenses prévues ont atteint 161,9 milliards de dollars. Ce sont des dépenses budgétaires.

Il y a une autre composante dans vos chiffres qui sont des dépenses non budgétaires. Traditionnellement, nous n'incluons pas cela dans les dépenses prévues, parce que ce sont des prêts et des investissements qui procurent un rendement. Nous nous attachons donc davantage aux dépenses budgétaires. En fait, une tranche de 1,8 milliard de dollars de l'augmentation que vous signalez est non budgétaire et correspond au fait que les prêts que le gouvernement accorde maintenant et inscrit aux livres du Canada étaient auparavant assumés par les institutions financières dans le cadre du Programme canadien de prêts aux étudiants. C'est un montant considérable mais cela n'a aucune incidence sur le niveau global des dépenses prévues fixé dans la mise à jour budgétaire.

Pour ce qui est des dépenses budgétaires, nous avons un niveau de 161,9 milliards de dollars pour l'année actuelle, et nous le respectons. Une partie de cette augmentation est consacrée au dossier plutôt compliqué, dans lequel j'hésite à me lancer, des montants qui étaient déjà imputés les années antérieures. Les montants assez importants, par exemple, pour le versement de trois milliards de dollars pour l'équité salariale, ont été imputés au déficit et à l'excédent des années précédentes, quoi que les paiements sont versés cette année et sont identifiés comme tels dans ce Budget des dépenses supplémentaire. Cependant, aux fins de comparaison avec les Comptes publics et les États financiers du gouvernement du Canada, ces dépenses ne sont pas comptabilisées cette année. Il y a aussi un autre montant assez important, de 2,5 milliards de dollars, que le Parlement a approuvé dans le cadre de la Loi canadienne sur la santé. L'engagement avait été pris au cours d'une année antérieure et l'argent est dépensé cette année. Il s'agit du complément de 2,5 milliards de dollars au TCSPS.

Ces deux poste budgétaires n'influent pas sur le montant des dépenses prévues cette année, même si les décaissements ont effectivement lieu cette année. Ces montants sont imputés aux déficits et aux excédents des années au cours desquelles les engagements avaient été pris à l'égard de ces fonds. Dans le cas du complément aux TCSPS, les changements proposés avaient fait l'objet d'un examen parlementaire approfondi dans le cadre de l'étude de la Loi canadienne sur la santé au Parlement.

De plus, il y a un certain nombre de postes assez importants qui expliquent la plus grande partie de l'augmentation. Il y a la somme de trois milliards de dollars que je viens de mentionner pour le règlement de l'équité salariale, et puis les 2,5 milliards de dollars pour grossir le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, qui avaient été annoncés dans le budget de 2000 et qui avaient été imputés une année auparavant. Nous avons aussi la somme 1,5 milliard de dollars qui découle de l'accord sur les soins de santé conclu en septembre avec les provinces, y compris un milliard de dollars pour le Fonds de recherche médicale qui a été créé, et 500 millions de dollars pour payer une compagnie qui fournira des normes et la mise en commun de renseignements médicaux. Il a fallu aussi réviser les prévisions relatives aux paiements de péréquation en fonction de variables économiques. Tout cela a ajouté une autre tranche de 1,2 milliard de dollars. En additionnant tout cela, nous avons déjà 10 milliards de dollars, avant même tous les autres postes budgétaires. C'est là qu'est le gros de l'augmentation. Les autres dépenses se situent dans la fourchette des augmentations normales dans le Budget des dépenses supplémentaire.

L'augmentation de 3,9 milliards de dollars qui figurait dans la mise à jour budgétaire reflétait principalement deux postes: une tranche de 1,5 milliard de dollars pour la remise aux ménages pour l'huile à chauffage et une autre tranche de 1,5 milliard de dollars pour le complément au transfert pour la santé et les programmes sociaux découlant de l'accord conclu en septembre avec les provinces. Cela représente trois milliards de dollars des 3,9 milliards de dollars. Par conséquent, les prévisions de dépenses totales pour 2000-2001, en incluant les montants demandés dans ce Budget des dépenses supplémentaire, sont conformes aux dépenses prévues qui ont été rajustées dans le budget de cette année. Nous nous en tenons à cela. Nous n'irions pas au-delà de ce que le ministre des Finances a prescrit dans le budget.

Le sénateur Bolduc: Et le Programme de prêts aux étudiants et tout le reste ne vous créent pas d'obstacles?

M. Lieff: Le Programme de prêts aux étudiants n'entre pas en ligne de compte parce que ce sont actuellement des prêts productifs. Ce sont de nouveaux prêts que l'on accorde. Si nous devons les radier ultérieurement ou établir des réserves pour éventualités, à ce moment-là, nous en aviserons le Parlement.

Le sénateur Bolduc: Et l'innovation itou.

M. Lieff: Le Fonds d'innovation ne figure pas dans le Budget des dépenses supplémentaire.

Le président: M. Coulter et M. Lieff seront présents demain à 17 h 45 quand nous étudierons le Budget des dépenses principal pour 2001-2002. Vous serez invités à tourner votre regard vers l'avenir, plutôt que sur les méfaits des années passées.

Le sénateur Stratton: Je veux savoir comment vous composerez avec la diminution des recettes du gouvernement au cours de la prochaine financière.

Le président: Cela pourrait être une question de politique. Je vous remercie, monsieur Lieff et monsieur Coulter.

Je vous demanderais de rester cinq minutes, sénateurs. Je pense que l'on vous a distribué copie du calendrier des réunions. Nous avions prévu reprendre dans une semaine l'étude du projet de loi S-6, Loi sur la dénonciation dans la fonction publique. Nos collègues du comité directeur, nommément le sénateur Finnerty qui est vice-présidente du comité, et le sénateur Banks, m'ont présenté ce matin une proposition visant à apporter un changement. Ils craignent que, dans notre étude des ébauches de rapports, nous nous rapprochions dangereusement de l'échéance pour faire adopter les lois de finances. Ils espèrent que nous serons en mesure de mettre la dernière main au rapport sur le Budget des dépenses supplémentaire et sur le Budget des dépenses principal, le mercredi 21 mars. Peut-être que nous y parviendrons, mais peut-être pas. Quoiqu'il en soit, ils aimeraient reporter l'étude du projet de loi S-6 au mardi 27 mars, dans l'espoir et dans l'attente que l'étude des ébauches de rapports puisse être avancée au mardi 20 mars et, au besoin, au mercredi 21 mars.

Je regrette beaucoup que le sénateur Kinsella, qui est le parrain du projet de loi S-6, ne soit pas présent. J'aurais aimé le consulter à ce sujet, ne serait-ce que par courtoisie. Ce jour-là, notre seul témoin est M. Audcent, notre conseiller juridique, et nous avons demandé aux gens du Conseil du Trésor d'être prêts à comparaître. Si vous voulez donner suite aux desiderata de nos collègues libéraux dans cette affaire, vous avez maintenant l'occasion de dire oui ou non, selon le cas.

Comme je n'entends aucune objection, nous allons essayer d'organiser le tout de cette manière.

J'ajoute une réserve: si le comité souhaite apporter beaucoup de changements à l'ébauche de rapport, nous devrons en reprendre l'étude le 27 mars et il y aura conflit avec les subsides, mais ce sont les risques du métier.

Le sénateur Finnerty: Le projet de loi S-6 ne prendra pas tellement de temps.

Le président: On dit toujours cela.

Le sénateur Bolduc: Dans la lettre que je vous ai envoyée le 22 février, j'ai fait une faute de grammaire au premier paragraphe. J'ai dit que nous avons une longue tradition d'enquête concernant ces politiques gouvernementales.

Le président: Je suis content que vous apportiez cette précision. Nous devrons nous réunir à huis clos avant la fin du mois pour discuter des travaux futurs. En particulier, les sénateurs Banks, Bolduc, Stratton, Moore et Cools ont des idées de questions auxquelles nous devrions accorder une attention spéciale au cours des prochains mois, et peut-être d'autres questions ont-elles été soulevées au cours du témoignage d'aujourd'hui. Je pense que je devrais prendre des dispositions à un moment donné pour savoir exactement ce qu'il en est, et vous devriez vous y mettre aussi. Nous allons nous réunir à un moment donné d'ici la fin mars pour établir un calendrier auquel nous pourrons nous tenir.

Le sénateur Bolduc: Si nous voulons apporter une contribution valable à l'institution parlementaire, alors notre comité peut jouer ce rôle.

Notre comité a un rôle à jouer dans le bon fonctionnement des institutions parlementaires, étant donné notre rôle législatif et de supervision budgétaire. Nous devrions établir un calendrier à long terme. Il ne faut pas s'en tenir à un mois, il faut voir plus loin. Nous devrions décider, par exemple, que nous entreprendrons au cours des deux ou trois prochaines années, une enquête en profondeur sur certaines questions. Nous pourrions nous pencher sérieusement sur des dossiers importants. Ce serait un apport utile au Parlement.

La séance est levée.


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