Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales
Fascicule 33 - Témoignages
[Note du réviseur]
CORRECTIONS
À la
page 33:14 du fascicule imprimé, huitième paragraphe, quatrième et cinquième
lignes, le texte se lit comme suit:
…ventes et de
transferts à des promoteurs privés de propriétés qui étaient jusqu'alors
privées.
Le texte devrait se lire:
…ventes et de
transferts à des promoteurs privés de terrains boisés qui étaient
jusqu'alors publics.
—————
À la page
33:23 du fascicule imprimé, cinquième paragraphe, le texte se lit comme suit:
...La loi ne prévoit pas que l'on exige un seul service. Ce sont deux sociétés distinctes.
Le texte devrait se lire:
La loi prévoit
un seul service. Ce ne sont pas deux sociétés distinctes.
OTTAWA, le mardi 12 mars 2002
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 32 pour examiner le Budget des dépenses déposé devant le Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2003.
Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Chers collègues, mercredi dernier, les fonctionnaires du Conseil du Trésor ont comparu devant notre comité pour répondre aux questions concernant le Budget supplémentaire des dépenses (B) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2002 — soit cette année. Traditionnellement, le ministre, le président du Conseil du Trésor, comparaît devant notre comité à la fin mai ou au début juin pour répondre à nos questions avant que le gouvernement ne demande au Parlement de lui accorder l'intégralité des crédits.
Nous allons entendre aujourd'hui les fonctionnaires du Conseil du Trésor du Canada. Je crois savoir que M. Bickerton a un exposé à nous présenter pour commencer, et je l'invite à prendre la parole.
M. David Bickerton, directeur exécutif, Division des opérations et prévisions des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor: Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, il nous fait plaisir de vous rencontrer ce matin pour discuter du Budget principal des dépenses de 2002-2003 et pour répondre à vos questions. La présidente du Conseil du Trésor a déposé aux Communes, le 28 février dernier, les parties I et II du Budget des dépenses, aussi connu sous le nom de Livre bleu. Le dernier volet du Budget des dépenses, les rapports sur les plans et les priorités des ministères et organismes, sera pour sa part déposé à la fin du mois de mars.
Avant de vous présenter plus en détail les éléments de dépenses de 2002-2003, permettez-moi de passer brièvement en revue les documents qui, ensemble, forment le Budget des dépenses, c'est-à-dire les trois parties qui sont déposées à différents moments de l'année financière. Tout d'abord, la partie I du Budget des dépenses présente une vue d'ensemble des dépenses fédérales et résume les rapports existants entre les grands éléments du Budget principal des dépenses et le plan de dépenses actuel, présenté par le ministre des Finances dans le Budget de dépenses 2001.
Vient ensuite la partie II du Budget des dépenses qui appuie directement les lois de crédits. On y décrit les autorisations de dépenser — les crédits — et les montants correspondant à chaque ministère à inclure dans les lois d'affectation de crédits subséquentes. Le Parlement sera appelé à approuver ces crédits pour permettre au gouvernement de réaliser son plan de dépenses.
[Français]
Nous prévoyons que le projet de loi des crédits provisoires du Budget principal des dépenses sera déposé vers le 19 mars, et suivi au mois de juin du projet de loi prévoyant la totalité des crédits. Vous aurez l'occasion d'examiner ce projet de loi plus tard ce printemps, dans le contexte des Rapports sur les plans et les priorités qui seront déposés ce mois-ci et qui présenteront les plans de dépenses détaillés de chacun des ministères.
[Traduction]
La partie III du Budget des dépenses est divisée en deux volets. Le premier, les Rapports sur les Plans et Priorités, présente les plans des dépenses de chaque ministère et organisme. Il fournit une information beaucoup plus complète sur les ministères que ce que l'on retrouve dans le Livre bleu, entre autres des détails sur les résultats stratégiques, sur les objectifs des secteurs d'activités, sur les initiatives et sur les résultats attendus. Cette information est rattachée aux niveaux de ressources requis pour les trois années suivantes. Les RPP sont déposés au plus tard le 31 mars de chaque année.
[Français]
Le deuxième volet, les Rapports ministériels de rendement, présente les réalisations de chacun des ministères et organismes, par rapport aux attentes en matière de rendement indiquées dans le Rapport sur les plans et les priorités. Les Rapports ministériels de rendement portent sur l'année financière qui vient de s'achever et sont habituellement déposés à l'automne.
[Traduction]
J'aimerais maintenant vous présenter certains éléments spécifiques du Budget principal de cette année. Le plan budgétaire du 10 décembre 2001 du ministre des Finances fait état de dépenses budgétaires prévues de 172,9 milliards de dollars. Le Budget principal des dépenses de 2002-2003 présente des autorisations de dépenses budgétaires de 168,3 milliards de dollars.
[Français]
Cela représente plus de 97 p. 100 du plan des dépenses établies dans le budget du ministère des Finances en décembre 2001. Le reste comprend des fonds pour d'autres dépenses en vertu des programmes législatifs ou des autorisations qui seront demandées sous forme de Budget supplémentaire.
La différence entre le Budget principal des dépenses et les prévisions annoncées dans le budget a trait principalement aux initiatives qui nécessiteront l'adoption d'une loi comme la mise sur pied d'un nouvel organisme fédéral chargé de la sécurité aérienne ou, encore, à d'autres initiatives qui n'étaient pas suffisamment précisées au moment où le Budget principal des dépenses a été mis au point. Cela comprend d'autres postes qui ont été annoncés dans le budget de décembre.
[Traduction]
Les autorisations de dépenser à l'égard de ces postes seront demandées par le biais de budgets supplémentaires des dépenses au cours de l'année financière 2002-2003. Lorsqu'on ajoute les 2 milliards de dollars à consacrer aux dépenses non budgétaires, le Budget principal des dépenses de 2002-2003 s'élèvera à 170,3 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 5,2 milliards de dollars ou de 3,1 p. 100 par rapport à celui de 2001-2002.
Les 170,3 milliards de dollars du Budget principal des dépenses sont divisés en deux grandes catégories, à savoir, tout d'abord, les crédits votés que le Parlement est appelé à autoriser par le biais du budget des dépenses. En 2002- 2003, ces postes s'élèvent à environ 56,3 milliards de dollars, ou 33 p. 100 du Budget principal. La deuxième catégorie est celle des dépenses législatives, c'est-à-dire celles autorisées par des lois ayant déjà été approuvées. Il s'agit par exemple des prestations d'assurance-emploi, des prestations aux personnes âgées, du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux ainsi que des transferts aux provinces et aux territoires. Dans ce budget principal, les dépenses législatives s'élèvent à 114 milliards de dollars, soit à peu près 67 p. 100 du total.
En outre, on peut répartir le Budget principal entre les dépenses budgétaires et non budgétaires. Quant aux dépenses budgétaires, elles incluent le service de la dette publique; les dépenses de fonctionnement et d'immobilisations des ministères et organismes; les paiements de transfert aux personnes, aux organisations et à d'autres paliers de gouvernement; ainsi que les paiements aux sociétés d'État. Tout comme les opérations non budgétaires, les dépenses budgétaires peuvent être autorisées par des crédits votés ou par les lois existantes. En 2002-2003, les dépenses budgétaires devraient s'élever à environ 168,3 milliards de dollars.
Voici un aperçu des grands changements qui touchent le Budget principal des dépenses de 2002-2003.
Si l'on fixe un seuil de 100 millions de dollars, voici les hausses les plus importantes: 3,8 milliards de dollars pour un redressement législatif aux cotisations nettes d'assurance-emploi et à l'administration, comme l'indiquent les comptes à fins déterminées consolidés; 1,3 milliard de dollars pour le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux; 1,2 milliard de dollars pour les versements directs aux particuliers, telles les augmentations de la Sécurité de la vieillesse et du supplément de revenu garanti; 613 millions de dollars pour les initiatives en matière de sécurité publique et de lutte contre le terrorisme; 439,1 millions de dollars pour les hausses salariales, y compris le financement de la rémunération des juges et des membres de la GRC, ainsi que les rajustements salariaux des députés et des dirigeants de la chambre, conformément aux dispositions du projet de loi C-28; 382 millions de dollars afin de répondre aux exigences liées à la charge de travail de l'ADRC, au remplacement des équipements, aux besoins en investissements et au rétablissement des niveaux de service antérieurs; 349 millions de dollars en paiements à diverses institutions financières internationales pour les engagements pris par le Canada dans le cadre d'ententes multilatérales de réduction de la dette; 348,6 millions de dollars en dépenses de la Défense nationale, notamment 110,6 millions de dollars pour les rajustements approuvés de salaires et d'avantages sociaux du personnel militaire et civil; 348,1 millions de dollars en paiements de transfert dans le cadre du Programme Infrastructure Canada; 216,2 millions de dollars pour répondre à des besoins opérationnels de base ou d'investissement, notamment pour les initiatives de recrutement, de maintien en poste et de formation; 169,8 millions de dollars pour la création du fonds pour l'adaptation des soins de santé primaires; 155,9 millions de dollars en contributions au nouveau programme stratégique d'infrastructure routière; 143,5 millions de dollars pour le programme d'accès aux pêches pour favoriser le transfert de permis de pêche aux pêcheurs autochtones et pour examiner les questions de développement économique durable et des droits des Autochtones ainsi que les droits issus de traités; 140,5 millions de dollars pour les cotisations d'employeur aux régimes d'assurance de la fonction publique. Cette hausse est essentiellement liée à une augmentation des coûts de soins de santé et d'autres régimes d'assurance, ainsi que des charges sociales provinciales pour la santé; 113 millions de dollars pour la distribution de locaux pour le gouvernement — espace supplémentaire requis par les ministères, hausse des coûts, espace temporaire nécessaire pour maintenir le parc immobilier; enfin, 107,6 millions de dollars pour répondre à la demande accrue des programmes et services permanents, notamment la mise en oeuvre de la Stratégie de guérison pour les Innus du Labrador.
Les principales réductions dans le Budget principal des dépenses sont les suivantes: 5,4 milliards de dollars en frais de services et d'intérêts de la dette publique; 183,8 millions de dollars en raison de la tenue du Recensement de la population de 2001 et du Recensement de l'agriculture de 2001; 133 millions de dollars du Fonds du Canada pour la création d'emplois, en raison de la décision prise en juin 2000 de supprimer le Fonds; enfin, 101,7 millions de dollars en paiements à des organismes internationaux pour l'encaissement de billets par l'association internationale de développement conformément à la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes et pour les paiements à la facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance du Fonds monétaire international.
Les dépenses non budgétaires sont celles qui ont pour effet de modifier la composition des actifs financiers du gouvernement. Ces opérations peuvent être autorisées soit par des lois de crédits, soit par des lois existantes. En 2002- 2003, les dépenses non budgétaires totalisent environ 2 milliards de dollars et sont surtout des paiements à différentes institutions financières internationales.
En ce qui concerne les dépenses non budgétaires, il y a une variation nette de 200 millions de dollars. L'augmentation principale est de 223,4 millions de dollars en paiements à diverses institutions financières internationales et la principale réduction est 100 millions de dollars en prêts accordés aux termes de la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants.
[Français]
Comme je l'ai déjà souligné, nous prévoyons que le projet de loi sur les crédits provisoires pour le Budget principal des dépenses sera déposé vers le 19 mars. Ce projet de loi visera quelque 16,9 milliards de dollars en financement provisoire sur les 56,3 milliards de dollars en crédits votés et demandés dans le Budget principal des dépenses.
[Traduction]
Quant aux crédits qui restent, soit environ 39,4 milliards de dollars, le Parlement sera appelé à les approuver en juin.
Monsieur le président, honorables sénateurs, mon allocation s'arrête ici. Il nous fera maintenant plaisir de répondre à toutes vos questions.
Le sénateur Lynch-Staunton: J'ai plusieurs questions à vous poser, monsieur Bickerton, la première d'entre elles se rapportant à votre exposé.
Au bas de la page 3, et en haut de la page 4, vous nous dites que certaines exigences ou certaines initiatives n'avaient pas été bien arrêtées lorsqu'on a mis la dernière main au Budget principal des dépenses, et que cela englobe d'autres postes annoncés dans le budget.
Est-ce que cela signifie que le coût de certains postes budgétaires n'a pas été effectivement fixé et qu'il convient de peaufiner certaines estimations du ministre des Finances, ce qui pourrait très bientôt modifier les chiffres?
M. Bickerton: Lorsqu'il dépose son budget, le ministre des Finances fait figurer un certain nombre d'initiatives. Il traite avec les ministères pour arrêter avec eux les derniers chiffres. Ce que nous voulons dire dans notre exposé, c'est qu'au moment où nous mettons en place le Budget principal des dépenses, il reste encore aux ministères à préciser au Conseil du Trésor la nature de leurs dépenses, la façon dont ils envisagent de s'organiser et comment ils entendent administrer les programmes annoncés dans le budget.
Les affectations de crédits énoncées par le ministre des Finances ne changeront pas mais, dans le cadre de ses attributions, le Conseil du Trésor revoit toutes les demandes présentées au titre des différents programmes, et ses conclusions n'étaient pas prêtes au moment de l'élaboration du Budget principal des dépenses.
Le sénateur Lynch-Staunton: Voilà qui éclaircit la chose.
Je vois que l'on ne mentionne pas la Société du Vieux-Port de Montréal dans le Budget principal des dépenses, alors qu'il l'était auparavant. Il figurait même dans un des budgets supplémentaires. Quelle en est la raison?
M. Bickerton: Il s'agit d'un crédit du Conseil privé au titre de l'infrastructure de bureautique et des sociétés d'État du Canada. Nous fournirons des crédits à la Société du Vieux-Port de Montréal, si elle en a effectivement besoin, dans le cadre du budget supplémentaire des dépenses, mais cette société n'était pas prête lorsque le Budget principal des dépenses a été arrêté.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le Budget principal des dépenses de la prochaine année comporte de nombreux postes qui n'apparaissaient pas les années précédentes, ce qui signifie qu'il y a de nombreux éléments nouveaux. On trouve ainsi un poste correspondant à la Fédération canadienne des municipalités visant à la mise en place d'un guide national des infrastructures municipales durables, pour un montant de 5,385 millions de dollars, qui n'apparaissait pas dans le Budget des dépenses 2001-2002.
Laissez-moi vous donner un autre exemple, pour que vous compreniez bien où je veux en venir. À la page 17-7 on voit apparaître de nombreux postes. Il s'agit des ressources nationales, de l'appui accordé aux distributeurs d'électricité, d'un montant de 3 millions de dollars, pour qu'ils puissent faire la promotion de la vente d'électricité tirée des nouvelles ressources d'énergie renouvelable, et il y a aussi une participation au projet Weyburn de contrôle du gaz carbonique, qui relève de l'Agence internationale de l'énergie, d'un mondant de 1,6 million de dollars.
On retrouve, dans le Budget principal, des dépenses de ce type qui ne figuraient pas l'année précédente. Est-ce que tous ces postes de dépenses que l'on veut faire autoriser ont déjà été présentés auparavant au Parlement, soit dans le cadre du budget, soit au moyen de demandes ministérielles, ou est-ce qu'ils apparaissent ici pour la première fois dans le Budget principal des dépenses?
M. Bickerton: Pour ce qui est de la première affectation de crédits que vous avez mentionnée, elle résulte d'un transfert de ressources du Secrétariat du Conseil du Trésor lors du remaniement ministériel de janvier.
Jusqu'alors, le Conseil du Trésor était responsable du programme des infrastructures. Compte tenu des responsabilités qui ont été confiées au ministre Manley, nous avons mis en place un ministère distinct. En consultant le budget du Secrétariat du Conseil du Trésor, vous ne manquerez pas de constater qu'il y figurait un poste qui ne sera plus exigé lors du prochain exercice.
Nous nous contentons de transférer les ressources d'une organisation à une autre. Les chiffres ont été déposés et figurent dans les budgets antérieurs.
Le sénateur Lynch-Staunton: Est-ce qu'on peut trouver à ce sujet des notes dans le document budgétaire?
M. Bickerton: Lors de la présentation du Livre bleu, et je ne peux pas vous donner de référence précise, nous avons bien expliqué quelles étaient les répercussions du remaniement ministériel opéré en janvier en parlant d'une redistribution des responsabilités. C'est là une d'entre elles.
En ce qui a trait aux Ressources naturelles, il s'agit là d'un nouveau programme d'affectation de crédits; il apparaît pour la première fois. Soit il a été autorisé par le Cabinet et par la suite entériné par le Conseil du Trésor, soit il s'agit d'un nouveau programme lancé cette année, soit c'est un poste qui apparaît pour la première fois dans le Budget principal des dépenses. Je regrette de ne pas pouvoir vous donner davantage de précisions, sénateur.
Le sénateur Lynch-Staunton: Très bien. Il s'ensuit que nombre de ces programmes sont présentés au Parlement pour la première fois par l'intermédiaire du Budget principal des dépenses?
M. Bickerton: C'est cela, sénateur.
Le sénateur Lynch-Staunton: En somme, le Parlement n'a pas eu la possibilité d'en discuter, sauf dans le cadre des prévisions budgétaires ou encore si le ministre a accepté de comparaître devant le comité idoine pour en exposer les détails.
M. Bickerton: Monsieur le président, tous ces programmes relèvent des attributions législatives des différents ministres. Dans ce cas, il s'agit des Ressources naturelles et ce sont donc les lois actuelles dont relève le ministère qui autorisent le ministre à présenter ce genre de programme.
Le président: Est-ce qu'il y a une loi qui s'applique au programme canadien des infrastructures? Je devrais le savoir. Est-ce que le Parlement a effectivement adopté une loi?
M. Bickerton: Je n'en sais rien, monsieur le président.
Le président: C'est l'application du pouvoir fédéral de dépenser qui découle du Budget principal des dépenses et c'est le gouvernement qui décide. C'est un programme tripartite, n'est-ce pas, qui implique aussi les provinces et les municipalités?
M. Bickerton: Oui, c'est bien ça.
Le président: Vous mentionnez, à la page 7 de votre mémoire, le nouveau Programme stratégique d'infrastructure routière, soit 155,9 millions de dollars. Est-ce qu'il est encadré par une loi? Que savons-nous au sujet de ce nouveau programme? Quel ministre en a la responsabilité?
M. Bickerton: C'est le ministre des Transports qui en est responsable. Ce projet précis a été annoncé en octobre 1999 dans le discours du Trône. On a annoncé à cette époque la mise en place d'un nouveau programme sur les infrastructures visant à renforcer la croissance économique et à améliorer la qualité de vie de la population canadienne. Dans le budget de l'an 2000, 2 milliards de dollars ont été affectés à ce volet municipal. Le volet correspondant aux routes provinciales se monte à 600 millions de dollars au titre du Programme stratégique d'infrastructure routière.
Le président: Est-ce là tout ce que nous savons à son sujet, à l'exception de ce que l'on a pu voir dans les communiqués de presse ou dans les différentes annonces qui ont été faites? Y a-t-il une loi qui régit le tout?
M. Bickerton: Non, je crois qu'on a agit dans le cadre des attributions du ministre des Transports.
Le sénateur Corbin: J'ai une question précise à poser et je renvoie à ce sujet les honorables sénateurs aux pages 4-24 et 4-25, Patrimoine canadien et Bibliothèque nationale.
Je suis persuadé que les honorables sénateurs sont tous au courant des derniers malheurs de la Bibliothèque nationale, inondation, incendie et autres désagréments. Le dernier événement malheureux est survenu la semaine dernière. On a en fait recensé 72 incidents depuis qu'on a commencé à en faire le compte en 1993.
Je relève qu'il ne se dégage pas beaucoup de croissance du Budget principal des dépenses. On pourrait même interpréter des chiffres qui nous sont présentés comme étant récessionnistes. Il n'en faut pas moins composer, bien entendu, avec les augmentations normales de salaires, des prestations, et cetera, ce qui signifie que le mandat de l'administrateur général de la Bibliothèque nationale est remis sérieusement en cause. Son mandat, je le rappelle à tous ceux qui pourraient l'avoir oublié, est d'assembler et de préserver la collection tout en en facilitant l'accès.
À la suite du dernier incident, l'administrateur général a levé les bras au ciel et a pensé un instant devoir démissionner. La situation est devenue insoutenable.
Je pense que personne n'aimerait aller travailler dans un endroit où il faut utiliser des bottes et des pompes, où les canalisations dégouttent à l'occasion sur les collections et sur les documents et où l'on a quelque 10 ou 12 chambres froides en attente en cas d'urgence. Je vous passe tous les détails.
Pourtant, honorables sénateurs, il y a eu une nette diminution des crédits affectés à la Bibliothèque nationale, ce qui empêche l'administrateur général de la Bibliothèque d'exercer convenablement ses attributions, qui lui ont été confiées par le Parlement il y a bien des années.
Comment peut-on expliquer tout cela?
M. Bickerton: Monsieur le président, j'ai les chiffres devant moi. La Bibliothèque nationale bénéficie d'une petite augmentation de crédits.
Le sénateur Corbin: De quel montant?
M. Bickerton: Il s'agit de quelque 500 000 $.
Le sénateur Corbin: Sur un budget de 36 millions de dollars?
M. Bickerton: Oui. Je n'ai pas entendu dire que l'administrateur général de la Bibliothèque se soit présenté devant le Conseil du Trésor à la suite des incidents qui se sont produits récemment. La Bibliothèque nationale a la possibilité de le faire, si effectivement elle ne peut pas remédier aux conséquences d'un incident ou obtenir une réaffectation des priorités. Toute autorisation donnée par les ministres sera prise en compte dans les budgets supplémentaires des dépenses.
Le sénateur Corbin: Je crois comprendre que l'administrateur général de la Bibliothèque n'a pas directement accès au Conseil du Trésor, il doit passer par l'entremise du ministère de Patrimoine Canada. C'est un gros handicap lorsqu'il lui faut assumer ses devoirs et ses obligations.
C'est un problème qui se pose depuis des années. On n'a pas pris au sérieux ses avertissements. Il doit passer par des intermédiaires qui ne cherchent même pas à voir où est le problème. Sur le plan du service public, nous parlons ici d'un réseau de 500 bibliothèques importantes au Canada.
La situation actuelle de la Bibliothèque nationale est proprement inadmissible lorsqu'on la compare, par exemple, à celle de la Bibliothèque de Toronto. On ne dispose même pas des enceintes nécessaires pour préserver notre collection de journaux, qui est la plus importante collection de journaux canadiens au monde. Je me suis rendu hier sur le site. Il est placé au milieu du plus gros entrepôt de réservoirs de pétrole et d'essence à Ottawa. C'est là en soi un danger immédiat. Il y a un mois ou deux, un incendie s'est déclaré dans le hangar installé à côté de cette collection.
Personne ne semble prendre au sérieux les appels d'urgence qui émanent de l'administrateur général de la Bibliothèque. Il semble qu'il y ait un blocage au plus haut niveau. Les chiffres que vous nous avez donnés ce matin en font foi.
[Français]
Vous faites la sourde oreille à ces demandes urgentes. Cela ne date pas d'hier et cela ne vient pas non plus de l'administrateur actuel de la Bibliothèque nationale. C'est une situation qui persiste depuis au moins une décennie. Je profite de cette rare occasion qui nous est donnée en comité aujourd'hui pour soumettre ce point à l'attention des officiels du Parlement. Serait-il possible d'obtenir des réponses?
Tout le monde, ou à peu près, depuis 12 ou 15 ans a été obligé de se serrer la ceinture. D'un autre côté, nous avons mis en péril notre mémoire collective. Si l'administrateur de la Bibliothèque nationale s'inquiète publiquement — il a fait des déclarations dans les journaux la semaine dernière encore —, il est temps que nous nous réveillions, nous qui sommes chargés d'approuver les crédits du gouvernement et de voir à ce que la loi soit respectée. Je voudrais bien que dans votre rapport sur l'étude de ces comptes, vous en fassiez mention de façon sérieuse.
Entre-temps, les témoins pourraient-ils tracer pour le comité un portrait réaliste et factuel du budget de la Bibliothèque nationale, des sommes qui lui ont été allouées depuis les 10 ou 12 dernières années? Nous pourrions ainsi comparer la situation actuelle par rapport aux demandes auxquelles elle est confrontée. Nous pourrions voir les sommes disponibles qui ne tiennent pas compte des facteurs inflationnistes et autres facteurs économiques qui ont un impact tout à fait négatif sur leur fonctionnement.
J'aimerais bien que le message soit porté à l'attention des personnes responsables.
[Traduction]
M. Bickerton: Je ferai deux observations, monsieur le président. Nous n'avons évidemment pas sur nous aujourd'hui tout le dossier, qui remonte à 10 ans. Nous ferons parvenir au plus tôt ces renseignements au comité.
Au cours de l'exercice, le Secrétariat du Conseil du Trésor a reçu une demande de crédits supplémentaires présentée par la Bibliothèque nationale au titre de ses besoins de fonctionnement. L'année dernière, elle a bénéficié de 1 million de dollars de crédits supplémentaires pour régler des problèmes de préservation et remédier à certains besoins TI à long terme. Il est probable que l'on poursuivra cette action cette année dans le cadre d'un budget supplémentaire des dépenses. Je ne sais pas, cependant, si l'on répondra ainsi à tous les besoins exprimés par l'administrateur général de la Bibliothèque nationale.
Enfin, le Secrétariat du Conseil du Trésor a pour politique d'inciter les ministères à élaborer des plans d'équipement à long terme pour s'efforcer de maintenir en état les installations dont ils disposent. Les ministères sont encouragés à élaborer de tels projets et à les présenter au Conseil du Trésor. Ces projets seront examinés en temps utile. Un certain nombre de ministères l'ont fait et certains changements que vous pouvez constater dans le Budget principal des dépenses en sont le reflet.
Je ne sais pas si le ministère du Patrimoine ou si la Bibliothèque nationale ont élaboré de tels projets.
Le sénateur Bolduc: J'ai constaté, et ce n'est pas la première fois, qu'il y a d'assez gros écarts en ce qui a trait aux coûts de la Sécurité de la vieillesse. Chaque année, vous nous présentez une augmentation de quelque 4 p. 100. J'ai du mal à le comprendre. Une erreur de 4 p. 100 est importante. Cette année, vous nous demandez plus de 1 milliard de dollars de transfert au titre de la Sécurité de la vieillesse, ce qui représente 4 p. 100. Je ne comprends pas.
M. Bickerton: Toutes les prévisions qui ont trait aux programmes législatifs sont faites en fonction des meilleurs renseignements disponibles. On fixe une limite lorsqu'on s'efforce d'arrêter définitivement les chiffres. Pendant le peu de temps que j'ai passé ici, j'ai pu constater que des changements étaient apportés à la hausse ou à la baisse dans un certain nombre de programmes législatifs, mais l'on procède généralement en tenant compte des meilleurs renseignements disponibles.
Le sénateur Bolduc: Cette prévision devrait être assez précise étant donné qu'elle s'appuie principalement sur la démographie. Je sais qu'il faut tenir compte du facteur correspondant au supplément du revenu, mais une erreur de 4 p. 100 est énorme.
M. Bickerton: On procède à un certain nombre d'ajustements en fonction des renseignements servant à effectuer les prévisions. Lors de l'intervention de Ressources humaines Canada, les facteurs pris en compte portent non seulement sur le nombre de bénéficiaires, mais aussi sur la moyenne des paiements. Voilà à ce moment-là quelle est la nature de la modification apportée dans les prévisions dans le cadre des paiements ainsi effectués en vertu de la loi.
Le sénateur Cools: Mes questions vont dans le même sens que celles du sénateur Corbin, mais elles portent sur un autre sujet que je qualifierai de maintien de notre patrimoine. Je vous renvoie à la page 4-20, qui a trait au Patrimoine canadien, et plus précisément à la Commission de la capitale nationale. J'ai suivi récemment les enquêtes effectuées par les médias et j'ai comme l'impression que la Commission de la capitale nationale semble avoir abandonné la politique qu'elle s'était donnée de s'en remettre aux administrations locales pour ce qui est de la question de l'aménagement des terres.
Je suis très préoccupée par le fait que la CCN semble avoir délibérément choisi de se heurter et d'entrer en conflit avec les municipalités et les autorités locales, notamment en matière de ventes et de transferts à des promoteurs privés de propriétés qui étaient jusqu'alors privées.
En consultant cette page, je constate deux choses: tout d'abord, que les recettes qui y sont inscrites se montent à 32 888 000 $ et qu'il y a ensuite un autre poste de dépenses, celui de la gestion et de la promotion immobilière, au titre duquel les dépenses sont de l'ordre de 115 millions de dollars. J'ai plusieurs questions à vous poser à ce sujet et vous pourrez y répondre dans l'ordre que vous voudrez.
Pour ce qui est des recettes, qui se montent à 32 millions de dollars, quel est le pourcentage des recettes prévues pour l'année prochaine qui doit être tiré de la vente de l'immobilier? Quelles sont les propriétés concernées et quelles sont les recettes nettes prévues par la CCN?
M. Bickerton: Pour répondre à votre première question, je crois savoir que les recettes qui figurent dans ces documents budgétaires correspondant à la région de la capitale nationale n'englobent pas le produit des ventes. Il doit s'agir des programmes courants et de la vente de biens au sein de la Commission de la capitale nationale.
Le sénateur Cools: Il s'agit donc là des recettes tirées du canal et des différentes manifestations qui sont organisées?
M. Bickerton: Oui, je crois que c'est le cas.
Le sénateur Cools: Il ne s'agit donc aucunement ici du produit des transferts immobiliers.
Passons donc maintenant aux dépenses. En ce qui a trait aux conflits entre la CCN et les municipalités ou les collectivités locales, je me demande quelle partie des dépenses prévues doivent être affectées à la rémunération des avocats, des planificateurs et d'autres spécialistes chargés de préparer les dossiers et de témoigner lors des audiences de l'OMB, par exemple? J'essaie de mettre le doigt sur toutes ces activités qui semblent proliférer au sein de nos collectivités. On en a beaucoup parlé et il semble qu'elles échappent totalement au Parlement.
M. Bickerton: Je n'ai pas tous les détails permettant de ventiler les dépenses, mais je peux vous donner les raisons des augmentations. Il y a eu une augmentation globale de quelque 34 millions de dollars. Vous avez tout à fait raison de dire, sénateur Cools, que la plupart de ces dépenses se rapportent à la gestion et à la promotion immobilière. Le principal poste de dépenses se monte à quelque 46 millions de dollars au titre des crédits d'équipement correspondant à la remise en valeur des plaines LeBreton, notamment en ce qui a trait à la dépollution du site, à la viabilité et à l'aménagement du terrain du nouveau Musée canadien de la guerre.
Il y a une autre petite augmentation correspondant aux coûts salariaux dus à la convention collective. Il y a deux diminutions, une de quelque 11 millions de dollars au titre des crédits d'équipement correspondant à la remise en état de Rideau Hall, et une autre d'un peu moins de 3 millions de dollars correspondant à la cession du prêt devant permettre de rénover les ponts Champlain et du Portage. Cela ramène le total à 34 millions de dollars. Si vous le souhaitez, je pourrais vous donner des précisions en ce qui concerne les frais de services professionnels et spéciaux affectés à la CCN.
Le sénateur Cools: Si vous vous penchez sur la question, vous pourriez peut-être nous donner une idée du nombre de propriétés qui seront bientôt affectées à la vente. J'ai suivi la question d'assez prêt. Je me suis aperçu que nous connaissions en fait très peu de choses au sujet de la CCN. Il semble qu'il y ait là un mystère qu'il nous faut éclaircir.
M. Bickerton: Nous nous efforcerons de vous donner ces éclaircissements, monsieur le président.
[Français]
Le sénateur LaPierre: Les remarques que je voulais faire concernent la Bibliothèque et les Archives Nationales. Je connais un peu la situation puisque je suis un consultant de la ministre sur la Bibliothèque et les Archives Nationales.
[Traduction]
Après avoir présidé le comité institué à la suite du rapport publié en anglais pour unifier ces deux institutions, pour toutes sortes de raisons avancées par le rapport en anglais — je voulais simplement que la chose soit précisée.
Je tiens aussi à ajouter que ni les Archives nationales, ni la Bibliothèque nationale, si je me souviens bien, n'ont bénéficié de crédits supplémentaires au titre du projet de numéralisation, qui est administré par Patrimoine Canada. À moins que l'on ne modifie la structure des institutions, qu'il n'y ait plus qu'une seule société d'État et que le bâtiment soit transféré à quelqu'un d'autre, un nouvel édifice étant construit ici même ou à Gatineau, on ne résoudra jamais les problèmes actuels de la bibliothèque. Je tenais à ce que ce soit dit. J'en ai souvent parlé au ministre des Finances. Je ne pense pas qu'il faille soumettre la question au Conseil du Trésor, parce que ce ministère se contente d'administrer les crédits.
Je ne suis pas membre de ce comité et, pendant que j'ai la parole, j'aimerais vous demander si j'ai raison de penser que vous êtes chargés du contrôle des dépenses — le volet des dépenses?
M. Bickerton: Oui.
Le sénateur LaPierre: Voilà 40 ans que les gens me posent la question: comment se fait-il que, tous les ans, le vérificateur général relève des situations catastrophiques en ce qui a trait au contrôle des dépenses du gouvernement?
M. Bickerton: Monsieur le président, voilà neuf mois que j'occupe ce poste. Je ne pense pas être en mesure pour l'instant d'avoir toutes les réponses.
Le sénateur Cools: Monsieur le président, les fonctionnaires qui témoignent ici ne devraient pas avoir à répondre pour la vérificatrice générale.
Le sénateur LaPierre: Je voulais simplement savoir pourquoi il en est ainsi. Est-ce parce que les responsables ne comptabilisent pas les postes de la même manière que le vérificateur général? Tant pis si je n'obtiens pas de réponse; je continuerai alors à dire aux gens qu'il n'y a pas de réponse.
Le président: Il y a une question que l'on doit se poser et à laquelle il faudra bien obtenir une réponse, c'est pourquoi il y a tant de fuites d'eau dans l'édifice de la Bibliothèque nationale. C'est loin d'être le bâtiment fédéral le plus vieux d'Ottawa. A-t-il été mal construit au départ? A-t-on cherché à rogner sur l'entretien? Où se situe le problème? Je n'en sais rien. Je n'ai vu d'explication nulle part.
Le sénateur Banks: Je suis sûr que nos invités en ont par-dessus la tête d'entendre parler de la Bibliothèque, mais c'est sur ce point que va porter encore ma prochaine question.
Si nous établissions un bilan — et je sais qu'il n'y en a pas — dressant la liste des éléments d'actif, ceux de la Bibliothèque et des Archives nationales seraient inestimables. Ils n'ont pas de prix. Il est impossible de leur assigner une valeur quelconque. J'espère que vous êtes en mesure de faire comprendre à vos collègues que s'il y avait quelque part un fonds évalué précisément en dollars et auquel on ferait en quelque sorte courir de gros risques du point de vue des intérêts de la nation, le Conseil du Trésor, comme les autres intervenants, s'en inquiéterait fortement et ne manquerait pas d'étudier de près la question.
C'est bien la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous avons là un actif national d'une valeur inestimable, qui n'est pas facile à apprécier ou à comptabiliser. Faites-le évaluer par 50 experts, ils vous donneront 50 avis différents. Il court un risque, exactement comme on ferait courir un risque à une somme d'argent bien déterminée.
J'espère que vous ferez part de nos préoccupations à vos collègues du Conseil du Trésor pour qu'ils tiennent compte de ce genre de problèmes lorsqu'ils traiteront de ces questions d'affectation de crédits avec les ministres.
Ma question se ramène de manière générale à l'examen auquel procède le Parlement lorsqu'on accorde des autorisations de dépenses. Je comprends bien que, pour des raisons pratiques, il convient de déléguer au gouvernement et au conseil des ministres une bonne part des autorisations de dépenses. Il faut qu'ils puissent réagir immédiatement en cas d'urgence.
Prenons l'exemple de l'année dernière, lorsque le ministre des Transports, je crois que c'était lui, a annoncé presque immédiatement après le 11 septembre une aide de 160 millions de dollars, il me semble, aux sociétés de transport aérien. Il l'a fait dans le cadre de la Loi sur l'aéronautique, qui l'autorise à procéder ainsi. Du moins, c'est ce qui est dit.
Le sénateur Lynch-Staunton: Quelqu'un l'a dit.
Le sénateur Banks: En consultant bien le texte, on peut voir que ses dispositions permettent d'affecter de l'argent dans un tel but. On ne peut pas prévoir à l'avance ce genre de chose, bien entendu. La quantité d'argent dépensé de cette manière me préoccupe, de même que la très petite quantité d'argent, quelque 170 milliards de dollars, qui ne sont pas des dépenses législatives. Jusqu'à quel point peut-on permettre que ces lois nous autorisent à engager des dépenses qui ne sont entérinées qu'après coup, si tant est qu'elles le soient, par le Parlement?
J'ai l'impression qu'il s'agit là d'une préoccupation d'ordre général que partagent certains de mes collègues. Je me félicite de l'action entreprise au sujet des sociétés de transport aérien, mais il y a d'autres dépenses effectuées en vertu de certaines lois qui me paraissent étranges.
J'aimerais aborder un sujet sur lequel nous vous ferons part de nos préoccupations plus tard, en l'occurrence celui des crédits d'urgence. Tout administrateur fait face à des situations d'urgence. Comment opère-t-on dans ce cas? Quelle est la part du budget qui correspond à des situations d'urgence? Y a-t-il une enveloppe à ce sujet? Est-ce que l'on a prévu des limites? Est-ce que cet argent se trouve effectivement dans un compte quelconque? Est-ce que c'est le Conseil du Trésor qui décide qui peut avoir accès à l'argent dépensé au titre d'un crédit d'urgence?
M. Bickerton: Monsieur le président, je crois que dans ce cas précis les différents postes relevant d'une autorité législative sont tous adoptés dans le cadre des différentes lois déposées devant le Parlement. C'est cela qui justifie les autorisations de dépenses.
Le sénateur Banks: Je comprends. Y a-t-il d'autres paramètres entourant les dépenses? Je comprends qu'il faut adopter une année donnée une loi pour établir tel ou tel programme et que lors des années ultérieures, ce programme va éventuellement coûter davantage d'argent, mais y a-t-il une limite imposée aux augmentations de dépenses de type législatif?
M. Bickerton: Monsieur le président, chaque loi comporte un régime différent. Chaque loi se fixe des objectifs et le gouvernement met en place différents critères permettant d'autoriser les crédits. Je ne sais pas si les montants sont limités en vertu de la loi. J'imagine qu'ils le sont.
Pour répondre à votre question concernant les crédits d'urgence, il y a un crédit d'urgence au sein du Secrétariat du Conseil du Trésor. Sous une forme ou sous une autre, il existe pratiquement depuis l'établissement de la Confédération. Ce crédit en particulier est adopté tous les ans. Il figure dans le budget des dépenses du Secrétariat du Conseil du Trésor. À l'heure actuelle, il se monte à 750 millions de dollars. La définition de ce crédit permet au gouvernement de faire des avancements temporaires dans les cas d'urgence, pour les dépenses diverses et en cas d'imprévus. Les ministères présentent à cet effet des demandes au Conseil du Trésor et l'on détermine les montants qui doivent être autorisés. Ces sommes sont alors consignées dans les meilleurs délais dans les budgets supplémentaires des dépenses. C'est la pratique depuis maintenant de nombreuses décennies.
Le sénateur Banks: Si je comprends bien ce que vous venez de nous dire, les sommes consignées dans le fonds d'intervention d'urgence, plutôt que d'être prises au hasard, sont en partie arrêtées en fonction d'événements prévus à l'avance, puisque vous nous indiquez que les ministres viennent présenter des demandes et qu'on leur accorde des crédits d'urgence en fonction de celles-ci. Par conséquent, une partie au moins de ces 750 millions de dollars, somme qui me paraît assez faible par rapport à l'ensemble du budget — c'est moins de 5 p. 100 — correspond à des dépenses qui, d'une certaine façon, ont été prévues.
M. Bickerton: Monsieur le président, par nature, ce crédit s'applique à des dépenses qui doivent être imprévues ou fortuites. Ce crédit se monte précisément à 750 millions de dollars. Je crois qu'il a été augmenté il y a deux ou trois ans pour être porté à ce niveau. Traditionnellement, nous nous sommes efforcés au Conseil du Trésor de faire en sorte que ce chiffre se situe entre 1 et 1,5 p. 100 de l'ensemble des crédits. Le gouvernement dispose ainsi d'une certaine marge de manoeuvre. Des critères ont été mis en place pour déterminer les montants qui peuvent être prélevés sur ce crédit. Tous ces montants sont examinés par les ministres du Conseil du Trésor à la demande des ministères, et ce fut le cas pour celui de la subvention accordée cet automne à l'industrie du transport aérien.
Monsieur le président, lorsque les Budgets supplémentaires des dépenses sont déposés et adoptés par le Parlement, on restitue à nouveau des crédits d'urgence au Conseil du Trésor en vertu d'une affectation de crédits et il est alors possible de les réutiliser et de les affecter au ministère concerné dans le cadre de budgets supplémentaires des dépenses.
Le président: Vous n'ignorez pas que l'on va étudier précisément ce crédit. Nous avons rassemblé des documents et je pense que nous allons les distribuer pour faciliter notre travail.
Le sénateur Bolduc: Le montant discrétionnaire qui est prévu au budget est de quelque 56 milliards de dollars alors que nous parlons ici d'environ 750 millions de dollars, soit quelque 2 p. 100, le reste correspondant aux dépenses législatives déjà établies.
M. Bickerton: Je ne peux pas vraiment contester ce chiffre. Je crois bien entendu le sénateur sur parole.
Le sénateur Callbeck: Je ne suis pas membre de ce comité, mais j'aimerais poser un certain nombre de questions après avoir consulté pendant quelques minutes le document qui est devant nous.
Vous avez fait état dans votre exposé d'une importante diminution, se montant à 100 millions de dollars, au titre des prêts accordés aux termes de la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants. Pouvez-vous nous donner des précisions?
M. Bickerton: Monsieur le président, ce crédit relève plus précisément de la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants. Le ministère a décidé de modifier le montant d'argent qu'il s'apprête à dépenser après avoir affiné ses prévisions concernant le montant des prêts d'étudiants accordés.
Traditionnellement, on prévoit le montant des prêts qui vont être effectivement accordés aux étudiants. Nous avons constaté depuis un certain temps que 90 p. 100 seulement des étudiants qui demandent un prêt s'en prévalent effectivement. Nous avons pu rectifier les chiffres en conséquence.
La prévision pour 2002-2003 est plus précise étant donné qu'elle table sur le montant des prêts qui vont vraisemblablement être négociés avec les étudiants. Nous estimons que ce sera de l'ordre de 470 000 prêts ou certificats de prêt pour étudiants, d'un montant de quelque 1,8 milliard de dollars. C'est une prévision effectuée par le ministère en fonction des outils dont il dispose.
Le sénateur Callbeck: Autrement dit, aucune modification n'est apportée au programme. Cela s'explique tout simplement par le fait que les étudiants ne se prévalent pas de la quantité d'argent prévue au budget; c'est bien ça?
M. Bickerton: Oui, monsieur le président, c'est bien ça.
Le sénateur Callbeck: À la page 7-2 figure le montant total de la péréquation correspondant au TCSPS. Où puis-je me procurer la ventilation détaillée de ce chiffre?
Le président: De quelle répartition parlez-vous, sénateur?
Le sénateur Callbeck: De la répartition selon les provinces.
Le président: On peut certainement l'obtenir. Nous sommes en train d'élaborer un rapport sur la péréquation.
M. Bickerton: Monsieur le président, je ne suis pas sûr de disposer de la répartition selon les provinces. Cette répartition est fournie par le ministre des Finances dans son budget. Il se peut qu'il y ait là davantage de précisions.
Le sénateur Callbeck: Dans les documents budgétaires?
M. Bickerton: Oui, c'est cela.
Le sénateur Callbeck: Les recettes prévues de Radio-Canada se montaient l'année dernière à 528 millions de dollars. Cette année, elles sont de 455 millions de dollars. Pourquoi une telle diminution?
M. Bickerton: Monsieur le président, je vais demander à ma collègue Laura Danagher de répondre à cette question.
Mme Laura Danagher, directrice principale, Opération des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor: Dans une vie antérieure, j'étais à l'emploi de Radio-Canada et je sais donc bien comment cette société établit ses prévisions de recettes. Lors de l'exercice actuel, elle avait programmé un événement exceptionnel, soit les Jeux olympiques de Salt Lake City. Ses prévisions de recettes vont donc diminuer parce qu'un tel événement ne se reproduira pas en 2002 ou en 2003.
De plus, cette société a réduit son temps de publicité. Ainsi, pour l'émission The National, les annonces publicitaires ont diminué de moitié. Par ailleurs, certaines émissions diffusées à l'heure actuelle aux heures de grande écoute ne comportent aucune publicité.
C'est la principale raison de ce changement.
Le sénateur Callbeck: Est-ce que le chiffre de 528 millions de dollars prévu au budget 2001-2002 est raisonnablement exact?
Mme Danagher: De manière générale, Radio-Canada revoie ses prévisions budgétaires pour les cinq derniers mois de l'année. Elle le fait chaque mois. Je parlais la semaine dernière à ses responsables et ils m'ont dit que pour l'instant, l'écart par rapport à cet objectif reste dans une fourchette de 5 p. 100.
Le sénateur Callbeck: Est-ce que Radio-Canada envisage de continuer à réduire la quantité de publicité?
Mme Danagher: Oui, effectivement. Je pense que les principales répercussions se feront sentir en 2002-2003. Après cela, la baisse ne devrait pas être aussi sensible.
Le sénateur Lynch-Staunton: Pour en finir avec notre discussion précédente, dois-je comprendre, par conséquent, qu'il y a dans le Budget principal des dépenses de nouveaux programmes et de nouvelles demandes visant à obtenir de nouvelles autorisations de dépenses qui sont justifiées par une interprétation du pouvoir ministériel de dépenser? Je ne suis pas d'accord pour dire que la Loi sur l'aéronautique justifie que l'on accorde 160 millions de dollars pour aider les groupes concernés, les sociétés de transport aérien et d'autres. Toutefois, nous en reparlerons un autre jour.
Ma question s'applique avant tout au pouvoir ministériel de dépenser. Est-il de telle nature que les ministères peuvent faire figurer dans les prévisions budgétaires une demande de financement de nouveaux programmes et que le Parlement ne pourra en discuter qu'une fois que ces prévisions budgétaires lui seront présentées?
M. Bickerton: Monsieur le président, je vous renvoie au commentaire qui a été fait tout à l'heure au sujet des nouveaux programmes d'affectation de crédits dans le cadre des Ressources naturelles. Je pense que ces montants ont été fournis ou autorisés dans le cadre de la Loi sur l'efficacité énergétique. Cette loi autorise le ministre à mettre en place des programmes de contribution dans tous les domaines qui relèvent de ses attributions.
Il ne s'agit pas ici d'agir en fonction d'un objectif quelconque. Il faut que le programme que l'on met en place s'inscrive dans la loi. Il faut ensuite présenter des demandes au conseil des ministres et, lorsqu'il s'agit de crédits nouveaux, au Conseil du Trésor, au titre des programmes de contribution auxquels on veut réaffecter de l'argent ou qui doivent faire l'objet de nouvelles sources de financement. Toutes ces demandes sont examinées par les ministres du Conseil du Trésor avant d'être insérées dans le Budget principal des dépenses, ou encore dans les budgets supplémentaires.
Le sénateur Lynch-Staunton: S'il y a un texte de loi précis qui autorise cette façon de procéder, je suis alors tout à fait d'accord.
Pour en revenir aux 160 millions de dollars qui ont été accordés aux sociétés de transport aérien et à d'autres intervenants affectés par le 11 septembre, l'autorisation a été accordée en fonction des dispositions de la Loi sur l'aéronautique, n'est-ce pas?
M. Bickerton: Oui, vous avez raison, sénateur.
Le sénateur Lynch-Staunton: Même si ce n'est pas le moment d'engager ce genre de discussion, j'ai l'impression que certaines de ces lois sont rédigées d'une façon tellement vague qu'elles confèrent aux ministères davantage de latitude que le Parlement n'en avait prévue. Toutefois, cela relève de la responsabilité du Parlement, et il ne s'agit pas d'en discuter aujourd'hui.
Comme vous venez de le dire, monsieur le président, nous en reparlerons à une autre occasion.
Ma dernière question porte sur un point précis. Je ne suis pas un traditionaliste, mais je suis cependant en faveur des traditions établies de longue date, dont celles des lieutenants-gouverneurs. Je relève à la page 4-6 que les subventions qui permettent de rembourser aux lieutenants-gouverneurs le coût de leurs déplacements et d'autres frais de ce type sont en baisse. Je me demande s'il s'agit ici d'une diminution nette ou si l'on a modifié les règles comptables et s'il y a une compensation ailleurs qui fait que l'on soit resté au même niveau.
M. Bickerton: Monsieur le président, je regarde la page 4-2. Je peux voir que les paiements effectués au titre de la «Loi sur la pension de retraite des lieutenants-gouverneurs» sont restés les mêmes.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je suis à la page 4-6.
Le président: Nous nous efforçons d'enrayer la montée du républicanisme, monsieur Bickerton.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et je m'efforce de l'encourager, de sorte que je vous appuie sur ce point.
Le président: Faites attention, sénateur, vous êtes le chef de la Loyale Opposition à Sa Majesté au Sénat, je vous le rappelle.
M. Bickerton: Monsieur le président, à la page 4-6, je constate qu'il y a une différence qui se monte au total à quelque 60 000 $.
Le sénateur Lynch-Staunton: Pour quelle raison?
M. Bickerton: Je m'en informerai et je donnerai une réponse au comité.
Le sénateur Bolduc: Je voudrais revenir à l'affectation de 155 millions de dollars de crédits au nouveau Programme stratégique d'infrastructure routière. Est-ce ce programme a été établi dans le cadre de la loi de 1989 ou s'agit-il uniquement d'une entente de partage des coûts passée avec les provinces?
M. Bickerton: C'est un programme, monsieur le président, qui a été annoncé en octobre 1999. Il a été aussi inclus dans le budget. Si vous nous renvoyez à une loi, elle remonte à 1989. Il ne s'agit pas de la même chose.
Le sénateur Bolduc: N'était-il pas vrai que le ministre des Transports avait le pouvoir législatif de mettre en place un programme de financement de l'infrastructure routière?
M. Bickerton: Monsieur le président, j'ai peur de ne pas connaître la réponse. Là encore, je m'efforcerai de vous la donner plus tard.
Le sénateur Corbin: Je resterai bref, monsieur le président. Au chapitre de la Canadian Broadcasting Corporation- Société Radio-Canada, je ne vois aucune répartition des comptes entre les deux entités. Ces deux sociétés sont pratiquement indépendantes dans la réalité et pourtant leurs budgets sont confondus, ce qui me permet difficilement de voir ce que coûtent les différents programmes et quels sont les services qu'obtient la population canadienne qui les subventionne.
Pourquoi présentez-vous les comptes de cette manière? Ne devraient-ils pas être séparés?
Mme Danagher: Vous pouvez obtenir cette répartition chaque année lorsque la société présente son rapport annuel. Il y a effectivement une ventilation entre les réseaux francophone et anglophone.
Le sénateur Corbin: Pourquoi ne le fait-on pas dans le cadre de cette étude afin que nous puissions en parler?
Mme Danagher: Nous nous situons de manière générale à un niveau résolument macro-économique lorsqu'il s'agit d'obtenir les autorisations de dépenses.
Le sénateur Corbin: J'écoute aussi bien CBC que Radio-Canada — CBC à 7 heures et Radio-Canada à 8 heures.
[Français]
On a l'impression que ce sont deux entités complètement distinctes, non seulement par le contenu mais par l'attitude et la présentation. En fait, elles se comportent comme si elles étaient deux sociétés tout à fait distinctes.
Dans la loi, sont-elles reconnues comme deux sociétés distinctes ou est-ce simplement un habit qu'elles portent à des fins de publicité ou de relations publiques? Vous savez, je suis un ancien employé de Radio-Canada.
[Traduction]
Mme Danagher: Je crois savoir que ce n'est pas prévu dans la loi. C'est un service dispensé en particulier, mais nous sommes tenus de le faire dans les deux langues officielles. La loi prévoit un seul service. Ce ne sont pas deux sociétés distinctes.
Le président: Voilà qui met fin à notre séance. Je remercie M. Bickerton et Mme Danagher.
La séance est levée.