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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


Délibérations du Comité sénatorial permanent
des finances nationales

Fascicule 39 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 8 mai 2002

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 17 h 48, pour faire l'examen du Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2003 du crédit 5 du Conseil du Trésor — Éventualités du gouvernement.

Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Chers collègues, comme il y a quorum, nous allons commencer. Comme vous le savez, il est impossible à tout organisme important, qu'il soit public ou privé, de prévoir un an à l'avance chaque éventualité ou situation d'urgence qui surviendra. Les organismes prudents, publics comme privés, font des réserves pour de pareilles éventualités. Ainsi, le gouvernement fédéral a un fonds de prévoyance pour de petites éventualités variées et imprévues. En principe, il s'agit du crédit 5 du Conseil du Trésor dans le Budget des dépenses que le Parlement approuve chaque année. Tout comme l'an dernier, il est d'environ 750 millions de dollars cette année, une jolie somme. Toutefois, il ne représente tout au plus que 1,4 p. 100 des dépenses totales prévues dans le budget de l'exercice.

Depuis bien des années, le vérificateur général s'intéresse périodiquement à ce fonds, à la façon dont il est utilisé par le gouvernement, aux fins auxquelles il est affecté, et ainsi de suite. Toutefois, qu'est-ce qu'une éventualité au juste? Il n'y a pas longtemps, c'est-à-dire le mois dernier, dans un rapport qu'elle a déposé à la Chambre des communes, Mme Fraser a soulevé plusieurs points d'importance au sujet de la façon dont le gouvernement utilise le fonds.

Déjà, il y a 15 ans, notre comité s'en plaignait, et il est revenu à la charge récemment, particulièrement en ce qui a trait aux principes de reddition de comptes et de transparence du gouvernement. Les questions avec lesquelles nous sommes aux prises incluent de savoir s'il ne faudrait pas renforcer l'autorisation légale du fonds et resserrer le processus.

Nous avons entendu la vérificatrice générale elle-même, il y a quelques semaines. La semaine dernière, nous avons entendu le sous-contrôleur général, M. Neville, qui est de retour ici ce soir.

Nous avons aussi le plaisir d'accueillir ce soir M. Frank Claydon. Diplômé de l'Université de la Colombie- Britannique, il a durant plus de 15 ans occupé divers postes au Secrétariat du Conseil du Trésor avant de passer à la haute direction du ministère de l'Agriculture, y compris en tant que sous-ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Depuis deux ans, il est secrétaire du Conseil du Trésor et contrôleur général du Canada.

M. Claydon quittera ce poste la semaine prochaine pour agir comme conseiller auprès du Conseil privé, de sorte qu'on peut probablement l'appeler le secrétaire sortant du Conseil du Trésor. Je suis sûr que, même s'il est sur son départ, vous le trouverez toujours aussi réceptif.

M. Frank Claydon, secrétaire du Conseil du Trésor et contrôleur général du Canada: Monsieur le président, honorables, je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui.

Mon collègue Richard Neville est venu la semaine dernière devant votre comité afin de discuter des diverses caractéristiques du crédit 5 du Conseil du Trésor. Entre autres choses, il a parlé en détail du libellé du crédit. Il a également traité de certaines des préoccupations exprimées par la vérificatrice générale au sujet de la façon dont le crédit a été utilisé au cours des dernières années. Compte tenu du peu de temps dont nous disposons ce soir, je ne reviendrai pas sur ces questions. J'aimerais plutôt parler en termes plus généraux du crédit et de la façon dont il est utilisé. J'aimerais également examiner avec vous le rôle exercé par le Secrétariat du Conseil du Trésor et par les ministres du Conseil du Trésor dans le cadre du processus d'affectation des crédits.

J'espère que cette approche permettra de répondre aux questions qui sont peut-être demeurées sans réponse la semaine dernière. J'espère également qu'elle permettra de cerner d'autres aspects à approfondir.

[Français]

Permettez-moi tout d'abord de préciser que j'estime que le crédit 5 du Conseil du Trésor est un outil essentiel pour le gouvernement. L'actuel contexte des politiques publiques dans ce pays est complexe. En fait, les mécanismes de planification et de financement doivent être assez souples pour faire en sorte que les activités du gouvernement se déroulent en douceur. Le crédit 5 procure cette marge de manœuvre.

[Traduction]

Comme vous le savez, le crédit 5 a pour objet de fournir un financement temporaire aux ministères afin de leur permettre de faire face à des besoins de trésorerie imprévus et pressants. Les exemples de pareilles situations ne manquent pas. La première qui nous vient à l'esprit pour cette année est sans aucun doute la pression additionnelle exercée au chapitre de la paie sur des ministères comme la Défense nationale et la Justice par suite des événements du 11 septembre. Manifestement, il s'agissait de dépenses inévitables et nécessaires qu'il aurait tout simplement été impossible de prévoir dans le budget.

J'estime que nous avons mis au point un processus efficace de gestion de l'accès au crédit 5. Il assure une diligence raisonnable pour les Canadiens et les Canadiennes et la reddition de comptes au Parlement, tout en donnant aux ministères l'accès à un financement crucial. Je suis heureux de pouvoir discuter de ce processus.

[Français]

Permettez-moi tout d'abord de préciser normalement de la question des crédits que trois fois pendant l'exercice. Même si le gouvernement s'efforce d'inclure la grande majorité des nouveaux besoins en ressources dans le Budget principal des dépenses d'une année donnée, cela n'est pas toujours possible, comme vous pouvez sûrement l'imaginer.

Même le processus de planification le plus perfectionné qui soit ne peut permettre de prévoir toutes les éventualités. C'est la raison pour laquelle un Budget supplémentaire des dépenses est présenté chaque année. Ce processus prévoit des dépenses additionnelles relativement à des programmes nouveaux ou révisés, qui surviennent trop tard pour être incluses dans le Budget principal des dépenses.

[Traduction]

À de nombreux égards, le crédit 5 sert à combler l'écart entre le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses. L'accès au crédit 5 n'est approuvé que dans les cas où le besoin d'un financement immédiat est si grand qu'il ne serait pas prudent d'attendre jusqu'au Budget supplémentaire suivant.

Comme vous le savez, toutes les demandes d'accès au crédit 5 sont fondées sur des présentations soumises au Secrétariat du Conseil du Trésor par les ministères. Je dois souligner que, malgré tout ce qui a été dit à leur sujet, les demandes d'accès au crédit 5 constituent l'exception plutôt que la norme.

[Français]

Le Secrétariat du Conseil du Trésor aide les ministères à produire les présentations. Un rigoureux processus d'examen interne est observé. Durant l'élaboration des présentations, des discussions ont lieu sur la nécessité de demander l'accès au crédit 5, si le ministre estime que cela est nécessaire.

Comme l'a déjà dit M. Neville, le Secrétariat du Conseil du Trésor a établi des critères qui doivent être appliqués dans le cadre de l'évaluation des demandes d'accès au crédit 5. Si le Secrétariat juge ces demandes injustifiées, il encourage les fonctionnaires à ne pas les inclure dans la présentation officielle qui doit être signée par le ministre.

[Traduction]

Le plus important, c'est que la demande soit clairement justifiée. Nous ne prenons pas cette exigence à la légère. Les ministères doivent établir clairement la nécessité de recourir au financement. Nous examinons les demandes du point de vue de l'abordabilité. Cela signifie qu'il faut examiner les autres pressions additionnelles gérées par le ministère et déterminer en quoi ces pressions modifient la capacité qu'a le ministère de satisfaire aux exigences de programmes. Nous devons déterminer si le ministère en question peut oui ou non raisonnablement absorber le coût additionnel, compte tenu de la taille relative de son budget approuvé.

Nous étudions également les présentations du point de vue des calendriers. La demande doit être clairement urgente. Il convient de signaler que nous refusons d'office les demandes d'accès au crédit d'urgence pour ce qui concerne les paiements qui peuvent être reportés jusqu'à l'adoption du projet de loi de crédits suivant.

S'il s'agit d'une nouvelle subvention ou de l'augmentation d'une subvention existante, la demande est étudiée en fonction des mêmes critères. Si la justification du ministère et le jugement des fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor révèlent que ce poste doit être payé hors du processus habituel des crédits, l'accès au crédit 5 et l'autorisation temporaire afférente sont recommandés. Je vous rappelle toutefois que ces situations constituent l'exception, plutôt que la norme.

Ainsi, en 2002-2002, 87 subventions ont été incluses dans le Budget supplémentaire des dépenses. De ce nombre, il n'y a eu accès au crédit 5 que pour 17 subventions, soit dans moins de 20 p. 100 des cas.

[Français]

Une fois qu'une présentation est achevée par le ministère et approuvée par le ministre concerné, elle est soumise au Secrétariat où elle fait l'objet d'un examen approfondi. Je tiens à affirmer catégoriquement que ces présentations, et surtout les demandes d'accès au crédit 5, ne sont pas simplement estampillées par le Secrétariat.

[Traduction]

En bout de ligne, la décision d'approuver ou de rejeter une demande revient aux ministres du Conseil du Trésor eux- mêmes. Essentiellement, la présentation constitue une demande de financement d'urgence présentée par un ministre à l'un de ses collègues. Les ministres étudient les demandes dans le cadre des travaux d'un comité du Cabinet et ils pèsent le pour et le contre de chacun des cas. Il incombe au Secrétariat du Conseil du Trésor de superviser la présentation de ces cas au Conseil du Trésor et de faire des recommandations.

Comme vous le savez, certaines préoccupations ont été exprimées au sujet de la marge de manoeuvre que donne le crédit 5 au gouvernement. Le libellé du crédit a été intentionnellement énoncé en termes généraux. Cela étant dit, comme l'a souligné M. Neville la semaine dernière, l'utilisation des pouvoirs consentis par le crédit 5 a toujours été plus restrictive que les utilisations autorisées par le Parlement. Le gouvernement hésite beaucoup à utiliser le crédit autrement qu'à titre de mécanisme de financement temporaire pour des situations imprévues et urgentes. Cela est particulièrement vrai dans le cas des subventions versées avant l'autorisation du Parlement. Je sais que cette question préoccupe beaucoup les membres de votre comité et la vérificatrice générale. Je peux vous assurer que nous partageons ces préoccupations.

Monsieur le président, en conclusion, j'estime que le Conseil du Trésor a fait preuve d'une grande diligence et de la prudence qui s'impose dans la gestion de l'accès au crédit 5. Je trouve rassurant que la vérificatrice générale ait constaté, lors de l'examen récent de trois cas, que les analyses du Secrétariat étaient rigoureusement conformes à toutes les lignes directrices.

[Français]

Cela dit, je sais que nous pouvons faire encore mieux au chapitre de la gestion du processus d'affectation des fonds. C'est la raison pour laquelle nous avons l'intention de procéder à un examen complet des lignes directrices existantes. Nous examinerons de près les suggestions qui nous ont été présentées par votre comité. En fin de compte, notre objectif consiste à soumettre une politique sur le crédit 5 du Conseil du Trésor que les ministres du Conseil du Trésor seront invités à examiner et à approuver.

[Traduction]

Le sénateur Lynch-Staunton: Merci, monsieur Claydon, pour votre allocution succincte. Nous visons le même objectif; il s'agit de définir les dernières étapes à suivre. Personne ne remet en question la nécessité de ce pouvoir discrétionnaire. La mésentente, pour ainsi dire, porte sur l'interprétation des pouvoirs octroyés. Certains d'entre nous sont d'accord avec la vérificatrice générale lorsqu'elle déclare que l'expression «dépenses diverses, mineures et imprévues» a été interprétée de manière trop générale. Si l'expression «dépenses urgentes» était plutôt utilisée, l'interprétation serait limitée, mais est-ce que cela pourrait en restreindre l'application? Vous avez utilisé le mot «urgent» dans votre allocution.

Le président: Ce n'est pas dans le libellé du crédit.

Le sénateur Lynch-Staunton: Vous parlez de financement immédiat, et j'y viendrai dans quelques instants. Le sénateur Bolduc a soulevé cette question la semaine dernière en présence de M. Neville et de son collègue, et il a presque réécrit le libellé pour vous, mais le mot «urgent» refait toujours surface. Qu'en pensez-vous?

M. Claydon: Je tiens à faire remarquer aux sénateurs que huit lignes directrices sont utilisées par le Conseil du Trésor et les ministères lorsqu'ils ont a recours au crédit 5. Dans nos lignes directrices, le mot «urgent» est utilisé, et c'est un des facteurs dont nous tenons compte dans notre interprétation. Je serais heureux de prendre cette question en délibéré. Le mot «urgent» est certainement un des facteurs qui est pris en considération; nous devons déterminer si ce mot doit être inclus dans le libellé du crédit. Je peux vous assurer que ce mot est très présent dans nos délibérations.

Le sénateur Lynch-Staunton: À l'onglet 5 de notre cahier de breffage, vous trouverez la liste de certaines des principales dépenses admissibles en vertu du crédit 5, dont l'établissement du Bureau d'information du Canada, au coût de 15 millions de dollars. Ces dépenses étaient peut-être imprévues, mais je n'en vois vraiment pas l'urgence. Il y a aussi la création du Bureau du Canada pour le millénaire. Comme vous l'a demandé le sénateur Murray l'autre jour, n'avait-on pas prévu l'arrivée du millénaire? On se demande donc pourquoi ces initiatives, plutôt que d'avoir été mises en place par l'exécutif et financées de la sorte, n'ont pas été présentées au Parlement et n'ont pas franchi les étapes habituelles qui sont plus lourdes, mais aussi plus transparentes. Je ne veux pas m'en prendre à ces deux initiatives en particulier, mais quelle en était l'urgence?

M. Claydon: Moi non plus, je ne tenais pas à discuter de ces deux initiatives en particulier. M. Neville pourrait peut- être nous donner des précisions sur ces deux cas. Bien sûr, tous savaient que le millénaire approchait. Toutefois, pour que les objectifs définis par un programme établi puissent être atteints dans les délais prévus, il pouvait être nécessaire de mettre le processus en branle de manière urgente afin que le mécanisme de financement soit mis en place. Il était donc urgent que tout soit mis en place en temps prévu pour atteindre les objectifs du programme.

Ce genre d'urgence est complètement différent d'une urgence pouvant survenir à la suite d'événements tout à fait imprévus comme ceux du 11 septembre. Il existe aussi d'autres genres de situations dans lesquelles le gouvernement croit qu'il est très urgent de prendre certaines initiatives et de veiller à ce que ces initiatives répondent aux engagements pris et fournissent certains avantages à la population canadienne dans les délais prévus.

Le sénateur Lynch-Stauton: Je ne veux pas vous entraîner dans un débat politique, et si c'est ce qui se produit, je vous demande de m'interrompre, mais les échéanciers de ces deux initiatives auraient pu être respectés si les initiatives en question avaient été prévues au budget dès le départ. Elles auraient pu être présentées dans le cadre d'un budget et être autorisées par l'entremise d'un projet de loi de crédits normal. D'une certaine façon, je crois qu'on a opté pour la solution facile, sans contourner le Parlement puisque les dépenses doivent être approuvées par lui en bout de ligne. Toutefois, le Parlement n'a absolument pas participé à la création de ces deux initiatives.

M. Claydon: M. Neville pourrait peut-être apporter des précisions en ce qui concerne ces deux initiatives.

M. Richard Neville, sous-contrôleur général, Direction de la fonction de contrôleur, Secrétariat du Conseil du Trésor: En ce qui a trait à ces deux cas en particulier, les ministères ont démontré qu'il y avait urgence et qu'ils n'avaient pas les fonds nécessaires pour effectuer les paiements requis. Donc, des fonds ont dû être avancés par le crédit 5 du CT jusqu'à ce qu'ils puissent être inclus dans le budget supplémentaire des dépenses suivant. C'est pourquoi des fonds ont été versés pour ces deux initiatives.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il s'agit peut-être de renseignements confidentiels, mais le SCT fait des recommandations au CT.

M. Claydon: Oui.

Le sénateur Lynch-Staunton: Bien entendu, c'est le Conseil du Trésor qui a le dernier mot. Est-ce que vos recommandations sont parfois rejetées?

M. Claydon: J'aimerais prendre une minute pour fournir certaines explications. Le processus que nous devons suivre avec les ministères lorsque nous examinons leurs besoins en ce qui concerne le crédit 5 débute bien avant que le Conseil du Trésor examine un cas. Un très grand nombre de communications sont échangées entre le secrétariat et les ministères pour arriver à déterminer ensemble la nécessité de demander l'accès au crédit 5. Souvent, les ministères nous disent qu'ils ont besoin de ceci ou de cela. Toutefois, après que nous ayons fait une analyse, après que nous ayons déterminé les autres sources possibles de financement dans leurs budgets et les fonds dont ils ont réellement besoin, et ainsi de suite, nous convenons mutuellement qu'il n'est pas nécessaire de présenter une demande d'accès au crédit 5. Dans la grande majorité des cas, ces détails sont réglés par les fonctionnaires. Il est plutôt rare qu'un ministère présente une demande d'accès au crédit 5 et que le Conseil du Trésor ne puisse pas approuver cette demande.

Dans ce domaine, les ministères comptent énormément sur les compétences du Secrétariat du Conseil du Trésor pour les guider. Nous évitons presque toutes ces situations grâce au travail effectué par les fonctionnaires.

Le sénateur Lynch-Staunton: J'aimerais poser une dernière question dans ce tour de table. Pour quelle raison transfère-t-on le montant total des subventions aux fondations sous forme de subventions d'investissement plutôt que de leur accorder des fonds sur une base annuelle en fonction de leurs besoins? Je sais que nous ne devions pas parler des fondations comme telles, mais ma question porte simplement sur la politique de financement des fondations. Par exemple, le Fonds pour le développement durable, qui correspondait à 50 millions de dollars, n'était pas requis pendant la première année et il n'a donc même pas été établi. Il y a environ six semaines, on a annoncé la nomination de certains administrateurs, et d'autres seront nommés sous peu. Le gouvernement a donc annoncé la nomination de ses administrateurs qui ont, à leur tour, annoncé la nomination des autres. Ce projet en est au stade embryonnaire, mais les fonds ont déjà quitté les recettes générales et ont été versés dans un compte bancaire; les intérêts produits par ces fonds seront donc touchés par le Fonds. Je crois que si nous faisions l'addition de tous ces montants qui ont été transférés alors qu'ils n'étaient toujours pas requis, nous pourrions constater que les contribuables canadiens ont perdu des sommes importantes sous forme d'intérêts. Donc, pourquoi transférer tous ces fonds en une seule fois alors que les fondations ne sont pas prêtes à les utiliser?

M. Claydon: Je demanderais à M. Neville de répondre à cette question.

M. Neville: Il y a plus d'une raison.

Premièrement, c'est la politique du gouvernement d'agir de la sorte parce qu'en transférant la totalité des fonds dès le début, plutôt que de les étaler sur une période de trois ou quatre ans, il assure à la fondation un financement plus stable. Il ne sera pas touché par l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement ou un changement de priorités du gouvernement de l'heure ne peut donc pas être modifiée par un changement de gouvernement ni par un changement de priorités de la part du gouvernement au pouvoir. Lorsque les fonds sont immédiatement transférés, ils sont garantis.

Deuxièmement, grâce aux fonds obtenus, l'initiative peut alors obtenir des contributions ou des subventions similaires de la part d'autres organismes.

Troisièmement, nous voyons parfois ces fonds comme une source de richesse grâce à laquelle la fondation peut toucher des intérêts. Elle peut ainsi faire des paiements en utilisant les intérêts, sans toucher au capital. Il y a un certain nombre de facteurs qui entrent en jeu lorsque nous décidons de transférer des fonds immédiatement plutôt que d'en étaler le versement sur plusieurs années.

Le président: Vous pourrez continuer de poser des questions au sujet de la politique le 28 mai puisque John McCallum, un des ministres des Finances, et Kevin Lynch, le sous-ministre, seront parmi nous.

Le sénateur Lynch-Staunton: Ce sera avec plaisir. N'oubliez pas que c'est le Conseil du Trésor qui veille à ce que ces dépenses soient conformes aux lignes directrices. Vous savez que, le plus souvent, les montants versés ne seraient pas rendus au gouvernement si la fondation cessait ses activités. À une exception près, nous avons constaté que ces fonds étaient distribués à ceux qui avaient reçu les subventions tout au long du processus.

M. Neville: On ne doit pas oublier que ces fonds sont transférés à une tierce partie. Nous n'avons ensuite aucun contrôle sur ces fonds.

Le président: C'est là le problème.

M. Neville: Si nous exercions un contrôle sur ces fonds, il ne s'agirait plus d'un transfert à une tierce partie. Ces fonds seraient toujours considérés comme appartenant à une entité publique. Nous devrions alors les signaler en tant qu'élément de l'actif total du gouvernement et comme faisant partie d'un programme. Cela ferait obstacle au but que nous essayons d'atteindre.

Le sénateur Cools: J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins, surtout à M. Claydon que nous ne voyons pas très souvent. Si vous n'étiez pas sur le point de quitter votre poste, je vous demanderais de revenir. Notre collaboration a été plutôt courte.

Le sénateur Lynch-Staunton: Nous pouvons en discuter.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth: Dans votre présentation, vous avec dit que certaines préoccupations ont été exprimées quant à la marge de manœuvre que procure un crédit 5 au gouvernement. C'est vraiment une grande préoccupation.

Le gouvernement a cette facilité à mettre des fonds où il croit devoir en mettre en cas d'éventualités. Est-ce seulement dans des cas bien spécifiques que le gouvernement dispose de cet argent ou y a-t-il des limites quant au type d'éventualité pour l'utilisation du crédit 5?

[Traduction]

M. Claydon: Il n'y a qu'une seule limite, le total du crédit 5 qui, comme l'a dit le président, est de 750 millions de dollars. Il n'y a aucune limite particulière quant aux paiements accordés en vertu du crédit.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth: À part les fondations, vous avez donné d'autres exemples d'utilisation du crédit 5.

M. Claydon: Oui.

Le sénateur Ferretti Barth: Quelles sont les autres utilisations du crédit 5?

[Traduction]

M. Claydon: Le crédit 5 a un champ d'application très vaste. Il peut être utilisé pour un certain nombre d'activités, certainement pour financer des dépenses de fonctionnement et de capital. Par exemple, après le 11 septembre, il a servi à financer certaines dépenses de fonctionnement engagées par des ministères qui avaient entrepris des activités reliées à la sécurité. Il a été utilisé dans un grand nombre de ministères pour d'autres dépenses de fonctionnement et il est aussi utilisé aux fins de la liste de paye, une affectation à laquelle le crédit 5 sert plutôt fréquemment.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth: Il y a des lignes directrices pour procéder à un examen précis, complet et approfondi des requêtes d'un gouvernement pour disposer d'une somme d'argent.

Pourriez-vous nous faire part des lignes directrices qui s'appliquent à une demande de fonds pour subvenir aux besoins d'une éventualité? Vous avez exigé des lignes directrices, n'est-ce pas?

M. Claydon: Oui, nous avons des lignes directrices au Conseil du Trésor pour gérer le crédit 5. Nous en avons huit mais elle ne font pas partie de la législation. Elles sont des guides pour les analystes au Conseil du Trésor et pour les ministères aussi.

Le sénateur Ferretti Barth: Pourquoi le secrétariat du Conseil du Trésor n'a-t-il pas répondu aux commentaires de la vérificatrice générale?

[Traduction]

M. Claydon: Nous avons répondu aux recommandations faites par la vérificatrice générale dans le rapport qu'elle a récemment déposé, et nous avons entrepris un examen de nos lignes directrices quant à l'utilisation du crédit 5. Une fois cet examen terminé, nous présenterons au Conseil du Trésor l'ébauche d'une nouvelle politique de gestion du crédit 5 et de son application. C'est une des recommandations faites par la vérificatrice générale qui visait directement le Secrétariat du Conseil du Trésor.

M. Neville: Je demanderais au sénateur de bien vouloir lire la réponse précise donnée par le Secrétariat du Conseil du Trésor au chapitre 8, page 36. Elle porte directement sur les recommandations de la vérificatrice générale.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth: Pour conclure, je vous dirai que cette possibilité si grande et sans pénalité que le gouvernement a de profiter d'une marge de manœuvre, qui représente l'argent des contribuables, me fait peur. C'est bel et bien une opinion personnelle, mais en tant que citoyenne, je me dis que cela n'a pas de sens.

[Traduction]

M. Claydon: Un dernier commentaire. Un montant de 750 millions de dollars peut sembler assez élevé, mais par rapport à un budget total de 165 milliards de dollars, il ne donne pas une très grande marge de manoeuvre au gouvernement. C'est un très faible pourcentage du budget total. Selon des recherches que nous avons effectuées, c'est un pourcentage beaucoup plus petit que ce dont disposent d'autres gouvernements au niveau international. Étant donné les dépenses immenses engagées chaque année, il est tout à fait raisonnable, selon moi, que le gouvernement ait une certaine latitude de manière à pouvoir prendre des initiatives nécessaires et urgentes.

Le sénateur Bolduc: Le budget n'est pas vraiment de 165 milliards de dollars, mais plutôt de quelque 50 milliards de dollars. La différence représente les dépenses législatives et le remboursement de la dette. Le pourcentage est donc d'environ 1,5 p. 100, ce qui est plutôt raisonnable si l'on tient compte du fait que nous avons deux Budgets supplémentaires des dépenses, parfois trois. Le Parlement siège maintenant pendant presque toute l'année, du moins pendant dix mois. Le crédit 5 ne devrait être utilisé que pour des exceptions. C'est la première remarque que je voulais faire.

Deuxièmement, vous dites ne pas tellement l'utiliser, mais sur 87 subventions, vous y avez eu recours 20 p. 100 du temps. C'est une fois sur cinq. Vous dites que l'urgence est prévue dans vos lignes directrices.

M. Claydon: Oui.

Le sénateur Bolduc: J'aimerais préciser que c'est dans la 7e ou 8e ligne directrice. Les quatre premières sont vraiment des lignes directrices du Conseil du Trésor; je dirais que les autres sont du Secrétariat du Conseil du Trésor. Je suis étonné que le terme «urgence» ne figure pas dans les lignes directrices de base qui s'adressent aux ministres, au Conseil du Trésor lui-même. En français, au moins, il est question d'«un sentiment d'urgence». Le sentiment d'urgence est parfois particulièrement vif avant des élections.

Le sénateur Cools: Très vif.

Le sénateur Bolduc: Vous ne vous mettez pas à l'abri en faisant cela, si on pense à la vieille règle de responsabilité devant le Parlement.

M. Claydon: Certaines de ces lignes directrices sont récentes, vous le savez. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous allons les revoir. Nous allons présenter à nouveau toute la série au Conseil du Trésor et lui demander conseil sur une approche globale relativement aux politiques. Il est certain que nous allons tenir compte des commentaires que nous avons reçus plus tôt, et que nous recevons actuellement, dans les recommandations que nous présenterons au Conseil du Trésor.

Le sénateur Bolduc: Avez-vous l'intention de suivre le conseil de la vérificatrice générale au sujet du libellé du crédit 5? D'après Mme Fraser, il a besoin, lui aussi, d'être clarifié. Je pense qu'on a donné à «menues dépenses imprévues», un sens assez vaste.

M. Claydon: Le libellé actuel est plus ou moins le même, à ce que j'ai compris, depuis 1950. Nous pourrions certainement envisager d'en faire l'analyse. J'hésiterais beaucoup à changer quelque chose qui, de façon générale, fonctionne raisonnablement bien. À mon avis, il y a certainement place pour l'amélioration dans la manière dont le crédit 5 est interprété et utilisé en général.

Le sénateur Bolduc: Je peux le comprendre. Le crédit 5 est un article de la loi. Si la ministre décide de le modifier et demande la permission du Parlement, ça va. Je ne reproche rien aux fonctionnaires. Nous ne sommes pas ici pour faire des reproches à quiconque.

La vérificatrice générale suggère que nous examinions la question. Je pense que nous devrions faire une proposition à ce sujet.

Ma deuxième question porte sur les lignes directrices elles-mêmes. Je ne répéterai pas ce que j'ai dit la semaine dernière. C'est au compte rendu, et M. Neville a affirmé qu'il s'en occuperait. Malheureusement, j'avais oublié un élément. C'est au sujet de la ligne directrice no 8, qui n'est pas approuvée par les ministres, mais à ce que j'ai compris, le personnel s'en sert.

[Français]

Il doit exister un bénéficiaire valable et légalement constitué auquel la subvention doit être versée.

[Traduction]

J'ajouterai que, d'après les règles liées aux subventions, il faut un bénéficiaire — autrement, nous ne faisons pas la distinction entre le pouvoir législatif et le pouvoir de dépenser, la distinction qu'a faite la vérificatrice générale. J'aimerais connaître votre avis là-dessus.

M. Neville: Une autre bonne suggestion du sénateur. Nous ne manquerons pas d'y réfléchir. S'il veut bien être consulté en dehors de ce comité, peut-être voudra-t-il examiner cela.

Le président: Nous vous offrons ses services.

Le sénateur Cools: J'ai deux ou trois questions. Avant de les poser, j'aimerais m'assurer de bien comprendre la 8e ligne directrice. Il y en a quatre, et quatre autres que, je suppose, vous appelez des «directives». Celle dont vous parlez, me semble-t-il, est appelée «no 7». Vous parliez de l'aspect d'urgence.

Est-ce que j'ai bien compris que le sens du terme «urgence» dans cette ligne directrice particulière, directive ou instruction, quel que soit le nom que vous lui donniez, n'est pas le même que «emergency» en Anglais, comme une catastrophe naturelle, par exemple? L'urgence, dans ce cas, est un besoin pressant de politique publique ou un besoin politique pressant du gouvernement.

Je voulais seulement le dire aux fins du compte rendu pour qu'on ne confonde pas l'urgence avec une nécessité impérieuse. C'est que le gouvernement a un pressant besoin d'agir. Autrement dit, c'est un besoin pressant de politique publique.

M. Claydon: Oui.

Le sénateur Cools: Je voulais mettre cela au clair aux fins du compte rendu.

J'aimerais parler du témoignage de la vérificatrice générale, lorsqu'elle est venue ici il y a deux semaines. Elle a, de façon très théâtrale — et j'ajouterais très publique et avec beaucoup d'éloquence — adopté une position qui est en contraste flagrant avec la vôtre au sujet de l'interprétation du libellé du crédit, et en particulier, les termes «menues, diverses et imprévues» qui décrivent le crédit. J'ai été très attentive à la nature de ce désaccord entre le Conseil du Trésor et la vérificatrice générale.

J'ai craint que ce soit un désaccord au niveau de la politique plutôt que de la vérification. J'ai cette impression insinuante et gênante que nous assistons ici à une guerre de tranchée au sujet des compétences.

Je vais vous poser la même question que j'ai posée à la vérificatrice générale. Je lui ai demandé, en fait, dans quelle mesure sa divergence d'opinion avec le Conseil du Trésor et avec vous portait sur le fond de la politique, et dans quelle mesure c'était une question de vérification.

Peut-être, monsieur Neville, pourriez-vous essayer de donner une réponse. J'espère que vous le pourrez, parce que vous êtes déjà venu ici auparavant, et vous m'avez déjà entendu soulever cette préoccupation particulière.

M. Neville: C'est une question très valable, monsieur le président, et je l'apprécie.

De notre point de vue, selon la façon dont est formulé le rapport, c'est un problème de politique et non pas de vérification. Nous avons eu de nombreuses discussions à ce sujet avec des représentants du Bureau du vérificateur général. L'interprétation qui est faite du libellé, de toute évidence, découle d'une perspective de politique, et nous l'avons interprétée autrement.

Je ne crois pas qu'il y ait eu de problème au sujet des résultats de sa vérification. Le rapport de vérification est clair sur ce plan. Nous avons observé les huit lignes directrices que nous étions censés suivre.

Le président: En deux mots, monsieur Neville, pouvez-vous, je vous prie, expliquer la divergence de vues.

M. Neville: C'est que les termes «menues, diverses et imprévues», pour le Bureau du vérificateur général et pour la vérificatrice générale elle-même, signifient un montant restrictif, de loin inférieur au montant total du crédit.

D'un autre côté, le rapport ne mentionne aucun montant. Nous avons demandé à de nombreuses reprises ce que signifie pour eux «menues, diverses et imprévues». Nous n'avons reçu aucune réponse.

À ce que nous avons compris, on nous demandait des éclaircissements. C'est ce que nous nous sommes efforcés de donner. Je le répète, c'est une interprétation d'un point de vue de politique, dans le contexte de ce que serait le montant total du crédit en rapport avec son utilisation, plutôt que l'interprétation que nous ferions de cette utilisation. Cependant, ce n'est pas une interprétation du point de vue de la vérification.

Le sénateur Bolduc: Lorsque vous dites que vous avez répondu, est-ce que c'est ce que nous avons lu dans le plan budgétaire du ministre? Nous avons un plan budgétaire chaque année, et il s'y trouve quelques pages où vous expliquez pourquoi vous avez fait ce que vous avez fait.

M. Neville: Non, c'est tout à fait autre chose, qui sert à d'autres fins.

Le sénateur Cools: Si je pose certaines de ces questions, chers collègues et témoins, c'est parce que la tentative que fait le Bureau du vérificateur général de s'infiltrer dans le courant politique, ce que les universitaires appellent le «courant des conseils» est très troublant et a été remarqué par de nombreux membres et bien d'autres personnes depuis assez longtemps.

Je vais vous donner un exemple. Quand je me préparais pour ce comité, j'ai consulté un compte rendu de délibérations qui date de l'époque où le comité examinait déjà exactement la même question, le crédit 5, en 1988. J'ai trouvé cette citation, extraite du témoignage de Mme Sharon Sutherland, du 28 janvier 1988, dans le fascicule no 21 des délibérations du comité. Ce qu'elle dit est intéressant:

On constate que le vérificateur général a l'idée arrêtée que les vérificateurs devraient examiner les conseils, pour tenir les fonctionnaires responsables. Je pense que la responsabilité ministérielle est peut-être une idée ancienne, mais elle est très importante, et le vérificateur ne devrait pas la rejeter, ou simplement l'écarter.

J'aimerais suggérer à mes collègues que nous invitions Mme Sutherland à revenir devant le comité, parce que quand elle a témoigné ici, il y a quelques années, elle nous a présenté certains de ses ouvrages, dont «The Politics of Audit: The Federal Office of the Auditor General in Comparative Perspective». L'impression que le vérificateur général tente de commander la politique publique et l'opinion publique n'a rien de nouveau.

Puisque je lui ai posé la question, j'ai pensé que je devrais vous la poser, en toute justice, pour vous donner la chance d'y répondre. À ce que je vous entends dire, vous considérez très clairement que le différend porte sur le fond, plutôt que sur des séries de chiffres et la probité, et cetera. Je voulais souligner cela.

Aimeriez-vous approfondir un peu le sujet? Vous n'avez peut-être même pas connu les travaux de Mme Sutherland. Nous avons affaire à une vive concurrence entre le Bureau du vérificateur général et certains segments de la fonction publique, très franchement, pour l'opinion publique, et à mon avis, c'est ce qui en fait un problème politique et de politique publique.

M. Neville: La seule chose que je pourrais ajouter est que la vérificatrice générale n'aime généralement pas commenter les décisions de politique. C'est pourquoi je lui laisserai le loisir d'exprimer ses points de vue.

Le sénateur Cools: J'aimerais parler d'une autre citation de Mme Sutherland, dans le même document, publiée dans une revue intitulée Canadian Public Administration. À la fin de son article, elle déclare:

Il n'en reste pas moins que le système doit être réaligné de manière à ce que seuls ceux qui assument des responsabilités en conséquence du régime électoral assument des pouvoirs politiques de décision. Autrement, le Bureau du vérificateur général provoquera unilatéralement des changements constitutionnels fondamentaux, et notre transmutation en un régime semi-présidentiel frêle dont l'une des principales institutions serait libérée de tout contrôle démocratique. De l'avis de l'auteure, le mandat législatif de notre vérificateur général doit être modifié pour définir une activité plus contrôlée.

Ici, l'auteure dit en fait que le Bureau du vérificateur général devrait s'en tenir à faire des aux vérifications et ne pas toucher aux questions de politique.

Elle poursuit:

Les changements potentiels à la loi pourraient aller de l'adoption à certains mécanismes limitatifs qui sont en place ailleurs à au simple retour, pour le Bureau, d'un rôle de vérification plus traditionnel avec de vastes pouvoirs de compte rendu. S'il n'agit pas, le Canada assistera sans aucun doute à une autre manifestation de l'étrange ambition démesurée de ses vérificateurs d'État.

Ces déclarations viennent d'une universitaire qui a étudié ces questions.

Je suis très consciente du fait que vous ne jouissiez pas des mêmes libertés que, peut-être, la vérificatrice générale pour accaparer, soit l'opinion publique, soit l'attention des médias. On ne peut ignorer que la vérificatrice générale a appliqué une démarche très stratégique dans ses déclarations à la presse, et pour accaparer l'attention des médias.

Avez-vous des commentaires à faire sur ceci, de votre position «d'homme d'argent»? Est-ce que c'est trop vivement politique?

M. Claydon: Il nous est un peu difficile de commenter cela.

Le sénateur Cools: Je n'en doute pas.

M. Claydon: Le seul commentaire que je puisse faire, c'est que quoi que dise la vérificatrice générale, sa fonction est d'examiner les activités du gouvernement et de chercher qu'est-ce qui ne va pas comme ça le devrait. Les mauvaises nouvelles tendent à avoir plus d'attention des médias que les dix plus grandes réalisations de la même journée.

Il y a une certaine inévitabilité, dans le genre d'attention que reçoit la vérificatrice générale des médias. Je ne voudrais pas commenter son rôle en général. C'est de toute évidence au gouvernement d'y voir s'il pense qu'il devrait y avoir des changements.

Le sénateur Cools: Je me suis intéressée à certains aspects du sujet. Il ne fait aucun doute que la vérificatrice générale est au service de la Chambre des communes. Cependant, elle n'est pas au service du Sénat. Les rapports qu'entretient la vérificatrice générale avec le Sénat sont tout à fait différents de ceux qu'elle a avec la Chambre des communes. La vérificatrice générale est «l'employée de la Chambre des communes» pour ainsi dire. J'ai tendance à observer ce rôle du point de vue du Sénat.

Le président: De quand date l'article?

Le sénateur Cools: J'essaierai d'en obtenir une copie. Je lisais l'avant-dernière page.

Le président: Est-ce que c'est 1986?

Le sénateur Cools: Elle a publié de nombreux articles sur le sujet. Son témoignage devant le comité serait très utile pour tirer au clair ces vastes questions.

Le sénateur Stratton: Bienvenue, messieurs. Pour une présentation de trois pages, c'était clair et concis. Je vous en remercie.

La seule chose qui manque à la page 3, c'est le délai que vous prévoyez. Vous avez dit dans l'avant-dernier paragraphe que vous aviez l'intention d'entreprendre un examen complet des lignes directrices existantes.

M. Claydon: Nous avons déjà commencé. Nous allons avancer rapidement. Comme c'est M. Neville qui va faire tout le travail, peut-être devrais-je le laisser répondre à votre question.

Je n'ai pas l'impression qu'il faudra des années. Je m'attends à ce que cela prenne environ six mois.

M. Neville: Nous sommes sur la même longueur d'ondes. Nous allons nous efforcer de terminer cet examen d'ici à l'automne, pour en présenter les résultats aux ministres du Conseil du Trésor aux fins de ratification immédiate.

Le sénateur Stratton: Est-ce que nous le saurons? Comment en serons-nous informés? Si nous mettons la question dans le rapport, peut-être pouvons-nous espérer en avoir des nouvelles.

M. Neville: C'est sûr. Une fois que les ministres du Conseil du Trésor ont pris une décision, nous diffusons l'information. Cela comprend le comité.

Le sénateur Stratton: J'aimerais parler du document d'information qui a été préparé en avril. Je voudrais passer au quatrième onglet, la section qui nous a été envoyée par le «secrétariat de la gestion des dépenses». Je ne sais pas ce que cela veut dire.

M. Neville: Le Conseil du Trésor a un service qui s'appelle le «secteur des stratégies de dépenses et de gestion».

Le sénateur Stratton: On y trouve une description du crédit 5. Je m'intéresse à la comparaison de votre système avec ceux du Royaume-Uni et de l'Ontario. On voit clairement que dans le système britannique, le crédit pour éventualités a un budget nettement supérieur.

Le secrétariat de la gestion des dépenses dit, à la page 7, ce qui suit:

b) pour les nouveaux programmes, le libellé du crédit pour éventualités (c'est-à-dire diverses menues dépenses imprévues) interdit spécifiquement le recours à ce crédit pour le financement de nouvelles initiatives d'envergure.

Comment interprétez-vous cela? À mon humble avis, c'est le financement des fondations dans la mesure où elles devaient faire de gros investissements.

Est-ce qu'elles étaient financées avec le crédit 5? Pouvez-vous me donner une définition plus claire de ce que signifie la phrase «interdit spécifiquement le recours au crédit pour le financement de nouvelles initiatives d'envergure»?

M. Neville: Nous n'avons pas accès à ce document d'information.

Le sénateur Stratton: Je vous comprends.

Le président: Je pense que vous y avez accès.

M. Neville: Non, nous n'avons pas accès à vos documents d'information. Nous ne les avons pas ici.

Le président: Nous les avons remis à vos collaborateurs.

Le sénateur Stratton: Monsieur Neville, si vous ne pouvez pas répondre maintenant, pourriez-vous examiner cela et me faire parvenir une réponse? Cette phrase semble assez bizarre parce que d'après nous, c'est exactement ce qui est arrivé.

M. Neville: J'aimerais examiner cela dans le contexte où cette phrase a été rédigée et mieux la comprendre avant de donner une réponse.

Le sénateur Stratton: Je peux le comprendre. Vous nous ferez parvenir une réponse, je sais.

M. Neville: Merci, monsieur le président. Nous n'y manquerons pas.

Le sénateur Tunney: Bienvenue, messieurs. Je trouve tout cela fascinant, et plus j'en entends, plus je suis fasciné.

J'ai un peu de difficulté, comme d'autres sénateurs, je crois, à comprendre cette limite de 750 millions de dollars. Est- ce un montant cumulatif, et 750 millions de dollars seraient la limite?

Si une partie de ce montant est remboursée, est-ce que cela réduit le montant qui reste pour revenir à ce total de 750 millions de dollars, où est-ce les 750 millions de dollars sont un chiffre annualisé? J'aimerais comprendre cela un peu mieux.

M. Claydon: Je vais essayer de vous l'expliquer et M. Neville me reprendra si je me trompe.

C'est un montant de 750 millions de dollars qui a été fixé et qui correspond au plafond du crédit 5 du Budget principal des dépenses. Entre le Budget principal et le premier Budget supplémentaire, on peut faire divers retraits du crédit 5.

À l'occasion du premier Budget supplémentaire, il est possible, en fait, de rembourser le crédit 5. Une partie peut être remboursée et l'autre non. Le crédit 5 remonte alors légèrement, si bien qu'il y a plus d'argent disponible que s'il n'y avait aucun remboursement du budget supplémentaire.

Après le premier Budget supplémentaire, la même chose pourrait se produire de nouveau. On pourrait continuer à faire des retraits du crédit 5. Ce crédit pourrait être renfloué à nouveau, dans une certaine mesure, grâce au deuxième Budget supplémentaire.

Un plafond est fixé étant donné qu'on ne peut jamais le dépasser. C'est un plafond général annuel, car on ne peut rien faire de plus que renflouer ce crédit au moment de chaque Budget supplémentaire. En d'autres termes, on pourrait dépenser plus de 750 millions de dollars en l'espace d'une année.

Le sénateur Tunney: Cela fonctionne-t-il comme la marge de crédit que j'ai à ma banque? Si je rembourse une partie du prêt et que j'ai besoin d'un crédit supplémentaire, je peux emprunter davantage, sans toutefois dépasser mon plafond de crédit.

M. Claydon: Exactement. Par ailleurs, vous ne pouvez rembourser cette marge de crédit qu'une ou deux fois par an, et non pas chaque fois que vous le souhaitez. Dans le cas qui nous intéresse, c'est seulement lorsque le Budget supplémentaire est annoncé.

Le sénateur Tunney: J'ai un peu de mal à comprendre la valeur de 750 millions de dollars. J'imagine qu'il y a 20 ans, 750 millions de dollars avaient sans doute plus de valeur qu'aujourd'hui. Ce plafond a-t-il été relevé, puisque la valeur de notre dollar est moindre et que le besoin de fonds est plus grand qu'il y a 20 ans?

M. Claydon: Le plafond a été relevé au fil des ans. J'imagine que M. Neville peut vous dire exactement de combien il a été relevé et en l'espace de combien de temps. Il s'agissait de 300 ou 400 millions de dollars il y a 20 ans et aujourd'hui, il s'agit de 750 millions de dollars. Je suis sûr que nous pouvons vous donner un chiffre exact.

Le sénateur Tunney: Je n'en ai pas vraiment besoin. Ce qui m'intéresse, c'est la pratique.

M. Claydon: Le plafond a été relevé dans une certaine mesure.

M. Neville: En 1974-1975, le crédit 5 représentait 90 millions de dollars; en 1975-1976, 120 millions; en 1976-1977, 140 millions; en 1977-1978, 360 millions. Par conséquent, il a augmenté au fil du temps.

Le président: Cela correspond-il en gros à l'augmentation du Budget principal des dépenses?

M. Claydon: Oui, plus ou moins.

Le sénateur Tunney: Je suis fasciné par le pouvoir discrétionnaire, le jugement exercé, les restrictions et la tendance que l'on a à faire peu de cas des restrictions, entre le cabinet et le Secrétariat du Conseil du Trésor. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?

M. Claydon: Je ne suis pas sûr de comprendre la question.

Le sénateur Tunney: Je parle de jugement et de restrictions, ou de l'absence de restrictions, et donc de la légitimité du projet. Une demande peut-elle être rejetée en raison de son mérite et également du montant qu'elle représente?

M. Claydon: Normalement, tout projet soumis à l'approbation du Conseil du Trésor doit passer par le processus du comité du cabinet pour décider s'il en vaut la peine.

Le Conseil du Trésor examine alors scrupuleusement les conditions du programme et les ressources demandées pour s'assurer que le ministère ne demande pas trop ou trop peu. Parfois, les ministères essayent d'offrir des programmes à peu de frais ce qui ne cadre pas non plus avec des principes de bon gouvernement.

L'analyse de la demande porte également sur les exigences linguistiques ainsi que sur diverses politiques en matière de ressources humaines. Une fois cela terminé, le programme est présenté au Conseil du Trésor où les ministres en font un examen complet qui englobe la provenance des fonds et le recours au crédit 5.

Le sénateur Setlakwe: Bienvenue, messieurs. Je remplace un membre de ce comité car habituellement, je siège au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.

Les mots «diverses menues dépenses imprévues»m'ont semblé à première vue plutôt désinvoltes et frivoles. Toutefois, ce que vous avez dit m'a rassuré, surtout lorsque vous avez indiqué qu'il faut justifier clairement la demande, qui par ailleurs, doit comporter un élément d'urgence.

Compte tenu de ce que vous avez dit, le montant lui-même ne me préoccupe pas. Sur le budget total du gouvernement, 750 millions de dollars n'ont pas l'air de représenter une somme extraordinaire. Toutefois, le Secrétariat du Conseil du Trésor a-t-il déjà recommandé que l'on n'ait pas accès au crédit 5?

M. Claydon: Comme je l'ai dit un peu plus tôt, nous essayons d'aplanir nos différences avec les ministères au niveau des hauts fonctionnaires, pour ne pas avoir à recommander au Conseil du Trésor de ne pas approuver une demande. Il est rare qu'un ministère dise avoir absolument besoin des fonds immédiatement et que le Conseil du Trésor réponde qu'il doit attendre le prochain Budget supplémentaire. Nous avons tendance à trouver un terrain d'entente au préalable.

Dans la plupart des cas, lorsque les fonctionnaires du Conseil du Trésor disent que les arguments présentés ne leur semblent pas convaincants, les ministères l'admettent.

Peut-être que M. Neville pourrait vous donner quelques exemples.

M. Neville: J'ai en effet quelques exemples. Le Conseil du Trésor a recommandé le rejet d'une demande ministérielle examinée par les ministres du Conseil du Trésor. Vous le comprenez, il s'agit d'un comité du cabinet et, par conséquent, je ne peux vous en révéler davantage, mais cela s'est déjà produit.

Le sénateur Setlakwe: Vous faites votre travail.

M. Neville: C'est ce que nous croyons, monsieur le président.

Le sénateur Callbeck: Bienvenue, messieurs, et merci d'être ici ce soir.

Je ne suis pas membre de ce comité non plus. Je vois dans la documentation que vous avez fournie que des critères ont été établis et approuvés par le Conseil du Trésor en 1989 et que depuis, d'autres critères ont été ajoutés. Pourquoi?

M. Claydon: Certains des critères ont été ajoutés par suite de préoccupations exprimées par la vérificatrice générale, entre autres. Nous avons réagi en faisant tout ce qui s'imposait pour que le Secrétariat du Conseil du Trésor soit aussi exigeant que possible à l'égard des ministères. Plusieurs critères ont été ajoutés pour clarifier ce qui est prévu.

Comme nous l'avons dit, nous allons faire un autre examen, présenter au Conseil du Trésor l'ensemble des critères et demander qu'il approuve une nouvelle politique.

Le sénateur Callbeck: Autrement dit, c'est à cause des observations de la vérificatrice générale que ces nouveaux critères ont été ajoutés?

M. Neville: Je dirais que c'est une combinaison de plusieurs facteurs, comme les observations de la vérificatrice générale, des commentaires particuliers faits par des collègues d'organismes centraux, sans compter la contribution des analystes qui travaillent sur ces demandes et qui demandent des précisions. C'est pour cela que nous avons élargi les lignes directrices.

Le sénateur Callbeck: Dans votre mémoire, vous indiquez qu'en 2001-2002, le Budget supplémentaire renfermait 87 postes de subvention, dont 17, représentant près de 20 p. 100, pouvaient avoir accès au crédit 5. Retrouve-t-on en général cette proportion de 20 p. 100 les autres années?

M. David Bickerton, directeur exécutif, Division des opérations et prévisions des dépenses, Direction de la fonction de contrôleur, Secrétariat du Conseil du Trésor: Je crois que cela varie d'une année à l'autre. Je ne pourrais pas vous donner de réponse aujourd'hui. Le nombre est généralement peu élevé. Comme l'a dit le secrétaire, il est habituellement exceptionnel que les ministères aient accès au crédit 5; ce n'est donc pas la norme.

Le président: Vous ne voulez pas dire, monsieur Claydon, que dans le cas de 87 de ces postes, on a effectivement cherché à avoir accès au crédit 5?

M. Claydon: Non, loin de là. Il est peut-être utile d'expliquer également que dans leur grande majorité, les subventions sont en fait autorisées par le truchement du Budget principal des dépenses. C'est juste ces 87 postes qui ont été prévus dans le Budget supplémentaire. Les 17 postes en question représentent un très faible pourcentage de l'ensemble des subventions approuvées au cours de l'année.

Le sénateur Callbeck: Que donnerait environ, en dollars, cette somme de 17?

M. Bickerton: À ce moment-ci, je ne suis pas certain du montant exact. Le montant total prévu pour les subventions dans le Budget supplémentaire des dépenses était d'environ 220 millions de dollars. Évidemment, comme le comité le sait, le plus important poste était l'aide fournie à l'industrie du transport aérien suite aux événements du 11 septembre.

Le sénateur Cools: Le chapitre 8 du rapport de la vérificatrice générale en a long à dire. Je me demandais si ces messieurs auraient des observations pour nous. Par exemple, à la page 35, dans les conclusions, à la conclusion 8.112, pour ceux qui ont le document sous les yeux, c'est une recommandation au Comité sénatorial permanent des finances nationales et aussi au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes. C'est la première fois que je vois une recommandation de la vérificatrice générale à l'intention d'un comité sénatorial. Je trouve que c'est extrêmement inhabituel et insolite. Je reviens encore une fois à ce que je disais auparavant. La vérificatrice générale n'est pas au service du Sénat. Je me doute bien que vous avez lu un bien plus grand nombre de rapports du vérificateur général que moi. Je me demande si c'est inhabituel, ou si c'est seulement moi qui ai cette impression. Avez-vous déjà vu cela?

M. Neville: Je ne me rappelle pas d'avoir vu ce genre de recommandation dans les rapports que j'ai eu l'occasion de lire.

Le président: Au sujet du Sénat?

M. Neville: Exact.

Le président: Il y a des précédents pour ce qui est de faire des recommandations à la Chambre des communes dans les rapports.

Le sénateur Cools: Cela ne me surprend pas. Je ne m'inquiète pas de la relation avec la Chambre des communes. Ce qui me préoccupe, c'est la relation avec le Sénat. À l'intention de ceux qui la liront, je vais la consigner au compte rendu.

8.112 Recommandation. Étant donné l'évolution du recours au crédit 5, le Parlement, par l'intermédiaire du Comité sénatorial permanent des finances nationales et du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, voudra peut-être envisager d'examiner le libellé du crédit pour éventualités du gouvernement afin de s'assurer que l'utilisation de ce crédit pour le versement de subventions est bien conforme à l'intention du Parlement.

Je trouve cela très exigeant, et exigeant d'attention. De fait, je dirais que cette recommandation à elle seule mérite étude, car elle est certainement inhabituelle. La recommandation se poursuit, et dit quelque chose que je trouve encore plus extraordinaire. Encore une fois, nous sommes à la page 35 du chapitre 8.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait répondre à la recommandation des comités en suivant la procédure parlementaire.

Étant donné que cette recommandation particulière vous mentionne très clairement, avez-vous des observations à ce sujet? Je crois comprendre que vous êtes constamment en train de réviser les choses et de répondre à de nombreuses préoccupations. Pourriez-vous me dire si vous avez déjà vu dans une recommandation une déclaration selon laquelle vous devriez répondre? En outre, s'il s'agit véritablement d'un précédent, qu'en pensez-vous?

M. Claydon: Il existe une procédure pour que le gouvernement réponde à toutes les recommandations provenant des comités. Je peux vous dire que le Conseil du Trésor assume cette responsabilité avec une extrême rigueur. Une de nos principales préoccupations est de faire en sorte que nous répondions de la façon appropriée à ce que les comités disent au gouvernement. Dans un sens, nous avons un mandat à cet effet. Nous sommes tenus de le faire. Le fait de nous demander de nouveau de le faire n'est probablement pas nécessaire.

Cette observation de la vérificatrice générale a peut-être un autre but. De prime abord, je dirais que je ne pense pas que nous n'ayons jamais répondu à une recommandation d'un comité. Je serais très surpris que nous le ne fassions pas à l'avenir.

Le sénateur Cools: Étant un peu attachée aux traditions, je crois fermement dans la responsabilité ministérielle. Il me semble que ce sont les ministres qui répondent aux comités sénatoriaux et à leurs recommandations. J'étais très curieuse. Je trouve que cette recommandation est une bizarrerie constitutionnelle, car la vérificatrice générale relève de la Chambre des communes. Et voilà qu'elle dit que le Conseil du Trésor, qui est un rassemblement d'un grand nombre de ministères, devrait répondre aux recommandations des comités. Aurait-elle dit, par exemple, que le président du Conseil du Trésor devrait répondre au comité sénatorial? J'en doute beaucoup. Le caractère inhabituel de la chose m'échappe, à moins de lire avec plus d'attention. C'est très certainement une bizarrerie constitutionnelle.

M. Claydon: Je devrais peut-être préciser un peu plus.

Le sénateur Cools: Je l'apprécierais. Il serait préférable de poser ces questions à vos ministres ou à la présidente. Cependant, elle n'a pas dit que la présidente du Conseil du Trésor devrait répondre ou qu'un ministre devrait répondre, elle a dit que le Secrétariat devrait répondre. Je suis tout à fait à l'intérieur des limites de la probité en vous demandant de réagir à cela.

M. Claydon: En fait, c'est le gouvernement dans son ensemble qui répond aux comités parlementaires, et non pas un ministre en particulier, certainement pas un fonctionnaire ou un ministère. Toutes les réponses aux comités passent par le Cabinet et sont approuvées par celui-ci.

Le sénateur Cools: Précisément j'espère que quelqu'un d'autre donnera un suivi à cette question. Il y a toutes ces «bizarreries constitutionnelles», c'est ainsi que je les appelle, ici et là.

J'aimerais que le comité continue d'examiner la nature particulière de cette recommandation. Voici une autre bizarrerie parue dans un article tiré du Hill Times du lundi 29 avril 2002, à la page 24 — «Bureaucrats». Le grand titre se lisait comme suit: «La reddition de comptes du gouvernement fédéral, un sujet brûlant», et le sous-titre se lisait: «La vérificatrice générale, Sheila Fraser, loue le travail du puissant Comité des finances du Sénat, à majorité libérale». Bill Curry a rédigé l'article pour «Civil Circles». Je cite:

Mais la mauvaise utilisation par le gouvernement des fonds pour éventualités de 750 millions de dollars constituait un élément important du récent rapport de Mme Fraser, et elle a dit à Civil Circles après la réunion de la semaine dernière que c'était le travail des sénateurs au sein du comité qui l'avait incitée à examiner plus à fond la question.

Je ne fais que relever ce que je considère un ensemble d'anomalies parlementaires, presque, et de bizarreries constitutionnelles. Je ne sais pas à qui il faudrait poser ces questions.

Le président: Le ministre sera ici pour le Budget des dépenses principal.

Le sénateur Cools: Ce sont les déclarations de Mme Fraser. Je relève les curiosités constitutionnelles.

Le président: Nous accueillons la vérificatrice générale de temps à autre.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth: J'aimerais savoir si le secrétaire du Conseil du Trésor peut dépenser plus d'un million de dollars dans des programmes sans demander l'autorisation du Parlement?

M. Neville: Ce n'est pas une question de chiffre, mais une question de principe. Tel que cela a déjà été exprimé à quelques reprises, le montant global du crédit est le montant qu'on pourrait dépenser, si cela était nécessaire, en raison de la soumission et de la façon que cela est présenté, et selon l'analyse qui en est faite. Il n'est pas question de montant spécifique, tel que vous l'avez suggéré.

Le sénateur Ferretti Barth: J'ai compris cela. Mais je sais que le gouvernement peut dépenser de l'argent pour des situations imprévues avant de demander la permission au Parlement. Est-ce vrai?

M. Neville: Non. Lorsqu'on reçoit une soumission, on s'assure toujours que le programme existe dans le contexte d'une loi législative et, à partir de cette analyse, on passe au processus de vérification et de détermination pour savoir s'il est possible d'accepter cette soumission comme une charge contre le crédit 5.

Le sénateur Ferretti Barth: La soumission est acceptée par le Parlement après que l'argent est accordé au gouvernement pour faire face à des éventualités, non?

M. Neville: Soit que l'éventualité a déjà eu lieu ou aura lieu. Dans ce contexte, il faut examiner chaque soumission pour connaître la façon dont le ministère a présenté la soumission. On ne peut pas généraliser dans ce contexte, il faut examiner chaque soumission, cas par cas.

[Traduction]

Le président: Le sénateur Cools faisait remarquer plus tôt que ce qui est urgent n'est pas nécessairement une urgence. Que ce que l'on examine est une raison de politique publique urgente. Je crois que ce sont là les mots que le sénateur a utilisés. J'espère seulement qu'elle ne laissait pas entendre, et que vous n'avalisiez pas, que la question d'urgence est une notion tout à fait subjective. Il ne suffit pas, je suppose, pour un ministre, un sous-ministre ou quiconque de se présenter devant le Secrétariat et de dire: «Ç'est urgent», pour qu'on l'examine aussitôt. Je suis convaincu que vous allez nous dire que le Secrétariat applique une analyse et des critères objectifs pour commencer à la déclaration d'urgence.

M. Claydon: Je pense que c'est évident. Tout simplement parce qu'un sous-ministre ou un ministre dit que quelque chose est urgent n'est pas motif suffisant pour que nous l'acceptions comme tel. Il faut que ce soit quelque chose d'un niveau élevé d'urgence pour l'ensemble du gouvernement.

Le président: J'ai posé cette question la semaine dernière et je croyais avoir compris la réponse. Je vais la poser de nouveau car il y a un peu d'ambiguïté ce soir. La vérificatrice générale établit une distinction entre le pouvoir législatif et le pouvoir de dépenser. Acceptez-vous qu'il doive y avoir une distinction? Je pensais que la semaine dernière on avait répondu par la négative, soit M. Neville, soit M. Bickerton, ou les deux.

M. Claydon: Je vais essayer de clarifier la situation pour vous. Il existe un pouvoir législatif clair pour une activité qui doit être exécutée en vertu du crédit 5. Il y a une différence d'opinion entre la vérificatrice générale et nous-mêmes, en ce sens que la vérificatrice générale aimerait voir non seulement le pouvoir législatif, mais aussi un ensemble plus détaillé de critères de programmes prévus par la loi avant que nous donnions accès au crédit 5. Je ne suis pas convaincu qu'il s'agisse d'une distinction nette. C'est plus une question de zone grise. Une mesure législative est relativement claire au sujet de l'intention du programme, en ce sens qu'il s'agit d'une ligne qui explique certaines activités à effectuer. Nous vérifions qu'il y a pouvoir législatif concernant l'activité entreprise. Il y a uniformité entre ce que nous faisons et ce que fait la vérificatrice générale, mais elle cherche à avoir plus de certitude que nous.

Le président: Vous pouvez faire des observations sur ce point. Dans son rapport, la vérificatrice générale traite des subventions accordées aux sociétés aériennes concernant leurs difficultés financières après le 11 septembre. Mme Fraser dit que de toute évidence ce n'était pas prévu et elle pourrait même convenir que c'était urgent, mais elle mentionne des précédents. Il y a eu une crise dans le secteur agricole il y a quelques années, et le gouvernement s'est présenté devant le Parlement et a dit: «Voici un projet de loi de crédits; voici le montant dont nous avons besoin»; la Chambre des communes l'a adopté; le sénat l'a adopté; il a reçu l'assentiment royal et les chèques ont été faits. Même cela semble un peu rapide en fait de délibérations parlementaires, mais vous voyez ce que veut dire Mme Fraser. J'espère que vous voyez ce que je veux dire, quoi qu'il en soit. Si ce processus avait été suivi dans le cas des subventions aux sociétés aériennes, nous, les députés et les sénateurs, aurions eu une occasion de demander au ministre: «Comment en êtes-vous arrivé à ce chiffre? Quels sont les critères? Que vous ont dit les sociétés aériennes sur la façon dont elles sont arrivées à ces chiffres?» — et de nombreuses autres questions au sujet de la situation des sociétés aériennes après le 11 septembre.

Nous n'avons cette occasion que plus tard, lorsqu'on a recours au crédit 5. Il y a peut-être une réponse, car j'ai vu M. Neville vous consulter de toute urgence. Je vous prie de le consigner au compte rendu. C'est important qu'il en soit ainsi.

Le sénateur Cools: Je poursuivrais à ce sujet car je pense que la plupart d'entre nous peuvent accepter que le gouvernement ait eu un problème et que le ministre ait eu un problème et ait eu besoin d'argent. Pourtant, en même temps, en évaluant le montant et la façon de procéder, il me semble que la vérificatrice générale ait dit que ce n'est pas quelque chose de mineur. C'est son opinion; ce n'était pas mineur, divers et imprévu. Si on voyait ce qui se passe à l'intérieur de la personne qui dirige le secrétariat et aussi du ministre, il serait évident que le ministre lui-même n'était pas certain de toute l'ampleur des dommages, et qu'il ne savait pas s'il devrait revenir pour demander encore plus d'argent. À ce moment-là, le ministre aurait eu à prendre une décision, à savoir présenter un projet de loi ou agir de cette façon. Je crois comprendre que le ministre n'était pas tout à fait certain s'il aurait besoin d'un seul projet de loi ou s'il devrait revenir et présenter de nombreux projets de loi. Il a décidé de procéder ainsi.

Le président: Le Parlement peut être très conciliant dans des situations comme celle-là.

Donnons maintenant le mot de la fin aux fonctionnaires.

Le sénateur Cools: C'est une question politique, et peut-être que même le ministre pourrait comparaître devant nous pour nous expliquer, car il aurait été préférable pour lui sur le plan politique de procéder par projet de loi. Je pense que le Parlement aurait fait preuve de compréhension. Cependant, c'est sans importance.

J'essayais de dire qu'un certain nombre de ces problèmes tournent autour de la façon dont ces personnes prennent ces décisions très politisées. C'est un problème politique et vous ne pouvez pas y répondre.

Le président: Nous allons donner le dernier mot au secrétaire du Conseil du Trésor sortant.

M. Claydon: J'ai une observation. J'étais au ministère de l'Agriculture en 1986, ou peu importe l'année où ces fonds ont été approuvés. Le montant d'argent nécessaire était très près du montant total disponible dans le crédit 5. Une des raisons pour se présenter devant le Parlement et demander son autorisation, c'était qu'il s'agissait d'un montant que l'on ne pouvait pas obtenir par le biais du crédit 5.

Le président: Vous y auriez eu recours si vous aviez pu le faire.

M. Claydon: Je n'irais pas jusque là.

Le président: Merci beaucoup. Nous vous en savons gré. Monsieur Claydon, nous vous souhaitons tout le succès possible dans vos prochaines entreprises.

La séance est levée.


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