Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches
Fascicule 11 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 30 octobre 2001
Le Comité sénatorial permanent des pêches se réunit aujourd'hui à 19 h 08 pour examiner certaines questions relatives à l'industrie des pêches.
Le sénateur Gerald J. Comeau (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Ce soir, nous poursuivons l'examen de certaines questions relatives à l'industrie des pêches.
Avant de vous présenter nos témoins de ce soir, je vous signale qu'en 2000-2001, le comité a tenu plusieurs réunions informelles afin de permettre à ses membres de se familiariser davantage avec la pêche en eau douce et les pêches du Nord. Sur le plan géographique, la zone étudiée correspond grosso modo à la région du Centre et de l'Arctique - une des six régions administratives du ministère des Pêches. Cette vaste région englobe 65 p. 100 environ des eaux canadiennes et 67 p. 100 des eaux douces du pays. Elle présente une certaine diversité sur le plan des conditions climatiques ainsi qu'en ce qui concerne les espèces de poissons, leur habitat et leur activité. La Région du Centre et de l'Arctique comprend un certain nombre de provinces et de territoires: la Saskatchewan, l'Alberta, le Manitoba, le Nunavut, les Territoires du Nord-Ouest, le Versant nord du Yukon et l'Ontario.
En mai 2000, un groupe de travail du comité a rencontré des représentants de l'Institut des eaux douces à Winnipeg pour se renseigner sur les activités et les programmes du ministère. Parmi les sujets abordés figuraient l'état des stocks de poisson d'eau douce, l'habitat du poisson, le changement climatique, la pollution locale et transfrontalière, les activités de la Garde côtière, les ports pour petits bateaux, l'hydrographie, l'évaluation des stocks de poisson et la recherche, y compris les travaux entrepris dans la région des lacs expérimentaux dans le nord-ouest de l'Ontario, l'activité des océans et les espèces exotiques, pour n'en citer que quelques-uns.
Cette séance a été très intéressante et très instructive. En fait, à la suite en partie des discussions que nous avons eues avec vous sur les pêches et les sciences de l'Arctique, nous avons décidé de rendre visite aux intervenants du Nord au Nunavut et dans les Territoires de Nord-Ouest en juillet 2000.
Je vous souhaite la bienvenue au comité ce soir. Nous avons des témoins de Burlington, de Winnipeg, de Calgary et d'Ottawa. C'est la première fois que nous avons, dans une même réunion, des témoins venant de quatre endroits différents. Ne nous en voulez pas si nous nous perdons un peu dans la technique pendant notre discussion.
Pour le compte rendu, il est nécessaire de savoir qui intervient. Je demanderai donc aussi bien à mes collègues qu'aux témoins de bien vouloir s'identifier chaque fois qu'ils prendront la parole. La rédaction du compte rendu s'en trouvera facilitée, et je suis sûr que cela fera plaisir à nos sténographes.
Je vais maintenant laisser M. Redmond Clarke, directeur régional de l'Habitat au ministère des Pêches et des Océans, vous présenter le sujet.
M. John Cooley, directeur régional des Sciences, ministère des Pêches et des Océans: Je suis très heureux de vous parler aujourd'hui de certains des travaux que les scientifiques effectuent dans notre région. Je vais compléter les renseignements qui vous ont été donnés au cours de votre visite à l'Institut des eaux douces à Winnipeg au mois de mai de l'an dernier.
J'ai ce soir avec moi un certain nombre de collègues: M. Clarke, directeur régional, Habitat, Gestion des pêches et des océans; M. Mike Papst, chef de division, Recherche sur l'Arctique; M. Terry Shortt, chef de division, Sciences de l'environnement; et M. Robert Fudge, coordinateur du Programme des sciences, qui viennent tous de Winnipeg. Il y a aussi M. Garry Linsey, directeur du secteur des Prairies, qui est de Calgary. Avec vous à Ottawa se trouve M. Martin Bergmann, directeur, Développement du programme des sciences de l'Arctique.
Je vais faire quelques commentaires, puis j'inviterai M. Clarke à faire quelques observations sur les rôles et les responsabilités du gouvernement fédéral et des provinces en matière de gestion des pêcheries et d'habitat du poisson dans les Prairies. Nous répondrons ensuite avec plaisir à toutes questions que vous pourriez avoir.
La mission d'ensemble du MPO sur le plan scientifique est de fournir des renseignements scientifiques opportuns et fiables pour aider à la conservation, à la gestion et à l'utilisation durable des ressources halieutiques de la région, ainsi qu'à la protection et à la conservation de l'habitat aquatique. Je sais que cela fait beaucoup et a un caractère un peu formel, mais nous essayons de conserver et de protéger le poisson et l'habitat du poisson. Veuillez noter qu'il s'agit de quelque chose qui n'entre pas dans les responsabilités provinciales.
Dans notre région, la plus grande partie de notre travail se fait dans le cadre d'activités qui se déroulent dans deux grands centres de recherche: l'Institut des eaux douces, à Winnipeg, que certains d'entre vous ont visité l'an dernier, et l'Institut Bayfield, le Centre canadien des eaux intérieures, à Burlington, où je me trouve ce soir.
C'est dans ces deux instituts que travaillent la quasi-totalité des plus de 200 scientifiques de la région. Notre Programme de lutte contre la lamproie marine, dont je parlerai un peu plus tard, est à Sault Ste. Marie.
Nos programmes scientifiques sont aussi variés que la vaste région dans laquelle nous travaillons. La Région du Centre et de l'Arctique comprend l'Ontario, les trois provinces des Prairies, le Nunavut, les Territoires du Nord-Ouest et le Versant nord du Yukon.
Ce secteur représente les deux tiers environ de la masse continentale du Canada ainsi que les trois quarts du littoral canadien, et il renferme près de 20 p. 100 des eaux douces du monde.
J'aimerais vous parler, dans leurs grandes lignes, des activités de quatre de nos unités de recherche qui relèvent, d'après ce que je comprends, du domaine sur lequel porteront nos discussions d'aujourd'hui. Notre Division de recherche sur l'Arctique, qui est située à l'IED à Winnipeg, comprend quelque 40 employés à temps plein. Nous cherchons à déterminer la taille et l'état de santé de certains stocks de poissons et de mammifères marins. Ces renseignements servent à fixer pour les prises des limites qui assureront la durabilité des pêches. Nous ne travaillons pas seuls. Un système unique de cogestion est utilisé pour les poissons et les mammifères marins de l'Arctique. La cogestion est un processus conjoint qui réunit les utilisateurs des ressources locales et les organismes gouvernementaux afin qu'ils puissent partager la responsabilité de la gestion des ressources locales ou régionales. Il importe de noter que, dans nos décisions de gestion, nous tenons compte des «connaissances écologiques traditionnelles» des collectivités autochtones du Canada.
Notre recherche dans l'Arctique met fortement l'accent sur la création et la mise en oeuvre d'une méthodologie améliorée et nouvelle en matière de gestion des stocks. Par exemple, nous utilisons des profils d'ADN pour déterminer les stocks homogènes d'animaux et nous avons recours à des plaques de repérage par satellite pour suivre les mouvements de certains animaux, comme les baleines.
Ce qui préoccupe particulièrement les collectivités autochtones du Canada, c'est la présence de niveaux inacceptables de contaminants dans des animaux qui pourraient être pris et mangés. Souvent, ces contaminants viennent de pays étrangers et entrent dans l'écosystème canadien à la suite d'un long voyage dans l'atmosphère.
Nous travaillons en étroite collaboration avec d'autres ministères fédéraux, comme Santé Canada, Affaires indiennes et du Nord Canada et Environnement Canada, ainsi qu'avec les collectivités autochtones pour interpréter les résultats que nous obtenons. Dans la plupart des cas, nous travaillons en partenariat avec d'autres groupes. Nous estimons que la mise en commun des ressources à la fois humaines et financières constitue une façon efficace d'aborder notre travail. C'est ainsi que nous procédons quand nous le pouvons dans tous nos programmes, qu'ils concernent l'Arctique ou le port de Hamilton.
Travailler dans l'Arctique présente de nombreux défis pour nos chercheurs. Souvent, il est difficile et onéreux d'accéder aux sites d'étude du fait de leur éloignement et de l'absence d'infrastructures, telles que routes et aéroports. Nos agents doivent rester sur place, loin de leurs familles, pendant de longues périodes, et leurs conditions de travail laissent souvent à désirer. Le travail est dur, long et, dans certains cas, à la fois dangereux et stressant, mais nous avons une équipe de professionnels pleins d'enthousiasme et désireux de relever ce défi.
Une de nos dernières études a porté sur le flétan du Groenland dans l'Arctique. Nos chercheurs ont essayé de déterminer s'il était possible de créer une pêche commerciale au profit de la population du Nunavut. Cependant, comme cela se produit souvent, on a entrepris en même temps d'autres projets destinés à compléter les connaissances dans le domaine de l'écologie marine dans l'Arctique.
Autre exemple de partenariat qu'il faut mentionner: nous avons tenté d'obtenir pour l'Arctique un brise-glace qui servirait aux travaux des chercheurs spécialisés dans les sciences de l'Arctique, dont ceux du gouvernement, des universités, des organismes du Nord et de nos partenaires internationaux. Nous utilisons généralement, pour nos projets scientifiques, des brise-glace polyvalents de la Garde côtière. Toutefois, la demande en matière de sciences de l'Arctique s'accroît à cause de questions comme la consommation d'énergie dans le Nord et le changement climatique. Nous sommes persuadés qu'un tel navire aiderait le Canada à acquérir de précieux renseignements sur la protection et la conservation de ses ressources du Nord. En outre, il existe dans le monde une très forte demande de plates-formes ou de navires permettant de travailler en toute sécurité dans l'Arctique, et nous avons de nombreux partenaires potentiels, dont des universités et d'autres gouvernements, qui sont prêts à signer. D'une façon générale, il y a, dans les pays ayant une région polaire, une pénurie de navires de ce genre.
Comme dans le cas du programme de l'Arctique, nos travaux relatifs aux eaux douces sont variés, et nous avons de nombreux partenaires qui travaillent avec nous. Récemment, le ministre des Pêches et des Océans a signé un nouvel accord scientifique concernant les Prairies, dans lequel l'accent est mis sur le partenariat et la coopération pour les questions de pêche et d'environnement d'intérêt mutuel. Un accord semblable entre le MPO et le ministère ontarien des Ressources naturelles est en cours de préparation.
On n'insistera jamais suffisamment sur la valeur et la santé des ressources dulcicoles de production. Depuis la fin des années 60, le MPO exploite, près de Kenora, dans le nord de l'Ontario, la région des lacs expérimentaux (ELA), qui est internationalement connue. Des études de manipulation de l'écosystème de lacs entiers ont été entreprises sur une série de 58 petits lacs figurant dans un accord conclu avec l'Ontario. L'ELA est une installation unique en son genre, dont nous sommes extrêmement fiers. En effectuant des expériences sur des lacs entiers, les scientifiques sont capables d'obtenir des résultats beaucoup plus précis que si leur étude avait été faite en laboratoire. Certains des travaux effectués dans l'ELA ont donné des résultats importants qui ont conduit à l'adoption de lois sur l'environnement. Ces études ont porté sur cinq domaines. Le premier est le rôle du phosphore dans la pollution des écosystèmes d'eau douce, comme les lacs Érié et Ontario. Ces travaux ont contribué à faire disparaître le phosphore des détergents. Le deuxième est l'effet des pluies acides sur les lacs et les rivières du Canada. Cette étude a conduit le Canada et les États-Unis à signer un accord sur les émissions génératrices de pluies acides. Le troisième est l'étude des problèmes de contaminants causés par la création de réservoirs. Le quatrième domaine est constitué par les dommages causés à nos ressources en eau douce par les produits chimiques toxiques. Le cinquième comprend les études de contrôle à long terme qui nous aident à comprendre comment fonctionnent les écosystèmes d'eau douce et comment ils réagissent à des stress tels que le changement climatique.
Plus récemment, nous avons entrepris d'accroître nos activités scientifiques dans les Prairies dans le cadre de l'Accord sur les sciences dans les Prairies, dont j'ai parlé tout à l'heure. Nous sommes ainsi entrés dans le Consortium du lac Winnipeg. Je sais que vous avez eu dernièrement une discussion à ce sujet avec M. Al Kristofferson.
Malheureusement, nos écosystèmes d'eau douce subissent de nombreux stress. Nous sommes très préoccupés par l'effet des espèces étrangères ou envahissantes, comme la moule zébrée, sur les espèces indigènes. On parle à ce sujet de «pollution biologique», et elle n'est pas moins importante que la pollution chimique. Souvent, ces espèces dites exotiques entrent en concurrence avec les espèces indigènes et les éliminent, ce qui se traduit par une réduction de la diversité biologique, qui joue un rôle important. Par exemple, la chaîne alimentaire nécessaire aux vastes pêcheries du lac Érié a été grandement modifiée à la suite de l'introduction accidentelle de moules zébrées il y a environ 15 ans. Depuis lors, les moules zébrées se sont propagées dans le bassin hydrographique de la rivière Mississippi, et on les trouve même maintenant au sud, à la Nouvelle-Orléans. On craint fort que cet envahisseur s'infiltrera dans les bassins hydrographiques de l'Ouest canadien.
Les Grands Lacs sont particulièrement exposés à l'introduction d'espèces envahissantes parce que les navires de haute mer, qui avaient rempli leurs ballasts d'eau douce dans un port quelconque d'une autre partie du monde, y déchargent fréquemment cette eau. La moule zébrée n'est qu'une des nombreuses espèces envahissantes introduites de cette façon. Nous nous attaquons à ce problème avec des organismes américains, mais les solutions sont difficiles à trouver et chères.
Les espèces envahissantes contribuent à la création d'«espèces en péril» - ces espèces qui risquent de disparaître localement, voire dans le monde entier. Il y a 27 espèces d'eau douce en péril dans notre région seulement, et aussi certains mammifères marins. Nous participons à des études qui pourraient aider à la protection de ces espèces. À l'un de nos sites d'études - la rivière Sydenham dans le sud de l'Ontario - il y a neuf espèces en péril, rien que pour les poissons.
Dans le cadre de notre programme scientifique des Grands Lacs, nous souhaitons aussi trouver des façons d'améliorer et de restaurer l'habitat du poisson, de déterminer les niveaux de contaminants dans le poisson et autres espèces aquatiques, de comprendre les aspects environnementaux du développement de l'aquaculture en eau douce et de bâtir une base scientifique solide pour les décisions qui seront prises en matière de gestion de l'habitat.
Le programme scientifique le plus en vue dans notre région est sans doute le programme de lutte contre la lamproie marine à Sault Ste. Marie. Ce programme international, placé sous le leadership administratif de la Commission des pêches des Grands Lacs, a pour objectif de faire échec à l'invasion des lamproies marines. Il n'est pas exagéré de dire qu'il y aurait peu de pêcheries viables, voire pas du tout, sans le travail constant des agents de ce programme et de son équivalent américain.
J'aimerais offrir à mon collègue, M. Clarke, la possibilité de faire quelques commentaires.
M. Redmond Clarke, directeur régional, Gestion de l'habitat, des pêches et des océans, ministère des Pêches et des Océans: Pour répondre à votre requête, sénateurs, on m'a demandé de vous fournir des renseignements sur les rôles et les responsabilités du gouvernement fédéral et des provinces en ce qui a trait à l'administration des pêcheries et à la gestion de l'habitat du poisson dans les Prairies. Je vais commencer par les responsabilités en matière d'administration des pêcheries.
La Loi constitutionnelle de 1867 a conféré au Parlement un pouvoir législatif exclusif pour adopter des lois sur les pêcheries des côtes et de l'intérieur. Par conséquent, le gouvernement fédéral est responsable de la protection et de la conservation de toutes les pêcheries, et le Parlement peut adopter des lois à cet effet. En 1868, le Parlement a adopté la Loi sur les pêcheries, qui établit le pouvoir législatif pour la gestion et la réglementation des pêcheries.
À la même époque, les articles 109 et 117 de la Loi constitutionnelle conféraient aux provinces la responsabilité des ressources naturelles à l'intérieur de leurs frontières respectives, et l'article 92, la compétence exclusive pour légiférer dans les domaines de la propriété et des droits civils ainsi que dans celui de l'administration des terres publiques, y compris les eaux intérieures.
Après la Confédération, on ne savait plus très bien dans quelle mesure le pouvoir du gouvernement fédéral l'emportait sur les droits de propriété des provinces concernant les pêcheries dans les eaux sans marée. En 1898, le Comité judiciaire du Conseil privé a éclairci ce point en stipulant essentiellement que les gouvernements provinciaux étaient les seuls responsables de l'attribution de baux et de permis pour la pêche intérieure, de l'application des dispositions provinciales en matière de permis et de la détermination, d'une façon générale, de la manière dont seront gérés les droits de propriété.
Au fil des ans, les provinces se sont vu déléguer de plus en plus l'administration des pêcheries au moyen de divers instruments. Les articles 109 et 117 de la Loi constitutionnelle ne se sont pas appliqués au Manitoba, à la Saskatchewan et à l'Alberta lorsqu'ils sont devenus des provinces. Cependant, les Conventions de 1930 sur le transport des ressources naturelles ont transféré l'administration et le contrôle des terres publiques et des ressources aux gouvernements provinciaux et ont reconnu les droits de propriété des provinces en matière de pêcheries. La réglementation relative à la conservation des pêcheries continue à relever du ministre des Pêches et des Océans et elle est administrée et appliquée en vertu de la Loi sur les pêches.
Cependant, les gouvernements provinciaux du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta demeurent responsables aujourd'hui de la gestion courante des pêcheries provinciales. Il incombe aux provinces de recommander au ministère des Pêches et des Océans la teneur des règlements provinciaux sur les pêches qui seront adoptés en vertu de la Loi sur les pêches. Ces règlements portent sur la conservation et sur d'autres domaines de compétence fédérale.
Les provinces disposent de leurs propres lois en ce qui a trait à certains aspects de la propriété des pêcheries, comme les permis, et le MPO ne participe pas à la gestion courante des pêcheries dans ces provinces. Je passe maintenant aux responsabilités en matière d'habitat du poisson.
La Loi constitutionnelle et les Conventions sur le transfert des ressources naturelles ne parlent pas de façon précise de la conservation et de la protection de l'habitat du poisson. On estimait que la gestion courante de l'habitat du poisson faisait partie des responsabilités déléguées en matière de gestion des pêcheries, mais elle n'a pas été transférée. La Loi sur les pêches comprend des dispositions précises sur la conservation et la protection de l'habitat du poisson. Les principales sont l'article 35, qui interdit la détérioration, la perturbation ou la destruction de l'habitat du poisson sans l'autorisation du ministre, ainsi que l'article 36, qui interdit le rejet de substances nocives dans des eaux où vivent des poissons, sauf lorsqu'un règlement le prévoit.
Le ministère des Pêches et des Océans est responsable de l'administration de l'article 35 et des autres dispositions de la Loi sur les pêches relatives à la protection de l'habitat du poisson. Une seule exception à cela: Environnement Canada est responsable de l'administration de l'article 36 de la Loi sur les pêches.
La politique de gestion de l'habitat du poisson, qui a été établie par le ministère des Pêches et des Océans en 1986 fournit un cadre national pour l'administration et l'application des dispositions de la Loi sur les pêches relatives à l'habitat du poisson. M. Paul Cuillerier, du ministère des Pêches et des Océans, vous a fait dernièrement, je crois, un exposé sur le programme national de gestion de l'habitat du poisson.
Les gouvernements provinciaux ont d'autres responsabilités en matière d'environnement et de gestion des ressources et ils disposent de lois qui concernent ou qui recoupent la gestion de l'habitat du poisson. Jusqu'au début des années 90, on estimait que la responsabilité de la gestion courante de l'habitat du poisson faisait partie des responsabilités déléguées en matière d'administration des pêcheries dans les provinces intérieures, dont le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta. Puis, il est ressorti de décisions judiciaires portant sur le processus d'évaluation environnementale relatif aux barrages Oldman et Rafferty-Alameda, que le rôle du gouvernement fédéral en matière de gestion de l'habitat du poisson était plus important que celui qu'il avait joué jusque-là et que les responsabilités fédérales sur le plan de l'évaluation environnementale ainsi que de la conservation et de la protection de l'habitat du poisson étaient confirmées.
À la suite de ces décisions judiciaires, le ministère des Pêches et des Océans a créé un petit groupe de huit personnes pour assumer ses responsabilités relativement au processus d'évaluation environnementale dans les provinces des Prairies et a entamé des discussions avec les provinces en vue de leur déléguer les responsabilités relatives à l'habitat du poisson découlant de la Loi sur les pêches.
Ces discussions ont pris plusieurs années, mais, en 1999, le Cabinet fédéral a décidé de créer un Programme de renforcement de la protection de l'habitat du poisson dans les provinces des Prairies et dans d'autres régions, afin d'assurer l'application uniforme par le gouvernement fédéral des mesures de protection de l'habitat du poisson et de fournir les ressources nécessaires.
Le ministère des Pêches et des Océans est en train de mettre en oeuvre au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta la décision du Cabinet concernant le Programme de renforcement de la protection de l'habitat du poisson. Pour 2001-2002, le Programme de gestion de l'habitat du poisson dans les provinces des Prairies dispose d'un effectif de 115 personnes et d'un budget de 10,4 millions de dollars. D'autres personnes sont actuellement recrutées dans les domaines de la biologie, de l'application de la législation, du génie et de l'administration. Soixante pour cent des postes sont permanents et les autres, à temps partiel.
Huit bureaux, dont sept nouvellement créés, s'occupent de l'exécution du programme. Ils sont situés à Dauphin et à Winnipeg, où un bureau existait déjà, au Manitoba; à Prince Albert et à Regina, en Saskatchewan; à Calgary, à Edmonton, à Lethbridge et à Peace River, en Alberta.
Une étroite coopération et des relations harmonieuses avec les gouvernements provinciaux sont essentielles à la réussite de la mise en oeuvre du Programme de renforcement de la protection de l'habitat du poisson au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Des discussions se déroulent actuellement avec chaque gouvernement provincial pour conclure des ententes bilatérales sous la forme de protocoles d'accord et de protocoles de fonctionnement pour la conservation et la protection de l'habitat du poisson.
À la demande des gouvernements provinciaux, l'accent est mis d'abord sur l'élaboration de protocoles de fonctionnement afin de veiller à l'exécution efficace du programme, à une meilleure coordination et à la réduction des chevauchements. Ces protocoles porteront essentiellement sur les domaines suivants: les communications, l'application de la législation, le processus intégré de consultation, l'échange de données et diverses questions techniques.
Je terminerai en parlant de l'initiative du Conseil canadien des ministres des Pêches et de l'Aquaculture à propos de l'harmonisation. En 1999, le ministre des Pêches et des Océans et ses homologues provinciaux ont signé un Accord de coopération intergouvernementale en matière de pêches et d'aquaculture. Par la suite, le Conseil canadien des ministres des Pêches et de l'Aquaculture (CCMPA) a créé un groupe de travail intergouvernemental sur les pêches en eau douce et l'a chargé de trouver un consensus pour l'élaboration d'une Stratégie nationale sur les pêches en eau douce.
Le groupe de travail a établi un projet de stratégie pour que le CCMPA l'examine à sa réunion de septembre 2001. Cette stratégie porte principalement sur les domaines suivants: la conservation du poisson et l'administration des pêcheries, la gestion de l'habitat du poisson, la science relative au poisson d'eau douce ainsi que les instruments législatifs et réglementaires.
À leur réunion de septembre dernier, les membres du CCMPA, à l'exception du Québec, ont accepté le projet de Stratégie nationale sur les pêches en eau douce destinée à renforcer la conservation, la gestion, la réhabilitation et la protection des pêches en eau douce, et ont convenu que l'habitat du poisson devait faire l'objet d'efforts concertés. Ils ont également chargé le groupe de travail de consulter les principaux intervenants pour confirmer l'orientation établie dans la stratégie et de cerner les possibilités de liaison avec d'autres projets concernant les eaux douces, comme ceux qui portent sur l'introduction et le transfert d'organismes exotiques et sur la protection d'espèces en péril. Enfin, ils ont avalisé l'élaboration de priorités et l'achèvement d'un plan de mise en oeuvre qui sera soumis à l'approbation du CCMPA à sa réunion de 2002.
Par suite des initiatives des ministres et des discussions du ministère des Pêches et des Océans avec le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta, on aura une meilleure définition, une plus grande harmonisation et un rapprochement accru des rôles et des responsabilités du gouvernement fédéral et des provinces en ce qui a trait à l'administration des pêcheries et à la gestion de l'habitat du poisson.
Le sénateur Johnson: Merci, monsieur le président. Il est bon d'entendre les exposés des deux témoins après les réunions que nous avons tenues dans l'Ouest le printemps dernier et qui ont été elles aussi profitables. Je viens de la région des lacs, au Manitoba, et j'ai participé à l'étude de cette question et aux travaux du consortium qui a déclenché ce processus.
M. Cooley, à Burlington, a parlé de l'habitat du poisson dans les provinces des Prairies et a fait une distinction entre la compétence provinciale et la compétence fédérale. Combien de problèmes de compétence allons-nous rencontrer? Vous avez bien fait la distinction. Dans quelle mesure allons-nous être capables de travailler ensemble?
M. Cooley: Sénateur, je vais demander à M. Garry Linsey, notre directeur du secteur des Prairies à la Gestion de l'habitat, de répondre à votre question.
M. Garry Linsey, directeur du secteur des Prairies, ministère des Pêches et des Océans: Monsieur le président, il a été effectivement très difficile de mettre en oeuvre le programme dans les provinces des Prairies. La répartition des compétences dans les provinces des Prairies est, me semble-t-il, très claire. Les provinces ont la compétence pour l'administration des pêcheries. Tout le monde est également d'accord pour dire que la gestion de l'habitat du poisson relève du gouvernement fédéral. Nous collaborons bien avec les provinces dans la mise en oeuvre de nos programmes.
Le sénateur Johnson: Je suis contente de l'entendre, parce que le gouvernement fédéral et les provinces ont pris beaucoup de temps pour arriver à collaborer et à lancer les programmes. Il existe encore une certaine confusion au Manitoba, à tout le moins sur les rives du lac Winnipeg, pour ce qui est de savoir où commence la compétence fédérale et où finit la compétence provinciale, en ce qui a trait du moins au travail de notre consortium.
Êtes-vous satisfait du protocole d'accord conclu en matière d'habitat entre les provinces et le gouvernement fédéral?
M. Linsey: Est-ce à moi que vous posez cette question, sénateur?
Le sénateur Johnson: Oui. Je sais que cela s'est fait le 20 septembre.
M. Linsey: Monsieur Clarke, peut-être pourriez-vous m'aider à répondre à cette question.
M. Clarke: Sénateur, parlez-vous de l'accord sur les sciences qui a été signé par les ministres le 20 septembre?
Le sénateur Johnson: Oui.
M. Clarke: Je pense que M. Cooley serait mieux à même de parler de ce sujet.
M. Cooley: Oui, je suis prêt à aborder cette question. La signature de l'accord sur les sciences des Prairies, qui est intervenue le 20 septembre, n'était en fait que le renouvellement d'un accord qui avait été signé trois ans auparavant. L'accord original s'était appliqué pendant trois ans et il était arrivé à échéance. À la fin de cette période, le MPO a rencontré les représentants des organismes scientifiques provinciaux intéressés. Nous avons admis que l'accord sur les sciences avait connu quelques problèmes de démarrage.
Certaines choses ont bien été alors que d'autres avaient besoin, nous semblait-il, d'une mise au point. Il était évident, aux yeux de tous, que les trois provinces des Prairies et nous-mêmes trouvions que l'accord était valable. C'est pourquoi nous avons recommandé aux ministres de le reconduire. Nous avons également accru la portée des activités.
Nous avons ajouté certains sujets d'intérêt commun lorsque nous estimions qu'une collaboration nous serait profitable. Il y a eu, par exemple, les espèces en péril, dont j'ai parlé dans ma déclaration préliminaire.
Nous avons renouvelé l'accord et nous allons travailler encore plus fort pour que cette fois il fonctionne. Un tel accord nous est nécessaire. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes très près de conclure un accord semblable avec l'Ontario.
Le sénateur Johnson: Ma dernière question porte sur l'aspect écologique des différentes questions. Il existe de nombreux contaminants, comme les pluies acides et les produits chimiques toxiques, et, bien sûr, nous avons la moule zébrée. Dans quelle mesure la moule zébrée a-t-elle envahi notre écosystème? Je ne crois pas qu'elle ait atteint encore le lac Winnipeg. Les recherches que le consortium effectuera cet été permettront probablement de le savoir. Ai-je raison ou tort? Je ne crois pas qu'elle se soit propagée jusque dans le lac, mais où la trouve-t-on dans le reste de notre écosystème?
M. Cooley: La moule zébrée n'est pas sortie de l'Ontario, mais elle a envahi la quasi-totalité des États-Unis. Elle s'est propagée très à l'ouest, presque jusqu'aux Rocheuses, en empruntant certains des affluents du Mississipi - à l'est comme à l'ouest. On craint fort, dans des endroits comme le Manitoba et, plus à l'ouest, dans la vallée de l'Okanogan, que la moule zébrée, si elle devait arriver jusque-là, ne cause des dommages incalculables, comme elle l'a fait dans le lac Érié. C'est là sans aucun doute qu'elle a causé le plus de dégâts au Canada.
Il existe un certain nombre de programmes destinés à sensibiliser les propriétaires de bateaux au problème. Il y a environ un an, un garde plutôt alerte a remarqué la présence de moules zébrées sur la coque d'un bateau qui franchissait la frontière canado-américaine entre Seattle et la Colombie-Britannique. Il se trouvait que le garde était au courant du problème, qui a pu ainsi être réglé. Autrement, les moules zébrées auraient atteint directement les eaux de la Colombie-Britannique sans passer par les Prairies.
Le sénateur Johnson: Monsieur Cooley, est-ce là la façon la plus efficace de lutter contre les moules zébrées? Est-ce en surveillant étroitement les navires qui pourraient les transporter dans d'autres eaux? Existe-t-il une autre façon?
M. Cooley: J'aimerais vous répondre oui, mais je crois bien que c'est la seule. Il existe dans le domaine de la science un proverbe qui dit: «Les introductions, comme les extinctions, sont éternelles.» Une fois que ces espèces envahissantes s'établissent quelque part, il est pratiquement impossible de s'en débarrasser. Il va vraiment nous falloir créer un mode de contrôle.
On peut également prendre comme exemple ce que, encore une fois, j'ai dit dans ma déclaration préliminaire au sujet de la lamproie marine. Elle est entrée dans les lacs vers 1830 avant d'atteindre le lac Supérieur et le lac Huron quelque 100 ans plus tard avec l'ouverture du canal Welland. Nous avons maintenant le Programme de lutte contre la lamproie marine, que le Canada et les États-Unis appliquent pour limiter l'importance des populations. Sans ce programme, la lamproie marine, à elle seule, détruirait pratiquement toutes les grandes pêcheries situées dans les eaux canadiennes et américaines des Grands Lacs.
Le sénateur Johnson: Il est très important d'éduquer le public, n'est-ce pas? Cela nous aiderait-il de sensibiliser les gens au problème?
M. Cooley: Oui, une fois que ces espèces se sont implantées quelque part, il est extrêmement important de sensibiliser le public.
Le sénateur Mahovlich: Monsieur Cooley, ma femme et moi avions l'habitude de patiner sur la rivière Credit, pas très loin de Burlington. Cela fait 25 ans que nous ne pouvons plus le faire, et je ne sais pas si c'est à cause des polluants qu'elle contient. Quel effet cela a-t-il sur le saumon ou la truite grise qui frayaient dans la rivière Credit? Avant, je pouvais les voir dans la rivière, qui traversait un des terrains de golf de Mississauga. Les poissons peuvent-ils encore frayer dans cette rivière?
M. Cooley: Sénateur, j'avais l'habitude de patiner sur la rivière Humber. J'essayais d'imiter Frank Mahovlich, à l'époque, mais sans grand succès.
Nous ne voyons pas dans la rivière de polluants qui l'empêchent de geler, mais nous constatons clairement les effets d'un changement climatique. Il fait plus chaud dans ces secteurs du sud de l'Ontario, et c'est pour ça que la rivière ne gèle pas.
Pour ce qui est des polluants contenus dans les rivières qui se jettent dans les Grands Lacs, la situation s'est, d'une façon générale, bien améliorée par rapport à il y a 20 ou 30 ans, grâce à l'Accord canado-américain sur la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, signé en 1972. À cette époque, on se préoccupait plus particulièrement du phosphore et de la situation du lac Érié, dont on disait qu'il était mort.
Cinq ou six ans plus tard, l'accord a été renouvelé et on y a mis l'accent sur les contaminants. À ce moment-là, on trouvait dans nos poissons un très grand nombre de contaminants, tels que les BPC et d'autres produits chimiques nocifs. Un grand effort a été fait de part et d'autre de la frontière pour s'attaquer à cette question. Quelque 25 ans plus tard, les nouvelles sont à la fois bonnes et mauvaises. La bonne nouvelle, c'est que le niveau de contaminants dans le poisson, qui est un bon indice de la santé des écosystèmes aquatiques, a énormément baissé par rapport à ce qu'il était au début. La mauvaise nouvelle, c'est que ce niveau n'est pas encore assez bas, et qu'il y a encore beaucoup à faire.
Ce qui est malheureux, c'est que certains de ces contaminants se logent dans les sédiments avec lesquels ils peuvent être transportés ailleurs. Il faudra donc plus de temps pour que ces écosystèmes se débarrassent «naturellement» de certains de ces contaminants. Il y a encore des poissons qui remontent la rivière Credit, mais dans la plupart des cas il s'agit de saumons du Pacifique qui ont été stockés. Après quatre ans, ils retournent et essaient de frayer, et c'est la fin de leur cycle de vie.
Le sénateur Mahovlich: Merci pour les bonnes nouvelles.
Dans le nord de l'Ontario, autour de Kirkland Lake, les rivières se jettent toutes dans l'Arctique. Je crois que Kirkland Lake est aussi au nord que Winnipeg. Est-ce que tous les cours d'eau se jettent dans l'Arctique à cette latitude? Toutes les rivières coulent-elles vers le nord pour se jeter dans l'Arctique?
M. Cooley: Oui, les eaux s'écoulent vers le nord. La ligne de partage entre le drainage des Grands Lacs, qui aboutit au Saint-Laurent, et le drainage septentrional, qui va dans l'Arctique, n'est pas très loin d'ici, je crois. Je ne peux pas vous dire exactement où car je n'ai pas de carte avec moi.
Le sénateur Mahovlich: Est-il vrai que les rivières qui se jettent dans l'Arctique n'ont pas les problèmes de pollution qu'ont celles qui se jettent dans les Grands Lacs. Cela est-il exact?
M. Cooley: Oui, c'est vrai. Mais on y trouve quand même certains polluants, car ceux dont nous pouvons mesurer le niveau dans les poissons qui vivent dans des eaux «pures» sont arrivés là après un long voyage. Certains polluants viennent de pays en développement, d'où ils ont été transportés par le vent. Nous avons trouvé dans notre poisson des contaminants dont l'usage est interdit au Canada. C'est la vie, je suppose. Le monde est petit, mais il est clair que nous avons décelé des contaminants qui viennent de loin. Certains produits alimentaires traditionnels des Autochtones de l'Arctique contiennent un niveau beaucoup trop élevé de contaminants qui viennent de centaines de milliers de kilomètres de là.
Le sénateur Watt: La plupart de mes questions vont porter sur ce qui se passe vraiment dans l'Arctique. Monsieur Cooley, quelles recherches sont effectuées dans l'Arctique sur les chaînes alimentaires affectées par les contaminants?
M. Cooley: Sénateur, c'est une question très pertinente. Plutôt qu'accaparer ce micro toute la soirée, je vais transférer la question à M. Papst.
M. Michael Papst, gestionnaire, Division de la recherche sur l'Arctique, ministère des Pêches et des Océans: C'est une très bonne question. Quand peut-on dire que des recherches sont suffisantes? Parfois, quand nous nous rendons dans des localités du Nord et que nous disons à leurs habitants que nous avons trouvé des contaminants qui viennent de plantations de bananes situées quelque part en Amérique du Sud, ils ne sont pas contents. Cependant, lorsque l'on considère l'ensemble de la recherche sur les contaminants dans l'Arctique, on peut dire que l'on a une bonne image de ce qui s'y passe dans le cas de certains contaminants importants, comme le mercure par exemple.
Cela est dû en partie au fait que les collectivités, et en particulier les chasseurs et les pêcheurs, nous aident énormément en recueillant des échantillons qui nous permettent de nous faire une bonne idée de la situation. Ensemble, les milieux scientifiques, qui ne s'attaquent pas à la question aussi bien qu'ils le pourraient, sont en train de mieux comprendre ce qui est vraiment important pour les gens. Si nous trouvons un certain niveau de contaminants dans une partie non consommée d'un bélouga ou si nous savons que le traitement que va subir la viande fera disparaître le risque de contamination, nous nous demandons alors s'il faut s'en inquiéter. Nous avons beaucoup débattu cette question. Nous avons consulté les anciens, en particulier dans l'ouest de l'Arctique, et nous leur avons parlé de la nécessité de mieux comprendre l'utilisation qui est faite de l'animal après sa capture, et aussi de ce que cette information signifie pour l'orientation que nous donnerons à notre programme sur les contaminants. Nous maîtrisons davantage la situation, mais c'est l'un des domaines où nous pouvons certainement mieux faire.
À Winnipeg, on s'inquiète en outre de la présence de contaminants. Nous avons tendance à croire que les contaminants, comme les pesticides ou les BPC, appartiennent au passé. Mais on crée aujourd'hui d'autres composés, tels que les ignifuges pour les vêtements d'enfants, qui peuvent se révéler dangereux. Nous commençons à les détecter en petites quantités dans les bélougas et les phoques de l'Arctique parce, comme le disait tout à l'heure M. Cooley, ils sont transportés par le vent sur de longues distances. C'est là un autre domaine que nous examinons, en priorité, pour nous attaquer à ce que nous appelons les «contaminants actuels».
J'espère que cela répond à votre question. J'ai été long, mais il s'agit d'une question importante.
Le sénateur Watt: Que faisons-nous à ce sujet, sur le plan de la recherche de données? Y a-t-il une façon de dire aux gens qu'on trouve des contaminants dans certaines espèces, comme les poissons, les phoques ou les bélougas? On utilise beaucoup le bélouga, par exemple. Quelles précautions allez-vous demander aux gens de prendre?
M. Papst: C'est généralement au ministère des Pêches et des Océans qu'il incombe de détecter la présence de contaminants chez les animaux. Notre rôle est d'étudier les effets de ces contaminants sur la viabilité des animaux. Nous savons qu'il y a dans l'Arctique des gens qui consomment cette nourriture traditionnelle. Notre politique est de communiquer nos données à Santé Canada, au service de santé du Nunavut et au service de santé des Territoires du Nord-Ouest. Ces organismes utilisent les données pour évaluer le risque. On trouve le meilleur exemple à ce sujet dans les Territoires du Nord-Ouest, où une mise en garde a été récemment diffusée à l'égard de certains poissons qui contenaient du mercure. Nous avons fourni les données à Santé Canada, qui a effectué une évaluation du risque et qui a ensuite publié cette mise en garde.
C'est souvent une question difficile. Nous avons eu, par exemple, des problèmes en ce qui concerne les niveaux de mercure dans les bélougas de l'ouest de l'Arctique. Nous avons mis sur pied dans ce cas, il y a un certain nombre d'années, un groupe de travail dans lequel figuraient des anciens. Avec Santé Canada, ses membres ont examiné tous les risques et ont conclu qu'il valait mieux dire aux gens que les bélougas contenaient du mercure, mais qu'il fallait aussi leur signaler que, à leur avis, les avantages de cette nourriture traditionnelle étaient supérieurs aux risques. Dans ce cas, on n'a diffusé aucune mise en garde, mais simplement une note d'information. Le groupe de travail avait estimé que les avantages de la nourriture traditionnelle étaient supérieurs aux risques.
Le sénateur Watt: À votre avis, Santé Canada doit-il participer au rassemblement de données? Faut-il lui fournir des renseignements afin qu'il puisse, le cas échéant, prendre les mesures nécessaires?
M. Papst: Nous essayons de communiquer les données rapidement. Cette question a souvent été débattue avec nos cogestionnaires, et nous avons décidé que, dès réception des résultats d'une expérience ou d'une étude, nous les enverrions à Santé Canada et aux autres services de santé. C'est là notre politique en matière de recherche au MPO. Je ne peux pas dire grand-chose sur ce que font les autres ministères une fois que nous leur communiquons l'information.
Le sénateur Watt: Je voudrais que l'on parle des conflits qui pourraient surgir en un endroit donné entre l'habitat du poisson et le développement. Je vais prendre comme exemple la vallée du Mackenzie, où il est question de pétrole et de gaz. A-t-on mis sur pied un système de contrôle pour faire en sorte que l'impact soit réduit au strict minimum?
Je suppose que ce pipeline va affecter à un moment ou à un autre l'habitat du poisson dans la zone de développement du Mackenzie. Pouvez-vous me donner quelques renseignements à ce sujet? Dans quelle mesure faites-vous des recherches dans cette zone? Surveillez-vous la situation sur place? Existe-t-il des données scientifiques que vous pourriez fournir aux responsables du développement afin qu'ils puissent réduire au minimum l'impact sur l'habitat du poisson?
M. Clarke: Nous avons réuni une quantité appréciable de renseignements sur le Mackenzie ainsi que sur les poissons et l'importance de l'habitat pour ces poissons. Ces renseignements ont été mis à la disposition des sociétés chargées du développement dans la vallée. Par ailleurs, ces sociétés elles-mêmes vont recueillir des renseignements et effectuer des évaluations environnementales que nous examinerons pour vérifier si elles sont complètes. Nous intégrerons dans notre programme général les mesures de contrôle dont l'industrie et nous-mêmes aurons besoin à l'avenir
M. Papst: J'ajouterai que cela ressemble beaucoup à la cogestion des pêcheries dans l'Arctique. Notre entente de cogestion dans la majeure partie de l'Arctique constitue un réel avantage dans ce cas. Pour ce qui est de la vallée du Mackenzie et d'autres travaux dans l'Arctique, nous avons déjà mis en place dans de nombreuses localités des programmes de surveillance des pêcheries, qui devaient à l'origine servir à établir les niveaux de prises durables. Ces mêmes programmes - appelés programmes communautaires - se sont révélés excellents pour contrôler l'impact potentiel. C'est là une des autres voies que nous utiliserons pour suivre les travaux de développement dans l'Arctique au fur et à mesure qu'ils se dérouleront.
Le sénateur Watt: J'ai une autre question en ce qui concerne le bélouga. Je sais que le ministère des Pêches et des Océans s'est beaucoup préoccupé du bien-être du bélouga, principalement dans la région de la baie d'Hudson, du détroit d'Hudson et aussi dans la baie d'Ungava. Je crois que cela va même jusqu'à l'île de Baffin et dans ses environs.
Il est possible que l'espèce elle-même soit placée sous la protection de la loi sur les espèces en péril. D'après les renseignements que j'ai recueillis l'an dernier, l'aspect scientifique n'était pas entièrement satisfaisant, car l'étude effectuée par le ministère des Pêches et des Océans datait d'environ cinq ans. Ils ont essayé d'en appliquer les résultats, mais ils n'ont fait aucune autre étude après ça. Savez-vous quelque chose à ce sujet?
M. Papst: Je crois que je peux répondre à votre question. On ne craint pas, d'après moi, de dire que le bélouga est une espèce en péril. Mais il ne s'agit pas de toute la population. On pense que certains stocks dans l'Arctique sont au-dessous du niveau maximum et pourraient être placés sur la liste des espèces menacées. Je ne sais pas précisément sur quel stock portent les données qui datent de cinq ans. Cela ne me surprend pas.
Répertorier les stocks de bélougas pour en évaluer le nombre est un processus cher et compliqué. Plusieurs années séparent souvent deux relevés aériens. Ce n'est pas en fait une question d'argent. Cela ne servirait à rien d'en faire plus souvent car la qualité des données ne serait pas nécessairement meilleure.
Pour les espèces menacées d'extinction, l'approche générale serait de travailler avec les collectivités afin d'établir des plans de sauvetage. S'il était jugé qu'une espèce était menacée d'extinction, on mettrait sur pied un plan de sauvetage pour cette espèce. Dans le cadre de ce plan, on améliorerait, entre autres, l'évaluation de la population ou on obtiendrait à son sujet des données plus récentes. C'est là une partie des mesures qui seraient prises pour une espèce menacée d'extinction.
Les données vieilles de cinq ans ne seraient pas simplement utilisées pour une catégorie dans laquelle on aura fait entrer l'animal. Il y aurait un plan de sauvetage pour lequel on ferait de nouvelles recherches. C'est comme ça que je vois le fonctionnement du processus.
Le président: Avant de passer la parole au sénateur Adams, je voudrais revenir sur une question posée par le sénateur Watt au sujet de l'impact qu'aurait l'exploitation du pétrole et du gaz sur l'environnement dans l'Arctique. Je pense qu'il a parlé du Mackenzie. Je veux en être absolument sûr.
Qui va évaluer l'effet d'une fuite éventuelle de pétrole ou de gaz? Qui va décider de poursuivre ou d'arrêter les travaux? Le groupe de cogestion? Le ministre?
Ce que je veux savoir, c'est à qui appartient la décision finale. J'imagine que M. Clarke doit connaître la réponse à ma question.
M. Clarke: Je pensais bien que vous alliez me poser cette question. Merci.
Je ne suis pas sûr qu'il existe quelqu'un qui aurait la décision finale. Je suppose qu'elle reviendrait au gouvernement fédéral. Je ne sais pas trop à quel ministre exactement. Ce pourrait être le ministre des Ressources naturelles.
Il est certain que le ministère des Pêches et des Océans et nous-mêmes avons un rôle à jouer dans l'évaluation des risques que courent les poissons, les mammifères marins et leurs habitats. Et il en est de même pour nos cogestionnaires. Nous travaillerions dans le cadre des processus d'évaluation environnementale qui ont été établis pour la région désignée des Inuvialuits et pour le pipeline de la vallée du Mackenzie.
Si je me souviens bien, les conseils créés dans le cadre de ces processus relèvent de l'un des ministres fédéraux. C'est ce ministre fédéral qui serait responsable de la décision.
Le président: Je suppose que le ministre ne peut pas déléguer le pouvoir que lui accorde la Constitution du Canada. Il n'est pas autorisé à déléguer ce pouvoir à un groupe de cogestion. C'est ce que je suppose, mais j'essaie de savoir si on a tenté d'une façon quelconque de déléguer ce pouvoir.
M. Clarke: Les accords de revendications territoriales attribuent des responsabilités précises aux différents conseils. Ce dont je me souviens - et je m'excuse de ne pas avoir la réponse sous les yeux - c'est que les conseils finissent par faire des recommandations à divers ministres.
Le président: Vous avez tout à fait raison de dire que le ministre peut le faire s'il utilise la voie législative. Mais dans certains secteurs, on s'est servi de l'accord de revendications territoriales.
M. Clarke: Je pense que c'est comme ça que cela fonctionne pour le processus d'évaluation environnementale.
Le sénateur Watt: J'imagine qu'avant que le projet de développement ne reçoive le feu vert de l'autorité chargée de le lui donner, on effectuera une évaluation environnementale dans la zone qui sera touchée. Je suppose aussi que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien sera informé de l'importance de l'impact qu'aurait ce projet.
À partir de quand juge-t-un un projet intéressant? Comment déterminez-vous ce point?
M. Clarke: Je pense que, s'il faut déterminer un tel point, c'est à un ministre ou au Cabinet de le faire. Notre rôle est de fournir les meilleurs conseils possibles dans le cadre de nos responsabilités en matière de protection du poisson et de son habitat.
Le sénateur Adams: J'adresse ma question à M. Papst à Winnipeg. Je vis à Rankin Inlet, qui est directement au nord de l'endroit où vous êtes. Je représente maintenant l'ensemble du Nunavut. C'est le territoire que vous êtes en train d'étudier pour les services hydrographiques d'Hudson Bay.
Vous avez dit que des BPC, du mercure et d'autres produits qui viennent de la rivière affectent certaines personnes. J'ai entendu dire qu'on les trouvait non seulement dans la rivière mais aussi dans l'air. Ils descendent du ciel. Par temps froid, ils se déposent dans les lacs et sur les terres. Ils affectent la migration de certains caribous.
Je veux connaître davantage les effets de ce phénomène sur les gens qui consomment de la nourriture traditionnelle. Le projet de loi C-38 est sorti il y a deux ou trois ans, et j'ai parlé avec le ministre de l'Environnement et le ministre de la Santé, et je leur ai dit qu'il fallait surveiller davantage la nourriture traditionnelle et les gens qui la consommaient. Les deux ont affirmé qu'ils étaient d'accord mais qu'ils n'avaient pas l'argent nécessaire pour le faire.
Nous voulions savoir dans quelle mesure il affectait les membres de la collectivité qui mangent de la viande de caribou et du poisson. Nous utilisons du caribou surgelé et de l'omble. Nous ne les cuisons pas. Quelle différence y a-t-il entre des aliments surgelés et des aliments cuits pour ce qui est de ces substances? Quels sont ceux qui sont meilleurs pour la santé?
Lorsque les aliments son pollués, peu importe, je pense, que vous les mangiez cuits ou crus. Cela ne fait aucune différence.
Pendant combien de temps ces gens vont-ils être affectés par ces types de pollution? Quelle quantité de ces polluants absorbent-ils? Pendant combien de temps vont-ils vivre? Procédez-vous à ce genre de contrôle?
Est-il nécessaire de prélever un échantillon de tissu ou même un échantillon de sang sur les gens qui consomment une telle nourriture?
Certaines collectivités n'ont pas beaucoup entendu parler de cette question depuis que j'ai été moi-même mis au courant il y a quatre ou cinq ans. Les habitants de Broughton Island ont subi certains effets. Il y avait des femmes qui allaitaient leurs enfants. On a découvert qu'elles absorbaient des BPC en mangeant de la viande de baleine. Avez-vous des renseignements à ce sujet? Le gouvernement doit-il faire d'autres contrôles?
M. Papst: C'est une bonne question, sénateur. Les contaminants sont probablement le sujet dont il est le plus question lorsque nous allons voir les collectivités. Nous parlons aux membres des associations de chasseurs et de trappeurs, et ils se disent toujours préoccupés par les niveaux de contaminants. Dans la plupart des cas, les gens qui nous conseillent en matière de santé nous disent que les contaminants ne constituent pas encore un danger.
Le ministère des Pêches et des Océans ne fait aucun test sur les humains. Nos activités de surveillance ne portent que sur les animaux et, dans une moindre mesure, sur le transport des contaminants dans l'environnement.
Le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord est un programme national destiné à contrôler la présence de contaminants dans les aliments consommés dans le Nord. Je n'ai pas le rapport avec moi ce soir, mais c'est un excellent document. Ses responsables ont aussi rédigé à l'intention des collectivités un excellent résumé qui présente chacun des projets entrepris dans l'Arctique au cours des cinq dernières années.
Nous distribuons ce rapport aux groupes scolaires lorsque nous travaillons dans l'Arctique. Ces renseignements sont disponibles. Nous essayons de les diffuser le plus possible lorsque nous nous rendons dans les collectivités.
Je voudrais à nouveau insister sur le fait que le ministère des Pêches et des Océans n'effectue aucun test sur les humains. Nous ne nous occupons que des poissons, des bélougas et des animaux.
Le sénateur Adams: Vous souvient-il d'avoir prélevé des échantillons sur des caribous ou tout autre animal dans d'autres endroits? Je ne sais pas si c'est vrai ou pas, mais j'ai entendu dire que certains contaminants contenus dans l'air tombent dans l'Arctique. Est-ce vrai?
M. Papst: Le transport sur de longues distances, que ce soit par le vent ou d'autres moyens, de contaminants qui se déposent dans l'Arctique est un sujet de grande préoccupation. Je ne suis pas expert dans ce domaine particulier, mais il me semble que les contaminants sont plus fréquemment transportés dans l'Arctique par le vent que par les rivières dont on a parlé tout à l'heure.
Nous nous intéressons certainement à ce secteur. Nous y effectuons certains travaux. Il y a plusieurs années, dans le cadre du Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord, nous avons mis sur pied avec un certain nombre d'écoles de l'Arctique une activité ayant pour thème le mercure et la neige. Les classes de sciences devaient prélever des échantillons de neige en respectant un protocole scientifique très rigide. Nous leur avons fourni tous les flacons et tout le matériel nécessaires. Nous leur avons aussi communiqué de la documentation afin de leur permettre de mieux comprendre la question des contaminants. Je crois que les résultats de cette étude sont publiés dans cette brochure sur le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord. C'est comme ça que nous informons les collectivités.
Pour ce qui du caribou, nous ne faisons pas le travail au ministère des Pêches et des Océans. Il y a un bon moment que je n'ai pas jeté un coup d'oeil sur ce résumé du Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord, mais je suis sûr qu'il y avait des études sur le caribou.
Le sénateur Adams: Monsieur Papst, vous parliez de brochures. Quels ministères les ont offerts? En a-t-on donné aux chasseurs et aux trappeurs? Peut-être en a-t-on laissé des exemplaires dans les dispensaires? J'aimerais en savoir un peu plus. Je vais peut-être voir ce qu'il en est lorsque je serai à Rankin.
M. Papst: Il s'agit du Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord. Je me rappelle que les brochures avaient été produites par Environnement Canada, mais il se pourrait que ce soit le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Elles parlent d'un certain nombre de projets du ministère des Pêches et des Océans.
J'avais une boîte pleine de ces petits rapports, et je les amenais avec moi surtout dans l'ouest de l'Arctique où je travaille. On les distribuait aux chasseurs et aux trappeurs lorsque nous assistions à leurs réunions de comité. Je pense qu'on les envoyait par la poste aux chasseurs et aux trappeurs ainsi qu'aux dispensaires.
Je vais essayer de voir pour vous où ces publications ont été envoyées. Je sais qu'on peut en obtenir d'autres exemplaires.
Le sénateur Adams: Merci, monsieur Papst. Faites-les parvenir au comité à Ottawa.
Le sénateur Cook: Merci pour cette conversation des plus enrichissantes.
Je vais commencer par une observation. Vous ai-je entendu dire, lorsque vous parliez avec le sénateur Watt, que vous testiez les aliments, mais qu'aucun test n'était fait sur les humains pour découvrir l'effet des contaminants sur la population du Nord? Ai-je bien entendu?
M. Papst: Oui, le ministère des Pêches et des Océans ne teste que les animaux. Notre travail consiste en fait à découvrir l'effet des contaminants sur la population animale, car c'est là la mission du ministère. Nous reconnaissons que, en particulier dans l'Arctique, les données que nous recueillons servent immédiatement pour ceux qui se procurent la nourriture traditionnelle. Nous fournissons ces données à Santé Canada, dont le mandat est de s'occuper de la santé des gens. Le ministère s'en sert dans le cadre de son processus d'évaluation du péril.
Nous ne testons pas les chasseurs. Nous testons les animaux chassés.
Le sénateur Cook: Les résultats de vos tests aboutissent en fin de compte chez quelqu'un qui recherche le bien-être des gens du Nord. Santé Canada effectuera-t-il des tests sur la population?
M. Papst: Santé Canada fait beaucoup de tests. Je ne connais pas bien son programme, mais il effectue des tests pour découvrir la présence de contaminants chez les humains. Il prend nos données et les utilise dans le cadre de son processus global d'évaluation du risque.
Le sénateur Cook: Dois-je comprendre que ce sont les niveaux de contamination qui vont décider de la poursuite des tests?
M. Papst: C'est ce qui s'est produit jusqu'à présent. Leur intervention est souvent déclenchée par un niveau proche de l'un des niveaux de consommation humaine publiés par Santé Canada. L'autre facteur qui entre en jeu, cependant, ce sont les craintes des collectivités - aussi bien pour Pêches et Océans que pour d'autres ministères. Il arrive que les collectivités, de façon tout à fait compréhensible, s'inquiètent même lorsque le risque a été évalué et que tout sujet de préoccupation semble avoir disparu. Pourtant les collectivités s'inquiètent. Nous poursuivons souvent nos tests de contrôle et nous collaborons avec Santé Canada en vue de réunir d'autres renseignements pour apaiser leurs inquiétudes, même si aucun risque pour la santé n'a été signalé
M. Martin Bergmann, directeur, Développement du programme des sciences de l'Arctique, Pêches et Océans Canada: Sénateur Cook, je veux ajouter quelque chose à ce qu'a dit M. Papst. Toute cette question des contaminants que l'on trouve dans les aliments consommés dans le Nord et de la façon dont on s'y attaque en ce qui concerne la population est un très gros problème non seulement chez nous, au Canada, mais aussi dans le monde. Pour essayer de le régler, nous comparons, avec nos partenaires internationaux, des échantillons prélevés dans différentes parties des collectivités circumpolaires. Les cours d'eau, l'océan Arctique, l'océan Atlantique et l'océan Pacifique sont tous en intercommunication. Les contaminants vont constamment de l'un à l'autre.
Le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord, dont M. Papst vient de parler, est un programme administré par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ce ministère gère une enveloppe de financement, dont il fait bénéficier les services de recherche, les organismes du Nord ou Santé Canada, qui utilisent cet argent pour lancer des études sur différentes questions.
Lorsque surgit un problème de santé humaine dans une collectivité donnée ou une série de régions du Nord, le MAINC affecte une partie de cette enveloppe au service ou à l'organisme qui a la compétence voulue pour recueillir les renseignements nécessaires.
Par exemple, si une collectivité avait des inquiétudes au sujet de la présence de contaminants dans les bélougas, il peut communiquer avec un service ou un groupe externe pour l'encourager à effectuer des recherches. Ces liens, dont M. Papst a parlé, nous permettent de recueillir des renseignements au sommet de la chaîne alimentaire; un autre service étudie la consommation.
Cependant, c'est le MAINC, au travers du Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord, qui dirige la recherche. Il pose les questions et travaille avec les différents services. Il peut jouer avec les fonds dont il dispose, même s'il doit composer avec la taille de son enveloppe.
Le sénateur Cook: Une fois que vous avez obtenu ces renseignements de source sûre, j'espère qu'il y aura des liens assez forts avec les divers services pour faire en sorte que l'impact sur la population du Nord de tous contaminants qui seraient découverts soit réduit au minimum.
Qui est responsable en dernier ressort de l'habitat du poisson dans le Nord?
M. Bergmann: C'est à M. Clarke qu'il faut poser cette question, puisqu'il gère le programme de l'habitat.
M. Clarke: Le ministère des Pêches et des Océans.
Le sénateur Cook: Qui est responsable de la santé des poissons?
M. Clarke: Le ministère des Pêches et des Océans. Cela fait partie de nos responsabilités en matière de gestion et de conservation.
Le président: J'aimerais revenir sur une question posée un peu plus tôt à M. Cooley par le sénateur Mahovlich à propos du changement climatique.
Je voudrais que l'on parle du Nord. Lorsque nous nous sommes rendus dans diverses collectivités du Nord, on a constaté que le changement climatique était un grand sujet de préoccupation pour les gens de cette région. On disait jadis que le Nord était comme un canari dans un puits de mine - il nous prévenait de ce qui allait se passer par la suite dans le Sud.
C'est lorsque nous sommes allés dans le Nord en l'an 2000 que l'on a porté à notre attention les préoccupations des gens au sujet de l'état de la recherche dans cette région. Cette année-là, un groupe de travail conjoint sur la recherche dans le Nord, créé par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le CRSNG, et le Conseil de recherches en sciences humaines, le CRSH, a indiqué que la recherche canadienne dans cette région était en crise. Il a précisé que, si rien n'était fait, le Canada ne serait pas en mesure de remplir ses obligations internationales en matière de sciences et de recherches, de contribuer au règlement de questions d'importance mondiale et de respecter ses obligations fondamentales, au niveau national, pour ce qui est de contrôler, de gérer et de sauvegarder l'environnement du Nord ainsi que de faire face aux questions sociales qui surgissaient.
Ma question découle donc de ces quelques remarques que je viens de faire. Remplissons-nous nos obligations internationales en matière de sciences et de recherches? Ce que dit le groupe de travail conjoint est-il exact?
M. Cooley: Je vais demander à M. Bergmann de vous parler du rôle que le MPO joue dans certaines des études sur le changement climatique qui se déroulent en ce moment dans l'Arctique.
Il est très difficile de répondre à votre question et de vous dire si nous en faisons assez ou pas. Vous ne devez jamais demander à un scientifique s'il a assez d'argent pour faire ses recherches. On sait très bien ce qu'il va vous répondre. Bien sûr, nous pouvons toujours utiliser plus d'argent pour en faire davantage.
Cependant, on ne peut s'attendre à ce qu'un ministère ou un pays résolve à lui seul la question du changement climatique et de la création de modèles de changement climatique. C'est là une question qui requiert la coopération de nombreux pays. Les scientifiques du MPO sont, à n'en pas douter, très impliqués dans ce domaine, et aussi bien M. Bergmann que moi assistons chaque année à la réunion du Conseil scientifique de l'océan Arctique - qui est une réunion de divers pays circumpolaires organisée pour parler de questions comme le changement climatique.
Il se fait beaucoup de choses. Monsieur Bergmann, peut-être voudriez-vous dire quelque chose de plus sur cette question.
M. Bergmann: Sénateur Comeau, vous avez posé une très bonne question. Vous faites référence à un rapport du groupe de travail du CRSNG qui a été bien accueilli au Canada par les gens du Nord ainsi que par les ministères et les universités dans le Sud. Il a également été diffusé dans le monde. On y trouve quelques commentaires énergiques sur la position du Canada en ce qui concerne les sciences de l'Arctique. Le terme «crise» n'est pas un mot que l'on peut employer facilement de nos jours. Cependant, il est clair que les sciences de l'Arctique constituent un secteur dans lequel il faudra certainement investir davantage si l'on veut être en bonne position pour répondre aux questions sur la gestion maintenant et à l'avenir, lorsque nous devrons faire face aux grands problèmes mondiaux comme le changement climatique.
En ce qui concerne ce que vous avez dit, à savoir que l'Arctique était «le canari dans le puits de mine», c'est effectivement le cas d'après les milieux scientifiques internationaux. Quel que soit l'angle sous lequel on envisage cette question, c'est le Nord qui indique ce qui se passe vraiment. Il y a de nombreuses données qui viennent étayer la nature des différentes questions, mais il ne fait aucun doute que d'énormes changements sont en cours.
Le groupe de travail affirme clairement que le Canada ne respecte pas toujours ses engagements internationaux dans le domaine scientifique. C'est une dure façon de s'exprimer. Le Canada a un immense territoire dans l'Arctique. Compte tenu de notre population et d'autres considérations, nous devons trouver comment, sur le plan scientifique, nous allons donner la priorité au Nord par rapport à toutes nos autres responsabilités territoriales. Ce que le groupe de travail essaie de faire ressortir, c'est qu'il est vraiment nécessaire, pour s'occuper du Nord, de créer des partenariats chaque fois que la chose est possible.
M. Cooley a déclaré que si on demandait à un scientifique s'il avait assez d'argent pour ses recherches, il répondrait toujours qu'il pourrait utiliser des ressources supplémentaires. Cela dépend de la mesure dans laquelle vous vous sentez capable de prendre des décisions sur la base de renseignements limités. Pour certaines questions, vous pouvez disposer d'une quantité donnée de renseignements et être persuadé que vous avez la marge de confiance que vous désirez. Toutefois, si l'on pose des questions difficiles, si l'on demande par exemple à un scientifique s'il est possible de capturer 10 animaux, à une unité près, ou 10 animaux, à 10 unités près, la quantité de renseignements nécessaire pour répondre à ces questions variera grandement.
Il est certain que nos partenaires internationaux ont manifesté un très grand intérêt à travailler dans l'Arctique canadien sur des questions circumpolaires, parce qu'ils sont conscients du fait que le Nord n'est pas simplement une partie gelée de la planète, où intrants et extrants n'ont aucune importance, mais qu'il est plutôt un secteur dynamique de la terre. Et dans un scénario de changement climatique, il est encore plus dynamique. Les intrants et les extrants prennent de l'importance. Les gens réalisent qu'il affecte leur vie non seulement dans les collectivités circumpolaires mais dans d'autres régions.
Vous avez demandé si le Canada en faisait suffisamment pour la science au niveau international. Tout ce que je peux vous dire, c'est que nous ne pouvons pas répondre à tous les coups de téléphone que nous recevons de la part de partenaires internationaux qui voudraient réaliser des projets avec nous.
Le président: Je m'intéresse au transfert d'oeufs d'omble de l'Arctique pour l'aquaculture. Si cette question n'est pas de votre ressort, vous n'avez pas besoin d'y répondre. Savez-vous que des oeufs sont transférés dans le Sud pour l'aquaculture?
M. Papst: C'est moi qui vais répondre à cette question. Si vous faites une recherche bibliographique à mon sujet, vous verriez que mon nom est attaché à certaines des recherches faites sur les oeufs d'omble importés de deux endroits dans l'Arctique - le nord du Labrador dans les années 80, et la presqu'île Kent, dans les territoires du Nord-Ouest, à la fin des années 70. Il s'agit de deux projets de recherche qui ont été abandonnés par Pêches et Océans.
Depuis lors, aussi bien dans les Territoires du Nord-Ouest qu'au Nunavut, les conseils de cogestion et les collectivités locales ont indiqué clairement qu'ils ne voulaient pas que l'on poursuive ce genre de recherches. Nous n'avons rien fait dans ce domaine pendant un certain nombre d'années. Quelques transferts ont été effectués au début des années 70 et 80.
Le président: Cela m'amène à poser deux ou trois autres questions. On m'a dit que dans certains centres de pisciculture du Sud, on élevait actuellement des ombles de l'Arctique. Je ne sais pas exactement où ils se trouvent. J'ai lu cette fin de semaine qu'il y en avait un qui s'ouvrait en Nouvelle-Écosse.
Je suis quelque peu surpris qu'une telle chose se produise, car ces gens doivent obtenir leurs oeufs et leurs géniteurs quelque part de façon à pouvoir reconstituer leurs stocks. Si vous faites venir des oeufs dans le Sud, n'est-ce pas considéré comme l'introduction d'une espèce exotique? N'est-ce pas quelque peu semblable à ce qui s'est passé sur la côte Ouest lorsqu'on y a introduit le saumon de l'Atlantique? Ne serions-nous pas en train d'introduire dans le Sud une espèce étrangère si nous y faisions venir des oeufs d'omble de l'Arctique?
M. Papst: L'omble de l'Arctique se rencontre dans des zones aussi bien polaires que subpolaires. Celui dont vous parlez, qui est utilisé pour l'aquaculture, vient de géniteurs qui existent dans le Sud. Dans la majorité des cas, il est issu du frai original de la fin des années 80. Les stocks sont élevés dans des établissements commerciaux. Les géniteurs viennent de là. La plupart des collectivités de l'Arctique, pour un certain nombre de raisons - à la fois économiques et culturelles -, ont fait savoir qu'elles ne voulaient que des transferts se fassent à partir de l'Arctique.
Il existe dans les Territoires du Nord-Ouest un comité des transferts qui étudie les demandes d'ensemencement. Je ne pense pas qu'il ait approuvé un transfert d'omble de l'Arctique depuis de nombreuses années. Au Nunavut, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, en coopération avec les comités de chasseurs et de trappeurs et les collectivités, a établi une politique en matière de capture d'animaux vivants, qui interdit essentiellement ce genre de mouvement ou la capture d'animaux vivants pour ces raisons. On ne peut effectuer ce genre de mouvement ou capturer des animaux vivants pour l'aquaculture ou même pour la recherche, sauf dans des cas très précis.
Le président: L'omble remonte aux années 80, ce qui signifie qu'il y a un élevage considérable en consanguinité. Je suppose qu'après toutes ces années, ces pauvres ombles de l'Arctique doivent se livrer à des duels de banjos maintenant.
M. Papst: Je ne crois que cela aille jusque -là, mais il y a certainement élevage en consanguinité.
Le sénateur Watt: Je ne suis pas très sûr de vous avoir bien compris lorsque vous avez dit que des oeufs d'omble de l'Arctique avaient été transférés dans le Sud au cours des années 80. Savez-vous si Pêches et Océans a une politique qui permet une telle chose? Dans le cas contraire, le gouvernement fédéral ne devrait-il pas intervenir pour mettre un peu d'ordre dans tout ça?
M. Papst: J'ai deux commentaires à faire. Même dans les années 80, il fallait obtenir une autorisation pour pouvoir transférer des oeufs. À cette époque, on acceptait le transfert dans le Sud pour la recherche en matière de pisciculture. On estimait alors que l'on pourrait ainsi développer l'industrie aussi bien dans le Nord que dans le Sud.
Il y a des protocoles qui exigent le respect de certaines conditions pour ce qui est du transfert. Depuis 1980, aussi bien les Territoires du Nord-Ouest que le Nunavut disposent de politiques en matière de transfert. Pêches et Océans soit siège au comité des transferts, ce qui est le cas dans les Territoires du Nord-Ouest, soit suit la recommandation du gouvernement du Nunavut sur la capture d'animaux vivants, qui est essentiellement de l'interdire.
En résumé, si la décision de transférer des oeufs devait être prise aujourd'hui, elle appartiendrait aux collectivités.
Le sénateur Watt: Si on va les transférer dans des lacs, où l'eau plus chaude permettra au poisson de grandir plus rapidement, ne faudrait-il pas effectuer une évaluation environnementale comme l'exige le ministère de l'Environnement?
M. Papst: Oui, en effet.
Le sénateur Watt: En d'autres termes, le gouvernement fédéral pourrait intervenir si l'une des provinces agissait dans son propre intérêt et transférait ces poissons ailleurs?
M. Papst: Oui. .
Le sénateur Watt: J'ai participé aux premières étapes de la coopération circumpolaire - on a appelé cela le Conseil de l'Arctique. Au cours des discussions entreprises pour savoir si certaines recherches scientifiques devaient être effectuées au niveau international, les participants s'efforçaient de trouver des compromis fondés sur des raisons plus politiques que scientifiques. Pêches et Océans bénéficie-t-il, dans le cadre du Conseil de l'Arctique, des données recueillies et des recherches scientifiques entreprises par les différents pays de l'Arctique?
M. Bergmann: Le Conseil de l'Arctique a évolué, comme vous le savez, au cours de ces dernières années. Une série de disciplines ont été créées au sein du Conseil de l'Arctique pour effectuer certains types de recherches dans divers endroits. Le Conseil de l'Arctique comprend la Convention sur la faune et la flore de l'Arctique ainsi que le programme pour la protection du milieu marin de l'Arctique. Il y a également une série d'autres organismes qui se sont regroupés ou qui découlent de la formation du Conseil de l'Arctique.
Selon la participation des organismes et des universités, le Canada est représenté dans un grand nombre de ces comités pour contribuer à structurer au niveau international les intérêts dans ces secteurs. Nous bénéficions énormément de cette masse de connaissances offertes par les différents groupes qui appartiennent au Conseil de l'Arctique. Les deux ministères qui participent aux travaux du Conseil de l'Arctique sont le MAINC et le MAECI. Nous nous joignons à eux pour assister à certaines réunions qui comportent des éléments scientifiques au sujet desquels nous pouvons apporter notre contribution.
Le sénateur Watt: J'imagine que le Canada bénéficie des résultats des travaux scientifiques, mais je ne suis pas sûr que les gens qui vivent dans l'Arctique profitent réellement des renseignements qui sont diffusés. J'en doute. Par exemple, nous parlons des effets sur le poisson, mais on ne semble pas vraiment s'inquiéter des effets sur l'être humain. Le Sénat devrait peut-être créer un nouveau comité. On pourrait l'appeler comité de lutte contre les contaminants de l'environnement qui affectent l'espèce humaine.
M. Bergmann: Sénateur Watt, votre remarque est pertinente. Nous sommes en présence d'un écosystème. C'est un mécanisme très complexe, où divers éléments du réseau alimentaire agissent les uns sur les autres. C'est un véritable combat que nous menons pour essayer de créer des programmes multidisciplinaires au sein desquels des pays ainsi que des ministères et des organismes collaboreraient pour recueillir les nombreux renseignements sur le Nord qui nous font encore tant défaut.
Le Conseil de l'Arctique est encore relativement nouveau. Il n'existe que depuis huit ou neuf ans, peut-être dix. Je sais que Mary Simon a beaucoup travaillé sur ce dossier. On m'a dit que le Conseil de l'Arctique veut cerner un certain nombre de grands sujets de recherche auxquels il se consacrerait dans sa nouvelle configuration.
Il a créé l'Université de l'Arctique, un organisme virtuel qui doit permettre aux gens du Nord de faire, entre autres, des études postsecondaires. C'est un organisme en évolution. Vous avez raison de dire qu'il se bat avec la question de la diffusion de l'information - à la fois au Canada et dans le monde.
Le sénateur Watt: Je parle de l'écosystème. Je vis dans une région qui semble avoir été fortement affectée par le changement climatique, c'est-à-dire le réchauffement de la planète. La végétation pousse très vite dans la région subarctique. Ce qui se passe dans le Grand Nord a-t-il de l'importance?
Il n'y a pas si longtemps, j'étais assis dans mon salon quand j'ai entendu que la température allait descendre à 42 degrés sous zéro, et il pleuvait. Il se passe quelque chose. Il n'y a pas de doute.
Nous parlons d'habitat du poisson et nous semblons maintenant vouloir nous en inquiéter et rattraper notre retard. Le changement climatique est une autre grande question qui prend le devant de la scène. Il va affecter toutes les espèces qui existent sur notre planète.
Nous sommes si loin de bien comprendre ce que nous devons faire. Les milieux scientifiques effectuent des études mais ils n'en tirent pas de conclusions. Ceux qui vivent dans l'Arctique commencent à être fatigués par cette situation. Les scientifiques parlent beaucoup mais ils n'agissent pas. Lorsqu'ils trouvent une solution, les choses semblent en rester là.
M. Bergmann: Sénateur Watt, votre remarque est très pertinente. Cependant, lorsque vous abordez une question comme le changement climatique, vous devez étudier l'évolution du temps sur une longue période avant de pouvoir dire s'il y a eu un véritable changement.
Le sénateur Watt: Il y a un véritable changement. Ce n'est pas peut-être, c'est certain.
Le sénateur Johnson: J'ai une question sur la coopération internationale qui est liée à ce dont le sénateur Watt et vous-même parliez, monsieur le président. Je pense que M. Bergmann va pouvoir y répondre.
Je suis sûre que vous connaissez le «Volet nordique de la politique étrangère du Canada», qui a été adopté en juin 2000. Pourriez-vous éclairer le comité au sujet des principaux éléments ou aspects de ce document, en ce qui concerne surtout les autres questions soulevées ici aujourd'hui à propos aussi bien du Conseil de l'Arctique que de la coopération circumpolaire? Est-ce que cette nouvelle politique apporte quelque chose en ce moment? Le fera-t-elle? Est-elle utile?
M. Bergmann: Je connais bien le «Volet nordique de la politique étrangère du Canada».
Le sénateur Johnson: S'agit-il simplement d'une extension de la politique actuelle?
M. Bergmann: Notre ministère a fourni certains renseignements pour ce projet. Je n'ai pas beaucoup de détails ici. C'est un document que nous utiliserons pour les questions à caractère international afin de chercher des mécanismes permettant d'améliorer, entre autres, l'échange de renseignements entre pays. Je crois que cette initiative est dirigée par le ministère des Affaires étrangères et qu'elle en est à un stade où l'on discute encore beaucoup de la politique elle-même. Je serai heureux d'obtenir d'autres renseignements et de vous les communiquer.
Le sénateur Johnson: Il y a de nombreuses zones arctiques dans le monde. Bien sûr, nous ne sommes pas les seuls à être affectés par des contaminants et tous ces autres problèmes. La politique vise essentiellement à permettre à divers pays de collaborer pour résoudre ces questions. Je n'ai plus entendu parler de cette politique depuis qu'elle a été annoncée. Je suis curieux de savoir si quelque chose a déjà été fait dans le cadre de cette politique. A-t-elle eu un effet sur le plan international en ce qui concerne notre travail avec des pays comme la Finlande, la Norvège, l'Islande, la Suède ou la Russie, qui font tous partie du monde nordique? J'aimerais bien que vous me fournissiez des renseignements à ce sujet.
M. Bergmann: Je le ferai.
Le sénateur Adams: Actuellement, dans le Grand Nord, des chercheurs scientifiques étudient la planète Mars. Ce projet a-t-il été approuvé par le gouvernement fédéral ou le ministère des Affaires indiennes? Comment ces gens-là ont-ils été obtenu l'autorisation d'être là?
Je sais qu'ils ont construit un bâtiment scientifique dans le Grand Nord. Ce sont les Américains qui l'ont construit. Quelle est l'approche de ces gens? Comment ce système fonctionne-t-il?
M. Bergmann: M. Papst va sans doute pouvoir répondre à une partie de votre question. Ce que je sais, c'est que le programme de la NASA dont vous parlez, le Programme Mars sur l'île Devon, a bien été approuvé. Les Américains ont suivi la filière normale pour obtenir les permis nécessaires aux recherches qu'ils effectuent. Ils ont eu des discussions à je ne sais quel niveau avec le gouvernement du Nunavut. Voilà ce que j'en sais. Ressources naturelles Canada, avec son Étude du plateau continental polaire, participe également aux recherches.
Je n'ai pas de détails. M. Papst pourra peut-être vous en dire davantage.
M Papst: Je sais que le Nunavut a un programme de permis qui exige l'avis des collectivités pour toute recherche faite au Nunavut.
Le sénateur Cook: Revenons à quelque chose de plus simple, messieurs, et ma question s'adresse à tous. Je sais que l'on a besoin d'un permis pour vendre du poisson. Faut-il un permis pour vendre des oeufs de poisson?
M. Papst: C'est une bonne question. Pêches et Océans doit approuver tout transfert de poisson en vertu de notre règlement sur la protection de la santé du poisson. Mais je ne suis pas sûr cependant qu'il s'agisse vraiment d'un permis.
Le président: Vous pourrez nous fournir ce renseignement plus tard.
M. Clarke: Nous n'émettons pas généralement de permis pour vendre quelque chose. Nous émettons des permis pour attraper quelque chose. S'il s'agit d'attraper des poissons adultes pour en retirer les oeufs, il faut obtenir un permis auprès du ministère des Pêches et des Océans ou de tout organisme compétent.
Pour ce qui est du transport des oeufs, il pourrait y avoir quelque chose également dans le règlement sur la santé du poisson.
Le sénateur Cook: Je ne sais ce qui vient d'abord, le poulet ou l'oeuf, mais on doit attraper le poisson pour prendre les oeufs.
Le sénateur Watt avait une question qu'il m'a demandé de poser. Il voudrait savoir quel pays préside actuellement le Conseil de l'Arctique.
M. Bergmann: Je crois que jusqu'à tout récemment, c'étaient les Américains. Il me semble que c'est maintenant le tour des Finlandais, mais je n'en suis pas sûr. Il se peut que ce soit toujours les Américains, mais je pourrai aussi vous obtenir ce renseignement.
Le président: Au nom du comité, je voudrais vous remercier tous d'être venus ce soir. Cette réunion a été très instructive, et nous vous en sommes très reconnaissants. Nous espérons que nous pourrons communiquer à nouveau avec vous au fur et à mesure que nous avancerons dans notre programme.
Vous nous avez transmis ce soir des renseignements extrêmement importants.
Si les membres du comité le veulent bien, nous mettrons en annexe les documents que nous a donnés la semaine dernière la société foncière. Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord?
Des voix: D'accord.
M. Cooley: Au nom des représentants du MPO qui sont ici ce soir, je voudrais remercier le comité d'avoir pris le temps de discuter avec nous de ces questions qui nous intéressent particulièrement. Vous avez peut-être remarqué que M. Bergmann est arrivé avec un sac. Nous avons, pour chacun des sénateurs et pour certaines des personnes qui nous ont aidés, le très recherché tee-shirt du secteur scientifique du MPO, que, je l'espère, vous porterez comme nous avec orgueil. Une fois encore, je vous remercie de nous avoir reçus.
La séance est levée.