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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 31 - Témoignages (séance du 5 juin)


OTTAWA, le mercredi 5 juin 2002

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 17 h 35 pour étudier les enjeux stratégiques touchant l'industrie du transport interurbain par autocar.

Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Je tiens à vous souhaiter la bienvenue aux audiences publiques s'inscrivant dans l'étude spéciale du comité sur le transport interurbain par autocar. Le ministre des Transports a demandé au comité d'entreprendre cette étude, pour des raisons que je mentionnerai sous peu.

Nous avons commencé nos travaux à la fin de l'an dernier, et nous avons lancé les audiences publiques en février de cette année. Nous sommes tenus de présenter un rapport avant la fin de 2002. Je suis convaincue que nous aurons suffisamment de temps pour étudier convenablement la question et formuler des recommandations.

Nous avons déjà entendu un certain nombre de témoins ici à Ottawa, ainsi qu'à Montréal, Halifax, Vancouver, Calgary et Toronto. Nous accueillons aujourd'hui Mme Patricia Raymaker, présidente du Conseil consultatif national sur le troisième âge, et Mme Louise Plouffe, de Santé Canada.

Nous avons entendu le témoignage de groupes d'aînés de l'Atlantique canadien et de l'Ouest. Il semble qu'il y a certains problèmes liés aux services d'autocar inadéquats qui sont offerts à la population du troisième âge, surtout en régions rurales.

Le conseil a récemment distribué aux membres du comité un bulletin d'information traitant des enjeux du transport pour les aînés dans les collectivités rurales. Par conséquent, nous sommes particulièrement intéressés à entendre le point de vue du conseil sur le sujet.

À titre d'information pour notre témoin, j'expliquerai brièvement pourquoi on nous a invités à étudier la question des autocars interurbains. Le problème tient essentiellement au fait que l'utilisation des services de transport interurbain en autocar baisse constamment depuis plusieurs décennies. Cette situation est troublante, car l'autocar est un élément important du système de transport de passagers. L'autocar peut aller pratiquement n'importe où. C'est un mode de transport respectueux de l'environnement, et qui a toujours été relativement peu coûteux.

On peut expliquer ce déclin de plusieurs façons. On peut supposer que les gens sont plus aisés qu'autrefois et qu'ils se déplacent en automobile. Il est possible que plus de gens vivent dans les grandes villes. On peut aussi attribuer la situation à une réglementation gouvernementale trop lourde, qui varie trop d'une province à l'autre.

C'est ce que nous comptons découvrir au cours des semaines et des mois à venir.

Mme Patricia Raymaker, présidente, Conseil consultatif national sur le troisième âge: Le Conseil consultatif national sur le troisième âge est heureux d'avoir l'occasion de répondre à l'étude spéciale du Comité sénatorial permanent des transports et des communications sur le transport interurbain par autocar. Au nom du conseil, je tiens à vous remercier de votre intérêt à prendre connaissance de nos opinions à l'égard du transport interurbain par autocar pour les aînés.

Le Conseil consultatif national sur le troisième âge, le CCNTA, a été créé par décret en 1980 en vue d'aider et de conseiller le ministre de la Santé à l'égard des enjeux touchant le vieillissement de la population canadienne et la qualité de vie des aînés. Le CCNTA examine les besoins et les problèmes des aînés et recommande des mesures correctives, assure une liaison auprès d'autres groupes qui s'intéressent au troisième âge, encourage la discussion publique, et publie et diffuse de l'information sur le vieillissement.

Bien que le conseil remarque une baisse générale importante de l'achalandage à l'égard du transport interurbain par autocar, j'aimerais signaler que les aînés — pour diverses raisons — continuent d'être de grands utilisateurs du transport interurbain par autocar, et que ce moyen de transport contribue de façon importante au maintien de leur autonomie et à l'amélioration de leur qualité de vie.

Pour de nombreux aînés — en particulier le nombre croissant d'aînés âgés de 80 ans et plus —, le transport interurbain par autocar demeure le seul mode de transport long-courrier viable, que ce soit pour un voyage d'agrément ou pour rendre visite aux parents et amis. Ce groupe d'aînés, qui se chiffre à presque 1,3 million de personnes cette année, est le principal groupe d'utilisateurs du transport interurbain par autocar chez les aînés, et il connaîtra une croissance de 18 p. 100 au cours des cinq prochaines années, et de 32 p. 100 au cours des dix prochaines années.

Par conséquent, dans le monde d'aujourd'hui, où la mobilité de tous les Canadiens est très supérieure à celle qu'elle l'était il y a une génération, le fait de maintenir des liens sociaux avec sa famille et ses amis, dont un grand nombre peut habiter une localité éloignée, peut être une source de joie pour les aînés et donner un sens à leur vie. De plus, les aînés peuvent se fier au transport interurbain par autocar pour se rendre dans les grands centres urbains en vue d'obtenir des services médicaux importants.

Le Conseil consultatif national sur le troisième âge a constaté, dans le cadre de ses consultations antérieures auprès des aînés, que les aînés perçoivent le transport et la mobilité comme des éléments clés de leur autonomie. Si l'accès au transport public dans la localité est très importante à cet égard, le transport interurbain l'est aussi.

Aujourd'hui, mes commentaires s'attacheront à trois obstacles éventuels pour les aînés dans le domaine du transport interurbain par autocar: la disponibilité, l'abordabilité et l'accessibilité. Enfin, je répondrai, selon le point de vue d'un aîné, à certaines des questions soulevées dans votre document d'information.

La principale préoccupation du CCNTA concernant la disponibilité du transport interurbain par autocar est liée aux conséquences possibles d'une déréglementation de l'industrie. Comme nous le savons, il y a, aux endroits où le transport interurbain par autocar est actuellement visé par une réglementation, un interfinancement des coûts entre les circuits plus rentables et les circuits qui desservent les régions rurales et les petites localités, qui sont moins achalandées. Dans d'autres cas, les tarifs sont fixés en fonction des circuits plus achalandés, de façon à ce que les entreprises s'assurent une rentabilité raisonnable tout en dispensant le service aux collectivités rurales ou aux petites localités.

Le Conseil consultatif national sur le troisième âge s'opposerait à toute déréglementation de l'industrie qui occasionnerait une réduction considérable ou l'élimination de l'accès des aînés des régions rurales au transport interurbain par autocar. La disponibilité de ce service est particulièrement importante en Saskatchewan et dans les provinces de l'Atlantique, surtout à Terre-Neuve, où presque 50 p. 100 des aînés vivent à l'extérieur des centres urbains. Toutefois, le CCNTA ne s'opposerait pas à une certaine forme de déréglementation, si on veille à ce que les routes rurales soient entretenues, à ce que les normes de sécurité demeurent élevées et soient respectées, et à ce que les tarifs demeurent stables ou n'augmentent pas plus rapidement que le taux d'inflation.

Pour ce qui est de l'abordabilité, le revenu des aînés canadiens est inférieur à celui de la plupart des autres groupes d'âge. Cela est particulièrement vrai dans le cas des aînés plus âgés, et à plus forte raison pour les femmes de ce groupe qui vivent seules. Le revenu moyen pour tous les aînés s'élevait à 23 080 $ en 1995; dans le cas des femmes seules de ce groupe, le revenu moyen était de 17 060 $. Même si, au cours des dernières décennies, le pourcentage d'aînés vivant sous le seuil de la pauvreté a baissé de façon considérable, la plupart des aînés doivent composer avec un budget modeste. Il est probable que les écarts de revenu chez les adultes faisant actuellement partie de la population active se maintiennent lorsque ces personnes arriveront à la retraite. La proportion d'aînés à revenu faible ou modeste demeurera probablement élevée dans les régions rurales du pays, où le taux de chômage est élevé.

Même si l'automobile est toujours le mode de transport privilégié pour la plupart des aînés, ce n'est, bien souvent, pas une option financière réaliste. Les coûts liés à l'achat et à l'entretien d'un véhicule — en particulier les primes d'assurance — peuvent rendre cette option inabordable pour un grand nombre d'aînés à revenu fixe. Compte tenu de cette réalité, et du fait que le transport ferroviaire ou aérien est considérablement plus coûteux que le transport en autocar, cette dernière option est bien souvent la plus économique pour les aînés, surtout ceux dont le revenu est plus modeste.

Le conseil, tout en reconnaissant le besoin des entreprises privées d'obtenir un rendement raisonnable de leur investissement, n'appuierait aucune politique de réglementation ou de déréglementation qui rendrait le transport interurbain par autocar moins abordable pour les aînés. Il est très important que le transport interurbain par autocar soit disponible et abordable pour les aînés. Dans le cas du niveau d'achalandage chez les aînés, la disponibilité et la rentabilité sont liées de façon inextricable.

Aux fins de mon exposé, lorsque je parle de l'accessibilité du transport interurbain par autocar pour les aînés, je fais surtout référence aux préoccupations qui concernent l'accessibilité pour tous les aînés — par exemple, les escaliers d'autocar mal conçus, l'éclairage inadéquat dans les autocars et dans les terminaux, et l'absence de préposés dûment formés pour aider les aînés.

Les personnes handicapées ne constituent pas un groupe homogène, et il en va de même pour les aînés aux prises avec un handicap. Même si de nombreux aînés, y compris les plus âgés continuent de jouir d'une grande autonomie, ceux qui sont handicapés ont des besoins et des exigences beaucoup plus importantes à l'égard des autocars interurbains. Ces besoins varient en fonction de leurs capacités fonctionnelles et du type d'invalidité — au chapitre, par exemple, de la mobilité, de l'agilité, de la vision et de l'ouïe, de la parole et des capacités cognitives. Les politiques gouvernementales visant à répondre aux besoins des aînés handicapés doivent tenir compte non seulement des obstacles physiques, mais aussi des obstacles au chapitre des communications et des attitudes.

Une étude, menée par Transports Canada en 1988, révèle que pour 75 p. 100 des personnes qui éprouvent de la difficulté à recourir au transport en commun, les principales difficultés tiennent à l'embarquement et au débarquement. Quelque 51 p. 100 des gens avaient de la difficulté à se rendre à l'arrêt d'autobus. Ces chiffres concernent l'ensemble de la population canadienne. Il y a fort à parier que ces chiffres sont supérieurs chez les aînés qui sont plus âgés, car le potentiel d'invalidité est plus élevé.

Parmi les autres problèmes des aînés handicapés qui doivent recourir au transport interurbain en autocar, mentionnons les difficultés à entrer, à sortir et à se déplacer dans le terminal, et le déneigement et le déglaçage médiocres des terminaux et des arrêts d'autobus. Afin qu'on surmonte certaines de ces barrières à l'accès, le Conseil consultatif national sur le troisième âge suggère, tout d'abord, que les systèmes de transport existants, comme l'établissement des horaires, l'embarquement, le débarquement, le déneigement et le matériel, comme les escaliers des autobus et les dispositifs favorisant l'accès aux chaises roulantes, soient adaptés de façon à maximiser l'utilisation par des aînés aux prises avec divers degrés d'invalidité. Deuxièmement, l'affichage autour des terminaux et des arrêts d'autobus devrait être amélioré. L'éclairage, l'information sur les horaires, les boîtes vocales et les télécommunications doivent être mieux adaptés aux besoins des aînés. Troisièmement, la formation de gens qui travaillent pour les entreprises d'autocar, y compris les chauffeurs, devrait s'assortir d'un volet de sensibilisation aux besoins des aînés. Cette formation devrait fournir de l'information sur les méthodes de communication appropriées.

Le CCNTA reconnaît que le transport interurbain par autocar relève des provinces et des territoires, et que, même dans le cas des autocars interurbains qui franchissent les frontières provinciales — ce qui, normalement, serait visé par une réglementation fédérale —, l'autorité réglementaire fédérale dans ce domaine a été déléguée aux provinces et aux territoires. Toutefois, le conseil demande instamment au gouvernement fédéral, au moment d'apporter des modifications à la Loi sur le transport par véhicule à moteur de 1954, de veiller à ce que les dispositions relatives au service adapté aux personnes handicapées tiennent compte des aînés. De plus, l'accès au transport interurbain par autocar devrait être une condition de la délégation du pouvoir réglementaire fédéral aux provinces et aux territoires.

Le conseil tient à signaler que les normes applicables au transport interurbain par autocar peuvent varier d'une région du pays à l'autre, car la réglementation dans le domaine a été confiée aux provinces et aux territoires. Pour surmonter certains des problèmes potentiels en matière de compétence qui pourraient miner l'amélioration de l'accès aux aînés handicapés, le CCNTA suggère que l'information touchant les pratiques innovatrices liées aux services de transport ou l'adaptation du matériel en vue d'améliorer l'accès aux aînés handicapés soient grandement diffusées afin qu'on puisse prendre des mesures dans plusieurs régions. De plus, le conseil suggère que le gouvernement fédéral crée des incitatifs financiers afin d'encourager les provinces et les territoires à se pencher sur les facteurs qui influent sur l'accessibilité du transport par autocar.

Je répondrai maintenant à certaines des questions soulevées dans votre document d'information. Ensuite, je serai heureuse de répondre à vos questions. Si je ne suis pas en mesure de répondre à vos questions, j'en prendrai note et je vous acheminerai une réponse écrite.

La première question sur laquelle je me penche est la suivante: quelle est l'importance des services d'autocar dans les régions rurales et éloignées pour les habitants de ces dernières? Manifestement, le Conseil consultatif sur le troisième âge ne peut prétendre parler au nom de tous les Canadiens. Toutefois, nous voulons insister sur le fait que les services d'autocar dans les régions rurales et éloignées sont très importants pour les aînés. Il y a fort à parier que ces services revêtent une grande importance pour tous les groupes d'âge des provinces où les populations sont dispersées, comme dans les Prairies et dans les provinces de l'Atlantique.

La deuxième question est la suivante: les normes de sécurité sont-elles suffisamment strictes pour les autocars? Les dispositions du Code national de sécurité sont-elles suffisantes?

Même si le CCNTA croit que, de façon générale, les dispositions relatives à la sécurité semblent adéquates, le conseil aimerait les examiner avant de les commenter en détail. Les opinions sur les normes de sécurité évoluent rapidement lorsqu'on acquiert des connaissances à l'égard des causes de blessures et des méthodes de prévention. Le conseil recommande qu'on procède régulièrement à l'examen et à la modification de ces normes, en fonction des recherches actuelles.

La troisième question est la suivante: quelles sont les possibilités de desserte des localités rurales et éloignées en utilisant des véhicules autres que de grands autocars? Les petites fourgonnettes et autres véhicules de ce genre constituent-ils une option possible pour ces parcours?

Il faudrait que je consulte mes collègues du CCNTA avant d'appuyer officiellement une telle proposition, mais je peux dire, pour l'instant, que le recours à d'autres catégories de véhicules pour les circuits ruraux semble être une bonne idée. Bien sûr, pour que le CCNTA appuie une telle initiative, il serait crucial qu'on applique des normes de sécurité équivalentes à celles qui régissent les autocars, et que ces véhicules réduits tiennent compte des enjeux de la disponibilité, de l'abordabilité et de l'accessibilité.

Enfin, vous posez la question suivante: «existe-t-il une manière claire et évidente d'enrayer la baisse de fréquentation des services d'autocar, manifeste depuis des années? Si la réponse est la réduction des tarifs, comment y parvenir sans subvention?

De nombreux voyageurs ont probablement opté pour le transport aérien ou ferroviaire parce que ces modes de transport sont plus rapides. Même si ces modes sont plus coûteux, les gens sont disposés à consacrer au transport une part plus importante de leur revenu disponible que dans le passé. Il semble que le temps a plus de valeur que jamais. Le Conseil consultatif national sur le troisième âge n'a pas adopté de position officielle en ce qui concerne les moyens de mousser l'achalandage au moyen d'une réduction tarifaire. Toutefois, on pourrait occasionner une réduction des tarifs en ouvrant le marché à la concurrence. Cela réduirait probablement le prix des billets sur les circuits rentables. Même si je crois qu'il serait souhaitable qu'on offre des prix plus avantageux sur les circuits qui relient les grands centres, je voudrais être certaine que cela n'occasionnerait pas une baisse du service ou une hausse tarifaire disproportionnée dans les régions rurales.

La présidente: J'aimerais entendre votre point de vue sur le niveau de service de transport interurbain par autocar qui est offert aux usagers de partout au pays, ainsi que sur les tarifs qui sont fixés.

Mme Raymaker: Comme je l'ai affirmé dans mon exposé, je crois que nous avons présenté les principes sur lesquels se fonderait une hausse ou une baisse des tarifs, ainsi que les répercussions d'une hausse ou d'une baisse sur les aînés. Cela nous renvoie de nouveau aux questions de la disponibilité et de l'abordabilité, compte tenu du fait que les aînés touchent un revenu modeste.

Je ne sais pas si je réponds à votre question, mais il est très important pour les aînés que l'autocar soit un mode de transport économique.

La présidente: Croyez-vous que les tarifs sont trop élevés? Est-il trop coûteux pour les aînés de se déplacer en autocar?

Mme Raymaker: En toute honnêteté, je ne suis pas vraiment au courant des tarifs. Toutefois, puisque j'ai affaire à des aînés, je peux vous affirmer que la question du tarif déboursé par l'accompagnateur d'un aîné qui voyage est très importante. La présence d'un accompagnateur procure une autonomie accrue à l'aîné, mais cela renvoie à la question de l'abordabilité, car l'accompagnateur qui prend soin de lui dans l'autobus doit se procurer un billet. Je sais que les sociétés aériennes se sont penchées sur la question et en ont parlé. Je suis aussi membre du Comité consultatif sur le transport accessible, alors je reconnais que vous avez probablement beaucoup entendu parler de ces questions.

Compte tenu du fait que les aînés ont un revenu modeste et qu'il y a eu des hausses des frais d'utilisation dans le domaine des soins de santé au cours des dernières années, de nombreux aînés doivent composer avec une baisse de leur revenu disponible. Il est très important que les aînés soient autonomes. Ils nous disent continuellement que l'accès au transport est la clé de leur autonomie. Les tarifs doivent être raisonnables.

La présidente: Quelles sont les perspectives au chapitre des circuits dans les régions rurales et éloignées? Est-ce que l'utilisation de fourgonnettes et d'autres véhicules comparables serait viable dans ces régions?

Mme Raymaker: Encore une fois, j'en ai parlé dans mon exposé. Je n'ai pas eu la chance d'en parler à mes collègues. Le recours à des solutions de rechange, comme la fourgonnette, pourrait donner des résultats qui feraient plaisir à tout le monde. Par contre, nous voudrions être certains que ces fourgonnettes et autres véhicules plus modestes fassent l'objet de normes de sécurité équivalentes à celles des gros transporteurs. Encore une fois, l'abordabilité serait aussi un facteur important.

La présidente: Certains intervenants font valoir que la déréglementation du transport interurbain par autocar permettrait de redresser la tendance à la baisse du recours à ce service. Avez-vous examiné cette question, et avez-vous une opinion sur cette option?

Mme Raymaker: Nous avons fondé notre position sur la déréglementation. Encore une fois, je crois que ce sont les collectivités rurales et les localités plus modestes qui sont à risque si on procède à une déréglementation. Je ne peux affirmer que nous avons envisagé tous les enjeux, mais nous déclarons que si la déréglementation occasionne une baisse du service dans ces régions, cela aurait des répercussions négatives sur un grand nombre d'aînés — surtout dans le Canada atlantique et dans les Prairies.

La présidente: Vous avez mené une enquête auprès des aînés sur les enjeux touchant le transport rural, et vous avez conclu que la mobilité au sein de leur localité n'est pas l'enjeu le plus crucial. Pourriez-vous nous parler des préoccupations liées au transport interurbain, comme le besoin de se rendre dans les régions urbaines pour bénéficier d'un traitement médical?

Mme Raymaker: Je crois qu'avec la régionalisation des services de santé dans les centres urbains, vous constaterez que les aînés doivent se rendre dans les centres urbains pour obtenir des services de traitement ou de diagnostic. Mais je dirais que ces personnes proviennent non pas des régions rurales ou éloignées, mais bien de la banlieue. Je pense à un endroit comme Toronto. Il s'agit, bien sûr, d'un autobus local, mais il n'en demeure pas moins que nombre de ces fournisseurs sont des autocars interurbains qui proviennent des zones périphériques. Vous devez tenir compte du fait que la situation actuelle dans le système des soins de santé force les aînés à recourir au transport interurbain par autocar pour obtenir des soins de santé.

La présidente: Vous avez mentionné un certain nombre de programmes de transport rural dans la localité d'Antigonish, en Nouvelle-Écosse, ainsi que le programme manitobain pour la mobilité des gens défavorisés et le programme d'aide au transport rural de la Saskatchewan.

Avez-vous été en mesure de cerner certains des aspects clés des programmes d'aide au transport qui ont réussi?

Mme Raymaker: Je cède la parole à notre gestionnaire du développement des connaissances, car c'est elle qui effectue les recherches.

Mme Louise A. Plouffe, gestionnaire, Section du développement des connaissances, Division du vieillissement et des aînés, Santé Canada: Je n'ai pas de réponse pour l'instant. Je prends votre question en note et je fournirai une réponse au comité.

La sénarice Spivak: À la lumière de votre mémoire et de votre exposé, je ne comprends pas comment vous arrivez à concilier la déréglementation et les besoins des aînés. Il me semble évident qu'une déréglementation doit mener à un profit. S'il doit y avoir un profit, comment les régions rurales et éloignées seront-elles servies? Il sera difficile de rentabiliser cela.

Je sais que vous avez tenté de répondre en disant «peut-être, mais pas nécessairement», mais est-ce là vraiment votre point de vue? Ne pouvez-vous pas vraiment choisir un camp?

Mme Raymaker: Je crois que nous sommes dans le camp des aînés. Les aînés ont besoin de services abordables, sécuritaires et offerts dans les régions rurales. Les fournisseurs diront probablement: «Nous n'avons pas les moyens de payer tout cela pour obtenir des fourgonnettes.» Ou «Nous ne pouvons offrir le même niveau de sécurité.» Accepteriez- vous cela?

Le sénateur Spivak: Je comprends votre point de vue. Autrement dit, vous dites que vous accepteriez peut-être une déréglementation si on tenait compte de tous ces aspects de façon permanente. Nous avons déréglementé l'industrie du transport aérien en croyant que cela stimulerait la concurrence et occasionnerait une baisse du tarif — et regardez ce qui s'est produit.

Mme Raymaker: J'aimerais vraiment avoir une réponse à vous donner. Je suis ici pour vous parler des besoins des aînés.

Le sénateur Spivak: Je comprends cela.

Le sénateur Adams: Qu'est-ce qui vous préoccupe le plus: le transport par autocar pour aller voir son médecin ou le transport pour aller magasiner? De combien de kilomètres parlez-vous? À l'occasion, je dois voir mon médecin dans une clinique en vue de recevoir un traitement. En ville, cela peut être très difficile. Puisque je vais dans l'Arctique, tout est très près. Même pour les visites médicales, nous pouvons amener nos aînés dans un poste de soins infirmiers, situé tout près. En ville, c'est très compliqué. Nous avons entendu un témoin l'autre jour qui faisait de bonnes affaires en reconduisant à l'aéroport de Toronto des gens de petites localités, 24 heures sur 24, dans une fourgonnette. Je crois que c'est un peu différent lorsqu'on veut transporter un patient à l'hôpital. Comment voyez-vous l'avenir du transport des aînés par autocar?

Mme Raymaker: Parlez-vous des collectivités éloignées? Je crois qu'il faut distinguer les collectivités rurales et les petites localités des régions éloignées. Je comprends que le Nord est vaste, et que vous devez couvrir de grandes distances. À mon avis, les aînés peuvent sombrer dans la dépression, la solitude et l'isolation s'ils n'ont pas la possibilité de voir leurs parents et amis. Lorsqu'il y a un problème de santé, s'il y a une crise, on l'envisagerait par l'entremise du système de soins de santé. Je crois que, dans le cas qui nous occupe, il s'agit généralement d'aînés en bonne santé qui peuvent avoir besoin de services diagnostiques — ce sont eux qui dépendent de ce type de transport.

Qu'est-ce qui est le plus important? Je crois que les deux sont importants. Je tiens à signaler que, même si on a l'impression que vous allez magasiner ou que vous allez ici et là, les aînés attachent une si grande valeur à leur autonomie qu'un tout autre ensemble de problèmes survient lorsqu'ils la perdent. Je comprends que nous n'avons pas de fournisseurs de services privés dans les régions éloignées.

Le sénateur Adams: Qu'advient-il des infirmières? Ne serait-il pas plus facile de veiller à ce qu'une infirmière effectue des visites à domicile lorsque le patient n'a pas besoin de voir le médecin?

Mme Raymaker: Je suis d'accord.

Le sénateur Adams: Vous parlez de personnes âgées de 80 ans et plus. Êtes-vous préoccupée par l'octroi de permis de conduire à des personnes âgées qui se déplacent en automobile après leur retraite? À l'heure actuelle, les exigences relatives au transport sont-elles plus strictes pour les aînés? Je connais des gens qui sont préoccupés par le fait que des personnes âgées de plus de 90 ans ont encore un permis de conduire. Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?

Mme Raymaker: Nous avons un peu examiné cette question. Je ne peux vous fournir de réponses. L'obtention du permis de conduire est un problème chez les aînés aujourd'hui. Nous avons de l'information sur le sujet, et nous serions très heureux de vous la transmettre. Mme Plouffe pourrait peut-être vous fournir des détails supplémentaires.

Mme Plouffe: La Commission du droit du Canada vient de diffuser une étude d'envergure sur les automobilistes du troisième âge. On envisage les besoins et les capacités des automobilistes plus âgés, leur âge et leur capacité de conduite. On envisage aussi la législation pertinente de partout au pays, qui est très diversifiée. La question est encore plus compliquée que le transport interurbain par autocar.

Le sénateur Adams: Dans l'Arctique, nous n'avons pas de médecins permanents. Les médecins viennent de Winnipeg pour effectuer des examens médicaux. Le système fonctionne-t-il dans les régions rurales — celles où on trouve 50 ou 100 personnes? Nous avons des dentistes, des médecins et des radiologistes qui se rendent régulièrement dans notre petite localité de l'Arctique. Nous ne sommes pas dotés d'un hôpital local. Comment un tel arrangement fonctionnerait-il?

Mme Raymaker: Je ne crois pas qu'il soit possible d'offrir des services de transport interurbain par autocar dans les régions éloignées, car je ne sais pas si on arriverait à intéresser un fournisseur à le faire. Je reconnais que vous êtes confronté à d'énormes défis à ce chapitre.

Le sénateur Phalen: Depuis que je suis devenu membre du comité, j'ai décidé de faire quelques promenades en autocar. J'ai pris l'autobus et le métro à Toronto; j'ai pris l'autobus à Halifax et à Ottawa, juste pour voir comment tout cela fonctionnait. Je suis un aîné. Parmi les difficultés que j'ai relevées, il y a le fait que si on se retrouve dans une zone qu'on connaît mal et qu'on ne sait pas exactement où on doit débarquer, c'est un problème. Vous soulevez la suggestion suivante:

La formation de gens qui travaillent pour les entreprises d'autocar, y compris les chauffeurs, devrait s'assortir d'un volet de sensibilisation aux besoins des aînés. Cette formation devrait fournir de l'information sur les méthodes de communication appropriées.

Qu'entendez-vous par cela?

Mme Raymaker: En raison de certains handicaps que les aînés sont susceptibles d'avoir, les gens peuvent parfois se montrer terriblement impatients avec eux. Prenons le cas, par exemple, d'une personne qui peut se rendre à la gare d'autobus et qui peut avoir des problèmes d'élocution. Cette personne, tout en étant mobile, peut avoir été victime d'un accident cérébro-vasculaire et éprouver des difficultés à communiquer. C'est un exemple. Si vous ne parlez pas de la façon que les autres croient que vous devriez parler, ils parlent plus fort. C'est une situation embarrassante pour les aînés.

L'éducation de l'ensemble du personnel est importante, mais c'est particulièrement important dans le cas des chauffeurs, car ils sont aux premières loges: ce sont eux qui rencontrent les passagers. Si les aînés sentent que le chauffeur est sensibilisé aux enjeux qui les préoccupent, je crois que l'on pourrait réaliser beaucoup de progrès.

Pour ce qui est de savoir où l'on va ou l'endroit où il faut débarquer, je dois reconnaître que je n'ai pas pris un autobus en ville depuis longtemps. Je n'arrive même pas à comprendre l'autobus municipal. Je suis d'accord avec vous. Si vous tentez de vous rendre dans un endroit que vous ne connaissez pas bien, il est difficile de comprendre le réseau de transport local.

Le sénateur Phalen: J'ai pris l'autobus à Toronto. N'eût été du fait que je débarquais au terminus, je n'aurais jamais su où je m'en allais. La situation était différente dans le métro, car on annonce chaque station, et le nom de l'arrêt s'allume pour vous montrer où vous êtes. On ne jouit pas d'un tel soutien dans l'autobus, du moins, dans ceux que j'ai utilisés. J'ai parlé à la femme qui chauffait l'autobus, et elle s'est montrée très serviable. Elle a annoncé l'arrêt où je devais débarquer.

Je croyais peut-être que vous faisiez référence au fait que les autobus devraient annoncer les arrêts. Il est difficile de prendre l'autobus lorsqu'on ne connaît pas bien l'endroit, ou lorsqu'on ignore où se trouve notre destination, à moins que quelqu'un nous dise où nous sommes rendus.

Ce n'était qu'une observation concernant les aînés. Je suis certain qu'ils seraient confrontés au même problème.

Vous avez mentionné d'autres problèmes à l'égard d'aînés handicapés qui ont besoin de recourir au transport interurbain par autocar, y compris l'embarquement et le débarquement, et les déplacements dans le terminal. En ce qui concerne les personnes handicapées, j'ai posé la question l'autre soir, et je crois qu'on m'a répondu que deux places étaient réservées à cette fin dans le véhicule. Estimez-vous que cela est adéquat?

Mme Raymaker: Probablement pas, compte tenu de l'évolution des données démographiques, mais c'est un aspect lié aux aînés handicapés qu'il faudrait envisager à l'avenir. Est-ce que le véhicule doté de deux places pour les personnes handicapées est un autobus ou un autocar destiné au transport interurbain?

Le sénateur Phalen: Je crois qu'il s'agissait d'un autocar. Dans le même ordre d'idée, sur la question de l'espace disponible dans le métro, j'ai remarqué une enseigne et une section pour les aînés. Elle était désignée pour les aînés. Les aînés n'étaient pas toujours assis à ces endroits, mais je suppose que les aînés jouissent d'un accès prioritaire à ces places lorsque le métro est plein. On ne voit pas cela dans les autocars.

Mme Raymaker: J'ai déclaré que les communications, les télécommunications et l'adaptation aux besoins des aînés sont importantes. Si on peut le faire dans le métro, on peut le faire dans les autocars interurbains. Vous venez de cerner un écart bien réel entre les deux.

La présidente: Madame Raymaker, avez-vous présenté à l'Association canadienne de l'autobus un exposé, comparable à celui d'aujourd'hui, sur les besoins des aînés?

Mme Raymaker: Non, je travaille avec des gens de l'industrie au sein du Comité consultatif sur le transport accessible. J'ai soulevé un certain nombre de ces enjeux, mais l'Association n'a jamais invité le Conseil consultatif national sur le troisième âge à se prononcer, à titre d'usager. Je serais très bien préparée, et je connais certains de ces intervenants, si on nous invite à présenter notre point de vue. J'arrive généralement à soulever les préoccupations du CCNTA au sein de ce comité consultatif.

La présidente: Ils ont la possibilité de lire le compte rendu de votre exposé d'aujourd'hui. Les pages 7 et 8 de votre mémoire, qui portent sur l'affichage, les gens qui travaillent pour les sociétés de transport par autocar, la formation, l'éducation et les besoins et les capacités des aînés, sont très intéressantes. Ce sont des enjeux importants pour l'industrie du transport par autocar.

Mme Raymaker: L'industrie du transport interurbain par autocar est bien consciente de tout cela. Je le lui dis, et ce n'est pas la première fois qu'elle entend un tel message. Les organismes de protection des personnes handicapées lui ont transmis le même message.

Par rapport à une jeune personne devenue paraplégique à la suite d'un accident d'automobile, les aînés doivent composer avec un ensemble compliqué de handicaps, Ils apprennent à vivre avec leur handicap, et ils arrivent à le faire, en partie. Toutefois, avec les aînés, les capacités baissent un peu chaque jour. Je crois qu'on ne tient pas compte de cela. Nous avons travaillé avec l'industrie sur les codes de pratique régissant le transport interurbain, que, je crois, vous connaissez bien.

Il existe 12 organismes nationaux représentant les aînés. Nous travaillons ensemble afin de transmettre le même message au sujet des aînés, et ces organismes représentent environ deux millions d'aînés membres. Nous faisons partie de ce groupe. Ils s'attachent à cinq grandes questions, et le transport est l'une d'elles. Je ne saurais trop insister sur l'importance du transport pour les aînés. Le transport est essentiel à leur autonomie et à leurs besoins.

La présidente: Je vous encourage à leur remettre un exemplaire de votre mémoire. Je crois qu'il est intéressant. Il sera utile lorsque nous formulerons nos recommandations.

Merci beaucoup de votre présence, madame Raymaker; nous vous en sommes reconnaissants.

Mme Raymaker: Merci beaucoup. Nous vous fournirons des réponses à certaines de vos questions.

La séance est levée.


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