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VETE

Sous-comité des anciens combattants

 

Délibérations du sous-comité des
anciens combattants

Fascicule 4 - Témoignages pour la séance du matin


CHARLOTTETOWN, le jeudi 7 mars 2002

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 8 h 45, dans le but d'examiner, en vue d'en faire rapport, les soins de santé offerts aux anciens combattants qui ont servi au cours de guerres ou dans le cadre d'opérations de maintien de la paix; les suites données aux recommandations faites dans ses rapports précédents sur ces questions; et les conditions afférentes aux services, passations et soins de santé offerts, après leur libération, aux membres de l'armée permanente ou de la réserve, ainsi qu'aux membres de la GRC et aux civils ayant servi auprès de casques bleus en uniforme dans des fonctions d'appui rapproché.

Le sénateur Michael Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Le sous-ministre et ses fonctionnaires nous ont invités à maintes reprises à venir les rencontrer à Charlottetown, et nous leur en sommes gré. Nous allons aborder toute une série de sujets: les pensions, le syndrome de stress post-traumatique, les soins de santé, les soins à domicile. Je suis certain que l'amiral Murray et les fonctionnaires qui l'accompagnent accepteront volontiers de répondre également à toute question que les sénateurs souhaitent aborder. Vous avez l'ordre du jour sous la main.

Je vais demander à l'amiral Murray, qui est accompagné de MM. Ferguson et Butler, de nous parler du programme des pensions. Nous allons ensuite examiner le processus suivi dans un cas en particulier.

M. Larry Murray, sous-ministre, ministère des Anciens combattants Canada: Monsieur le président, je tiens d'abord à vous dire que nous sommes heureux de vous accueillir ici, à Charlottetown. Avant de commencer, j'aimerais, au nom du ministre et du personnel du ministère des Anciens combattants, vous présenter nos condoléances à l'occasion du décès du sénateur Findlay MacDonald, un grand Canadien et un grand ami, et ce, depuis de nombreuses années, des anciens combattants et de leurs familles.

Nous avons eu une semaine fort chargée. De nombreux membres du personnel ont eu l'occasion de rencontrer, pour la première fois, notre nouveau ministre, l'honorable Rey Pagtakhan. Malheureusement, comme il avait plusieurs engagements à remplir à Winnipeg, il n'a pu rester pour votre visite. Il m'a toutefois demandé de vous transmettre son bon souvenir. Je pense qu'on vous a distribué quelques articles de journaux qui font état de sa visite. Si vous avez des questions à poser à ce sujet plus tard dans la journée, nous y répondrons volontiers. Comme je l'ai indiqué à Halifax, il espère vous rencontrer très bientôt à Ottawa ou ailleurs, quand cela vous conviendra.

Nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de vous rencontrer dans le cadre d'audiences formelles qui se situent dans le prolongement de celles tenues récemment à Halifax. Nous allons vous parler des progrès que nous avons accomplis jusqu'ici et de certains défis que nous devons relever sur divers fronts.

[Français]

Comme vous le savez, Anciens Combattants Canada doit composer avec de nombreux enjeux, notamment celui d'essayer d'assurer un équilibre entre le soutien de nos anciens combattants traditionnels et de nos anciens combattants plus jeunes des Forces canadiennes, et de leurs familles.

Au cours des dix prochaines années, le nombre d'anciens combattants de la Première et de la Seconde Guerre mondiale ainsi que de la guerre de Corée diminuera, alors que le nombre de clients âgés de plus de 80 ans augmentera de près de 50 p. 100 au cours des cinq prochaines années, tout comme la complexité et la gravité de leurs besoins en matière de soins de santé. Pendant la même période, on prévoit que le nombre de clients des Forces canadiennes augmentera de 25 p. 100, et qu'il passera de moins de 25 000, en l'an 2001, à plus de 30 000 en l'an 2005.

[Traduction]

Le nombre de demandes et les dépenses liées aux anciens combattants du temps de guerre augmentent plus rapidement que dans le cas des anciens combattants des Forces canadiennes. Je fais allusion ici, entre autres, aux allocations pour soins et aux demandes de pensions pour anciens combattants du temps de guerre, dont le nombre ne cesse de croître. En fait, nous avançons tous en âge, nos anciens combattants aussi. L'âge moyen des anciens combattants des Forces canadiennes est de 59 ans. Toutefois, bon nombre des dossiers plus complexes visent les anciens combattants plus jeunes des Forces canadiennes qui, pour la plupart, ont des familles qui grandissent. De nombreux anciens combattants affectés à des zones de service spécial souffrent de traumatismes liés aux expériences vécues à l'étranger.

Notre ministère, de même que nos programmes et services, ont évolué au cours des quelque 50 dernières années en vue de répondre aux besoins de nos anciens combattants qui avancent en âge. Malheureusement, les programmes et services existants, de même que la loi qui nous régit, ne répondent pas à tous les besoins des jeunes hommes et femmes qui, dans bien des cas, se sont sacrifiés pour leur pays et pour la paix.

Cela dit, nous estimons avoir accompli de véritables progrès ces dernières années, en collaborant de façon étroite avec le ministère de la Défense nationale, les Forces canadiennes et les associations des anciens combattants. Nous pilotons, et continuons de lancer, des initiatives et des programmes qui visent à répondre aux besoins immédiats des anciens combattants des Forces canadiennes. Nous sommes en train d'évaluer les besoins à long terme, surtout en ce qui a trait aux programmes de transition et aux services de soutien, des militaires qui participent à des opérations comme celles qui ont lieu en Afghanistan.

Il est important de comprendre que les améliorations apportées aux services offerts aux anciens combattants des Forces canadiennes ne se font pas, et ne se feront pas, aux dépens des anciens combattants du temps de guerre d'ACC. En effet, ces initiatives, pour la plupart, profitent aux deux groupes. Par exemple, le service professionnel de counselling que nous avons mis sur pied en avril et auquel on peut avoir accès 24 heures sur 24, par téléphone, s'inscrit dans le cadre du Programme d'aide aux membres des Forces canadiennes du MDN. Les anciens combattants des Forces canadiennes et les anciens combattants du temps de guerre y ont tous les deux accès.

[Français]

Anciens Combattants Canada doit également composer avec un certain nombre d'enjeux au chapitre de la commémoration. Le public que nous voulons rejoindre — les Canadiens et les Canadiennes d'un bout à l'autre du pays — est très diversifié. Nous devons comprendre cette diversité et en témoigner dans nos programmes du Souvenir.

Les anciens combattants du Canada ont grandement contribué à façonner notre société, à protéger nos valeurs et à faire naître en nous un sentiment de fierté et d'appartenance. Au fur et à mesure que le temps passe, les anciens combattants du Canada sont de moins en moins capables de porter et de transmettre leur message.

[Traduction]

Ces défis ouvrent cependant la voie à des possibilités nouvelles. D'après certaines études, 87 p. 100 de la population estime qu'il faudrait faire plus pour souligner les sacrifices et les réalisations des Canadiens en temps de guerre et de paix.

Nous sommes très souples, et notre objectif aujourd'hui est de vous servir et de vous fournir l'information dont vous avez besoin pour l'étude importante que vous êtes en train de réaliser en faveur des anciens combattants du Canada et de leurs familles.

Je sais que deux membres du comité doivent se rendent à Vimy en fin de semaine. Le responsable du projet de rénovation du monument de Vimy compte organiser une brève séance d'information à l'intention des sénateurs Day et Wiebe.

Voilà pour l'introduction, monsieur le président. Si je puis me permettre, je vais demander à Bernard Butler de vous parler des pensions d'invalidité, de préparer en quelque sorte le terrain, comme vous l'avez demandé. Vous rencontrerez ensuite les personnes qui s'occupent des dossiers; elles vous en expliqueront le cheminement. Vous aurez ainsi une bonne idée du travail qu'elles accomplissent.

M. Bernard Butler, directeur, Direction des opérations des pensions d'invalidité, Ministère des Anciens combattants Canada: Monsieur le président, j'aimerais vous remercier de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Nous entretenons de très bonnes relations de travail avec le Sous-comité des anciens combattants. Je suis fort impressionné par l'excellent travail que vous avez accompli. Vous avez cerné les enjeux et en plus, vous nous avez fourni des renseignements très utiles sur les améliorations à apporter à nos programmes et services. Je suis donc très heureux d'avoir l'occasion de vous donner des précisions sur notre programme des pensions d'invalidité, dont il est souvent question dans les médias. Vous aurez, dans les heures qui viennent, une meilleure idée du fonctionnement de celui-ci et des défis que doivent relever les responsables du programme au ministère des Anciens combattants.

L'exposé figure à l'onglet 4 du cartable. Nous allons simplement passer en revue les diapositives. Nous allons commencer par l'aperçu. Nous espérons vous donner aujourd'hui une vue d'ensemble du programme des pensions d'invalidité. Nous allons discuter du cadre de soutien des décisions, qui sert à assurer la prestation du programme. Nous allons vous parler de certaines options de recours qui s'offrent aux anciens combattants et aux membres qui cherchent à obtenir des prestations dans le cadre du programme qui, vous allez le constater, est fort généreux et détaillé.

Nous allons vous fournir quelques statistiques et quelques données sur les tendances observées au chapitre des dépenses et de la clientèle en général, ce qui vous donnera une bonne idée de l'ampleur du programme. Le mandat du programme des pensions d'invalidité définit et reflète l'obligation que nous avons d'indemniser de manière opportune et équitable les anciens combattants, les membres anciens et actifs des Forces canadiennes ainsi que les personnes à leur charge pour tout décès et toute incapacité résultant du service militaire. C'est là un des objectifs clés du programme législatif. De nombreuses personnes se posent la question suivante: qu'est-ce qu'une pension d'invalidité? La Loi sur les pensions nous sert de guide. Ce cadre statutaire définit trois grands principes. Mentionnons d'abord la reconnaissance, par la population et le gouvernement du Canada, de l'invalidité ou du décès qui sont liés au service. La contribution des anciens combattants, entre autres, est reconnue à l'échelle nationale.

L'incapacité est définie comme «la perte ou la diminution de la capacité d'accomplir tout acte mental ou physique normal». Cette définition se trouve actuellement dans la loi, et est très vaste comme vous pouvez le constater. Avec le temps, l'interprétation qui lui est donnée, c'est qu'il faut une incapacité médicalement définie. Nous nous fondons normalement sur le diagnostic médical de l'état d'une personne pour nous permettre de prendre une décision relativement à sa demande, dans le contexte de la loi.

Enfin, une pension d'invalidité est de toute évidence une somme d'argent versée en vertu de la Loi sur les pensions, administré par le ministère des Anciens combattants. Il y a des dispositions très spécifiques, dans cette loi, et dans la Loi sur le Tribunal des anciens combattants, qui permettent et commandent au ministère des Anciens combattants d'administrer le programme en se montrant très généreux pour les anciens combattants.

La loi dit que les mesures législatives doivent être analysées et interprétées de façon libérale. Il y a une disposition, dans la loi, qui commande au ministère de traiter chaque requête émanant d'un ancien combattant dans un contexte très généreux. Cette disposition est maintenant connue sous le titre de «disposition du bénéfice du doute», et vous entendrez souvent les anciens combattants en parler dans les médias. Ils diront: «Eh bien, ils ne m'ont pas donné le bénéfice du doute». Cette disposition est tout simplement une espèce de directive à l'arbitre qui s'occupe d'une requête. Elle dit à l'arbitre d'accepter les preuves dignes de foi et non contredites qui soutiennent une demande de prestations d'invalidité. L'arbitre doit tirer des conclusions favorables raisonnables en faveur du requérant et si, au bout du compte, des doutes ou une incertitude persistent quant à savoir si le requérant a ou non établi un motif légitime en faveur des prestations, l'arbitre doit rendre une décision favorable au requérant.

C'est une disposition très généreuse et l'une des raisons qui fait que de nos jours, nous pouvons traiter efficacement les demandes que déposent de nombreux anciens combattants des forces régulières 50 ans après le fait. La norme de preuve est évidemment bien moins rigoureuse que si c'était dans le cadre d'un tribunal civil. De fait, je pense qu'elle est unique, sur le plan de la nature des preuves exigées pour satisfaire à un seuil pour appuyer une demande.

Vous entendrez parler de la façon dont le ministère traite un dossier particulier et si un client est mécontent ou non, et le processus est d'ailleurs décrit dans la loi, à l'article 5.3.

L'autre part de notre mandat qui est prévue par la loi, c'est que toutes nos délibérations doivent être expéditives, informelles et non contradictoires. Le cadre que nous appliquons est très axé sur le client, dans la manière dont nous aidons le client à recueillir des preuves et dans notre démarche d'évaluation de la demande.

La diapositive suivante illustre les deux principaux critères d'admissibilité en vertu de la loi. Comme je l'ai dit plus tôt, l'un des principaux facteurs, évidemment, est le lien avec le service militaire. Il faut qu'il y ait un lien entre l'incapacité et le service militaire. La Loi sur les pensions, cependant, établit deux catégories distinctes. L'une concerne exclusivement les clients des forces régulières qui sont actuellement en service, peut-être au Canada, et qui souffrent d'une maladie ou d'une incapacité. Ce critère est appelé le «principe de compensation» et est très semblable à l'indemnisation des accidents du travail. Les membres doivent faire la preuve d'un lien direct avec le service. L'incapacité doit découler du service militaire. Cela signifie que nous examinons ce que faisaient les membres dans le cadre de leurs fonctions ou d'autres fonctions liées au service, qui pourrait avoir contribué à l'incapacité qui fait l'objet de la demande de prestations. Ce principe s'applique à la période que les membres passent au travail. Une fois qu'ils quittent le travail et rentrent chez eux, ils ne sont plus couverts. Les membres ne reçoivent pas de prestations ou d'indemnisation pour des blessures subies chez eux ou en fin de semaine. C'est une approche assez directe et pleine de bon sens.

L'autre critère d'admissibilité, en vertu de notre loi, est celui qui s'applique aux anciens combattants de la force régulière, à ceux de la guerre de Corée et aux membres des forces armées qui ont été envoyés dans des zones de service spécial comme la Bosnie ou la Croatie. C'est une disposition législative différente, connue comme le «principe de l'assurance». Tant que les membres sont en service dans l'une de ces zones, ils sont protégés 24 heures sur 24, quelle que soit la cause de la blessure, de l'incapacité ou du décès. Par exemple, si un membre qui a été posté en Bosnie souffre d'une incapacité découlant d'un événement survenu lors d'un repas au mess, il est protégé en vertu de cette loi, que ce soit ou non lié aux activités militaires. C'est un principe général qui est certainement très avantageux pour les membres qui sont en service dans ces régions à risque élevé.

Il vaut vraiment la peine de s'en rappeler — le principe de l'indemnisation et le principe de l'assurance. Vous en entendrez plus parler, puisque les Forces armées canadiennes examinent d'autres enjeux relatifs à l'élargissement des critères d'admissibilité des membres dans diverses circonstances, comme le débordement de la Rivière Rouge ou la tempête de verglas au Québec. Il est beaucoup question, de nos jours, de la pertinence d'élargir ces principes. Seul le temps nous donnera une réponse.

Le sénateur Wiebe: Des préoccupations ont été soulevées, et peut-être ceci y répondrait-il, à propos des membres qui subissent des blessures au travail. Est-ce que, maintenant, ils peuvent continuer de travailler et recevoir des prestations?

M. Butler: C'est une très bonne question, sénateur, et la réponse est oui. C'est une conséquence d'amendements qui ont été apportés à la loi il y a quelques années seulement, par l'entremise du projet de loi C-41. Avant cela, seuls les membres qui étaient blessés dans une zone de service spécial pouvaient recevoir une indemnisation de nous et continuer leur service. Maintenant, que vous soyez à la retraite ou non, vous recevez vos prestations en vertu du principe de l'indemnisation et du principe de l'assurance.

Le sénateur Wiebe: Oui, le projet de loi C-41 est entré en vigueur l'année dernière, je crois. Est-ce qu'il est efficace? Je pose cette question parce que j'ai parrainé le projet de loi devant le Sénat, et sa pertinence a été mise en doute lors des débats. Est-il efficace et est-il accepté par les membres?

M. Butler: Il semble l'être, et il semble avoir constitué un véritable progrès, en faisant en sorte que les membres ont l'impression d'être tous traités de la même façon pour les incapacités liées au service. En conséquence de ces dispositions législatives, nous avons reçu un assez grand nombre de demandes de ce groupe, ce qui à notre avis est très bon signe. Elles nous permettent de régler ces dossiers plus rapidement. Comme vous le savez, dans le passé, les membres réguliers des Forces armées pouvaient être blessés au Canada sans pouvoir demander d'indemnisation pendant, peut-être 10 ans, jusqu'à leur libération. Évidemment, à ce moment-là, il pouvait arriver que la piste, pour recueillir des preuves pouvant appuyer la demande, soit devenue froide et les requérants étaient privés de ces prestations pendant très longtemps. Il semble que le projet de loi ait été reçu très favorablement.

Le sénateur Wiebe: Je suis heureux de l'entendre. Je vous remercie.

Le sénateur Atkins: Comment traitez-vous les incapacités invisibles, comme le diabète?

M. Butler: Tout état de santé qui est reconnu par un médecin peut être tenu en compte dans une demande de prestations d'invalidité. Le diabète peut être un cas difficile, parfois, parce qu'on doit se demander si le diabète est lié au service militaire. Nous devons demander au membre: «Avez-vous une preuve médicale pouvant indiquer qu'il y a quoi que ce soit d'inhérent à votre service, ou un événement ou toute autre activité qui aurait pu causer le diabète ou y contribuer?»

C'est un excellent exemple, monsieur le sénateur, des défis et de la différence entre la protection qu'offre l'article 21.2, le principe de compensation et l'article 21.1, le principe d'assurance. Pour le principe de l'indemnisation, il nous faut la preuve d'un rapport de cause à effet entre le service et l'incapacité, tandis que pour le principe de l'assurance, si les symptômes du diabète ont commencé à se manifester en Bosnie, par exemple, nous n'avons pas besoin de faire une enquête plus fouillée.

Le sénateur Atkins: Le diabète, particulièrement de type 2, peut être héréditaire et je ne vois pas comment vous pouvez établir un lien entre celui-là et le service militaire.

M. Butler: Vous avez tout à fait raison. C'est un défi. La loi est conçue pour indemniser les membres pour des incapacités liées au service, alors, souvent, il est difficile de traiter des demandes au sujet du diabète dont souffrent des membres en temps de paix.

Le sénateur Atkins: Qu'en est-il des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale ou de la guerre de Corée qui en sont atteints? Est-ce qu'ils recevraient une indemnisation ou est-ce que le ministère des Anciens combattants s'en occuperait?

M. Butler: Nous aurions un problème similaire aujourd'hui si un ancien combattant de 75 ans se présentait avec le diabète avec l'intention de faire une demande en établissant un lien entre sa maladie et son service actif au sein de l'armée. Ce serait très difficile à prouver.

Le sénateur Atkins: Je ne vois pas comment ce serait possible.

M. Butler: C'est souvent difficile avec ces maladies-là, étant donné leurs origines, et cetera. Puisque nous parlons de maladies invisibles, nous avons beaucoup de cas de troubles psychiatriques qui présentent, eux aussi, leurs défis particuliers. Le critère ultime, en vertu de la loi, est la relation, la connexion avec le service militaire. Nous nous donnons beaucoup de mal pour essayer d'aider les membres à faire leur demande de prestations, que ce soit des anciens combattants de 80 ans ou des membres actuels de 25 ans, pour trouver une preuve de lien avec le service. Malheureusement, il arrive que ce soit tout simplement impossible, que la communauté médicale nous dise: «nous n'avons rien à offrir. Nous ne pensons pas qu'il y ait le moindre lien avec le service militaire». Dans ces cas, nous sommes bien obligés de dire non, et c'est là que les requérants peuvent être très mécontents et frustrés, parce qu'ils sont nombreux à souffrir de troubles médicaux très invalidants.

M. Murray: Je voudrais seulement aborder plusieurs points. Premièrement, je tiens à vous remercier pour la rapidité avec laquelle le projet de loi C-41 a été adopté, parce que c'était une semaine avant l'élection et le projet de loi aurait été reporté s'il en avait été autrement. L'appui de tout le monde, au Sénat, a été déterminant; le projet de loi est passé en quelques jours, et c'était extrêmement important.

La deuxième chose que j'aimerais dire se rapporte aux prestations d'invalidité. Ces prestations sont une porte sur les soins de santé. De fait, l'importance du projet de loi C-41 va bien au-delà des prestations d'invalidité. Il nous permet de prendre les membres des Forces armées canadiennes comme clients alors qu'ils sont encore en service, même s'ils doivent être libérés au bout du compte en conséquence de l'incapacité. Cela permettra de réduire de beaucoup le nombre de gens qui glissent entre les fentes. Ils seront nos clients, bien avant qu'ils quittent les forces armées. Nous avons maintenant des règlements, en vertu de cette loi, qui prévoient aussi le soutien de la santé par l'entremise du Programme pour l'autonomie des anciens combattants, pour ces gens.

Le sénateur Atkins a soulevé la question de la manière dont on peut décider ce qui est lié à quoi pour un ancien combattant de 80 ans, et nous essayons de le déterminer. Si un ancien combattant est très handicapé, a plus de 78 p. 100, nous n'essayons pas de trouver qu'est-ce qui est la cause de son état. Nous avons des études, qui sont en cours, pour voir s'il y a moyen de réduire cette norme de 78 p. 100 pour éviter les difficultés pour l'ancien combattant et pour le système.

Le sénateur Atkins: Le diabète est une maladie qui est liée au style de vie, alors on ne peut pas savoir quand il a commencé, tout ce qu'on sait, c'est qu'on l'a. C'est une maladie environnementale, et je me demandais s'il n'y a pas un test quelconque que vous pouviez faire.

Mme Janice Burke, directrice intérimaire, Direction des décisions sur les pensions, ministère des Anciens combattants Canada: Nous avons des critères, dans notre table des invalidités, pour évaluer le diabète, et nous examinons tout un tas de paramètres pour cette maladie particulière.

De plus, un projet est en cours, où l'on revoit l'actuelle table des invalidités et qui aboutira sur de meilleurs critères d'évaluation d'invalidité.

Le sénateur Atkins: Un petit commentaire seulement. Je doute fort qu'un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale qui souffre du diabète vive encore aujourd'hui.

Le sénateur Day: Monsieur Butler, en ce qui concerne le principe de l'indemnisation, pouvons-nous faire un autre parallèle avec l'indemnisation des accidentés du travail, où les Forces armées réduisent le salaire des personnes qui ont une incapacité reconnue et qui reçoivent des prestations d'invalidité tout en poursuivant leur service?

M. Butler: Non, une fois que l'admissibilité est établie et que les membres reçoivent des prestations du ministère des Anciens combattants, il n'y a pas de réduction pendant qu'ils sont encore en service. Les prestations s'ajoutent à la rémunération qu'ils recevaient en fonction de leur classification.

Le sénateur Day: Est-ce que c'est fondé sur le principe de coûts additionnels qu'entraîne l'incapacité?

M. Butler: Oui, et en vertu de ce principe fondamental du système législatif, ces prestations sont en reconnaissance de la contribution qu'ils apportent en tant que membres des Forces armées canadiennes et constituent une indemnisation qui s'ajoute à toute autre prestation ou programme. Ce n'est pas en fonction du revenu, et cela n'a rien à voir avec le grade, le rang ou quoi que ce soit d'autre.

Le sénateur Day: Je crois avoir compris que le principe de l'indemnisation vise le personnel de la force régulière. Est- ce que cela signifie qu'il ne s'appliquerait pas à la force de réserve?

M. Butler: Non. Le principe de l'indemnisation s'applique également aux membres de la réserve et de la force régulière.

Le sénateur Day: Le dernier éclaircissement que j'aimerais avoir se rapporte aux zones de services spéciaux. Est-ce que c'est une définition qui évolue par règlement, ou comment composez-vous avec les tempêtes de verglas, les inondations de la rivière Rouge, et cetera?

M. Murray: Actuellement, cela ne s'applique qu'aux régions comme la Bosnie. Une zone de service spécial sera bientôt établie pour les opérations en Afghanistan, mais la définition ne s'est jamais encore appliquée aux opérations qui se déroulent au Canada, comme l'intervention lors de la tempête de verglas, les inondations du Manitoba et les opérations de recherche et de sauvetage. Après la réflexion suscitée par les événements du 11 septembre, plusieurs textes de loi ont été adoptés, comme vous le savez bien. Il se pourrait qu'il y en ait d'autres, peut-être pas, mais l'une des retombées de ces événements est que l'on examine, avec le MDN, toute cette question des zones de service spécial. Nous examinons actuellement la possibilité de revoir la Loi sur les pensions pour rendre plus logiques les dispositions relatives aux zones de service spécial, peut-être par l'entremise d'un mécanisme comme une «opération de service spécial». Lorsque quelqu'un est assigné à une opération particulière qui présente un danger ou un risque accru, les dispositions seraient les mêmes que celles qui s'appliquent à la zone de service spécial. Pour vous donner un exemple, il ne me paraît pas très logique que l'équipage d'un aéronef Hercules qui quitte Trenton et se ravitaille en Islande n'est pas protégé, mais que dès qu'il traverse la frontière magique du Moyen-Orient, il l'est. Nous essayons de résoudre ceci. Dans un contexte semblable, nous discutons de la possibilité que le ministre de la Défense nationale puisse déterminer qu'une opération particulière, disons au Canada, mérite le même statut qu'une zone de service spécial à l'étranger. Nous espérons pouvoir présenter quelque chose sous peu pour régler certaines des iniquités que nous avons relevées.

Le président: Est-il tenu compte du principe de négligence contributive, dans ces dossiers?

M. Butler: C'est une excellente question, monsieur le président. Pas vraiment, bien qu'il y ait une disposition dans la loi qui fait qu'une faute intentionnelle peut rendre le demandeur inadmissible aux prestations. On peut recevoir des prestations partielles en vertu du principe de l'indemnisation. Si quelqu'un souffre d'une maladie ou d'une incapacité qui a pu, en partie, être causée par des facteurs qui ne sont pas liés au service, il pourrait y avoir réduction des prestations en conséquence.

Ce n'est pas fréquent, cependant, dans le contexte d'une faute ou d'une incurie de la part du membre. Nous n'envisageons généralement pas un dossier sous ce point de vue. Pour vous donner un exemple, vous pouvez présenter, après cinq ans de service dans la force régulière, une perte auditive. Il se peut bien que vous jouiez dans un orchestre cinq soirs par semaine pendant vos loisirs, mais il ne fait aucun doute que vous avez été exposé à beaucoup de bruit dans le cadre de vos fonctions dans l'armée. Lorsque vous présentez une demande de prestations pour perte auditive, il peut y avoir une réduction pour des facteurs qui ne sont pas liés au service pouvant avoir contribué à l'incapacité, et vous recevez des prestations pour la portion ou le degré de la perte auditive qui est lié au service. Il y a donc une disposition pour cela. La loi prévoit le versement de prestations par cinquièmes. Vous pouvez recevoir quatre cinquièmes des prestations pour perte auditive si un cinquième du handicap peut être attribué à des facteurs qui n'ont pas de rapport avec le service. Cependant, nous essayons de l'éviter autant que possible, parce que cela crée des problèmes, tant pour les arbitres, pour quantifier cette contribution et l'expliquer rationnellement, que pour les membres qui reçoivent des prestations partielles alors qu'à leur avis, l'incapacité peut être entièrement liée au service.

Le président: Est-ce que la perte doit être liée à des activités qui ne se rapportent pas au service dans l'armée, pour que les prestations soient réduites?

M. Butler: En vertu de l'article 21.2, il faudrait normalement que ce ne soit pas lié au service militaire. Auriez-vous un exemple plus précis à me donner?

Le président: Disons qu'on sait bien que je ne porte pas de bouchons d'oreilles, même si je suis officier d'artillerie, parce que je trouve cela désagréable. Je sais que je suis censé en porter. Qu'arrive-t-il dans ce cas? Vous pouvez trouver 10 personnes pour dire que je n'ai jamais porté ces sacrés bouchons.

M. Butler: Vous devriez être chargé de prendre les décisions, monsieur le président. Ce sont des causes très difficiles pour nous. Les membres vont souvent dire la même chose, en ajoutant toutefois que, s'ils les avaient portés, ils n'auraient pu entendre les instructions sur le champ de tir ou le son du moteur dans la salle des machines du navire. Nous essayons de ne pas réduire les indemnités dans des cas comme ceux-là. J'imagine que s'il était flagrant qu'on avait désobéi à un ordre permanent ou qu'il y a un lien avec une autre activité que le travail, nous chercherions sûrement à établir le lien avec le service militaire. Nous sommes tout à fait autorisés à le faire en vertu de la loi. Comme nous l'avons dit au début, nous essayons, dans la mesure du possible, de régler les cas incertains de cette nature en faveur du demandeur.

Le président: Est-ce comme dans les procès au civil, que le sénateur Day et moi-même du moins connaissons bien, quand des experts s'affrontent, qu'un médecin vient dire une chose et un autre le contraire, et qu'on se relance la balle?

M. Butler: Encore une fois, c'est une excellente question. Je pense qu'on avait peut-être plus tendance à faire cela par le passé. Depuis que la loi a été modifiée en 1995 et que le ministère, par l'entremise du ministre, se charge de décider des indemnités au premier palier, on cherche avant tout à trouver des moyens de trancher en faveur de la demande.

Quand les clients produisent, à l'appui de leur demande, un avis médical raisonnable et crédible, qui n'est pas en contradiction avec les ouvrages médicaux ou la pensée médicale courante, nous n'essayons sûrement pas de monter un dossier pour la refuser. C'est vraiment le sens de la disposition sur les règles régissant la preuve. Si les demandeurs fournissent des preuves raisonnables et crédibles, nous sommes portés, à moins qu'elles soient injustifiées à première vue, de conclure qu'elles soulèvent à tout le moins un doute raisonnable, et nous allons trancher en leur faveur. Nous allons demander l'avis de médecins dans les cas complexes. Nous énonçons nos propres avis médicaux dans ces cas. Le processus n'est vraiment pas antagoniste dans ce sens.

À ce premier palier, c'est vraiment un processus de nature administrative. Nous travaillons en fait avec le client en région pour réunir les preuves à l'appui de sa demande. Nous en décidons ici à Charlottetown. Si la cause est portée en appel devant le Tribunal des anciens combattants, organisme dont je vais vous parler tout à l'heure, le ministère offre les services d'un avocat au client, s'il n'est pas autrement représenté. On intervient à tous les niveaux pour aider le client à justifier sa demande et à répondre aux critères d'admissibilité prévus dans la loi.

Je vous demanderais maintenant de jeter un coup d'oeil à la diapositive sur le cadre de soutien des décisions. Nous en avons déjà un peu parlé. Les décisions sont fondées sur des éléments de preuve. Nous examinons les données médicales qui expliquent l'invalidité pour laquelle le demandeur réclame une pension. Nous examinons par exemple les déclarations du demandeur et de témoins, s'il y a lieu de déterminer si l'incident est survenu pendant le service militaire. Nous examinons le dossier militaire pour vérifier les états de service du demandeur durant une période donnée et les données médicales qui y figurent.

Le sénateur Atkins: Beaucoup d'anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale étaient tellement pressés de quitter les forces à la fin de leur service qu'ils ne se sont pas donné la peine de constituer un dossier de leurs problèmes de santé.

Que faites-vous quand ils se rendent compte qu'ils ont un problème de santé attribuable à leur service militaire?

M. Butler: Votre question est pertinente, et je vous répondrais qu'il y a bien des façons de plumer un canard, comme on dit. Comme vous l'avez bien fait remarquer, la meilleure preuve qu'on puisse avoir pour justifier le versement d'une pension est un dossier écrit établi soit durant le service militaire, soit au moment du départ.

Cependant, vous avez tout à fait raison de dire qu'il y a beaucoup d'anciens combattants qui n'ont pas signalé avoir de problème. Ils voulaient s'en aller. Nous le savons et nous les comprenons, et c'est pourquoi nous accordons assez de poids aux déclarations des anciens combattants. Toutefois, nous cherchons également des éléments de preuve pour la période suivant leur départ des forces, pour déterminer la continuité de la preuve en quelque sorte. Si vous attribuez vos problèmes lombaires à une blessure au dos survenue en 1942, la plupart des médecins vont nous dire que, s'il y a un lien entre les deux, vous souffrez probablement de maux de dos depuis longtemps. Nous allons chercher à savoir si vous avez consulté votre médecin de famille en 1948, si vous vous êtes fait soigner par le médecin de l'usine dans les années 50. Nous allons essayer de réunir des preuves raisonnables pour établir que le lien existe. Il serait pratiquement impossible de justifier une demande 50 ans après le fait avec des preuves de ce genre, si le fardeau de la preuve était celui d'un tribunal civil. La loi qui nous régit nous permet, quand il y a un doute raisonnable, de trancher en faveur de l'ancien combattant et d'examiner les preuves. Les preuves ne sont pas évaluées comme devant un tribunal. Autrement dit, vous pouvez fournir une déclaration dans laquelle votre épouse indique que vous vous plaignez d'avoir mal depuis qu'elle vous connaît et depuis que vous vous êtes mariés en 1950. Nous allons accorder beaucoup de poids à cela, dans la mesure où c'est raisonnable et crédible et non contredit autrement. Ce n'est sûrement pas ce qui empêcherait un ancien combattant qui n'a pas fait état de son problème pendant ses années de service d'obtenir une pension aujourd'hui.

Nous posons essentiellement trois questions pour déterminer l'admissibilité à une pension. Y a-t-il une incapacité? L'incapacité est-elle liée au service militaire? Et, dans l'affirmative, dans quelle mesure? Une fois que vous êtes jugé admissible, qu'il est établi que l'incapacité est liée au service militaire, nous devons déterminer la gravité du problème pour établir le montant de l'indemnité. Vous serez indemnisé selon la nature de l'incapacité. C'est ce que nous appelons l'évaluation médicale. Nous allons demander les données médicales de vos médecins. Souvent, un de nos médecins vous fera subir un examen médical pour déterminer le pourcentage de votre incapacité. Comme vous le savez, il y a beaucoup d'incapacités légères qui donnent lieu à l'indemnité la plus basse. Il y en a d'autres très sévères et débilitantes qui justifient le versement d'une pension d'invalidité très élevée.

Le sénateur Day: Est-ce lié d'une façon quelconque au revenu? Je pense aux militaires qui reçoivent une pension d'invalidité établie en fonction du degré de l'incapacité. Après leur départ des Forces, ils n'ont plus le même revenu. L'incapacité n'a pas changé, mais le revenu, oui. Pouvez-vous modifier le montant de la pension non pas parce que l'incapacité a changé mais parce que la situation financière est différente?

M. Butler: Non, sénateur, nous ne pouvons pas le faire.

Le sénateur Day: Oh, c'est vraiment dommage.

M. Butler: Ces indemnités sont indépendantes du revenu. Elles ne sont pas du tout établies en fonction du revenu et sont liées directement au degré d'incapacité. Cela cause sans doute des problèmes à beaucoup d'anciens combattants. Pour vous donner un exemple, si vous avez perdu deux doigts d'une main, l'évaluation de votre incapacité sera la même que vous soyez chirurgien militaire ou travailleur non qualifié. Le manoeuvre pourra peut-être bien continuer de travailler après avoir quitté les Forces armées, mais il recevra la même indemnité que le chirurgien, dont la carrière peut être finie. Nous sommes très conscients de ce problème, et on s'est déjà demandé si le programme répondait vraiment à tous les besoins des membres qui quittent les Forces armées. Cela fait l'objet d'une étude sérieuse sur l'orientation future du programme.

La prochaine diapositive traite du cadre d'exécution des programmes du ministère des Anciens combattants. Nous en avons déjà parlé. Les agents des pensions du ministère, dans tous nos bureaux de district, sont formés pour aider les membres et les clients au sujet de la pension d'invalidité. Ils les conseillent et les aident à préparer leur demande. Une fois les preuves réunies, le dossier est envoyé ici à Charlottetown, une décision est rendue et la pension est versée à partir d'ici aussi.

Vous aurez l'occasion de rencontrer un évaluateur pour discuter de son travail, ainsi qu'un agent chargé du paiement, pour voir exactement comment le paiement d'un dossier est effectué.

La prochaine diapositive traite des allocations spéciales. On veut simplement vous faire remarquer qu'en plus des prestations de pension il y a d'autres indemnités d'invalidité prévues par la loi. L'allocation pour soins en est une. Elle est accordée aux pensionnés atteints d'une invalidité totale pour leur permettre d'obtenir des soins nécessaires à leur vie de tous les jours. L'allocation vestimentaire est versée, par exemple, à celui qui touche une pension pour un problème de genou et qui porte un appareil qui use ses vêtements. Quant à l'allocation d'incapacité exceptionnelle, elle est accordée aux anciens combattants ou aux pensionnés qui reçoivent la pension d'invalidité maximale mais qui, en raison d'un état de dépendance, de douleurs ou de malaises extraordinaires associés à leur incapacité ont besoin d'une aide additionnelle.

La prochaine diapositive donne simplement un aperçu de la procédure touchant les allocations spéciales, et je ne vais pas trop m'attarder là-dessus. Le client communique avec l'agent des pensions concerné, et la décision peut être prise au bureau du district dans certains cas, et à Charlottetown dans le cas des allocations d'incapacité exceptionnelle.

La diapositive suivante donne un exemple des taux de pension, qui sont établis par la loi. Le taux de pension correspondant au degré d'invalidité convenu est fixé par la loi et rajusté tous les ans en fonction de l'indice des prix à la consommation. Je vous fais aussi remarquer qu'il est exempt d'impôt.

Sur le tableau, le premier montant correspondant à un degré d'invalidité de 5 p. 100 est de 93,79 $ par mois pour un pensionné célibataire. Si le pensionné est marié, il touche 25 $ de plus à peu près, et davantage s'il a des enfants.

Le président: Pour un ou des enfants à charge?

M. Butler: Oui, pour un enfant à charge. Vous pouvez voir que si vous touchez la pension d'invalidité maximale et êtes marié, vous recevez 2 344,76 $. Il faut aussi remarquer que, si le bénéficiaire meurt, l'époux survivant a droit à une indemnité qui est établie en fonction du degré d'invalidité du pensionné. S'il est de moins de 48 p. 100, l'époux reçoit la moitié du montant d'origine. S'il est de 48 p. 100 ou plus, il reçoit 65 p. 100 du taux de pensionné marié.

Le président: Je comprends que les montants sont rajustés tous les ans en fonction de l'indice du coût de la vie, mais quand les montants de base ont-ils été révisés la dernière fois?

M. Murray: Je vais vous répondre brièvement, monsieur le président, et Bernard pourra poursuivre. La façon dont ils ont été établis à la suite de la Première Guerre mondiale est très intéressante, et le Parlement a joué un grand rôle là- dedans. Le tableau des invalidités dont Janice a parlé a été produit par des parlementaires sur la base du taux de rémunération des travailleurs non qualifiés. La plupart des soldats de la Première Guerre mondiale étaient des travailleurs agricoles ou autres. Les taux variaient en fonction du grade à l'époque. Cette distinction a fini par être éliminée, mais les taux de base étaient et ont continué d'être fondés sur le revenu des travailleurs non qualifiés dans les années suivant la Première Guerre mondiale. Ils ont été rajustés tous les ans et ils sont maintenant fondés, si j'ai bien compris, sur le salaire de cinq groupes professionnels dans la fonction publique, comme les travailleurs non qualifiés ou les commis.

Le sénateur Day: Il importe peu que vous ayez été amiral ou matelot de première classe, alors?

M. Murray: Cela n'importe pas.

Le sénateur Day: Le montant est-il élevé pour un matelot de première classe et bas pour un amiral, par rapport à leur échelle de salaire?

M. Murray: C'est la même chose qui est indemnisée. En fait, cela nous ramène à la question de départ sur le sens du programme. C'est le genre de question qui nous donne un peu de fil à retordre. Pour un ancien combattant de 80 ans, je pense que le programme a évolué de façon favorable, même s'il peut y avoir des problèmes dans des cas particuliers. Les programme de soins de santé et les principes sur lesquels il se fonde sont assez valables. Cependant, le programme est-il utile à un militaire de39 ans, quand on pense qu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale le pays était dans l'obligation de s'occuper, et de bien s'occuper des anciens combattants qui ne seraient plus jamais en mesure de s'occuper d'eux-mêmes. Cependant, dans la majorité des cas, on a cherché à en faire des citoyens tout à fait fonctionnels le plus tôt possible. Pour régler les problèmes des nouveaux anciens combattants, nous pensons qu'il faudra rétablir certaines mesures comme le recyclage et la réintégration. Selon le programme, plus l'invalidité est importante, plus l'indemnité est élevée, même s'il n'est pas question ici de s'enrichir. Compte tenu du filet de sécurité sociale d'aujourd'hui, comment établir un système qui reconnaisse l'invalidité de façon équitable, mais prévoie aussi des mécanismes pour permettre de redevenir pleinement fonctionnel si c'est possible? À mon avis, ce ne serait pas une bonne solution de décider de doubler les pensions d'invalidité, parce que cela mène beaucoup de gens à se dévaloriser.

M. Butler: Cela vous donne une idée du programme. Je vous demanderais de tourner la page pour passer au processus de révision ministérielle. Nous voulons vous donner une idée des recours mis à la disposition de ceux qui demandent des pensions d'invalidité. Comme je l'ai indiqué, toutes les demandes sont examinées ici, à l'administration centrale, par un groupe d'évaluateurs. Si les clients sont insatisfaits de la décision rendue et ont de nouveaux éléments de preuve à soumettre, ils peuvent nous demander de réexaminer le dossier. Le ministre est toujours responsable, et nous pouvons examiner un dossier plus d'une fois, le cas échéant, quand de nouvelles preuves sont fournies par le client. Si la décision est favorable, nous pouvons indemniser le client.

Si, après l'examen du ministère, les clients sont toujours insatisfaits de la décision rendue, ils ont le droit d'interjeter appel devant le Tribunal des anciens combattants, révision et appel. Le Tribunal est un organisme quasi-judiciaire qui relève du Parlement, par l'entremise du ministre des Anciens combattants, mais c'est un organisme indépendant du ministère. Il y a deux niveaux de règlement devant le Tribunal. Pour ce qui est de la révision, comme je l'ai déjà dit, les clients ont le droit d'être représentés par un avocat du ministère, de présenter des éléments de preuve et de convoquer des témoins, s'ils le veulent, pour justifier leur requête. Ces révisions se déroulent à différents endroits du pays. Elles sont facilement accessibles et les clients ont toutes les chances de défendre leur cause.

Si le résultat est toujours défavorable, les clients ont un autre recours. Ils peuvent interjeter appel devant le Tribunal. Ces causes sont entendues ici à Charlottetown. Les clients ne comparaissent pas habituellement, mais peuvent être représentés à l'audience par un avocat du Bureau de services juridiques des pensions, qui fait partie du ministère des Anciens combattants.

Le sénateur Atkins: Qui choisit l'avocat?

M. Butler: Les avocats en chef des pensions relèvent du sous-ministre. Il y a à peu près une demi-douzaine d'avocats, ici à Charlottetown, qui travaillent surtout sur les dossiers d'appel. Il y a des bureaux de district associés aux nôtres dans l'ensemble du pays. Normalement, pour la révision d'une décision, les clients sont défendus par l'avocat désigné. C'est un genre de service d'aide juridique. De même, quand la cause est portée en appel ici à Charlottetown, l'avocat examine le dossier, parle au client par téléphone, réunit les nouveaux éléments de preuve nécessaires et présente le dossier. En vertu de la loi, nous allons payer les frais de déplacement du client au moment de la révision qui, rappelons- le, a lieu dans les régions. Les clients ont évidemment le droit d'assister à l'audience qui a lieu à Charlottetown, mais à leurs propres frais. C'est la différence.

Le sénateur Day: Est-ce que l'avocat nommé au palier de révision dans le district est membre du Bureau de services juridiques des pensions?

M. Butler: Oui.

Le sénateur Day: Que feriez-vous si le client vous disait qu'il préfère un avocat indépendant qui ne relève pas du groupe examinant sa demande, mais qui est plutôt une personne qui agirait au mieux de ses intérêts?

M. Butler: C'est son droit, mais il devrait alors en assumer les coûts.

Le sénateur Day: D'accord.

M. Butler: Je dois mentionner que la Légion royale canadienne fournit souvent des services de représentation et qu'en réalité, environ 10 p. 100 de nos clients choisissent d'être représentés par un agent d'aide sociale de la Légion royale canadienne, soit pendant les formalités initiales, soit au stade de la présentation de la demande ou encore, devant le Tribunal des anciens combattants.

Le sénateur Day: Est-ce que vous désignez toujours un avocat?

M. Butler: Oui, par l'entremise du Bureau de services juridiques des pensions et conformément à la loi, ils sont tous membres du barreau lorsqu'ils entrent au ministère. C'est une des exigences.

Le sénateur Wiebe: Il me paraît plutôt évident d'après le processus décrit que l'ancien combattant a certainement le bénéfice du doute tout au long du processus. Je vous en félicite. Toutefois, j'ai une question difficile pour vous. Comme je suis sénateur et aussi membre du comité, lorsque des anciens combattants sont passé par tout le processus et qu'ils croient avoir été lésés, on peut dire que les gens comme nous sont leur dernier recours. Parce que nous sommes membres de ce comité, ils nous téléphonent ou ils nous écrivent. Habituellement, je transmets ces cas à leur député en lui expliquant que, selon moi, une de ses tâches consiste à s'occuper de ses électeurs. Vous, les gens du ministère, comment préféreriez-vous que nous traitions ces cas?

M. Butler: Eh bien, sénateur, je travaille dans ce milieu depuis plusieurs années, et je peux vous dire que je reçois des demandes directement des sénateurs, des députés et d'autres personnes. Il existe donc plusieurs approches. En bout de ligne, je crois que cette décision revient à chaque sénateur. En dernière analyse, que vous décidiez de nous transmettre un cas ou que vous décidiez d'écrire au sous-ministre, au sous-ministre adjoint ou à quelqu'un comme moi, le résultat est le même. Ce programme est indépendant du Parlement, et c'est ainsi que les choses doivent être. Nous prenons des décisions en nous fondant sur le cadre existant. Bien sûr, certaines demandes nous sont présentées par des députés. Lorsque de nouvelles données nous sont soumises, nous les examinons si c'est à nous qu'il appartient de rendre une décision. Les cas les plus problématiques sont ceux que nous avons rejetés, que le Tribunal des anciens combattants a rejetés et pour lesquels aucune nouvelle donnée ne vient appuyer la demande. Ces cas représentent de grands défis. Dans de telles situations, tout ce que nous pouvons espérer, c'est de mieux comprendre, du point de vue du ministère, pourquoi un cas a été rejeté afin de fournir des conseils appropriés au client. Vous pouvez écrire en tout temps au ministère ou à l'avocat du Bureau de services juridiques des pensions qui représente le client afin d'obtenir des explications au sujet d'une demande et pour que tout autre recours possible soit utilisé.

M. Murray: Je crois qu'il est préférable d'utiliser le processus le plus rapide possible. La plupart de ces gens sont contrariés. La plupart d'entre eux ont aussi 80 ans, surtout ceux qui ont pris part à la Seconde Guerre mondiale. Je participe au plus grand nombre possible de congrès, de réunions, et autres, en partie parce que je reviens toujours avec une douzaine de cas différents les uns des autres. Je traite tous ces cas de la même manière, et nous sommes toujours heureux de nous en occuper. Souvent, le seul fait d'être écouté pendant le processus de révision est extrêmement thérapeutique. C'est à vous de décider, mais je crois que ce qui importe, c'est que nous recevions l'information le plus rapidement possible. Souvent, certains renseignements sont égarés, et le fait que leur demande soit traitée le plus rapidement possible est ce qui importe le plus.

Le sénateur Wiebe: Merci. Je suis heureux de l'entendre. Bien entendu, c'est difficile, en partie, pour les sénateurs parce que c'est une question de jugement. Nous recevons des appels ou des lettres de gens qui ne savent pas comment fonctionne le système. Habituellement, les plaintes sont légitimes, et nous savons ce que nous devons faire. Souvent, lorsque les gens sont passés par le processus et croient avoir été lésés, ils communiquent avec leur député, qui reprend tout le processus avec eux, et leur demande pourra être une fois de plus rejetée. Mais ils n'abandonnent pas. Ils téléphonent alors au ministre provincial responsable, qui lui aussi examine la demande et la rejette. À qui peuvent-ils ensuite s'adresser? Le sénateur de la province? Pourquoi pas? Lorsque ces demandes se retrouvent sur nos bureaux, bon nombre d'entre elles ont déjà été examinées par toutes ces personnes. J'écoute ce que les gens ont à dire, et si la demande a déjà été examinée, je la transmets au député, parce que je ne crois pas que nous voulions qu'un troisième niveau perde son temps pour une demande qui a déjà été examinée attentivement.

M. Butler: Comme l'a suggéré le sous-ministre, le ministère peut en tout temps vous fournir les renseignements requis pour que vous puissiez mieux comprendre et mieux conseiller les gens. Ainsi, vous pourrez plus facilement traiter avec l'électeur, et vous pourrez mieux comprendre quelles sont les questions, quels sont les enjeux et quelles seront les décisions susceptibles d'être prises à ce moment-là.

Honorables sénateurs, j'aimerais finalement vous faire part de quelques statistiques sur le programme afin que vous puissiez avoir une meilleure idée de son envergure. La première diapositive illustre les dépenses annuelles relatives au programme en 1991-1992, et vous pouvez constater que ces dépenses ont augmenté avec le temps. Dans le dernier exercice, les dépenses se chiffraient à 1,2 milliard de dollars.

La prochaine diapositive illustre la croissance graduelle du nombre de bénéficiaires, qui est passé de 150 000 à 155 000. Ce nombre est relativement stable.

Le sénateur Day: En quelle année la loi a-t-elle été changée afin d'inclure la définition des anciens combattants et du personnel militaire en plus de ceux qui ont participé à la Seconde Guerre mondiale?

M. Butler: Sénateur, je crois que cela a été fait dans le projet de loi C-41.

Le sénateur Day: Est-ce qu'il est trop tôt pour en connaître l'impact?

M. Butler: Oui.

Le sénateur Day: Croyez-vous que cet impact sera important?

M. Butler: Bien sûr, nous avons constaté une hausse du nombre de demandes provenant des membres de la force régulière, et cela est probablement en grande partie attribuable au projet de loi C-41.

Le sénateur Wiebe: Le projet de loi C-41 a été déposé au printemps 2000 puisque que les élections ont eu lieu à l'automne.

M. Butler: La diapositive suivante se rapporte aux pensionnés en date de février 2002. Il s'agit d'une ventilation de ce groupe, et comme vous pouvez le constater, 86 000 anciens combattants reçoivent des pensions d'invalidité correspondant à une appréciation du droit à pension de 5 à 100 p. 100. Les anciens combattants de la catégorie 21 reçoivent une pension de moins de 5 p. 100 sous forme de versement unique. Cette pension est versée pour des incapacités très légères. Le nombre total de pensionnés en date de février 2002 est de 155 000.

Le président: Merci. Je crois savoir ce qu'est un PG. Ce nombre est certainement en baisse puisque ce sont principalement des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée.

M. Butler: Oui.

Le sénateur Day: Monsieur le président, savons-nous pourquoi le mot «uniquement» est utilisé pour la catégorie des PG?

Le président: Je crois que c'est parce qu'ils reçoivent une indemnité seulement parce qu'ils ont été des prisonniers de guerre. Mais M. Butler pourrait peut-être répondre à cette question.

Le sénateur Day: Est-ce que le fait d'avoir été un PG est une incapacité en soi?

M. Butler: Ces gens ne reçoivent qu'une indemnité de PG et aucune autre pension d'invalidité de notre part. La Commission de secours d'Halifax est celle que l'on trouve en général très étrange, et elle découle de la célèbre explosion de Halifax. Le ministère des Anciens combattants a été chargé, par l'entremise de la Commission de secours d'Halifax, d'administrer les pensions. Fait intéressant, sept survivants reçoivent encore de telles pensions. Comme vous pouvez le constater, ce n'est pas un pourcentage élevé du grand total. La catégorie «Allocations pour acte de bravoure» s'applique aux gens qui reçoivent une pension, parce qu'ils ont reçu une décoration pour acte de bravoure pendant leur service de guerre.

Le sénateur Day: Pour que ce soit bien clair dans mon esprit, est-ce que cette indemnité s'ajoute à la pension à laquelle ils pourraient avoir droit?

M. Butler: Oui. Les gens reçoivent une indemnité pour diverses médailles militaires, par exemple, pour la Croix du service distingué dans l'Aviation. Nous administrons ces indemnités, mais ce ne sont pas des pensions d'invalidité.

Je ne sais pas vraiment ce que la catégorie «Autres» comprend. C'est seulement une catégorie fourre-tout. Janice, pouvez-vous nous donner des renseignements à ce sujet?

Mme Burke: Ce sont les allocations de commisération.

M. Butler: C'est en effet possible. En vertu de l'ancienne loi, lorsque quelqu'un présentait une demande de pension qui ne pouvait pas faire l'objet d'une décision, parce que certains facteurs devaient être pris en considération, mais que les circonstances relatives à la demande étaient particulièrement valables, l'ancienne Commission canadienne des pensions avait le pouvoir d'accorder une allocation de commisération d'un montant n'excédant pas la pension qui aurait été payable si l'incapacité avait été reconnue comme étant reliée au service. Cette disposition a été modifiée en 1995. C'est maintenant du ressort du Tribunal des anciens combattants. Nous supposons que les primes au mérite ou les allocations de commisération tombent dans la catégorie de ce groupe de 39 anciens combattants. La catégorie «Survivants» s'applique aux conjoints ou aux enfants à charge survivants.

Le sénateur Atkins: C'est un programme de grande envergure.

M. Butler: En effet. Beaucoup de gens reçoivent de telles pensions au pays. Souvent, on ne se rend pas compte de l'envergure de ce programme;on croit en effet que le ministère des Anciens combattants, et que les anciens combattants en particulier, représentent une très faible portion de l'électorat, mais ce n'est pas le cas.

Je crois que vous trouverez la prochaine diapositive sur les demandes de pensions d'invalidité très intéressante. C'est un signe des temps sur la direction que va prendre notre programme. En 1994-1995, l'ancienne Commission canadienne des pensions a reçu 8 679 demandes. La loi a été modifiée en 1995 et, comme je le disais, le ministère des Anciens combattants est maintenant responsable de la gestion des formalités initiales du processus. Vous pouvez constater une croissance très marquée du nombre de demandes depuis quelques années. Nous prévoyons qu'à la fin de l'exercice 2001-2002, nous aurons reçu presque 24 000 demandes. Lorsqu'on entend parler des délais de traitement et d'autres problèmes de ce genre, on doit se rappeler que nous travaillons dans un environnement où le taux de croissance est très élevé. Par conséquent, les défis que nous devons relever pour répondre aux demandes dans des délais raisonnables et pour maintenir la qualité, et ainsi de suite, sont aussi très grands. Nous travaillons avec acharnement pour répondre à ces attentes.

Le sénateur Atkins: Les anciens combattants qui avancent en âge en sont-ils la cause?

M. Butler: Cette hausse est-elle attribuable à l'âge?

Le sénateur Atkins: Oui.

M. Butler: Je crois qu'il y a probablement plusieurs explications à cela. Par exemple, les anciens combattants qui avancent en âge et qui ont de plus en plus de problèmes de santé veulent obtenir des pensions et la population des Forces canadiennes est de plus en plus sensibilisée à ce programme, en grande partie grâce aux directives fournies par le sous-ministre, qui nous a demandé de tenir des séances d'information pour les militaires à propos de leurs droits et de leurs avantages. Le projet de loi C-41 est un autre facteur. Les membres des Forces canadiennes ont de plus en plus de poids, puisqu'ils connaissent de mieux en mieux leurs droits et leurs avantages. Ils demandent des décisions formelles. C'est sans aucun doute une combinaison de plusieurs facteurs, mais cette tendance est très importante. Monsieur le sous-ministre, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

M. Murray: Le sénateur Kenny a posé des questions intéressantes à la dernière séance au sujet des tendances et des statistiques, et nous nous attaquons à ce problème. Comme l'a expliqué Bernard, nous pouvons vous donner des renseignements non scientifiques, mais nous ne comprenons pas pleinement ces tendances et ces statistiques. Par exemple, il est très difficile de faire des prévisions en termes de nombres pour les Forces canadiennes.

Le sénateur Wiebe: Est-ce en partie à cause de la reconnaissance des membres de la marine marchande et ce genre de choses, ou cela est-il un sujet complètement distinct? Est-ce que cette reconnaissance donne lieu à un paiement forfaitaire, si bien que ces gens-là ne font alors pas partie de cette catégorie?

M. Murray: C'est une question intéressante. En apparence, il n'y a aucun lien parce que l'ensemble des avantages sociaux propres à la marine marchande est une indemnité distincte. Mais, en réalité, nous avons donné de l'information dans la publication Legion Magazine, et au bas des formulaires que nous avons transmis, nous demandions aux membres s'ils voulaient communiquer avec nous. Je suppose que plus de gens ont pris connaissance de leurs droits et de leurs avantages à la suite de cette initiative. C'était un genre de programme d'approche. Nous n'avons pas les statistiques en main, mais beaucoup de ces anciens combattants qui ne recevaient pas de pension d'invalidité répondaient aux critères du seuil de faible revenu. Bon nombre d'entre eux ne savaient pas ce à quoi ils avaient droit. C'est donc aussi un facteur dont il faut tenir compte.

Le sénateur Day: L'octroi de prestations spéciales aux marins de la marine marchande n'était pas lié à l'admissibilité de ces derniers à d'autres programmes. Dois-je comprendre qu'ils étaient déjà inclus?

M. Butler: Ils le sont depuis 1992. Je dirais qu'une partie de l'angoisse existentielle entourant le problème tenait au fait que beaucoup d'entre eux n'avaient pas réalisé qu'ils avaient les mêmes droits que les anciens combattants des forces armées depuis 1991 ou 1992. Les anciens combattants de la marine marchande recevaient 5 000, 10 000 ou 20 000 $, selon la durée de leur service en temps de guerre, et ceci était totalement séparé du reste. Peu importe s'ils faisaient partie de nos clients, ils avaient droit à ces prestations et les recevaient. Dans de nombreux cas, les gens se sont rendu compte de leurs droits et il se pourrait qu'ils soient maintenant nos clients, parce qu'ils reçoivent une pension d'invalidité ou autre en plus de cela.

Le sénateur Day: J'avais l'impression que plusieurs de ceux qui défendent les marins de la marine marchande n'étaient pas au courant. Ils s'en sont rendu compte lorsqu'on a fait la promotion du programme d'indemnisation.

Le président: Cela démontre probablement l'à-propos du programme de sensibilisation dont vous faites la promotion.

M. Butler: La diapositive suivante concerne les examens médicaux. Comme je l'ai indiqué, une fois que le droit à des prestations est reconnu, les personnes peuvent devoir subir une première visite médicale si nous ne disposons pas de l'information suffisante pour déterminer la gravité de l'incapacité, et nous reconnaissons également que l'état de santé peut empirer avec le temps et que les bénéficiaires ont le droit de nous demander une révision des évaluations. Celles-ci sont effectuées par notre personnel médical dans chacun de nos bureaux de district. Cette diapositive vous montre tout simplement le travail que cela représente pour nous.

La diapositive suivante fait référence à la composition de la clientèle changeante dont le sous-ministre a parlé dans son allocution d'ouverture. Par exemple, nous nous attendons à ce que dans dix ans notre clientèle soit composée d'à peu près 25 p. 100 de membres des Forces canadiennes, contre environ 11,7 p. 100 actuellement. Cela représente un certain nombre de défis pour notre ministère.

M. Murray: Monsieur le président, j'aimerais souligner la rapidité avec laquelle les plus jeunes sont visés. Depuis une heure et 10 minutes, l'âge moyen des clients, membres des FC, a diminué de quatre ans.

M. Butler: Nous parlerons certainement de tout cela plus tard, d'ailleurs, la diapositive sur les caractéristiques démographiques illustre ce problème. La diapositive suivante porte sur les taux d'approbation et nous voulons que vous sachiez véritablement quelle approche nous avons adoptée en la matière. Comme vous pouvez l'observer, le taux d'approbation a crû graduellement au cours des dernières années, au premier palier d'arbitrage. Le but était de viser juste du premier coup. Si nous pouvons aider les clients à réunir toute l'information nécessaire à l'appui de leur demande dès le début, cela leur évite de passer par la procédure d'appel et de subir tout le stress, ainsi que la perte de temps et d'argent que cela suppose.

La dernière diapositive est celle que nous aimons toujours présenter aux sénateurs et à tous ceux qui viennent nous écouter. Elle décrit les progrès que nous avons accomplis ces dernières années dans la réduction du délai de traitement. En 94-95, il fallait attendre 18 mois entre la date de demande d'indemnité et celle du premier versement. Le ministre de l'époque avait fait preuve d'une grande sagesse en déclarant que ce n'était pas satisfaisant. On a procédé à une restructuration majeure de l'organisation et à une importante réforme législative. Nous avons continué de réduire les délais de traitement jusqu'à leur niveau actuel, c'est-à-dire 6,6 mois. Je pense qu'il est juste de dire, et j'aime beaucoup citer le sous-ministre là-dessus, que 6,6 mois c'est très bien, mais qu'il faudrait que ce soit beaucoup mieux. Nous cherchons toujours des façons et des moyens d'améliorer les délais de traitement ainsi que la qualité et la cohérence de nos décisions. Voilà donc les défis que nous devrons relever au cours des prochaines années.

M. Murray: J'aimerais dire quelque chose à propos des 6,6 mois. Le personnel a travaillé vaillamment pour en arriver là, mais permettez-moi d'en revenir au projet de loi C-41, compte tenu, plus particulièrement, des nouveaux clients qui se présentent chez nous, atteints de troubles comme le syndrome de stress post-traumatique. Le problème essentiel que je vois ici c'est que, pour recevoir une aide médicale dans notre système, il faut être invalide. C'est à cette condition que les anciens combattants des Forces canadiennes en bénéficient; les anciens combattants des Première et Deuxième Guerres mondiales ont, quant à eux, droit à un revenu, à une pension d'invalidité. C'est pourquoi le projet de loi C-41 était si important, pour que ce délai de 6,6 mois puisse s'écouler pendant que les personnes sont toujours membres des Forces armées canadiennes et qu'elles reçoivent un soutien médical complet. Ainsi, lorsqu'elles quittent les Forces armées, les personnes qui répondent aux critères ne reçoivent pas seulement une pension d'invalidité, elles se voient aussi offrir un soutien médical adapté à leur état de santé. C'est la raison pour laquelle je voulais insister sur l'importance du projet de loi C-41, parce que lorsqu'arrive dans nos bureaux de Toronto un jeune ayant servi en Bosnie ou ailleurs, dans les années 90, qui souffre du syndrome de stress post-traumatique et qui a été à l'extérieur du pays pendant trois ans, nous lui disons: «remplissez ces formulaires». Nous sommes vraiment fiers, car nous avons réduit le délai de traitement de 18 à six mois et parce que nous allons pouvoir l'aider. C'est le problème et, en toute honnêteté, nous faisons du mieux que nous pouvons. C'est la raison pour laquelle il est si important d'établir un contact avec ces gens, tant qu'ils sont au service des Forces armées, au sein d'une organisation qui s'occupera d'eux tant qu'elle le pourra.

Le sénateur Day: J'imagine que s'ils ont droit à des indemnités, quelle que soit la durée du processus, il y a un effet rétroactif?

M. Butler: Oui, c'est exact. On compte à partir de la date de la demande ou de la date de prise de contact avec le ministère des Anciens Combattants.

Le sénateur Wiebe: Compte tenu de l'expérience considérable dont dispose le ministère des Anciens combattants en la matière, je me demande — et je suis sûr que c'est le cas — si vous transmettez l'information et les critères d'admissibilité au ministère de la Défense nationale pour voir si les données qu'il a sont meilleures ou plus à jour, de cette façon il serait beaucoup plus facile pour vous de traiter avec ces personnes. Est-ce qu'on encourage le MDN à créer son propre programme de sensibilisation pour informer les militaires actifs des démarches qu'ils doivent faire, dont ils pourraient profiter, le cas échéant?

M. Brian Ferguson, sous-ministre adjoint, Services aux anciens combattants, ministère des Anciens combattants: C'est exactement ce qui arrive. Depuis trois ans, à la suite du travail effectué autour du projet de loi C-41 et de l'initiative du ministère de la Défense nationale visant à améliorer la qualité de vie des militaires, nous avons travaillé en très étroite collaboration avec eux. Voici ce sur quoi nous nous sommes concentrés: chercher à obtenir d'eux de meilleurs renseignements plus rapidement; avoir accès aux dossiers médicaux et aux données compilées par les ressources humaines; trouver une façon d'entrer ces données dans notre système plus rapidement, et leur demander de conserver soigneusement toutes les informations ayant trait à leur maladie ou à ce qui leur est arrivé. Tout cela nous sera très utile pour l'ensemble du processus. C'est une part très importante du message que nous envoyons au ministère de la Défense nationale, avec notre programme de sensibilisation.

Le président: Le sénateur Atkins m'a rappelé que nous avions eu un exposé sur le traitement ou le manque de traitement accordé aux anciens combattants autochtones. Je me demande si, dans ce contexte, c'est une question pertinente, et si vous êtes la personne toute indiquée pour y répondre.

Le sénateur Wiebe: J'avais prévu d'en parler aujourd'hui, mais je ne savais pas comment l'introduire.

Le président: Je ne sais pas comment moi non plus.

Le sénateur Wiebe: Le chef Perry Bellegarde, de la Federation of Sasktachewan Indian Nations, a présenté un exposé devant notre comité, accompagné de Matthew Coon Come, grand chef de l'Assemblée des premières nations. De mon point de vue, le chef Bellegarde était certainement beaucoup plus au fait des problèmes et des démarches qu'ils avaient entreprises que ne l'était le grand chef.

Je crois qu'ils ont vraiment raison, même s'ils s'égarent un peu lorsqu'ils parlent du type d'indemnisation qu'ils veulent, quand on compare la situation de la marine marchande avec ce qu'ils reçoivent, et l'absence d'aide quelconque à la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Nous devons aussi examiner l'aide qu'ont effectivement reçue les Premières nations. Cette aide était disponible sous trois formes différentes. Les anciens combattants autochtones admissibles recevaient une partie du premier et du troisième programme d'aide. Pour le deuxième, il y avait un certain flou. Ils nous ont donné l'impression qu'après leurs discussions avec le ministre de l'époque, ils pensaient que l'affaire avait été réglée et qu'une annonce serait faite peu après. Bien sûr, il n'y a jamais eu d'annonce.

Je suis sûr que votre ministère a beaucoup travaillé sur le dossier. Comment réagissez-vous à leur exposé? Peut-être est-ce une question que je devrais poser au ministre. Cependant, pour le moment, il ne connaît pas très bien la situation, et il m'a assuré, lors d'un entretien que j'ai eu avec lui, qu'il étudiait la question de près.

M. Murray: Compte tenu des préoccupations exprimées par les anciens combattants autochtones, le gouvernement fédéral, qui englobe ce ministère, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et le ministère de la Défense nationale, a pris cette décision parce qu'il y avait quelques problèmes relatifs aux prestations familiales accordées pendant les années de guerre, en vertu de ce programme. Le grand chef Howard Anderson, de la Saskatchewan, a présidé une table ronde nationale. Dans le rapport qui a suivi, on faisait état d'un consensus sur le fait que les anciens combattants autochtones avaient été traités différemment des autres anciens combattants, particulièrement ceux qui retournaient dans les réserves après la guerre.

Cette différence de traitement tenait au fait que le ministère des Anciens combattants leur offrait sans doute la même gamme d'avantages, mais que la distribution des prestations se faisait par l'intermédiaire d'un agent autochtone. Il semble que cela ait suscité un débat et qu'on se demande si chaque ancien combattant autochtone a véritablement reçu, grâce à ce processus, le même traitement qu'un ancien combattant non autochtone. Dans la plupart des cas, cela a trait aux dispositions de la Loi sur les terres destinées aux anciens combattants.

Quoi qu'il en soit, la table ronde est terminée et ceux qui y ont participé ont produit un rapport dans lequel ils font des suggestions concernant l'indemnisation — je crois qu'ils parlent de 425 000 $. Le gouvernement étudie la proposition. Je suis certain que le nouveau ministre a été saisi du dossier, tout comme ses collègues concernés. Maintenant, ils travaillent main dans la main pour préciser la réponse du gouvernement aux recommandations du rapport.

Parmi les éléments pris en considération, citons le niveau d'indemnisation, l'allocation-repère versée aux prisonniers de Hong Kong et celle établie pour les anciens combattants de la marine marchande. Actuellement, les ministres concernés, avec à leur tête notre nouveau ministre, se penchent sur la question et s'efforcent de résoudre le problème le plus rapidement possible pour donner une réponse aux anciens combattants autochtones.

Le sénateur Wiebe: Comme vous le savez certainement, il faut faire vite, car peu de ces anciens combattants sont encore en vie. Parmi les problèmes soulevés, on a dénoncé l'absence d'un programme de sensibilisation destiné aux combattants autochtones qui rentraient chez eux. L'agent se trouvant dans la réserve était en grande partie responsable de ce problème.

Une autre de leurs inquiétudes — à juste titre — c'était que peu après la Deuxième Guerre mondiale, la plupart des anciens combattants recevaient énormément d'informations sur le programme de sensibilisation dans les filiales de la Légion partout au Canada. L'accès aux bureaux de la Légion canadienne était refusé aux anciens combattants autochtones parce que ces derniers n'étaient pas autorisés à boire de l'alcool. Ils n'avaient donc aucune idée du type de programmes à leur disposition. Beaucoup d'entre eux étaient comme les anciens combattants dont nous venons de parler à propos des examens médicaux — dès que la guerre était finie, ils ne pensaient qu'à quitter l'endroit où ils se trouvaient pour rentrer chez eux.

Je crois qu'il y a motif valable et que le ministre le réalise lui aussi. Toutes ces conditions ont été prises en considération.

Le sénateur Atkins: Lorsque j'ai interrogé le chef au sujet des dossiers médicaux, ce dernier n'était pas sûr de l'endroit où ils étaient conservés — au ministère de la Défense nationale ou à celui des Affaires indiennes et du Nord. Chose certaine, ce n'est pas au ministère des Anciens combattants.

M. Murray: Dans le cadre de la table ronde nationale, on a fait beaucoup de recherche et examiné de nombreux dossiers. Peut-être M. Bernard peut-il nous en dire plus.

M. Bernard: Je ne suis pas vraiment au courant de tous les détails. Normalement, c'est aux Archives nationales du Canada qu'on rechercherait le dossier médical d'un ancien combattant, qu'il soit Indien ou non, puisque c'est là que les dossiers médicaux des militaires sont normalement conservés.

M. Murray: Nous le faisons en ce moment pour les anciens combattants métis. L'Association nationale d'anciens combattants aborigènes en est actuellement aux premiers stades de la recherche sur les Indiens non inscrits. Une personne de chez nous, M. Bryson Guptill, a travaillé pendant des mois sur ce projet dans le cadre de la table ronde nationale. Si vous le désirez, monsieur le président, je pourrais demander à M. Guptill de comparaître pour vous fournir des détails sur les dossiers que nous avons examinés, sur leur état et sur d'autres questions du genre.

Le sénateur Atkins: Excellent.

Le sénateur Day: Messieurs, je suis un peu mal à l'aise face à certaines informations que nous avons recueillies en chemin. Ma préoccupation touche les droits élargis en vertu du projet de loi C-41 dont nous avons discuté. Le délai d'exécution est bon et je crois que les droits élargis pour les membres actuels est la voie à suivre. Je vous suis également reconnaissant d'avoir insisté sur l'importance des dossiers médicaux.

Ce qui me préoccupe, c'est lorsque nous sommes rendus dans l'Ouest visiter la marine et lorsque nous sommes allés à Halifax — et j'espère qu'il n'y a pas de lien avec ce que vous venez de nous dire au sujet de ces nouveaux droits pour les membres actuels — on nous a dit que le délai était inacceptable dans le cas des demandes provenant des membres de la réserve qui voulaient devenir membres de la force régulière. Il était préférable pour eux de présenter une demande sans faire mention de leur appartenance à la réserve à cause des dossiers médicaux; en effet, les Forces armées passaient un temps exagérément long à obtenir ces dossiers médicaux et à documenter les dossiers de toutes ces personnes avant de les accepter.

Nous avons porté cette question du délai à l'attention du ministre de la Défense nationale et nous en avons également fait état dans notre rapport. J'espère qu'il n'y a pas de lien entre ce délai et les droits étendus en vertu du projet de loi C-41.

M. Murray: Ma réponse ne peut être qu'empirique parce qu'il s'agit véritablement d'une question de recrutement au sein des Forces canadiennes. Je sais qu'en raison des efforts extraordinaires réalisés au cours des dernières années pour renforcer les services médicaux dans les Forces canadiennes, on a accordé beaucoup d'importance aux dossiers par rapport aux besoins des Forces. En termes de besoins, lorsqu'il y a une entrée particulière dans le dossier — un rapport d'accident, par exemple — cette entrée est complètement reformulée pour la rendre conviviale. Je me rappelle très certainement que lorsque j'étais jeune officier, on m'exposait toutes les raisons pour lesquelles je devais m'assurer d'enregistrer mes activités comme le jogging, le hockey et ainsi de suite.

En ce qui a trait à la nature des dossiers, je crois qu'on a fait de gros efforts — que nous appuyons d'ailleurs — pour s'assurer que les membres des Forces soient au courant. Je sais que les Forces font le nécessaire pour les aider à remplir des dossiers afin de favoriser leur accès à une pension d'invalidité. À nos yeux la question du traitement des membres de la réserve par rapport à celui des membres de la force régulière s'inscrit dans un contexte bien différent de celui auquel vous avez fait allusion. Nous croyons être suffisamment présents sur les bases et également être en mesure de sensibiliser les membres de la force régulière, tout en essayant de rejoindre les réservistes.

Il y a un domaine dans lequel nous devons faire plus d'effort pour nous assurer que les réservistes comprennent la nature de leurs dossiers. Lorsqu'ils demandent ou obtiennent un transfert dans la force régulière, nous devons nous assurer qu'ils reçoivent de nous la même information que celle qu'ils reçoivent de la force régulière. Je ne suis pas certain que ce soit le cas à l'heure actuelle. Il y a du travail à faire de notre part à ce sujet, bien que nous fassions des efforts dans ce sens.

Le sénateur Day: Je comprends votre réponse, monsieur le sous-ministre, et je ne crois pas qu'il y en ait d'autre possible.

M. Murray: Nous pourrions faire le suivi indirectement avec les forces et vous en reparler, si vous voulez.

Le sénateur Day: Je voulais juste éveiller votre attention sur le fait que, pour une raison quelconque, il semblerait que les dossiers médicaux soient la cause d'un délai beaucoup trop long.

M. Ferguson: Nous devrions faire le suivi de votre suggestion, étudier le tout et vous faire part de l'information nouvelle que nous aurons réussi à obtenir.

Le président: Comme vous le savez, la Légion soulève souvent la question de l'interprétation donnée par le Tribunal d'appel des anciens combattants, et je me demandais quelle serait votre réponse. Autant que je sache, la loi laisse place à l'interprétation. La Légion nous dit que, récemment, les demandes d'interprétation de la loi n'ont pas reçu de réponse. Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est ou nous éclairer sur cette question?

M. Murray: Je crois que le président du Tribunal des anciens combattants doit comparaître plus tard ce matin. Comme je ne peux vous donner qu'une réponse empirique, je crois préférable que vous lui posiez la question.

Le président: C'est bien. En définitive, y a-t-il une façon de créer un tableau qui explique plus clairement la relation entre le volume de la demande et le délai d'exécution? Ce tableau du délai d'exécution ne tient pas compte du volume, n'est-ce pas?

M. Butler: Non, il ne tient pas compte des défis que nous avons dû relever pour répondre à une demande croissante.

M. Murray: Si vous permettez, monsieur le président, le délai d'exécution de 7.5 présenté n'est pas lié au volume, ce qui vaut au personnel en cause une autre mention élogieuse. Il s'agit d'une question d'informatique que nous avons résolue grâce à un effort extraordinaire du personnel. Par conséquent, c'est un témoignage d'estime offert aux personnes que vous allez rencontrer dans quelques minutes.

Le sénateur Day: Est-ce que le délai d'exécution s'applique aux cas qui vont en appel ou s'agit-il simplement de la première évaluation?

M. Butler: Juste la demande initiale.

Le sénateur Day: C'est bien ce que je pensais.

Le président: Il s'agit là d'une séance des plus intéressantes et des plus instructives. Nous voulons remercier chacun d'entre vous pour nous avoir donné ces réponses si riches en information.

M. Brian Chambers est notre prochain témoin et je crois qu'avec ses collègues, il va nous entretenir du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), dont nous avons entendu parler par des personnes qui nous écrivent à l'occasion — toujours en termes élogieux, je peux vous l'assurer. Peut-être pouvez-vous nous présenter vos collègues?

M. Brian Chambers, président, Tribunal des anciens combattants (révision et appel): Je suis accompagné de Dale Sharkey, directrice exécutive, et de Jean Dixon, conseillère juridique principale. Pour vous aider à mieux comprendre la situation du tribunal, j'aimerais vous donner un aperçu de ce qui s'est passé chez nous depuis 1995-1996. Sentez-vous bien à l'aise de poser des questions.

Le mandat conféré par la loi au tribunal est de donner aux clients toute liberté de demander une révision ou d'interjeter appel des décisions et ce, dans le but d'assurer un processus équitable d'arbitrage dans le cas des demandes de pension d'invalidité et d'allocation aux anciens combattants. L'organisation de base du tribunal n'est pas d'une grande complexité. Le tribunal est constitué d'un président et d'un directeur du développement professionnel, qui est responsable des programmes de formation permanente destinés aux membres. Nous avons une directrice exécutive que je viens tout juste de vous présenter, un directeur des services juridiques et, en vertu de la loi, nous pouvons avoir 29 membres permanents. Nous pouvons également nommer des membres vacataires lorsque la charge de travail l'exige. À l'heure actuelle, le tribunal compte 28 membres.

Le président: Est-ce que vous ou le tribunal pouvez les nommer?

M. Chambers: Non, ils sont nommés par le gouverneur en conseil. Je m'excuse, j'aurais dû le préciser. Dans nos débuts, nous avons demandé d'avoir des membres temporaires parce que la charge de travail était extrêmement lourde. Nos besoins sont moins grands en ce moment.

Parmi nos clients, nous retrouvons des anciens combattants de la Première Guerre mondiale, même si leur nombre diminue.

Le sénateur Atkins: Y en a-t-il encore?

M. Chambers: Oui. Je pense qu'il y en a encore autour de trois ou quatre mille.

Le sénateur Atkins: Oh, vraiment? Ils doivent avoir 100 ans.

M. Chambers: Oui. Je peux me tromper sur les chiffres, mais ils sont sûrement plus nombreux que ce que je pensais. En fait, il reste sept survivants de l'explosion de Halifax qui reçoivent toujours une pension.

Le sénateur Atkins: Cela inclut-il les conjoints?

M. Chambers: Oui, une disposition prévoit qu'une partie de la pension est versée au conjoint survivant après le décès du bénéficiaire. De plus, les conjoints peuvent de nouveau présenter des demandes. Par exemple, après le décès d'un pensionné, sa veuve peut en tout temps venir nous dire que son mari n'a jamais demandé d'être indemnisé pour ses maux d'estomac. Il y a une disposition pour ce genre de demande, dans la mesure où la veuve peut fournir des éléments de preuve. Nous pouvons approuver sa demande et elle recevra une prestation pour le compte de cet ancien combattant, à titre posthume.

Le sénateur Atkins: Elle ne peut pas venir vous dire que, s'il vivait encore, son dos le ferait souffrir davantage aujourd'hui?

M. Chambers: Oui, elle peut si elle a des éléments de preuve. C'est une question d'ordre pratique. Il est très difficile de réunir des éléments de preuve, mais il est arrivé que des rapports de médecin existaient mais n'avaient pas été présentés — surtout si les gens viennent de régions éloignées du pays et n'ont pas de contacts réguliers avec le ministère.

Nous nous occupons des anciens combattants de la guerre de Corée dont l'âge moyen se situe aujourd'hui autour de 66 ans, je pense. Il y a essentiellement deux grandes catégories au sein des Forces canadiennes. La première est le service dans les zones de service spécial, auquel est accordé un obscur crédit conformément à la Loi portant affectation de crédits qui définit ces zones. Elles sont définies en fonction des missions qui sont confiées aux militaires canadiens, par exemple, en Haïti, au Rwanda, en Somalie et en Afghanistan. Je vous le signale parce qu'il est très difficile de trouver ces renseignements dans la documentation courante. La deuxième catégorie est celle des anciens combattants encore actifs, de leurs survivants et personnes à charge. Nous nous occupons des personnes à charge jusqu'à un certain âge. Par exemple, si une personne à charge est handicapée avant l'âge de 21 ans, ou si un enfant souffre d'une maladie mentale ou d'une anomalie congénitale sévère qui l'empêche de travailler, cet enfant peut continuer de recevoir une pension à titre de survivant.

Nous nous occupons des membres de la GRC et des anciens combattants de la marine marchande, dans un contexte différent de celui du règlement sur la marine marchande. Les membres de la marine marchande entrent dans une catégorie spéciale s'ils ont participé à une intervention contre l'ennemi, et ils peuvent demander de se faire indemniser s'ils ont subi une blessure ou souffert d'une incapacité liée à cette intervention. C'est prévu depuis longtemps. Cette prestation existe depuis au moins trois ou quatre décennies.

Auparavant, c'était la Commission canadienne des pensions qui s'occupait des demandes au premier palier. Les appels présentés à la Commission canadienne des pensions étaient entendus par le Tribunal d'appel des anciens combattants. En 1995-1996, avec l'adoption du projet de loi C-61, c'est le ministère, et non plus la Commission canadienne des pensions, qui a été chargée des décisions au premier palier. De notre côté, nous sommes responsables des décisions aux deux paliers suivants. Nous nous occupons des demandes de révision, comme on dit, puis des demandes d'appel, au dernier palier.

Ainsi, au moment de la révision, nous tenons des audiences dans les villes et les provinces de résidence des anciens combattants des Forces canadiennes, des demandeurs, des conjoints ou des veuves, selon le cas. Nous payons également leurs dépenses pour assister à l'audience. S'ils veulent faire entendre des témoins, comme des médecins, des dispositions prévoient également le remboursement de leurs dépenses. De plus, si certains anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale qui sont âgés et souffrent d'incapacités graves doivent se faire accompagner, nous payons aussi les dépenses de ces personnes. Par exemple, s'ils viennent d'une région rurale du Manitoba et doivent assister à une audience à Brandon, ils seront hébergés à l'hôtel pour la nuit, l'audience aura lieu le lendemain et ils retourneront chez eux par la suite. S'ils ne sont pas satisfaits de la décision rendue à ce stade, ils peuvent interjeter appel.

L'audition des appels de dernière instance se déroule à Charlottetown, où se trouve le bureau national du tribunal. Les clients sont représentés par un avocat, habituellement du Bureau de services juridiques des pensions, mais il peut aussi travailler à la Légion royale canadienne. La Légion a un employé à Charlottetown qui est responsable des dossiers d'appel. De temps à autre, des avocats du secteur privé peuvent aussi représenter les clients.

Dans des cas très particuliers, nous offrons un système de vidéoconférence, surtout pour tenir compte de la façon dont le travail du Bureau de services juridiques des pensions est réparti. Ainsi, l'avocat qui se trouve à Calgary ou à Terre-Neuve peut, grâce au système de vidéoconférence, présenter l'appel de son client.

À l'audience, vous pouvez produire tous les éléments de preuve que vous voulez. Il n'y a pas de limite. Ensuite, il s'agit d'audiences de novo; cette expression latine signifie que la cause peut être réentendue à partir de zéro, sans être limitée à certains aspects particuliers. À chaque palier, il y a examen complet du dossier. Il n'y a pas de limite à ce qu'on peut présenter. Il y a une restriction prévue dans la loi qui semble créer de la confusion. En effet, la loi stipule que nous n'entendons pas les arguments oraux au dernier palier, celui de l'appel. Or, cela signifie simplement que le demandeur peut, par l'entremise de son avocat, présenter une déclaration écrite qui peut être de 10 ou 20 pages. Les clients ne comparaissent pas, seulement leurs avocats.

Cette disposition amène les gens à croire que nous refusons d'entendre les éléments de preuve. Ce n'est pas le cas. Nous ne sommes tout simplement pas en mesure d'accueillir les arguments des clients de vive voix. En général, dans ces cas, on présente la transcription écrite du témoignage présenté au palier précédent. Par conséquent, nous entendons les éléments de preuve. Nous sommes au courant de tout ce qui s'est dit au palier précédent ainsi que de tous les nouveaux éléments de preuve que les clients veulent présenter, qu'il soit de nature médicale, militaire, juridique ou autre.

Il y a par conséquent beaucoup, beaucoup de possibilités. Nous ne sommes pas liés par un processus rigide. Nous essayons de faciliter les choses. Compte tenu de l'âge et de la situation de nos clients, nous devons trouver de nouveaux moyens d'entrer en contact avec eux et de faciliter l'accès aux audiences, sans perdre de vue que nous avons certaines exigences d'ordre juridique à respecter par mesure de protection.

Nous avons convenu que les demandes de révision pouvaient être entendues par un comité composé d'un seul membre. Nous l'avons déjà fait et je vous explique pourquoi. Quand nous avons pris la relève en 1995-1996, il y avait 8 000 causes en attente. Comme elle prévoyait l'adoption d'une nouvelle loi et la création d'un nouveau tribunal, la commission qui était l'organisme responsable à l'époque a simplement relâché ses efforts.

Au cours de notre première année d'existence, en plus des 8 000 causes déjà déposées, nous avons eu aux alentours de 11 000 ou 12 000 nouvelles causes à traiter. Nous avions près de 20 000 causes à instruire, et nous voulions le faire dans une période de 12 mois.

C'était le défi que nous avions à relever. Compte tenu du nombre de membres que nous avions et du nombre d'audiences à tenir, nous avons osé demander aux gens s'ils accepteraient que leur cause soit entendue devant un comité composé d'un seul membre plutôt que de deux, comme c'est prévu. Nous n'avons pas imposé cette façon de faire mais, s'ils acceptaient, nous étions en mesure de nous rendre dans leur localité trois ou quatre mois plus tôt. Nous ne l'avons pas fait s'ils n'étaient pas d'accord. Beaucoup de gens ont préféré que l'audience se tienne plus tôt, au lieu d'attendre. Nous tenons des audiences dans un peu plus de 40 villes et localités du Canada.

Nous avons aussi ce que nous appelons des instructions sur dossier. Elles ont souvent lieu quand les gens trouvent un élément d'information important qui manquait. Au lieu de prévoir une audience et d'envoyer des gens sur place, nous examinons directement la question. Il y a des discussions informelles préalables auxquelles participent nos avocats et nos agents des politiques. Ils nous expliquent la situation; nous demandons un document écrit et essayons de rendre une décision dans un délai d'environ 48 heures.

Il faut comprendre que, pour les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, qui ont aujourd'hui près de 80 ans et plus, présenter une demande est une cause de stress. Nous essayons de mettre fin à ce facteur de stress le plus tôt possible en réduisant les longues périodes d'attente. Comme je l'ai dit, pour les demandes de révision, nous enregistrons sur bande audio toutes les audiences et nous envoyons par écrit la décision au demandeur et à son représentant.

Nous voulons adopter de nouvelles méthodes. Nous voulons mettre au point un système nous permettant de transmettre par voie électronique des documents à des centres particuliers, ce qui serait plus rapide que de les envoyer par le courrier normal. Nous devons cependant régler des questions de sécurité et d'encryptage. Donc, même si nous avons des méthodes établies, nous aimerions faire appel à la technologie pour faciliter le processus le plus possible.

Nous pouvons aussi réexaminer des décisions, et nos normes prévoient que les décisions soient rendues dans un délai de 30 jours. C'est notre objectif et nous surveillons cela de très près avec notre personnel et nos membres. Dans la majorité des cas, nous respectons le délai.

Le président: Quelle est votre moyenne au bâton?

M. Chambers: Mme Sharkey a les chiffres.

Mme Dale Sharkey, directrice générale, Tribunal des anciens combattants (révision et appel): La dernière fois que j'ai vérifié, elle était d'environ 60 à 70 p. 100. Cependant, pour ce qui est des délais, ils sont la plupart du temps de 39 jours. Nous déployons beaucoup d'efforts pour les réduire de neuf jours. Je dirais que, depuis Noël, nous nous rapprochons du délai de 30 jours.

M. Chambers: Les représentants du ministère vous ont probablement parlé de leur nouveau système de suivi de l'information, le réseau de prestation des services aux clients. Quand le ministère l'a adopté, il y a environ un an, il y a eu beaucoup de chambardements. Beaucoup de retards sont causés par le système. Je crois que le ministère reconnaît que la mise en oeuvre du système a causé des problèmes considérables. Nous avons été touchés par le fait que le système tombe en panne à l'occasion ou ne fournit pas les informations à temps. Cela nous a ralentit, sans que nous puissions faire grand-chose à ce sujet.

Trois membres entendent les appels de dernier recours à Charlottetown. Dans le cas des appels, nous avons un système de vidéoconférence pour répondre aux besoins des avocats et, comme je l'ai dit, ils peuvent fournir tous les éléments de preuve qu'ils veulent. Cependant, tous les arguments de leurs clients doivent être présentés par écrit. Dans certains cas, nous avons convenu d'accepter les explications d'un client sur bande magnétique. C'est plus compliqué pour la transmission et l'entreposage et pour faire en sorte que les trois membres du comité en prennent connaissance.

La loi stipule que les clients peuvent assister à l'audience. On ne leur interdit surtout pas de le faire, mais c'est à leurs frais. Évidemment, c'est très cher pour quelqu'un de Vancouver ou d'Edmonton de se présenter à l'audience de son appel à Charlottetown. Nous n'enregistrons pas l'audience à ce palier, mais nous présentons une décision écrite détaillée, et cette décision comprend une clause restrictive qui la rend définitive et exécutoire — même si aucune de nos décisions ne l'est vraiment. Un nouvel examen est toujours possible, et il n'y a pas de limite de temps. Vous pouvez donc nous soumettre de nouveau une demande dans la mesure où vous pouvez nous prouver que vous avez de nouveaux éléments de preuve ou que nos conclusions sur les faits ou l'interprétation du droit étaient erronées, et nous allons rouvrir le dossier et réexaminer la cause.

Il n'y a jamais rien de définitif dans notre système; c'est toujours ouvert. Autrement dit, il n'y a pas de délai de prescription qui, après un certain temps, vous prive de votre droit d'interjeter appel. Notre système n'est pas limitatif. Cela peut créer certains problèmes de temps à autre, parce qu'il y a des décisions à effet rétroactif. Si on permet aux gens de présenter une demande n'importe quand, sans limite, le gouvernement a prévu par ailleurs dans la loi que nous n'allions pas remonter trop loin en arrière. La rétroactivité est limitée en vertu des articles 39.1 et 39.2 de la loi à trois années précédant la date de la demande. Par conséquent, si vous avez présenté votre demande en 1990 et qu'elle est acceptée en 2000, l'effet rétroactif de la décision ne sera que de trois ans.

Comme dans le cas de tous les tribunaux de l'administration fédérale, nos décisions peuvent être soumises à l'examen judiciaire surtout de la Cour fédérale, mais aussi d'un autre tribunal.

Le sénateur Day: Monsieur Chambers, je ne sais pas si on peut vous interrompre ou non.

M. Chambers: Oui, oui.

Le sénateur Day: Bien, merci. Ma question a trait au processus. Avez-vous des membres qui, en raison du mandat qui leur a été confié ou de leur ancienneté, sont spécialisés dans les causes d'appel, ou est-ce fonction de ce qui va se présenter le mois prochain?

M. Chambers: Nous formons nos membres pour qu'ils puissent examiner autant des demandes de révision que des demandes d'appel. S'ils examinent, par exemple, la demande de révision de M. Smith à Saint John, au Nouveau- Brunswick, ils ne pourront pas réexaminer la même cause si M. Smith porte la décision en appel.

Le sénateur Day: Oui, d'accord.

M. Chambers: Cette formation polyvalente assure plus de souplesse. En cas de congés de maladie, de vacances ou de nouvelles affectations, nous pouvons faire appel à un grand nombre de membres. Si les membres étaient désignés, nous serions vraiment coincés. Il est arrivé que deux ou trois de nos membres soient en congé de maladie de longue durée et, si nous n'avions pas eu la possibilité de déplacer nos membres un peu partout dans le pays, la tenue des audiences auraient pu être compromise.

Le président: Pouvez-vous embaucher des membres temporaires?

M. Chambers: Nous ne le faisons pas. Le processus de nomination serait trop long. Nous ne pourrions pas répondre à nos besoins opérationnels parce que les nominations doivent être soumises à l'approbation du Bureau du Conseil privé et du cabinet du premier ministre et faire l'objet de recommandations. Je pense que la plupart d'entre vous connaissent cela mieux que moi. Il faudrait attendre plusieurs mois avant d'avoir quelqu'un en poste, et il aurait ensuite une formation d'au moins quatre mois à suivre avant de ne plus représenter trop de risques pour nous et pour le client dans l'exercice de ses fonctions.

Le sénateur Atkins: En général, les gens préfèrent-ils un comité composé d'un membre ou de deux?

M. Chambers: Il y a deux membres qui entendent les demandes de révision. La loi prévoit que, si les deux membres ne s'entendent pas sur la décision à prendre, la décision qui est la plus favorable au demandeur est celle qui prévaut. Si les deux membres ne sont pas d'accord, c'est donc la décision la plus favorable qui prime dans notre système.

Le sénateur Atkins: C'est dans le cas des appels?

M. Chambers: Des demandes de révision. Dans le cas des appels, le comité est composé de trois membres et c'est évidemment la décision de la majorité des membres, c'est-à-dire deux contre un, qui l'emporte dans ce cas.

Le sénateur Atkins: Vous avez aussi parlé d'un comité d'un membre avec le consentement du client. Combien y a-t-il de demandes en moyennes entendues par un seul membre, et est-ce que beaucoup de gens acceptent cette formule?

M. Chambers: Oui, ils acceptent. Par exemple, le représentant d'un client qui veut présenter une donnée médicale qui servira d'argument décisif dans la cause va préférer soumettre la demande par écrit à un seul membre, parce que la décision peut être rendue dans un délai de 48 heures. Cette solution est retenue parce qu'elle est plus rapide pour les deux parties. En général, cela se produit moins de 50 ou 60 fois par année.

Le sénateur Atkins: Il me semble que c'est préférable.

M. Chambers: Ça l'est. Les gens insistent pour que leur demande soit entendue par un comité composé de deux membres parce qu'ils estiment qu'ils ont seulement une personne à convaincre. Ils croient avoir plus de chances devant deux personnes. Cependant, dans environ 98 p. 100 des cas, les deux membres tombent d'accord. Il est très rare qu'ils ne soient pas du même avis et, habituellement, quand cela arrive, c'est qu'un membre a mal interprété le dossier et c'est alors davantage une occasion d'apprentissage.

Le sénateur Day: Les membres vivent-ils tous à Charlottetown?

M. Chambers: Non. Il y a deux sortes de membres. Il y en a environ une quinzaine qui vivent à Charlottetown. Ils entendent les demandes d'appel et s'occupent surtout des demandes de révision de la région de l'Atlantique. Puis, il y a quatorze membres répartis un peu partout dans le pays. Nous essayons d'en avoir un dans chaque province. Nous en avons plusieurs en Colombie-Britannique, parce qu'il y a beaucoup de retraités des forces armées qui vivent sur la côte Ouest. Nous en avons un dans chacune des provinces de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, et nous en avons plusieurs en Ontario et au Québec.

Le sénateur Day: Si j'étais un avocat de la Saskatchewan représentant un demandeur éventuel, est-ce que je saurais qui va s'occuper de la révision initiale?

M. Chambers: Non, nous ne sommes pas un organisme transparent. On ne peut pas demander qu'un membre en particulier se charge de la révision.

Le sénateur Day: C'est ce que je voulais savoir.

M. Chambers: Les demandeurs ne savent pas, à l'avance, qui va siéger. En fait, si à notre avis les relations deviennent trop amicales, le demandeur ne fera probablement pas affaire avec les gens avec qui il a établi de si bonnes relations, parce que nous devons assurer un équilibre dans tout le pays. Le même genre de décision doit être rendue aux mêmes paliers, et c'est pourquoi les gens sont déplacés. Les membres connaissent les règles du jeu et savent que c'est sain. Ils ne demeurent pas dans le même secteur et ils n'ont pas les mêmes collègues pendant très longtemps. Trop de familiarité — et je suis certain que votre situation est probablement semblable à la nôtre — peut causer des problèmes et c'est pourquoi nous sommes prudents dans ce domaine.

Le sénateur Wiebe: Quel est votre budget d'exploitation?

M. Chambers: Notre budget est d'environ 8,6 millions de dollars.

Mme Sharkey: En réalité, il se rapproche davantage de 9 millions de dollars.

M. Chambers: Oui, nous avons eu un supplément grâce aux fonds affectés au programme qualité de vie, mais notre budget de base est d'environ 8,6 millions de dollars.

Le sénateur Wiebe: Est-ce que cela inclut l'équipement de bureau et le personnel?

Mme Sharkey: Les membres du tribunal occupent des postes à temps plein.

M. Chambers: C'est leur seul emploi?

Mme Sharkey: Oui.

M. Chambers: Nous n'avons pas d'employés à temps partiel, contrairement à certains bureaux fédéraux. Environ 90 p. 100 de notre budget est consacré aux salaires et le reste correspond aux capitaux d'exploitation. Je crois que c'est une répartition raisonnable.

Le sénateur Atkins: Quelle est la durée des mandats?

M. Chambers: Leur durée varie d'une à cinq années. Il n'y a aucune norme, mais le mandat le plus long a été de cinq ans et certains membres ont eu des mandats d'un ou deux ans. Le CPM a déjà envisagé des mandats initiaux de deux ans avant d'en accorder de plus longs en fonction de la performance.

Le sénateur Kenny: Est-ce que leur mandat peut être renouvelé?

M. Chambers: Oui.

Le sénateur Kenny: Un mandat d'un an me paraît un grand gaspillage. On commence à peine à se retrouver au bout d'un an. À votre avis, combien de temps faut-il pour devenir compétent?

M. Chambers: Nous recueillons des données à ce sujet depuis presque six ans. Il faut environ 12 mois pour qu'un membre possédant de bonnes aptitudes de base puisse être pleinement fonctionnel et prendre des décisions de manière autonome.

Le sénateur Kenny: Douze mois? Les mandats de deux ans ne sont donc pas très rentables pour vous; il faudrait qu'ils soient de trois, quatre ou cinq ans. Qu'est-ce que vous faites? Avez-vous un mécanisme de rétroaction lorsqu'un membre ne semble pas compétent? Pouvez-vous communiquer avec le BCP ou tout autre organisme si quelqu'un ne fait pas son travail correctement? Je ne vous parle pas d'un membre qui doit être sanctionné pour mauvaise conduite, mais plutôt d'un membre qui ne semble pas avoir les compétences voulues.

M. Chambers: Je crois que nous ne sommes pas différents des autres tribunaux fédéraux en ce sens que le président n'a pas le contrôle que l'on retrouve chez les présidents de la plupart des conseils d'administration. Nous pouvons tenter d'influencer le comportement d'un membre, mais nous n'avons aucune mesure de sanction.

Le sénateur Kenny: Je comprends. Je vous demande quel est le mécanisme de rétroaction que vous utilisez lorsque vous offrez un nouveau mandat? Pouvez-vous savoir d'une manière ou d'une autre si la personne en question serait plus à l'aise ailleurs?

M. Chambers: Le CPM demande souvent au président de lui transmettre ses commentaires sur la performance d'un membre en particulier lorsque vient le moment de renouveler le mandat de ce dernier. Cela ne se fait pas dans tous les cas, mais il y a un échange d'information.

Le sénateur Kenny: Lorsque l'information revient, vérifiez-vous à quelle fréquence vos recommandations sont suivies?

M. Chambers: Je suis raisonnablement satisfait de la réponse apportée à nos principales préoccupations, ainsi que des ajustements qui sont faits. Je suis heureux que l'on écoute ce que j'ai à dire à propos du rendement vu que de nombreux facteurs sont en cause, comme par exemple un problème de santé ou un problème personnel. Nous essayons toujours d'aider la personne en question, mais parfois, rien n'y fait.

Nous considérons qu'il est de notre devoir d'informer le CPM de tout problème qui nous semble réel. Laissez-moi vous donner un exemple. Les membres du palier de révision du tribunal sont en déplacement de 30 à 35 semaines par année. Au Manitoba, très peu de tribunaux siègent régulièrement si bien que les membres qui résident à Winnipeg doivent prendre l'avion toutes les semaines. Normalement, ils prennent l'avion le dimanche et arrivent à destination le dimanche après-midi et les dossiers de tous les cas qu'ils devront entendre le jour suivant — en général cinq à six dossiers — les attendent à la réception de l'hôtel.

Habituellement, il leur faut de deux à trois heures pour lire tous ces dossiers, prendre des notes et revoir le tout pour le lendemain matin. Les audiences débutent vers 8 h 30 et elles se terminent habituellement vers midi. Chaque audience dure environ une demi-heure. Les délibérations qui se tiennent dans la salle d'audience permettent d'arriver à une conclusion. Après le dîner, les membres se répartissent les dossiers et rédigent les décisions. Certains les dictent, d'autres les tapent sur leur ordinateur portatif et cela prend environ deux heures et demie.

Après le souper, ils commencent à lire les dossiers du lendemain. C'est ainsi que ça se passe du lundi au vendredi. Les audiences du vendredi se terminent à midi. Ils reviennent le vendredi soir et reprennent l'avion le dimanche après-midi.

C'est un horaire très lourd. Ces gens travaillent beaucoup et leurs journées sont longues. Pour trois semaines d'audience, ils n'obtiennent en retour qu'une semaine de «travail de bureau», pour employer un euphémisme, afin de reprendre leur souffle. Habituellement, ils en profitent pour aller chez le dentiste ou chez le médecin ou pour répondre à leurs obligations familiales.

La tâche est moins ardue pour les membres du palier d'appel, parce qu'ils n'ont pas à se déplacer. Ce n'est pas tout à fait exact, puisqu'ils travaillent parfois au palier de révision. Si on s'en tient seulement à la fonction des membres du palier d'appel, on constate qu'ils doivent simplement se rendre au bureau de Charlottetown et assister à trois séries d'audience par semaine en moyenne. Ils effectuent aussi des réexamens et d'autres tâches.

Le sénateur Kenny: C'est une description très utile, monsieur Chambers. Avez-vous une méthode pour faciliter la tâche d'un membre s'il a des problèmes de santé? Pouvez-vous lui offrir une demi-tâche?

M. Chambers: Si c'est un problème assez grave, nous pouvons lui offrir un congé non renouvelable de 180 jours pour se faire soigner. Mais s'il a d'autres problèmes de santé, nous l'encourageons à accepter un poste à Charlottetown, où les déplacements sont moins exigeants. Nous le nommons alors en tant que troisième membre d'un palier de révision afin de répartir davantage la tâche, mais seulement lorsque le volume de travail n'est pas trop important de l'autre côté.

Le sénateur Kenny: Finalement, j'aimerais parler des évaluations. Avez-vous un système d'évaluation annuelle du rendement? Un système de révision interne? Comment un membre peut-il savoir si son rendement est bon ou non?

M. Chambers: Au cours des 12 premiers mois, les membres reçoivent régulièrement des commentaires sur leur rendement, la qualité de leurs décisions, leur capacité d'effectuer des révisions de dossiers et de témoignages de qualité, et ainsi de suite. Donc, pendant les 12 premiers mois, nous effectuons un suivi très approfondi. Il n'existe aucun processus formel d'évaluation entre nous et le CPM ou le BPC par exemple. En 1996, on a essayé d'établir un processus formel d'examen sur dossier pour chaque membre, l'évaluation obtenue étant transmise à l'agence centrale. Certaines difficultés ont surgi à propos de l'établissement d'une formule relative aux genres d'information à fournir, et cetera. Les choses en sont restées là.

Le sénateur Kenny: Et vous, est-ce que quelqu'un évalue votre rendement?

M. Chambers: Il n'y a aucun processus formel d'évaluation de mon rendement. Lorsqu'il est temps de renouveler mon mandat, personne ne discute avec moi pour savoir comment les choses se passent.

Le sénateur Kenny: Même pas une révision par les pairs? Vous ne discutez jamais en groupe d'un certain nombre de cas que vous avez traités au cours de l'année? Vous ne discutez pas non plus en groupe du processus que vous avez utilisé? Rien de ce genre?

M. Chambers: Si, assez souvent. Nous avons en fait deux comités, un comité de révision de la politique qui examine les cas, et un autre, que je préside et qui traite des questions de l'heure touchant les membres qui sont en ville. Nous examinons les cas difficiles, intéressants ou bizarres. Nous essayons de nous entendre pour ce qui est de l'interprétation d'un cas, des problèmes ou des points soulevés, et ainsi de suite. Nous adoptons ce processus, parce que si les collègues ne discutent pas entre eux de leur travail, ils peuvent facilement s'écarter de la voie à suivre.

Nous essayons aussi de respecter l'autonomie et l'indépendance des membres. Je leur dis toujours: Voilà comment nous avons procédé, comment nous avons analysé le cas et les résultats que nous avons obtenus. Si vous voulez changer de direction, c'est parfait, mais ne soyons pas bizarres, soyons plutôt raisonnables. Expliquez-nous votre démarche, comment elle se conforme aux lois ou comment elle répond aux exigences médicales. Peu importe que vous innoviez, mais vous devez le justifier pour que nous puissions comprendre, car, au bout du compte, ce n'est pas une décision personnelle, c'est une décision du tribunal.

Le président: Ce sont de bonnes questions, très utiles. Quelle est la rémunération des membres du palier de révision? Je suppose que c'est du domaine public?

M. Chambers: Oui, c'est du domaine public. Leur rémunération varie de 82 000 à 97 400 $.

Le président: Est-ce en fonction de l'ancienneté?

M. Chambers: Non, ils sont tous payés au même niveau. Aucune augmentation d'échelon n'est prévue. Si vous êtes nommé aujourd'hui, vous recevrez le même salaire que quelqu'un qui est en poste depuis cinq ans. C'est ainsi que cela fonctionne; nous n'avons aucun contrôle là-dessus.

Le président: Comment expliquez-vous la fourchette de 80 000 $ à 90 000 $?

M. Chambers: C'est l'échelle salariale. Il existe différentes catégories de tribunaux dans le système fédéral et notre tribunal tombe dans la catégorie 3; c'est l'échelle qui est prévue pour ce palier. C'est la rémunération que reçoivent tous nos membres; c'est un niveau fixe pour tout le tribunal.

Le président: Entre 80 000 $ et 90 000 $?

M. Chambers: Oui, à l'heure actuelle, c'est 97 400 $.

Le président: C'est bien, je voulais juste une idée de l'ordre de grandeur.

M. Chambers: Nous pouvons vous confirmer ce chiffre.

Mme Sharkey: Je vais confirmer ce point. La rémunération est fixée par le Conseil privé.

Le président: Merci beaucoup. J'aimerais savoir si le point suivant est théorique ou non. La Légion porte un intérêt à un grand nombre de vos clients. Que se passerait-il si la Légion vous écrivait qu'un des membres du tribunal rend constamment des décisions bizarres, pour reprendre votre terme, que c'est devenu une tendance et que cette situation paraît vraiment injuste. Dans quelle mesure vous sentiriez-vous obligé de réagir à une telle lettre ou comment y réagiriez-vous?

M. Chambers: Cela arrive vraiment. Je vous donne un exemple. En septembre dernier, j'ai participé à la Conférence des agents d'aide sociale de l'est du Canada. Il s'agit d'une réunion regroupant des agents de la Légion qui représentent leurs clients devant notre tribunal (révision). Ces agents m'ont signalé qu'ils ne comprenaient tout simplement pas certaines décisions, qui, à leurs yeux, n'étaient pas logiques.

Le président: Une décision rendue par une personne ou par les mêmes personnes?

M. Chambers: Par deux membres. Mais, de façon générale, nous savons, à l'interne, quel est le membre qui a rédigé la décision et nous faisons un examen. Nous examinons les situations et donnons une rétroaction aux membres, non pas pour essayer de changer la décision, mais pour leur indiquer les lacunes relevées par les clients dans l'analyse, dans les raisons motivant la décision, et pourquoi la décision ne leur paraît pas sensée. Il s'agit pour nous d'un outil utile, mais il ne suffit pas de dire que les décisions rendues sont insatisfaisantes; il est préférable d'avoir des exemples, parce que cela nous fournit de la matière première pour amorcer le travail. En fait, nous encourageons cette pratique. Ce n'est pas une chose à laquelle nous résistons, parce qu'il s'agit d'un outil de rétroaction très utile.

Le président: J'ai une dernière question et j'ignore si vous préférez y répondre maintenant ou plus tard, mais elle concerne ce que la Légion perçoit comme l'absence de volonté ou de capacité de fournir des interprétations.

M. Chambers: Des audiences?

Le président: Non, des interprétations portant sur certaines parties de la loi, ce que la loi vous autorise à faire, si je ne m'abuse.

M. Chambers: La loi que nous sommes chargés d'administrer est unique du fait qu'elle comporte une disposition prévoyant que des groupes peuvent demander une interprétation de certaines parties de la loi qui peuvent paraître ambiguës ou vagues. Globalement, les divers tribunaux ont rendu 42-43 décisions d'interprétation portant sur différentes parties de la loi depuis la dernière grande refonte de la loi en 1971. Il y a eu une deuxième refonte, de moindre importance, vers 1981-1982.

La loi n'a pas beaucoup changé depuis 1971, de sorte que l'ensemble des décisions d'interprétation s'appliquant à des cas particuliers est déjà bien connu. Dans l'exemple que vous citez, la Légion demande une interprétation sur la situation des anciens combattants alliés. Auparavant, quiconque n'avait pas servi dans les Forces canadiennes, mais était un ancien combattant allié ayant déménagé au Canada après la guerre, en provenance de l'Angleterre, et ayant résidé au Canada pendant une période minimale de 10 ans, était admissible à une allocation d'ancien combattant. Le Parlement a abrogé cette mesure, se demandant pourquoi il faudrait verser une allocation à des gens d'un pays allié venus s'établir au Canada après la guerre. Cela n'était pas logique. Ainsi, le Parlement a accordé une clause de droits acquis à quiconque était arrivé au Canada avant une certaine année. Vous souvenez-vous de l'année en question? Je crois que c'était à la fin des années 80.

Mme Jean Dixon, directrice, Services juridiques, Tribunal des anciens combattants (révision et appel): Désolée, je ne me le rappelle pas.

M. Chambers: Nous pourrons vous donner cette date. Mais quiconque était au Canada et était admissible à des allocations à ce moment-là a bénéficié d'une clause de droits acquis de sorte que cette personne n'a perdu aucun de ses avantages. Toutefois, si un ancien combattant allié a quitté l'Angleterre pour s'installer au Canada en 1992, le Trésor public ne lui verse plus de pension. Là est la question.

La Légion a prétendu qu'elle croyait qu'une disposition de la Charte des droits et libertés pouvait être invoquée pour contester cette décision et nous lui avons suggéré de le faire devant les tribunaux. Il s'agit d'une loi adoptée par le Parlement. Nous nous trouvons dans une situation un peu délicate du fait que, comme tribunal constitué principalement de membres non-juristes, nous n'avons pas vraiment la compétence voulue pour nous engager dans des discussions détaillées et de haut niveau sur la Charte canadienne des droits et libertés. Nous n'avons pas non plus, comme c'est le cas de certains tribunaux, la capacité d'ordonner certaines mesures de réparation découlant d'une décision faisant intervenir la Charte.

Nous avons dit à la Légion que si elle avait un cas réel, elle n'avait qu'à nous présenter une demande et que nous lui fournirions alors l'interprétation nécessaire. Nous avons conclu avec elle une entente par écrit. Mais la Légion n'a pas de cas à présenter, elle n'a personne qui réponde à cette description. Nous lui avons fait savoir qu'il n'était pas question de nous pencher sur un cas hypothétique, alors que des milliers d'anciens combattants âgés de 70 et 80 ans attendent une décision de ce même tribunal. On ne peut justifier d'immobiliser le tribunal à cause de situations hypothétiques simplement parce que des avocats ou d'autres représentants estiment qu'il serait bien que le tribunal se prononce sur quelque chose qui ne servira à personne. C'est là que nous avons fixé les limites. Lorsque la Légion aura un cas véritable à nous soumettre, nous rendrons une décision véritable.

Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, nous donnons une interprétation dans tout cas difficile faisant intervenir une question médicale complexe ou l'interprétation de faits médicaux d'un point de vue juridique. Nous vous disons comment le tribunal va analyser la question et nous vous expliquons comment la loi s'applique à ces faits particuliers. Par conséquent, il est curieux de dire que nous prétendons ne pas avoir besoin de rendre des décisions d'interprétation.

Je pense à un cas qui remonte aux environs de 1985-1986 et qui portait sur la définition d'enfant n'ayant pas de liens de parenté ou légaux aux fins de certains avantages. On a demandé au tribunal de donner une interprétation de cette définition et nous avons fait savoir qu'il était beaucoup plus sensé de le faire dans le cadre d'une décision réelle, ce qui nous permet de recourir à nos règles juridiques normales pour déterminer si cette personne est ou non un enfant n'ayant pas de liens de parenté ou légaux. Si nous avions accepté de le faire, nous aurions pu être tenus de respecter cette décision dans tous les cas futurs.

C'est toujours l'approche que nous avons privilégiée. Il n'est pas très sensé de faire ce travail dans l'abstraction, parce que les faits caractérisant les cas réels ne correspondront pas. C'est là notre préoccupation. J'espère avoir répondu à votre question.

Le président: Nous avons encore quelques minutes et je crois qu'il reste quelques diapositives, monsieur Chambers.

M. Chambers: Oui. Pour bon nombre d'entre vous, c'est la première fois que nous nous rencontrons. J'aimerais passer en revue les données statistiques sur la réforme des pensions, parce que je crois que cela vous donne une très bonne indication du chemin que nous avons parcouru.

Avant la promulgation de la loi en 1995, il fallait compter plus de quatre ans pour qu'une demande passe par toutes les étapes du processus d'appel et qu'une décision soit rendue. La Légion et les groupes d'anciens combattants jugeaient ce délai tout à fait inacceptable. C'est pourquoi la loi a été adoptée. À ce moment-là, à l'étape de la révision, une décision était rendue dans les 12 mois suivant la demande. Pour un appel, il fallait compter environ 10 mois. Pour résumer le tout, dans les 18 mois qui ont suivi le moment où nous avons pris les choses en main, nous avons ramené la période de 12 mois à 3,7 mois et celle de 10 mois à environ 3,8 mois.

À l'époque, les avocats nous ont dit de ne pas presser davantage le citron parce qu'ils avaient besoin de cette période de temps pour bien préparer leurs cas. Nous avons établi le principe que lorsqu'ils faisaient une demande d'audience, ils nous disaient en fait qu'ils étaient prêts à procéder. En d'autres mots, ils ne pouvaient pas présenter une demande et préparer le cas plus tard. Nous aurions pu réduire encore davantage la durée du processus, mais on nous a demandé de maintenir une période de 3,6 à 4 mois, sous prétexte qu'un délai plus court compromettrait la capacité des avocats à bien représenter leurs clients. Je suis d'accord sur ce point.

En somme, nous pourrions probablement ramener cette période à deux mois, mais cela pourrait nuire à la cause du client et aller à l'encontre du but recherché.

Le président: Qu'arrive-t-il lorsqu'un avocat demande un ajournement pour cause de maladie, en raison d'un conflit ou pour tout autre motif? Les dossiers concernés sont-ils relégués au bas de la liste d'attente?

M. Chambers: Nous examinons les raisons au cas par cas. Nous hésitons à retarder ou à ajourner les audiences.

Mme Sharkey: En fait, nous savons, lorsque nous fixons la date de l'audience, que l'avocat est prêt. Il n'y a de problème de ce type à l'audience que dans un-demi pour cent des cas — ce qui représente 20 ou 30 dossiers par année.

Le président: C'est mieux que devant les autres tribunaux, je pense.

M. Chambers: Je crois que depuis cinq ans et demi, nous avons traité 57 000 cas, ce qui est vraiment beaucoup. L'équilibre consiste toujours à examiner le plus de dossiers possible sans jamais sacrifier la qualité ni la cohérence et l'équité.

Le président: Une question me brûle les lèvres. Quelqu'un s'est-il déjà plaint de la rapidité des procédures?

M. Chambers: Nous avons effectué un sondage auprès de la clientèle. Les personnes pour lesquelles nous émettons une décision favorable pensent évidemment que nous allons à la bonne vitesse. Il n'en demeure pas moins que certains clients se sont plaints de la rapidité avec laquelle nous avons traité leur demande.

C'est quelque chose que nous surveillons de près. Nous invitons des anciens combattants à prendre part à des groupes de consultation. Nous abordons avec eux différentes questions. À une occasion, les participants ont indiqué — et cela ne m'avait encore jamais effleuré l'esprit — qu'ils trouvaient les caractères trop petits et qu'ils n'arrivaient pas à lire les documents, même avec des lunettes. Nous leur avons dit que cela retarderait un peu le processus décisionnel et ils ont répondu que cela n'avait pas d'importance. Nous avons donc utilisé de plus gros caractères pour satisfaire à leurs exigences, en raison de leur âge et de leur état.

Nous essayons d'être sensibles à ces détails durant le processus. Nous n'aurions jamais su cela si nous n'avions pas organisé un groupe de consultation réunissant des anciens combattants.

Notre sondage sur la satisfaction de la clientèle fait partie du Projet d'amélioration des rapports au Parlement. C'est un document qui vous sera remis et qui sera aussi déposé devant les comités permanents du Parlement. Environ 99 p. 100 des clients étaient satisfaits lorsque le jugement rendu leur était favorable.

Toutefois, fait intéressant, parmi les clients qui avaient reçu un jugement défavorable ou partiellement favorable, 81 p. 100 ont déclaré que nous avions fait un excellent travail, que nous nous étions montrés justes et que nous avions fait preuve de professionnalisme. Parmi ceux qui n'avaient pas obtenu gain de cause, 55 p. 100 ont répondu que nous avions fait du très bon travail à plus d'un titre.

Nous sommes le premier tribunal fédéral à avoir effectué un sondage sur la satisfaction de la clientèle; d'autres tribunaux nous ont demandé comment nous nous y étions pris. Autant que je sache, nous sommes vraiment très en avance sur n'importe quel autre tribunal fédéral en matière de satisfaction de la clientèle. Je ne prétendrais pas que le fait qu'ils nous connaissent soit d'une très grande utilité. Nous avons beaucoup plus de contacts avec nos clients que les autres tribunaux, mais cela peut avoir du bon et du mauvais.

Les gens s'intéressent toujours au pourcentage de décisions favorables que nous rendons; permettez-moi de vous le donner, à titre d'information. Pour les forces actives, au stade de la révision, voici les taux actuels: 42,3 p. 100 des clients ont obtenu un jugement favorable; 20,6 p. 100 ont interjeté appel; pour les Forces canadiennes, ce pourcentage est de 45,6 et de 24,2 p. 100 respectivement; pour la GRC, il s'établit à 48,1 et à 23 p. 100. Globalement, dans 44 p. 100 des cas, les jugements ont été favorables au premier niveau d'arbitrage, et 22 p. 100 en appel, quand les chances de gagner diminuent.

Le président: Vous avez fait preuve d'une très grande patience et vous avez éclairé notre lanterne. Messieurs, avez- vous des questions?

Le sénateur Day: Au stade de la révision, revoyez-vous la demande d'un client mécontent de la décision rendue?

M. Chambers: Le ministre a rejeté cette possibilité.

Le sénateur Day: Peut-être qu'il l'a rejetée ou que le taux d'invalidité n'était pas aussi élevé que le client le souhaitait.

M. Chambers: Oui, exactement.

Le sénateur Day: On est admissible ou on ne l'est pas, mais on ne peut pas obtenir tout ce qu'on veut, n'est-ce pas?

M. Chambers: Il se peut même que le tribunal rende un jugement favorable, mais que le client considère qu'il mérite plus. Les motifs de révision sont très variés.

Le sénateur Day: Est-ce la même chose en appel?

M. Chambers: La même chose.

Le sénateur Day: Je peux comprendre pourquoi les statistiques continuent de diminuer, mais 45 ou 42,5 p. 100, cela me semble très élevé. Le tribunal rend des décisions favorables toutes les fois que c'est possible. D'après la dame qui nous a expliqué tout le processus d'évaluation, nous voyons que la charge de la preuve incombe au demandeur, en fin de compte. En outre, vous revoyez 44 p. 100 des demandes rejetées.

M. Chambers: Il arrive parfois que les clients qui présentent une première demande n'aient pas toutes les pièces justificatives en main; il leur manque des preuves médicales ou des renseignements d'ordre militaire. Il se peut également qu'ils aient omis d'inclure d'autres dépositions.

Il convient aussi de souligner que c'est la première fois que le client comparaît devant notre tribunal pour nous raconter son histoire. Nous lui posons des questions. Celles-ci ne visent pas à le mettre dans l'embarras; nous ne cherchons pas la confrontation. Toutefois, nous pouvons extraire beaucoup d'informations qui n'apparaissent pas dans la preuve ou dans les témoignages, et c'est ce processus d'extraction de l'information qui conduit souvent à un jugement favorable. Il y a des informations dont le client n'avait même pas conscience qu'elles étaient véritablement importantes et que personne n'avait recueillies auparavant. On stimule un peu le client en lui demandant s'il a vu un médecin en 1950, s'il y avait une pharmacie dans la ville, quels médicaments il devait prendre, et ainsi de suite.

Nous essayons de ramener certains éléments à la surface, lesquels peuvent être d'une importance capitale et, dans de nombreux cas, influencer favorablement la décision finale. Apparaître en personne présente deux avantages. Premièrement, aux yeux des clients, nous représentons le gouvernement. Pour la première fois, ils ont quelqu'un en face d'eux. Deuxièmement, ils ont la possibilité de raconter leur histoire.

Le sénateur Day: N'ont-ils pas déjà raconté leur histoire à la personne qui s'est occupée de compiler les informations au départ, dans le bureau local? Cette statistique nous dit-elle ce qui se passe dans les bureaux locaux?

M. Chambers: C'est la conclusion que vous tirez. Je serais injuste si je disais la même chose. Je pense que c'est seulement dans la nature du processus. Nos arbitres sont plus expérimentés que les gens du ministère. L'interrogatoire qu'ils mènent peut être plus approfondi, dans la recherche de la preuve, que ne le serait celui d'un agent des pensions de premier niveau. Je pense que c'est la raison pour laquelle nous obtenons davantage d'informations tout au long du processus.

Le sénateur Day: J'aimerais poser deux autres questions, si vous permettez, monsieur le président. Faites-vous une ventilation quelconque ou effectuez-vous un suivi des révisions et des appels ou tout simplement des refus et des contestations concernant la couverture et l'évaluation? Y a-t-il des personnes qui n'obtiennent pas ce qu'elles veulent?

M. Chambers: Toutes les informations sont regroupées et conservées dans un dossier. C'est Dale qui se charge de cela.

Le sénateur Day: Quels cas voyez-vous le plus souvent? Y a-t-il une tendance dominante?

M. Chambers: À peu près 50 p. 100 des causes qui sont portées en appel le sont pour des problèmes d'évaluation et 50 p. 100 pour des raisons d'admissibilité.

Le sénateur Day: C'est donc moitié-moitié?

M. Chambers: Il y a huit ou neuf ans, entre 65 et 70 p. 100 des cas concernaient des questions d'admissibilité. Toutefois, on observe que plus il y a de gens admissibles, plus il y a de préoccupations au sujet de l'évaluation. Un processus a été mis en place au début des années 80. Disons que dans huit cas sur dix le problème était lié à l'admissibilité. Au cours des 15 dernières années, ce ratio est passé de 80/20 à 50/50, et plus les clients vieillissent, plus ils s'inquiètent de l'évaluation de leur état, parce qu'ils sont déjà admissibles. C'est ce qui explique ces résultats.

Le sénateur Day: Mon autre question concerne la représentation indépendante — pas par un avocat du gouvernement sur le terrain, mais par un avocat de la Légion ou un avocat indépendant. J'imagine que cela représente un très petit pourcentage.

M. Chambers: Oui, un pourcentage insignifiant. Le Bureau nous dit qu'il traite environ 98 p. 100 des cas. La Légion doit prendre en charge le reste, et nous voyons quatre avocats privés dans toute une année. C'est très coûteux par rapport aux avantages que nous allons en retirer.

Le sénateur Day: Cela explique peut-être la surprise de notre président face au peu de demandes d'ajournement des audiences; c'est parce que ce sont des avocats en pratique privée.

M. Chambers: Pourriez-vous m'accorder quelques secondes de plus?

Le président: Certainement. Permettez-moi tout d'abord de vous remercier, vous et vos deux collègues, de votre aide si précieuse. Merci également d'avoir été parmi nous aujourd'hui.

M. Chambers: Nous ne vous avons pas donné ceci en début de séance de crainte que ce ne soit perçu comme une tentative de subornation. Deux de nos employés ont travaillé à ce projet et l'un d'eux s'est vu décerner le Prix d'excellence de la Fonction publique — un sur 12 au Canada. Nous en sommes très fiers. Durant l'Année internationale de la femme, ils ont produit un livre intitulé My Grandmother's Wartime Diary, qui est une compilation d'histoires de leurs propres mères ou de mères de parents, et des expériences qu'elles ont vécues pendant la guerre. J'ai apporté un exemplaire pour chacun de vous. Nous ne possédons pas de librairie. La rédactrice se trouve un étage plus haut et si vous voulez qu'elle vous dédicace le livre, je peux arranger quelque chose pour cet après-midi.

Le président: Je vous remercie beaucoup. C'est très aimable à vous. Y a-t-il quelque chose que vous vouliez ajouter pour conclure?

M. Chambers: Non, j'ai beaucoup apprécié être parmi vous ici aujourd'hui. Je trouve que c'est toujours une expérience très salutaire. Plus vous en savez sur notre compte, meilleur c'est pour nous.

La séance est levée.


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