Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 8 - Témoignages pour la séance de l'après-midi
WINNIPEG, le lundi 17 mars 2003
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 13 h 45 pour faire une étude sur les problèmes touchant les jeunes Autochtones urbains au Canada et en particulier sur l'accessibilité, l'éventail et la prestation des services, les problèmes liés aux politiques et aux compétences, l'emploi et l'éducation, l'accès aux débouchés économiques, la participation et l'autonomisation des jeunes, et d'autres questions connexes.
Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Mesdames et messieurs, nous tenons depuis 18 mois des audiences sur les problèmes touchant les jeunes Autochtones urbains. Ces jeunes gens sont confrontés à des problèmes très particuliers qui exigent des solutions d'un caractère très spécial. Notre objectif est d'élaborer un plan d'action pour le changement et d'autonomiser les jeunes qui vivent dans les collectivités afin de les aider à affronter les problèmes très graves qui les touchent en cette nouvelle ère.
Nos premiers témoins sont Mme Marileen McCormick et Mme Leslie Spillett. Allez-y, je vous prie.
Mme Marileen McCormick, présidente, Centre for Aboriginal Human Resources Development: Je vous remercie de m'avoir invitée à me présenter devant le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones afin de discuter des problèmes touchant les jeunes Autochtones urbains. Je suis directrice générale du Centre for Aboriginal Human Resources Development (CAHRD), qui est le principal et le plus vieil organisme de placement autochtone de Winnipeg.
Pour aider à cerner les problèmes à l'étude aujourd'hui, je voudrais donner un bref aperçu statistique de la situation de la collectivité autochtone urbaine. D'après le recensement de 2001, c'est Winnipeg qui abrite la plus importante population autochtone urbaine au Canada, soit 55 000 Autochtones dont environ 55 p. 100 sont des jeunes de 24 ans ou moins. L'âge médian des Manitobains est de 38 ans mais il est de 23 ans en ce qui concerne les Autochtones urbains. Le recensement de 1996 avait révélé que 51 p. 100 des Autochtones âgés de 18 à 25 ans avaient un niveau d'instruction inférieur à la 12e année. Les résultats de 1 364 tests concernant l'éducation de base des adultes effectués à notre Aboriginal Community Campus ont révélé que 81 p. 100 avaient un niveau de scolarité inférieur à la 8e année en mathématiques et que 66 p. 100 avaient un niveau inférieur à la 8e année en anglais.
Je voudrais faire une brève description de notre organisation afin de démontrer notre capacité, notre engagement et notre expérience en matière de développement des ressources humaines au sein de la collectivité autochtone urbaine. Le CAHRD est un modèle de pratiques exemplaires.
Le Centre for Aboriginal Human Resources Development est un organisme de bienfaisance à but non lucratif reconnu, qui a plus de 27 années d'expérience dans la fourniture de services de placement, de services d'orientation, de services de formation et de programmes éducatifs. Notre centre est dirigé par un conseil d'administration autochtone et compte plus de 60 employés autochtones très dévoués. Le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial nous octroient des fonds. Le CAHRD comprend cinq directions.
La première, celle des services centraux, dispense des services d'orientation professionnelle et d'aiguillage en matière d'éducation, de formation et d'emploi. En 2002, nous avons fait plus de 1 100 placements, dont 18 p. 100 concernaient des jeunes âgés de moins de 24 ans et 33 p. 100 des jeunes âgés de moins de 29 ans.
Dans le cadre de notre programme de solutions de dotation, nous avons des contacts personnels avec nos clients et nous plaçons des jeunes diplômés de niveau secondaire, de niveau postsecondaire ou d'écoles professionnelles privées grâce à une collaboration étroite avec eux et avec les employeurs. En 2002, nous avons fait 667 placements, dont 17 p. 100 concernaient des jeunes âgés de moins de 24 ans et 40 p. 100 des jeunes âgés de 29 ans maximum.
Notre troisième direction, celle du programme d'éducation, couvre un large éventail de programmes, depuis des programmes d'alphabétisation jusqu'à des programmes d'études postsecondaires mis en place avec la collaboration des collèges communautaires et universités, en passant par des programmes permettant d'obtenir un diplôme de niveau secondaire, accrédités par la province. Au cours des trois années qui se sont écoulées depuis la mise en place de ce programme, plus de 150 Autochtones ont pu ainsi obtenir un diplôme de 12e année. C'est un programme d'éducation pour adultes.
Notre quatrième direction concerne des programmes de formation dans le cadre desquels nous travaillons en étroite collaboration avec des employeurs coopératifs. Nous concevons et dispensons une formation d'amélioration des compétences débouchant sur un emploi. Nous avons fait 424 placements dans le cadre de ce programme en 2002.
La cinquième direction de notre organisation est le service mandataire de l'entente de développement des ressources humaines autochtones (EDRHA). Nous sommes un des organismes urbains mandataires de l'entente pour Winnipeg. Nous administrons dans la collectivité autochtone des programmes d'emploi et de formation représentant un investissement annuel d'environ 4 millions de dollars. Nous offrons des services à tous les Autochtones, y compris aux jeunes, mais nous n'avons pas d'affectation budgétaire spéciale pour les jeunes. À Winnipeg, les fonds pour les jeunes sont administrés par Développement des ressources humaines Canada.
Une question importante dans ce dernier contexte — et qui prend de plus en plus d'importance à l'approche de la date de renouvellement d'avril 2004 — est que les groupes autochtones nationaux font du lobbying pour prendre le contrôle d'organismes communautaires urbains comme le nôtre dans le cadre de leur plan d'autonomie gouvernementale. J'ai assisté à plusieurs séances de consultations concernant la reconduction de cette entente et la question a été abordée à chaque réunion.
On nous a demandé de donner des informations sur les pratiques exemplaires, les politiques et les programmes qui ont permis d'améliorer la vie des jeunes Autochtones urbains.
Bien que nous n'ayons pas de fonds qui soient affectés spécifiquement aux programmes pour les jeunes, nous les aidons dans le cadre des activités de notre agence d'emploi et de nos programmes de formation.
Je voudrais mentionner deux pratiques exemplaires en matière de programmes: le programme de technicien en loisirs et un programme de jeunes gardiens, mis en oeuvre l'un et l'autre avec la collaboration de la municipalité de Winnipeg. Ces deux programmes ont été opérationnels de 1999 à 2001 et ils revêtaient un caractère un peu spécial parce qu'ils s'adressaient à des jeunes encore à l'école et ne s'inscrivaient pas dans notre mandat.
Le programme de technicien en loisirs est axé sur la formation de jeunes Autochtones à risque fréquentant des établissements de niveau secondaire afin d'en faire des travailleurs rémunérés auprès des jeunes, pour les centres-villes. On a demandé à ces jeunes Autochtones de s'engager à consacrer au maximum 14 heures par semaine au programme pendant la durée de l'année scolaire. Les sept premières heures de travail étaient bénévoles et les sept heures suivantes étaient rémunérées à raison de 7 $ de l'heure. Ces jeunes recevaient une formation accréditée et suivaient des ateliers dans un large éventail de domaines. La formation était principalement axée sur les compétences personnelles et l'aptitude au commandement. Elle était conçue de façon à débuter en même temps que l'année scolaire pour que le jeune soit prêt pour un emploi d'été. Le programme prônait en outre le principe de «l'École avant tout». Une de nos principales règles est que si les participants abandonnaient leurs études, ils devraient également abandonner le programme. Nous avions des contacts réguliers avec les écoles pour vérifier et pour aider non seulement les enseignants, mais aussi les parents, à encourager les jeunes à ne pas abandonner leurs études.
Le deuxième modèle de pratiques exemplaires en matière de programmes est le Youth Guard Program (programme de jeunes gardiens). Il consistait à donner à des jeunes de niveau secondaire à risque une formation leur permettant de devenir des sauveteurs ayant toutes les compétences requises. Ce programme présentait une différence importante: le jeune devait s'engager pour une période de trois ans. Nous sommes particulièrement fiers de ces jeunes parce que la plupart d'entre eux n'ont pas abandonné et se sont appliqués à devenir eux-mêmes des modèles pour d'autres jeunes Autochtones.
Leur formation terminée, les participants étaient jumelés avec une personne de soutien consciencieuse — un autre jeune — qui les aide à faire la transition vers le marché de l'emploi et le maintien en poste. Les jeunes que nous aidons n'ont généralement pas autant d'appui ni autant de contacts avec le milieu du travail que les autres jeunes.
Le taux de réussite dans le cadre de ces programmes a été de 73 p. 100: 62 des 84 jeunes participants qui ont suivi la formation jusqu'à la fin ont obtenu rapidement leur premier emploi rémunéré. Un suivi effectué en novembre 2002 — portant donc sur une période de cinq ans — a révélé que 28 des jeunes avaient terminé leurs études secondaires et que 16 avaient entrepris des études universitaires, que 19 étaient toujours à l'école et que neuf avaient «décroché». Nous n'avons pas pu établir de contact avec six d'entre eux. Sur les 62 participants initiaux, 44 jeunes avaient encore un emploi d'été et 34 avaient un emploi à plein temps ou à temps partiel. Environ 56 p. 100 des 84 jeunes qui s'étaient inscrits ont participé au programme jusqu'à la fin. Je pense que c'est un très bon résultat pour ce programme.
Bien que notre objectif initial soit un emploi d'été pour les jeunes, le principal avantage de ce programme est que ces jeunes n'aient pas abandonné leurs études. Je tiens à signaler que ce programme n'est plus financé.
Les conclusions que nous avons tirées de ce projet et de divers autres projets concernant les jeunes que nous avons parrainés sont que les jeunes souhaitent participer à un programme humain, significatif et structuré et qu'ils veulent acquérir de l'expérience. Ils veulent qu'on leur donne des conseils et qu'on les guide pour leur permettre de connaître le milieu du travail et de savoir ce qu'il faut faire pour réussir dans ce milieu. Un autre aspect important est que tous nos programmes sont élaborés et gérés par des Autochtones, ce qui permet de développer les capacités dans notre collectivité et de mettre les jeunes en contact avec des Autochtones qui ont un emploi. Ces programmes permettent donc aux jeunes d'avoir de l'amour-propre, de la motivation et des aspirations.
Quelques autres programmes qui ont été couronnés de succès sont le programme du permis de conduire, le cybercentre pour jeunes Autochtones, les Urban Green Teams, Service Jeunesse Canada et Youth in Community.
On nous a en outre demandé de déterminer les principaux problèmes touchant actuellement les jeunes Autochtones urbains. Un fait fondamental est qu'un pourcentage très élevé des Autochtones — en particulier des jeunes — que nous aidons en matière d'éducation, de formation et d'emploi survivent grâce à un soutien du revenu et ce, depuis plusieurs générations. Ils n'ont pas adopté la culture de la majorité; ils n'adhèrent pas à une culture autochtone mais à une culture axée sur la possession, avec toutes ses conséquences débilitantes, notamment un manque de formation et une absence d'éthique professionnelle.
Pour pouvoir bénéficier de ces programmes, les intéressés doivent participer activement. D'après les statistiques de la Division scolaire no 1 de Winnipeg, le taux d'inactivité dans les trois écoles secondaires comptant le plus grand nombre d'élèves autochtones, à savoir Argyle, Children of the Earth et R.B. Russell, est constamment supérieur à 30 p. 100. Le faible taux de participation pose aussi un problème dans le cadre de nos programmes. La plupart des jeunes participants veulent améliorer leur vie mais ils n'ont généralement pas le degré d'autodiscipline nécessaire ou ont d'autres problèmes: ils sont chefs de famille monoparentale, n'ont pas un logement adéquat ou n'ont pas de quoi se payer l'autobus. On rencontre quotidiennement des jeunes qui ont abandonné l'école secondaire et qui ont fait pas moins de cinq tentatives infructueuses de participation à des programmes de formation. Il est nécessaire de briser ce cercle vicieux.
Le seul recours que l'on ait généralement pour lutter contre l'absentéisme passe par le soutien provincial du revenu. Comme fournisseurs de programmes destinés à des assistés sociaux, nous sommes obligés de signaler les absences. Le paiement des prestations d'aide sociale est suspendu, ce qui rend la vie des personnes concernées encore plus misérable et aggrave leurs problèmes.
Afin de tenter de régler ce problème, nous avons mis en place des incitatifs pour la participation régulière à nos programmes pour les jeunes et à ceux pour adultes. D'après les résultats obtenus jusqu'à présent, un supplément de 5 $ à 10 $ par jour par rapport aux prestations d'aide sociale augmente le taux de présence; ce supplément peut être accordé ou retenu selon les présences sans menacer les moyens de subsistance de base. C'est une formule intelligente étant donné que notre économie est fondée sur le principe d'un échange de services contre rémunération.
Ces personnes font un effort supplémentaire et ce, malgré de nombreux obstacles. Les personnes en formation n'ont généralement pas un logement décent — sans compter un coin de travail — et elles devraient être récompensées pour leurs efforts. En qualité de centre urbain de développement des ressources humaines autochtones, nous voudrions négocier avec les services à la famille et du maintien du revenu de la province pour être autorisés à verser à même les fonds prévus dans le cadre de l'entente un supplément qui s'ajouterait aux allocations sociales sans que celles-ci soient récupérées.
Je voudrais également faire des commentaires sur l'éducation et la formation. Alors que de nombreux problèmes touchent les jeunes Autochtones, nous pensons que le besoin est particulièrement criant dans ce domaine. L'éducation est la pierre angulaire d'une vie fructueuse et productive. Nous sommes conscients que l'éducation est une responsabilité provinciale, mais le gouvernement fédéral doit continuer de chercher des solutions originales pour aider les jeunes à terminer leurs études. Un bon point de départ consisterait à appuyer nos programmes scolaires et nos programmes d'été par l'intermédiaire de programmes tels que l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes Autochtones, de Patrimoine Canada.
La Stratégie nationale d'innovation, coadministrée par Développement des ressources humaines et Industrie Canada, compte financer un site Web national consacré à l'emploi et à la formation pour les Autochtones qui sont spécialisés et pour ceux qui ont déjà de l'instruction, surtout de niveau postsecondaire. C'est très bien, mais il est également nécessaire de trouver des ressources supplémentaires pour aider les Autochtones en matière d'éducation et de formation. D'après le recensement de 1996, 51 p. 100 de la population autochtone de Winnipeg n'avait pas atteint le niveau d'instruction de la 12e année. Notre organisme, le CAHRD, examine avec l'aide du secteur aérospatial et du secteur technologique, des programmes pilotes d'emploi rémunéré et de formation pour les jeunes afin de nous permettre de nous orienter vers des secteurs de croissance à long terme et des emplois bien rémunérés. Le modèle que nous utilisons est inspiré d'un programme mis en place à Detroit appelé «Focus Hope» en vertu duquel on dispense une formation aux défavorisés dans le cadre de partenariats entre des organismes à but non lucratif et le secteur privé.
Pour notre exposé, nous avons également été invités à mentionner les mesures qui permettraient d'établir des programmes efficaces et des pratiques exemplaires.
Plusieurs facteurs sont des éléments clés de l'efficacité d'un programme. Premièrement, une évaluation est essentielle. Il est nécessaire de savoir où les jeunes en sont afin d'instaurer un programme qui réponde à leurs besoins scolaires, sociaux et financiers pour éviter qu'ils courent d'avance à l'échec. Deuxièmement, d'après les résultats de l'évaluation, il est nécessaire de mettre en place des mesures de soutien souples. Troisièmement, les programmes doivent être élaborés et gérés par des Autochtones. Un trop grand nombre de programmes sont toujours contrôlés par des non-Autochtones qui ne connaissent pas notre collectivité et qui ne recrutent pas des Autochtones, surtout aux postes de direction. Quatrièmement, les programmes doivent être axés sur la collectivité afin d'encourager un sentiment d'appartenance et le sens des responsabilités chez les jeunes. Un cinquième facteur est la facilitation par des Autochtones bien informés et sensibilisés sur le plan culturel. Sixièmement, le programme doit être axé sur des attentes précises auxquelles les participants peuvent aspirer. Il est nécessaire de s'efforcer d'atteindre des objectifs pour ne pas se déprécier. Le programme doit comporter des objectifs à court terme, à moyen terme et à long terme. Enfin, ces programmes pour la jeunesse doivent être accrédités et répondre aux critères du secteur privé.
Ce sont là les principes que nous suivons dans les programmes de formation pour jeunes Autochtones qui sont efficaces et ils peuvent être appliqués à d'autres programmes.
On nous a demandé en outre d'identifier les lacunes ou les redondances dans les programmes. Au niveau des programmes, nous avons davantage de problèmes de lacunes que de redondances. Nous éprouvons de la difficulté à fournir un service global à notre collectivité. Nous sommes en concurrence non seulement entre nous, mais aussi avec la collectivité non autochtone et les organismes gouvernementaux qui fournissent des services aux jeunes Autochtones. Des organismes non autochtones, établis de longue date et souvent archaïques, continuent de contrôler la plupart des ressources et des programmes pour les Autochtones, y compris les jeunes. À Winnipeg, la moitié des organismes s'adressant aux Autochtones sont dirigés par des organisations non autochtones. Il s'agit généralement d'organisations bien établies ayant un financement assuré. La plupart des organismes autochtones sont financés sur une base annuelle.
On nous a demandé ensuite d'identifier les facteurs qui contribuent à l'élaboration d'initiatives réussies ou à créer des obstacles. Le premier commentaire que j'ai à faire à ce sujet est l'absence d'un système de financement à long terme souple en ce qui concerne les programmes pour les jeunes. La plupart des sources de financement des programmes s'appuient sur des critères très stricts.
Dans la collectivité autochtone, on n'a généralement pas les ressources nécessaires — financières et humaines — pour élaborer des projets permettant d'avoir accès aux fonds. Un cas récent est celui du projet pour les sans-abri. La communauté autochtone n'avait pas les ressources nécessaires et ne pouvait généralement pas démontrer la durabilité des projets avec des arguments assez convaincants pour avoir accès aux fonds. Par contre, les organismes non autochtones n'ont pas ce problème car ils sont généralement bien établis et utilisent les fonds destinés à la lutte contre l'itinérance pour améliorer leurs programmes et démontrer leur durabilité. L'initiative pour les sans-abri était financée en partie par des fonds destinés aux jeunes, mais sa mise en oeuvre a été confiée à des organismes non autochtones. La plupart des groupes autochtones n'étaient pas au courant de l'existence de ces fonds et n'y ont donc pas eu accès.
Les programmes de techniciens en loisirs et de jeunes gardiens ont été financés par le CAHRD, avec le concours de l'Entente sur le développement de Winnipeg. Il s'agit d'une entente tripartite entre la municipalité, la province et le gouvernement fédéral portant sur le réaménagement du centre-ville. Elle a fourni des fonds de fonctionnement pour ce programme pendant plusieurs années. À son échéance, nous n'avons pas trouvé d'autre partenaire pour le financement du programme. Le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial ont signalé qu'ils ne pouvaient plus fournir des fonds pour la formation des jeunes de niveau secondaire parce qu'elle ne débouchait que sur des emplois d'été. Ce projet répond aux critères de l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes Autochtones (CUPJA) de Patrimoine Canada. Un projet a été présenté et nous attendons la décision.
Un autre programme essentiel, mais qui ne répond pas à ces critères, est le cybercentre, un programme technologique communautaire pour les jeunes, mis en oeuvre par des jeunes. Ce programme aurait dû être financé dans le cadre de cette Initiative, mais ne l'a pas été parce qu'il a déjà reçu de l'aide financière pendant deux ans.
Les ressources pour les initiatives pour jeunes Autochtones devraient être assouplies de façon à permettre le financement de programmes pilotes ou de projets expérimentaux. Chaque programme devrait comprendre des critères qui exigent que les jeunes soient sensibilisés à la notion d'apprentissage à vie et soient prêts à terminer leur éducation secondaire et à acquérir des compétences professionnelles.
J'aborde maintenant le sujet de la participation des jeunes Autochtones à la conception et à l'exécution des programmes et des politiques. Les jeunes Autochtones devraient participer à la conception et à la mise en oeuvre des programmes; il faut toutefois reconnaître qu'ils ont des contacts restreints avec le domaine et que leurs compétences et leurs connaissances sont limitées. Des ressources sont nécessaires pour la formation et le mentorat des jeunes afin de leur permettre de devenir des participants actifs et bien informés au processus décisionnel et à l'exécution des programmes. Dans certains cas, des ressources considérables ont été mises à la disposition des jeunes en leur disant qu'ils étaient capables de réaliser les programmes par leurs propres moyens. N'ayant que leur confiance comme atout, ils ont foncé mais ont échoué. Un certain encadrement, au niveau de l'organisation et au niveau individuel, est nécessaire.
Dans le cadre d'un de nos programmes antérieurs, nous avons permis aux jeunes de prendre des décisions en matière de programmes, y compris en ce qui concerne la participation, pendant environ quatre mois, à un programme d'une durée de dix mois et sa réalisation. Nous avons constaté que le programme piétinait et que les jeunes n'étaient pas guidés. Ce n'est qu'après que les responsables du projet eurent décidé de jouer un rôle plus interactif et de les guider davantage que la situation a pu être redressée.
En ce qui concerne les options d'accroissement de la coordination intergouvernementale et des interventions dans le cadre des politiques officielles, nous n'avons pas été très actifs dans ce domaine. Nous pensons que les politiques doivent généralement être axées sur le développement économique des Autochtones urbains. La coordination entre les autorités civiles, les autorités provinciales et les autorités fédérales est actuellement très limitée. La coordination entre les divers gouvernements, à tous les paliers, et la collectivité autochtone urbaine est encore beaucoup plus restreinte.
Nous avons déjà fait des commentaires au sujet de questions liées à l'accès au financement et à la prestation des programmes et des services. Nous avons cependant quelques recommandations générales à faire. La première est qu'il est important de financer davantage les programmes d'alphabétisation destinés aux Autochtones. En outre, nous aimerions que les services du CAHRD soient élargis en vue de créer des programmes destinés spécifiquement aux jeunes. Les fonds destinés aux jeunes octroyés dans le cadre de l'Entente de développement des ressources humaines autochtones pourraient être utilisés à cette fin. Nous souhaiterions une coordination accrue entre les ministères fédéraux et provinciaux en ce qui concerne les programmes autochtones. Enfin, un financement permanent pour les ententes de développement urbaines est important, au même titre que des fonds pour l'accroissement des capacités.
Mme Leslie Spillett, présidente, Urban Aboriginal Education Coalition: Bonjour. Je vous souhaite la bienvenue sur le territoire des Innus, des Anishinabe, des Dénés, des Métis et des Dakota.
Je voudrais me présenter. Je suis la porte-parole du Mother of Red Nations Women's Council du Manitoba. Nous ne tenons pas compte du statut. Nous représentons des Premières nations, des Métis, des Inuits, quel que soit leur statut par rapport à la Loi sur les Indiens. Notre organisation regroupe environ 720 membres de diverses collectivités du Manitoba.
Je tiens à vous remercier pour cette occasion de participer à vos délibérations. J'ai fait distribuer un rapport intitulé «Aboriginal Education in Winnipeg Inner-City High Schools», paru en décembre. Je voudrais faire des commentaires sur quelques passages de ce rapport.
Il est important que les Canadiens et les Canadiennes d'un bout à l'autre du pays relèvent les défis très particuliers qui font l'objet des présentes audiences et examinent les solutions spéciales qui seront proposées. Je sais que l'on a publié de nombreux rapports et fait de nombreuses études et enquêtes sur les peuples autochtones du Canada. On mentionne souvent que le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, qui est un document très intéressant, est toujours autant d'actualité qu'il ne l'était à sa parution. Le rapport de l'Enquête sur l'administration de la justice en milieu autochtone est un autre document qui est aussi pertinent qu'à sa publication, il y a une dizaine d'années. Vous trouverez dans ces documents la clé de quelques situations déconcertantes en ce qui concerne les peuples autochtones canadiens.
Permettez-moi maintenant de faire quelques commentaires flatteurs à mon égard. Si j'ai bien compris, mon collègue, Dan Highway, n'a pas pu venir témoigner ce matin. Pendant cinq ans, j'ai été directrice générale de Anishinabe Oway- Ishi, un programme de formation préparatoire à l'emploi pour les jeunes de Winnipeg. C'est dans le cadre de ce programme qu'ont été créées les Aboriginal Youth Achievement Awards, qui sont toujours en place. Elles ont été créées il y a dix ans. Ce programme a modifié l'opinion que l'on a des Autochtones et plus particulièrement des jeunes Autochtones. Une foule de stéréotypes continuent d'avoir des conséquences néfastes pour notre collectivité. Comme tous les stéréotypes, ils sont fondés sur de l'information entièrement erronée. Par le biais de ces distinctions, nous avons d'abord honoré 14 jeunes pour leurs nombreux talents. Ils ont démontré qu'ils sont capables de se mesurer à n'importe quel autre Canadien, en dépit de problèmes comme ceux que Mme McCormick a mentionnés. Ces distinctions sont un beau modèle de pratique exemplaire. Winnipeg est devenue le berceau de nombreuses pratiques exemplaires.
Je vis dans cette collectivité depuis 1977. Je suis fière d'être active dans plusieurs organismes et j'ai participé à l'éducation de notre collectivité avec le concours de plusieurs de ses membres. Winnipeg est maintenant une collectivité très différente de ce qu'elle était en 1977. Lorsque j'ai déménagé ici, du nord du Manitoba, le nombre d'organismes autochtones était très réduit dans cette ville. La situation s'est considérablement améliorée depuis 1977.
Je sais pourtant que nous ne serions pas ici si nous n'avions pas des défis de taille à relever. Je voudrais faire quelques commentaires sur ces défis, surtout dans le domaine de l'éducation, à savoir de la maternelle jusqu'à la 12e année.
Vous avez probablement entendu beaucoup de chiffres ce matin et je ne les répéterai pas. Nous représentons le segment de la population canadienne dont la croissance est la plus rapide; elle est deux ou trois fois plus rapide que celle d'autres segments. Nous sommes jeunes. En outre, nous nous urbanisons de plus en plus. Si vous avez l'occasion de passer quelques jours à Winnipeg, c'est en vous rendant dans les collectivités mêmes, où sont les Autochtones, que vous pourrez recueillir les meilleures informations. Dans cette ville, on ne peut pas se promener dans une rue sans rencontrer un Autochtone ou sans avoir une conversation avec un Autochtone.
Nous avons conscience depuis des années que le système scolaire n'est généralement pas équipé pour répondre aux besoins des «apprenants» autochtones. Depuis nos premiers contacts avec la population blanche, de nombreux événements marquants ont eu lieu, surtout en ce qui concerne les pensionnats. Il y a ce que nous appelons le «scoop des années 60», période pendant laquelle de nombreux enfants des Premières nations et métis ont été enlevés à leur famille et envoyés dans d'autres collectivités pour être élevés dans des familles étrangères. Nous souffrons encore des conséquences de ces problèmes du passé. Ce sont ces événements qui ont compromis et considérablement déformé notre identité culturelle.
J'ai été élevée dans la même collectivité que la dame assise à côté de moi. Nous avons toutes deux des origines autochtones. Nous avons été élevées hors réserve; on nous considérait comme des Autochtones, mais nous faisions tout notre possible pour éviter cette association. Je pense qu'on réagit encore ainsi. Notre culture a été mise en grand péril par le contexte historique et je pense que c'est la source d'un grand nombre de nos problèmes, de ce que vous considérez comme des problèmes sociaux. Ces problèmes touchent également nos enfants, nos petites filles et nos jeunes garçons, qui sont victimes de la prostitution ou d'exploitation sexuelle. Il n'est pas nécessaire d'aller bien loin d'ici pour en trouver des preuves. Plus d'un millier de nos jeunes sont actuellement dans des centres pour jeunes. Les femmes autochtones représentent 90 p. 100 de la population carcérale féminine, malgré leur nombre relativement peu élevé. Je pourrais faire bien d'autres commentaires sur les problèmes sociaux. Je pense qu'ils sont surtout liés au fait que notre identité culturelle a été considérablement déformée et mise en péril.
Comme adulte ayant quelques années d'expérience, je sais que mes collègues qui ont été capables de transformer leur vie ont pu le faire après avoir retrouvé leur identité ainsi que la fierté et la dignité liées à leurs origines. Je suis convaincue que c'est la seule possibilité de réparer les dommages considérables qui ont été faits. J'en suis absolument convaincue parce que les preuves que j'ai, des preuves anecdotiques et des preuves que j'ai relevées au cours de mes recherches, me le démontrent. Nous ne bâtirons nos nations, nos collectivités et nos familles et ne réaliserons notre épanouissement personnel que lorsque nous accepterons notre identité, lorsque nous en tirerons un sentiment de fierté et lorsque nous connaîtrons nos racines historiques comme premier peuple de ce pays. C'est seulement alors que nous serons en mesure d'avancer à nouveau côte à côte.
J'ai assisté dernièrement à une conférence sur l'Arctique. Une des invitées a mentionné qu'elle avait assisté à une conférence sur le développement de la petite enfance en Colombie-Britannique et qu'elle y avait vu des études qui établissent un lien entre le recul du suicide chez les jeunes et le contrôle communautaire. C'est très encourageant. C'est le message que je voudrais communiquer aujourd'hui, si aucun autre message ne vient du plus profond de mon être. Il est nécessaire d'arrêter les dommages et de renverser la vapeur en transférant le contrôle.
J'insiste toujours sur le fait que les Autochtones n'ont jamais renoncé à leur droit ni à leur responsabilité de prendre soin eux-mêmes de leurs enfants et des membres de leur collectivité. Il est essentiel qu'on nous donne l'occasion de le faire. Nous le savons au plus profond de notre coeur. Je trouve extraordinaire que nous soyons en mesure de prouver l'étendue du contrôle que nous avons sur notre destin, que nous ayons des preuves d'un lien entre notre influence et la prévention du suicide chez les jeunes.
Je voudrais mentionner quelques solutions qui, d'après nous, sont porteuses de changement. Il est important que notre collectivité prenne dans une certaine mesure le contrôle de l'éducation des Autochtones dans la ville de Winnipeg. Nos collègues de la communauté francophone savaient que leur survie linguistique dépendait de leur capacité de dispenser l'éducation en langue française dans une perspective mondiale française et en se basant sur des valeurs françaises. Nos collègues de la communauté juive ont également eu l'occasion de dispenser une éducation juive à leurs enfants, de la maternelle à la 12e année.
Il est essentiel de donner également aux Autochtones la possibilité de se charger de l'éducation de leurs enfants, de la maternelle à la 12e année, pour pouvoir leur transmettre leur vision du monde, leurs valeurs et leurs traditions pendant leur période de scolarité. Nous ne voulons pas abaisser le niveau de l'éducation minimale pour nos enfants. Nous voulons être en mesure de dispenser une excellente éducation pour leur permettre de poursuivre des études postsecondaires. Les données démontrent que nos enfants ne s'en tirent pas très bien dans le système éducatif actuel.
Comment pourraient-ils réussir? Ce système est de souche européenne. Il a été créé par des descendants d'habitants d'Europe occidentale pour des descendants de même souche. Nos enfants ne se sentent pas concernés par ce type d'éducation.
J'ai deux enfants, dont l'un vient de terminer ses études secondaires et l'autre est en 9e année. Mes enfants ont encore eu des cours sur la découverte du continent. Ce discours est encore solidement ancré dans la pédagogie du système éducatif actuel.
Nous avons créé la Urban Aboriginal Education Coalition en février. Nous voulons nous baser sur cette recherche pour mobiliser notre collectivité. Je pense que l'appui que donne notre collectivité à la vision axée sur la création d'une division scolaire pour nos enfants est une pratique exemplaire. Notre vision ne s'arrête pas à la création d'une division scolaire autochtone; nous voulons influencer et faire progresser notre plan d'action par le biais de divers systèmes scolaires afin d'instaurer un système d'éducation antiraciste et multicentrique pour tous. Il est essentiel que les enfants connaissent l'histoire de leur pays. Il est essentiel qu'ils connaissent ceux et celles avec lesquels ils partagent ce pays. Si notre système éducatif ne fait pas un portrait fidèle de notre passé, il ne servira pas les intérêts de nos enfants.
Voici un chiffre effarant: au Manitoba, seulement 44 p. 100 des enfants d'âge scolaire vont à l'école. Parmi ceux qui fréquentent les cours, 65 p. 100 ne terminent pas leurs études secondaires. Il est donc essentiel de prendre des mesures énergiques pour améliorer le taux de réussite des Autochtones.
Il ne faut toutefois pas le faire sous la contrainte, comme dans le cas des pensionnats. Nous avons alors été intégrés de force à un système éducatif centré sur l'Europe. Le système éducatif doit être adapté à nos besoins. Un étudiant peut obtenir un diplôme en pédagogie à l'Université du Manitoba sans avoir la possibilité de suivre un cours facultatif en études autochtones. Par conséquent, il est possible pour un enseignant de donner le cours à une classe dont 90 ou 95 p. 100 des élèves sont d'origine autochtone en ignorant tout de leur culture, de leurs conceptions différentes du monde ou de leurs valeurs. Comment peut-on enseigner à nos enfants sans les connaître?
Il est à mon sens nécessaire de remédier à ces lacunes. Il faut que cela se fasse non seulement par le biais du système d'éducation de base, mais aussi par le biais du système d'enseignement postsecondaire.
La plupart des enseignants et des administrateurs des écoles à forte proportion d'élèves autochtones ne sont pas Autochtones eux-mêmes. Certains efforts ont été entrepris pour remédier à cette lacune et en ce moment même, quatre étudiants d'origine autochtone sont inscrits à la faculté de pédagogie. Ce n'est pas trop tôt pour veiller à ce que l'éducation soit adaptée davantage aux besoins des Autochtones.
Le rapport contient de nombreuses informations intéressantes. Il ne recommande pas spécifiquement la création d'une division scolaire autochtone. Je pense que les auteurs préconisent des changements progressifs qui sont réalisables, d'après eux. Je pense qu'ils savaient que, dans le centre-ville, où vit un pourcentage élevé de nos enfants, pas un seul conseiller scolaire n'est d'origine autochtone. Par conséquent, ils n'étaient pas très optimistes quant aux chances de pouvoir créer une division scolaire autochtone. Nous savons cependant que lorsque des conseillers scolaires d'origine autochtone seront en poste, la situation changera.
Au début des années 80, il y avait deux conseillers scolaires autochtones. Au cours de cette période, grâce à la présence de ces conseillers scolaires et à la mobilisation de la collectivité, une école secondaire autochtone que nous appelons «Children of the Earth» a été créée. Je pense que c'est un échantillon de pratiques exemplaires. Il y a aussi la Niji Mahkwa School, qui est une école élémentaire. Ces écoles sont théoriquement cogérées par la division scolaire et par la collectivité, ce qui permet à notre collectivité d'être représentée à la table où sont prises les décisions concernant les activités de ces écoles. Nous ne sommes toutefois pas en mesure de maintenir une participation égale à titre bénévole. La cogestion est actuellement inexistante. Ces écoles sont gérées par les conseillers scolaires.
Ce sont de bonnes écoles mais elles ne sont pas un remède universel. On ne peut pas envoyer tous les enfants autochtones dans ces établissements scolaires de taille modeste situées dans la ville de Winnipeg. Il est nécessaire de trouver d'autres remèdes et d'autres solutions à ce problème.
Il est essentiel de mettre en place une stratégie à long terme pour recruter des Autochtones et leur donner une formation d'enseignants. Nous pensons qu'il serait possible d'encourager l'adoption d'une telle stratégie de façon beaucoup plus active. En outre, il est absolument impératif que les enseignants soient préparés en conséquence. Nous ne pouvons pas admettre que les personnes chargées de notre instruction ignorent tout de notre peuple.
Il est nécessaire d'apporter des modifications au programme d'études de niveau secondaire. Ce programme doit être multicentrique et antiraciste — pas seulement à l'égard de nos enfants, mais à l'égard de tous les enfants. Un système éducatif qui honore et respecte les enfants issus de toutes les cultures sera profitable pour tous. Il sera profitable pour notre pays dont il renforcera les assises.
Enfin — et notre collectivité le réclame depuis de nombreuses années —, il est nécessaire d'établir un système éducatif autochtone qui permette à nos enfants d'acquérir des connaissances sur leurs origines, comme peuples fondateurs de ce pays, afin de pouvoir reconstruire nos nations et nos collectivités en fonction de notre identité.
Certaines personnes se sentent menacées par ce changement. Lorsque certains citoyens tentent de recouvrer leurs pouvoirs, d'autres se sentent invariablement menacés. Il est essentiel que nous reprenions le contrôle de notre éducation. Ce n'est pas un nouveau concept. Nous avions le contrôle dans le passé et nous devons le reprendre. Les études indiquent que nous pourrons avoir une profonde influence sur notre avenir si l'on permet à nos collectivités de reprendre le contrôle.
C'est tout ce que j'avais à dire. Meegwetch.
La présidente: Je vous remercie l'une et l'autre. Vos exposés étaient très intéressants et très instructifs.
Le sénateur St. Germain: Madame Spillett et madame McCormick, j'ai été élevé dans des circonstances semblables. Les conditions n'étaient probablement pas aussi dures que dans votre cas, mais je me souviens du premier jour où, à la Chambre des communes, je me suis levé pour faire des commentaires au sujet de Riel et j'ai mentionné que j'étais Métis. Le téléphone de ma mère a sonné sans arrêt. On croyait que j'étais devenu fou; on pensait que je ruinerais ma carrière politique en révélant mes origines.
J'ai été élevé dans une petite collectivité située à l'ouest de Winnipeg, le long de la rivière Assiniboine. Le racisme était présent. Est-ce que l'anecdote que je viens de raconter est liée au racisme? Cette audace aurait pu être fatale. Dans mon cas, je me suis contenté de décider de me battre mais, dans de nombreux cas, c'est le contraire. Est-ce que cette attitude combative est l'attitude dominante chez les jeunes qui fréquentent actuellement un établissement scolaire? Si le taux de fréquentation n'était que de 44 p. 100, c'est peut-être parce que ces enfants se font traiter de «sales Indiens» ou de «sales petits Métis». J'ai entendu moi-même ces sobriquets. On m'a signalé, lorsque j'étais à l'école secondaire, que je n'étais pas autorisé à sortir avec la fille de certaines personnes en raison de mes origines. Ce type de préjugés est-il toujours très répandu actuellement? Est-ce qu'on s'efforce de les faire disparaître?
Mme Spillett: Je vous remercie pour votre commentaire. J'aborde généralement la question du racisme quand je fais un exposé. Je ne pense pas l'avoir fait aujourd'hui. Le rapport en question sur les élèves autochtones des écoles de Winnipeg indique que dans les écoles du centre-ville, un tiers des enfants autochtones sont victimes de racisme flagrant. Voici quelques commentaires extraits du rapport:
Certaines personnes font des commentaires racistes comme «squaw» ou «sale Indien». Je n'avais plus l'envie d'aller à l'école. Ces commentaires me décourageaient et me faisaient avoir honte de mes origines.
Ils étaient racistes; je suis devenu rebelle et j'ai riposté. Je suis devenu un dur [...] les autres élèves dansaient en poussant des cris.
J'ai souvent été victime de racisme. On m'a toujours donné des sobriquets terribles. Cela me blessait profondément [...] ces propos m'humiliaient. Je me demandais ce qui n'allait pas chez moi.
J'étais très sensible [au racisme] [...] ça me terrorisait. J'avais hâte de sortir de cette école.
Les non-Autochtones nous appelaient les «brûleurs de chariots», les «peaux rouges» et «squaw». C'est alors que mes ennuis ont commencé, parce que je me battais avec ceux qui nous appelaient ainsi [...][ J'ai abandonné l'école. Je pensais que l'école ne changerait jamais et que les non-Autochtones auraient toujours raison.
Quand j'étais enfant, le racisme était très répandu dans les quartiers où j'ai été élevé, surtout à East Kildonan et à St. Vital. Les élèves nous harcelaient et nous insultaient.
Je pense que vous avez mis le doigt sur la plaie. Je pense que la plupart de nos enfants abandonnent l'école à cause de ce racisme flagrant. Nous sommes également conscients du racisme systémique. C'est une bonne observation.
Le sénateur St. Germain: Vous avez mentionné qu'il était nécessaire de prendre le contrôle du système éducatif. Il semblerait que les programmes soient très nombreux. Y a-t-il un sommet à la pyramide? C'est un sujet de préoccupation. Un très grand nombre d'organismes sont en place. Est-il possible qu'ils axent leurs efforts sur les besoins, étant donné leur nombre? Ils ont peut-être tous les mêmes objectifs, mais ils pourraient travailler à contre- courant, ce qui entraînerait de telles dépenses de fonds que ce serait inefficace.
Avez-vous le personnel nécessaire pour prendre le contrôle du système éducatif?
Je pense que c'est une bonne suggestion. Elle est pertinente. On ne l'avait encore jamais présentée sous cette forme. Encore faut-il disposer de la force motrice nécessaire. Si vous disposez de cette force motrice, que faudrait-il pour mettre cette suggestion à exécution? Nous sommes au palier fédéral et c'est une question qui relève vraisemblablement de la compétence des provinces, surtout en ce qui concerne les Autochtones hors réserve. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord n'intervient pas — Dieu merci — dans ce qui touche les Autochtones hors réserve. Avez-vous des commentaires à faire sur ces deux questions?
Mme Spillett: À propos de votre deuxième question, je signale que c'est un problème de contrôle et qu'il faut s'assurer que l'on a en place des personnes ayant un certain pouvoir. Au centre autochtone par exemple, il y a des Autochtones qui ont de l'assurance et les qualifications requises. Nous commencerions par accroître la capacité. Ce serait un point de départ; la situation pourrait être différente dans 10 ou 15 ans. Nous pensons toutefois que nous avons la capacité nécessaire pour amorcer le processus.
En ce qui concerne votre première question, nous savons que de nombreux programmes sont en place. Tout le monde a un programme. La plupart de ces programmes ne sont toutefois pas efficaces. C'est un fait qui a été mis en évidence dans le cadre de l'Enquête sur l'administration de la justice en milieu autochtone et à nouveau dans le cadre des audiences de la Commission royale sur les peuples autochtones. La plupart de ces programmes ont pour objectif de faire changer les Indiens, et de nous faire évoluer un peu.
Ces programmes sont issus d'une perspective eurocentrique; ils transforment notre oppression en pathologie. Je pense que c'est du néocolonialisme, lorsque d'autres ont le contrôle sur notre oppression.
On a mis en place des programmes à toutes les sauces; il y a un programme pour remédier à chaque indicateur qui démontre que nous sommes marginalisés. Ces programmes aident surtout des membres de la classe moyenne qui ont un emploi mais n'aident pas beaucoup à régler les problèmes systémiques et fondamentaux. Ils sont voués à l'échec parce qu'ils ne sont pas fondés sur l'identité.
La présidente: Le ministre des Affaires indiennes, M. Nault, a créé un groupe de travail national sur l'éducation. Ce groupe a notamment fait les deux recommandations suivantes: l'une concernant la création de commissions scolaires autochtones distinctes et l'autre portant sur le recrutement d'un plus grand nombre d'enseignants autochtones.
Mme Spillett: C'est en plein ça!
Le sénateur Tkachuk: J'ai deux questions à poser au sujet des valeurs, afin de mieux comprendre. Vous préconisez la création d'écoles autochtones. Compte tenu du fait que les réserves — d'après le sous-ministre — ont le contrôle de l'éducation des jeunes à l'intérieur des réserves, comment expliquez-vous que le pourcentage de diplômés soit plus élevé parmi les Métis et les Indiens inscrits hors réserve que lorsque le système éducatif est sous le contrôle des autochtones?
Mme Spillett: Plusieurs raisons expliquent cet écart. L'une est l'impact que les pensionnats ont eu sur les membres des Premières nations. En ce qui concerne les Métis, je pense que moins on est identifié comme Autochtone et plus on a de la facilité à participer. Je pense que c'est un des facteurs.
Le sénateur Tkachuk: Le pourcentage de diplômés est plus élevé chez les Métis et les Indiens inscrits hors réserve que chez ceux qui vivent dans les réserves.
Mme Spillett: Il est souvent impossible d'obtenir un diplôme dans les réserves à cause de l'absence d'écoles secondaires. Les enfants doivent quitter leur collectivité et aller dans les grandes villes pour obtenir le diplôme. Dans la plupart des collectivités des Premières nations, il n'est pas possible d'obtenir son diplôme.
Le sénateur Tkachuk: Je n'ai pas encore d'opinion bien précise au sujet de l'instauration d'un système éducatif fondé sur la race. On a toutefois mis en place des établissements scolaires catholiques ou des établissements scolaires fondés sur la religion.
Mme Spillett: Il y a également des établissements scolaires fondés sur la classe sociale. Les riches ont leurs écoles.
Le sénateur Tkachuk: Les pauvres ont leurs écoles également.
Quelles sont les valeurs communes qu'il faudrait enseigner, d'après vous? Quelles sont les valeurs qui ne sont pas enseignées dans les écoles courantes et qui le seraient dans des établissements autochtones?
Mme Spillett: Dans les établissements scolaires occidentaux, l'objectif principal est de permettre à l'individu de se réaliser pleinement, sans tenir compte des autres.
Le sénateur Tkachuk: Ce n'est toutefois pas ce que nous enseignons.
Mme Spillett: Je n'en suis pas sûre.
Je pense que l'approche aux valeurs est différente. Les Autochtones ont un sens aigu de la collectivité et pensent que le bien-être de l'individu est indissociable de celui de la collectivité. Ma fille, par exemple, a obtenu son diplôme dans une école secondaire de la ville. Les enfants qui avaient les meilleures notes ont été les plus applaudis à la remise des diplômes. Plus les notes étaient élevées et plus les applaudissements étaient nourris; une moyenne de 99,9 p. 100 a littéralement déclenché un tonnerre d'applaudissements.
L'autre valeur importante est fondée sur le vedettariat sportif. C'est tout ce qui attire les honneurs. Dans notre culture, les divers membres d'une collectivité apportent chacun leur pierre à l'édifice. Ils sont tous importants. Chacun a quelque chose à offrir, peu importe les résultats obtenus lors d'un test. Certaines différences culturelles créent des barrières. Par exemple, si l'enseignant pose une question, nos enfants n'auront pas tendance à lever la main et à attirer l'attention sur eux. Ils auront tendance à agir de façon conforme à leur bagage culturel et ce serait un comportement inusité de leur part d'attirer l'attention de la sorte. Nous n'avons pas tendance à vouloir surpasser tous nos compagnons de classe.
Nous avons un comportement différent. L'ignorance de nos comportements et de nos codes de conduite est la source de méprises. J'ai souvent entendu dire que l'attitude de ces enfants était due à une piètre estime de soi, par exemple. On pense que quand on n'a pas toujours la réponse et qu'on n'est pas toujours à la hauteur, c'est parce qu'on a une piètre estime de soi ou que l'on est timide. C'est absolument faux. En réalité, les enfants se comportent selon leur bagage culturel.
Le savoir et les habitudes des Autochtones reposent sur une certaine vision du monde qui nous convient. Nos grands-mères nous accompagnent en classe parce qu'elles nous communiquent leur savoir. Elles nous apprennent la langue, elles nous racontent des histoires et nous apprennent les chansons. Lorsque j'étais membre d'un «comité d'éducation des Autochtones urbains» qui devait être une ressource pour les conseillers scolaires, on n'acceptait pas que nous amenions nos grands-mères en classe parce que ces femmes n'avaient pas un baccalauréat en pédagogie.
Nous adoptons les valeurs de notre collectivité et son intelligence mais nous reconnaissons que cette intelligence ne doit pas nécessairement être cautionnée par un diplôme de niveau universitaire. Les différences sont nombreuses.
Le sénateur Pearson: C'était un exposé extrêmement intéressant. Madame McCormick, le commentaire que vous avez fait au sujet de l'autonomisation des jeunes et de leur participation à la conception des programmes m'a vivement intéressée. Vous avez mentionné qu'il n'était pas question de les laisser livrés à eux-mêmes sans encadrement et de les laisser échouer. C'est une opinion que j'approuve.
Quand nous avons établi notre mandat et examiné les possibilités d'autonomiser les jeunes, nous n'avons pas du tout envisagé celle-là. Ce n'était pas ce que nous cherchions. Nous cherchions des méthodes auxquelles ont pourrait faire appel pour permettre aux jeunes d'avoir un certain contrôle sur les décisions qui ont un impact sur leur milieu.
Qu'il s'agisse d'élaborer un programme avec le concours des jeunes ou de leur permettre d'y consacrer un certain nombre d'heures, je pense que personne ne trouvait que ce serait une idée particulièrement brillante d'en déléguer l'entière responsabilité aux jeunes. C'est une solution de paresse; on délègue l'entière responsabilité aux jeunes si bien qu'en cas d'échec, on les considère comme entièrement responsables de cet échec.
Mme McCormick: Oui.
Le sénateur Pearson: Nous aimerions que vous mentionniez des possibilités de créer ce type de partenariat avec des jeunes et de les autonomiser. Pourriez-vous citer deux ou trois exemples?
Mme McCormick: Oui. Il pourrait s'agir des programmes que j'ai mentionnés. Lorsque nous collaborons avec nos jeunes, nous nous efforçons toujours de les aider à développer leurs compétences en leadership. C'est toujours l'influence culturelle qui domine. Dans nos collectivités, nous avons fait notre apprentissage grâce aux autres membres de la collectivité: nos Aînés, nos parents, nos frères et nos soeurs. Lorsque nous travaillons avec des jeunes, nous nous efforçons toujours de les faire participer au programme à un niveau qui leur permette d'apprendre.
Nous nous efforçons de faire intervenir des mentors dans le contexte de nos programmes. À nos débuts, les programmes étaient généralement administrés par des adultes. À l'heure actuelle, dans la plupart de nos programmes pour les jeunes, plusieurs jeunes un peu plus âgés que les autres jouent un rôle de mentors. Ils ont un peu de marge de manoeuvre pour prendre des décisions, mais nous les aidons et nous les guidons pour éviter qu'ils se trouvent dans une impasse. C'est un système très dynamique. C'est une question de bon sens. Tous les ingrédients de la réussite des programmes pour les jeunes que nous avons mentionnés s'y trouvent. Les principes qui nous guident sont importants dans le cadre de tous les programmes.
La présidente: C'est très intéressant. Vygotsky est un psychologue russe qui m'a impressionnée. Il a mentionné la «zone of next development». On ne met jamais un jeune — et c'est valable pour les parents également — dans une situation qui est au-delà de ses capacités. On leur confie une tâche juste assez complexe pour qu'ils se dépassent.
Il faut observer les jeunes et apprendre à les connaître; il faut les suivre de près et passer à la prochaine étape. Je pense que c'est ainsi qu'il faut procéder dans la formation aux fonctions de leadership. Nous avons très bien compris votre message.
Le sénateur Léger: Je vois qu'il y a de l'espoir dans le système éducatif. Je suis originaire du Nouveau-Brunswick. Deux systèmes sont en place dans notre province: nous avons un ministre de l'Éducation et les anglophones ont le leur. Les deux systèmes se rejoignent au sommet. Nous avons finalement les mêmes objectifs.
Vous voulez avoir votre propre système. C'est possible. Vous avez une certaine capacité, d'après ce que vous avez mentionné, et vous la renforcez. C'est possible avec tous ces jeunes. C'est ce qu'on fait chez nous.
J'apprécie que vous signaliez que vous avez des comportements et des codes de conduite différents. Ce que vous espérez, et ce que j'espère également, c'est que tous les enfants de toutes les cultures en tirent des avantages; c'est l'essence même du multiculturalisme.
Il est possible que vous ayez un système bien à vous, et je vous le souhaite.
Le sénateur Sibbeston: Madame la présidente, je suis conscient que je fais toujours référence aux Territoires du Nord-Ouest. Je crois sincèrement que des progrès considérables ont été faits dans les Territoires du Nord-Ouest où les Autochtones représentent un pourcentage plus élevé de la population.
Je n'ai pas pu m'empêcher de penser au début des années 70, lorsque j'ai fait mes débuts en politique. Le gouvernement insistait alors beaucoup sur un certain niveau de scolarité pour la plupart des postes de fonctionnaire dans le Nord. Nous avons contesté ces exigences en invoquant le bon sens et en mentionnant que l'on pourrait se contenter d'un niveau d'instruction adéquat pour remplir les fonctions.
Cette opposition a finalement entraîné la création de programmes d'éducation spécifiques au Nord: un programme de formation d'enseignants et un programme de formation d'infirmières axés sur les Autochtones et la société du Nord ont été mis en place. On a mis en place également un programme de formation de travailleurs sociaux et on a créé le Collège arctique dont les activités sont principalement axées sur la formation professionnelle. J'ai remarqué que l'on a créé dernièrement une faculté de droit au Nunavut. On compte former des avocats qui n'auront peut-être pas le degré de raffinement de ceux de Winnipeg ou de Toronto, mais ils répondront aux besoins de notre société.
A-t-on mis en place des programmes analogues à Winnipeg ou au Manitoba? A-t-on mis en place des programmes qui permettront aux Autochtones de travailler dans leur milieu?
Nous déplorons l'absence de prêtres autochtones dans le Nord parce que les prêtres doivent être très érudits. Ils font notamment des études universitaires qui durent sept ans. Pourtant, on peut être un bon chrétien et un bon dirigeant chrétien sans avoir fait d'études universitaires. L'Église anglicane a créé un système spécial dans l'Arctique et a des ministres anglicans inuits dans toutes les collectivités parce qu'elle a adapté son approche pour former des chefs de file appelés à travailler dans leur collectivité. Ces ministres anglicans ne sont peut-être pas aussi raffinés ni aussi érudits que ceux de Paris ou de New York, mais ils ont certainement des connaissances suffisantes pour répondre aux besoins locaux. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Mme Spillett: Plusieurs programmes de formation de travailleurs sociaux et d'enseignants autochtones ont été mis en place. Ce sont les deux principaux secteurs de l'éducation où des mesures spéciales ont été prises en ce qui concerne les Autochtones.
Je suis allée dernièrement en Saskatchewan. J'ai trouvé qu'en ce qui concerne l'enseignement postsecondaire, la Saskatchewan a une trentaine d'années d'avance sur le Manitoba. On s'accorde à dire que c'est capital dans le secteur du travail social. La Saskatchewan Federation of Indian Nations a toutefois mis sur pied, avec le concours de l'Université de Regina, un collège et une série de cours très intéressants.
En fait, les personnes qui font partie du campus régulier de Regina doivent s'adresser au Saskatchewan Federated College pour recevoir une formation en études autochtones. Par ailleurs, le Gabriel Dumont College offre également des programmes d'enseignement dans le Nord, à Saskatoon et à Regina. C'est donc une réalisation très impressionnante.
Au Manitoba, on a mis sur pied ce que l'on appelle le Brandon University Northern Teacher Education Program (BUNTEP). Ce programme est administré par l'Université de Brandon. Il est principalement axé sur la formation d'enseignants pour le Nord, d'enseignants qui retourneront dans leur collectivité. C'est un excellent programme. C'est le type d'initiatives qui sont efficaces et que nous appuyons.
J'aimerais faire un autre commentaire. Les Autochtones connaissent les Autochtones. Est-ce intelligent de mettre en poste au Nunavut une personne originaire de Toronto qui ignore tout de notre peuple? Nous savons que notre savoir est vaste. David Suzuki, notre frère écologiste, signale que nous avons de vastes connaissances transmises par la voie orale qui disparaissent avec nos Aînés. D'après lui, c'est un savoir qui sera perdu à tout jamais. Il est nécessaire d'accorder une certaine crédibilité à notre savoir et de le respecter dans le contexte de l'éducation. Pour moi, c'est l'éducation.
J'envoie mes enfants à l'école de la Division scolaire no 1 de Winnipeg. Toute éducation est importante à mes yeux. Les connaissances de tous sont intrinsèquement bonnes et précieuses; il est par conséquent nécessaire d'apprendre à connaître les autres personnes. Il faut savoir également qu'il existe un système de connaissance qui est tout aussi intéressant et tout aussi profond que les autres; il est nécessaire d'acquérir cette connaissance. C'est pourquoi je m'intéresse à ce qui se passe dans le monde. Je n'aime pas que l'on établisse une sorte de hiérarchie basée sur des jugements de valeurs. Je tiens à ce que nous soyons tous mis sur un pied d'égalité et à ce que nos connaissances soient mises sur un pied d'égalité.
Le sénateur Tkachuk: J'ai oublié de mentionner la participation des Premières nations aux activités de l'Université de Regina. Si l'un ou l'une d'entre vous va à Regina, je lui recommande de visiter le nouvel édifice. Il est absolument spectaculaire. C'est probablement un des plus beaux édifices universitaires d'Amérique du Nord.
Mme Spillett: L'architecte est Douglas Cardinal, un Autochtone.
Le sénateur Tkachuk: C'est l'architecte qui a fait les plans du musée d'Ottawa.
Le sénateur Johnson: Pouvez-vous mentionner ce que font les 44 p. 100 de jeunes Autochtones qui ne fréquentent pas l'école?
Mme Spillett: Certains d'entre eux restent à la maison; d'autres sont dans la rue et d'autres sont en prison. Certains sont en bande ou font de la prostitution. Ce sont eux qui font les statistiques sociales. Pas tous, mais certains d'entre eux.
Le sénateur Johnson: Vous avez fait des commentaires sur diverses possibilités de résoudre ces problèmes et il est de plus en plus question de l'éducation dans les discussions. Tous ceux qui traitent de ce problème considèrent l'éducation comme une des clés. Les fonds de Développement des ressources humaines Canada destinés à la formation devraient- ils être octroyés pour de plus longues périodes?
Mme McCormick: Bien sûr. Un des problèmes est que les fonds de formation sont en fait destinés à des adultes et aident à financer des programmes pour des personnes âgées de 18 ans et plus.
Cependant, un des problèmes qui se posent au CAHRD et dans le cadre des autres ententes de développement des ressources humaines autochtones est lié au fait que les ressources que nous recevons sont à court terme. Elles sont octroyées pour une année environ, deux tout au plus.
De nombreux Autochtones commencent par des cours d'alphabétisation. Quand ils arrivent, leur niveau de scolarité n'est même pas équivalent à la 8e année. Il n'est pas possible de faire leur formation dans les délais qui nous sont imposés. C'est une lutte continuelle. Il n'est pas facile de convaincre les gens qu'ils peuvent s'instruire, recevoir une formation et travailler. Quand on y arrive, c'est alors le problème des délais trop courts qui se pose.
Le sénateur Johnson: Croyez-vous que le but est que la formation s'effectue sur une plus longue période?
Mme McCormick: Oui.
Le sénateur Johnson: Pensez-vous, comme John Kim Bell, que la formation n'est en réalité pas axée sur l'économie postindustrielle et que ces programmes de formation sont axés sur des emplois de niveau peu élevé?
Mme McCormick: J'en suis convaincue.
Le sénateur Johnson: Ne forme-t-on personne pour les secteurs de technologie de pointe qui sont très spécialisés?
Mme McCormick: Ce sont les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral qui créent cet obstacle. Le gouvernement fédéral crée un obstacle du fait que les programmes de formation ne durent pas assez longtemps. La plupart des Autochtones qui participent à ces programmes sont des assistés sociaux. Ces personnes ne peuvent toucher des prestations d'aide sociale que pendant une période limitée. Le gouvernement préfère que les assistés sociaux participent à un programme de formation d'une durée de trois mois et décrochent un emploi. Ce n'est toutefois pas efficace.
Le sénateur Johnson: Avez-vous lu le rapport de John Kim Bell intitulé «Taking Pulse»?
Mme McCormick: Oui.
Le sénateur Johnson: Je pense que les auteurs de ce rapport ont interrogé une centaine d'entreprises qui n'avaient jamais entendu parler des ententes de développement des ressources humaines autochtones (EDRHA). Elles n'étaient pas au courant des fonds octroyés dans le cadre de ces ententes. Elles n'avaient jamais eu vent du programme.
Mme McCormick: Je le comprends. La plupart des programmes EDRHA sont communautaires et collaborent avec des personnes de leur région qui sont les plus faciles à approcher.
Le sénateur Johnson: Bien. Par conséquent, ces programmes ne suscitent aucune demande de la part du secteur privé parce que les entreprises ne sont pas au courant de leur existence.
Mme McCormick: C'est bien cela, si elles ne sont pas au courant.
Mme Spillett: Je voulais faire un autre commentaire au sujet des EDRHA. Un autre conseil des EDRHA est censé travailler avec les milieux d'affaires. Il y a par conséquent un contact entre l'industrie et les EDRHA.
Le sénateur Johnson: Pensez-vous que la seule possibilité de régler ce problème soit une formation ou une éducation plus poussées et des objectifs à plus long terme?
Mme McCormick: Oui. Nous avons un autre problème en ce qui concerne les employeurs — l'industrie — que mentionne John Kim Bell. C'est bien beau de les faire participer, mais c'est inutile si l'on n'a pas des candidats ayant une formation suffisante à leur proposer. Le pourcentage des participants ayant un niveau d'instruction inférieur à la 9e année ou à la 12e année est très élevé et, par conséquent, nous ne faisons pas beaucoup d'efforts pour entrer en contact avec d'éventuels employeurs. Même si nous arrivons à établir un contact, nous n'avons aucun candidat à leur proposer parce que les personnes que nous aidons n'ont pas l'éducation et la formation nécessaires.
C'est absolument essentiel. Nous sommes également actifs dans le domaine de l'éducation postsecondaire. Chez nous, il y a une tension entre les personnes qui dirigent les programmes d'alphabétisation et les programmes de 12e année pour adultes et celles qui tentent de diriger les programmes postsecondaires car elles se demandent où sont les candidats. Il est essentiel d'avoir un niveau d'instruction équivalent à la 12e année pour entreprendre des études postsecondaires. C'est un problème majeur.
Le gros problème en ce qui concerne l'alphabétisation est que les fonds disponibles sont très insuffisants pour répondre aux besoins.
Le sénateur Johnson: Quel est le taux d'alphabétisation? Pouvez-vous citer les chiffres pour votre population?
Mme McCormick: Oui, en ce qui concerne le CAHRD. Le taux de participation à nos cours de formation est d'environ 400 adultes par an. Environ 60 p. 100 d'entre eux sont au niveau de l'alphabétisation — c'est-à-dire en dessous du niveau de la 6e année; nous les faisons ensuite passer de la 8e à la 12e année. Ensuite, nous les faisons participer aux programmes de formation générale proprement dits.
Nos programmes sont principalement axés sur l'alphabétisation et je pense que c'est le cas partout ailleurs également. Ensuite, nous donnons des cours de perfectionnement; dans certaines classes, le nombre de participants est assez intéressant en ce qui concerne les sciences et les mathématiques. Le nombre de participants au-delà du niveau de la 10e année est de 12 à 14 seulement, parce que le nombre de personnes ayant atteint ce niveau n'est pas suffisant.
Le sénateur Johnson: Savez-vous combien d'Autochtones sont analphabètes dans la ville de Winnipeg?
Mme McCormick: Tout dépend de ce que l'on entend par analphabétisme. Différents niveaux ont été établis.
Le sénateur Johnson: Oui, je sais. Je parle de compétences de base en matière de lecture.
Mme McCormick: D'après les statistiques récentes, 51 p. 100 des Autochtones ne terminent pas la 12e année. Je pense qu'environ 45 p. 100 ne dépassent pas le niveau de la 9e année, d'après le recensement de 1996. L'analphabétisme est un gros problème.
Le sénateur Johnson: Je le sais, c'est un gros problème.
Le sénateur Tkachuk: À la page 4 de votre mémoire, vous mentionnez que vous ne recevez plus les fonds nécessaires pour financer le programme d'emploi.
Mme McCormick: Non, nous n'avons plus les fonds nécessaires.
Le sénateur Tkachuk: N'était-ce pourtant pas un programme efficace?
Mme McCormick: Oui. Nous pensons que c'était un programme très efficace. C'est un programme qui n'est apparemment couvert par aucun des organismes subventionnaires, sauf Patrimoine Canada.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne vous y êtes peut-être pas très bien pris. Vous auriez peut-être dû dépasser votre budget de 1 milliard de dollars et faire preuve d'une incompétence totale; la ministre aurait peut-être demandé des fonds supplémentaires au gouvernement.
Mme McCormick: Oui, je présume.
Le sénateur Tkachuk: Changez donc de tactique.
La présidente: Je vous remercie.
Nos invités suivants sont Mme Diane Redsky et M. Troy Rupert. Allez-y.
M. Troy Rupert, Circle of Life, Thunderbird House: Honorables sénateurs, je suis le coordonnateur de Gang Outreach Intervention/Prevention (service d'intervention et de prévention en matière de bandes) à la Thunderbird House. Je vous remercie pour cette occasion de participer à ce processus important.
Je voudrais profiter de l'occasion pour faire des commentaires sur un groupe que l'on néglige trop souvent: les Autochtones de sexe masculin. Il est temps de s'attaquer aux problèmes sous-jacents au comportement antisocial qui est à la source de la formation de bandes et d'activités criminelles chez les jeunes, puis chez les adultes.
Les facteurs qui sont à la source de la délinquance et d'un comportement antisocial ultérieur chez les jeunes hommes autochtones sont le plus souvent une mauvaise surveillance ou la négligence parentale, de mauvaises méthodes disciplinaires, la criminalité parentale, l'agressivité et un statut socioéconomique médiocre. Dans de nombreux cas, ces facteurs incitent ces jeunes à exploiter les femmes ou les enfants, à s'adonner à la toxicomanie et à l'alcoolisme, à manifester de la violence à leur propre égard ou à l'égard d'autres membres de la collectivité et ils entraînent finalement leur incarcération.
Je pense qu'il est nécessaire de s'attaquer à ces problèmes avant qu'ils ne prennent trop d'ampleur et avant qu'un changement soit plus difficile. En s'attaquant aux attitudes, aux valeurs et aux préjugés qui nourrissent le comportement antisocial, nous pourrons nous passer des fonds et des programmes consacrés à la réparation des dommages causés par ce type de comportement. Si nous apprenons à nos jeunes à être sains d'esprit et de corps, leurs enfants seront des membres productifs de la société et les femmes seront traitées avec respect.
Les ressources en ce qui concerne les femmes sont nombreuses et bien documentées dans des répertoires, des annuaires téléphoniques, des listes de groupes de soutien, des ateliers; les femmes sont représentées dans la collectivité et dans la fonction publique; en outre, des groupes de défense ont été créés à leur intention.
Quelques ateliers recommandés pour les jeunes Autochtones de sexe masculin sont axés sur les thèmes suivants: «modes de pensée criminels ou conscience sociale» — cognition sociale — «responsabilités des hommes au sein de la famille et de la collectivité», «le respect des femmes», «la maîtrise de la colère», «résolution des problèmes sociaux», «la conscience morale» et «acquisition de la maîtrise de soi», «sensibilisation aux victimes», «The Red Rood» et «la suerie». Tous ces ateliers seraient intéressants. En acquérant des aptitudes sociales lorsqu'ils sont encore jeunes, les hommes deviendraient des pères, des maris et des membres de la collectivité plus productifs.
J'aide des membres de bandes autochtones — des jeunes et des adultes — depuis une dizaine d'années; j'élabore des programmes innovateurs pour les aider à se séparer des bandes et à entamer une nouvelle vie. Les plus grosses difficultés ont consisté à obtenir des résultats rapides comme des emplois décents, la désaccoutumance aux stupéfiants et à l'alcool, l'éducation et la capacité de résister à la tentation de renouer avec les anciennes fréquentations et l'ancien style de vie. Le succès instantané est toutefois illusoire et les pressions exercées par le groupe, le désespoir et la frustration sont autant d'obstacles.
Parmi les autres problèmes systémiques, il y a le refus des divisions scolaires de collaborer avec des membres de bandes, les méthodes judiciaires et répressives et les stéréotypes négatifs. Les jeunes sont souvent amenés à penser à tort que c'est en devenant un gangster endurci que l'on obtient un statut, de l'argent et du respect. Sans le désir sincère de changer, les jeunes qui font partie de bandes ne réussiront pas dans la vie. J'ai toutefois constaté que ce type d'individus constituaient des exceptions et que la plupart souhaitaient un changement pour le mieux.
La difficulté pour les jeunes est d'être entouré d'un système de soutien efficace et de se fixer des objectifs à longue échéance, et peut-être aussi de régler des problèmes de comportement dus à l'influence de la famille ou des pairs. J'ai observé en outre que la plupart des membres de bandes dont je me suis occupé veulent aider les autres en devenant eux- mêmes des travailleurs des services d'approche.
À la Circle of Life Thunderbird House, nous élaborons des programmes en nous basant sur des recommandations faites par des jeunes qui font partie de bandes. Ces programmes sont PAA PII WAK, un refuge pour les membres de bandes qui veulent se quitter leur bande en ayant recours à des méthodes autochtones ancestrales; «Clean Start», un projet de dissimulation ou d'enlèvement du tatouage de la bande et un programme d'intervention conçu pour faire disparaître les modes de pensée et les comportements criminels, qui est encore en cours d'élaboration et ne porte pas encore de nom.
Les bandes d'Autochtones et les activités criminelles autochtones ne sont pas des phénomènes récents à Winnipeg. Nos leaders autochtones ont malheureusement passé ces comportements sous silence. Ils en ont rejeté la responsabilité sur nos amis non autochtones et apprennent aux jeunes à agir comme eux. Pour que les Autochtones réussissent dans la vie, il est nécessaire de prendre ses responsabilités et d'enseigner par l'exemple. Winnipeg a de nombreux personnages modèles autochtones qui sont en mesure de faire une différence par leur simple présence, par leur influence et par leurs conseils.
Winnipeg a la réputation d'être un lieu peu fréquentable et d'avoir une mauvaise influence sur les jeunes Autochtones, ce qui est faux. Alors que de nombreuses tentations et activités néfastes peuvent détourner certains jeunes de la bonne voie, les facteurs positifs sont beaucoup plus nombreux que les facteurs négatifs. Les bandes, la consommation abusive de substances psychoactives et la violence sont omniprésents, y compris dans les collectivités isolées. Winnipeg offre davantage de possibilités d'emploi, d'éducation, de formation et de consultation aux jeunes Autochtones. Une bonne préparation éducative à l'autonomie fonctionnelle faciliterait considérablement l'adaptation d'un jeune Autochtone à la vie en milieu urbain.
La Circle of Life Thunderbird House a mis en place de nombreux programmes qui s'adressent aux jeunes et aux adultes autochtones des deux sexes et qui sont accessibles tout au long de la semaine. Le programme Oshkitwaawin est mis en oeuvre par deux travailleuses des services d'approche spécialisées dans la prostitution qui aident des prostitués transsexuels des deux sexes, dispense des services consultatifs et comprend un groupe de soutien hebdomadaire. Ce programme comprend en outre deux travailleurs d'approche auprès des bandes qui dispensent des services de consultation, d'aiguillage et de soutien. Le programme d'approche auprès des bandes organise en outre des ateliers de sensibilisation et des conférences à l'intention d'organismes communautaires et de groupes de jeunes.
«Rites of Passage» est un programme qui est placé sous la direction d'un Aîné, Don Cardinal; il comprend dix ateliers différents axés sur un apprentissage traditionnel différent. Les participants ont l'occasion de rencontrer Don Cardinal individuellement ou en famille pour recevoir des conseils personnels.
«Flight of the Thunderbirds» est un programme faisant intervenir deux travailleurs d'approche spécialisés dans le secteur culturel qui sont en charge de divers programmes culturels pendant toute la semaine. Les participants ont accès à des leçons de pow wow, à des cours de broderie de perles, à des séances de groupe des tambours, à des services consultatifs et à divers autres services.
Un Aîné est en permanence sur les lieux pour donner des conseils personnels, des conseils aux familles, pour la guérison et pour les cérémonies où une personne reçoit un nom. L'accès à d'autres Aînés — de type traditionnel et chrétien, hommes ou femmes — est possible.
La Circle of Life Thunderbird House organise en outre de façon régulière des célébrations pour la solstice et l'équinoxe, des cérémonies de suerie, des réunions communautaires, des conférences et des visites; elle loue aussi des locaux. Je vous remercie.
Mme Diane Redsky, directrice des programmes, Centre Ma Mawi Wi Chi Itata Centre: Bonjour. Je suis venue ici pour donner des informations sur notre centre, qui est une réponse communautaire à notre stratégie de développement de la jeunesse et pour donner des informations sur quelques pratiques exemplaires et leur efficacité en ce qui nous concerne.
Depuis 1984, le Ma Mawi Wi Chi Itata Centre dispense des services de prévention et de soutien adaptés à leurs besoins culturels aux enfants et aux familles autochtones de Winnipeg.
Le Centre est un organisme à but non lucratif, non mandaté, placé sous le contrôle et la direction d'Autochtones, qui offre un large éventail de services et de programmes adaptés à notre culture.
Depuis sa création, le centre Ma Mawi a évolué; il était à l'origine un organisme de défense dont la vocation est actuellement d'autonomiser les membres de la collectivité en offrant des services de prévention et de soutien aux enfants et aux familles.
Le principe qui guide Ma Mawi est que la collectivité tout entière a la responsabilité du développement sain des générations futures. Un engagement envers la croissance et le développement de la collectivité autochtone sous-tend toutes nos activités de programmes et de services.
Notre approche unique en matière de prestation de services nous a valu un niveau de crédibilité, de soutien, d'acceptation et de reconnaissance élevé dans la collectivité. Notre détermination à aider et à prendre soin des enfants, des familles et des collectivités nous distingue des autres organismes de services sociaux dans le coeur et dans l'esprit des membres de la collectivité; nous sommes considérés comme une ressource communautaire à valeur ajoutée.
La collectivité nous a signalé à maintes reprises que les services et les programmes les plus profitables aux enfants et aux familles ont des racines communautaires. Ma Mawi est fidèle à une approche au développement communautaire qui vise à créer des occasions pour la collectivité proprement dite. Nous sommes devenus bien plus qu'un organisme de services sociaux; nous sommes devenus un chef de file en matière de soins communautaires.
Notre plan d'avenir est axé sur l'apport du soutien nécessaire pour permettre à une collectivité de reconquérir son pouvoir de prendre soin de ses membres. Notre plan est fondé sur quatre principes axés sur la collectivité: une approche communautaire, être toujours là où sont les familles, des pratiques visant à accroître les capacités, une participation communautaire active et des occasions de leadership.
Ces principes nous aideront à apporter aux membres de la collectivité les ressources et la reconnaissance nécessaires pour accroître sa capacité de prendre soin d'elle-même. Notre centre a cinq établissements dans la ville de Winnipeg et nous prévoyons l'ouverture d'un sixième. Nous employons 120 membres de la communauté autochtone. Lorsque notre sixième installation sera ouverte, nous aurons au total trois établissements de soins en résidence et trois centres de quartier.
Nous avons élaboré notre stratégie de développement de la jeunesse il y a environ deux ans. Les jeunes Autochtones sont un élément dynamique de la ville de Winnipeg. Ils sont nos futurs dirigeants, nos futurs éducateurs, nos futurs travailleurs indépendants et nos futurs modèles. Ils constituent le lien entre l'histoire et les traditions ancestrales et sont porteurs du savoir et de la vision de l'avenir.
Ces mêmes jeunes joueront un rôle capital dans l'avenir de Winnipeg en ce nouveau millénaire. Les jeunes Autochtones sont le segment de la population jeune de Winnipeg dont la croissance est la plus rapide. C'est toutefois dans cette couche de la population que le taux de chômage et le taux de suicide sont les plus élevés; c'est là aussi que le niveau d'instruction est le plus faible. En outre, la conjoncture du marché du travail n'aide pas beaucoup les jeunes Autochtones, ce qui aggrave une situation dans laquelle les jeunes Autochtones ont déjà beaucoup plus de défis à relever que les autres jeunes.
La stratégie de développement de la jeunesse du Ma Mawi Wi Chi Itata Centre est fondée sur le principe que l'on peut trouver des solutions et atteindre des objectifs lorsque tous les intervenants collaborent dans le cadre d'un partenariat authentique.
Le renforcement de la capacité de la collectivité autochtone grâce à des programmes et des services conçus et fournis par des organismes établis et par de nouveaux organismes s'adressant aux jeunes Autochtones devrait être encouragé.
La fourniture des programmes et des services dans un climat de respect mutuel, de reconnaissance des mérites, de conscience des responsabilités et de partage sert les intérêts de toutes les parties concernées.
Nous imaginons un avenir dans lequel les jeunes Autochtones seront en mesure de poursuivre des objectifs en matière de carrière et de qualité de vie tout en soutenant les aspirations sociales et économiques de toute la collectivité autochtone.
La mission de la stratégie de développement de la jeunesse est de guider les jeunes Autochtones et de leur fournir des services globaux efficaces avec le concours de divers particuliers et de divers organismes pour les aider à se réaliser pleinement.
L'objectif de la stratégie est d'établir un cadre qui aidera les organisations autochtones, les particuliers et les jeunes à concevoir et à fournir des programmes et des services accessibles aux jeunes Autochtones. On prévoit que la mise en oeuvre de la stratégie aidera à amener le profil actuel de la jeunesse autochtone à un niveau comparable à celui du reste de la jeunesse canadienne.
L'objet de la stratégie du centre est de prendre l'initiative de concevoir des programmes pour aider les jeunes Autochtones d'aujourd'hui. La stratégie est fondée sur des approches qui reposent sur les points forts et qui ont pour but de mettre en valeur les talents, les atouts, les capacités et les qualités des jeunes Autochtones.
Les jeunes Autochtones reconnaissent qu'il est important qu'ils soient au courant de leurs traditions et de leur histoire. Ils veulent avoir des contacts avec leur culture et avec leur langue; ils veulent les préserver dans le but d'accroître leur mieux-être.
Cette conception a été transmise par la Commission royale sur les peuples autochtones de 1996. Les jeunes Autochtones entrevoient un futur qui leur offre des possibilités équitables de réussir et de mener une vie enrichissante. Pour atteindre cet objectif, il est essentiel qu'ils aient les aptitudes, les capacités et l'information nécessaires pour tirer pleinement parti des possibilités qui s'offrent à eux dans les domaines de l'éducation, de la formation et de l'emploi.
Notre objectif est d'encourager les jeunes Autochtones qui veulent mener un mode de vie sain à profiter des possibilités et les aider à exprimer leur identité culturelle dans le contexte du soutien et de l'apprentissage. Nous comptons mettre l'accent sur les points forts et les talents des jeunes Autochtones tout en les remettant en contact avec une collectivité. Nous voulons renforcer la capacité de nos quartiers et dispenser des services qui encourageront l'épanouissement culturel et l'autonomie des jeunes Autochtones. Nous voulons que nos jeunes respectent et diffusent la culture, les collectivités, la langue, l'histoire, les coutumes, les traditions, l'identité, les valeurs et le patrimoine autochtones.
De nombreux jeunes Autochtones souhaitent recouvrer leur identité culturelle et reprendre contact avec leurs valeurs traditionnelles.
La stratégie de développement de la jeunesse du Ma Mawi Wi Chi Itata Centre est fondée sur le principe suivant: les solutions et les résultats sont réalisables lorsque tous les intervenants, y compris les collectivités autochtones, les gouvernements et les institutions, le secteur privé, les organismes bénévoles de la collectivité et les particuliers, collaborent dans le cadre d'un partenariat authentique.
Cette stratégie a été élaborée il y a plusieurs années et nous avons mis en place plusieurs programmes visant à aider leurs jeunes et leur famille. La participation de la famille est un ingrédient essentiel de notre stratégie.
Des possibilités en matière de loisirs, de culture, d'éducation et de leadership, conçues avec l'aide des jeunes pour les jeunes, ont été mises en oeuvre. Nous administrons des clubs de pow-wow où nous accueillons les jeunes et les membres de leur famille.
Nous avons mis sur pied des programmes récréatifs dans plusieurs centres communautaires de la ville de Winnipeg. Nous avons mis en place des programmes d'emploi d'été. Nous avons créé des programmes de camps auxquels toute la famille est invitée à participer.
Nos trois établissements de soins en résidence sont axés sur les besoins des jeunes. La famille est au centre de nos programmes et a son mot à dire dans toutes les décisions qui sont prises.
Le Ma Mawi Wi Chi Itata Centre prépare l'ouverture d'un centre d'apprentissage dans la banlieue immédiate de Winnipeg. Un groupe de jeunes dynamiques élabore un plan d'entreprise, choisissent l'emplacement, et cetera. C'est une occasion de perfectionnement en leadership pour les jeunes qui donne également l'occasion à Ma Mawi d'encadrer les jeunes et de préparer la relève.
Le sénateur Johnson: Je vous remercie. Vos réalisations au niveau communautaire sont extraordinaires.
Monsieur Rupert, nous avons suivi l'évolution de vos initiatives au fil des ans et je tiens à vous féliciter pour les progrès considérables réalisés. Vous avez mentionné que l'on disposait d'abondantes ressources en ce qui concerne les femmes mais que les ressources étaient plutôt minces en ce qui concerne les jeunes Autochtones de sexe masculin. Avez- vous créé des ateliers pour ces jeunes?
M. Rupert: Non. Nous préparons toutefois actuellement un atelier. Je compte le tenir à l'extérieur de la Thunderbird House. Je voudrais que ce groupe se réunisse deux fois par semaine pour examiner des questions liées au développement social.
Jusqu'à présent, le seul programme axé sur les jeunes Autochtones de sexe masculin a été un programme de tournées dans les écoles. J'ai administré ce programme par l'intermédiaire de la Winnipeg Native Alliance. Ce programme ne s'adressait toutefois pas uniquement aux jeunes hommes. Il consistait à organiser des discussions de groupe hebdomadaires avec des jeunes de 16 et 17 ans.
Le sénateur Johnson: Pensez-vous que ce nouveau programme attirera des jeunes hommes? Comptez-vous utiliser un modèle?
M. Rupert: Non. L'objectif principal de ce programme est d'apprendre à ces jeunes hommes à respecter les femmes. J'ai d'ailleurs apporté les résultats d'un sondage qui expliquent ma démarche. J'ai fait un sondage auprès de 49 jeunes Autochtones dans le cadre duquel j'ai posé plusieurs questions au sujet des bandes. Une des dernières questions que j'ai posées est: d'après vous, quel rôle jouent les femmes dans les bandes? La réponse de près de 90 p. 100 des participants... je me demande si je dois la révéler. La réponse de la majorité des participants était épouvantable.
Le sénateur Johnson: Je suis certaine que ce serait un document intéressant à lire.
M. Rupert: Aimeriez-vous le voir? Je peux le faire circuler, si vous voulez.
La présidente: Pourriez-vous nous en faire faire des copies?
M. Rupert: Oui.
Le sénateur Johnson: Quel est le nombre de jeunes gens qui font partie de bandes?
M. Rupert: D'après les statistiques sur l'administration de la justice, le nombre de membres de bandes actuellement actifs dans la ville est évalué à 2 000.
Le sénateur Johnson: Ce chiffre est-il resté stable?
M. Rupert: Il inclut tous les membres de bandes; on estime que 40 p. 100 d'entre eux sont des jeunes et que 70 p. 100 des 2 000 sont des Autochtones.
Le sénateur Johnson: Comment votre programme aide-t-il les jeunes à cesser de faire partie de bandes? Y a-t-il une approche particulière qui a été efficace dans votre cas et les parents vous soutiennent-ils dans ce contexte?
M. Rupert: Nous recevons de nombreux appels de parents qui sont inquiets au sujet de leurs enfants.
Le sénateur Johnson: Votre taux de réussite est-il élevé?
M. Rupert: Oui. Les garçons ont malheureusement généralement un pied dans la bande et un pied en dehors.
Un de nos protégés fréquente l'école du centre autochtone pendant quelques semaines puis rejoint parfois sa bande. De toute évidence, il n'arrive pas à se décider; les liens avec une bande ne se brisent pas facilement.
Ses pairs et son environnement ont eu une grosse influence sur sa vie. Il a fréquenté des membres de bandes pendant la plus grande partie de sa vie. Il connaît bien les membres de bandes du quartier où il est né. Lorsqu'il quitte la bande, son départ ressemble à une retraite et, comme dans tous les cas de retraite concernant une association, il maintient des liens avec la bande. Il restera loyal à ses couleurs jusqu'à sa mort, même s'il ne participe plus activement à ses activités.
C'est un dilemme commun aux garçons que nous aidons.
Le sénateur Johnson: Pourquoi vos dirigeants autochtones restent-ils muets au sujet des bandes et des activités criminelles autochtones? En avez-vous une idée?
M. Rupert: À mon avis, ils pourraient croire que ce serait du suicide politique d'en discuter. En outre, ils craignent les bandes, car celles-ci sont puissantes.
Le sénateur Johnson: Connaissez-vous quelqu'un qui soit susceptible de divulguer des informations à ce sujet ou pensez-vous que la situation persistera?
M. Rupert: Je pense qu'il faudrait peut-être qu'un événement terrible survienne pour que quelqu'un décide de parler. Les politiciens autochtones dénoncent la brutalité de la police et d'autres abus mais, lorsqu'il s'agit de rendre des comptes à leur peuple, ils gardent le silence.
Le sénateur Johnson: Je suis certaine que vous apprécieriez qu'ils vous donnent un peu plus d'appui.
La présidente: J'ai relevé le défi de faire un sondage sur les bandes autochtones à Edmonton. J'ai reçu quelques flèches dans le dos au fil des ans et je ne suis donc pas trop inquiète au sujet des réactions que pourrait susciter mon sondage. Je suis maintenant parfaitement au courant des activités des bandes.
Je présenterai les résultats du sondage à notre caucus et au comité. Je peux toutefois révéler qu'ils sont décourageants. Le système judiciaire encourage pratiquement la formation de bandes en transférant des détenus de l'établissement correctionnel de Stony Mountain à l'établissement à sécurité maximale d'Edmonton, d'où ils sont libérés. Cette façon de procéder a entraîné une recrudescence de 35 p. 100 des activités des bandes à Edmonton.
M. Rupert: C'est effectivement une des principales sources du problème.
La présidente: Avez-vous constaté des améliorations au niveau communautaire? Si j'ai bien compris, la collectivité souhaite vivement affranchir ses enfants de ces bandes. Quels résultats avez-vous obtenus dans ce domaine?
M. Rupert: De nombreux organismes communautaires s'appliquent à régler le problème des bandes. Ma Mawi et d'autres organismes s'attachent à créer des programmes efficaces qui aideront nos jeunes à rester à l'écart des bandes qui se sont infiltrées dans nos collectivités.
Le sénateur Chaput: Je suis membre du comité depuis peu et je vous félicite de discuter aussi ouvertement des bandes et, surtout, de la nécessité d'aider les jeunes hommes. Nous sommes conscients que les hommes qui ont des problèmes sociaux demandent rarement de l'aide.
Je présume qu'il doit être plus facile de faire de la prévention que de tenter de convaincre quelqu'un de se séparer d'une bande. Quel pourcentage de vos programmes sont axés sur la prévention?
M. Rupert: Environ 15 p. 100 de nos initiatives sont axées sur la prévention et les autres sur l'intervention. Les mesures de prévention consistent notamment en l'organisation d'ateliers scolaires et communautaires auxquels participent les jeunes et leur famille.
Le sénateur St. Germain: Remportez-vous la lutte ou la perdez-vous? De quelle façon la police a-t-elle tenté de s'adapter aux besoins de nos collectivités autochtones? Avez-vous suffisamment de personnel qualifié pour aider la police?
J'ai été policier à St. Boniface à l'époque de la fusion, puis j'ai été policier banalisé à Vancouver pendant sept mois. J'ai passé les cinq mois suivants dans la rue.
La délicatesse nécessaire pour accomplir cette tâche n'était pas à l'honneur lorsque j'étais policier. Je sais que la situation a changé, et c'est tant mieux, mais avez-vous les talents nécessaires?
Y a-t-il un bassin d'Autochtones dans lequel vous pouvez prélever des personnes ayant la formation voulue pour faire partie du corps de police? Le corps de police s'adapte-t-il aux nouveaux principes?
M. Rupert: En ce qui concerne votre première question, je pense que je ne remporte pas la victoire, mais que je ne perds pas la lutte non plus. Je réalise cependant des progrès. Je pense que le nombre de membres de bandes reste pratiquement stable, aux alentours de 2 000. Il n'a pas beaucoup changé depuis plusieurs années. Le nombre de membres de bandes est élevé, mais un grand nombre de membres de bandes d'un certain âge ont décidé de se séparer de leur bande.
Il semblerait que ce soient les plus jeunes et les plus âgés parmi les membres de bandes qui veuillent s'en aller; ils constatent que c'est possible. Ils comprennent que des ressources ont été mobilisées pour les aider à s'affranchir de la bande et à devenir des membres productifs de la société.
En ce qui concerne l'autre question, je ne peux plus être aussi sincère et franc depuis que je sais que vous êtes un ex- policier.
Le sénateur St. Germain: Rien ne leur ferait plus plaisir que de vous voir me démolir. Allez-y. Ne vous retenez surtout pas.
M. Rupert: Je pense que nous avons réalisé des progrès dans la communication avec les Autochtones. De nombreux bureaux communautaires satellites ont été ouverts et le système de surveillance policière communautaire est efficace.
Le service de police recrute des agents et le Downtown Winnipeg Biz est un programme efficace dans le cadre duquel de jeunes ambassadeurs font des patrouilles de quartier. Un grand nombre d'ambassadeurs sont des Autochtones et plusieurs veulent faire carrière dans le corps de police. Plus le nombre d'Autochtones que l'on arrivera à attirer dans ces domaines sera élevé et plus la situation s'améliorera.
Nous avons effectivement des problèmes récurrents de brutalité de la part des agents de police. Nous avons également des préoccupations au sujet du comportement agressif des bandes à l'égard des jeunes. Ce sont deux problèmes auxquels il est essentiel de s'attaquer.
On les esquive toujours et les gens sont frustrés et préoccupés par cette inertie. Les membres de la collectivité sont préoccupés parce qu'on ne tient pas compte de leurs opinions en ce qui concerne ces problèmes. Il semblerait que la police protège ses membres et que, même si elle reconnaît certains abus, elle ne donne pas suite aux plaintes.
Le sénateur St. Germain: L'agressivité de part et d'autre entraîne-t-elle une recrudescence de l'agressivité dans la collectivité?
M. Rupert: S'agit-il d'agressivité entre les Autochtones et le service de police?
Le sénateur St. Germain: Oui. Je suis particulièrement préoccupé par l'agressivité des bandes parce que si une partie fait preuve d'agressivité, cette agressivité provoque généralement une réaction semblable chez l'adversaire.
M. Rupert: Il est indéniable que les deux groupes se détestent.
Le sénateur Tkachuk: Étiez-vous membre d'une bande avant de vous occuper de ce programme?
M. Rupert: Pendant 15 années de ma vie, j'ai été incarcéré à de nombreuses reprises. La dernière fois que j'ai été incarcéré, c'était à l'établissement correctionnel de Stony Mountain. J'ai été libéré en 1992. Lorsque j'étais incarcéré dans cet établissement, j'ai fait partie d'une bande. Je n'en suis pas resté membre longtemps.
Le sénateur Tkachuk: Qu'est-ce qui a changé votre vie?
M. Rupert: Je présume que c'est la naissance de mon fils et le décès de sa mère. Six mois après ma libération de l'établissement de Stony Mountain, la mère de mon fils a perdu la vie et j'ai dû prendre son éducation en charge. Comme j'avais un sentiment de culpabilité au sujet de mon comportement, j'ai changé de vie. Je suis conscient que cet enfant sera à mon image. Je ne tenais pas à ce qu'il suive la même voie que moi. Je ne tenais pas à ce qu'il devienne ce que j'étais lorsque j'étais jeune. C'est ce sentiment de culpabilité qui m'a poussé à changer.
Mon fils a sauvé ma vie à plusieurs reprises. Il y a peu, il m'a aidé à surmonter des problèmes personnels que j'avais beaucoup de difficulté à gérer.
Le sénateur Tkachuk: C'est très émouvant. Votre fils a de la chance.
Vous avez mentionné que les dirigeants autochtones passaient les problèmes sous silence. Nous avons examiné le problème des méthodes utilisées par la police. Je voudrais que vous fassiez des commentaires sur le refus des divisions scolaires d'aider les membres de bandes.
Je voudrais entendre vos opinions au sujet des méthodes judiciaires et des initiatives qu'il conviendrait de promouvoir en matière de politiques officielles pour aider à régler le problème.
M. Rupert: De nombreux enseignants n'ont pas reçu une formation adéquate pour faire face à des situations liées à la présence de bandes. Ils ne savent pas comment réagir à une mentalité agressive, à des activités de bande et à des comportements antisociaux et criminels. Leur réaction est de faire renvoyer le jeune concerné de l'école; elle est d'ailleurs conforme à la politique de tolérance zéro des autorités scolaires.
Le ministre de la Justice a déclaré qu'un membre de bande dans une école en est un de trop. Est-ce une attitude acceptable de la part du ministre de la Justice?
Si j'étais enseignant, mon premier objectif serait de me préoccuper de l'éducation des élèves et de les sensibiliser pour les aider à poursuivre leurs études. J'ai envoyé une lettre immédiatement au ministre de la Justice.
Le sénateur Tkachuk: Je n'en doute pas. Comment peut-on collaborer avec les commissions scolaires? Que peut-on faire pour s'assurer que les enfants aient la possibilité de terminer leurs études?
M. Rupert: Je l'ignore. Je sais que les changements doivent venir d'enseignants ayant reçu une formation spéciale pour faire face à ce problème. Une politique de tolérance zéro a pour seul résultat d'inciter les enfants à risque à se tourner vers les bandes. Je suis incapable de répondre à cette question.
Le sénateur Tkachuk: J'approuve vos opinions au sujet de la tolérance zéro. Si l'enfant est agressif, il est expulsé après le troisième avertissement et il est perdu pour la collectivité.
M. Rupert: Oui. Il y a bien quelques écoles en dehors du campus. Leur nombre n'est toutefois pas élevé. Ces écoles acceptent des enfants qui ont eu trois avertissements et leur objectif est de les accepter en dépit de leurs agissements. Un plus grand nombre d'écoles de ce type seraient nécessaires.
Le système judiciaire n'est pas parvenu à mettre un terme aux activités des bandes. Vous avez mentionné la politique de transfert des chefs de bande à Edmonton. Ils ont été transférés de Stony Mountain à l'extérieur de la province pour tenter d'atténuer le problème. Cette initiative n'a pas réglé le problème mais, à cause d'elle, les membres de bandes sont maintenant partout.
La tension entre les détenus et les gardiens est très forte. Les gardiens et le système traitent très mal les Autochtones. Ils sont humiliés par les gardiens.
Le système des libérations conditionnelles pose également un problème dans le système judiciaire. Certains de ces hommes ne sortent jamais du système. Lorsqu'ils sont pris en charge par le système carcéral fédéral, ils passent au système des libérations conditionnelles et ils doivent parfois attendre des années avant d'en sortir.
Le sénateur Pearson: J'ai entendu parler de votre centre et de l'accent qu'il met sur les enfants et sur les familles. Nous avons entendu dire que des jeunes sont préoccupés au sujet de la grossesse chez les adolescentes et de certains problèmes parentaux. Le fait que des jeunes qui sont encore des enfants doivent élever eux-mêmes des enfants les préoccupe. Un jeune homme qui était éloquent a même mentionné que les enfants ne comprenaient pas le lien entre le comportement sexuel, l'engagement et l'amour. Lorsque nous avons posé à ces enfants des questions au sujet de «l'amour», ils ne savaient pas ce que cela voulait dire.
Pouvez-vous mentionner des programmes qui pourraient briser le cercle vicieux de la grossesse précoce?
Mme Redsky: La grossesse chez les adolescentes est indéniablement un problème qui se pose chez nos jeunes. Nos jeunes ont également des problèmes en ce qui concerne les bandes et les comportements illégaux. Je peux répondre à votre question en mentionnant tous ces problèmes.
Les Boys and Girls Clubs de Winnipeg et d'autres organismes aident nos enfants à se réaliser. Ces associations leur offrent des possibilités de participation à des activités récréatives et culturelles. Si les enfants ne font pas des choix sains, ils ont tendance à chercher l'amour là où ils ne le trouveront pas.
Les organismes communautaires doivent disposer des ressources nécessaires pour occuper ces enfants. Nous devons leur offrir des possibilités de rechange saines, comme des emplois d'été, des activités culturelles, du travail bénévole ou des programmes de développement de leur aptitude au leadership. Si la collectivité appuie ces initiatives, les enfants sont occupés et ils sont à l'abri des ennuis.
Nous avons un foyer pour mères adolescentes et nous préparons l'ouverture d'un foyer pour les jeunes victimes d'exploitation sexuelle. Bien que ce soit un symptôme ou un résultat de son expérience, la collectivité autochtone ne voit pas le problème sous cet angle.
Nous voulons établir des relations avec nos jeunes. Le centre Ma Mawi a été créé à la suite des difficultés que les familles autochtones avaient avec les services d'aide à l'enfance.
Le sénateur Pearson: Vous avez un défi de taille à relever. Le problème de la sexualité me préoccupe davantage que celui de la grossesse chez les adolescentes. Je pense que l'on peut effectivement enrayer ce dernier problème en mettant l'accent sur l'éducation, sur les possibilités et sur les choix. Par contre, il est essentiel de trouver un moyen d'apprendre aux enfants ce qu'est une sexualité saine. Il est nécessaire de faire l'éducation sexuelle des garçons et des filles, pas seulement des Autochtones, mais des autres jeunes également.
Est-ce que vous administrez des programmes de ce type?
Mme Redsky: Nous avons mis en place un programme appelé Positive Adolescent Sexuality Support. Ce programme est mis en oeuvre par deux facilitateurs qui dirigent cet atelier au Centre manitobain de la jeunesse. Ils font également des visites dans les écoles qui autorisent ce type d'éducation. Dans nos centres communautaires, nous avons des discussions sur la régulation des naissances et la sexualité. Nous avons en outre mis en place un programme appelé «Baby Think It Over Dolls». L'année dernière, nous avons ajouté un volet emploi au programme. Deux de nos facilitateurs ont recruté 15 jeunes dans la collectivité et les ont formés pour animer ces sept ateliers.
Le sénateur Pearson: Excellente initiative!
Mme Redsky: Ces 15 jeunes sont des cofacilitateurs et sont en outre rémunérés. Nos programmes sont réguliers; ils ne dépendent pas des conditions météorologiques. Nous avons établi de solides liens de confiance avec les jeunes de la localité. Nous avons établi des relations stables et intéressantes avec ces enfants et ils ont appris à respecter les membres de notre personnel qui les encadrent.
Le sénateur Pearson: Je vous remercie pour toute cette information. Vous avez mis en place un programme très bien conçu; nous sommes conscients que le financement et la durabilité sont des facteurs importants pour la survie du programme.
La présidente: Je vous remercie pour vos exposés très intéressants.
Je voudrais maintenant accueillir M. Darryl Bruce et M. Bill Shead.
M. Darryl Bruce, directeur exécutif, Manitoba Aboriginal Sports and Recreation Council: Je vous remercie de me donner l'occasion de communiquer des informations sur l'organisme que je représente et sur les services que nous fournissons aux Autochtones du Manitoba dans le secteur des sports et des loisirs.
Le Winnipeg Aboriginal Sport Achievement Centre dispense des services d'un caractère très particulier aux jeunes Autochtones âgés de 8 à 12 ans du centre-ville de Winnipeg. Nos coordonnateurs en leadership recrutent des jeunes du centre-ville et nous organisons des camps sportifs pour eux. Les enfants qui participent à des camps sportifs sont généralement des enfants de familles de la classe moyenne ou de la classe supérieure.
Nous faisons une campagne de recrutement pendant les mois de mai et de juin. Au début de l'été, les enfants sont amenés sur l'ex-terrain de foire et participent au camp sportif dans le cadre duquel ils ont à leur disposition un terrain de jeu extérieur et un stade couvert.
Les enfants reçoivent une collation le matin, un dîner à midi et une collation dans l'après-midi, avant d'être reconduits à l'endroit où ils ont été embarqués pour aller au camp. Pendant toute la journée, ils participent à plusieurs activités et, en fin de journée, nous les emmenons nager. L'événement marquant de la semaine a lieu le vendredi, jour où nous emmenons les enfants à Fun Mountain, où la plupart d'entre eux n'avaient encore jamais eu l'occasion d'aller.
Le camp dure de six à sept semaines, selon notre programme provincial. Au cours de cette période, nous accueillons un millier de jeunes. Nous avons 36 dirigeants autochtones qui ont reçu un entraînement à divers niveaux de performance sportive. Leur niveau dépend en outre de leur niveau d'instruction, secondaire, postsecondaire ou universitaire.
Nous organisons notre camp depuis quatre ans. Nous avons mis en place le Youth Achievement Program (programme du mérite pour les jeunes) qui encourage les élèves de niveau secondaire à tirer parti de ce que leur enseignent des dirigeants chevronnés; lorsqu'ils ont un niveau de formation suffisant, ils peuvent obtenir un emploi.
La municipalité de Winnipeg, le gouvernement provincial et le Centre urbain polyvalent pour les jeunes Autochtones nous octroient les fonds nécessaires par l'intermédiaire du ministère du Patrimoine canadien.
L'année dernière, nous avons fait un sondage dans le cadre duquel nous avons notamment posé les questions suivantes: combien de repas prenez-vous par jour? Avez-vous déjà pratiqué des sports réguliers? Comment ce programme vous a-t-il fait participer à des activités sportives et récréatives?
L'objectif du sondage est de déterminer quels enfants désirent pratiquer des sports réguliers.
Les sports et les loisirs sont très importants pour le bien-être des jeunes, mais ils servent également un objectif plus large en mobilisant les jeunes qui ont tendance à traîner dans la rue et en leur offrant la possibilité de faire carrière dans le secteur des sports et des loisirs. La plupart de nos dirigeants poursuivent des études supérieures en sports et loisirs à l'Université du Manitoba.
Notre programme est en outre adapté à la culture. Il comprend un volet «Premières nations» et «Métis».
À Winnipeg, le nombre d'Autochtones s'élève à près de 60 000. Nous avons fait une enquête sur d'autres camps sportifs qui a révélé que les participants autochtones ne sont pas nombreux. Autrefois, notre programme était axé sur les jeunes Autochtones du centre-ville, mais nous sommes en train de l'étendre aux jeunes banlieusards.
Depuis quatre ans, nous avons un programme d'automne et d'hiver qui inclut des cours de patinage et de natation pour débutants. Ce programme est structuré de la même façon que notre programme d'été: nous allons prendre les enfants à 15 h 30 après la fin des cours. Ils participent aux programmes disponibles et nous leur offrons une collation, puis nous les reconduisons à l'école.
Nous sommes heureux d'offrir ce programme pendant toute l'année et il a eu beaucoup de succès jusqu'à présent. C'est formidable de proposer des activités aux enfants pendant les mois d'automne et d'hiver.
Nous déplorons de ne pas être en mesure d'avoir assez de place pour répondre à toutes les demandes. Nous avons une liste d'attente de 20 enfants pour la même école.
Nous devons surveiller notre budget en espérant que nous recevrons les fonds nécessaires pour élargir la portée de ce programme très intéressant.
Nous dispensons une formation à nos dirigeants: entraîneur agréé, premiers soins et cours de niveau d'entrée à l'Université du Manitoba.
Après sa création, le nombre de participants à notre programme était de 600 jeunes et il est maintenant d'un millier de jeunes. Nous comptons sur 2 000 participants cette année. Notre objectif est de changer la vie des enfants que nous accueillons.
Nous encourageons les enfants à participer aux sports réguliers. Il est souvent difficile d'encourager un enfant à penser à faire une carrière sportive lorsque la pauvreté constitue un obstacle majeur. Certains de ces enfants n'ont même pas de maillot de bain. Notre sondage a révélé que 10 p. 100 seulement des 1 000 participants possédaient de l'équipement sportif. Ces chiffres sont décourageants et sont révélateurs de certains problèmes urgents auxquels ces jeunes du centre-ville sont confrontés.
M. Bill Shead, président, Aboriginal Centre of Winnipeg: Je suis ici pour donner des informations sur les activités du centre autochtone de Winnipeg et d'expliquer les raisons pour lesquelles les leçons que j'ai apprises pourraient vous aider à trouver une solution aux problèmes que vous examinez.
Le centre autochtone de Winnipeg a été créé il y a dix ans. Il est dans l'ancienne gare du Canadien Pacifique, au bout de la rue. Cet édifice sera centenaire en 2005 et il est classé bâtiment historique. C'est un bel édifice ancien qui est apprécié pour sa beauté architecturale et pour sa valeur historique.
En décembre 1992, un groupe d'organismes autochtones de la ville a acheté l'édifice au Canadien Pacifique et a fait des rénovations dans le but de l'adapter à leurs besoins et d'en préserver les attributs historiques.
Cet édifice répond à un besoin d'infrastructure de la collectivité autochtone et des organismes qui offrent des services à la population autochtone de Winnipeg. Vous n'ignorez probablement pas que depuis plusieurs décennies, le gouvernement du Canada et d'autres gouvernements ou organismes financent plusieurs organisations pour qu'elles fournissent des services qui aident les Autochtones à faire la transition à la vie en milieu urbain. Le centre d'amitié a été le premier; vous aurez certainement l'occasion d'entendre le témoignage des représentants de nombreux autres centres analogues dans le cadre de cette étude.
Un des aspects de ces programmes est qu'ils reçoivent des subventions d'un montant précis, dont une somme arbitraire qu'ils peuvent intégrer à leur budget. D'une manière générale, en raison même de la nature des ententes de financement, ces organismes doivent trouver des locaux et, étant donné la durée limitée des ententes, les propriétaires n'ont pas la possibilité ni la volonté de faire les rénovations nécessaires pour que ces locaux répondent à nos besoins. À cause de cette situation, les différents organismes étaient éparpillés à travers la ville et plusieurs étaient établis dans des quartiers inadéquats où les installations ne répondaient pas à nos besoins.
Il y a un certain temps, Wayne Helgason, l'ex-directeur général du Ma Mawi Wi Chi Itata Centre cherchait des locaux pour son programme. Il a décidé de collaborer avec et de réunir d'autres organismes qui avaient également besoin de locaux et d'acheter un édifice en faisant des rénovations en fonction de leurs besoins.
Ces organismes avaient trois objectifs: obtenir des locaux répondant à leurs besoins, faciliter les contacts et les communications entre les divers organismes et programmes, réduire les frais généraux et investir les économies ainsi réalisées dans la fourniture des services. Il va sans dire qu'il a été nécessaire de surmonter de nombreux obstacles pour réaliser ce rêve.
Au cours des cinq premières années de développement du centre autochtone de Winnipeg, la société à laquelle appartient l'édifice a conclu 50 ententes distinctes avec deux douzaines de ministères et organismes différents, rien que pour les travaux de construction et de rénovation.
J'ai remis au greffier une liste des programmes dans le cadre desquels nous avons investi environ 6 millions de dollars sur une période de cinq ans pour atteindre cet objectif.
Quel est le but de tous ces efforts? Quoi que l'on puisse dire au sujet des jeunes Autochtones et de leurs besoins spécifiques en matière de programmes, il est nécessaire d'être conscient du contexte global d'une approche stratégique à la fourniture des services et à l'amélioration de la vie des jeunes Autochtones en milieu urbain.
Le ciblage doit être plus précis parce que certains jeunes Autochtones qui vivent dans les villes n'ont pas besoin d'aide. Ils font partie de familles de la classe moyenne ou de la classe supérieure qui s'en tirent très bien et n'ont probablement pas besoin d'aide, mais un grand nombre d'autres jeunes en ont vraiment besoin.
Il est en outre nécessaire de situer leurs problèmes dans le contexte d'un milieu urbain. Il est inutile d'adopter la perspective traditionnelle du Nord ou celle de leurs communautés. Il n'est pas utile, par exemple d'apprendre à un jeune Autochtone vivant en milieu urbain à dépouiller un lièvre; cette connaissance ne lui sera pas utile.
Je pense qu'il est également nécessaire d'adopter une approche globale à l'égard de ces problèmes. Il faut éviter soigneusement de saturer ces jeunes de programmes. Il est nécessaire d'adopter une approche collective et pas isolée. Il est essentiel de s'assurer que ces enfants acquièrent les compétences intégrées qui les aideront dans la vie courante.
Quoi qu'il arrive, le leadership est absolument essentiel. Il est essentiel d'avoir un champion. C'est à mon sens la clé de la réussite. La réussite du centre autochtone est due au fait que nous avions un champion, quelqu'un qui avait une vision de ce que devait devenir le centre. Le centre était sa passion et cet homme avait un engagement profond. Il a obtenu l'appui et le parrainage de nombreux organismes publics et privés; il était en outre un excellent communicateur. C'est le type de leadership vigoureux et engagé qui est essentiel. Une bonne coordination est en outre nécessaire.
Je pense que nous avons mis en place plusieurs projets et programmes très intéressants pour les Autochtones de la ville. Nous avons encore un trop grand nombre d'ententes à administrer. La liste que j'ai remise au greffier n'est pas insignifiante.
N'oubliez pas que j'étais là; j'étais directeur général à cette époque et je me souviens d'avoir négocié ces ententes. Je me souviens d'avoir dû faire appel à des avocats. Les frais généraux sont beaucoup trop élevés. Il est essentiel de les réduire. Nous devons trouver une méthode plus efficace de gestion de nos ressources humaines afin de réaliser le programme plutôt que d'administrer des ententes de contribution ou de consacrer toute notre énergie à l'administration financière.
Je pense que si nous voulons aider les jeunes Autochtones, il sera nécessaire d'améliorer l'infrastructure. Il sera nécessaire de mettre en place des installations sportives plus modernes et un théâtre. Il est nécessaire de mettre à leur disposition un établissement dont ils puissent être fiers.
L'autre ingrédient que je considère comme essentiel pour aider les jeunes Autochtones est ce que j'appelle le «mentorat». Le mentorat ne consiste pas uniquement à être un bon patron; le jeune doit être encadré par des personnes qui sont prêtes à lui donner leur amitié et à l'aider à progresser dans sa carrière. À mon avis, un mentor est essentiel pour aider un jeune à faire son chemin dans la vie.
Le dernier commentaire que je voudrais faire concerne la coopération. Nous sommes trop souvent témoins d'affrontements entre les divers paliers de compétence; je pense qu'il est nécessaire de mettre fin à cette concurrence et d'instaurer un engagement et une coopération à long terme dans le cadre des programmes. Il est nécessaire d'exprimer les difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes Autochtones, sinon nous ne serons pas en mesure de résoudre le problème. Il est nécessaire de faire preuve de détermination et de s'attaquer aux problèmes urgents qui touchent les jeunes Autochtones.
Je tente de démontrer qu'il n'est pas possible d'atteindre cet objectif dans le contexte de chaque programme. Il faut intégrer les divers programmes. Il faut adopter une approche stratégique. Quand on rédige un rapport, on pourrait croire que le programme est efficace, mais je pense qu'il n'est pas possible d'établir un très bon rapport si l'on n'arrive pas à exposer ses projets dans les grandes lignes. Je vous remercie pour votre attention.
Le sénateur Tkachuk: Monsieur Shead, vous avez mentionné qu'il était nécessaire d'établir une infrastructure. Comment est-ce possible?
M. Shead: On peut procéder comme nous l'avons fait pour le centre autochtone. Lorsque nous avons construit le centre autochtone, nous n'avons pas engagé un groupe d'architectes et d'ingénieurs. Au début, ce sont des autochtones qui ont fait les travaux de démolition et, à la fin des travaux, la contribution des Autochtones représentait à peu près 300 000 heures de travail. L'édifice fait partie de la collectivité et la collectivité est associée à l'édifice. Ce sont les Autochtones qui ont payé et qui ont travaillé, même si c'était une gare du Canadien Pacifique.
Le sénateur Tkachuk: C'est précisément la question que je voulais poser, mais vous êtes très perspicace et vous m'avez devancé. Est-ce que certaines personnes ont participé au processus pour réaliser ces exploits?
M. Shead: Oui, et c'est ainsi que le centre autochtone a démarré. Il a démarré avec l'aide de personnes extraordinaires.
Le sénateur Tkachuk: Je ne sais pas très bien ce que vous entendez par là.
M. Shead: Voyons si je peux vous donner des explications un peu plus précises.
Le sénateur Tkachuk: Les Autochtones ne se sentent-ils pas chez eux dans la ville de Winnipeg et dans les institutions qui sont déjà en place?
M. Shead: Non. Dans la ville, plusieurs collectivités ont créé ce que l'on appelle de petits campus d'où les membres de ces collectivités sont sortis pour faire partie de la collectivité urbaine. L'Asper Jewish Community Campus, par exemple, est un haut lieu pour la communauté juive.
La situation est la même ici ou dans toute autre ville où les Autochtones sont nombreux. Comme l'a mentionné mon collègue, 60 000 Autochtones est un nombre considérable. Le problème est que nous ne bénéficions pas de la même vigueur ni de la même attention que les autres membres de la communauté.
Le sénateur Tkachuk: Qu'est-ce qui pourrait améliorer la situation? Quelles sont les possibilités en ce qui concerne les facteurs politiques qui interviennent dans une telle entreprise? Je pose la question en raison des rivalités politiques entre groupes métis.
M. Shead: Ah oui.
Le sénateur Tkachuk: Comprenez-vous où je veux en venir?
M. Shead: Oui.
Le sénateur Tkachuk: C'est la même rivalité qu'entre Orthodoxes et Catholiques et, tant que l'on n'aura pas réglé ces problèmes, on n'arrivera jamais à atteindre l'autre objectif.
M. Shead: C'est tout à fait exact, sénateur. Les rivalités politiques interviennent parce que c'est une question de compétence.
Les Premières nations sont dans une situation difficile pour ce qui est d'adopter une approche globale dans un milieu urbain. À Winnipeg, presque toutes les bandes et presque toutes les Premières nations du Manitoba, ainsi que plusieurs autres de l'extérieur de la province, sont représentées. Qui a compétence sur ces personnes?
Le chef de la bande Peguis n'abandonnera pas sa compétence sur son peuple à quelqu'un d'autre de la ville de Winnipeg. La question des compétences pose par conséquent un problème, j'en conviens. La situation est analogue en ce qui concerne les Métis.
Je pense qu'il y a une possibilité de coopération pour la fourniture des services aux personnes qui veulent faire leur vie en ville parce que je pense que lorsqu'on décide d'aller s'établir en milieu urbain, on le fait dans l'espoir d'y trouver la paix et le bonheur. Ces personnes sont à la recherche d'un nouveau mode de vie qu'elles n'avaient pas dans leur collectivité.
Ce principe n'est pas valable uniquement pour les Autochtones. Certains agriculteurs quittent la terre pour aller s'établir dans des localités urbaines, en quête d'une vie meilleure.
En fait, les débouchés économiques sont inexistants dans la collectivité autochtone. Les Premières nations en particulier investissent beaucoup dans l'éducation et envoient leurs enfants en milieu urbain pour faire des études postsecondaires.
Le sénateur St. Germain a demandé si nous avions accès à un nombre suffisant de personnes ayant la formation nécessaire pour devenir agents de police. Je dirais que nous avons tout ce qu'il faut pour toutes les fonctions. Encore faut-il nous donner l'occasion d'occuper ces postes.
En 1975, j'ai été détaché de la force maritime pour diriger le Bureau de recrutement des Autochtones de la Commission de la fonction publique; notre objectif était de recruter des Autochtones pour la fonction publique du Canada. On avait alors de la difficulté à trouver des Autochtones pour occuper les postes; ce n'est plus le cas à l'heure actuelle. Des dizaines de milliers d'étudiants autochtones qui font des études postsecondaires sont aptes, disposés et prêts à occuper n'importe quel emploi de professionnel.
La présidente: Êtes-vous affiliés à l'Indigenous Sports Council?
M. Bruce: Oui. C'est notre organisme qui était chargé de présenter la soumission en 1998-1999 et les coprésidents siègent au conseil exécutif, avec M. Shead, pour les Jeux autochtones de l'Amérique du Nord. Nous occupons actuellement des sièges au sein de l'exécutif des Jeux.
La présidente: Je suis une Aînée de l'Indigenous Sports Council pour l'Alberta.
Aujourd'hui, quelqu'un était préoccupé par le fait que nous étions censés parler uniquement des jeunes. Notre sujet d'étude est les jeunes Autochtones urbains, mais nous avons l'intention de discuter des problèmes des Autochtones de tout âge, pas uniquement des jeunes.
Nous avons examiné les lacunes dans les services destinés aux jeunes Autochtones urbains. Nous avons conclu que nous devions communiquer avec les organismes pour déterminer quelles sont ces lacunes et nous assurer que les programmes sont accessibles aux enfants et aux jeunes qui en ont besoin.
Nous avons entendu les représentants de nombreux organismes de jeunes, mais un pourcentage important de l'information dont nous avions besoin nous a été fournie par les institutions et les organismes qui offrent des services aux jeunes. Ils ont mentionné des faits et des chiffres intéressants en ce qui concerne le décrochage scolaire, les Autochtones dans les centres de détention pour jeunes et la grossesse chez les adolescentes. Les organismes et les jeunes eux-mêmes nous ont également communiqué des informations très intéressantes. Nous avons appris que les organismes font des miracles pour de nombreux jeunes de la région.
J'ai pris un repas au restaurant de votre centre; c'était délicieux. Je constate que vous faites également de la formation dans ce secteur. L'école est à l'étage.
Vous arrangez-vous avec les écoles pour faire participer les jeunes Autochtones à des activités sportives?
M. Bruce: Nous ne cherchons pas des enfants qui participent déjà à des programmes structurés, mais des enfants qui ont besoin de l'orientation que peut donner l'Achievement Centre.
La présidente: Qui finance vos programmes?
M. Bruce: Le Centre urbain polyvalent pour les jeunes Autochtones fournit un pourcentage important des fonds nécessaires; nous recevons également des fonds des gouvernements provinciaux, de Neighbours Alive, de Aboriginal Northern Affairs, de la municipalité de Winnipeg, du Centre for Aboriginal Human Resource Development et de la Winnipeg Foundation.
La présidente: Recevez-vous un appui efficace de tous les paliers de gouvernement?
M. Bruce: Oui.
La présidente: Recevez-vous de l'aide des organismes communautaires?
M. Bruce: Oui. J'ai été très heureux d'apprendre que le Centre urbain polyvalent pour les jeunes Autochtones a maintenu son financement pour au moins encore un an.
La présidente: Nous n'avons entendu que des éloges au sujet des fonds octroyés par ce centre et de ce que l'on en fait.
Le sénateur Pearson: Je pense que les programmes sportifs et récréatifs sont essentiels au développement harmonieux et sain des jeunes, et surtout des jeunes Autochtones. Ken Dryden m'a dit un jour que ce qui est formidable dans les activités sportives, c'est qu'on apprend à perdre.
Il est nécessaire de donner l'occasion de commettre des erreurs parce que c'est ce qui aide les gens à apprendre. C'est particulièrement vrai en ce qui concerne les jeunes parce que cela leur donne l'occasion de faire contrepoids à certains problèmes plus graves comme les bandes. Si l'on veut avoir un sentiment d'appartenance et un sentiment de famille, les activités sportives sont idéales.
Dans tous les programmes axés sur les jeunes à risque, le défi est de leur donner la possibilité de pratiquer des sports peu coûteux. Fort heureusement, beaucoup d'enfants aiment le football, qui n'est pas un sport très coûteux.
Nous élaborons des programmes pour les enfants pauvres depuis plusieurs années; ils ont malheureusement été envahis par les enfants issus de familles de la classe moyenne. Les pauvres ne peuvent plus participer aux programmes sportifs parce que les frais d'adhésion ont augmenté en raison de la capacité qu'ont les enfants de familles de la classe moyenne de payer davantage.
Comment réglerez-vous ce problème?
Comment réglerez-vous la question du coût de l'équipement pour les sports d'hiver? Est-il possible d'obtenir de l'aide ou de s'adresser à des équipes de hockey importantes pour obtenir des fonds?
M. Bruce: Nous avons posé cette question dans notre sondage et les résultats ont révélé qu'un très petit nombre d'enfants possèdent de l'équipement pour les sports d'hiver. Il ne sera pas aussi facile qu'on ne le pense généralement de leur donner accès aux activités sportives régulières. C'est une question de coût.
Les activités sportives régulières sont parfois coûteuses. Une lutteuse autochtone qui a remporté les compétitions provinciales m'a appelé aujourd'hui même pour me demander des fonds pour participer à la compétition nationale. Elle avait besoin d'un billet d'avion qui coûte 230 $ et du montant nécessaire pour payer le droit d'inscription qui est de 65 $. C'est un cas parmi d'autres de personne qui a besoin d'aide.
Nous étudions les possibilités de partager l'équipement. Le hockey est très coûteux. Nous mettrons bientôt en place un programme de hockey avec les Manitoba Moose. Nous devrons fournir de l'équipement à 30 enfants. Il s'agit d'un projet pilote et nous verrons les résultats. Nous nous inquiétons pour l'avenir et nous nous demandons comment nous pourrons fournir un équipement complet de hockey à ces enfants; un équipement complet coûte environ 500 $.
Il n'y a pas de solution miracle. Nous encourageons les jeunes à participer aux activités sportives régulières sans savoir s'ils pourront continuer plus tard ou s'ils devront arrêter pour des raisons financières. Si l'enfant manifeste un vif intérêt, il devrait avoir la possibilité de continuer de participer. C'est notre rôle de le signaler au public et de chercher des contributions.
M. Pearson: Un psychiatre, Dan Offord, a fait une étude sur ces questions. Il est le directeur général du Canadian Centre for Studies of Children at Risk. Je vous recommande de lire ses travaux à ce sujet. C'est toujours utile d'apprendre ce que d'autres personnes ont découvert et de ne pas devoir tour réinventer.
Il y a des années, M. Offord a mis en place à Ottawa un programme qui recrutait des jeunes dans les quartiers à logements subventionnés de la ville. Ce fut une réussite éclatante. Nous faisons face aux mêmes défis que lui. Nous devons nous occuper de recrutement et nous devons généralement aller prendre les jeunes chez eux et les reconduire. Nous devons être des mentors, des enseignants, des chauffeurs et des entraîneurs. C'est un défi de taille.
Dans le cadre de son projet, M. Offord a examiné la question de très près et a constaté que c'était très rentable. Les coûts de surveillance policière dans le quartier avaient considérablement diminué pendant que son programme était en place. Tout le quartier en a bénéficié étant donné que le nombre de fausses alarmes et de cas de vandalisme avait diminué. On s'est rendu compte que le programme s'autofinançait. Lorsque le programme a été suspendu, pour des raisons indépendantes de la volonté de M. Offord, le taux de criminalité juvénile s'est remis à augmenter.
Le sénateur Johnson: Monsieur Bruce, combien d'athlètes et combien d'enfants participent à vos programmes?
M. Bruce: Environ 2 000 enfants sont passés par le Winnipeg Aboriginal Sports Achievement Centre. Le nombre de participants au programme d'été est d'un millier et, en ce qui concerne notre programme automne-hiver, le taux de participation est de 40 enfants par soirée, quatre jours par semaine. Nous avons également mis en place un programme de cours de natation et de cours de patinage pour débutants et notre Youth Achievement Program. Notre Winter Adventures Program sera mis en place cette année. Notre établissement tourne actuellement à pleine capacité.
Le sénateur Johnson: Est-ce que des athlètes handicapés mentaux participent au programme?
M. Bruce: Par le biais d'un autre service, nous gérons les Jeux d'été autochtones du Manitoba et nous avons un volet Jeux Olympiques spéciaux, mis en oeuvre avec le concours des Jeux Olympiques spéciaux du Manitoba.
Le sénateur Johnson: Organisez-vous également des Jeux Paraolympiques?
M. Bruce: Non. Nous participons aux Jeux Olympiques spéciaux dans le cadre des Jeux autochtones de l'Amérique du Nord.
Le sénateur Johnson: C'est formidable. Je vous remercie.
Le sénateur Léger: Monsieur Bruce et monsieur Shead, j'ai une brochure intitulée Manitoba Aboriginal Sport and Recreation Council. Cependant, sur le programme, vous êtes mentionné sous le nom de Manitoba Aboriginal Sports Council. Les deux organismes ont-ils été séparés?
M. Bruce: Non.
Le sénateur Léger: Votre énoncé de mission consiste à aider les Manitobains à participer aux diverses activités sportives et récréatives, au niveau choisi. Il n'y est pas fait mention des arts. Est-ce parce que vous êtes spécialisés dans les sports?
M. Bruce: Non. Le Sports Achievement Centre vient de l'acronyme du WASAC, le Winnipeg Aboriginal Sports Achievement Centre. Nous proposons des activités culturelles et artistiques à nos enfants, mais ce volet du programme n'est pas mentionné dans le nom.
Les sports occupent toutefois une place un peu plus importante à cause du rôle que nous avons joué dans les Jeux autochtones de l'Amérique du Nord, qui sont axés uniquement sur les sports. Nous avons établi un vigoureux partenariat avec les dirigeants des activités récréatives des diverses collectivités autochtones de la province.
Le sénateur Léger: C'est partout ainsi. Le mot «sport» est toujours indiqué en majuscules et le mot «arts» en minuscules. Je suis heureuse d'apprendre que les arts font partie de votre programme.
Avez-vous un volet artistique dans vos jeux d'été du 1er juillet?
M. Bruce: Les jeux comprennent un volet culturel. Nos activités ne sont toutefois pas axées spécifiquement sur les arts.
Le sénateur St. Germain: Organisez-vous des compétitions de gymnastique?
Le sénateur Léger: Non, n'allons pas plus loin.
Le sénateur Tkachuk: Faites-vous du saut à la perche?
Le sénateur Léger: J'aimerais que petit à petit, chaque fois qu'il est question de sports, on signale également l'aspect artistique, même s'il n'est pas particulièrement développé.
Je pense notamment à une cérémonie d'ouverture et à une cérémonie de fermeture ainsi qu'à un spectacle de mi- temps. Les arts culturels peuvent intervenir pendant ces périodes.
M. Bruce: Nous aimons beaucoup exprimer notre culture autochtone et c'est ce que nous faisons à l'occasion des cérémonies d'ouverture et de fermeture.
Le sénateur Léger: C'est pourquoi je vous recommande d'annoncer l'aspect culturel des jeux. La culture enrichit les jeux et fait prendre conscience aux personnes qui ne sont pas particulièrement sportives que les arts jouent un rôle important.
M. Bruce: Oui, j'en conviens. Je pense que nous avions un excellent spectacle à la cérémonie d'ouverture des Jeux autochtones de l'Amérique du Nord. Vingt-quatre mille personnes ont vu le spectacle culturel et les divers artistes sans pour autant suivre les activités sportives.
Le sénateur Léger: Vous pourriez peut-être ajouter «et les artistes» à votre publicité. Les politiciens pourraient procéder ainsi pour toutes les campagnes électorales qui se dérouleront à partir de maintenant. Ils ont tous besoin d'un peu de publicité. Je vous remercie, monsieur Bruce.
Monsieur Shead, est-ce que nous protégeons nos visionnaires? Est-ce que les visionnaires s'épuisent à cause de leur dévouement et de leur engagement envers les programmes? Investissons-nous suffisamment dans la protection des personnes qui sont un atout précieux?
M. Shead: Vous avez posé une question très pertinente, sénateur. En raison de leur nature même, les organisations autochtones sont de taille relativement petite et les ressources humaines qu'elles emploient pour réaliser leurs programmes peuvent être épuisées assez rapidement par des changements ou en raison d'autres circonstances. Des personnes de talent s'en vont parfois très vite pour relever d'autres défis. Un bon chef a souvent tendance à vouloir relever des défis plus importants quand l'occasion se présente.
Je pense qu'il est nécessaire de réduire les risques de perdre les gens en concentrant et en coordonnant nos efforts afin que, lorsque nous avons un bassin de personnes dans un certain secteur, celles-ci aient des perspectives de carrière, un peu comme dans les Forces armées canadiennes où l'on peut avoir une promotion avec des responsabilités supplémentaires tout en continuant à travailler pour le même organisme.
La plupart de nos organisations n'ont même pas de plan de sécurité d'emploi pour le personnel. Elles n'ont pas de caisse de retraite ni d'avantages sociaux; par conséquent, elles ont beaucoup de difficulté à conserver leur personnel. En outre, le personnel n'est pas bien rémunéré.
Pour tenter de régler ce problème, nous devons nous tourner vers l'administration. Comment traite-t-on les personnes qui sont concernées? Nous prenons bonne note de votre question. Je pense que c'est un facteur que nous avions négligé.
Nous avons éparpillé nos efforts entre un nombre tellement élevé de services et d'organismes que nous n'avons pas la capacité de les réunir. C'est une situation comparable à celle des superministères de l'époque de M. Trudeau. Ce n'étaient pas des ministères, mais c'étaient des organismes de coordination sans budget de fonctionnement. Notre situation est analogue.
Nous devons trouver une possibilité de regrouper les organismes pour ne former qu'un seul département doté d'un budget et de ministères. Le centre autochtone et tous les autres organismes devraient être regroupés pour ne former qu'une seule et même entité placée sous la direction d'un seul conseil d'administration, plutôt qu'une vingtaine. Il est nécessaire de mettre en place un centre de gestion des ressources humaines commun pour réaliser certains projets que nous avons mentionnés. Par exemple, un directeur de programme pourrait être promu au poste de directeur général d'un groupe puis à celui de président de la société. Les possibilités sont infinies. Nous n'avons malheureusement pas encore atteint ce stade-là.
Le sénateur Léger: Nous pourrons inclure votre recommandation lorsque nous terminerons nos travaux, ce qui vous permettra peut-être d'atteindre plus rapidement ce stade.
M. Shead: Il faudrait examiner ce type de possibilités. Il est essentiel d'être tourné vers l'avenir.
Le commentaire que vous avez fait au sujet de la culture est très important et je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que nous ne faisons aucun effort dans ce domaine. Nous en faisons.
Nous avions un volet culturel très important dans les Jeux autochtones de l'Amérique du Nord. Un grand nombre de personnes ont assisté à l'activité culturelle. Des activités sportives avaient été organisées pour les participants, les officiels et les entraîneurs, mais les événements culturels avaient été organisés pour tous, y compris les visiteurs et les spectateurs. De nombreux musiciens et artistes ont participé à cet événement. Nous avons un volet culturel, mais nous ne l'annonçons pas dans notre publicité.
Le sénateur Léger: Il faudrait peut-être se mettre à l'annoncer.
M. Shead: Nous faisons de la publicité, mais nous ne le précisons pas.
Le sénateur Léger: Je pense qu'il faudrait s'y mettre un jour.
Le sénateur St. Germain: Les villes canadiennes ont des entreprises culturelles très importantes.
Le sénateur Léger: Nous connaissons tous les Ballets de Winnipeg. J'aimerais que toutes les autres compagnies de ballet aient un titre également.
Le sénateur Tkachuk: L'Ouest n'est pas défavorisé sur le plan culturel.
Le sénateur Chaput: Quel est le pourcentage de filles par rapport aux garçons dans votre campagne de recrutement?
M. Bruce: De nombreuses personnes sont étonnées de constater que 55 p. 100 des jeunes que nous recrutons sont des filles.
La présidente: Je vous remercie pour ces exposés très intéressants. Je vous souhaite bonne chance.
La séance est levée.