Pour 130 dollars de plus...
Mise à jour sur la crise financière des Forces canadiennes
UNE VUE DE BAS EN HAUT
Une injection de fonds pour commencer
1
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Le Comité répète
que la hausse de 4 milliards de dollars des dépenses au titre de la défense
recommandée dans notre premier rapport est un minimum
et qu’il faut y procéder immédiatement. |
Cette
hausse représente une augmentation d’environ 130 $ par Canadien des dépenses
au titre de la défense, qui passent ainsi à quelque 525 $. C’est un
quart seulement de ce que l’Américain moyen dépense au même titre et légèrement
plus du tiers de ce qu’y consacrent les Britanniques, qui, tout comme les
Canadiens, doivent également financer un système national de soins de santé.
Mais
le Comité ne demande pas aux Canadiens de dépenser autant que les Américains
ou les Britanniques.
Il ne
demande pas non plus que le pays se classe parmi ceux qui consacrent le plus à
la défense. Ces 130 $ de plus ne nous font monter que d’un échelon
parmi les pays de l’OTAN et passer devant le Portugal, c’est-à-dire
nous classer 12e sur 18.
Si le
Comité sollicitait une hausse par habitant de 200 $, nous serions en 11e place,
devant l’Italie et le Portugal. Mais ce n’est pas ce que le Comité demande.
Si le
Comité prévoyait une hausse de 400 $ par habitant, cela nous placerait en
7e place.
Mais
ce n’est pas ce que le Comité demande.
Le Comité
demande au gouvernement canadien de consacrer 130 $ de plus par habitant
aux dépenses militaires pour que notre principale police d’assurance sur le
plan international – notre armée – soit à un niveau tel
qu’elle ne soit pas constamment au bord du précipice, dépouillée
qu’elle est bien souvent de la formation ou de l’équipement qui
assureraient sa sécurité ou son succès.
Recommandations – Partie II
Retraite stratégique :
Pour « souffler »
Le
terme de « retraite » a des connotations négatives dans quasiment
tous les contextes, notamment militaire. Dans ce dernier contexte, toutefois,
l’expression « retraite stratégique » est plus positive, parce
qu’elle décrit une situation dans laquelle l’armée se retire pour obtenir
un avantage qui la mènera à une victoire stratégique.
Rappelez-vous
le célèbre boxeur Mohammed Ali et ses succès sur le ring. Il désignait
l’une de ses meilleures tactiques de Rope-a-Dope, qui signifiait se laisser
tomber dans les cordes pour feinter l’adversaire et retrouver son énergie
pour remporter le combat. C’est un peu ce que le Comité recommande aux Forces
armées canadiennes.
À la
lumière de la pénurie manifeste de personnel, de formation et d’équipement
dans les forces canadiennes, nous sommes désormais convaincus qu’il n’est
plus question de résoudre les problèmes militaires du pays avec une simple
injection de fonds.
Le
Comité estime qu’il est désormais impossible d’injecter simplement de
l’argent frais et des ressources pour créer rapidement une force capable de
s’acquitter des fonctions que l’armée canadienne peut s’attendre à
devoir assumer au cours des quelques prochaines années, surtout compte tenu du
fardeau opérationnel confié ces dernières années.
En bref, même si le gouvernement du Canada fait
face à ses obligations et injecte immédiatement 4 milliards de dollars
dans le budget global de la défense, cela ne suffira presque certainement pas
étant donné les multiples missions dont l’armée doit s’acquitter. Presque
autant que de fonds, l’armée a besoin du temps nécessaire pour se remettre
sur pied afin d’assumer les obligations qui lui ont été confiées en ce début
de XXIe siècle. Le Canada a besoin d’un moment de répit après s’être
acquitté de ses nombreuses responsabilités outre-mer, pour recruter, s’entraîner,
se ré équiper et repenser son rôle optimal compte tenu du climat actuel en
matière de conflits. Le Comité estime que les Forces armées canadiennes
ne pourront procéder à la restructuration, au réarmement et au renouveau dont
elles ont tant besoin à moins qu’elles n’abandonnent leurs obligations
actuelles outre-mer, ce qui semblera à certains assez extrême. .
|
Le
Comité recommande que toutes les forces armées canadiennes cessent leurs
activités outre-mer dès que les périodes de service en cours seront terminées.
Cela pourrait prendre jusqu'à six mois. Le
Comité recommande qu’après
cela aucune force ne soit déployée outre-mer pendant un minimum de 24 mois.
Cela représentera une suspension de 30 mois des déploiements[1].. |
Un
nouvel engagement à l’égard de nos alliés, un nouvel engagement à l’égard
du monde
Les périodes
de service durent normalement six mois. Donc, dans les six mois qui suivront la
mise en place par le gouvernement canadien de notre recommandation, toutes les
troupes canadiennes seront de retour sur le territoire nord-américain et seront
engagées dans le rétablissement des capacités à un niveau efficace.
Le
Comité entend déjà les critiques se plaindre que le Canada est en train de
passer outre à ses obligations à l’égard de ses alliés. Or, c’est tout
à fait l’inverse. Nous devons nous attacher à collaborer avec nos alliés
pour assumer notre véritable rôle canadien.
L’image
du Canada à l’étranger est déjà ternie. Il est peu probable que le retrait
recommandé n’aggrave la situation — en fait nous y gagnerons sans doute en
crédibilité, puisque ce sera le signe que nous nous attaquons à un grave
problème. En définitive, la capacité du ministère des Affaires étrangères
et du commerce international de promouvoir les intérêts nationaux sera rehaussée
plutôt qu’affaiblie.
Notre
retrait influera sur les relations de travail que nous entretenons avec
l’OTAN, les Nations Unies et nos alliés. Le Comité est cependant convaincu
que la contribution de notre pays à ces relations est devenue si modeste
qu’il faut de toute urgence prendre des mesures draconiennes pour redevenir
aptes à jouer un rôle utile. C’est ainsi que le Canada sera de nouveau en
mesure de contribuer de manière significative à la stabilité du monde, rôle
qui lui revient de plein droit.
Que
les forces exsangues du Canada aient pu à l’occasion briller sur la scène
internationale depuis dix ans est un hommage à l’esprit et à la ténacité
qui ont animé les troupes plutôt qu’au soutien dont elles ont disposé. Or
on ne peut compter que sur l’esprit des forces armées canadiennes. Nos
troupes et nos alliés méritent un renouvellement de nos capacités et plus
vite le Canada s’y attellera, le mieux ce sera.
Le
Canada assure actuellement une mission de coalition dans le combat contre le
terrorisme, deux missions à l’OTAN et huit missions aux Nations-Unies. Opération
Apollo, désignation de l’intervention canadienne dans ce combat, regroupe
1068 soldats. Le Canada a affecté 1579 soldats à l’Opération Palladin,
dont le but est de ramener la stabilité en Bosnie Herzégovine. Il a affecté
un officier à l’opération de l’OTAN visant à récupérer des armes des
factions rebelles en Macédoine. Des huit missions des Nations Unies, la plus
large est constituée des193 personnes affectées au plateau du Golan. Pour en
savoir plus sur les missions canadiennes outre-mer, voir l’Annexe 5.
Le
Comité a entendu pendant des centaines d’heures le témoignage de chefs
militaires à Ottawa et de militaires de tous les grades dans les 15 bases
et installations militaires éparpillées un peu partout dans le pays. À la
lumière des témoignages que nous avons entendus ainsi que de l’analyse de la
situation militaire dans l’ensemble du monde que nous avons menée, nous ne
pouvons que constater que les Forces canadiennes ont des effectifs
insuffisants, des responsabilités trop importantes, un financement inadéquat
et une santé précaire.
Le zèle
des forces armées canadiennes n’est pas remis en question. Nos chefs
militaires et leurs troupes continuent de démontrer un dynamisme très net et
de trouver des moyens novateurs d’exécuter leurs missions. Mais une armée à
bout de souffle ne peut continuer de se montrer à la hauteur des périls. On en
demande trop à un personnel trop limité, doté de ressources trop maigres.
Les mécanismes
de sécurité intégrés – congés adéquats, roulement raisonnable et
formation régulière – ont été abandonnés. Il s’agit des mécanismes
conçus pour préserver la vie conjugale, la santé mentale et physique et le
rendement professionnel des troupes canadiennes.
L’érosion
de ces mécanismes s’est traduite par des pertes inhabituelles dans le
personnel formé ces dernières années. D’ailleurs, l’armée de l’air a
indiqué dans son plan d’activités pour 2001 :
«La FA est à un point tournant dans le sens qu'elle sera bientôt à
court en matière de ressources humaines et qu'aucun équipement ni aucun
financement ne pourra combler ce déficit à court terme. L'exode du personnel
navigant qualifié et de membres d'autres GPM essentiels au déploiement des
capacités de la FA reste constant. Les niveaux d'expérience dans tous les
effectifs sont en passe de devenir critiques, notamment l'effectif des opérations
d'hélicoptères tactiques, des escadrons d'appui tactique, du PHM et des aéronefs
de patrouille maritime.»
Sur
les 567 pilotes ayant des « obligations contractuelles » qui ont répondu
à un sondage officieux, la moitié environ a déclaré s’attendre à quitter
les Forces une fois expirée la période de libération avec restriction (en
2003)[2].
D’autres métiers de l’armée de l’air sont également sous le niveau préférentiel
de dotation (NPD), parfois de façon critique. Les métiers d’appui aux
services techniques les plus menacés sont dans le groupe professionnel
militaire 640 (technicien en réfrigération, technicien en réfrigération,
technicien Groupes électrogènes, technicien Plomberie et chauffage, technicien
Eau, produits pétroliers et environnement, technicien Construction, technicien
en construction) où six des sept métiers sont dans une situation jugée
critique, car l’effectif est bien inférieur au niveau préférentiel de
dotation. Selon le rapport de 2001, la sous-dotation du groupe professionnel
militaire 226 (technicien de systèmes d'information et de télécommunications
aérospatiales) est de plus de 25 % et continue de se détériorer. La
marine, et encore plus l’armée de terre, connaissent des pénuries du même
ordre.
Nos
chefs militaires ont des responsabilités vis-à-vis du public
Nos
chefs militaires, y compris les bureaucrates du ministère de la Défense
nationale, doivent présenter avec franchise aux comités parlementaires la manière
dont les Forces armées du pays sont censées accomplir toute la gamme de tâches
qu’elles doivent effectuer avec les ressources dont elles disposent. Le
gouvernement, pour sa part, doit les encourager à fournir en toute honnêteté
leur opinion professionnelle lorsqu’ils témoignent devant les comités
parlementaires — et non les décourager de le faire.
Le
Comité ne suggère pas aux militaires de patrouiller le pays pour faire
valoir les avantages d’une hausse des dépenses au titre de la défense, que
ce soit lors d’émissions télévisées, dans les journaux ou autrement. Mais
les comités parlementaires interrogent les témoins au nom de la population et
jouent un rôle consultatif dans le cadre de la prise décisions par le
gouvernement. Sans conseils honnêtes, les pouvoirs publics ne peuvent faire de
choix intelligents et les citoyens ne peuvent soupeser les avantages et les
inconvénients d’un investissement dans une protection militaire compétente.
Les
comités parlementaires comme le nôtre peuvent envoyer sans ménagement des
messages aux politiciens et à la population, mais la situation ne pourra s’améliorer
que si les chefs militaires ne cachent pas
l’état inquiétant de leur institution, l’un des principaux
instruments de maintien de la prospérité et de la sécurité au Canada.
On
nous a dit à plusieurs reprises à quel point il était décourageant pour les
membres des forces armées canadiennes d’avoir à écouter les politiciens présenter
une belle image de l’armée. Les simples soldats estiment que certains chefs
militaires « font semblant » publiquement pour faire plaisir aux
politiciens. Dans toute démocratie, l’armée relève de l’exécutif.
Personne au Comité ne souhaite voir les officiers supérieurs faire office de démarcheurs
auprès des pouvoirs publics pour qu’augmentent les dépenses militaires. Ceci
dit, la timidité n’est pas le type de vertu que nos politiciens devraient
encourager chez le personnel militaire haut gradé qui témoigne devant un comité
parlementaire.
Les
membres du Comité n’ont pas toujours été convaincus que les officiers supérieurs
et les bureaucrates qui témoignaient devant eux étaient parfaitement francs.
Les officiers supérieurs ont certes dit la vérité lorsqu’ils ont déclaré,
par exemple, que le Canada pouvait dépêcher un bataillon si nécessaire, mais
pas toute la vérité, si l’envoi du bataillon signifie une dégradation
encore plus nette des capacités militaires du pays.
Le
gouvernement des États-Unis n’hésite pas à dire à ses militaires qu’ils
doivent obéir aux dirigeants politiques; pourtant les militaires américains
sont également censés offrir leur plus honnête analyse aux comités du Congrès.
Le gouvernement canadien doit s’attendre à cette même honnêteté de la part
de ses militaires et l’encourager. Et, s’il encourage les officiers supérieurs
à dénigrer les recommandations de comités comme le nôtre pour la simple
raison qu’il les trouve déplaisantes, cela ira à l’encontre des
principes démocratiques.
|
Les Canadiens ont besoin de chefs militaires courageux sur le front législatif
tout comme ils ont besoin de soldats courageux sur le champ de bataille.
Ils ont aussi besoin de politiciens qui ont suffisamment d’objectivité
pour accueillir favorablement l’analyse réfléchie provenant du personnel
militaire de haut rang sur des grands dossiers. |
Il
faut reconnaître que certains hauts gradés ont tout de même exprimé
publiquement des préoccupations d’ordre général. Le lieutenant-général
Mike Jeffrey, chef de l’armée canadienne, s’est plaint du manque de
ressources pour pouvoir soutenir le large éventail de tâches auxquelles
l’armée doit faire face. Le vice-amiral Ron Buck, chef de la marine
canadienne, a tenté d’obtenir un soutien pour procéder de toute urgence au
renouveau de l’armée canadienne. Le général Ray Henault, chef d’état-major
de la défense, a déclaré que la situation n’était plus viable. Mais ce ne
sont que de faibles gémissements, couverts par la clameur qui monte de la
tribune où sont débattues les politiques des pouvoirs publics; ce qu’il
faut, c’est un véritable vacarme. Les voix les plus tonitruantes de l’armée
semblent se taire par loyauté mal placée.
Les
Canadiens doivent savoir ce que savent nos soldats
Tous
les soldats savent que leur formation en vue d’une meilleure performance
future souffre parce que des ressources trop minces sont éparpillées entre de
trop nombreuses « missions du jour ». Ils savent tous que les forces
armées canadiennes n’assument pas leurs fonctions comme elles le pourraient,
parce qu’elles sont mal formées, que leur équipement est mal entretenu et
qu’elles disposent de congés insuffisants pour avoir un état de santé et
les satisfactions personnelles nécessaires à un haut rendement. Mais ils sont
mal placés pour alerter la population canadienne. Leurs chefs le sont ou du
moins devraient l’être.
Qu’on
leur permette de faire leur travail
Le
nombre de congés de maladie que les militaires canadiens prennent a augmenté
considérablement au cours des dernières années parce que ceux-ci doivent
s’attaquer à des tâches qui sont trop nombreuses et trop lourdes par rapport
à la capacité des Forces canadiennes. Le 19 août 2002, CBC News a signalé
que la fréquence des congés de maladie pris dans les FC avait augmenté de 25
% entre 1999 et 2001. Les militaires nous ont formulé bien des plaintes au
sujet du manque de temps pour se regrouper et se perfectionner, mais ce n’était
pas là, pourtant, le principal objet de leur frustration.
|
Ils se plaignaient surtout du simple fait que les soldats ne pouvaient
pas être des soldats, que les marins ne pouvaient pas être des marins, que
les aviateurs ne pouvaient pas être des aviateurs parce que les Forces canadiennes manquaient de personnel et que les
techniciens ne pouvaient pas effectuer la maintenance en raison d’un manque
de fonds relativement à la maintenance et au matériel. |
Imaginez-vous
qu’il faille entraîner des troupes au tir de roquettes alors que seulement
deux des vingt militaires disposent de munitions chargées. Ainsi, les 18 autres
risquent de devoir tirer lors d’un combat sans avoir acquis l’expérience
pratique. L’entraînement virtuel est une perspective d’avenir, mais rien ne
saura jamais remplacer l’expérience pratique.
Le
rajeunissement des ressources
Selon
le Comité, une pause de deux ans dans les missions à l’étranger ne représente
qu’un point de départ visant à permettre aux Forces canadiennes de reprendre
leur souffle. Il faudra vraisemblablement la majeure partie de la décennie pour
redonner aux militaires la situation dans laquelle ils se trouvaient à la chute
du mur de Berlin en 1989. Il faut plus que quelques mois pour rétablir une
capacité atrophiée.
Une
telle pause permettrait au personnel clé − dont bien des membres ne
participeraient plus ainsi à des missions à l’étranger − de jouer un
rôle nécessaire afin de recycler et de rafraîchir les programmes de formation
des Forces canadiennes. En matière de formation, la capacité actuelle est
beaucoup trop faible pour que nous puissions accorder la priorité à cette
question, sans devoir ramener de l’étranger les membres de la Force régulière
pendant une période de temps prévisible.
Deux
ans ne suffiront pas pour restabiliser la Marine et la Force aérienne du
Canada. Cependant, il est possible de redresser considérablement la situation
de l’Armée de terre dans un tel laps de temps. Même si les lacunes actuelles
de l’Armée de terre sont encore plus criantes que celles de la Marine et de
la Force aérienne, il faut moins de temps pour former un membre de l’Armée
de terre. L’Armée de terre pourrait rétablir la situation dans ce délai de
deux ans si elle pouvait compter sur une planification et un financement
pertinents. C’est à tout le moins dans le domaine des possibilités, d’après
le Comité.
Il
faudrait maintenir la campagne de recrutement actuelle. Les Forces canadiennes
comptent 52 000 militaires entraînés et efficaces, soit 8 000
de moins que le niveau autorisé. Le recrutement est cependant inutile s’il ne
s’accompagne pas de la formation pertinente. Le Comité a été mis au courant
de situations où des recrues se tournaient les pouces parce que les Forces
canadiennes étaient peu en mesure d’assurer leur formation de base, ce qui
n’était certes pas la seule lacune décelée.
·
Il faut offrir de nouveaux cours de
perfectionnement professionnel aux militaires qui reviennent d’une mission à
l’étranger, bon nombre d’entre eux n’ayant pas eu droit au recyclage
habituel en raison du rythme des affectations dans le cadre des missions à l’étranger
ces dernières années.
·
Aux militaires dont la vie familiale a été
mise à rude épreuve par le stress découlant du rythme effréné des
affectations répétitives à l’étranger, il faudrait donner davantage
l’occasion de « réintégrer » leur famille.
·
Il faudrait prendre les mesures pour permettre
aux planificateurs du MDN d’élaborer et de mettre en œuvre les programmes
innovateurs qui s’imposent.
·
Il faudrait embaucher davantage
d’administrateurs de projet pour faciliter l’acquisition et l’utilisation
des nouveaux biens d’équipement.
·
Il faudrait finalement favoriser l’exécution
du programme de maintenance préventive qui s’impose à l’égard de
l’ensemble du matériel.
·
Lorsqu’il n’y a aucune urgence, il faudrait
autoriser les militaires à prendre leurs congés annuels en fonction de leur
vie familiale et personnelle au lieu de leur imposer rigoureusement des périodes
comme c’est le cas actuellement.
·
Les planificateurs militaires devraient pouvoir
se pencher notamment sur les engagements contractés et les plans opérationnels
pour évaluer la capacité légitime du Canada de respecter ses obligations
actuelles et éventuelles.
·
Il faudrait affecter les hautes autorités
militaires à des tâches autres que la « gestion de crise » et leur accorder
aux le temps nécessaire leur permettant d’évaluer les capacités et de
donner au gouvernement des conseils stratégiques sur l’avenir des Forces
canadiennes.
|
Aucune des recommandations précédentes n’a la
moindre chance d’être mise en œuvre à moins que les organismes centraux
du gouvernement canadien – en l’occurrence, le Cabinet du Premier
ministre, le Bureau du Conseil privé, le Conseil du Trésor et le ministère
des Finances – fassent front commun pour accélérer le rajeunissement
des ressources des Forces canadiennes au lieu d’y offrir une résistance. |
La
Marine et la Force aérienne auront besoin de plus de temps
La
capacité de la Marine canadienne est taxée, principalement en raison des récentes
opérations lors de l’invasion de l’Afghanistan. Il faudra beaucoup plus que
deux ans pour augmenter l’effectif opérationnel de la Marine canadienne.
Cette période de deux ans permettra simplement au personnel actuel de prêter
main-forte dans la formation des recrues et le perfectionnement des marins qui
n’ont pas pu rafraîchir leurs connaissances en raison de leurs nombreuses
affectations dans le cadre des différentes missions.
Les
recrues de la Marine canadienne nécessitent souvent plus de formation que
celles de l’Armée de terre. Par exemple, il faut jusqu’à six ans pour
former un ingénieur naval. La Force aérienne se trouve dans une situation
analogue. Elle a besoin de plus de techniciens et de pilotes. Il faut deux ans
et demi pour qu’un pilote acquière les qualifications élémentaires par
rapport à son appareil. La formation des techniciens nécessite environ 18 mois,
après lesquels ces derniers doivent encore être supervisés dans l’exécution
de leur travail.
Les
Canadiens ne veulent pas dépenser 130 $ chacun simplement pour permettre
aux militaires canadiens de recouvrer leur estime de soi. Cependant, le Comité
croit qu’ils seraient prêts à ce que cette somme soit consacrée à la
création d’un organisme capable d’améliorer la protection de notre
pays dans un monde plus sûr. Nous vous proposons donc la liste des améliorations
que les citoyens devraient espérer de l’accroissement du budget militaire de
quatre milliards de dollars et de la pause de deux ans dans les missions à l’étranger.
Une injection de un
milliard de dollars dans l’exploitation et la maintenance
donnerait les résultats suivants :
· DES TROUPES MIEUX ENTRAÎNÉES : une meilleure instruction collective et une meilleure instruction
individuelle, de façon à ce que les recrues ne se tournent pas les pouces en
attendant de devenir des soldats utiles, à ce que la Réserve porte sa capacité
au niveau de celle de la Force régulière et à ce que les membres de la Force
régulière puissent se recycler assez souvent pour maintenir leurs compétences
et en acquérir de nouvelles en fonction d’une augmentation des opérations
maritimes épineuses découlant de la guerre moderne;
·
UNE MEILLEURE SURVEILLANCE AÉRIENNE : augmentation des heures de vol pour toute la flotte d’aéronefs, ce
qui améliorerait la surveillance des terres et des eaux canadiennes,
maintiendrait les compétences de vol et favoriserait la formation ainsi que
l’entraînement;
·
DES NAVIRES POUVANT PRENDRE LA MER : augmentation
du nombre de jours de mouillage et fin de l’inutilisation des navires en
raison du manque de fonds et de personnel;
·
DU MATÉRIEL MILITAIRE EN ÉTAT DE FONCTIONNMENT : un ravitaillement en pièces de rechange, de façon à ce que le matériel
ne soit pas inutilisé parce qu’il n’est plus en état de fonctionnement et
la fin de la cannibalisation pour faire fonctionner du matériel;
·
LA FIN DE L’INSALUBRITÉ DU LOGEMENT : une amélioration du programme de maintenance de tous les biens d’équipement,
des bureaux et des logements afin d’inverser la tendance à la détérioration
qui s’est manifestée au cours de la dernière décennie;
·
LA
PARTICIPATION À LA PROTECTION DE NOTRE CONTINENT : un retour à la formation au niveau du bataillon entre les Forces
canadiennes et ses alliés (particulièrement les forces américaines), de façon
à ce que toutes les unités de commandement et tous les groupes opérationnels
soient en mesure de collaborer pour faire face à une menace d’urgence,
particulièrement en ce qui concerne la défense de l’Amérique du Nord.
Une injection d’un
montant variant entre 675 et 800 millions de dollars dans l’embauche et
le perfectionnement du personnel militaire, donnerait les résultats suivants :
·
UN NOMBRE SUFFISANT DE MILITAIRES POUR JOUER UN RÔLE PERTINENT SUR LA SCÈNE
INTERNATIONALE :
des Forces canadiennes dont l’effectif entraîné et efficace passerait de 52 000
à 75 000, ce qui contribuerait à offrir une solution à l’épuisement
et au faible taux de rengagement, qui sont imputables à l’affectation d’un
nombre trop restreint de militaires à l’exécution de tâches trop nombreuses
à un rythme trop épuisant;
·
DES ÉCONOMIES PAR RAPPORT AU TAUX DE ROULEMENT : des Forces canadiennes qui pourraient mieux
recruter et conserver leur effectif tout en accordant des primes aux spécialistes,
ce qui leur permettrait de garder leur personnel de qualité;
·
UNE DIMINUTION DU NOMBRE DE MILITAIRES NE FAISANT QUE JOINDRE LES DEUX
BOUTS : des militaires de
grades inférieurs qui auraient droit à certaines hausses de solde, afin de réduire
l’injustice, de rehausser le moral et d’améliorer la qualité de la vie
familiale;
·
UNE DIMINUTION DE L’ÉCLATEMENT DES FAMILLES MILITAIRES : une gamme d’améliorations aux logements
familiaux en vue d’atténuer le stress qu’impose aux couples l’une des
professions les plus éprouvantes.
Une injection d’un
montant variant entre 2 et 2,325 milliards de dollars dans les programmes
d’investissement donnerait les résultats suivants :
·
DES HÉLICOPTÈRES
ASSURANT UNE PROTECTION ADÉQUATE À NOS FRÉGATES : la mise en œuvre immédiate du projet d’hélicoptère maritime pour
remplacer, d’ici 2005, les vieux appareils Sea King, qui passent plus de
temps dans les ateliers de maintenance que dans les airs;
·
LA FIN
DU QUÉMANDAGE AUPRÈS DES AUTRES PAYS :
l’amélioration immédiate de la capacité de transport stratégique aérien
et maritime, de façon à ce que les troupes canadiennes puissent être
transportées sur le théâtre des opérations en cas d’urgence sans qu’il
faille louer, emprunter ou quémander les ressources d’autres pays;
·
DE
MEILLEURS MOYENS DE RECUEILLIR LE RENSEIGNEMENT :
la mise en œuvre accélérée du projet portant sur le renseignement, la
surveillance et la reconnaissance, ce qui permettrait d’améliorer notre
capacité d’obtenir et d’analyser le renseignement, peut-être la mission
militaire la plus essentielle afin de contrer les menaces asymétriques de la
guerre moderne;
·
UNE
SURVEILLANCE COMMUNE DE CE QUI MENACE L’AMÉRIQUE DU NORD : la mise en œuvre accélérée du Projet spécial interarmées, pour
s’assurer que le Canada contribue d’une façon significative à la défense
de l’Amérique du Nord;
·
UNE DÉFENSE
CÔTIÈRE PERTINENTE : une meilleure coordination
entre les Forces canadiennes et américaines dans la défense des longues côtes
vulnérables de l’Amérique du Nord;
·
DES
UNIFORMES ADAPTÉS AU CHAMP DE BATAILLE : une modification de la
tenue militaire afin que le personnel dispose des effets adaptés à toutes les
situations, particulièrement en ce qui concerne les opérations de combat et la
tenue de combat pour le personnel féminin;
· UNE PROTECTION CONTRE LE TIR AMI : du matériel de reconnaissance efficace pour réduire les risques de pertes imputables au tir ami.
Nous
avons effectué une tournée de la plupart des bases et installations militaires
du Canada, pour deux raisons :
·
ces visites étaient le moyen de nous informer
des problèmes qu’éprouvent les Forces canadiennes;
·
elles nous ont permis de comparer les témoignages
des officiers supérieurs et des hauts fonctionnaires d’Ottawa avec les avis
et opinions des officiers, des militaires du rang et de tous ceux qui
connaissent la réalité du travail sur le terrain.
|
À l’extérieur d’Ottawa, le Comité a entendu de
nombreux commandants des Forces régulières et de la Réserve, ainsi que
d’autres officiers supérieurs. Nous avons aussi tenu à rencontrer de façon
informelle des officiers subalternes et des militaires du rang. De plus, nous
avons intégré à notre personnel un officier ayant le grade de général, à
la retraite depuis peu, ainsi qu’un sous-officier supérieur, également
retraité depuis peu, et nous n’avons épargné aucun effort pour connaître
les vues aussi bien des officiers supérieurs que des militaires du rang. Nous
savons gré aux unités de leur hospitalité, et aux militaires de leurs
points de vue. Nous avons entendu des gens très convaincus, mais souvent très
désillusionnés. Nous tentons de résumer leurs messages dans ce compte rendu
de nos visites. |
Une guerre à mener sur trois fronts
Nous avons observé trois catégories de problèmes,
tous liés à un manque de fonds :
I. La crise du
personnel :
II. La crise par rapport aux opérations :
III. La crise des biens d’équipement :
des
militaires trop peu nombreux et trop peu formés
Nous avons demandé à un jeune soldat quelle
serait sa grande priorité si le Forces armées canadiennes étaient financées
adéquatement. Sa réponse est très simple :
« Que
nous soyons plus nombreux ».
Après une décennie de réductions,
l’effectif des Forces canadiennes est tombé de plus de 80 000 à environ
52 400.
Le
manque de personnel entraîne toutes sortes de problèmes, par exemple :
·
Des réparations aux équipements essentiels
retardées par manque de techniciens;
·
Des navires immobilisés faute d’équipages;
·
Des bataillons d’infanterie insuffisamment dotés;
·
Une cadence trop rapide des opérations, d’où
des intervalles insuffisants entre les déploiements, un stress accru pour les
militaires et leurs familles et un recours plus fréquent aux congés de
maladie;
·
Une absence complète de formation au-dessus du
niveau du bataillon depuis 1993;
·
Des retards dans le traitement des recrues et
dans leur intégration aux Forces canadiennes;
·
Des recrues désœuvrées qui attendent que des
possibilités de formation se libèrent;
·
Des militaires qui attendent de 7 à 12 mois
pour pouvoir suivre des cours de formation de base;
·
Le recours à des membres des formations opérationnelles
pour compléter les unités de formation;
· Une pénurie de pièces de rechange si grave qu’elle affecte le moral des techniciens et leur envie de se rengager dans les Forces;
·
La cannibalisation des unités opérationnelles
pour doter les unités de formation pendant les périodes de pointe.
L’insuffisance
de la capacité de formation pèse lourd dans la crise du personnel
|
Les réductions budgétaires extrêmes que les Forces
canadiennes ont subies au cours des années 90 ont eu un effet disproportionné
sur l’effectif des instructeurs militaires à plein temps. Comme le nombre
de recrues était faible, il était facile de justifier une forte diminution
du personnel et du matériel de formation. Les résultats, pourtant prévisibles,
ont été désastreux. Les possibilités moindres d’exercer et de développer
leurs compétences professionnelles, nous a-t-on dit, est la principale raison
pour laquelle un certain nombre des militaires les plus compétents et les
plus utiles des Forces canadiennes ont décidé de ne pas se rengager. |
Ce
qu’on nous a dit dans les bases au sujet de la crise du personnel
La Base des Forces canadiennes (BFC) Esquimalt
La
Marine, comme le reste des Forces canadiennes a adopté la notion de Force
totale, à savoir que la Force régulière et la Réserve sont assujetties aux mêmes
normes de leadership et de professionnalisme. Des réservistes d’Esquimalt
nous ont dit que leur manque de formation les empêchait d’atteindre les
normes de la Force régulière.
La
première mission du contre-amiral Fraser, en tant que commandant des Forces
maritimes du Pacifique (FMAR(P)), est de préparer les navires et les équipages
à la guerre. Lorsque nous avons visité la base d’Esquimalt, les navires se
trouvaient sous très haute sécurité en prévision du prochain déploiement.
Cela signifiait entre autres qu’il fallait passer en revue environ 700 officiers
et autres militaires, et vérifier si leur formation, leur état mental et leur
condition physique – ainsi que leur situation de famille – répondaient aux
exigences d’un déploiement outre-mer.
Nous
constaté que les navires n’étaient pas tous adéquatement dotés. En posant
des questions, nous avons appris que les rangs des officiers subalternes étaient
particulièrement minces, tandis que certains métiers techniques étaient
incontestablement sous-dotés. Pour compléter les équipages de certains
navires, il a fallu puiser ailleurs dans la flotte. Ainsi, un destroyer et un
navire de défense côtière ont dû être immobilisés, car leurs effectifs étaient
insuffisants pour qu’ils puissent prendre la mer. La Marine aurait besoin
d’environ 1 000 officiers et militaires du rang supplémentaires. La
proportion du temps passé en mer par les militaires (60 % contre 40 %
sur terre) est la plus élevée parmi toutes les marines de l’OTAN (où le
partage est habituellement 50-50).
Étant
donné que la plupart des moyens de formation en mer sont actuellement consacrés
à l’entraînement des officiers de la Force régulière, les réservistes
sont obligés de se débattre pour obtenir le temps dont ils ont besoin pour améliorer
leurs niveaux de rendement.
Le
capitaine (M) Pile
nous a parlé du rôle de la Réserve à bord des navires de défense côtière,
dont six sont sur la côte Ouest et six sur la côte Est. À l’exception de
deux experts techniques de la Force régulière, ces navires comptent 38 réservistes
(y compris le capitaine) d’un peu partout au Canada et dont les contrats vont
de trois mois à trois ans.
La Réserve
navale de la côte Ouest, nous a-t-on dit, éprouve les mêmes pénuries de
personnel que la Marine, et seulement cinq des six navires peuvent être dotés
d’un équipage. Le rythme des opérations est devenu le premier motif de doléances
à Esquimalt, plus que la rémunération et les allocations. Cette cadence frénétique
engendre de la tension chez les militaires et leurs familles et elle a des
effets néfastes sur le moral et la santé des individus et sur la cohésion des
groupes.
Selon
les militaires du rang et les officiers que nous avons entendus, c’est le
rythme des opérations et la pénurie de certaines catégories essentielles de
personnel qui constituent les plus graves problèmes de la 1re Division aérienne
du Canada.
Il
s’ensuit un cercle vicieux. Le recours au personnel opérationnel pour
compenser le manque de formateurs réduit la capacité opérationnelle, d’où
un besoin de personnel entraîné.
Tous
les types de formation (individuelle, en groupe, au Canada et à l’étranger)
ont été limités par suite des réductions budgétaires. Par conséquent, le
niveau général de préparation a décliné, et aujourd’hui les pilotes qui
possèdent le niveau le plus élevé de préparation sont peu nombreux.
Le
maintien en place des spécialistes représente, semble-t-il, un problème
encore plus grave que le recrutement. Bien entendu, conserver le savoir-faire coûte
moins cher que de former de nouveaux spécialistes. Nombreux sont ceux qui
quittent les Forces à cause des mauvaises conditions de travail et du niveau
insuffisant de la formation et de l’équipement. Des primes au maintien, si
elles étaient approuvées, pourraient aider à retenir les techniciens.
L’adjudant
chef Dietrich nous a parlé des initiatives destinées à améliorer la qualité
de vie des membres de la Division aérienne. Le manque de temps de formation,
a-t-il dit, est l’une des grandes sources de tension au sein de la
Division. L’aviateur est aujourd’hui obligé d’être une sorte d’«
homme-orchestre » – une situation peu professionnelle qui sape la
fierté, la confiance et la compétence.
Le
capitaine (M)
Burke, commandant par intérim, Forces maritimes de l’Atlantique, a informé
le Comité des défis auxquels le commandement fait face :
·
Des budgets de 26 % inférieurs à ceux
d’il y a cinq ans;
·
Un équipement réduit et des effectifs
moindres, ce qui entraîne des tensions à cause du rythme des opérations et de
la piètre qualité de vie;
·
Les effets négatifs du manque de techniciens
sur le niveau de maintenance de la flotte – à l’heure actuelle, cette
carence est considérée comme encore plus grave que la pénurie générale
d’argent;
Au
moment de notre visite, le commandement n’était en mesure de doter que deux
des trois navires qui se préparaient au déploiement. Pour doter le troisième
navire (l’Iroquois) en prévision de la rotation de 2003, il faudra demander
à de nombreux membres des équipages de repartir en mission huit mois seulement
après leur affectation précédente.
Il
est normal pour un marin régulier d’être en mer en moyenne 100 jours
par année, mais les équipages des navires de la patrouille côtière sont
composés de réservistes à contrat, qui passent entre 120 et 150 jours
par année en mer, avec d’inévitables conséquences sur leur vie de famille.
Au contraire des réservistes de la côte Ouest, qui se plaignent d’un manque
de formation en mer, ceux de la côte Est trouvent que leurs affectations en mer
sont trop longues.
Le
capitaine (M) Payne,
commandant de l’Installation de maintenance de la Flotte Cape Scott, nous a
expliqué l’importance de cette installation, qui souffre d’un manque de
main-d’œuvre, parce que le programme de formation a été supprimé par suite
des réductions budgétaires des années 90. L’effectif est vieillissant,
et il faudrait créer un programme d’apprentissage pour donner une formation
et de l’expérience à la prochaine génération de militaires.
Faute
de ce type de programme, l’installation atteindra bientôt le point où elle
sera incapable de répondre aux besoins de la Flotte atlantique.
Ici,
le grand problème, nous a-t-on répété à maintes reprises, est le rythme des
opérations et en particulier des déploiements outre-mer, qui réduit considérablement
le temps disponible pour la formation personnelle et la vie de famille. À
l’appui de l’opération Apollo de lutte contre le terrorisme, la 12e Escadre
Shearwater a affecté 125 personnes à l’étranger pendant six mois, pour
doter et maintenir des détachements aériens d’hélicoptères à bord des
navires déployés. Cette cadence n’a pu être soutenue qu’en réduisant le
temps dévolu à la formation et à la vie de famille.
·
L’Escadre manque déjà de pilotes pour les
Sea King. Des 37 pilotes disponibles, 24 étaient déployés à l’étranger.
À leur retour, ils sont censés avoir le temps de renouveler leurs liens
familiaux et de rafraîchir les compétences tactiques qu’ils n’ont pas pu
utiliser pendant leur affectation. Mais, à cette base, comme dans beaucoup
d’autres, les membres du personnel sont assujettis à des tensions qui dépassent
celles que comporte normalement leur profession, déjà difficile et dangereuse.
·
Certains pilotes et certains membres du
personnel de maintenance ont été forcés de passer immédiatement à une autre
affectation dès leur retour.
Selon
le colonel Hincke,
Commandant de la 12e Escadre Shearwater, le report du recrutement a entraîné
une grave pénurie de personnel spécialisé, laquelle persistera tant que de
nouvelles recrues ne pourront pas être formées et acquérir de l’expérience.
Les vénérables hélicoptères Sea King exigent une lourde maintenance, et le
manque de spécialistes suppose un nombre moindre d’heures dans les airs pour
ces appareils – le taux de disponibilité des Sea King s’établit en moyenne
à 55 %. Même en tenant compte du fait que les hélicoptères neufs
exigent de l’entretien, il n’est pas très exagéré de dire qu’il faut
pratiquement deux Sea King pour remplir les fonctions qui devraient être celles
d’un seul hélicoptère.
Les
militaires du rang avec qui nous avons discuté à l’heure du déjeuner sont
manifestement démoralisés par la piètre qualité des conditions de vie réservées
aux familles : les casernes sont de qualité inférieure, les spécialistes
médicaux font défaut, les écoliers ayant des besoins spéciaux ne reçoivent
pas assez d’aide, etc. L’absence de soutiens médicaux francophones dans la
ville est tellement grave que de nombreux militaires refusent d’être affectés
à cette base. L’espace est un problème réel, alors que le personnel double
et triple pendant l’été et que les casernes sont insuffisantes.
Le
brigadier général Mitchell,
commandant du Secteur de l’Atlantique de la Force terrestre, et le colonel
MacLeod, commandant du 3e Groupe de soutien de secteur, se sont entretenus
avec nous. Ils font face disent-ils à un certain nombre de « défis »,
qui ressemblent davantage à des crises.
Depuis
que leur capacité de formation a été réduite, ils doivent compenser par des
instructeurs puisés dans des unités opérationnelles un peu partout au Canada,
privant ainsi celles-ci de membres essentiels et réduisant le temps dont
disposent les formateurs pour leur vie de famille et pour leur propre
perfectionnement professionnel.
L’armée
n’a pas le personnel qu’il faudrait pour soutenir le rythme élevé de ses
opérations ni pour se moderniser. Le colonel Ward, commandant du Centre
d’instruction au combat et les commandants des écoles de l’infanterie, de
l’artillerie et de l’arme blindée nous ont parlé. Ensuite, nous avons eu
avec eux une discussion extrêmement franche. L’opinion exprimée sans détour
collectivement par les officiers et les instructeurs est qu’ils font face à
une situation intenable, qui ne peut pas durer.
Il
manque au moins 300 instructeurs permanents dans les écoles, ce qui force
les responsables à puiser dans les unités opérationnelles. La demande en matière
de cours augmente sans cesse. Alors que le personnel permanent a été réduit
de 25 %, le nombre des élèves qui suivent des cours dans les écoles,
anciennement de 1 429, était de 2 342 au moment de notre visite, ce
qui représente une augmentation du nombre de jours de formation de 50 0000
à 100 000. Pour répondre à cet accroissement de la demande, les écoles
de formation ont dû faire passer de 350 à 2 000 le nombre
d’instructeurs puisés dans les unités opérationnelles de la Force régulière
et de la Réserve.
Selon
les personnes qui nous ont informés, avant de s’améliorer, la situation
s’aggravera nécessairement, car les officiers nouvellement recrutés auront
besoin d’une formation immédiate et, dès que les autres recrues auront
terminé leur formation de base, il faudra leur assurer des formations de métier
et des formations spécialisées.
Le
403e Escadron forme des pilotes pour les hélicoptères CH-146 Griffon,
utilisés pour appuyer l’armée. Selon le lieutenant-colonel Black, son
commandant, plusieurs « défis » en matière de personnel se présentent :
le pire concerne les pénuries qui forcent l’unité à compter sur la Réserve
pour sa dotation, et le manque d’informaticiens qui oblige les techniciens
d’aéronefs à effectuer ce genre de travail.
Comment
se sent-on quand on fait partie du PAI (personnel en attente d’instruction)?
Nous
avons déjeuné avec un groupe d’élèves et de PAI. La plupart d’entre eux
nous ont déclaré qu’ils étaient entrés dans l’armée pour faire une
carrière passionnante et utile. Au lieu de cela, on les fait languir de sept à
douze mois, en attendant que des cours de formation en vue d’une qualification
ne soient disponibles pour eux. Non seulement c’est du gaspillage de
ressources, mais c’est démoralisant. On leur a donné quelques cours imporvisés,
mais dans l’ensemble ils ont perdu leur temps. Au moment de notre visite,
environ 30 PAI regardaient la télévision; quelques autres travaillaient
dans la boutique du dépanneur, etc. À Kingston, comme ailleurs, le nombre des
PAI est en augmentation rapide – il est passé d’un peloton (30) à une
compagnie (174). S’il est vrai que certains PAI ne se plaignent pas d’être
payés pour regarder la télévision, d’autres sont dégoûtés et démoralisés,
et ne voient pas pourquoi ils se rengageraient à la fin de leur contrat de
trois ans.
Le
lieutenant-colonel Tarrant,
directeur adjoint, Instruction de l’Armée de terre, nous a parlé des moyens
consacrés à l’instruction, de ce qu’il en coûte pour former des officiers
et des militaires du rang, ainsi que de certains des défis auxquels font face
les formataeurs. Après la séance d’information, lui-même et le
brigadier-général Nordick, commandant adjoint, Système de la doctrine et de
l’instruction de la Force terrestre, ont répondu à nos questions.
Les
affectations des instructeurs ne dépassent pas trois ans, car il doivent
pouvoir retourner dans leurs unités, pour pouvoir entretenir leurs compétences
et leur expérience opérationnelle. La plupart des instructeurs travaillent à
plein temps, mais il faut leur ajouter des militaires provenant des unités régulières,
pendant l’été, en raison de la pénurie de personnel.
Selon
le bgén Nordick, le manque d’instructeurs, tant pour les officiers que pour
les militaires du rang, est le principal problème des unités de formation. Les
forces de campagne en souffrent. Cent soixante-dix-sept officiers et
militaires du rang supplémentaires seraient nécessaires pour assurer la
formation, soit l’équivalent de trois bataillons, et il faudrait près de
cinq ans pour que l’actuelle campagne de recrutement permette de disposer
d’un nombre suffisant de soldats formés et expérimentés capables de répondre
aux besoins de formation de l’armée.
Comme
les réservistes ne sont rémunérés que 35 jours par an, leurs possibilités
de formation sont beaucoup moindres que celles des militaires réguliers, qui
travaillent 250 jours par an. De plus, les nouvelles technologies viennent
exacerber cette situation. Comme la matière est trop vaste, on ne donne aux réservistes
que les éléments indispensables des cours. Si plus tard ils se joignent à
l’armée régulière, ils doivent recevoir une nouvelle formation complète.
Au moment de notre visite, l’augmentation prévue du nombre de réservistes,
qui doit passer de 15 000 à 18 000, n’avait pas encore été financé.
Au
Quartier général du Groupe du recrutement des Forces canadiennes, nous avons
appris que le succès de l’actuelle campagne de recrutement déborde les
ressources limitées dont on dispose pour y répondre.
Soulignons
l’ironie de la situation. Les Forces ont besoin d’augmenter leur personnel,
et elles ont réussi à recruter des gens, mais leur manque de moyens de
formation provoque un goulet d’étranglement. Des années de réductions budgétaires
ont beaucoup réduit les moyens dont on dispose pour former les recrues et
donner des cours d’initiation aux centaines de métiers dont les Forces ont
besoin.
Lors
d’un déjeuner informel, quelques jeunes militaires du rang nous ont dit que
la cadence actuelle des opérations dissuaderait certainement beaucoup de leurs
camarades de s’engager de nouveau. Quant aux instructeurs, non seulement ils
sont déçus, mais ils déplorent le message que cette situation transmet aux
recrues.
Selon
le major Orr, l’organigramme du Groupe du recrutement comporte 950 personnes,
dont 31 % sont des réservistes. Cinq cent cinquante-trois travaillent dans
33 centres et détachements un peu partout au pays; 307 participent à la
formation de quelque 5 000 recrues par année à Saint-Jean (Québec),
et environ 90 sont attachés au Quartier général, BFC Borden. À la fin de
mars, le nombre de recrues prévues, à savoir 10 000, avait déjà été dépassé
de 1 000. Le recrutement des réservistes avait atteint 150 % du
nombre prévu. Par conséquent, les effectifs rémunérés des Forces
canadiennes avaient déjà dépassé 61 000 et allaient atteindre,
croyait-on, 63 000 au 31 mars 2003. Toutefois, l’effectif
entraîné se situe aux alentours de 52 000.
Le
lcol. Lilienthal nous a parlé du travail du Groupe de l’instruction de
soutien des Forces canadiennes, qui est chargé d’assurer une large gamme de
cours spécialisés, à la BFC Borden et ailleurs. Sur la base, on enseigne les
matières suivantes : administration et logistique, génie électrique et mécanique,
services dentaires, sciences nucléaires, armes chimiques et biologiques; on y
trouve aussi une école de pompiers, , une académie de police militaire, un
centre de formation des instructeurs et une école d’aumôniers. Le génie
militaire, le renseignement militaire, les communications, l’électronique et
les langues s’enseignent ailleurs.
Selon le major Henderson,
cette escadre fournit aux Forces canadiennes des transports aériens souples,
des services de recherche et de sauvetage et des soutiens déployables. La
formation des pilotes, nous a-t-elle dit, risque sérieusement d’être
annulée, même si ceux-ci ont besoin d’un nombre minimal d’heures
pour pouvoir conserver leurs qualifications, et d’encore plus de temps pour se
perfectionner. C’est le rythme accéléré des opérations qui provoque une pénurie
d’avions. Il n’y a
qu’un seul appareil de disponible pour la formation, alors qu’il en faudrait
deux.
Au cours d’une table ronde, nous avons appris qu’environ 54 % des techniciens d’aéronefs seraient admissibles à la retraite d’ici à cinq ans. Il est essentiel que l’on puisse en retenir le plus grand nombre possible, sans quoi les pénuries s’aggraveront encore. La formation complète d’un technicien exige, après la fin de ses cours, deux à trois ans d’instruction pendant l’emploi. On reconnaît généralement que le regroupement des métiers de la Force aérienne a été mal planifié. Aussi est-il très difficile de maîtriser complètement les nouveaux métiers.
Des
techniciens nous ont dit que l’insuffisance des pièces de rechange et de l’équipement
dont ils ont besoin pour faire leur travail serait l’une des grandes raisons
pour lesquelles ils renonceront à renouveler leur engagement.
Centre de parachutisme du Canada
Le
Centre de parachutisme du Canada risque d’être éliminé dans le cadre des
mesures de compression des coûts. Les officiers et les militaires du rang
auxquels nous avons parlé, tant au Centre que dans les unités opérationnelles
de l’Armée de terre, ont insisté sur le fait que les parachutistes
constituent un élément essentiel d’une armée moderne, en permettant à la
fois de satisfaire aux exigences opérationnelles et de rehausser le moral.
Au 2e
Groupe-brigade mécanisé du Canada, une table ronde a permis à des officiers
supérieurs de faire valoir que la brigade manquait dangereusement de personnel
et ne pouvait donc s’acquitter de ses tâches opérationnelles quotidiennes.
Par exemple, le 1er Bataillon du Royal Canadian Regiment, qui compte environ 575 militaires,
se trouve de toute évidence à 80 % de son effectif autorisé. En fait, il
ne peut rassembler qu’entre 300 et 400 militaires la plupart du
temps, soit la moitié de son effectif autorisé. Les autres militaires sont
affectés ailleurs ou sont en congé de maladie. Environ 10 % de
l’effectif se trouvent en congé de maladie, en partie parce qu’on hésite
à enlever quelqu’un du tableau de service actif tant qu’un mince espoir
permet d’espérer qu’il pourra reprendre le travail.
Le
manque de personnel entraîne l’affectation d’une même unité à plus
d’une opération. Il se peut également que la planification nécessite
beaucoup trop de ressources pour permettre le déploiement des troupes en raison
d’un manque de personnel, comme ce fut le cas lors de la planification de
l’aide fournie après le tremblement de terre important survenu dans le Lower
Mainland en Colombie-Britannique (opération Agile). Puisque la brigade doit préparer
le déploiement d’un bataillon d’infanterie, il faut accorder à ce dernier
la priorité quant au personnel, à l’équipement et à l’entraînement, ce
qui entraîne de graves répercussions sur les deux bataillons puisque l’un
est à court d’effectif tandis que l’autre doit composer avec du nouveau
personnel.
Les
officiers nous disent que, s’ils disposaient de moyens financiers supérieurs,
l’une des premières mesures qu’ils prendraient consisterait à doter les
unités de la brigade de leur effectif autorisé et complet, et qu’ils leur
accorderaient même du personnel supplémentaire pour remplacer les militaires
en congé de maladie prolongé. Ce personnel supplémentaire réduirait le
stress imposé par le rythme des opérations. Il arrive trop fréquemment que
des soldats passent d’un cours à une affectation, puis à d’autres cours
d’été sans jouir d’une pause pertinente.
Les
officiers nous ont confié qu’ils consacreraient plus d’argent aux exercices
de combat et à l’entraînement de tir réel, deux aspects que les mesures de
compression des coûts avaient restreints considérablement. La BFC Petawawa ne
dispose pas des installations nécessaires pour permettre aux unités
d’infanterie, de chars et d’artillerie de participer à des exercices fondés
sur la réalité.
Les
officiers ont fait valoir que plus se rengageraient si davantage de mesures
permettaient de mettre au défi les militaires faisant le plus preuve
d’initiative. Selon eux, il faudrait créer une école de reconnaissance et
des unités spéciales qui, comme l’ancien régiment aéroporté, offriraient
davantage de défis que la simple unité d’infanterie sans comporter les
exigences de la Force opérationnelle interarmées 2 (FOI 2). Pour
encourager l’interopérabilité des armées alliées occidentales, le Canada
pourrait échanger des pelotons avec des pays comme les États-Unis et le
Royaume-Uni.
Au détachement
de la baie Patricia, le personnel du 407e Escadron nous a brossé le tableau de
la situation. Le 407e Escadron regroupe les aéronefs de patrouille maritime
Aurora à la 19e Escadre Comox, en Colombie-Britannique. Après la période
des questions suivant la description des fonctions de l’Escadron, les
militaires ont signalé au Comité que, en raison des restrictions budgétaires,
les pilotes des appareils Aurora ne volaient que 400 heures par année,
soit à peine un peu plus que le nombre minimum d’heures nécessaires afin de
maintenir les compétences de vol. Au sein du 442e Escadron dans la baie
Patricia, la pénurie d’hélicoptères en état de vol a limité les pilotes
à 300 heures de vol en mer et à 150 heures le long des côtes.
Le
Comité n’a pas rencontré officiellement les officiers et les militaires du
rang du 3e Bataillon du Black Watch (Milice), mais il a examiné plusieurs
problèmes lors de discussions officieuses.
Tant
les officiers que les militaires du rang supérieurs se sont surtout plaints des
problèmes découlant du recrutement, dont le contrôle et l’organisation relèvent
de la brigade.
Le
Black Watch exerce beaucoup d’attrait historique et militaire, mais la
paperasserie administrative l’empêche de prendre ses propres mesures de
recrutement : annonces dans les journaux locaux, visites des écoles
secondaires, des collèges et des universités ainsi que participation à des
salons de l’emploi pour étudiants. Ses efforts doivent se limiter
essentiellement à recruter des connaissances ainsi que des amis de militaires
et, pour «réfréner l’attrait exercé», à disposer des tableaux-annonces
dans la rue d’un manège militaire.
Les
candidats éventuels perdent fréquemment tout intérêt parce qu’il faut
beaucoup de temps pour mener à terme le processus de recrutement et entamer la
formation. Pour les officiers éventuels, les délais sont particulièrement
longs et les modalités administratives, lourdes. Les aspirants officiers sont
presque tous des étudiants des collèges ou des universités, qui ont besoin de
savoir rapidement à quoi s’en tenir sur le plan de l’emploi et de pouvoir
compter sur un salaire le plus tôt possible.
Un
stage préalable dans une unité de la Réserve devrait constituer la marche à
suivre normale, voire préférable avant de se joindre à la Force régulière.
Il faut tellement de temps pour obtenir une mutation de la Réserve à la Force
régulière que les candidats abandonnent la Réserve ou omettent de signaler
leur service antérieur lorsqu’ils présentent une demande à la Force régulière.
C’est une perte de temps et une mauvaise utilisation des ressources de
formation.
Le
Black Watch et les autres unités locales de la Réserve sont de plus en plus à
court d’instructeurs et ne peuvent donc pas accroître rapidement le nombre
d’inscriptions. De plus, parmi les caporaux-chefs les mieux formées et les
plus expérimentés qui constituent la base du système d’instruction de la Réserve,
nombreux sont ceux qui sont affectés à des missions à l’étranger ou à des
écoles de formation. Cette situation influe négativement sur notre capacité
de donner la formation aux unités locales de la Réserve.
[1]
Le Comité recommande de maintenir les activités récurrentes ci-après qui
devront être considérées comme faisant exception à l’interruption des
opérations outre-mer : attachés militaires, personnel militaire au siège
de l’OTAN et du SACLANT, personnel militaire affecté au NORAD (notamment
l’état-major de planification des Armées de terre et de mer) et
engagements relatifs au AWACS de l’OTAN à Geilenkirchen, en Allemagne
[2]
Plan d'activités de premier échelon du CEMFA pour
2001