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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 17, Témoignages du 10 juin 2003


OTTAWA, le mardi 10 juin 2003

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 17 h 49 pour étudier en vue d'en faire rapport de nouvelles questions concernant son mandat (mise en oeuvre de Kyoto).

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nous tenons une réunion du Comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles en vue de poursuivre nos travaux visant à produire un rapport sur les nouvelles questions concernant notre mandat qui comprend notamment la mise en oeuvre de Kyoto et d'autres sujets ayant rapport avec les émissions.

Aujourd'hui, nous entendrons M. Michael Cleland, président de l'Association canadienne du gaz qui a mené une longue et distinguée carrière dans la fonction publique et dans le secteur privé de l'énergie en général, ainsi que M. Brendan Hawley, spécialiste des communications et du marketing qui, lui aussi, représente l'Association canadienne du gaz.

Je suppose, messieurs, que vous aimeriez faire une déclaration préliminaire avant que nous posions nos questions. Vous pouvez commencer.

M. Michael Cleland, président, Association canadienne du gaz: J'aimerais présenter un exposé et j'ai apporté des documents à vous distribuer. Je vais essayer de procéder rapidement afin de vous laisser le plus de temps possible pour poser des questions.

Premièrement, j'aimerais vous donner un bref aperçu de notre industrie afin de mettre les choses en perspective. Je suis sûr que vous en connaissez certains aspects, mais il y en a peut-être d'autres qui sont nouveaux pour vous. Alors, je vais vous parler brièvement du gaz naturel dans le contexte des changements climatiques. Enfin, j'aimerais insister sur nos démarches visant à créer des partenariats entre l'industrie et le gouvernement en vue de nous attaquer, en particulier, au problème des émissions produites par les consommateurs. Ce qui nous amène à l'objectif une tonne lancé par le gouvernement.

La page trois montre un survol de l'industrie du gaz naturel. Nous avons près de cinq millions de consommateurs, si on inclut toutes les catégories. C'est un secteur qui comprend le transport, la distribution et finalement l'utilisation. Ce secteur répond à un peu moins d'un tiers de la demande totale en énergie du Canada. Il y a un élément qui a été oublié sur cette diapositive, ce qui explique pourquoi la somme de ces chiffres ne correspond pas au total. L'élément qui correspond à l'industrie et à la production de l'électricité représente 1,1 million de pieds cubes. Je m'en excuse.

La quatrième diapositive décrit le système de transport et montre où le gaz produit au Canada est transporté. Environ 56 p. 100 du gaz est exporté à destination des États-Unis; le reste est transporté dans la plupart des régions du Canada — sauf dans le Nord, évidemment. Je vous signale que la Nouvelle-Écosse à tout récemment accordé une franchise à une société de distribution, ce qui signifie que nous couvrons la plupart des provinces maintenant, à l'exception de l'Île du Prince-Édouard. La majorité de la production, comme vous le savez, provient de l'Ouest. Et une partie de cette production vient de la côte Est. Nous aimerions que cette région en produise davantage, mais pour le moment c'est l'état de la situation.

La cinquième diapositive montre quels sont les principaux membres de l'Association canadienne du gaz. Il y a les grandes sociétés de distribution d'un bout à l'autre du pays, et un certain nombre de sociétés de moins grande envergure qui desservent de plus petites régions dans certaines provinces.

Voici une répartition générale du marché du gaz naturel: 56 p. 100 du gaz est destiné à l'exportation et le reste est distribué dans un éventail de secteurs de l'économie canadienne, de l'industrie et de la production d'électricité en passant par la demande institutionnelle, résidentielle et commerciale. La production d'électricité représente toujours une part relativement faible du marché au Canada, par comparaison aux États-Unis, mais néanmoins, une part grandissante, et peut-être le plus important facteur en progression pour ce qui est de déterminer la mesure dans laquelle la demande pourrait croître.

À plusieurs égards importants, le gaz naturel représente une partie de la solution — c'est-à-dire, la conversion d'autres combustibles au gaz naturel. Par ailleurs, l'industrie elle-même fait sa part pour réduire ses propres émissions. Je vais en parler plus longuement. Enfin, pour ce qui est de la question de la consommation, il y a beaucoup à faire en ce qui concerne l'efficacité de l'utilisation finale de l'énergie.

Parmi tous les combustibles fossiles, le gaz naturel est le plus pauvre en carbone. Il produit aussi moins d'émissions que d'autres combustibles. À court et à long terme, le gaz naturel est utilisé dans plusieurs secteurs comme la production d'électricité, l'industrie et le transport. Ces applications signifient que le gaz naturel pourrait non seulement contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air, mais aussi à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. J'aimerais insister sur le fait qu'il faut examiner ceci dans le contexte d'une solution globale faisant appel à de nombreux combustibles et à des technologies diverses, y compris les technologies renouvelables, mais y compris aussi des combustibles plus traditionnels.

Il faudra attendre encore longtemps, je le crains, avant que le Canada cesse d'utiliser les combustibles fossiles ou même certains combustibles plus traditionnels. D'où l'importance de maintenir un équilibre. Et justement, pour maintenir cet équilibre, nous devons nous assurer de disposer d'un approvisionnement suffisant. Il se déroule actuellement à Washington des audiences sur le déséquilibre croissant entre la demande et l'offre en Amérique du Nord. Ce déséquilibre devient de plus en plus un sujet d'inquiétude qui se traduit dans les prix pratiqués aujourd'hui.

Il ne s'agit pas d'une crise. Cette distinction est importante. Mais nous faisons face à un problème qu'il faut régler afin de nous assurer de disposer d'une offre suffisante, tant à court terme que dans l'avenir.

Le secteur du gaz naturel — c'est-à-dire, sa composante de distribution locale — représente une portion relativement peu importante de la production d'émissions au Canada. La majorité de ces émissions sont des émissions fugitives comme celles qui résultent des fuites dans les anciens systèmes. Ces fuites sont difficiles à évaluer, mais depuis plusieurs années, l'industrie du gaz se démarque comme un des chefs de file pour ce qui est de la réduction uniforme et volontaire des émissions pour toute la gamme de nos activités. Nous collaborons avec le gouvernement fédéral en vue de trouver des moyens rentables de réduire encore davantage nos émissions.

Comme je l'ai suggéré tout à l'heure, nous sommes persuadés que la clé du problème se trouve à l'étape de la consommation. Près d'un tiers de notre consommation annuelle totale d'énergie primaire provient du gaz naturel, et plus des deux tiers des émissions associées à l'utilisation du gaz sont produites à la sortie d'un brûleur. Nous sommes persuadés qu'il faut concentrer nos énergies dans ce secteur afin d'y trouver d'autres possibilités de réduire les émissions.. Les consommateurs sont appelés à jouer un rôle important, mais le gouvernement et l'industrie doivent les soutenir.

Nous avons acquis passablement d'expérience à cet égard. L'industrie du gaz naturel possède beaucoup d'expérience dans la gestion axée sur la demande, la GAD. Et les possibilités de puiser à même cette expérience sont là, tout comme dans la vaste expérience acquise par le gouvernement fédéral avec ces programmes. Nous agissons à titre d'intermédiaire auprès de plus de cinq millions de consommateurs.

La diapositive suivante illustre les résultats des programmes de GAD chez Enbridge. Nous reviendrons sur le sujet, si vous le souhaitez. Cette expérience montre qu'un effort raisonnable, même s'il ne s'agit pas d'un mince effort, a permis à Enbridge de réduire ses émissions de 2,5 millions de tonnes d'équivalent CO2. Comparez ce résultat avec le fait que notre secteur ne produit que 1 million de tonnes d'émissions au total. Les réductions que les consommateurs sont susceptibles de réaliser sont considérables par comparaison, même si elles pourraient entraîner des coûts importants. Il faudra donc consentir des efforts réels sur le plan de l'investissement pour y arriver, mais il reste que les possibilités sont substantielles.

Dans cette optique, nous avons collaboré avec Ressources naturelles Canada en vue d'établir un partenariat entre l'industrie et le gouvernement. Nous pensons qu'en travaillant main dans la main, le gouvernement et l'industrie pourraient arriver à créer une synergie — un effet multiplicateur, si vous préférez — en joignant leurs efforts respectifs et qu'il serait possible d'obtenir des réductions encore plus poussées que celles que nous avons obtenues avec les programmes actuels. Nous pouvons aborder ensemble la question des obstacles réglementaires et essayer de trouver comment aider les consommateurs à prendre des décisions éclairées et efficaces en ce qui concerne leur utilisation du gaz naturel.

Les discussions avec Ressources naturelles Canada se poursuivent depuis un certain temps. Elles sont très collégiales et nous sommes optimistes quant à la possibilité de mettre en place un cadre de travail. Nous espérons réussir à améliorer la coordination de nos interventions, la diffusion des meilleures pratiques et l'élaboration des communications — qui jouent un rôle décisif auprès des consommateurs. Nous voulons nous assurer de définir des objectifs et des cibles clairs et mettre en place des moyens de vérification rigoureux afin que le gouvernement et nous- mêmes puissions nous convaincre d'obtenir des résultats en contrepartie de nos investissements.

Nous essayons d'obtenir du financement de la part du gouvernement fédéral afin de compléter celui de notre industrie. Nous voulons nous assurer que les organismes de réglementation reconnaissent les efforts que nous consentons et que des mesures d'encouragement efficaces seront mises en place afin de faciliter l'atteinte de nos objectifs. Au-delà de l'efficacité énergétique et de la gestion axée sur la demande, nous pensons qu'il existe des possibilités grâce à ce genre de partenariat d'élargir certains créneaux de marché, comme celui des véhicules au gaz naturel, et d'améliorer l'efficacité des partenariats dans le secteur de l'innovation et du développement technologique. Je le répète, il s'agit de deux domaines où nous constatons que le gouvernement est ouvert à la considération de ces approches.

Les avantages potentiels de ces efforts sont assez évidents. Nous sommes en mesure d'aider le gouvernement à améliorer la portée de ses programmes en lui permettant de s'adresser directement aux consommateurs. Nous pouvons améliorer leur efficacité grâce à notre expérience. Enfin, le gouvernement peut démontrer son leadership en créant des programmes susceptibles d'aider les Canadiens à relever le Défi d'une tonne.

Il est évident que l'industrie ressent le besoin d'agir et de donner l'impression qu'elle agit en vue de respecter les objectifs environnementaux. C'est un domaine dans lequel nous pensons pouvoir réussir. Nous pouvons décupler nos efforts grâce au financement conjoint, et dans le processus, améliorer le service à la clientèle. Plus nous travaillerons avec nos consommateurs en vue d'améliorer l'efficacité de leur énergie et de leur utilisation de l'énergie, et plus nous améliorerons le service que nous leur fournissons.

En résumé, nous pensons qu'il est important que le gouvernement adopte une approche globale dans ses rapports avec les industries en vue de réduire les gaz à effet de serre. Autrement dit, il ne suffit pas d'examiner ce que nous pouvons faire pour réduire nos propres émissions, mais aussi il faut envisager ce que toutes les industries peuvent faire à cet égard, et travailler de concert avec elles, avec les fournisseurs ou encore, dans notre cas, avec les consommateurs. Si nous voulons réussir dans ce domaine, nous n'aurons pas le choix de fonctionner de cette manière. Le gaz naturel a sa place dans un avenir sans pollution, que ce soit à court ou à long terme, pourvu que nous parvenions à maintenir un équilibre entre l'offre et la demande. Enfin, les résultats les plus efficaces devraient provenir de nos efforts auprès des consommateurs.

Le sénateur Christensen: J'aimerais poser une question concernant l'offre et la demande, qui, bien entendu, revêtent une grande importance pour l'avenir. Je suis originaire du Yukon et je m'intéresse de près au gazoduc de la vallée du Mackenzie et à celui de la route de l'Alaska. Lorsque l'on a proposé pour la première fois la construction du gazoduc de la route de l'Alaska, vers 1975, il était supposé être en exploitation au début des années 80, comme vous vous en rappelez sans doute. On a construit un premier tronçon, de l'Alberta jusqu'aux États-Unis. Le concept de départ était que le gaz de l'Alberta serait transporté à destination des États-Unis, et que le gaz qui proviendrait du nord viendrait plus tard le remplacer. Bien entendu, ce gazoduc n'a jamais vu le jour.

Quelles seront les répercussions de cette décision de ne pas construire le gazoduc sur notre offre actuelle et à long terme dans le futur? Il me semble que cela pourrait devenir un problème politique de très grande envergure.

M. Cleland: Est-ce que votre question porte sur la construction du tronçon lui-même?

Le sénateur Christensen: Le premier tronçon a été construit en Alberta. Il était question de transporter le gaz de l'Alberta à destination des États-Unis. Et lorsque l'on aurait entrepris l'extraction du gaz de l'Alaska, l'Alberta aurait pu l'utiliser.

M. Cleland: Évidemment, ces gazoduc sont pleins et une capacité additionnelle a été mise en place avec le gazoduc de l'Alliance. Il existe une capacité de réserve permettant de transporter le gaz à partir de l'Ouest canadien. Le gaz du delta du Mackenzie, en premier lieu, puis celui de l'Alaska pourront répondre aux besoins de l'Alberta, mais il est clair que la majorité de cette production sera acheminée vers le marché américain.

Le sénateur Christensen: Qui aura la priorité en ce qui concerne la demande pour ce gaz en provenance de l'Alaska, à long terme?

M. Cleland: Il est facile de répondre que nous évoluons dans une économie de marché, et que ceux qui sont prêts à payer le prix pourront bénéficier du produit. C'est ainsi que les choses fonctionnent depuis 15 ans. Il n'y a aucune raison de penser que les Canadiens pourraient devoir affronter une pénurie de gaz.

Le sénateur Christensen: Est-ce que ça ne pourrait pas être une éventualité? Les champs bitumineux albertains sont exploités depuis des années et leur produit est acheminé dans ce tronçon de gazoduc, et ce n'est pas le gaz de l'Alaska qui va venir le remplacer.

M. Cleland: En effet, le gaz en provenance du Nord viendra tout simplement rejoindre le réservoir albertain. Essayez d'imaginer les choses de cette façon. Je n'utilise pas le mot «réservoir» dans son sens technique, mais plutôt pour expliquer que le gaz est acheminé dans le territoire albertain. Une partie sera prélevée à partir du gazoduc de TransCanada PipeLines.

Le sénateur Christensen: Cela concerne le gaz de la vallée du Mackenzie, mais moi je parle du gaz de l'Alaska.

M. Cleland: Selon toute vraisemblance, ce gaz prendra la direction du sud en passant par le nord de l'Alberta ou de la Colombie-Britannique. Il est tout probable que ce gaz viendra rejoindre l'offre globale en Alberta.

Le sénateur Christensen: Possédez-vous des connaissances à jour ou de l'expérience en ce qui concerne les transporteurs de GNL et cette technologie? Comment cette technologie évolue-t-elle? Est-ce que cette nouvelle technologie n'est pas en train de surpasser les gazoducs et de devenir un moyen plus facile de transporter le gaz?

M. Cleland: Il est peu probable que les transporteurs de GNL soient plus économiques alors qu'il existe déjà une voie terrestre très accessible. La perte d'énergie qui résulte de la liquéfaction du gaz naturel est très élevée. En revanche, étant donné les prix qui ont cours depuis quelques années, la technologie du GNL est économique. Les grands problèmes sont liés à la construction de terminals portuaires, au délai nécessaire à la regazéification et au risque qui en découle ainsi qu'aux perceptions de ce risque et, si vous voulez, à l'attitude «pas dans ma cour».

Le sénateur Christensen: Au fur et à mesure que les coûts diminuent pour la production de GNL, il se peut que nous en arrivions au point où il sera peut-être moins coûteux de transporter le gaz de l'Alaska jusqu'à Valdez. Nous pourrions y construire un terminal portuaire et l'acheminer tout simplement le long de la côte Ouest plutôt que de construire ce long gazoduc.

M. Cleland: Je crois que les auteurs du projet ont déjà examiné cette option, mais si je comprends bien — et je ne suis pas un expert — actuellement, la route terrestre d'un bout à l'autre du Canada est toujours le choix le plus économique.

Le président: N'importe quelle route terrestre — peu importe celle qui sera choisie — devra, pour des raisons d'ordre pratique, avoir une liaison avec la canalisation d'amenée au nord de la Colombie-Britannique et traverser l'Alberta. De toute façon, il n'existe pas d'autre moyen d'y acheminer le gaz.

M. Cleland: Il est possible d'acheminer le gaz par l'entremise du réseau Duke en Colombie-Britannique ou encore par les canalisations de la société Nova en Alberta, mais ce sont les seuls moyens.

Le président: D'une manière ou d'une autre, c'est le seul chemin qu'il peut prendre.

Le sénateur Milne: J'aurais besoin de quelques précisions. Dans votre mémoire, à la page 9, vous affirmez que la majorité des émissions — 0,89 mégatonne — sont des émissions fugitives, autrement dit, des fuites imprévues. À la page suivante, vous dites que les deux tiers de ces émissions sont associées à l'utilisation du gaz naturel et produites à la sortie d'un brûleur.

M. Cleland: Il manque des chiffres dans mon exposé. Ce chiffre correspond à la totalité des émissions associées au gaz naturel en amont jusqu'à la production.

Le sénateur Milne: Quel est le bon chiffre?

M. Cleland: Cette fraction de 0,89 représente une très petite part du total.

Le sénateur Milne: N'avez-vous pas dit qu'il s'agissait de la majorité des émissions?

M. Cleland: Non. La majorité des émissions produites par l'ensemble du système, y compris le transport et la production — c'est-à-dire, si vous additionnez le tout.

Le sénateur Milne: Du point A au point B, le point B étant la sortie du brûleur?

M. Cleland: C'est exact.

Le sénateur Milne: C'est entre les deux points.

M. Cleland: Les émissions du secteur en aval de l'industrie, que mon association représente, ne comptent que pour une mégatonne d'émissions, ce qui correspond à une très petite fraction du total.

Le sénateur Milne: Le reste des émissions se retrouvent à la sortie du brûleur. En raison de la combustion incomplète.

M. Cleland: Oui, ou même de la combustion complète. La production de CO2 est une conséquence inévitable.

Le sénateur Milne: Je suis curieuse au sujet de la carte qui figure à la page 4. Certaines flèches en direction des États- Unis son hachurées; les autres non. Les canalisations de TransCanada Pipeline, TCPL, commencent aux limites de la Saskatchewan. Je sais qu'il y a un gazoduc de grande envergure qui descend directement au sud à partir de là, soit de Cabri, en Saskatchewan, mais en direction de l'est en Saskatchewan y a-t-il quelque chose de prévu, ou encore existe-t- il un réseau existant ou différent?

M. Cleland: Je m'excuse d'être un peu vague, mais il s'agit d'une carte schématique. Elle est seulement à titre indicatif. Il y a aussi le gazoduc de l'Alliance, donc il y a plusieurs gazoducs à destination des États-Unis.

Le sénateur Milne: En ce qui concerne cette production de 1 024 milliards de pieds cubes dans l'est ontarien, il me semble qu'il y a une canalisation qui part de la région de Niagara et une autre à destination des États-Unis, soit la canalisation Iroquois dans l'est de l'Ontario. Quelle est la quantité de gaz transportée dans la canalisation Iroquois à l'heure actuelle?

M. Cleland: Je n'ai pas ce renseignement sous la main, mais je peux vous le fournir plus tard.

Le sénateur Milne: Je suis un peu curieuse parce que mon mari a assumé la responsabilité de cette construction.

M. Cleland: Je vais me renseigner et vous revenir là-dessus.

Le président: Lorsque vous serez en mesure de satisfaire la curiosité du sénateur , pourriez-vous transmettre l'information à la greffière aussi?

Le sénateur Milne: Vous avez mentionné que nous exportons déjà 56 p. 100 de notre gaz à l'heure actuelle, et que lorsque l'on aura terminé la construction de la canalisation d'alimentation de l'île de Sable qui traverse le Nouveau- Brunswick on en exportera encore davantage. À combien estimez-vous ce volume d'exportation?

Le sénateur Buchanan: De quelle canalisation est-ce que vous parlez?

Le sénateur Milne: De celle de l'île de Sable.

Le sénateur Buchanan: Elle se rend déjà jusqu'au Massachusetts.

Le sénateur Milne: Il y a une autre canalisation qui traverse le Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Buchanan: Pas encore.

Le sénateur Milne: Est-ce que c'est celle-ci qui est proposée?

Le sénateur Buchanan: Oui, cette canalisation fait l'objet d'une proposition, si la phase II de l'île de Sable voit le jour, et je ne vois pas pourquoi elle n'y arriverait pas.

Le sénateur Milne: Vous le garantissez, n'est-ce pas? Certains se montreront très intéressés.

Trouvez-vous que nous exportons de trop grandes quantités de gaz naturel actuellement? Avec la diminution dans les champs de sable de l'Alberta, prévoyez-vous que nous devrons commencer à compter sur le gaz de l'île de Sable? Devrons-nous faire appel à d'autres sources d'alimentation en gaz? Que devrait faire le Canada pour se doter d'une vision à long terme lui permettant de déterminer la quantité exportée actuellement, celle dont nous aurons besoin dans le futur, et comment procéder pour accroître notre propre utilisation du gaz naturel Ben faire un combustible qui pollue moins — particulièrement dans les automobiles et les grandes industries?

M. Cleland: Votre question comporte plusieurs volets. Premièrement, exportons-nous de trop grandes quantités de gaz? Je ne pense pas. Il y a un autre moyen d'envisager la situation qui consiste à déterminer combien nous produisons aujourd'hui au Canada par rapport à il y a quinze ans avant la déréglementation et le libre-échange. Nous produisons actuellement au-delà de 6 billions de pieds cubes, soit entre le double et le triple de ce que nous produisions auparavant.

Je dirais que la déréglementation et le libre-échange ont permis d'établir un cadre extrêmement efficace pour attirer les investissements dans l'industrie et pour favoriser le développement des ressources que nous possédons. Dans le futur, je m'attends à ce que nous ayons besoin de ressources pour le nord. Nous aurons besoin du gaz de la vallée du Mackenzie et de celui de l'Alaska. Nous aurons besoin du méthane de gisements houillers. Nous aurons besoin du gaz provenant des installations de forage en mer de la côte Est. Et, au bout du compte, il est très possible que le GNL fasse son entrée au Canada, et très certainement aux États-Unis.

Il serait, à mon avis, extrêmement difficile de revenir à la situation qui s'est présentée entre 1985et 1990. Cette situation nous a été favorable, et je pense qu'elle continuera de l'être.

Le sénateur Milne: Je crois comprendre que l'accord de libre-échange garantit le volume de gaz que nous devons livrer aux États-Unis.

M. Cleland: Pas tout à fait. L'accord prévoit que dans l'éventualité où le gouvernement du Canada déciderait de restreindre la production de gaz pour des motifs de conservation des ressources, il faudrait prendre des mesures pour garantir un approvisionnement dans les mêmes proportions à destination des États-Unis.

Le sénateur Milne: Donc, la même proportion, mais pas nécessairement le même volume.

M. Cleland: Nous ne garantissons absolument pas le même volume. C'est une distinction importante à faire.

Le sénateur Milne: Est-ce que cela aura une incidence sur notre capacité d'atteindre nos objectifs en ce qui concerne le Protocole de Kyoto?

M. Cleland: Dans la mesure où l'on ressentira un resserrement dans les marchés du gaz — ce que nous sommes à même de constater en ce moment — et les répercussions sur les prix, il est certain que cela aura un effet sur les consommateurs, qu'il s'agisse de ceux du secteur industriel ou résidentiel, ou des constructeurs de centrales énergétiques. Dans cette mesure, oui cela aura des répercussions.

À notre avis, il appartient aux administrations de faire les bons choix afin de tout mettre en oeuvre pour accroître la disponibilité de l'offre — l'offre dans le contexte nord-américain. Je le répète, l'utilisation du terme «réservoir» fait référence au fait que l'on constituera un réservoir à marché unique. Les prix seront établis dans ce contexte. Donc, d'une manière ou d'une autre, les Canadiens devront payer les prix qui seront fixés dans le contexte nord-américain.

Le président: Ces prix sont de toute façon réglementés en fonction du pourcentage de bénéfice réalisé par vos membres dans l'exercice de leurs activités. N'est-ce pas?

M. Cleland: Nous nous occupons du transport. Nous sommes soumis à une réglementation un peu différente, selon la province, en ce qui a trait aux prix que nous pouvons exiger.

Le sénateur Cochrane: Je vais vous lire un article rédigé par Roma Luciw dans The Globe and Mail au sujet d'une réunion qui s'est tenue à Washington aujourd'hui. Je cite:

À Washington, aujourd'hui, un dirigeant de TransCanada Corp. a déclaré devant un comité du gouvernement américain que la demande pour le gaz naturel va excéder les stocks existants en Amérique du Nord.

«Nous pensons que pour conserver des prix concurrentiels en Amérique du Nord, au cours de la prochaine décennie, nous aurons besoin du gaz naturel du nord canadien et de l'Alaska, de même que du gaz naturel liquéfié,» [...]

«Nous estimons que la demande en gaz naturel croîtra de plus de 15 milliards de pieds cubes par jour d'ici 2012, mais que la croissance de l'offre en provenance des sources traditionnelles nord-américaines ne devrait pas être supérieure à 5 milliards de pieds cubes par jour».

Voulez-vous faire des commentaires sur cet article?

M. Cleland: J'ai pris connaissance de l'existence de ce rapport, mais je ne pense pas être en mesure de faire de commentaires en ce qui concerne la précision de ces chiffres. J'ignore exactement quels sont les chiffres utilisés par M. Hal Kvisle dans ce rapport. Néanmoins, les ordres de grandeur me semblent justes.

Une distinction importante à faire est qu'il mentionne l'offre disponible à partir des sources «traditionnelles» en Amérique du Nord — ce qui ne comprend pas nécessairement le méthane de gisements houillers et le gaz du Nord. Par conséquent, certaines sources n'ont pas été prises en compte.

La croissance de la demande me semble à peu près réaliste. Le message à retirer de cette déclaration est selon moi que nous devrons compter sur nos sources traditionnelles ainsi que sur des sources non traditionnelles pour pouvoir répondre à la demande.

Le sénateur Cochrane: Je suis originaire de l'Est et je ne compte pas parmi les 5 millions de consommateurs du gaz naturel — pas par choix, mais parce que je suis de Terre-Neuve. Je me demande quel est le coût du gaz naturel par rapport aux autres sources d'énergie pour le consommateur moyen au Canada?

M. Cleland: De façon générale, en ce qui concerne le chauffage des locaux, dans la plupart des régions, il s'agit de la ressource la plus économique. C'est un peu plus difficile au Québec où nous sommes en concurrence avec une électricité à très faible coût de revient.

En ce qui concerne le chauffage de l'eau chaude, le coût du combustible est concurrentiel, mais les chauffe-eau sont plus chers. Ce marché est plus difficile à pénétrer pour notre industrie. De façon générale, en ce qui concerne le chauffage des locaux — qui représente la grande part du marché — le gaz naturel est le choix le plus économique. En revanche, étant donné les prix qui ont cours aujourd'hui, les choses sont un peu plus difficiles.

Le sénateur Cochrane: Pour le consommateur local, c'est comparable.

M. Cleland: Non, c'est mieux, parce que le gaz naturel est une option moins polluante et certainement un meilleur choix que l'électricité, dans la plupart des régions.

Le sénateur Cochrane: Que prévoyez-vous en ce qui a trait à l'expansion?

M. Cleland: Je ne suis pas sûr de pouvoir vous répondre parce que mon industrie représente le segment de la distribution locale du secteur, et non le transport sur de grandes distances. J'ignore à combien on estime actuellement les coûts rattachés au prolongement du réseau de transport plus loin dans l'est au Québec ou encore au nord du Nouveau-Brunswick ou à l'Île du Prince-Édouard. Mais je pense que ces coûts ne se sont pas révélés favorables. Étant donné les questions en suspens concernant les stocks de l'île de Sable — même si j'espère que le sénateur Buchanan ne se trompe pas en disant que les difficultés vont être aplanies — il est difficile de prévoir quelles sont les perspectives. La région de Terre-Neuve comporte, bien entendu, d'énormes difficultés, parce que les stocks sont énormes, mais qu'ils se trouvent à une grande distance au large et qu'ils sont difficiles d'accès.

Le sénateur Merchant: En ce qui concerne les changements climatiques liés au gaz naturel, qui sont l'objet de notre préoccupation, vous insistez sur la consommation et les consommateurs. Il y a des consommateurs industriels et des consommateurs résidentiels. J'aimerais que vous nous parliez de ces derniers, parce que des objectifs ont été fixés en vue de permettre des économies individuelles.

Vous avez déclaré que les consommateurs doivent jouer un rôle clé et que le gouvernement et le secteur du gaz doivent les soutenir. Pourriez-vous élaborer un peu sur ce soutien que vous pourriez fournir aux consommateurs individuels?

M. Cleland: Oui. Plusieurs de nos membres se sont déjà dotés de programmes de GAD, de différentes natures. Certains sont plus complets que d'autres, suivant le traitement des organismes de réglementation et compte tenu de la brochette très variée de programmes. Si vous le souhaitez, je pourrai vous fournir le mémoire qu'a soumis Enbridge Gas Distribution Inc. à la Commission de l'Énergie de l'Ontario en décembre 2002. Vous y trouverez une description assez détaillée de ces programmes. C'est un document du domaine public qui pourrait vous intéresser.

Le soutien varie énormément d'un programme à l'autre. Certains petits programmes d'encouragement visent à réduire le coût de conversion des chaudières à haut rendement. D'autres programmes qui mettent à contribution divers partenaires — notamment, des entreprises de services éconergétiques — permettent de transmettre de l'information aux consommateurs pour qu'ils fassent une installation et une utilisation conformes de l'équipement — par exemple, l'installation et le réglage des thermostats programmables au niveau recommandé. Bref, les programmes sont multiples et ils requièrent la participation de nombreux partenaires.

Le sénateur Merchant: Pour convaincre les consommateurs de se conformer, la transition doit être à toutes fins utiles transparente. Si elle demande trop d'efforts, je doute que les consommateurs soient intéressés. Nous aurons beau mettre les meilleurs plans en place, il n'est pas dit que les consommateurs prendront le train.

M. Cleland: C'est un lourd défi. Vous pouvez faire l'exercice de convertir les chiffres que nous vous avons soumis en dollars par tonne de CO2 pour l'ensemble du programme Enbridge. De quelque point de vue que l'on se place, ces chiffres sont excellents pour ce qui est des programmes de gestion axée sur la demande, mais ils représentent plus du double du prix plafond fixé par le gouvernement pour les crédits de CO2.

Seulement, ce sont des chiffres réels, qui dénotent une réalité canadienne, et qui ont une incidence durable sur notre capital national. Le jeu en vaut vraiment la chandelle. Les meilleurs chiffres se trouvent à l'échelon industriel, où les consommateurs sont plus gros, les coûts des transactions moins élevés et où il existe de réelles possibilités d'obtenir les effets désirés. C'est plus cher dans le secteur commercial, et encore plus cher à l'échelon individuel. Vous avez tout à fait raison: comme les consommateurs ne paient pas beaucoup pour l'énergie, ils ne portent pas attention aux conséquences.

Le président: Ils commencent à faire attention.

M. Cleland: Leur intérêt vient par vagues et c'est là tout le problème. Leurs efforts ne durent pas parce que les prix tantôt montent en flèche — ce dont ils se rendent compte B, tantôt piquent du nez.

Le président: Dans l'ensemble, le gaz naturel, du moins en Alberta, était auparavant ridiculement bon marché — c'était une dépense négligeable dans le budget mensuel. Or, pour beaucoup, il prend de plus en plus de place dans le budget. Le coût a grimpé pour le consommateur.

Le sénateur Finnerty: Récemment, des membres du comité se sont rendus en Californie pour discuter de la question de l'efficacité énergétique. Nous avons rencontré des représentants de Pacific Gas and Electric pour nous entretenir du succès de leurs efforts pour promouvoir l'efficacité énergétique auprès de leurs clients résidentiels. Êtes-vous d'accord avec cette entreprise quand elle dit que c'est parce qu'elles communiquent régulièrement avec leurs clients que les entreprises de services publics sont les mieux placées pour promouvoir l'efficacité énergétique?

En Californie, les programmes d'efficacité énergétique sont financés par une surtaxe sur toutes les factures de services publics, ce qui garantit un appui financier considérable et soutenu d'année en année. Une telle approche serait- elle applicable au Canada?

M. Cleland: Pour répondre à la première partie de la question, je dirais que oui, tout autant d'ailleurs que pour les services d'électricité. Tous les mois, nous livrons nos factures à la porte des consommateurs, nous répondons à des appels de service, et cetera. Nous connaissons bien les consommateurs et leur profil de consommation d'énergie. Toutes sortes de raisons nous mettent en excellente position, sinon pour prendre la tête, du moins pour assumer une grande partie de l'effort.

C'est d'ailleurs pour cela que nous collaborons avec Ressources naturelles Canada. Déjà, pour cette raison justement, plusieurs de nos membres travaillent avec RNC à la mise en place de contrats de partenariat. Entre l'industrie et le gouvernement, beaucoup d'information circule et nous pouvons puiser à même une immense compétence pour mettre au point des façons efficientes d'atteindre l'objectif.

En ce qui concerne la pertinence de la surtaxe, je ne peux pas vous donner de réponse définitive. Je sais cependant que des organismes de réglementation comme la Commission de l'énergie de l'Ontario, qui rend compte de l'effet des programmes de GAD par l'échelle de tarification, doivent créer des mesures d'encouragement qui convaincront l'industrie de se mettre à l'action. N'oublions pas que l'objet de ces mesures est de réduire notre production. Pour que les investisseurs soient intéressés par la proposition, il faut les en convaincre par des incitatifs.

Le président: La solution au problème de l'insuffisance de l'offre ne représente-t-elle pas une mesure incitative?

M. Cleland: Si on pouvait obtenir de tels effets à court terme, ce serait vrai. Cependant, nous sommes dans une période de latence. Le problème lié à l'offre insuffisante sera probablement réglé dans un an, deux dans le pire des cas. La capacité d'arriver à un résultat significatif auprès des consommateurs en si peu de temps est très limitée. Mais oui, c'est une partie du problème. C'est l'un des aspects qu'il faudra prendre en compte dans l'élaboration d'une politique gouvernementale.

Le président: Pour poursuivre dans le même ordre d'idées, vous êtes certainement au fait — vous qui étiez auparavant dans l'industrie de l'électricité — du succès obtenu par B.C. Hydro avec son programme concerté axé sur le consommateur. Je raconte souvent la même histoire au sujet de mon cousin, qui est dans l'industrie du gaz. Il a mis trois ans pour convaincre les clients de sa société d'utiliser moins de gaz, en leur expliquant comment y arriver sans nuire à leur qualité de vie. B.C. Hydro en a fait autant.

Les deux industries prévoyaient un problème imminent et aigu d'approvisionnement. L'offre était insuffisante et la demande était excédentaire. L'industrie du gaz disposait de trois solutions possibles. La première consistait à forer de nouveaux puits, avec tout ce que cela comporte d'incertain. Une autre solution aurait été de construire de nouveaux gazoducs, sans assurance du côté de la sécurité de l'approvisionnement et moyennant un coût très élevé. La troisième façon pour combler l'écart entre l'offre de gaz et la quantité à vendre aux consommateurs consistait à réduire les besoins de ces derniers.

Ils ont investi des sommes considérables et, à très brève échéance — B.C. Hydro a fait exactement la même chose pour l'électricité B, ils ont réussi à combler la différence entre la pénurie et la demande excédentaire en réduisant la demande. Ils ont tiré un immense avantage en reportant — sinon en éliminant — d'énormes investissements de capitaux. Les profits ont sensiblement augmenté et les consommateurs étaient fort heureux de recevoir des factures de gaz et d'électricité beaucoup moins élevées. C'est ce qu'a fait B.C. Hydro voilà deux ans, si je me souviens bien. Vous le savez probablement mieux que moi.

M. Cleland: Je ne crois pas que l'issue ait été si rapide, mais je me garde de vous contredire parce que je n'ai pas les faits exacts en mémoire. Dans le cas de B.C. Hydro, la courbe des programmes de gestion de la demande n'est probablement pas très différente de celle d'Enbridge, qui figure dans le mémoire — la période de mise en place a dû s'étendre sur quelques années.

Il est possible que le programme de B.C. Hydro ait connu un succès plus rapide. À ma connaissance, le seul cas de réussite instantanée est celui de la Californie, où la crise était imminente — ou réelle — et où les consommateurs ont participé à l'effort de conservation de l'énergie.

Pour obtenir un effet durable, il faut chercher à influer sur les décisions d'achat qui exigent un gros investissement, telle que la décision concernant l'achat d'une nouvelle chaudière. L'effet peut être immédiat, mais il ne sera pas continu, comme c'est le cas si on tente de convaincre le consommateur de baisser le thermostat. Dès que la crise est endiguée, le thermostat remonte et le pull disparaît.

Le président: On trouve des chaudières plus efficaces maintenant.

M. Cleland: Oui. C'est une question intéressante parce qu'il arrive effectivement que la courbe bouge plus vite; cependant, dans la majorité des cas, elle suit celle d'Enbridge.

Le président: Nous recevrons des témoins de B.C. Hydro la semaine prochaine; nous pourrons leur poser ces questions.

Le sénateur Buchanan: J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos deux invités et informer mes collègues du comité que tous deux possèdent une très vaste expérience de la Nouvelle-Écosse.

Michael Cleland, si vous voulez bien, je vais retourner en arrière — la Nouvelle-Écosse a signé le premier accord fédéral-provincial d'exploitation extracôtière, trois ans avant Terre-Neuve, soit dit en passant.

Le sénateur Cochrane: Qui était premier ministre à cette époque?

Le sénateur Buchanan: J'étais premier ministre et j'ai signé les documents. En 1986, nous avons signé le deuxième document — nous avons signé le premier avec le premier ministre Trudeau, et le deuxième avec le premier ministre Mulroney. Ces deux accords extraordinaires avaient été négociés par nos experts des ministères de l'Énergie et du Développement de la Nouvelle-Écosse. Pendant toutes ces années, Michael Cleland était au service du ministère du Développement de la Nouvelle-Écosse. Voilà pourquoi je souligne à quel point nous sommes choyés de recevoir deux témoins d'une si grande envergure.

Heritage Gas a finalement signé un contrat de distribution du gaz en Nouvelle-Écosse, mais seulement pour le centre de la province, par le détroit de Canso et pour les environs. Les municipalités de la région du détroit de Canso ont aussi signé un contrat de distribution. À ce jour, aucune distribution n'est prévue au Cap-Breton, mais je crois que nous résoudrons cette question dans quelques années, en augmentant les volumes de gaz amenés jusqu'à la côte, mais aussi en résolvant les problèmes de gazoducs vers les industries du Cap-Breton.

Fait intéressant, les activités d'extraction du charbon ont cessé au Cap-Breton. Nous n'en produisons pas moins 1 000 mégawatts d'électricité à partir du charbon. Les Cap-Bretonnais sont profondément irrités de voir les collines de charbon qui transitent par le détroit de Canso en provenance de la Colombie et par les routes de Hampton, aux États- Unis, pour être ensuite expédiées par camion et par train vers les centrales électriques du Cap-Breton. Comme vous le savez déjà, notre espoir est de convertir au gaz naturel, dans un avenir le plus rapproché possible, les usines du Cap- Breton qui sont alimentées au charbon, quand l'offre de gaz augmentera.

Je souligne par ailleurs, pour répondre à la question de la sénatrice Milne au sujet du gazoduc, qu'un important gazoduc relie la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick, avant de descendre à Dracut, Massachusetts. Nous acheminons chaque jour entre 400 et 500 millions de pieds cubes vers le nord-est des États-Unis.

Savez-vous le plus triste de cette histoire? J'ai présenté un document à l'Association parlementaire canado- américaine il y a trois semaines. Des membres de la Chambre des représentants et du Sénat des États-Unis qui viennent du nord-est ignoraient complètement que, dans la ville de Boston et dans la région, des foyers sont chauffés avec du gaz provenant de la Nouvelle-Écosse. Ils ne le savaient pas. La plupart ne savent pas non plus que le Canada vend beaucoup d'énergie aux États-Unis. Ils ne sont tout simplement pas au courant.

Il est impératif de leur faire savoir à quel point ils sont dépendants du Canada pour une bonne partie de cet approvisionnement, y compris de cette vieille et minuscule Nouvelle-Écosse. Sans oublier Terre-Neuve.

J'ai assisté à une conférence tenue à Boston voilà des années, à l'époque où El Paso avait proposé un plan d'acheminement du gaz naturel de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse par gazoduc sous-marin jusqu'au nord-est des États-Unis. Le plan est mort dans l'oeuf, pour toujours peut-être, mais il est fort possible que nous puissions venir en aide à Terre-Neuve.

Le sénateur Cochrane: Il y a beaucoup de gaz là-bas.

Le sénateur Buchanan: Oui, il y en a beaucoup.

Le sénateur Milne: Nous devrions convoquer le sénateur Buchanan comme témoin pour qu'il continue d'entretenir le comité à cet égard.

Le sénateur Buchanan: J'ai une question. Les commentaires sur l'aide du gouvernement à la conversion ont piqué mon intérêt. L'un des problèmes du Nouveau-Brunswick est la rareté des possibilités de conversion. Je crois que l'objectif était de 4 000 foyers seulement. En Nouvelle-Écosse, un fonds de 12 à 14 millions de dollars viendra en aide aux gens qui veulent faire la conversion du mazout au gaz, soit dit en passant cette mesure a suscité la colère des fournisseurs de mazout de la Nouvelle-Écosse. Cependant, cet argent ne provient pas du trésor public. Il vient des réserves mises de côté par les entreprises qui font du forage au large de la Nouvelle-Écosse, des entreprises qui font du développement et de la production dans le domaine du gaz naturel. Ces entreprises ont constitué un fonds de quelque 12 millions de dollars à l'appui de la conversion. Ce fonds constituera un atout précieux pour convaincre les gens d'adopter le gaz naturel en Nouvelle-Écosse. La joute ne sera pas facile, mais le succès viendra.

J'ai parlé avec les responsables de Maritime and Northeast Pipeline voilà quelques semaines. ENCan était à Halifax auparavant. Malheureusement, les bureaux ont été partiellement fermés. Ils reviennent pour le projet Sable II, qui permettrait d'acheminer un autre demi-milliard de pieds cubes de gaz naturel vers les États-Unis chaque jour. Ce serait un bon coup de pouce pour la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick.

Qu'est-ce que vous en pensez? Qu'avez-vous entendu au sujet de Sable II et quelles sont les chances que ce projet se réalise dans un proche avenir?

Le président: Il vient tout juste d'apprendre son existence par votre bouche.

M. Cleland: Je ne crois pas que mon opinion vous soit très utile parce que mon expertise dans ce domaine est très limitée. Je me suis forgé une opinion à partir de la couverture dans la presse financière.

Comme vous le savez, la zone extracôtière de la Nouvelle-Écosse présente des difficultés du fait du morcellement. Elle est profonde et la pression y est énorme. L'exploitation y est très onéreuse, mais on a quand même réussi une première percée. Il s'y trouve encore du gaz. Il se peut qu'à ce point, les processus d'approbation soient très difficiles.

Je n'en sais pas plus. Je n'oserais pas vous donner une opinion au sujet de la prochaine étape.

Le président: Les processus d'approbation de qui?

M. Cleland: Des divers organismes de réglementation. Un processus réglementaire complexe est en cause. Et il se complexifie à mesure que le temps passe.

Le sénateur Buchanan: J'ai parlé avec des gens du ministère de l'Énergie, de la direction du pétrole de la Nouvelle- Écosse, du ministère du Développement de la Nouvelle-Écosse et de l'Office Canada/Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers. Tous tentent désespérément de réduire les contrôles réglementaires parce que, comme vous le savez, beaucoup de ces entreprises, sans se retirer complètement, ont décidé de reporter leurs plans pendant un certain temps en raison des règlements de l'Office, de l'environnement, du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial. La situation est hautement complexe pour ces entreprises. Elle sera redressée, c'est notre souhait, très bientôt, pour que les activités reprennent enfin.

Vous le savez déjà, on a proposé de construire un autre gazoduc, et la proposition tient toujours. El Paso propose de construire un gazoduc entre les champs de l'île de Sable jusqu'à la côte de Shelburne, de construire une raffinerie de gaz à cet endroit et d'expédier le gaz par voie sous-marine jusqu'au Massachusetts. Le projet est sur la glace.

Le sénateur Christensen: Dans votre mémoire, vous indiquez que l'un des objectifs est d'abolir certains obstacles réglementaires. Pouvez-vous élaborer sur ce que vous considérez être les obstacles réglementaires? Comment devons- nous en tenir compte dans notre étude?

M. Cleland: Il s'agit d'obstacles réglementaires posés par les organismes provinciaux de réglementation de l'énergie. Les façons de les aborder sont multiples.

Le sénateur Christensen: Les premiers ministres sont-ils à l'origine du problème?

Le sénateur Buchanan: Je vais m'abstenir de tout commentaire.

M. Cleland: Il faut trouver un moyen de collaborer avec les organismes de réglementation pour concevoir des systèmes qui proposeront des mesures d'encouragement pertinentes. Bien entendu, le plus difficile vient de ce que cet effort a des répercussions sur les prix. Et ceux qui payent ne sont pas tous en faveur d'un changement. Il faut trouver un équilibre entre les intérêts à court terme de certains consommateurs et les intérêts à long terme, selon ce qu'il est permis de croire, à la fois des consommateurs et des entreprises.

La plupart des organismes de réglementation évoluent dans le bon sens. Il reste à les pousser à aller plus loin et plus vite.

Le sénateur Christensen: Ces règlements ralentiraient l'expansion des marchés.

M. Cleland: C'est un fait. Nos entreprises sont en affaires. Étant donné que les coûts retombent entièrement sur les actionnaires, ils sont plus ou moins intéressés.

Le sénateur Milne: Dans l'Ouest, les projets de transformation d'anciens puits de gaz en puits de carbone sont nombreux. En vidangeant le dioxyde de carbone dans le puits, on prolonge la source de gaz d'une région. S'agit-il d'un marché marginal ou y voyez-vous un avenir?

M. Cleland: Je vous avoue que je ne connais pas très bien la technique qui consiste à utiliser le CO2 pour augmenter la production de gaz. On s'en sert pour la production pétrolière.

Une possibilité intéressante serait de séquestrer le dioxyde de carbone dans les filons de charbon et d'en extraire le méthane, un élément naturel du charbon. Ne me demandez pas quel est le principe chimique, mais le dioxyde de carbone y adhère. Tous y gagnent.

Je ne suis toutefois pas très au courant pour ce qui est de l'injection dans les puits de gaz.

Le sénateur Milne: Nous devrions approfondir ce thème pour voir ce que nous pouvons apprendre.

Quel est l'avenir dans le domaine des véhicules privés au gaz naturel? Actuellement, la plupart de ceux qui sont en usage ont été convertis, et leur efficacité est assez médiocre. Certains nouveaux véhicules au gaz sont plus efficaces que les véhicules convertis.

Ces modèles ont-ils de l'avenir? Je sais que tout dépend de la capacité des gens de s'approvisionner en gaz naturel, mais êtes-vous optimiste relativement à leur avenir?

M. Cleland: Nous serions ravis de constater de bonnes perspectives pour les véhicules privés. Il existe beaucoup de possibilités pour les propriétaires de parcs qui veulent se tourner vers des véhicules au gaz naturel. Ils sont économiques en plus d'être écologiques.

C'est plus difficile dans le cas des véhicules privés. Vous avez mis le doigt sur la principale raison — l'infrastructure d'avitaillement en carburant. Je ne crois pas qu'on en verra beaucoup à court ou à long terme.

Le président: Je vais poursuivre sur la question des véhicules au gaz naturel. Je fais abstraction des nouveaux véhicules, extraordinairement efficaces sur le plan de la combustion de l'essence, ainsi que des voitures hybrides.

Les moteurs conventionnels dont sont équipées la plupart des voitures tournent mieux, ils durent plus longtemps et ils sont plus efficaces pour ce qui est de la combustion du gaz naturel, si nous comprenons bien. Ils sont même plus efficaces sur le plan des émissions, notamment si on les compare aux véhicules à l'éthanol. C'est du moins ce que nous ont laissé entendre divers intervenants.

Si je comprends bien, votre association ne fait pas autant de pression pour convaincre les particuliers d'adopter des véhicules au gaz qu'elle ne le fait pour les parcs.

M. Cleland: Je vais demander à mon collègue de commenter. Il en sait plus que moi au sujet de l'utilisation des carburants dans le transport. Si nous voyons des possibilités d'augmenter la part du marché dans le domaine des véhicules privés, nous ne manquerons certainement pas de tenter notre chance. Tout dépendra du potentiel de ce marché.

Le président: Ne devez-vous pas créer le marché?

M. Cleland: Oui, bien entendu, mais tout dépend de l'investissement que nous sommes prêts à faire.

Le président: C'est justement ma question.

M. Cleland: Le marché le plus prometteur est encore celui des parcs de véhicules. Vraisemblablement, si nous réussissons à nous imposer encore dans le domaine des parcs de véhicules et si, par voie de conséquence, l'infrastructure d'avitaillement s'en trouve améliorée, les possibilités pourraient devenir meilleures. Cependant, la capacité d'investissement est limitée, et le potentiel ne semble pas suffisant pour justifier un effort important de ce côté.

M. Brendan Hawley, gestion des communications et du marketing, Association canadienne du gaz: À mon avis, il s'agit d'une question de mandats et de subventions. Certains groupes industriels ont exprimé avec beaucoup de verve leur opposition aux subventions, avec encore plus de conviction pour ce qui est de l'utilisation de l'éthanol.

La question est double. Le premier volet est d'ordre économique. Dans un marché ouvert, est-il raisonnable d'utiliser l'argent des contribuables pour favoriser la pénétration dans un marché compétitif d'un type de carburant en particulier? Il y a aussi l'argument environnemental, dans la mesure où l'addition d'éthanol à l'essence ordinaire augmenterait sa volatilité, ou son taux d'évaporation et, par voie de conséquence, les émissions de gaz à effet de serre. J'ai entendu ces arguments.

En ce qui a trait aux carburants non conventionnels, quand le débat a eu lieu à la Chambre il y a deux ou trois ans, on a soulevé la question du rendement des véhicules à essence par rapport aux véhicules au gaz naturel. Dans l'une des discussions, la GRC a fait savoir, sans doute avec une pointe d'ironie, qu'on y était inquiet à l'idée d'utiliser des véhicules de chasse qui fonctionneraient avec un carburant de remplacement. Quelqu'un a suggéré que la GRC n'aurait dans ce cas pas le choix d'adopter une nouvelle devise du genre «Jadis, nous les attrapions tous».

Le président: Je ne comprends pas la blague.

M. Hawley: Elle fait allusion au rendement des moteurs à carburant de remplacement, qui n'est pas aussi bon que celui des moteurs qui tournent avec de la bonne vieille essence.

Le président: La voiture ne va pas aussi vite?

M. Hawley: Ni aussi vite, ni aussi loin.

Parmi les exemples de problèmes soulevés se trouvaient les limites du propane — il est impossible de stationner une voiture au propane dans un garage souterrain. De tels problèmes restreignent le choix de carburants et leur disponibilité.

Selon l'expérience acquise, comme l'a mentionné M. Cleland, le gaz naturel semble la meilleure option pour les déplacements sur des routes connues, dans les zones urbaines, et pour les parcs de véhicules.

Le président: Quels efforts votre organisation a-t-elle faits pour convaincre les gens d'installer des chaudières neuves et plus efficaces dans leur foyer?

M. Cleland: Nos programmes de gestion axée sur la demande consistent principalement à trouver des moyens de faire connaître les modèles les plus efficients et à inciter les consommateurs à utiliser des chaudières à haut rendement. Nous avons d'autres initiatives en lien avec les thermostats, les chauffe-eau, et ainsi de suite, mais les meilleures possibilités se trouvent du côté de l'application des meilleures technologies dans le marché.

Le président: Le sénateur Buchanan — tout comme vous — a évoqué la résistance des consommateurs d'une région donnée à convertir leurs installations, quelle que soit l'énergie utilisée, au gaz naturel pour chauffer leurs foyers et pour alimenter leurs cuisinières. Je viens de l'Alberta, et mon père a travaillé toute sa vie pour la compagnie de gaz. Tout le monde en Alberta utilise le gaz naturel depuis 1912 ou 1913. Le problème m'est donc complètement étranger. Quel est l'état d'esprit des gens qui ont accès au gaz naturel mais qui refusent de le faire entrer dans leur maison?

M. Cleland: Le sénateur Buchanan pourrait peut-être commenter aussi, mais à mon avis il s'agit surtout d'un problème d'infrastructure. Il faut faire passer des canalisations, amener le gaz jusqu'à la rue et faire les raccordements nécessaires aux foyers.

Le président: Les gens ne veulent pas qu'on creuse dans leurs rues?

M. Cleland: Ou ils ne veulent pas payer pour cela. Il en est ainsi: si nous desservons un gros client industriel, l'acheminement est bon marché, et c'est aussi le cas pour les centrales énergétiques. Pour approvisionner des consommateurs multiples répartis dans des maisons individuelles, il en coûte plus cher. L'enfouissement de tuyaux dans Halifax-Ironstone coûte particulièrement cher. C'est le genre de difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Cependant, une fois l'avitaillement assuré, le gaz devient une bonne option.

Le président: Les problèmes liés à l'infrastructure touchent l'ensemble du pays, à divers degrés. À ma connaissance, il en a toujours été ainsi. Les compagnies de gaz ont toujours investi dans l'infrastructure pour se ménager un accès aux consommateurs. Personne n'a jamais payé pour l'installation de la canalisation principale nécessaire à l'approvisionnement en gaz naturel. Peut-être quelqu'un a-t-il payé pour la canalisation raccordée à la maison, mais pas pour les canalisations principales de distribution. Pouvez-vous me dire si je me trompe?

M. Cleland: Je ne suis pas particulièrement au courant de cette question. Je connais la situation du gazoduc de l'île de Vancouver, qui a été étendu jusqu'à l'île de Vancouver. Les travaux ont pu être effectués en partie grâce à une aide à la construction du réseau de distribution.

Le président: Une subvention gouvernementale?

M. Cleland: Je ne me souviens pas au juste de la structure du financement. Je travaillais pour le ministère des Finances à l'époque et j'ai été appelé à travailler un peu dans ce dossier. Des ententes de financement gouvernemental ont été conclues, mais je ne me souviens plus des détails. Pour ce qui est de la première expérience, je ne suis pas assez au courant pour commenter.

Le sénateur Buchanan: Heritage Gas, et la société Sempra avant elle, ont prévu installer, et installeront dans les faits, des canalisations dans les rues de subdivision. Le mieux serait qu'elles commencent par les subdivisions importantes, parce qu'il est plus facile de desservir ces subdivisions que le centre de Halifax ou d'autres zones du même type.

Heritage paiera pour les canalisations principales raccordées au réseau de Maritime Northeast Pipeline, soit les canalisations qui acheminent le gaz vers le réseau de distribution. Cependant, tout comme pour les canalisations d'égout entre la rue et la maison, le consommateur doit payer l'installation. Le consommateur doit aussi payer pour la conversion de sa chaudière au gaz naturel. C'est pourquoi le produit est si difficile à vendre au Nouveau-Brunswick. En Nouvelle-Écosse, ce ne sera pas si difficile parce que nous avons accès au fonds de 12 à 14 millions de dollars réservé au cours des 4 dernières années par Mobile Oils et d'autres groupes pour inciter les consommateurs à convertir leur foyer au gaz naturel.

L'autre raison est la résistance au changement. Une fois cette étape franchie, je crois que tout ira sans problème. Chez Heritage Gas, on sait que le produit sera difficile à vendre pendant un bout de temps, mais on est aussi convaincus que tout se déroulera bien et rapidement une fois que les gens auront constaté que le train est en marche.

Le président: Envoyez-les à Medicine Hat. Medicine Hat repose, pour citer Rudyard Kipling, «sur un sous-sol d'enfer». La ville est construite sur un gigantesque dépôt de gaz naturel. Elle garde pour elle son stock de gaz naturel, et refuse de l'exporter. Elle approvisionne uniquement ses citoyens. C'est très pratique.

Le sénateur Buchanan: J'aimerais vous livrer un commentaire sur un événement survenu la semaine dernière. La visite technique chez General Motors a été des plus intéressantes. J'ai découvert alors que l'hydrogène pouvait être produit en énormes quantités à partir du gaz naturel. Comme vous le savez, l'ingénieur en chef vient de la Nouvelle- Écosse. Il m'a dit que la Nouvelle-Écosse possède une imposante capacité d'extraction d'hydrogène du gaz naturel dans les usines de Point Tupper. Malheureusement, il ne servirait à rien présentement mais, quand les véhicules à l'hydrogène feront leur entrée dans le marché, l'hydrogène trouvera un marché important, au lieu d'être dégagé dans l'atmosphère comme maintenant. Le gaz naturel est acheminé sur la côte. Il est traité dans les usines de transformation, avant d'être envoyé aux usines de traitement, qui peuvent notamment en extraire de l'hydrogène, pour lequel les promesses d'avenir sont très bonnes. C'est une autre utilisation possible du gaz naturel.

Le sénateur Merchant: Lors de notre visite en Californie, nous avons conduit une voiture dotée d'une pile à combustible. Notre hôte nous a demandé si nous avions apprécié l'expérience. Nous avons répondu que la voiture allait très bien et que la conduite était facile. Il en était très heureux parce que, comme il nous l'a mentionné, la voiture avait coûté 15 millions de dollars. J'attends que les prix soient un peu plus raisonnables!

Le sénateur Buchanan: Les coûts de développement ont dépassé les 6 millions de dollars.

Le sénateur Merchant: Quand ces voitures seront-elles mises en vente dans le marché?

Le sénateur Buchanan: Je serai mort et enterré.

Le président: Dès qu'ils en auront construit une deuxième. Elles coûtent seulement 3 millions de dollar l'unité, plus le métal. Des économies d'échelle seront possibles.

Messieurs, avez-vous d'autres commentaires avant que la séance ne soit levée?

M. Cleland: Le point qu'a soulevé le sénateur au sujet de l'hydrogène pourrait être important. Il existe deux sources principales d'hydrogène: le reformage à la vapeur du gaz naturel, une technologie éprouvée, et l'électrolyse, qui demande beaucoup plus d'énergie et qui coûte beaucoup plus cher.

Si nous parvenons à créer un parc de véhicules à l'hydrogène, nous devrons choisir l'une de ces deux sources. À notre avis, le gaz naturel pourrait s'avérer, pour une certaine période du moins, une très bonne source.

Le sénateur Christensen: Depuis la ratification de l'Accord de Kyoto et l'établissement de l'objectif une tonne, avez- vous constaté un regain d'intérêt de la part des consommateurs à l'égard du gaz naturel? Y a-t-il eu un soubresaut ou les choses ont-elles continué comme à l'habitude?

M. Cleland: Pour être honnête avec vous, l'objectif une tonne et le Plan n'ont eu aucun impact sur les consommateurs. Ils ne font aucun cas de ce genre de mesures. Les marchés, depuis plusieurs années, affichent une courbe rectiligne, sans signe de croissance. Et comme je l'ai déjà dit, les prix courants suscitent une certaine résistance.

Le président: Il faut tout simplement régler ce problème.

M. Cleland: Nous sommes d'avis qu'une réflexion approfondie sur le thème de l'offre devrait faire partie des priorités en vue de l'élaboration d'une politique gouvernementale canadienne, à court terme. Nous partageons ce point de vue avec beaucoup de nos collègues de l'industrie de l'énergie.

Le président: Nous découvrons que la question de l'offre de toutes les formes d'énergie est préoccupante.

M. Cleland: Oui, il en est de plus en plus ainsi pour tout. Vous avez entendu des témoins des secteurs de l'électricité, du pétrole et du gaz. Ce n'est pas une crise, mais le problème est sérieux et il faut se pencher dessus en adoptant une perspective à long terme.

Le président: Merci beaucoup, messieurs. Votre exposé a été fort édifiant. Je suis convaincu qu'une bonne partie de vos propos seront cités dans le rapport que nous sommes à rédiger.

La séance est levée.


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