Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 19, Témoignages du 16 septembre 2003
OTTAWA, le mardi 16 septembre 2003
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, auquel a été renvoyé le projet de loi S-10 concernant les motomarines dans les eaux navigables, se réunit aujourd'hui, à 17 h 15, pour examiner cette mesure législative.
Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.
Le président: Honorables sénateurs, nos témoins ce soir proviennent du ministère des Pêches et des Océans. M. Meisner, directeur général intérimaire de la Direction générale des programmes maritimes, est accompagné par M. Haché et M. Saheb-Ettaba.
M. Tim Meisner, directeur général intérimaire, Direction générale des programmes maritimes, ministère des Pêches et des Océans: Honorables sénateurs, je voudrais d'abord remercier les membres du comité d'avoir donné au ministère des Pêches et des Océans, plus particulièrement à la Garde côtière, l'occasion de vous parler de cette importante question. Je représente la Garde côtière en ma qualité de directeur général intérimaire des Programmes maritimes. La Garde côtière canadienne est heureuse de la tenue de cette discussion. Elle félicite aussi madame le sénateur Spivak pour son engagement à l'égard de l'environnement et de la sécurité nautique.
Je souhaite assurer le sénateur Spivak, ainsi que le comité, que la sécurité et la protection de l'environnement sont des points de vue à partir desquels la Garde côtière canadienne accepte sa responsabilité concernant les embarcations de plaisance au Canada et à partir desquels nous avons arrêté notre position à l'égard du projet de loi S-10.
La Garde côtière et madame le sénateur Spivak partagent plusieurs préoccupations semblables, mais je regrette que nous ne puissions appuyer le projet de loi S-10. Selon nous, le projet de loi ne viendrait que dédoubler les outils dont dispose actuellement la Garde côtière en matière de protection de l'environnement et de promotion de la sécurité nautique et pourrait entrer en conflit avec ceux-ci. Plus précisément, la Garde côtière ne voit aucun motif impérieux justifiant la présentation de nouveaux processus, puisque les dispositions réglementaires actuelles lui permettent déjà de restreindre ou d'interdire le bâtiment, y compris les motomarines.
Je vais donner quelques renseignements sur nos politiques et nos lois actuelles avant d'expliquer notre position plus en détail.
La common law reconnaît le droit du public de naviguer. La Loi constitutionnelle confère le pouvoir de légiférer pour réglementer toutes les questions de navigation. La Cour suprême du Canada a confirmé plusieurs fois cette compétence exclusivement fédérale.
La Loi sur la marine marchande du Canada fournit les fondements législatifs à la restriction de la navigation pour des raisons de sécurité publique, de protection du milieu marin et d'utilité publique. En vertu de ce pouvoir législatif, le Cabinet a adopté le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux, instrument qui permet à la Garde côtière canadienne d'appliquer les restrictions à la navigation.
En ce qui concerne le sujet qui nous préoccupe, le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux fournit un mécanisme restreignant ou interdisant l'exploitation de tous les bâtiments à propulsion mécanique, y compris les motomarines, sur les eaux canadiennes. Ce règlement comporte actuellement un certain nombre d'annexes qui définissent les restrictions ou interdictions s'appliquant au bâtiment. C'est donc dire que toutes les embarcations, non pas seulement certaines, font l'objet d'interdictions en vertu de ce règlement.
Le projet de loi S-10 se distinguerait donc de nos pratiques actuelles, qui imposent l'application de restrictions à la navigation pour tous les bâtiments à propulsion mécanique. Le point qui fait l'objet du débat est le suivant: la réglementation en vigueur de la Garde côtière s'applique actuellement à tous les bâtiments à propulsion mécanique et ne prévoit aucune restriction pour un type de bâtiment en particulier, comme les motomarines. C'est là où la Garde côtière et le projet de loi S-10 divergent.
En plus de restrictions, bon nombre d'autres mesures pourraient être mises en oeuvre en vertu du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux. Par exemple, une limite de vitesse riveraine pourrait être appliquée dans les provinces participantes. Des permis pourraient être émis pour des événements ayant lieu sur une voie navigable assujettie à une restriction. On a défini la puissance maximale des embarcations pouvant être exploitées par des personnes de moins de 16 ans, ainsi que l'âge minimal exigé pour pouvoir conduire une embarcation, notamment une motomarine. Ces annexes sont modifiées périodiquement pour ajouter et, en de rares cas, retirer des restrictions, à la demande de l'autorité locale.
Selon notre propre expérience, nous estimons qu'il vaut mieux sensibiliser le public à la navigation sûre et responsable, au lieu de se fier seulement sur des dispositions réglementaires. Je ne tente pas de vous faire croire que l'éducation et les campagnes de promotion suffisent, mais je dois vous dire que, dans notre cas, nous obtenons de bons résultats, notamment des changements d'attitude.
Pour appuyer cette approche, nous disposons d'une série de mesures sur lesquelles nous pouvons compter pour exercer un contrôle sur l'exploitation de bâtiments à propulsion mécanique, y compris les motomarines, en plus du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux. La Garde côtière applique aussi le Règlement sur les petits bâtiments et le Règlement sur la compétence des conducteurs d'embarcations de plaisance.
Je crois qu'il est important de signaler l'article 43 du Règlement sur les petits bâtiments et de relever son importance pour les collectivités locales. Cet article peut servir à contrer le comportement irresponsable d'une personne conduisant une embarcation de plaisance, y compris une motomarine. Des avertissements et des amendes sont prévus en vertu de cet article. C'est pourquoi la Garde côtière, en partenariat avec la communauté policière, l'industrie marine, les associations de plaisanciers et les municipalités, encourage la sensibilisation à l'article 43 de ce règlement. Il existe également le Règlement sur la compétence des conducteurs d'embarcations de plaisance, qui exige un certain niveau de connaissances en vue de l'exploitation d'une embarcation de plaisance. Nous croyons qu'une part du succès que nous connaissons en matière de sécurité nautique est attribuable à ce règlement.
Comme les honorables sénateurs peuvent le constater, nous disposons de toutes les mesures nécessaires. Voilà pourquoi nous sommes toujours d'avis que des restrictions à la conduite des bateaux peuvent ne pas toujours s'avérer le premier ou le meilleur moyen de contrer le comportement irresponsable d'une personne conduisant une motomarine.
À ce moment-ci, je crois qu'il serait utile de comparer les mesures proposées dans le projet de loi S-10 à celles déjà en place, principalement dans le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux. J'aimerais commencer tout d'abord par les similitudes.
Le pouvoir prévu dans le projet de loi S-10 concernant la prise de règlements, le jeu d'annexes, le processus pour demander une restriction ou une interdiction et la disposition concernant la consultation locale sont tous semblables.
Sur le plan des différences, le projet de loi S-10 disposerait des mesures suivantes: des restrictions ou interdictions ne s'appliquant qu'aux motomarines; le pouvoir de prendre des règlements serait conféré au ministre et non au Cabinet; les gouvernements provinciaux ne joueraient aucun rôle; des contraintes administratives et des délais seraient imposés au ministre.
Nous croyons que le projet de loi S-10 ne servirait pas les intérêts des plaisanciers canadiens, car il donnerait lieu à deux séries de dispositions en matière de restrictions à la conduite des bateaux: une pour les motomarines et une autre pour toutes les autres embarcations. De plus, le projet de loi S-10 créerait davantage de règlements alors que des règlements visant les motomarines sont déjà en place, comme l'article 43 du Règlement sur les petits bâtiments.
Même si des mesures sont ajoutées, nous estimons que le projet de loi ne contribuerait pas à accroître la sécurité pour autant. Nous aimerions aussi attirer l'attention du comité sur un important défi que j'ai mentionné indirectement il y a un moment, c'est-à-dire l'application des règlements.
Notre ministère s'appuie énormément sur des organismes comme la GRC, les forces de police provinciales et municipales et d'autres organismes pour faire appliquer ces règlements. Le ministère reconnaît que les organismes chargés de l'application des règlements pour la Garde côtière sont déjà utilisés au maximum, et l'ajout d'une autre série de règlements pourrait venir miner davantage cette capacité limitée. Je suis persuadé que le projet de loi S-10 ne vise pas cet objectif.
Avant de terminer, permettez-moi de revenir sur la question des restrictions qui constituent, selon moi, le fond de notre problème. Bien que j'aie mentionné que le projet de loi S-10 divergerait des pratiques ministérielles actuelles, j'aimerais ajouter que la Garde côtière canadienne serait prête à envisager l'application de toute restriction à la navigation de plaisance qu'on lui présenterait.
Plus précisément, la Garde côtière canadienne examinerait une demande d'interdire ou de restreindre l'exploitation de motomarines sur certaines eaux si celle-ci était présentée dans le cadre du processus actuel du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux.
Quels sont les éléments que nous examinons lors de la présentation de demandes, y compris celles qui ciblent les motomarines seulement? Premièrement, nous demandons à l'auteur de la demande de définir le problème — d'exposer la raison justifiant le besoin d'une restriction à la navigation de plaisance; deuxièmement, nous envisageons d'autres possibilités, y compris des solutions autres que des règlements, afin de définir si elles ne sont pas davantage appropriées; et troisièmement, nous voyons aussi à ce que des consultations aient lieu avec les personnes qui seraient les plus touchées par la restriction. Nous croyons que l'approche actuelle est solide et qu'elle continue de bien servir le public.
La Garde côtière reconnaît que l'usage des eaux du Canada a considérablement changé depuis une génération. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'une grande part de ces changements ont eu lieu au cours des 10 dernières années. L'avènement de la navigation de plaisance comme activité de loisir de prédilection et des changements technologiques importants, tels que les motomarines, forcent la Garde côtière à faire face à cette tendance et à envisager de nouvelles façons de composer avec les changements et les défis. Nous croyons que nous progressons de façon satisfaisante, mais nous reconnaissons également que nous pouvons faire mieux au fil du temps. Nous ne rejetons pas la possibilité d'agir différemment si c'est ce qu'il faut faire pour bien faire notre travail. Ceci étant dit, il importe de s'assurer que nous comprenons clairement l'objet de nos travaux et de déterminer si l'on doit faire appel à une nouvelle solution ou à une solution existante modifiée.
Je ne crois pas que la question des motomarines dépasse les moyens déjà en place permettant de prendre des mesures d'atténuation ou de résolution. Voilà pourquoi je souhaitais préciser aujourd'hui que nous ne refusons pas de mettre en oeuvre des restrictions ne s'appliquant qu'aux motomarines. Nous demandons cependant que ce type de restrictions soit évalué à l'aide des outils déjà en place. Je crois que la navigation sûre et responsable est un objectif sur lequel nous pouvons tous facilement convenir. Je suis d'avis que le système actuel peut continuer d'appuyer et de favoriser ce concept.
En terminant, je vous remercie de me donner l'occasion de faire valoir les points de vue de la Garde côtière canadienne à ce comité. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le sénateur Spivak: Je vous remercie de votre exposé. Je dois dire que votre déclaration selon laquelle vous accepteriez une demande ciblant les motomarines seulement me rend perplexe. Je veux attirer votre attention sur l'une des nombreuses lettres que j'ai reçues. Deux ministres m'ont écrit pour me dire que toute proposition concernant l'ajout d'une nouvelle annexe au règlement visant à interdire précisément les motomarines nécessiterait une consultation complète auprès des Canadiens. Un tel ajout serait considéré comme un changement important à la politique actuelle qui aurait fort probablement une incidence sur de nombreuses personnes et des intérêts commerciaux. Les ministres ont aussi affirmé que le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux ne prévoit pas des restrictions à propos d'un type précis d'embarcation, mais plutôt un moyen d'imposer des interdictions ou des restrictions à l'égard de toutes les embarcations, y compris les motomarines.
En fait, on a tenté à plusieurs reprises, comme vous le savez, d'imposer des restrictions quelconques visant les motomarines. La tentative la plus notable a eu lieu en 1994. Le Québec, l'Ontario, la Colombie-Britannique et la Garde côtière avaient convenu que certaines restrictions devraient s'appliquer à l'exploitation de motomarines. Les restrictions en question avaient été publiées dans la Gazette du Canada, mais, au bout du compte, elles n'ont pas été autorisées.
Laissez-vous entendre, monsieur Meisner, que la politique a changé? Quelle est la politique actuelle du ministère à ce sujet? Dans une autre lettre, il n'était pas clair si la politique avait changé.
M. Meisner: La question est de savoir si nous parlons de la politique, des pratiques ou de la philosophie. Nous ne disposons d'aucune politique écrite, mais, selon nos pratiques, nous avons toujours imposé des restrictions à l'ensemble des embarcations motorisées et non pas à certains types d'embarcations en particulier.
Cela étant dit, la loi nous confère le pouvoir d'établir des restrictions pour certains types d'embarcations, mais dans la pratique, nous avons exercé ce pouvoir avec parcimonie — nous ne sommes pas intervenus autant que nous aurions pu. Nous n'avons jamais reçu de demande d'élaboration d'un règlement sur les restrictions à la conduite des motomarines seulement.
Le sénateur Spivak: Mais vous en avez déjà reçu. Vous en avez reçu une en 1994. Attendez un instant — il y en a eu d'autres.
M. Meisner: Elle concernait l'ajout d'une annexe, dois-je préciser, et non une restriction à l'égard des motomarines dans un cours d'eau particulier.
Le sénateur Spivak: Une telle demande ne nécessite-t-elle pas l'ajout d'une annexe? Bien sûr. Je ne comprends pas.
M. Daniel Haché, directeur intérimaire, Sécurité, Intervention environnementale, ministère des Pêches et des Océans: Puis-je me permettre de dire que, si on demande une restriction pour un type particulier d'embarcation et qu'aucune annexe n'existe, nous examinons le cas et, en parallèle, nous entamons un processus d'établissement d'une annexe. Cependant, nous ne pouvons pas créer simplement une annexe sans avoir de cas à examiner.
Le sénateur Spivak: Bien sûr. Mais il demeure qu'environ 2 000 demandes sont effectuées pour d'autres véhicules motorisés, à chacun desquels correspond une annexe, alors de quoi est-il question en ce moment?
M. Meisner: Chaque demande est différente.
Le sénateur Spivak: Je veux aussi savoir s'il est possible d'imposer des restrictions, selon votre politique, uniquement aux motomarines dans un lac en particulier sans que cela ne touche d'autres véhicules motorisés? Je suis membre d'une collectivité, et un groupe de personnes habitant aux abords du lac situé à côté du mien souhaitait faire cela. La GRC les a informés que c'était impossible.
M. Aziz Saheb-Ettaba, avocat, Services juridiques, ministère des Pêches et des Océans: Si vous me permettez, je vais expliquer du point de vue juridique, et non pas du point de vue de notre politique, comment le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux est rédigé à l'heure actuelle. Conformément à certaines annexes qui existent en ce moment, il est impossible d'imposer une restriction dans un lac en particulier s'appliquant, par exemple, uniquement aux motomarines. Cependant, nous pouvons imposer des restrictions à l'égard des motomarines comme nous pouvons le faire pour d'autres embarcations motorisées; des restrictions pourraient s'appliquer aux motomarines ainsi qu'à d'autres embarcations de plaisance qui possèdent le même moteur.
Le sénateur Spivak: C'est ce que j'avais compris. Mais la politique a-t-elle changé?
M. Aziz Saheb-Ettaba: Permettez-moi de continuer. Il est à noter cependant que cela n'empêche pas le gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre, de modifier le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux en vue d'ajouter une annexe portant seulement sur les motomarines. Cela n'est pas impossible, mais il faudra une autre étape pour créer cette nouvelle annexe.
Le sénateur Spivak: D'accord. C'est très clair. Merci. Je comprends maintenant ce que vous dites. Autrement dit, la politique est la même; elle n'a pas changé.
Ma deuxième question vise à savoir si une consultation est nécessaire. On m'a déjà dit qu'une consultation complète auprès de l'ensemble des Canadiens serait nécessaire, et non pas seulement auprès des résidents du lac en question. Est- ce exact?
M. Meisner: L'ajout d'une annexe au règlement nécessite une consultation.
Le sénateur Spivak: C'est la même chose. Autrement dit, si un groupe de résidents d'un lac avait suivi toutes les étapes — consultations, et cetera — seulement pour les motomarines, les restrictions seraient ajoutées au Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux et ensuite présentées au ministre. Comment s'effectuerait cette consultation auprès de l'ensemble des Canadiens?
M. Meisner: Au moins par l'entremise de la Gazette du Canada.
Le sénateur Spivak: Maintenant je comprends. Tandis que si on voulait imposer des restrictions s'appliquant à un bateau ordinaire, ce ne serait pas le cas?
M. Meisner: Pas si une annexe existe déjà.
Le sénateur Spivak: C'est très clair.
Le président: Merci, sénateur Spivak. Je veux m'assurer que nous comprenons, et que vous aussi comprenez madame le sénateur, la divergence d'opinion que certains d'entre nous peuvent avoir avec vous. Je crois que les auteurs du projet de loi, et ceux qui l'appuient, comprennent le Règlement sur la restriction à la conduite des bateaux — et nous le comprenons encore mieux maintenant. Nous savons que le règlement a toujours existé. Le projet de loi a été élaboré car ses auteurs, ses parrains et les personnes qui l'appuient souhaitent que le gouvernement et ses organismes prennent une mesure qui n'a pas encore été prise. Comme vous venez de le dire, il n'existe aucune annexe en ce moment qui permette d'imposer des restrictions aux motomarines précisément dans un cours d'eau en particulier si c'est ce que souhaitent les résidents de l'endroit en question. C'est la lacune qui existe dans le règlement, comme l'ont constaté les personnes qui appuient le projet de loi.
Quant aux autres éléments dont vous avez parlé, comme le comportement irresponsable, par exemple, j'imagine que toute personne reconnue coupable d'un tel comportement se verra imposer des sanctions, peu importe qu'elle ait piloté un vieux rafiot, une motomarine ou un transbordeur. Le but de ce projet de loi n'est pas uniquement d'empêcher les comportements irresponsables. Comme ses détracteurs l'ont fait remarquer, cette mesure législative équivaut à utiliser un canon pour tuer une mouche. Ce projet de loi consiste à protéger les personnes vivant aux abords des lacs et que ces engins dérangent — parce que c'est aussi une question d'esthétique. Il ne vise pas seulement les personnes irresponsables, mais aussi celles aux commandes de motomarines qui deviennent incontrôlables lorsqu'elles perdent de la vitesse et qui, d'après ce que nous avons entendu, sont à l'origine d'un très grand nombre d'accidents en tous genres. Ceux qui appuient ce projet de loi ne visent pas qu'à prévenir les comportements irresponsables.
Vous avez dit, dans votre allocution, que la différence résidait dans le fait que le projet de loi S-10 comportait des restrictions ou des interdictions s'appliquant uniquement aux motomarines. C'est tout à fait exact.
J'aimerais vous poser trois questions. Vous avez fait remarquer que les gouvernements provinciaux ne jouaient aucun rôle. Effectivement. C'est une prérogative du gouvernement canadien, n'est-il pas question de voies navigables ou servant au transport des marchandises?
M. Meisner: Si.
Le président: Je considère cet élément non pertinent. À combien s'élève environ le budget dont disposent actuellement la Garde côtière et le ministère des Pêches et des Océans pour assurer une formation adéquate sur la conduite sécuritaire et respectueuse des motomarines?
M. Meisner: Je peux vous donner le montant du budget du Bureau de la sécurité nautique et vous énumérer les programmes appliqués un peu partout au pays, qui touchent à la fois la réglementation et la formation; actuellement, il tourne autour de 9,4 millions de dollars. Je ne saurais vous dire quelle proportion est consacrée au volet réglementaire et quelle part sert à la formation.
Le président: N'y a-t-il pas de budget séparé pour la formation?
M. Meisner: Non, le Bureau de la sécurité nautique s'occupe des deux aspects.
Le président: J'imagine qu'il vous est tout aussi impossible de me dire combien il y a de patrouilleurs de la Garde côtière sur le lac Wabamun ou sur la rivière Saskatchewan Nord — c'est la région où je vis — puisque cela entre dans le même budget. Vous avez parlé des activités en matière de réglementation; je suppose que l'application des règlements en fait partie.
M. Meisner: Non, cela ne relève pas de nous.
Le président: D'accord, mais vous faites de l'observation. Nous ne savons pas comment se répartissent ces 9,4 millions de dollars. Pourriez-vous vous informer? Nous voudrions savoir dans les grandes lignes comment se décomposent ces 9,4 millions de dollars, c'est-à-dire combien d'argent vous consacrez à la formation, aux relations publiques, à la publicité et aux cours, si tant est que vous en donniez. Quel est le montant réservé aux patrouilles, au sens propre du terme, et combien s'en va dans l'administration et d'autres dépenses du genre? Une simple ventilation d'ordre général nous aiderait beaucoup.
De combien de temps avez-vous besoin pour obtenir ces informations?
M. Meisner: Il me faudra probablement une semaine. Nous devons aussi communiquer avec les régions pour recueillir certaines données. C'est un chiffre national. Cela devrait prendre une semaine, mais si nous le pouvons, nous vous enverrons l'information avant.
Le président: Ce serait très apprécié. Je ne sais pas si quiconque considère ce facteur déterminant, mais nous aimerions avoir ces renseignements en mains avant de passer au vote. Si vous pouviez nous transmettre l'information plus rapidement que prévu, nous vous en serions reconnaissants.
M. Meisner: Si elle est déjà disponible, ce ne sera qu'une question de jours.
Le président: Merci. J'aimerais revenir à la dernière question du sénateur Spivak. Vous avez dit que la Garde côtière canadienne serait prête à examiner une demande d'interdiction ou de restriction de l'utilisation des motomarines. J'imagine que cette décision donnerait lieu à la préparation d'une annexe au règlement.
Encore une fois, j'insiste sur la différence entre la politique existante et celle envisagée par les auteurs et les promoteurs de ce projet de loi, voulant que cet élément soit désormais à peine pris en compte. De fait, si les dispositions prévues au projet de loi devaient s'appliquer l'une après l'autre, on imposerait des restrictions.
Les gens n'auraient plus la possibilité de décider, sauf ceux qui sont directement concernés, si cela est susceptible de se produire. C'est une différence singulière que vous avez signalée et, si j'ai bien compris, c'est précisément l'objet du projet de loi.
Le sénateur Christensen: J'aimerais obtenir davantage d'éclaircissements à ce sujet. Je tiens à vous remercier, messieurs, de comparaître devant nous aujourd'hui. Bien évidemment, ce projet de loi a été présenté en réponse aux préoccupations des personnes qui vivent, pour se détendre, aux abords de voies navigables. Dans certains cas, ces personnes ont investi des sommes considérables dans l'achat de leur chalet. Les motomarines sont bien différentes des embarcations hors bord ou même en-bord à cause de leur mode de conduite et du bruit qu'elles produisent, par exemple. Pour certains, elles sont une source de nuisances. Les gens qui choisissent de s'établir dans ces régions y vont pour profiter de la paix et de la quiétude qu'elles procurent.
À la page 2 de votre allocution, vous indiquez que la Garde côtière ne voit aucun motif impérieux justifiant la présentation d'un nouveau processus puisque, selon vous, il y a déjà des dispositions réglementaires. En quoi la loi actuelle peut-elle nous aider à régler le problème soulevé par le sénateur Spivak. Vous dites que vous n'avez pas besoin de ce projet de loi parce que vous avez déjà le pouvoir d'agir. Comment faire?
M. Meisner: Je vous répondrai, et cela vaut aussi pour la troisième question posée par le sénateur Banks, que nous en tiendrions compte étant donné que cela a été présenté selon la procédure actuelle qui prévoit des consultations auprès de toutes les personnes visées par une telle restriction. Je dis que nous avons déjà les outils pour imposer des restrictions. Nous pourrions appliquer de telles mesures aux conducteurs de motomarines si le processus de consultation suivi était celui utilisé pour toutes les autres limitations. Ce processus est en place et il convient de l'adapter à la politique réglementaire du gouvernement fédéral pour s'assurer que toutes les consultations permettent d'entendre les arguments des deux camps.
Nous n'imposerions pas automatiquement des restrictions. Nous étudierions la question. C'est ce que j'ai voulu dire.
Le sénateur Christensen: À la page 4 de votre allocution, vous dites que les annexes sont modifiées périodiquement pour ajouter et, en de rares cas, retirer des restrictions, à la demande des autorités locales.
M. Meisner: Cela fait l'objet de consultations.
Le sénateur Spivak: J'aimerais vous poser une autre question. Ce projet de loi prévoit aussi une vaste consultation, y compris auprès du législateur.
Je ne comprends pas. Je pensais avoir saisi à la lumière des explications de M. Saheb-Ettaba. Vous ne pouvez le faire que si vous limitez l'utilisation de tous les véhicules motorisés dans un secteur donné. Il me semble vous avoir entendu dire que ce n'était pas possible, à moins de s'adresser au ministre, et ce dernier est d'accord pour que nous préparions une annexe applicable uniquement aux motomarines.
En réalité, ceci ne fait pas partie des dispositions réglementaires actuelles car ces dernières ne permettent pas d'intervenir aussi simplement.
Le président: Ce que vient de dire le sénateur Spivak est-il vrai?
M. Meisner: Les dispositions actuelles ne sont pas accompagnées d'une annexe prévoyant l'interdiction des motomarines. On pourrait en rajouter une. C'est tout ce que je dis. Les outils existent. Vous pouvez ajouter cet élément dans le processus de consultation.
Le sénateur Spivak: C'est exactement ce que vise le projet de loi.
Le président: Pardonnez-moi, la parole est au sénateur Christensen.
Le sénateur Christensen: Le ministère semble dire qu'il dispose des outils et des moyens pour agir et que le projet de loi proposé est redondant. Si vous avez les éléments vous permettant d'intervenir, dites-nous alors comment vous procéderiez et pourquoi rien n'est fait quand c'est nécessaire?
M. Meisner: Pourquoi rien n'est fait? Permettez-moi de vous rappeler que depuis 1994, et même depuis que ce projet de loi a été rédigé, nous n'avons reçu aucune demande d'interdiction concernant les motomarines. En 1994, le processus de consultation a permis de conclure que beaucoup de gens étaient contre cette idée.
Le sénateur Christensen: Vous êtes en train de dire que si on reçoit des demandes, on s'occupera de la question, n'est- ce pas?
M. Meisner: On peut déjà s'en occuper grâce au processus de consultation actuel.
M. Haché: Si je puis me permettre, je vous rappelle qu'il existe une annexe et des dispositions réglementaires. Nous aurions besoin, comme élément déclencheur pour ajouter une autre annexe d'un cas particulier en vertu duquel on devrait imposer des restrictions à l'utilisation des motomarines sur un plan d'eau donné. Cela nécessiterait la tenue de consultations au niveau local, mais l'ajout d'une annexe supposerait l'organisation de consultations au niveau national.
Le sénateur Christensen: Une fois que vous les avez organisées au niveau national, vous pouvez automatiquement redescendre au niveau local.
M. Haché: Après la mise en oeuvre de l'annexe, on ne procéderait qu'à des consultations au niveau local.
Le sénateur Christensen: Lorsqu'on s'est entendu sur une annexe, on peut l'appliquer à l'échelle locale.
M. Haché: C'est exact.
Le sénateur Christensen: La grande question est de savoir comment mettre en place le processus permettant d'élaborer une telle annexe, que pourraient utiliser des groupes locaux sur certains lacs ou rivières lorsque souhaité. Peut-être qu'il n'est pas nécessaire d'envisager une nouvelle mesure législative; il suffirait de créer une annexe nationale applicable en tout temps, dans n'importe quel secteur.
M. Haché: Il convient de rappeler que cette annexe doit être mise en oeuvre à la suite d'un événement précis.
Le sénateur Christensen: Oui.
Le président: Cela dépend du bon vouloir du ministre, n'est-ce pas? Si je demande que les motomarines soient interdites sur mon lac, on commencerait par préparer une annexe puis on procéderait à des consultations aux niveaux local et national, avant d'obtenir l'approbation du ministre. Ai-je raison?
M. Haché: Normalement, les recommandations se rendent jusqu'au Comité spécial du Conseil.
Le président: Quel Conseil?
M. Meisner: Le Conseil privé.
M. Haché: Le CSC — c'est-à-dire le Comité spécial du Conseil.
Le sénateur Spivak: En somme, le Cabinet.
Le président: C'est donc le Cabinet qui donne son approbation.
Le sénateur Milne: Si un groupe de personnes résidant aux abords d'un lac réussit à passer au travers des différentes étapes du processus et qu'une annexe est créée, celle-ci pourra s'appliquer aussi à d'autres lacs sur lesquels on voudrait interdire l'utilisation des motomarines, n'est-ce pas?
M. Meisner: Effectivement.
Le sénateur Milne: Personne ne sait combien il y a de lacs au Canada. On n'a jamais pu tous les compter.
M. Meisner: On procéderait au cas par cas, une fois l'annexe mise en oeuvre.
Le sénateur Milne: Cela pourrait occuper le ministre à temps plein pendant des années.
M. Meisner: C'est ainsi que fonctionne le système pour les embarcations motorisées. On ajouterait différents plans d'eau à cette annexe selon les besoins.
M. Haché: Il faut bien comprendre que les consultations pour les cas particuliers se font au niveau local. Les consultations destinées à ajouter une annexe se tiennent au niveau national.
Le sénateur Spivak: C'est l'objet de ce projet de loi.
Le président: Je veux être certain que nous comprenons bien. Dans l'éventualité où une demande serait formulée par un particulier, ce serait encore au gouverneur en conseil de décider comment procéder. Exact?
M. Meisner: En bout de ligne, c'est ce qui se passerait.
Le président: Le but de ce projet de loi est de dire: «Non, non, ce n'est pas que vous pouvez, c'est que vous devez.» C'est le point fondamental.
Le sénateur Spivak: La navigation pose certains problèmes.
Le sénateur Buchanan: C'est intéressant. Il y a quelque chose que je ne comprends pas au sujet de l'approbation du ministre. Permettez-moi de vous raconter une anecdote. Au début des années 80, nous avons adopté des dispositions réglementant l'utilisation des motoneiges en Nouvelle-Écosse. En vertu du Motor Vehicle Act, avant de pouvoir traverser une route de Nouvelle-Écosse en motoneige, il fallait obtenir la permission du ministre des Transports. Un député avait alors dit: «Cela signifie que dimanche prochain, lorsque je sortirai avec mes amis faire de la motoneige à la campagne et que j'arriverai à l'intersection de la route 101, je devrai descendre de mon véhicule, me rendre jusqu'à une cabine publique et appeler le ministre des Transports pour lui dire «Nous sommes dans Annapolis Valley et nous voulons traverser la route 101. Veuillez s'il vous plaît nous donner votre permission.» Nous nous sommes immédiatement rendu compte à quel point cela était ridicule d'obtenir le consentement personnel du ministre pour quelque chose de semblable.
Êtes-vous en train de dire qu'il faut obtenir l'avis du ministre quand quelqu'un fait une demande concernant des motomarines sur certains lacs?
M. Meisner: Non, la création du règlement ne se fait qu'une fois. Le ministre ferait une recommandation auprès du comité du Cabinet. Lorsque la réglementation serait en vigueur, on appliquerait la restriction correspondante. Le ministre n'aurait pas besoin de donner son approbation à chaque fois.
Le sénateur Buchanan: N'est-ce pas ce que prévoit votre projet de loi?
M. Meisner: Le fait est qu'il y aurait des chevauchements puisque nous avons déjà des instruments en place pour agir.
Le sénateur Buchanan: Mais pour l'instant vous ne faites rien.
Permettez-moi de vous raconter une autre anecdote. Ma femme et moi étions en train de discuter d'une histoire racontée dans les journaux l'autre jour. Je lui disais qu'il y avait un sénateur à Ottawa qui s'occupait de la question. Je ne sais pas si vous avez lu cette histoire, mais c'est l'une des plus bizarres que j'ai jamais connues. Cela s'est passé à Wakefield, au Québec, sur la rivière Rideau. Une personne qui conduisait une motomarine est passée sur un ourson au moins à six reprises. Elle essayait de noyer cette pauvre bête. Elle l'a attrapée avec une corde qu'elle a attachée à son embarcation puis a traîné l'animal sur l'eau. D'après ce que l'on m'a dit, le gars n'a pas été inquiété. Comment peut-on être aussi irresponsable et poser de tels gestes en toute impunité?
Le sénateur Spivak: C'est quelqu'un qui manque de jugement. C'est tout.
Le sénateur Buchanan: Vous avez certainement entendu parler de cette histoire.
M. Meisner: Je pense que le problème n'était pas tant comment il conduisait son embarcation, mais la façon dont il traitait l'animal.
Le sénateur Buchanan: Il faisait un vacarme assourdissant sur la rivière Rideau. Les gens le voyaient depuis la rive.
M. Meisner: Selon l'article 43 du règlement sur les petits bâtiments, cette personne pourrait être accusée de conduite irresponsable. C'est possible.
Le sénateur Buchanan: Qui porterait les accusations?
M. Meisner: Tous nos règlements sont appliqués par les forces de police — la GRC, la Police provinciale de l'Ontario ou tout autre corps policier compétent.
Le président: Dans le cas dont fait état le sénateur Buchanan, et auquel d'autres ont fait référence, étant donné que quelqu'un a porté plainte, est-il possible que le ministre, et si ce n'est pas lui, le Cabinet, disent: «Nous n'allons pas donner suite à cette affaire»?
Le sénateur Meisner: Oui, cela ne fait aucun doute. On tient compte des résultats de la consultation. Si 80 p. 100 des gens sont contre une proposition et 20 p. 100 sont pour, il y a fort à parier que le ministre dira non. S'il décide d'agir, le Cabinet interviendra.
Le président: Le but des projets de loi est de clarifier les choses.
Le sénateur Spivak: Ce n'est pas seulement possible que ce genre de situation se produise, c'est déjà arrivé à quelques reprises. Par exemple, en 1996, un groupe de personnes vivant sur l'île de Quadra, en Colombie-Britannique, a demandé quelque chose de semblable, avec le soutien des autorités locales et du gouvernement britanno-colombien; 87,5 p. 100 des gens ont dit ne plus vouloir de motomarines sur les lacs d'eau douce et 76,25 p. 100 ne voulaient pas voir ces engins autour de l'île. Peu importe, leur demande a été rejetée.
Dans ma province, les personnes qui vivent aux abords du lac proche du mien voulaient imposer des restrictions sur les motomarines et elles ont aussi essuyé un refus. Le problème, c'est que le règlement sur les restrictions à la conduite de bateaux comporte environ 20 étapes, et parfois, il faut attendre jusqu'à quatre ans avant d'en voir le bout. Qui plus est, à chaque étape, un bureaucrate peut dire: «Non, vous ne pouvez pas» et c'est fini. C'est là le problème.
Je sais que vous suivez le règlement sur les restrictions à la conduite de bateaux, mais beaucoup de gens considèrent que ce n'est pas la bonne procédure à suivre.
L'autre chose que j'aimerais mentionner, et j'espère que je peux le dire sans poser de questions, c'est que dans le mémorandum échangé entre le ministre de l'Environnement et l'Association des motomarines, ou peu importe son nom, les motomarines sont traitées à part, comme c'est aussi le cas dans plusieurs affaires devant les tribunaux aux États-Unis. Il y a une raison à cela. Ce sont des véhicules sportifs et, parfois, des véhicules servant à pratiquer des sports extrêmes. Ils ne ressemblent pas donc aux autres embarcations étant donné que l'idée est d'aller vite et de faire des figures acrobatiques. Je tenais à vous le rappeler.
Il ne s'agit pas d'un autre niveau de réglementation. Je ne vois pas pourquoi vous dites cela. Vous avez 2 000 annexes. Ce n'en serait qu'une de plus. Ce n'est pas un autre niveau. Voyez-vous ce que je veux dire? Vous avez toutes ces annexes pour tous ces autres bateaux que les gens utilisent partout au Canada, alors pourquoi serait-ce compliquer la tache aux gens qui font les règles?
La dernière chose que je voulais dire, c'est que M. Vollmer — je crois qu'il est ici aujourd'hui —, a dit lors d'une réunion, en mai 2003, au sujet de la Garde côtière et du Conseil consultatif maritime canadien, que le Bureau de la sécurité nautique manque de personnel de soutien et de fonds pour s'acquitter correctement de son travail, et il a offert de le faire. L'application de la loi est un enjeu énorme, mais tant qu'on ne pourra pas faire passer le message au public que c'est un problème, il faut qu'il soit facile, ou du moins possible, pour les citoyens d'une collectivité locale d'accéder aux outils qui leur permettent de faire ce qu'ils veulent sur un lac, et bien souvent ils l'ont déjà fait pour d'autres bateaux. Mais dans ce cas-ci, on dirait qu'il y a problème.
Avez-vous des commentaires à faire là-dessus?
M. Meisner: Tout d'abord, au sujet de votre exemple de l'île Quadra, je ne suis pas au courant de cette situation.
Le sénateur Spivak: Il y en a bien d'autres.
M. Meisner: C'est ce que j'allais dire. Il y a beaucoup d'exemples au sujet des motomarines et autres embarcations où il n'a pas été question de créer une annexe ou d'ajouter une annexe pour diverses raisons — quand il n'y avait aucun soutien.
Le sénateur Spivak: Un simple bureaucrate, ou la GRC, ne laisserait pas le dossier aller plus loin.
M. Meisner: Si ce n'était qu'un bureaucrate, il me semble qu'il aurait d'excellentes raisons d'y faire obstacle, comme le manque de données à l'appui ou autre chose.
Le sénateur Spivak: Comment le sauriez-vous?
M. Meisner: J'ose espérer que par le biais du processus de consultation, il y aurait une explication des raisons qui font que l'affaire ne va pas plus loin. C'est partie intégrante de notre processus et de nos politiques, de donner des raisons, plutôt que de tout arrêter sans motif. Je ne peux pas commenter le cas particulier que vous avez présenté, mais il y a toutes sortes de situations qui n'aboutissent pas pour diverses raisons.
Pour ce qui est de la motomarine comme étant une embarcation spécifique, je ne pense pas qu'il y ait de débat sur le sujet. Elle est différente des autres types d'embarcations, mais en vertu de la politique que nous avons appliquée jusqu'à maintenant, la pratique a été de réglementer tous les véhicules et embarcations motorisés. Il existe d'autres bateaux qui sont conçus pour la vitesse et l'exécution de manoeuvres. Nous n'avons, jusqu'ici, pas créé d'annexe spécifique pour un type particulier de bateau. C'est une pratique que nous reconnaissons. Avec l'évolution de l'utilisation qui est faite des voies navigables, et avec l'avènement de la navigation de plaisance, nous pourrions y songer. Si un cas était présenté, nous le ferions passer par le processus de consultation.
Vous avez aussi parlé de l'approche par niveaux.
Le sénateur Spivak: Ça va; vous n'avez pas besoin de commenter cela. Nous comprenons ce que vous dites.
J'ai un dernier commentaire à faire. À l'instar de toute autre question de politique publique, comme celle du tabac, lorsque l'intérêt public est en jeu, il y a toujours une lutte entre ceux qui tirent leur subsistance de la vente de ces choses et ceux qui veulent faire ceci, et les citoyens qui ne le veulent pas.
Je le vois bien. Ce n'est pas que tout le monde tient absolument à ce que cela arrive. S'il y en a qui sont contre. Toutefois, la grande majorité des gens voudraient que la question soit résolue d'une façon ou d'une autre. Il faut avant un processus pour que ce soit fait équitablement et correctement, et c'est là le problème.
En 1994, la raison pour laquelle ça n'a pas été mis en oeuvre — disons les choses telles qu'elles sont —, c'est que l'industrie s'y est opposée. C'est ce qui est arrivé. L'industrie a exercé de fortes pressions contre ce projet de loi. Je m'en étonne parce qu'il me semble qu'en affaires, le client a toujours raison. On est censé faire selon les désirs du client, dans la mesure où il sera bien heureux d'acheter votre produit s'il l'a aimé et est d'accord avec lui.
Quoi qu'il en soit, c'est la situation. C'est pourquoi, si le ministre décidait demain d'ajouter une annexe, nous n'aurions pas besoin de ce projet de loi. Je ne pense pas que le ministre décidera cela demain, à moins que nous continuions d'exercer des pressions.
Le sénateur Christensen: Vous pouvez toujours faire une demande.
M. Meisner: Je crains de me répéter, mais si une demande était déposée visant la restriction sur un cours d'eau spécifique, elle suivrait le processus normal et serait examinée.
Le sénateur Spivak: Le fait est qu'il y en a eu.
Le président: Elle serait examinée, mais dans le passé, quand c'est arrivé, les demandes ont été examinées et l'examen a été suspendu; n'est-ce pas?
M. Meisner: Je pense que le sénateur Spivak a bien plus d'exemples que je n'en ai moi-même.
Le président: Nous en avons d'autres aussi.
Le sénateur Spivak: J'ai une question au sujet des problèmes environnementaux. Parlons-nous d'environnement, dans les restrictions sur la navigation? Où est-il question de dommages à l'environnement?
M. Meisner: Dans la loi.
Le sénateur Spivak: Ce devrait être clair, mais je ne vois pas.
M. Meisner: En vertu de la loi, la Loi sur la marine marchande du Canada, on peut établir des règles pour l'environnement, la sécurité et l'utilité publique.
Le sénateur Spivak: C'est vrai, les amendements les plus récents.
M. Meisner: Les dispositions actuelles. Les nouveaux ne sont pas encore en vigueur.
Le sénateur Spivak: On me dit qu'ils ne sont pas encore entrés en vigueur. Oui, ils ont travaillé sur un protocole environnemental pour le règlement de restriction de la navigation. Un groupe de travail se penche sur un document de politique interne et des lignes directrices, mais aucune consultation publique n'est prévue, et apparemment, M. Vollmer, qui a offert ses services, a soutenu que les coûts d'évaluation seraient énormes. Par conséquent, ils pourraient se pencher ultérieurement sur les questions relatives à l'environnement, mais le projet de loi S-10 les intègre déjà.
M. Meisner: Nous en traitons maintenant. Nous avons déjà des restrictions qui sont appliquées. Nous avons l'exemple d'Elk River, où un règlement est en vigueur à des fins de protection de l'environnement, mais là encore, il interdit tous les véhicules motorisés.
Le sénateur Spivak: D'accord. C'est une impasse.
M. Meisner: L'objectif visé est la protection de l'environnement. On a déterminé que tous les véhicules motorisés devaient être interdits, pour protéger l'environnement.
Le président: J'ai encore deux choses sur lesquelles j'aimerais avoir votre avis. Tout d'abord, nous avons entendu un témoignage selon lequel, en comparaison avec d'autres véhicules motorisés, les Sea-Doos, si vous permettez que j'utilise un nom de marque, et autres du genre, sont nettement et manifestement moins sécuritaires et plus susceptibles de causer des accidents. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous savez là-dessus.
Deuxièmement, j'aimerais que vous nous disiez si vous comprenez, ou si vous avez tenu compte ou pensé tenir compte, dans votre point de vue, des arguments d'ordre esthétique que soutiennent les défenseurs de ce projet de loi, ceux qui n'ont aucune envie d'entendre du bruit sous leur fenêtre le dimanche matin.
M. Meisner: Je répondrai au deuxième élément en premier. Si je suis à un chalet, sur un lac, je n'aime pas entendre les motomarines ou les bateaux de course, alors pourquoi ne pas interdire tous les bateaux à moteur?
Le sénateur Spivak: Ce n'est pas la même chose.
M. Meisner: Pour moi, oui. Je n'aime entendre aucun bateau à moteur. C'est une question de préférence personnelle et de tolérance personnelle. Si vous avez un chalet, et aussi une motomarine, peut-être serez-vous plus tolérant que d'autres. C'est une question complexe, et il y a deux côtés à chaque point de vue.
En ce qui concerne la première question, je n'en sais rien. Je vais demander à M. Haché s'il peut y répondre.
M. Haché: Je n'ai pas les données devant moi sur le plus grand nombre d'accidents causés par les motomarines. Je pourrai vous les transmettre ultérieurement.
Le président: Je pensais que vous pourriez donner des exemples de cas isolés, ou d'expérience personnelle.
M. Haché: Oui, des cas isolés.
Le président: Selon les témoignages que nous avons entendus, d'après les statistiques, de façon anecdotique et autrement, ces embarcations sont purement et simplement dangereuses, comparativement à un petit moteur.
Le sénateur Spivak: C'est à cause du traumatisme. Apparemment, la plupart des accidents avec des motomarines causent des traumatismes contondants. Ce n'est pas la noyade. Il y a probablement plus de noyade avec d'autres types de bateaux, mais, avec la motomarine, c'est le traumatisme contondant qui est le plus fréquent. C'est ce que nous a dit l'association des hôpitaux qui fait un suivi de ces données.
Le président: Pourrez-vous nous dire aussitôt que vous le saurez si vous avez des statistiques au ministère des Pêches et des Océans sur cet aspect? Les statistiques que nous avons reçues viennent de gardes côtières d'ailleurs, et d'autres gens d'autres pays. Est-ce que ces statistiques spécifiques existent au Canada?
M. Meisner: Je viens d'apprendre que nous avons effectivement des statistiques sur les décès dans certaines provinces, mais pas toutes. Nous pouvons vous transmettre celles que nous avons, mais il n'y en a pas pour toutes les provinces.
Le président: Il n'y en a pas à l'échelle nationale.
Messieurs, je vous remercie beaucoup. Votre témoignage a été des plus utile et nous comprenons tous maintenant le règlement sur la navigation beaucoup mieux qu'auparavant, bien que nous entendions parler d'eux depuis longtemps.
Notre témoin suivant est M. Todd Lucier, qui représente Northern Edge Algonquin Inc.
Le sénateur Cochrane: J'aimerais savoir combien de membres du personnel ont travaillé sur cette question de maintien de l'ordre.
Le président: Personne, pour ce qui est du maintien de l'ordre.
Le sénateur Cochrane: On leur avait demandé de vous envoyer une ventilation du budget annuel. Je voulais savoir combien de personnes participaient au maintien de l'ordre.
Le président: Il n'y en a pas beaucoup, et ils n'ont absolument aucun pouvoir en matière d'application de la loi.
Le sénateur Cochrane: Ils disent aussi que la responsabilité relève de la GRC. Leur budget est tout aussi chargé.
Le président: Il l'est, mais la Garde côtière n'a aucun pouvoir d'application de la loi.
Le sénateur Buchanan: Aucun pouvoir.
Le président: Ils ne peuvent pas dire «arrêtez». Ils ne peuvent pas fouiller un bateau. Ils ne peuvent pas arrêter un bateau ou un navire. Ce ne sont pas des agents de la loi. Ils n'ont pas plus de pouvoirs que monsieur tout le monde.
Le sénateur Buchanan: En fait, ils doivent se faire accompagner de gendarmes.
Le président: C'est cela. Ils pourraient aussi se faire accompagner d'agents des pêches. Ils n'ont pas le moindre pouvoir en matière d'application de la loi.
Le sénateur Spivak: C'est encore une assez faible priorité.
Le sénateur Cochrane: De toute évidence.
Le président: C'est une question qui nous intéresse, soit dit en passant, sénateur Cochrane, au Comité de la sécurité nationale. Nous nous interrogeons pour savoir si la Garde côtière, ou du moins certains de ses membres, devraient porter le titre d'agents de la paix.
Le sénateur Cochrane: La Garde côtière existe et son travail, c'est l'application de la loi.
Le président: Non, ce n'est pas cela. On pourrait le penser, mais ça ne l'est pas.
Le sénateur Buchanan: La Garde côtière des États-Unis est bien différente de la nôtre.
Le président: Le travail de notre Garde côtière est l'entretien de la voie maritime, des bouées et des aides au transport. Elle transporte aussi des agents de la loi sur les lieux au besoin, lorsqu'elle peut en trouver un, mais elle n'a pas de pouvoir d'application. De fait, sa convention collective exige que ses membres ne soient jamais mis dans une situation dangereuse. Ils ne peuvent pas arrêter un navire, ou rien du genre. C'est un gaspillage de ressources, d'après certaines personnes.
Ceci répondra en partie à votre question.
Nous accueillons maintenant M. Lucier.
M. Todd Lucier, Northern Edge Algonquin Inc., témoignage à titre personnel: Honorables sénateurs, j'ai véritablement un message à vous livrer aujourd'hui. Si la collectivité entourant un lac peut être la première à proposer d'interdire les motomarines sur ce lac, je représenterai notre lac, pour de nombreuses raisons que je vous exposerai aujourd'hui. Le seul moyen de mesurer l'importance de la loi proposée que le Sénat examine actuellement est d'examiner un cas particulier et de voir l'incidence de toutes les questions sur ce cas.
Le président: Permettez-moi de vous interrompre, monsieur Lucier, mais pourriez-vous nous dire d'où vous venez? Qu'est-ce que Northern Edge Algonquin Inc.?
M. Lucier: Northern Edge Algonquin Inc. est un refuge écologique qui vaut un peu plus d'un million de dollars. Il est situé juste en dehors du parc Algonquin. Nous offrons plusieurs types d'expériences, dont certaines au public, comme des randonnées en canoë et en kayak de mer. Nous avons des visiteurs qui viennent au Canada de tous les coins du monde pour vivre l'expérience canadienne par excellence, comme faire une randonnée en canoë dans le parc provincial Algonquin et observer un orignal, ou encore hurler avec les loups ou de faire du kayak de mer. Nous offrons ces possibilités partout au Canada. Nous offrons des cours d'introduction au kayak de mer sur notre lac. Nous offrons aussi des programmes éducatifs. Nous emmenons des gens sur le lac très souvent pour vivre des expériences éducatives. Nous offrons des retraites de cadres d'entreprises. Nous créons une atmosphère qui est quelque peu différente de l'existence que les gens ont en ville dans leur quotidien. Les gens viennent à nous à la recherche des sons de la nature. La brochure que les sénateurs ont reçue aujourd'hui contient, à l'endos de la page couverture, un poème, dont voici une traduction libre:
S'enfoncer toujours, et toujours plus loin
Dans une transe urbaine,
L'oreille sourde aux voix
Du monde de la nature.
Leur chant séduit l'esprit
Et incite les sens
À émerger et à s'éveiller
Au chant toujours présent
Mais souvent ignoré.
C'est ce que nous offrons à nos clients, et qui nous rapporte en moyenne 20 000 $ une belle fin de semaine rien qu'avec un unique et très petit refuge écologique à l'orée du parc provincial Algonquin. Je dois expliquer aux honorables sénateurs pourquoi nous avons choisi cet endroit. Nous avons cherché plus d'un an un point d'accès où nous pourrions mettre des bateaux à l'eau pour que les gens puissent venir, acheter les expériences que nous offrons et pénétrer dans le parc provincial Algonquin.
Le parc Algonquin fait 200 kilomètres par 200 kilomètres. Aucune motomarine, ni le ski nautique ne sont autorisés sur ces lacs. Une distinction est faite dans les règles pour permettre les bateaux à moteur sur les lacs, mais les motomarines qui troublent de l'expérience que les gens veulent vivre dans ces parcs posent nettement un problème.
Aucun investisseur du secteur de l'écotourisme n'a la possibilité de créer un chalet écologique dans un secteur protégé, une zone de conservation ou un parc. L'industrie, y compris les refuges comme le nôtre, ne peuvent s'établir qu'en dehors des limites de ces réserves. Le gros problème que nous avons, c'est que lorsque des gens viennent nous voir pour vivre l'expérience que nous offrons dans un parc et pour les expériences d'apprentissage que nous proposons sur le lac, nous n'avons pas de contrôle sur ce qui se passe sur le lac. Les motomarines font des va-et-vient à toute vitesse le long de la berge, devant nos clients et, dans certains cas qui ont été documentés sur film vidéo, font des manoeuvres autour des gens qui sont en kayak de mer. Les kayaks de mer ont un très faible tirant d'eau, alors cela pose un problème de sécurité. Les Jet Skis passent à toute vitesse autour des débutants qui sont là pour apprendre à manoeuvrer les kayaks de mer. Ce sont parfois des touristes étrangers qui sont venus vivre l'expérience de la nature au Canada. Ils sont perturbés, à l'aller ou au retour de leur randonnée, de rencontrer ces véhicules. Ils n'ont aucun problème avec les bateaux à moteur. Très franchement, les gens qui veulent aller à la pêche prennent leurs bateaux à moteur jusqu'à un certain endroit, où ils jettent l'ancre. Ils n'ennuient personne. Ils traversent le lac et s'arrêtent.
Nous offrons des expériences les fins de semaine. C'est là que nous faisons le plus gros de nos recettes. Le mardi et le mercredi, rien n'arrive chez nous. Ce sont les jeudi, vendredi, samedi et dimanche que nous faisons nos recettes, avec des gens qui viennent de Toronto ou de l'étranger.
Il n'y a que huit ou neuf samedis par saison. Sur ces huit ou neuf samedis, trois Jet Skis, sur un petit lac comme le nôtre, peuvent prendre beaucoup de place six heures par jour. Nous cherchons des possibilités et des endroits pour amener nos clients et leur faire vivre cette expérience purement canadienne ou leur enseigner à pagayer un canoë ou encore leur faire connaître la nature sauvage. Pendant ce temps-là, il y a des gens qui utilisent des véhicules pour défaire les berges exprès, en vue d'avoir un accès facile pour mettre leurs bateaux à l'eau et les en ressortir. Ensuite, ils tournent en rond avec leurs Jet Skis et vont sauter des vagues. Les Jet Skis sont de merveilleux joujoux, mais il y a bien des endroits au Canada où ces véhicules peuvent aller et être chez eux. Nous n'avons pas un seul endroit tranquille au Canada où offrir les expériences que j'aime proposer. Il y a bien des gens comme moi qui investissent des milliers de dollars pour offrir aux voyageurs étrangers cette expérience paisible et purement canadienne.
Il nous faut trouver un moyen pour que les municipalités locales, les administrations locales ou même les gouvernements provinciaux disent: «Vous savez, si vous voulez établir votre entreprise dans ce secteur, votre placement est en sécurité; nous veillerons sur vous.»
J'ai créé mon entreprise aux abords d'un parc provincial de renommée mondiale, une ressource qui rapporte plus d'un million de dollars par année. J'avais pensé que l'établissement de mon entreprise à trois ou quatre kilomètres de la frontière du parc était un pari sûr. Maintenant, quand les samedi et dimanche, lorsque mes clients veulent venir, on n'est même pas sûrs de pouvoir éviter ces véhicules. Notre lac est petit. Je peux amener un groupe sur une île faire de la peinture. Nous avions un partenariat avec le Musée des beaux-arts l'année dernière. Nous nous sommes entendus avec le Musée des beaux-arts de l'Ontario, cette année, pour offrir l'expérience Tom Thomson.
C'est un lac où Tom Thomson a peint, et nos clients viennent vivre l'expérience de Tom Thomson. Depuis la fin des années 1800, ce lac est une voie d'accès au parc provincial Algonquin pour les adeptes du canoë. C'est ce pourquoi nos invités viennent. Le fait de ne pas pouvoir le leur offrir parce que nous n'avons pas de contrôle sur ce qui arrive en dehors de notre terrain est, très franchement, une honte. C'est l'expérience à vivre au Canada que nous offrons dans le monde entier, et il devrait y en avoir plus.
J'ai dit beaucoup de choses, ici, qui témoignent de la valeur que peuvent avoir les visiteurs qui viennent vivre cette expérience. Une bonne fin de semaine, plus de 200 personnes viennent au lac faire une randonnée en canoë vers le parc Algonquin. Un tiers de ces personnes, grosso modo, font partie d'un groupe guidé. Les gens paient jusqu'à 170 $ par jour pour une randonnée guidée dans le parc Algonquin.
Mon voisin peut aller à pied ou en voiture jusqu'au kiosque de location de motomarines, en louer une et saper mon revenu, gâcher l'expérience de mes clients en un quart d'heure. Les gens en sont écoeurés.
Si ce n'est pas une fenêtre sur la protection des investissements dans l'écotourisme au Canada, j'aimerais bien savoir ce qui pourrait l'être. Où y a-t-il un endroit calme où on puisse offrir ces expériences, et comment pouvons-nous stimuler l'investissement dans ce type d'entreprise? C'est ce que, à mon avis, nous recherchons. Il y a bien des gens qui ne demandent qu'à vivre l'expérience canadienne. La Commission canadienne du tourisme clame dans le monde entier que c'est un endroit calme, naturel, unique. Si nous ne pouvons pas protéger les gens contre ces véhicules, nous ne pouvons pas leur offrir ce que nous aimerions offrir.
Un problème particulier est l'accès aux zones protégées. Aux niveaux fédéral et provincial, on constate une vigoureuse poussée en faveur de la création de secteurs protégés pour que les gens puissent vivre l'expérience de la nature. Cependant, il faut que le secteur des affaires intervienne et offre la location de canoës, offre aux gens des randonnées guidées, offre la version naturaliste de l'expérience, qui favorise l'investissement à valeur ajoutée et l'activité économique. Les parcs, en soi, ne peuvent pas générer beaucoup d'activité économique. Ces entreprises ne peuvent pas s'établir dans la réserve ou la zone protégée. Elles doivent s'établir aux abords du parc, comme nous l'avons fait. L'une des brochures de la trousse que nous avons remise aux sénateurs comporte une carte de nos installations, qui montre où nous sommes, tout au bord du parc.
Il y a plusieurs brochures, dans cette trousse, qui vous donneront une idée de ce que nous vendons et de ce contre quoi nous devons lutter. Par exemple, sur la brochure intitulée «Journey to the Edge for a Restorative Getaway», je n'ai pas mis d'image de motomarine dans le paysage, parce que ce n'est pas compatible avec ce que je vends.
Notre lac est très peu profond. On pourrait être à 100 mètres de la rive et avoir la tête au-dessus de l'eau avec les pieds qui touchent le fond. Les motomarines peuvent circuler entre les nageurs, et le font souvent.
L'odeur d'essence dans l'eau, une heure après qu'a disparu la dernière motomarine, est écoeurante. Nous n'avions pas à vivre avec cela il y a cinq ans.
Autre chose que nous offrons, ce sont les randonnées en canoë pour observer les orignaux. Il y a moins d'orignaux à voir ces temps-ci sur notre lac, mais nous en voyons dans le parc provincial Algonquin. Les huards, les hérons, sur notre lac, sont mis en péril par ces véhicules. Il en est question dans le rapport, alors je n'en dirai pas plus sur le sujet.
«Arts in the Wild», les arts dans la nature, c'est une grande activité de partenariat qui offre la possibilité d'une expérience d'apprentissage dans notre environnement. Une motomarine ne fait pas bonne figure dans l'expérience artistique Tom Thomson. Lorsqu'on est sur une île, à offrir ces expériences à des gens qui paient 700 $ pour la fin de semaine, une motomarine qui passe à toute vitesse ne va pas très bien dans le tableau.
Prenons l'exemple de Paddling Ontario. Il y a 24 membres. Ce sont toutes des entreprises qui offrent des expériences non motorisées.
Sur notre lac, cinq compagnies différentes proposent le même type d'expérience que nous. Aucune ne propose de bateaux à moteur. Aucune n'a, même, de bateau à moteur et encore moins de motomarine.
Ce lac est différent. J'ai ici un article du New York Times, avec les titres «In Canada, Wet Meets Wild»; «A Novice Paddles to Her Heritage» et «Canoeing in Algonquin Park: Little Traffic on a Watery Highway». C'était un article de trois pages sur notre entreprise, paru dans le New York Times. Les gens qui l'ont lu ont une bonne idée de ce dans quoi ils s'embarquent. Imaginez être le guide qui prend charge de gens tout excités à la perspective d'observer la nature canadienne tout en pagayant le long de la rivière Amable du Fond vers le parc provincial Algonquin. Il se peut qu'ils aient aperçu un bateau à moteur sur la rivière, mais voilà une motomarine qui les dépasse à toute vitesse juste alors qu'ils parviennent à l'embouchure de la rivière. C'est tout à fait écoeurant. Ce n'est pas compatible avec le produit que le Canada offre au monde.
Il est indispensable, sénateurs, que ce projet de loi aille de l'avant et soit aussi rigoureux que possible.
C'est un partenariat que nous avons avec Ontario Northland. Nous faisons notre publicité auprès de cadres d'entreprises du centre-ville de Toronto: Prenez le train. Sortez pagayer. C'est une campagne publicitaire de milliers de dollars qui est menacée. Ça ne va tout simplement pas ensemble.
Après que nous nous soyons réunis et que nous ayons dit «Commençons à unir toutes nos ressources et investissons tout ce que nous avons dans ce projet. Mettons-y le paquet», il n'est pas juste que quelqu'un puisse arriver et détruire tout cela, en toute légalité. Je demande avec insistance aux honorables sénateurs qu'ils fassent quelque chose pour protéger et encourager l'investissement dans ce genre de ressources.
À la dernière page du document que je vous ai remis, je suggère certaines choses que ce projet de loi pourrait faire. Le projet de loi S-10 peut permettre l'imposition de restrictions visant les motomarines sur les cours d'eau qui sont contigus à des parcs provinciaux ou des réserves fauniques, afin de pouvoir encourager les entrepreneurs à créer des entreprises en offrant une certaine mesure de protection de leur investissement.
Les collectivités locales pourraient se déclarer elles-mêmes des lieux de tranquillité. Il y a quelques années, j'étais tenté de lancer une nouvelle campagne de marketing. J'ai pensé, vous savez, voilà la campagne de marketing du siècle: «Tranquillité».
Dans une forêt sans cours d'eau, on peut offrir aux gens la tranquillité et les sons de la nature. On peut garantir qu'aucun de ces véhicules ne viendra troubler la paix. Cependant, tout le monde veut être au bord de l'eau. Les gens veulent être sur l'eau. Ne pouvons-nous pas protéger quelques cours d'eau contre ces véhicules lorsque nous avons des milliers et des milliers de kilomètres carrés d'eau sur lesquels ils pourraient aller?
Je suis au milieu de nulle part. Il n'y a même pas d'électricité, sur ce lac. Nous utilisons l'énergie solaire. Les résidants du lac ont dit «N'amenez pas l'hydroélectricité ici parce que cela détruira tout. Il y aura trop de gens, trop d'attentes, de plus grosses maisons, tout le bataclan». Les résidants ne veulent pas de téléphone. Il n'y a pas de téléphone, à part les petits téléphones d'ordinateur satellite que nous utilisons. Le lac, depuis toujours, donne accès au parc provincial Algonquin, et il n'y a pas moyen d'empêcher les motomarines de tout gâcher.
J'espère que les honorables sénateurs ont des questions à me poser. Je pourrais continuer sur ma lancée bien longtemps.
Le sénateur Finnerty: Combien y a-t-il de chalets sur ce petit lac?
M. Lucier: Il en est question dans le document. Il y a une cinquantaine de bâtiments sur le lac, si vous regardez la carte topographique, mais ce ne sont pas tous les chalets. Il y a 30 ou 40 chalets. Trois chalets ont des motomarines, mais c'est un lac public.
Le sénateur Finnerty: Comment peuvent-ils y accéder si tout est privé?
M. Lucier: Les gens peuvent venir en voiture jusqu'au lac et mettre le bateau à l'eau. C'est ce qui se fait dans le parc Algonquin. On y va en voiture et on met le canoë à l'eau. On peut faire ça avec les motomarines aussi, et c'est ce que font les gens.
Il y en a qui viennent en visite à un chalet.
Le sénateur Finnerty: Je ne savais qu'on pouvait faire ça sur un lac privé.
M. Lucier: Il y a un accès public à la plupart des lacs.
Le sénateur Finnerty: Je trouve ça bizarre, mais ils ne peuvent pas entrer dans le parc.
M. Lucier: Ils les utilisent sur la rivière, mais on ne peut légiférer le bon sens, en matière de conduite de ces véhicules, malheureusement. Il faut offrir un autre choix aux gens pour les tenir à l'écart d'un secteur. Bon nombre de ces gens-là viennent de Toronto pour la fin de semaine, ils louent un véhicule et vont sur le lac pour se trouver une place de camping. Quand la police provinciale arrive pour faire enquête, généralement, ils sont déjà repartis.
Le sénateur Finnerty: Quelle est la grandeur du lac?
M. Lucier: Il fait environ 400 hectares, soit 2 kilomètres par 2 kilomètres.
Le sénateur Buchanan: Ce n'est pas très grand.
Le sénateur Finnerty: C'est trop petit pour des motomarines.
M. Lucier: J'espérais que ce projet de loi pourrait contribuer à régler ce problème. Des chercheurs devraient s'intéresser au sujet de la capacité d'un lac en ce qui concerne l'essence qui y est rejetée. Quelle grosseur devrait avoir un lac pour pouvoir accueillir des motomarines? Est-ce que nous pourrions fixer une limite en fonction de la grandeur du lac?
Le sénateur Spivak: Cela se fait aux États-Unis dans bien des régions.
M. Lucier: Notre lac est tellement peu profond qu'il ne fait pas 10 pieds dans sa partie la plus large, ce qui est parfait pour ces véhicules. Toutefois, on peut sentir la pollution qu'ils créent dans le lac. Bien des gens tirent leur eau potable du lac. Imaginez seulement aller au puits et sentir l'essence dans votre eau, ou aller au lac chercher de l'eau et sentir l'odeur d'essence qu'elle dégage. Le parc Algonquin a été créé pour protéger la qualité de l'eau, ce qui est une des raisons pour lesquelles ces véhicules n'y sont pas autorisés et la grosseur des moteurs est limitée. L'eau de notre lac coule dans le parc provincial Algonquin. Le ministre des Ressources naturelles l'a reconnu comme une région de gestion améliorée, pour sa valeur liée à l'écotourisme — en raison de ce que nous faisons — et aussi de sa valeur de patrimoine naturel.
Nous pouvons légiférer l'utilisation des terres en Ontario. Il y a un merveilleux document sur le site Patrimoine vital de l'Ontario, mais c'est une stratégie d'utilisation des terres. On peut désigner des régions comme étant dotées de ces valeurs particulières, mais on ne peut rien faire au sujet de l'eau, à part au niveau fédéral.
Le sénateur Buchanan: Est-ce votre épouse qui est derrière vous, monsieur Lucier?
M. Lucier: Oui. J'aimerais vous présenter plusieurs personnes qui m'accompagnent, aujourd'hui. Il y a des étudiants de Jeunesse Canada Monde sont arrivés cette semaine, que nous les hébergeons. Ce sont Félix, du Kenya et Mussa de la Tanzanie. Aussi, il y a ici mon épouse, Martha, et mon fils Timothy, qui est venu à Ottawa aujourd'hui pour s'informer sur le processus gouvernemental.
Le président: Nous vous souhaitons la bienvenue à tous.
Le sénateur Buchanan: Tout d'abord, votre épouse a mentionné quelque chose d'intéressant. Il y a des restrictions, au parc Algonquin.
M. Lucier: La plupart des parcs sont des réserves naturelles.
Le sénateur Buchanan: Est-ce qu'ils ne sont pas régis par le gouvernement fédéral?
M. Lucier: C'est le gouvernement provincial, qui peut tirer des lignes autour d'un secteur protégé comme celui-là. Il formule des règlements pour les parcs, pour interdire certains véhicules.
Le président: Est-ce que le parc Algonquin est un parc provincial?
M. Lucier: Oui.
Le sénateur Spivak: La plupart des parcs fédéraux, à part un qui est au Manitoba...
M. Lucier: ... Riding Mountain National Park. J'ai parlé à quelqu'un qui participe au processus, et ils ont interdit les motomarines dans le parc.
L'un des principaux problèmes, c'est que si on veut qu'il y ait de la croissance dans l'industrie, il faut protéger les investissements.
Le sénateur Buchanan: Vous étiez ici quand les autres témoins sont venus.
M. Lucier: Oui.
Le sénateur Buchanan: Est-ce que vous, ou quelqu'un d'autre de votre lac, a fait une demande pour que les motomarines y soient interdites?
M. Lucier: J'ai consacré beaucoup de mon temps à essayer de protéger l'accès aux ressources dont nous jouissons en dialoguant avec les compagnies forestières au sujet des forêts et des pistes que nous utilisons sur les terres de l'État, en essayant de protéger les valeurs que mes invités viennent rechercher. Il me semble que pour tout le monde, un labyrinthe est créé avec, en son milieu, un morceau de fromage. Nos passons des années et des années à essayer d'atteindre le fromage.
Le sénateur Buchanan: Avez-vous entendu M. Meisner? Il a dit que des demandes pourraient être faites pour limiter l'utilisation des motomarines.
M. Lucier: Sénateur Buchanan, je l'ai entendu. La vérité, c'est que cela nécessite de la paperasserie, et comme j'ai pas mal eu affaire avec des compagnies forestières, j'ai appris qu'elles voudront bien protéger ce qu'on a tant qu'elles n'ont rien à coucher sur papier. Elles regarderont un cas particulier et hocheront la tête, rien qu'à l'idée de tout ce que cela représente. Elles préfèrent continuer leur chemin, laisser les gens tranquilles et s'occuper de leurs affaires. Ce n'est pas ainsi qu'il faut faire.
Le président: Bref, pour répondre à la question du sénateur Buchanan, vous n'avez pas fait de demande au ministère des Pêches et des Océans visant à interdire les motomarines.
M. Lucier: C'est vrai, je ne l'ai pas fait.
Le sénateur Christensen: Je viens du Yukon, alors j'en sais pas mal sur la nature. Je reviens à peine d'un voyage de neuf jours en kayak dans les eaux glacées du sud-est de l'Alaska, à photographier et suivre des rorquals à bosse, et c'était fantastique. Il n'y avait ni motomarines, ni aucun autre bateau.
N'y a-t-il pas une association nationale d'écotourisme?
M. Lucier: Non, il n'y en a pas.
Le sénateur Christensen: Je pense qu'il en existe une. Je connais certaines personnes, dans le Nord, qui en sont membres.
M. Lucier: Il n'y pas d'association nationale d'écotourisme formelle, mais il y a des associations provinciales au Québec et en Saskatchewan.
Le sénateur Christensen: Il y a certainement une association territoriale. À ce que j'ai compris, ils ont aussi une association nationale sans statut.
M. Lucier: La Commission canadienne du tourisme a une espèce de club de développement dont les membres sont des gens qui font ce genre de choses partout au Canada, mais il n'y a pas d'organisation formelle.
Le sénateur Christensen: Tout cela pose un gros problème. Il est certain que le sénateur Spivak s'est donné beaucoup de mal pour formuler un projet de loi dans le but de régler ce problème.
Nous avons affaire à un projet de loi S, ce qui signifie qu'il vient du Sénat. Il doit donc être présenté à la Chambre des communes après sa troisième lecture devant le Sénat. Lorsqu'il sera devant la Chambre, si le ministre n'est pas disposé à l'accepter ou à l'incorporer à une loi existante, il n'ira pas bien loin. Nous avons un problème, et comme je dis, le sénateur Spivak a présenté beaucoup d'excellentes informations, et aussi de la documentation. Je pense que nous devrions essayer de régler le problème.
On nous a dit, il n'y a pas très longtemps, que si nous pouvions avoir une annexe nationale, les gens comme vous pourraient faire une demande au ministère. Si cette annexe existait, la demande pourrait être faite. Il me semble que ce serait une excellente chose, non seulement pour les associations d'écotourisme, mais aussi pour les organisations de tourisme dans la nature de tout le pays, si elles faisaient pression sur le ministère et, en fait, si elles obtenaient la création de cette annexe, afin que vous n'ayez pas, comme maintenant, une myriade de documents à remplir.
Manifestement, le sénateur Spivak a fait tout ce qu'il fallait pour appuyer sa démarche. Vous, par contre, vous ne l'avez pas fait.
M. Lucier: Sénateur Christensen, il n'existe pas d'association nationale.
Le sénateur Christensen: Il y a des associations de tourisme.
M. Lucier: Oui, il y a des associations de tourisme.
Le sénateur Christensen: Il y a une réunion, le mois prochain, à Montréal, du groupe national.
Le sénateur Spivak: Je voulais préciser que dans mes conversations avec le personnel du ministre, je leur ai dit: «Faites-le vous-même; cette loi n'est pas nécessaire.» Je n'ai reçu aucune réponse, à vrai dire, mais ce serait très simple si le ministre ajoutait cette annexe. La seule chose qu'il resterait à régler — et je pense qu'ils examinent la question —, c'est le processus du règlement d'interdiction des bateaux; je vous demande de ne me poser aucune question là-dessus. Il manque de personnel; cela pourrait prendre quatre ans; à n'importe quel moment, quelqu'un pourrait dire: «On laisse tomber.» Voilà encore autre chose. Il ne s'agit pas seulement, en fait, que d'un seul problème.
Le sénateur Christensen: Cela s'applique aussi à votre projet de loi s'il entrait en vigueur?
Le sénateur Spivak: Non, ça ne passerait pas par le même processus. C'est seulement pour dire «au ministre».
Le sénateur Christensen: Il faut tout de même l'appliquer. Il y a un problème, nous l'avons cerné, et il me semble qu'il devrait y avoir un moyen de le résoudre, parce que la possibilité qu'il y ait deux textes législatifs pour traiter des motomarines n'a tout simplement pas de bon sens. Comment faire, et comment faire des recommandations qui donnent un résultat concret? C'est tout ce que vous voulez; c'est tout ce que nous voulons tous.
Le sénateur Spivak: Oui. Cela ne vient vraiment pas de moi. Ce sont les gens, là-bas.
Le sénateur Christensen: C'est tout le monde qui a à voir avec la nature. C'est l'un de nos plus grands biens au Canada, notre eau, notre nature. Au plan économique, c'est un gros élément vendeur dans le monde entier, puisque nous avons ce que la plupart des gens n'ont plus. Je réfléchis à haute voix, mais ça ne va pas très loin.
Le sénateur Spivak: Il y a des régions où les municipalités ont imposé des règlements. Si quelqu'un devait les contester, ils pourraient être annulés, parce que seul le gouvernement fédéral est habilité à imposer des règles, mais en fait, il n'y a pas eu de contestations. Je ne sais pas. Peut-être pourriez-vous essayer de ce côté-là pendant que nous attendons une solution positive.
Le président: C'est un peu comme une loi de justicier.
Le sénateur Spivak: Vous avez raison.
M. Lucier: Avec cette loi vient l'occasion d'éduquer le public sur le sujet. Actuellement, nous craignons de nous faire justiciers de l'autre côté, de poser des affiches indiquant que l'Association des propriétaires de chalets ou des amis du lac, la municipalité a décidé que les motomarines ne sont pas tolérées ici. Les gens démolissent les affiches qui limitent leurs droits personnels tout le temps — ils le font sur nos pistes, dans notre voisinage.
S'il y a un document ou une force de loi, quelque part, qui appuie cette affiche, elle restera; et alors, la chose devient normale. Pourquoi ne pas créer une norme? Actuellement, en Ontario, si quelqu'un voulait créer une entreprise isolée comme la nôtre — une exploitation accessible par hydravion, par exemple — et établir le genre d'exploitation que nous avons sur un lac isolé du Nord, rien n'empêcherait quiconque de venir, d'ouvrir un accès sur le lac par les terres publiques, de tout arracher et de stationner un véhicule là, et de recommencer encore et encore. Je pense que la force de loi pourrait stimuler le développement économique dans ce secteur, parce que les gens auraient un cadre pour les appuyer; ils n'auraient à se démener dans le dédale du labyrinthe. Ils pourraient s'adresser à un gouvernement régional ou municipal et dire «Voici l'outil — cette loi, ici, est l'outil. Je veux investir tant de milliers de dollars, ou tant de millions de dollars, et mettre sur pied un projet ici, mais nous devons savoir qu'il sera toujours protégé.» S'il était possible de construire ce genre d'installations dans des régions protégées, ce serait fait. Il y aurait des gens pour les construire dans des réserves fauniques ou des parcs provinciaux ou nationaux. Ce n'est pas possible.
C'est pourquoi nous sommes aux abords du parc.
Le sénateur Finnerty: Avez-vous essayé de rencontrer les propriétaires de chalets? Nous l'avons fait sur notre lac. Nous avons fait un remue-méninges. Lorsque la situation a été expliquée en détail, lorsque nous avons montré les résultats des analyses d'eau et démontré combien elle s'était détériorée au fil des ans, avec les moteurs sur le lac, tout le monde a fini par convenir que c'était vraiment un gros problème.
M. Lucier: Je pense qu'avec l'industrie, cela va bien plus loin que l'association de chalets. Comme je l'ai dit, il y a environ 200 personnes qui, chaque fin de semaine, voteraient en faveur de l'interdiction des motomarines.
Le président: Si vous vous adressiez aux autres résidents de votre lac et vous mettiez d'accord avec eux pour interdire les motomarines, est-ce que ça marcherait?
M. Lucier: Ça pourrait être utile, mais je pense que le problème que j'ai apporté ici, c'est que c'est un lac public. C'est une ressource publique, et les gens qui viennent à ce lac n'en veulent pas. Des centaines d'entre eux viennent chaque fin de semaine, et ne veulent pas des motomarines. Même si l'association de propriétaires de chalet pouvait obtenir 85 p. 100 des votes, disant: «D'accord, nous ne les voulons pas sur le lac», et demandait au ministre de confirmer ou non l'interdiction, si on ajoutait 200 autres noms à ces vingt-là, cela ferait 220 personnes contre trois. Je pense qu'il y a un problème, ici, qui va bien au-delà des propriétaires de chalet. C'est ce dont je parle ici. Si je pouvais ajouter ces centaines de noms de gens qui utilisent le lac, ce serait plus qu'une requête formelle.
Le sénateur Spivak: C'est là où nous voulons en venir, voyez-vous. Les gens n'ont pas toujours le temps et l'énergie pour faire cela, alors il faut créer un cadre pour leur faciliter la tâche. Il faudra attendre et voir ce qui se passera.
Le sénateur Finnerty: Nous avons tout simplement harcelé tout le monde qui venait au lac, et ils ont cessé de venir. Nous leur avons rendu la vie si difficile qu'ils ne voulaient plus venir.
M. Lucier: Avez-vous tendu des fils partout au travers du lac?
Le sénateur Finnerty: Presque — l'un des propriétaires avait un fusil, et il tirait en l'air.
Le sénateur Buchanan: Je voudrais revenir à ce parc Algonquin. Est-ce que vous dites les motomarines ne sont pas autorisées sur le lac, dans le parc Algonquin?
M. Lucier: Sur des milliers de lacs du parc Algonquin.
Le sénateur Buchanan: D'où est venue cette interdiction — en vertu de quelle autorité?
M. Lucier: Le parc?
Le sénateur Buchanan: Peu importe.
M. Lucier: Est-ce que vous dites que ce sont des particuliers qui y sont parvenus?
Le sénateur Buchanan: Y a-t-il un lac? Y a-t-il un lac Algonquin? Je ne connais pas très bien la région.
M. Lucier: Non, il y a des milliers de lacs.
Le sénateur Buchanan: Est-ce que vous dites que ces motomarines ne sont pas autorisées sur ces lacs?
M. Lucier: Pas dans le parc provincial, en effet.
Le sénateur Buchanan: Pourquoi?
M. Lucier: Parce que le parc provincial Algonquin impose toutes sortes de restrictions sur les comportements, qui ont été établies, pour la plupart...
Le sénateur Buchanan: Comment ces restrictions ont-elles été mises en vigueur?
M. Lucier: Le parc a un plan de gestion formel. Le parc Algonquin est très différent de tout autre parc.
Le sénateur Buchanan: Il faudrait que ce soit sous autorité fédérale.
Le président: Non. Il y a des parcs provinciaux dans, je pense, au moins sept ou huit provinces.
Le sénateur Buchanan: Il doit y avoir délégation de pouvoirs législatifs.
Le président: Non, ils sont sur des terres publiques provinciales, assujetties à l'autorité de l'administration provinciale. Elles sont la propriété de la province, qui les administre, et qui détermine les règles.
Le sénateur Spivak: C'est différent. Ils ont un mandat et une mission, et ils fonctionnent conformément à ces règles.
Le sénateur Buchanan: Je sais bien. Toutefois, pourquoi le gouvernement de l'Ontario ne pourrait-il administrer votre lac?
M. Lucier: C'est un problème que j'ai soulevé auprès de l'Organisation mondiale du tourisme. J'étais à Cuiaba, au Brésil, lorsque la délégation se préparait en vue de l'Année internationale de l'écotourisme, et la question s'est retrouvée dans le document officiel publié à l'issu de cette rencontre.
Des mesures de conservation sont automatiquement mises en oeuvre dans les secteurs de conservation, pour protéger les ressources. Le problème, comme celui que nous avons, que pose l'accès à ces ressources, c'est que nous devons agir en dehors de ces limites, et les restrictions s'arrêtent aux limites du parc. C'est pourquoi il y a une ligne.
Il faut une zone tampon, là. Le document qui a été diffusé disait qu'il est nécessaire de protéger, aussi, en dehors du secteur protégé, les valeurs que viennent chercher les gens dans la zone protégée.
Le sénateur Buchanan: Il manque quelque chose, ici, parce qu'en vertu de la Loi constitutionnelle du Canada, tout ce qui concerne la navigation sur les voies navigables du pays relève de la responsabilité fédérale.
M. Lucier: Oui. D'où ma présence ici.
Le sénateur Buchanan: C'est un pouvoir fédéral exclusif. Comment le gouvernement de l'Ontario peut-il contourner cette exclusivité?
M. Lucier: Je n'en sais rien.
Le sénateur Buchanan: Comment ont-ils pu prendre le contrôle de ces lacs dans les parcs provinciaux? Il a fallu que le gouvernement fédéral leur délègue ces pouvoirs.
Le sénateur Spivak: Probablement.
M. Lucier: Je ne sais pas, parce que l'Ontario vient de créer plusieurs réserves et zones de conservation. Il y aura certainement des restrictions.
Le sénateur Buchanan: Nous en avons créé en Nouvelle-Écosse aussi, mais la GRC patrouille ces lacs, sous l'autorité du gouvernement fédéral. Notre gouvernement provincial n'a jamais eu le contrôle des lacs. Nous pouvions l'avoir si le gouvernement fédéral nous déléguait ce pouvoir. Le gouvernement fédéral doit avoir délégué le pouvoir au gouvernement de l'Ontario, pour lui laisser l'autorité exclusive sur la navigation sur les lacs des parcs provinciaux.
M. Lucier: C'est ce qu'on pourrait penser.
Le sénateur Finnerty: C'est possible. Là où se trouve notre chalet, il y a 27 lacs. Le gouvernement provincial a dit qu'il en ferait un parc du Nord de l'Ontario. C'est appelé le parc Kettle Lake. Seuls les canoës sont autorisés.
Le sénateur Buchanan: Ce pouvoir doit être délégué par le gouvernement fédéral, parce que le gouvernement fédéral, en vertu de la Loi constitutionnelle, jouit de l'autorité exclusive sur la navigation sur tous les cours d'eau du pays.
Le président: L'inverse est vrai aussi. Le gouvernement du Canada ne peut créer un parc national sans l'accord de la province.
Le sénateur Buchanan: Il a le pouvoir d'exproprier.
Le président: Il ne l'a jamais fait.
Le sénateur Buchanan: Il l'a essayé en Nouvelle-Écosse une fois, mais a échoué.
Le président: Nous devrions trouver la réponse à cette question.
Le sénateur Buchanan: Dommage que nous n'ayons pas posé la question aux experts lorsqu'ils étaient ici.
Le président: Nous aurions dû le faire, mais nous ne pensions pas aux parcs provinciaux à ce moment-là.
Le sénateur Christensen: Vous parliez de l'Association mondiale du tourisme et de l'Année de l'écotourisme. Est-ce que c'est l'année prochaine?
M. Lucier: C'était en 2002.
Le sénateur Buchanan: Puis-je vous lire quelque chose?
Le président: Je vous en prie.
Le sénateur Buchanan: «Le droit du public de naviguer est reconnu dans la common law. En ce qui concerne notre discussion jusqu'à maintenant, la Loi constitutionnelle donne pouvoir de faire des lois pour réglementer tout ce qui a trait à la navigation. Cette exclusivité du pouvoir fédéral a été confirmée par la Cour suprême à plusieurs reprises.»
Le sénateur Spivak: Oui.
M. Lucier: Selon vous, sénateur Buchanan, la province aura été habilitée par le gouvernement fédéral à faire ceci. C'est aussi mon avis.
Le président: Peut-être l'ont-ils fait dans le style des justiciers, personne ne les en a empêché.
Le sénateur Spivak: Cela arrive parfois, mais pas dans les parcs. Par exemple, il n'y a pas de motoneiges à Banff, un parc fédéral.
Le président: Il n'y a pas de McDonalds à Banff. Il y a beaucoup de choses qu'on ne peut pas faire.
Le sénateur Spivak: C'est ainsi qu'il faut faire.
Le président: Je vais prendre le rôle de l'intervenant hostile. Vous nous avez parlé surtout, aujourd'hui, du péril qui plane sur votre entreprise. Vous êtes, de fait, en pleine quête industrielle. La première chose que vous avez dit, c'est qu'il y a beaucoup d'autres endroits où les gens qui ont ce genre de machines peuvent aller les utiliser. Où, par exemple?
M. Lucier: Tous les cours d'eau du Canada.
Le président: Et que faites-vous des gens qui vivent sur ces cours d'eau?
M. Lucier: Les gens peuvent amener ces véhicules sur n'importe quel cours d'eau lorsqu'il y a un accès public.
Le président: D'accord, mais selon votre argument, les gens qui vivent aux abords de n'importe quel cours d'eau et qui préféreraient ne pas y voir ces véhicules pourraient aussi demander, en vertu d'un quelconque règlement existant ou de ce projet de loi, s'il est adopté, que ces motomarines soient interdites sur leur cours d'eau, que ce soit le Saint- Laurent ou le lac Huron.
M. Lucier: C'est une façon de voir, et je dirais que le projet de loi pourrait régler cela. L'autre solution, ce serait de réglementer en fonction de la taille du lac. L'interdiction pourrait ne s'appliquer qu'aux petits lacs.
Le président: Certains Américains l'ont fait. Vous serez d'accord que quelles que soient vos objections, du point de vue des affaires, et non pas du point de vue esthétique, les utilisateurs de tout autre cours d'eau pourraient en dire autant, y compris ceux du Saint-Laurent? Les propriétaires de chalet dans les Mille-Îles, sur le fleuve Saint-Laurent, n'ont-ils pas les mêmes droits à la tranquillité?
M. Lucier: L'argument qui peut favoriser notre cas, c'est la nature historique de ce qui est arrivé. Ce lac est utilisé depuis une centaine d'années par les adeptes du canoë.
Le président: Au Canada, tous les lacs ont d'abord été fréquentés par des adeptes du canoë.
Y a-t-il des entreprises de location de motomarines et d'autres choses du genre sur votre lac?
M. Lucier: Non, il n'y en a pas.
Le président: Il doit bien y avoir 12 ou 15 endroits où je pourrais louer une motomarine pour l'amener sur ce lac et y tourner en rond?
M. Lucier: Je ne connais pas les noms et les adresses des gens qui louent ces véhicules.
Le président: Qu'en est-il de leurs entreprises? Vous avez parlé de l'importance du développement économique. Nous avons entendu des gens qui ont des entreprises de fabrication, de distribution et de vente de motomarines parler des dommages que subirait leur industrie et les problèmes d'emploi que provoquerait l'adoption de ce projet de loi. Un argument sur le développement économique va dans les deux sens. Je ne sais pas combien de gens vous employez, mais cette industrie en emploie des milliers. L'économie est un argument délicat, ici.
M. Lucier: Est-ce que vous voulez que je réponde à cela?
Le président: Oui, c'est pourquoi j'ai posé la question.
M. Lucier: L'économie est un aspect très important, en ce qui concerne les motomarines. Cela ne fait aucun doute. Mon entreprise, qui emploie 10 à 12 personnes une longue fin de semaine ou sept personnes tout au long de l'année, n'a pas un très grand impact économique. Je ne représente qu'une entreprise mais déjà, nous employons 35 p. 100 de ce que les entreprises forestières de la région emploient. Je ne suis qu'un modeste entrepreneur. Si vous ajoutez à cela toutes les petites entreprises exploitées sur notre lac, nous avons plus d'employés que le secteur forestier dans notre région. C'est un impact important, et notre industrie croît à une vitesse folle.
Les randonnées en kayak de mer, en Ontario, ont affiché une croissance exponentielle. Elles ont doublé l'année dernière. Elles doubleront encore. Ce n'est pas un secteur stagnant. Nous sommes en pleine croissance.
Je ne pense pas que l'industrie des motomarines souffrirait vraiment de la désignation de quelques lacs comme des secteurs de tranquillité. Nous ouvrons des débouchés économiques en créant des secteurs de tranquillité.
Le président: Je ne sais pas si nous parlons de doubler ou décupler l'activité. Votre argument revient à sauver votre entreprise plutôt que la leur.
M. Lucier: Mon argument n'a rien à voir avec leurs affaires.
Le président: Exactement.
Le sénateur Spivak: Ce projet de loi ne vise pas l'interdiction des motomarines. Les gens pourraient les interdire sur un petit lac. Les gens du lac voisin pourraient ne pas y voir d'inconvénient.
Il faut trouver un juste milieu, comme doit toujours le faire le gouvernement. Certaines personnes ont dit que les arbres de la forêt valent plus debout que coupés.
Nous avons une ressource rare, ici, au Canada. Nous avons la nature, que beaucoup de pays n'ont pas. Ce serait folie que de la détruire.
C'est un argument d'entreprise. Il me semble qu'il y a des moyens de trouver un juste milieu. Il y a des motos tout terrain dans certains secteurs. Il y a des courses d'accélération dans d'autres secteurs. Ailleurs, ce sont des courses de chevaux.
Si on veut avoir des motomarines, il suffit de désigner des endroits où elles peuvent aller. Laissez le reste de la population en paix. Croyez-moi, l'industrie n'en mourra pas.
Le sénateur Finnerty: Il y a des milliers de lacs.
Le sénateur Spivak: Elle n'en mourra pas, parce que si elle peut convaincre le public que c'est une bonne chose, le public s'en emparera. Nous vivons dans un marché libre, vous savez.
Le président: Pas exactement.
Le sénateur Spivak: Ils veulent empêcher le succès du libre marché.
Le sénateur Buchanan: Puis-je faire une observation? Nous avons parlé de la différence entre ici et les États-Unis. Je vais de temps en temps au New Hampshire. Les lacs du New Hampshire, et particulièrement ceux que je connais, sont sous l'autorité exclusive de la loi de l'État, et non pas sous l'autorité fédérale. Le gouvernement fédéral n'intervient absolument pas.
Quelqu'un a dit un jour que le gouvernement fédéral a le pouvoir exclusif de faire ceci, cela et autre chose encore, et il ne peut déléguer ce pouvoir, mais je suis ici pour vous dire qu'il le peut. En Nouvelle-Écosse et ailleurs, en vertu du Code criminel du Canada, le jeu relève exclusivement de l'autorité du gouvernement fédéral du Canada, mais il a délégué cette autorité aux provinces, si elles en veulent. Les gouvernements provinciaux administrent les casinos de la Nouvelle-Écosse et de l'Ontario.
Le sénateur Spivak: Il nous faut nous pencher là-dessus aussi.
Le sénateur Buchanan: De la même manière, le gouvernement fédéral a les droits exclusifs sur la navigation sur tous les cours d'eau, et il a délégué ce pouvoir au gouvernement de l'Ontario. Adressez-vous au gouvernement de l'Ontario. Les élections sont proches. M. Eves est un type très sympathique.
Le sénateur Finnerty: Je connais un gars qui s'appelle Dalton, c'est le prochain premier ministre.
M. Lucier: J'aimerais dire quelque chose pour terminer. Je pense qu'il est de la responsabilité du Sénat de s'assurer que la Commission canadienne du tourisme offre ce qu'elle dit offrir. La mission de la Commission canadienne du tourisme est d'offrir aux gens une occasion d'établir un rapport avec la nature et de connaître diverses cultures et collectivités. Le rapport avec la nature — c'est ce que la Commission canadienne du tourisme veut offrir à l'échelle internationale. Nous ne pouvons pas offrir cela maintenant. C'est ce que nous vendons au monde, mais nous ne pouvons pas l'offrir.
Le sénateur Spivak: C'est dans toutes les revues.
M. Lucier: La vision est d'offrir des expériences de classe mondiale en matière de nature et de loisirs — de classe mondiale. Où pouvons-nous offrir du canoë en eau calme s'il n'y a pas moyen d'interdire les motomarines? Selon la vision de la Commission du tourisme, nous faisons cela en préservant et en partageant les milieux propres, sains et naturels du Canada. L'industrie touristique doit être guidée par les valeurs du respect, de l'intégrité et de l'empathie.
Si la Commission canadienne du tourisme est un organe mandaté par le gouvernement fédéral qui travaille avec l'industrie et dont c'est la tâche, il incombe au Sénat de demander au gouvernement du Canada de faire que ce soit possible, et que nous puissions réellement avoir une nouvelle industrie de l'écotourisme au Canada qui fait de nous, dans le monde entier, la meilleure destination du monde pour ce qui est des milieux de canotage en toute tranquillité.
Je remercie les honorables sénateurs de cette occasion qu'ils m'ont donnée de faire cette présentation, et pour leurs questions réfléchies.
Le président: Honorables sénateurs, merci beaucoup.
La séance est levée.