Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans
Fascicule 13 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 30 septembre 2003
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui à 19 h 03 pour étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, les questions relatives aux stocks chevauchants et à l'habitat du poisson.
Le sénateur Gérald J. Comeau (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Nous poursuivons ce soir notre étude des questions relatives aux stocks chevauchants et à l'habitat du poisson. Nous avons déjà terminé notre rapport sur les stocks chevauchants, même si la question est encore inscrite à l'ordre du jour. Aujourd'hui, nous allons traiter particulièrement de la question de l'habitat du poisson.
Nous avons la chance d'avoir pour témoins ce soir des représentants de Myles et associés, c'est-à-dire M. Myles Kehoe et son associé, Michael Ojoleck. Nous avons bien hâte d'entendre l'exposé.
À la suite de votre déclaration préliminaire, nous passerons à la partie importante de notre séance, soit la période de questions. S'il y a des documents que vous souhaitez remettre au comité, je vous prie de le faire, pour que nous puissions les intégrer à notre dossier.
M. Myles Kehoe, associé, Myles et associés: Honorables sénateurs, invités, nous vous remercions de nous avoir invités à témoigner devant le comité. C'est un hasard qui est à l'origine de mes recherches dans ce domaine; en 1990, j'ai trouvé dans un vieux cahier un article de journal remontant à 1946. L'article en question donnait une description détaillée du cheminement de wagons couverts chargés de barils de gaz moutarde de 45 gallons, depuis l'Ontario jusqu'à la Nouvelle-Écosse. Le gaz excédentaire produit en temps de guerre a été transporté jusqu'à la côte, puis jeté en mer. Un autre reportage témoignait du fait que les pêcheurs de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse avaient manifesté contre la manœuvre, craignant que cela ne détruise leurs fonds de pêche.
À ce moment-là, j'ai posé des questions à mon père, John, au sujet de ces histoires. Pêcheur de carrière durant la guerre, il a confirmé que le rejet en mer des munitions était monnaie courante durant les années suivant la Seconde Guerre mondiale. Sur ses vieilles cartes, certains lieux étaient marqués: «Danger: bombes non explosées» et «Zone de décharge d'explosifs». Certains des lieux ainsi marqués sur les cartes américaines de nos voies d'eau ne portaient aucune indication sur nos cartes correspondantes.
Depuis que j'ai commencé mes recherches, bon nombre des compagnons pêcheurs de mon père m'ont dit qu'il leur était arrivé de remonter à la surface toutes sortes de choses — des morceaux de jeep, de vieux obus, des torpilles et ainsi de suite. Souvent, l'excédent des stocks de l'armée provenait de lieux qui sont bien loin des zones de décharge désignées.
Quand l'Office canadien d'hydrocarbures extracôtiers a accordé à Hunt Oil Company un permis d'exploration pour la baie de Sydney, j'ai remarqué qu'il y avait deux zones de décharge dans le secteur circonscrit. Aidé dans mes recherches par M. Michael Ojoleck, de Port Hood, j'ai découvert ce qu'il y avait au juste, sous la surface. Nous avons fait des découvertes intéressantes.
M. Michael Ojoleck, associé, Myles et associés: Durant la guerre, le Canada a été un chef de file mondial en élaboration, en mise à l'essai et en production d'armes chimiques. Dans plusieurs usines, surtout chez Stormont Industries à Cornwall, en Ontario, des obus, des bombes et des grenades étaient chargés de gaz moutarde épaissi.
Les obus d'artillerie comportaient à l'intérieur comme à l'extérieur un revêtement spécial anticorrosion et, pour indiquer qu'il s'agissait du gaz moutarde, portaient une bande rouge. D'autres bandes de couleur étaient employées pour le lewisite. Les articles de journaux de 1946 racontent que les armes chimiques en question étaient envoyées outre- mer dès leur production, et qu'elles n'étaient jamais très loin d'une ligne de front.
Après la guerre, le Canada a récupéré ses munitions pour les éliminer. Le hic, c'est que les dépôts d'armes à Bedford, près de Halifax, et Pointe Edward, près de Sydney, étaient déjà emplis de munitions destinées à être renvoyées outre- mer.
M. Kehoe: Des débardeurs et des marins à la retraite m'ont dit que des munitions avaient été jetées par-dessus bord — parfois, au cours du voyage de retour d'Europe en 1945, puis, plus tard, durant des opérations de rejet en mer qui ont duré pendant de longues années, après la guerre.
Au début des années 60, la Navy américaine a vidé nombre des réservoirs de munitions de son chantier naval à Argentia. Nous ne savons pas en quoi consistaient exactement les stocks en question, mais nous avons appris qu'un bateau, le LST-519, avait été muni de bacs spéciaux pour faciliter le rejet en mer du matériel militaire et de déchets toxiques et nucléaires. En octobre 1960, le bateau a fait depuis Argentia quatre voyages pour aller rejeter des munitions en mer. Un ancien combattant de Terre-Neuve nous a dit soupçonner que l'Air Force américaine s'est défaite de munitions depuis sa base à Stephenville, peut-être en les rejetant dans la zone de décharge établie au nord des Îles-de- la-Madeleine. Il importe de savoir ici que Argentia était la plus grande base navale des États-Unis pour toute la région de l'Atlantique.
M. Ojoleck: Il semble que peu des recensements de stocks jetés en mer — avec une indication du lieu où cela a été jeté — aient survécu. Il y a probablement eu des opérations non autorisées, tout comme le rejet d'éléments en mer, en dehors des lieux désignés.
Par exemple, en février 1946, une barge transportant 2 800 tonnes de gaz moutarde et 10 219 barils de 45 gallons a été sabordée au large de l'île de Sable. Grâce à des demandes d'accès à l'information, on a pu établir les coordonnées suivantes pour la zone en question: 42 degrés, 50 minutes nord, par 60 degrés, 12 minutes ouest — à 30 kilomètres à peine de la zone de prospection pétrolière d'aujourd'hui.
Des études récentes donnent à voir que le gaz moutarde forme une pâte épaisse dans les eaux glacées de l'océan et demeure actif pendant des décennies. Couvert de sédiments, il reste tapi sur le lit de mer et peut encore causer des blessures, voire la mort à quiconque y est exposé. Les rapports établis au fil des ans laissent voir que le risque d'exposition par accident est le plus élevé chez les pêcheurs au chalut et les travailleurs de l'industrie pétrolière.
Notre rapport de recherche expose les conclusions de scientifiques internationaux, qui craignent que des agents chimiques comme le gaz moutarde, le lewisite et les produits de la dégradation d'explosifs de type classique comme le TNT ne s'infiltrent dans la chaîne alimentaire ou suscitent un taux de mortalité accru chez des poissons. Les mollusques, les crustacés, les poissons adultes et les larves de poissons, qui passent beaucoup de temps sur ou autour de la couche de sédiments, peuvent être exposés aux agents chimiques en question, présents dans les produits de lixiviation ou de dégradation.
Il semble maintenant que les pêcheurs de la côte Est qui avaient mis les gens en garde contre une catastrophe possible en 1946 avaient raison. Ils ne pouvaient deviner, néanmoins, que les effets des armes chimiques en question se feraient seulement sentir à l'époque de leurs arrière-petits-enfants.
M. Kehoe: Le secret entoure encore pour une grande part l'existence des armes chimiques en question et la façon dont on s'en est débarrassé au Canada. En 1984, à la suite de cas déclarés de blessures et de décès chez les membres d'une équipe de pêcheurs danois exposés au gaz moutarde que contenaient des grenades qui fuyaient, ramassées dans les filets de pêche au large du Danemark, le sous-ministre canadien des Transports, Withers, a demandé à la Défense nationale de faire enquête pour déterminer si cela pouvait jamais causer des difficultés aux pêcheurs de notre pays. Selon une des réponses du MDN, «on n'a connaissance au Canada d'aucun cas où de tels éléments auraient été rejetés en mer».
En juin 2003, les représentants de l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures côtiers, ou OCNEHE, d'Environnement Canada et du ministère de la Défense nationale se sont réunis pour discuter des zones de décharge et de l'exploration au large des côtes. Aucun procès-verbal n'a été tenu ni aucune transcription établie, nous a-t-on dit. Dans une autre lettre, l'OCNEHE a insisté pour dire qu'il s'agissait d'un «processus ouvert et transparent».
M. Ojoleck: Nos recherches nous ont permis de constater qu'il y a pénurie d'études scientifiques sur la sécurité des détonations sismiques de 240 décibels directement au-dessus des zones de décharge d'armes chimiques en eau peu profonde, c'est-à-dire à moins de 200 pieds. De façon évidente, l'industrie et les administrations fédérale et provinciale hésitent à reconnaître l'ampleur de la chose.
Hunt Oil du Canada a affirmé son intention de réaliser des essais sismiques directement au-dessus d'une zone de décharge militaire de catégorie 1, à 12 milles seulement au large d'une zone peuplée du Cap-Breton — lieu qui, selon un rapport commandé par le MDN, renferme probablement des munitions comportant du gaz moutarde.
Dans une étude d'impact déposée auprès de la commission de réglementation fédérale-provinciale le 1er août 2002, Hunt Oil estime à plus de 23 000 tonnes les quantités de gaz moutarde et de munitions de lewisite associées ayant été rejetées sans indication officielle, dans la zone d'exploration de l'entreprise, au large de la côte est de l'île du Cap- Breton.
M. Kehoe: L'officier d'état-major Kyle Penney, de la section Environnement (Formation) de la Défense nationale à Halifax, a révélé au Globe and Mail, le 22 janvier 2002, que le MDN n'a peut-être pas réponse à toutes les questions: «Nous ne savons pas ce qui se trouve au fond des eaux; nous ne savons donc pas ce sur quoi les travaux sismiques pourront avoir une incidence».
Au téléjournal de Radio-Canada/CBC, le 22 janvier 2003, le lieutenant Chris Hough, du quartier général du MDN, a réitéré que le MDN ne sait toujours pas ce que sera l'effet des essais sismiques sur les zones de décharge de munitions en mer.
Le 12 décembre 2002, le sous-ministre John McCallum écrit que le ministère de la Défense nationale a transmis aux deux offices visés — l'OCNEHE et l'Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers, l'OCTNHE — des renseignements sur les zones de décharge en mer, destinés au processus d'approbation des offices. Il s'agissait de faire en sorte que les responsables des activités d'exploration évitent les zones en question.
M. Ojoleck: Malgré ces mises en garde et les préoccupations valables exprimées par la Défense nationale, la commission de réglementation a accordé à Hunt Oil et à Corridor Resources un permis sans entrave pour la réalisation de détonations sismiques dans les eaux chargées de munitions au large du Cap-Breton, entre le 1er novembre 2003 et le 29 février 2004. De fait, le comité d'examen scientifique de la question a déterminé, à propos de la question des munitions chimiques rejetées en mer, qu'aucune autre mesure ne s'impose.
M. Kehoe: Mes recherches m'ont mené jusqu'en Écosse, en novembre, où j'ai rencontré des pêcheurs de la côte Nord et de la côte Ouest. Je me suis également entretenu avec les principaux scientifiques du domaine en Belgique et en Norvège, avec un haut dirigeant de la garde côtière royale de Suède et avec le président de l'association des pêcheurs danois à propos de leur expérience en ce qui concerne les zones de décharge de munitions comportant du gaz moutarde.
Ils se sont tous fait l'écho d'une étude américaine récente mettant en garde contre la menace possible que présente la substance pour la sécurité et la santé humaine, dans les cas où les filets de fond de la pêche commerciale, une fois remontés, contiennent des munitions et des boules de moutarde et les cas où les membres des équipages des projets de gazoduc et d'oléoduc sont exposés, dans la mesure où les activités ont lieu dans une zone de décharge.
M. Ojoleck: Mme Tine Missiaen et ses collègues du Renard Centre of Marine Geology, à l'Université de Gand, en Belgique, sont des experts mondiaux de la question des zones de décharge de munitions chimiques en milieu côtier. Ce sont les auteurs de l'évaluation de la décharge du Paardenmarkt, qui les a amenés notamment à cartographier les zones de décharge de munitions comportant du gaz moutarde au large de la ville belge de Zeebrugge et à y recueillir des échantillons de sédiments. En 2001, Mme Missiaen était coordonnatrice de l'atelier de Gand sur les zones maritimes de décharge de munitions en milieu côtier, qui a attiré les participants provenant de nombreux pays.
Après avoir communiqué avec Mme Missiaen et passé en revue ses recherches, nous sommes d'accord avec elle pour dire qu'il s'agit d'un problème croissant du point de vue de la santé et de l'environnement, digne des meilleurs efforts que nous pouvons déployer.
M. Kehoe: Pour ramener cette question à l'avant-plan, j'ai présenté une pétition en application de l'article 22 de la Loi sur le vérificateur général, l'an dernier, de manière à adresser des questions précises à d'importants ministères fédéraux. Malheureusement, ceux-ci ont donné des réponses vagues, non techniques et non scientifiques.
Le souci principal de notre gouvernement n'est pas la santé des pêcheurs, des équipages des plates-formes de forage pétrolier ou le milieu marin. Il semble que les questions de responsabilité, les inquiétudes quant aux coûts éventuels d'un nettoyage et le grand empressement à trouver des nouveaux gisements de pétrole expliquent le manque de volonté d'étudier le problème.
Un conseiller principal en politique d'Environnement Canada et de Ressources naturelles a dispensé des conseils techniques sur la question l'an dernier:
Le gouvernement fédéral doit démontrer au public qu'il paraît sûr que les nouvelles activités maritimes ne perturberont pas, dans les fonds marins, les lieux où se trouvent de vieilles matières dangereuses et que les zones en question ne posent pas de risques inacceptables pour la santé humaine, la vie et l'environnement.
La nouvelle stratégie océanique du ministère des Pêches et des Océans passe sous silence l'existence de décharges de munitions et le danger qu'elles posent pour les équipages des dragueurs. Les eaux chargées de munitions au large du Cap-Breton ont été ouvertes aux opérations de dragage au début de l'année, même si Hunt Oil a estimé à 23 000 tonnes la quantité de munitions chimiques qui se trouvent dans des lieux non balisés dans le secteur dit de la baie de Sydney.
Pendant que d'éminents scientifiques européens, scandinaves, russes et américains étudient les effets éventuels et réels des produits de lixiviation et de dégradation des armes chimiques rejetées en mer sur le milieu marin, le ministère canadien des Pêches et des Océans adopte une politique officielle de déni.
L'an dernier, en réponse aux préoccupations soulevées par le président du Comité des pêches et des océans de la Chambre des communes, notre ministre des Pêches a révélé au public que le MPO [traduction] «n'a réalisé aucune étude portant sur la toxicité ou l'évolution du gaz moutarde dans l'eau, du fait que les laboratoires du MPO ne sont pas équipés pour traiter des substances à ce point toxiques».
Tout de même, le truc le plus incroyable est survenu à la fin de 2002, quand des scientifiques du MPO et d'Environnement Canada n'ont même pas commenté les passages portant sur les munitions chimiques et conventionnelles rejetées en mer dans l'étude d'impact environnemental de Hunt Oil et de Corridor Resources. Ils ont accordé beaucoup d'attention aux oiseaux marins, mais n'ont absolument rien dit à propos des effets des zones de décharge des munitions.
M. Ojoleck: Selon la recommandation des scientifiques de ces ministères à l'intention de l'OCNEHE, «aucune autre mesure ne s'impose» en rapport avec cette question. C'est une recommandation qui établit un précédent au Canada: aucune précaution n'est nécessaire dans les cas où une activité d'exploration pétrolière a lieu directement au-dessus d'une zone de décharge de gaz moutarde près d'une zone peuplée.
Si un tel scénario se produisait à 12 milles de la côte de la ville de New York, croyez-vous que les autorités américaines chargées de la réglementation fédérale permettraient qu'il y ait des essais sismiques, étant donné le manque de données scientifiques concernant les effets de tels essais quand ils ont lieu au-dessus de munitions chimiques réactives qui ont plus de 60 ans et qui ont subi les effets de la corrosion, sans compter les fuites, dans un grand dépotoir marin d'une largeur d'un mille où il est clairement marqué «bombes non explosées?»
Je tiens à vous rappeler que la zone de décharge large d'un mille qui se trouve près de la côte est du Cap-Breton est indiquée clairement, sur les cartes des voies de navigation civile, comme étant une zone où il y a «danger — bombes non explosées» et qu'il s'y trouve, selon le MDN, du gaz moutarde.
M. Kehoe: Officiellement, on dit que cela fait un mille de largeur, sur les cartes. Par contre, comme les pêcheurs des chalutiers et mon père et tous ses amis vous le diront, cette décharge en particulier fait au moins cinq milles de diamètre. Selon le rapport du ministère de la Défense nationale, il est très probable qu'il s'y trouve également du gaz moutarde.
M. Ojoleck: Que faire de cette zone de décharge maritime et des autres? En octobre 2000, l'OTAN a organisé un écologique à Riga, en Lettonie, avec pour thème «es conséquences pour l'environnement et la sécurité de la récupération et l'élimination du matériel militaire rejeté dans les eaux côtières». Des scientifiques militaires et civils du monde maritime y ont participé. Le livre de Mme Missiaen sur l'atelier de 2001 de Gand renferme le rapport intégral, y compris les recommandations.
En bref, si la conférence a eu lieu, c'est parce que, au large de la côte du nord-ouest de l'Europe et dans la mer Baltique, les armes chimiques sont souvent déposées à moins de 360 pieds. Au fil des ans, les obus, bombes et grenades ont fini par être couvertes de sédiments, une couche de plusieurs mètres, par endroits. Or, des boules de gaz moutarde provenant de munitions corrodées et fuyantes viennent souvent enrayer les engins de pêche.
Au séminaire de Riga, plusieurs scientifiques civils ont averti qu'il serait beaucoup plus dangereux pour l'environnement d'essayer de récupérer les munitions en question, plutôt que de laisser les zones de décharge intactes. Tout de même, il faut exercer des contrôles étroits sur chacune des zones en question pour repérer la diffusion dans l'environnement des agents en question ou de leurs produits de dégradation, sources de déchets toxiques.
M. Kehoe: Dans un article récent, le New York Times: International cite le collègue de Mme Missiaen, M. Jean-Pierre Henriet, comme remettant en question le bien-fondé de tout projet de récupération. Il a affirmé qu'il existe des préoccupations évidentes concernant la contamination des voies de transport ou des installations d'entreposage terrestres ainsi que l'exposition des travailleurs.
Dans l'étude sur le Paardenmarkt, Henriet et Missiaen expliquent que les marques employées pour identifier les munitions, qui avaient été peintes sur les obus, ont depuis longtemps disparu. Il est devenu impossible de distinguer les armes chimiques et les armes conventionnelles. De ce fait, étant donné que les produits de dégradation du TNT sont toxiques, certains scientifiques proposent que toutes les zones de décharge de munitions en milieu marin soient indiquées sur les cartes comme étant des «zones de décharge de produits chimiques».
En nous fondant sur nos recherches sur le sujet et sur le trésor d'information qu'offrent les experts en Belgique et leurs collègues, nous proposons respectueusement les recommandations suivantes.
Premièrement, il faut indiquer immédiatement sur les cartes des voies de navigation civile du Canada les lieux soupçonnés d'être des zones de décharge de produits chimiques et de munitions, comme cela se fait en Europe, en Russie, au Japon et en Australie.
Deuxièmement, nous recommandons l'établissement immédiat de zones d'exclusion pour la pêche de fond, le dragage, l'exploration et la production pétrolières et les activités de transmission autour des lieux en question.
M. Ojoleck: La question de la responsabilité surgira peut-être si le gouvernement et les commissions de réglementation disposent des renseignements et des mises en garde dont il est question, mais omettent d'agir de façon prudente et qu'il y a dommage pour la santé humaine, des biens ou l'environnement.
M. Kehoe: Notre troisième recommandation, c'est qu'il y ait des recherches effectuées par des scientifiques indépendants et reconnus concernant les effets sur le milieu marin des produits de lixiviation des munitions chimiques et conventionnelles — surtout à la lumière des nombreux rapports qui associent la mortalité des poissons à l'exposition aux agents toxiques en question et à leurs produits de dégradation comme l'arsenic et le TNT.
Quatrièmement, Mme Tine Missiaen et ses collègues de l'Université de Gand, en Belgique, doivent contrôler les zones de décharge océaniques au Canada, de concert avec la section Environnement (Formation) du MDN.
M. Ojoleck: Cela permettrait de créer un climat de confiance; de même, il s'agit du protocole international qui s'impose dans un tel cas. Par exemple, le Canada prête déjà son assistance aux projets russes de biorestauration sur les lieux des dépotoirs terrestres de munitions chimiques. L'équipe MEDEA, sous direction américaine — qui regroupe une quarantaine de scientifiques américains spécialisés en environnement et en changement climatique — a réalisé une étude globale des zones de décharge de munitions chimiques dans la mer Baltique.
M. Kehoe: Nous proposons respectueusement que les autorités mettent en œuvre ces recommandations avant de permettre l'exploration pétrolière et la récupération des munitions le long des côtes de l'Atlantique et du Pacifique au Canada.
Cinquièmement, nous demandons que le Parlement, le Sénat ou la Cour suprême interviennent pour frapper de nullité l'approbation réglementaire accordée par l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures en rapport avec l'exploration pétrolière dans les eaux chargées de munitions au large du Cap-Breton, jusqu'à ce que des évaluations rigoureuses des risques puissent être réalisées par la section Environnement (Formation) du MDN, en collaboration avec des scientifiques européens indépendants, sous la direction de Mme Tine Missiaen, de Belgique.
Enfin, nous recommandons que la section Environnement (Formation) du MDN reçoive pour tâche de repérer et de surveiller les zones de décharge de matériel nucléaire en mer au Canada. À la lumière de préoccupations concernant la sécurité nationale, des projets d'exploitation pétrolière et la pêche, cela s'impose.
M. Ojoleck: Nous croyons que l'OCNEHE a agi de manière irresponsable en accordant à Hunt Oil du Canada et à Corridor Resources l'approbation réglementaire nécessaire à des activités d'exploration au-dessus des zones confirmées et soupçonnées d'être des lieux de décharge de munitions chimiques près des terres.
Les autorités doivent envisager le principe de précaution comme un point de droit, étant donné surtout la question de la responsabilité éventuelle et celle de l'indemnisation qui pourrait survenir si jamais les munitions tapies au fond de l'eau sont perturbées directement par l'activité d'exploration pétrolière ou le dragage des chalutiers dans les zones en question.
Nous avons souligné nos préoccupations aux responsables de la réglementation ainsi qu'aux administrations fédérale et provinciale, et nous tenons à profiter de l'occasion pour les passer en revue avec votre comité.
M. Kehoe: Le fait d'autoriser la réalisation d'essais sismiques dans des zones où il est confirmé, sinon établi comme étant fortement probable qu'il y ait des armes chimiques viables et réactives peut être perçu par la communauté internationale comme étant un manque de respect de la part du Canada quant aux conditions et à l'intention de la Convention de 1997 sur les armes chimiques.
M. Ojoleck: Permettre l'exploration du fond océanique au moyen d'essais sismiques, le forage d'exploration, la construction d'oléoducs ou de gazoducs ou encore le dragage du fond, dans des zones dont on sait qu'il s'y trouve des armes chimiques viables, pose peut-être des problèmes du point de vue de la sécurité nationale et mondiale.
M. Kehoe: Si nous allons de l'avant avec ces activités, à la lumière des connaissances qui existent quant à la présence de ces substances chimiques ainsi que leur viabilité et leur réactivité — surtout dans le cas du gaz moutarde —, la presse mondiale le soulignera, et ce sera une source d'embarras pour les administrations fédérale et provinciales.
Les effets sur l'environnement et le prix à payer du point de vue de la santé humaine et de la vie marine ne seront mesurés que dans les journées et les années suivant le moment où les armes chimiques en question sont perturbées.
Le sentiment général des scientifiques européens de premier plan au sujet de cette question complexe trouve sa meilleure expression dans les propos de Mme Missiaen et M. Henriet, en Belgique:
Sensibiliser le public est d'une importance capitale. La sensibilisation permettra non seulement de dissiper l'incertitude et les doutes nourris à ce sujet, mais, encore, elle permettra d'éviter les préoccupations excessives. Le problème est tel qu'il faut mettre nos meilleurs moyens en œuvre, aujourd'hui et durant les époques à venir. Nous devons cela à la société et aux générations futures.
M. Kehoe: Maintenant, plus que jamais, la prudence et le bon sens doivent l'emporter sur le reste. Nous demandons que les lieux en question soient désignés comme étant tout à fait interdits. Il est ahurissant que M. Ojoleck et moi-même ayons pu faire tout ce travail et toutes ces recherches, mais, encore, que nos organismes gouvernementaux au Canada ne fassent strictement rien.
Les mesures de la Défense nationale m'ont impressionné. Par contre, le ministère des Pêches et des Océans ne marque pas ces lieux sur les cartes.
Il y a un film de 1945 où 2 800 tonnes de gaz moutarde sont jetées en mer au large de l'île de Sable. Tout le monde sait qu'il est là; j'ai l'extrait de film moi-même. Néanmoins, le ministère des Pêches refuse d'indiquer cela sur les cartes.
Nous permettons à des flottes étrangères de venir pêcher les quotas canadiens en eaux canadiennes, par-dessus le marché. Qui est responsable? Il est ahurissant de constater ce qui se passe vraiment. Nous demandons que ce soit Mme Tine Missiaen et son équipe qui interviennent et personne d'autre, parce que ce sont eux, les experts du domaine, dans le monde. Nous n'avons pas d'expert au Canada. Quand nous avons fait des recherches, nous avons appris que nous étions considérés comme étant deux des experts au Canada. Cela fait peur.
M. Ojoleck: C'est par la Défense nationale.
M. Kehoe: Nous ne sommes pas experts. Nous faisons les recherches voulues. La cartographie dont il est question est un projet d'envergure. La Défense nationale a reçu 10 millions de dollars pour cartographier les lieux et réaliser les recherches. C'est de la menue monnaie.
Il faut bien plus que 10 millions de dollars pour envoyer en mer un de ces bateaux pour qu'il puisse faire le travail. Obtenir les bateaux voulus et l'équipage qui exécutera la tâche — il faut que l'équipe scientifique de l'Europe les accompagne, pour jauger les activités. C'est elle qui a l'expérience.
Sur la côte Est, notre poisson disparaît à un rythme catastrophique. Ma famille entière a pêché pendant des générations, et tous mes amis sont des pêcheurs côtiers. Notre taux de cancer n'a pas son pareil. Ce qui est incroyable, c'est que, lorsque j'ai été en Europe, en Irlande, en Écosse et en Norvège, j'ai constaté qu'ils ont tous les mêmes problèmes que nous — les mêmes décharges, les mêmes problèmes.
Les honorables sénateurs étaient-ils conscients du fait que le Canada était le premier producteur d'armes chimiques et biologiques pour les forces alliées et, probablement, le monde? Nous étions les experts reconnus en gaz moutarde — cela se faisait tout juste ici, à Cornwall. Nous en avons mis dans nos obus et nos bombes et tout le reste.
Le problème que nous avons en ce moment est le suivant: 20 p. 100 de l'ensemble des munitions étaient chargés de gaz moutarde et d'agents chimiques de toutes sortes — nous n'avons même pas encore commencé à parler de substances radioactives. Néanmoins, parmi les agents en question, 95 p. 100 de l'ensemble ont été mis dans les obus.
Durant la guerre, c'était l'effet combiné de l'Angleterre, des États-Unis et du Canada. La Grande-Bretagne a trouvé la solution. Ils ont fait des obus dont le revêtement intérieur et extérieur comportait un agent inhibiteur de rouille. C'est un problème, car nous avons employé un acier de première qualité, et ce revêtement a créé un cauchemar. J'ai appelé au ministère des Pêches et des Océans pour discuter de certains lieux où la pêche et le dragage et ainsi de suite sont permis. Les gens là-bas m'ont dit de ne plus jamais les rappeler. Ce n'est pas très rassurant de constater que les ministères rejettent les efforts des gens qui font le travail et essaient de diffuser l'information.
Le MPO est au courant depuis 1984. Il en a entendu parler de la part de la Défense nationale et du ministère des Transports, qui ont tous deux posé les mêmes questions.
De 1984 à 2003, ayant tous ces renseignements en main, il n'a rien fait. C'est alarmant. J'avance que cela va à l'encontre des articles 35 et 37 de la Loi sur les océans. Quelqu'un devrait étudier cette possibilité. Le ministère est censé protéger le poisson, l'habitat du poisson et la santé des pêcheurs.
Nous savons ce en quoi consiste le problème, nous connaissons les risques que cela présente, mais personne ne fait quoi que ce soit. Nous avons un problème grave. Néanmoins, quand nous leur avons transmis la réponse de l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers, les scientifiques du ministère des Pêches et des Océans ont affirmé qu'aucune autre mesure ne s'imposait. Ils nous ont dit que nous avions des «hallucinations». C'est un problème qui se manifeste partout dans le monde.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Kehoe, monsieur Ojoleck. Peut-être pourrions-nous faire inscrire toutes ces armes dans le registre des armes à feu. Nous avons dépensé beaucoup d'argent pour enregistrer des armes.
M. Kehoe: Ce ne sont vraiment pas des armes dont vous voudriez, monsieur.
Le président: Vous nous avez présenté un exposé instructif, quoique troublant. Vous avez donné à nos sénateurs beaucoup de matière à penser et des munitions en vue de commencer à poser des questions.
Le sénateur Cook: Vous faites cela depuis 13 ans?
M. Kehoe: Oui.
Le sénateur Cook: Vous défendez merveilleusement votre cause. Où trouvez-vous les fonds dont vous avez besoin?
M. Kehoe: Nous payons la note nous-mêmes.
M. Ojoleck: Nous ne recevons rien du gouvernement ni de sources privées, seulement des sous pour l'épicerie.
M. Kehoe: Nous ne sommes affiliés à personne.
Le sénateur Cook: Vous ressentez à l'intérieur cette force vive qui vous pousse à faire cela pour l'humanité?
M. Kehoe: Tous mes frères étaient pêcheurs, tout le monde chez nous était pêcheur. Nous sommes les témoins de trucs qui sont vraiment horribles. Nous avons vu des zones où il y avait des crabes hermaphrodites; il y a des zones où la boue est suffisamment toxique pour que les enfants se brûlent les mains. Des poissons de toutes sortes ont des lésions cancéreuses. Le taux de cancer est élevé chez les gens qui vivent dans les localités côtières, près des zones de décharge en question; cela comprend la côte est de Terre-Neuve et le secteur qui va du Cap-Breton jusqu'à Canso. La même chose se produit sur les côtes ouest de l'Écosse et les côtes est de l'Irlande. Le taux de cancer est à la hausse, et le poisson se meurt. Partout où cela se produit, il y a des décharges.
M. Ojoleck: Les gens de l'île de Man vous disent qu'il y a eu beaucoup d'activités entourant des projets de pipeline dans tout le secteur de Beaufort Dyke — grand site de munitions situé entre l'île de Man et le continent. La garde côtière irlandaise et la garde côtière suédoise patrouillent les plages au moyen de jumelles et repèrent des problèmes régulièrement.
De même, des organismes communautaires demeurent à l'affût d'objets d'aspect étrange sur les plages. Quand on en trouve, on les enlève et on les fait exploser immédiatement.
Il y a lieu de croire que l'activité entourant le pipeline a brassé le fond marin, car beaucoup de munitions se mettent à flotter ou sont portées par les courants jusqu'au rivage.
Le sénateur Cook: Pouvez-vous nous dire ce que cela vous a coûté jusqu'à maintenant?
M. Kehoe: Non, nous ne pouvons le faire. Nous avons dépensé beaucoup d'argent. Tout de même, c'est là que j'habite et je veux continuer d'y habiter. Je peux vous dire qu'il est effrayant d'entendre d'ex-militaires qui ont jeté ces choses en mer me dire de dire à mes enfants de ne pas avoir d'enfants sur le Cap-Breton.
Le sénateur Cook: Ce qui est fait est fait.
Vous avez parlé du prochain élément qui se profile à votre horizon et des essais sismiques. Croyez-vous vraiment que cela va probablement déclencher la catastrophe?
M. Kehoe: Il n'y a absolument aucune recherche, où que ce soit dans le monde, qui ait été faite à propos des effets des essais sismiques sur les zones de décharge militaire. Vous pouvez poser la question à tous les scientifiques; quelques-uns diront qu'ils «ne croient pas» que cela va causer du tort, mais il n'y a aucune recherche scientifique pour le prouver.
C'est tout ce que nous avons demandé: que les zones d'exclusion soient établies immédiatement, tant et aussi longtemps que la Défense nationale et des scientifiques dignes de ce nom se penchent sur le phénomène, pour nous dire ensuite ce qui se passe.
Le sénateur Cook: Les gens qui font de l'exploration au large de nos côtes m'ont dit que les permis nécessaires pour forer et explorer relèvent de 18 ministères différents. Est-ce qu'il y a un ministère auquel il faut s'adresser pour obtenir qu'aucun essai sismique ne se fasse dans les zones cartographiées?
M. Kehoe: Avant d'obtenir ses permis, l'industrie pétrolière demande à ses groupes de recherche marine de réaliser l'étude. Par exemple, à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse, les deux offices d'hydrocarbures ont fait appel à une organisation d'Aberdeen, en Écosse. J'y ai été pour faire des recherches et j'ai communiqué avec l'entreprise en question pour demander ce sur quoi ils avaient fait des recherches. Tandis que je parlais à ces gens-là, j'avais devant moi toutes mes cartes, dépliées. Je leur ai demandé s'ils avaient repéré des zones de décharge militaire. Ils ont répondu qu'ils n'en avaient pas trouvé aucune. C'était un institut spécialisé en recherche sous-marine. Je leur ai dit que je trouvais cela étrange qu'ils n'aient pas trouvé de zones de décharge, parce qu'il y en avait deux qui étaient indiquées sur la carte, dans la zone où ils faisaient des recherches.
Cela devient un problème quand ils vont dire à un organisme de réglementation que, dans les fonds marins, il n'y a aucun problème. Je ne comprends pas. Est-ce une question d'argent? Est-ce simplement parce que cela ne leur importe pas? Est-ce parce que le secteur à étudier est trop grand? Nous devons nous rappeler le fait que la Défense nationale se penche sur 1 200 sites sur la seule côte de l'Atlantique.
Le sénateur Cook: Il y a eu des cas où les filets de chalutiers ont remonté du matériel provenant de zones de décharge. Y a-t-il eu à cet égard des armes chimiques qui ont été remontées?
M. Kehoe: Nous avons eu quelques cas, au début. Un type est mort dans la baie de Fundy. Un enfant a été blessé près de Halifax. Tout cela, nous le savons grâce à l'accès à l'information. Un petit groupe d'hommes à Terre-Neuve a presque trouvé la mort quand il a allumé des feux de joie sur la plage; il y avait de ce matériel qui était là.
M. Ojoleck: Ce n'était pas chimique; c'était des armes de type classique.
M. Kehoe: Ils ne peuvent déterminer facilement s'il s'agissait d'armes conventionnelles ou d'armes chimiques. Prenez ce verre, par exemple. Si nous y traçons de petits anneaux, puis que nous immergeons le verre dans l'eau, d'ici un an ou deux, les anneaux ont disparu. En l'absence du marquage, je ne peux dire si cela contient, oui ou non, des produits chimiques. Le même raisonnement vaut pour les munitions; 20 p. 100 des nôtres comportaient des produits chimiques.
Le sénateur Cook: Les lieux figurent sur la carte, mais vous ne savez pas vraiment ce qui s'y trouve.
M. Ojoleck: C'est cela.
Le sénateur Cook: Durant la Seconde Guerre mondiale, à l'époque où Terre-Neuve n'était pas une province du Canada, la base américaine se trouvait à Argentia. Vous avez mentionné le fait que le Canada était un expert de premier plan en fabrication de bombes et autres armes de destruction. Ce sont les Américains qui ont mis au point la bombe atomique, et nous ne savons pas ce qui se trouve dans la baie de Plaisance.
M. Kehoe: Vous ne savez pas ce qui se trouve dans la baie de Plaisance. Nous n'avons même pas mentionné les zones de décharge de substances radioactives qui se trouvent au large de nos côtes. Il y en a bon nombre au large de votre côte aussi, sénateur. C'est un sujet qui nous effraie. Les Américains, les Russes et certains Canadiens en ont jeté en mer.
Le sénateur Cook: À l'époque de la guerre froide.
M. Kehoe: C'est cela. Ils ont simplement rejeté ça en mer. Il y a un assez bon nombre de sites. Nous entendons dire qu'une partie du matériel se trouve dans une gaine de plomb couverte de ciment. Le ciment se désagrège maintenant.
On discutait de cette question même à la conférence de Halifax l'an dernier — c'est une sorte de conférence «secrète» dont personne n'était vraiment au courant. Nous avons reçu des renseignements grâce à l'accès à l'information. Je suis sûr qu'ils étaient heureux de savoir que Myles Kehoe se trouvait en Écosse, à faire des recherches sur leurs zones de décharge là-bas, pendant qu'ils se réunissaient à Halifax.
Le sénateur Cook: Est-ce que le fait que les lieux en question soient recensés vous rassure? Est-ce qu'il y en a encore qui n'ont pas été recensés?
M. Kehoe: Quatre-vingt-dix-neuf pour cent d'entre eux ne le sont pas.
Le sénateur Cook: Je vois beaucoup de zones colorées sur une carte. Que représentent les couleurs?
M. Kehoe: Du pétrole et du gaz. Ce sont les lieux sur lesquels nous travaillons vraiment.
Le sénateur Cook: Ce sont des lieux identifiés comme tels?
M. Kehoe: Vous voyez les petits trucs, là? Il s'agit d'une zone qui ferait cinq kilomètres. Toutefois, tous les commandants de chalutier de Terre-Neuve vous diront que la zone en question fait plus de 30 milles de largeur. C'est une grande décharge. À cet endroit-là, ils ont remonté des obus, des ogives, des charges de détonateurs et des barils dont ils ne peuvent déterminer le contenu. Les éléments des appareils utilisés pour les essais sismiques ont été pris dans les bombes.
Le diagramme que vous avez devant les yeux laisse voir un site du sous-bassin laurentien, qui fait l'objet d'un bail. Toutefois, cette carte n'existe plus. Une nouvelle carte est publiée, subitement, le site n'est plus marqué. Les autorités enlèvent cela. Vous pouvez avoir dix cartes — une d'entre elles montrera qu'il y a ici une zone de décharge, les neuf autres, non. Par contre, ce sont les mêmes cartes, mais pour des années différentes. C'est assez étrange.
J'ai eu une discussion légèrement corsée avec les représentants de la Défense nationale à ce sujet, à un moment donné. Ils m'ont dit qu'un site en particulier n'existait pas. J'ai répliqué que je l'avais devant les yeux, et j'ai lu les coordonnées. J'ai demandé au responsable quelle date figurait sur sa carte. Sa carte remontait à 1990; la mienne remontait à 1967. Ma question est la suivante: «Où est passée la zone de décharge?»
Il y a toutes ces zones de décharge; il y a les lacs Bras d'Or, au milieu du Cap-Breton. Il y a un trou profond tout juste à côté de Long Island. Tout porte à croire qu'il y avait une énorme zone militaire de décharge d'armes chimiques comportant du gaz moutarde: ainsi, ils n'auraient pas eu à aller jusqu'au plateau Scotian, pour trouver des eaux profondes.
Le sénateur Cook: L'an dernier, un ami de Nouvelle-Écosse m'a dit que l'Institut de Bedford avait fait certains travaux de cartographie dans les lacs Bras d'Or.
M. Kehoe: Ils ont fait la cartographie, mais l'Institut de Bedford le savait depuis 1984, sans avoir vraiment fait quoi que ce soit au sujet des zones de décharge.
J'ai assisté ce printemps dernier à une réunion dans une communauté des Premières nations. Les gens là sont vraiment confus maintenant. Tout ce qui vit dans le lac Bras d'Or est en train de mourir. C'est un fait qui a été bien établi par les médias par chez nous. Le ministère des Pêches et des Océans refuse de regarder les effets de ces zones de décharge sur le poisson.
Le sénateur Cook: Si vous aviez un seul souhait, quel serait-il?
M. Kehoe: Mon souhait, c'est qu'on mette en place immédiatement les zones d'exclusion dans les secteurs connus et que la Défense nationale et une équipe viennent étudier tous les cas soupçonnés, tout de suite. Cela doit se faire.
Si nous voulons voir notre génération à venir ou si nous voulons que le poisson dans la mer y demeure, il nous faut commencer à adopter de telles mesures dès maintenant.
M. Ojoleck: Vous devez penser aux gens qui vivent près du lieu en question, à 12 milles de la côte. D'ici un mois, l'une des entreprises pétrolières aura toute la permission voulue — l'approbation entière de l'organisme de réglementation — pour réaliser des essais sismiques directement au-dessus du site.
Le sénateur Cook: Votre souci immédiat, c'est les effets possibles à cet égard des essais sismiques?
M. Ojoleck: Nous nous soucions des effets de l'activité exploratoire.
Le sénateur Mahovlich: Est-ce que le lac Bras d'Or est en plein Cap-Breton?
M. Kehoe: Oui, il l'est.
Le sénateur Mahovlich: Est-ce que c'est un lac d'eau douce?
M. Kehoe: C'est un lac semi-salé; il y a là de l'eau douce et de l'eau salée provenant des marées. Il y a une autre entrée à l'écluse de St. Peters.
Il y avait à Johnstown un endroit qui s'appelait «Johnstown Armories». Nous croyons savoir qu'il servait à l'expérimentation d'armes biologiques et chimiques. Toutefois, si vous essayez de vous renseigner de quelque façon à la Défense nationale, vous apprenez que Johnstown Armories n'existe pas et n'a jamais existé.
M. Ojoleck: Vous pouvez passer en voiture devant les bâtiments en question.
M. Kehoe: C'est là. Je le vois depuis que je suis enfant.
Le sénateur Mahovlich: Vous me dites qu'il y a des problèmes avec le poisson.
M. Kehoe: Nous avons des préoccupations. Au large de l'île de Sable, 10 219 barils de 50 gallons de gaz moutarde ont été jetés en mer. J'ai le film de la manœuvre.
Il y a là une sorte de sole américaine. Dans les lacs Bras d'Or, il y a une autre sole américaine, mais celle-là ne se mêle jamais à la première. À une réunion, j'ai entendu un chercheur du MPO dire que tout le monde était perplexe: ils ne comprenaient pas pourquoi toutes les soles américaines étaient en train de mourir dans ce trou dans les lacs Bras d'Or. J'ai pris la parole pour signaler que, selon leurs propres statistiques pour 2003, la sole américaine au large de l'île de Sable connaissait le même problème. J'ai signalé que le dénominateur commun, c'était l'existence d'une zone de décharge militaire confirmée comportant du gaz moutarde, dans un cas, et l'existence très probable d'une zone de décharge dans l'autre cas. Les deux espèces de sole ne se mêlent jamais les unes aux autres; néanmoins, leur production d'œufs ne vaut plus rien, tout comme leur masse corporelle et leur tonus musculaire.
Tout ce qui vit dans le lac Bras d'Or est en train de mourir. C'est un secteur où la sensibilité est très grande, car dans ce trou profond — cela fait 1 000 pieds —, il existe des espèces de poisson qui remontent à l'époque antérieure à la période glaciaire. Il y a aussi une faille sismique et un système de repérage de la Défense nationale — tout cela dans le même coin. Ça fait peur.
Le sénateur Mahovlich: Êtes-vous en train de dire que si vous apportiez un échantillon de ces poissons mourants à notre ministère des Pêches, il ne l'étudierait pas?
M. Kehoe: J'ai justement posé cette question à nos responsables du ministère des Pêches par chez nous.
Le sénateur Mahovlich: Si une vache est malade, ils vont bien jeter un coup d'œil.
M. Kehoe: Est-ce qu'ils ont découvert ce qui faisait mourir les baleines? Il y a quatre zones de décharge chimiques, une zone de décharge biologique et une zone de décharge nucléaire, et tout le monde dit être tout à fait perplexe à ce sujet.
Le sénateur Mahovlich: C'est la même chose pour la morue.
M. Kehoe: C'est cela. Il y a deux zones de décharge, là où se trouve la morue. C'est une possibilité. Nous n'en sommes pas sûrs. Il nous faut une série d'études.
Le sénateur Mahovlich: Vous ne pouvez faire appel aux services de scientifiques?
M. Ojoleck: Les scientifiques canadiens n'ont pas l'équipement voulu.
Le sénateur Mahovlich: Qui a l'équipement? Les Européens?
M. Kehoe: Les Européens ont l'équipement, monsieur.
Le sénateur Mahovlich: Que font les Américains? Ils ont rejeté beaucoup de choses en mer ici, n'est-ce pas?
M. Kehoe: Ils en ont beaucoup fait. C'est un problème pour notre armée. Elle essaie d'accéder aux dossiers américains, pour déterminer exactement la quantité de matériel qui a été jetée en mer.
M. Ojoleck: Sur cette carte-ci, on voit un site de décharge qui mesure dix milles nautiques sur dix milles nautiques. Ce site a été établi avant 1960, selon le service hydrographique, expressément pour les forces américaines basées à Argentia. Le gouvernement canadien n'a conservé aucun dossier sur ce qui y a été jeté en mer.
M. Kehoe: Cette semaine, la Défense nationale enverra là ses bateaux. Je respecte le ministre de la Défense nationale. Ses responsables étudient un secteur dans les lacs Bras d'Or et la baie de Sydney.
Bon, ils n'ont pas encore tout l'équipement voulu, mais, au moins, ils entament l'étude.
Le sénateur Mahovlich: Le MPO n'a pas l'équipement non plus?
M. Kehoe: Leurs documents affirment qu'ils ne sont pas équipés du tout.
M. Ojoleck: Ils ne sont pas équipés pour manier du gaz moutarde.
M. Kehoe: C'est ce qu'ils affirment; ce n'est pas moi qui dis cela.
Le sénateur Mahovlich: Voilà qui nous éclaire. Je tiens à vous féliciter pour votre exposé. Je ne savais pas qu'il y avait un si gros problème là.
M. Kehoe: Quand il y a une zone de décharge comme celle-là, indiquée sur la carte, pourquoi ne pas installer là une zone d'exclusion?
Le sénateur Mahovlich: Vous avez raison.
M. Ojoleck: Quand nous avons assisté aux audiences publiques de l'office des hydrocarbures extracôtiers en janvier, l'an dernier, nous avons présenté un exposé semblable et averti les gens que l'inconnue comportait de très grand risque: on ne saurait appliquer ici une attitude cavalière.
Hunt Oil, de fait, a révisé son projet d'essai sismique; plutôt que d'avoir lieu près de la zone de décharge, maintenant, les essais auront lieu directement au-dessus de la zone. Selon son étude d'impact environnementale, les lignes de son tracé de sondage passent directement au-dessus du site 1, qui ne comporte que des bombes non explosées. Toutefois, personne ne sait ce qu'il y a vraiment là, et les bombes non explosées pourraient être chargées de munitions chimiques.
M. Kehoe: Pour ce qui est de ce secteur, la Défense nationale a souligné qu'il était extrêmement probable que du gaz moutarde s'y trouve. Dans une entrevue donnée à la CBC, le porte-parole de Hunt Oil a affirmé que les zones de décharge n'étaient pas une préoccupation pour son entreprise. Voilà qui est positif.
M. Ojoleck: J'aimerais vous faire écouter ce segment de 40 secondes de l'entrevue en question, accordée à Jacques Hébert, de la radio de Radio-Canada, à Moncton.
[Extrait sonore]
Le sénateur Trenholme Counsell: Vous avez brossé un tableau alarmant de la situation et, certes, soulevé des questions. Je tiens à vous remercier d'avoir fait part de vos préoccupations au comité.
J'aimerais en savoir plus sur l'étude de 10 millions de dollars du MDN. Pouvez-vous me donner des précisions sur la portée et l'échéancier de cette étude? J'ai également une question à poser en ce qui concerne la santé.
M. Kehoe: Oui, l'échéancier, c'est que nous devons nous assurer — et il importe que tout le monde le comprenne — d'obtenir des renseignements très précis de scientifiques accrédités dans le monde.
Quand les médias ont eu vent de l'affaire, en premier, à la suite des travaux de la commission d'examen public, tout le monde nous téléphonait pour nous dire qu'il voulait nous aider et qu'il souhaitait obtenir tous les renseignements que nous avions recueillis. Nous ne souhaitions pas donner des renseignements à n'importe qui. Nous voulions savoir qui se trouvait où et ce qu'on entendait faire de l'information. Nous voulions nous assurer que l'information soit acheminée vers des scientifiques dignes de ce nom.
Nous ne savons pas ce qui se trouve exactement dans certains des sites. Il faut y descendre avec l'équipement voulu et faire des tests sur le sol. En Europe, à des sites distants de seulement deux milles l'un de l'autre, les lectures peuvent être tout à fait différentes. Il est vraiment important de le savoir. Chaque site doit être considéré individuellement et classé dans la bonne catégorie.
Pour ce qui est de l'étude du MDN, ce devrait être énorme. C'est une véritable insulte — que 9 millions de dollars seulement soient prévus pour tout ce travail. C'est une farce.
Le sénateur Trenholme Counsell: Parfois, le financement est progressif; on vous donne 9 millions de dollars aujourd'hui, vous obtenez 5 millions ou 19 millions plus tard, si le besoin est confirmé. Quel est l'échéancier des travaux et à quel moment les gens vont-ils s'y mettre?
M. Kehoe: La Défense nationale a déjà entamé les travaux.
Le sénateur Trenholme Counsell: Il y a combien de temps de cela?
M. Kehoe: Elle a envoyé son bateau de recherche il y a deux semaines. J'ai rencontré ses responsables à Halifax, et ils ont dit qu'ils commençaient le travail. Il y a quatre mois environ, les chercheurs ont obtenu un contrat pour s'occuper du côté documentaire — la recherche sur la façon dont une bonne part du matériel militaire en question a été produit.
Le sénateur Trenholme Counsell: Est-ce que ce sont des scientifiques ou des membres du MDN?
M. Kehoe: Le contrat a été attribué à un chercheur de l'Alberta. J'ai parlé à un certain Lloyd White, au Cap-Breton, il y a un an.
La chose importante que le comité sénatorial devrait faire, c'est de convoquer la Défense nationale et, pour être précis, M. Kyle Penney, de la section Environnement (Formation) à Halifax.
Le président: Kyle Penney.
M. Kehoe: Oui. Il a dit qu'il fallait compter de trois à sept ans. Les pétrolières affirment qu'elles ont le permis nécessaire pour entamer les travaux sismiques le mois prochain, et jusqu'en février 2004. La Défense nationale n'a pas du tout le temps de rattraper le terrain perdu et de déterminer s'il convient d'effectuer des travaux sur un site donné.
Le sénateur Trenholme Counsell: Est-ce qu'on a mis en suspens certaines opérations?
M. Kehoe: Absolument pas.
Le sénateur Trenholme Counsell: Vous êtes en train de dire que l'échéancier de l'étude n'est aucunement parallèle à quelque calendrier d'exploration?
M. Kehoe: Absolument pas
Le sénateur Trenholme Counsell: Est-ce que l'étude a été approuvée pour le MDN?
M. Kehoe: Elle a été approuvée il y a environ un an. Par contre, ils ont pris un certain temps pour se mettre en marche. Nous sommes les premiers que les chercheurs viennent voir, et ils sont venus nous voir il y a à peu près un mois.
Le sénateur Trenholme Counsell: Ce projet découle-t-il de votre travail à vous? Croyez-vous avoir été le catalyseur à cet égard?
M. Kehoe: La Défense nationale nous a dit que c'était le cas. Cela m'a révolté lorsque j'ai appris qu'ils ne possèdent pas ce dont ils ont besoin pour faire leur travail. Ce projet revêt de l'importance pour nous tous. Il y a tellement de questions qui doivent être examinées. Je ne peux même pas parler du nucléaire, car c'est trop déprimant.
Le sénateur Trenholme Counsell: À mon avis, neuf millions de dollars, c'est beaucoup pour lancer une étude.
M. Kehoe: Cela coûte 400 000 $ par jour pour faire fonctionner un navire.
Le sénateur Trenholme Counsell: Êtes-vous en train de dire que la majeure partie du financement couvre le coût du navire?
M. Kehoe: Oui. Notre ministère des Affaires étrangères a versé cinq millions de dollars à la Russie et a réservé un milliard de dollars pour examiner le même phénomène en Russie.
Le président: C'est vrai.
M. Kehoe: La première fois que j'en ai entendu parler, j'ai communiqué avec le ministère des Affaires étrangères et demandé pourquoi il est là-bas, alors que nous avons la même chose ici. Il s'agit d'une indemnisation, car l'OTAN et l'ONU ont une organisation en Europe; ils veillent à ce que tout le monde collabore, et c'est fantastique.
Au Canada, nous sommes tous dans un état de torpeur. Ils ne comprennent pas ce qui se passe ici, car nous ne faisons rien.
M. Ojoleck: L'OTAN divise l'Atlantique en est et en l'Atlantique ouest. Le Canada est dans l'Atlantique ouest. Le volet est de l'OTAN a lancé une vaste étude visant à repérer, à identifier et à contrôler toutes les zones connues et soupçonnées de déchargement de munitions chimiques de la Deuxième Guerre mondiale. Nous ne sommes pas au courant de ce que fait le volet Atlantique-ouest de l'OTAN.
M. Kehoe: L'OTAN a préparé une estimation des coûts qu'il faudrait assumer pour mener une recherche et restaurer certaines de ces zones de décharge. On dit qu'il en coûterait de 20 à 30 milliards de dollars pour la côte est américaine, et qu'au Canada, les coûts s'élèveraient de 15 à 20 milliards de dollars. La plupart de ces zones ne peuvent être restaurées.
Le sénateur Trenholme Counsell: Cette étude vise probablement à au moins déterminer l'ampleur du problème — pas à restaurer.
M. Kehoe: C'est exact. On ne peut restaurer certains de ces lieux.
Le sénateur Trenholme Counsell: J'ai entendu dire que les mares de goudron de Sydney contribuent beaucoup à l'incidence de cancer? Pouvez-vous me dire quel type de cancer pourrait être lié à ce problème, et me parler de tout facteur lié aux incidents?
M. Ojoleck: L'une des conséquences de l'exposition au gaz moutarde est la suppression du système immunitaire. Il existe un type de gaz moutarde qu'on appelle «ypérite à l'azote». Des hôpitaux de partout dans le monde l'utilisent pour la chimiothérapie, car il est efficace pour lutter contre certains types de cancer à diffusion hématogène. Cependant, même s'il supprime certains cancers, il peut favoriser l'apparition de tumeurs malignes lorsqu'on en trouve une grande quantité ou qu'on y est exposé trop longtemps.
Il est difficile de confirmer le lien causal. C'est ce que la science doit faire maintenant. Dans les régions côtières, comme au Cap-Breton, les gens ont un mode de vie relativement sain, traditionnel; les gens cultivent leurs propres aliments et pêchent leurs propres poissons. C'est un mode de vie traditionnel qui remonte à de nombreuses générations. Nous constatons qu'il y a une forte incidence de cancer dans des régions où nous ne pouvons voir d'autres formes évidentes de pollution. Nous n'affirmons pas qu'il y a un lien, nous aimerions que ce soit les chercheurs qui le fassent.
Le sénateur Trenholme Counsell: De quels types de cancer parlez-vous?
M. Kehoe: De tous les types de cancer. Mes parents vivaient sur l'Île Madame, et les deux sont morts d'un cancer. Un jour, ma mère et moi-même avons tenté de penser à une maison dans les trois localités avoisinantes où le cancer n'avait pas sévi. Nous ne pouvions en trouver une, pas une seule. C'est difficile à prendre.
Je vis sur le côté ouest des Margarees, mais j'ai aussi une entreprise sur le côté est, à l'Île Madame. À titre d'antiquaire, je suis toujours en contact avec le public, à parler avec les gens. Il ne se passe jamais une journée sans qu'on entende parler de deux ou trois personnes qui ont le cancer. Les victimes sont de plus en plus jeunes. Le taux de cancer chez les 45 à 60 ans, mon groupe d'âge, est énorme. Cela commence à faire peur.
Nous devons étudier la situation et déterminer s'il y a un lien entre le poisson pêché à un endroit donné et le taux de cancer à un autre endroit. Je n'ai pas mené ma propre enquête, mais il faut que quelqu'un se rende dans tous les ports de chalutier où l'on a rapporté du poisson de certaines zones. Par exemple, cette zone était la plus grande zone de pêche au sébaste dans la région atlantique du Canada. Les prises allaient ici, dans un endroit qui affiche désormais un taux de cancer énorme.
Je ne suis ni chercheur, ni biologiste, ni chimiste; quelqu'un doit faire ce travail. Nous devons cesser de dire que nous en ignorons les causes. S'il y a quelque chose d'aussi horrible au large de nos côtes, quelqu'un doit tenter de découvrir pourquoi.
Le sénateur Trenholme Counsell: Croyez-vous que le cancer est lié à la consommation de poisson ou à la qualité de l'air ou de l'eau?
M. Kehoe: Je ne saurais dire.
Le sénateur Hubley: Cela semble certainement un problème d'une telle étendue qu'il nous est difficile de l'envisager. D'ailleurs, il semble que personne d'autre ne se penche sur la question.
J'ai été intéressé d'apprendre que l'OTAN avait parrainé une conférence sur les armes chimiques rejetées en mer, en 1996, et qu'à l'époque on était préoccupé par le fait qu'il y aurait d'importantes décharges d'agents chimiques autour de 2005. Or, 2005 arrive à grands pas.
J'ignore si vous savez pourquoi ils ont divisé l'océan en deux secteurs, est et ouest. C'est une question avec laquelle vous pourriez peut-être m'aider. Êtes-vous au courant de la conférence?
M. Kehoe: Lorsque j'étais en Europe, une chose spectaculaire s'est produite. J'ai parlé à tous les chercheurs qui devaient assister à toutes ces conférences, et j'ai pris le temps de communiquer avec chacun d'eux afin d'en parler.
Un seul pays connaissait l'étendue de la production canadienne, et c'était la Norvège. C'était tout un choc de découvrir cela, car l'Écosse, l'Irlande et l'Île de Man ne savaient même pas que le Canada participait — personne ne le savait.
Nous leur fournissons des renseignements, car ils devraient le savoir, et ils nous fournissent de l'information. C'est plutôt surprenant de constater que Michael et moi-même devons demander l'aide de chercheurs européens et que nos chercheurs n'aident personne.
M. Ojoleck: Ces enjeux ne sont pas bien connus. Dans les milieux gouvernementaux où ils sont connus, c'est-à-dire au MPO, on a déclaré officiellement que ses laboratoires n'étaient pas équipés à cette fin.
M. Kehoe: Lorsque je me rendais aux audiences publiques, en janvier dernier, j'ai entendu parler à la radio d'un reportage de Santé Canada selon lequel nous affichons le taux de cancer le plus élevé au Canada, ainsi que l'espérance de vie la plus basse. Laissez-moi vous dire que j'étais heureux de prendre la parole. Ensuite, le fait d'entendre le représentant de Hunt Oil dire que sa société n'était pas préoccupée par nos commentaires sur les zones de décharge de gaz moutarde, même si nous ne demandons que la création de zones d'exclusion, était très décourageant.
Les sociétés pétrolières ont accès à toute cette zone. Elle est énorme, et ce que je vous montre sur cette carte, c'est seulement pour l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers. À Terre-Neuve, on trouve un autre office qui couvre cette zone. L'office du Québec couvre la zone qu'on voit ici. L'aire totale des zones que nous voulons exclure est très petite.
Il est insensé de ne pas considérer les zones situées près de régions habitées comme des zones d'exclusion. Nous pourrions ensuite laisser la Défense nationale et les chercheurs faire leur travail, et prendre des décisions ensuite. Toutefois, les sociétés pétrolières ont refusé.
Le sénateur Hubley: Quand les produits chimiques ont été déchargés, étaient-ils dans des fûts ou des bidons? Possédez-vous de l'information selon laquelle, de fait, ces contenants se détérioreront après un certain temps?
M. Kehoe: Oui, nous avons trois films sur le rejet de munitions chimiques en mer. Le premier a été tourné à Cornwall. Nous avons des piles d'articles de journaux et de films au sujet de ce chargement. Il était constitué de choses qu'on ne mettait pas dans les bombes et les obus. Ils se contentaient de préparer des chargements de ces produits. Cinq chargements — à raison de 35 wagons par train — tous munis spécifiquement de wagons couverts, ont été acheminés à Halifax. C'est horrifiant de regarder ces images: ils ne portaient ni masque ni autre matériel de protection. Ils envoyaient le navire au large et le sabordaient.
Le sénateur Hubley: Est-ce qu'ils se contentaient de placer le train sur le bateau?
M. Kehoe: Ils chargeaient les barils sur le bateau. C'est ce qu'on voit dans le premier film. Un autre film, tourné pendant la guerre, montre comment nous acheminions une tonne de munitions en Europe en vue de contribuer à l'effort de guerre. Fait intéressant, la CBC l'avait intitulé «Transporter les outils de la guerre». Ce film a été tourné en 1942, à l'intention des écoles du Canada. On y montre toutes les régions où les armes chimiques ont été fabriquées, et les itinéraires de transport. C'était un jeu.
Le sénateur Hubley: C'était un jeu?
M. Kehoe: C'est un jeu qu'ils avaient offert aux écoles, pour les enfants. J'étais à la radio un jour lorsqu'on homme de 92 ans a téléphoné pour dire qu'il avait été enseignant et qu'il avait ce jeu pour les enfants.
Derrière la ligne de front, il y avait toujours une gamme d'armes chimiques et biologiques dans les obus qui étaient chargés. L'Allemagne en avait une; nous en avions une. Le matériel non utilisé retournait à Londonderry, en Irlande. Certains des matériaux que nous retraçons se rendaient ensuite de Londonderry à St. John's. St. John's ne faisait pas partie du Canada, alors on envoyait le matériel là-bas. Certains hommes qui avaient été sur les bateaux à l'époque nous ont raconté qu'ils embarquaient des militaires à St. John's et les ramenaient au Canada, c'est-à-dire à Point Edward. Ils ont constaté que l'établissement de Point Edward ne pouvait accueillir le chargement, car il était déjà plein de matériaux destinés à partir à la guerre — du gaz moutarde pur.
Comme vous voyez dans ce film, on ne voit qu'un seul homme portant du matériel de protection.
[Présentation des actualités silencieuse de 1946.]
M. Ojoleck: Il s'agit des actualités filmées présentées par Fox Movietone en 1946. L'Office national du film a aussi produit un film, mais, après avoir mené de vastes recherches, nous avons conclu qu'il n'en existe plus de copie. C'est ce qu'on dit officiellement.
M. Kehoe: Ils prenaient tout simplement les matériaux et les déchargeaient. Ils sabordaient le navire au complet. Certains d'entre eux flottaient, alors il fallait tirer dessus.
M. Ojoleck: Ils tiraient le sondeur principal le long des barils flottants, et on tentait de les faire couler en tirant dessus à la carabine. Les membres d'équipage ont été exposés aux produits.
M. Kehoe: Dans ce film, vous voyez que le navire est tout près de l'Île de Sable. Il y a des trains qui arrivent en Nouvelle-Écosse de Cornwall, en Ontario. Tous ces wagons sont spécialement adaptés et revêtus pour le transport des fûts de gaz moutarde. Pourtant, les hommes qui les manipulent ne portent aucun équipement de protection.
Le sénateur Trenholme Counsell: Les matériaux passaient du train au navire, et ensuite à la mer?
M. Kehoe: Oui.
Le sénateur Hubley: Et qu'est-ce qu'ils font là? Ils les marquent ou ils les peinturent?
M. Ojoleck: Non. Le représentant de la Défense nationale qui est venu nous interroger avait été chercheur à Suffield. Il estime qu'ils étaient peut-être en train de badigeonner les barils. Ils mélangeaient de la chaux avec de l'eau. Apparemment, si le gaz moutarde s'échappait — ces barils étaient rouillés —, ce mélange créerait un précipité et neutraliserait l'effet du gaz. Le badigeonnage avait pour but de neutraliser les fuites de gaz moutarde.
M. Kehoe: C'était la deuxième étape: se débarrasser des matériaux qui nous revenaient de la guerre. Ensuite il fallait se débarrasser de tout ce qui restait dans nos entrepôts et nos soutes à munitions. Au Cap-Breton — à Point Edward —, c'est ce qu'on appelait «Protector Two». C'est à peu près ici. Cet établissement était plutôt unique. On y entreposait toutes les munitions qui devaient aller à la guerre. Les hommes partaient de Halifax, les munitions partaient d'ici.
La Défense nationale conservait aussi toutes ses archives militaires pour la côte Est à cet endroit. D'une manière ou d'une autre, toutes ces choses ont disparu; personne ne sait où elles sont. Cette zone sur la carte, c'est l'île Saint-Paul. On y trouvait des bases militaires à l'époque, pourtant, lorsqu'on fait une recherche sur l'île Saint-Paul, elle n'existe pas. Il y avait des bases militaires, mais cette île n'existe pas dans les archives. Les armoiries de Johnstown n'existent pas; l'île Saint-Paul n'existe pas. C'est comme si elle s'était évaporée.
Selon les archives de la Défense nationale, Cornwall était le principal producteur de gaz moutarde en Amérique du Nord. Tout le gaz transitait par notre région. Nous regardons la côte Est. Il y a aussi des zones gravement touchées au large de Clayoquot Sound et d'Esquimalt. On avance qu'il y en aurait aussi dans le lac Ontario.
Le ministère de la Défense nationale a besoin de gens pour l'aider à faire des recherches là-dessus. J'ignore comment il parviendra à faire certaines choses. Le Standard Freeholder de Cornwall a publié un article, en mai, au sujet des installations de Cornwall — on y décrivait les activités de l'établissement et les répercussions de ses activités sur les gens. Aujourd'hui, cette région est aux prises avec de graves problèmes.
Le sénateur Hubley: Il y avait une raison évidente de les rejeter en eaux profondes. Croyez-vous que la marée joue un rôle sur ces zones à l'heure actuelle?
M. Kehoe: C'est ça le problème. Un décret ordonnait à la Défense nationale de décharger ces produits en mer. Un protocole avait été établi: la décharge devait avoir lieu au-delà de la zone de 12 milles, de façon à ne pas empiéter sur les lieux de pêche, et il fallait veiller à ce que les produits soient convenablement dissimulés, et ainsi de suite. Cela n'a jamais été fait.
Le site que vous voyez ici, au large de l'Île Scatterie, est à environ 220 pieds sous l'eau. Certains sites sont à des milliers de pieds de profondeur, mais d'autres ne sont qu'à quelque centaine de pieds. Ils sont partout.
La Défense nationale aurait chargé des entrepreneurs de rejeter les matériaux, et c'était plutôt désordonné. Les gars qui étaient dans les soutes à munitions — les gardiens de sécurité et certains des travailleurs de Point Edward — étaient en mesure de déterminer à quel endroit la décharge s'effectuait. Ils déterminent à combien de nœuds le bateau allait ainsi que la durée du trajet, tout comme à Argentia. Ces gars-là sont toujours vivants.
Le personnel militaire retraité qui possédait ce type de renseignements secrets n'a pas le droit de révéler cette information au grand public, aux médias, ou à quiconque. La Défense nationale doit publiquement leur demander cette information. Nous avons posé la question au ministère il y a un an, et on nous a répondu qu'il allait le faire. Je le harcèle depuis, car ces hommes sont en train de mourir; il faut mettre la main sur ces renseignements avant qu'ils ne soient tous partis.
D'une certaine façon, il semble que personne ne veuille vraiment tout savoir. Ils veulent le pétrole et le gaz qui se trouvent au large. Ils sont peut-être préoccupés par l'argent, et ils ne s'en font pas vraiment pour nous. Accordons à ces vieux messieurs la liberté de parler à la Défense nationale, et laissez-les expliquer ce qui s'est produit.
Le sénateur Watt: J'ai peine à croire que notre gouvernement n'ait pas donné suite à cette question. Je suppose que les zones que vous nous avez montrées sur la carte ne sont pas les seules, et que cela se produit ailleurs. Y a-t-il d'autres zones à l'extérieur du secteur de la côte Est?
M. Kehoe: Oh, oui. La Défense nationale a commandé un document, et il se trouve que je l'ai en ma possession. Il s'agit d'un document protégé et confidentiel, mais il décrit toutes les zones qu'ils examinent. Ils en examinent 1 200, et il ne s'agit pas uniquement de zones de décharge; il y a aussi des épaves, un dépotoir, des choses comme ça.
Pour chaque navire coulé, ils ignorent le contenu. C'est ça, le problème. Ils ont toute ma sympathie. Il sera extrêmement difficile de tenter de déterminer ce qu'ils contiennent. Il est aussi intéressant de signaler que certaines zones ne figurent pas dans cette liste. Une certaine zone, qui fait l'objet d'une documentation étoffée — tant sur pellicule que sur papier —, n'y figure pas du tout. De nombreux sites près de Argentia n'y sont pas.
La Défense nationale doit s'activer. Le million de dollars qu'elle a reçu pour mener des recherches sur l'étendue des rejets devrait être réaffecté. Elle devrait prendre le million de dollars, retenir les services des scientifiques européens et travailler avec eux dès maintenant.
J'ai fourni beaucoup de renseignements à la Défense nationale. Ensuite, un entrepreneur est venu me voir. Je lui ai donné les mêmes renseignements, et il les a aussi remis à la Défense nationale. C'est stupide. Le ministère devrait embaucher des chercheurs européens désireux de contribuer. Il a déjà communiqué avec la marine à Halifax. Quand nous avons parlé aux chercheurs en Europe, nous leur avons demandé de parler à Kyle Penney et de lui acheminer de la documentation. C'est ce qu'ils ont fait. M. Penney a communiqué avec eux, et ils lui ont transmis toutes sortes de recherches.
Ce serait vraiment bien que le ministère dépense intelligemment son argent. Le fait de m'envoyer quelqu'un pour obtenir les mêmes renseignements que je leur ai déjà fournis, c'est dépenser de l'argent stupidement.
M. Ojoleck: En Europe, de nombreuses zones de décharge sont des zones d'exclusion tellement dangereuses — en particulier celles autour de la Norvège et de la Suède — qu'on ne peut y plonger pour confirmer ce qui se trouve au fond. Pourtant, au large du Cap-Breton, de Terre-Neuve et des Îles-de-la-Madeleine, vous pouvez louer un bateau de pêche et envoyer des plongeurs chercher des souvenirs, ce que la loi canadienne actuelle permet. De plus, les sociétés pétrolières et gazières peuvent faire de la prospection sismique, et même du forage d'exploration, directement au-dessus de ces zones de décharge.
M. Kehoe: Je pourrais nager au-dessus de la zone qui se trouve dans les lacs Bras d'Or. C'est effrayant.
Je vis au Cap-Breton. Je prends la parole, à la télévision et à la radio, et je dis à tous mes amis et voisins que ces produits sont sur leur propriété, tout juste au large de nos côtes. C'est effrayant pour une personne âgée d'entendre cela à la radio.
Encore une fois, à la lumière des recherches que M. Ojoleck et moi-même avons effectuées, je suis totalement dégoûté de la façon dont le ministère des Pêches et des Océans et le ministère de la Santé ont agi dans ce dossier.
La réponse du bureau du vérificateur général à mes requêtes était totalement inacceptable. Santé Canada a fait fi du problème, sa réaction a été terrible. Le ministère des Pêches et des Océans n'a pas fait mieux.
La Défense nationale ne peut répertorier ce site. Le seul ministère qui peut le répertorier est le ministère des Pêches et des Océans. Alors, pourquoi ne le fait-il pas en vertu du mandat que lui confère la Loi sur les océans?
M. Ojoleck: Il pourrait déclarer le site zone d'exclusion pour toute activité. Il ne l'a pas fait, malgré nos avertissements.
M. Kehoe: À vrai dire, c'est une question de santé. Il est effrayant de vivre au sein d'une collectivité où tout le monde meurt. Tous les poissons meurent aussi. Mes frères et mes neveux me demandent s'ils devraient pêcher dans telle ou telle zone. C'est dur à prendre.
Le MPO ne fait rien.
M. Ojoleck: Nous venons de recevoir un dépliant assez complet qui résume la recherche effectuée par les chercheurs de l'Université de Gand dans le cadre du projet Paardenmarkt.
M. Kehoe: Nous vous le laisserons. Il a paru en mars. Il a été élaboré par la Dre Tine Missiaen et environ 25 chercheurs européens.
M. Ojoleck: L'une des recommandations issues de l'étude du site The Paardenmarkt consistait à fournir de l'information aux équipes de pêche, aux équipes de prospection pétrolière et gazière et à quiconque se retrouve au- dessus de ces zones de décharge répertoriées. Cette information s'assortit de mises en garde. Le seul exemplaire que nous avons est en hollandais. Il y aura bientôt un exemplaire en français, et peut-être en anglais. Elle a été rédigée à l'intention des gens qui vivent le long des côtes de la Belgique. Nous en remettrons un exemplaire au greffier. Le document montre à quel endroit se trouve le site, et explique de quoi ont l'air les vieilles munitions, afin que les pêcheurs sachent que l'objet bosselé qu'ils trouvent dans leur filet n'est pas seulement un morceau de ferraille: c'est peut-être une vieille grenade qui remonte à la Deuxième Guerre mondiale. On donne aussi de l'information sur les personnes avec lesquelles il faut communiquer ainsi que les hôpitaux qui sont dotés d'équipes d'intervention d'urgence spécialisées formées pour traiter l'exposition aux munitions chimiques ou aux agents toxiques, comme les gaz neurotoxiques, qui sont aussi susceptibles de se trouver dans ces obus. On explique à quoi ressemblent les blessures. Si vous avez des plaques rouges sur la peau quatre ou cinq heures après avoir pêché, vous avez peut-être été exposé au gaz moutarde. Le document décrit comment donner les premiers soins.
M. Kehoe: Tous les bateaux danois et suédois sont dotés de trousses de sécurité. Le dirigeant de l'Association danoise des pêcheurs a été alarmé de constater que ce n'était pas le cas chez nous. La garde côtière suédoise dit que cela devient obligatoire; le ministère de la Santé a aidé à formuler ces choses.
Quand nous téléphonons au ministère de la Santé du Canada, on nous raccroche pratiquement au nez. Il ne fait pas son travail, et le MPO non plus. J'accorde au ministère de la Défense nationale un peu de mérite, mais il doit en faire un peu plus.
M. Ojoleck: L'un des arguments utilisés par les organismes fédéraux tient au fait qu'il n'y a aucun cas connu d'exposition aux munitions chimiques au large de la côte Est. Le problème, c'est que, s'il y a exposition, personne ne le saura, car il reste bien peu de médecins qui auraient l'expérience directe du traitement de l'exposition au gaz moutarde utilisé pendant la Deuxième Guerre mondiale. Il y a peut-être eu exposition, peut-être pas, nous l'ignorons.
On a le même problème sur l'île de Man. Pendant les 50 années qui ont suivi la guerre, on n'a jamais entendu parler de la grande quantité de munitions qui échouent sur la côte. Vous pouvez parler à la garde côtière irlandaise, à la garde côtière suédoise, et aux gens autour de l'île de Man, et ils vous confirmeront que des munitions échouent sur le rivage.
Quelle est la différence? La différence tient peut-être aux bouleversements du fond marin occasionnés par la création de pipelines. Ce que nous disons, c'est qu'il faudrait tenter d'éviter de tels problèmes en attribuant à ces sites répertoriés le statut de zone d'exclusion. Nous ne voulons pas devoir composer avec les problèmes qui ont eu lieu en Europe.
M. Kehoe: Tous ces barils ont été déchargés au large de l'île de Sable. Pourtant, aucune de ces substances ne se trouve encore dans les barils; elles sont recouvertes d'une croûte de sédiments. Toute activité similaire au dragage va troubler le fond marin. Cela répand les produits chimiques partout, et c'est ça le problème. Nous devons mettre un terme à la plongée sous-marine dans ces zones. Nous devons mettre un terme à la prospection pétrolière et gazière dans ces zones. Nous devons le faire maintenant.
Nous devons pousser la Défense nationale à agir un peu plus rapidement. Nous devons inciter notre gouvernement fédéral à assumer toutes les responsabilités que lui confèrent les diverses lois — les lois environnementales et les lois sur la santé. De nombreuses lois ne sont respectées par personne. Dans le cas du MPO, la Loi sur les océans prévoit que le ministère doit protéger les poissons et leur habitat. Il ne fait pas cela, c'est clair.
Le sénateur Watt: Croyez-vous que ces substances commencent à s'étendre ailleurs dans l'océan?
M. Kehoe: Oui.
Le sénateur Watt: Est-ce qu'elles se dispersent dans l'Arctique et influent sur la chaîne alimentaire? J'ai été témoin des choses que vous avez décrites.
M. Kehoe: Mitretek Industries a produit une étude qui s'intitule «Ocean Dumping of Chemical Munitions: Environmental Effects in Arctic Seas». Prenons un bon exemple, celui d'une bombe sur le fond marin qui commence à se lixivier. Tous les poissons qui passent dans un certain rayon de cette bombe mourront. Lorsque les poissons s'éloignent, ils meurent ou deviennent léthargiques et nagent à l'envers. Ce phénomène a été documenté. Les poissons passent dans cette zone et deviennent spastiques.
Si une seule bombe peut faire cela, songez à ce que 5 000 bombes en lixiviation peuvent faire. C'est pourquoi les Européens affirment que nous aurons des problèmes dès 2005. La situation en Europe est peut-être différente de la nôtre, en raison de nos marées, du sel, de la saltation et de la quantité de moutarde dans les obus au Canada.
Les dossiers de la Défense nationale indiquent qu'un obus de mortier de 60 livres contiendrait 30 livres d'explosifs et 30 livres d'armes chimiques liquides. En Europe, les Allemands auraient mis environ 10 livres de gaz moutarde et 50 livres d'explosifs dans un obus de 60 livres. Ils en utilisaient beaucoup moins là-bas. Nous utilisions un ratio de un pour un.
Le sénateur Trenholme Counsell: Si, dans un monde idéal, ces zones d'exclusion devaient être établies, que resterait-il pour la pêche? Je parle de nos pêches sur la côte atlantique.
M. Kehoe: Tout pêcheur de la côte Est — au Cap-Breton et dans la plupart de Terre-Neuve — vous dira que, dans cinq ans, il n'y aura plus de poissons du tout.
La plupart de nos poissons de fond sont disparus; beaucoup de nos mollusques et crustacés sont disparus. Notre crabe disparaît à vue d'œil. On m'a dit que le phénomène des crabes hermaphrodites échappe à notre contrôle. Le MPO a mené une étude sur le sujet. La Défense nationale a tenté d'obtenir une copie de cette étude, et le ministère des Pêches a refusé de lui en fournir une.
Le sénateur Trenholme Counsell: Quel pourcentage du fond marin ou des zones désignées aux fins de la pêche par nos pêcheurs dans l'Atlantique serait toujours accessible aux pêcheurs?
M. Kehoe: Je crois que ce serait un minimum, car nous avons les zones de décharge au large des Grands bancs, et le Banc Georges est plein de produits chimiques.
Le sénateur Trenholme Counsell: Croyez-vous qu'il resterait peu de place pour la pêche?
M. Kehoe: Oui. Il resterait très peu de place pour la pêche. Ça me désole de dire cela. Dans ma famille, nous sommes pêcheurs de père en fils. La plupart des pêcheurs que je connais ont peur. Ils s'aperçoivent que certaines de ces substances sont dans la mer, mais ils ont peur de dire quoi que ce soit.
Nous n'avons pas grand-chose ici. Nous avons la pêche, un peu d'industrie; nous n'avons pas grand-chose. Si nous arrivons à maîtriser la situation, peut-être arrêter les gens d'aggraver la situation, nous arriverons peut-être à contenir le problème un peu plus.
M. Ojoleck: Il existe divers types de pêches, au filet, au chalut. Je tiens à préciser que, en ce qui concerne l'activité de pêcher dans l'océan, nous n'avançons pas que cela pose un risque pour la santé.
Ce que nous disons, c'est que les équipes de pêche au chalut courent un risque d'exposition.
Le sénateur Trenholme Counsell: Je vous ai demandé si vous estimiez qu'il est dangereux de manger le poisson.
M. Kehoe: Oh, je mange toujours du poisson.
M. Ojoleck: Moi aussi.
M. Kehoe: Les poissons meurent, mais nous ne savons s'ils sont dangereux, car personne n'a mené d'étude.
M. Ojoleck: Ce sont les alevins qui semblent afficher le taux de mortalité le plus élevé; c'est ce qu'on avance dans l'article paru dans le Chronicle Herald en décembre 2000.
M. Kehoe: Les populations ne croissent pas.
M. Ojoleck: Nous ne mangeons pas d'alevins. Ce sont des petits poissons qui restent au fond. Les alevins n'atteignent pas l'âge adulte, et c'est pourquoi le taux de mortalité déconcerte les chercheurs.
Nous voyons les œufs et les larves, mais lorsqu'on prend des échantillons de larves, elles sont toutes plutôt minces et malsaines. Ce sont les mots que les chercheurs utilisent. Il y a 20 ou 30 ans, les larves étaient plus rondes et saines.
Lorsqu'on compare les larves de morue d'il y a 30 ou 40 ans aux échantillons de larves d'aujourd'hui, on constate que les deux sont fort différentes. Selon l'article, les scientifiques halieutistes du Canada ignorent pourquoi les larves de morue ne se rendent tout simplement pas à l'âge adulte.
Le sénateur Mahovlich: Si je comprends bien, vous dites que la solution consiste simplement à ne pas toucher ces zones.
M. Kehoe: C'est ce que prône actuellement la communauté mondiale: laissons les choses telles qu'elles sont jusqu'à ce qu'on trouve les solutions.
Le sénateur Mahovlich: Ne pourrions-nous pas nettoyer le fond marin?
M. Kehoe: Non, non.
Le sénateur Mahovlich: Croyez-vous qu'il y ait actuellement à Cornwall des gens qui savent comment manipuler le gaz moutarde?
M. Kehoe: Non. Le gaz moutarde est une substance plutôt bizarre et très instable. Lorsqu'on tente de le déplacer, on court le risque de briser le contenant et de causer une fuite. Le vrai danger concerne l'environnement marin. Le gaz a des répercussions à l'heure actuelle, mais elles pourraient être encore pires si on tentait de nettoyer le fond marin.
Le sénateur Mahovlich: Ainsi, nous devrions tout laisser là.
M. Kehoe: Il y avait une grande zone de gaz moutarde en Italie.
Le sénateur Mahovlich: Que s'est-il passé?
M. Kehoe: On tente de l'encapsuler.
Le sénateur Mahovlich: Comment le gaz moutarde réagit-il dans l'eau?
M. Ojoleck: Il se dégradera ou s'hydrolysera s'il entre en contact avec l'eau. La molécule de gaz moutarde est très simple. Elle est constituée de deux molécules d'alcool. On sépare les groupes de cellules d'alcool, on met du chlore et on les lie avec une molécule de soufre. Ce n'est pas compliqué.
Lorsqu'on le place dans l'eau froide de la mer, une réaction chimique crée une pellicule, une sorte de croûte, sur la partie externe de la bosse. Comme nous l'a expliqué un homme qui travaillait avec le gaz moutarde à Suffield, c'est comme un ballon plein d'eau: il y a de l'eau à l'intérieur, mais elle est contenue dans une peau stable. Toutefois, lorsque cette peau est perforée, on se trouve en présence d'une matière réactive.
Dans le cas du gaz moutarde, si on brise l'enveloppe et on laisse s'échapper la matière réactive dans l'eau, la substance commencera à se dissiper et à se dégrader en une solution totalement inoffensive en quelques heures, mais elle recommence à former cette croûte. On ne savait pas cela en 1946.
M. Kehoe: Les connaissances scientifiques commencent tout juste à prendre forme. C'est plutôt déprimant de voir ce qui se trouve au fond et de se demander comment on réussira à résoudre le problème. Voilà pourquoi il faut que les meilleurs chercheurs travaillent avec notre gouvernement, et il faut que la Défense nationale invite les chercheurs à la suivre et à travailler ici.
Le sénateur Mahovlich: Les Russes ne sont pas les seuls à devoir composer avec ce problème.
M. Kehoe: Non, il y a 13 pays dans le monde qui mènent des études.
Le président: Avez-vous parlé au Commissaire à l'environnement et au développement durable du Bureau du vérificateur général du Canada?
M. Kehoe: Oui. Nous lui avons soumis une requête. Nous avons soumis à six ministres des requêtes relatives à dix questions. Toutes les réponses nous ont été transmises par l'entremise de la Défense nationale. Aucun ministère n'a eu la permission de nous répondre directement. La Défense nationale devait nous acheminer toutes les réponses des autres ministères.
Le président: Par Mme Gélinas?
M. Kehoe: C'est vrai. Quand nous avons présenté une requête en vertu de l'article 22 au Bureau du vérificateur général, elle a soumis des requêtes, en notre nom, je suppose, aux ministres de la Santé, de l'Environnement et des Pêches, et elle leur a posé toutes ces questions auxquelles ils devaient répondre. Les réponses que nous avons obtenues étaient complètement vides.
Nous présentons une autre requête. Nous avons appris quelques choses au fil des années. Nous poserons des questions plus pointues.
Le président: Nous effectuerons un suivi sur cette question, car Mme Gélinas a témoigné devant notre comité il y a quelque temps, et elle était très fière du processus de requête appliqué par sa commission. Nous assurerons peut-être un suivi là-dessus.
Si cela est possible, monsieur Kehos, nous vous reparlerons afin d'obtenir des copies des documents que vous avez reçus en réponse à votre question. Le comité voudra peut-être ensuite aborder cette question avec Mme Gélinas.
M. Kehoe: La réaction de son ministère et de son bureau a été fantastique. On tente de communiquer avec divers ministères et on ne nous répond pas, et ensuite on téléphone à un ministère qui veut vraiment nous aider, c'est plutôt agréable.
Le président: C'est l'un des aspects sur lesquels nous voudrons revenir, car nous étions plutôt impressionnés par son exposé sur le bien-fondé du processus de requête.
Je ne crois pas que notre comité ait eu l'occasion d'apprendre comment le processus fonctionne. Nous ne pouvons que déterminer si vous obtenez les réponses voulues et si elle assure un suivi convenable, et ainsi de suite.
Elle témoignera devant notre comité le 23 octobre. Cela nous donnera l'occasion d'assurer un suivi. Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, pourriez-vous nous transmettre l'information afin que nous puissions en parler avec elle ce jour-là? Nous allons certainement lui demander si elle est satisfaite des réponses qu'on lui a fournies. Cela nous serait utile, et nous pourrions faire d'une pierre deux coups.
M. Kehoe: Nous allons aussi remettre à votre comité un cartable de documentation que nous aimerions ravoir. Nous vous remettrons aussi une copie de l'un des films, du nouveau livre de la Dre Missiaen et du journal de Mitretek Industries. Nous remettrons à votre comité tout renseignement utile que nous trouverons afin que vous puissiez mener vos propres recherches.
Le président: Il y a eu beaucoup d'informations sur le réseau d'alerte avancé dans le Nord. Les travaux de la commission ont été plutôt publicisés, car la question du Nord était très délicate. Il en va de même pour l'océan. Pourtant, pour une raison qui nous échappe, il ne semble y avoir aucune forme de déclassement de ces zones de décharge dans l'océan, rien qui ne s'approche du déclassement à l'égard du réseau d'alerte avancé.
Peut-on établir un certain parallèle ici? Est-ce tout simplement plus difficile à déclasser?
M. Kehoe: La plupart des zones de décharge au large de la côte est du Canada étaient très secrètes, personne n'était au courant de leur existence. Par exemple, en 1997, la Défense nationale niait que nous ayons même eu du gaz moutarde, à l'époque même où elle nettoyait un lieu de décharge de gaz moutarde à Chalk River, où se trouvent les grandes installations nucléaires. D'un côté, il nie tout, de l'autre, il nettoie.
Je sais que c'est une chose effrayante à savoir pour le public du Canada, mais tous les pays européens ont choisi d'en informer le public et d'obtenir son aide. Je crois que c'est ce que nous devons faire ici. Nous obtenons tellement d'informations. C'est beaucoup de travail, et certains aspects échappent à nos capacités. Je ne me sens pas à l'aise avec les aspects touchant le nucléaire. D'autres personnes qui connaissent mieux le domaine devraient faire ce travail.
En ce qui concerne le travail effectué sur la côte est et la côte ouest du Canada, je crois que la Défense nationale est toujours en déni. À vrai dire, si nous n'étions pas ici, cette question serait probablement toujours occultée.
Le président: Je crois que vous nous avez informés du fait que les laboratoires du MPO ne sont apparemment pas équipés.
M. Kehoe: Pour faire ce que le ministre a dit.
Le président: Est-ce vraiment la réponse qu'on vous a donnée?
M. Ojoleck: La lettre est dans le cartable.
Le président: Nous voulons assurer un suivi à cet égard.
M. Kehoe: Si la lettre n'est pas dans le cartable, nous vous l'acheminerons. On vient d'établir un groupe de travail canadien sur les zones de décharge, et il comprend des représentants du MDN, qui en assurent la direction, et des ministères des Affaires étrangères, des Pêches et de l'Environnement.
Certains de leurs documents sont plutôt intéressants à lire, car le groupe estime que les zones de décharge causent la mort du poisson. Il semble que les gens pensent cela, mais ils ne réagissent pas vraiment.
Le président: Lorsque quelque chose a des répercussions néfastes sur l'habitat du poisson, l'article 35 de la Loi sur les pêches peut automatiquement être invoqué. A-t-on déjà essayé d'invoquer l'article 35 à l'égard d'une telle situation?
M. Kehoe: Non. Nous avons parlé de cet article au MPO, et on ne nous a pas écoutés. Le ministère ne veut même pas nous parler, ni répondre à nos lettres.
Nous avons aussi rappelé certaines dispositions de la Convention sur les armes chimiques au ministère des Affaires étrangères, car nous avons signé cette convention. Cela m'a laissé perplexe. Si nous avons signé une convention et que nous ne prenons aucune mesure à l'égard de ce que nous avons rejeté dans la mer, alors, quel est le problème ici? Pourquoi le font-ils en Europe et pas ici?
J'ai demandé à des chercheurs européens ce qui causerait ce problème. Ils disent que le Canada contrevient à certains articles de la Convention sur les armes chimiques. Ils ont laissé entendre que nous aurions dû déclarer ce que nous avions et ce que nous en avions fait. Personne n'a jamais fait cela.
Le président: Il y a quelques semaines, ou plus récemment, j'ai posé une question à des représentants du MPO concernant la rapidité avec laquelle on a procédé à une évaluation en vertu de l'article 35 lorsque quelqu'un a proposé de créer une carrière. Pourtant, l'impact d'une carrière n'arrive même pas à la cheville de l'impact d'un lieu de décharge de munitions.
M. Kehoe: Ce qu'il faut comprendre, c'est que le dragage dans ces zones a lieu depuis des années. De plus, il est certain qu'on a aussi fait de la prospection sismique. Toutefois, nous ignorons les répercussions de ces activités.
Sont-elles au moins partiellement responsables de ce qui arrive à notre morue et à nos poissons de fond? Nous ne le savons pas. C'est une question importante, et il faudrait que quelqu'un y réponde.
Le président: Nous ne savons même pas ce qui est arrivé à la morue, bon sang!
Le sénateur Mahovlich: Avez-vous entendu des choses au sujet des zones de décharge dans le Pacifique?
M. Kehoe: Oui. Beaucoup de choses. Outre les zones de décharge de produits chimiques et biologiques, on trouve aussi des zones de décharge de matières nucléaires.
Le président: L'exposé de ce soir s'est révélé des plus intéressants.
M. Kehoe: Auriez-vous l'obligeance de tenir M. Ojoleck et moi-même au courant de vos progrès et de l'information que vous trouvez? Nous transmettrons tout ce que nous avons à votre comité.
Le président: Absolument, nous serons heureux de le faire. En conclusion, votre passion et votre pouvoir de persuasion sont très impressionnants et utiles. À la lumière des questions qui vous ont été posées, je crois que vous avez impressionné les membres du comité.
Le sénateur Trenholme Counsell: Monsieur le président, pourrions-nous, à un moment donné, assurer un suivi auprès des Pêches et du MDN concernant cette réfutation? L'a-t-on déjà fait?
Le président: Non, pas sur ce sujet.
Le sénateur Trenholme Counsell: Je crois que nous devrions vraiment faire cela afin qu'on puisse poursuivre.
Le président: En général, vers la fin de notre étude, nous invitons le MPO à aborder le sujet de notre étude. Dans le cas du MDN, nous allons certainement communiquer avec le comité directeur pour voir si nous pourrions rencontrer les représentants.
La séance est levée.