Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants
Fascicule 3 - Témoignages du 19 février 2003
OTTAWA, le mercredi 19 février 2003
Le Sous-comité des affaires des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense s'est réuni aujourd'hui à 12 h 10 pour étudier les soins de santé offerts aux anciens combattants qui ont servi au cours de guerres ou dans le cadre d'opérations de maintien de la paix; les suites données aux recommandations faites dans ses rapports précédents sur ces questions; et les conditions afférentes aux services, prestations et soins de santé offerts, après leur libération, aux membres de l'armée permanente ou de la réserve, ainsi qu'aux membres de la GRC et aux civils ayant servi auprès des casques bleus en uniforme dans des fonctions d'appui rapproché; et toutes les autres questions connexes.
Le sénateur Michael A. Meighen (président) préside la séance.
[Traduction]
Le président: Mesdames et messieurs, bienvenue au Sous-comité des affaires des anciens combattants. Aujourd'hui, nous reprenons notre étude des prestations fournies aux anciens combattants, et de façon plus précise, des prestations versées au titre du RARM, le Régime d'assurance-revenu militaire, aux membres des Forces canadiennes qui ont subi une mutilation. Les membres du comité se rappelleront que nous avons entendu la semaine dernière le lieutenant- général Christian Couture, sous-ministre adjoint, Ressources humaines — militaire; Pierre Lemay, président du Régime d'assurance-revenu militaire; John Geci, président de l'Agence de soutien du personnel des Forces canadiennes, ainsi que Mme Kathleen Martin, gestionnaire du RARM à la Maritime. Tous ces gens nous ont expliqué comment fonctionne le RARM et comment se répartissent les cotisations des membres des Forces armées canadiennes et celles du gouvernement. Nous avons accueilli avec plaisir au cours de leur témoignage la confirmation d'une couverture élargie d'assurance, à hauteur d'un montant forfaitaire de 250 000 $, versée pour mutilation aux membres des Forces canadiennes dont le rang est inférieur à celui de colonel.
Je suis le sénateur Meighen, de l'Ontario, et je préside le Sous-comité des affaires des anciens combattants. Laissez- moi vous présenter les membres du comité qui sont ici aujourd'hui, et je commence à mon extrême gauche. Il y a le sénateur Terry Stratton, du Manitoba; le sénateur David Smith, de l'Ontario; le sénateur Tommy Banks, de l'Alberta; le sénateur Jack Wiebe, de la Saskatchewan; le sénateur Norm Atkins, de l'Ontario; le sénateur Michael Forrestall, de la Nouvelle-Écosse; et le sénateur Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse.
Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui le ministre de la Défense nationale, l'honorable John McCallum. Avant de nous faire votre déclaration, monsieur le ministre, vous voudrez peut-être nous présenter ceux qui vous accompagnent.
L'honorable John McCallum, ministre de la Défense nationale: Mesdames et messieurs du Sénat, je suis ravi d'être ici. J'aimerais vous présenter deux personnes du ministère qui m'accompagnent: à ma gauche, vous avez M. Pierre Lemay, président du RARM, et à ma droite se trouve la capitaine Andrea Siew, directrice de la Qualité de la vie.
J'ai une brève déclaration à faire, mais j'aimerais consacrer d'abord quelques instants au budget d'hier. Si vous avez des questions ou des commentaires, je les accueillerai avec plaisir.
C'est très tôt dans ma carrière comme ministre de la Défense nationale que j'ai découvert qu'il existait ce que l'on pourrait appeler «l'écart de la viabilité»: autrement dit, notre budget se trouvait à ce niveau-ci, tandis que le coût de ce que l'on exigeait de nous était à un niveau supérieur. Or, nos dirigeants militaires m'ont informé que cet écart se chiffrait à 936 millions de dollars. Après réflexion, j'ai accepté ce chiffre et décidé que mon objectif principal, c'était de combler cet écart.
J'aimerais remercier les honorables sénateurs du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, les membres du comité de la Chambre des communes, les membres du caucus, le premier ministre et le ministre des Finances d'avoir comblé l'écart d'un seul coup hier. Dès l'an prochain, on consacrera un milliard de dollars de plus par année aux dépenses de défense, ce qui représente un quart de l'augmentation totale des dépenses de 4 milliards de dollars annoncées hier dans le budget. Nous avons donc comblé l'écart.
J'aimerais également rajouter que, en ce qui concerne le budget, l'augmentation ne signifie pas pour autant que nous pouvons nous croiser les bras désormais. Le monde a changé considérablement pour tout ce qui touche la sécurité depuis l'ère soviétique jusqu'à aujourd'hui et en passant par le 11 septembre. On exige des organisations militaires de partout au monde qu'elles se transforment pour s'adapter à une situation qui est considérablement différente de ce qu'elle était, sans parler des changements rapides de la technologie.
Nous allons gérer judicieusement nos ressources, en faisant les réallocations et les ajustements nécessaires entre les secteurs à faible priorité et les secteurs à priorité plus élevée. Nous allons aborder une période de transformation et devoir prendre des décisions difficiles pour pouvoir faire passer nos forces armées au XXIe siècle. Cela représente une entreprise à long terme. Toutefois, maintenant que nous avons atteint une durabilité à court terme, nous abordons l'étape suivante.
[Français]
C'est tout ce que j'aimerais dire au sujet du budget d'hier. Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter d'un sujet important, soit la santé, le bien-être et le traitement équitable de tous les membres des Forces canadiennes et de leur famille. C'est une question que le présent gouvernement prend très au sérieux.
Depuis que je suis devenu ministre de la Défense nationale, j'ai eu la chance de constater de mes propres yeux le formidable travail accompli chaque jour, au pays et à l'étranger, par les hommes et les femmes des Forces canadiennes. J'ai visité les militaires en Bosnie, en Afghanistan et à travers le Canada et, chaque fois, leur dévouement, leur persévérance et leur professionnalisme m'ont impressionné.
[Traduction]
Nous tous qui sommes ici comprenons les nombreux sacrifices que l'on exige de nos hommes et femmes soldats. Non seulement le personnel des Forces canadiennes doit sacrifier beaucoup pour sa patrie, mais il doit être également prêt à donner sa vie pour le Canada, au besoin. Lorsque ces gens s'enrôlent, ils acceptent cette responsabilité illimitée. Or, étant donné tout ce que les Forces canadiennes font en notre nom, nous devons être prêts à en faire autant pour elles.
Vous nous avez entendu dire que la qualité de la vie chez les hommes et les femmes des Forces canadiennes constitue une priorité des plus hautes pour les chefs de l'équipe de la défense. J'aimerais maintenant remercier mon prédécesseur, Art Eggleton, qui a occupé ces fonctions pendant cinq ans et dont la priorité la plus haute, tout au cours de son mandat, était d'assurer la qualité de vie chez les soldats. Il nous faut tous reconnaître que, au cours de ces cinq années, des progrès remarquables ont été effectués dans ce dossier. Nous ne voulons pas nous reposer sur nos lauriers, car il reste encore beaucoup à faire.
[Français]
Au cours des dernières années, le ministère de la Défense nationale a beaucoup fait pour respecter ce principe: «The principle of putting people first».
Un financement accru a rendu possible une large gamme d'améliorations pour le logement, les avantages sociaux et les soins de santé. Toutefois, il est toujours possible de faire mieux, j'en suis pleinement conscient. Comme M. Couture l'a dit, nous nous efforçons toujours d'améliorer la qualité de vie de nos militaires, hommes et femmes, ainsi que de leur famille.
[Traduction]
Je suis heureux de discuter avec vous aujourd'hui d'une percée importante effectuée récemment en vue d'assurer un traitement équitable à tous les membres des Forces armées, à savoir le versement d'un montant forfaitaire en cas de mutilation accidentelle. Laissez-moi vous rappeler brièvement comment tout cela a commencé. C'est au tout début de mon entrée en fonction comme ministre de la Défense, bien avant que j'entende parler de l'écart de viabilité, que j'ai entendu parler dans les médias du major Henwood. J'ai donc décidé d'une chose dont vous avez déjà entendu parler et sur laquelle je reviendrai dans un instant.
Donc, je n'étais pas au courant de l'anomalie dont il est question jusqu'à ce que j'en entende parler dans les médias et, particulièrement, par Peter Worthington.
Il s'agit d'un cas auquel tous les Canadiens peuvent être sensibles. En effet, c'est fondamentalement injuste de voir que seuls les officiers des Forces canadiennes peuvent recevoir un versement forfaitaire s'ils perdent un bras ou une jambe en service actif. C'est carrément injuste, et je l'ai compris très clairement lorsque j'ai entendu parler du major Henwood.
Je m'empresse d'affirmer qu'il ne s'agit pas là d'un complot de la part des généraux et des colonels de l'armée. En effet, cette disposition sur la mutilation faisait partie de prestations accordées à tous les hauts fonctionnaires de la fonction publique du Canada et qui ont été étendues aux hauts gradés. C'est comme ça que cela s'est passé. Cela ne justifie quand même pas que les gradés de rang inférieur soient exclus de cette prestation. On comprend aisément qu'ils aient tout autant besoin que leurs collègues hauts gradés de ces prestations.
Dès le début, j'ai voulu corriger cette anomalie. D'après les notes que je suis censé lire, j'aurais corrigé l'anomalie très rapidement. Je veux bien que pour le gouvernement — et cela ne fait pas longtemps que j'y suis — les choses se soient passées très vite. Néanmoins, je n'ai pas l'impression que les choses aient bougé si rapidement que cela étant donné que l'affaire était relativement simple. Mais nous avons agi, et désormais, tous les membres des Forces canadiennes, peu importe leur rang, recevront cette prestation.
Cela laisse néanmoins en suspens la question de la rétroactivité. Je me suis saisi de cette affaire, puisque si on considère aujourd'hui la situation comme injuste, elle l'a certainement été tout autant pour ceux qui ont été mutilés par le passé. J'ai donc l'intention de déployer tous les efforts voulus pour faire changer les choses sur ce front-là. J'ai enjoint à mes fonctionnaires d'ouvrir le dossier, et j'espère pouvoir vous donner un rapport d'étape sous peu des progrès accomplis.
Tout cela fait partie des responsabilités que doit absolument assumer un gouvernement. Toutefois, cela ne va pas sans difficulté et exige du temps. Je ferai de mon mieux pour que cela se fasse vite, mais il faudra le temps voulu pour des raisons que mes collègues qui m'accompagnent aujourd'hui pourront vous expliquer en détail.
D'abord, quelques commentaires généraux au sujet de la qualité de la vie, puisque vous pourriez vouloir m'interroger là-dessus. Notre Direction générale de la qualité de la vie s'occupe de la recherche et de nouvelles initiatives en ce qui concerne les différentes questions de la qualité de la vie au travail. Ainsi, la direction mène actuellement une étude approfondie sur les effets de la cadence des opérations militaires sur nos membres et leurs familles.
Nous avons également lancé une autre grande initiative pour aider les membres actuels et les anciens combattants des forces armées qui auraient souffert du traumatisme lié au stress opérationnel. Ils pourront être aidés, de même que leurs familles, par les réseaux de soutien des pairs que l'on trouve aujourd'hui dans huit endroits au Canada; nous avons l'intention d'en ouvrir sept autres d'ici la fin de cette année-ci.
Comme cela et les changements récents l'illustrent, le ministère de la Défense déploie beaucoup d'efforts pour s'occuper d'abord de son personnel. En effet, les hommes et les femmes des Forces canadiennes qui se mettent régulièrement en situation de danger pour servir la paix méritent rien de moins.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir invité. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
Le président: Je vous remercie pour vos remarques spontanées. Cela démontre un intérêt particulier de votre part pour le sujet qui nous préoccupe. Notre auditoire et tous ceux qui s'intéressent à cette question l'auront sûrement remarqué.
Nous sommes huit sénateurs aujourd'hui et le ministre doit nous quitter à 13 h 10. Je demanderais aux honorables sénateurs de limiter les questions qu'ils veulent poser. Je suis confiant que le ministre, comme toujours, nous donnera des réponses succinctes.
[Traduction]
Le sénateur Banks: J'ai toujours hâte, comme le sait le ministre. Je dois d'ailleurs le féliciter pour tout ce qu'il a fait. Vous avez raison de dire qu'il reste encore beaucoup à faire, mais je crois que tous les membres du comité s'entendront avec moi pour dire que, si l'on se fie à ce que vous nous avez dit, vous avez fait un grand pas dans la bonne direction. Nous vous en félicitons chaleureusement.
Je n'ai qu'une question à vous poser. Vous avez dit que vous vous occupiez déjà du dossier de la rétroactivité, sur lequel on voudra peut-être vous poser d'autres questions. À mon avis, on continue à maintenir la distinction entre les officiers généraux et les officiers de grade inférieur. Vous avez expliqué que c'était à cause d'une disposition du programme d'assurance de la fonction publique qui avait été élargie pour qu'elle s'applique aussi aux officiers généraux. Mais si j'ai bien compris le nouveau programme qui s'applique aux membres des Forces canadiennes de grade inférieur, les dispositions régissant la mutilation ne s'appliquent que lorsque ces officiers sont en service actif dans le théâtre des opérations. Si ce que j'ai dit est exact, allez-vous aussi vous en occuper?
De plus, pourriez-vous nous donner rapidement une explication de ce que vous appelez «être de service»? Si j'attends l'autobus à l'arrêt, en vue de me rendre au travail à la base, suis-je de service? Si je me rends à la base à vélo, comme l'a suggéré pour ma santé le ministère de la Défense, suis-je de service? Quand exactement ne suis-je plus de service? Si je vais en pique-nique avec ma famille, je veux bien croire que je ne suis pas de service.
M. McCallum: Je crois que vous avez raison. Je vais voir s'il n'est pas possible de changer la situation, mais je crois que nous avons au moins atteint notre premier objectif. Dans la fonction publique, les cadres supérieurs jouissent de cette assurance-mutilation, contrairement aux fonctionnaires de niveau subalterne. On peut bien crier à l'injustice, mais ce sont les règles. Dans les forces armées, l'iniquité dépend de la période pendant laquelle on est de service, et c'est ça qui distingue les forces armées des fonctionnaires.
Le sénateur Banks: C'est ce que nous allions vous demander.
M. McCallum: On a au moins changé ce qui se passera désormais. Dès qu'un membre des forces armées est de service, qu'il soit en Afghanistan ou à la base, il pourra recevoir le paiement. Mais si un caporal, par exemple, n'est pas de service et qu'il se fait blesser dans un centre commercial pendant le week-end, je ne suis pas sûr si ce caporal sera mieux traité qu'un fonctionnaire de niveau subalterne.
Je vais prendre cela en délibéré, mais je ne crois pas que l'aspect du service soit aussi urgent que l'équité.
Je n'ai pas de définition précise de ce que l'on entend par «être de service». Peut-être qu'un de mes collègues pourrait vous la donner. J'imagine que vous êtes de service chaque fois que vous êtes à la base, à votre lieu de travail, que ce soit au Canada ou lors d'un déploiement à l'étranger. Mais quant à savoir si vous êtes de service pendant que vous attendez l'autobus pour vous rendre au travail, je n'en sais trop rien. Quelqu'un peut-il répondre?
M. Pierre Lemay, président du Régime d'assurance-revenu militaire, ministère de la Défense nationale: Je crois que dès que vous quittez votre domicile et que vous vous rendez au travail, vous êtes considéré comme étant de service. Si vous êtes envoyé en entraînement quelque part ou pour suivre un cours, au Canada ou à l'étranger, vous êtes de service. Ensuite, les paramètres fixés et la logique d'application dépendent de la façon dont vous définissez «être de service».
Le sénateur Banks: Merci.
Le président: On trouve-t-on une définition juridique dans votre cadre de politique? Comment fait-on pour décider?
M. Lemay: C'est établi dans la politique. Nous avons également une définition dans une autre politique, celle de l'invalidité à long terme, qui se fonde sur des consignes existantes. Mais nous consultons le ministère des Anciens combattants, car vous savez sans doute que les prestations que verse le ministère des Anciens combattants sont versées à des gens en service; voilà pourquoi nous ferons en sorte que la définition de «être de service» soit la même partout. Mais je ne sais pas si c'est défini dans la Loi sur la défense nationale ou dans ses règlements.
Le sénateur Atkins: Monsieur le ministre, je vous félicite de vous être attaqué à ce dossier qui est très important, à mon avis.
Cela signifie-t-il que le gouvernement assume désormais les cotisations au RARM de tous les membres des forces armées?
M. McCallum: Je sais que les membres des forces armées recevront les prestations. Si j'ai bien compris, le gouvernement fait une contribution annuelle à un fonds qui servira à financer ces versements, sans qu'une compagnie d'assurances y participe. Même si le fonds n'était pas complètement constitué et qu'il devenait nécessaire de verser des prestations, je crois que le gouvernement serait suffisamment solvable pour pouvoir l'effectuer.
Le sénateur Atkins: Pour une protection maximale?
M. McCallum: En effet, sénateur Atkins.
Le sénateur Atkins: Dans vos notes, je lis que, à votre avis, les rajustements pour le mieux de la protection en cas de mutilation accidentelle sont un pas énorme dans la bonne direction mais que vous ne considérez pas pour autant qu'il n'y ait plus rien à faire dans le dossier de la qualité de vie.
Lorsque le major Henwood a comparu, il a expliqué notamment que pendant sa période de convalescence, il avait constaté que beaucoup de dépenses et de frais engagés par sa famille n'étaient pas couverts par son assurance. Il avait dû débourser beaucoup d'argent de sa propre poche. Il parlait de l'absence de remboursement lorsque sa famille lui rendait visite à l'hôpital et devait assurer les frais de stationnement et de l'absence de remboursement de l'aide à laquelle ses enfants avaient dû avoir recours pendant cette période de détresse. C'est à cela que vous pensiez en disant cela?
M. McCallum: Je ne suis pas libre de commenter le cas précis du major Henwood, car je crois qu'il y a des procédures judiciaires intentées. De façon générale, il me semble que ce serait la moindre des choses qu'une personne dans la situation du major Henwood reçoive toutes sortes de formes d'aide. Le gouvernement devrait d'ailleurs faire tout en son pouvoir pour aider des gens comme lui de la façon dont vous l'avez laissé entendre. Mais je demanderais encore à un de mes collègues d'expliquer ce que nous faisons en ce sens.
La capitaine de vaisseau Andrea Siew, directrice, Qualité de la vie, ministère de la Défense nationale: Depuis l'accident du major Henwood il y a de cela plusieurs années, plusieurs programmes ont été lancés pour aider encore plus les familles des membres des forces armées qui ont été blessés. Nous avons mis sur pied un fonds de visite des familles qui permet d'offrir du transport aux membres de la famille, particulièrement si ceux-ci ne se trouvent pas au même endroit que le blessé. Un fonds de prévoyance a également été mis sur pied pour aider les familles de membres des forces armées blessés dans toutes sortes de situations et de circonstances et qui est administré à l'échelle locale. Nous offrons également des services d'urgence de garde d'enfants dans nos centres de soutien aux familles des forces armées partout au Canada, de même que plusieurs autres programmes familiaux qui fournissent ce genre d'aide.
Le sénateur Atkins: Où faut-il présenter les demandes de remboursement: au ministère des Anciens combattants ou au ministère de la Défense nationale?
Capt Siew: C'est au ministère de la Défense nationale. Il s'agit de nos propres programmes. Nous travaillons également en collaboration avec le ministère des Anciens combattants pour offrir des programmes améliorés aux familles des militaires blessés, surtout des programmes d'aide psychologique, parce que nous avons encore du travail à faire à ce niveau. C'est un des domaines que nous examinons actuellement.
Le sénateur Wiebe: Merci, monsieur le ministre, de votre comparution ici aujourd'hui. J'espère pouvoir glisser deux questions en une comme l'a fait le sénateur Banks qui lui en a glissées trois.
Ma première question vise en réalité à obtenir plus d'information pour le comité. C'est lié aux questions du sénateur Banks sur la définition de «de service». Pouvez-vous nous fournir la définition du ministère ou de la compagnie d'assurances de «de service»? Lorsque nous parlons de quitter la maison pour aller travailler, l'exemple fonctionne si un militaire habite hors de la base. Mais les membres des forces armées qui habitent avec leur famille sur la base? Est-ce que ces militaires sont de service 24 heures par jour? C'est le genre de distinction qui me fait espérer que nous pouvons trouver une définition.
Mon autre question porte sur quelque chose qu'a abordé le lieutenant-général Couture lors de sa comparution ici. Nous sommes très reconnaissants au ministre de nous assurer qu'il va examiner très sérieusement la question de la rétroactivité dans les cas de mutilation. Nous lui avons demandé si on avait une idée au ministère du nombre de militaires mutilés et licenciés, mais il a été incapable de nous répondre. Il a dit qu'au cours des dix ou douze dernières années, il y en avait peut-être eu 12 au total. Avez-vous une idée du nombre de tels cas?
M. McCallum: En ce qui concerne votre première question, monsieur le sénateur, il vaudrait peut-être mieux que nous vous répondions par écrit quant à la définition précise de «de service». J'ai posé la deuxième question moi-même plus d'une fois, mais je n'ai toujours pas de réponse. On travaille à trouver des données. D'après ce qu'on m'a dit, tout n'est pas super-informatisé et disponible au bout des doigts. Il faut du temps, peut-être même une collaboration avec les anciens combattants, pour réunir cette information.
Capt Siew: Je peux répondre à la question. En quittant la réunion de comité la semaine dernière, le général Couture a communiqué au ministère des Anciens combattants pour demander qu'on fasse les recherches et qu'on fournisse cette information. Le ministère y travaille. Les dossiers sont des dossiers papier et il faut les dépouiller manuellement. Nous tentons d'avoir une idée générale du nombre de dossiers.
Le sénateur Wiebe: Tous ces dossiers sont au ministère des Anciens combattants?
Capt Siew: Oui, c'est là qu'on trouve toute la documentation. Il faut également travailler avec le RARM, fouiller nos propres dossiers, pour nous assurer que nous avons le chiffre exact.
Le sénateur Wiebe: Je présume que la compagnie d'assurance a également certains de ces dossiers.
Capt Siew: Oui, et il nous faut également vérifier auprès de Maritime Life. Pour ce qui est des demandes en cas de mutilation, les chiffres de Maritime Life sont très limités parce que les critères d'admissibilité pour demander des prestations sont très stricts. Là encore, il faudrait que Maritime Life regarde ses documents, et M. Lemay peut peut- être vous parler des difficultés qu'éprouverait la compagnie.
M. Lemay: Nous avons les mêmes problèmes, monsieur le ministre; certains des dossiers ont été rangés. En fait, pour certaines années, nous n'en avons peut-être pas. Les employés travaillent de longues heures pour tenter de réunir les données le plus rapidement possible.
Lorsque nous aurons les données, nous allons les analyser et fournir la meilleure estimation possible au ministre.
Le sénateur Wiebe: Lorsque vous dites que ce n'est «pas disponible», j'espère que vous ne voulez pas dire qu'on a détruit les dossiers. Vous avez quand même des données?
M. Lemay: Si l'on remonte 25 ans en arrière, il est fort possible que certains dossiers aient été détruits. Je parle des dossiers de Maritime Life.
Le sénateur Smith: Merci, monsieur le ministre, de votre présence ici. J'aimerais également vous féliciter de votre leadership dans le contexte du budget. Pour citer Mao-Tsé-Toung, c'est un grand bond en avant. Il semble que ce n'est pas une mince affaire que d'obtenir une augmentation globale de 25 p. 100. Vous avez manifestement obtenu la moitié de l'augmentation liée à la santé, pas mal du tout. Nous sommes très heureux de ce qui est annoncé aujourd'hui et nous vous encourageons à continuer à examiner la question de la rétroactivité.
Je me suis joins au comité il y a six mois. Nous avons entendu de nombreux témoins et j'ai énormément de respect pour le travail que ce comité a fait. Je ne suis pas vraiment convaincu encore qu'il nous faut marquer un temps d'arrêt dans les affectations à l'étranger. Je suis en fait tout à fait en faveur de ces affectations. C'est la marque des forces militaires canadiennes depuis des décennies, cela fait partie de notre raison d'être.
Quand on a annoncé le déploiement en Afghanistan, dans les médias, certains se demandaient si nous en étions capables. Si on regarde ceux qui ont comparu devant ce comité, je n'ai toujours pas rencontré d'officier ou de soldat qui n'est pas tout à fait enthousiaste en ce qui concerne les missions de ce genre.
Lorsque nous étions à Edmonton à la base des Forces canadiennes il y a plusieurs semaines, nous avons été quelques-uns à déjeuner avec un type qui était à 100 mètres de la bombe qui a tragiquement tué quatre soldats canadiens. Toutefois, cela ne signifie pas qu'il ne veut pas retourner.
Vu les rumeurs, pouvez-vous nous dire comment vous évaluez et déterminez notre capacité à entreprendre des missions de cette envergure et nous dire jusqu'à quel point vous avez confiance que nous sommes capables d'assumer ce genre de mission?
M. McCallum: Merci beaucoup, monsieur le sénateur. Je suis un économiste. Ce que j'ai dit au sujet de la moitié des dépenses était juste, mais formulé avec beaucoup de soins. Nous avons la moitié des dépenses supplémentaires pour 2003-2004. Une grande partie du financement des soins de santé est un financement unique qui apparaît pour l'année en cours. Quand on regarde le premier exercice complet, le ministère de la Défense a reçu un milliard de dollars sur l'augmentation de quatre milliards.
Pour ce qui est d'un temps d'arrêt dans les affectations à l'étranger, rien à mon avis ne saurait mettre nos alliés plus mal à l'aise en ce qui concerne notre engagement. Je n'avais pas l'intention de soulever cette question, mais vous l'avez mentionnée.
En ce qui concerne l'Afghanistan, je reçois des avis de militaires sur ce qui est possible. Ou bien mes conseillers ou moi disons: «Et l'Afghanistan?» Alors je dirais peut-être: «Nous voudrons peut-être aller en Afghanistan. Veuillez me dire quelles sont nos capacités».
Quelques semaines avant d'annoncer notre participation, je savais quelle était notre capacité. C'était un plan militaire et c'est exactement ce que nous avons annoncé. Nous avons dit que nous envisagerions un quartier général de la brigade et un groupement tactique en Afghanistan pour deux périodes de six mois.
Il y a d'autres points que je pourrais peut-être souligner. Les forces armées sont une grande organisation et comme dans toute organisation de ce genre, il existe des divergences d'opinions sur ce que le gouvernement devrait faire dans tel ou tel cas. Et il serait surprenant et malheureux si tout le monde, dans les forces armées, étaient pareils et pensaient et voyaient de façon identique.
Nous trouvons des militaires qui sont, comme vous l'avez dit, extrêmement enthousiastes à l'idée de participer à la mission en Irak. Il y a une autre école de pensée de militaires qui préfèrent être en mission de combat.
La mission en Afghanistan est très dangereuse. C'est une région très instable. Ce n'est pas du tout facile; c'est extrêmement difficile, mais ce n'est pas du combat pur. Je n'ai jamais rencontré qui que ce soit dans les forces armées ou entendu qui que ce soit qui disait qu'il ne fallait pas aller en Afghanistan parce que c'est trop dangereux. Soit qu'on aime l'idée ou on dit: Parfait, mais nous préférons une zone de combat.
Bien que ces divergences d'opinions soient normales, tous les militaires comprennent et acceptent le principe que dans une démocratie, les forces armées présentent des options au gouvernement, mais c'est le gouvernement élu démocratiquement qui décide où envoyer les militaires. L'armée ne décide pas où envoyer l'armée, et personne dans les forces armées, du moins à ma connaissance, voit les choses différemment. Tous reconnaissent que dans une démocratie, le gouvernement prend cette décision fondée sur de bons conseils militaires. Voilà donc comment se passent les choses.
Le sénateur Forrestall: Je vais revenir à la question du sénateur Wiebe. Au fil des ans, j'ai vu par moi-même le genre d'anomalies qui peuvent se présenter.
Qu'est-ce qui arrive au simple soldat qui travaille comme bénévole pour le service d'incendie d'une région rurale et qui est blessé? Que se produit-il alors? Pouvez-vous faire faire une recherche à ce sujet? On nous a parlé de décisions différentes qui ne nous ont laissé que de nombreuses questions sur le sort des soldats qui se retrouvent dans cette situation.
Vous dites dans vos notes à la page 5, à l'avant-dernier paragraphe: «Par exemple, la direction générale effectue actuellement une étude approfondie des répercussions du rythme opérationnel sur nos membres et leurs familles».
Pouvez-vous nous en dire un peu plus long à ce sujet, parce que dans une grande mesure, c'est justement ce qui a poussé le comité du Sénat à proposer que l'on ramène la moitié de l'effectif au pays afin de permettre aux membres des forces armées de refaire connaissance avec leur famille et de parfaire leur formation.
Enfin, ce n'est pas un commentaire éditorial, mais j'aimerais dire que je me joins à tous les autres pour vous féliciter d'avoir répondu aussi vigoureusement et rapidement à l'affaire que nous examinons. Cela a augmenté la confiance, ce qui va donner à d'autres un appui que nous aurions dû leur offrir il y a longtemps. Cela aurait dû se faire dès le départ.
Cela dit, est-ce qu'il va nous falloir envoyer à la ferraille un navire de classe tribale pour trouver de l'argent? Où dans les crédits puis-je trouver le financement pour remplacer les hélicoptères embarqués — les Sea King? Avez-vous au bout des doigts le coût total de l'opération APOLLO?
Très sincèrement, je tiens à vous remercier de ce que vous avez fait pour les anciens combattants.
M. McCallum: Merci. Je vous remercie de vos aimables propos, sénateur. Je vais demander à mes collègues ici de répondre à certaines de vos questions, y compris celles sur le soldat qui travaille comme bénévole au service d'incendie. Le rythme opérationnel est clairement une des principales questions. Lorsque je suis devenu ministre et que j'ai entendu parler de l'écart dans le financement, le rythme opérationnel a pris beaucoup d'importance à mes yeux. Une de nos principales tâches consiste à régler cette question en nous fondant sur la justice, l'équité, l'efficience et l'efficacité. Pour ce qui est de cette étude en particulier, je vais demander à d'autres de vous répondre.
Quant au financement du remplacement du Sea King, je peux vous assurer que même avant hier, il y avait un financement adéquat de prévu dans le budget d'équipement. Maintenant on est passé de deux contrats à un seul — on parle parfois de «regroupage». Par conséquent, nous obtiendrons plus rapidement une décision, à un risque moindre et, peut-on l'espérer, à un coût moindre. Une fois la décision prise, nous connaîtrons le gagnant, on placera la commande et les hélicoptères seront livrés sur plusieurs années, pas trop j'espère. Nous avons prévu cette dépense et les fonds nécessaires sont prévus. Il y a même plus d'argent en banque depuis hier, mais auparavant, ce n'était pas un problème de payer pour remplacer ces hélicoptères.
En ce qui concerne le coût de l'opération APOLLO, je sais que nous avions 270 millions de dollars pour cette année pour couvrir plusieurs coûts prévus au budget. Je n'ai pas en tête le montant total de l'opération APOLLO depuis le début, mais je peux facilement vous obtenir ce chiffre.
Le sénateur Forrestall: Je voulais savoir si vous pensiez qu'il y avait suffisamment d'argent pour couvrir le coût.
M. McCallum: Voulez-vous dire à l'avenir?
Le sénateur Forrestall: À l'avenir et pour l'ensemble du projet.
M. McCallum: Est-ce que vous incluez la mission en Afghanistan? Est-ce de cela que vous parlez?
Le sénateur Forrestall: Je m'intéresse au roulement de personnel.
M. McCallum: Nous avons pris l'engagement de le faire. Nous le financerons, d'une façon ou d'une autre. Il n'y a pas le moindre doute. Il y avait une provision de 200 millions de dollars pour l'an prochain, une réserve pour éventualités qui servira à financer le déploiement que nous proposons en Afghanistan.
Je peux peut-être préciser que le déploiement en Afghanistan est réparti, grosso modo, moitié-moitié, entre cette année et l'an prochain, donc les 200 millions de dollars financeront environ la moitié de cette mission. Nous ne connaissons pas encore la nature exacte de la mission. Nous n'avons pas encore chiffré tous les coûts. Il y a eu des discussions, hier je crois, avec les collègues allemands et hollandais qui seraient peut-être nos partenaires ainsi que les Italiens, peut-être. J'ai parlé à mes homologues. Nous en sommes encore aux premières étapes. Nous disposons de sept mois avant que les personnes en place partent. Nous n'avons pas de chiffres précis, mais au moins on a annoncé hier une réserve partielle pour financer l'entreprise.
Le sénateur Forrestall: Je n'insisterai pas, si vous me dites que vous êtes à l'aise avec la situation actuelle.
M. McCallum: Nous allons peut-être marchander un petit peu, selon le coût, pour déterminer si c'est le ministère ou le centre qui paye. Cela se produit parfois. Par contre, d'une façon ou d'une autre, la chose se fera.
M. Lemay: Je peux peut-être répondre à votre première question. Je présume que dans ce scénario, vous parlez de quelqu'un qui ne serait pas de service. C'est justement la raison d'être du RARM. Il s'agit d'une assurance pour les blessures ou la mort non liées au service. Une personne dans cette situation aurait une couverture complète aux termes de l'assurance-invalidité de longue durée et l'assurance-mutilation du RARM. J'aimerais rappeler aux sénateurs que le régime d'assurance principal pour le personnel des Forces canadiennes blessé ou tué en service ou en fonction, c'est la Loi sur la pension de retraite. Peut-être me permettriez-vous de vous suggérer de faire venir quelqu'un du ministère des Anciens combattants pour vous fournir de l'information sur les prestations offertes dans le cas des blessures ou du décès lorsqu'on est de service.
Le sénateur Forrestall: Voilà le diable et l'ange. Je sais ce que vous voulez dire, et je sais ce que nous voulons entendre. C'est à vous, monsieur le ministre, de tirer cela au clair. À un moment donné, les règles d'engagement entre le civil et le militaire ont changé. À l'époque, si on se joignait aux forces armées, on était de service, un point c'est tout. On était en disponibilité 24 heures sur 24, 365 jours par année. Ça c'est votre revers de la médaille. L'argument du diable c'est: «Je ne veux pas payer si ce n'est pas nécessaire, et si je peux trouver une façon de refuser, c'est ce que je vais faire». Votre point de vue est un peu différent. Payez les prestations et qu'on n'en parle plus. Monsieur le ministre, vous faites les choses comme il se doit.
Capt. Siew: Nous avons une étude en cours sur le rythme opérationnel. Nous utilisons l'expression «PERSTEMPO» pour parler de la fréquence de déploiement du personnel. Il s'agit du temps lorsqu'on est loin de chez soi. Comme nous l'avons dit, il ne s'agit pas simplement de l'incidence d'un déploiement en situation de mission, mais également de la formation collective — la formation nécessaire avant le déploiement et les exercices auxquels participent les membres des forces armées. Il s'agit du temps de service temporaire et des cours de formation. Ce sont toutes les affectations loin de chez soi.
Nous examinons également l'incidence sur la charge de travail de ceux qui restent là, parce que lorsque des membres des forces armées partent en mission, suivent des cours ou participent à des exercices, quelqu'un continue à faire le travail qui doit être fait. Cela peut avoir une grande incidence sur ces personnes. C'est ce que nous avons vu dans plusieurs groupes cibles.
Cette recherche se divise en deux parties. Il y a la partie qualitative, et nous faisons appel à plusieurs groupes cibles. En fait, nous avons fait 200 groupes cibles dans trois environnements ainsi que dans tous les sites de déploiement afin de comprendre et de voir qu'est-ce qui est en cause. Nous préparons maintenant une série d'instruments d'enquête quantitatifs de façon à réunir les données et à vraiment comprendre le niveau des répercussions. Nos données étaient empiriques et il nous faut maintenant aborder les choses d'un point de vue scientifique. Participeront au sondage les membres des forces armées ici au Canada, tous ceux qui sont en déploiement, les membres des familles, les professionnels des soins de santé et d'anciens militaires. Cela nous donnera un aperçu réel de l'incidence de PERSTEMPO et ensuite nous analyserons notre politique et nos programmes actuels pour voir s'ils sont satisfaisants pour répondre aux besoins des membres et de leurs familles.
Le président: Et quel est le calendrier prévu?
Capt Siew: En fait, le premier des deux instruments est déjà mis au point. Nous espérons terminer d'ici décembre l'analyse et le rapport concernant les membres des forces armées déployés et ceux qui restent. Ensuite, nous voulons sonder les familles dès l'automne.
Le président: Et les résultats seront publics?
Capt Siew: Bien sûr.
M. McCallum: Ce qui m'embête dans les forces armées, c'est leur manie d'utiliser des centaines, voire des milliers de sigles qu'il faut apprendre.
Le président: C'est ce que nous avons constaté.
M. McCallum: Prenez PERSTEMPO: cela veut dire la fréquence du déploiement du personnel. D'ailleurs, chaque fois que j'entends quelqu'un utiliser un sigle, je lui demande ce qu'il signifie, et une fois sur cinq, on ne peut pas me répondre. Cela me réjouit chaque fois.
Le président: Vous voudrez peut-être faire comme nous et imposer 25 cents d'amende à quiconque utilise un sigle sans l'expliquer. Celui-là, je ne l'ai pas vu venir. Je pensais que c'était quelque chose qui avait à voir avec les femmes.
Le sénateur Cordy: Merci, monsieur le ministre, d'avoir pris le temps de comparaître aujourd'hui. Je veux moi aussi vous féliciter d'avoir reçu le quart de ce que promet le budget. Cela n'a certainement pas dû être facile, et j'imagine que vous y avez travaillé fort et avez dû vous montrer persuasif. Comme je siège également au comité sénatorial qui étudie les soins de santé, le budget d'aujourd'hui m'a doublement réjoui.
Je vous félicite aussi de la combativité dont vous avez fait preuve dans le dossier de l'indemnisation des membres des forces armées ayant subi une mutilation accidentelle. Vous démontrez aussi beaucoup de respect non seulement à l'égard des membres des forces armées, mais particulièrement à l'égard des anciens combattants, et je vous en remercie.
Je sais que vous vous penchez maintenant sur la question de la rétroactivité. Où en êtes-vous dans votre étude? Croyez-le ou non, vous avez réussi à faire bouger les choses assez rapidement pour le gouvernement. Savez-vous combien il en coûterait au gouvernement d'effectuer des versements forfaitaires aux membres des forces armées dont le rang est inférieur au rang de colonel?
M. McCallum: C'est justement ce que nous essayons de déterminer. Mais à vrai dire, nous n'en savons rien. Il y a deux choses à établir. En premier lieu, il faut savoir à combien de gens cela pourrait s'appliquer, et on vous a expliqué combien ce serait difficile à établir. Mais nous y parviendrons, même si cela prend du temps.
En second lieu, il faut établir ce qui est arrivé dans chacun des cas. La responsabilité financière dépend de la nature de l'accident. Je ne puis donc pas vous répondre pour l'instant, car nous ne savons rien des cas.
Le sénateur Cordy: Ce sera tout un défi de colliger cette information.
M. McCallum: Oui, mais nous sommes en train de la recueillir et nous le ferons le plus rapidement possible, pour vous en faire part.
Le sénateur Cordy: Vous avez parlé plus tôt de la qualité de la vie et félicité votre prédécesseur d'avoir mis ce dossier en vedette. Nous-mêmes avons été témoins de changements au cours de nos visites des bases militaires au Canada. Au début des années 70, ma belle-soeur a ouvert un centre pour les femmes. Aujourd'hui, on parlerait plutôt d'un centre pour conjoints ou partenaires. Or, ce premier centre qu'elle a ouvert était situé dans un appartement vide. Pour m'être rendu il y a quelques semaines à Edmonton pour visiter le centre de ressources familiales, je puis vous confirmer que les choses ont beaucoup changé. J'en félicite le ministère, vous-même et votre prédécesseur.
Le stress opérationnel est une blessure qui pose tout un défi à diagnostiquer, même si nous en sommes beaucoup plus conscients aujourd'hui. Ce sera peut-être plus difficile pour les anciens combattants qui en ont souffert, car ils ne font peut-être plus partie d'un groupe de pairs qui pourraient les aider à s'en sortir. Je sais que cette initiative vient d'être lancée, mais que faites-vous pour aider les anciens combattants qui pourraient avoir été victimes du stress opérationnel et pour les aider à s'en sortir?
M. McCallum: Parlez-vous du SSPT?
Le sénateur Cordy: Oui.
Le président: Pardon, monsieur le ministre, mais je vous demanderais de nous expliquer ce sigle, à moins que vous ne vouliez verser 25 cents.
M. McCallum: Il s'agit du syndrome de stress post-traumatique, et vous voyez que je tombe moi-même dans ce piège. Ce sont les risques du métier.
Je dois de nouveau rendre hommage à mon prédécesseur à cet égard, puisque le plus gros du travail a été effectué pendant son mandat. Nous avons déployé beaucoup d'efforts et certaines ressources en ouvrant des centres dans lesquels un travailleur social ou d'autres professionnels rencontrent les individus avant qu'ils partent en mission et à leur retour de celle-ci. Nous avons d'ailleurs fait preuve d'innovation au retour de nos soldats d'Afghanistan, en les envoyant passer quelques jours à Guam pour qu'ils s'adaptent à la vie normale.
Mon homologue britannique m'a d'ailleurs pressenti à ce sujet, car il voulait savoir comment nous faisions. Il semble que plusieurs pays offrent des services et que nous soyons, du moins à certains égards, parmi les chefs de file. Il y a également le problème d'ajustement culturel. En effet, auparavant, on réagissait de façon très négative devant les soldats qui avaient ces problèmes. Mais aujourd'hui, l'état-major des Forces canadiennes réagit et prend des mesures très positives. C'est d'ailleurs ce qui se passe de plus en plus chez le personnel subalterne. Mais on peut parler d'une évolution générationnelle, dans une certaine mesure, ce qui explique que les attitudes ne changeront pas du jour au lendemain. Mais je constate qu'il y a eu de grandes améliorations depuis quelques années.
Capt Siew: Nous avons mis sur pied et continuons à organiser plusieurs programmes précis. D'ailleurs, nous travaillons de concert avec le ministère des Anciens combattants pour faire en sorte que tous ces programmes soient offerts aux membres encore actifs et aux anciens combattants qui ont quitté les forces armées. Nous voulons être sûrs que les soins sont disponibles, au fur et à mesure que les membres des forces armées quittent l'armée pour retourner à la vie civile. Les services de soutien social et opérationnel des centres de traumatologie comptent des médecins tout autant que des réseaux de soutien des pairs, et ces centres sont répartis un peu partout dans le pays et ouverts aux anciens combattants ou aux membres des forces armées qui partent à la retraite.
Nous sommes en train de proposer dans nos propres installations médicales des entrevues individuelles entre les conseillers des Affaires des anciens combattants, d'une part, et nos membres qui sont libérés, d'autre part. C'est ainsi que, s'ils ont besoin de services de soutien supplémentaires, nous pouvons les aider en leur offrant les programmes qu'il leur faut.
Le sénateur Cordy: Les anciens combattants connaissent-ils l'existence des centres de traumatologie qui offrent du soutien social, par exemple? Lorsque vos gens sont libérés des forces armées, les informe-t-on des services qui leur sont offerts? Cherche-t-on à communiquer avec ceux qui ont déjà été libérés?
Capt Siew: Le ministère des Anciens combattants a un vaste programme de communication, et nous travaillerons de concert avec lui pour faire en sorte que toute l'information sur ces programmes soit distribuée à tous les anciens combattants, en même temps que nous contactons de façon active ceux qui ne sont pas nécessairement des clients du ministère des Anciens combattants.
Le sénateur Stratton: Je remercie le ministre d'avoir comparu et je le félicite de ce qu'il a accompli dans le budget. Il était grand temps, et nous partons enfin du bon pied. Mais vous savez certainement mieux que moi qu'il reste encore beaucoup à faire.
J'aimerais aussi remercier les parlementaires de notre parti, et particulièrement Elsie Wayne, qui ont fait un travail phénoménal pour aider les blessés des forces armées. De plus, cela fait déjà plusieurs années que le sénateur Forrestall se dévoue pour la Défense nationale et les Forces canadiennes. Nous leur devons une fière chandelle à tous deux.
Ma question est fort simple et vous y avez certainement songé à titre d'économiste. Si nous adoptons cette nouvelle politique à l'égard de nos gradés dont le rang est inférieur à celui de colonel, qu'arrivera-t-il dans le cas d'une guerre régionale qui ferait de nombreux blessés? J'imagine que vous vous êtes demandé quelle serait la répercussion à long terme sur vos budgets. Ne serait-il pas logique pour vous de vous poser la question?
M. McCallum: Comme on le dit dans les Maritimes, nous sommes des âmes soeurs, Elsie Wayne et moi-même, dans notre appui à la Défense nationale. Tout juste avant le discours du budget, j'ai d'ailleurs appelé Mme Wayne et les autres porte-parole des partis de l'opposition pour les remercier de leur appui. Nous ne sommes pas toujours du même avis, mais nous avons toujours travaillé de concert pour défendre la cause des Forces canadiennes.
En bref, dans l'éventualité d'une guerre, l'assurance-mutilation deviendrait la responsabilité du gouvernement. Toutefois, dans une telle éventualité, ce serait probablement la responsabilité financière la moins importante du gouvernement. Je ne sais pas au juste ce que l'on pourrait étudier. La responsabilité financière serait égale au nombre de personnes touchées multiplié par le coût par personne. Nous avons plusieurs scénarios que nous examinons, mais je pense que c'est un risque que le gouvernement est prêt à assumer.
Le sénateur Stratton: Je vous remercie. Je voulais m'assurer que ceux qui participent à une guerre régionale où le nombre de blessés est considérable sont protégés et c'est bien ce qu'indiquera le compte rendu.
Le sénateur Wiebe: Monsieur le ministre, l'une des premières conversations que nous avons eues, vous et moi, lorsque vous êtes devenu ministre de la Défense, portait sur un sujet qui m'intéresse tout particulièrement, les réserves. Nous avons eu une excellente discussion.
Ce matin, alors que je terminais mon petit-déjeuner avec une deuxième tasse de café, j'ai mis la télévision au canal CTV. J'ai vu notre ministre de la Défense qui prenait son petit-déjeuner au centre-ville avec un des animateurs de CTV. J'ai été très encouragé d'entendre ce que vous aviez à dire.
Au cours de cette entrevue, vous avez dit qu'une partie de l'augmentation annoncée dans le budget d'hier serait consacrée aux réserves au Canada. Êtes-vous en mesure de nous en dire plus long à ce sujet?
M. McCallum: Monsieur le sénateur, je me souviens que nous avons discuté des réserves. Je n'annonce rien maintenant. Toutefois, cela fait plusieurs mois que je dis que je considère que les réserves sont une très grande priorité. Je le pensais avant le 11 septembre 2001. Maintenant, leur priorité est encore plus grande. Les réserves pourraient jouer un rôle important dans la défense du pays puisque ces effectifs sont répartis partout au pays, contrairement aux forces régulières qui sont stationnées à des points plus précis. J'ai certainement mentionné de faire quelque chose au niveau du financement des réserves si nous touchions une augmentation du budget. C'est maintenant le cas et je vais faire quelque chose. Toutefois, je ne suis pas disposé à dire exactement ce qui sera fait encore, car nous devons voir. Le budget n'a été déposé qu'hier. Dans un proche avenir, je vais annoncer plus officiellement quelque chose qui vous fera plaisir.
Le sénateur Wiebe: Au nom de tous les réservistes au Canada, permettez-moi de profiter de l'occasion pour vous remercier à l'avance. Merci.
Le sénateur Atkins: Monsieur le ministre, tous les membres du comité, comme vous le savez, se sont rendus dans les différentes bases militaires un peu partout au pays. Un sujet qui est constamment revenu, c'était la pénurie de personnel militaire dans la plupart des unités et la pénurie de cadres qualifiés pour former le personnel. Pouvez-vous nous dire ce que vous considérez être la nombre approprié de militaires alors que nous nous préparons à vivre une époque dangereuse?
M. McCallum: Tout d'abord, permettez-moi de dire que vous avez cerné deux questions essentielles qui exigent un financement accru. D'abord, il y a la formation. Nous avons remporté beaucoup de succès au niveau du recrutement sur une grande échelle. Nous avons recruté environ 10 000 personnes en une année. Toutefois, nous n'avons pas le personnel pour former ces nouvelles recrues. Ce serait très décourageant, à mon avis, pour une recrue de devoir attendre à rien faire que la formation commence.
J'ai dit qu'il y avait des tensions dans le système et qu'il faut que l'argent continue à nous être versé. L'un des points de tension, c'est la formation. Nous allons trouver une solution.
La deuxième chose que vous avez mentionnée et que nous allons régler aussi, c'est la pénurie de gens de métier dans des domaines spécialisés, qu'il s'agisse de pilotes, de mécaniciens, d'ingénieurs, etc. Ce problème n'est pas unique aux forces militaires. Au risque d'avoir l'air partisan, sénateur Forrestall, lorsqu'une économie crée plus de 500 000 emplois en une seule année dans un secteur, ce n'est pas mauvais. Toutefois, il nous faut être plus actif dans nos tentatives d'attirer et de garder ces gens. Vous avez mentionné deux choses et je partage tout à fait votre avis à ce sujet.
Le sénateur Atkins: Le nombre de militaires se chiffre-t-il encore à 60 000 ou leur nombre est-il encore plus élevé?
M. McCallum: Tel qu'indiqué dans le budget, nous avons promis d'effectuer un examen de la défense. Pour le moment, le chiffre de 60 000 ne change pas. À l'heure actuelle, il y a environ 60 000 militaires, dont seulement 52 000 sont formés et qui constituent donc notre force réelle.
Enfin, la technologie évolue rapidement. Les forces armées entendent profiter des changements technologiques de façon générale. Nous avons actuellement un projet en ce sens. La marine et la force de l'air profiteront également du progrès technologique. C'est très important pour moi. Nous voulons décloisonner l'information, la communication et les renseignements, pour créer un guichet unique accessible à tous, c'est-à-dire aux militaires se trouvant en mission et ceux travaillant au quartier général. Cela signifie, entre autres, que les forces militaires de l'avenir — l'armée a une vision claire de ce qu'elle veut être un jour — se concentrent davantage sur les connaissances que sur la force brute. Les opérations seront plus précises et basées sur l'information. Cela ne signifie pas nécessairement qu'on aura besoin de plus de personnel, mais plutôt qu'on pourra en faire davantage avec le même nombre de gens. Bref, la réponse à votre question est que nous ne prévoyons pas à ce stade-ci changer le chiffre de 60 000.
Le sénateur Banks: Monsieur le ministre, mercredi dernier, le 12 février, nous avons posé une question à Maritime Life au sujet de la soutenabilité, la certitude et la confiance envers le RARM. Les actuaires nous ont envoyé une réponse nous informant qu'à l'heure actuelle, le fonds d'invalidité de longue durée est bien financé, mais que cela pourra changer si la tendance au niveau des expériences de morbidité démontre que le fonds ne pourra pas couvrir les prestations qui devront être versées à l'avenir. Eh bien, oui. Si vous vous trompez dans vos calculs, vous serez à court d'argent. Je présume, dans le pire scénario, c'est-à-dire le scénario qu'on a évoqué où le RARM doit verser encore plus de prestations — et vous avez parlé d'autres cas — que vous trouverez les moyens de respecter ces obligations. Est-ce exact?
M. McCallum: Je ne suis pas au courant des détails de cette affaire, mais je vous répondrai en deux temps. En premier lieu, il incombe au gouvernement de ne pas assumer, au nom des contribuables, une responsabilité qui revient à une autre partie.
En second lieu, nous avons une obligation envers les membres des forces armées. Voilà ma réponse à votre question.
Le président: J'aimerais conclure avec quelques observations, monsieur le ministre. D'abord, il y a la question de la rétroactivité. Merci d'avoir accepté de l'examiner de plus près pour voir s'il y avait une solution. Nous avons demandé un rapport, dont vous pouvez sans doute aussi vous servir, le 12 février, si je ne m'abuse, pour connaître l'ordre de grandeur. Est-ce que je peux vous le remettre et pourriez-vous nous le remettre d'ici le 14 mars, ce qui vous donnerait plus de quatre semaines à partir de la date demandée? Nous nous réunirons le 19 mars pour étudier l'ébauche de rapport. Nous apprécierions le recevoir d'ici là, et même si toutes les questions ne sont pas réglées, cela nous donnerait une bonne idée de la chose et nous serait utile.
J'aimerais juste ajouter une observation à ce que le sénateur Wiebe a dit au sujet des réserves. Vous avez répondu à sa question, mais j'aimerais noter que la plainte qui revient sans cesse concerne les procédures internes. Cela a trait à des procédures administratives internes, comme le traitement des dossiers des candidats. La procédure administrative est tellement longue qu'une fois terminée, c'est l'été et les candidats sont partis ailleurs. Voilà le problème qui se pose à ceux qui veulent passer des forces régulières aux réserves ou vice versa. On doit repêcher les dossiers d'anciens pilotes des forces de l'air qui sont partis travailler dans le secteur privé lorsqu'ils atteignaient des sommets, pour ainsi dire, mais qui veulent réintégrer les forces armées. Ou bien les dossiers demeurent introuvables, ou bien on les trouve après six mois. C'est tout simplement incompréhensible. Monsieur le ministre, si les témoignages que nous avons entendus s'avèrent exacts, je suis sûr que vous voudrez enquêter. Voilà où en sont les choses.
Le sénateur Forrestall: Je crois que c'est une bonne idée de ressusciter le Halifax Rifles au cas où il y aurait des problèmes de sécurité intérieure dans les Maritimes.
Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre, pour votre patience, votre témoignage et vos remarques encourageantes envers nous.
Voilà qui conclut notre étude sur le RARM — acronyme que nous avons suffisamment expliqué — et les prestations auxquelles ont droit les membres des Forces canadiennes qui ont subi une mutilation lorsqu'ils étaient en mission.
À tous nos auditeurs, je vous avise que la prochaine réunion du sous-comité aura lieu le mercredi, 26 février, et nos témoins seront des représentants des ministères de la Défense et des Anciens combattants. On discutera du syndrome de stress post-traumatique.
Monsieur le ministre, nous espérons produire un rapport sur ce sujet bientôt.
Si vous avez des questions ou des commentaires au sujet de ces audiences, veuillez visiter notre site Web à WWW.SEN.CA\VETSCOM. ASB.
Vous pourrez y lire les témoignages de nos témoins et y trouver l'horaire de nos réunions. Sinon, vous pouvez communiquer avec le greffier du comité en composant 1-800-267-7362.
La séance est levée.