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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts


Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 10 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 11 mai 2004

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 17 h 50 pour étudier les questions liées au développement et à la commercialisation de produits agricoles, agroalimentaires et forestiers à valeur ajoutée sur les marchés national et international.

Le sénateur Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président: Honorables sénateurs, laissez-moi d'abord vous souhaiter la bienvenue, chers collègues, ainsi qu'à nos observateurs. Je voudrais également souhaiter la bienvenue aux Canadiens et aux Canadiennes qui nous écoutent sur Internet.

Aujourd'hui, nous continuons notre étude sur les questions liées au développement et à la mise en marchés, au Canada et à l'étranger, de produits agricoles, agroalimentaires et de foresterie à valeur ajoutée.

[Traduction]

Ces dernières semaines, honorables sénateurs, nous avons entendu différents témoins qui nous ont expliqué les questions liées au développement et à la commercialisation de produits agricoles, agroalimentaires et forestiers à valeur ajoutée. Ce soir, nous avons invité l'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario à nous présenter un aperçu des problèmes auxquels l'industrie se heurte en ce qui concerne les débouchés pour les produits à valeur ajoutée des agriculteurs.

M. Mark Wheeler comparaît au nom de l'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario; il est le président sortant de l'association et il fait actuellement partie de son conseil d'administration. M. Wheeler exploite aussi la Wheeler Sugar Bush, une des plus grandes érablières de l'est de l'Ontario, dans le comté de Lanark, avec 13 500 entailles.

J'invite maintenant M. Wheeler à faire son exposé.

M. Mark Wheeler, membre du conseil d'administration de l'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario: Je voudrais vous présenter mon collègue, Don Dodds, président provincial du Comité de recherche et de transfert technologique de notre association. Il est aussi acériculteur dans le comté de Lanark. J'ai préparé quelques notes pour lancer la discussion.

Quand on pense au Canada, on pense aux vastes espaces sauvages, aux policiers de la Gendarmerie royale du Canada, au castor et au sirop d'érable. C'est d'ailleurs la feuille de l'Acer saccharum ou de l'érable à sucre qui figure sur notre drapeau. L'idée selon laquelle le sirop d'érable est un produit typiquement canadien est parfaitement justifiée. Le sirop d'érable ne peut être produit que dans le nord-est des États-Unis ou le sud-est du Canada. Le Canada est, de loin, un des chefs de file du monde entier pour tout ce qui concerne le sirop d'érable, des exportations jusqu'à la production. En 1998, le Canada a produit 82 p. 100 du sirop d'érable du monde entier, le reste de la production provenant des États-Unis.

En Ontario, environ 2 200 acériculteurs entaillent plus de 1,2 million d'érables, leurs revenus dépassant 12 millions de dollars par année. Lorsqu'en 1921, l'industrie acéricole était à son zénith, les acériculteurs ontariens ont entaillé plus de 3 millions d'érables situés dans près de 20 000 exploitations — par opposition à 1,2 million d'érables actuellement. La canne à sucre de même que l'urbanisation de la société canadienne sont les principaux facteurs expliquant la baisse actuelle. Cela dit, il y a encore plus de 3 millions — certains diront près de 12 millions — d'entailles possibles en Ontario. En cette époque où la gestion durable des forêts et l'aménagement sensé du territoire agricole sont importants, l'acériculture est un excellent exemple d'activité économique respectueuse de l'environnement.

Lorsque des acériculteurs parlent entre eux de valeur ajoutée à un produit, on suppose qu'ils parlent de produits purs qu'ils obtiennent traditionnellement en faisant bouillir davantage le sirop d'érable jusqu'à ce qu'il se transforme en sucre d'érable pur, en beurre d'érable pur, en sucre granulé pur ou en tire d'érable pure. Cela se fait habituellement sur le lieu de l'exploitation et cela confère une modeste valeur ajoutée au litre de sirop d'érable.

Ces dernières années, les produits à valeur ajoutée comprennent aussi la barbe à papa à l'érable, la gelée à l'érable, la promotion de recettes nécessitant des produits de l'érable et d'autres efforts de commercialisation créatifs. Les ventes de produits de l'érable au détail ou à la ferme accroissent considérablement la marge bénéficiaire d'un producteur. À titre d'exemple, mentionnons les ventes sur Internet et celles issues de la commercialisation directe, les produits vendus lors des marchés fermiers et des foires agricoles, ainsi que le marché des cadeaux d'entreprise. Qui plus est, la présence du sirop d'érable dans la vie des Canadiens et l'odeur sucrée du sirop d'érable frais, au printemps, attirent des centaines de milliers de personnes qui vont dans les cabanes à sucre locales pour goûter au sirop d'érable et peut-être même se régaler de crêpes.

Dans la plupart des cas, la production de sirop d'érable en Ontario procure un revenu supplémentaire qui s'ajoute à ceux d'une autre activité agricole principale. Seules une poignée d'exploitations agricoles en Ontario tirent la majeure partie de leurs revenus de leur production acéricole. En Ontario, l'exploitation acéricole moyenne est de la taille d'une ferme d'agrément et elle compte 200 entailles. Parce que de nombreuses exploitations sont à petite échelle, elle ne peuvent consacrer qu'un montant limité aux dépenses visant des programmes de contrôle de la qualité comme l'analyse des risques et maîtrise des points critiques ou HACCP, l'amélioration du matériel, la publicité et des services de commercialisation professionnels. La recherche liée à l'acériculture se limite à des projets financés par le gouvernement et à d'autres projets d'envergure modeste menés par de petits groupes d'agriculteurs réunis en coopératives.

Quelques agriculteurs de l'Ontario ont une production assez importante pour pouvoir rentabiliser le fait de s'occuper eux-mêmes de l'exportation de leur produit. Dans la plupart des cas, les acériculteurs vendent leur sirop en vrac, à de grands producteurs, pour un prix bien moins élevé que ce qu'ils obtiendraient en le vendant au détail. Certains acériculteurs qui ont déjà vendu de petites quantités de sirop aux États-Unis ont cessé de le faire à cause de la multiplication des tracasseries administratives qu'occasionne pour eux la nouvelle loi américaine sur le bioterrorisme.

Je serai heureux de répondre à vos questions.

Le président: C'était fort intéressant. Je vous remercie beaucoup.

Lorsque je vais étudier le français au Québec, au printemps, nous allons habituellement à une cabane à sucre où nous pouvons acheter de la tire et divers produits de l'érable. La vente au détail est un volet important de ce secteur d'activité. Deux choses que vous avez mentionnées m'ont intéressé. J'aimerais tout d'abord que vous expliquiez pourquoi la loi américaine de 2002 sur le bioterrorisme a modifié vos activités commerciales. Deuxièmement, je voudrais savoir en quoi les ventes de produits de l'érable augmentent considérablement la marge bénéficiaire du producteur. Comment et dans quelle mesure? Pouvez-vous expliquer cela?

M. Wheeler: La nouvelle loi a eu surtout eu des répercussions sur les petits producteurs — par petits, je veux dire ceux dont les ventes sont inférieures à 1 000 $ par mois. En raison de la loi, il y a des frais de courtage supplémentaires et des coûts à payer pour avoir un agent aux États-Unis. Il y a de nouveaux règlements et des honoraires supplémentaires. Enfin, le sirop d'érable est un produit lourd et il coûte cher à expédier. À cause de tous ces facteurs combinés, on ne peut plus vendre le produit à un prix raisonnable.

Il y a aussi le prix de vente au détail. Ainsi, un contenant de quatre litres de sirop d'érable se vendrait environ 50 $ au détail. Si on emballe le sirop dans des contenants plus petits destinés aux produits spéciaux, on peut obtenir de 120 $ à 150 $ pour quatre litres de sirop. Lorsque le sirop est écoulé sur le marché du vrac, il est vendu à la livre, et le prix cette année était d'environ 20 $ pour quatre litres.

Le président: Vous voulez dire que, pour la même quantité, soit quatre litres, au lieu d'obtenir 50 $ vous en obtenez à peu près la moitié, c'est bien cela?

M. Wheeler: Exactement. On obtient 50 $ pour du sirop vendu dans un contenant de quatre litres, et environ 20 $ à 25 $ s'il est vendu dans des contenants de 35 gallons.

Le président: Dans votre entreprise, avez-vous un point de vente au détail? Vendez-vous le sirop et le sucre d'érable à ce point de vente?

M. Wheeler: Oui.

Le président: Vous ajoutez la valeur au produit sur les lieux de votre exploitation?

M. Wheeler: Oui. La tempête de verglas a eu d'énormes répercussions, elle a beaucoup nui à la production et nous a forcés à bien diversifier nos activités. J'ai diversifié celles de mon entreprise en proposant des repas de crêpes, une dégustation de tire sur la neige et des sentiers d'interprétation dans l'érablière, de manière à sensibiliser davantage les visiteurs à la forêt.

Le président: Dans tout ce que vous faites pour accroître la valeur de votre production, qu'est-ce qui vous permet de réaliser vos bénéfices les plus importants?

M. Wheeler: Les crêpes amènent les gens à acheter notre sirop. Les ventes de sirop d'érable sont ce qui rapporte le plus, car les gens achètent du sirop lorsqu'ils mangent des crêpes. Ils peuvent voir tout le processus de fabrication du sirop, ils peuvent en manger sur leurs crêpes et en rapporter à la maison pour leur famille et leurs amis.

Le président: Votre exploitation fonctionne-t-elle 12 mois pas année?

M. Wheeler: Oui. À ma connaissance, notre établissement est le seul en Ontario à fonctionner à longueur d'année. Comme il est situé à proximité de la capitale nationale, à environ une heure d'Ottawa, nous avons un assez bon achalandage touristique pendant toute l'année. Nous gardons nos sentiers et notre restaurant ouverts et nous sommes en mesure de vendre notre sirop au détail toute l'année durant.

Le sénateur Fairbairn: Je crois pouvoir dire que, lorsque nous voyageons partout dans le monde, nous apportons dans nos bagages quelques gâteries à base de sirop d'érable. Elles sont grandement appréciées où que nous allions. Vous avez dit que 82 p. 100 de la production mondiale de sirop d'érable vient du Canada et que c'est donc un produit vraiment unique. Pourriez-vous nous dire quels pays achètent 82 p. 100 de notre production?

M. Wheeler: Les États-Unis sont nettement le plus grand importateur de sirop d'érable du Canada; viennent ensuite les pays côtiers du Pacifique — le Japon et Taïwan; et au troisième rang, on trouve le Danemark et l'Allemagne, où les ventes connaissent une croissance rapide. Ce sont là les principaux importateurs.

Le sénateur Fairbairn: Votre entreprise se joint-elle à d'autres pour ce qui est de la promotion commerciale à l'étranger ou s'organise-t-elle toute seule?

M. Don Dodds, président, Comité de recherche et de transfert technologique, Association des producteurs acéricoles de l'Ontario: Plus de 80 p. 100 du sirop qui est consommé en Ontario est importé du Québec. Nous ne nous joignons à personne, parce que notre marché est ici. Nous n'avons qu'à acheminer le produit sur le marché.

Le sénateur Fairbairn: Vous importez du sirop du Québec?

M. Dodds: Oui. Les consommateurs ontariens en achètent. De tout le sirop qui est consommé en Ontario, 80 p. 100 vient du Québec.

Le sénateur Fairbairn: Pourquoi ne vient-il pas de l'Ontario?

M. Dodds: Nous ne suffisons pas à la demande.

Le sénateur Fairbairn: Vous avez dit que la canne à sucre et l'urbanisation de la société canadienne sont les principaux facteurs à l'origine de la réduction du nombre d'entailles. Est-ce à dire que les érablières sont progressivement subdivisées?

M. Wheeler: Oui, dans une certaine mesure. En fait, chaque exploitation agricole du sud de l'Ontario et du sud du Québec avait son érablière. Ces arbres sont toujours là, le long des routes.

Le sénateur Fairbairn: Les agriculteurs, eux, n'y sont plus.

M. Wheeler: Ils sont occupés à faire autre chose et ils se spécialisent dans d'autres secteurs de l'agriculture. Faire du sirop d'érable, c'est beaucoup de travail.

M. Dodds: Comme j'ai un peu de cheveux blancs, je me souviens des origines de tout cela. J'ai commencé à aller à l'école au début des années 40. Tous les agriculteurs le long du chemin que j'empruntais pour me rendre à l'école tiraient du sirop d'érable leurs approvisionnements en sucre. Ils transformaient le sirop en bloc de sucre; c'est ce qu'on préférait dans notre région parce que le bloc de sucre était non périssable. C'était la seule façon de conserver cette denrée. Ils râpaient le bloc de sucre d'érable pour en saupoudrer leur gruau et d'autres aliments.

De nos jours, la société a évolué: les maris et les femmes travaillent et ils n'ont plus le temps d'entailler les érables. Il y a, en Ontario, 12 millions d'érables qui attendent d'être entaillés.

Le sénateur Fairbairn: Monsieur Wheeler, vous avez parlé de la tempête de verglas. À quel point a-t-elle été dévastatrice pour les érablières? Si l'on se fie aux statistiques, ce fut un événement terrifiant et destructeur. Jusqu'à quel point cela a-t-il été dévastateur pour les érablières?

M. Wheeler: Dans notre exploitation, immédiatement après la tempête de verglas, nous avons dû réduire le nombre d'entailles à cause du stress causé aux arbres, et notre production a donc diminué de 50 p. 100. Six ans plus tard, nous continuons de retirer de l'érablière des arbres qui meurent encore des suites des traumatismes subis lors de la tempête de verglas. Les effets se font encore sentir, et les arbres du comté de Lanark et des environs sont parmi ceux qui ont été le plus endommagés. Je pense être prudent en disant que le nombre d'entailles a baissé de 30 à 40 p. 100.

Le sénateur Fairbairn: Je voulais entendre votre réponse parce que, cette année, au début de l'hiver, j'ai été très étonnée de constater à quel point il était difficile de trouver du bois de chauffage à vendre. Les gens se sont demandé pourquoi il y avait si peu de bois de chauffage alors disponible. J'imagine que c'est parce que la tempête de verglas a détruit énormément d'arbres et que les jeunes arbres ne sont pas encore assez grands pour être coupés. Pareille tempête a des effets à long terme sur les industries tributaires des forêts.

M. Wheeler: Absolument. Je vends un peu de bois de chauffage comme activité parallèle. Nous coupons et fendons du bois de chauffage pour nos clients. Pendant la tempête de verglas, il y a eu énormément de bois de chauffage sur le marché parce que les gens nettoyaient leur cour et leur terrain. Il y a eu beaucoup de bois de chauffage généreusement offert gratuitement. Bien des gens ont aménagé un foyer dans leur maison par crainte d'une nouvelle tempête de verglas. Il est bon de pouvoir se chauffer au bois lorsqu'il y a une panne de courant. En général, l'industrie forestière se ressent des prix plus élevés du mazout et du gaz. Les gens se tournent vers le bois de chauffage, parce que c'est plus économique que le gaz et le mazout. La conjonction de ces deux facteurs a fait qu'il est plus difficile d'acheter du bois de chauffage.

Le sénateur Hubley: C'est un sujet intéressant. Nous avons tous un faible pour les sucreries, et le sirop d'érable est là pour combler ce besoin. Je m'intéresse à la recherche sur la mise en valeur des produits ou sur la création de nouveaux produits. Vous avez parlé de quelques produits que vous avez mis au point récemment: la barbe à papa à l'érable, la gelée à l'érable, les recettes et ainsi de suite.

La recherche est un important catalyseur en ce qui concerne l'innovation et la valeur ajoutée aux produits, que ce soit grâce à des rendements de production accrus, à la mise au point de nouveaux produits ou à de nouvelles utilisations des produits. Qui fait le recherche pour l'industrie acéricole? Où cette recherche se fait-elle?

Pourriez-vous expliciter une observation que vous avez faite dans votre exposé, au sujet de la recherche en acériculture qui serait limitée à des projets financés par le gouvernement — pourriez-vous nous donner une idée de ce en quoi ils consistent — et à des projets de petite envergure menés par des groupes restreints d'acériculteurs? Quel genre de recherche fait-on en l'occurrence?

M. Dodds: Il y a beaucoup de recherches en cours. M. Tom Noland, de l'est de l'Ontario, mène actuellement une étude importante sur les répercussions de la tempête de verglas. Cette étude a commencé l'automne dernier et elle se poursuit ce printemps. Nous espérons avoir les conclusions de cette étude pour notre assemblée annuelle de juillet.

La seule façon d'étudier les répercussions de la tempête de verglas, c'est d'évaluer la santé des arbres, celle-ci se mesurant grâce à la fécule emmagasinée dans les racines. On peut examiner tous sortes d'autres éléments, mais le meilleur indicateur que nous ayons, c'est la quantité de fécule emmagasinée dans les racines. Je devrais savoir d'où provient le financement. Je sais que M. Noland a demandé du financement auprès de certaines sources. L'OMSPA, l'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario, a fourni des fonds et, sur le terrain, 15 exploitations ont offert leur érablière et tout ce qui est nécessaire pour l'étude.

Pour ce qui est de la valeur ajoutée, je dois reconnaître que l'OMSPA a été peu active. Nous avons essayé de nous pencher sur d'autres questions importantes. Si vous avez visité le site Web de l'ACIA récemment, vous y avez vu de l'information sur la contamination par le plomb du sirop d'érable. Nous voulons que l'Ontario produise le sirop le plus sûr dans le monde et nous accordons la priorité à cette question, au détriment de certaines autres recherches.

Le président: Quelle serait la source de la contamination par le plomb?

M. Dodds: Le plomb peut provenir de nombreuses sources — de l'ancien chalumeau en acier galvanisé, au seau en passant par le réservoir dans lequel l'eau d'érable est emmagasinée et aux cuves où on la fait bouillir, si ces objets ont des soudures au plomb. La sève est légèrement acide. On n'a pas cette impression quand on la boit. Le sirop aussi est acide. Parce qu'il est légèrement acide, il provoque la libération de plomb. Le gouvernement provincial a fixé à 0,5 partie par million le niveau acceptable. Qui sait quel est le taux figurant sur le site Web depuis deux ou trois jours? Je ne sais pas à combien il s'élève, mais je sais qu'il est supérieur à cela. Habituellement, on n'affiche pas ce taux à moins qu'il soit supérieur à 1.

Il y a d'importants projets de recherche sur le plomb qui sont en cours en Ontario. Nous avons stratégiquement choisi 15 producteurs qui nous ont envoyé des échantillons de leur sirop. Des échantillons de la première coulée de sirop tous les matins et de la dernière tous les soirs étaient gardés au congélateur, ils étaient recueillis par des responsables du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation de l'Ontario, le MAAO, puis apportés à un laboratoire pour y être analysés. Nous nous attendons à avoir les résultats de ces analyses lundi prochain. Ils seront intéressants, car ils nous aideront à déterminer comment nous aborderons le problème du plomb en Ontario.

Le drame, c'est que les petits producteurs qui ont entre 200 et 300 entailles, qui ne possèdent aucun autre revenu et qui n'ont pas les moyens de diversifier leurs activités pour gagner plus d'argent compliquent la tâche des grands producteurs en raison de l'image associée aux produits de l'érable. Nous allons certainement frapper à certaines portes pour obtenir des fonds afin de régler le problème et de rendre le produit plus sûr. Notre objectif premier est de faire en sorte que le sirop d'érable soit un produit sûr pour les jeunes enfants. L'ingestion de plomb est cumulative sur toute une vie. Nous ne voulons pas avoir de problèmes.

Qui fait la recherche? Les principales recherches au Canada se font au Centre ACER, au Québec. Nous travaillons en coopération avec ce centre dans le cadre de certains projets, et de manière isolée en ce qui concerne d'autres projets. Notre grand problème, c'est que nous n'avons pas l'argent pour faire traduire en anglais, à l'intention des acériculteurs ontariens, les excellentes recherches que ce centre effectue, et vice versa. Nous faisons aussi de bonnes recherches. C'est un problème épineux.

Le sénateur Hubley: À propos de ce problème de plomb, quelles mesures avez-vous dû prendre et quelles répercussions cela a-t-il eues sur l'ensemble de l'industrie? Avez-vous modifié le procédé de fabrication du sirop d'érable ou avez-vous dû remplacer par d'autres les contenants qui renfermaient du plomb?

M. Dodds: Il y a environ trois ans, M. Wheeler et moi avons présenté dans toutes les régions de la province des ateliers sur les méthodes de gestion optimales. Nous avons dit aux gens de ne pas laisser la sève séjourner dans le seau pendant un certain pour empêcher les infiltrations de plomb. Nous leur avons expliqué qu'il leur fallait recueillir rapidement la sève. Nous leur avons aussi dit qu'ils devaient jeter la sève si elle avait séjourné dans le seau pendant deux ou trois jours. Elle ne pouvait alors être transformée. Ces ateliers ont été bien accueillis. Les analyses concernant le plomb se sont poursuivies. Dans certains cas, la situation s'est régularisée; dans d'autres, le problème ne s'est pas réglé.

Le MAAO a continué de prélever des échantillons chez ceux dont les produits présentaient des résultats supérieurs à la teneur en plomb autorisée. Bon nombre ont régularisé leur situation en adoptant de saines pratiques de gestion. Ceux qui n'y sont pas parvenus devront remplacer leur matériel. C'est la seule solution. Il y a infiltration. Ils se sont occupés des méthodes de gestion, mais c'est maintenant un problème financier qu'il leur faut régler.

La plupart des producteurs, comme les Wheeler et nous-mêmes, ont fait l'acquisition de nouveau matériel dépourvu de soudure au plomb; il s'agit de soudage TIG, c'est-à-dire de soudage à l'électrode de tungsten, si cela vous dit quelque chose. Il s'agit simplement de soudage. Il n'y a pas de brasure ni de risque que de transfert de plomb dans le produit alimentaire.

L'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario a aussi établi un programme Sceau de qualité. Vous savez peut-être de quoi il s'agit. Sinon, vous pouvez prendre connaissance de détails de ce programme sur le site Web de l'association. Il s'agit d'un programme de contrôle de la qualité qui oblige les membres de l'association à faire analyser trois lots différents de leur sirop pour déterminer s'ils contiennent du plomb. Si les niveaux de plomb sont supérieurs au seuil de 0,5 partie par million, ils ne peuvent vendre leur sirop à titre de produit assorti du sceau de qualité.

Au Canada, les règles sont différentes de celles en vigueur dans un État voisin, le Vermont. Dans cet État, on peut mêler du sirop contaminé à du sirop qui ne l'est pas jusqu'à ce que l'on abaisse la teneur en plomb. Au Canada, il est illégal de mêler des produits contaminés. L'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario appuie cette approche. Nous estimons que la seule solution consiste à se débarrasser du matériel qui contamine le produit.

Le président: Vos règlements relèvent-ils de la province ou est-ce qu'une partie relève du comté?

M. Dodds: Nos règlements sont d'ordre provincial et ils sont conformes aux normes fédérales. À l'échelle de la province, nous n'avons pas tellement de normes. Nous avons simplement décidé que la réglementation fédérale s'applique en Ontario. Cela nous a même causé un problème, car maintenant, quand nous classons un sirop, nous disons qu'il s'agit de sirop Canada numéro 1, extra clair, et cette appellation est protégée par une maque déposée. Nous ne pourrons plus faire cela après le 1er janvier.

M. Wheeler: Le programme Sceau de qualité est une initiative que l'industrie a lancée l'année de la tempête de verglas — il y a environ six ans. L'association a reconnu que le maillon le plus faible est la plus grande faiblesse dans l'ensemble de l'industrie. Un de nos principaux défis vient du fait que la majeure partie de nos entreprises sont de petites exploitations d'agrément qui ont peu d'argent à investir dans les programmes de contrôle de la qualité. On a beau avoir de grands producteurs qui font du sirop de qualité supérieure, si l'un d'eux voit un de ses produits de catégorie numéro un rappelé et que tous les journaux et toutes les chaînes de télévisions en parlent, c'est toute l'industrie qui en souffre, parce que cela porte atteinte à la perception que les gens se font du sirop d'érable comme étant un produit sûr.

Le programme Sceau de qualité qui a été établi prévoit une série de mesures de gestion optimales pour le sirop d'érable. Il s'agit d'un programme à participation volontaire. Sur les 2 200 producteurs de l'Ontario, seulement un peu plus de 100 y ont adhéré. Il convient toutefois de signaler que cette centaine de producteurs représentent un pourcentage assez élevé de la production de sirop d'érable en Ontario, car ils possèdent de grandes exploitations.

Le président: Peuvent-ils placer une indication en ce sens sur leur étiquette pour qu'on sache qu'on obtient le meilleur produit possible? Le cas échéant, en quoi consiste cette indication? Dans le cas des vins, on parle d'appellation VQA. De quoi s'agit-il en ce qui concerne le sirop d'érable?

M. Wheeler: Il s'agit d'un collant qui est un sceau attestant la qualité du sirop produit en Ontario.

Le président: Lorsqu'on voit ce sceau, c'est une garantie?

M. Wheeler: Oui. Nous avons pu obtenir du financement par l'entremise du programme CanAdapt du Conseil de l'adaptation agricole pour aider à la mise en oeuvre de ce projet et financer certains projets de commercialisation visant à promouvoir le sceau de qualité et sa signification. Ce financement s'est toutefois tari il y a trois ans.

Le président: Pendant la tempête de verglas, alors que les producteurs du Canada étaient aux prises avec toutes sortes de problèmes de production, du sirop du Vermont mélangé a-t-il pu se vendre au Canada, à l'époque, et peut-il s'en vendre maintenant?

M. Wheeler: C'est une question difficile à répondre. C'est possible.

M. Dodds: Je ne connais pas les quantités en cause. Du sirop du Vermont est en vente à Perth, au coeur même de la capitale de l'érable en Ontario; oui, cette production nous nuit. Oui, elle est en vente chez nous. Est-ce que je sais si ce sirop a été mélangé? Je n'en ai pas la moindre idée. Nous ne pouvons pas savoir quelle quantité de plomb peut se trouver dans ces produits. Je suis certain que l'Association des producteurs acéricoles de l'Ontario le sait, car l'an dernier, elle a évalué la production de plus de 400 producteurs de l'Ontario. Je suis certain qu'elle a aussi analysé quelques échantillons de sirop provenant de producteurs du Vermont.

Le sénateur Mercer: En tant que citadin, j'étais très heureux de me joindre au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts afin d'élargir mes connaissances. Je pensais que j'allais enfin rencontrer des représentants d'une industrie sans problème, mais vous m'avez enlevé mes illusions.

Je sais que l'Ontario ne produit que 4 p. 100 de la production de sirop d'érable au Canada, alors que le Québec en produit 93 p. 100, le Nouveau-Brunswick, 3 p. 100, et les autres provinces, 0,02 p. 100. Je représente des gens de la Nouvelle-Écosse appartenant à ce groupe qui produit 0,02 p. 100 de la production canadienne.

En faisant mes recherches, j'ai été très impressionné d'apprendre que ma province compte 70 acériculteurs qui possèdent 300 000 entailles, ce qui ne représenta que 10 p. 100 des 36 000 acres de bons érables aptes à produire dans notre province. Quand on parle de 0,02 p. 100, ça semble petit, mais si l'on tient compte du fait qu'on produit 140 000 litres de sirop d'érable, ça commence à être plus important. L'Ontario importe du sirop du Québec, mais en importe- elle aussi d'autres provinces comme la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick?

M. Dodds: Oui. Delta Foods a signé un important contrat avec des producteurs du nord du Nouveau-Brunswick. Le sirop est transporté par camions gros porteurs jusqu'à une petite ville qui s'appelle Tin Cap, juste au nord de Brockville. C'est là qu'il est transformé en différents produits et qu'il est vendu partout aux États-Unis, sous forme de produits de la marque Choix du Président.

Le président: Oh mon dieu!

M. Dodds: On l'expédie en Norvège, sous forme de gros blocs de sucre auxquels on ajoute de l'eau pour qu'il soit transformé en sirop là-bas. C'est la façon la plus économique d'acheminer le sirop outre-mer. En ce qui concerne la Nouvelle-Écosse, je ne saurais trop dire si l'Ontario importe du sirop de cette province, mais j'en doute. La Nouvelle- Écosse doit avoir des débouchés suffisants — Peggy's Cove doit bien absorber cette production, n'est-ce pas?

Le sénateur Mercer: Nous vendons là-bas des bouteilles de petits formats. Je veux parler de la valeur ajoutée. C'est là où la Nouvelle -Écosse intervient. Même si nous ne produisons que 140 000 litres de sirop, nous produisons l'autre élément le plus important qui accompagne le sirop d'érable. Osford, en Nouvelle-Écosse, est en effet la capitale du bleuet au Canada. Nous produisons les bleuets qui entrent dans les recettes de crêpes que le sirop d'érable couvre. Je cherche une façon d'établir un lien entre les ventes de nos produits.

J'ai trouvé intéressant ce que M. Wheeler a dit au sujet de son produit. Je remarque que votre entreprise ne vent pas ses produits par commande postale, mais qu'ils sont disponibles à partir des fromageries Balderson. Cela dit, à cause de la nouvelle réglementation américaine en application aux frontières, le fromage Balderson n'est plus expédié à l'extérieur de nos frontières ou ses exportations sont limitées, c'est bien cela?

M. Wheeler: C'est exact. À cause d'un certain nombre de facteurs, les fabricants du fromage Balderson ont décidé qu'il ne valait plus la peine d'exporter leur fromage, compte tenu des tracasseries que cela occasionnait, que ce n'était plus rentable commercialement. Leur chiffre d'affaires au Canada leur suffit.

Le sénateur Mercer: J'aimerais aborder le thème du contrôle de la qualité. Nous en avons parlé lorsque nous avons parlé du vin et du boeuf. Vous avez soulevé le problème du plomb. C'est un problème de contrôle de la qualité.

Le North American Maple Syrup Council, c'est-à-dire le Conseil nord-américain du sirop d'érable, décerne environ cinq prix chaque année. Je crois savoir que, l'an dernier, trois de ces prix ont été décernés à des producteurs de la Nouvelle-Écosse. D'ailleurs, un ami de mon père, Albert Bentley, du comté de Westchester-Cumberland, en Nouvelle- Écosse, a remporté deux d'entre eux. C'est tout un exploit de la part d'une province qui ne produit qu'une faible partie de toute la production canadienne et c'est révélateur du fait que nous misons sur la qualité.

J'espère que vous allez me dire que ces prix sont fondés non seulement sur l'excellent goût ainsi que les coûts de production, et cetera, mais aussi sur le faible taux de contamination au plomb.

M. Dodds: Il n'y a certainement aucune analyse de la contamination au plomb effectuée à ce niveau. Je pense que parce que votre région a été l'hôte de l'assemblée du Conseil nord-américain du sirop d'érable cette année, il se peut qu'il y ait eu de nombreux producteurs de cette province parmi les concurrents cette année et que des producteurs de l'Ontario n'aient pas été au nombre des concurrents. À mon avis, c'est la seule raison pouvant expliquer que nous n'avons pas remporté les prix.

Le sénateur Mercer: Je veux bien vous laisser dire cela, mais je ne sais pas si je partage votre avis sur cette question.

Le président: Vouliez-vous ajouter quelque chose, monsieur Wheeler?

M. Wheeler: Ce genre de concours est fondé sur la couleur, la saveur et l'apparence.

Le sénateur Mercer: Pour continuer dans la même veine que ce que le sénateur Oliver a dit au sujet du sceau de qualité sous forme de collant, je pense que c'est une idée valable. S'il y a sur le marché du sirop d'érable en provenance du Vermont qui est mélangé à un produit contaminé dans une certaine mesure par le plomb, nous devrions faire en sorte que notre produit se démarque de cela en faisant la promotion du sceau de qualité.

Je m'inquiète toutefois du programme concernant le sceau de qualité. Vous dites que seulement une centaine de producteurs de l'Ontario sur les 2 200 y ont adhéré. S'agit-il d'un programme limité à l'Ontario et, le cas échéant, pourquoi?

M. Wheeler: C'est un projet qui a vu le jour en Ontario. Le printemps dernier, le Québec a lancé un programme qui s'appelle Sirop pro et qui s'inspire grandement du programme Sceau de qualité de l'Ontario. Il y a énormément de parallèles entre les deux programmes. Ils ne comportent pas de différences marquées; je pense que la seule chose qui les différencie, c'est le nom.

Le sénateur Mercer: Je reviens sur une discussion que nous avons eue à un certain nombre d'occasions, lorsque nous avons parlé de la valeur ajoutée. Dans ma province, il y a un groupe qui s'appelle «Taste of Nova Scotia»; ce groupe rassemble des produits de qualité de tous les secteurs de l'industrie agricole et des pêches. Nous présentons nos meilleurs produits, qu'il s'agisse de poisson, de boeuf, de fruits, de tartes, de bleuets, de vins et ainsi de suite — tous les produits de la Nouvelle-Écosse. Il me semble que nous devrions essayer de rassurer davantage les consommateurs.

Le Canada — qu'il s'agisse de la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario, du Québec ou du Nouveau-Brunswick — produit le meilleur sirop d'érable dans le monde. L'idée de se regrouper et de demander au gouvernement fédéral d'aider à établir des normes qui leur permettront de s'élever au-dessus de tout cela a-t-elle fait son chemin parmi les membres de l'industrie?

Vous avez dit que quelqu'un va faire une erreur, mettre en marché du sirop d'érable dont la teneur en plomb est trop élevée et que cela aura des répercussions catastrophiques sur tout le monde. Pourquoi ne pas parer le coup? J'en ai assez de parler des crises auxquelles nous faisons face. Nous pourrions peut-être éviter celle-là.

M. Wheeler: Il existe un programme de qualité fédéral qui est administré par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, l'ACIA. Il s'agit simplement d'un programme d'enregistrement. Pour un acériculteur, l'enregistrement fédéral signifie qu'une fois par année, un inspecteur de l'ACIA visite son exploitation et détermine si elle respecte tous les critères concernant les méthodes de gestion optimales. L'inspecteur prélève plusieurs échantillons de sirop d'érable afin d'analyser s'il contient du plomb, du paraformaldéhyde et s'il a fait l'objet d'une adultération. Il y a adultération quand, par exemple, on ajoute du sucre de canne ou un autre édulcorant au sirop qui en font du faux sirop de piètre qualité. Les inspecteurs vérifient tous ces aspects.

Lorsqu'on fait une telle vérification, on est tenu, de par la loi, d'apposer sur son contenant de sirop une petite étiquette qui précise «Canada numéro 1» ou «Canada numéro 2». Les catégories sont extra clair, clair et médium.

Le sénateur Mercer: Que signifie «numéro 1» et «numéro 2»?

M. Wheeler: «Canada numéro 1» désigne la qualité supérieure. «Canada numéro 2» désigne un sirop de couleur ambrée — un sirop davantage employé pour la cuisson.

Le président: La catégorie numéro 3 désigne-t-elle un sirop foncé?

M. Wheeler: La catégorie numéro 3 désigne un sirop foncé et ne peut être vendue à des magasins.

Le président: Cette catégorie peut-elle être vendue à des fins commerciales?

M. Wheeler: Elle est vendue exclusivement à des fins commerciales.

Le sénateur Callbeck: J'aimerais parler de la demande de sirop d'érable. Vous pouvez vendre toute votre production, n'est-ce pas? La demande est-elle grande?

M. Wheeler: En Ontario, c'est généralement facile de vendre ce que l'on produit. Au Québec, les producteurs reportent d'importants excédents d'une année à l'autre, parce que la production est considérable dans cette province.

Le sénateur Callbeck: La vente au Québec pose-t-elle un problème? Faut-il davantage de marchés?

M. Wheeler: C'est exact.

Le sénateur Callbeck: Le prix varie-t-il beaucoup?

M. Wheeler: Cette année, il n'y a pas eu de changement par rapport au prix de l'an dernier. Les prix ont fluctué l'année de la tempête de verglas. Quand on connaît une mauvaise année, le prix peut fluctuer, mais pas de manière draconienne.

Le sénateur Callbeck: Vous avez mentionné que la majeure partie de la production est destinée au marché des États- Unis. Vous avez aussi parlé du Japon, de Taïwan, du Danemark et de l'Allemagne. Comment avez-vous mis ces marchés en valeur?

M. Wheeler: Ce sont les grandes entreprises d'emballage qui ont développé ces marchés. Les acériculteurs qui vendent leur sirop en vrac le vendent à ces entreprises, en barils de 30 ou 40 gallons. En Ontario, il y a au moins trois entreprises du genre. Au Québec, il y en a beaucoup plus. Ce sont ces entreprises qui vendent votre marque de sirop ou des emballages particuliers aux épiceries — aux épiceries hongroises, par exemple.

En général, il ne s'agit pas d'exploitations acéricoles, mais de grandes usines d'emballage commerciales situées dans des parcs industriels. Elles achètent le sirop de centaines de producteurs et le présentent dans leurs propres contenants. Ce sont elles qui participent à des foires alimentaires internationales.

Le Québec a bénéficié d'initiatives de commercialisation financées par le gouvernement fédéral et destinées à promouvoir ces marchés. Dans certains cas, il faut aller sur place pour établir le marché. Il est facile de commercialiser le sirop d'érable au Canada — tous les Canadiens savent ce qu'est le sirop d'érable. Les marchés internationaux ont tout juste commencé à s'ouvrir il y a deux ans. C'est tout un défi de vendre un produit sur un continent qui n'a jamais pu ou qui ne pourra jamais produire de sirop d'érable. Il faut tout d'abord que la clientèle visée sache exactement en quoi consiste le produit. C'est probablement le plus grand défi que les producteurs de sirop d'érable doivent relever à l'échelle internationale.

Le sénateur Callbeck: Vous dites que cela date de deux ans. Les ventes ont-elles augmenté chaque année?

M. Wheeler: Oui.

Le sénateur Callbeck: S'agit-il d'augmentations importantes ou modestes?

M. Wheeler: Je n'ai pas les chiffres sous la main. Vous pourriez probablement les obtenir de la fédération du Québec.

Le sénateur Callbeck: Quelles sont les principales mesures que le gouvernement fédéral peut prendre pour aider votre industrie? Ces mesures doivent-elles viser l'ouverture de marchés? Le secteur de la recherche?

M. Wheeler: Nous n'avons pas encore parlé de cette question, mais de nombreux acériculteurs craignent le longicorne asiatique. Je ne sais pas si vous en avez déjà entendu parler. On est loin de la valeur ajoutée. Les acériculteurs espèrent surtout que le longicorne asiatique ne se propagera pas à l'extérieur de Toronto, qu'on réussira à le contenir. Si le longicorne asiatique s'attaque aux forêts de bois francs, l'industrie acéricole sera complètement anéantie. Nous n'aurons pas à nous préoccuper de la valeur ajoutée ou de la commercialisation s'il n'y a plus d'érables.

Cela dit, nous bénéficierions indiscutablement d'efforts de commercialisation déployés sur une grande échelle, au niveau international: efforts visant à faire connaître le produit et travail en coopération avec les associations industrielles. Jusqu'à maintenant, il y a eu de nombreux projets d'ordre provincial. Quelqu'un a parlé de la campagne «Taste of Nova Scotia», qui vise à faire découvrir les produits de la Nouvelle-Écosse. Une campagne semblable qui viserait à faire découvrir les produits du Canada serait dans l'intérêt de tous les producteurs canadiens.

Le sénateur Callbeck: N'y a-t-il jamais eu d'efforts du genre?

M. Wheeler: Pas à ma connaissance.

M. Dodds: Il n'y a jamais eu d'efforts conjoints de déployés.

On a fait un premier pas. Celui-ci consiste à essayer d'établir un système de classification uniforme à l'échelle de l'Amérique du Nord. Si quelqu'un au Japon achète du sirop portant la mention «Canada numéro 1, extra clair», en quoi cela se compare-t-il à un produit du Vermont? Dans cet État, il y a une catégorie «de choix». Dans un autre État, il y a une désignation différente. Nous devons éliminer cette source de confusion.

Vous pourriez peut-être appuyer nos efforts en ce sens. Je ne sais pas si nous y parviendrons un jour. Nous travaillons là-dessus depuis deux ans. Nous n'avons pas encore accompli de grands progrès. Le Vermont est le deuxième producteur de sirop d'érable en importance dans le monde et il ne veut pas renoncer à son identité lui non plus. Au Vermont, la qualité supérieure est la catégorie «De choix», et le sirop que nous désignons comme étant «clair», conformément à la certification ontarienne et canadienne, est désigné comme étant «ambré clair» au Vermont. Leur catégorie «ambré médium» correspond à notre catégorie «médium». Nous avons besoin de critères uniformes pour définir les degrés de transmittance afin que les consommateurs sachent ce qu'ils obtiennent. L'important serait que le gouvernement fédéral prenne l'initiative de faire travailler ensemble les quatre provinces concernées. Si chaque province agit isolément, on ne règle pas les problèmes généraux.

Nous devons privilégier la valeur ajoutée si nous voulons diversifier nos produits et faire en sorte que les jeunes puissent rester sur la ferme et gagner leur vie sans programme d'aide gouvernementale dans l'avenir. Je pense que nous devrions privilégier la valeur ajoutée, même si je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'acériculteurs canadiens qui partagent cet avis. Si nous n'adoptons pas cette orientation, je pense que notre argent sera mal employé. Il faut amener toutes les provinces à travailler ensemble.

L'an dernier, le Nouveau-Brunswick a surpassé notre production. Nous étions passés au troisième rang il y a un an. L'Ontario a toutefois connu une meilleure année l'an dernier et partout, sauf dans le nord du Nouveau-Brunswick, ils ont connu une mauvaise année. Nous avons reconquis notre deuxième place.

Le sénateur Callbeck: Vous avez parlé de quatre provinces. La quatrième, c'est la Nouvelle-Écosse, n'est-ce pas?

M. Dodds: Oui.

M. Wheeler: L'Île-du-Prince-Édouard produit aussi un peu de sirop.

Le sénateur Callbeck: Je suis originaire de cette province. J'ai lu ici qu'on y trouve 10 exploitations acéricoles.

M. Dodds: Vous ne voudriez pas entailler vos magnifiques érables mouchetés.

Le président: J'ai cinq ou six brèves questions. Vous avez parlé de provinces qui ont connu une mauvaise année. Si j'ai bien compris, vous avez besoin de nuits froides et de journées chaudes pour produire du sirop. Quelles conditions climatiques avez-vous eues en Ontario cette année? Les nuits ont-elles été assez froides, et les journées, assez chaudes, pour favoriser l'écoulement de la sève?

M. Wheeler: Oui, la saison a été bonne en Ontario, de ce point de vue. Nous avons besoin de journées chaudes et de nuits froides, mais cela nuit à la saison lorsqu'il fait chaud pendant de longues périodes. S'il n'y a pas de gel la nuit pendant plus de quatre ou cinq jours, cela commence à devenir inquiétant. Lorsque le mercure grimpe, la qualité diminue.

Le président: Quel âge doit avoir un arbre avant que vous puissiez l'entailler?

M. Wheeler: Une quarantaine d'années, ce qui signifie qu'il doit avoir un diamètre d'environ 10 pouces.

Le président: À titre d'acériculteurs, recevez-vous, l'un ou l'autre, une forme de subvention — une aide, un soutien gouvernemental ou autre chose du genre — pour soutenir vos prix?

M. Wheeler: Je ne connais aucun programme de cette nature dans le sud de l'Ontario. Après la tempête de verglas, de l'aide a été accordée pour le nettoyage de nos érablières. Je sais que, dans le nord de l'Ontario, la FedNor aide certains producteurs.

Le président: En ce qui concerne les catégories et la qualité, pourriez-vous nous expliquer encore ce qu'il en est de la couleur? Que recherche le consommateur? Êtes-vous autorisés à utiliser du colorant pour éclaircir ou foncer le sirop?

M. Dodds: Non. Le mot clé est «pur». L'expression «sirop d'érable pur» signifie que le produit ne contient absolument aucun additif.

La préférence en matière de couleur c'est comme avec le fromage. Certains aiment le fromage doux, tandis que d'autres préfèrent le fromage fort. De même, certaines personnes aiment le sirop ambré et d'autres le sirop extra clair. Cela dépend probablement de ce que l'on a connu lorsqu'on était enfant. Si vous consommiez du sirop Aunt Jemima, vous allez préférer le sirop ambré. Par contre, si vous avez grandi dans une ferme et que vous avez consommé du sirop extra clair qui, selon moi, reflète la véritable saveur d'érable parce qu'il ne renferme pas un grand nombre de bactéries actives, vous allez préférer la saveur extra clair. Il n'y a pas de réponse à cette question. Heureusement qu'il y a des gens qui aiment chacune des catégories. Ceci nous permet de toutes les écouler.

Le président: Vous avez dit qu'il existait un gros problème en ce qui a trait au langage employé pour l'étiquetage entre le Canada et les États-Unis. L'industrie des arbres de Noël éprouve le même problème. Certains emploient des termes tels que «de fantaisie» ou «de choix», tandis que d'autres vont dire «de qualité supérieure» et ainsi de suite. Il existe trois expressions différentes pour décrire la catégorie et la qualité des arbres, ce qui porte beaucoup à confusion. D'autres et moi-même avons tenté de faire clarifier tout cela. Ce n'est pas facile, parce que les gens s'en tiennent à leurs anciennes expressions.

Le sénateur Callbeck a posé une bonne question, soit celle de savoir ce que l'on attendait du gouvernement. Vous avez dit qu'en Ontario il y a un grand nombre d'érables à sucre de plus de 40 ans qui ne sont pas exploités. Un programme visant à ramener des producteurs sur le marché serait-il utile? La demande est plus forte que l'offre si, effectivement, plus de 80 p. 100 des produits de l'érable consommés en Ontario proviennent du Québec. Serait-il profitable d'exploiter les érables qui ne le sont pas à l'heure actuelle?

M. Wheeler: Oui, sans l'ombre d'un doute.

Le président: Que faudrait-il faire à cette fin?

M. Wheeler: Dans certains cas, ces érables se trouvent sur des terres qui appartiennent à la Couronne ou au comté, de sorte qu'ils échappent à l'entreprise privée. Un terrain adjacent à notre propriété appartient au comté, mais celui-ci n'a pas de politique de location de ses arbres, ce qui fait que les érables en question ne servent à rien. Le comté empêche leur exploitation.

Le président: D'un point de vue commercial, ces arbres font partie de l'inventaire. Un érable à sucre de 50 ans qui est en parfait état peut donner du sirop. Si vous pouviez obtenir un bail raisonnable pour ces quelques acres, vous auriez ce qu'il faut pour vous lancer en affaires. Vous prenez la sève, vous l'acheminez et vous vendez le produit transformé. Il me semble que c'est là une occasion d'affaires potentielle.

M. Wheeler: Tout à fait. Au cours des trois derniers mois, nous avons éprouvé des problèmes en Ontario. La Municipal Property Assessment Corporation de la province a décidé d'imposer les dépôts de sucre d'érable, où le sirop est fabriqué en quantités industrielles, par opposition aux fermes. Le taux d'imposition a été multiplié par 17 dans la plupart des cas. Cette mesure a en quelque sorte eu pour effet de réduire ces industries au silence au cours des derniers mois en Ontario. Nous espérons que la question a été réglée et que la décision a été renversée.

Nous sommes confrontés à la même situation en ce qui a trait à la valeur ajoutée. Là aussi la province aimerait que les activités à valeur ajoutée soient considérées comme des activités «industrielles» aux fins de l'impôt foncier et décréter que la fabrication du sucre d'érable et du beurre d'érable sont des activités industrielles plutôt qu'agricoles.

Le président: Ce le sont, dans la mesure où vous devez vous conformer à l'Analyse des risques et maîtrise de contrôle critiques (HACCP) au niveau de votre productivité.

M. Wheeler: À ce stade-ci, l'HACCP est hors de la portée de pratiquement tous les producteurs de sirop d'érable que je connais, pour ce qui est du coût du programme et des dimensions de notre industrie du sirop d'érable.

Le sénateur Fairbairn: J'ai une question qui découle d'autres témoignages entendus, y compris celui des représentants de l'industrie de l'agriculture biologique au Canada. Pulse Canada a laissé entendre que ce serait une bonne chose pour Agriculture Canada de rassembler tous les groupements de producteurs spécialisés pour élaborer un plan d'ensemble en matière de recherche agricole. Dans le cadre de cet exercice, on ne se pencherait pas uniquement sur le processus de la valeur ajoutée, mais aussi sur la production, les systèmes de commercialisation et ainsi de suite.

Votre industrie serait-elle d'accord avec une initiative du genre?

M. Wheeler: Je ne vois pourquoi elle ne serait pas d'accord. Je ne vois pas comment on pourrait se tromper en coopérant.

Le sénateur Fairbairn: Il pourrait être utile de regrouper ces petites industries pour discuter de la commercialisation des produits au sein d'un groupe de coordination plus large.

Lequel de vos produits se vend le plus? Est-ce le sirop? Qu'en est-il des bonbons et produits du genre? Le sirop est-il votre produit le plus vendu?

M. Dodds: À notre petite installation, nous n'avons que 2 500 arbres et le sirop d'érable est notre produit le plus vendu. Nous voulons être très clairs. Nous ne fabriquons pas de bonbons. Nous fabriquons des tartinades au beurre d'érable; nous fabriquons du sucre dur et du sucre mou que vous appelez «bonbon». Si nous fabriquions des bonbons, il nous faudrait faire payer la TVP et nous serions des entreprises industrielles. Il faut être prudent. Nous fabriquons du sucre cristallisé qui ressemble exactement au sucre brun. Nous en expédions de grandes quantités à notre exploitation en Colombie-Britannique, et nous obtenons environ 140 $ par gallon en transformant ce produit jusqu'à ce point.

Il est certain que, à d'autres endroits, le sirop est le produit vedette. Si je vais dans une crêperie, j'y vais pour l'ambiance et pour beaucoup de choses autres que le sirop d'érable. J'y vais en tant que consommateur. Parfois, on y va pour le divertissement. Il peut y avoir un spectacle. On y va pour ces raisons. Cela dit, peu importe où je vais, je me trouve à acheter du sirop.

M. Wheeler: Dans le cas du sirop d'érable, il s'agit d'un produit de l'érable. Le sirop d'érable est un produit d'érable. La seule différence entre le sirop d'érable, le sucre d'érable et le beurre d'érable est leur teneur en sucre.

Le sénateur Fairbairn: Lequel a la teneur la plus faible?

M. Wheeler: Le sirop d'érable a une teneur en sucre d'environ 66 p. 100, tandis que le sucre d'érable pur a une teneur qui approche 100 p. 100. Comme vous pouvez l'imaginer, du sucre pur à 100 p. 100 c'est très sucré.

M. Wheeler: Si vous cuisinez avec un produit d'érable, vous obtenez une saveur d'érable, que vous utilisiez du sucre ou du sirop d'érable. Je constate que la plupart des gens se servent simplement du sirop d'érable, parce que c'est un produit qui convient mieux à des usages multiples.

Le sénateur Mercer: Lorsque vous avez dit que vous ne fabriquez pas de «bonbon», j'ai pensé qu'on avait peut-être trouvé l'outil de commercialisation parfait, soit un produit qui n'est pas du bonbon, mais qui est sucré.

Si l'on se fie aux propos du sénateur Oliver, la situation est très simple: il y a tous ces arbres qu'il faut exploiter; il existe un marché et nous n'exportons pas beaucoup, parce que nous consommons la plupart de nos produits ici, au Canada. Je regarde les chiffres pour ma propre province et je constate que nous n'exploitons que 10 p. 100 des 36 000 acres où l'on trouve de bons érables à sucre. Nous ne sommes qu'une toute petite province comparée au Québec, à l'Ontario ou au Nouveau-Brunswick.

Cela dit, je ne pense pas que ce soit aussi simple. Comment faire pour qu'un plus grand nombre de personnes participent à cette activité commerciale? Comment faire pour que les personnes qui exercent déjà cette activité élargissent leur exploitation et augmentent leur production? Dans certains cas, il leur faudrait acquérir de nouvelles terres, mais si j'ai bien saisi ce que les gens m'ont dit, de toute façon vous, en tant que producteurs, n'exploitez pas tous vos arbres. Comment faire pour que vous exploitiez un plus grand nombre d'érables afin de produire une plus grande quantité de sirop et de ce produit «non engraissant» que certains appellent «bonbon»?

Comment faire pour qu'un plus grand nombre de personnes s'adonnent à cette activité? La seule chose qu'il nous reste en grandes quantités au pays, et ce malgré l'ampleur du phénomène d'urbanisation, ce sont des terres et des arbres, et probablement beaucoup de terres qui conviendraient à l'acériculture.

M. Wheeler: Vous pourriez poser la même question relativement à n'importe quelle forme d'exploitation agricole au Canada. Il est probable qu'un grand nombre de propriétaires de fermes ont l'impression qu'ils travaillent trop et qu'ils sont sous-payés.

Le président: Il s'agit du rendement du capital investi. C'est la raison pour laquelle nous étudions la valeur ajoutée; nous voulons trouver une façon d'assurer un meilleur rendement, c'est-à-dire une plus grande valeur à la ferme.

Le sénateur Mercer: Un érable doit avoir 40 ans pour que vous puissiez l'exploiter. Il me semble que, pour avoir des arbres de 40 ans, une personne doit avoir été propriétaire de la terre durant 40 ans. C'est là un investissement important lorsqu'on veut en tirer un rendement. Je ne pense pas que les gens plantent des érables pour en faire l'exploitation, à moins d'avoir une très grande terre qui n'est pas utilisée. Ce n'est pas comme les arbres de Noël que l'on peut planter puis couper bien avant qu'ils n'atteignent l'âge de 40 ans.

M. Dodds: Je viens juste de planter des arbres sur une partie de ma terre au printemps et je compte en planter d'autres au cours des trois prochaines années.

Le sénateur Mercer: Vous allez planter des arbres pendant trois ans, mais vous n'allez pas être là pour les exploiter.

M. Dodds: Ma petite-fille pourrait l'être. Il y a beaucoup de plantations d'érables en Ontario. Vous seriez surpris du nombre de producteurs qui prennent des terres agricoles dont le rendement est faible ou pauvre et qui y plantent des érables.

C'est un investissement pour l'avenir. Vous avez ici deux personnes qui s'opposent actuellement à une modification fiscale imposée par le gouvernement provincial. Nous essayons de convaincre les autorités que si nous plantons des érables, nous pouvons raisonnablement nous attendre à tirer un bénéfice de cet investissement dans l'avenir, et nous savons que cela veut dire dans 35 ou 40 ans.

Le sénateur Mercer: Est-il possible que la recherche permette de découvrir une technique en vertu de laquelle les érables pourraient être exploités dans moins de 40 ans, de sorte que le rendement du capital investi serait plus rapide et plus élevé?

M. Dodds: Je pense que la croissance est prédéterminée par la génétique et le climat. Je ne veux pas parler de nos voisins, mais au Québec les arbres sont plus petits que dans le sud de l'Ontario. Il en est ainsi à cause des différences de climat, de la durée de la saison de croissance et ainsi de suite. Je ne pense pas que l'on puisse faire quoi que ce soit à ce niveau.

Toutefois, nous pouvons faire beaucoup de recherches relativement à ce que nous appelons l'érable «sucré». En d'autres mots, nous pourrions planter uniquement des arbres qui produisent une sève plus sucrée, d'une teneur en sucre plus élevée. Une telle initiative mériterait certainement d'être appuyée. J'ai eu un arbre qui me donnait une sève dont la teneur en sucre était de 13 p. 100. Je m'en vantais jusqu'au jour où j'ai fait venir un scientifique de Sault Ste. Marie. Je lui ai dit: «Cela vaut la peine d'en faire part à tout le monde.» Le scientifique m'a répondu: «Vous ne devriez en parler à personne. Cet arbre éprouve un stress. Il est en train de mourir et il ne sera plus là dans deux ou trois ans.» Cette année, nous obtenons en moyenne un taux de sucre pouvant atteindre jusqu'à 4 p. 100, mais un grand nombre d'arbres ne donnent qu'un taux de 1,5 p. 100 et nous devons les éliminer.

Le sénateur Mercer: Comment faites-vous pour réduire le stress? Laissez reposer l'arbre durant une année?

M. Dodds: Le stress est causé par le sel provenant de la route. Il n'y a pas de remède.

Le président: Votre industrie est-elle limitée ou gênée de quelque façon que ce soit par des barrières commerciales interprovinciales? Plus tôt, vous nous avez dit que la plupart des produits d'érable consommés en Ontario proviennent du Québec. J'en conclus qu'il n'y a pas de barrières ou d'obstacles interprovinciaux qui empêchent le mouvement de ces produits dans les deux sens.

Pourriez-vous, si vous en avez, vendre vos produits de l'Ontario au Québec sans problème ou sans devoir surmonter des obstacles interprovinciaux au commerce?

M. Dodds: Voulez-vous dire des problèmes autres que financiers? Pendant un bon nombre d'années, les producteurs québécois ont obtenu une subvention pour exploiter leurs arbres, de sorte qu'ils pouvaient vendre leur sirop à un prix moins élevé que le nôtre. Nos coûts sont sensiblement plus élevés en Ontario, parce que nous n'avons pas eu de telles subventions. Je pense que ces subventions allaient de 1,50 $ à 3 $ par arbre exploité.

Le président: Monsieur Wheeler et monsieur Dodds, je vous remercie beaucoup au nom du comité. Vos propos ont été stimulants, intéressants et très instructifs. Ils étaient directement liés à l'objet de notre étude. La question que nous nous posons c'est: «Que peut-on faire avec un produit brut tel que la sève, et comment peut-on y ajouter une valeur à la ferme?»

Monsieur Wheeler, vous utilisez la sève brute, vous fabriquez du sucre et du sirop, vous avez votre propre commerce et vous faites vos propres crêpes — bref vous vous occupez de toutes les étapes de la chaîne. C'est là l'un des messages que nous pouvons donner aux autres exploitants agricoles quant à la façon de préserver une plus grande partie de la valeur à la ferme.

En outre, vous vendez votre produit au niveau international, ce qui est très intéressant aux fins de notre étude. Nous vous remercions de nous avoir fait part de votre expérience.

Le comité s'ajourne.


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