Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule 4 - Témoignages du 8 décembre 2004
OTTAWA, le mercredi 8 décembre 2004
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 16 h 7, dans le but d'examiner le projet de loi C-5, portant sur l'aide financière visant l'épargne postsecondaire et d'étudier les questions traitant de dons de bienfaisance au Canada.
Le sénateur W. David Angus (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président : La réunion du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce est maintenant ouverte.
Je voudrais souhaiter la bienvenue aux témoins qui comparaissent dans le cadre de l'étude des questions traitant des dons de bienfaisance au Canada. Les audiences, qui ont commencé voilà quelques semaines déjà, se terminent aujourd'hui. Notre étude comportera deux volets. Le premier traitera des mesures incitatives, ou plutôt de l'absence de ces mesures, encourageant les Canadiens à faire des dons. On a l'impression que la structure globale canadienne pourrait être améliorée. Nous avons recueilli des témoignages à cet égard et espérons déposer notre rapport au Sénat plus tard cette semaine ou bien en début de la semaine prochaine dans l'espoir qu'il mènera à des changements.
Je voudrais également souhaiter la bienvenue à nos téléspectateurs.
Nous accueillons MM. Brian Gray et Barry Turner qui représentent Canards Illimités Canada. Au Parlement, nous connaissons bien M. Turner, qui est un ancien député. Ravi de vous revoir.
M. Barry Turner, directeur, Relations gouvernementales, Canards Illimités Canada et Conservation de la nature Canada : Monsieur le président, cela fait cinq ans que je suis directeur des relations gouvernementales auprès de Canards Illimités. Mon collègue, M. Brian Gray, est directeur des programmes de conservation. Il connaît très bien un grand nombre des questions qui vont nous intéresser ce soir. Pour ma part, je ne suis pas fiscaliste et ne prétendrai pas le contraire.
Canards Illimités, c'est vraiment la société de conservation canadienne par excellence. Elle a été créée il y a 67 ans et est maintenant l'organisation de conservation la plus importante et la plus en vue au Canada. Notre mandat, qui est de conserver les zones humides, non seulement pour la sauvagine mais également pour la faune, nous rend très fiers. C'est en protégeant les zones humides que les Canadiens pourront avoir accès à une eau de qualité.
Le vice-président : Parlez-nous de vos membres, de l'établissement de votre mandat et de qui vous relevez.
M. Brian Gray, directeur, Programmes de conservation, Canards Illimités Canada : Nous avons environ 80 000 membres, qui paient des frais d'adhésion. De plus, nous organisons des collectes de fonds à l'échelle du pays, essentiellement sous forme de banquets. Nous tenons environ 700 événements dans toutes les régions du pays, grâce à l'aide de nos 7 000 bénévoles. En plus de nos 80 000 membres, nous avons 70 000 adhérents, soit des sociétés, des agriculteurs, etc.
Nous avons beaucoup travaillé avec les propriétaires terriens, dont la plupart sont agriculteurs. À l'heure actuelle, nous gérons et travaillons en vertu d'environ 15 000 accords signés avec des propriétaires terriens actifs. À une certaine époque, on s'intéressait principalement aux trois provinces des Prairies. Il y a environ 25 ans nous avons pris de l'expansion et nous avons maintenant des bureaux dans chacune des provinces canadiennes. Nous sommes gouvernés par un conseil d'administration qui regroupe 67 administrateurs, de chacune des provinces du pays. Chaque province a droit à un nombre défini d'administrateurs.
Notre mémoire vous a été envoyé à l'avance, mais il a été légèrement modifié. J'ai demandé au greffier de distribuer un autre document traitant de l'inventaire des terres dont les propriétaires sont soit des entreprises soit des promoteurs immobiliers, qui donne une autre interprétation des informations figurant dans le document intitulé « Achieving Conservation Success ». Je n'en dirai pas davantage.
La conservation au Canada ne repose pas simplement sur des fondements environnementaux, esthétiques ou même spirituels. Son impact économique se fait de plus en plus ressentir. En 2000, le Service canadien de la faune d'Environnement Canada a publié son dernier sommaire sur l'importance que revêt la nature aux yeux des Canadiens. L'importance économique de la nature y est étudiée. Les données du rapport datent de 1996, donc elles sont un peu désuètes. Par contre, des fonds ont été débloqués pour faire renaître cette étude qui se fera grâce à la collaboration des provinces, des organisations de conservation et des ministères fédéraux.
En 1996, les secteurs d'activité touchant la nature généraient environ 215 000 emplois directs, soit 12 milliards de dollars de PIB. Il est évident que huit ans plus tard, ce secteur génère beaucoup plus d'activités économiques.
Les écosystèmes jouent un rôle vital. La qualité de vie repose sur la purification de l'eau et de l'air ainsi que le contrôle de l'érosion et des inondations. Il faut également que les ressources énergétiques et la biodiversité soient protégées et que la lutte antiparasitaire soit gérée, tout comme nos loisirs et nos activités culturelles. Tout cela a une valeur économique.
Vous avez sans doute pris connaissance du document que j'ai envoyé à chacun de vos bureaux au cours des deux dernières semaines, « The Value of Natural Capital in Settled Areas of Canada ». L'auteur de ce document, Mme Nancy Olewiler, économiste de renom à l'Université Simon Fraser, a analysé très attentivement la valeur économique et les impacts du capital naturel sur les zones peuplées dans quatre régions du Canada, en collaboration avec Canards Illimités et Conservation de la nature. En deux mots, chaque dollar dépensé pour protéger notre capital naturel peut générer un rendement de 2 $. J'encourage les honorables sénateurs à lire ce document.
Je ne vais pas vous parler de la première proposition qui figure dans le document qui vous a été distribué, à savoir le Fonds national pour la conservation, car je sais que ce sont les questions relatives aux dons de bienfaisance au Canada qui vous intéressent.
On devrait s'intéresser à trois aspects. Les terres privées abritent 50 p. 100 des espèces à risque canadiennes et ces terres sont de plus en plus convoitées par les promoteurs immobiliers. La Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux du Canada a conclu qu'il était essentiel de conserver l'habitat des terres privées jouxtant les parcs nationaux pour en maintenir l'intégrité écologique. On peut citer l'exemple du parc national Waterton Lakes dans le sud de l'Alberta. Conservation de la nature Canada a récemment protégé les terres jouxtant le parc, créant ainsi une zone tampon.
Au cours des dernières années, le gouvernement canadien a fait évoluer les choses en créant le Programme des dons écologiques dans le cadre duquel il est possible de faire don de terres à divers organismes de conservation. Par contre, lorsqu'on faisait don de terres il y a quatre ans, il fallait payer un impôt sur les gains en capital de 75 p. 100. Par la suite, cet impôt a été réduit pour s'établir à 50 p. 100 il y a trois ans et 25 p. 100 il y a deux ans. Par conséquent, on décourage toujours les propriétaires terriens à faire don de leurs terres en vertu du Programme des dons écologiques, parce qu'ils doivent toujours payer des impôts de 25 p. 100 s'appliquant sur les gains en capitaux par rapport à la valeur de leurs terres. Nous estimons que cet impôt devrait être éliminé.
Le ministère des Finances et le gouvernement en général reconnaissent également le volet don de ce qu'ils appellent les dons écologiques. En effet, il est possible de ne faire don que d'une partie de ces terres et d'en vendre le reste. Par exemple, disons que vous êtes propriétaire d'une terre dont la valeur est évaluée à 100 $, et que c'est effectivement la juste valeur marchande de la terre. Si vous faisiez don de la terre, vous auriez à payer un impôt sur les gains en capital de 25 $. Si vous décidiez de vendre la terre, vous recevriez un reçu de 75 $ mais serez tout de même obligé de payer les 25 $ en impôt sur les gains en capital. Si c'est une bonne idée, nous estimons que l'impôt sur les gains en capital devrait disparaître complètement, ce qui encouragerait d'autant plus les propriétaires terriens à faire don de leurs terres.
Dans notre document, honorable sénateurs, nous avons 103 propositions : l'élimination de l'impôt sur les gains en capital des dons écologiques, la prise en compte des dons de terres d'importance écologique détenues comme inventaire, et l'élimination de la TPS sur l'achat de terres par les organisations de conservation. Permettez-moi de parler de la troisième proposition en premier. Canards Illimités tout comme Conservation de la nature Canada doivent payer la TPS sur les acquisitions de terres à des fins de conservation. C'est une mesure dissuasive. Nous préférerions utiliser l'argent que nous consacrons à la TPS à des fins de conservation. Il s'agit de sommes considérables d'argent. C'est donc une demande spéciale que nous adressons au gouvernement, lui demandant d'éliminer la TPS sur les acquisitions de terres à des fins de conservation. L'argent ainsi libéré serait utilisé dans le contexte de la conservation.
Ensuite, parlons des terres dont les propriétaires sont des gens d'affaires ou encore des promoteurs immobiliers. J'ai demandé au greffier de distribuer un nouveau document qui est beaucoup plus détaillé que le premier. Il s'intitule « Encouraging Donations of Ecologically Sensitive Lands Held as Inventory Briefing Note ». Ce document, que vous avez maintenant entre les mains, ne fait qu'une page et explique la situation clairement.
Les particuliers ou les sociétés qui veulent faire don de terres d'importance écologique détenues comme inventaire ne peuvent pas profiter des avantages fiscaux en vertu du programme fédéral des dons écologiques. Le problème, c'est que quand on cède des terres détenues comme inventaire, ce sont des bénéfices qui sont générés plutôt que des gains en capital parce qu'il ne s'agit pas d'immobilisations. Ainsi, les bénéfices générés s'ajoutent aux revenus et sont donc imposables en vertu de l'impôt sur le revenu dudit promoteur immobilier. Les avantages fiscaux découlant du programme de dons écologiques ne s'appliquent qu'aux gains en capital se rattachant aux dons. Nous estimons que nous encouragerions les promoteurs immobiliers à faire don de leurs terres si la Loi de l'impôt sur le revenu était modifiée, pour que les bénéfices réputés découlant d'un don de terres d'importance écologique détenues comme inventaire soient traités de la même façon que les gains en capital réputés se rapportant aux dons de terres détenues à titre de capital.
Je sais, par exemple, qu'il y a des terres d'importance écologique dans le Oak Ridges Moraine, au nord de Toronto, appartenant à des promoteurs immobiliers. Les promoteurs immobiliers pourraient faire don de ces terres à une organisation de conservation mais, ce qui les arrête, c'est que comme il s'agit de terres détenues comme inventaire, le traitement fiscal accordé serait différent de celui régissant les dons aux organisations de conservation. Nous pensons que le ministère des Finances devrait également s'intéresser à cette problématique.
Par conséquent, nous demandons trois mesures : que les organisations de conservation ne payent plus de TPS sur les acquisitions de terres; que le système fiscal régissant les terres détenues comme inventaire soit modifié pour encourager les promoteurs immobiliers à faire don de leurs terres aux diverses organisations de conservation; et que l'impôt sur les gains en capital s'appliquant aux dons de terres par des particuliers passe de 25 p. 100 à zéro.
Voilà nos trois propositions. Maintenant, nous serions ravis de répondre à vos questions.
Le vice-président : Monsieur Gray, aviez-vous quelque chose à ajouter?
M. Gray : Au niveau conceptuel, nous sommes engagés dans un bras de fer avec Revenu Canada et Finances Canada. Pour le gouvernement, il ne s'agit que de perte de revenus ou bien de l'abandon de la possibilité de renflouer ses caisses. Nous démontrons dans le document auquel nous avons fait référence plus tôt que ce n'est pas comme ça qu'on doit aborder la situation. Au contraire, il s'agit plutôt d'un investissement dont le rendement peut atteindre 100 p. 100.
Nous avons mis l'accent sur les zones peuplées du Canada pour démontrer qu'il est plus rentable de laisser à Mère nature le soin de nous approvisionner en eau pure plutôt que de construire des usines de traitement. De même, il est plus intéressant financièrement de confier à Mère nature la réduction des impacts des gaz à effet de serre plutôt que d'essayer de restaurer l'équilibre après le fait. Nous avons choisi des zones ici et là au Canada pour bien le démontrer. Nous disons en fait que la nature nous procure des biens et services écologiques. Maintenant, nous vous demandons de nous donner les moyens pour assurer la présence de la nature dans les zones peuplées. C'est ainsi que nous concevons la situation. On ne peut pas tout simplement se borner à dire : « Ça ne nous intéresse pas parce que nous allons perdre des recettes. » En définitive, il s'agit d'un investissement rentable.
Le vice-président : Avant de passer aux questions, je voulais tout simplement vous signaler que le Comité sénatorial de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles effectue une étude sur le développement durable, qui touche aux questions que vous avez vous-même soulevées. Par conséquent, ce comité serait certainement intéressé par ce que vous avez à dire puisqu'il s'intéresse à ce que vous avez soulevé, notamment à la protection de l'environnement, à l'eau, à la disparition de certains aquifères et à la cartographie. Tout cela rejoint ce que vous nous avez décrit. Je vous conseillerais donc de contacter la greffière de ce comité, Mme Keli Hogan, qui vous réservera sans aucun doute un accueil chaleureux.
Le sénateur Massicotte : J'aimerais bien comprendre les mesures fiscales qui s'appliquent aux terres détenues en inventaire. Ce que vous dites en fait, c'est que si la terre détenue comme inventaire par un promoteur immobilier a coûté 80 $ mais en vaut 100, le promoteur paiera 20 $ en impôt sur le revenu. Vous voulez en fait que les terres ne soient pas imposables, qu'il s'agisse d'immobilisations ou de titres cotés en bourse, est-ce bien cela?
M. Turner : Si le promoteur immobilier vend la terre, les bénéfices sont imposables à 100 p. 100.
Le sénateur Massicotte : Lorsqu'un promoteur immobilier fait don d'une terre en vertu des structures régissant les dons des sociétés, a-t-il droit à une déduction d'une valeur équivalente?
M. Turner : Il recevrait un reçu d'impôt de 100 $ mais ne pourrait pas bénéficier des avantages du programme écologique.
Le sénateur Massicotte : Mais en vertu des règles régissant les dons des sociétés, il aurait tout de même droit à une déduction de 100 $?
M. Turner : Je pense bien, mais je ne suis pas fiscaliste. Tout ce que je peux vous dire c'est que les terres détenues comme inventaire sont traitées différemment.
Le sénateur Massicotte : Mais si le promoteur en question a droit à une déduction équivalente à la juste valeur marchande, à savoir le prix de vente réputé, cela veut dire qu'il cède ses terres en échange d'un montant équivalent au prix de vente, non?
M. Turner : S'il accepte de le faire.
Le sénateur Massicotte : Il n'y a pas de conséquence fiscale?
M. Turner : Je ne suis pas fiscaliste. Mais si c'est ainsi que ça marche, vous avez sans doute raison.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Qui établit la valeur monétaire d'une terre qui a un intérêt écologique? Qui certifie que c'est une terre à intérêt écologique? Est-ce que toutes les terres sont à intérêt écologique? Comment évaluez-vous la valeur monétaire d'une terre?
[Traduction]
M. Turner : Ce sont les scientifiques qui détermineraient si une terre donnée a une importance écologique particulière en vertu, par exemple, de la législation sur les espèces en péril. Je sais que le sénateur Oliver a sur ses terres de Nouvelle-Écosse une espèce bien particulière de tortue. Si les scientifiques déterminaient que cette tortue était en péril, cela voudrait dire que la terre du sénateur Oliver est un bien précieux aux yeux des Canadiens. Par conséquent, on l'encouragerait d'une façon ou d'une autre à protéger ses terres.
Ce sont des évaluateurs compétents et reconnus qui se chargent d'évaluer la juste valeur marchande des terres. L'évaluation est alors soumise à l'étude du Comité d'examen des évaluations pour en assurer l'authenticité et l'exactitude. Si ce n'est pas le cas, le comité, dont les membres sont nommés par le gouvernement fédéral, demanderait une seconde évaluation. C'est le ministre de l'Environnement, M. Dion, qui a le dernier mot.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Si quelqu'un a une terre qu'il déboise complètement et qu'il vend par la suite pour sa valeur écologique, la situation change-t-elle? Est-ce que vous examinez simplement la valeur écologique ou si vous examinez la valeur économique de la terre? Si elle est déboisée, est-ce qu'elle a moins de valeur? De quelle façon vous y prenez-vous?
[Traduction]
M. Turner : Dans le cas de terres d'importance écologique pour lesquelles le propriétaire a signé un accord de servitude afin de protéger la terre au niveau juridique, on ne pourrait pas, par exemple, y abattre des arbres, si les arbres présentaient un intérêt écologique significatif, à moins que dans l'accord on ait précisé que ce genre de choses était permis. Mais c'est clair qu'il y aurait d'autres choses qui seraient interdites, sans doute à perpétuité, à tout jamais.
Le sénateur Fitzpatrick : J'aimerais vous poser une question dont la réponse ne sera pas évidente, mais avant de le faire je voudrais vous remercier d'être venu. Nous discutons d'une question qui est très importante pour tous les Canadiens et surtout pour ma région d'Okanagan-Similkameen. Nous prenons toute une série de mesures pour essayer de protéger des écosystèmes qui sont, dans certains cas, très particuliers. Vos recommandations me semblent raisonnables et j'espère bien qu'on va pouvoir y donner suite.
Autour de cette table, nous avons tous nos domaines de prédilection. Avec le temps, savez-vous quelle ampleur prendra le phénomène de dons de terres abritant des écosystèmes? Pour ma part, j'estime que si nous n'agissons pas immédiatement, les coûts que devra assumer le Canada seront énormes. Il me semble que ça ne coûterait pas très cher au gouvernement de donner suite à vos recommandations. Quels conseils nous donneriez-vous à cet égard?
M. Turner : Monsieur le sénateur Fitzpatrick, j'ai cru comprendre que dans la région de l'Okanagan les vignes étaient de grande qualité.
Le sénateur Fitzpatrick : Effectivement.
M. Turner : Votre question m'a rappelé un film que nous avons tous vu à plusieurs reprises, Autant en emporte le vent. Je me souviens d'une scène, c'est après la guerre civile et un des personnages ramasse une poignée de terre — tout a été incendié — et il y a quelqu'un qui lui dit : « Il ne reste plus rien. » Il ramasse cette poignée de terre — je me souviens de la scène mais j'ai oublié le nom du personnage — et, laissant filer la terre entre ses mains dit : « Vous avez peut-être bien raison, mais ça, c'est éternel. » C'est la terre qui défie le temps.
Votre question a une portée très vaste. À moins que le Canada et le gouvernement ne tirent profit des instruments économiques qui sont à leur disposition pour créer de meilleurs incitatifs, les propriétaires terriens vont continuer à faire ce qu'ils font depuis 150 ans : cultiver leurs terres et abattre des arbres. Si le gouvernement n'a pas de vision pour l'avenir de nos vallées, de nos rivières, de nos fleuves, de nos lacs et de nos paysages, que ce soit dans l'Okanagan, à Oak Ridges Moraine, à Terre-Neuve ou encore dans le nord du Manitoba, la terre dépérira. Il faut maintenant qu'on mette un terme à la surexploitation de l'air, de l'eau et de la terre. Il faut que des mesures incitatives soient créées pour les propriétaires fonciers parce qu'en général, être agriculteur dans les Prairies, ce n'est pas toujours facile. Le sénateur Gustafson ne le sait que trop bien puisqu'il a été agriculteur, comme ses voisins, dans cette région toute sa vie et ça n'a pas toujours été facile. Il faudrait que les gouvernements créent des mesures qui permettraient aux agriculteurs de rester sur leurs terres en produisant, comme l'a mentionné M. Gray, des biens et services écologiques. Mais il faudrait que leurs efforts soient récompensés. Ça ne suffit pas de dire : « Vous devez changer vos pratiques parce que les substances que vous utilisez se retrouvent dans les rivières et tuent les poissons », parce que le propriétaire terrien voudra automatiquement savoir comment lui pourrait bénéficier d'un changement de pratique, et il a bien raison.
À titre de décideurs, nous devons adopter une perspective globale. Quelles sont les incidences de l'activité humaine sur nos terres, notre air, notre eau, notre biodiversité et notre faune? Comment faire pour les protéger? Le gouvernement a adopté une loi pour protéger les espèces en péril. De son côté, le ministère de l'Agriculture a créé le Cadre stratégique pour l'agriculture afin d'inciter les agriculteurs à changer leurs pratiques. Il y a une prise de conscience environnementale qui se cache sous ce cadre, et M. Gray et moi-même y avons beaucoup travaillé avec l'ancien et l'actuel ministre de l'Agriculture. Autrement, c'est vrai qu'il n'y a pas de panacée. Peut-être qu'il y en a une que connaît M. Gray, mais moi je ne la connais pas.
Le vice-président : Je voudrais que M. Gray nous en dise davantage, mais je me dois de vous dire que le temps file. Je pense que les principaux arguments ont été présentés. C'est le sénateur Oliver qui va poser la dernière question. Monsieur Gray, s'il vous reste des choses à dire, allez-y. Vous allez sans doute vouloir finir votre réponse à la question du sénateur Fitzpatrick. Allez-y je vous prie.
M. Gray : Pour répondre à votre question directement, telle que je l'ai comprise, il y a sept ans, l'impôt sur les gains en capital était de 75 p. 100. En d'autres termes, les dons de terres écologiques ont été assujettis à un impôt sur les gains en capital de 75 p. 100. Cet impôt a été réduit par la suite pour atteindre 37,5 p. 100 puis 25 p. 100. Sur le terrain, nous n'avons pas été inondés par les dons. Si on passait de 25 p. 100 à 0 p. 100, je peux vous assurer qu'on ne recevrait pas dix fois plus de terres en dons. Il y aura sans doute une augmentation, mais elle ne sera pas énorme. On veut que vous compreniez que toute aide est utile. Ce n'est que l'an passé qu'il y en a eu suffisamment, et nous existons depuis 25 ans. Vous êtes invités à examiner les dossiers de nos deux organisations. Vous verrez ainsi que les dons n'ont pas triplé au cours des trois dernières années.
Le sénateur Fitzpatrick : Si on éliminait effectivement l'impôt sur les gains en capital, il faudrait que, tous, nous identifions les terres en question et que nous fassions connaître l'existence des mesures incitatives visant la transformation de ces terres en zones écologiques. Il faudrait que les allègements fiscaux soient suffisamment significatifs pour inciter les gens à bouger.
M. Gray : Pour compléter la réponse de M. Turner, il est important que le gouvernement dise clairement aux Canadiens que nous chérissons les zones écologiques et qu'elles ont une importance certaine pour l'ensemble des Canadiens.
M. Turner : Un don culturel, comme une statue, une gravure ou encore un tableau de grande valeur qui s'apprécie, fait réaliser des gains en capital. Et pourtant, celui qui fait don d'un bien culturel à l'État ne paie pas d'impôt sur les gains en capital. À l'inverse, quand on fait don de terres, l'impôt sur les gains en capital s'élève à 25 p. 100. C'est injuste.
Le sénateur Fitzpatrick : Je suis d'accord.
Le sénateur Oliver : Très brièvement, monsieur le président. Il ne nous reste plus beaucoup de temps. Quelle est l'étendue de terre dont sont propriétaires Conservation de la nature Canada et Canards Illimités — s'agit-il de deux entités distinctes ou d'une seule? Quelle est l'étendue de vos terres et par quel régime fiscal sont-elles régies? En d'autres termes, êtes-vous exemptés de l'impôt municipal?
M. Gray : Non. Canards Illimités paie des impôts aux municipalités où se trouvent ses terres. Je ne sais pas comment cela se passe pour Conservation de la nature. Toutes nos terres sont assujetties aux impôts municipaux et provinciaux ainsi qu'aux impôts fonciers.
Le sénateur Oliver : Quel rapport y a-t-il entre Canards Illimités et Conservation de la nature Canada?
M. Turner : Nous sommes deux organisations distinctes. Par contre, nous nous intéressons toutes les deux à l'acquisition de terres à des fins de conservation.
Le sénateur Oliver : Achetez-vous des terres ensemble? Les dons de terres sont-ils faits à vos deux organisations en même temps?
M. Gray : Nous sommes des organisations distinctes et nous acquérons des terres séparément.
Le sénateur Oliver : Quelle est l'étendue de terres dont Canards Illimités est propriétaire?
M. Gray : Environ 250 000 acres.
Le vice-président : À l'échelle du Canada?
M. Gray : Oui.
Le sénateur Oliver : Et par conséquent, vous payez beaucoup d'impôts fonciers?
M. Gray : Dans la plupart des cas, nos terres sont évaluées en fonction du barème le plus bas, c'est-à-dire le taux agricole. C'est vrai que dans certaines régions on doit de temps en temps défendre nos droits, parce que les promoteurs immobiliers essaient de nous faire passer à la tranche supérieure pour construire sur nos terres. Mais actuellement, et ce, à l'échelle du Canada, nous sommes imposés au taux agricole.
Le sénateur Oliver : Aujourd'hui, dans le cadre de cette comparution, vos démarches visent l'impôt fédéral et les gains en capital. Tentez-vous, par ailleurs, de faire pression auprès des municipalités et des provinces pour faire baisser les impôts fonciers?
M. Gray : Pas encore. Sur le terrain, nous voulons vraiment faire partie des collectivités et payer notre juste part des infrastructures. Il est possible que dans une génération nous ayons pu recueillir toutes les informations économiques pertinentes pour démontrer que grâce à nos terres les collectivités attirent des touristes, par exemple. Mais pour l'instant, nous ne sommes pas prêts à entamer des démarches au niveau municipal.
Le sénateur Moore : Par rapport à ce que demandait le sénateur Oliver, lorsqu'on vous fait don d'une terre ou que vous l'achetez, y a-t-il un contrat établissant les utilisations futures de la terre en question? Le don est-il fait à perpétuité à des fins de conservation uniquement? Et si d'autres utilisations en sont faites, la terre est-elle rétrocédée? En d'autres termes, le donneur jouit-il d'un droit de premier refus lui permettant de racheter cette terre? Y a-t-il de tels accords?
M. Gray : En général, l'accord stipule que les terres doivent être utilisées à des fins écologiques, et ce, à perpétuité. Ça varie d'un donneur à l'autre. Certains demandent qu'on indique dans l'accord ce à quoi va être utilisée la terre et qu'en cas de non-respect, la terre est rétrocédée. Pour certains, ce n'est qu'une question de confiance et pour d'autres, les détails sont importants.
Le sénateur Gustafson : En général, d'où proviennent vos dons — de successions, de sociétés ou de particuliers?
M. Turner : De particuliers en général, parce qu'on ne peut faire don de terres de la Couronne à Canards Illimités.
M. Gray : De plus, lorsqu'on reçoit ou qu'on se porte acquéreur de terres, on les cède à la Couronne, aux provinces, en vertu d'un accord semblable à ceux dont on parlait plus tôt précisant le fait que les terres seront gérées à des fins écologiques à perpétuité et qu'en cas de non-respect, nous pouvons exercer notre droit de premier refus et reprendre les terres. Au Québec et en Ontario, nous cédons beaucoup de terres aux provinces. Par contre, on ne le fait pas en général dans les Prairies parce qu'il n'existe pas d'infrastructure permettant la bonne gestion des terres dans ces provinces.
Le sénateur Gustafson : Lorsqu'un agriculteur vous fait don de terres, les 500 000 $ en gains en capital s'appliquent- ils?
M. Gray : Oui, mais on vous dirait sans doute qu'on a besoin de toute l'aide disponible et on voudrait s'en tenir aux terres et non parler des dons.
Pour en finir avec cette question, vous avez sans doute vu la grande pancarte de Canards Illimités en bordure de l'autoroute 105, de l'autre côté de la rivière en allant vers Montebello. Nous avons récemment signé avec le gouvernement du Québec un accord d'acquisition de près de 5 000 hectares de terres longeant la rivière des Outaouais du côté québécois. Ces terres seront protégées à perpétuité grâce à la collaboration entre Canards Illimités, le gouvernement du Québec et les propriétaires privés de l'Outaouais.
Le vice-président : Messieurs, je vous remercie de votre comparution. Nous sommes venus nombreux et avons été très attentifs à vos recommandations, ce qui témoigne de l'intérêt que nous portons à ce sujet. Nous sommes impatients de vous retrouver au comité de l'énergie et de l'environnement, où vous aurez l'occasion de nous en dire encore plus
Nous allons maintenant accueillir des fonctionnaires qui sont venus réfuter certains des témoignages que nous avons entendus dans le cadre de notre étude sur les dons de charité.
Messieurs les fonctionnaires du ministère des Finances, bienvenue. À titre d'information, pourriez-vous décrire vos fonctions au ministère et nous expliquer pourquoi vous avez demandé de comparaître à nouveau?
[Français]
M. Serge Nadeau, directeur, Division de l'impôt des particuliers, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances : Je m'appelle Serge Nadeau et je suis directeur de la division de l'impôt des particuliers au ministère des Finances.
[Traduction]
M. Bill Murphy, agent principal, Politique de l'impôt, Division de l'impôt des particuliers, Direction de la politique de l'impôt, ministère de Finances : Je m'appelle Bill Murphy et suis agent principal de la politique de l'impôt au sein de la Direction de la politique de l'impôt du ministère des Finances.
Le vice-président : Vous avez suivi nos audiences — c'est vrai, en tout cas pour M. Nadeau il y a quelques semaines. Vous connaissez donc la teneur des témoignages que nous avons entendus. Dites-nous précisément pourquoi vous avez demandé qu'on vous accorde quelques minutes aujourd'hui.
M. Nadeau : Honorables sénateurs, je vous remercie de cette occasion qui m'est donnée pour vous présenter des renseignements supplémentaires sur le traitement fiscal des dons de bienfaisance. Aujourd'hui, mon principal objectif est d'attirer votre attention sur des points essentiels à considérer pour évaluer deux suggestions présentées au comité par d'autres témoins, en particulier la semaine dernière. Premièrement, j'aimerais parler de questions relatives aux propositions visant à étendre aux fondations privées le taux d'inclusion réduit de moitié applicable aux gains en capital découlant de dons de titres cotés en bourse. Deuxièmement, je voudrais vous parler des propositions visant à éliminer la partie restante de l'impôt sur les gains en capital qui frappe ces dons.
Mon mémoire ayant été distribué, je vais donc passer ces points en revue.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette : Monsieur le président, j'aurais un point à soulever. Notre invité me semble être francophone. Nous avons très peu de témoins qui parlent français et l'on apprécierait, lorsque ce sont des fonctionnaires du gouvernement, qu'ils s'adressent à nous, de temps à autres, dans leur langue maternelle pour notre grand plaisir et pour permettre à nos collègues d'entendre la traduction. Je suis certaine que vous maîtrisez la langue française, monsieur Nadeau, mais la majorité du temps nous entendons les témoins en anglais et cela nous fait plaisir de parler dans notre langue.
Le président : Je vous remercie sénateur, toutefois les témoins savent que c'est leur droit de choisir leur langue.
M. Nadeau : Monsieur le président, si on préfère que je parle en français, il me fera un grand plaisir de le faire. Permettez-moi de commencer par un examen des questions relatives à l'extension du taux d'inclusion réduit à moitié aux dons faits à des fondations privées.
Il existe à l'heure actuelle environ 8 000 fondations de bienfaisance enregistrées au Canada dont environ 50 p. 100 sont publiques et 50 p. 100 privées. Les fondations privées estiment qu'elles devraient bénéficier du même traitement fiscal préférentiel que les autres organismes de bienfaisance enregistrés, étant donné que leurs fonds sont affectés à des services de bienfaisance approuvés.
Nous reconnaissons le rôle important que jouent les fondations privées pour combler les besoins de la collectivité qu'elles veulent aider. Cependant, le fonctionnement d'une fondation privée et ses relations avec ses fondateurs diffèrent du fonctionnement d'une fondation publique et de ses relations avec son conseil d'administration.
En outre, le coût assumé par l'État pour étendre aux fondations privées le taux d'inclusion réduit de moitié entre en jeu. J'aimerais me concentrer sur une question importante : la possibilité d'opérations entachées d'un intérêt personnel lorsqu'il advient des dons à des fondations privées. La question se pose car, en règle générale, il y a des liens de dépendance entre les donateurs aux fondations privées et les administrateurs de ces dernières. Les donateurs et les administrateurs d'une fondation privée sont souvent les mêmes personnes. Par opérations entachées d'un intérêt personnel, j'entends le fait qu'un donateur, à cause des relations entretenus par cette personne avec une fondation privée, pourrait garder par l'entremise de cette fondation un droit de vote pour les actions données et, peut-être, en tirer un avantage économique du pouvoir qu'elle conserve sur ces actions, surtout si elle détient un grand bloc majoritaire d'actions d'une société publique.
Ainsi, cette personne, à cause de ses intérêts commerciaux à l'extérieur de la fondation, pourrait décider que des actions données d'un certain type seraient conservées par la fondation dans des cas où un administrateur de fondation qui agirait sans lieu de dépendance vendrait ses actions afin d'optimiser les avantages pour l'organisme de bienfaisance.
La question des opérations entachées d'un intérêt personnel est moins importante dans le cas des organismes publics de bienfaisance. En effet, dans ces cas il n'y pas normalement de lien de dépendance entre le donateur et le conseil d'administration. Les donateurs ont donc beaucoup moins de pouvoir sur l'utilisation de leur action après avoir fait un tel don. Des règles pour limiter les opérations entachées d'un intérêt personnel, comme celles qui ont été adoptées aux États-Unis, pourraient nécessiter des mécanismes très complexes. On pourrait, par exemple, imposer des limites strictes sur le fait pour la fondation de détenir un certain titre sur les administrateurs de cette dernière où des personnes apparentées auraient le contrôle de l'entreprise en question.
Comment évaluer ce contrôle, selon les paramètres à fixer dans une loi? Ce serait une tâche très complexe. Le secteur des organismes de bienfaisance a reconnu que les opérations entachées d'un intérêt personnel constituent un problème réel. Toutefois, le présent comité a également entendu des témoins qui étaient d'avis que les modifications récemment proposées aux règles applicables aux organismes de bienfaisance enregistrés permettraient de régler cette question. Tel n'est pas le cas.
Le budget de 2004, envisageait une sanction intermédiaire dans le cas d'un avantage injustifié, mais la proposition reprend essentiellement l'interdiction générale existante de la Loi de l'impôt sur le revenu et ne vise qu'une sanction moins sévère pour les infractions mineures ou premières. Donc, le budget de 2004 ne résout pas du tout les questions qui pourraient relever des opérations entachées d'un intérêt personnel dans le cas d'un don d'actions à une fondation privé. En fait, elle ne présente aucune règle nouvelle ou différente pour traiter des subtilités des opérations entachées d'un intérêt personnel.
En conclusion, il existe des raisons stratégiques valides pour que les mêmes règles s'appliquent aux fondations privées et publiques. Leur travail et leur soutien du secteur bénévole sont importants pour combler les besoins de la collectivité. La question des opérations entachées d'un intérêt personnel n'est cependant pas banale, et devrait être réglée pour satisfaire les besoins des fondations et les objectifs stratégiques du gouvernement.
J'aimerais parler des propositions que vous avez entendues sur l'élimination complète de l'impôt sur les gains en capital qui frappent les dons de titres cotés en Bourse faits à des organismes publics de bienfaisance. Je crois que cela faciliterait le travail du comité si je présentais deux commentaires soulevés à cet égard : d'abord, le coût budgétaire de l'application du taux d'inclusion réduit de moitié et, ensuite, l'assistance offerte aux États-Unis. On vous a présenté certaines comparaisons la semaine dernière et j'aimerais réviser ces comparaisons.
À l'heure actuelle, pour la plupart des dons de titres cotés en Bourse, le soutien gouvernemental s'établit dans l'ensemble à environ 53 p. 100 du coût du don, tandis que le donateur prend à sa charge environ 47 p. 100 du don. On le voit au tableau 1, à la page six de la version française de mes notes. Le pourcentage précis variera selon la province et selon le montant des gains en capital. Le donateur décide de l'organisme de bienfaisance qui recevra le don et de la période pendant laquelle le don se fera. Mais dans chaque cas, le soutien gouvernemental correspond au moins à la moitié du coût. Si l'impôt sur les gains en capital était retiré totalement, le soutien gouvernemental passerait à environ 60 p. 100 du coût. Donc, le donateur assumerait seulement 40 p. 100, alors que le gouvernement, c'est-à-dire les contribuables assumeraient 60 p. 100 du coût.
Combien cette mesure coûte-t-elle en revenus auxquels l'État renonce? Comme vous le savez peut-être, le ministre des Finances publie chaque année une étude sur les coûts dans le passé de cette mesure. D'ailleurs, à chaque année nous publions le rapport intitulé Dépenses fiscales et évaluations.
Le tableau 2 a été tiré du rapport de 2004. La note explicative afférente au tableau 2 est essentielle pour comprendre le coût de cette mesure. Il est impossible de quantifier de façon précise les coûts entraînés par la mesure sans savoir comment les donateurs auraient agi en l'absence de celle-ci. C'est pourquoi on indique un plafond et un plancher pour chaque année. Le plancher indique que le coût pour le gouvernement fédéral serait de sept millions de dollars en 2003, si la mesure ne donnait pas lieu à aucune hausse des dons de bienfaisances, c'est-à-dire si tous les donateurs remplaçaient simplement leurs dons en espèces par des dons d'actions. En pareil cas, le coût marginal pour le gouvernement fédéral serait l'impôt sur les gains en capital auquel il aurait renoncé, c'est-à-dire pour l'année de 2003, environ sept millions de dollars.
À l'opposé, il se peut que chaque don d'actions admissible ait été un don qui n'aurait pas été effectué autrement. D'ailleurs, c'est ce que l'on a argumenté la semaine dernière : avoir une réduction d'impôt en termes du gain en capital augmenterait ces dons. En pareil cas, le coût pour le gouvernement comprendrait l'impôt sur les gains en capital auquel il aurait renoncé et les crédits pour les dons de bienfaisance associés aux nouveaux dons. Selon ce scénario, le coût est évalué à 53 millions de dollars pour 2003. Donc, ici on a une valeur plancher et une valeur plafond entre sept millions et 53 millions de dollars. Nul doute que la vraie valeur est probablement entre les deux.
Toutefois, on ne peut conclure que pratiquement tous les dons d'actions ont été faits à la suite de la mesure d'incitation ni que la mesure a seulement encouru des coûts de sept millions de dollars par année. La mesure peut avoir été un franc succès, alors les coûts sont élevés, et si la mesure n'a pas eu de succès, les coûts sont faibles.
Maintenant, en ce qui a trait au traitement fiscal des dons au Canada et aux États-Unis, comme le comité a déjà discuté de ces questions, permettez-moi de présenter une comparaison de la générosité relative du régime fiscal applicable aux dons de titres au Canada et aux États-Unis. Tel qu'indiqué au tableau 3, le taux effectif à l'aide fiscale est à peu près le même dans les deux pays. Bien qu'aux États-Unis, les gains en capital sur les dons ne soient pas imposés, les incitatifs fiscaux sont semblables parce que la déduction pour dons de bienfaisance aux États-Unis est moins généreuse que le crédit pour dons de bienfaisance au Canada. En 2004, le taux effectif d'aide fiscale est d'environ 53 p. 100 au Canada et de 52 p. 100 aux États-Unis.
En outre, le régime fiscal américain impose plusieurs restrictions sur la capacité d'un donateur d'obtenir de l'aide fiscale, restrictions qui ne sont pas de la même envergure au Canada. Les donateurs américains peuvent demander des déductions au titre des dons jusqu'à concurrence de 30 p. 100, de façon générale, du revenu brut rajusté seulement, par rapport à 75 p. 100, ou plus, du revenu net au Canada. Ce facteur peut être très important dans le cas de dons de forte valeur. On vous a fait cette remarque la semaine dernière. Par ailleurs, dans le cas des Américains à revenu élevé, on retranche actuellement de la déduction pour dons de bienfaisance trois p. 100 du revenu en sus d'à peu près 140 000 dollars jusqu'à concurrence de 80 p. 100 de la valeur de la déduction. Cette mesure de récupération devrait être éliminée progressivement, d'ici 2010, aux États-Unis. Au Canada, aucune disposition de récupération n'est prévue.
Vous serez sans doute intéressés de savoir que le traitement fiscal des dons en espèces est plus généreux au Canada qu'aux États-Unis à plusieurs égards. Pour les contribuables à revenu faible ou moyen, le crédit canadien, qui est fixé au taux marginal supérieur, une fois que le donateur a versé au moins 200 dollars en dons dans l'année, vaut plus que la déduction américaine. La plupart des donateurs américains n'obtiennent aucun avantage fiscal sur un don de bienfaisance supplémentaire parce qu'ils choissent la déduction forfaitaire, qui ne leur permet pas de présenter leur don aux organismes de bienfaisance.
En résumé, le traitement fiscal des dons en espèces est nettement plus généreux au Canada qu'aux États-Unis pour la plupart des donateurs. Par contre, pour les dons de titres cotés en Bourse à des organismes publics de bienfaisance, le traitement fiscal est, dans l'ensemble, à peu près semblable, surtout compte tenu des restrictions au pourcentage admissible du revenu du donateur et des mesures de récupération.
Enfin, j'aimerais mentionner la question d'équité entre les contribuables qui versent des dons en espèces aux organismes de bienfaisance et ceux qui font des dons d'actions. Ces derniers, qui, en règle générale, sont des contribuables à revenu plus élevé, sont déjà favorisés par le régime fiscal (tel qu'indiqué au tableau 1). Pourtant, les organismes de bienfaisance comptent beaucoup plus sur les dons en espèces que sur les dons de titres.
Je suis disposé à répondre aux questions des honorables sénateurs.
Le vice-président : Monsieur Nadeau, il est évident que vous mettez un peu d'eau froide sur les autres témoignages. Mais malgré tout, comment expliquez-vous le fait que les dons soient beaucoup plus élevés aux États-Unis qu'ici, au Canada?
M. Nadeau : Plusieurs hypothèses ont été faites.
Le vice-président : Ce doit être parce qu'aux États-Unis, il y a d'autres incitatifs pour donner davantage. Si je comprends bien, vous faites une comparaison entre des pommes et des pommes?
M. Nadeau : Plusieurs hypothèses ont été faites, notamment celle reliée à la taille du secteur public aux États-Unis comparativement à la taille du secteur public au Canada. Au Canada, le gouvernement est beaucoup plus impliqué en ce qui a trait à l'éducation, à la santé et à la pauvreté. D'ailleurs, on a fait parvenir des statistiques au comité. La taille du secteur public au Canada est d'environ 34 p. 100 alors que la taille du secteur public aux États-Unis est d'environ 25 p. 100.
Beaucoup de Canadiens ont délégué à l'État des responsabilités en termes d'activités charitables. On l'explique souvent de cette façon.
[Traduction]
Le sénateur Tkachuk : Au tableau 3 de la page 10 de votre document, sous la rubrique Taux marginal supérieur d'imposition, pour le Canada, c'est 46 p. 100 et pour les États-Unis 40 p. 100. Cette tranche d'imposition s'applique à quel revenu?
M. Nadeau : À environ 350 000 $ en devises canadiennes.
Le sénateur Tkachuk : Et au Canada?
M. Nadeau : 113 000 $.
Le sénateur Tkachuk : Pour les revenus de 50 000 à 120 000 $, est-ce que notre taux d'imposition est semblable au leur?
M. Nadeau : Notre taux d'imposition est beaucoup plus élevé. Dans les États où les taux sont les plus faibles, la différence peut être de 10 p. 100.
Le sénateur Tkachuk : Je me suis toujours demandé comment on établissait les tranches d'imposition. La seule chose qui change, c'est que le gouvernement ne touche pas l'argent. Il est dépensé de toute façon, soit pour répondre à un besoin que le gouvernement aurait eu de toute façon, soit pour acheter des biens et services dont le gouvernement touchera les taxes de vente et l'impôt sur le revenu.
Il y a un argument qui est avancé par beaucoup d'économistes qui veut que l'argent qui circule à l'extérieur du gouvernement génère en fait des revenus pour le gouvernement. Il est possible que si on donne de l'argent aux organismes de bienfaisance, cet argent sera mieux dépensé et générera une activé économique accrue dont le gouvernement bénéficiera. Comment quantifier ces bénéfices?
M. Nadeau : Ce que vous dites est vrai. C'est un argument qui est souvent répété et qui tient la route. Différents choix s'offrent à nous. On pourrait faire bénéficier les organismes de bienfaisance de mesures fiscales de 50 millions de dollars ou bien, on pourrait utiliser ce même argent pour réduire les impôts, inciter le développement économique, entre autres activités. Ce qu'il faut savoir c'est ce qui risque d'être le plus rentable. Serait-il plus rentable de donner de 50 millions de dollars aux organismes de bienfaisance, qui font beaucoup de choses louables, de dépenser l'argent ailleurs ou de mettre en place des réductions d'impôt de 50 millions. La réponse n'est pas évidente.
Le sénateur Tkachuk : Les divers témoins qui ont comparu nous ont donné leurs statistiques et il est possible qu'ils aient été un peu trop généreux en leur faveur, pour ce qui est des avantages et des répercussions fiscales. Les statistiques que vous avancez ne sont pas de vrais chiffres parce que vous ne pouvez pas dire voici les coûts que devra assumer le gouvernement par rapport à leurs coûts parce que même si le contribuable bénéficie d'une déduction, l'argent est tout de même dépensé et l'impôt sur le revenu payé. En d'autres termes, l'argent stimule toujours l'économie et vient s'ajouter au trésor public même si il n'a pas transité par le gouvernement.
Je suis d'avis que l'argent serait mieux dépensé par les organismes de bienfaisance que par le gouvernement. Ça ne veut pas dire que les autres sénateurs sont d'accord avec moi. Je pense qu'il est juste de dire que les chiffres que vous nous avez apportés ne sont pas exacts non plus, n'est-ce pas?
M. Nadeau : Vous avez raison dans la mesure où les statistiques ne reflètent pas les retombées économiques. Par contre, c'est un fait qu'un crédit d'impôt sur un don se traduit par de l'argent dans les poches du contribuable. Ce qui veut dire que certains contribuables subventionnent ce transfert de crédit d'impôt, ce qui est acceptable. C'est un choix fait par le gouvernement. Par contre, qu'est-ce qui vaut mieux : accorder 50 millions de dollars aux organismes de bienfaisance ou réduire les impôts de 50 millions dollars, par exemple? Si on opte pour les allègements fiscaux, l'argent reste dans le secteur. On pourrait aussi décider d'augmenter la prestation nationale pour enfants de 50 millions de dollars. C'est ce genre de comparaison qui s'impose et ce n'est pas toujours facile. Vous avez raison de dire que les 50 millions de dollars, c'est un plafond, dans une certaine mesure.
Le sénateur Tkachuk : Tout à fait. Ce n'est pas le montant exact. On ne peut pas tout simplement accepter les chiffres. On peut accepter les concepts mais pas les chiffres. Si on regroupait des experts en économie, il y a aurait certainement des divergences d'opinion quant à l'impact de cet argent qui se retrouverait ailleurs que dans les coffres de l'État. Certains diraient sans doute même que l'impact économique serait tel que le gouvernement toucherait davantage en impôt en investissant dans les organismes de bienfaisance.
M. Nadeau : Je n'ai pas entendu dire que le gouvernement percevrait ultimement plus d'impôt que l'allégement fiscal accordé. Je ne pense pas que ce serait le cas. Quoi qu'il en soit, d'aucuns pourraient dire que la dépense fiscale est moins élevée.
Le sénateur Tkachuk : Cela expliquerait peut-être la raison pour laquelle nous avons les impôts que nous avons.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette : Ma question sera assez courte. On nous a donné des statistiques et on nous dit que 43 p. 100 des organismes qui faisaient des dons de charité étaient du côté religieux. J'ai posé la question sur les exigences du ministère en ce qui concernait les exigences auprès de ces communautés religieuses. On me dit que les exigences ne sont pas aussi rigoureuses que pour d'autres organisations. Je voulais savoir si on avait les mêmes standards pour tout ce qui s'appelle organismes religieux que pour les organismes qui sont à caractère civil.
M. Nadeau : La Loi de l'impôt sur le revenu a absolument les mêmes exigences, que ce soit un organisme religieux ou un organisme à but éducatif. En termes d'administration, on a ici des personnes de l'Agence du revenu du Canada qui pourraient peut-être répondre. Je ne voudrais pas répondre pour eux, mais je pense qu'ils ont absolument les mêmes critères, que ce soit pour un organisme ou l'autre. Ils ont des règles à suivre et les suivent de leur mieux.
Le sénateur Hervieux-Payette : Je m'inquiète de cela et je pose la question parce qu'on nous a dit que certains mouvements à caractère religieux auraient pu avoir un caractère terroriste. Je me demandais quel genre de vérification se faisait et comment ces gens se qualifiaient, surtout sur la question de l'ensemble des rapports faits, à savoir s'ils dépensent trois fois plus que ce qu'ils déclarent recevoir.
Je ne sais pas comment c'est géré, mais chose certaine c'est qu'on me dit qu'il y a peut-être plus de reçus que de dons. C'est la donnée que j'ai et que je ne peux prouver, mais je pose la question justement pour avoir la réponse.
M. Nadeau : Du point de vue de la loi, c'est la même chose. Toutefois, du point de vue de l'administration, il est difficile de répondre parce que nous ne sommes pas responsables de l'administration. Mais une personne de l'Agence du revenu du Canada pourrait répondre à cette question spécifique.
[Traduction]
Le vice-président : Étant donné l'heure, je voudrais vous remercier tous les deux. Si vous aviez la gentillesse de consulter votre collègue de l'ARC au sujet de la question du sénateur Hervieux-Payette et de préparer toute information pertinente pour nous et nous la faire parvenir le plus rapidement possible, ce serait utile. Nous tiendrons des audiences demain, si cela est possible.
Vous avez exprimé une grave préoccupation au sujet de toute mesure accordant un autre avantage fiscal aux fondations privées, et vous avez parlé d'opérations d'initiés. Nous n'avons pas eu le temps d'explorer ces questions, mais peut-on dire que vous êtes venus ici ce soir pour nous faire une petite mise en garde en disant : « Eh, sénateurs, avant de recommander de gros changements aux allégement fiscaux, veuillez prendre note de toutes ces choses »?
[Français]
C'est pour qu'on mette un peu les freins et pour nous avertir que ce n'est pas si simple que cela.
M. Nadeau : Exactement.
Le vice-président : Au nom du comité, je vous remercie tous les deux. C'est très intéressant et cela nous aide beaucoup dans notre étude.
[Traduction]
Le vice-président : Permettez-moi maintenant, au nom du Comité permanent sénatorial des banques et du commerce, de souhaiter chaleureusement la bienvenue au ministre.
Nous sommes ici ce soir afin d'examiner le projet de loi C-5, un projet de loi spécial intitulé Loi sur l'aide financière à l'épargne destinée aux études postsecondaires. Je crois que le projet de loi n'a été renvoyé à notre comité que cet après-midi, après avoir franchi les étapes habituelles à la Chambre des communes, notamment l'étude en comité. Le projet de loi a été lu une première et une deuxième fois au Sénat. Monsieur le ministre, nous sommes ici pour que vous et vos collègues nous expliquiez en quoi consiste ce projet de loi et nous disiez pourquoi nous devrions l'adopter rapidement.
L'honorable Joseph Volpe, C.P., député, ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences : Merci, monsieur le vice-président. Je voudrais tout d'abord remercier votre comité qui s'est engagé à examiner rapidement ce projet de loi qui est à mon avis très important. Ce n'est pas pour rien qu'il a été l'un des premiers projets de loi à être présentés à la Chambre lorsque le Parlement a repris ses travaux à l'automne.
[Français]
Je vous remercie de me donner l'occasion de vous expliquer l'objet de la Loi canadienne sur l'épargne-études. Cette loi, un des faits saillants du dernier discours du Trône, est axée sur l'avenir et elle représente un investissement sain dans l'avenir de nos enfants, de notre nation et de tous les citoyens qui seront les maîtres d'œuvre de notre prospérité dans le futur.
[Traduction]
C'est pourquoi l'objet principal de cette loi est d'aider les familles à faible revenu à investir dans les études postsecondaires futures de leurs enfants. Elle s'ajoute à d'autres mesures pour offrir aux étudiants d'aujourd'hui, de niveau postsecondaire, une aide financière supplémentaire, dont les importantes améliorations apportées au Programme canadien de prêts aux étudiants et à la Subvention canadienne pour études.
Le but du gouvernement du Canada est de veiller à ce qu'aucun Canadien qualifié ne soit exclu de l'enseignement postsecondaire par manque de ressources financières. Afin d'atteindre cet objectif, nous devons investir dans l'avenir de nos enfants. J'utilise ce terme collectivement car les enfants qui naissent chaque jour cette année nous appartiennent à chacun d'entre nous, et ils font partie de notre composante canadienne, de notre avenir tout comme de notre présent. Le projet de loi C-5 prévoit d'ailleurs plusieurs mécanismes qui permettront aux Canadiens de faire cet investissement en planifiant les études postsecondaires de leurs enfants et petits-enfants et en épargnant à cette fin.
Nos études révèlent — comme si nous ne le savions pas, que 93 p. 100 de tous les parents souhaitent que leurs enfants poursuivent des études collégiales ou universitaires. Cela fait tout à fait partie de notre culture. Nous savons également que depuis son introduction, la Subvention canadienne pour l'épargne-études a eu beaucoup de succès et a un large appui comme le révèlent les études. Par exemple, à ce jour, les parents et les grands-parents ont investi 13 milliards de dollars dans les régimes enregistrés d'épargne-études ou REEE et le gouvernement a versé des subventions d'une valeur de 2 milliards de dollars. Tout cela s'est fait au cours des six dernières années.
Cependant, et je le souligne, seulement 8 p. 100 des familles dont le revenu est de 25 000 $ ou moins investissent dans les REEE ou profitent de la Subvention canadienne pour l'épargne-études.
La plupart des familles souhaitent évidemment investir dans l'éducation de leurs enfants, mais de nombreux Canadiens à faible revenu n'ont pas les moyens financiers nécessaires ou, pourrait-on dire, ne savent pas comment s'y prendre, ne comprenant pas les mécanismes d'investissement ou d'épargne. D'autres études démontrent qu'un patrimoine principalement constitué de l'épargne pour les études postsecondaires est tout aussi important qu'un revenu pour le bien-être. Nous nous concentrons sur la constitution d'un patrimoine. Les parents, quant à eux, s'occupent de gagner un revenu.
Le projet de loi C-5, qui repose sur une politique axée sur le cumul d'un capital reconnaît que les personnes à faible revenu doivent elles aussi se constituer un patrimoine pour assurer leur avenir, tout comme le font les familles à revenu moyen et plus élevé. Cette réalité nous est encore plus évidente lorsque nous prenons connaissance de la réponse des jeunes Canadiens lorsque Statistique Canada leur a demandé dans un sondage récent si d'autres personnes ou eux- mêmes avaient épargné pour leurs études postsecondaires. Les répondants qui avaient suivi des études postsecondaires ont répondu en plus grand nombre par l'affirmative. Par exemple, ceux qui avaient des économies avaient suivi des études postsecondaires à hauteur de 74 p. 100 par opposition à 50 p. 100 pour ceux qui n'avaient pas fait d'économies. Le but du projet de loi C-5 est d'aider les Canadiens à revenu moyen ou à faible revenu à accumuler ce patrimoine essentiel.
Je vais expliquer les principaux éléments de la loi. Tout d'abord, il y a un élément nouveau. Le bon d'études canadien constitue cette clé de voûte et il s'agit d'une subvention non renouvelable de 500 $ offerte aux enfants nés le 1er janvier 2004 ou après.
Le vice-président : D'habitude, je n'interviens pas en plein milieu d'un exposé, mais j'ai une question à poser et ce sera d'ailleurs la seule que je poserai. Ce bon d'études canadien — s'agit-il d'un bon comme d'une garantie qui lie les gens ensemble ou s'agit-il d'un bon comme un bon d'épargne, c'est-à-dire une formule ou un sobriquet dont le gouvernement a affublé cette initiative précise?
M. Volpe : J'espère qu'il s'agit d'un bon d'épargne qui sera perçu comme un sobriquet parce que nous voulons nous servir de ce bon pour lier les gens à l'idée et à la culture d'épargne en vue d'études postsecondaires.
Le vice-président : Il s'agit donc d'un nom conventionnel, en quelque sorte?
M. Volpe : Il s'agit du bon d'épargne, de l'instrument financier.
Le sénateur Hervieux-Payette : Leur donnera-t-on l'argent?
M. Volpe : Ils obtiendront 500 $. Nous le déposerons à la banque pour les ayants droit, nous déposerons le montant à un compte et il y restera, accumulant des intérêts, jusqu'à ce que l'enfant soit en mesure de poursuivre des études postsecondaires.
Je fais un aparté, parce que vous m'avez posé une importante question. En plus de cela, honorables sénateurs, le montant de 500 $ est augmenté d'un montant additionnel de 100 $ chaque année par le gouvernement du Canada tant et aussi longtemps que la famille se trouve dans la catégorie qui reçoit la prestation nationale pour enfants. Si la famille améliore sa situation financière et n'est plus admissible à cette prestation, alors elle n'est plus admissible au montant additionnel de 100 $ qui s'ajoute aux 500 $ du début pendant 15 ans, ce qui suppose, évidemment, que la situation économique ou sociale de la famille ne s'améliore guère pendant cette période. Nous espérons que ce ne sera pas le cas.
Nos politiques économiques et sociales — permettez-moi de vanter un peu les succès du gouvernement — permettront à un nombre croissant de personnes de passer aux catégories plus élevées de revenu. Pour ceux qui ne réussissent pas à le faire, nous avons le genre de politiques que nous vous proposons ici. Tant que la famille demeure admissible à la prestation fiscale pour enfants, le montant de 100 $ est ajouté au compte de banque ouvert au titre du bon d'études canadien et qui permet le cumul des intérêts au nom de cet enfant qui pourra alors s'en servir lorsqu'il ou elle sera en mesure de poursuivre des études postsecondaires, c'est-à-dire jusqu'à l'âge de 25 ans, n'est-ce pas? Non, jusqu'à l'âge de 21 ans, mais il était question de 25 ans environ.
Il faut que ce choix s'exerce. Le gouvernement du Canada, c'est-à-dire nous tous, est prêt à investir dans cette constitution de capital et nous sommes prêts à aider à augmenter le capital. Nous voulons encourager les familles à augmenter ce capital. Nous les encourageons; nous ne les y obligeons pas. Elles peuvent y investir un montant égal à celui du gouvernement chaque année ou encore plus. Le régime enregistré d'épargne-études donne ce choix. C'est ce que veut faire le gouvernement du Canada. Comme je l'ai dit, honorables sénateurs, il ne s'agit pas d'offrir tout simplement un bon de garantie qui servira ensuite à payer des études un peu plus tard, mais il s'agit de créer chez la famille cette idée d'épargner pour l'avenir. D'ordinaire, les familles qui jouissent d'un revenu se situant entre 25 000 et 35 000 $ par année ont de la difficulté à se constituer un capital. Nous voulons leur donner l'occasion de le faire.
Le vice-président : Merci pour cet éclaircissement. Pour ce qui est de la stratégie de communication entourant cette initiative louable, vous avez choisi un nom. J'espère que ça va fonctionner.
M. Volpe : Nous aussi et merci.
Je poursuivrai maintenant mon exposé, mais vous pourrez interrompre si vous préférez cette méthode. Permettez- moi d'inscrire au compte rendu quelles sont nos intentions et vous pourrez en juger par vous-mêmes.
Tout enfant né le 1er janvier 2004 ou après cette date est admissible au régime d'office pourvu qu'il ou elle soit né dans une famille qui répond aux conditions financières énoncées. Les parents ne sont pas obligés de contribuer au régime enregistré d'épargne-études de l'enfant pour recevoir ce bon. Ils doivent cependant fournir un certificat de naissance et un numéro d'assurance sociale, c'est-à-dire un N.A.S., et ensuite se rendre à la banque en expliquant qu'ils veulent y ouvrir ce compte. C'est une démarche que doivent entreprendre les parents. Nous ne voulons pas passer pour paternaliste ou suffisants, mais c'est la première démarche : « Allez mettre de côté ce capital de 500 $ qui rapporte des intérêts pour votre enfant. Tout ce qu'il vous faut c'est de fournir une copie de l'acte de naissance, d'obtenir un numéro d'assurance sociale et c'est parti. »
Le vice-président : Il faut ouvrir un compte, c'est-à-dire un REER. Allez-vous leur offrir un montant de 25 $ pour ce faire?
M. Volpe : C'est exact, parce que nous pensons que c'est tout ce que cela coûtera et les banques nous ont assurés qu'elles n'en demanderaient pas plus. D'après le vieil adage, qui veut la fin prend les moyens. Nous essayons de mousser la fin.
De plus, et jusqu'à l'âge de 15 ans, parce que dans la plupart des provinces les enfants doivent fréquenter l'école jusqu'à l'âge de 16 ans, on donnera un montant annuel additionnel de 100 $ à chacun de ces enfants. Le projet de loi en rajoute et prévoit des améliorations au niveau de la subvention canadienne pour épargne-études, c'est-à-dire le programme de la SCEE. Lorsque les parents contribuent à leur REEE, le gouvernement accorde une subvention de contrepartie et c'est très bien. Les familles disposant d'un revenu net de 35 000 $ ou moins reçoivent une subvention de contrepartie de 40 p. 100 pour la première tranche de 500 $ investie dans le REEE chaque année. S'ils y investissent 1 $, nous ajouterons 0,40 $. C'est une augmentation par rapport au 20 p. 100 actuel. Nous tenons à encourager les gens à participer à cette culture du savoir. Nous reconnaissons que les conditions exigeaient que nous fassions un effort supplémentaire. Nous sommes en mesure d'en faire plus et nous en ferons plus à l'avenir.
Pour les familles dont le revenu se situe entre 35 000 $ et 70 000 $ par année, la contrepartie passera de 20 p. 100 à 30 p. 100. On suppose que ces familles investissent déjà et cumulent un capital, ce qui signifie que les instruments disponibles fonctionnent très bien pour elles. Cependant, passer de 20 p. 100 à 30 p. 100 représente une augmentation de 50 p. 100 au niveau de la contrepartie. De plus, le pourcentage de contrepartie sera encore de 20 p. 100 pour tous les autres REEE.
Le projet de loi lance le bon d'études canadien, mais on y apporte aussi quelques modifications à la subvention canadienne pour épargne-études. On prévoit que 4,5 millions d'enfants pourraient profiter de la SCEE bonifiée l'an prochain. Si on tient compte des 13 milliards de dollars investis dans les REEE et des améliorations prévues par ce projet de loi, un plus grand nombre de parents pourraient investir dans l'avenir de leurs enfants et cela pourrait se traduire par un plus grand nombre d'inscriptions à l'avenir.
[Français]
Si on examine le processus d'adoption de ce projet de loi jusqu'à aujourd'hui, on constate que nombreux sont ceux qui appuient ces mesures afin d'aider les familles à faible revenu et à revenu moyen à épargner en vue des études postsecondaires de leurs enfants.
Les députés des différents partis politiques qui ont siégé au comité permanent de la Chambre ont largement facilité ce processus.
[Traduction]
Néanmoins, neuf amendements ont été proposés et ils ont tous obtenu l'aval des membres du comité. La plupart étaient d'ordre technique et ont été proposés par mon secrétaire parlementaire en mon nom et en celui du ministère. J'aimerais cependant m'attarder sur deux amendements de fond qui, me semble-t-il, ont amélioré le projet de loi et nous avons été heureux de les adopter.
On a proposé et accepté des amendements accessoires qui élargiraient la portée de la Loi de l'impôt sur le revenu, à laquelle est assujetti le REEE, afin que les étudiants à temps partiel dans les collèges ou universités puissent recevoir des prestations d'aide à l'éducation. Puisque le nombre de ce genre d'étudiants augmente régulièrement, nous avons cru bon qu'ils puissent continuer de profiter des principes qui sont à la base même de notre pensée à ce sujet. À l'heure actuelle, seuls les étudiants à temps complet peuvent puiser dans leurs épargnes versées dans un REEE pour financer leur éducation. Grâce à cet ajout, le gouvernement reconnaît que l'éducation a plusieurs facettes. Ce n'est pas tout le monde qui s'enferme entre les quatre murs d'une salle de classe à longueur d'année. Parfois, on a l'occasion de travailler et d'étudier en même temps. Les responsabilités familiales et financières ainsi que les choix personnels sont autant de facteurs dont chacun tient compte au moment de prendre des décisions touchant l'éducation.
[Français]
Nul n'a besoin de nous dire que les Canadiens à faible revenu sont ceux qui, le plus souvent, suivent des cours à temps partiel et ce sont précisément ces Canadiens que nous voulons aider. Cette disposition visant les études à temps partiel peut inciter une personne à s'inscrire au collège ou à l'université au lieu de se contenter de moins.
Un autre amendement qui nous réjouit porte sur les mesures visant à s'assurer que les Canadiens sont informés des bonifications.
[Traduction]
Difficile à croire, mais il nous fallait une modification à la Loi pour nous rappeler de vanter haut et fort les avantages du projet de loi afin de nous assurer que les gens en profiteraient. Cela fut fait et nous sommes maintenant obligés de faire ce que nous espérions faire. Nous mettons au point un programme de promotion et de sensibilisation qui s'ajoutera aux produits habituels de communication et à la campagne publicitaire nationale. Nous souhaitons faire une promotion de masse et nouer des partenariats avec les organismes communautaires intervenant auprès des groupes cibles. L'amendement fait en sorte que notre programme de promotion et de sensibilisation sera permanent.
Je suis également ravi de constater l'esprit de collaboration qui a mené à l'adoption rapide du projet de loi en Chambre. Cet esprit démontre les grandes choses que les parlementaires peuvent accomplir lorsqu'ils unissent leurs efforts et il contribue à nous aider à respecter des délais serrés et des visées ambitieuses.
Afin de mettre en place les mesures prévues par le projet de loi, les institutions financières auront besoin d'au moins six mois pour mettre à niveau leurs systèmes et former leurs employés, mais cela, vous le savez mieux que moi.
On a déjà annoncé les premiers programmes provinciaux de contrepartie. En 2005, nous soulignerons le 100e anniversaire de l'entrée de l'Alberta dans la Confédération. Pour lancer les célébrations, la province a annoncé son programme d'épargne-études du centenaire qui prévoit une mesure incitative universelle afin d'encourager les investissements dans un REEE pour les études postsecondaires de tout enfant né en Alberta en 2005 ou après.
La Loi canadienne sur l'épargne-études, qui est proposée, autorise le gouvernement à conclure des ententes administratives avec les provinces et les territoires afin qu'ils puissent en leur nom offrir des programmes dont les buts s'apparentent à ceux du bon d'études et de la SCEE. L'Alberta est la première province à formuler cette demande; de là, ce sentiment d'urgence. La Loi confère également au gouvernement du Canada le pouvoir de recueillir des informations auprès des Albertains aux fins de l'administration du programme. Elle autorisera également le dépôt de fonds de l'Alberta dans un REEE.
Le premier ministre du Canada a accédé à la demande du premier ministre Klein voulant que le gouvernement fédéral offre le programme au nom du gouvernement de l'Alberta contre recouvrement des coûts. Le gouvernement de l'Alberta souhaite être en mesure de verser les fonds aux bénéficiaires admissibles d'ici avril 2005.
Cette entente avec l'Alberta est un exemple frappant de l'importance que le gouvernement du Canada et les citoyens accordent aux partenariats fédéraux-provinciaux. Le projet de loi C-5 démontre que deux ordres de gouvernement peuvent, dans le respect de leur compétence respective, unir leurs efforts pour combler les besoins de la population et aider les Canadiens à planifier leur avenir.
[Français]
Notre but est de faire en sorte qu'aucun enfant ne rate l'occasion de suivre des études postsecondaires en raison de faibles ressources financières et les autres mesures prévues par le projet de loi nous aideront à l'atteindre.
[Traduction]
Je sais que nous voulons tous que les Canadiens réalisent leur plein potentiel afin que nous puissions garantir la prospérité du Canada.
Je vous remercie encore une fois, sénateurs, de m'avoir invité à témoigner devant votre comité. Si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre. Et si je ne peux pas y répondre, je suis accompagné de gens très capables qui pourront y répondre.
Le vice-président : Merci, monsieur le ministre. Votre déclaration préliminaire a été très informative.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Je vous remercie de votre exposé. À la première page, vous dites que seulement 8 p. 100 des familles ont profité de cet avantage. Cela ne me surprend pas du tout que des familles qui gagnent 25 000 $ — et qui dit famille dit deux adultes et au moins un enfant — n'aient pas les fonds nécessaire pour déposer régulièrement, ne serait- ce que 10 $ par semaine, dans un compte bancaire. D'abord parce qu'avec un salaire de 25 000 $ — je ne sais si c'est brut ou net — il en reste encore moins dans la poche du consommateur lorsqu'on pense au salaire net.
Avant d'être nommée au Sénat, j'ai passé ma vie à aider les consommateurs à faire des budgets et je crois que ce qui aurait dû précéder cette initiative très louable aurait été d'impliquer les groupes qui font de la consultation budgétaire ou d'en mettre sur pied à travers le Canada pour que les gens puissent transformer la capacité de rembourser en une capacité d'épargner.
Quand les gens peuvent payer leurs dettes et qu'ils voient la lumière au bout du tunnel, à ce moment, tout au long de la démarche, on peut transformer la capacité de remboursement en une capacité d'investissement.
Ce qui est intéressant dans votre projet, c'est d'avoir pour but d'amener les familles à faible revenu non seulement à travailler mais aussi à épargner. Parce que lorsqu'on épargne pour quelque chose, c'est qu'on s'est fixé un objectif. C'est un peu comme se fixer l'objectif de partir en voyage. Il faut penser à l'avance comment se déroulera le voyage. Quel sera l'itinéraire et que faudra-t-il apporter?
On peut épauler les parents d'une autre façon en leur disant comment aider leur enfant à atteindre l'objectif de faire des études postsecondaires.
Le vice-président : Quelle est votre question, sénateur Plamondon?
Le sénateur Plamondon : Qu'avez-vous prévu comme campagne pour motiver les gens à pouvoir vivre avec 25 000 $ par année et à épargner pour souscrire à ce programme?
M. Volpe : Vous avez déjà compris que l'objectif est louable. Il est louable parce qu'on a tenté d'établir une habitude à épargner. Il ne s'agit pas seulement de prévoir des fonds pour l'avenir de ses enfants, il faut aussi comprendre comment le faire et pourquoi le faire.
Aujourd'hui, nous parlons du futur éducatif de ses propres enfants, mais le futur vaut pour une foule d'autres choses. Et si on gagne 25 000 $ bruts ou si on gagne 18 000 $ bruts, la chose la plus importante est de savoir comment gérer ces fonds.
Le gouvernement a voulu donner l'occasion à ceux et celles qui le voulaient d'apprendre à utiliser les mécanismes d'épargne mis à leur disposition et ce, quel que soit leur revenu annuel. Pour ce faire, il faut leur donner la motivation initiale dont ils ont besoin.
L'exercice ne vise pas à épargner pour n'importe quoi. C'est plutôt un incitatif pour investir dans l'avenir de ses enfants tout en utilisant les mécanismes existants. L'objectif serait de développer une certaine ambition. C'est le moment d'entrer dans le monde de ceux et celles qui font des contributions.
Le sénateur Hervieux-Payette : Mes questions vont probablement intéresser mon personnel. Mon adjointe a un bébé de deux ans et elle en attend un autre au mois de mars. Je crois bien qu'un seul bébé pourra bénéficier de votre programme. Est-ce bien le cas? J'aimerais que vous me le confirmiez.
Deuxièmement, si les grands-parents, oncles ou tantes veulent contribuer, est-ce que les parents gagnant moins de 35 000 $ continueront à recevoir le 100 $ annuel? Pourront-ils contribuer au programme antérieur de fonds d'études des enfants?
M. Volpe : J'aimerais d'abord féliciter votre adjointe parce que sa situation sert aussi les exigences démographiques du pays. En ce qui concerne votre question qui concerne ceux et celles qui sont en mesure de pouvoir faire des contributions, je vais donner la parole à Mme Thivierge.
Mme Marie-Josée Thivierge, sous-ministre adjointe, Programmes d'investissement de la personne, Ressources humaines et développement des compétences Canada : Dans un premier temps, effectivement, la mesure du bon d'études s'applique aux enfants qui sont nés après le 1er janvier 2004. Maintenant, en ce qui a trait à la bonification du programme d'épargne-études, celle-ci sera en vigueur le 1er janvier 2005.
Les contributions à un REEE constituent l'élément déclencheur. À la base, une famille doit ouvrir pour l'enfant un REEE dans lequel sera déposé, selon l'admissibilité, le bon d'étude. Par la suite, si la famille choisit de faire des contributions— que ce soit la famille directe ou la famille élargie — à ce moment la famille fait la contribution dans le REEE et il y aura une contribution en vertu du programme de subvention épargne-études qui sera ajoutée au tarif qui s'applique à la famille en question.
Je ne suis pas certaine d'avoir saisi parfaitement votre question sur le revenu des grands-parents et l'admissibilité. Pourriez-vous clarifier votre question?
Le sénateur Hervieux-Payette : Si les parents se qualifient pour le 100 $ et que les grands-parents offrent un cadeau de Noël pour les études des petits-enfants, ces parents qui gagnent un faible revenu vont-ils perdre le 100 $ en vertu de ce programme?
Mme Thivierge : Non. Le bon d'études possède son régime d'admissibilité et les subventions à l'épargne-études font partie d'un autre programme. Les deux ont l'objectif commun de favoriser l'épargne aux fins d'études postsecondaires. Dans la mesure où la famille admissible au supplément à l'enfance reçoit le 100 $, cette somme est acquise en fonction de l'admissibilité.
Le sénateur Hervieux-Payette : Est-ce que tant et aussi longtemps qu'ils seront dans les limites acceptables du 35 000 $ de revenu annuel, chaque année, pendant 15 ans, ils auront droit à ce 100 $?
Mme Thivierge : Effectivement, le 35 000 $ est un montant qui est utilisé aux fins d'illustration. C'est un montant approximatif mais le critère d'admissibilité est bel et bien si la famille, pour une période d'un mois dans une année complète, a été admissible en vertu du Supplément canadien de bénéfices à l'enfant. Et c'est cette admissibilité à ce bénéfice qui est l'élément déclencheur du versement du bon d'études.
Le sénateur Hervieux-Payette : Au Québec, est-ce comme en Alberta? Quel va être le régime des Québécois?
Mme Thivierge : C'est d'abord un effort de la part de la famille d'ouvrir le REEE. C'est la famille qui détermine qu'elle veut commencer à planifier pour les études.
Cela se fait entre la famille et l'institution financière. Dans la mesure où une famille décide d'ouvrir un régime épargne-étude et est admissible au supplément de prestation nationale pour enfant, elle aurait accès au versement selon l'admissibilité du bon. Par la suite, si la famille choisit de contribuer au régime d'épargne-étude, elle pourrait devenir admissible à la contribution fédérale en vertu du régime de subvention épargne-étude.
[Traduction]
Le sénateur Cordy : Ayant moi-même été enseignante, je trouve que tout ce qui peut être un incitatif et qui rend l'enseignement supérieur plus accessible mérite d'être encouragé. J'ai quelques petites questions. Tout d'abord, quand une famille reçoit le Bon d'études canadien de 500 $ pour un enfant, cette subvention non renouvelable de 500 $, et que ses circonstances changent, les 500 $ restent-ils dans le compte de l'enfant?
M. Volpe : Oui.
Le sénateur Cordy : Le paiement annuel de 100 $ est-il automatique ou faut-il que la famille remplisse une déclaration de revenus pour le recevoir? Comment cela fonctionne-t-il?
M. Volpe : L'évaluation des revenus entre toujours en ligne de compte, mais elle est liée, comme l'a expliqué Mme Thivierge, non pas au revenu gagné mais à la réception de la Prestation canadienne fiscale pour enfants. Tant que la famille reçoit cette prestation, elle a droit au paiement de 100 $.
Le sénateur Cordy : L'argent serait versé automatiquement dans le compte?
M. Volpe : Exact. Si vous le permettez, sénateur Cordy, je tiens à bien insister sur le fait que le programme vise à cibler un groupe en particulier qui, jusqu'à maintenant, n'a pas profité des instruments existants. Mais, en réponse à la question du sénateur Hervieux-Payette, je tiens à rappeler les autres modifications qui seront apportées, comme je l'ai dit, à la Subvention canadienne pour l'épargne-études et qui profiteront aussi à ceux qui changent de catégorie de revenu du fait de l'accroissement du pourcentage que contribuera le gouvernement fédéral.
Le sénateur Cordy : C'est très bien s'ils arrivent à passer à une catégorie de revenu supérieur.
M. Volpe : Bien sûr.
Le sénateur Cordy : C'est qu'il y a un progrès. Je suis heureuse de constater que vous avez l'intention d'entreprendre un programme de sensibilisation et d'éducation. Comme vous l'avez dit, les personnes ciblées seront celles qui n'ont pas pu jusqu'à maintenant accéder aux fonds qui sont offerts pour leurs enfants. Bien souvent, les gens ne sont pas au courant de l'existence de ces programmes d'aide parce qu'ils n'ont pas les réseaux de communication qu'ont généralement les familles de la classe moyenne.
Avez-vous un plan d'action à cet égard? Vous avez parlé d'établir des partenariats avec des groupes communautaires. Cela veut-il dire que vous auriez notamment des programmes dans les maternités — comme, dans le cas de Halifax, l'hôpital pour enfants et l'hôpital Grace — pour que les familles soient sensibilisées à l'existence du programme dès la naissance de leur enfant?
M. Volpe : Ce sont sans doute là d'excellentes idées. Je ne veux pas du tout donner l'impression que je doute de la compétence de mes collaborateurs, mais je vais leur éviter d'avoir à répondre à cette question en y répondant moi- même.
Quand nous avons été saisis de l'amendement en ce sens la semaine dernière, tout le monde s'est tout de suite précipité pour essayer de trouver tous les moyens possibles de faire la publicité du programme. Si j'essayais de vous donner d'ores et déjà une idée de ce à quoi pourrait ressembler le programme, ou si je demandais à mes collaborateurs de le faire, vous auriez une réponse incomplète. Sachez que nous avançons dans cette voie et que l'amendement qui a été apporté, et partant la Loi, nous oblige justement à le faire. Nous avions l'intention de mettre en place des mesures en ce sens parce que nous en comprenions l'importance, mais maintenant nous devrons le faire de façon plus méthodique et systématique.
Le sénateur Cordy : C'est un excellent amendement à mon avis. Bien souvent, les familles canadiennes ne sont pas au courant des programmes qui leur sont offerts.
Si quelqu'un n'avait pas inscrit son enfant malgré tous les efforts que nous aurions déployés, l'inscription pourrait- elle être rétroactive? Si l'enfant avait quatre ans, aurait-il droit au montant de 500 $, puis aux 100 $ pour les trois années?
M. Volpe : Tout ce que je peux faire, c'est répondre par l'affirmative.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Viserez-vous également la famille élargie pour le programme d'information et de communication? Cette famille élargie peut apporter des contributions et aider les jeunes familles à profiter de ce programme, n'est-ce pas?
[Traduction]
M. Volpe : L'idée est de cibler tous ceux qui peuvent cotiser. Quand la famille élargie joue un rôle, comme l'a expliqué Mme Thivierge, il arrive parfois que la principale personne responsable du soin de l'enfant donne son consentement pour que le bon soit versé, par exemple, dans le compte du grand-parent. La tâche qui nous attend maintenant consiste à trouver une stratégie qui joindrait tous ceux qui pourraient faire partie du programme.
Si vous me permettez cette note personnelle, il y a des grands-parents comme le sénateur Hervieux-Payette qui sont impatients d'y aller de leurs cotisations, mais je ne suis pas encore de ceux-là. Je suis de ceux qui sont prêts à le faire. Je n'ai pas encore fait de ces cotisations.
L'idée serait toutefois qu'il appartiendrait aux parents de faire le premier pas. La loi est rédigée de façon à ce que la personne principalement responsable du soin de l'enfant, le parent, le père et la mère, doit prendre la décision délibérée et définitive de confier cette responsabilité à quelqu'un d'autre.
Notre stratégie, telle quelle est conçue à ce stade préliminaire — j'allais dire embryonnaire, mais je n'ai pas voulu faire trop d'allusion à ce fait —, engloberait tous ceux qui pourraient souscrire à cette culture voulant qu'on y aille de sa contribution, qu'on mette de l'argent de côté, qu'on fasse des placements et qu'on ait une vision à long terme.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Lorsque vous parlez de subventions équivalentes à 40 p. 100 de la première tranche de 500 $, si la famille proche ne peut faire qu'une contribution de 100 $, les contributions de la famille élargie sont-elles sujettes à cette subvention équivalentes à 40 p. 100?
M. Volpe : Il y a le bon d'études et aussi tout le reste de la loi. On fait toujours des contributions.
[Traduction]
En anglais, on continue à cotiser au REEE. Si le cotisant passe à une autre catégorie, autrement dit s'il n'est plus de ceux qui gagnent moins de 35 000 $, il peut alors bénéficier de l'autre programme. Mais si, dès le départ, il obtient le bon de 500 $, non renouvelable, il continue à recevoir chaque année les 100 $, à condition qu'il demeure dans la fourchette visée. Pour ce qui est des membres de la famille élargie qui voudraient cotiser, s'ils ne font pas partie de la catégorie visée, ils feraient partie d'une des autres catégories qui donnent droit à une subvention proportionnelle de la part du gouvernement. Nous faisons de notre mieux pour que tout le monde puisse profiter du programme.
Mme Moore : Je vous demanderais une petite précision, monsieur le ministre, car je crois que quelqu'un d'autre a fait allusion à cela. Pour qu'un autre membre de la famille puisse faire un don ou une contribution au compte dans lequel le bon d'études a été versé, il faut que la famille soit admissible au supplément de la prestation nationale pour enfants, ou la personne contribue-t-elle au REEE?
M. Volpe : Il y a la contribution au REEE. Le gouvernement du Canada continue à contribuer 100 $, mais seulement tant que la famille touche la prestation fiscale pour enfants. Cela ne veut pas dire que le compte, une fois qu'il a été ouvert... n'oubliez pas qu'il s'agit d'un compte REEE et que c'est le bon de 500 $ donné par le gouvernement du Canada qui donne le coup d'envoi, si bien que l'avoir continue à s'accumuler. Quelqu'un d'autre peut y contribuer, mais l'avantage qu'en retire le cotisant dépend de sa situation financière. Le compte en tant que tel continue à croître en valeur, et l'intérêt continue à s'accumuler dans le compte.
Pour ceux qui comme moi ont besoin qu'on leur explique les choses en des termes simples, une fois que les 100 $ ont été versés dans le compte et que le gouvernement canadien continue à y verser des paiements de 100 $, tous les autres sont encouragés à essayer d'accroître l'avoir dans le compte.
Mme Lenore Burton, directrice générale, Apprentissage et alphabétisation, Ressources humaines et Développement des compétences : Le ministre ne s'est pas trompé, mais je voudrais préciser que, parce que la subvention dépend du revenu, c'est le revenu de la personne qui est la principale responsable du soin de l'enfant qui compte, et le plus souvent, il s'agit de la mère. Si un des grands-parents veut faire un don et que la mère y consent, nous pouvons évaluer le revenu de la mère, et c'est son revenu qui va déterminer le montant de la subvention qui sera versée dans le compte du grand-parent. Il se pourrait donc que le grand-parent ouvre un compte REEE pour son petit-fils et que le montant de la subvention soit plus élevé si la mère se trouve dans une catégorie de revenu inférieure.
Le sénateur Robichaud : Vous avez répondu à ma question. Merci.
Le sénateur Forrestall : Je serai bref. Je me pose depuis quelques années des questions concernant des programmes comme celui-ci. Pourriez-vous nous donner des preuves que de tels programmes semblent très attrayants, au moins à prime abord? Comment pourriez-vous me convaincre qu'ils n'encouragent pas les gens à ne pas se marier ou à se séparer, si les personnes sont mariées, comme moyen de devenir admissible sur le plan du revenu familial?
Le vice-président : Voilà un défi, monsieur le ministre.
M. Volpe : Vous posez une question intéressante, sénateur. Même si les décideurs ne s'attendent pas vraiment à cette réaction des gens pour recevoir un bon de 500 $ comme point de départ, je reconnais que la tentation serait beaucoup plus grande si on parlait d'un montant beaucoup plus important, mais les décideurs sont allés de l'avant.
Le sénateur Forrestall : C'est un péché ou ce ne l'est pas.
M. Volpe : Vous avez raison, et on ne veut point l'encourager. Cependant, si les 500 $ sont là, nous aimerions faire embarquer les gens. Nous voudrions attirer ceux qui n'ont jamais ouvert de régimes d'épargne. Il faut quand même être dans cette tranche de revenu pour en bénéficier. Ceux qui gagnent plus de 35 000 $ savent que le REEE leur accorde un autre avantage qui les découragerait de faire ce que vous avez suggéré. Mme Thivierge pourrait donner aux sénateurs d'autres assurances.
Mme Thivierge : Sénateur, vous parliez de la séparation et du divorce. La seule chose que je pourrais ajouter, c'est qu'il faudrait en examiner les répercussions. Comme Mme Burton l'a indiqué, il s'agit d'un programme axé sur le revenu. Il fonctionne vraiment dans le cadre de la Loi de l'impôt sur le revenu, et je ne prétends pas être experte dans ce domaine. Nos collègues du ministère des Finances pourraient sans doute vous donner des éléments de réponse, mais il y a des règles qui s'appliquent à la Loi de l'impôt sur le revenu et à l'évaluation des revenus pour des fins d'admissibilité.
M. Volpe : Avant d'aller trop loin dans ce sens, peut-être que nous pourrions demander à M. Beaulieu, qui est avocat, combien il coûte pour lancer le processus qui mène à une entente de séparation ou à un divorce, et si ce montant dépasserait la subvention de 500 $.
Le sénateur Forrestall : Une bonne chicane.
Le vice-président : Passons. Êtes-vous satisfait de la réponse, sénateur?
Le sénateur Forrestall : C'était tout.
M. Volpe : J'aimerais vous donner une idée de notre réflexion du point de vue financier.
Le vice-président : Nous commençons à manquer de temps, mais j'aimerais permettre au sénateur Tkachuk d'intervenir, et ce sera la dernière question.
Le sénateur Tkachuk : J'ai quelques questions. Je ne connais pas bien le REEE, et le projet de loi a été déposé au Sénat et présenté aujourd'hui, de telle sorte que nous n'avons pas eu beaucoup de temps ici. J'essaie de me familiariser avec le projet de loi pendant que le ministre est ici. Expliquez-moi cette mesure législative.
Je comprends les questions posées par les autres sénateurs concernant les contributions par des tierces personnes, mais votre souci, ce n'est pas d'où vient l'argent, en autant que la personne satisfasse aux exigences de revenu. Que ce soit un grand-parent ou un oncle qui fait la contribution, le ministère du Revenu ne s'en préoccupe pas parce qu'il s'agit d'argent après impôts. Ça revient au même et donc ce n'est pas important.
Mettons que je gagne 24 000 $ par année. J'ouvre un compte en banque ou quelque chose. M'envoyez-vous un chèque? Quel est ce montant de 500 $? D'où vient-il et comment est-il versé dans le compte?
M. Volpe : Vous le soutirez au ministre des Finances.
Le sénateur Tkachuk : Cela pourrait se faire de beaucoup de façons, du RPC à l'assurance-emploi en passant par l'impôt, mais parlons de cette mesure-ci.
M. Volpe : Vous utilisez le certificat de naissance de votre enfant afin d'obtenir un numéro d'assurance sociale pour lui, et ensuite vous ouvrez un compte en banque. Le banquier remplit la documentation et l'envoie au gouvernement du Canada. Le gouvernement envoie un chèque une fois le compte ouvert, de sorte que le bon d'études canadien de 500 $ y est versé et y reste.
Le sénateur Tkachuk : Quand un particulier produit sa déclaration de revenus l'année suivante, comment l'argent en contrepartie est-il affecté au compte? S'agit-il d'un crédit d'impôt?
M. Volpe : Si vous produisez une déclaration et que le gouvernement du Canada décide que vous êtes toujours une famille et que vous recevez toujours la prestation pour enfants, on vous enverra un autre versement de 100 $.
Le sénateur Tkachuk : C'est beaucoup de travail pour 100 $. C'est beaucoup d'administration pour 100 $. Combien en coûte-t-il pour donner ces 100 $ à la personne?
M. Volpe : Il en coûte très peu. Le versement se fait par envoi électronique. Nous n'émettons pas de chèque, ce qui coûte 60 $ maintenant. Nous ne faisons pas cela. Donc, voilà. On y verse l'argent tout de suite. Tout se fait par moyen électronique. Les banques nous ont confirmé qu'un montant initial de 25,00 $ suffira. Elles ne demandent pas de fonds supplémentaires pour administrer le compte. Si d'autres membres de la famille veulent faire des contributions afin d'augmenter la valeur de l'épargne, leur revenu est évalué et ils recevront les mêmes avantages que quiconque fait une contribution à un REEE. Il s'agit d'un REEE, ici aussi, mais il est lancé par le bon d'études canadien.
Le sénateur Tkachuk : Vous dites que 26 p. 100 des familles ayant un revenu de 25 000 $ ou moins épargnent en vue des études postsecondaires de leurs enfants. C'est ce qu'a dit le parrain, le sénateur Moore, aujourd'hui au Sénat, mais seulement un tiers de ces familles bénéficiaient du programme REEE. Comment savez-vous donc que 26 p. 100 des familles épargnent en vue des études de leurs enfants?
Mme Burton : Nous avons fait un sondage des diverses approches du régime d'épargne-études en faisant le lien avec le revenu des répondants. Nous avons demandé si les gens épargnaient en vue des études de leurs enfants, et 26 p. 100 des familles dans la catégorie du faible revenu ont dit oui. Quand nous leur avons demandé si elles avaient un REEE, 8 p. 100 ont dit oui.
Le sénateur Tkachuk : Si un consommateur ouvre un compte d'épargne dans une banque, est-ce que le personnel de la banque lui donnera des conseils concernant le programme REEE et la subvention du gouvernement? De toute évidence, deux tiers des familles n'ont pas reçu des conseils de leur banque.
Mme Burton : Peut-être que leur épargne se fait ailleurs que dans une institution financière.
Le sénateur Tkachuk : Le sénateur Moore a dit aussi qu'une famille qui contribue 10 $ par mois à un REEE pourrait bâtir une épargne de 7 000 $ en 18 ans. Comment est-ce que ce chiffre est calculé?
M. Volpe : Une contribution de 10 $ par mois fait 120 $ par année sur 15 ans, c'est-à-dire 1 800 $ plus les 500 $.
Le sénateur Moore : C'est 500 $ plus 100 $?
M. Volpe : Oui, les 100 $ y sont ajoutés. Cela fait 2 400 $ plus les intérêts courus, ce qui équivaut à environ 7 000 $ après 18 ans. Le montant pourrait facilement doubler.
Le sénateur Tkachuk : Il ne doublerait pas aux taux d'intérêt actuels. Ce n'est pas moi qui ai créé ce chiffre de 7 000 $; je me demande d'où il vient.
M. Volpe : Je ne voulais pas être argumentateur.
Le sénateur Tkachuk : Vous l'êtes, cependant.
M. Volpe : Si vous faites des contributions sur 15 ans, en commençant par 500 $ plus 100 $ par année, et si vous y ajoutez 2 000 $, vous aurez un peu plus de 7 000 $ après 15 ans, en raison des intérêts composés, même aux taux d'aujourd'hui.
Le sénateur Tkachuk : Vos mathématiques, pas les miennes.
Le vice-président : J'ai dit que le sénateur Tkachuk serait le dernier intervenant, mais le sénateur Plamondon veut poser une question et il a promis que ce ne serait pas long.
[Français]
Le sénateur Plamondon : J'aimerais savoir ce qui arrive avec les montants investis si l'enfant ne fait pas d'études postsecondaires?
M. Volpe : Ce serait dommage. Dans ce cas, les fonds qui appartiennent au gouvernement seraient remis au gouvernement, mais tout l'intérêt accumulé va à la famille, c'est-à-dire aux contribuables.
[Traduction]
Le vice-président : Monsieur le ministre, messieurs et mesdames les fonctionnaires du ministère, comme l'a dit le sénateur Tkachuk, nous faisons plus que notre possible pour accélérer l'adoption de ce projet de loi en tenant compte de son esprit et des intentions des auteurs. Je tiens à vous souligner que sept témoins comparaîtront devant notre comité demain. Au moins la moitié d'entre eux s'opposent sérieusement au projet de loi. Par anticipation, et pour que nous puissions bien faire notre travail, j'ai une dernière question à poser. Elle a été posée au Sénat cet après-midi en deuxième lecture et je cite le sénateur Kinsella :
...le projet de loi part des meilleures intentions qui soient, et je félicite le gouvernement de commencer à s'attaquer à un problème qui s'est aggravé de façon exponentielle depuis une dizaine d'années.
Le projet de loi C-5 a été conçu pour essayer d'aider les Canadiens pour qui les études postsecondaires sont de moins en moins financièrement abordables. À mon avis, le but n'est pas atteint. Le gouvernement prétend qu'il veut atteindre une fin, mais il ne propose pas de moyens suffisamment précis qui puissent permettre de l'atteindre.
Si quelqu'un nous posait une question du genre demain, ce que je soupçonne fortement, quelle serait votre réponse? Plus tôt, vous avez dit que nous essayons de créer une culture d'épargne chez les familles à faible revenu, surtout à ces fins louables. Est-ce bien cela? Nous partons peut-être de minimis, mais le gouvernement est assis sur un excédent énorme. Nous avons peut-être ici l'occasion rêvée de fixer l'obligation à 1 000 $ et les versements annuels à 200 $.
M. Volpe : Je vous remercie de m'offrir cette occasion de répondre à cette question hypothétique parce que je ne serai pas là pour y répondre. Certaines de ces questions ont été soulevées par au moins un des partis à la Chambre des communes pendant, évidemment, le débat en deuxième lecture, à l'étape du rapport et en troisième lecture. Je veux souligner vos derniers propos : l'intention du législateur est de créer un climat propice pour que les gens investissent dans l'avenir de leurs enfants. Il faut juger de ce projet de loi non pas pour ce qu'il nous apporte aujourd'hui mais pour ce qu'il nous permettra d'accomplir demain. Puisqu'il s'agit d'amener les gens à penser à se prévaloir des instruments qui leur permettront de se créer un patrimoine à une fin particulière — les études —, c'est en fonction de cela que doit être jugé le projet de loi.
On peut toujours prétendre que 500 $ c'est beaucoup trop ou beaucoup trop peu. On aurait pu dire cela, mais nous avons dit 500 $. Puis-je améliorer les choses en lorgnant du côté de l'excédent? Je pourrais probablement argumenter que nous avons d'autres associés dans cette initiative que nous encourageons, comme l'Alberta, qui a affirmé vouloir être partie prenante. Ils offrent d'y investir plus d'argent que le gouvernement du Canada. Le gouvernement du Canada n'a pas l'intention de servir de source unique pour tout, mais il veut bien d'un associé près à investir des fonds et à demander aux autres gouvernements s'ils veulent aussi y participer à parts égales. Certains diront que l'état de la situation est tel aujourd'hui que les épargnes ainsi accumulées ne suffiraient pas à payer de très longues études. J'ai la liste de toutes les universités du Canada avec les frais de scolarité et les frais de résidence, ce qui nous permet de savoir ce qu'on peut acheter avec 7 000 $. Cela varie et va de un an jusqu'à deux ans.
Le vice-président : Ce sont les chiffres d'aujourd'hui; on nous dit que dans 15 ans, il en coûtera près de 87 000 $.
M. Volpe : Je me souviens que je payais 400 $ en frais de scolarité et c'était une somme princière pour l'époque. Quand je vois combien il m'en coûte pour faire faire des études universitaires à mes enfants, je me rends compte qu'il n'en coûtait à mon père qu'une très petite portion de son salaire pour me payer mes études. Je ne suis pas très impressionné par les calculs concernant les projections des coûts pour les universités. Il y a une série de programmes, d'interventions législatives et de projets, aujourd'hui même, qui s'attaquent à cette question de coûts. Je présume que ces programmes seront toujours en place dans 15 ans ou qu'il y aura alors quelque chose de semblable.
Ces derniers mois, le gouvernement a conclu des accords avec les provinces dans les domaines de la santé et de la péréquation. Le résultat en est un transfert de quelque 73 milliards de dollars sur 10 ans. Je présume que ces provinces auront accès à un montant supplémentaire de 7 milliards de dollars par année pour la santé et l'éducation. Elles pourront s'associer beaucoup mieux que par le passé.
Il ne s'agit pas de débattre aujourd'hui de qui a tort ou qui a raison. Je ne veux pas que le projet de loi mène à des insinuations malveillantes, parce que c'est beaucoup trop facile de s'en servir à des fins partisanes. Je croyais que tous les partis en Chambre, sauf un, avaient décidé qu'ils voulaient saisir l'occasion et investir dans un changement culturel pour notre avenir puisque c'est cela que le présent projet de loi représente. Les autres observations sont valables seulement s'il s'agit d'un programme différent, d'un projet différent ou d'initiatives différentes des gouvernements. Ce dont il s'agit ici, c'est d'une initiative du gouvernement du Canada visant notre avenir et c'est dans cet esprit qu'il faut comprendre les choses.
Le vice-président : Merci, monsieur le ministre. Toutes les interventions ont été excellentes. J'espère que tout ira bien demain puisque vous nous laissez avec des assises très solides.
La séance est levée.