Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense
Fascicule 5 - Témoignages du 1er décembre 2004 (matin)
WINDSOR, le mercredi 1er décembre 2004
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 8 h 10 pour examiner la nécessité d'une politique de sécurité nationale au Canda et en faire rapport.
Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Vous êtes devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je tiens à souhaiter la bienvenue à toutes les personnes présentes.
Je crois comprendre que M. McCuaig est en chemin, je vais donc passer tout de suite aux exposés. Je m'appelle Colin Kenny, sénateur de l'Ontario, et président du comité.
À ma droite immédiate se trouve l'éminent sénateur de la Nouvelle-Écosse, Michael Forrestall. Le sénateur Forrestall est au service des gens de Dartmouth depuis 37 ans, il a été d'abord leur député à la Chambre des communes, puis leur sénateur. Lors de son passage à la Chambre, il a été le secrétaire parlementaire de plusieurs ministres, dont celui des Transports et celui de l'Expansion régionale et industrielle.
À l'extrême droite de la table se trouve le sénateur Norman Atkins, de l'Ontario. M. Atkins est entré au Sénat en 1986, après plus de 27 ans dans le domaine des communications. Il est l'ancien président de Camp Associates Advertising Limited, et il a été également le conseiller du premier ministre William Davis de l'Ontario.
À côté de lui, le sénateur Tommy Banks, de l'Alberta. Le sénateur Banks est bien connu des Canadiens, c'est un musicien et un artiste de la scène des plus accomplis. Il compte une carrière de plus de 50 ans à son actif. Il a reçu un prix Juno et est officier de l'Ordre du Canada. Le sénateur Banks préside le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, et il préside aussi le caucus libéral de l'Alberta.
À ma gauche, le sénateur Jane Cordy, qui est de la Nouvelle-Écosse. Le sénateur Cordy est une éducatrice chevronnée et a servi pendant longtemps ses concitoyens, notamment à titre de vice-présidente de la Halifax-Dartmouth Port Development Commission. Elle préside également l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN.
À côté d'elle se trouve le sénateur Michael Meighen, de l'Ontario. Le sénateur Meighen est avocat et membre du barreau de l'Ontario ainsi que du barreau de la province de Québec. Il préside en ce moment notre comité des anciens combattants. Le sénateur Meighen est également membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.
Au bout de la table, à gauche, le sénateur Jim Munson, de l'Ontario, autrefois journaliste écouté et directeur des communications du premier ministre canadien avant son entrée au Sénat en 2003. Le sénateur Munson a été en lice deux fois pour des prix Gémeaux d'excellence en journalisme.
Notre comité est le premier comité sénatorial permanent qui ait pour mandat d'étudier la sécurité et la défense. Le Sénat nous a demandé d'étudier la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité. À ce jour, nous avons publié cinq rapports sur différents aspects de la sécurité nationale. Le comité porte maintenant son attention sur l'infrastructure frontalière du Canada.
Le comité prépare un rapport qui traitera des infrastructures, et c'est également le sujet de la séance d'aujourd'hui. Cet examen portera sur les divers réseaux physiques qui lient le Canada et les États-Unis.
Ce n'est pas notre premier voyage à Windsor. Nous étions ici en février 2003, et nous avons la chance aujourd'hui d'entendre des témoins nouveaux. Il s'agit de M. Bruce McCuaig, qui est au ministère des Transports de l'Ontario. On me dit qu'il est en chemin et qu'il sera ici d'un instant à l'autre. M. McCuaig est sous-ministre adjoint responsable de la Division des politiques, de la planification et des langues. Cette division est chargée des politiques et des règlements du ministère, de la planification à long terme et de la mise au point des normes de génie.
Nous recevons également aujourd'hui M. Shelby Slater, directeur de la sécurité intérieure pour la ville de Detroit. Il est responsable à ce titre de l'adhésion de la ville à son plan de sécurité intérieure. M. Slater possède un baccalauréat en administration policière ainsi qu'une maîtrise en technologie interdisciplinaire de la Eastern Michigan University.
Nous allons également entendre M. Mario Iatonna, ingénieur municipal de la ville de Windsor. M. Iatonna dirige le département du génie et des projets municipaux. Il est responsable de l'administration de l'Aéroport de Windsor et de la moitié côté Windsor du tunnel Detroit-Windsor. M. Iatonna détient un baccalauréat en génie civil et une maîtrise en administration des affaires de l'Université de Windsor.
Enfin, nous avons avec nous M. Kirk Steudle, directeur adjoint du département des Transports du Michigan. Il est présent dans tous les aspects du transport de l'État. M. Steudle est diplômé de la Lawrence Technological University, B.Sc. en génie construction, et il est membre de l'Ordre des ingénieurs du Michigan.
Messieurs, nous croyons savoir que vous avez tous de brefs exposés à nous faire. Vous allez ouvrir la marche, monsieur Iatonna.
M. Mario Iatonna, ingénieur municipal, Ville de Windsor : Monsieur le président, membres du comité, la Ville de Windsor s'intéresse vivement à l'étude que fait le comité du Sénat sur la sécurité frontalière et les infrastructures névralgiques. La Ville de Windsor n'est pas seulement une ville frontalière; elle possède la moitié canadienne du tunnel Detroit-Windsor depuis sa construction vers la fin des années 20. La Detroit & Windsor Tunnel Corporation, une entreprise privée, administre la moitié canadienne du tunnel pour le compte de la ville de Windsor, et la moitié américaine pour le compte de la ville de Detroit. Cette entreprise et celles qui l'ont précédée gèrent le tunnel depuis son ouverture.
Comme on l'a vu aux autres passages frontaliers, les événements du 11 septembre et la mise en œuvre subséquente et suivie des mesures de sécurité accrue ont compliqué beaucoup la gestion du tunnel. La circulation n'a pas cessé de décroître depuis le 11 septembre, et on a vu au cours des trois premières années des baisses de 10 p. 100, 9,6 p. 100 et 5,8 p. 100, respectivement. D'après les données que nous avons jusqu'à présent pour 2004, la baisse aurait été de 6 p. 100 pour l'année.
Le problème semble tenir à deux choses. Premièrement, il y a encore la réticence des voyageurs à franchir la frontière, particulièrement les Américains qui entraient au Canada auparavant, étant donné les craintes que suscite encore le 11 septembre. D'après les données sur la circulation, même si la tendance indique un retour au niveau d'avant le 11 septembre, nous sommes encore très loin du point que nous avions atteint avant ces événements terribles.
Le deuxième problème, c'est manifestement la mise en place de mesures de sécurité plus rigoureuses, particulièrement du côté américain, qui continuent de causer d'importants retards aux automobilistes qui parviennent à la frontière. Les médias font souvent état de retards à la frontière, et si l'on ajoute à cela le bouche à oreille normal, le public en est venu à se convaincre que la frontière ne se franchit pas aisément. Cela contribuerait à l'hésitation qu'ont les voyageurs à utiliser le tunnel.
Ces retards réels ont également eu un effet marqué sur le trafic voyageur et commercial, particulièrement le trafic camion. Les migrants journaliers doivent franchir la frontière tous les jours, et il n'y a que deux passages entre Windsor et Detroit, le tunnel ou le pont Ambassador. Pour les camionneurs, selon leur origine et leur destination, il y a aussi l'option du pont Blue Water de Sarnia. Cependant, les exigences du juste-à-temps de l'industrie locale au Canada comme aux États-Unis, particulièrement pour l'industrie automobile et les manufacturiers de la région, limitent les options aux deux passages frontaliers de Windsor.
L'impact sur le commerce et le tourisme a été important et continue de l'être. La Ville de Windsor a besoin de son industrie et de ses attractions touristiques pour donner un milieu tonique à ses résidents et à ses entreprises. Tant qu'on n'aura pas trouvé des solutions viables et à long terme qui remédieront aux retards à la frontière, l'économie locale et canadienne subira de lourdes pertes.
Les gouvernements du Canada et de l'Ontario ont constaté la nécessité de remédier aux problèmes de la frontière de Windsor en injectant 300 millions de dollars du Fonds pour l'infrastructure frontalière dans l'amélioration de l'accès aux passages de Windsor. Les projets de la phase un qui ont déjà été annoncés s'élèvent à 52 millions de dollars et serviront à améliorer les infrastructures de la ville de Windsor. Il faut ajouter à cela 20 millions de dollars, somme que se partagent moitié-moitié les gouvernements fédéral et provincial, pour les améliorations à l'esplanade du tunnel et aux approches.
En vertu des dispositions des processus d'évaluation environnementale fédéral et provincial, nous menons en ce moment une étude devant aboutir à la création d'un plan directeur. On s'attend ainsi à améliorer l'accès au tunnel de manière générale et à créer des corridors facilitant l'utilisation de notre système de prépéage, connu sous le nom de EXPRES, le système de prédédouanement canadien du programme NEXUS. Cependant, les processus d'évaluation environnementale prennent du temps, et les principales améliorations ne devraient pas être construites avant la fin 2005, ou soyons plus réalistes, avant 2006. La ville envisage cependant des mesures intérimaires à court terme qui seront financées par le fonds frontalier et amélioreront l'accès à l'esplanade actuelle.
Les divers paliers de gouvernement prennent également part à une étude binationale sur la faisabilité d'un troisième passage entre Windsor et Detroit. D'un point de vue national, ce passage supplémentaire augmenterait la capacité à la frontière, augmenterait les choix et avantagerait ainsi la sécurité nationale. Cela augmenterait également la capacité locale, et si le principe selon lequel le développement suit l'infrastructure est vrai, les économies locales et nationales des deux côtés de la frontière en profiteront grandement.
Je dois vous rappeler que ni les améliorations à court terme ni celles à long terme ne vont régler les problèmes que posent les retards causés par les formalités des douanes américaines. Si les mesures de sécurité sont nécessaires pour la protection des citoyens des deux pays, elles doivent être mises en œuvre d'une manière qui autorise une circulation essentiellement libre aux frontières, avec des retards minimes, comme c'était le cas par le passé.
La réalité, c'est que les économies de Windsor et de Detroit, de l'Ontario et du Michigan, du Canada et des États-Unis, sont très imbriquées dans la région. La viabilité future de la région passe par le souci constant de maintenir une frontière relativement ouverte.
Même si la Ville de Windsor, en sa qualité de propriétaire de la moitié du tunnel, peut faire des instances auprès des autorités douanières de la région de Detroit et solliciter leur coopération, le fait est que les mesures de sécurité sont ordonnées au niveau national. Il est essentiel que le gouvernement du Canada conserve un rôle actif pour s'assurer, non seulement que la sécurité soit maintenue des deux côtés de la frontière, mais aussi pour que la frontière continue d'être traitée comme un élément absolument essentiel des économies nationales et locales.
M. Shelby Slater, directeur, Sécurité nationale, Ville de Detroit : Bonjour, et merci de m'avoir invité. La Ville de Detroit et l'État du Michigan tenaient absolument à vous faire connaître leurs vues. Si Detroit est aux prises avec bon nombre des mêmes problèmes que l'on constate dans les autres grands centres métropolitains, la ville est unique à maints égards et ses problèmes sont uniques.
Comme vous le savez, Detroit est la plus grande ville du Michigan, la neuvième en importance aux États-Unis et la plus grande ville bordant une frontière internationale. Les grands défis qui attendent la ville sont entre autres la sécurité frontalière, la sécurisation des infrastructures névralgiques et des grands équipements, le partage de l'information, l'équipement de secours d'urgence, la formation et l'obtention de fonds voulus. Je souligne ce dernier point.
Les trois premiers secteurs économiques qui ont un impact majeur sur Detroit et le Michigan sont le secteur manufacturier, le tourisme et l'agriculture. La relation commerciale canado-américaine est la plus importante du genre dans le monde. Les Canadiens achètent pour plus de 59 p. 100 des produits qu'exporte le Michigan. Le second débouché de l'État représente moins du quart de ce que les Canadiens ont acheté du Michigan en 2002. Cette même année, le commerce bilatéral dépassait les 66 milliards de dollars et donnait du travail à des dizaines de milliers de personnes des deux côtés de la frontière.
Detroit est un point d'entrée majeur de notre frontière du nord, avec plus de 24 millions d'automobiles et 4,5 millions de camions qui traversent la frontière Michigan-Ontario chaque année. L'industrie du transport comptait pour plus de 75 p. 100 du commerce bilatéral en 2002. Les industries automobiles du Michigan et du Canada sont très intégrées et interdépendantes. Elles ont échangé pour près de 50 milliards de dollars de pièces d'automobiles et de camions en 2002.
La frontière entre le Michigan et l'Ontario, c'est pour plus de 1,5 milliard de dollars d'échanges tous les jours. Quotidiennement, 26 500 véhicules empruntent le pont Ambassador. D'après les experts, le trafic commercial devrait augmenter de 150 p. 100 d'ici 2030, et le trafic voyageur de 70 p. 100. La rivière Detroit véhicule pour plus de 80 millions de tonnes de fret chaque année, dont plus de 7 millions passent annuellement par le port de Detroit.
Étant donné le principe de livraison juste-à-temps qu'utilisent les manufacturiers automobiles des deux côtés de la frontière, toute perturbation dans le trafic transfrontalier qui cause la fermeture d'une usine coûte environ 1,5 million de dollars l'heure. Une perturbation de quatre heures au pont Ambassador fait perdre environ 10,3 millions de dollars au produit régional brut. Nous sommes tous conscients des longues et fréquentes files de camions qu'on voit des deux côtés de la frontière. Les retards dans le transport par camion alourdissent évidemment les coûts d'exploitation des manufacturiers. On estime que si ces retards se poursuivent, il en coûtera 6 milliards de dollars au Michigan et à l'Ontario d'ici 2020, et cela aura des effets directs et indirects sur le chômage.
Bon nombre des infrastructures névralgiques et des principaux actifs se trouvent du côté de Detroit, dont le siège social mondial des trois plus grands fabricants d'automobiles au monde. L'un des plus grands centres de congrès des États-Unis, plusieurs amphithéâtres du sport professionnel, et un aéroport régional et international. La fluidité des échanges commerciaux à la frontière est non seulement un produit économique local pour la ville de Detroit, mais nos efforts de resserrement de la sécurité à la frontière ont également eu un impact sur l'économie de l'État, l'économie nationale et l'économie internationale. Les régions frontalières, particulièrement les villes à la frontière, méritent par conséquent plus d'attention lorsqu'il s'agit de cerner les facteurs névralgiques et de cibler les ressources nationales.
Je vais vous dire ce qu'on a fait jusqu'à présent à Detroit. Le maire Kilpatrick reconnaît que la coopération régionale est essentielle à la région de Detroit ainsi qu'au bien du pays tout entier. L'approche de Detroit concernant la sécurité intérieure s'appuie par conséquent sur l'établissement et le renforcement des liens avec les services du renseignement et de police à tous les niveaux, local, État, fédéral et international.
Au cours des premières semaines qui ont suivi mon arrivée, je me suis efforcé de contacter et d'aller voir les représentants de tous ces services, dans le but de créer de nouveaux liens et de consolider ce que nous avons déjà. Detroit sait que les systèmes de communication, d'information et d'exploitation qu'on utilise pour assurer les services urgents et non urgents tous les jours sont la pierre angulaire de la défense du territoire.
Detroit est un grand centre urbain qui attire les éléments criminels et terroristes, et c'est la raison pour laquelle la ville doit adhérer à un plan d'intervention beaucoup plus imposant. Detroit a lancé plusieurs projets et initiatives dans le but de consolider la coordination et la coopération au niveau de la ville, de l'État et de la frontière; entre autres, nous avons acquis le matériel voulu pour lier les systèmes radio indépendants qu'utilisent en ce moment nos policiers, nos pompiers et nos secouristes; nous avons mis en œuvre un nouveau projet de 800 mégahertz pour intégrer tous nos systèmes de radio dans l'État du Michigan; en collaborant aussi avec la ville de Windsor, nous nous sommes assurés que ces services sont en mesure de communiquer avec notre système radio au besoin.
Nous avons établi de nouveaux liens à la frontière. Le Comité transfrontalier des urgences en est un. Nous faisons également partie de l'équipe intégrée de la police des frontières, et nous siégeons au comité exécutif du Conseil de la sécurité portuaire. Nous avons commencé à collaborer à titre de partenaire à part entière avec les autorités fédérales, locales, internationales et celles de l'État pour mettre en place une stratégie frontalière qui soit coordonnée, efficace et efficiente. Nous y sommes parvenus grâce aux subventions à la sécurité portuaire. Nous sommes membres du Conseil consultatif de l'État pour la sécurité intérieure et nous jouons un rôle dans l'initiative de sécurité de la région urbaine.
Nous avons organisé des exercices de formation avec d'autres autorités locales, d'État, fédérales et canadiennes, et nous y avons pris part. Mentionnons entre autres les exercices du tunnel Detroit-Windsor et du pont Ambassador que nous menons annuellement, les exercices du Salon international de l'auto de l'Amérique du Nord où interviennent les secouristes opérationnels de Windsor et d'autres régions du Canada, et tout récemment, l'exercice de quatre jours de la Croix-Rouge américaine.
Nous planifions un exercice pour le match des étoiles du Baseball majeur en prévision du match de l'an prochain, et nous avons invité les premiers intervenants canadiens à participer avec nous à un exercice de cours de gestion intégrée des urgences en janvier de l'an prochain. C'est un cours de quatre jours et demi qui se donnera à Anniston, en Alabama. C'est entièrement gratuit, c'est le gouvernement fédéral qui en acquitte les frais, et à l'heure actuelle deux des organismes de premiers intervenants de Windsor ont accepté d'y participer avec nous et nous nous en réjouissons. Nous ne cessons d'évaluer et de mettre à jour nos besoins en sécurité, énoncés dans notre stratégie et notre plan d'action de sécurité du territoire.
Voyons quels sont nos plans pour l'avenir. Dans l'avenir, Detroit insistera davantage sur l'amélioration de la ville et, à terme, la capacité de la région de rassembler, d'analyser et de diffuser du renseignement relié au terrorisme et d'autres renseignements pertinents. La ville de Detroit et le Wayne County collaborent pour fusionner et classer en ordre de priorité leurs buts et objectifs en vue d'unifier leur démarche de satisfaction des besoins de la ville et du comté.
Nous continuerons de nous réunir à intervalles réguliers dans le but de simplifier le mécanisme de prise de décisions de la Ville de Detroit et du Wayne County. La ville de Detroit s'emploie également à créer un système intégré de collecte, d'analyse et de diffusion de l'information qui servira de base à un effort multidisciplinaire de prévention contre les menaces terroristes et autres événements critiques. Nous mettons sur pied un centre de gestion stratégique qui aura notamment pour mission de suivre les efforts de sécurité du territoire dans la ville de Detroit ainsi que dans la région.
Le volet le plus important de notre effort de sécurité est de mobiliser les résidents et les associations locales à nos mécanismes de préparation en cas d'urgence. Le bureau de Detroit de la sécurité du territoire a lancé plusieurs programmes de mobilisation citoyenne. À l'heure actuelle, quatre équipes citoyennes d'intervention d'urgence ont suivi ou suivent une formation dans la ville.
Le président : Monsieur Slater, pardonnez-moi de vous interrompre. L'information que nous recherchons aujourd'hui porte sur le passage de la rivière et la façon de l'accélérer. Il est évident que vous avez un programme complet de sécurité du territoire, et je m'en réjouis, mais je vous inviterais à limiter votre témoignage aux efforts concernant la traversée du pont, du tunnel ou de tout autre ouvrage à l'étude. Je vous en serais reconnaissant.
M. Slater : Bien sûr. Je voulais seulement montrer par là l'importance du pont et du tunnel comme ouvrage essentiel pour la ville de Detroit et pour le Canada.
Pour ce qui est de ce que nous faisons pour assurer un passage sûr, pour faciliter le passage, nous travaillons avec nos homologues canadiens, avec les services des douanes et de l'immigration pour garantir la sécurité de ces ouvrages.
Si le degré de menace pour la sécurité nationale est relevé, nous avons des mécanismes d'intervention essentiels dans chaque service, notamment chez la police, pour intervenir sur le pont et fournir des renforts aux inspecteurs de manière à faciliter la circulation sur le pont tout en protégeant la sécurité du pays.
M. Kirk Steudle, directeur en chef adjoint, ministère des Transports du Michigan : Je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de m'entretenir avec vous ce matin. Comme M. Slater vient de vous le dire, nous faisons un gros effort de coordination dans les domaines qu'il a abordés et que je ne répéterai pas.
Rappelons d'abord que la frontière est la voie de communication vitale pour nos deux pays. Ce n'est pas à vous que j'ai besoin d'expliquer que les économies du Michigan et de l'Ontario, voire des États-Unis et du Canada, sont tributaires du poste frontalier. Pour moi, cela ne désigne pas seulement les deux points de passage de Detroit mais aussi ceux de Port Huron et de Sarnia et les deux de Sault Ste Marie, qui sont aussi essentiels, surtout par souci de redondance.
Comme vous le savez, une grande partie des marchandises qui empruntent le pont Ambassador et le pont Blue Water aboutit dans 26 autres États du côté américain et au Canada. Il est donc d'une importance colossale pour nous de nous assurer que le trafic se poursuit de façon efficace. La commission des transports de l'État vient d'adopter une politique relative à la frontière destinée à garantir la sécurité. Elle prévoit la mise à niveau des installations pour offrir un degré approprié de redondance entre les points de passage ainsi que des mesures de resserrement de la sécurité économique destinées à garantir le mouvement des produits et des personnes de part et d'autre. Elle prévoit également l'expansion des infrastructures pour répondre aux besoins de sécurité ainsi que la croissance future du commerce.
Les deux vont de pair et la commission des transports de l'État a clairement reconnu que les formalités frontalières et les infrastructures doivent aller de pair. L'un ne va pas sans l'autre.
La commission nous a également enjoints de collaborer avec les autres organismes pour améliorer les méthodes d'expansion à la frontière, faciliter le mouvement des voyageurs à faible risque, des marchandises, fournir un nombre suffisant d'inspecteurs et recourir à la technologie pour raccourcir le temps du passage et améliorer la sécurité.
Ce qui précède découle d'un sommet sur le transport tenu en décembre au Michigan qui rassemblait 500 participants. Une des questions à l'étude était le commerce intérieur et le commerce extérieur, avec une insistance particulière sur la frontière canado-américaine et les moyens d'accélérer les échanges. C'est ce que nous avons appelé « la mobilité sûre ». Il arrive souvent que la vocation du département des Transports du Michigan aille à l'encontre de celle des agences de protection frontalière. Les responsables des transports voudraient que le trafic soit le plus rapide possible et les responsables de la protection voudraient stopper tout le monde pour leur parler le plus possible.
C'est pourquoi nous avons créé le Groupe de travail frontalier Ontario-Michigan, qui compte des représentants du département des Transports du Michigan, de la Federal Highway Administration, section Michigan et section Washington, du ministère des Transports de l'Ontario, de Transports Canada et des agences frontalières des deux pays. Le groupe se réunit toutes les six ou huit semaines environ, au besoin. Le groupe a défini sa vision et ses objectifs à court et à long terme. Il entrevoit entre le Michigan et l'Ontario une frontière toujours et davantage marquée par son ouverture tout en protégeant les populations grâce à une mobilité sûre. Comment fait-on passer les gens? Comment revenir à la frontière telle qu'elle existait avant le 11 septembre? Comment pouvons-nous y parvenir?
Le groupe s'est fixé des objectifs à court et à long terme et s'est donné des buts et des projets. À long terme, il s'agit plutôt de partenariat binational, d'ouvrir un point de passage supplémentaire quelque part, ce qui est en train de progresser. M. McCuaig, je crois, vous dira où nous en sommes.
La partie américaine est presque prête à retenir les services de son consultant. De fait, le marché sera signé début janvier et l'on entreprendra le travail d'évaluation environnementale du côté américain de l'ouvrage en évaluant les options. Nous sommes donc dans les temps en ce qui concerne le calendrier à long terme.
À court terme, nous avons dit que nous ne pouvons pas attendre jusqu'en 2010 ou 2013, nous croiser les bras. Que peut-on donc faire aujourd'hui avec les infrastructures que nous avons? Comment pouvons-nous les rendre plus efficaces? Nous avons songé à deux ou trois choses.
La première est la promotion des programmes EXPRES et NEXUS, qui nous permettent de repérer et de faire passer rapidement le voyageur à faible risque sous NEXUS et les transporteurs commerciaux sous EXPRES, en leur réservant de l'espace supplémentaire leur permettant de couper la file. Le groupe nous a demandé de promouvoir davantage ces programmes. Ils sont en place, mais il faut les faire connaître aux gens pour qu'ils s'inscrivent.
L'autre, ce sont les systèmes intelligents de transport (STI), pour informer les citoyens de part et d'autre de la frontière de la situation en matière de gestion de la circulation. Quels sont leurs meilleurs choix? Comment peuvent-ils se déplacer? Quand ils sortent du tunnel, où vont-ils? Nous envisageons de gérer cela au moyen de nos STI ou de notre centre de gestion et de maintenance des transports du centre-ville de Detroit.
Le troisième élément essentiel est l'agrandissement de l'esplanade côté américain du pont Ambassador. Nous en sommes à la quatrième phase d'un projet qui en compte cinq. La dernière commencera en 2006, immédiatement après que nos invités venus de partout au monde auront assisté au grand match de football de janvier. On éliminera un grand nombre de bretelles d'accès malcommodes aux autoroutes I-96 et I-75. On estime à 170 millions de dollars les investissements à l'esplanade côté américain. Les travaux comprendront le retrait des guérites et l'agrandissement des zones d'inspection pour faciliter le passage des camions. Chose tout aussi importante, ceux-ci emprunteront alors directement l'autoroute, ce qui permettra d'éliminer une partie des bouchons qui se créent lorsque les véhicules serpentent autour de l'esplanade, comme c'est actuellement le cas. Ces travaux majeurs à court terme contribueront à atténuer une partie des problèmes. Il est aussi prévu de reconfigurer l'esplanade.
Si le projet d'une travée supplémentaire se réalise, il y aura assez d'espace sur l'esplanade. Il ne serait pas nécessaire de reconstruire l'esplanade. Je dis bien « si ». C'est une des cinq possibilités; il pourrait y en avoir une autre. Si ce choix est retenu, l'esplanade serait assez grande pour répondre aux besoins.
Je vous remercie encore une fois d'être venus. Je serai heureux de répondre à vos questions.
M. Bruce McCuaig, sous-ministre adjoint, ministère des Transports de l'Ontario : C'est un plaisir pour moi d'être ici ce matin. J'ai un texte, que je ne lirai pas en totalité. C'est plutôt un document de référence pour vous où vous trouverez de l'information et des chiffres. Je signale avec plaisir qu'il ne représente pas seulement le travail de l'Ontario mais aussi du Canada, du département des Transports du Michigan ainsi que de la U.S. Federal Highway Administration en faveur d'une stratégie à long terme pour la zone binationale du point de passage Windsor-Detroit.
J'aimerais insister sur cinq grands messages. Premièrement, l'Ontario reconnaît que des mesures sont nécessaires dans la zone Windsor-Detroit. Deuxièmement, il faut travailler de part et d'autre de la frontière en vue d'esquisser une vision commune de la façon de gérer la zone. Troisièmement, il faut régler tant les problèmes d'infrastructure que de partage à la frontière. Quatrièmement, il faut adopter une perspective systémique sur la manière de régler les problèmes au point de passage. Cinquièmement, il faut équilibrer les objectifs nationaux et provinciaux des mouvements de marchandises et de voyageurs au point de passage, d'une part, et les préoccupations locales légitimes que suscite la présence d'un point de passage international dans l'agglomération Windsor-Detroit.
Très rapidement, en ce qui concerne le premier point, nous ne contestons pas qu'il faut agir. Windsor est notre passage frontalier le plus occupé avec notre plus grand partenaire commercial, et il est essentiel à la prospérité de nos économies nationales, provinciales et locales. Toutes les parties conviennent que le statu quo est inacceptable et qu'il nous appartient de trouver le moyen d'agir à court, moyen et long terme.
Quant au deuxième point, les économies du sud-ouest de l'Ontario et du sud-est du Michigan sont imbriquées. Il faut trouver une solution pour la région binationale au lieu de faire des plans de notre côté tandis que les Américains en font du leur. Pour nous, il s'agit d'une région économique d'un seul tenant et il faut nous assurer que nos méthodes sont elles aussi intégrées. Il nous faut un système qui forme un tout pour notre économie et nos citoyens.
Troisièmement, on ne peut régler nos problèmes en se contentant de bâtir plus d'installations ou d'améliorer les mécanismes commerciaux aux passages eux-mêmes. Les deux sont importants en soi, mais les deux dépendent de l'autre si l'on veut trouver une solution efficace pour l'avenir. Un exemple serait de construire plus de routes sans régler une partie des problèmes des formalités frontalières. Faute de capacité et de formalité adéquates, ces nouvelles routes coûteuses ne serviront qu'aire de garage pour les véhicules qui attendent de passer.
La construction récente de quatre nouvelles guérites d'inspection à l'esplanade américaine montre de façon spectaculaire combien le passage peut être plus rapide et plus efficace quand on a de meilleures formalités et les ressources qu'il faut.
Quatrièmement, on ne peut se contenter du pont Ambassador, ni même des deux passages qui sont ici à Windsor. Il faut songer à Sarnia et à l'interconnexion entre chaque passage ainsi que les autres éléments du réseau que sont le chemin de fer et les traversiers. Il faut donc considérer la région dans son ensemble et adopter une vision systémique.
Cinquièmement, nous savons que nos solutions doivent répondre aux grands objectifs nationaux et provinciaux que sont le mouvement des véhicules et des marchandises, mais il faut aussi tenir compte de la population et de l'environnement locaux. Nous savons qu'il faudra prendre des décisions difficiles au sujet des nouvelles infrastructures. Nous pensons que les mécanismes que nous avons mis en place sauront établir les coûts et avantages sociaux, économiques et environnementaux permettant de trouver la solution qui tiendra compte de tous ces facteurs.
Nous sommes convaincus que la province prend des mesures décisives pour régler les problèmes du point de passage Windsor-Detroit. Nous collaborons avec nos partenaires de la cellule binationale. Je signale à votre attention trois acétates de l'exposé.
Je vais commencer par l'acétate 6 qui énonce le mandat de l'étude binationale, qui est d'élaborer une stratégie des transports pour les 30 prochaines années dans la région. Elle est censée se faire à l'extérieur du processus officiel d'évaluation environnementale de l'un ou l'autre pays, mais il n'y en aurait qu'une et elle répondrait à toutes les exigences de la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario. Elle respecterait également la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et la législation américaine de protection de l'environnement. L'élaboration de la stratégie prendra en compte les problèmes des formalités transfrontalières. Nous chercherons des moyens d'optimiser l'actuel système des transports, d'employer des techniques de gestion de la demande ainsi que de créer ou d'agrandir les points de passages internationaux.
Je parlerai maintenant de l'acétate 14 où il est question des cinq principaux couloirs repérés à ce jour pour être agrandis afin d'y construire un nouveau passage. Vous constaterez que l'option 3 illustrée ici ressemble au jumelage de l'actuel pont Ambassador. L'option 4 touche le couloir ferroviaire du CP. L'option 2 envisage un nouveau pont en aval du pont Ambassador tandis que les options 1 et 5 examinent des lieux possibles pour la construction des nouveaux passages. Ces options seront débattues en séances publiques pour aboutir à la meilleure solution qui soit.
Je parlerai enfin de l'acétate 19, qui illustre la démarche que nous suivons actuellement. Les autorités environnementales ontariennes ont approuvé notre mandat et, comme mon collègue l'a dit il y a quelques instants, le Michigan et l'Ontario terminent les préparatifs de recrutement des consultants qui nous aideront à réaliser l'évaluation environnementale. Nous prévoyons que la solution retenue sera approuvée fin 2007. Nous procéderons alors à la conception, à l'ingénierie, à l'acquisition des terrains, à la construction, l'ouverture se faisant dans la première moitié de la prochaine décennie. Ce sont les horizons qui sont les nôtres actuellement.
La province sait également qu'elle doit prendre des mesures à court et à moyen terme pour remplir les engagements pris par les autorités fédérales et provinciales. Nous avons passé une entente avec la ville de Windsor sur un ensemble d'améliorations de la phase un annoncée cette année. On travaille actuellement à cinq ou six initiatives d'amélioration du réseau des transports dans la région de Windsor qui jetteront les bases de travaux ultérieurs.
Nous discutons aussi avec le Canada et Windsor concernant un éventuel accord pour la phase deux, encore une fois pour commencer à construire les fondations de l'avenir en travaillant avec tous les paliers de gouvernement pour dégager un ensemble d'initiatives qui nous permettront d'atteindre les objectifs et les principes exposés dans un protocole d'entente signé au début de l'année.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le sénateur Banks : Merci d'être venus et merci pour vos exposés liminaires. J'aimerais tout d'abord m'adresser à M. Slater.
Monsieur Slater, nous nous sommes penchés sur plusieurs des questions que vous avez abordées, et vous êtes bien placé pour répondre à certaines d'entre elles puisque nous avons constaté dans toutes les villes du Canada que nous avons visitées qu'on a remédié à l'absence de liens entre les divers organismes de première intervention. La capacité d'interopérabilité, notamment en matière de communications, progresse. Les problèmes ne sont pas complètement éliminés, tout n'est pas encore réglé, mais on progresse.
Il va sans dire que dans les villes frontalières, et nous en avons quelques-unes dans ce pays, celle-ci étant la plus importante de toutes, les problèmes sont exacerbés du fait qu'il y a deux pays avec des paliers de gouvernement divers dans chacun d'eux. Comme l'a dit M. Steudle, on parle d'événement catastrophique pour une raison ou une autre; il faut qu'une communauté soit traitée comme une communauté.
Je voudrais vous demander de nous parler en quelques minutes de l'interopérabilité des deux côtés de la rivière en cas de catastrophe. Pouvons-nous vous aider? Pouvez-vous nous aider, et quels seraient les obstacles qui pourraient empêcher le personnel de première intervention de filer de l'autre côté de la rivière, si je peux m'exprimer ainsi, pour apporter de l'aide? Et au niveau du quotidien, avons-nous la coopération nécessaire dans des collectivités comme celle-ci?
M. Slater : Pour ce qui est de la coopération, à court terme, oui, nous avons beaucoup de coopération. J'ai parlé du comité d'intervention d'urgence transfrontalière que j'ai formé. Il est composé de Canadiens et d'Américains. Nous élaborons un plan d'urgence transfrontalier pour coordonner nos ressources, les échanger, passer d'un côté à l'autre en cas d'événement grave, en particulier un incident qui menacerait le pont ou le tunnel.
Comme vous le savez, de nombreux infirmiers et infirmières font la navette entre Windsor et Detroit pour aller travailler au Detroit Medical Center. Ces services médicaux seraient durement pénalisés si le personnel ne pouvait pas franchir la frontière.
Pour ce qui est des communications actuellement, j'ai parlé du lien dans le cadre du système de communications actuel. Le système actuel à Detroit laisse à désirer. C'est pour cela que nous passons au nouveau système à 800 mégahertz. J'ai acheté deux unités portatives qui nous permettront de relier des systèmes de radio disparates pour qu'ils communiquent entre eux. Quand j'ai fait l'essai de ces unités, j'ai demandé aux représentants des services d'incendie et de police de Windsor de prendre leurs radios et de vérifier qu'elles fonctionnaient bien avec ce système, et c'est le cas. Par conséquent, dans notre planification des communications, de la formation et de la coordination des ressources, nous intégrons nos homologues canadiens.
Le sénateur Banks : C'est excellent et encourageant.
Ma deuxième question va dans le même sens; elle concerne les guerres de territoire. De notre côté de la frontière, nous avons fait des efforts pour faire tomber les obstacles et améliorer la coopération, notamment sur le plan de l'échange d'information, pas la capacité d'échanger les informations dont vous parliez il y a un instant, mais la volonté d'échanger des informations. Êtes-vous satisfait de la situation? Avez-vous des problèmes de bureaucratie, notamment pour passer d'un côté à l'autre de la rivière, qui vous agacent?
M. Slater : Ces dernières années, l'échange d'information d'une rive à l'autre s'est bien amélioré. Lors de la première réunion d'intervention d'urgence transfrontalière, le service d'incendie de Windsor a dit que son unité chargée des marchandises dangereuses avait de la difficulté avec la procédure d'inspection s'il devait répondre à un incident dans une autre région du Canada. Bien souvent, il est plus facile d'aller de Windsor à d'autres endroits au Canada, en passant par les États-Unis qu'en passant par le Canada, et ils ont eu des problèmes à faire passer leur matériel et leur personnel au poste d'inspection. M. Kevin Weeks, le directeur de l'ICE du côté de Detroit, a été chargé de régler le problème. À ma connaissance, ce problème a disparu. C'est un exemple de la collaboration que nous avons sur ces problèmes. Quand on nous en soumet un, nous en discutons avec les personnes compétentes pour essayer de le régler.
Le président : Pourriez-vous dire ce que c'est que ce ICE, s'il vous plaît?
M. Slater : ICE, c'est l'abréviation pour Immigrations and Customs Enforcement. C'est un nouveau nom depuis que l'immigration relève du département de la Sécurité intérieure. Le nom a déjà changé quatre ou cinq fois.
Le président : Je prierais les témoins de ne pas utiliser d'acronymes ou d'initiales. Partez du principe que nous ne savons pas ce que cela signifie. Donnez-nous le nom complet, ce sera très utile pour le compte rendu.
Le sénateur Cordy : Merci d'être venus ce matin. Vous avez tous parlé de la nécessité d'une coopération entre Windsor et Detroit et entre les deux pays. Monsieur Slater, vous avez parlé de co-dépendance, et c'est un excellent terme car nous avons besoin l'un de l'autre.
Monsieur Slater, vous avez parlé du système radio et en réponse à une question du sénateur Banks, vous avez parlé de la communication entre les personnes qui travaillent sur le pont. Quand vous parliez de système radio, j'imagine que vous vouliez parler d'une fréquence d'urgence. Avez-vous les deux, ou avez-vous une station radio pour les urgences? C'est de cela que vous vouliez parler?
M. Slater : Le système portatif que nous avons est prévu pour les urgences. Toutefois, le nouveau système à 800 mégahertz qui sera opérationnel à partir de mars prochain fonctionnera aussi bien pour la circulation quotidienne que pour les urgences, et je sais que des représentants du Canada ont participé aux réunions des comités sur ce système à 800 mégahertz pour assurer la liaison entre les deux systèmes.
Le sénateur Cordy : Donc, pour l'instant, nous n'avons pas de liaison mais vous y travaillez?
M. Slater : Actuellement, nous pouvons communiquer d'un côté à l'autre de la frontière avec le système portatif, mais seulement en cas d'urgence. Il y a eu un échange de radios entre les services d'incendie de Windsor et de Detroit, mais là encore uniquement pour les cas d'urgence. Le système ne fonctionne pas pour les activités de routine quotidiennes.
Le sénateur Cordy : Vous avez aussi parlé d'exercices sur le pont et dans le tunnel. En quoi consistent-ils exactement? Qui y participe, et que faites-vous exactement?
M. Slater : Une fois par an, les premiers intervenants de Detroit, les services de police, d'incendie, les SMU et autres, choisissent une date avec les intervenants des mêmes services à Windsor et élaborent un scénario d'incident dans le tunnel ou sur le pont. C'est toujours organisé un dimanche matin quand il y a peu de circulation. On ferme le tunnel ou le pont et on fait l'exercice. Il peut s'agir d'un déversement de produits chimiques ou d'une explosion. C'est le comité qui choisit le scénario.
Les services d'incendie et de police réagissent comme ils le feraient dans ce genre de situation. Nous voyons où nous avons des faiblesses et nous essayons de les rectifier pour la fois suivante. Encore une fois, nous faisons cela une fois par an. Lors du dernier exercice sur le pont Ambassador, les participants incluaient le gouvernement fédéral américain, la Garde côtière américaine et le gouvernement fédéral canadien.
Le sénateur Cordy : Il y a des premiers intervenants des deux côtés de la frontière.
M. Slater : Oui.
Le sénateur Cordy : Monsieur Steudle, vous avez parlé des efforts de coordination. En cas d'alerte de votre côté, qui contacte les travailleurs à la frontière? Qui est responsable? Y a-t-il un mécanisme pour prévenir les gens des deux côtés de la frontière de ce qui se passe? Y a-t-il un dispositif pour donner l'alerte des deux côtés?
M. Steudle : J'aimerais revenir sur votre dernière question. Lorsque nous avons ces exercices, il y a aussi la participation du gouvernement de l'État, de la police de l'État du Michigan, et du point de vue des communications il y a un degré important de communication avec les organismes de l'État du Michigan par le biais des employés du département des Transports et de la police de l'État du Michigan. La plupart des communications passent par les travailleurs du pont, d'une place à l'autre, par les gestionnaires de l'infrastructure qui sont sur place.
N'oubliez pas que le pont Ambassadeur est propriété privée. Par conséquent, il n'y a pas d'employé d'État ou fédéral dans cette zone, seulement un agent frontalier. Il faut donc qu'il y ait des communications. Dans le cas du pont, qui est propriété privée, les employés de la compagnie peuvent se parler d'un côté à l'autre et assurer cette liaison.
Je ne peux pas vous dire qui exactement décroche le téléphone en cas d'incident, mais je peux vous dire qu'il y a des communications quotidiennes. Il y a des réseaux officieux entre les personnes qui travaillent des deux côtés, et notamment des procédure de sauvegarde des communications, et cetera. Donc il y a régulièrement des communications.
S'il y a une alerte concernant un certain type de véhicule, et là encore je parle des organismes de protection de la frontière, je crois que ce sont ces deux organisations qui la transmettent. J'espère que cela répond à votre question.
Le sénateur Cordy : Certains travailleurs nous ont dit hier qu'on ne les prévenait pas aussi souvent qu'il le faudrait, et je me demandais s'il y avait un dispositif pour prévenir les gens des deux côtés.
M. Steudle : Les travailleurs...
Le sénateur Cordy : S'il y a une alerte du côté américain, les travailleurs du côté canadien ne sont pas nécessairement informés.
M. Steudle : Je ne sais pas exactement ce que fait l'agence frontalière et je ne connais pas bien l'organisation à terme. J'imagine qu'on prévient l'agent des douanes, mais je ne peux pas vous affirmer qu'on le fait pour l'agent du péage, car il y a toutes sortes de menaces potentielles. Il faut évaluer chaque incident pour savoir s'il s'agit vraiment d'une menace ou non.
Il ne faut pas dramatiser chaque incident, à chaque fois que quelqu'un signale quelque chose alors que c'est une fausse alerte. Je ne peux donc pas m'occuper des communications internes à l'organisme responsable du passage à la frontière, car je n'ai pas de contrôle là-dessus.
Le sénateur Cordy : Je m'intéresse aux programmes EXPRES et NEXUS. Hier, nous avons parlé avec des camionneurs qui ont été arrêtés — et les camionneurs n'aiment pas qu'on les bloque, mais c'est la règle du jeu. Nous avons demandé à l'un d'entre eux s'il participait au programme EXPRES. Il a répondu : « À quoi bon? Cela ne nous fait pas gagner de temps », à cause des queues et cetera.
Avait-il raison? Monsieur Steudle, je crois que vous avez dit qu'il fallait améliorer les relations publiques et avoir plus de personnes dans ce programme. Mais si un camionneur dit une chose pareille alors que d'autres camionneurs sont à côté et peuvent l'entendre, j'imagine qu'il vaudrait mieux améliorer le travail de relations publiques au sujet de ce programme. Est-ce qu'il fonctionne?
M. Steudle : Ce monsieur devrait peut-être en discuter avec ces gens-là pour savoir exactement ce qui se passe. Il est clair qu'il y a toute une infrastructure dans ce contexte. Il faut de la place pour permettre aux camions de sortir de la file et d'accéder aux cabines du programme EXPRES. S'il y a un embouteillage important, ils restent bloqués; mais quand ils approchent, ils peuvent déboîter et franchir la frontière plus rapidement. Est-ce que c'est idéal? Non, mais c'est quand même plus rapide.
Pour ce qui est du pont Blue Water au passage Sarnia-Port Huron, où nous avons une capacité additionnelle avec une voie réservée pour les véhicules du programme EXPRES, on obtient un gain de temps considérable grâce à cette voie réservée. C'est un bon exemple encore une fois du lien entre le traitement à la frontière et l'infrastructure.
Le président : Avant de poursuivre la liste, j'aimerais faire une remarque d'ordre général. Nous sommes ici parce que nous estimons que 2013 ne constitue pas un délai raisonnable pour résoudre ce problème. Nous voulons avoir le tableau d'ensemble. Il est important que nous puissions comprendre la complexité du problème, et nous pensions que vous seriez les mieux placés pour nous y aider. Mais très franchement, nous n'avons pas l'impression que vous soyez très pressés de régler ce problème.
Personne ne nous dit que ce délai jusqu'à 2013 est trop long. Or, notre comité pense plutôt que nos deux pays ne peuvent pas se permettre d'attendre 2013 pour trouver une solution, et nous aimerions bien que vous nous proposiez quelque chose qui nous permettrait d'arriver à une solution bien avant cette échéance de 2013.
Pour notre comité, 2013, c'est un délai inacceptable. Nous voudrions donc savoir quelles mesures vous prenez pour accélérer les choses, vous pourrez nous le dire dans le cadre de vos réponses. Est-ce qu'il y a un leadership? Est-ce qu'il y a une volonté? Sinon, qui devrait s'en charger? Nous vous serions très reconnaissants si vous pouviez en dire quelques mots dans vos réponses au comité.
Le sénateur Atkins : Le président m'a presque volé ma première question, mais je voudrais me reporter à la page 19 de votre exposé, monsieur McCuaig. Si je vous comprends bien, la construction va commencer en 2013?
M. McCuaig : Avec notre programme actuel, la construction serait terminée à peu près à cette date.
Le sénateur Atkins : Terminée.
M. McCuaig : Oui. Évidemment, tout cela dépend en grande partie des décisions qui vont être prises, des choix qui seront faits à la fin et de la complexité de la construction, mais c'est ce qui est prévu pour l'instant.
Le sénateur Atkins : Quels sont les obstacles qui font que cette date est si éloignée? Est-ce que ce sont les approbations intergouvernementales, les autorisations environnementales? Qu'est-ce qui vous empêche d'aller plus vite, comme le disait le président?
M. McCuaig : Il faut voir plusieurs choses. Premièrement, il s'agit de mettre en place un élément d'infrastructure considérable dans un contexte urbain complexe. Il faut donc examiner à fond toutes les possibilités pour déterminer la meilleure solution et atténuer le plus possible les retombées sur ces milieux urbains ou sur l'environnement de la région. Il y a donc beaucoup de travail à faire avec les collectivités pour évaluer les diverses options sur la carte. C'est le résultat de tout le cadre législatif que tous les paliers de gouvernement ont mis en place pour encadrer toutes ces décisions.
Le calendrier que nous envisageons est analogue à celui que nous aurions pour d'autres grands projets d'infrastructure, qu'il s'agisse d'un grand couloir de circulation, d'une nouvelle grande route ou d'un autre grand chantier. Effectivement, cela prend du temps, mais nous vivons dans un contexte de plus en plus complexe et nous devons prendre en compte toutes ces exigences.
D'un point de vue administratif, nous nous sommes efforcés d'harmoniser et d'intégrer les trois lois dans ce processus de telle manière que, au bout du compte, lorsque nous obtenons une approbation, c'est une seule approbation pour toutes les compétences. Nous sommes décidés à trouver de nouvelles solutions administratives pour faciliter le processus, et je peux honnêtement vous dire que le partenariat entre les quatre administrations consacre beaucoup de temps à trouver des moyens de passer d'une étape à l'autre avec le plus d'efficacité possible.
Nous sommes d'accord pour dire que cela prend du temps. C'est aussi la raison pour laquelle les gouvernements fédéral et provincial collaborent avec la ville pour apporter des améliorations à court et à moyen terme qui ne compromettront pas le résultat final mais nous permettront d'investir judicieusement dans les infrastructures aujourd'hui et demain — autrement dit, quelles mesures pouvons-nous prendre aujourd'hui pour nous rapprocher de notre but à long terme?
Le sénateur Atkins : Aurez-vous du mal à financer le projet qui sera arrêté?
M. McCuaig : Lorsque nous aurons cerné le résultat recherché, il appartiendra aux gouvernements de décider de la manière dont le projet sera mis en œuvre. Que le projet soit mis en œuvre dans un modèle traditionnel du secteur public, ou qu'il fasse intervenir divers mécanismes de financement novateurs, je l'ignore; je ne peux pas parler au nom de ces gouvernements. Cependant, tout le monde veut avancer le plus rapidement possible. Je ne peux pas imaginer de scénario où le financement du projet en handicaperait la mise en œuvre. Il s'agit d'un investissement important pour les économies des deux pays, de la province, de l'État et de la région, et il faut agir.
Le président : Étant donné les coûts quotidiens dont on a parlé aujourd'hui, et les témoins nous en ont déjà parlé aujourd'hui, le coût horaire des embouteillages sur les ponts ou dans le tunnel, si l'un ou l'autre scénario ne fonctionne pas, vous pourriez vous tromper deux ou trois fois dans vos choix et il continuerait de vous en coûter moins cher de faire le mauvais choix deux ou trois fois. Les citoyens du Michigan et de l'Ontario ou des États-Unis et du Canada se porteraient mieux si vous faisiez ces erreurs.
Nous reconnaissons qu'il y a des lois et des limites auxquelles il faut se conformer. Cela étant dit, cependant, nous avons l'impression que d'ici à ce qu'on prenne la bonne décision, les deux parties seront considérablement appauvries. Quelqu'un veut-il répondre à cela?
M. McCuaig : J'imagine que vous faites allusion au temps qu'il faut pour se rendre jusqu'au bout, et aux conséquences de cet état de choses à long terme.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur la diapositive 9. Vous allez voir que nous avons essayé de déterminer le moment où nous atteindrons la capacité maximale dans divers éléments d'infrastructure. Ainsi, par exemple, vous allez voir que certains équipements frontaliers et les esplanades seront engorgés à court terme, et c'est la raison pour laquelle, par exemple, le Michigan est allé de l'avant avec le pont Ambassador et le projet du point d'accès, j'imagine, du côté américain de la frontière. Il y a des contraintes sur l'esplanade du côté américain à Port Huron-Sania, et l'on y travaille.
Donc, à mon avis, la question du nouveau passage frontalier n'est pas la seule qui doit nous préoccuper, même si elle demeure importante. En fait, il y a diverses choses qui doivent être faites entre-temps. Plus particulièrement, il y a les améliorations aux équipements frontaliers et à l'esplanade que nous pouvons apporter à court et à moyen terme dans l'attente du jour, si je puis dire, où nous aurons un nouveau passage frontalier.
Techniquement, la capacité du pont Ambassador n'atteint pas son maximum selon les travaux qui ont été faits au cours des 10 ou 15 prochaines années. Ce qui ne veut pas dire que la situation soit optimale. Personne ne vous dira que la situation est optimale, mais la capacité physique y est, si nous arrivons au cours des 10 prochaines années à faciliter le trafic aux esplanades et sur les routes qui mènent à ce pont.
Le sénateur Atkins : Monsieur Slater, pourriez-vous nous expliquer ce qui se passerait si le gouverneur Ridge déclenchait aujourd'hui l'alerte orange?
M. Slater : Absolument. Comme je l'ai dit plus tôt, chacun de nos départements s'est doté d'une politique de base sur la manière dont il faut réagir à l'élévation du niveau de la menace. Nous leur avons demandé de faire cela pour que leurs employés soient moins anxieux s'ils ne savent pas ce que le département va faire.
Tout d'abord, le service de police de Detroit a une unité dans deux secteurs différents qui fournirait le personnel supplémentaire pour le pont et le tunnel. Le service des incendies de Detroit augmenterait les effectifs des casernes qui sont situées le plus près de ces infrastructures. Il y aurait des patrouilles accrues, des patrouilles policières autour des infrastructures névralgiques, soit le pont, le tunnel et les autres infrastructures essentielles de la ville.
Le centre des opérations d'urgence est partiellement activé en temps normal. C'est là où je me trouve lorsqu'il y a une situation critique, et le centre est partiellement activé par mon personnel. Cette activation partielle nous permet de capter toute information importante que nous recevons et de la transmettre au cabinet du maire et aux autres points de diffusion essentiels.
Le sénateur Atkins : Que fait-on du côté de Windsor?
M. Slater : Du côté de Windsor, l'information irait au service de police et au service des incendies. Du côté de Detroit, ces services ont des liens directs avec leurs homologues de Windsor. J'ai aussi un lien direct avec un monsieur du nom de Guy Dorion, que je contacte toutes les semaines. S'il fallait diffuser des informations importantes, je le contacterais directement par téléphone.
Le sénateur Atkins : C'est vous le patron?
M. Slater : C'est moi le patron.
Le sénateur Atkins : Dans l'un de vos exposés, vous avez dit que depuis le 11 septembre, la circulation sur le pont et dans le tunnel a été réduite et n'est pas revenue au volume de trafic initial. Comment expliquez-vous cela? Quelles en sont les raisons à votre avis?
M. Iatonna : Dans mon exposé, j'ai mentionné deux motifs possibles. Premièrement, on craint toujours de voyager depuis le 11 septembre, semble-t-il, et chose certaine, on craint de traverser la frontière. Nous le voyons dans certaines de nos opérations et dans certaines de nos entreprises. Par exemple, le casino de Windsor est une grande attraction touristique, et son chiffre d'affaires en a clairement pâti. Nous collaborons avec les propriétaires et les exploitants du casino pour faciliter le passage de la frontière.
L'autre problème, c'est la perception, du moins le perception sinon la réalité, qu'il y a des retards importants à la frontière. Ce n'est pas le cas presque toute la journée, mais les longues files de camions et d'automobiles impressionnent les gens lorsqu'ils voient ça aux nouvelles ou lorsqu'ils en entendent parler. Des deux côtés de la frontière, des gens nous disent qu'ils ne veulent pas voyager à cause de ces retards, qu'ils vont faire d'autres choix, qu'il s'agisse de leurs affaires ou de leur plaisir.
Le sénateur Atkins : Le tourisme est-il en baisse?
M. Iatonna : Le tourisme est en baisse. Je n'ai pas de chiffres précis, mais la baisse est évidente. Cela reflète plus ou moins le déclin du trafic aux passages frontaliers.
Le sénateur Meighen : Bien sûr, l'une des façons de raccourcir l'attente à la frontière c'est d'avoir moins de gens qui y passent, mais il est évident que ce n'est pas un objectif pour aucun d'entre nous. Je pense que M. Iatonna a bien défini la chose : Il y a une perception. Y a-t-il quelqu'un qui fait quelque chose pour contrer cette perception?
On nous a dit hier que le temps d'attente moyen est de 10 minutes la semaine et de 20 minutes les jours fériés et la fin de semaine. Comme vous l'avez dit, cela surprendrait beaucoup la plupart des gens. Est-ce qu'on dit ces choses au public?
M. Iatonna : Je peux vous dire ce que nous faisons à l'échelle locale. Comme nous sommes copropriétaires du tunnel, nous avons un plan de marketing et nous faisons activement de la publicité, particulièrement dans la région de Detroit, et nous faisons savoir que le tunnel est accessible et que vous pouvez le franchir assez rapidement. Nous essayons de faire connaître la réalité. Nous utilisons tous les types de médias — télévision, radio et journaux — pour répandre ce message. Nous avons également recours à des communiqués de presse pour informer le public.
Pendant une longue période, après l'attentat du 11 septembre, nous avons eu un site Internet qui donnait de l'information sur les retards à la frontière et à d'autres points de passage. Nous avons fait de notre mieux à l'échelle locale, mais la question est plus vaste.
M. McCuaig : Outre les mesures locales, nous essayons aussi de faire connaître les retards ou les périodes d'attente à la frontière partout dans la province à l'aide de sites Web et en collaboration avec des intéressés, comme l'association du camionnage. Nous essayons aussi de travailler avec nos partenaires fédéraux pour appuyer et promouvoir NEXUS et EXPRES, pour que les frontaliers, entreprises ou particuliers, tirent le plus profit de ces voies réservées.
En ce qui concerne le pont Queenston-Lewiston, le Blue Water et le pont Peace, nous essayons de voir comment augmenter la capacité. C'est un peu plus difficile qu'à Windsor avec le pont Ambassador, étant donné les limites imposées par la voie d'approche, mais il y a actuellement des discussions sur ce point avec les organismes locaux.
La province a montré qu'elle agit en investissant dans des améliorations à court et à moyen terme. Vous verrez donc des investissements dans l'élimination des passages à niveau sur Walker Road pour améliorer l'accès local à partir de certaines des usines de fabrication automobile. On investit dans les systèmes intelligents de transport, l'élimination des passages piétonniers le long de Huron Church Road. Nous savons que ce n'est pas la panacée mais ce sont des progrès sur la voie d'une solution plus complète.
Le sénateur Meighen : Pardonnez-moi si je fais du coq-à-l'âne. À ce stade-ci, il ne reste plus beaucoup de bonnes questions. Le tunnel, évidemment, appartient à Detroit et à Windsor. Le pont appartient à des intérêts privés. Je ne sous-entends rien du tout — je suis sûr que ces intérêts collaborent entièrement — mais quelles difficultés pose le fait que le passage appartient à des intérêts privés plutôt qu'à l'État?
M. Iatonna : Je peux essayer de vous répondre. Je vais vous dire quelle est la situation actuellement au tunnel. Il est exploité par une entreprise privée pour le compte de Windsor et de Detroit. Windsor s'intéresse de plus près à l'activité quotidienne du tunnel. Pour elle, c'est un ouvrage public, un lien de transport majeur et elle prend des décisions sur les péages, par exemple, en le considérant comme un service public. L'exploitant privé, en revanche, n'y voit qu'une entreprise commerciale à but lucratif. D'un côté comme de l'autre, les décisions pourront varier selon la philosophie qui les guide.
Je ne peux pas parler directement du pont mais j'imagine que l'attitude est la même : dans un cas, il s'agit d'abord d'une entreprise commerciale; dans l'autre, à Windsor, d'une entreprise de service public.
Le sénateur Meighen : Oui, mais comme voyageur, ça n'y change rien, sauf pour ce que je dois acquitter en péage. Je ne sais même pas si ça coûte plus cher de passer par le pont que par le tunnel mais pour ce qui est de la rapidité, le type de propriété joue-t-il selon vous?
M. Iatonna : Pour les deux facteurs que vous avez mentionnés, le péage et la rapidité, nous savons d'expérience que le montant du péage n'influe pas sur la décision du passage à emprunter ou de traverser la frontière ou non. C'est la rapidité et la perception qu'on en a et la commodité du lieu qui comptent. Pour aller à notre casino, par exemple, beaucoup d'Américains viendront par le pont et rentreront par le tunnel. La rapidité est donc la considération première et je crois que l'objectif des exploitants, qu'ils soient privés ou publics, est de s'assurer que la circulation se fasse rapidement.
Le sénateur Meighen : Ce que vous me dites, c'est que la structure n'a pas vraiment grand-chose à voir avec la façon de combattre les problèmes dont on discute ce matin.
M. Iatonna : C'est juste.
Le sénateur Meighen : Nous parlions d'EXPRES et de NEXUS. Quelqu'un m'a dit qu'il y a peut-être beaucoup d'abus d'un programme ou des deux. Y a-t-il des contrôles pour le vérifier ou sont-ils de création trop récente pour que l'on sache s'il y a ou non des abus importants?
M. Steudle : Sénateur, je n'ai pas entendu parler d'abus majeur de l'un ou l'autre programme, mais je vais vérifier. D'après nos renseignements, ils sont tous les deux très efficaces. Je n'ai pas entendu parler d'abus. Nous allons nous renseigner.
Le président : Pourriez-vous en informer le comité, monsieur? Pourriez-vous envoyer une lettre au comité sur le sujet?
M. Steudle : Certainement.
Le sénateur Meighen : Je ne dis pas qu'il y en a eu. Quelqu'un m'a dit qu'à son avis il y en avait beaucoup, que c'était permis de faire de la contrebande en quelque sorte parce que personne ne vérifie.
M. Steudle : C'était une conjecture de sa part? La personne a-t-elle donné des précisions? Savait-elle effectivement que cela se faisait?
Le sénateur Meighen : C'est ce qui se dit. Il n'y avait ni cas, ni chiffres précis, mais à son avis cela se faisait.
M. Steudle : Ces laissez-passer sont délivrés après des contrôles de sécurité assez approfondis.
Le sénateur Meighen : Oui, je le sais.
M. Steudle : Je dirais qu'on pourrait croire effectivement que cela peut exister. La seule façon de s'assurer que ça ne se produit pas serait de n'avoir ni l'un ni l'autre programme.
Le sénateur Meighen : Je suis du même avis.
M. Steudle : Je pense donc que le risque existe. Je vais me renseigner.
Le sénateur Meighen : Fait-on un contrôle aléatoire des détenteurs de laissez-passer NEXUS et EXPRES?
M. Steudle : Ça, je ne le sais pas. Je vais vérifier.
Le sénateur Meighen : Personne ne le sait? L'un d'entre vous pense-t-il qu'une augmentation de l'effectif des douanes et de l'immigration d'un côté ou de l'autre accélérerait le passage des voyageurs et des marchandises? Est-ce un problème? Nous faut-il plus de gens?
M. Slater : Du côté américain, les douanes ont obtenu du personnel supplémentaire. Je ne pense pas que le nombre d'employés influe sur le travail d'inspection. Les inspecteurs ont des marches à suivre pour voir si quelque chose sort de l'ordinaire. Il est évident que, lorsqu'il y a plus de personnel, les quarts sont plus courts et plus nombreux. Au lieu de deux quarts de 12 heures ou deux de 10 heures, les employés peuvent faire des quarts de 8 heures, ce qui est plus facile pour eux, mais c'est le travail d'inspection qui influe sur la rapidité.
Le sénateur Meighen : Les témoins canadiens ont-ils un avis?
M. Iatonna : J'aimerais dire quelque chose. Les choses se sont beaucoup améliorées sur le pont après l'ajout de quatre voies d'inspection du côté américain. M. Slater a tout à fait raison. Il y a suffisamment de guérites et de personnel. Par contre, si le degré de l'inspection augmente — et l'un des problèmes, c'est qu'il peut augmenter à tout moment. Le résultat, c'est que nous ne pouvons pas venir à bout de la circulation qui passe par le tunnel et cela devient un problème. Si les abords du tunnel de chaque côté de...
Le sénateur Meighen : Excusez-moi, que je comprenne bien. Vous dites que ça peut augmenter à tout moment. S'agit-il des cas où M. Slater se faire dire que le niveau d'alerte a été relevé?
M. Iatonna : Nous sommes informés qu'il a été relevé. On ne nous prévient pas forcément à l'avance d'une alerte.
Le sénateur Meighen : J'aimerais approfondir cela un peu plus. Combien de temps faut-il avant que quelqu'un ici sache que le niveau d'alerte a été relevé? S'il l'a été, il est de l'intérêt de tout le monde d'affecter plus de personnel à la vérification des voyageurs.
M. Slater : Je vais vous présenter deux scénarios. Il y a environ 14 mois, je l'apprenais par CNN, et c'est la vérité. À partir de là, j'ai commencé à téléphoner moi-même. Maintenant, je reçois un appel anticipé du département de la Sécurité intérieure qui me prévient, et nous diffusons l'information.
Le sénateur Meighen : Y compris au Canada?
M. Slater : Y compris au directeur des services qui doivent contacter les Canadiens, les services de police et d'incendie.
Le sénateur Meighen : Et vous êtes certain qu'ils le font rapidement?
M. Slater : Bien franchement, je ne contrôle pas ce qu'ils font. Je présume simplement qu'ils transmettent ces appels comme nous le leur demandons. Je n'ai pas entendu mon homologue canadien se plaindre d'un retard dans ces appels. C'est peut-être arrivé, mais je n'en ai pas entendu parler.
M. Iatonna : Je peux vous en parler. Nous sommes prévenus à temps. L'administrateur du tunnel sait immédiatement quand le niveau d'inspection est relevé, et il nous en informe. Il y a deux niveaux de notification. Il y a une notification par courriel, et pour les niveaux d'alerte plus élevés, il y a la communication téléphonique. Donc, le système fonctionne bien. Dès que la décision est prise et qu'on passe à l'action, nous sommes immédiatement informés.
Le sénateur Meighen : Donc, vous essayez de contacter plus de personnes, j'imagine, mais après coup.
M. Iatonna : C'est exact.
Le président : Si vous me le permettez, sénateur Meighen, j'ai l'impression qu'il y a un problème de personnel d'appoint aux douanes. Si je vous comprends bien, il y a un problème d'effectifs d'appoint en cas d'urgence aux douanes. Vous en entendez parler immédiatement, vous savez qu'il y a un problème mais vous ne pouvez pas faire venir des agents assez rapidement pour empêcher les embouteillages.
M. Iatonna : Ce n'est pas nous qui contrôlons le passage à la douane, mais oui.
Le président : Non, je sais bien. Mais vous savez qu'il y a un problème, vous en faites part aux responsables appropriés des services de douanes, et ensuite c'est à eux de se débrouiller pour trouver un tas de personnes pour faire les inspections, mais ils ne sont pas en mesure de faire venir en moins d'une heure une douzaine ou une trentaine de vos inspecteurs. C'est bien ce que vous nous dites?
M. Iatonna : Cela me paraît juste.
Le président : Est-ce que c'est le seul problème ou est-ce que c'est seulement un aspect du problème?
M. McCuaig : Il est certain que plus le niveau de sécurité augmente, plus la circulation au poste-frontière se ralentit s'il n'y a pas de personnel supplémentaire. Vu les effectifs actuellement, je ne crois pas qu'il soit possible d'augmenter considérablement le nombre d'agents très vite en cas d'urgence. Cela peut se faire au moment des changements de poste, mais effectivement, dans ce genre de cas, le flot se ralentit. Si le niveau d'inspection se renforce, il y a un ralentissement au niveau de chaque inspecteur.
Cela dit, avec l'ouverture des quatre cabines et l'accroissement du personnel, la situation est nettement meilleure à Windsor maintenant qu'il y a un an ou un an et demi. Mon collègue de Windsor peut peut-être vous en parler, mais nous avons l'impression que la longueur des files d'attente et leur fréquence ont diminué depuis quelque temps. C'est parce que les postes-frontières sont mieux organisés avec plus de personnel et des méthodes modifiées.
Le sénateur Meighen : Est-ce qu'on a envisagé de stationner des agents américains des douanes et d'immigration en sol canadien et inversement, comme on le fait dans les aéroports, et le cas échéant, où en est la discussion à ce sujet?
M. Slater : Il y a eu pas mal de discussions à ce sujet. À chaque fois que j'ai eu l'occasion d'en parler avec M. Ridge, j'ai soulevé la question, car on craint beaucoup que quelqu'un puisse s'aventurer dans ou sur cette infrastructure, que ce soit le tunnel ou le pont, et commette un acte répréhensible, si vous voulez, avant d'être inspecté. À chaque fois, M. Ridge m'a dit qu'il continuait à étudier la question et qu'il y avait des problèmes de souveraineté et d'autres questions politiques. Je ne sais pas où en est la discussion. Cette question est toujours l'une des priorités absolues des responsables de la sécurité intérieure au Michigan.
Le sénateur Meighen : C'est dommage. Nous avons réglé le problème pour les avions. Pourquoi ne pourrions-nous pas le faire pour les automobiles?
M. Slater : Je suis d'accord.
Le sénateur Forrestall : Bienvenue, messieurs, et je dois dire à nos amis américains aujourd'hui que nous sommes très heureux de vous accueillir, et que je suis très fier que le président soit à Halifax aujourd'hui.
Je voudrais vous parler un peu des dispositifs d'alerte. Aux États-Unis, vous avez les codes rouge, vert, orange, pourpre, et cetera. Nous avons aussi notre système d'alerte — que vous connaissez peut-être — Peter Mansbridge et Lloyd Robertson, de la CBC et de CTV, deux réseaux de télévision.
Je vais adresser ma question au sous-ministre. Faudrait-il mettre au point au Canada un système national d'alerte avec des codes de couleur ou autre chose?
M. Slater : Si je peux répondre à cette question, je dirais que le système de codes de couleur aux États-Unis est bien intentionné. Toutefois, il ne précise pas suffisamment en quoi doivent consister les réactions des particuliers et des organisations. Naturellement, quand le degré d'alerte monte, on sait que quelque chose est en train de se passer, mais il n'existe aucune ligne directrice pour dire aux villes, aux organisations ou aux citoyens ce qu'ils doivent faire lorsque le code passe de jaune à orange ou d'orange à rouge. C'est pour cela qu'à Détroit nous avons mis au point des mesures de protection de base pour que nos divers services, leurs directeurs, leurs sous-directeurs et leurs agents sachent exactement quoi faire et suivent nos directives.
Pour répondre à votre question, je ne suis pas certain des avantages que cela apporte. Je sais que c'est une façon de prévenir la population. Tout dépend de la façon dont le dispositif est conçu. Il faut qu'il soit structuré. Si l'on organise un tel dispositif, il faut prévoir des directives pour les particuliers ou les organisations.
Le sénateur Forrestall : Dans votre ville, est-ce que vous utilisez le système de codes de couleur national?
M. Slater : Oui.
Le sénateur Forrestall : Le même qu'au niveau fédéral?
M. Slater : Oui, c'est le système du département de la Sécurité intérieure.
Le sénateur Forrestall : Il doit quand même avoir une différence. S'il y a une menace d'attentat terroriste dans l'espace aérien de l'Amérique du Nord, ce n'est pas la même chose que s'il y a un problème sur le pont entre Detroit et Windsor. Qu'est-ce qui permet de faire la différence? Comment les gens savent-ils que c'est simplement un problème local?
M. Slater : La seule différence, c'est que nous apportons plus de précision quand nous utilisons l'un de ces codes de couleur.
Le sénateur Forrestall : C'est un genre de dispositif 911, un dispositif d'alerte pour les services d'incendie, de police et d'ambulance. Vous déterminez le problème et vous réagissez.
M. Slater : C'est exact. Chaque service a des fonctions bien précises qui ont été élaborées par mon bureau en fonction de chacun de ces codes de couleur. Ce n'est pas l'état ou le gouvernement fédéral qui ont déterminé ces fonctions. L'état a aussi ajouté certaines informations aux codes de couleur, mais à Détroit, nous avons des mécanismes d'intervention bien précis qui sont liés à l'utilisation de chacune de ces couleurs.
M. Steudle : Sénateur, dans les états, nous utilisons le même système de codes de couleur et nous procédons de la même façon que les villes.
Prenons comme exemple le cas du pont Mackinac. Nous avons le même système, et à chaque changement de couleur, il y a des protocoles d'activités différentes pour le personnel, selon la nature de la menace, mais la base est la même. Dans bien des cas, le problème a un caractère spécifiquement local. Vous comprenez bien que le pont Mackinac devient une cible de temps en temps.
Le sénateur Atkins : Pourriez-vous nous parler des retombées économiques de ce système de codes de couleur?
M. Slater : Certainement. Le passage au niveau supérieur à Noël l'année dernière, durant la période de Noël et du Nouvel An, a coûté environ 9 millions de dollars au service de police avec toutes ces interventions et tout le dispositif qu'il a fallu mettre en place. Donc, il y a des retombées budgétaires sur les services de première intervention.
Le sénateur Forrestall : Monsieur Slater, je dois avouer que je suis très heureux de vous avoir entendu dire : « C'est ma responsabilité ». Vous êtes la première personne à dire cela en trois ans. Nous cherchons toujours à savoir qui est responsable.
J'ai deux ou trois très brèves questions. Dans la collaboration entre vos deux villes, est-ce qu'il vous arrive d'avoir recours à des hélicoptères pour assurer des déplacements stratégiques sur le pont ou dans le tunnel?
M. Slater : Les hélicoptères jouent un rôle important. Toutefois, l'hélicoptère de la ville de Detroit, qui appartient au service de police, a désespérément besoin de réparations. Nous n'avons donc pas toujours la capacité de le faire voler. Nous cherchons à obtenir des fonds fédéraux pour acheter des moyens de transport aérien. Toutefois, cela ne s'est pas encore produit.
Le sénateur Forrestall : Detroit a-t-elle cette capacité, monsieur Iatonna, de quelque façon que ce soit?
M. Iatonna : Demandez-vous si Windsor a cette capacité? Windsor n'a aucun hélicoptère. Toutefois, et je regrette de soulever une autre question, mais j'ajoute que, compte tenu des services de soins de santé ici, à Windsor, nous éprouvons des problèmes lorsque la circulation à la frontière est bloquée. Nous nous servons des hôpitaux de Detroit pour les malades de l'urgence, et nous avons souvent recours à des hélicoptères pour amener des patients de l'autre côté de la frontière.
Le sénateur Forrestall : Avez-vous un protocole avec le ministère de la Défense nationale ou avec la Garde côtière canadienne pour vous servir de leur matériel?
M. Iatonna : Je l'ignore.
Le sénateur Forrestall : Le savez-vous, monsieur McCuaig?
M. McCuaig : Non, je regrette. Je ne le sais pas.
Le sénateur Forrestall : Permettez-moi de poser une question qui me passe par la tête. La dernière fois où j'étais ici, nous avons posé une simple question au sujet de la réserve de produits médicaux et autres du ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, celle qui doit servir dans les situations d'urgence, en cas d'extrême nécessité. À l'époque, le groupe des témoins, un groupe très distingué, a réagi en nous gratifiant d'un regard ébahi. Non seulement il ne savait rien de cette réserve, mais il ignorait qui détenait l'information et, en fait, qui pouvait bien avoir la clé. Si l'on envisage la possibilité d'une urgence, il est plutôt décevant de constater cet état de faits. Peut-être qu'un représentant de la Ville de Windsor pourrait nous dire si la réserve d'urgence en approvisionnements médicaux, en couvertures, en civières et en autres matériels a enfin été trouvée, si elle a été améliorée et si elle est disponible.
M. Iatonna : La Ville de Windsor dispose bien d'un plan d'urgence exhaustif. En fait, on s'occupe de le mettre à jour en ce moment même. Une partie de cette mise à jour inclura l'inventaire des stocks. Il existe un registre des stocks. Cela dit, sont-ils suffisants, compte tenu des réalités actuelles à la frontière? Nous évaluerons cela en faisant la mise à jour.
Le sénateur Forrestall : Monsieur le président, j'hésite à poser la question, mais je vais le faire. Savez-vous s'il existe un programme national? Les sénateurs de tout le pays disposent d'un approvisionnement en cas d'urgence, comme je l'ai dit. Le savez-vous?
Le président : Sénateur Forrestall, ces témoins ne sont pas ici pour témoigner à ce sujet. Nous ne les avons pas avertis du fait que cette question serait soulevée. Ce sont vraiment les opérations de protection civile qui s'occupent de cela.
Le sénateur Forrestall : Mais voyons, vous faites certainement partie des opérations de protection civile.
M. Iatonna : Je suis membre de ce que l'on appelle le groupe de contrôle en cas d'urgence, mais je ne sais rien du programme dont vous parlez.
Le sénateur Forrestall : Très bien. Je comprends.
Mon autre question porte sur les abus qui peuvent découler de l'utilisation de programmes NEXUS ou EXPRES. Certains membres de la collectivité ainsi que les gouvernements des états ou des provinces voudraient qu'à chaque passage frontalier, dans la guérite, il y ait un agent qui devrait ou pourrait dire : « T'es qui toi? Eh, tu t'en vas où comme ça, mon gars? » Au Canada, ces agents ne sont pas armés.
Manifestement, je devrais m'interrompre ici.
Le président : Oui, vous ne vous adressez pas au bon groupe, sénateur Forrestall. Avez-vous d'autres questions portant sur le pont ou le passage frontalier?
Le sénateur Forrestall : Aucune qui vous intéresserait, monsieur.
Le président : C'est évident.
Le sénateur Munson : Dispose-t-on d'une prévision des coûts associés à la phase de la conception? Combien coûterait-il de commencer à concevoir tous ces travaux maintenant?
M. McCuaig : Non, nous n'avons pas effectué de prévisions détaillées des coûts pour l'instant. Nous en sommes encore à cerner et évaluer les diverses options. Les coûts feront partie de l'étape suivante de notre démarche.
Le sénateur Munson : Combien cette étape-là durera-t-elle?
M. McCuaig : Nous prévoyons recevoir les approbations environnementales de tous les ordres de gouvernement d'ici à la fin de 2007. Je le répète, le coût n'est que l'un des critères pris en compte pour la comparaison et les diverses options. Ce sera le scénario des deux années à venir, environ.
Le sénateur Munson : Pourquoi ces approbations environnementales prennent-elles tant de temps?
M. McCuaig : J'en reviens à ce que je disais plus tôt au sujet de la complexité de l'environnement dans lequel nous évoluons et des problèmes qu'il faut résoudre, que le problème soit soulevé par la collectivité concernée par l'infrastructure, ou qu'il s'agisse des caractéristiques environnementales de la région. Nous avons beaucoup de travail à faire pour nous assurer que nous avons bien fait nos devoirs avant d'aller parler à ces collectivités. À mesure que nous sommes saisis des divers problèmes, nous avons beaucoup de travail à accomplir et nous tâchons de répondre aux préoccupations et de prévoir les mesures à prendre au cours de notre préparation.
Je crois donc que tout le monde reconnaît qu'il faut beaucoup de temps. D'après notre expérience, pour bon nombre de processus environnementaux, il est nécessaire de déployer tous ces efforts pour parvenir au but visé.
Le sénateur Munson : Les dates sur la diapo 9 ne sont-elles pas légèrement trompeuses? Qu'arrive-t-il aux dates sur la diapo 9 si vous perdez l'un de ces passages frontaliers? Est-ce la tragédie? Il y a toutes ces attentes. Ces dates seraient toutes fausses, n'est-ce pas?
M. McCuaig : Vous voulez dire au cas où l'un des passages frontaliers n'est plus disponible?
Le sénateur Munson : Oui.
M. McCuaig : Ce n'est pas une hypothèse dont nous avons tenu compte dans cette évaluation. S'il survenait un événement de ce type, il va falloir d'autres mesures pour y répondre. Ce processus n'est pas conçu en fonction de l'hypothèse que nous perdrions l'accès à l'un des passages frontaliers.
Le sénateur Munson : Un peu plus tôt, monsieur Slater, vous avez parlé d'une fermeture du pont ou du tunnel une fois par année, un dimanche matin, pour examiner les faiblesses et les carences. Pouvez-vous nous dire ce que vous avez constaté plus particulièrement lors des dernières inspections et ce que vous avez fait en collaboration avec les Canadiens pour améliorer la situation?
M. Slater : Je ne tiens pas particulièrement à entrer dans les détails, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a certains mécanismes de réaction, tant du côté américain que du côté canadien, qui devaient être améliorés. La communication constitue l'un des problèmes importants. Dans plusieurs cas, le tunnel a présenté des situations où nous croyions avoir réglé les problèmes de communications, mais celles-ci n'étaient pas aussi efficaces que nous l'aurions souhaité. Je songe en particulier aux procédures de franchissement du tunnel pour le matériel. Il faut s'assurer que, d'un côté comme de l'autre, il existe une interopérabilité des mécanismes de connexion, particulièrement en cas d'incendie et à l'intérieur du tunnel. Initialement, nous avons constaté que certains connecteurs n'étaient pas adaptés aux spécifications de l'un ou l'autre des services. Cela a été résolu.
Il n'y a pas eu d'autres grandes lacunes, mais si tout cela avait fait défaut en même temps, nous aurions eu un problème de taille. Tous les ans, lorsque nous faisons ces exercices, nous tâchons d'envisager un nouveau scénario qui mette à l'épreuve les diverses méthodes et procédures déceler les autres problèmes auxquels nous risquons de ne pas avoir songé.
Le sénateur Banks : Je voudrais poser une brève question à M. Iatonna. Vous dites que la circulation a diminué. S'agit-il principalement de la circulation touristique ou plutôt de la circulation des camions? De cette réduction de 10,9 p. 100, savez-vous quelle a été la part des camions et quelle a été celle des touristes?
M. Iatonna : Vu les contraintes imposées au tunnel, le pourcentage de la circulation des camions est très bas, et nous avons constaté une baisse à cet égard. Je n'ai pas ces chiffres avec moi. Il nous est difficile de calculer la part de chaque type de circulation, parce que nous n'avons pas qu'un seul passage frontalier dans cette région, nous en avons deux. Nous pouvons avancer des suppositions, et j'ai dit croire que c'est probablement les voyages touristiques facultatifs qui ont diminué, mais il y a certainement eu une incidence sur la circulation commerciale.
En ce qui concerne les camions, le tunnel est principalement utilisé par les entreprises locales. Par exemple, notre mine de sel locale envoie du gros sel de gemme aux organismes de transport du Michigan pendant l'hiver. Il s'agit d'un de nos plus grands clients au tunnel. Ce sont principalement les utilisateurs régionaux qui s'en servent.
M. Steudle : Sénateur, à d'autres passages frontaliers, celui de Sault Ste. Marie, par exemple, il y a également réduction du nombre de véhicules à passagers. La circulation est en baisse aux autres ponts également. Nous voyons cela au pont International. À notre propre pont, le pont Mackinac, situé entre deux péninsules, il y a également baisse de la circulation.
Le sénateur Banks : Est-ce la circulation facultative qui diminue ou la circulation commerciale, qui est essentielle? Le savez-vous? Est-ce que la circulation en camion diminue?
M. McCuaig : Nous avons des renseignements que nous pouvons vous transmettre ultérieurement si vous le voulez, sénateur. On y traite et de la circulation en automobile et de la circulation commerciale. Nous pouvons vous fournir ces renseignements.
Le sénateur Banks : Si vous pouviez transmettre cela au greffier, ce serait utile. Monsieur le président, je voudrais poser une dernière question à M. McCuaig et M. Steudle. L'un de nos collègues, le sénateur Grafstein, a fait un exposé à Washington il y a deux semaines, pendant lequel il a parlé de la frustration que nous éprouvons tous quant à la vitesse à laquelle tout cela se fait, non seulement à ce passage frontalier, mais principalement à ce passage-ci. Comme vous l'avez tous souligné, ce passage est d'une importance fondamentale pour la bonne santé économique et la sécurité des deux côtés de la frontière.
Le sénateur Grafstein a dit que la frustration était telle que, si nous voulons vraiment résoudre le problème, il faut qu'il y ait une nouvelle grande commission, une nouvelle commission internationale dotée des pouvoirs nécessaires pour éliminer les tracasseries administratives. Ces tracasseries sont le résultat de la présence de six ordres de gouvernement et de nombreux intérêts commerciaux. Cela est même plus compliqué que la présence de six ordres de gouvernement. Il faut que ces six ordres de gouvernement et que les intérêts commerciaux internationaux se concertent et tombent tous d'accord pour que quelque chose se produise enfin, quelque chose qui tiendrait compte des considérations environnementales et de toutes les autres.
Pour résoudre le problème, il faut qu'il y ait quelqu'un qui puisse affirmer, comme l'a fait M. Slater aujourd'hui : « J'assume cette responsabilité. » Il faut que quelqu'un dise : « Nous assumons la responsabilité, nous allons surmonter les obstacles bureaucratiques et résoudre le problème des passages frontaliers. »
Pensez-vous que c'est une bonne idée?
M. McCuaig : S'agit-il d'une bonne idée? Je n'y ai pas vraiment beaucoup réfléchi. Je suis sûr qu'il y a certains avantages à ce qu'il y ait un seul organisme ou une seule personne qui détienne la responsabilité et le pouvoir de réaliser les objectifs souhaités.
Le sénateur Banks : Une commission internationale, par exemple?
M. McCuaig : Je suis sûr qu'il y aurait certains avantages à cela. Toutefois, ce type de structure entraîne probablement un certain nombre de problèmes.
D'après mon expérience, il arrive parfois qu'en adoptant de nouvelles dispositions de gouvernance, on consacre beaucoup de temps, d'efforts et de ressources pour simplement obtenir de nouvelles dispositions de gouvernance, sans pour autant avoir progressé à la recherche d'une solution du problème fondamental.
Je tiens donc à exprimer une préoccupation, à savoir qu'il faudrait peut-être beaucoup d'efforts pour parvenir à un consensus permettant d'établir une toute puissante administration transfrontalière et qu'ensuite il restera encore tout le travail à faire pour parvenir à la solution.
M. Steudle : Pour poursuivre sur cette lancée, je crois également que cette commission devrait pouvoir s'occuper des lois environnementales dans les deux pays, reconnaissant qu'elles existent et qu'il y a eu des raisons pour qu'elles soient adoptées. Cette commission devrait donc avoir un certain pouvoir pour modifier certaines dispositions, les contourner ou faire ce qu'il faut.
Le sénateur Banks : Ou s'occuper de les faire adopter plus rapidement.
M. Steudle : Ou les faire adopter plus rapidement. Comme l'a dit M. McCuaig, il y a certainement des aspects positifs à cela. Je suis sûr toutefois qu'il y a des difficultés qui découleraient également de l'établissement de cette structure. C'est une idée intéressante.
Le sénateur Banks : Je rappelle que la CMI, par exemple, a résolu beaucoup de problèmes et, peut-on supposer, permis d'éviter beaucoup d'autres problèmes. C'est une commission internationale très puissante qui a fait beaucoup de bien.
Le président : Au nom du comité, je voudrais remercier nos témoins. Nous avons eu une matinée très utile. Nous vous savons gré du temps et des efforts que vous avez consacrés à vous y préparer, et nous vous remercions de nous avoir aidés à comprendre les questions complexes touchant les mouvements transfrontaliers. Vous ayant entendu, nous comprenons encore plus clairement la difficulté des tâches à accomplir et des défis à relever.
Les échéances continuent à nous préoccuper. Je suis sûr que vous partagez nos inquiétudes et nous continuerons notre examen de la question en nous concentrant particulièrement sur les délais de réalisation. Une fois de plus, merci de votre présence ici. Nous vous savons gré de votre contribution.
Honorables sénateurs, nous recevons maintenant M. Mark Norman, président du conseil d'administration et PDG de DaimlerChrysler Canada. M. Norman représente le Conseil du partenariat du secteur canadien de l'automobile — le CPSCA. Avant sa nomination à ce poste, il était vice-président des ventes et du marketing chez DaimlerChrysler.
Nous recevons également M. Bob Keyes, premier vice-président de la Chambre de commerce du Canada. Auparavant, M. Keyes était vice-président aux Affaires économiques de l'Association minière du Canada, où il était responsable d'une vaste gamme de dossiers économiques, y compris le commerce international et la politique des investissements. En sa qualité de premier vice-président, il dirige le programme et les activités internationales de la Chambre de commerce.
Messieurs, je crois savoir que vous avez chacun un bref exposé à nous faire.
M. Bob Keyes, premier vice-président, Affaires internationales, Chambre de commerce du Canada : Bonjour. Je suis ravi d'être ici pour vous parler d'infrastructure critique et de mouvements transfrontaliers ainsi que de certains enjeux importants à ce sujet. Votre greffier m'a remis certaines questions devant servir de guide, et je crois que je vais les suivre, mais je suis sûr que nous allons nous intéresser à bien d'autres questions pendant la période de discussion.
Pour ce qui est de l'importance économique de la frontière, il convient de réfléchir un instant pour se demander ce qu'est une frontière et ce à quoi elle sert. Une frontière, c'est beaucoup plus que des postes frontaliers. Une frontière, c'est un système complexe et dynamique doté d'une multiplicité de fonctions qui, dans l'ensemble du pays, fonctionnent en modes multiples et réalisent des choses multiples. Dès que nous parlons d'infrastructure, nous devons songer de façon très générale à ce que nous appelons « la frontière ».
Dans quelle mesure cette frontière nous importe-t-elle? Il y a pléthore de chiffres, et il suffit de regarder par la fenêtre et de voir les camions qui traversent le pont. Le Canada exporte plus de 40 p. 100 de son PIB, ses biens et ses services devant traverser une frontière pour parvenir à d'autres endroits. Sachant que 85 p. 100 de nos exportations vont aux États-Unis, comme cela s'est produit l'an dernier, nous savons que ces biens et ces services doivent quitter le territoire canadien pour entrer en sol américain. Il est donc essentiel que cela se produise de façon efficace.
Pour ce qui est des échanges Canada-États-Unis, il est évident que, ce matin, nous nous trouvons tout proche d'une artère primordiale. Plus du quart de nos échanges empruntent ce corridor, passant d'un centre industriel à un autre. L'infrastructure propre à ce corridor est d'une importance stratégique parce qu'elle facilite le mouvement des biens, des personnes et des services dans les deux sens, pas dans un seul, du fait de l'intégration de nos économies. Par conséquent, si nous ne gérons pas ces postes-frontières, si nous n'investissons pas dans ces mouvements transfrontaliers et si nous ne nous occupons pas de cet actif, nous ferons face à de grands problèmes économiques.
La construction de l'infrastructure va au-delà de la simple installation. Il faut que ce soit la bonne infrastructure, au bon endroit, servant à faire ce qui est utile. Le plan d'action en 30 points de décembre 2001 et, ultérieurement, l'accord sur la frontière intelligente ont eu une importance énorme parce qu'ils nous ont amenés à nous concentrer sur la frontière et sur l'état de la frontière.
Avant le 11 septembre 2001, la frontière était traitée avec désinvolture. Nous étions là, comme des somnambules. La croissance des échanges et de la circulation à la frontière dépassait considérablement la capacité des mécanismes de fonctionnement des frontières, malgré l'Accord sur la frontière commune en vigueur depuis le milieu des années 90 et malgré les efforts concertés du premier ministre Chrétien et du président Clinton en vue d'un partenariat Canada-États-Unis. Nous ne disposions tout simplement pas des investissements, des montants et de l'attention nécessaires.
Bien sûr, au lendemain du 11 septembre, la situation a changé radicalement. Il y a eu de nouvelles priorités et un nouveau programme, principalement centrés sur la sécurité.
Nous félicitons grandement le gouvernement canadien de ses initiatives. Il n'a pas hésité à faire les premiers pas auprès des Américains et à réaliser les programmes qui respectaient à la fois leurs besoins et les nôtres, surtout en ce qui concerne la sécurité.
La frontière d'aujourd'hui comporte un tout nouveau vocabulaire. On entend des mots tels que intégrer, coopérer, harmoniser, rationaliser, coordonner, partager, innover et, bien sûr, sécurité. Cela interpelle non seulement les gouvernements mais aussi les entreprises, parce que ce sont les entreprises qui déplacent les biens et un bon nombre de personnes. Nous devons donc être un partenaire essentiel des gouvernements; nous avons immensément à gagner à ce que tout ce qui concerne la frontière soit bien fait.
Un des produits essentiels du plan d'action en 30 points prévu par l'accord sur la frontière intelligente a été la mise en œuvre de programmes tels que EXPRES et NEXUS. Toutefois, bien que je sois prêt à reconnaître l'utilité de ces programmes, je crois qu'ils ne peuvent fonctionner et bien fonctionner que si nous disposons de l'infrastructure nécessaire pour assurer un maximum d'efficacité. Si nous ne réglons pas systématiquement les problèmes d'infrastructure, ces programmes ne pourront pas permettre de réaliser les objectifs pour lesquels ils ont été conçus et il ne sert à rien d'avoir des voies réservées au programme EXPRES si les camions ne peuvent pas y parvenir ou les emprunter peu de temps avant d'arriver à un passage frontalier. La capacité de faire toutes les choses que nous voulons que ces programmes accomplissent n'existe simplement pas.
Nous avons désespérément besoin d'agrandir et de moderniser les infrastructures à de nombreux postes-frontières, peut-être pas à tous, mais à un bon nombre d'entre eux. Or il n'existe aucun corridor plus important que celui à côté duquel nous nous trouvons aujourd'hui, celui de la région de Detroit-Windsor. Avec une meilleure infrastructure, comme je l'ai dit il y a un instant, des programmes tels que NEXUS et EXPRES ainsi que d'autres encore peuvent fonctionner comme prévu, en permettant l'accès à la circulation à faible risque et en permettant aux efforts de sécurité de se concentrer sur les mouvements à risque élevé.
La présence d'une meilleure infrastructure est également essentielle à l'éclosion de nouvelles idées, notamment les autorisations préalables, parce qu'il faut que ces mesures correspondent à l'infrastructure. Il faut avoir l'espace pour les installations nécessaires.
Pour ce qui est de la dernière question, le Canada doit vraiment insister sur la mise en œuvre de l'infrastructure. Le budget fédéral a prévu des centaines de millions de dollars à cette fin, mais on n'a dépensé qu'une toute petite partie de ces montants au cours des trois années qui ont suivi le 11 septembre et la multitude d'annonces de dépenses prévues qui a immédiatement suivi.
Oui, le système est complexe, car il concerne deux gouvernements nationaux et de nombreuses administrations sous-nationales. Chaque élément a ses priorités, ses problèmes et ses contraintes financières. À cela s'ajoute les idées différentes du secteur privé, et chaque idée comporte ses avantages et ses inconvénients. Cela dit, soyons directs : l'infrastructure est un bien stratégique d'une importance primordiale tant pour le Canada que pour les États-Unis.
Je ne suis pas sûr que nous ayons une vision commune de ce qui est nécessaire de façon uniforme pour tout le pays. Nous sommes deux pays, mais avons-nous effectué une analyse stratégique des besoins? Savons-nous quelle est la priorité? Connaissons-nous la fréquence des investissements à faire pour préparer l'avenir? Voilà certainement une chose que le premier ministre Martin et le président Bush ont soulignée dans leur déclaration d'hier. Il y a beaucoup de coordination entre les organismes correspondants. L'établissement de liens entre les autorités canadiennes et les autorités américaines est une bonne chose. Ces liens s'améliorent, mais avons-nous vraiment un consensus stratégique commun?
Selon nos membres et selon nous, l'importance stratégique de la frontière pour le Canada et son économie signifie qu'il est nécessaire d'agir vite pour obtenir des infrastructures supplémentaires à la frontière. Nous devons nous sortir de l'inertie actuelle. Les préoccupations locales, les évaluations environnementales, les propositions concurrentes, voilà autant de difficultés à résoudre. Nous devons trouver le moyen d'accélérer le processus et de régler ce problème parce que ces actifs et cette infrastructure sont essentiels pour le Canada. Si nous ne faisons pas les choses bien et vite, c'est notre économie que nous mettrons vraiment en danger.
Dans l'espace économique intégré du Canada et des États-unis, des entreprises comme celle de M. Norman se trouvent aux prises avec une frontière internationale située au beau milieu de leur chaîne de montage. Voilà la réalité. Les entreprises ont donc besoin d'une frontière efficace et fluide, une frontière neutre du point de vue de la prise de décisions commerciales, sinon nous risquons de voir les investissements, les emplois, la prospérité et notre compétitivité passer à d'autres.
Une dernière réflexion. Les forces géopolitiques et géoéconomiques du monde entier sont en pleine mutation. Nous devons songer au fonctionnement sans heurts de l'économie nord-américaine face à l'économie asiatique ou européenne. Il ne s'agit pas simplement du Canada et des États-unis. Nous agissons comme une unité économique, et cela signifie que la ligne qui sépare les deux partenaires économiques — la frontière — doit fonctionner efficacement et en toute sécurité.
Je suis sûr que nous allons avoir un débat intéressant sur ces questions. J'attends cela avec intérêt et je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de discuter de cela avec vous.
M. Mark Norman, président, DaimlerChrysler, et président du Comité de l'infrastructure, Conseil du partenariat du secteur canadien de l'automobile : Permettez-moi de bâtir sur la pierre d'assise que M. Keyes a proposée pour le commerce en général. Je voudrais particulièrement aborder notre dépendance nationale de l'industrie de l'automobile et certains de ces fondements pour notre économie. Il est évident que notre industrie dépend de la frontière pour acquérir constamment un avantage concurrentiel mondial, non seulement au Canada, mais au sein des groupes industriels septentrionaux.
En bref, vous êtes nombreux à savoir que l'industrie de l'automobile produit un excédent commercial annuel de près de 12 milliards de dollars en faveur du Canada. Plus d'un demi-million de Canadiens travaillent directement pour le secteur de l'automobile. L'emploi indirect, autrement dit les emplois accessoirement créés par le secteur, représente un emploi sur sept. Comme l'a dit M. Keyes, il s'agit d'un secteur entièrement intégré, très concurrentiel et de nature mondiale.
Par conséquent, lorsque nous parlons d'échanges régionaux, je parle en fait d'une région qui part de Chicago, traverse l'Ohio, l'Ontario, le Québec et redescend au sud jusqu'au Mississipi. Lorsque nous parlons de compétitivité en matière d'emploi, nous parlons d'une région qui doit livrer concurrence à l'Asie du Sud-Est, à la Chine, à l'Amérique du Sud. Les interdépendances sont donc énormes.
Au Canada, nous nous concentrons sur notre avantage net à l'exportation, phénomène qui s'est amorcé il y a 40 ans. Nous produisons 65 p. 100 plus de voitures au Canada que les consommateurs canadiens en achètent, ce qui signifie que notre secteur doit constamment innover.
En pourcentage, deux pays seulement exportent plus que nous, la Corée et le Japon. Pour devancer les États-unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni, nous devons faire exactement ce dont Bob a parlé, c'est-à-dire empêcher que la frontière soit perçue comme un obstacle aux échanges. Si la distance qui sépare les fournisseurs des fabricants est de 10 kilomètres et si la frontière se trouve en plein milieu, l'écart de perception peut être beaucoup plus grand que 10 kilomètres.
Brièvement, pour ce qui est de DaimlerChrysler, nous avons investi plus de 2,5 milliards de dollars au cours des trois dernières années au Canada, plus que tout autre constructeur pendant la même période. En collaborant avec le Conseil du partenariat pour le secteur canadien de l'automobile, nous recherchons une plus grande visibilité, afin de contribuer à maintenir l'avantage que nous avons acquis en tant qu'industrie et de présenter les principales mesures que nous pouvons prendre pour garder cet élément présent à l'esprit pour la génération future. Une invitation à passer à l'action a été présentée à Ottawa au début du mois dernier, et la frontière est une des principales questions. Je dirige le sous-comité du commerce et des infrastructures, et en tant que résident de Windsor, je ne suis on ne peut mieux placer pour parler au nom des fournisseurs et des gros clients de l'industrie.
De sorte qu'avec notre investissement ici, nous faisons affaires avec 1 400 camionneurs qui chaque jour traversent le pont. Quelque 15 p. 100 de tout le matériel qui passe par le pont Ambassador sont des produits de DaimlerChrysler, sans compter le volume de produits acheminés par nos fournisseurs ou pour eux. Pensez aussi seulement aux autres économies tributaires, les entreprises d'outils et de matrices, les fabricants de moules industriels : 20 p. 100 de toutes les entreprises d'outils et de matrices et 50 p. 100 de tous les fabricants de moules industriels se trouvant à Windsor et dans le comté d'Essex. Encore-là, nous ne parlons pas ici que des gros équipementiers mais aussi des économies tributaires.
Je vais maintenant parler de notre dépendance à l'égard de la frontière et de certaines des mesures que nous savons pouvoir prendre pour donner des effets immédiats et à moyen terme, qui feront une différence. D'abord, il faudrait mieux coordonner les objectifs en matière de commerce et de sécurité sur le plan binational. Qu'entendons-nous par là? Nous parlons d'une meilleure coordination des critères d'admissibilité aux programmes, c'est-à-dire qui nous permettront de nous assurer que le système est harmonieux et simple. Étant donné le nombre de divers paliers d'administration concernés, les occasions ne manquent pas d'ajouter des quantités d'exigences qui renforcent ces barrières invisibles.
Nous avons connu beaucoup de succès avec le Programme d'autocotisation des douanes — PAD — et Partenaires en protection ainsi que le Programme EXPRES. Ce n'est qu'un début. S'il subsiste des files d'attente malgré ces mécanismes d'autorisation préalable, c'est donc qu'on ne les utilise pas à fond. Nous pouvons mieux équilibrer le commerce et la sécurité. Nous sommes certainement sensibles aux concessions qu'il faut faire pour assurer la sécurité et nous voulons nous assurer de ne surtout pas la compromettre, mais il est essentiel de favoriser l'accélération et l'efficacité des échanges. Ces programmes, qui repoussent loin de la frontière le traitement des formalités, éloignent le goulot d'étranglement dans les secteurs géographiques qui nous intéressent. Nous ne disposons tout simplement pas de suffisamment de capacité de débit terrestre et de franchissement pour faire face à ces questions d'ici, je le répète, la prochaine génération. Il est certain qu'ils réduisent les délais de traitement et contribuent à dissiper l'incertitude aux frontières.
Il n'y a aucune surprise quand un camion se présente à la frontière et que le camionneur dit : « Écoutez, tous les documents sont en ordre. » Nous savons ce que fait son entreprise; nous savons que ce qu'il transporte est autorisé. Nous devons aider les participants au Programme EXPRES à se déplacer sans retard. Le débit la circulation est important; ils ne peuvent pas se permettre d'aller grossir les rangs des transporteurs de marchandises en attente d'autorisation.
À cette fin, nous recommandons et continuons de réclamer la mise en place d'une autorité frontalière binationale, qui contribue à harmoniser la réglementation. Elle pourra rendre compte des faits en matière de débit, et nous pourrons rapidement savoir ce qu'il en est véritablement, gérer les situations de crise, en cas d'urgence, en cas d'accident sur l'une des artères ou encore s'il survient un conflit de travail comme celui que nous avons connu au début de l'année. Ainsi une autorité comme celle-là pourrait nous aider à intervenir rapidement et efficacement en tenant compte du nombre des diverses parties concernées.
Je ne saurais trop insister — et je sais que M. Keyes l'a aussi rappelé — sur la nécessité pour nous de continuer à réclamer un investissement dans les infrastructures. L'affectation dans un premier temps de 80 millions de dollars pour le travail préalable qui a été annoncée en mars — le fait que nous mettions encore beaucoup de temps à entamer ces étapes initiales nous empêche vraiment de travailler sur le projet d'infrastructure routière canadienne, pas simplement en ce qui concerne les franchissements, mais aussi l'accès à ces franchissements. Il s'agit là des 300 millions de dollars qui ont été accordés, mais nous n'avons que très lentement et patiemment progressé. Nous devons continuer d'exercer des pressions.
À cet égard, il nous faut continuer de réclamer la coordination des objectifs commerciaux et de sécurité, avec à l'appui, de façon incontournable, une administration frontalière binationale. En outre, il faut indéniablement réclamer de façon urgente un investissement permanent dans l'infrastructure qui aboutirait à un passage à moyen terme mais et, ce sont là nos priorités, des investissements fondamentaux à court terme.
Le sénateur Atkins : Monsieur Norman, vous avez parlé d'un processus harmonieux pour le franchissement de la frontière. Pour ce qui est du camionnage, pouvez-vous nous dire quels sont les empêchements qui vous inquiètent le plus et quel est l'échéancier auquel les chaînes de montage sont soumises?
M. Norman : L'élément qui a le plus d'incidence sur nous est la variabilité, le risque d'un petit retard. Par exemple, même un incident mineur comme la sortie du camion sur Huron Church Road peut avoir des conséquences massives, touchant d'abord nos fournisseurs, parce qu'ils doivent multiplier le nombre de camions s'ils veulent respecter les exigences du juste-à-temps pour les unités de production.
On nous demande souvent : « Combien cela vous coûte-t-il quand vous êtes à l'arrêt? » C'est que nous essayons de n'être jamais à l'arrêt. C'est une situation catastrophique qu'il nous faut éviter à tout prix, mais de devoir augmenter les stocks pour pallier cette situation à cause de l'instabilité constitue à vrai dire notre plus gros risque. Ainsi, des mesures permettant de surveiller la circulation des biens et de prendre rapidement une décision en ajoutant des douaniers ou en détournant du trafic routier vers d'autres points de passage, tout cela a une incidence à court terme, et j'espère que cela répond à votre question.
Le sénateur Atkins : Pouvez-vous nous dire quelles sont les conséquences, sur le plan des emplois, quand les choses ne fonctionnement pas rondement...
M. Norman : Quand les choses atteignent un moment de crise, c'est aussi grave que s'il s'agissait d'une grève. La fermeture d'une unité d'exploitation, le temps d'absorption des liquidités, l'arrêt de travail de la main-d'œuvre dans un mode de chaîne d'approvisionnement en temps réel, tout cela est très grave — mais encore une fois, je le répète, c'est moins grave que la panne de courant que nous avons connue il y a un an.
M. Keyes : Je vais vous donner une explication, qui vous démontrera que cela n'est pas une inquiétude propre au Canada et aux États-Unis. Nous sommes liés à la Chambre de commerce internationale. Nous parlons au personnel des ambassades. Le personnel responsable du commerce et de l'investissement dans les ambassades et les consulats installés ici au Canada surveillent la situation et renvoient des renseignements et des opinions à leurs secteurs industriels nationaux qui envisagent d'investir ici.
Récemment, j'ai reçu, de la part d'un attaché commercial de l'ambassade d'un des principaux pays européens, une information me signalant qu'une de leurs sociétés envisageait de faire un investissement majeur en Amérique du Nord et on me demandait où cette unité d'exploitation devrait s'installer et ce que je pensais de la situation à la frontière. Par là, je veux vous expliquer que c'est un enjeu stratégique.
Quand nous nous rendons à des réunions de la Chambre de commerce internationale à Paris, on nous demande des séances d'information sur ce qui se passe dans les relations canado-américaines et comment les choses se déroulent à la frontière. Il nous faut donc agir sur l'opinion des gens. C'est la réalité, et c'est un enjeu concurrentiel et stratégique pour le Canada.
Le sénateur Atkins : Pensez-vous que l'on considère avec l'urgence nécessaire le besoin de trouver des solutions de rechange pour le passage entre Detroit et Windsor?
M. Keyes : Certains jours, oui, et bien d'autres jours, non. Dans ce couloir, il est évident qu'il faut accroître la capacité et il existe divers processus en place, mais il semble que ce soit un dispositif qui n'a de cesse. À quel moment allons-nous passer aux décisions et voir des actions concrètes? C'est un couloir crucial. Toutefois, et c'est la réalité, dans le sud de la Colombie-Britannique et entre le Québec et l'État de New York, on fait face aux mêmes difficultés — même si elles ne sont pas aussi graves.
Comme je l'ai dit, pendant les années 90, on a constaté une certaine indifférence. On ne faisait pas tellement attention à cette situation, même si on constatait de la bonne volonté et des vœux pieux. L'ADRC, dans la forme qu'elle revêtait à l'époque, n'a pas bougé alors que le trafic augmentait. Il y avait une lacune. Voilà que nous en sommes à une ère nouvelle et d'excellentes mesures ont été prises, tout à l'honneur des ministres Manley et McLellan, qui ont mis le tout en branle. C'est tout à l'honneur également du sénateur Ridge, qui a joué véritablement un rôle dans ce processus. À notre avis, il est regrettable qu'il quitte son poste.
Je ne pense pas que nous soyons aussi conscients de cette situation autant que nous le devrions, car la question est de nature stratégique.
M. Norman : On comprend bien l'attention qu'exige la capacité de passage et l'urgence de la situation, mais parfois, cela se fait au détriment de l'attention et de l'urgence qu'exige l'installation d'une infrastructure à plus court terme. On parle beaucoup de solutions d'ici 5, 10 ou 15 ans, et on semble ignorer complètement les solutions que nous pourrions apporter maintenant et qui pourraient nous éviter d'avoir à prendre ces autres mesures qui ne sont sans doute pas très rentables.
Le sénateur Atkins : Le témoin précédent nous a parlé du chemin critique. Il semble que huit années soient une longue période, surtout pour votre secteur où, je suppose, la technologie et la demande progressent à un rythme appréciable. Vous devez donc ressentir des frustrations.
M. Norman : Le cycle de vie des produits raccourcit sans cesse, ce qui signifie qu'il faut que les unités de production fassent preuve de plus de souplesse. Pour ce qui est de l'approvisionnement, il y a de plus en plus de choix, ce qui exerce des pressions sur les fournisseurs. Huit années, c'est donc une éternité pour l'investissement étranger direct.
Le sénateur Atkins : C'est effectivement ce qui nous a semblé. Vous avez parlé d'une vision commune. Où se situe le conflit?
M. Keyes : Sénateur, je ne suis pas sûr qu'il existe un conflit. Je pense que tous deux, nous avons une opinion quant à ce que nous voulons obtenir, mais l'ordre des priorités est différent.
Le sénateur Atkins : Songez-vous à un troisième passage?
M. Keyes : Ici?
Le sénateur Atkins : Oui.
M. Keyes : Une plus grande capacité, cela signifie-t-il de nouveaux passages ou l'amélioration des passages existants? Les idées à ce sujet foisonnent. Il nous faut prendre des décisions et aller de l'avant. Il semble qu'il existe une certaine inertie — il y a eu des études, diverses opinions et des propositions concurrentielles.
M. Norman a évoqué la possibilité d'une sorte d'administration mixte quelle qu'elle soit. Il y a toutes sortes de possibilités auxquelles on peut songer.
Le sénateur Atkins : Qui devrait tenir les rênes?
M. Keyes : C'est une bonne question. Il y a six ordres de gouvernement en cause, sans compter les entreprises. Tout le monde veut prendre les choses en main, mais tous nous souhaitons que les choses aillent de l'avant.
Le sénateur Atkins : Nous avons rencontré le secrétaire Ridge, et il a exprimé sa frustration face à la nécessité que tous les ordres de gouvernement conjuguent leurs efforts. Il me semble que c'est la première chose à régler — qui doit prendre les choses en main et les faire aboutir?
M. Keyes : Il y a l'aspect juridique, le processus. Il y a des exigences sur le plan de l'environnement, des lois, des processus à respecter des deux côtés — mais nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre huit ans.
Le sénateur Atkins : Nous sommes de cet avis-là également.
M. Norman : Nous convenons des mesures à prendre, mais nous ne nous entendons pas sur la principale autorité. Le fédéral intervient deux fois par année ou une fois par trimestre, alors que la province ou l'état exige une reddition de comptes mensuelle, et ensuite il y a le niveau local... il s'agit ici de commerce et de sécurité. La question universelle est la suivante : le risque sur le plan de la sécurité est-il nul? Le flux commercial se fait-il sans entrave aucune?
C'est plus facile à dire qu'à faire. Toutefois, nous sommes tout à fait d'accord sur ce qu'il y a à faire, même si nous ne le sommes pas quand il s'agit de savoir qui exerce l'autorité.
Le sénateur Atkins : Êtes-vous favorable aux dispositions qui sont prises actuellement en attendant la décision quant à un troisième passage?
M. Norman : Il nous faut faire valoir le plan en neuf points qui concerne Windsor, c'est-à-dire la stratégie de faire bouger les choses dans le couloir Windsor-Essex, quelle que soit la solution retenue. L'infrastructure le long des parcours est importante, quelle que soit la solution, et cela ne pourra pas être décidé en quelques mois, à cause du temps qu'il faut pour l'évaluation environnementale. Il nous faut faire accélérer les choses, mais en même temps, il faut investir dans notre infrastructure nationale. Nous ne pouvons pas attendre qu'une solution soit trouvée pour songer aux appuis nécessaires.
Le sénateur Atkins : Une dernière question. Vous avez parlé de 1 400 véhicules. Est-ce pour votre seule société, quotidiennement?
M. Norman : Oui.
Le sénateur Munson : Depuis quelques jours, nous avons entendu beaucoup de mots à la mode... sans faille, simple. Vous avez réclamé qu'on fasse quelque chose dès maintenant, à court terme, sur le plan de l'infrastructure. Pouvez-vous être plus précis quant à ce que vous souhaitez qu'on construise et qu'on fasse pour améliorer l'efficacité?
M. Norman : Dans le document Il faut que ça bouge à Windsor-Essex figurent des éléments essentiels en ce qui concerne l'infrastructure. C'est expliqué. Rien n'a changé depuis un an. Nous n'essayons pas d'inventer de nouvelles solutions mais tout simplement de mettre en œuvre celles sur lesquelles de nombreux ordres de gouvernement sont en grande partie tombés d'accord.
Le sénateur Munson : Quelles sont-elles?
M. Norman : L'élargissement de la route E.C. Row en est une. La promenade Lauzon est une autre artère principale qui traverse la ville. Certains éléments de la première phase sont déjà approuvés, et il s'agit d'éléments simples et mineurs — par exemple l'élimination des passages à niveau sur Walker Road et un passage supérieur dans le secteur de Huron Church. Je le répète, les choses avancent de ce côté-là mais lentement, et ce sont des éléments précurseurs à la deuxième phase. Ce sont des questions de base qui touchent les comtés, les municipalités et les provinces pour l'assainissement des voies de circulation en ville. L'objectif est de permettre aux camions de traverser la ville, peu importe leur destination, pour atteindre les passages actuels ou de nouveaux passages. Ce n'est pas difficile. Il s'agit d'un entretien de base. Il s'agit de désengorger nos artères.
Le sénateur Munson : Savez-vous quel est l'élément qui bloque? C'est toujours une question d'argent, n'est-ce pas?
M. Norman : Croyez-le ou non, ce n'est pas véritablement un facteur — 300 millions de dollars ont été réservés à cette fin et 80 millions de dollars sont prévus pour la première phase. Dans le cas de la première phase — et je pense ici à des petites choses toutes simples comme un million de dollars pour les passages supérieurs — les choses sont ralenties à cause de l'évaluation environnementale. Nous ne voulons pas sous-estimer l'importance de respecter les procédures établies, mais nous ne pouvons pas attendre 8 ou 15 ans pour que l'on trouve une solution à d'autres égards.
Le sénateur Munson : Je ne sais pas si ma question est opportune. Vous avez parlé de 1 400 camions, de 15 p. 100 du trafic. L'intervention de douaniers et d'autres préposés des deux côtés de la frontière rendrait-elle votre travail plus facile...
M. Norman : Cela a certainement aidé. Cette année, quatre nouveaux postes ont été ouverts du côté américain. Ils ont conscience du rôle de l'intervention américaine pour la sécurité.
L'administration frontalière doit voir à ce que la main-d'œuvre soit en place en même temps qu'une infrastructure concrète ou technologique. À mon avis, tout cela fait partie d'une solution mixte.
Le sénateur Banks : Je pense que M. Keyes a entendu la question que j'ai posée au témoin précédent. J'aimerais qu'il y réponde brièvement. La question est tout à fait théorique, mais elle découle d'une suggestion qu'on a sans doute faite par ailleurs mais qui a été reprise récemment par un de nos collègues dans un discours à Washington. En effet, le sénateur Grafstein, soucieux de résoudre ce problème tout en accélérant la suppression des obstacles aux mesures que vous souhaitez, plutôt que de les contourner, propose la création dans un bref délai d'une nouvelle commission internationale de gens éminents, puissants et influents qui s'emploieraient non pas à mettre fin aux processus ou à contourner les obstacles, mais à accélérer les choses et à aboutir à des résultats concrets.
Cela vous semble-t-il raisonnable pour aboutir à une solution?
M. Norman : Absolument, et pour reprendre ce qui a été dit, il y aurait les mesures à deux volets qui viendraient à l'appui. Une commission binationale qui sous-tendrait une administration responsable de la circulation et une commission de planification chargée d'une stratégie et d'investissements majeurs semblent tout à fait logiques. Je pense qu'il y a moyen de concilier ces divers ordres de gouvernement, qui ont tous leurs grands intérêts, mais de créer un organe comme celui-là pour simplifier les choses. Cela me semble brillant.
M. Keyes : La Sécurité transfrontalière Canada-États-Unis, STCÉU. Je pense qu'il nous faut songer à la façon dont nous pouvons conjointement gérer cette frontière. Il y a des modèles comme celui de la Commission mixte internationale, qui joue un rôle direct et qui est très utile quand il s'agit de résoudre les difficultés. Prenez par exemple la Commission nord-américaine de coopération environnementale, dans le cadre de l'ALENA, qui regroupe des experts des questions environnementales de chacun des pays signataires. Ils font de la recherche, puis formulent des recommandations à divers gouvernements. Cette commission n'a pas de rôle exécutoire, mais des mesures conjointes sont envisageables.
N'oubliez pas que d'agence à agence, il y a déjà une énorme interaction entre l'ASFC, l'Agence des services frontaliers du Canada et les responsables de la sécurité du territoire des États-Unis, le DHS. Comment tout cela est-il intégré, qui prend les décisions opportunes et comment? Ce sont là les questions cruciales.
Le sénateur Banks : Mais y a-t-il intégration?
M. Keyes : Sous la houlette de la ministre McLellan, bien des questions en matière de sécurité sont intégrées.
Le sénateur Banks : Excusez-moi, mais c'est du ressort du ministre des Transports.
M. Keyes : En effet le ministre des Transports intervient, mais Industrie Canada aussi. Si je ne m'abuse, Infrastructure Canada relève de ce ministère.
Comment tout cela est-il intégré? Eh bien, selon notre régime, cela se passe au conseil des ministres. Toutefois, ce mécanisme est peut-être trop éloigné quand il s'agit de prendre des décisions quotidiennes et de régler des problèmes concrets rapidement. Là, les choses sont résolues au niveau politique — ce qui est tout à fait approprié pour les décisions d'ordre général mais peut-être pas pour les détails.
Le sénateur Forrestall : Monsieur Norman, dans quel délai souhaiteriez-vous que cette administration binationale soit créée? Dans quel délai pensez-vous que nous pouvons la mettre en place?
M. Norman : Dans le secteur privé, les choses sont toujours urgentes. Il y a urgence également du côté de nos résultats. Nous ne demandons pas l'impossible à qui que ce soit, mais le plus tôt sera le mieux.
Le sénateur Forrestall : Pensez-vous que cela pourrait se faire? Avez-vous dix noms à nous proposer?
M. Norman : Pour l'instant, non, mais il ne me faudrait pas beaucoup de temps.
Le sénateur Forrestall : C'est là où je veux en venir. Pouvez-vous nous proposer une liste de dix noms dans les 72 heures?
M. Norman : Oui. Concrètement, il s'agirait d'un mois ou deux au maximum.
Le président : La question est la suivante : combien d'années faudra-t-il au Congrès et au Parlement pour se mettre d'accord sur la façon appropriée de procéder?
M. Norman : Je comprends où vous voulez en venir. Toutefois, s'il y a deux éléments en cause — d'une part le commerce et la circulation et d'autre part la planification —, manifestement la planification est beaucoup plus difficile, exige un processus beaucoup plus laborieux. Au cours des derniers jours, nous avons constaté des signes positifs toutefois, une reconnaissance de la part des Américains des besoins à combler pour faciliter le passage, une sensibilisation accrue à l'interdépendance des divers secteurs dans notre économie. Il ne s'agit pas ici d'un enjeu commercial uniquement canadien. Par conséquent, si nous commençons modestement, avec une administration, nous pourrions acquérir de la crédibilité et accroître la réceptivité aux obstacles importants au passage et aux approbations.
Le sénateur Forrestall : Le pouvoir d'une telle administration devrait se situer tout en haut de la pyramide, au niveau du gouvernement fédéral, des autorités fédérales, du conseil des ministres, n'est-ce pas?
M. Norman : C'est essentiel.
Le sénateur Banks : Si nous voulons que les choses se fassent, il faudrait que ce soit au plus haut niveau. Le président et le premier ministre doivent décider que l'urgence justifie qu'il en soit ainsi et faire le nécessaire. Je réagis à vos remarques, monsieur Norman, sur les raisons qui expliquent les lenteurs.
Je passe à quelque chose d'un peu différent. Je me rapporte au document intitulé « Un appel à l'action : Cadre pour une stratégie automobile canadienne ». Monsieur Norman, je suppose que vous êtes parfaitement au courant du contenu de ce document, n'est-ce pas?
M. Norman : En effet.
Le sénateur Banks : Je me reporte à la page 9 de ce document. On y décrit les faiblesses de notre situation actuelle à la frontière. Nous avons une inquiétude, bien entendu. Si les choses deviennent à tel point impraticables, la connexion entre les éléments de la chaîne de production étant coupée à la frontière, les gens vont se rabattre ailleurs pour construire là où il n'y a pas de difficulté.
Voici ce que vous dites sur les mesures d'incitation à l'investissement : « Par rapport à celles des pays concurrents, les mesures d'incitation à l'investissement du Canada sont perçues comme incohérentes et non harmonisées entre les divers paliers de gouvernement (et exclusivement au niveau gouvernemental). Dans d'autres pays concurrents, le processus est bien coordonné, il implique l'industrie, le mouvement syndical et le gouvernement. »
Pouvez-vous développer cette idée, car vous semblez dire qu'au Canada, le problème provient du gouvernement, un point c'est tout, et qu'ailleurs, la solution provient d'entreprises trilatérales.
M. Norman : Dans d'autres pays, on a adopté deux solutions diamétralement opposées pour bénéficier de l'investissement dans l'automobile. Par exemple, dans certains États du sud, on offre souvent une solution quasi clés en mains aux investisseurs potentiels. Qu'est-ce que cela veut dire? La municipalité aide au niveau du terrain, avec des dégrèvements fiscaux et d'autres incitatifs. La municipalité dit à un investisseur potentiel : « Voilà. Nous avons l'infrastructure, le terrain, les appuis. Allez-y. Installez votre usine ici. »
Dans d'autres pays, le gouvernement fédéral offre de l'aide. Depuis des années, c'est ce qui se fait au Japon, et en Chine également. En Malaisie et dans d'autres pays en développement, il existe un investissement stratégique fédéral pour la formation de la main-d'œuvre. Ils courtisent les secteurs industriels qu'ils souhaitent. C'est ce que nous voudrions voir prospérer.
Par le passé, et les choses se sont améliorées considérablement au cours de la dernière année, on constatait une certaine confusion à la frontière pour l'investissement dans l'automobile, par exemple. Cela venait-il du fédéral? Du provincial? Du niveau local? Nous avons beaucoup progressé, la province de l'Ontario intervenant et affirmant : « Cela est important pour nous du point de vue des emplois. » La province a débloqué des fonds de contrepartie à cette fin. Ottawa se tourne vers l'avenir en songeant à investir dans la R et D.
Comment investissons-nous dans le développement des ressources humaines, pour aborder votre deuxième point, sans que ce ne soit que le gouvernement qui intervienne mais également le syndicat et d'autres sources? Les divers ministères responsables de ces dossiers sont intervenus.
Depuis 12 mois, je dirais que nous avons fait des progrès remarquables au Canada, en matière de collaboration. Toutefois, nous n'avons pas fait grand-chose à la manière des pays en développement que je vous ai cités en exemple. Nous espérons que cela va changer.
Le sénateur Banks : Vous voulez dire par comparaison avec d'autres pays, n'est-ce pas?
M. Norman : Oui.
Le sénateur Banks : Une dernière question et j'en aurai d'autres pour le second tour, si nous en avons le temps, monsieur le président.
Vous avez parlé d'une durée de vie de plus en plus courte pour les produits. Pourquoi en est-il ainsi? Vous êtes un fabricant. La dernière chose que vous voudriez que les gens croient est que vos produits ont une durée de vie de plus en plus courte.
M. Norman : Excusez-moi, je parlais du cycle de vie et non pas de la durée de vie. Je me reportais ici à la vitesse avec laquelle un produit est complètement rénové et refait. Par le passé, un produit pouvait demeurer pratiquement inchangé pendant sept ou huit ans. Désormais, le renouvellement des stocks est plus court, et cela est attribuable à la vitesse à laquelle un produit atteint le marché, à une plus grande efficacité, à une fonction de R et D plus concurrentielle, à plus de compétitivité.
Cela exige de nous — et nous procure un avantage net à l'exportation — de courir plus vite, d'anticiper plusieurs cycles futurs, de veiller à ce que nous offrions toujours les produits les plus frais et les plus compétitifs.
M. Keyes : Monsieur le président, permettez-moi d'ajouter quelque chose en réponse à la question du sénateur Banks et à celle du sénateur Forrestall. C'est à propos des limites de temps, des acteurs potentiels et de la façon de procéder. Déjà, nous pouvons compter sur des groupes naissants. Rappelez-vous ce qui s'est passé immédiatement après le 11 septembre. Le milieu des affaires s'est uni. Nous avons formé une coalition pour que les frontières soient sûres et efficaces pour les échanges commerciaux. Nous avons produit un rapport en six semaines. Nous avons travaillé avec nos collègues du gouvernement et produit un plan en 30 points, désormais 32. Cela témoigne d'une excellente coopération très étroite.
Nous avons travaillé avec nos collègues aux États-Unis, formé des coalitions, auxquelles nous participions avec la chambre de commerce américaine, par exemple. Il n'y a aucune raison pour que le même genre de processus ne puisse pas intervenir par rapport à l'infrastructure, afin qu'une mesure propre à l'infrastructure soit présentée aux deux gouvernements.
Rob Wright, du côté canadien, préside un mécanisme consultatif et c'est Rob Bonner qui est son homologue du côté américain. À quelques reprises, il y a eu des pourparlers concernant des initiatives particulières faisant intervenir les entreprises et le gouvernement. Voilà un autre groupe qui pourrait constituer une ressource. Je pense que le fondement existe déjà et que nous pourrions agir plus vite que nous ne le pensons, assurément pour présenter des recommandations fermes et expéditives.
Quant aux pouvoirs sur le plan juridique, c'est autre chose.
M. Norman : Pour ce qui est de la réaction face à la crise et de la planification des mesures d'urgence, choses centrales et très urgentes, dans lesquelles je pense que tout le monde est prêt à investir ses pouvoirs respectifs, je dirais que ce serait pour le plus grand profit de tous de pouvoir compter sur une plus grande prise de conscience du besoin et l'aboutissement à de meilleurs résultats en matière de planification.
Le sénateur Meighen : En politique, la perception est la réalité et, monsieur Keyes, vous avez évoqué la perception dont nous avons discuté avec les témoins précédents à propos des retards au passage des ponts.
On nous a dit qu'en général, le retard était de dix minutes en semaine et de vingt minutes, en moyenne, en fin de semaine et les jours fériés. Monsieur Norman, est-ce inacceptable du point de vue de votre secteur et de votre méthode d'opération juste à temps?
M. Norman : Dans un contexte où l'on s'inquiète de l'instabilité, les moyennes ne reflètent pas la réalité. Il faut tenir compte des extrêmes. S'il était parfaitement prévisible que l'attente se limite à 10 à 20 minutes et que nous travaillions à réduire cela à 8 à 12 minutes, nous aurions en main les éléments nécessaires pour progresser, mais l'instabilité va au-delà de cela. Voilà pourquoi il nous faut divers filets de sécurité.
Quand un ralentissement informatique se produit et se conjugue à une grève et à un accident de voiture pendant la même semaine, il faut des heures pour traverser la frontière et cela fait la une des journaux le lendemain. Est-ce la réalité ce jour-là? Tout à fait. Est-ce que cela alimente une perception qui dure plus longtemps? Absolument.
M. Keyes : Si vous comparez cela avec les cycles et les amplitudes en physique, vous pouvez très bien trouver une moyenne. Mais ce qui est inquiétant, ce sont les variations, les hauts et les bas, l'incertitude. Je consulte régulièrement les sites Internet du DHS et de l'ASFC et j'y trouve des tableaux sur les passages à la frontière et les retards. Il y a deux choses qui me frappent. Tout d'abord, pour beaucoup de passages, tout fonctionne très bien. Toutefois, il y a des hauts et des bas, et régulièrement, je constate des retards d'une heure, deux heures, trois heures à certains points cruciaux. Quand je consulte le site Internet du DHS, les temps de retard sont tout à fait différents. Nous ne disposons donc pas d'une méthode de rapport commune entre les deux administrations. Ainsi, quelqu'un qui consulte ces sites Internet pour voir quels sont les retards obtient souvent deux estimations différentes.
Le président : Est-ce qu'on ne mesure pas le trafic qui va dans des directions opposées?
M. Keyes : Non, les deux font rapport des passages commerciaux et non commerciaux dans les deux sens, à tous les points de passage. Il y a des jours où tout va rondement, même si le volume atteint ses pointes habituelles. Toutefois, d'autres jours, il y a de long retards. Pour les camionneurs et les fabricants, ces statistiques sont peu réconfortantes.
Un des membres de notre association est propriétaire d'une société de camionnage qui livre aux quatre coins de l'Amérique du Nord. Ses camionneurs exigent maintenant d'être rémunérés pour le temps d'attente. Tout cela a une incidence sur la compétitivité.
Le sénateur Meighen : Je vais me faire un peu l'avocat du diable. Les accidents se produisent. Les gens sont retardés. Des gens de Toronto ratent une pièce à Stratford parce qu'il y a un bouchon sur la 401. C'est agaçant. Si cela se produisait constamment, ce serait plus qu'agaçant.
Est-ce que je peux faire une distinction entre l'industrie de M. Norman, qu'il exerce dans cette double collectivité, si l'on veut, et l'importation au Canada de fruits provenant du Mexique? Dans ce cas, votre industrie bénéficie-t-elle de concessions parce qu'il s'agit d'une industrie locale? Est-ce qu'elle devrait en bénéficier? Pouvez-vous envisager une voie réservée au transport routier? Est-ce qu'il est plus essentiel pour vous d'éviter ces retards de trois ou quatre heures que pour un chauffeur de camion qui arrive du Mexique à Toronto avec un chargement de bananes?
M. Norman : Vous dites que des accidents se produisent; votre question porte sur les embouteillages et les accidents, n'est-ce pas? Il y a quelques mois, un accident de camion sur la 401 a entraîné la fermeture de l'autoroute pendant plusieurs heures. Que peut-on faire contre les embouteillages? N'oubliez pas qu'au plan logistique, nos activités sont interdépendantes à l'échelle du continent. Il y a effectivement un point de passage obligé ici, ainsi que des mécanismes de prédédouanement avantageux.
Dans une certaine mesure, nous avons déjà les éléments de base de la formule que vous proposez. Cependant, il s'agit en partie d'infrastructures géographiques, et il n'y a pas suffisamment de voies pour acheminer la circulation. En l'occurrence, il faudrait prendre d'autres mesures, à savoir, comme je l'ai dit, déplacer la frontière en mettant en place un service de prédédouanement ou constituer une autorité frontalière qui pourrait orienter la circulation et éviter les goulots d'étranglement. Vous êtes sur la bonne voie, mais la question n'est pas simple.
Le sénateur Meighen : C'est parfait.
Est-ce que l'un de vous ou les deux estimez que le sentiment d'urgence s'estompe un peu? À mesure que le temps nous éloigne du 11 septembre 2001 et qu'on parle de l'échéance de 2013, est-ce que certains ne sont pas en train de perdre leur motivation et, en conséquence, de démotiver aussi les gouvernements?
M. Keyes : Si.
M. Norman : Oui, un peu. Je crois qu'il y a beaucoup d'agitation à Ottawa et à Queens Park, mais les efforts se sont sans doute ralentis en ce qui concerne certaines solutions locales.
Le sénateur Meighen : Nous verrons ce que nous pouvons faire pour vous.
M. Keyes : Sénateur, ma réponse était un peu lapidaire, mais je crois que la situation a changé. L'attention s'est portée sur certains goulots d'étranglement, mais nous avons aussi affaire à de nouvelles initiatives américaines qui n'étaient pas envisagées lorsque nous avons élaboré le plan en 30 points. Nous avons eu la visite du président américain, qui a eu des répercussions sur la circulation à la frontière. Nous verrons ce qui en ressortira. Nous avons eu le règlement sur le bioterrorisme, auquel certains ont eu beaucoup de mal à s'adapter.
Il y a eu toute une série de nouvelles exigences de données auxquelles l'industrie et les entreprises ont dû se préparer, il y a eu de nouvelles normes de sécurité, des exigences en matière de documents, et je pense donc que certaines autorités ont porté leur attention ailleurs; on regarde peut-être moins les infrastructures que les points de décision.
Le sénateur Meighen : Encore une question. Elle ne vous concerne peut-être pas du tout, monsieur Norman, mais que se passe-t-il du côté des chemins de fer? Les problèmes sont-ils moins graves pour les trains qui franchissent la frontière?
M. Keyes : La situation des chemins de fer a été plus facile à gérer, et les gens qui s'en occupent pourront certainement vous dire que même juste après le 11 septembre, un bonne partie des expéditions par train se sont poursuivies à l'abri des perturbations qu'on a observées à la frontière dans le domaine du camionnage. Les trains transportent des marchandises en vrac moins exigeantes en matière de délai, ce sont toutes sortes de marchandises, mais il existe des dispositifs d'inspection, et des équipages peuvent faire franchir la frontière à un train sans qu'il ait à s'arrêter. C'est donc un problème d'une ampleur différente.
La situation de nos ports sur la côte ouest et à Halifax est tout aussi critique. Ils essaient de se positionner de façon à recevoir les marchandises et à autoriser les mouvements, pour les charger ensuite sur un train et leur faire franchir la frontière. Autrement dit, il s'agit d'utiliser nos ports pour accéder au territoire américain. Il est économiquement avantageux pour le Canada d'avoir un réseau ferroviaire qui fonctionne bien et respecte les horaires.
Il y a des représentants des autorités douanières américaines qui travaillent dans nos ports à dédouaner les marchandises contenues dans ces trains, afin qu'ils n'aient pas à arrêter à la frontière.
Le sénateur Meighen : Oui, nous sommes au courant. Vous n'avez pas recours aux expéditions ferroviaires du tout, n'est-ce pas, monsieur Norman?
M. Norman : Oui, nous le faisons. Néanmoins, pour les expéditions juste à temps aux fournisseurs, nous dépendons un peu plus des camions.
Nous parlons de toute une chaîne d'approvisionnement qui dépend beaucoup du transport multimodal. Une bonne partie de notre planification repose sur la souplesse et sur la capacité intermodale.
Le sénateur Meighen : J'aurai une dernière question qui peut sembler contradictoire : avec la méthode juste à temps, existe-t-il une certaine prévisibilité?
M. Norman : Il y en a beaucoup.
Le sénateur Meighen : Beaucoup de quoi?
M. Norman : Il y a une grande prévisibilité.
Le sénateur Meighen : Ainsi vous pourriez décider, dans des circonstances particulières, que juste à temps veut dire juste à temps pour jeudi prochain, soit au moment où je devrai composer avec un gros volume d'expédition?
M. Norman : Absolument, et que je devrai expédier davantage de marchandises, en raison de la variabilité des délais de dédouanement.
Le sénateur Meighen : Ainsi vous pourriez prévenir les autorités douanières que vous enverrez beaucoup de marchandises qui traverseront le pont jeudi soir prochain?
M. Norman : Non, pas exactement. Nos mouvements de marchandises sont un petit peu plus uniformes. Je croyais que vous nous demandiez si nous modifions notre capacité en fonction des circonstances avec lesquelles nous devons composer, et alors la réponse est oui, nos mouvements de marchandises sont assez prévisibles et assez stables. Il n'y a pas beaucoup de creux et de crêtes.
Le président : En ce qui concerne la méthode juste à temps, il me semble que tout dépend de la destination des marchandises. Vous les expédiez à vos fournisseurs; vous ne voulez pas garder des marchandises en inventaire là où vous procédez à l'assemblage. Dans certains cas, certains arguments d'affaires doivent militer en faveur d'une augmentation de votre inventaire si l'on considère le coût des arrêts d'exploitation ou de la fermeture d'usines.
M. Norman : Que l'on procède d'une façon ou de l'autre, il y a augmentation des coûts, et c'est précisément ce qui nous préoccupe.
Le président : Dans les deux cas, les coûts augmentent, mais j'imagine qu'à long terme, l'augmentation est moindre si l'on privilégie une option plutôt que l'autre.
M. Norman : Vous savez, lorsqu'on travaille d'arrache-pied pour faire baisser de cinq cents le prix d'une pièce d'auto en plastique, le coût des stocks, qu'il s'agisse des nôtres ou de ceux des fournisseurs... Il ne s'agit pas de leur faire payer ces coûts. Ce sont des coûts découlant du système et que nous assumons.
Le président : Je vous comprends, mais si vous faites de la planification qui s'étend jusqu'en 2013, vous faites vos prévisions en conséquence.
M. Norman : Nous le faisons, mais, je le répète, c'est là où le groupe court un risque, si les stocks nécessaires ici sont plus grands qu'ailleurs dans le monde.
Le président : Pourquoi ai-je l'impression qu'on n'a pas bien fait comprendre aux divers ordres de gouvernement quelles étaient les conséquences du point de vue des coûts et du point de vue des emplois?
M. Norman : Je crois que notre document invitant les autorités à passer à l'action, document dont vous avez d'ailleurs parlé, était une bonne initiative pour faire avancer les choses à l'échelle locale. Les États les plus commerçants sont de plus en plus sensibilisés à cette question et sont de plus en plus interdépendants, du moins dans notre secteur. Il ne s'agit pas d'un enjeu qui préoccupe nécessairement le gouvernement fédéral américain en tout temps, mais il est clair qu'il s'agit d'un enjeu commercial international. Nous déployons donc des efforts en ce sens, et de façon générale, les ordres de gouvernement nous posent tous la même question : quelles autres instances sont au courant de la situation? Nous faisons beaucoup de travail public et privé pour promouvoir nos intérêts.
Le président : Vous avez tous les deux décrit une situation qui semble, aux yeux de notre comité, avoir des conséquences graves. Vous parlez d'un processus qui a perdu de sa vigueur, qui n'est plus urgent, qui n'apparaît pas susceptible de fournir des résultats dans un délai qui soit raisonnable pour nous tous.
Que faut-il donc faire? Que doit-il se produire, selon vous, pour que les gouvernements prennent des mesures suffisantes, pour que quelqu'un prenne les commandes et que certaines de ces décisions soient prises plus rapidement?
M. Norman : Il faut poursuivre nos activités de sensibilisation, et je crois que vous devez agir de façon urgente. Nous avons présenté les mêmes arguments au premier ministre. Il a assuré aux représentants de notre groupe qu'il effectuait avec empressement des démarches auprès du président Bush ainsi que de M. Ridge et de son successeur afin de faire avancer le dossier. Il a également parlé de l'ardeur de la ministre McLellan à régler cette question. Encore une fois, les plus hautes instances dirigeantes sont conscientes de l'urgence de cette situation et veulent s'assurer que nous nous fassions bien comprendre par toutes les autorités concernées. En outre, je communique régulièrement avec le conseil municipal et le maire de Windsor.
Si les choses n'avancent pas, ce n'est pas faute de discussion et de dialogue urgent. Personne dans cette salle n'a baissé les bras. Nous essayons d'apporter des solutions précises et dynamiques qui ne sont pas faciles. La plupart de ces solutions n'ont jamais été mises en place auparavant, mais elles sont nécessaires et n'entraînent pas des coûts exorbitants non plus, du moins je ne pense pas. Nous essayons de régler cette question tout en produisant un bon rendement pour notre secteur et pour le Canada.
Le président : Cela étant dit, je ne crois pas que nous ayons attendu quoi que ce soit ce matin qui fasse passer l'échéance de 2013 à 2012.
M. Norman : Non, mais si nous apportons de grandes améliorations d'ici 2006, alors notre production sera aussi élevée que possible. Peut-être que les échéances de 2012 ou 2013 ne revêtent pas autant d'importance si nous travaillons à augmenter notre capacité de production dans une mesure adéquate en étant deux fois plus efficaces grâce aux moyens dont nous disposons.
Le président : D'après votre témoignage et celui du groupe qui vous a précédé, j'ai l'impression que l'un des principaux problèmes auxquels nous sommes confrontés tient au fait que les postes de contrôle frontalier n'ont pas la capacité de composer avec les augmentations subites de la circulation.
M. Keyes : Je crois qu'on manque de personnel des deux côtés de la frontière. J'entends la même observation dans tout le pays : seule la moitié des postes de contrôle étaient ouverts.
M. Norman : Peut-être qu'une instance conjointe serait utile. Celle-ci pourrait s'assurer que les ressources sont disponibles pour faire face aux problèmes de capacité variable.
Le président : Ne serait-il pas possible de démontrer que les coûts des mesures nécessaires pour composer avec une augmentation subite de la circulation sont moins élevés que la perte de recettes si ces véhicules n'arrivent pas à traverser la frontière?
Le sénateur Atkins : Il y a également les pertes d'emploi.
M. Norman : Je crois que c'est possible, mais cela ne représente qu'une fraction du coût lié à la perception, dont la valeur exacte est un peu plus difficile à établir.
M. Keyes : Quelques observations me viennent à l'esprit, monsieur le président. En ce qui concerne les chiffres, je ne sais pas si vous avez vu le document publié par la Chambre de commerce de l'Ontario sur le coût des retards à la frontière. Si vous ne l'avez pas lu, je vous recommande vivement de le faire.
Le président : Ce document se trouve dans notre cahier d'information.
M. Keyes : Tant mieux, car il contient des chiffres intéressants.
Autre observation : je crois que nous assistons à une convergence des programmes politiques en matière de commerce et de sécurité. Le Canada et des hauts fonctionnaires et ministres canadiens proposent de nombreuses idées aux Américains, et c'est tout en leur honneur. Je crois que ces idées n'étaient jamais venues à l'esprit des Américains auparavant, et nos représentants canadiens en font la promotion sans relâche.
D'ailleurs la prochaine initiative à l'ordre du jour est celle du prédédouanement à la frontière terrestre. On évoque la possibilité d'un projet pilote à Niagara.
Le président : Nous en avons parlé au commissaire Bonner en mars dernier, et il nous a regardés avec des points d'interrogation dans les yeux.
M. Keyes : Je vais assister à une discussion avec les autorités douanières américaines et les nôtres la semaine prochaine, et il sera question de plans et d'idées fermes en vue de lancer cette initiative. D'ailleurs le président et le premier ministre ont dit lors de leur rencontre d'hier qu'il fallait que ce projet se concrétise.
Le président : Selon vous, s'agit-il de la bonne solution?
M. Keyes : C'est une solution que nous devons envisager. Nous devons nous assurer qu'elle fonctionne et qu'elle soit tout indiquée, et que nous ne compliquions pas le système. Mais si nous pouvons faire tout ce que nous avons à faire au même endroit, dans le respect des exigences en matière de sécurité et des besoins économiques, et que les camions peuvent circuler...
Le président : Devant le dernier groupe de témoins, le sénateur Meighen a discuté de l'exemple des aéroports. En effet, nous comptons sept aéroports dotés de processus de prédédouanement. Il est donc difficile de voir quels peuvent être les problèmes de principe. Il peut exister des difficultés en ce qui concerne le zonage ou les priorités de passage mais on peut présumer que ces difficultés peuvent être aplanies.
M. Keyes : Lorsque j'ai discuté avec les autorités de l'idée d'appliquer le modèle des aéroports à la frontière terrestre, j'ai constaté qu'on pourrait réaliser beaucoup de progrès sans apporter de changements réglementaires ou législatifs d'envergure. Il y a un cadre qui peut être appliqué et si l'on dispose de suffisamment d'espace pour créer des installations permettant de regrouper les deux services, et si l'on obtient des résultats satisfaisants en procédant d'un seul coup, alors cette initiative devrait être mise en place.
Je voudrais revenir à votre question au sujet de la capacité; je voudrais à nouveau mettre en relief la nature multimodale et multidimensionnelle de la frontière. Je ne suis pas passé par Montréal depuis l'ouverture du nouveau poste frontière, mais je suis arrivé à Montréal de Washington à quelques reprises à la fin de l'automne dernier. Sept des douze postes de contrôle étaient ouverts. Il y avait de 800 à 900 voyageurs qui attendaient de passer aux douanes. Lors de l'un de ces voyages, j'étais avec un passager qui arrivait d'Angleterre pour discuter d'un investissement, et il a qualifié notre aéroport d'amateur à cause des délais. Nous avons attendu plus d'une heure avant d'arriver au poste de contrôle. J'ai raté ma correspondance pour Ottawa et j'ai dû prendre l'autobus. Évidemment, il s'agit d'un poste frontière dans un aéroport. Néanmoins, nous devons réfléchir au système en entier, à la frontière sous toutes ses formes, dans un système intégré.
Si le mandat de votre comité est assez vaste pour inclure toute la frontière, je vous encourage à mener une étude très élargie de cette question.
Le président : Je comprends ce que vous voulez dire. J'aimerais beaucoup retrouver ce voyageur et lui parler de certaines de mes expériences à Heathrow, mais je n'irai pas plus loin.
Le sénateur Cordy : Monsieur Norman, au sujet des déplacements transfrontaliers, vous avez dit qu'il fallait de meilleurs critères d'entrée. Les camionneurs en particulier comprennent-ils bien ces critères? Je me demande simplement s'il existe des normes et, si c'est le cas, sont-elles uniformes, ou les personnes concernées constatent-elles qu'elles changent d'une semaine ou d'un mois à l'autre.
M. Norman : Les normes qui existent sont uniformes, mais certaines administrations sont concurrentielles, surtout lorsqu'il s'agit de trouver de nouvelles idées. Par exemple, il y a une pénurie de camionneurs, et ceux-ci peuvent parfois attendre de trois à six mois avant d'être approuvés. Si on pouvait simplifier les mécanismes de préapprobation et assujettir les camionneurs à un processus commun, alors des ressources seront disponibles pour pallier le manque de personnel aux postes frontières et s'occuper d'autres problèmes que nous essayons de résoudre.
Ainsi, je ne veux pas laisser entendre que la situation est complètement ambiguë, mais les choses ne sont pas aussi rapides, claires, simples ni faciles que les stratégies ne le portent à croire.
M. Keyes : La demande et le processus d'adhésion à ces programmes ne sont pas aussi conviviaux que possible. Certaines personnes ont dû faire beaucoup d'effort pour être à temps. Lorsque le programme NEXUS a été lancé, le bureau était ouvert de 8 à 13 h. Un énorme retard s'est accumulé et il a fallu beaucoup de temps pour le rattraper. La convivialité du programme pose donc certainement problème.
Au Canada, la participation au programme EXPRES est loin d'atteindre les niveaux espérés, parce que ce programme repose sur l'autocotisation des douanes. L'AD est un critère auquel les entreprises doivent satisfaire pour adhérer au programme EXPRES, et il constitue un lourd fardeau pour bon nombre d'entre elles. C'est pourquoi très peu d'entreprises se sont inscrites au programme EXPRES.
Le président : Pourriez-vous nous donner des détails à ce sujet s'il vous plaît?
M. Keyes : En vertu du programme d'autocotisation des douanes, le PAD, et en vertu du nouveau RSAP, soit le Régime des sanctions administratives pécuniaires, ceux qui ne respectent pas les exigences du processus douanier se voient imposer des sanctions pécuniaires de plus en plus élevées. Il s'agit en effet d'une amende de 100 $ à la première contravention, de 1 000 $ la fois suivante, de 10 000 $ à la contravention suivante, et ainsi de suite.
Au Canada, l'adhésion au programme EXPRES repose sur l'admissibilité au programme d'autocotisation des douanes, ce qui signifie que l'entreprise doit satisfaire à certaines exigences en matière de tenue de la comptabilité et de certification.
Aux États-Unis, ce lien n'existe pas, alors la participation et l'adhésion des entreprises au programme EXPRES y a été beaucoup plus élevée qu'au Canada. Il existe des iniquités dans le RSAP en ce qui a trait au PAD. Je serais très heureux de vous fournir plus d'information au sujet des observations de nos membres quant à leur expérience du RSAP.
Le président : J'aimerais que vous fournissiez ces documents au greffier.
M. Keyes : Oui, je vais le faire. Ce lien entre les deux programmes a causé des problèmes et a refroidi l'enthousiasme des entreprises à l'égard du programme EXPRES.
M. Norman : Voilà un exemple d'inégalité entre les deux côtés de la frontière. Moins les définitions devront être précises, plus les deux pays seront susceptibles de travailler à des objectifs communs plus vastes.
Le sénateur Cordy : Allez-vous nous envoyer des renseignements monsieur Keyes?
M. Keyes : Je vous enverrai des renseignements.
Le sénateur Banks : J'ai une question supplémentaire très brève. Le formulaire que doit remplir un chauffeur pour adhérer au programme EXPRES, formulaire que j'ai lu une première fois hier, demande des renseignements sur les cinq dernières années, soit toutes les adresses, tout l'historique d'emploi, tout doit être complet. Je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question, mais cela peut décourager certaines personnes de s'inscrire au programme.
Les enquêtes de sécurité menées sur ces chauffeurs sont-elles si approfondies? Les voisins sont-ils interrogés sur les cinq dernières années de vie des candidats? Les employeurs de ces personnes au cours des cinq dernières années sont-ils interrogés? Je ne me prononce pas sur la validité d'une telle enquête, mais je veux savoir s'il y a vraiment une enquête approfondie, le savez-vous?
M. Keyes : Je ne sais pas. Je peux seulement citer en exemple la dernière fois où j'ai demandé un passeport, et il est clair que les vérifications de sécurité sont beaucoup plus approfondies qu'avant. Pour être admis au programme EXPRES, un chauffeur doit entrer dans une certaine catégorie risque, il doit être considéré comme une personne présentant un faible risque, alors je présume que le processus est exhaustif.
M. Norman : Nous pouvons vérifier cela, si vous voulez que nous vous fournissions une réponse.
Le sénateur Banks : Vous n'êtes pas obligé de le faire, je croyais que vous le saviez peut-être.
M. Keyes : S'ajoutent à cela tous les critères d'entrée aux États-Unis. Les camionneurs qui ne sont pas citoyens canadiens et qui ne satisfont pas aux exigences d'exemption actuelles n'apprécient pas toutes les tracasseries auxquelles ils sont confrontés chaque fois qu'ils traversent la frontière, qu'il s'agisse de la prise d'empreintes digitales ou de photographies. À cause de ces nouvelles exigences, certains camionneurs ne sont pas prêts à adhérer à ce type de programmes et à aller aux États-Unis.
Le sénateur Banks : Je vais vous poser une deuxième question naïve. Il semble que le goulot d'étranglement qui ralentit la circulation sur le pont se produise avant le processus de dédouanement. Je parle ici de vos 1 400 camions, monsieur Norman, qui, je présume, circulent dans les deux sens. En d'autres termes, je crois comprendre qu'il n'y a pas de voie réservée aux chauffeurs qui participent au programme EXPRES. Est-ce exact?
M. Norman : Pas pour arriver au pont, mais une fois qu'il est traversé. Il y a environ 25 voies, et il ne suffit que d'une file et d'une attente modeste dans l'une de ces voies pour que la voie réservée au programme EXPRES soit bloquée. Cela ne se produit pas tous les jours, mais ça ne prend pas grand-chose pour qu'il y ait des embouteillages, pour que les quatre voies du pont soient bloquées.
La même chose vaut pour le tunnel. La voie réservée au programme NEXUS est facilement bloquée.
Le sénateur Banks : S'il y avait une voie réservée au programme EXPRES à partir de tout endroit où l'on accède à la route qui mène à la frontière, est-ce que cela améliorait beaucoup les choses?
M. Norman : Ce devrait être utile, mais selon moi, ce sont les lois de la physique qui ont le dernier mot, c'est-à-dire qu'il y a trop de camions qui circulent sur le pont. C'est pourquoi nous demandons sans relâche à ce qu'il y ait un renforcement des infrastructures de notre côté, parce que nous devons améliorer l'infrastructure routière également. Les autorités responsables du pont gèrent bien cette circulation d'ailleurs.
Le sénateur Banks : Qui, pardon?
M. Norman : Les responsables du pont.
Le sénateur Banks : Peut-on reprocher à l'un des pays plus qu'à l'autre l'absence de solution aux problèmes d'infrastructure? Les Canadiens attendent-ils que les Américains prennent une initiative, ou les Américains se disent-ils prêts à agir alors que les Canadiens ne font rien? L'une de ces deux affirmations reflète-t-elle la réalité?
M. Norman : Du côté américain, le problème réside à la fois dans une pénurie de personnel au poste de contrôle et dans leur indifférence, parfois, devant les embouteillages sur Huron Church Road. Ils ne connaissent pas l'ampleur de ce goulot d'étranglement. De notre côté, les difficultés concernent l'infrastructure locale et la facilité d'accès aux frontières.
Il y a donc des délais qui s'expliquent par des raisons différentes. Une partie n'essaie pas d'éviter de répondre à l'autre. Elles ont des problèmes différents.
Le sénateur Atkins : Vous avez parlé d'un programme en neuf points qui pourrait être mis en place. Pouvez-vous nous donner des détails à ce sujet?
M. Norman : La nouvelle stratégie pour l'infrastructure de la région de Windsor-Essex s'intitule « Il faut que ça bouge à Windsor-Essex » ou Let's Get Windsor-Essex Moving. Le document du CPSCA en parle. Il s'agit du plus récent et du plus important consensus. Nous pouvons vous fournir un exemplaire des documents portant sur ces éléments.
Le sénateur Forrestall : En ce qui concerne les efforts pour réduire le temps requis avant qu'un chauffeur soit approuvé, DaimlerChrysler a-t-il un programme de formation interne pour les nouveaux chauffeurs? Embauchez-vous de nouveaux chauffeurs ou voulez-vous seulement des chauffeurs qualifiés?
M. Norman : Nous le faisons, et notre flux est assez satisfaisant. Toutefois, il faut garder à l'esprit le fait que nous sommes à la merci des délais auxquels sont exposés nos fournisseurs aussi et que nous ne voulons pas les voir crouler sous les coûts. Comme entreprise, nous obtenons un accès adéquat et une bonne circulation et nous ne sommes pas confrontés à des obstacles à l'embauche et au développement, mais nous dépendons néanmoins de toute une infrastructure.
Le sénateur Forrestall : Combien de temps faut-il à un chauffeur pour remplir son formulaire de demande et pour obtenir son adhésion au programme EXPRES?
M. Norman : Je vais vous envoyer la réponse exacte à cette question. Je ne la connais pas par coeur.
Le sénateur Forrestall : Merci.
Le sénateur Atkins : Nous avons dit que le sentiment d'urgence s'atténuait à mesure qu'on s'éloignait du 11 septembre. Selon mon expérience des relations avec l'administration, il faut parler d'emplois, d'emplois et d'emplois pour attirer l'attention des gouvernements. D'ailleurs je vous dirais que si vous voulez réellement toucher le cœur de Queens Park, c'est la voie à suivre et je le dis également à mon ami qui représente la Chambre parce que...
M. Keyes : D'où le document de la Chambre de commerce de l'Ontario.
Le président : Vous n'avez pas entendu ma présentation du sénateur Atkins, mais il a été longtemps conseiller d'un ancien premier ministre de l'Ontario et il connaît Queens Park mieux que quiconque dans cette salle, selon moi.
Le sénateur Meighen : Vous devez être prudent avec ces documents, si vous faites la somme de tous les emplois, vous arrivez à une population de 50 millions d'habitants en Ontario. Je suis sûr que les recherches qui s'imposent ont été effectuées et je suis sûr que vous pouvez fournir des documents à l'appui.
Comme résident de Toronto, j'ai honte du fait que nos déchets se rendent au Michigan et je suis horrifié par le nombre de camions qui transportent ces déchets. Empruntent-ils ce pont, ou traversent-ils à Sarnia? S'ils empruntent ce pont, avez-vous remarqué leur présence et ont-ils eu un effet quelconque sur le facteur de saturation?
M. Keyes : Je ne sais pas, j'habite Ottawa.
Le sénateur Meighen : Monsieur Norman, vous êtes le résident de cette région.
M. Norman : Je n'ai pas remarqué d'augmentation excessive de la circulation de déchets.
Le sénateur Meighen : J'aurais espéré obtenir une réponse différente, mais telle est la situation. J'avais entendu le chiffre de 1 200 camions, mais je suis certain qu'il s'agit peut-être d'une exagération.
M. Norman : Je vais surveiller ces chiffres à partir de maintenant.
Le sénateur Meighen : Il suffit d'avoir les narines orientées vers la bonne direction, et vous les trouverez, mais il ne fait aucun doute que vous remarquerez leur présence en conduisant sur la route 401.
M. Keyes : Oh! Je les ai vus sur l'autoroute 401.
Le sénateur Meighen : Et de toute évidence ils doivent traverser la frontière quelque part, je ne sais seulement pas où ils le font.
Le président : Messieurs, au nom du comité, je voudrais vous remercier d'avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd'hui. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'un problème complexe. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'une question importante pour les économies des deux pays, probablement pour celles de plusieurs États, et certainement pour l'économie de cette région. Nous sommes très conscients de l'importance du temps.
Officiellement, notre comité affirme être très insatisfait des échéanciers tels qu'ils nous ont été présentés. Nous serions heureux de recevoir toute communication que vous voulez nous transmettre ou toute suggestion de solutions, mais d'ici là, nous vous remercions beaucoup de nous avoir fait part de votre point de vue. Vous avez été fort utiles.
La séance est levée.