Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 15 - Témoignages du 9 juin 2005
OTTAWA, le jeudi 9 juin 2005
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 10 h 50, pour examiner le projet de loi S-21, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants).
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte. Notre témoin de ce matin est M. Paul D. Faris.
Soyez le bienvenu devant notre comité, monsieur Faris. Nous commencerons par vous écouter, après quoi, j'en suis sûre, les sénateurs auront des questions à vous poser.
M. Paul D. Faris, directeur administratif et conseiller juridique principal, Home School Legal Defence Association, Coalition for Family Autonomy : Madame la présidente, honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant vous aujourd'hui. C'est pour moi un grand honneur.
Il y a énormément de documents sur la question. J'ai essayé de retenir les plus convaincants, mais je serais très heureux de vous donner autant d'information que vous le souhaiterez.
Je suis ici au nom de la Home School Legal Defence Association, membre de la Coalition for Family Autonomy qui était intervenue dans l'affaire Canadian Foundation for Children Youth and the Law c. Canada (Procureur général). La coalition comprenait quatre organisations qui s'étaient unies pour mettre en commun leurs ressources et pouvoir comparaître devant la Cour suprême du Canada, dont les frais de procédure sont, comme vous le savez, très élevés.
Par conséquent, je ne pourrais trop parler pour les autres groupes. Je vous encourage à les inviter, si l'occasion vous en est offerte.
Je suis opposé, comme les membres des autres organisations, à toute forme de violence envers les enfants. Nous n'avons pas pris position sur la question de savoir si la fessée est bonne ou mauvaise. Nous ne sommes pas ici pour discuter de la fessée. Nous sommes ici pour prendre position contre la criminalisation de l'usage modéré de la fessée. La différence est très importante.
J'aimerais, tout d'abord, discuter de certaines dispositions juridiques sur la question. L'article 265 du Code criminel parle de voies de fait, tandis que l'article 43, dont il est question dans le projet de loi S-21, établit une défense contre les voies de fait.
L'article 265 stipule que le toucher imposé constitue une voie de fait et qu'il est par conséquent passible d'une peine pouvant aller jusqu'à cinq ans de prison. Il s'agit ici d'une disposition très stricte de notre Code criminel.
Cela fait partie de notre héritage de libertés et de droits individuels. Il est significatif qu'un parent non protégé par l'article 43 et inculpé en vertu de l'article 265 soit passible de cinq ans de prison, même si, à l'évidence, il est fort improbable que l'on condamne un parent à une peine aussi longue.
L'arrêt rendu par la Cour suprême du Canada en janvier 2004 répond directement à ces questions. En fait, il s'agissait d'une réponse aux intervenants et à la requête visant à proscrire l'article 43 et à le faire retirer du Code criminel.
La Cour suprême du Canada a examiné la question en profondeur. Elle a tenu compte des présentations qui lui ont été faites. Des experts du monde entier ont témoigné. Nous avons des caisses de preuves présentées par tous les experts que les deux parties ont pu recruter. Trois paliers de notre système judiciaire ont examiné cette preuve d'expert.
Dans cette action en justice dont j'ai parlé, les parties principales ont interrogé à souhait les témoins et les experts. Elles ont pu poser toutes les questions qu'elles souhaitaient poser et une transcription de ces questions a été déposée devant les juges. La preuve n'a pas été seulement présentée, elle a été examinée et discutée à fond
La Cour suprême du Canada a estimé que l'article 43 sanctionnait seulement « une force légère — ayant un effet transitoire et insignifiant ». La correction ne peut ni blesser ni dévaloriser l'enfant. Dans le cas contraire, elle contrevient automatiquement, en vertu de l'arrêt de la Cour suprême du Canada, à l'article 43.
La Cour suprême a établi d'autres critères. Les mesures de discipline contre les enfants de moins de deux ans ne sont pas visées par l'article 43. Elles sont interdites contre les enfants handicapés, nonobstant leur âge. Elles ne doivent pas non plus servir à dévaloriser l'enfant. Les objets du type règles, ceintures et autres sont interdits, tout comme les gifles et les coups à la tête. Ces gestes ne sont ni permis ni protégés par l'article 43 et sont considérés comme voies de fait en vertu de l'arrêt de la Cour suprême.
De plus, la Cour suprême a énoncé des lignes directrices qui permettront de déterminer les motifs protégés par l'article 43. L'un d'eux concerne l'application de la force dans un but purement éducatif et le gain que doit retirer l'enfant de la mesure de discipline.
Cela laisse le champ libre aux interprétations. Le chiffre deux, par exemple, est quelque peu arbitraire, mais d'autres facteurs sont pris en considération. Si l'enfant a plus de deux ans, ou s'il est handicapé ou incapable de comprendre la nature disciplinaire de la correction qu'il a reçue, l'infraction n'est plus protégée par l'article 43.
Ainsi, les enfants sont mieux protégés depuis l'arrêt de la Cour suprême du Canada.
D'autres lois protègent l'enfant. Chaque province a ses propres lois sur les services à l'enfance et à la famille, lesquels offrent une solide protection de l'enfance hors du Code criminel. J'ai inclus dans mon mémoire trois exemples. Les lois provinciales permettent aux services à l'enfance et à la famille d'appréhender un enfant s'ils estiment que l'enfant a besoin de protection à la suite de violences physiques ou même de maltraitance émotionnelle.
L'enfance est bien protégée hors du Code criminel. Comme il a été dit lors de la présentation d'hier, je crois, ces lois n'auraient nul besoin d'être modifiées, même si le projet de loi S-21 était adopté et l'article 43 du Code criminel abrogé. Ces protections sont importantes, comme on peut le voir.
De nombreuses recherches ont été effectuées sur ce sujet. J'ai inclus dans ma présentation écrite trois documents importants. Pour résumer ces documents, j'ai contacté le professeur Larzelere, l'un des principaux experts appelés à témoigner dans l'affaire, et je lui ai demandé de préparer une courte lettre à l'intention de votre comité. Le professeur Larzelere travaille au centre médical de l'Université du Nebraska. Je vous encourage à lire sa lettre, laquelle sera, je crois, un bon résumé de la preuve.
Le professeur Larzelere est un expert reconnu dans le domaine. Il a publié des dizaines d'études et d'articles sur la question. En fait, il est l'auteur de l'étude et du mémoire présentés par l'American College of Pediatricians aux Nations Unies.
Comme il est de coutume chez les professeurs et les experts, il existe des désaccords entre eux sur la question. Le professeur Larzelere est un expert, tout comme le professeur Baumrind, dont j'ai inclus les mémoires dans mes éléments matériels. Le professeur Baumrind travaille à l'Université de Berkeley, en Californie.
La preuve sur le caractère préjudiciable de la fessée est réfutable. Lorsqu'elle est pratiquée modérément et raisonnablement, par exemple, deux tapes sur la fesse — sans colère — il ne semble pas exister de preuve qui montre que la fessée soit préjudiciable à l'enfant.
La plupart des études qui montrent le préjudice de la fessée font état d'une violence qui en fait en conjugue plusieurs. Personne ne suggère que la violence, quelle que soit sa forme, doit être tolérée, mais il convient de discriminer.
Il a beaucoup été question de la Suède et d'autres pays européens. En Suède, la campagne contre la fessée a commencé bien avant son interdiction. Même interdite, la fessée n'en était pas pour autant un acte criminel. En fait, selon mon dernier calcul, seule une douzaine des 191 pays signataires de la Déclaration des droits de l'enfant ont interdit la fessée. Aucun d'eux ne la considère comme un acte criminel. Elle est interdite en fait par des lois sur la protection de l'enfance et autres mesures similaires. Si ce projet de loi devait être voté, nous serions le premier pays au monde à faire de la fessée un acte criminel et, il est permis de croire, de mettre un parent en prison pour avoir donné une fessée à son enfant.
La recherche en sciences sociales implique plusieurs facteurs différents. Il n'est pas possible de trouver une étude concluante sur un enfant à qui l'on donne une fessée et sur un autre enfant à qui ne l'on ne donne pas de fessée. Bien évidemment, ce ne serait pas approprié.
Il est intéressant de noter, en Suède, le nombre des actes de violence et de maltraitance par les parents envers les enfants et le nombre de ces mêmes actes par des enfants envers d'autres enfants, après l'interdiction de la fessée. Les chiffres n'ont pas diminué comme on aurait pu le penser. Ils ont augmenté. Et cela est inquiétant.
Bien sûr, cela ne prouve rien. Toutefois, il est intéressant de constater qu'au lieu de réduire le nombre d'actes de violence, l'interdiction de la fessée a augmenté leur nombre, que cette maltraitance vienne des parents ou d'autres enfants.
Selon la preuve présentée par la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law, requérante dans l'affaire jugée par la Cour suprême du Canada, 75 p. 100 des parents canadiens recouraient, à l'époque du procès, à une quelconque forme de mesure de discipline physique. Si le projet de loi S-21 est vote et si l'article 43 est abrogé, nous ferons de ces 75 p. 100 de parents canadiens des criminels. Leur nombre a peut être diminué depuis, mais nous parlons d'un nombre statistiquement important. Ce n'est pas sans soulever, bien évidemment, beaucoup d'inquiétude.
Il existe une quantité importante de jurisprudence sur l'enfance et la famille. Nous ne défendons pas les droits des parents; nous défendons les doits de l'enfant. Nous pensons que la famille est importante au développement de l'enfant, que les enfants se développent mieux au sein de la famille et que nous devons être prudents lorsque nous nous immisçons dans la sphère familiale.
Nous constatons en parcourant la jurisprudence que le droit hésite à s'immiscer dans les affaires familiales. J'ai inclus dans mon mémoire quelques références.
La loi reconnaît également — et nous devons être très prudents là-dessus lorsque nous traitons des droits de l'enfant — que les enfants sont égaux devant la loi, mais qu'ils ne se ressemblent pas. Notre jurisprudence et nos lois montrent que les enfants ne sont pas traités de la même manière. L'obligation qui leur est faite de s'éduquer en est l'exemple le plus évident. Ce traitement inégal ne serait pas légal s'il s'agissait des adultes. Il s'agirait d'une séquestration en droit civil et d'une détention illégale en droit pénal. Cette obligation ne résisterait pas à la Charte. Vous ne pourriez pas forcer des adultes à suivre des programmes éducatifs à moins qu'ils n'aient commis un crime. Pourtant, il est essentiel que nous forcions les enfants à s'éduquer. Les enfants sont comme on le voit dans une situation différente de celle des adultes, et ils doivent être traités équitablement, ce qui ne veut pas dire de la même manière.
Les parents ont également d'importantes obligations envers leurs enfants, et l'éducation en est une. Je m'occupe d'enseignement à domicile. De nombreux parents sont criminellement responsables — en vertu des lois sur l'éducation — s'ils n'éduquent pas leurs enfants. Il y a plusieurs autres domaines qui responsabilisent et obligent positivement les parents envers leurs enfants. Nous devons être prudents lorsque nous cherchons à limiter la capacité des parents à éduquer ou à contrôler leurs enfants.
Je conclurai en citant la Cour suprême du Canada. Je suis plus qu'heureux de parler de cet arrêt parce qu'il présente, sous de nombreux aspects, un intérêt certain. Je cite ici le jugement majoritaire de la Cour, au paragraphe 62 :
En fait, sans l'article 43, le droit canadien général en matière de voies de fait criminaliserait l'emploi de la force qui ne correspond pas à notre perception du châtiment corporel, comme le fait de forcer un enfant à s'asseoir pendant cinq minutes pour qu'il se tranquillise. La décision de ne pas criminaliser une telle conduite est fondée non pas sur une dévalorisation de l'enfant, mais sur la crainte que la criminalisation de cette conduite détruise des vies et disloque des familles — un fardeau qui, dans une large mesure, serait supporté par les enfants et éclipserait tout avantage susceptible d'émaner du processus pénal.
J'en ai fini avec ma présentation. Je serais heureux de répondre à vos questions.
[Français]
La présidente : Le Canada a ratifié en 1991 la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant qui protège explicitement, à son article 19, les enfants contre toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalité physique ou mentale.
Le Canada a présenté deux rapports d'application de la convention. En réponse au deuxième rapport du Canada, le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies a affirmé, en octobre 2003, qu'il notait avec une profonde préoccupation que l'État-partie n'a pas adopté de textes de loi à l'effet d'interdire expressément toutes les formes de châtiment corporel et n'a pris aucune mesure pour abroger l'article 43 du Code criminel qui autorise les châtiments corporels.
Cette convention internationale est importante pour le Canada, c'est évident. Elle bénéficie aussi d'un rayonnement considérable et, selon le comité de l'ONU, le Canada n'a toujours pas mis en place dans son droit interne l'ensemble des normes juridiques qui découlent de l'adhésion de notre pays à la convention.
À la page 9 de votre présentation, au no 35 de votre document, vous affirmez que, sur les 191 États-parties à la convention, très peu ont reformé leur droit interne. Vous soutenez aussi que c'est plutôt le droit civil et le droit de la famille qui ont fait l'objet de réformes dans les États qui ont opté pour des changements législatifs.
Avez-vous à l'esprit un exemple où une réforme de droit criminel aurait été nécessaire pour répondre aux exigences internationales?
[Traduction]
M. Faris : Le sujet m'inspire deux réflexions. La première est que la Cour suprême du Canada a bien considéré la Convention relative aux droits de l'enfant dans l'affaire Canadian Foundation for Children, Youth and the Law. La cour a écrit au paragraphe 33 :
Ni la Convention relative aux droits de l'enfant ni le Pacte international relatif aux droits civils et politiques n'exige explicitement que les États parties interdisent toute infliction d'un châtiment corporel à un enfant.
Il faut reconnaître que la décision de l'organisme des Nations Unies a été rendue ultérieurement. Toutefois, la Cour a bien considéré l'article, et elle a décidé qu'il ne s'appliquait pas à cette situation.
J'invoquerai un autre affidavit, bien qu'il n'ait pas été inclus dans mon mémoire. Il s'agit d'un affidavit de l'un des principaux diplomates qui ont travaillé à la convention et contribué à sa rédaction.
La présidente : Comment s'appelle ce diplomate?
M. Faris : John T. Holmes. Je serais heureux de vous remettre l'affidavit.
Le sénateur Hervieux-Payette : Quelle date porte l'affidavit, s'il vous plaît?
La présidente : Nous vous en donnerons une copie à tous.
M. Faris : Il a déclaré que les rédacteurs de la convention n'avaient pas l'intention d'interdire le châtiment corporel.
Nous avons deux déclarations qui montrent clairement qu'ils ne pensaient pas que l'article interdisait le châtiment corporel.
Pour répondre à la deuxième partie de votre question et eu égard au droit pénal, je ne connais aucune loi criminelle au monde qui interdise la fessée. On retrouve l'interdiction de la fessée dans les lois sur les services à l'enfance et à la famille ou la fessée est également déclarée préjudiciable ou dans les programmes de sensibilisation du public. Je n'ai apporté aucun de ces documents avec moi, mais si vous le désirez, je vous en retrouverai des exemplaires.
Le sénateur Mercer : Vous avez cité de nombreux experts, et cela m'énerve un peu quand on cite des experts. D'où je viens, un expert est défini comme un type qui vient d'ailleurs.
La difficulté que nous éprouvons comme législateurs, c'est de faire ce qu'il y a de mieux pour la société canadienne, notamment pour ceux qui sont le moins capables d'agir pour eux-mêmes ou en leur nom. Dans le cas présent, nous parlons des enfants.
Je trouve cela curieux qu'une organisation comme la vôtre ne veuille pas que nous commettions une erreur en faveur des enfants en leur donnant le plus de protection possible. J'ai de la difficulté à accepter cela. C'est l'une des raisons pour laquelle ce projet de loi me plaît; si nous devons errer, je préfère que ces erreurs soient des erreurs causées par la compassion et l'inquiétude plutôt que par la négligence et l'ignorance des réalités de ce monde dur et cruel. Oui, nous commettons des fautes. Nous en avons commis hier et nous en commettrons demain.
M. Faris : Nous sommes ici, et c'est là l'une de mes principales préoccupations, parce que nous ne croyons pas que le projet de loi S-21 erre en faveur des enfants, mais qu'il leur est préjudiciable. Parce que nous ne sommes pas dans une situation où nous pouvons dire : « Arrêtez toute forme de violence physique ou toute application de la force physique contre les enfants. » Nous ne sommes tout simplement pas en mesure de le faire cela. Nous devons sanctionner par des peines.
Je suis inquiet à l'idée de mettre 75 p. 100 des parents en prison. C'est un exemple extrême, certes. Mais, si la loi était appliquée strictement, c'est ce qui arriverait. Si 75 p. 100 des parents pratiquent la fessée et que les lois requièrent des sanctions pénales contre quiconque pratique la fessée, nous retrouverons alors en prison tous ces parents qui auront donné deux tapes sur les fesses de leurs enfants. C'est pourquoi je considère que les familles ont besoin de l'article 43 et que le projet de loi S-21 n'erre pas en faveur des enfants mais qu'il leur en fait préjudiciable.
Je l'ai dit au début et je ne pourrais jamais le répéter assez fort : il ne s'agit pas de décider si la fessée est bonne ou mauvaise. Nous n'avons pas de position là-dessus. En fait, nous n'avons aucun problème avec les campagnes de sensibilisation du public qui cherchent à encourager les parents à utiliser d'autres formes de mesures disciplinaires. Nous sommes inquiets à l'idée de voir les parents mis en prison.
Le sénateur Mercer : Lorsque nous avons adopté la loi sur le contrôle des armes à feu, la police était sur le point de faire des descentes pour saisir les armes à feu. Vous laissez entendre que le projet de loi S-21 n'erre pas en faveur des enfants, et je pense qu'il le fait. Je préfère cela.
La présidente : L'aspect juridique est également important. C'est le message de M. Faris.
Le sénateur Ringuette : Lorsque vous affirmez que 75 p. 100 des parents canadiens seraient mis en prison, vous semblez avoir peu de confiance dans les parents.
J'ai lu votre présentation écrite et je n'ai vu nulle part ce que vous avez affirmé oralement il y a quelques minutes; depuis que la Suède a interdit la fessée, le nombre d'enfants suédois victimes de la violence de leurs parents a augmenté.
Pouvez-vous justifier votre affirmation par des faits?
M. Faris : Oui, je le peux. Je pourrais vous fournir beaucoup de faits là dessus.
Le sénateur Ringuette : Je ne veux pas d'affirmation. Je veux une étude qui prouve ce que vous nous avez dit dans votre déclaration.
M. Faris : Je vous fournirai les données officielles de l'agence suédoise de la statistique.
Le sénateur Ringuette : Merci. Je ne veux pas que l'on prenne à la légère cette déclaration.
La présidente : Ce document sera distribué.
Le sénateur Ringuette : Vous avez dit que le projet de loi S-21 est préjudiciable aux enfants. Dans toute la documentation que l'on nous a donnée, je ne vois aucune preuve que le projet de loi S-21 est préjudiciable aux enfants. Pourriez-vous s'il vous plaît me dire en quoi il l'est?
M. Faris : J'en serais très heureux. Le projet de loi S-21 est préjudiciable aux enfants parce qu'il menace de mettre leurs parents en prison. Comme nous l'avons vu, les enfants sont mieux dans une famille pleine. Les intérêts des enfants sont moins bien protégés lorsque leurs parents sont en prison.
Par ailleurs, les parents qui feront face à des poursuites criminelles, ce qui sera le cas ici, devront assumer les frais de leur défense, même s'ils sont défendus avec succès. Je peux dire avec certitude que les services à la famille appréhenderont l'enfant si le parent est poursuivi. Des vies seront perturbées pendant plusieurs années, une pour le moins, et des dizaines de milliers de dollars seront dépensés en frais.
Comme le décrit la Cour suprême du Canada, le Code criminel est un instrument émoussé. Elle a déclaré en fait que l'abrogation de l'article 43 du Code criminel serait préjudiciable aux enfants. C'est là la conclusion de la Cour et je peux appuyer cette conclusion de plusieurs citations.
Le sénateur Ringuette : C'est votre droit et votre privilège de penser de la sorte, mais vous semblez avoir peu de confiance dans les gens qui gèrent au quotidien les problèmes familiaux, comme les intervenants sociaux, les autorités policières, et cetera. Vous semblez douter de leur capacité à juger une situation, et semblez penser que seul un parent peut le faire.
Nous voyons dans les médias, presque chaque semaine, des situations où, grâce à Dieu, ces agents chargés de l'application de la loi et ces intervenants sociaux secourent des enfants. Je respecte votre opinion, mais je ne la partage pas. Merci.
M. Faris : J'aimerais exprimer mon plus profond respect aux agents chargés de l'application de la loi et aux différents employés des services à l'enfance et à la famille qui protègent nos enfants à travers le pays. Je ne veux les dénigrer en aucune manière. Je pense réellement qu'ils exercent l'un des métiers les plus difficiles dans ce pays et je suis de tout cœur avec eux.
En ce qui concerne le pouvoir discrétionnaire du poursuivant, nous nous inquiétons de l'idée que nous puissions faire quelque chose d'illégal et laisser le soin aux agents chargés de l'application de la loi de déterminer l'objet de la poursuite.
La Cour suprême du Canada, a déclaré à plusieurs reprises et directement dans ce récent cas que cela violait la primauté du droit parce que dans un pays qui respecte la primauté du droit, les citoyens sont censés être liés par les lois, non par les décisions de certains individus. Nous nous apercevons que ces décisions diffèrent dans le pays, non parce que les agents ne font pas bien leur travail, mais parce qu'ils doivent l'interpréter dans des situations difficiles.
J'aimerais citer la Cour suprême du Canada dans son jugement majoritaire, paragraphe 16, dans l'affaire Canadian Foundation for Children, Youth and the Law :
Elle suscite également la crainte que les responsables de son application disposent d'un pouvoir discrétionnaire trop grand, en plus de violer le principe voulant que les citoyens soient régis par la primauté du droit et non par l'arbitraire individuel. La règle de la nullité pour cause d'imprécision vise généralement à éviter de laisser aux policiers, aux juges et aux jurys le soin de régler, de façon ponctuelle et subjective, des questions de politique générale fondamentales, ce qui risque d'entraîner une application arbitraire et discriminatoire de la loi.
Ce sont là les mots de la Cour suprême du Canada, non les miens.
Le sénateur Andreychuk : J'aimerais vous remercier pour votre très sérieux mémoire.
Avez-vous des statistiques sur le nombre d'enfants victimes d'une quelconque forme de violence de la part de leurs parents?
Ce que je veux dire, c'est que je continue de croire que les parents sont la meilleure ressource des enfants, et que lorsque nous les appréhendons, nous leur créons autant de problèmes que nous essayons d'en résoudre.
Nous avons des problèmes dans les familles d'accueil et nous sommes confrontés au problème additionnel que nous n'avons pas les ressources nécessaires pour appréhender les enfants que nous voulons appréhender. J'ai une grande expérience d'enfants que l'on transférait des services de garde temporaire vers des services de garde permanente puis qu'on retirait carrément des services de garde et que l'on déplaçait cinq à six fois d'un endroit à l'autre.
Quand je me remémore ces cas, je constate que les circonstances entourant l'appréhension des enfants était difficiles, mais que ce que nous avons fait par la suite était encore plus difficile pour les enfants. Je ne vois pas cela comme une panacée.
Je suis toujours curieux de savoir combien d'enfants sont appréhendés à la suite de violences. En d'autres termes, assumons-nous aujourd'hui une protection des enfants pour nous assurer qu'ils ne sont pas abandonnés dans des foyers où la violence existe à la différence de la fessée?
M. Faris : Je n'ai pas ces statistiques avec moi, mais je serais heureux de les retrouver et de les remettre au comité.
Malheureusement, je n'ai pas non plus ces études avec moi, mais les responsables des services de protection de l'enfance reconnaissent de plus en plus que les enfants sont mieux chez eux, comme vous l'avez mentionné. Il arrive qu'ils doivent être retirés de leur famille, mais ce sont là des circonstances toujours exceptionnelles. Je sais que c'est généralement cette idée qui prévaut dans les services à l'enfance et à la famille aujourd'hui.
Le sénateur Andreychuk : Vous avez mentionné la Suède. La Suède n'a pas inscrit la Convention relative aux droits de l'enfant dans ses lois. En d'autres termes, la Suède n'est pas tenue par la Convention relative aux droits de l'enfant. Elle l'utilise comme ligne directrice, essaie de s'y conformer, mais ne l'a pas inscrite dans ses lois.
Avez-vous étudié le cas de la Norvège qui, je crois savoir, a inscrit la Convention relative aux droits de l'enfant dans ses lois?
Vous faites remarquer qu'il y a eu une augmentation des cas de violence en Suède depuis le début de la campagne contre le châtiment corporel. J'aimerais savoir si vous avez des statistiques sur la Norvège, qui a suivi la convention à la lettre.
M. Faris : Je n'ai pas ces statistiques avec moi. Encore une fois, je serais heureux de les retrouver et de vous les remettre.
Le sénateur Andreychuk : Vous en êtes-vous servi au moins?
M. Faris : Je les ai eues entre les mains, mais je me souviens bien qu'elles appuyaient en général la position que je défends. J'aimerais pouvoir vous répondre plus directement sur cette question avec des statistiques spécifiques.
Le sénateur Andreychuk : L'arrêt de la Cour suprême du Canada à part, pensez-vous que le droit a réellement évolué sur la question?
Il y a cinquante ans, il était relativement normal d'exercer une forme quelconque de châtiment corporel. Aujourd'hui, les parents y recourent moins, le trouvent moins acceptable des parents, mais il a n'a pas été totalement exclu des mesures de discipline.
Pensez-vous que le droit a évolué ou que sa position se voulait définitive?
M. Faris : Absolument, je pense que le droit a évolué sur la question. En fait, la Cour suprême du Canada a spécifiquement dit qu'elle avait, que dans sa détermination du caractère raisonnable prévu par l'article 43, elle a dû tenir compte du point de la société sur la question.
Nous nous retrouvons dans une situation très similaire, parce que la Cour suprême du Canada a rendu sa décision il y a un an seulement. Si la société s'opposait universellement à toute forme de fessée, je m'attendrai à ce que la Cour suprême du Canada reconnaisse cela dans l'article 43. Il y a eu une évolution, c'est certain, et la Cour suprême du Canada a spécifiquement mentionné que cela devait arriver.
Le sénateur Andreychuk : Je dis cela parce que je serais pour que le gouvernement canadien investisse une importante part de ses ressources pour éduquer le public et l'amener à utiliser d'autres mesures de discipline, jusqu'à la disparition totale du châtiment corporel. Nous savons que cela prendrait des moyens incroyables. Actuellement, il fait beaucoup d'efforts, mais ses efforts ne suffisent pas ou ne sont pas répartis sur une base suffisamment large.
Laissons le passé et revenons au présent. Nous avons beaucoup de travail à faire dans les collectivités autochtones. La situation des jeunes mères et le suicide chez les adolescents nous interpellent. Serions-nous mieux si nous commencions réellement à nous attaquer à ces problèmes, et si nous menions une campagne globale constante et cohérente à travers le Canada pour mettre un terme au châtiment corporel?
M. Faris : Absolument. Je crois que le meilleur moyen de faire une campagne de sensibilisation du public et de changer le point de vue des gens. Une fois le point de vue des gens changé, la Cour suprême du Canada changerait certainement aussi son interprétation de ce qui est raisonnable et permis en vertu de l'article 43. C'est ainsi que je lis la décision rendue, qu'elle conformerait son interprétation au point de vue de la société sur le sujet.
Le sénateur Andreychuk : Nous avons signé et ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant. Toutefois, nous n'avons pas inscrit la convention dans nos lois nationales.
Changeriez-vous d'avis et peut être la Cour suprême du Canada changerait-elle d'avis si nous avions inscrit la convention dans nos lois?
M. Faris : Je me souviens d'un de mes professeurs pour qui le droit international n'existe pas, puisqu'il n'est qu'un traité. Il n'a de force ou d'effet au Canada que celui de lier les gouvernements qui l'ont signé.
Toutefois, les individus qui n'appartiennent pas aux ONG n'ont réellement aucune qualité pour agir. Si la Convention relative aux droits de l'enfant de l'ONU avait été inscrite dans les lois nationales, elle aurait une capacité légale dans ce pays. Selon son application et le niveau de son application (provinces, fédéral, la Charte, et cetera.), elle aurait une influence diverse sur les tribunaux. Ce serait très très différent.
Le sénateur Andreychuk : Je remets la question de l'existence du droit international à un autre jour. L'un de nos autres comités se bat actuellement pour que les professeurs de droit et d'autres comprennent le droit international tel qu'il est, pas tel qu'il était il y 20 ans.
Vous dites que nous serions mieux armés pour adopter une norme universelle de ce que dit la loi sur le châtiment corporel, si nous nous y soumettions pleinement par son adoption dans nos lois.
M. Faris : Absolument. Je n'avais pas l'intention de laisser entendre que je ne crois pas dans le droit international.
Le sénateur Milne : Monsieur Faris, vous dites que la Cour suprême évolue. Pensez-vous que l'arrêt de la Cour aurait été différent si la résolution des Nations Unies avait été en vigueur à l'époque du jugement et si la Cour avait pu la prendre en considération dans son jugement?
M. Faris : C'est là une question difficile. Je suppose que je dois, pour être honnête, dire que je ne sais pas. Je ne crois pas que cela aurait changé sa position. Je dis cela parce que notre Cour suprême est très versée dans le droit et son interprétation. Ses juges sont là pour décider dans l'intérêt du Canada. Ils avaient devant eux tous les articles de la Convention relative aux droits de l'enfant et tous les traités internationaux sur la question. Ils les ont abordés directement et ils jugé qu'aucun traité international, y compris la Convention relative aux droits de l'enfant, n'exigeait qu'ils interdisent le châtiment corporel. C'est mon évaluation de la situation.
Le sénateur Milne : Bien.
Vous avez cité la partie de l'arrêt où la Cour suprême du Canada dit que l'abrogation de l'article donnerait aux individus un pouvoir discrétionnaire trop important. Comment réagissez-vous alors à la décision de la Cour supérieure de l'Ontario, en 2004, dans l'affaire de cette mère qui avait clairement ignoré deux des critères de la Cour suprême en giflant publiquement sa fille adolescente? Est-il possible que ce soit actuellement les tribunaux qui disposent d'un pouvoir discrétionnaire important et qu'ils ne suivent pas l'arrêt de la Cour suprême.
M. Faris : Ce problème est celui des tribunaux, de la police et des agents responsables de l'application des droits de l'enfant qui ne respectent pas la loi. J'ai entendu parlé hier d'une enfant qui avait été battue lorsqu'elle était jeune. Elle est allée à la police, mais la police ne l'a pas crue.
Ce qui importe ici, c'est que nous voyons des représentants de la loi et des tribunaux qui ne suivent pas la loi telle qu'elle est. S'ils ne respectent pas la loi telle qu'elle est aujourd'hui, comment le fait de changer la loi peut-il les aider à la respecter demain? Nous avons besoin de meilleurs programmes éducatifs pour nos représentants de la loi, afin qu'ils connaissent mieux leurs droits et leurs obligations.
Par exemple, nous avons besoin d'éduquer davantage les employés des services à la famille et à l'enfance et les agents de police. Nous devrions leur expliquer que les parents n'ont pas le droit de battre leurs enfants, qu'ils n'ont pas le droit d'utiliser des objets sur leurs enfants, qu'ils n'ont pas le droit de perpétrer des actes haineux à leur endroit; tout cela est déjà interdit, comme on le sait. Je crois que cela serait beaucoup plus utile de garantir la sécurité de l'enfant que de changer la loi lorsque nous voyons qu'elle n'est pas toujours respectée.
Le sénateur Milne : Vous avez parlé de la Suède et des statistiques qui y ont été compilées. Je trouve cela très inquiétant que, statistiquement, la pratique de la fessée a augmenté depuis l'introduction de la nouvelle loi.
Ne vous attendriez-vous pas à voir la pratique de la fessée augmenter? Si elle était soudain déclarée illégale dans ce pays, ne vous attendriez-vous pas à plus de rapports?
M. Faris : Oui, ce serait certainement le cas. Nous ne savons pas réellement pourquoi la pratique de la fessée a augmenté. La lettre du professeur Larzelere que j'ai remise au comité contient quelques informations là dessus. Il s'agit d'une analyse de statistiques d'une étude suédoise. Je ferai parvenir cette étude au comité.
Ce qui s'est passé en Suède, c'est que la campagne de sensibilisation du public a commencé bien avant l'interdiction de la fessée. Les gens avaient été sensibilisés à la question bien avant que l'on ne modifie la loi.
Le sénateur Milne : Y a-t-il eu des tests pendant la période intermédiaire pour voir si le nombre de cas de violence avait commencé à augmenter avant que l'on ne modifie la loi?
M. Faris : Oui. En fait, la pratique de la fessée a considérablement diminué avant que la Suède ne l'interdise. C'est là une conséquence de la campagne de sensibilisation du public.
Le sénateur Milne : Le nombre de cas de fessées est-il repassé ensuite au-dessus de son ancien niveau?
M. Faris : Il a augmenté, pas en ce qui concerne les fessées raisonnables, mais en ce qui concerne la violence et la maltraitance. Une violence entre les enfants également, qui n'aurait jamais été permise de toute façon. Il n' y aurait pas dû y avoir un impact là-dessus.
Le sénateur Milne : J'ai une question pour vous, qu'elle soit juridique ou non. La fessée est-elle bonne ou mauvaise? Existe-t-il des études qui justifieraient une politique qui soutiendrait que la fessée est bonne?
M. Faris : Le sénateur, je vais essayer de vous répondre au mieux. C'est une question difficile. Une question qui dépend de la personne à qui vous la posez.
Avant le jugement de la Cour suprême, j'écoutais avec intérêt les émissions-débats sur la question. Je ne suis pas sûr que les gens puissent dire un jour, à 100 p. 100, si la fessée est bonne ou mauvaise.
Le sénateur Milne : Ce dont j'ai besoin, toutefois, c'est une sorte de raison politique qui dise : « Laissez l'article 43 là où il est. »
M. Faris : Les principaux défenseurs de la criminalisation et de la décriminalisation de la fessée ont présenté leurs arguments devant trois échelons du système judiciaire. Ils ont fait témoigner les plus grands experts. Les tribunaux ont entendu tous ces experts et ils sont arrivés à la conclusion, en se fondant sur leurs experts rapports, que la fessée n'était pas préjudiciable à l'enfant comme d'autres peuvent l'être.
Le juge de première instance avait établi ce que la plupart des experts croient préjudiciable et ce qui ne l'est pas. C'est après analyse de la preuve apportée par les experts que la Cour suprême a décidé ce qu'elle acceptait et ce qu'elle n'acceptait pas de voir se produire.
Je suppose que le plus grand débat que nous ayons eu à ce jour a conduit à l'arrêt de la Cour suprême du Canada.
Le sénateur Milne : Ce qui me ramène au fait que l'arrêt n'est pas suivi.
Le sénateur Pearson : Pour ajouter à la discussion générale, j'aimerais faire quelques commentaires sur ce que vous venez de dire. Pour commencer, je parlerai du cas de la Suède.
Le sénateur Andreychuk et moi étions en Suède comme membres de notre Comité des droits de l'homme. La démographie de la Suède a beaucoup changé. Je ne pense pas que nous puissions parler de l'augmentation ou de la baisse de la violence sans tenir compte de cet important flux migratoire de réfugiés. C'est ce qui est dit dans cette étude. Je ne pense pas que nous puissions utiliser la Suède comme un bon ou un mauvais exemple. Notre défi est de trouver une solution à ce qui se passe chez nous. Vous avez mentionné John T. Holmes et je le connais bien.
Lors de la rédaction de la Convention relative aux droits de l'enfant, il avait été espéré qu'elle deviendrait universelle, ce qu'elle est pratiquement devenue. Il a donc fallu surmonter d'énormes problèmes culturels. Personne n'a dit explicitement que le châtiment corporel devait être interdit. C'est pourquoi cela ne figure ni dans la convention ni dans le pacte. Le châtiment corporel n'est qu'une forme potentielle de violence; les rédacteurs n'étaient prêts à aller jusque là. Je pense qu'ils ont eu raison. Ils ont parlé des deux articles de la convention, l'article 19, qui traite de la violence envers les enfants, et d'un autre qui stipule que les punitions et les mesures de discipline scolaires ne doivent pas porter atteinte à la dignité de l'enfant. Il était question de dignité. Ce sont ces mêmes questions que nous avons devant nous.
Il ne s'agit pas d'interdire ou de ne pas interdire. Le fond de la question qui se pose à nous dans nos discussions sur la loi et dans notre actuel débat touche à la diminution de la violence envers les enfants.
L'article 43 a pris toute son importance. La discussion a dépassé son cadre juridique, elle est devenue quelque chose de plus fort qu'un symbole. C'est pour cela que les gens se sentent si concernés.
Si nous considérons cette affaire d'un point de vue purement juridique, nous verrons qu'une grande partie des arguments avancés par les deux parties sont aussi valables les uns que les autres.
Une nouvelle étude comparative sur la violence et la négligence envers les enfants sera publiée cette semaine. Malheureusement, cette étude montrera une augmentation de ce type de violence au Canada. Nous avons maintenant les données en mains. Cette situation n'est pas sans nous préoccuper et nous devons réfléchir sur les moyens de diminuer violence et négligence.
Je suis contre une trop grande ingérence dans la vie familiale. Nous savons que de nombreux cas de maltraitance ont pour origine la consommation d'alcool et de problèmes autres.
Je suis d'accord avec le sénateur Andreychuk quand il dit que nous avons besoin de plus de ressources pour aider les parents à assumer leur responsabilité éducative envers leurs enfants. Il y aura toujours des situations où nous ne pourrons pas protéger les enfants, malgré tous les efforts que nous aurons déployés.
Cette inquiétude me poursuit depuis 1979, l'Année internationale de l'enfant. J'étais alors vice-président de la commission canadienne. Nous avions demandé l'abrogation de l'article 43. C'était il y a 26 ans. J'ai toujours pensé qu'il s'agissait d'un acte symbolique. L'abrogation de l'article 43 a pour moi une valeur symbolique. Nous avons rencontré des gens qui pensaient que l'abrogation de l'article 43 n'aurait pas l'impact escompté, qu'il était impossible de rallier 75 p. 100 des parents canadiens, que cela ne se pouvait pas.
Je sais que l'on nous reproche de criminaliser le châtiment corporel. Fondamentalement, nous écartons la défense. Il doit y avoir d'autres moyens que le Code criminel pour supprimer cette inquiétude que personne n'est poursuivi injustement. Il s'agissait de défendre l'état de nécessité.
Dans un sens, cela devient un débat entre l'évolution et le passage à l'action ou le passage à une action plus lente. Voilà le débat. À mon avis, le débat consiste à ne pas conserver pour toujours et toujours, comme il a été fait des moyens de défense de l'époux qui frappait son conjoint. L'enfant doit être protégé comme tout être humain.
Il ne s'agit pas d'une interrogation, mais plutôt d'un commentaire. Je veux m'assurer que nous comprenons bien sur quoi porte réellement le débat. Je ne sais pas si vous avez une quelconque réponse à mes propos.
M. Faris : Je suis d'accord qu'il doit être mis un terme à la maltraitance de l'enfant au Canada. Je soutiens tout ce qui pourra arrêter cette maltraitance. Le problème est que cette maltraitance viole déjà la loi. Ma préoccupation est que si nous changeons la loi qui ne nous permettra pas son application, cela ne fera qu'augmenter le nombre de personnes qu'elle devrait punir. En même temps, elle punirait potentiellement les personnes qui ne devraient peut-être être punies.
Madame la juge en chef Arbour, dans son jugement minoritaire, a reconnu la défense fondée sur l'état de nécessité et la règle des minimes. J'attends avec impatience la réponse des tribunaux. Le problème de ces deux types de défense, c'est qu'il est en fait double. D'abord, le droit a ses raretés. La plupart des avocats ont dû ressortir leurs cours pour comprendre ces raretés et comment elles s'appliquaient. L'état de nécessité est fondamentalement une situation dans laquelle vous êtes forcé d'agir. Un enfant marche dans la rue, sur le point d'être renversé par véhicule. Vous l'empoignez et le tirez hors du danger. Voilà un exemple d'état de nécessité. Techniquement, c'est une voie de fait, mais l'état de nécessité exige que vous réagissiez ainsi. La défense fondée sur la nécessité ne s'applique à aucune sorte de fessée, et les deux tapes sur la fesse ne pourraient être défendues ni pas l'état de nécessité ni par la règle des minimes. Fondamentalement, l'idée est que « la loi ne s'occupe pas de peccadilles ». L'abrogation de l'article 43 n'est pas une peccadille. C'est une chose qu'il faut considérer sérieusement.
La règle des minimes n'est pas courante dans le droit canadien. La Cour suprême a déclaré que ces deux types de défense étaient problématiques et qu'elles attireraient certainement leur lot de poursuites et de problèmes si nous les invoquions.
Le sénateur Pearson : Savez-vous combien de fois l'article 43 a été invoqué?
M. Faris : Je ne sais le nombre de fois exact. Il est certainement invoqué assez souvent, parfois avec succès parfois sans. Lorsque la maltraitance est le fait d'un parent, les avocats de la défense recourent invariablement à l'article 43. Dans les autres cas, l'article n'offre aucune défense.
Le sénateur Pearson : Vous avez été très aimable de nous documenter sur plusieurs points. Pourriez-vous nous donner quelques informations sur cette question?
M. Faris : Je peux essayer. J'estime le nombre à des milliers sinon à des dizaines de milliers de cas. Le droit pénal fait connaître lois sur le bien-être de l'enfant et de la famille.
Lorsque les services à l'enfance et à la famille ont été appelés, ils essaient d'empêcher la famille d'utiliser toute forme de correction physique. J'ai vu les ordonnances de beaucoup de juges, j'ai vu des juges ordonner, dans le cas d'antécédents de maltraitance, interdire aux parents toute forme correction physique.
Ce sont le plus souvent les services à l'enfance et à la famille qui font respecter cette interdiction. J'essaierai de trouver des informations sur les procès criminels concernant la maltraitance des enfants.
Le sénateur Andreychuk : Le sénateur Pearson a mentionné la parution d'un rapport la semaine prochaine. Il serait utile que nous en ayons une copie. Le problème de la maltraitance des enfants porte maintenant sur l'intimidation et la maltraitance d'enfants par d'autres enfants. J'aimerais savoir si cette augmentation de la maltraitance a ses origines dans les familles ou dans les foyers de soins.
Le sénateur Pearson : Une partie des informations sur l'intimidation révèle que les auteurs des intimidations sont des enfants qui ont eux-mêmes été victimes de châtiment corporel à la maison.
Le sénateur Andreychuk : Ce serait utile si nous pouvions avoir ces informations.
Le sénateur Cools : J'aimerais remercier le témoin d'être venu devant nous. J'aimerais également vous remercier, à ma manière, pour l'excellent travail que vous faites au sein de la Home School Legal Defence Association of Canada. Je connais très bien votre organisation et je sais qu'elle fait un excellent travail.
Vous m'avez clarifié deux ou trois points. Le premier est le phénomène du droit international. Le droit international concerne les traités et non des lois par lesquelles un groupe de personnes élues par la population décide d'être lié. Le droit international est devenu une fuite que certaines gens utilisent pour refaire le monde à leur image et non à l'image de ceux qui ont été élus par la population. Je vous remercie d'inscrire cela au dossier.
Ce dont nous parlons, c'est de l'imposition de traités signés entre souverains. Un traité est une entente entre deux rois, deux souverains. Ce dont nous parlons, c'est de rapporter un traité et de l'imposer à un pays sans méfiance. Cet acte est très noble, mais lorsqu'il est lié à des questions comme celle de la création de tribunaux pénaux internationaux, il me gène beaucoup parce que la compétence est très très sujette à caution. Plusieurs cas le montrent, notamment le cas Milosevic, mais nous ne sommes pas ici pour cela, n'est-ce pas?
J'aimerais revenir à la question que vous avez clarifiée : pourquoi l'abrogation de l'article 43 serait-elle à long terme préjudiciable à l'enfant?
Beaucoup de gens ont oublié ces années où les femmes enceintes emprisonnées pour des crimes qui ne se rapportaient pas au bien-être de leurs enfants pouvaient accoucher en prison et élever leurs bébés en prison. Les gens ne savent pas que l'administration pénitentiaire permettait à l'enfant de vivre en prison avec sa mère plusieurs années.
Un prisonnier bien connu de l'administration pénitentiaire ontarienne est lui-même né dans une prison. Son histoire est intéressante. Même dans ces situations, le système aidait à garder la famille unie. J'appartiens à ce groupe. La pratique est tombée en désuétude mais je pense que c'était une bonne politique de la part des systèmes correctionnels. Aujourd'hui, nous faisons le contraire.
Vous avez fait remarquer que lorsqu'une poursuite est intentée contre un parent, il y a d'abord ces impies frais d'avocat puis le retrait de l'enfant de sa famille. Par ailleurs, il est interdit au parent inculpé d'entrer en relation avec son enfant. C'est cela qui se produit dans notre système de voies de fait.
Entre parenthèse, les mères commettent plus de violences contre leurs enfants que les pères dans ces mauvais cas. Les preuves vont dans ce sens.
Ces variables se combinent pour forcer l'accusé à plaider coupable et qu'un avocat général ou un collectionneur de statistiques puisse dire : « Regardez toutes les inculpations que nous avons. » J'ai vu cela se produire dans ces soi-disant situations de voies de fait domestiques.
C'est là l'une de mes inquiétudes. J'ai travaillé dans la gestion des conflits familiaux et je sais que la réussite vient en travaillant avec la famille comme un tout. C'est là le grand danger.
Le second grand, comme vous le dira toute personne qui travaille dans la protection de l'enfance, c'est que la plupart des plaintes qui sont faites aux organismes de protection de l'enfance sont fausses. Dans le cadre d'un autre comité, il y a quelques années, un témoin d'une société de protection de l'enfance a déclaré qu'un grand nombre de plaintes et d'allégations étaient fausses. Le simple fait qu'elles soient fausses et seulement vérifiées comme tel après une longue enquête est une preuve en soi du potentiel de poursuites immédiates. Et ces poursuites aboutissent parce que d'autres variables se sont combinées pour forcer l'innocent à plaider coupable.
Aucune de ces choses n'a de rapport avec le bien-être de l'enfant. Elles ont peut être un rapport avec la vengeance, les représailles ou la justice vengeresse, mais l'enfant est laissé à une situation de terreur et de tristesse.
Madame la présidente, je ne sais pas si nous pourrions entendre des témoins nous expliquer ce qui se passe en de telles circonstances. Les poursuivants pourraient enfin comprendre les tensions qui sont alors exercées. C'est pour cela que je crois que nous ne devrions permettre des situations dans lesquelles notre foi dans les poursuivants est plus grande que dans le droit.
Les émules de Montesquieu disaient : « être régi par le droit, pas par l'homme ». C'était l'ancien adage, sauf que ce sont les hommes qui régissent les lois, alors vous voyez ce que je veux dire.
Si vous aviez encore des doutes, j'attends vos commentaires. J'ai connu de nombreux parents qui avaient de terribles problèmes avec leurs enfants et qui s'en sont remarquablement sortis. Nous sommes très souvent déçus, mais je ne crois pas qu'une gifle devrait permettre de qualifier des parents ou des grands-parents de « violents ».
Le sénateur Pearson a raison : la véritable question n'est pas de savoir qui est pour ou contre le châtiment corporel; la véritable question est de savoir comment procéder. Je suis d'accord avec la Cour suprême lorsqu'elle déclare que le Code criminel est un instrument émoussé. Je vous remercie de votre déclaration.
Ma compréhension du développement du Code criminel s'est toujours accompagnée d'une mise en garde : ne pas l'invoquer contre la population. Il s'agit réellement d'une question d'exercice du pouvoir contre les citoyens. Il s'agit du pouvoir du roi contre ses sujets. Le Code criminel st un moyen de contrainte vers lequel nous devrions nous tourner rarement et avec grande circonspection.
Je suis sûr que vous connaissez ma position sur plusieurs de ces questions. Je m'inquiète que l'on entre rapidement dans une lutte des classes parce que plusieurs de ces problèmes sont le propre de certains segments de la population. Nous parlons d'instituer des lois qui s'appliquent aux classes laborieuses.
Cela me dérange profondément. J'ai passé beaucoup de temps à essayer d'avancer et de travailler avec ces gens. Je suis heureux que vous m'ayez posé ces questions.
Je me demande si vous avez des données ou des informations, notamment sur les poursuites vexatoires ou malveillantes et les dénonciations de maltraitance par vengeance, même entre voisins.
La documentation actuelle est très mince. Cela est courant, mais il y a très peu d'études sur ce phénomène. Je sais cela parce que j'ai participé à plusieurs études sur les dénonciations calomnieuses.
M. Faris : J'ai vu cela également dans mon cabinet. Je ne sais pas s'il existe des statistiques sur le sujet. Le problème est que les dénonciations faites aux services à l'enfance et à la famille sont confidentielles. Voilà la condition de base — les auteurs des dénonciations auprès des services à l'enfance et à la famille sont protégés. Leurs noms sont confidentiels, et ils ne peuvent être poursuivis. La recherche sur le sujet est donc pratiquement impossible, sauf contribution éventuelle d'un ex-employé des services à l'enfance et à la famille. Il est difficile d'envisager qu'une personne qui y a effectué toute sa carrière vienne se confier à vous et les trahir. Je ne connais aucune statistique sur ces dénonciations, sauf des données anecdotiques.
Pour ce qui est des dénonciations calomnieuses, il s'agit d'un problème grave. Je ne savais rien de leur fréquence avant d'ouvrir mon cabinet et de constater de moi-même. Lorsqu'une famille veut nuire à ses voisins avec qui elle vient de se disputer, elle fait généralement deux choses : elle appelle les services de protection des animaux pour leur dire que ses voisins battent leur chien ou les services à l'enfance et à la famille pour leur dire qu'ils battent leurs enfants. Cette situation est très malencontreuse, car ce sont des voies qu'il convient de garder ouvertes pour protéger les enfants. Pourtant, plus souvent que jamais, elle se reproduit, et elle est utilisée abusivement — j'ai vécu personnellement cette preuve anecdotique — par des gens en colère contre d'autres gens. C'est là une réelle inquiétude.
Quand elle se produit, cette situation désorganise complètement la famille. C'est tantôt une allégation de violence sexuelle, tantôt une allégation de violence physique. L'allégation doit alors être vérifiée. La famille est perturbée et les époux tendent à se désunir, doutant de l'autre, notamment dans le cas de violence sexuelle. Le père pourrait être inculpé, mais la mère ne serait toujours pas convaincue de sa culpabilité, car il n'existerait pas de réelles preuves. Comment être sûr?
La discorde de la famille ne cesse de croître, elle traumatise les enfants, parce qu'ils sont très souvent jeunes. Dans les cas de violence physique extrême ou de violence sexuelle, notamment, il faut parfois une fouille à nu ou une visite à un médecin inconnu pour vérifier les allégations, et cela est évidemment très difficile pour l'enfant. Les fausses allégations sont un énorme problème.
Nous le voyons dans notre travail de parents-maîtres. Très souvent, les voisins, voyant que les enfants ne sont pas à l'école, appellent les services à l'enfance et à la famille. Il faut alors beaucoup d'explications et de temps pour convaincre les services à l'enfance qu'il s'agit d'une situation normale et qu'ils n'ont pas à s'inquiéter.
Le sénateur Joyal : Monsieur Faris, avez-vous une copie du rapport de 1995 du Comité des droits de l'enfant des Nations Unies? Les paragraphes 14 et 25 semblent faire comme si le Canada conservait l'article 43 du Code criminel. Cela irait contre l'interprétation que le Comité des Nations Unies donne à la convention.
J'au crû comprendre que ces paragraphes avaient été pris en considération par la Cour suprême du Canada lors de l'affaire dans laquelle vous étiez l'un des intervenants.
M. Faris : J'en ai une copie, mais pas avec moi. Je serais heureux de vous retrouver le rapport. Est-ce le jugement de 1995?
Le sénateur Joyal : Oui. Je vois, d'après l'arrêt de la Cour que votre affaire a été entendue en juin 2003.
Il existe un autre rapport de l'ONU d'octobre 2003 que vous n'auriez pu ni invoquer ni présenter dans votre documentation parce qu'il n'avait pas encore été publié à l'époque. Puisque la Cour n'en a pas une connaissance d'office, elle aurait pu ne pas prendre en considération le second rapport.
Le point que j'essaie de clarifier est le suivant : le rapport de 2003 est en substance semblable par son paragraphe 32 au rapport de 1995 et ses paragraphes 14 et 25. J'essaie de vérifier si le fait que la Cour suprême n'a pas pris en considération le rapport de 2003 est substantiellement un oubli par rapport à ce qu'elle a pris en considération en 1995. Si le rapport de 2003 ne fait que répéter, plus ou moins, les paragraphes 14 et 25, alors le fait que la Cour suprême ne l'ait pas pris en considération n'a pas été déterminant dans sa conclusion. Voilà ce que j'essaie de clarifier.
M. Faris : Le rapport de 1995, si j'ai bonne mémoire, a été présenté à la Cour. C'est la chose intéressante à propos des tribunaux; je ne crois pas que ce rapport appelait à une interdiction du châtiment corporel au Canada. Je vais me procurer le rapport et je le remettrai au comité.
Le sénateur Joyal : Selon les éléments en ma possession, le comité a déclaré, pour ce qui est du paragraphe 32 du rapport 2003 qui répondait au deuxième rapport du Canada :
[...] qu'il est profondément inquiet que l'État partie ne se soit pas doté d'une loi qui interdise explicitement toute forme de châtiment corporel et n'a pris aucune mesure pour abroger l'article 43 du Code criminel, lequel autorise le châtiment corporel.
Autrement dit, si le comité est inquiet que l'État ne s'est doté d'une loi, cela signifie qu'ils le lui avaient demandé dans leur rapport antérieur. C'est ainsi que je l'interprète.
Le fait que la Cour suprême n'ait pas tenu compte du rapport 2003 n'a pas modifié son arrêt. Ce point est important pour comprendre que la preuve présentée aux neuf juges de la Cour suprême était essentiellement l'interprétation que la commission des Nations Unies donne à la Convention relative aux droits de l'enfant en ce qui concerne l'article 43.
Les juges auraient peut être décidé autrement s'ils avaient eu connaissance du rapport 2003. Personnellement, c'est ce dont je souhaite réellement me persuader à la lecture des paragraphes 14 et 25. C'est pour cela que je pose la question.
M. Faris : Je vais me procurer une copie de ce rapport et je vais y joindre une note qui répondra spécifiquement à cette question.
Le sénateur Joyal : Il s'agit spécifiquement des paragraphes 14 et 25, selon la référence que j'ai ici.
Mon second point fait suite à l'intervention du sénateur Pearson, qui est très précise, si je comprends bien notre situation. Il s'agit d'une question évolutive. L'attitude générale envers les enfants a changé et considérablement évolué dans les 20 dernières années, notamment depuis le suivi de l'exécution de l'objectif de la Convention. La Cour suprême a fait une interprétation très étroite de l'article 43. Comme le sénateur Andreychuk l'a dit, le Canada doit prendre part au processus de sensibilisation sur les droits des parents et leur attitude à utiliser la force sur leurs enfants.
Devons-nous, pour rester dans le courant de cette évolution, amender l'article 43 pour y inclure les paramètres que la Cour suprême a énoncés dans son arrêt?
J'ai lu le paragraphe 6 de votre mémoire, dans lequel vous reprenez certains passages de l'arrêt de la Cour suprême, et l'article 43 se lirait ainsi :
Tout père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondée à employer [...]
J'ajouterai :
[...] une force corrective légère, transitoire et négligeable [...]
Ce sont les mots de la Cour suprême.
[...] pour corriger un enfant [...]
Il s'agit d'un autre critère de la Cour.
[...] confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances
J'ajouterai :
[...] ne cause aucun préjudice et dévalorise pas l'enfant.
Ce sont les mots de la Cour suprême. En d'autres termes, qu'apporteraient ces amendements?
Ils reconnaîtraient que l'utilisation de la force est acceptable, mais dans un contexte limité et contraint. Ce contexte limité et contraint serait celui que la Cour suprême a énoncé dans son arrêt.
Je ne dis pas que c'est là la solution parfaite, parce que je comprends l'objectif global d'interdire toute forme de force. Par principe, comme certains le prétendent, l'enfant ne devrait être l'objet d'aucune force, pas plus que tout autre être humain. Je comprends cet argument. D'un autre côté, comme le sénateur Andreychuk l'a mentionné, à titre de société, le Canada a atteint un certain stade d'évolution. Le meilleur moyen pour nous de signaler notre place dans cette évolution serait de clairement énoncer dans l'article 43 le stade de notre évolution, qui est essentiellement
[...] une force corrective légère, transitoire et négligeable qui ne peut ni causer préjudice à l'enfant ni le dévaloriser.
Cet énoncé ne répondrait pas à l'objectif du sénateur Hervieux-Payette et de la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law, mais il aurait un but éducatif précis pour la société canadienne : faire connaître les contraintes qui gouvernent l'utilisation de la force, les objectifs et les conséquences de son utilisation.
Comment réagissez-vous à cette idée?
M. Faris : C'est raisonnable. Sous plusieurs aspects, cet énoncé serait éducatif. Il ne changerait pas réellement la loi. Ce serait simplement légiférer ce que la Cour suprême a déjà établi.
Il y a cependant un aspect négatif à cela : la Cour suprême a statué que le concept de ce qui est « raisonnable » évoluait. Les attitudes sociétales sur la fessée, surtout à cause des campagnes de sensibilisation, s'en écartent. Je m'attends à ce que dans 10 ou 20 ans, la Cour suprême restreigne davantage la défense de l'article 43 si les attitudes sociétales changeaient.
Si l'article 43 avait été ainsi amendé, il aurait eu l'effet de geler la définition dans la loi, bien que la Cour suprême du Canada eût pu la reformuler, je suppose. Ce serait une proposition raisonnable.
Le sénateur Joyal : D'après ma lecture de l'arrêt et des commentaires, la Cour a essayé de comprendre où se situaient les Canadiens par rapport à cette situation. C'est ce qu'elle a exprimé dans son arrêt. Elle a exprimé les zones grises. Ce n'est pas si simple. Des pas ont été faits dans cette direction. Personne ne remettra cela en question, mais nous sommes loin de notre destination.
Les défenseurs du projet de loi disent que nous devons lancer une campagne de sensibilisation. Nous ne savons pas si cette campagne sera lancée. Personne pendant la campagne contre l'article 43 n'a appelé les provinces à en faire une priorité, à la faire si elles ont en les moyens, et cetera, et cetera.
Si nous voulons faire quelque chose d'utile et d'efficace immédiatement, le moment n'est-il pas venu?
M. Faris : Ce serait raisonnable. L'amendement proposé doit être étudié plus en détail. Grosso modo, il légiférerait ce que la Cour suprême du Canada a établi.
Les commentaires sur la campagne de sensibilisation soulèvent plusieurs questions. Notre organisation interagit sur les questions juridiques avec les parents-enseignants. Nous avons décidé, chaque fois qu'une famille nous appelle ou que nous interagissons avec quelqu'un, si cela est possible, de faire connaître l'arrêt de la Cour suprême du Canada, ce qu'est le droit et où il en est. Il est surprenant que personne ne le connaisse réellement. Nous avons relativement bien réussi à éduquer nos membres et à leur faire prendre conscience de leurs comportements.
J'ai la même préoccupation que vous. On nous dit toujours qu'une campagne de sensibilisation est en voie de préparation, mais pendant ce temps là, les problèmes n'attendent pas.
Le sénateur Gustafson : Ma question a fait suite à un entretien téléphonique que j'ai eu ce matin sur l'éducation et son importance. Le sénateur Joyal a vu juste.
Je parlais à un représentant de la Commission canadienne du blé et il me disait qu'il était très préoccupé par le suicide chez les fermiers. Il y a eu quatre suicides non loin de chez moi, à cause de la mauvaise conjoncture de l'agriculture. Il me dit qu'on en lui parle chaque jour.
Avec la mauvaise conjoncture sont venus la violence familiale, la pauvreté et autres problèmes que la société n'a pas encore reconnus. Nous devons commencer à regarder les causes de ces événements, où a lieu la maltraitance des enfants, et cetera. Vous ne pouvez pas me dire, dans une famille où le père se suicide, qu'il n'y a pas de tensions et que ces tensions ne durent pas depuis des années.
J'ai été surpris qu'Aaron Gross, notre représentant à la Commission canadienne du blé, me pose cette question. Il m'a dit : « Len, je ne supporte plus de répondre au téléphone; cela n'arrête pas, c'est problème sur problème. Certains fermiers me disent d'aller dans un sens, d'autres d'aller dans le sens contraire. Les Canadiens ne les écoutent pas, ils leur ont tourné le dos et ne veulent plus entendre parler de leurs problèmes. » Je suis d'accord avec lui.
L'éducation est une lourde tâche. Comment allons-nous gérer les problèmes économiques, la pauvreté et les causes du problème? Pour moi, la priorité est là. Je l'affirme.
M. Faris : Vous soulevez un excellent point, parce que la maltraitance et la violence sont extrêmes; mon sentiment personnel est qu'il vaudrait mieux investir les ressources dans le combat contre cette forme extrême. Il y tant d'enfants qui vivent des situations terribles.
Comme vous l'avez mentionné, sénateur, la famille est soumise à beaucoup de tensions et de stress et les oiseaux de malheur montrent leur nez, comme le suicide et la violence. C'est dans ces situations que les enfants sont violentés, non lorsqu'ils reçoivent à l'occasion une fessée de la part de parents concernés.
Nous pouvons nous demander si c'est bien ou mal. Je ne prends pas position, si ce n'est pour dire que je ne crois pas qu'il soit bien de criminaliser la fessée. Nous devons nous concentrer sur les situations extrêmes dans lesquelles nos enfants sont violentés.
Le sénateur Cools : Le sénateur Gustafson et le témoin ont donné un visage au problème. Il y a deux ou trois mois, une mère est venue me dire qu'elle avait presque estropié son fils avec un objet qu'elle lui avait lancé. Elle a en été traumatisé, mais elle a appris la leçon.
Nous devons comprendre que les êtres humains vivent dans un monde réel, essayant de joindre les deux bouts, vivant de chèque de paie en chèque de paie. Les causes de stress sont nombreuses. Je crois fermement que l'on ne peut invoquer le Code criminel si le comportement n'est pas flagrant.
Le sénateur Hervieux-Payette : Puisque vous commencez votre mémoire en disant que vous êtes fermement opposé à la maltraitance des enfants et à la violence qui leur est faite, j'aimerais vous renvoyer à l'Étude canadienne sur l'incidence des signalements de cas de violence et de négligence envers les enfants publiée par Santé Canada. L'étude montre que dans la majorité des cas la violence physique commence par le châtiment corporel.
Il existe également une étude par un groupe américain appelé Violence and the American Family. Le conseil d'administration du groupe est composé de différents professeurs des départements de psychologie de différentes universités américaines : Harvard, Massachusetts, Miami, Wisconsin, John Hopkins, Kansas, Chicago et Californie. Tout cela pour dire qu'il est constitué de gens venus des quatre coins des États-Unis. Dans la même veine, le rapport note :
La culture américaine favorise actuellement la perception que la violence et la docilité provoquée par la peur permettent d'atteindre l'objectif à court terme qui consiste à contrôler le comportement des autres ... L'examen des attitudes qui prônent l'utilisation de la violence contre les membres de la famille dans la culture américaine doit également tenir compte des expériences religieuse et parentale qui prônent le châtiment corporel et de mesures de discipline à l'égard des enfants.
Il ajoute, plus loin encore :
Le lien étroit qui existe dans la recherche entre l'utilisation du châtiment corporel et de la maltraitance de l'enfant suggère qu'il faut prêter davantage attention à la prévention de la « fessée » et autres formes de mesure de discipline physique. Ainsi, les professionnels de la santé devraient notamment s'informer de mesures de discipline alternatives pour mieux guider les comportements des parents.
J'aimerais, madame la présidente, déposer ce rapport.
Il nous faut regarder le contexte social canadien et le degré de violence de nos sociétés. Dans un rapport sur la criminalité, j'ai lu qu'il en est commis 12 658 par an aux États-Unis, contre 489 au Canada. Si nous mettons ces chiffres en pourcentage, nous pouvons dire que les Américains sont 300 p. 100 plus violents que nous.
Si les spécialistes américains et notre propre gouvernement rapportent que la maltraitance des enfants commence avec le châtiment corporel léger, j'aimerais savoir pourquoi vous continuez à dire que nous avons besoin de l'article 43. Après tout, l'article 43 ne fait que justifier plus ou moins la poursuite de la pratique de la fessée.
À moins de nous faire parvenir un autre rapport, je ne vois rien dans ce que nous avons qui nous montre les aspects positifs de la poursuite de la pratique du châtiment corporel.
M. Faris : Je demande instamment au Sénat d'entendre les professeurs Larzelere et Baumrind. Ils seront très utiles. Le professeur Larzelere connaît très bien la situation. Il serait très intéressant et très instructif de lui parler. Je ne suis pas un chercheur en sciences sociales. J'ai essayé de m'informer sur le sujet, mais personne ne pourrait mieux que lui répondre à votre question, sénateur.
La recherche a connu de graves problèmes parce que les termes eux-mêmes varient très souvent. Lorsqu'une étude appelle châtiment corporel « toute action physique exercée contre un enfant dans le but de le rendre docile », une autre parle de « deux tapes sur la fesse ». Il existe un grand nombre de définitions du châtiment corporel et autant d'études que de définitions. Il n'est pas surprenant, alors, que les conclusions soient aussi diverses.
La dernière étude du professeur Larzelere traite de 13 différentes formes de punition, allant de la suspension aux cris. L'étude montre qu'en matière de docilité, le châtiment corporel arrivait dans les trois premières formes et qu'il se situait dans les quatre premiers en matière de réalisation des résultats désirés. Il s'agit de la plus récente recherche du professeur Larzelere sur le sujet.
Je demande instamment que vous parliez à quelqu'un comme lui, afin que vous ayez une connaissance étendue de la recherche. Il pourrait concevoir des situations pour le comité.
Le sénateur Cools : Le professeur Larzelere a commencé ses études à l'Université du New Hampshire, au laboratoire sur la violence familiale, sous les auspices du professeur Murray Straus, je crois, n'est-ce pas?
M. Faris : Tout à fait.
Le sénateur Cools : C'est une mine de savoir.
Nous devrions inclure dans ces études des variables ethniques, physiques et culturelles. Ces variables pourraient nous donner une image plus juste.
Lorsque l'on étudie le meurtre, la mort, et cetera, on doit également comprendre qu'il y a des facteurs de décès qui sont toujours soigneusement dissimulés. Je continue de penser que les 4 000 hommes cas de suicide annuels, certains sont des meurtres. On ne peut étudier que ce que l'on a.
Le sénateur Hervieux-Payette : Je suis tout à fait d'accord. Madame la présidente sait que j'aimerais appeler à témoigner certains experts canadiens. J'aimerais également déposer deux études de la professeure Durrant de l'Université du Manitoba. La professeure Durant part en Suède passer un septième été à travailler sur ce sujet.
J'ai ici une très courte conclusion de sa dernière étude, datée du 9 octobre 2004. Je pense qu'elle réfutera tout ce qu'a dit le professeur Larzelere, lequel n'a jamais mis les pieds en Suède. La professeure Durrant y a passé les sept derniers étés à réfléchir spécifiquement sur cette question.
La professeure Durant cite des preuves à l'effet que la violence envers les enfants a diminué en Suède au cours des dernières décennies. Elle note que les parents suédois sont moins susceptibles de battre leurs enfants que les parents nord-américains et moins susceptibles de juger leur acte comme constructif ou nécessaire lorsqu'ils les battent.
Le nombre d'actes de violence grave est très faible en Suède, comme l'atteste le nombre moyen annuel d'homicides d'enfants de moins de 5 ans, quatre depuis 1975, en raison notamment de la quasi non existence de la maltraitance physique en Suède.
En conclusion, les preuves puisées dans plusieurs sources montrent que la Suède a réussi à réduire le nombre de cas de violence contre les enfants en réformant ses lois et en éduquant ses citoyens.
Je suis d'accord avec tout le monde sur l'éducation, mais je veux m'assurer que l'on inscrit au dossier que la loi sur le châtiment corporel a été modifiée en 1957. La loi qui a été modifiée en 1979 concernait l'aspect social de la protection de l'enfance. Ce sont deux lois différentes qui ont été votées, et leur histoire est conséquent plus longue que nous le croyons.
Je vais distribuer deux études qui complètent à mon avis l'étude du professeur Larzelere.
Hier, le Conseil de l'Europe a adopté une résolution pour répondre aux plaintes relatives aux droits de la personne formulées contre cinq pays. Le Comite européen des droits sociaux a confirmé l'interdiction par les cours suprêmes italienne et portugaise du châtiment corporel. Certains pays comme la Belgique, la Grèce et l'Irlande ont été avertis qu'ils contrevenaient à leur obligation sur les droits de l'homme.
La décision du comité fait suite aux plaintes soumises en 2003 par l'Organisation mondiale contre la torture. Il s'agit d'une affaire très sérieuse. C'est pour cela que j'aimerais voir le Canada suivre cette voie, qu'il nous soit dit de modifier notre droit parce que nous ne nous conformons pas à un autre traité. Ce traité établit que le droit dans ces pays n'a pas réussi à protéger les enfants contre le châtiment corporel et autres traitements humiliants.
Ils ont dit :
Nous accueillons favorablement ces arrêts novateurs qui devraient donner à tous les enfants européens le même droit de protection contre les violences physiques et les humiliations dont jouissent les adultes à leur égard. Ils font avancer l'Europe vers une zone libre de tout châtiment corporel, où le droit de l'enfant à une protection équitable est respecté.
Pour moi, il ne s'agit pas uniquement d'une affaire de droit. La question des traités ne se posera plus lorsque nous saurons les inscrire dans nos lois. Ceux d'entre nous qui ont une formation juridique savent que nous n'abandonnons pas notre souveraineté lorsque nous signons un traité. Nous avons toujours la liberté de nous y conformer ou de ne pas nous y conformer. Nous avons vu de nombreux pays ne pas se conformer, notamment en matière de droit de la personne. Le Canada respecte généralement ses engagements et se conforme.
J'aimerais vous voir réagir. Vous parliez d'environ 190 pays. Je suis d'accord que le reste du monde n'avance pas au même rythme que le Canada en matière des droits de la personne, mais il y a actuellement 16 pays européens qui s'y conforment. Vous avez déclaré que cela était quasi inexistant. En fait, le Conseil de l'Europe contraint tous les pays signataire à s'y conformer.
Ils sont peut être en avance sur d'autres pays, mais leur signature a été respectée. Certains pays n'ont pas encore ratifié le traité sur les droits de l'enfant.
Comment pouvons-nous concilier cela avec votre position qui consiste à dire que la Cour suprême a énoncé cela?
Comme l'a mentionné le sénateur Joyal, le rapport des Nations Unions n'a pas été présenté à la Cour suprême. Devrions-nous nous y conformer ou devrions nous attendre d'être cité comme contrevenant à un autre traité?
Je serais honteux, à titre de parlementaire et de Canadien, de nous voir dire que nous ne respectons pas notre engagement parce que nous permettons encore le châtiment corporel.
M. Faris : J'aimerais faire quelques commentaires sur l'étude de la professeure Durrant. Ces statistiques ont fait l'objet d'une réponse directe dans une lettre du professeur Larzelere, et j'ai inclus cette lettre dans mes éléments matériels.
La réponse commence à la page 2 de la lettre, chapitre « Évaluation de la décision par la Suède d'interdire la fessée en 1979 ». Le professeur Larzelere y répond point par point. Il admet que lui et la professeure Durrant étudient tous deux le cas de la fessée en Suède et qu'ils sont arrivés à des conclusions opposées.
La raison se trouve dans les tableaux qu'ils montrent. Je pourrais peut être en lire une partie. Il félicite d'abord la professeure Durrant d'être une excellente chercheure. A la page 2 de sa lettre, parlant de la Suède, le professeur Larzelere déclare :
Le seul groupe d'âge d'auteurs de voies de fait qui fut élevé entièrement après l'interdiction de la fessée en 1979 comptait 718 voies de faits graves contre des mineurs en 1994, soit une augmentation de 519 p. 100 depuis 1984, une augmentation beaucoup plus importante que celle de tout autre groupe d'âge d'auteurs. La seconde augmentation en pourcentage concernait celle des 15-19 ans en 1994, lesquels avaient entre 0 et 4 ans lorsque la fessée fut interdite.
Et de poursuivre :
Comment la professeure Durrant a-t-elle pu conclure que le nombre des jeunes auteurs augmentait plus lentement que celui des auteurs plus âgés? Elle a fait cela en incorporant dans le plus jeune groupe les individus dans leur vingtaine, ce qui incluait le groupe des auteurs qui avaient connu la plus faible augmentation, celui des 25-29 ans en 1994.
Voilà qui explique plus ou moins les écarts dans les résultats; cela dépend du groupe que vous considérez.
En ce qui concerne les 16 pays européens qui ont fait cela, je suis un peu gêné parce que je ne suis pas au courant de l'arrêt d'hier.
J'ai mes idées. Comme vous l'avez mentionné, nous sommes notre pays et nous devons nous attaquer à nos propres problèmes et décider ce qui est le mieux pour nous. L'Europe a une dynamique sociétale très différente de la nôtre, tout comme les États-Unis. Nous devons nous attaquer à nos problèmes et décider ce qui est le mieux pour le Canada.
Je suis curieux de savoir si les 16 pays européens ont traité les problèmes en se référant à leur code criminel ou à leurs lois sur les services à l'enfance et à la famille, qui sont moins intrusives.
Le sénateur Hervieux-Payette : Ne pensez-vous pas que le comportement des citoyens change avec le droit? Je pense au Code criminel et à l'augmentation de la peine de conduite en état d'ivresse, ou encore à la loi sur le contrôle des armes à feu ...
Ce ne sont pas uniquement les campagnes de sensibilisation qui changent les choses favorablement. Parfois, les lois font cela très bien.
M. Faris : J'admets qu'il faut parfois des réformes législatives pour changer le comportement des gens. J'aimerais formuler deux remarques à cet égard.
Nous avons une situation qui diffère du comportement haineux ou préjudiciable comme la conduite en état d'ivresse. Dans ce cas, les preuves sont contradictoires, selon de nombreux experts. Nous alléguons que ce comportement est préjudiciable, et certains allègueraient le contraire, mais les trois échelons du système judiciaire reconnaissent, en se fondant sur la majorité des chercheurs, qu'une fessée raisonnable ne semble pas être préjudiciable. Nous ne parlons pas de quelque chose qui est apparu ou qui a été vérifié comme haineux ou destructif à la société.
Deuxièmement, juste pour réitérer ce que la Cour suprême du Canada a déclaré : le Code criminel est un instrument émoussé. Oui, cela sensibiliserait davantage, mais je ne crois pas que la criminalisation des parents soit le meilleur moyen de sensibiliser davantage. Il existe des moyens meilleurs et moins intrusifs.
La présidente : Merci monsieur Faris. Puisque vous n'avez pas utilisé tout votre texte dans votre présentation, nous le déposerons officiellement.
La séance est levée.