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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 17, Témoignages du 2 juin 2005 - Séance du matin


REGINA, le jeudi 2 juin 2005

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 9 heures, pour examiner des questions concernant la santé mentale et la maladie mentale.

Le sénateur Wilbert J. Keon (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Mesdames et messieurs, le sénateur Callbeck et moi-même représentons les membres du comité ce matin. Le sénateur Callbeck a été ministre de la Santé de l'Île-du-Prince-Édouard et, évidemment, ancien premier ministre de cette province. Pour ma part, j'ai travaillé dans le domaine de la médecine avant de devenir sénateur, et ce jusqu'en avril dernier.

Nous allons commencer ce matin par le témoignage de M. Thomas Bartram.

M. Thomas Bartram, membre, de la Société de la schizophrénie de la Saskatchewan : Bonjour. J'ai transmis certains documents au sénateur Kirby; vous devriez donc avoir une copie de cette lettre.

J'aimerais d'abord souligner le fait que le régime d'assurance-médicaments de la Saskatchewan paie une partie de mes médicaments. Tous les mois, je dois payer 17 p. 100 de ce que coûte le Zyprexa. Ce médicament coûte environ 300 $ par mois. Par conséquent, le régime d'assurance-médicaments augmente beaucoup mon revenu en ce moment.

Je reçois actuellement une pension d'invalidité du RPC, et j'aimerais vous dire comment j'en suis venu à toucher cette pension. Je vous prie de m'excuser de ne pas avoir joint une copie de cette lettre aux documents que je vous ai fournis.

J'ai commencé à recevoir une pension le 23 juillet 1992. Je savais que d'autres membres de notre groupe, By Ourselves, en recevaient une aussi. Puisque j'avais de la difficulté à obtenir des documents sur les conditions du régime, j'ai appelé le Parti libéral de la Saskatchewan qui a communiqué ensuite avec le RPC. J'ai reçu une lettre disant « À la suite de notre conversation téléphonique, le... », et cetera.

J'ai ensuite montré cette lettre, ainsi que la copie de la lettre du gouvernement du Canada que vous avez entre les mains, à un membre de ma famille qui est juge à la Cour supérieure. Il m'a dit qu'à son avis, on venait de me faire une offre. J'ai donc écrit au ministre du Développement des ressources humaines pour savoir en vertu de quelle disposition l'offre m'avait été faite, et j'ai reçu une réponse.

Un membre de mon organisation m'a dit que le directeur du Régime de pensions du Canada s'appelait Nancy Lawand. J'ai communiqué avec Mme Lawand et lui ai envoyé une copie de certains documents. J'ai également demandé des précisions sur le sens de « une occupation véritablement rémunératrice » et sur d'autres conditions du régime de pension.

Elle m'a répondu par écrit; j'ai ensuite pu déterminer que je pouvais travailler comme chauffeur de taxi pendant deux quarts de travail, à raison de 10 heures par quart. J'ai donc été soumis à ce qui se semble être un processus de réévaluation aléatoire. Je croyais que je pouvais suppléer mon revenu tout en continuant de recevoir des prestations, ce qui m'était nécessaire puisque je ne peux tolérer trop de stress, et je ne voulais pas être jugé inadmissible à recevoir des prestations du régime.

J'ai ensuite reçu une lettre dans laquelle on me remerciait d'avoir fourni d'autres renseignements permettant de déterminer mon admissibilité au Régime de pensions du Canada et qu'on me disait que le personnel responsable de l'évaluation des demandes avait déterminé, après avoir examiné ces données, que mes prestations pouvaient se poursuivre. On me disait aussi de les aviser si mon état s'améliorait ou si mon nombre d'heures de travail ou mon taux de rémunération augmentait.

Étant un chauffeur de taxi, je suis un travailleur autonome. Je dois louer la voiture à raison de 50 $ par quart de travail et je paie l'essence. Mon revenu est déterminé par le nombre de clients ou la crise du jour. Je voulais seulement préciser ça.

Je veux également commenter la décision R. c. Emerson Bunnar, au Nouveau-Brunswick, et la décision Starson c. Swayze, qui a forcé le Parlement à revoir le Code criminel du Canada pour ce qui touche les personnes souffrant de troubles mentaux. J'aimerais que cette loi soit revue. À l'heure actuelle, la loi de la Saskatchewan, la Mental Health Services Act, reprend une bonne partie des pouvoirs de cette loi dans la mesure où un psychiatre qui traite un patient souffrant de schizophrénie réfractaire peut garder indéfiniment cette personne à l'hôpital psychiatrique de North Battleford ou jusqu'à ce que les symptômes aient été maîtrisés.

En ce qui a trait aux dispositions concernant la durée maximale, je pense qu'on pourrait imposer un maximum au Code criminel si les autres provinces adoptaient une loi semblable à celle de la Saskatchewan.

En ce qui a trait à l'administration de la loi, dans l'affaire R. c. Patty Clark, des accusations beaucoup moins sérieuses de fraude ont été portées contre elle, notamment en ce qui concerne le logement, des courses en taxi et de la nourriture. En tant que membre de By Ourselves, à Regina, j'ai assisté à son procès. Le juge ne savait pas trop quoi faire avec une personne si gravement malade et accusée de délits si mineurs. Le psychiatre n'a pas témoigné, ce qui a nui à la procédure, et elle a été envoyée au centre correctionnel de Pine Grove pour 30 jours en attendant son procès. Elle a été hospitalisée là-bas dans l'aile psychiatrique.

Comme je l'ai déjà dit auparavant à un juge, je crois que c'est du harcèlement puisqu'un juge peut maintenant exiger, sans avoir fait appel à un psychiatre, une détention préventive de 30 jours dans un hôpital de la Saskatchewan pour qu'une personne soit évaluée psychologiquement et obtenir un rapport écrit.

Dans cette affaire, le juge, le procureur et l'avocat de la défense étaient tous d'accord pour dire que le temps passé en détention était suffisant pour les délits qui lui avaient été reprochés. Elle a été néanmoins adressée à un psychiatre en vertu de la Mental Health Services Act après que le juge a rendu un non-lieu.

Dans une autre affaire, R. c. David Thompson, on disait que les symptômes de M. Thompson s'étaient aggravés, puis qu'il avait agressé des gens du centre d'accueil. Il a été accusé de voies de faits et condamné à une peine d'emprisonnement au centre correctionnel de la province. Son travailleur social a pris des dispositions pour qu'il soit détenu dans un hôpital de la Saskatchewan, à North Battleford, étant donné que le centre correctionnel était un environnement trop hostile pour une personne en plein traitement.

Par la suite, il a été libéré et a dû se soumettre à une ordonnance de traitement en milieu communautaire; s'il ne se présentait pas pour une injection ou n'était pas à son domicile, le psychiatre pouvait demander à la police de l'arrêter et de l'amener à l'hôpital.

Je crois que le comité devrait suivre de près la façon dont la loi est appliquée et que le Code criminel devrait être revu à la lumière d'études de cas de personnes souffrant de troubles mentaux.

Si vous avez des questions, n'hésitez pas.

Le vice-président : Vous avez présenté votre point de vue très clairement, monsieur Bartram, et l'avez très bien appuyé. Nous avons l'enregistrement complet de votre témoignage. Je vais en discuter davantage avec le comité et voir ce que nous pouvons faire. Je suis certain que vous comprenez que ce serait une démarche très complexe, mais nous verrons ce que nous pouvons faire.

M. Bartram : Merci beaucoup.

Le sénateur Callbeck : Vous avez dit ne payer que 17 p. 100 du coût de vos médicaments même si vous ne recevez pas de prestations d'aide sociale. Est-ce ainsi depuis longtemps?

M. Bartram : C'est ainsi que fonctionne le régime d'assurance-médicaments de la Saskatchewan. À une époque, le gouvernement avait un régime d'assurance-médicaments pour tous, mais en raison de restrictions budgétaires, il a déterminé que l'admissibilité au régime serait fondée sur le revenu.

Le sénateur Callbeck : Dans bon nombre de provinces, il faut recevoir de l'aide sociale pour que les médicaments soient payés.

Le vice-président : Nous allons maintenant céder la parole à Carol Solberg.

Allez-y.

Mme Carol Solberg, directrice administrative, Société de la schizophrénie de la Saskatchewan : J'aimerais d'abord remercier le comité de me permettre d'exprimer certaines des préoccupations de mes collègues et des gens de la Saskatchewan.

Depuis au moins 35 ans, j'interviens dans le domaine de la santé mentale auprès de familles et de clients. Pendant 30 ans, j'ai travaillé comme infirmière psychiatrique à l'unité des soins psychiatriques pour les malades hospitalisés à l'hôpital général. Depuis les cinq dernières années, j'offre des services de counselling et d'éducation au sein de la Schizophrenia Society of Saskatchewan. Maintenant, j'y travaille à titre de directrice administrative. La majeure partie de ce que j'ai à dire aujourd'hui reflète les inquiétudes dont m'ont fait part des familles et des clients.

Il faut absolument un plan concernant la santé mentale et les dépendances à l'échelle fédérale et provinciale pour assurer une meilleure coordination des services. Ce plan doit être suffisamment souple pour tenir compte des besoins des clients, ou si vous voulez, des patients. Dans le passé, les gens ayant besoin de services devaient satisfaire aux critères des programmes en place. Je crois que nous devons d'abord cerner les besoins pour ensuite élaborer des programmes qui y répondent et sont plus efficaces.

Je crois que vous avez une copie de notre bref mémoire. Je n'aborderai probablement pas toutes les questions car ce serait trop compliqué et trop long, mais si ça vous intéresse, nous pourrons en discuter plus tard.

Une de nos préoccupations, c'est l'accès aux services. Les personnes qui montrent des symptômes graves ne peuvent pas se permettre d'attendre des semaines ou des mois pour obtenir des services. Ils ont parfois besoin d'aide dans les heures ou les jours qui suivent. Ça peut prendre jusqu'à trois mois en Saskatchewan pour voir un psychiatre.

Récemment, à Regina, une personne extrêmement déprimée a été adressée par son médecin à un psychiatre, mais celui-ci ne pouvait la voir que dans trois mois. Heureusement, j'ai pu intervenir pour lui permettre de consulter un psychiatre dans les quelques jours qui ont suivi. Après trois mois, elles se sentait mieux et était de retour dans son poste d'enseignante. Je crois que cet exemple illustre clairement l'efficacité d'une intervention rapide. On peut non seulement aider les gens à mieux se sentir, mais aussi à réintégrer leur travail. Les longues listes d'attente pour consulter un psychiatre sont un problème. Nous avons vraiment besoin davantage de psychiatres.

Une autre grande préoccupation, c'est le temps d'attente à l'urgence pour les gens souffrant de maladie mentale ou de dépendance. Il n'est pas suffisant d'avoir une infirmière psychiatrique à l'urgence qui travaille cinq jours par semaine, de 9 heures à 17 heures. Les gens ne tombent pas nécessairement malades entre 9 heures et 17 heures, du lundi au vendredi. En prolongeant la plage horaire, ça permettrait non seulement d'alléger la charge de travail à l'urgence, mais aussi d'aider les gens qui sont malades à obtenir les services appropriés dans la collectivité au moment opportun sans devoir être vus ou évalués par un psychiatre.

Hier, j'ai parlé à une infirmière qui travaille à l'urgence. Elle m'a dit qu'en une journée, elle avait vu 10 personnes, mais qu'une seule avait vraiment besoin de voir un psychiatre. Les autres ont pu quitter rapidement la salle d'urgence. C'est une façon très efficace de gérer les crises. Souvent, les gens qui se rendent à l'urgence n'ont pas besoin de voir un psychiatre ou d'être hospitalisés; ils n'ont besoin que d'une certaine intervention. C'est une façon très rentable de gérer un problème difficile à l'urgence.

Nous avons vraiment besoin d'augmenter nos ressources dans la collectivité. Si nous en avions suffisamment, bon nombre de crises pourraient être évitées puisque les gens seraient dirigés vers les bonnes ressources.

La Phoenix Residential Society est un centre doté d'un service de garde 24 heures par jour. Ça serait utile si quelques lits étaient réservés à des cas urgents. Ainsi, une personne pourrait être évaluée et occuper un de ces lits. Souvent, les crises ne durent pas longtemps, mais ça ne veut pas nécessairement dire qu'une personne est dans un état de psychose ou de maladie mentale grave; elle vit peut-être tout simplement une situation difficile dans sa vie. Si ces gens avaient un endroit supervisé pour y séjourner quelque 72 heures, ça serait probablement suffisant et plus rentable que de les envoyer à l'hôpital ou, parfois, en prison.

Il arrive souvent que des gens atteints de maladie mentale aient des démêlés mineurs avec la justice et aboutissent en prison, comme Thomas l'a mentionné; c'est inapproprié et ça nous préoccupe.

La Société de la schizophrénie de la Saskatchewan et l'Association canadienne pour la santé mentale ont mis sur pied un comité directeur pour examiner la possibilité d'une réforme du système judiciaire en vue d'établir quelque chose qui s'apparenterait à un tribunal de la santé mentale. Nous ne savons pas encore quelle direction prendront leurs travaux, mais nous croyons qu'il faudrait établir un système où l'on tient compte de la santé mentale des gens dans le cadre de procédures judiciaires. Cela permettrait à une personne atteinte d'une maladie mentale qui enfreint la loi d'être vue et évaluée par un psychiatre ou un autre intervenant approprié. Elle pourrait ainsi recevoir le traitement qui convient au lieu d'être envoyée en prison. Ce serait non seulement préférable, mais aussi très rentable. Nous savons tous qu'il y a actuellement beaucoup de personnes dans nos prisons qui souffrent de maladie mentale.

Le logement est également un problème important pour les gens qui souffrent de troubles mentaux et qui n'ont pas assez d'argent pour vivre dans un endroit convenable. La plupart des gens qui reçoivent de l'aide sociale vivent dans de très petits logements, souvent dans des quartiers pas toujours très sécuritaires. Les logements sont parfois insalubres et ne favorisent pas une bonne santé mentale. Je crois que quiconque jouissant une bonne santé mentale, mais qui vivrait dans ce genre de conditions finirait par être malade ou, à tout le moins, déprimée.

La Phoenix Residential Society, ici à Regina, offre un abri aux gens et est dotée d'un service de garde 24 heures par jour. Le but est d'amener les gens à devenir indépendants avec un minimum de soutien.

Beaucoup de parents doivent compléter le revenu de leurs enfants qui reçoivent de l'aide sociale et se demandent, avec raison, qui s'en occupera lorsqu'ils ne seront plus là.

Nous savons aussi qu'un diagnostic et un traitement précoces sont extrêmement importants dans tout cas de maladie mentale. À l'heure actuelle, la Société de la schizophrénie de la Saskatchewan et l'Association canadienne pour la santé mentale ont un comité directeur qui se penche sur l'intervention précoce dans le cas de psychoses. Des programmes semblables existent ailleurs au Canada et dans le monde, et nous les examinons pour voir si certains conviendraient à la Saskatchewan.

L'éducation et la sensibilisation sont nécessaires, et nous persistons à faire des efforts de ce côté. Nous devrions aussi travailler avec les écoles; un système devrait être mis en place pour permettre aux jeunes d'être évalués et soignés au moment opportun.

On m'a dit qu'à Winnipeg la période d'attente la plus longue était de sept à dix jours, mais que la plupart du temps, les gens étaient vus en dedans de deux ou trois jours. C'est ce genre de délai que nous devons viser en Saskatchewan. Ce serait un bon investissement dans la jeunesse. Si les jeunes pouvaient être évalués et traités rapidement, ils n'auraient peut-être pas besoin de manquer des jours d'école et pourraient par la suite entrer sur le marché du travail et vivre une vie productive sans avoir perdu du temps en raison d'une maladie. Dans de nombreux cas, lorsque quelqu'un tombe malade, ça prend quelques années avant qu'il soit évalué et soigné. Beaucoup de temps peut s'écouler, ce qui représente des années perdues pour bon nombre de personnes. Voilà pourquoi nous insistons pour que les jeunes soient évalués et traités rapidement.

La stigmatisation est également une autre inquiétude. Nous croyons que si nous pouvions collaborer davantage avec les médias pour éduquer et sensibiliser la population, nous pourrions enrayer les préjugés entourant la maladie mentale. La Société de la schizophrénie de la Saskatchewan a un programme de partenariat; nous en parlons d'ailleurs dans le dépliant jaune que nous vous avons remis. Nous allons dans la collectivité en équipes de trois : une personne qui souffre de schizophrénie, un membre de la famille et un professionnel de la santé mentale. Nous essayons d'atteindre les élèves du secondaire. Nous parlons aux cadets de la GRC, à la police municipale, aux étudiants universitaires, à ceux de la Saskatchewan Institute of Applied Technology et allons partout où on veut bien nous écouter. Nous avons un programme semblable à Saskatoon.

Nous croyons que l'éducation et la sensibilisation jouent un rôle clé pour enrayer les préjugés et aider les gens à reconnaître les premiers symptômes de schizophrénie chez des membres de la famille. Lorsque nous donnons une conférence dans les écoles, ce sont des jeunes qui viennent nous dire qu'ils ont des symptômes qui s'apparentent à ceux dont nous avons parlé; nous les encourageons donc à obtenir de l'aide. Nous croyons que ce programme est très efficace.

Nous avons besoin de soutien financier pour tenir certaines des activités dont je vous ai parlé et pour former un nombre satisfaisant de personnes pour nous aider à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés : psychiatres, infirmières psychiatriques, travailleurs sociaux, psychologues. L'idée principale derrière notre présentation aujourd'hui, c'est que si nous avions les ressources communautaires nécessaires, si nous pouvions sensibiliser davantage les gens et si nous avions d'autres systèmes en place, comme une réforme judiciaire et des mesures d'intervention précoce, moins de gens seraient admis dans les hôpitaux et les prisons, ce qui coûte très cher et n'est pas la meilleure façon d'aider les patients. Nous espérons qu'ainsi les gens pourront avoir une meilleure vie dans leur collectivité, ce qui est notre objectif.

Le vice-président : Hier, nous avons entendu un groupe de Brandon. Cette municipalité a un excellent programme communautaire en santé mentale. À mon avis, c'est le meilleur au Canada dont j'ai entendu parler jusqu'à présent. L'infrastructure communautaire a été organisée de façon à ce qu'on puisse traiter des choses dont vous parlez. Il n'y a pratiquement aucun délai d'attente avant d'accéder au programme. Une équipe de soins de santé généraux a été mise sur pied. Il n'y a pas de psychiatre à temps plein à Brandon, mais il y en a un qui vient quelques fois par semaine de Winnipeg. On trouve des infirmières spécialisées, des psychologues, des travailleurs sociaux et d'autres travailleurs de la santé, et les patients ont accès aux services 24 heures sur 24, dans la communauté. Ce programme est combiné aux services communautaires et sociaux à Brandon, alors si quelqu'un a besoin d'une aide financière provisoire, d'un logement ou de nourriture, on peut voir à toutes ces choses.

Comme vous êtes relativement près, je vous recommanderais de communiquer avec eux. Vous pourriez en apprendre beaucoup relativement aux plans que vous entreprenez. Notre personnel peut vous aider à communiquer avec les responsables.

Le sénateur Callbeck : Carol, je vous remercie de votre exposé. J'adhère tout à fait à ce que vous avez dit.

Je ne crois pas que vous ayez parlé de l'accès aux services dans les régions rurales. La télépsychiatrie est-elle utilisée en Saskatchewan?

Mme Solberg : Non. C'est une chose qui sera étudiée, je crois.

Sur le plan de l'éducation, la Société de la schizophrénie de la Saskatchewan songe à utiliser la nouvelle technologie pour informer les familles et d'autres personnes.

Le sénateur Callbeck : Je suis moi-même originaire d'une région rurale, alors je suis très sensible à cette suggestion.

Je conviens également que nous devons faire davantage pour mettre fin aux préjugés existants. Vous avez parlé des médias et du programme de partenariat. Ce programme existe-t-il depuis longtemps?

Mme Solberg : Le programme de partenariat en Saskatchewan existe depuis environ six ans. Il a vu le jour en Colombie-Britannique environ deux ans auparavant. Nous avons maintenant rejoint 25 000 personnes avec nos présentations. Nous avons encore bien du chemin à parcourir et nous pourrions faire beaucoup plus si nous étions plus nombreux.

Le sénateur Callbeck : Vous avez dit que vous alliez dans les écoles. Vous adressez-vous à des classes en particulier?

Mme Solberg : Nous parlons surtout aux élèves de huitième, neuvième et dixième années et aux élèves des écoles secondaires.

Le sénateur Callbeck : Ce programme est-il efficace?

Mme Solberg : Je crois qu'il est très efficace. Il rejoint les enseignants également, en ce sens qu'ils peuvent dépister un élève qui a besoin d'intervention. Nous recevons des commentaires des élèves qui nous disent qu'eux-mêmes ou des amis présentent peut-être les mêmes symptômes. Ils savent maintenant qu'ils peuvent communiquer avec nous et qu'ils peuvent obtenir de l'aide. Ces élèves sont les employeurs et les travailleurs de demain. Il est à espérer qu'ils garderont ce savoir, ce qui non seulement contribuera à diminuer les préjugés, mais les aidera aussi à reconnaître une personne qui pourrait être malade.

Le sénateur Callbeck : Ce programme me paraît excellent. Qui finance le programme de partenariat?

Mme Solberg : Le gouvernement finance le programme de partenariat, et nous recevons aussi de l'argent de Centraide. Outre ce financement, le programme reçoit des dons et de l'aide des compagnies pharmaceutiques.

Le sénateur Callbeck : Recevez-vous beaucoup d'argent des compagnies pharmaceutiques?

Mme Solberg : Pas beaucoup. Une compagnie pharmaceutique a donné 3 000 $ pour la création d'une bourse d'études à l'intention d'une personne atteinte de schizophrénie. Ces compagnies nous aident lors de notre conférence provinciale annuelle et parfois pour l'impression du matériel et l'envoi de notre bulletin trimestriel.

Le sénateur Callbeck : Je m'entretenais l'autre jour avec une personne dont le fils d'une quarantaine d'années souffre de schizophrénie. Sa mère se demande bien comment composer avec cette maladie. Son fils ne vit pas à la maison, mais il y va à l'occasion. Si elle s'adressait à votre organisme, est-ce que quelqu'un pourrait travailler avec elle et l'aider?

Mme Solberg : Oui. Nous travaillerions avec elle pour qu'elle puisse prendre soin d'elle-même et répondre à ses propres besoins. Nous lui donnerions également des conseils sur la façon d'aider son fils et le nom des personnes ressources.

Nous faisons également du travail de représentation pour les membres des familles. Parfois, ce travail a trait aux médicaments. Je me suis entretenue avec des porte-parole du régime de médicaments d'ordonnance de la Saskatchewan. La règle concernant les produits génériques suscite des inquiétudes, notamment en ce qui a trait à la sécurité. Nous avons fait du travail de représentation dans les domaines du logement et de l'aide sociale. Nous prêtons main-forte de diverses façons.

Par exemple, nous avons aidé une famille à ramener d'Europe un de ses membres qui était malade. Nous nous portons à la défense des personnes de toutes les manières possibles, peu importe la situation.

Le vice-président : Vous avez dit que vous faisiez des interventions dans les écoles dès la huitième année. Les données que nous avons montrent que le plus tôt possible on intervient auprès d'un enfant, le mieux sera sa vie. En fait, beaucoup de données montrent que parmi les facteurs déterminants pour l'avenir d'un enfant, bon nombre sont en jeu alors que l'enfant se trouve encore dans l'utérus, sans parler des instants qui suivent immédiatement la naissance et les deux premières années de vie. On insiste donc sur une intervention la plus précoce possible. J'aimerais que vous parliez de la possibilité de rejoindre les enfants au plus bas âge.

Lorsque vous faites des présentations, parlez-vous au nom de votre organisme ou bien au nom de l'ensemble des maladies mentales, des toxicomanies et de la santé mentale?

Mme Solberg : Nous avons déjà envisagé de nous adresser à des enfants plus jeunes. Je crois qu'il faudrait changer un peu nos présentations à cette fin. Le problème, c'est que nous n'avons pas les ressources et il faudrait trouver des gens pour faire ce travail. La plupart sont des bénévoles, et le temps qu'ils peuvent ou qu'ils veulent donner est limité. C'est quelque chose que nous aimerions faire, mais il faudra vraiment élargir nos ressources.

J'aurais dû mentionner que lorsque nous intervenons dans la communauté, nous parlons également des drogues illicites et de l'alcool et du sérieux que représente leur consommation. Nous disons que l'utilisation de ces substances ne cause pas la schizophrénie, mais que si vous êtes prédisposé, la maladie apparaîtra probablement plus tôt et plus gravement si vous consommez des drogues illicites ou de l'alcool. Nous parlons beaucoup de drogues illicites et d'alcool dans les écoles secondaires. Nous parlons aussi d'autres aspects de la santé mentale, puisque la schizophrénie est une maladie mentale prise au sens large. Il arrive souvent qu'une personne reçoive un diagnostic de trouble bipolaire, puis de schizophrénie, puis de trouble schizo-affectif et qu'elle souffre de dépression. Les choses ne sont pas aussi claires qu'elles le paraissent.

Le vice-président : Ce point est extrêmement important. Les données que nous avons montrent que les personnes qui ont vraiment des difficultés sont celles qui souffrent de deux ou trois maladies mentales, comme de schizophrénie et de trouble bipolaire. Leurs problèmes sont aggravés par le nombre de diagnostics qu'elles reçoivent. Votre approche à cet égard est certainement la bonne.

Mme Solberg : Nous savons que les personnes atteintes de maladies mentales consomment souvent de l'alcool et des drogues. Je crois parfois qu'il s'agit en quelque sorte d'une automédication, en particulier avant qu'elles reçoivent un traitement. Nous savons que l'abus d'alcool ou d'autres drogues est courant et qu'il faut s'y attaquer.

Le vice-président : Merci beaucoup, Carol.

Nous écouterons maintenant M. Frank Dyck.

M. Frank Dyck, Depression and Manic Depression Support Group of Regina : Bonjour et merci, sénateurs. Je suis ravi de pouvoir témoigner devant votre comité.

Je suis ici principalement pour parler de notre organisme, le Depression and Manic Depression Support Group of Regina. En aucune façon je ne dirai que tout autre trouble mental ou autre problème connexe est de moindre importance. Les problèmes de santé mentale sont importants, point. Chacun de ces problèmes est important. Aujourd'hui, je me contenterai de parler de la dépression et du trouble bipolaire.

Notre groupe a été formé il y a 14 ans avec l'aide du bureau local de l'Association canadienne pour la santé mentale. Nous tenions nos réunions dans ses locaux au début et, par la suite, la clinique régionale en santé mentale nous a donné la possibilité de déménager dans un plus grand local et d'y tenir des réunions hebdomadaires régulières.

Au cours de nos réunions, nous discutons de nombreux sujets : médicaments, emploi, médecins, personnel infirmier, tout ce qui a trait à la dépression et au trouble bipolaire.

Pendant un certain temps, avant que je me joigne au groupe, nous recevions un financement du gouvernement. Toutefois, il en coûtait plus cher d'être un organisme de bienfaisance que ce que nous recevions en financement. Nous avons donc cessé de demander de l'argent, et tout le monde verse quelques dollars ici et là. Nous avons certains fonds pour diffuser notre message, que nous n'utilisons pas de façon régulière. Tout le travail est fait par des bénévoles. La petite brochure que nous distribuons est reproduite par une personne à son travail. Nous faisons les choses dans la plus grande simplicité et nous préférons qu'il en soit ainsi.

Nos réunions durent environ une heure. Nos règles de base sont simples : nous n'utilisons que nos prénoms; tout ce qui se dit dans la salle durant la réunion reste dans la salle; nous nous respectons mutuellement et, qui plus est, nous nous respectons nous-mêmes.

Notre groupe peut accueillir tant des personnes qui se trouvent à la fin de l'adolescence que des personnes âgées. Ce n'est que depuis deux ans que des jeunes de moins de 30 ans ont recours au groupe de soutien, à cause des préjugés entourant la santé mentale. Ils surgissent maintenant comme par enchantement.

Nous invitons non seulement les parents, mais aussi ceux que nous appelons les soutiens, soit des membres de la famille, des amis, des collègues de travail, toute personne qui doit composer avec la maladie parce qu'un être cher ou un ami souffre de dépression ou de trouble bipolaire. Nous les invitons à se joindre à nous pour qu'ils puissent écouter.

Parfois, nos discussions sont très simples : un participant fera part de ses problèmes de sommeil et un autre parlera des choses qu'il a essayées. Toutefois, on aborde aussi des questions très complexes, comme dans le cas d'un patient qui n'est pas tout à fait satisfait du traitement médical qu'il reçoit de son psychiatre. C'est le même discours : « Je le consulte tous les deux mois et il me donne plus de pilules et me renvoie chez moi. L'autre jour, j'en ai parlé à quelqu'un, qui m'a demandé si je savais comment le système fonctionnait. Je lui ai demandé ce qu'il voulait dire, et il m'a répondu que les psychiatres ne sont là que pour distribuer des pilules et que la clinique locale de santé mentale est censée faire toute la consultation. Pourquoi a-t-il dit pareille chose? » Si je reviens à certaines discussions du groupe, c'est à peu près ce qui se dit.

On peut compter cinq ou six participants seulement à une réunion, comme il peut y en avoir une quarantaine.

J'anime un groupe au l'Hôpital général de Regina une fois par mois, pour que les patients sachent que notre groupe existe avant qu'ils reçoivent leur congé. Ce n'est pas parce qu'on distribue une brochure qu'ils viendront à nos réunions. Ils ont parfois besoin d'un visage, d'un nom ou d'un numéro de téléphone pour savoir qu'ils se sentiront rassurés et à l'aise lorsqu'ils nous rendront visite. La nouveauté est difficile pour les gens qui souffrent de dépression et de trouble bipolaire. Ce n'est pas facile pour eux de quitter leur zone de confort.

Je vais reprendre certains éléments qui se trouvent dans mon mémoire. Il y a d'abord la mort. Je serai direct en disant qu'il y a trop de personnes qui meurent à cause des problèmes de santé mentale, en particulier la dépression et le trouble bipolaire; elles ont l'impression que c'est leur seule porte de sortie. J'ai présenté quelques exemples dans mon rapport.

Il y a ce garçon de 16 ans qui a réussi à s'emparer d'un fusil mal entreposé; il a mis l'arme dans sa bouche et a appuyé sur la gâchette. Une autre personne qui conduisait son véhicule a décidé de foncer tout droit dans une semi-remorque. Une autre a décidé, un beau jour, que c'en était assez et s'est ouvert les veines.

Deux de ces personnes sont mortes; l'autre a eu la chance d'être hospitalisée. Je les connaissais toutes, et j'en ai assez d'entendre parler de mort.

Les médias ont rapporté récemment que 126 personnes sont mortes sur les routes de la Saskatchewan en 2004; c'est très triste. Environ 40 ou 42 de ces décès sont attribuables à l'alcool; c'est encore plus triste.

Combien de personnes sont mortes par autodestruction? Nous n'en entendons parler que lorsqu'il s'agit d'un meurtre suivi d'un suicide, comme ce fut le cas en Saskatchewan il y a environ un mois et demi. Nous parlons des pauvres victimes, mais la personne qui s'est suicidée n'était-elle pas une victime également? Je ne dis pas qu'il ne faut pas avoir de pitié ou de sympathie pour la personne qui se fait tuer; c'est très malheureux et ça ne devrait pas arriver. En tant que société, nous devons prendre les moyens pour arrêter cela. Il y a des gens qui ne font qu'attendre; certains sont des bombes à retardement qui attendent d'exploser.

Sénateurs, je vous prie de dire au gouvernement qu'il faut accorder une plus grande priorité à la santé mentale.

Je vais vous parler maintenant de dignité. La dignité est importante dans nos discussions de groupe. J'utilise le mot dignité, peut-être un peu librement, dans le sens d'estime de soi, de confiance en soi. Ce sont des aspects importants pour nos membres. Lorsqu'ils ne peuvent trouver un emploi, vont-ils dire aux employeurs éventuels qu'ils ont une incapacité? J'étais chanceux d'avoir un emploi lorsque j'ai été hospitalisé, et j'ai pu retourner au travail. Malheureusement, je n'ai pas eu le même emploi depuis ce temps.

Nos problèmes peuvent être bien simples, comme lorsqu'une compagnie d'assurance nous demande de remplir de nouveaux formulaires tous les trois mois et d'obtenir un autre diagnostic médical parce qu'elle ne nous croit pas. On pense que si une personne est déprimée, elle prend des quantités de pilules et elle va bien. Or, il y a des gens qui ne peuvent travailler pour le reste de leur vie à cause d'une dépression ou d'un trouble bipolaire. Ils peuvent être sous médication et composer avec la vie de tous les jours, mais ils sont incapables de garder leur emploi. Encore une fois, je fais partie des chanceux. Il y a tous ceux qui ne travaillent pas depuis des années parce qu'ils ne peuvent trouver des occasions d'emploi ou un employeur compréhensif. Les obstacles sont nombreux pour nous, et nous en avons assez.

En mars 2001, j'ai eu une crise cardiaque et j'ai été conduit à l'Hôpital général de Regina. On m'a amené tout droit dans une salle. J'ai été branché en l'espace de quelques minutes. On m'a donné des choses et on a fait des tests sanguins. On a installé des appareils et tout. Je n'ai que des éloges à faire aux professionnels de l'urgence du Regina General Hospital.

Depuis ce temps, j'ai eu l'occasion d'attendre à l'urgence du même hôpital avec des amis de mon groupe. Nous sommes retournés à la maison, désespérés. Malheureusement, nous ne sommes pas très prioritaires, et je ne sais pas pourquoi. Si du sang coulait le long de nos joues, nous deviendrions peut-être une priorité.

Je vais vous dire bien crûment : nous ne sommes pas importants. Il semble que nous n'ayons aucune importance aux yeux des professionnels de la santé. Je ne veux pas m'asseoir dans une autre salle d'urgence parce qu'un ami me dit « Je ne peux plus vivre; j'ai besoin d'aide ». Je le conduis à cet endroit et on nous demande de nous asseoir. Un petit tableau d'affichage indique que le prochain patient non prioritaire sera vu dans trois ou quatre heures. Je ne veux plus voir cela. Cette personne a besoin d'une chambre, a besoin de sécurité. Elle n'a peut-être pas besoin de médicaments ou de pareilles choses, mais elle a besoin de sécurité. Elle veut savoir que quelqu'un se préoccupe d'elle et elle ne doit pas se trouver dans une grande salle d'attente à l'urgence. Nous voulons du respect et de la dignité.

Je me rappelle des annonces à la fin des années 60 faisant référence au fait que la forme physique d'un Canadien de 30 ans était équivalente à celle d'un Suédois de 60 ans. Je pense qu'il s'agissait de Participaction. Je soutiens que c'est formidable. Depuis lors, les gouvernements fédéral et provinciaux ont fait abondamment la promotion de la santé physique, ce qui est admirable, à mon avis. On nous indiqué dans quelle mesure nous devrions faire des exercices, ce que nous devrions manger et ce que nous devrions éviter. On nous conseille d'obtenir des analyses de sang pour déterminer notre taux de lipide. Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas la même chose à propos de la santé mentale? Nous devrions prendre quotidiennement une mesure positive pour promouvoir la santé mentale, et je pense que le gouvernement doit montrer l'exemple. Je crois à la théorie des effets de retombée. Si le gouvernement fédéral s'engage à cet égard, il y aura des retombées, et les gens commenceront à percevoir ce qui cloche actuellement.

Regina est un exemple éloquent. Le nombre de psychiatres dans cette ville équivaut au tiers de celui à Saskatoon, et certaines régions rurales n'en ont aucun. Nous avons besoin de leadership, et c'est le gouvernement qui doit l'exercer, qui doit nous informer et qui doit aider non seulement les personnes atteintes de troubles mentaux mais également la population en général afin de favoriser l'entraide. Lorsqu'on se rend compte qu'un membre de la famille est dans un certain état d'esprit, il faut être en mesure de reconnaître s'il y a un problème pour obtenir rapidement de l'aide. Aidez-nous par rapport à notre santé mentale et à notre attitude à cet égard.

Le sénateur Callbeck : Je conviens qu'il faudrait davantage accorder la priorité à la santé mentale, et c'est la raison de notre présence ici. Nous nous déplaçons dans l'ensemble du Canada pour formuler au gouvernement fédéral des recommandations sur les mesures à prendre à ce chapitre.

Votre groupe semble très utile à bien des égards. Vous êtes-vous inspirés d'un autre modèle ou l'idée de constituer un tel groupe émane-t-elle de vous?

M. Dyck : Je n'ai pas participé à la création de ce groupe. Celui-ci se réunissait dans les locaux de l'ACSM ici. Il a commencé à tenir des séances à intervalles réguliers pour examiner diverses questions. Les besoins du groupe ont évolué. Il avait besoin de plus grands locaux. Il s'est alors adressé au Service régional de santé. Tous les jeudis, de 19 heures à 20 heures, nous nous rencontrons dans une salle de réunion de Santé mentale et Toxicomanies, qui relève de ce service. J'ignore si le groupe s'est inspiré d'un modèle, mais je suis convaincu qu'il est analogue à de nombreux autres organismes de soutien. En matière de respect et de confidentialité, nous appliquons les mêmes principes dans une grande mesure. Nous voulons que les gens se sentent parfaitement en sécurité lors des réunions du groupe.

Le sénateur Callbeck : Vous avez indiqué avoir reçu des fonds publics tout en ajoutant que vous devez débourser davantage parce que vous êtes un organisme de bienfaisance. Est-ce parce que vous devez fournir des reçus?

M. Dyck : Nous n'avons pas d'employés rémunérés. Nous n'avons que des bénévoles. Vous ne devez pas oublier que ce sont tous des patients ou des consommateurs — quelle que soit l'expression que vous choisissez —, qui sont aux prises avec des problèmes de santé mentale. Un organisme gouvernemental nous a accordé 5 000 $ pour promouvoir le groupe, mais la vérification coûte 700 ou 800 $. À titre d'organisation de bienfaisance, nous devons produire un rapport de vérification. Nous ne sommes pas des professionnels et nous ignorons comment exécuter une telle vérification. Il doit exister une solution plus simple.

Il nous reste encore un peu d'argent que nous affectons aux activités du groupe afin que tous puissent se sentir à l'aise. Il a été difficile d'expliquer que nous déployons beaucoup d'efforts afin de demander des subventions pour les autres étant donné que nous sommes également aux prises avec des problèmes de santé mentale. J'en suis un parfait exemple. Mon sommeil et mes habitudes alimentaires ont été grandement perturbés la semaine dernière parce que je savais que je comparaîtrais devant le comité, ce qui m'a rendu très nerveux. J'ai demandé de l'aide pour rédiger mon exposé, et l'on a tapé et corrigé mon texte hier soir. Nous n'avons terminé qu'à environ 21 heures, tout simplement parce que j'avais beaucoup de difficulté à synthétiser le tout.

Le sénateur Callbeck : Je ne pourrais certes pas savoir que vous êtes nerveux ce matin.

M. Dyck : Parfois, vous devez exprimer votre opinion lorsque vous croyez passionnément en quelque chose.

Le sénateur Callbeck : Vous dites avoir perdu votre statut d'organisme de bienfaisance.

M. Dyck : Ce fut notre choix.

Le sénateur Callbeck : D'après vous, comment pourrions-nous simplifier les choses?

M. Dyck : Pourquoi ne pas créer un organisme central pour aider les groupes par rapport aux demandes de subventions et aux vérifications? Je suis sûr qu'il nous faudrait tous payer le vérificateur pour expliquer l'utilisation des fonds publics. S'il y avait un organisme central qui pourrait nous aider à cet égard, nous pourrions affecter plus d'argent pour offrir entre autres des programmes et de la formation aux gens qui en ont besoin. Au lieu de débourser 700 ou 800 $ — et c'est probablement 1 000 $ aujourd'hui —, pourquoi ne pas verser un taux uniforme de 250 $? Les cabinets d'experts-comptables auraient un incitatif s'ils pouvaient obtenir un crédit d'impôt de 250 $ pour l'exécution d'une vérification des activités d'un organisme de bienfaisance. C'est très simple : ces cabinets obtiendraient quelque chose, tout comme nous, et le gouvernement recevrait l'information nécessaire. Tous seraient gagnants. J'ai en tête un organisme central, et non une énorme bureaucratie.

Le sénateur Callbeck : Comme vous dites, cela pose certes un problème aux petites organisations comme les vôtres.

M. Dyck : Effectivement. Nous avons choisi de simplifier au maximum et de n'offrir nos séances qu'à Regina. Quelques participants viennent de l'extérieur de la ville, parce que la région sanitaire de Regina-Qu'Appelle s'étend au sud et à l'est de Regina jusqu'à la frontière, le long de la Route 1. C'est une région sanitaire étendue.

Le sénateur Callbeck : Existe-t-il des programmes pour aider les gens souffrant de dépression à se trouver un emploi?

M. Dyck : La Clinique de santé mentale se compose de deux groupes de travailleurs sociaux, dont l'un s'occupe du counselling et l'autre du traitement des cas. L'agent chargé de votre cas vous aide à vous trouver un emploi, un logement, et cetera. Cependant, il y a beaucoup plus de patients que d'agents. Je ne parle pas uniquement de dépression et du trouble bipolaire. J'englobe tous les problèmes de santé mentale. Beaucoup veulent simplement rester chez eux et n'ont même pas le courage de comparaître devant vous aujourd'hui. Ils y restent sans en sortir pendant une semaine et adoptent une position fœtale. Selon eux, personne ne les embauchera. À quoi bon essayer par conséquent?

On m'a demandé de signaler qu'il nous faut plus d'intervenants qui peuvent aider le groupe. Actuellement, nous sommes en liaison avec une femme à la Clinique de santé mentale de Regina. Je vous donne un exemple pertinent de la façon dont on aide le groupe. J'ai parlé à cette femme la semaine dernière et elle m'a demandé si nous avions besoin de conférenciers. Nous avons répondu que nous aimerions que quelqu'un vienne nous exposer comment communiquer avec les professionnels de la santé, comme les psychiatres et les conseillers. Savez-vous combien de membres de notre groupe sont intimidés par les professionnels de la santé? Si le médecin dit : « Prenez ces pilules », ils obéissent. Certains peuvent poser des questions sur les pilules, mais nombreux sont ceux qui les prennent sans mot dire.

Le sénateur Callbeck : Votre groupe comprend des gens souffrant de dépression ainsi que des parents et des amis, n'est-ce pas?

M. Dyck : Effectivement.

Le sénateur Callbeck : Que pensez-vous de l'idée de constituer un groupe distinct pour les parents et les amis?

M. Dyck : Nous essayons d'obtenir que la personne avec laquelle nous communiquons à la Clinique de santé mentale participe à une réunion par mois et si des personnes de confiance sont présentes, elle les réunira dans une autre pièce pour discuter avec elles. Nous constatons que même cette façon de procéder avec les personnes de confiance donne également de très bons résultats. Celles-ci peuvent ainsi savoir que leur parent ou ami n'est pas le seul à éprouver de tels problèmes.

C'est le message que nous essayons de transmettre. Ils sont si nombreux à ne pas avoir fait l'objet d'un diagnostic, et nous voulons qu'ils puissent s'exprimer. Il est difficile de mettre en œuvre des programmes et des stratégies efficaces si vous ignorez le nombre de personnes atteintes de dépression et du trouble bipolaire. Je ne dis pas que nous sommes devant un scénario apocalyptique, mais nous devons avoir un point de départ.

Le vice-président : On nous a répété constamment que, si des groupes comme le vôtre et l'organisation qui s'occupe des personnes atteintes de schizophrénie et dont nous venons d'entendre les représentants pouvaient avoir droit à l'infrastructure communautaire, vous pourriez ainsi beaucoup vous aider et vous entraider. Ce matin, j'ai fait allusion à ce qui est, selon moi, le meilleur programme dont nous avons entendu parler. C'est à Brandon au Manitoba. Je voudrais savoir ce que vous en pensez. C'est magnifique de pouvoir compter sur un endroit où les gens peuvent se rendre et où on leur offre tous les services sociaux et de santé afin qu'ils ne soient plus ballottés au fil de leurs démarches pour obtenir ce dont ils ont besoin. En ce qui concerne votre groupe, c'est magnifique que des gens ayant un point en commun puissent se réunir dans un endroit pour s'entraider et apprendre à se connaître.

Cependant, les gens ne veulent pas être ghettoïsés. Autrement dit, ils veulent occuper la place qui leur revient dans la société; ils ne veulent pas être que des laissés-pour-compte aux prises avec un handicap particulier. Il faut donc un équilibre dans la répartition des logements publics. Si des logements publics sont réservés aux personnes souffrant de troubles mentaux, ils doivent être disséminés sur l'ensemble du territoire et non pas être regroupés dans un seul endroit.

J'aimerais savoir ce qui, d'après vous, vous permettrait d'avoir l'infrastructure et le réseau nécessaires afin de pouvoir collaborer avec vos pairs, ici à Regina. Quelles ressources le gouvernement pourrait-il vous offrir pour que vous puissiez essentiellement prendre soin de vous-mêmes et de vos amis?

M. Dyck : Vous me demandez de traiter d'une question passablement vaste à laquelle je n'ai pas beaucoup réfléchi avant de comparaître aujourd'hui.

Le vice-président : C'est injuste de vous poser une telle question, mais nous voulons entendre l'opinion des gens qui, comme vous, savent de quoi ils parlent.

M. Dyck : Je suis un de ces chanceux. Je suis encore aux prises avec une dépression clinique, et je le serai pour le reste de mes jours. Je souffre également d'une maladie du coeur. C'est une arme à deux tranchants.

En fin de compte, les gens ne veulent que se sentir en sécurité. Ils veulent un endroit où ils peuvent se sentir en sécurité. Il pourrait s'agir de créer un organisme offrant des services 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, c'est-à-dire un endroit où les gens pourraient téléphoner ou se rendre pour parler à quelqu'un. Il n'est pas nécessaire que ce soit un professionnel en santé mentale. Ce pourrait être quelqu'un comme moi ou un autre membre de notre groupe. Nous n'avons pas besoin d'avoir ni diplômes ni titres. Nos réunions ne visent qu'à nous permettre de discuter, et c'est parfois tout ce qu'il faut.

Nous devons régler le problème des longues listes d'attente dans les hôpitaux. Il faut également un programme permettant de défendre les intérêts des personnes atteintes de problèmes de santé mentale. D'une façon directe et concrète, je l'ignore. Je sais ce qui est efficace pour de nombreux membres dans notre groupe. Lorsque je me rends à l'hôpital pour participer à un groupe de soutien, je sais ce dont on y parle. L'hôpital est un endroit sûr pour permettre à un malade de se rétablir, mais il ne suffira que de quelques mois pour y revenir si, à sa sortie, il ne peut pas compter sur notamment le soutien de la famille ou des amis.

Je vous donne un exemple : je connais quelqu'un qui était un sans-abri et qui était incapable de travailler en raison de ses toxicomanies. Pendant un mois, il s'est déplacé avec son chariot, dormant un peu partout. Puis, il a été hospitalisé pendant un mois pour revenir vivre dans la rue avec son chariot pendant un autre mois. Ce cycle s'est répété pendant plusieurs années.

De quelles ressources disposent les gens? Il faut un organisme central offrant des services 24 heures sur 24 pendant sept jours sur sept, et le programme doit être axé sur le soutien de la famille. Il faut former les gens.

Je me suis marié trois fois. Ma dépression a probablement contribué à l'échec de chaque union. C'est la même situation par rapport à l'emploi. Nous sommes des centaines et des milliers à vivre cela. Nous avons besoin d'un endroit où nous rendre pour dire : « J'ai besoin d'aide, et voici ce dont j'ai besoin. » Il existe de nombreux organismes et groupes, mais il n'y en a pas un, à ma connaissance, qui chapeaute le tout.

Voici de la matière à réflexion. La première fois que j'ai obtenu mon congé de l'hôpital, je voulais tout savoir sur ma grave dépression. J'ai trouvé un groupe en Alberta qui s'appelait l'Organization for Bipolar Affective Disorders ou OBAD. Elle s'occupe des gens atteints non seulement du trouble bipolaire mais également de toutes les autres maladies mentales. Je trouvais incroyable le système qu'on y avait structuré. L'organisation disposait d'un réseau regroupant les différentes groupes dans les différents domaines : schizophrénie, trouble bipolaire, dépendance au jeu et toxicomanie. Elle avait de liens renvoyant à d'autres sites. Je lui ai fait parvenir un courriel, et maintenant notre groupe figure sur le site de l'organisation à titre de groupe de contact en Saskatchewan. Je pensais que c'était un merveilleux modèle.

Ce serait formidable si l'organisation possédait des locaux où les gens pourraient se rendre, parce que nous n'avons pas tous accès à l'Internet. Je déteste devoir le répéter, mais il faudrait offrir des services 24 heures sur 24 pendant 7 jours sur 7. J'ignore si un tel bureau relèverait du Service régional de la santé ou s'il serait autonome. Il faudrait examiner tous ensemble les modalités. L'ACSM pourrait jouer un tel rôle utile si elle était au courant de tous les groupes qui existent. Je pense qu'un témoin comparaîtra ultérieurement aujourd'hui pour le compte de la section de la Saskatchewan de l'ACSM. Je ne suis pas au courant de l'ensemble de la structure. Le gouvernement devrait avoir voix au chapitre à cet égard.

Notre groupe se compose de patients ou de consommateurs, quelle que soit l'expression que vous choisissez. Nous avons tous notre propre vie. Nous avons besoin d'aide. C'est tout ce que nous demandons. Nous n'exigeons pas un statut particulier ou extraordinaire, nous ne voulons qu'on nous ouvre les portes. Nous voulons les mêmes droits et privilèges que les autres Canadiens. Nous n'avons pas besoin de beaucoup. Il nous faut que des petits coups de pouce pour nous aider.

Le vice-président : Nous avons entendu vos propos et nous comprenons votre point de vue, monsieur Dyck. Nous devons malheureusement passer au prochain témoin, étant donné que nous accusons un léger retard.

Notre prochain témoin est Mme Lisa Simmermon, n'est-ce pas?

Mme Lisa Simmermon, directrice des relations publiques, Saskatchewan Families for Effective Austism Treatment : Je vous remercie infiniment de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je suis la mère d'un enfant de 15 ans atteint d'autisme. Le soir, je suis une musicienne classique. Le jour, j'enseigne à mon fils à la maison.

Il a fallu attendre cinq ans avant d'avoir le diagnostic en Saskatchewan. Le problème, c'est qu'il faut des spécialistes possédant une formation très précise pour diagnostiquer les troubles du spectre de l'autisme. Cette formation n'est pas obligatoire dans les cours suivis par les psychiatres et les psychologues. Ils doivent payer pour l'acquérir. Il est difficile d'inciter les gens à payer pour obtenir une formation qui est essentielle dans un secteur particulier de la santé mentale et des troubles mentaux.

Une fois le diagnostic posé, nous nous sommes rendu compte pourquoi nous affrontions tous ces problèmes et nous avons découvert ce que nous pouvions réussir. Nous avons réalisé que le traitement efficace n'était pas offert en Saskatchewan. Comme de nombreuses autres familles, nous avons complètement échoué dans nos tentatives pour faire valoir qu'un tel traitement devrait être offert ici. Actuellement, la Saskatchewan est la seule province qui n'est pas dotée d'un programme provincial sur l'autisme. Deux territoires sont également dans le même cas que nous. C'est encore un problème crucial dans notre collectivité.

Par conséquent, nous avons décidé que nous étions les seuls à pouvoir aider notre fils. L'école n'a pas été la solution. Notre fils ne pourrait pas s'adapter à la vie en groupe, et le renforcement positif n'est pas utilisé à l'école. Nous avons obtenu du succès en enseignant à notre fils à la maison.

Nous avons eu la possibilité de placer notre fils dans une classe d'enseignement structuré où normalement, le niveau scolaire ne dépasse pas la deuxième année. Il est maintenant en onzième année et il a un an d'avance par rapport aux enfants de son âge. Sa déficience mentale est très grave, mais son aptitude à l'apprentissage est très bonne dans la mesure où il peut bénéficier des aménagements et des connaissances nécessaires dans ce domaine.

J'en arrive ainsi à la situation globale. En ce qui concerne l'autisme, nous avons besoin à l'échelle nationale d'expertise — des connaissances réelles, honnêtes, et pas simplement de quelques bribes de connaissances, car c'est terriblement dangereux. Une véritable expertise est nécessaire pour aider non seulement les familles où se trouvent de jeunes enfants autistes, mais aussi les personnes plus âgées qui se rendent compte qu'elles ont des symptômes de troubles du spectre autistique par suite d'un diagnostic à la fin de l'adolescence et à l'âge adulte. Aucun soutien pour ces gens n'est actuellement prévu à l'échelle du pays.

L'autisme tend à être un peu le parent pauvre de la déficience mentale. Il ne tombe pas dans d'autres catégories et les approches génériques ne permettent pas vraiment de relever les défis qu'il représente.

Comment régler les questions précises qui se posent localement tout en ayant une image globale illustrée par un plan d'action national ou provincial? C'est un des problèmes qui se posent.

La Saskatchewan a lancé une stratégie pour la déficience cognitive qui met l'accent sur le syndrome d'alcoolisation fœtale, le SAF. Toutefois, les gens qui sont embauchés n'ont pas l'expertise ni la formation voulues pour traiter l'autisme, alors que ce devrait être le cas pour qu'ils puissent aider les autistes dans notre province. Cette approche ne va pas fonctionner, car elle donne lieu à des cloisonnements et je sais que votre comité s'efforce, tout d'abord, de les identifier et ensuite de faire des recommandations concrètes pour les éliminer.

Tant que nous aurons des décisionnaires qui n'ont pas une véritable expertise pour prendre des décisions dans des domaines précis de déficience mentale, nous continuerons à avoir des problèmes importants. C'est un énorme gaspillage du potentiel des gens. Avec un traitement efficace et des soutiens adéquats, la plupart des gens atteints d'autisme arrivent à avoir un langage fonctionnel et à communiquer tout en ayant un QI parfaitement intact. Avec un traitement efficace, nous savons maintenant que seule une petite minorité d'autistes ont d'autres déficiences cognitives en plus de l'autisme.

D'après la recherche officielle, nous savons qu'un traitement efficace de l'autisme est rentable et peut faire économiser 50 p. 100 des coûts de soutien d'un adulte autiste dans la mesure où il dispose également de mesures d'adaptation et d'appuis adéquats. Il est judicieux, financièrement parlant, d'intensifier les efforts, d'offrir du financement et de mettre en place des programmes afin de pouvoir régler les problèmes et commencer à permettre aux gens de réaliser leur potentiel.

L'effet est énorme non seulement sur les autistes, mais aussi sur leurs familles. Dans le cas de ces familles, plus de 80 p. 100 des mariages se terminent définitivement. Le suicide pose également un problème important vu que les gens ont l'impression que la seule façon de s'en sortir consiste à disparaître. C'est une énorme source de préoccupation. On ne répond pas aux besoins des gens. Sans aller jusqu'à parler d'acte criminel, il reste qu'on ne répond pas aux besoins des gens.

Je suis d'accord avec Mme Solberg : il faut véritablement se pencher sur notre système judiciaire et peut-être faire la distinction entre la justice pénale pour les gens normaux et un système qui traite des gens qui sont atteints de troubles cérébraux de toutes sortes.

D'après la recherche, il apparaît clairement que beaucoup de gens qui sont déclarés coupables sont atteints de troubles cérébraux identifiables. Il me semblerait logique d'identifier ce que sont ces troubles et d'apporter l'aide qui s'impose. Je ne suis pas sûre que le système correctionnel soit la façon la plus productive d'aider les gens et je crois qu'il faut alors mettre l'accent sur la notion d'aide.

Dans votre rapport, vous demandez ce que nous pensons des termes « discrimination » et « stigmatisation. » J'encourage fortement le comité à utiliser davantage le mot « discrimination » par opposition au mot « stigmatisation. »

Vous avez dit qu'on ne donne pas au mot « stigmatisation » l'importance qu'il mérite; je crois que vous avez parfaitement raison. Par contre, la discrimination est une question juridique, mais pour bien la combattre, il faut des lois qui permettent effectivement aux gens d'aborder cette réalité dans une perspective juridique. Ce que nous avons appris ces dernières années en matière d'autisme, c'est que si le traitement n'est pas un droit, il est très difficile de lutter contre la discrimination.

Le fait que vous envisagiez une Loi canadienne sur la santé mentale en plus de la Loi canadienne sur la santé est extrêmement constructif et serait la seule façon de régler la question de la discrimination. La question serait vue dans une perspective juridique et, pour la première fois, les gens seraient en mesure de lutter contre la discrimination d'une manière constructive. La discrimination se manifeste insidieusement et de toutes sortes de façons.

Notre organisation voudrait que les ressources mises à la disposition des parents de famille d'accueil le soient aussi dans le cas des parents biologiques. Beaucoup d'enfants autistes sont confiés à la province, car leurs besoins sont si élevés que la famille ne peut pas s'en sortir et souvent atteint le point de rupture. Parfois, les familles placent leur enfant, car c'est la seule façon d'obtenir des fonds pour son traitement. Les parents confient leurs enfants à la province, pas parce qu'ils le veulent, mais parce qu'ils y sont obligés s'ils veulent avoir accès aux fonds prévus pour les traitements. Moralement parlant, c'est absolument condamnable. Il faut que les familles biologiques aient accès aux ressources au même titre que les familles d'accueil.

La surveillance est nécessaire si l'on veut déterminer l'étendue du problème. Les discussions que la Société canadienne d'autisme a menées avec l'Institut canadien d'information sur la santé, Statistique Canada et Santé Canada ont été frustrantes. Il est reconnu que Santé Canada a le mandat de s'occuper de la surveillance, mais il n'y a pas de volonté politique à cet égard.

J'encourage fortement le comité à inciter Santé Canada à agir selon son mandat et à assurer la surveillance de tous les troubles de santé mentale et cérébraux. Ce qui est inquiétant, c'est qu'on se contente actuellement d'un projet pilote qui va utiliser des bases de données qui existent déjà, au lieu de bâtir un système permettant la collecte de données nécessaires. C'est le problème. Il n'existe pas de données sur la prévalence de l'autisme, mis à part les données recueillies par la Société canadienne d'autisme auprès des ministères de l'Éducation des trois provinces. C'est la seule source d'information. Il faut que le ministère fédéral de la Santé assume la responsabilité de la surveillance, ce qui facilitera une meilleure prise de décision.

Des diagnosticiens de Saskatoon nous ont dit avoir posé un diagnostic dans le cas de centaines d'enfants des Premières nations dans le Nord. Ces enfants ne sont pas identifiés dans les bases de données de l'éducation de l'enfance en difficulté comme ayant des troubles du spectre autistique. Il faut avoir plus de discussions avec nos collectivités des Premières nations au sujet de leurs connaissances et de leurs croyances relatives à ces déficiences, afin de leur offrir l'information voulue, les traitements qui s'imposent et des appuis qui respectent leur réalité culturelle.

Je n'ai pas de propositions concrètes à faire à ce sujet, mais je voulais attirer votre attention, au moins dans cette province, sur le fait qu'il s'agit d'un problème identifiable, qui probablement existe dans les autres provinces, mais qui n'a peut-être pas encore été reconnu comme tel.

Pour ce qui est de la fourniture de services, bien sûr, le traitement est la question la plus importante dans notre collectivité. Toutefois, les services offerts aux particuliers et à leurs familles sont extrêmement importants aussi. Répit et soutien ne veulent absolument pas dire la même chose. Souvent, dans le cas de l'autisme, de graves questions de sécurité se posent, puisque les enfants n'ont aucun sens du danger et vont parfois essayer de consommer des articles non alimentaires, sans compter leurs graves troubles du sommeil. Les parents doivent dormir à tour de rôle pour assurer une surveillance 24 heures par jour. Préparer un repas ou aller faire l'épicerie devient impossible et il faut embaucher quelqu'un pour s'occuper de l'enfant afin de pouvoir tout simplement tondre le gazon ou faire la lessive, par exemple.

Ce n'est pas la même chose que le répit; c'est de l'aide aux familles et c'est un domaine que vous n'abordez pas dans votre rapport. J'espère que dans vos recommandations finales, vous indiquerez qu'il est nécessaire de prendre conscience de cette question ainsi que du besoin de ressources. C'est une question de sécurité pour la personne comme pour les soignants, sans compter que la famille pourrait aussi mieux fonctionner.

Nous remarquons qu'à plusieurs reprises, vous parlez dans le rapport des personnes « souffrant » d'une maladie mentale. Nous demandons que vous revoyiez l'utilisation de ce terme, car ce ne sont pas toutes les personnes qui ont une déficience ou des troubles cérébraux qui souffrent. Une personne autiste qui est en fait en mesure de se débrouiller fort bien ne souffre pas nécessairement; elle doit simplement relever des défis dans certains domaines de sa vie. Une personne qui a des troubles d'apprentissage ne souffre pas nécessairement. Pour certains adultes autistes, c'est une question importante. Nous décourageons le recours à une terminologie qui sous-entend que nous savons ce que les gens vivent, alors que parfois ce n'est pas le cas.

L'expression « maladie mentale » nous préoccupe aussi. Cette expression est utilisée pour englober tous les troubles cérébraux. Une recommandation précise est faite au sujet d'un programme particulier relatif à la lutte contre la maladie mentale. Cela ne fonctionne pas bien dans le cas des troubles cérébraux auxquels on ne peut venir à bout; on ne peut pas modifier les différences cérébrales structurelles; on peut prévoir des mesures d'adaptation et de l'aide, mais on ne peut pas en venir à bout.

Le mot « rétablissement » utilisé conjointement avec la maladie mentale pose également problème, car on ne peut pas guérir de l'autisme. Là encore, on peut apporter de l'aide, prévoir des mesures d'adaptation et de l'éducation, mais « rétablissement » n'est pas le terme adéquat; il vaudrait mieux utiliser l'expression « continuum des soins ». Nous demandons que vous soyez circonspects lorsque vous utilisez l'expression « maladie mentale » ainsi que les statistiques afférentes, et que vous englobiez également tout l'éventail des troubles mentaux.

J'aimerais parler, pour terminer, d'un plan d'action national; c'est très important. Je suis la représentante des relations publiques de Saskatchewan Families for Effective Autism Treatment. Nous sommes la société provinciale de l'autisme et sommes membres de la Société canadienne de l'autisme laquelle, à son tour, est membre de l'Alliance canadienne pour la maladie mentale et la santé mentale, l'ACMSM. Nous affirmons qu'il est nécessaire d'avoir un plan d'action national, lequel doit découler de ceux relatifs à chacun des troubles cérébraux, avant de pouvoir identifier les points communs, faute de quoi, il y aura toujours des cloisonnements et des lacunes. Dans le cadre de vos recommandations, nous vous demandons d'envisager de recommander pareille approche.

Le vice-président : Merci, Lisa.

Le contexte dans lequel nous utilisons le mot « rétablissement » se rapporte aux mesures d'adaptation nécessaires ou à la réadaptation nécessaire d'une personne, de manière qu'elle puisse fonctionner de nouveau au sein de la société. Il n'est pas utilisé pour signifier guérison complète. Si vous avez toujours des inquiétudes à ce sujet, je vous demanderais de bien vouloir m'envoyer une note dans ce sens.

Mme Simmermon : C'est ce que je vais faire, sénateur.

Le sénateur Callbeck : Vous soulevez plusieurs questions pour notre comité. Vous dites qu'il n'existe pas de traitement efficace ici.

Mme Simmermon : C'est exact.

Le sénateur Callbeck : Vous dites que la Saskatchewan est la seule province qui n'ait pas de programme relatif à un traitement efficace et à des appuis, n'est-ce pas?

Mme Simmermon : C'est la seule province qui n'ait pas de programme provincial de traitement de l'autisme. Un programme pilote a été lancé à Saskatoon pour six enfants, c'est tout, il n'existe donc pas de programme provincial de traitement de l'autisme.

Le vice-président : J'aimerais poser une question rapide. La Société canadienne de l'autisme se demande si notre rapport permet effectivement de démontrer que l'autisme n'est pas nécessairement une maladie mentale, même si certains autistes ont une maladie mentale. J'aimerais savoir rapidement si vous êtes d'accord ou non.

Mme Simmermon : Depuis longtemps, c'est de façon dispersée qu'on aborde la question de la santé mentale, ce qui ne marche pas. Grâce à un plan d'action national, il serait possible de l'aborder de manière plus cohésive; c'est certainement la perspective de l'ACMSM et il apparaît clairement à la lecture de votre rapport provisoire qu'il y a la volonté politique pour au moins entamer le travail voulu. Si l'autisme et les autres troubles cérébraux qui ne sont pas habituellement englobés dans la catégorie de la santé mentale ne le sont pas maintenant, ils ne le seront jamais. Les ressources ne seront toujours pas disponibles. Par conséquent, nous vous encourageons fortement à les englober.

Le vice-président : Merci beaucoup. Je suis désolé de ne pas pouvoir accorder à vous tous le temps que vous méritez; nous n'avons que 24 heures par jour et il nous faut aller de l'avant puisque nous avons pris du retard.

M. Darrell Downton est le témoin suivant.

M. Darrell Downton, coprésident, Comité consultatif sur la santé mentale et les toxicomanies, Five Hills Health Region : J'aimerais remercier le comité de bien vouloir nous entendre. Je suis coprésident et représentant du consommateur du Comité consultatif sur la santé mentale et les toxicomanies de la Five Hills Health Region. J'ai également été président du National Consumer Advisoring Committee pour l'Association canadienne pour la santé mentale, de 2001 à 2004. Ce poste m'a permis d'avoir des connaissances non seulement locales mais aussi nationales.

Le Comité consultatif sur la santé mentale et les toxicomanies de la Five Hills Health Region conseille l'Office de la santé, fait part de ses idées et reçoit une rétroaction à propos du processus de planification stratégique lié au service de santé mentale et de toxicomanie dans le contexte des besoins des résidents de la région en matière de santé mentale.

Le comité a examiné le rapport provisoire du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie de novembre 2004. Nous avons élaboré des réponses aux messages et aux questions clés découlant de ce rapport que nous présentons respectueusement au comité dans un document à part.

Aujourd'hui, je vais m'attarder sur les questions de stigmatisation, de recrutement et de maintien à l'emploi, de la promotion de la santé et de l'accès. Je crois que le recrutement et le maintien à l'emploi représentent une question particulièrement cruciale pour la province de la Saskatchewan.

Lorsque les problèmes identifiés dans le rapport provisoire seront effectivement réglés, nous pourrons alors prendre des mesures témoignant de notre engagement envers un système amélioré de santé mentale et de traitement de la toxicomanie.

Si on s'engage à donner la priorité à la santé mentale et au traitement de la toxicomanie dans le cadre du régime de soins de santé pour tous les Canadiens, les fournisseurs de services pourront puiser dans les innombrables connaissances et meilleures pratiques auxquelles auront accès ceux qui ont besoin d'aide pour entamer le processus de rétablissement. Un membre du Mental Health and Addictions Advisory Committee a observé que le fait d'augmenter la capacité de desservir les particuliers dans cette région permettrait d'offrir les services essentiels, ce qui atténuerait le sentiment de frustration. Lorsqu'une personne se sent bien et peut fonctionner, le niveau de frustration tombe considérablement, ce qui est fort important. C'est l'expérience que peuvent vivre le client, sa famille, les fournisseurs de services, les professionnels de la santé mentale, ainsi que les autorités régionales de la santé.

Lorsqu'on améliore la santé mentale, il est moins nécessaire de recourir à l'hospitalisation et les soins nécessaires sont moins nombreux, ce qui réduit les coûts et donne de bien meilleurs résultats. J'en ai fait l'expérience personnelle.

On dispose d'informations complètes et de connaissances rigoureuses sur ce qui devrait arriver et ce qui fonctionne — les meilleures pratiques. Ce qui se produit effectivement dépend de la capacité offerte à toute collectivité. Dans les régions rurales de la Saskatchewan, cette capacité peut être parfois considérablement limitée, et de façon chronique, ce qui est un grave problème. De nombreuses collectivités n'ont actuellement pas accès à ce qui, comme nous le savons bien, peut porter fruit.

On peut l'expliquer de nombreuses façons, en invoquant par exemple la stigmatisation et la valeur accordée aux résultats qualitatifs par rapport aux résultats quantitatifs.

Quand j'étais président du National Consumer Advisory Committee, la pénurie de services dans les régions rurales était un sujet important qui revenait constamment. Je crois qu'il faudrait en faire une priorité.

Je vais maintenant vous parler des préjugés. Il y a des organismes nationaux dont le mandat est de déceler et de corriger les fausses perceptions concernant la santé mentale et les toxicomanies. Il s'agit entre autres de l'Association canadienne pour la santé mentale et de la Société canadienne de schizophrénie. Nous évoquons souvent la question des droits, qui est importante pour les activités des groupes de pression et pour la protection. Cependant, les préjugés sont causés à la base par de fausses perceptions, et il est important que toute stratégie sur la question mette l'accent là-dessus.

Il existe des programmes d'information conçus pour différents groupes d'âge, des campagnes de sensibilisation et des publications instructives. Or, il faudrait diffuser plus largement ces précieux renseignements auprès du grand public pour en accroître le succès. Il est aussi important de transmettre l'information aux membres des familles. En effet, mon père a adopté une attitude bien meilleure à mon égard, une fois informé.

Il faut aussi trouver des clients qui peuvent servir de modèles. Leur exemple peut donner espoir à ceux qui souffrent de maladies mentales, parce qu'ils pourraient voir ce qu'il est possible de faire. Leur exemple pourrait aussi changer les attitudes et les perceptions de la société dans son ensemble.

Les établissements de santé qui forment le personnel soignant donnent quelques cours sur la santé mentale et les toxicomanies. Comme ils reçoivent une formation limitée, les fournisseurs de soins de santé n'ont pas les connaissances nécessaires pour combattre les préjugés. De plus, comme ils connaissent mal les signes et les symptômes de la maladie mentale, ils ne sont pas portés à envoyer leurs clients et leurs malades consulter.

Le dépistage précoce et le traitement de la maladie sont très importants. Dans mon cas, j'avais 32 ans quand on a diagnostiqué la maladie, ce qui a eu des effets psychologiques importants. Après 10 ou 12 ans, je me remets à peine de ces problèmes. Une évaluation précise et rapide permet d'arriver à de bien meilleurs résultats, en limitant les coûts et les séquelles psychologiques graves. Il est important que des travailleurs de première ligne puissent déceler rapidement le problème.

Quand les programmes de santé mentale et de toxicomanie sont limités, les responsables de la prestation des services de santé ne comprennent pas la gravité de la maladie et ne reconnaissent pas non plus le long processus de guérison et l'ensemble des services communautaires qui sont nécessaires à la gestion de la maladie. Le peu de possibilités offertes aux personnes souffrant de maladies mentales et de toxicomanies leur confirme qu'ils ne peuvent recevoir les soins et l'aide qu'ils méritent. Leur guérison est limitée aux choix qui existent.

Je l'ai souvent constaté moi-même. À la conférence nationale de 2002 de l'Association canadienne pour la santé mentale, j'ai donné un atelier sur la guérison. J'ai expliqué que c'est une roue qui tourne. J'ai parlé de la grande utilité de tous les services de soutien ainsi que des lacunes dans les services, des besoins non comblés et du fait que ma capacité de donner et de fonctionner est radicalement compromise. C'est pourquoi je dis que c'est une roue qui tourne. Si elle ne tourne plus, je ne peux pas donner. Je reçois et je donne. C'est vraiment important.

La Five Hills Health Region a du mal à recruter et à garder des psychiatres. C'est un problème particulièrement grave en Saskatchewan. Il faut recruter des psychiatres à l'étranger. Le problème de ressources est lié au nombre de places dans les établissements d'enseignement au Canada, à la capacité des psychiatres de participer à la recherche et au soutien dont les psychiatres ont besoin dans l'exécution de leur travail. Les psychiatres de la région ont indiqué que la pénurie de services communautaires empêchait leurs patients de guérir. Je suis tout à fait d'accord avec eux. Il faut offrir des services comme des activités de jour, des programmes, des cours, de la formation, de l'emploi et des possibilités de logement. J'ajouterais que les soins à domicile font aussi partie des services nécessaires.

Les malades ont aussi besoin d'avoir la possibilité et les moyens de se procurer des médicaments prescrits. Un accès limité aux médicaments nuit à leur guérison. Tous les professionnels de la santé mentale et des toxicomanies aimeraient que les besoins de leurs clients soient reconnus et qu'il y ait un ensemble complet de services.

Quand je sais que le système est complet et stable, je peux bien fonctionner. J'ai des problèmes au cerveau qui peuvent m'empêcher très rapidement d'être fonctionnel. Grâce à un système de soutien, je peux faire beaucoup. C'est rentable et très précieux de bien des façons.

Le Five Hills Health Region participe activement aux activités du comité interagences. Ce comité croit que la collaboration et l'intégration des services permet de mieux répondre aux besoins complexes des enfants, des jeunes et de leurs familles, et ainsi d'accroître leur bien-être. Comme j'ai dit, j'aurais aimé avoir droit à ces services.

La région parraine aussi le programme Kids First. Ce programme offre des moyens pour assurer la promotion de la santé, l'éducation et l'intervention précoce. La survie de ces programmes est incertaine.

J'ai participé à des programmes, surtout de travail, où souvent le temps d'exécution est court. Ma démarche est encore hésitante et on s'attend pourtant à ce que je fasse 40 verges en 4,4 secondes; ce n'est pas possible. Cependant, pour le programme de 1996 auquel j'ai participé, les délais ont été allongés et j'ai atteint les objectifs, si bien que, neuf ans plus tard, je travaille toujours. Quand ils ont injecté des fonds, c'était rentable et cela continue de l'être parce que le gouvernement économise toujours. C'est une bonne affaire.

Beaucoup de programmes fonctionnent avec des subventions annuelles. Cette année, le programme d'alphabétisation a perdu son financement. Les partenaires de ces programmes reconnaissent ce qui peut fonctionner et acceptent les ressources qu'on peut investir aujourd'hui pour le mieux-être de demain.

Comme je l'ai dit, la stabilité est absolument essentielle pour moi. Si je n'en ai pas, j'ai de graves problèmes. Ceux qui fournissent les ressources veulent avoir la preuve que leur investissement donne des résultats. Les programmes d'intervention précoce en donnent. Je crois en être la preuve. Cependant, les résultats prennent du temps à se manifester et il faut reconnaître la nécessité de cycles budgétaires à long terme. Comme je l'ai dit, j'atteins les objectifs, mais cela me prend plus de temps pour y arriver.

Pour ce qui est de l'accès, il faut d'abord que des services et des traitements soient offerts. Le nombre de lits dans les hôpitaux a diminué dans la région et les séjours à l'hôpital se prolongent en raison de la pénurie de services dans la communauté. Les ressources sont donc insuffisantes et celles qui existent sont surutilisées.

Un conseiller à l'accueil aux services pour enfants, jeunes et adultes reçoit en moyenne huit clients par jour ouvrable. C'est beaucoup. Ces personnes ont besoin de soins et on répond aux besoins urgents. Cependant, la liste d'attente est d'environ quatre semaines pour les services de santé mentale et de toxicomanie. D'après les recherches en matière de toxicomanie, la personne qui doit attendre avant d'entreprendre le traitement qu'elle est prête à suivre risque de se désister.

Pour ma part, quand la situation commence à se détériorer, je deviens de plus en plus irrité et de moins en moins enclin à participer. Au début, je suis enthousiaste et les résultats seront meilleurs. Les données indiquent que la demande de services dépasse l'offre. Attendre des services risque d'entraîner l'hospitalisation, ce qui n'est pas une utilisation judicieuse des ressources limitées.

L'Association canadienne pour la santé mentale explique l'ensemble de services dont les personnes qui éprouvent des problèmes de santé mentale et leurs familles ont besoin. Ils ont le droit de recevoir un ensemble de soins dans leur milieu. Ce ne sont pas des gens qui sont portés à se plaindre qu'on les néglige.

C'est mon cas; je ne dis pas grand-chose. Je vous donne un exemple; j'occupais deux chambres dans le sous-sol chez une dame très bien. Je suis une personne qui a du mal à s'organiser. En 2003, j'ai été expulsé et je vis maintenant en appartement. Ce fut tout un choc pour moi. J'ai du mal à communiquer et, bien souvent, on me néglige. J'ai parfois le sentiment que les services manquent. Je fais l'objet de préjugés.

La communauté autochtone est un groupe marginalisé qui n'a pas toujours accès comme il le faudrait aux services dans le domaine de la santé mentale et des toxicomanies. Pour bien répondre à leurs besoins, il faut d'abord déterminer les obstacles aux services. C'est en Saskatchewan que la population autochtone est la plus importante au Canada. Une évaluation pancanadienne sur la santé mentale a indiqué que les Autochtones étaient une priorité en Saskatchewan.

Il faut reconnaître que les besoins de base comme le logement, l'emploi, l'éducation, la santé physique et les services sociaux passent avant le programme de rétablissement et de traitement.

J'ai travaillé pendant des années comme conseiller de camp. Je m'occupais des enfants qui ont des besoins spéciaux en raison de mon expérience personnelle. J'ai rencontré des enfants de huit ou neuf ans qui ont perdu espoir, et beaucoup sont des Autochtones. Quand on réussit à établir le contact avec eux, on peut leur redonner espoir. L'espoir se transmet aux autres campeurs et les perceptions changent. Même en une semaine, ils peuvent commencer à s'épanouir.

Je me rappelle que la dernière année où j'ai travaillé au camp, le parent ou le tuteur d'un enfant atteint du syndrome d'alcoolisation fœtale espérait seulement qu'il puisse faire la semaine sans rien voler et, croyez-le ou on, cet enfant a été choisi campeur de la semaine. Je peux vous dire que cela me donne vraiment des ailes. Cela me réjouit. Voilà ce qui peut arriver quand les bonnes méthodes d'intervention existent.

En Saskatchewan, les Autochtones ont plus de démêlés avec la justice que le reste de la population. Il peut exister des programmes pour venir en aide aux délinquants, mais il est beaucoup plus important d'intervenir avant que les enfants se mettent à commettre des infractions. C'est une économie de 50 000 $ par année sans compter tous les autres avantages pour la société.

On pourrait peut-être mettre en place un processus de guérison en milieu correctionnel, qui tiendrait compte de la mentalité et de la culture autochtones, ce qui est important je pense. Les programmes de transition permettant la réinsertion sociale des détenus peuvent être envisagés.

Télésanté est une ressource prometteuse utilisée dans la région. Elle a amélioré l'accès à la pédopsychiatrie. Il existe un protocole provincial à ce sujet et l'utilisation du service Télésanté l'an dernier fait l'objet d'un examen. Cette ressource peut aider à régler le problème de recrutement des spécialistes ou des conseillers. Télésanté sert à des fins éducatives. La formation est faite sur le Web. Cet investissement a été utile et devrait avoir des avantages à long terme.

Le Canada est le seul pays du G8 à ne pas avoir de stratégie nationale en matière de santé mentale et de toxicomanie. Une stratégie nationale de ce genre peut fonctionner avec des ressources financières et un processus de responsabilisation.

Comme c'est indiqué dans votre troisième rapport, les meilleures ressources sont représentées par les clients et les membres de la famille. Où sont les mesures de financement pour qu'ils obtiennent des ressources et soient consultés? Si ce sont les vrais experts, il faut penser à les consulter et à répondre à leurs besoins. Une augmentation de leurs capacités est nécessaire au succès de toute stratégie. Sans ressources, c'est utopique.

J'ai une formation professionnelle et j'ai participé à une foule de conférences, notamment des conférences internationales. J'ai assisté à un atelier sur le développement des capacités à Ottawa, organisé par le Réseau national pour la santé mentale et financé par le gouvernement fédéral. Il y a beaucoup de ressources mais aucun plan directeur pour les utiliser.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'expliquer ce qui, comme le croit le comté, peut améliorer les services de santé mentale et de toxicomanie dans notre province et notre pays. Les problèmes sont considérables et il faut mettre l'accent sur le développement des capacités de chaque région. C'est donc important de fournir des ressources ciblées et fondées sur des preuves aux professionnels des domaines de la santé mentale et des toxicomanies, aux fournisseurs de services, aux services communautaires, aux clients et aux membres de leur famille, ainsi que de faire de la recherche et d'offrir les médicaments.

Un dernier point : j'ai beaucoup aimé entendre, au cours des conférences, les membres des familles s'exprimer. Leur point de vue est très précieux. C'est aussi souvent ce que trouvent les membres des familles qui participent à ces conférences. Ils estiment que c'est une intervention utile. Je crois qu'il faut examiner la question de près; c'est très important.

Ceci met fin à mon exposé.

Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Downton. Nous allons maintenant entendre Les Gray et Anne-Marie Ursan, après quoi nous vous poserons des questions.

M. Les Gray, coprésident, Comité consultatif sur la santé mentale et les toxicomanies, Five Hills Health Region : Merci, sénateur Keon et sénateur Callbeck. Merci également à la greffière et à l'attaché de recherche qui jouent un rôle important, je me rends compte.

Le comité a consacré beaucoup de temps à la préparation de ce rapport en s'inspirant du vôtre, qui est le point de départ de tout ceci.

Je n'ai rien d'autre à ajouter, sauf pour dire que, quand vous retournerez à Ottawa, nous espérons que l'étude de toute la documentation recueillie donnera lieu aux changements que nous attendons. Nous vous remercions du temps que vous nous accordez; je sais que vous ne seriez pas ici si le sujet ne vous intéressait pas beaucoup, et je tiens à vous en remercier.

Mme Anne-Marie Ursan, gérante, services de réhabilitation, Comité consultatif sur la santé mentale et les toxicomanies, Five Hills Health Region : Sénateurs, je travaille dans le domaine de la santé mentale et des toxicomanies dans la Five Hills Health Region. C'est le Comité consultatif en matière de santé mentale et de toxicomanies de cette région qui vient témoigner aujourd'hui, et j'aimerais souligner que le comité est très important dans la région. Il est composé de représentants de divers milieux. Au cours des derniers mois, ils ont examiné de près le rapport provisoire du comité et ont rédigé un document qui formule leurs réponses aux questions soulevées. Le mandat du comité consultatif a aussi été distribué aux membres. C'est vraiment un travail de collaboration, de partenariat, qui a suscité beaucoup de réflexion de la part des membres qui ne sont pas ici aujourd'hui, mais dont la liste est jointe en annexe.

Le sénateur Callbeck : Merci d'avoir produit ce rapport. J'y ai jeté un coup d'œil rapide et on voit tout de suite que vous y avez consacré beaucoup de temps, d'efforts et d'énergie. Il va nous être utile au cours de nos discussions et pour la rédaction de nos recommandations au gouvernement fédéral.

D'abord, quel territoire couvre la Five Hills Region?

M. Gray : Elle s'étend de la frontière de la province au sud, jusqu'à Chaplin, je pense, à l'ouest, Belle Plaine, à l'est, et Central Butte au nord. C'est une région assez vaste. Elle compte une population d'environ 60 000 personnes. Moose Jaw en est le point central, où les services sont offerts. C'est une région à la fois urbaine et rurale. Comme vous le savez probablement, la population rurale diminue lentement en raison des nombreux changements que la société connaît. Il n'y a pas de collectivités autochtones dans la région, mais nous croyons que le déplacement des membres de Premières nations vers les petites municipalités et localités va probablement nous faire connaître certains des problèmes associés aux Autochtones.

Le sénateur Callbeck : La même chose se passe dans ma province où les gens ont tendance de plus en plus à s'installer à Charlottetown et à Summerside; ce sont certes les régions rurales qui en souffrent.

M. Gray : Et on ne veut surtout pas abandonner les régions rurales de cette magnifique province.

Le sénateur Callbeck : Tout à fait. Vous avez parlé du manque de psychiatres. L'un des témoins de ce matin a mentionné que Regina comptait moins de psychiatres que Saskatoon. M. Downton a indiqué que ce phénomène s'expliquait notamment par le manque de soutien communautaire; y en a-t-il davantage à Saskatoon?

M. Gray : À Saskatoon, il y a l'hôpital universitaire. Les psychiatres ont donc tendance à s'installer dans cette région. Regina a accès à un bassin de psychiatres, mais ce n'est pas une ressource sur laquelle on peut toujours compter. Nous avons besoin de psychiatres capables de traiter les problèmes des enfants, bien qu'un psychiatre le fasse à Regina via Télésanté et que nous puissions généralement établir des communications entre les psychiatres de Moose Jaw et les personnes en place à Regina.

En toute franchise, c'est peut-être l'orientation que nous allons choisir. Lorsqu'on est aux prises avec un enfant éprouvant des troubles psychiques, le besoin est urgent et il ne faut pas attendre trop longtemps parce que plus vous attendez, plus le programme s'aggrave.

Le sénateur Callbeck : Est-ce que vous utilisez beaucoup Télésanté?

M. Gray : C'est devenu effectivement un mécanisme très utile. Nous l'utilisons pour la santé mentale de même que pour les collectivités isolées. Les médecins des régions rurales peuvent se servir de ce réseau de communication pour parler à un spécialiste de Moose Jaw afin d'obtenir une décision ou de l'information concernant des patients ou un traitement. C'est d'ailleurs l'office régional de santé Five Hills de Moose Jaw qui a piloté ce dossier.

M. Downton : Je participe à des réunions de prière à l'église. Notre groupe est très restreint, mais il compte deux parents ayant des enfants adultes atteints de maladie mentale. En raison de la pénurie de psychiatres, il est rare qu'ils puissent obtenir des visites. Essentiellement, les psychiatres ont seulement du temps pour les prescriptions et les consultations externes. Il arrive parfois que ces parents se sentent démunis ou frustrés. Ce n'est pas la faute des psychiatres; je crois qu'ils font le meilleur travail possible compte tenu des ressources limitées disponibles. J'estime qu'il est vraiment important que ces gens aient accès à tout le soutien possible et qu'on ait l'occasion de discuter à fond de toutes ces choses, notamment pour les membres de la famille. Il est primordial que l'on en fasse une priorité.

Le sénateur Callbeck : Avec toute votre expérience et votre expertise, Darrell, vous êtes un porte-parole formidable. Merci.

Le vice-président : Environ combien de villes sont desservies par l'office régional Five Hills et pourraient appuyer la mise en place d'une infrastructure de services de santé mentale pouvant être fondée, par exemple, sur une combinaison d'installations de services sociaux et de santé?

M. Gray : Il y a des centres de santé dans certaines petites collectivités parce qu'il est impossible d'y attirer un médecin d'exercice privé. Ils souffrent d'un manque de dialogue avec les autres médecins et ils finissent par déménager vers des villes plus grandes.

Nous offrons des services d'immunisation et tous les services de santé publique. Les cliniques sont habituellement ouvertes deux ou trois jours par semaine, selon la taille de la population. Certaines des cliniques peuvent compter sur des infirmières psychiatriques pouvant parfois être utiles. Quoi qu'il en soit, les gens doivent généralement se rendre à Moose Jaw pour obtenir des soins psychiatriques, et le font habituellement à la suite d'une recommandation ou d'un rapport du médecin pratiquant dans leur région rurale.

Le vice-président : Pour l'infirmière, par exemple, dans une petite ville?

M. Gray : Oui.

Le vice-président : Pour ce qui est des services de soutien dont aurait besoin un membre de ces petites collectivités qui est sans revenu et sans logement, existe-t-il des liens efficaces entre Moose Jaw et sa communauté pour lui donner accès à de tels services ou est-ce que la personne doit absolument déménager à Moose Jaw?

M. Gray : Je crois qu'Anne-Marie Ursan pourra vous répondre à ce sujet parce qu'elle a continuellement à composer avec ce genre de situations.

Mme Ursan : Parmi les phénomènes que nous constatons dans notre région, on peut noter l'évolution des soins de santé primaires. Pour la communauté de Central Butte, une équipe a été constituée et la réponse des citoyens est telle que l'équipe peut intervenir dès qu'une personne se retrouve aux prises avec un problème de santé mentale de telle sorte qu'une infirmière spécialisée et un psychiatre puissent répondre à ses besoins.

Les intervenants en soins infirmiers en santé mentale s'efforcent de répondre à tous les besoins de la personne, y compris pour ce qui est du logement et des autres mesures de soutien communautaire. Nous avons débuté dans la région de Central Butte, et le programme prévoit que les régions d'Assiniboia et de Gravelbourg vont également mettre sur pied des équipes d'intervention en soins de santé primaires pour que les gens de ces collectivités profitent d'un meilleur accès à ces soins. Ce sont les professionnels et les spécialistes de Moose Jaw qui se déplacent pour visiter ces communautés. Il y a également un psychiatre et une infirmière en santé communautaire qui se rendent dans la région d'Assiniboia.

Nous offrons aussi ce que nous appelons un milieu résidentiel approuvé, où des personnes aux prises avec une maladie mentale chronique peuvent vivre sous supervision dans une petite ville nommée Rockglen.

Voilà donc pour les initiatives qui voient le jour sous la responsabilité de l'office régional de santé. Cependant, si les gens veulent avoir accès à toute la gamme de soins, y compris le logement, des programmes d'emploi et des activités productives davantage disponibles, ils ont tendance à déménager dans les plus grandes villes.

Le vice-président : Le système offre-t-il la flexibilité voulue pour que ces personnes puissent choisir de demeurer dans leur village, que les fonds puissent aller aux familles qui prennent soin d'elles, qu'on puisse leur trouver une chambre dans un foyer stable, notamment, plutôt que de les obliger à déménager à Moose Jaw, dans un environnement qui ne leur est pas familier?

Mme Ursan : Il existe certaines possibilités en ce sens et il y a actuellement une personne dans une communauté rurale assez éloignée qui reçoit une médication injectable à effet prolongé. Quelqu'un de Moose Jaw s'occupe d'amener cette personne à la clinique pour le traitement et de l'aider un peu dans ses tâches ménagères, notamment. Un soutien financier est également accessible aux familles qui doivent prendre soin d'une personne aux prises avec une maladie mentale chronique. Cette aide financière est offerte au titre du logement et des médicaments.

Il y a encore des lacunes à combler; tout le monde a besoin d'une raison pour se lever le matin et d'une activité pour occuper ses journées, et il est bien certain que les options en ce sens sont plus limitées dans les communautés rurales. La personne dont je vous parle n'a pas de problème à ce chapitre. Sa famille est tout près et elle est bien intégrée à la collectivité, de telle sorte qu'on lui trouve suffisamment de choses à faire et qu'elle peut avoir des interactions avec les membres de sa famille et de sa communauté.

C'est un mécanisme qui peut donner des résultats, bien que ce ne soit pas une panacée. Les mesures de soutien sont en place et c'est essentiellement à la personne qu'il revient de décider quelle gamme de services elle souhaite obtenir. Si elle veut avoir accès à la totalité des services, elle va déménager; si elle arrive à se tirer d'affaires et préfère demeurer dans sa petite collectivité, les infirmiers et infirmières vont tout mettre en œuvre pour déployer les mesures de soutien nécessaires à cette fin.

Le vice-président : Si une personne vivant avec un trouble mental dans un petit village a temporairement besoin d'un logement à temps plein, d'un soutien financier à temps plein et ainsi de suite, qu'advient-il d'elle?

Mme Ursan : Un résident d'une collectivité rurale qui a besoin de séjourner ne serait-ce que pendant une courte période dans la ville de Moose Jaw peut être admis dans une unité de soins si cela est nécessaire. Ainsi, la plupart des gens vont normalement s'adresser aux services d'accueil pour que quelqu'un puisse évaluer leurs besoins. C'est ainsi que nous déterminons les services auxquels les gens doivent avoir accès. Une fois que cela est établi, nous préparons un programme. Il y a toute une gamme d'options de logement, y compris les milieux résidentiels approuvés. À compter de l'automne, nous offrirons un programme de séjour en appartement avec soutien, de manière à ce que les gens puissent vivre avec un maximum d'autonomie en ayant recours aux mesures de soutien dont ils ont besoin. Dans certains cas, il faudra leur rappeler de prendre leurs médicaments; pour d'autres, ce sera de l'aide pour la préparation des repas.

Plus souvent qu'autrement, le soutien financier vient du ministère provincial des Ressources communautaires et de l'Emploi. Certaines personnes reçoivent des prestations d'invalidité dans le cadre du Régime de pensions du Canada. Si elles ont besoin d'aide pour gérer leur revenu, l'Armée du Salut offre des services d'administration fiduciaire. Des infirmières communautaires en santé mentale se chargent d'élaborer le plan de soutien.

En outre, ces personnes ont accès à des tutorats pour l'apprentissage de la vie autonome. Si une personne choisit de ne pas participer au programme de séjour en appartement avec soutien et de se trouver elle-même un logement, le tuteur pourra l'aider à planifier ses menus, prévoir ses repas, remplir ses déclarations de revenus, faire la lessive ou pour tout autre besoin déterminé. Bien évidemment, ils ont aussi accès à leur psychiatre traitant, à l'infirmière et au centre de ressources communautaires offrant des programmes de jour, des activités de groupe et des activités éducatives. Nous offrons même maintenant un atelier de yoga du rire une fois par semaine ainsi que de la musicothérapie; nous nous adaptons en fonction des intérêts du groupe client.

Il y a également des programmes d'emploi. L'un d'eux s'appelle Transition to Employment et est notamment financé par Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC). Les participants y acquièrent des habiletés sociales, des connaissances pratiques et des compétences préalables à l'emploi. Ils profitent ensuite du soutien d'un mentor qui les aide à trouver un emploi à temps partiel ou à temps plein dans la collectivité.

Dans le cadre d'un programme de soutien de l'emploi dans la collectivité, il y a également une équipe des menus travaux qui permet aux gens de travailler autant d'heures qu'ils en sont capables durant la semaine. Il s'agit souvent de travaux à forfait comme tondre le gazon, pelleter la neige ou faire du ménage. Certains ont suivi une formation pour pouvoir accepter eux-mêmes des contrats de ménage, ce qui fait que le SPEC doit trouver autre chose. Nous faisons tout notre possible, mais c'est encore insuffisant sous bien des aspects. Darrell pourrait peut-être vous en dire davantage.

M. Downton : Je crois que je devrais. Je suis probablement moi-même un exemple de réussite, car j'ai débuté avec le programme SPEC qui m'a permis d'acquérir une certaine confiance. Lorsque vous travaillez, vous avez l'impression d'apporter une contribution productive et cela vous donne de l'énergie. J'ai acquis de l'expérience, les travailleurs nous aidaient beaucoup et étaient très patients avec nous de telle sorte que nous avons pu acquérir des compétences de façon très efficace. Depuis 1996, je travaille dans une résidence pour personnes âgées, ce qui me satisfait pleinement, parce que j'ai un très bon employeur. Mes besoins sont pris en compte et grâce aux compétences que j'ai acquises, j'apprécie grandement mon expérience de travail à cet endroit. C'est une expérience très positive pour moi.

Le vice-président : Je trouve que c'est formidable. Je voudrais en savoir plus au sujet de ce yoga du rire. Je crois que cela pourrait nous être utile à Ottawa. Pouvez-vous m'en parler?

Mme Ursan : Ce n'est pas moi qui suis la monitrice accréditée. Nous y avons en fait accès grâce à l'Association canadienne pour la santé mentale. Ainsi, les gens rient lorsque des éléments humoristiques leur sont présentés, mais tout dépend de leur capacité de « saisir » ou non. Le yoga du rire est une activité physique et on dit souvent qu'il est aussi bénéfique d'avoir un bon rire durant environ sept minutes que de faire du tapis roulant pendant à peu près le même temps. C'est vraiment une activité physique qui favorise probablement le dégagement de substances chimiques pour que nous nous sentions mieux. Cela nous permet de mieux relaxer. Le nombre de blessures diminue et c'est également une activité qui nous aide à rester jeune.

C'est en quelque sorte un programme structuré où les gens ont la possibilité de rire, de produire le son d'un rire et de participer à des activités qui déclencheront un rire spontané. À la fin, le groupe client peut se dire que c'est un excellent exercice. Il y a un peu de mouvement pour des gens qui généralement ne bougent pas trop et il y a aussi un climat de bonne humeur. Lorsque nous marchons tous autour de la salle en répétant « ha-ha-ha, ho-ho-ho, hé-hé-hé », l'enthousiasme est plutôt contagieux.

Je sais que certains lieux de travail ont intégré des programmes de rire afin de rehausser le moral des troupes, de faire quelque chose de complètement différent et d'offrir un genre de distraction en guise de pause-café. C'est un exercice qui favorise une saine respiration grâce à quelques activités bien structurées et, ce qui importe le plus pour nous, une interaction avec d'autres personnes qui s'amusent autant que nous.

M. Gray : J'ai participé à une séance où le moniteur nous a fait rire avant de nous demander à quoi nous pensions pendant que nous riions. Personne n'a pu lui répondre parce que nous étions dans un tel état de relâchement que nous avions oublié toutes les préoccupations que nous pouvions avoir. D'une certaine façon, c'est un bon outil psychiatrique.

M. Downton : Je crois également qu'on s'amuse bien de manière générale au centre de services communautaires et je pense que ça aide beaucoup. J'ai un exemple personnel à cet effet. Un gars avait une mauvaise journée et était plutôt perturbé. Je peux être comique à mes heures et je me suis servi de l'humour, sans me moquer de lui, pour désamorcer les choses; il s'est senti mieux et le rire lui a vraiment été bénéfique.

Au déjeuner du maire lorsque cet exposé nous a été présenté, on nous a également dit qu'une amélioration de 10 à 15 p. 100 du moral des troupes se traduisait par une augmentation de 40 p. 100 de la productivité. Cela est en grande partie attribuable à l'humour et à l'appréciation de la vie. Il est bien certain que les choses se passent beaucoup mieux lorsqu'un tel climat prévaut.

M. Gray : Sénateurs, vous pourriez peut-être transposer cela à Ottawa et nous pourrions voir un peu plus de bonne humeur et peut-être davantage de productivité en Chambre.

Le vice-président : Message reçu.

Le sénateur Callbeck : J'ai quelques questions concernant le tutorat pour l'apprentissage de la vie autonome. Comment procède-t-on pour désigner un tuteur pour une personne? Si vous avez besoin d'aide pour votre déclaration de revenus, devez-vous faire appel à un tuteur différent que si vous avez un problème de logement?

Mme Ursan : Une fois qu'un tuteur vous est assigné, c'est votre tuteur et il s'occupe de tout. Ils sont censés être capable de faire appel aux ressources nécessaires lorsqu'ils ne sont pas en mesure d'offrir un service eux-mêmes.

Le sénateur Callbeck : Je constate que votre mandat prévoit notamment que vous devez formuler des recommandations quant à la mobilisation efficace de la communauté et du grand public dans les dossiers touchant la santé mentale et la toxicomanie. Pourriez-vous apporter à ce sujet des précisions qui n'ont pas encore été données ce matin?

M. Gray : Tous les secteurs du district sont représentés au sein de notre comité. Lorsque nous nous penchons sur la toxicomanie, y compris le phénomène du crystal meth, nous obtenons des comptes-rendus de la situation dans les différentes petites collectivités. Il est toujours intéressant de savoir ce qui se passe dans les petites villes parce que les problèmes qu'on y retrouve finissent par se manifester dans l'ensemble de la région. Ces mécanismes de communication nous permettent de suivre l'évolution de la situation.

Il y a eu un grand nombre de suicides dans les communautés rurales lorsque la conjoncture agricole n'était pas bonne, et elle ne s'est d'ailleurs pas encore améliorée. Il y a eu par exemple des cas où, par temps clair et en plein jour, sur une route parfaitement praticable, un camion d'une demi-tonne conduit par un agriculteur est entré en collision avec un semi-remorque sans raison apparente. Cela nous donne matière à réflexion pour d'éventuelles recherches. Cependant, parce qu'il est impossible de savoir si le geste était délibéré ou non, on ne peut que formuler des hypothèses.

C'est la communauté agricole qui nous a mis au fait de la situation. Des épouses d'agriculteur sont extrêmement stressées parce que leur mari est lui-même extrêmement stressé; les enfants sont aussi très stressés car ils ne voient aucune perspective d'avenir, aucune possibilité de rester sur la ferme. Ce sont des préoccupations dont nous avons été saisis.

Ces préoccupations peuvent donner naissance à des problèmes de santé mentale et de toxicomanie et nous nous efforçons de déployer des services d'approche pour aller parler à ces gens; nous avons des conseillers qui visitent les communautés. Il est toutefois difficile de desservir une si grande région; si vous n'avez pas suffisamment de personnel pour répondre aux besoins, vous ne pouvez pas faire grand-chose.

Le sénateur Callbeck : Utilisez-vous un processus public de nomination pour le comité consultatif?

M. Gray : Oui.

Le sénateur Callbeck : Recevez-vous beaucoup de candidatures?

M. Gray : À la dernière occasion, il s'agissait simplement de remplacer certains membres. Au départ, je crois qu'il y avait 16 candidats. Il faut considérer la contribution pouvant être apportée au comité ainsi que la provenance des candidats, parce que nous voulons que presque tous les secteurs soient représentés, et nous sommes parvenus à le faire. Il y a cependant eu des occasions où il a fallu solliciter un membre de la communauté pour qu'il fasse partie du comité consultatif.

Le sénateur Callbeck : J'ai une dernière question. Je vais me faire un devoir de lire votre mémoire en entier, mais je note qu'à la dernière page, vous indiquez que le conseil provincial pour la qualité des soins de santé fait du bon travail pour ce qui est de la santé mentale. Pourriez-vous nous en dire davantage au sujet de ce conseil?

M. Gray : Je n'ai malheureusement pas beaucoup travaillé avec le conseil. Il a été mis sur pied par le ministre et fonctionne de façon plus ou moins indépendante par rapport au gouvernement. Il conseille le gouvernement dans différents dossiers, dont celui de la santé mentale. Il s'occupe aussi des questions liées au recrutement des médecins et aux innovations; en fait de toutes les questions d'intérêt dans le domaine de la santé.

Nous croyons qu'il devrait y avoir collaboration avec le conseil national. Plutôt que d'essayer de tout faire nous-mêmes, il est plus logique d'intégrer les ressources au sein d'un groupe plus large de manière à ne pas perdre son temps à réinventer la roue dans toutes les régions de ce grand pays. Nous pouvons apprendre de l'expérience des autres et c'est justement, je crois, l'objectif visé. Il est important de partager l'information.

Le sénateur Callbeck : Depuis combien de temps ce conseil existe-t-il?

M. Gray : Je crois bien que cela fait trois ans.

Mme Ursan : Le conseil pour la qualité des soins de santé existe depuis quelques années. Il portait auparavant le nom de Health Service Utilization and Research Committee. Les gens du conseil ont notamment été d'un grand secours à l'office régional de la santé en 2002, si je ne m'abuse, en offrant des services documentaires et en nous fournissant des renseignements sur les pratiques exemplaires. Ils ont également désigné un membre de ce qui est devenu le conseil pour travailler au sein du comité chargé de la révision des services liés à la santé mentale et à la toxicomanie dans la région.

Grâce à l'aide du conseil, nous avons pu compter sur des indicateurs-clés en matière d'accès, de disponibilité et de pertinence qui ont été utilisés pour le rapport final. Ils nous ont également guidé dans la constitution des groupes de discussion et quant aux mesures à prendre pour assurer l'intégrité du rapport. Ils produisent une grande quantité d'information à notre intention, pas seulement en matière de santé mentale et de toxicomanie, mais concernant la santé en général.

Le vice-président : Je tiens à tous vous remercier à nouveau pour votre contribution.

La séance est levée.


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