Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 8 - Témoignages du 17 octobre 2006
OTTAWA, le mardi 17 octobre 2006
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 19 h 16, pour examiner, en vue d'en faire rapport, la pauvreté rurale au Canada.
Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, mesdames les témoins, et tous ceux qui suivent les délibérations du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, bonsoir. En mai dernier, le comité a été autorisé à examiner en vue d'en faire rapport, la pauvreté rurale au Canada. Trop longtemps, le sort des Canadiens ruraux touchant de faibles revenus a été en partie ignoré par les décideurs et les politiciens.
Pure coïncidence, nous nous réunissons aujourd'hui, jour que les Nations Unies ont désigné Jour international de l'éradication de la pauvreté. Depuis 1993, les gouvernements et les organisations non gouvernementales de par le monde marquent ce jour.
Comme les Nations Unies l'ont souvent signalé, quand on songe à la pauvreté à l'échelle mondiale, on songe très souvent à la pauvreté rurale. Même si la situation dans des pays riches comme le Canada n'est pas aussi sombre que dans les pays en développement, notre pays n'en est pas moins confronté à son propre problème de pauvreté rurale.
Jusqu'à la fin de l'année, le comité recevra divers témoins qui dresseront un portrait de la pauvreté dans les régions rurales. Ces témoignages contribueront à préparer le comité pour les séances qu'il tiendra dans des collectivités rurales à l'échelle du pays au cours de la prochaine année.
Aujourd'hui nous accueillons des représentantes du Secrétariat rural. Le Secrétariat rural a été créé en 1998 pour donner une orientation coordonnée à la stratégie rurale du gouvernement fédéral. Il sert également à sensibiliser le gouvernement et les collectivités où nous nous rendrons, aux enjeux d'intérêt rural. Il est vrai que le Secrétariat rural n'a pas la pauvreté rurale pour mandat spécifique, mais il peut nous aider à comprendre les défis et les inquiétudes particulières des populations rurales, celles qui vivent sur le terrain.
Nous accueillons ce soir Mme Donna Mitchell, directrice exécutive, Secrétariat rural et Secrétariat aux coopératives, et Mme Christine Burton, directrice, Politique rurale et développement stratégique. Mme Mitchell est de Sherbrooke, au Québec, et Mme Burton est de Melville, en Saskatchewan. Nous sommes ravis de vous accueillir. Le problème nous chagrine, mais nous ne voudrions pas entreprendre notre tournée sans vous avoir entendues.
[Français]
Donna Mitchell, directrice générale, Secrétariat rural et Secrétariat aux coopératives, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Madame la présidente, je vous remercie de m'avoir invitée ce soir. Le sujet que vous avez choisi d'étudier au cours de la séance de ce soir et aussi, d'après ce que j'ai compris, au cours de la majeure partie de l'année prochaine, est extrêmement important. Je suis ravie de me présenter devant vous ce soir pour vous donner un aperçu des enjeux auxquels est confronté le Canada rural du point de vue du Secrétariat rural. Et cet aperçu, je l'espère, vous aidera dans votre examen.
[Traduction]
S'il est vrai que le Secrétariat rural est établi au sein d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, le terme « rural » désigne bien plus que l'agriculture. Il inclut aussi le secteur de la pêche, celui de la foresterie, les communautés du Nord, les communautés autochtones, les communautés minières ainsi que les personnes vivant dans ces communautés.
Pour rendre compte de la réalité multidimensionnelle de la vie rurale, le mandat du Secrétariat rural comporte trois volets : premièrement, faire preuve de leadership et de coordination pour le Partenariat rural canadien; deuxièmement, favoriser la coordination et la création de partenariats portant sur les enjeux et les priorités du monde rural; et, troisièmement, encourager le dialogue entre les intervenants ruraux et le gouvernement fédéral.
L'élément clé de notre approche consiste à ce que nous englobions l'ensemble des ministères fédéraux. Nous encourageons les ministères et organismes fédéraux à élaborer leurs programmes et politiques — que ce soit sur le plan économique, social, environnemental ou culturel — pour tenir compte des besoins particuliers des Canadiens vivant en milieu rural et améliorer leur qualité de vie.
S'il est vrai que vous avez abordé avec notre ministre la question des revenus agricoles au Canada, le rôle du Secrétariat rural ne se limite certes pas à l'agriculture, mais englobe la communauté rurale tout entière.
J'aimerais également vous parler brièvement du Secrétariat aux coopératives qui fait aussi partie de la Direction générale à laquelle j'appartiens. Le mandat du Secrétariat aux coopératives consiste essentiellement à veiller à ce que les besoins du secteur coopératif soient pris en considération par le gouvernement fédéral. Nous procurons également aux gouvernements, aux principaux intervenants économiques ainsi qu'au grand public l'information qui favorise la bonne compréhension des coopératives et du modèle coopératif.
Comme vous le savez, ce n'est pas la première fois que cette Chambre s'attaque à la question de la pauvreté rurale. À la fin des années 1960, le Comité Croll s'est également penché sur la pauvreté rurale, ce qui s'est traduit par une plus grande sensibilisation à la pauvreté au Canada.
Dans la foulée, le Secrétariat rural a constaté que la plupart des recherches effectuées sur la question de la pauvreté au Canada avaient porté essentiellement sur la pauvreté dans les zones urbaines. Il existe très peu d'études qui se penchent en particulier sur la pauvreté dans les zones rurales.
Il faut souligner qu'il est souvent difficile de faire la distinction entre ce qui est une « cause » et ce qui est un « effet » de la pauvreté. La pauvreté est l'énigme classique de « l'œuf et la poule ». La pauvreté est, sans conteste, un sujet complexe.
La pauvreté dans les zones rurales comprend les faibles revenus, la pénurie d'emplois, le manque de moyens de transport, ce qui complique l'accès aux possibilités d'emploi et aux services essentiels, les coûts élevés des constructions neuves, la mauvaise qualité des habitations, ce qui se traduit souvent par des coûts de chauffage plus élevés, une mauvaise santé et le manque de soins de santé accessibles, en plus des emplois saisonniers, du niveau d'instruction peu élevé, et le manque d'accès à l'enseignement supérieur. La situation est en fait très complexe.
[Français]
Comme le ministre Strahl l'avait fait observer à ce comité, les communautés rurales qui dépendent des mono industries sont à la merci des répercussions des effets du marché mondial sur ce secteur.
Depuis longtemps, de nombreux changements dans les industries primaires sont le résultat des nouvelles technologies et d'une meilleure productivité. Ce qui mène aussi à la réduction de la main-d'œuvre, à une perte de revenu et une diminution des occasions d'emploi pour les personnes vivant en milieu rural. Plus la productivité augmente, plus les communautés doivent pouvoir aider leurs citoyens déplacés.
[Traduction]
La pauvreté dans les zones rurales peut engendrer l'exode des personnes et des familles en quête de meilleurs emplois pour échapper à la pauvreté. Étant donné que les zones rurales ne sont déjà pas très peuplées, cela peut influer sur la disponibilité des services locaux qui, sans une population suffisante pour financer ou justifier leur présence, pourraient être contraints de mettre la clé sous la porte.
Tel qu'indiqué, les niveaux d'instruction et l'accès à l'éduction, notamment à l'enseignement supérieur, sont bel et bien reliés à la pauvreté rurale étant donné que les compétences professionnelles sont de plus en plus importantes sur le plan des choix professionnels. Il est important de souligner qu'il existe un lien bilatéral entre l'enseignement et l'emploi. Peu d'instruction réduit les capacités d'une personne à décrocher un emploi, et sans emploi, cette personne et sa famille sont moins susceptibles de s'instruire davantage afin de pouvoir gravir l'échelle des salaires, perpétuant ainsi le cycle de la pauvreté.
Les citoyens vivant en zone rurale estiment que le coût de l'enseignement postsecondaire est plus élevé pour leurs enfants qui doivent quitter la région s'ils veulent poursuivre des études.
Le Canada n'est pas le seul pays à devoir relever les défis de la pauvreté rurale. Aux États-Unis, par exemple, des recherches effectuées récemment montrent que l'écart des revenus entre les zones rurales et les zones urbaines résulte d'un niveau d'instruction moins élevé dans les zones rurales, et de moins de concurrence pour les travailleurs au niveau des employeurs ruraux, ce qui se traduit par des salaires moins élevés, un nombre réduit de personnes très qualifiées et d'emplois très bien rémunérés dans le profil des emplois dans les zones rurales.
L'Europe est confrontée à des défis de nature différente en ce qui concerne la pauvreté rurale. Par exemple, en Angleterre, la migration vers les zones rurales, même si elle est synonyme de l'arrivée de nouveaux résidents et de l'apport de nouvelles richesses dans une région, a également des conséquences négatives pour les personnes qui y vivent puisque le prix des habitations rurales augmente et l'accès par habitant à des services ruraux clés diminue en raison de l'augmentation de la population. C'est la preuve de la nature complexe de l'interdépendance du progrès et de la pauvreté.
[Français]
J'aimerais à présent souligner quelques-uns de nos efforts déployés avec le Secrétariat rural dans le but de remplir notre mandat et d'appuyer nos collègues dans l'ensemble du gouvernement fédéral dans leurs efforts visant à traiter des enjeux de la pauvreté rurale.
[Traduction]
Pour faciliter les contacts entre les ministères, les intervenants et les universitaires et faciliter la création de partenariats visant à traiter des enjeux et des priorités du monde rural, nous avons mis sur pied un Réseau pour le développement rural, composé de professionnels dans le domaine de la politique fédérale et de la recherche provenant de 34 ministères et organismes. Cela permet aux analystes des politiques de pouvoir disposer d'un point central et d'un noyau de compétences pour élaborer de nouvelles connaissances et favoriser l'échange d'information sur les questions rurales, ce qui permet ainsi une meilleure collaboration entre les ministères.
Le Réseau national de la recherche sur les questions rurales est un organisme de recherche non gouvernemental parallèle créé en février 2005 pour servir de mécanisme en vue de mieux faire connaître et de sensibiliser davantage à la recherche sur les questions rurales, en plus de faciliter et d'aider à la mise en œuvre de recherches et d'outils destinés aux communautés rurales ainsi qu'aux spécialiste des questions rurales. Le réseau a pour objectif de mettre sur pied un réseau permanent essentiellement virtuel de personnes et d'institutions concernées par la recherche sur les questions rurales et/ou l'application des résultats obtenus à la suite des recherches effectuées dans des zones rurales.
Parmi les travaux récemment effectués, il existe des études portant sur les aspects de la jeunesse des zones rurales et, en particulier, de la migration de cette dernière. Dans les recherches qui se poursuivent avec d'autres ministères, il faut noter des études effectuées sur les indications de la qualité de vie, sur l'infrastructure ainsi que sur la contribution du Canada rural au produit intérieur brut.
Nous savons que vous avez consulté des représentants de Statistique Canada et nous sommes fiers du travail effectué par cet organisme en partenariat avec Partenariat rural canadien, en ce qui concerne la préparation du Bulletin sur les régions rurales et les petites villes du Canada, qui traite de sujets comme la croissance de la population rurale, les tendances de l'emploi, l'utilisation de l'ordinateur et d'Internet par les membres des ménages ruraux. Ce bulletin fait l'unanimité dans le milieu de la recherche sur les questions rurales qui le considère comme l'un des instruments indispensables en matière de recherche dans le cadre des travaux effectués sur des questions concernant les Canadiens vivant en milieu rural. Ce bulletin est disponible à www.rural.gc.ca.
Grâce à l'aide de nos partenaires, nous avons également créé la Base de données sur les collectivités, ou BDC. La BDC a été conçue complètement par le Secrétariat rural, les provinces, les territoires et d'autres ministères fédéraux, et des groupes communautaires. Il s'agit de ressources en ligne offertes gratuitement sur le web et dont le but est d'aider les internautes à rapidement obtenir des données démographiques et socioéconomiques pour des régions géographiques précises ou multiples à partir d'une carte interactive. Nous avons pu cibler toute localité comportant plus de 250 habitants.
Ce site a pour objectif d'aider les internautes à mesurer, évaluer et comparer le rendement des communautés. Grâce à cet outil, les spécialistes du développement communautaire, les universitaires, les décideurs et les citoyens cerneront les principaux aspects et tendances socioéconomiques au niveau de la communauté, compareront les informations et les analyses au fil du temps et entre les collectivités et obtiendront des renseignements et des analyses indispensables à la planification du développement communautaire.
En procurant une source d'indicateurs statistiques cohérents, fiables et accessibles au niveau de la communauté au Canada, les chercheurs et les responsables des politiques, les décideurs au niveau local ainsi que les spécialistes du développement économique, pourront réaliser une analyse comparative portant sur plusieurs questions, parmi lesquelles les indicateurs de la pauvreté rurale, comme le niveau de revenus d'une communauté, le niveau d'instruction, le mouvement de population, et, par la suite, étudier plus en profondeur les politiques et les programmes qui fonctionnent et ceux qui ne fonctionnent pas, où et pourquoi. Cette banque de données est disponible gratuitement à l'adresse suivante : www.cid-bdc.ca.
Conformément à notre mandat, nous avons engagé des dialogues ruraux directement avec 17 000 Canadiens vivant en milieu rural. Ces citoyens ont cerné des sujets de préoccupation et permis au Secrétariat rural de comprendre leurs perspectives, leurs points de vue et leurs priorités et de s'en inspirer.
Il est intéressant de constater que dans nombre de ces dialogues, on remarque que la pauvreté rurale, en soi, n'est pas considérée par les citoyens ruraux comme un problème, bien que quantité des facteurs afférents dont j'ai parlé le sont assurément. Au cours de vos délibérations, vous découvrirez sans doute que la pauvreté rurale n'est pas le cheminement qui suscite l'intérêt des citoyens sur les enjeux et les priorités pour le Canada rural car c'est ce que nous avons nous-mêmes constaté.
[Français]
J'aimerais également parler du profil de nos régions rurales. Pendant vos déplacements à travers le pays pour entendre des témoins, vous trouverez peut-être que ces rapports seront utiles puisqu'ils étudient des indicateurs de la population, les indicateurs économiques et sociaux, ainsi que ceux portant sur les services de santé, en plus de décrire les différences qui existent non seulement entre les régions rurales et les régions urbaines, mais aussi entre les différents genres de régions rurales.
[Traduction]
Vous pourrez avoir accès à ces profils. Nous progressons dans notre travail. Nous n'avons pas encore terminé, mais nous avons déjà diffusé les résultats pour sept ou huit provinces dont les profils sont disponibles à www.rural.gc.ca. Au cours de votre tournée, vous les trouverez utiles pour situer diverses régions dans une province donnée.
Le Secrétariat rural et le Secrétariat aux coopératives se composent également d'un petit élément de programmes, mais c'est le Programme des modèles qui en constitue la majeure partie. Le budget en est modeste, 13,5 millions de dollars, auquel s'ajoutent encore 18,5 millions de dollars, pour un total de 37 millions de dollars. Cela nous aide à orienter des activités dans environ 200 collectivités rurales, et ce, au niveau local, pour une période de cinq ans.
Le Programme des modèles est un programme axé sur la recherche qui analyse les approches de développement rural réussies dans leur propre contexte. S'il est vrai que peu d'argent est investi dans ce programme national, nous pouvons cibler directement les questions que nous voulons étudier et voir leur impact dans les collectivités du Canada de même que les raisons pour lesquelles ces programmes fonctionnent ou ne fonctionnent pas.
Nous avons 21 modèles et encore davantage de collectivités rattachées à ces modèles. Dans certains cas, ils étudient les enjeux reliés aux causes profondes de la pauvreté rurale, telles que l'éducation, l'emploi et les soins de santé.
J'aimerais vous fournir quelques exemples de ces modèles. Parlons d'abord du modèle Les Petits Crayons. Il existe des obstacles qui empêchent les familles rurales de jouer un rôle clé dans le développement de leurs enfants. Ces obstacles proviennent notamment de l'isolement des familles, de la dispersion de la population et du manque de services. Le modèle des Petits Crayons est un club d'alphabétisation de la petite enfance destiné aux parents et aux enfants d'âge préscolaire. Les parents participent à l'élaboration des programmes et à la gestion du club, en plus d'accompagner leurs enfants dans leur apprentissage en faisant des travaux manuels, en jouant à des jeux, en lisant et en se faisant des amis, ce qui profite autant aux parents qu'aux enfants. Les recherches indiquent qu'un faible niveau d'instruction est une des causes de pauvreté. Ce modèle montre comment des collectivités rurales peuvent s'adapter pour relever ce défi d'une manière positive.
[Français]
Le deuxième modèle dont j'aimerais parler est le modèle des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation. Fondé en 1937, et établi dans le sud-est de la France, ce modèle a été conçu par des familles vivant dans les régions rurales pour pouvoir donner à leurs enfants une formation générale, sociale et professionnelle. Ce modèle, qui a fait ses preuves, a été adopté au Canada.
Le modèle des maisons familiales rurales est avant tout une école parallèle conçue par la communauté rurale et avec la participation de cette dernière. Ce modèle propose un programme alternatif de travail et d'études destiné aux étudiants du secondaire. Ce programme repose sur la bonne volonté de la communauté, des éducateurs et des secteurs d'affaires qui s'associent pour proposer aux jeunes un programme de formation professionnelle, tout en veillant à ce qu'ils terminent leurs études secondaires.
La pénurie d'emplois et les faibles niveaux d'instruction contribuent à la pauvreté rurale et ce modèle est une occasion pour les entreprises, les familles et le secteur de l'éducation de répondre aux besoins en main-d'œuvre locale en faisant en sorte que les jeunes gens restent dans leurs communautés grâce à un emploi spécialisé.
[Traduction]
Le dernier modèle dont j'aimerais vous parler est le Modèle de réseau intégré. Les personnes qui vivent dans les régions rurales du Canada savent combien il peut être difficile de trouver des services et d'y avoir accès, qu'il s'agisse de services destinés aux enfants, aux familles, aux jeunes, aux adultes ou aux personnes âgées. De nombreuses personnes ont constaté que même si des services sociaux sont disponibles, ils ne sont pas toujours situés au sein de la communauté ou ne sont pas ouverts pendant les heures où les personnes en ont le plus besoin.
Le Modèle de réseau intégré étudie la manière dont les communautés peuvent bénéficier de l'adaptation de la prestation de ces services en incorporant la prestation de services dans un seul et même endroit et en les offrant par une équipe interdisciplinaire ou encore dans le cadre d'autres innovations ou initiatives établies par la communauté.
Ce modèle fonctionne déjà très bien au Manitoba, et nous espérons le reproduire grâce au réseau Child Care Family Access Network, CFAN, dans d'autres communautés rurales. Port au Port, à Terre-Neuve-et-Labrador, sera la première communauté au sein de laquelle ce modèle sera mis à l'essai.
J'aimerais maintenant revenir aux coopératives qui sont également sous ma responsabilité. Les coopératives canadiennes se sont avérées efficace pour traiter de certaines questions en rapport avec la pauvreté rurale. Les coopératives se sont avérées un moyen incontestable d'entraide mutuelle, permettant aux personnes de travailler ensemble pour atteindre des objectifs communs, ce qui aide à l'édification de la cohésion sociale en favorisant la participation, la confiance et l'égalité entre les citoyens. Au cours de leurs cent ans d'existence au Canada, les coopératives ont aidé des milliers de personnes et de communautés défavorisées à trouver des solutions efficaces aux défis sociaux et économiques, tout en donnant, au niveau local, des compétences en leadership, une autonomie et un contrôle. Les Canadiens continuent d'avoir recours au modèle coopératif de manière innovatrice pour répondre à un large éventail de besoins et de défis, notamment les besoins des groupes autochtones et d'immigrants, des jeunes, des personnes handicapées et des communautés à faible revenu.
En 2003, le gouvernement du Canada a lancé un programme quinquennal de 15 millions de dollars, l'Initiative de développement coopératif, l'IDC, afin de créer et d'accroître la capacité de développement coopératif au Canada, et de faire des recherches et des essais sur des applications novatrices du modèle coopératif dans le but de répondre aux enjeux économiques et sociaux auxquels font face les Canadiens en milieu rural et urbain.
Les projets coopératifs mis en œuvre au Canada au cours des trente derniers mois grâce au financement de l'IDC proposent des services de santé et des soins à domicile, font la promotion de l'emploi chez les jeunes, du tourisme, de l'agriculture respectueuse de l'environnement et de la lutte contre la pauvreté. Ces coopératives ont pour objectif commun d'améliorer le bien-être économique des individus et des communautés. Elles sont particulièrement utiles dans les petites communautés rurales.
Pour conclure, la plupart des conséquences de la pauvreté rurale, soit des logements insalubres, le manque d'instruction, le manque de moyens de transport et la mauvaise santé, sont malheureusement aussi des causes de pauvreté. Ces attributs de la pauvreté inextricablement liés indiquent un cycle où les effets profonds et négatifs de la pauvreté influencent, génération après génération, des groupes de population vulnérables, dont les Canadiens vivant en milieu rural. Il est clair qu'un seul ordre de gouvernement ne peut à lui seul résoudre la question de la pauvreté rurale, et qu'une seule action ne sera pas la solution miracle qui mettra un terme à la pauvreté rurale. Toutefois, je pense que le fait que le Secrétariat rural encourage et appuie une multitude de ministères fédéraux pour qu'ils prennent en compte les préoccupations et les besoins uniques des communautés rurales dans le cadre des programmes et des services offerts est un élément essentiel de ce puzzle.
Nous avons hâte de lire votre rapport et vos recommandations sur cette question. N'hésitez surtout pas à nous contacter si nous pouvons vous aider davantage.
La présidente : C'est un plaisir de vous avoir parmi nous. Madame Burton, voulez-vous ajouter quelque chose?
Christine Burton, directrice, Politique rurale et développement stratégique, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Je vous encouragerais à passer aux questions.
Le sénateur Tkachuk : Grâce à la croissance qu'a connue le Canada au cours des deux dernières décennies, à l'Accord de libre-échange et à la maîtrise du déficit opérée par le gouvernement libéral, il semble y avoir beaucoup d'emplois. Aujourd'hui, au Sénat, le sénateur Mitchell nous a parlé de Grande Prairie et des difficultés d'emplois qu'on y trouvait ainsi que dans d'autres collectivités de l'Ouest. C'est aussi un problème grave en Colombie-Britannique et qui est en train d'en devenir un en Saskatchewan. Le problème est le suivant : nous ne pouvons pas recruter de gens pour occuper les postes vacants. Il n'y a donc pas assez de gens pour occuper les emplois disponibles. Je ne vous parle pas nécessairement d'emplois pour travailleurs non qualifiés, mais plutôt d'emplois pour travailleurs qualifiés dans le secteur minier. Un sénateur de la Colombie-Britannique a dit qu'on obtient un salaire de 95 000 dollars par an pour ces emplois, mais qu'il restait encore difficile de trouver des mineurs pour les occuper.
La dernière fois que nous avons étudié les statistiques, il n'y avait pas une grande différence dans les taux de pauvreté ruraux et urbains. Avez-vous des programmes qui favorisent la mobilité, ou disons-nous que les personnes ont le droit d'être pauvres et que même s'il y a des emplois disponibles, elles ne sont pas obligées de les accepter? Comment faire face à ces questions de politique publique lorsque l'économie est en plein essor? Le gouvernement fédéral et l'opposition croient qu'il faut réduire les impôts, ce qui me semble une manne provenant du ciel. Je sais que ça permettrait à l'économie de continuer à prospérer.
Au cours des vingt dernières minutes, personne n'a parlé des emplois disponibles. Est-ce que les gens acceptent ces emplois? Est-ce qu'ils ne veulent pas les accepter? Qu'en est-il? Pourquoi y a-t-il des pauvres?
Mme Mitchell : Votre question est très intéressante et présente un excellent point de départ. Oui, il existe beaucoup d'emplois, et on ne constate pas de diminution dans toutes les communautés rurales. En Europe, plusieurs études ont été effectuées sur les communautés qui vont de l'avant et celles qui accusent un retard. Comment se fait-il, lorsqu'on regarde deux communautés qui semblent connaître les mêmes avantages et qui ont toutes les deux été profondément touchées par les changements mondiaux et des choses qui échappent à la volonté des Canadiens, que l'une réussit à aller de l'avant, à s'adapter, alors que l'autre n'y parvient pas?
Une chose utile que nous avons constaté — et vous la trouverez dans nos profils régionaux — c'est que toutes les zones rurales ne sont pas équivalentes. Si vous vivez à proximité d'une région métropolitaine, vous pouvez devenir une des zones rurales les plus prospères du Canada. Les zones où l'influence métropolitaine est la plus forte sont celles où les habitants vont en ville pour y tirer environ 30 p. 100 de leur revenu. Ils utilisent toutes les installations de la ville. Leurs enfants fréquentent les écoles de la ville de même que les institutions sociales. Il s'agit d'un endroit prospère, et vous pouvez probablement y trouver une plus grande maison, qui soit de meilleure qualité, pour encore moins d'argent. Il s'agit de la zone la plus riche du Canada, et les gens qui y habitent sont en fait mieux nantis que bien des gens qui vivent en ville.
En dehors de cette zone, il y en a d'autres qui sont encore à distance de marché. Les gens gagnent encore leur vie vraisemblablement dans la région métropolitaine. Il y a de bons réseaux de transport et de bonnes infrastructures sociales et économiques. Ils peuvent se diversifier et contourner certains des problèmes sur lesquels ils n'ont pas d'emprise.
Au palier suivant, l'influence au niveau métropolitain est faible. Il y a de moins en moins de possibilités. Dans les régions rurales très reculées, il y a très peu d'ouvertures. Certaines régions ne sont accessibles que par des routes de glace l'hiver, sinon, le ravitaillement ne peut se faire que par avion. Dans cette zone, les défis sont considérables pour les écoles, les services et l'infrastructure sociale.
Il y a des types de zones rurales très différents. Dans son étude du Canada, l'OCDE dit qu'il existe une profusion d'actifs sous-utilisés dans le Canada rural. Il y a des femmes et des Autochtones qui n'ont pas d'emploi. Et quand ils en ont un, c'est un emploi de bas de gamme. Il existe une infrastructure qui pourrait être exploitée et élargie, et des perspectives nouvelles, mais encore faut-il trouver des personnes compétentes pour exploiter ces possibilités.
Vous parlez de régions qui ont réussi à continuer de se développer. Il existe une partie du Canada rural qui n'a pas encore réussie à profiter de la croissance en soi. En revanche, des communautés comme Lethbridge et Grande Prairie n'ont pas ces problèmes. En fait, dans le cas de certaines d'entre elles, comme Fort McMurray, c'est l'inverse, on n'y trouve pas assez de gens pour combler tous les emplois parce que l'infrastructure d'accueil n'arrive pas à suivre.
Que pouvons-nous faire pour aider les régions à croissance nulle ou faible à s'adapter, pour donner aux personnes de ces régions des compétences qui leur permettront d'y rester si elles le souhaitent, et pour atténuer la pauvreté grâce à la présence de bons emplois, de bons services, etc.?
Le degré de préparation des gens qui vivaient autrefois dans des communautés prospères et viables qui doivent s'adapter à une nouvelle réalité varie considérablement selon les régions du pays.
Le sénateur Tkachuk : Avons-nous un cadre stratégique visant à permettre à des gens qui vivent dans une zone à croissance nulle d'y rester, et est-ce que le gouvernement est tenu d'encourager le développement économique, ou la politique consiste-t-elle à inciter les gens à partir là où il y a du travail? En fonction de quel cadre stratégique utilisons- nous notre argent?
Mme Mitchell : Je ne crois pas que les gouvernements aient essayé de promulguer le droit de rester sur place. Je peux vous parler de l'attachement des gens à leur terre ou à la terre de leurs parents et de leurs ancêtres. Les Autochtones sont particulièrement attachés à la terre qu'ils ont toujours connue, et ils veulent y rester.
Que faire face à cette situation? Encore une fois, je ne pense pas qu'on ait essayé d'affirmer le droit de rester en bénéficiant de certaines formes d'aide, mais il y a peut-être d'autres solutions là où l'on peut envisager certaines perspectives. Au cours de nos entretiens, nous avons constaté que vers la troisième année, les citoyens ruraux manifestaient la volonté de prendre leur avenir en main et de faire quelque chose eux-mêmes. Ils veulent déterminer la vision de leur communauté pour l'avenir et élaborer à partir de là des stratégies. Cela ne signifie pas nécessairement que leur communauté va se développer, mais simplement ils veulent trouver le moyen d'assurer la pérennité de leur communauté.
Des recherches effectuées aux États-Unis montrent qu'un certain nombre d'éléments sont indispensables pour garantir cette durabilité. Il y a un leadership précis qui est important, un leadership qui rassemble les citoyens et les mobilise autour d'une cause commune. La communauté doit être en mesure d'exploiter toutes les ressources que les gouvernements mettent à sa disposition. Nous avons des centaines de programmes, mais il y a des communautés qui n'en profitent pas parce qu'elles ne savent pas rédiger des propositions, assurer le contrôle des dépenses que nous exigeons, etc., même parfois simplement s'adresser à la source de ces programmes.
Comment les communautés acquièrent-elles les qualités de chef leur permettant de rassembler les gens et de concevoir un plan et une stratégie durables? Nous avons observé de telles qualités dans bon nombre des communautés d'avant-garde mais non dans celles qui tirent de l'arrière. Ce genre de leadership se fonde sur une raison d'être quelconque puis finit par trouver des stratégies. En règle générale, ça ne se manifeste pas de manière spectaculaire; on commence d'abord par un emploi, par un établissement, par une nouvelle série de services, ou encore en transformant les services déjà en place de manière novatrice. Les milieux où la croissance se fait attendre pourraient certainement étudier ces phénomènes et s'en inspirer dans leurs politiques.
Le sénateur Mitchell : Le sénateur Tkachuk pose une question essentielle et dont les prémisses sont probablement vraies. Par ailleurs, est-il raisonnable de penser que ceux qui ne réussissent pas à trouver de l'emploi chez eux n'en trouveront pas davantage s'ils déménagent ailleurs? Il leur manque peut-être l'ensemble des compétences ou la formation nécessaires à l'obtention d'un emploi.
En second lieu, toutes sortes de gens déménagent pour trouver de l'emploi ailleurs. Voyez ce qui se passe à Fort McMurray, la blague bien connue, qui est devenue une sorte de colonie de Terre-Neuve-et-Labrador. C'est merveilleux, et d'affirmer que les gens ne quittent pas leur milieu d'origine pour trouver du travail revient à nier la réalité ainsi que les initiatives, la force et l'engagement de ces gens. Ce genre de chose se produit partout au pays.
Toutefois, si tous ceux et celles qui sont à la recherche d'un emploi quittaient leur milieu, alors toutes les infrastructures dans lesquelles on a investi, les réseaux communautaires et les infrastructures essentielles de grande valeur disparaîtraient. Il n'y a donc pas de solution absolue dans ce genre de situation. La plupart des gens tiennent à travailler, tout au moins la plupart des gens que j'ai rencontrés.
Cela m'amène à la question suivante. Vous avez conçu un modèle de leadership intéressant, susceptible de résoudre certains de ces problèmes. Cela dit, comment trouve-t-on les gens qui peuvent avoir de telles qualités et comment les forme-t-on pour qu'ils deviennent des dirigeants? Est-ce le maire, ou le préfet ou encore le directeur d'école? Qui s'en occupe? La chambre de commerce? S'agit-il d'une seule personne?
Mme Mitchell : Voilà une excellente remarque. Les gens vont-ils quitter leur milieu pour trouver du travail? Oui, ils le feront. Et les gens qui se déracinent pour échapper à la pauvreté dans une région, tout en manquant peut-être des compétences nécessaires pour décrocher des emplois chez eux, sont-ils mieux en ville? Si l'on en croit certains renseignements, ce n'est pas le cas. En effet, il leur manque encore les compétences indispensables pour décrocher des emplois, mais l'éventail d'emplois dans leur nouveau milieu est peut-être plus vaste.
Le sénateur Mitchell : Il se peut aussi qu'il y ait une pénurie de logements disponibles dans leur nouvelle communauté.
Mme Mitchell : Il semble qu'il faille prévoir diverses formes d'intervention, et je ne me sens pas habilitée à prévoir lesquelles.
Ce que nous entendons souvent à propos des régions rurales du Canada et que je suis à même de constater, c'est qu'il y a un exode de la population. Le cœur des communautés se vide, y compris des jeunes, qui vont poursuivre leurs études ailleurs. On ne leur en fait pas reproche, mais on ne semble pas réussir à les persuader de revenir. Aussi, selon les statistiques disponibles, les jeunes s'en vont mais aussi leurs aînés. En revanche, il y en a qui s'installent dans les régions rurales, mais ce sont surtout des membres de notre génération, qui font partie de la première vague de baby-boomers. Toutefois, ils sont bien moins nombreux dans notre pays qu'en Europe ou au Royaume-Uni.
Le problème tient aussi en partie à une question de perspective d'avenir. Au fur et à mesure que les habitants des régions rurales vieillissent et assistent depuis quelques générations à l'exode de leurs jeunes et de leurs jeunes familles, ils perdent leurs services. Il ne leur reste donc pas grand-chose et ils regrettent beaucoup cette perte. Ils aimeraient que les choses changent et sont d'ailleurs prêts à participer à des efforts en ce sens.
J'aimerais bien qu'il existe un modèle parfait nous permettant de trouver un chef et de le recruter, mais parfois, ce peut être, par exemple, l'instituteur. Dans une étude américaine, on cite le merveilleux exemple d'une femme noire, analphabète et probablement dans la soixantaine, qui, par la seule force de sa personnalité et de sa détermination, a réussi à sortir sa collectivité de la misère. On m'a d'ailleurs dit qu'elle était allée jusqu'à s'asseoir sur les marches du département de l'Agriculture des États-Unis pour convaincre les gens. Elle incarnait ce genre de chef différent et était déterminée à agir.
Le sénateur Mitchell : Est-ce que le leadership s'enseigne et s'apprend? Où cela se fait-il? Où donne-t-on cette formation en bonne et due forme dans notre société? Nous le faisons bien dans les forces armées, mais où à part cela?
Mme Mitchell : Je peux vous en donner un exemple tiré d'un modeste programme maintenant terminé. Nous avons soutenu un organisme qui s'appelait Action Humboldt, qui se trouvait à Humboldt en Saskatchewan. Ce groupe y avait fait un autodiagnostic, c'est-à-dire qu'il avait étudié la situation du milieu et en avait conclu qu'il fallait agir. Il a donc invité un organisme sans but lucratif, le Centre Estey, pour le guider. Ensuite, six et sept petites agglomérations agricoles en périphérie se sont jointes au groupe, et le Centre Estey a aidé l'ensemble, en facilitant les échanges entre citoyens, ce qui leur a permis de développer leurs habiletés et de déboucher sur une vision appuyée sur leurs points forts et sur leurs atouts. Les membres du groupe se sont entendus sur ce qu'ils pouvaient construire et ont donc été obligés de prendre des décisions parfois difficiles. Les communautés rurales sont comme tout le monde. Si on leur demande ce qu'elles veulent dans l'idéal, elles vous répondront : la lune. Quant à savoir comment on peut s'y prendre cependant, ça pourrait être différent. Quoi qu'il en soit, Action Humboldt, les citoyens de Humboldt et les six communautés rurales avoisinantes ont réussi à comprendre la situation et à agir. Ils ont ainsi commencé à endiguer l'exode des jeunes et ont obtenu la collaboration des milieux d'affaires pour rendre leur milieu plus attrayant et encourager l'esprit d'entreprise. Puisque toute la collectivité faisait partie du triangle d'airain, se sentait partie prenante, ils ont tablé là-dessus.
Pour revenir à la question cependant, c'est difficile à dire. Il existe bien des cours de formation au leadership, mais ça n'est pas nécessairement la solution au problème. Faire venir un spécialiste de l'extérieur qui vous fera un rapport puis s'en ira ne mobilisera pas nécessairement les citoyens et ne leur laissera pas nécessairement grand-chose. De toute façon, je ne suis pas sûre que tous les milieux disposent des mêmes compétences et ont les mêmes besoins. Les situations varient considérablement.
Le sénateur Tkachuk : Je suis allé à Humboldt et je connais des gens là-bas.
Toutefois, j'aimerais revenir à ma ligne de pensée. Sans vouloir trop insister là-dessus, le sénateur Mitchell a dit que malgré la justesse de ma question, j'allais dans la mauvaise direction, or ce n'est pas vrai. J'essaie de voir simplement s'il y a des dénominateurs communs dans les situations de pauvreté. Je tenais à savoir et, par la même occasion, à montrer tant aux autres sénateurs qu'aux Canadiens s'il y a des dénominateurs communs et si nos programmes sont efficaces. J'ai déjà abordé deux points, mais j'aimerais poser une dernière question, à mes yeux assez pertinente.
Lorsque j'étais à Berlin, on construisait et on reconstruisait Potsdam et on déménageait la capitale de Bonn à Berlin. Il y avait une activité vraiment débordante, on voyait des grues partout et j'ai donc dit au représentant du gouvernement qui nous accompagnait que je trouvais renversant que le taux de chômage soit de 16 p. 100 quand toute la ville de Berlin était un chantier. Comment était-ce possible? Il m'a répondu que les programmes sociaux étaient tellement généreux que personne ne voulait travailler. Je lui ai alors demandé qui faisait le travail et il a répondu que c'étaient les Turcs. « Pourtant, est-ce que vous ne les détestez pas? », lui ai-je demandé. Il a répondu que oui mais que quelqu'un devait faire le travail.
Nos programmes sociaux à nous sont-ils à ce point généreux qu'ils entravent notre développement économique et font obstacle à la mobilité? Autrement dit, est-ce qu'on ne peut pas penser qu'il est plus confortable de demeurer où l'on est. On peut recevoir telle et telle chose plutôt que de déménager ailleurs pour trouver du travail. Ça ne serait peut- être pas l'emploi le plus rémunérateur, mais ce serait du travail. À mon avis, si l'on veut empêcher les gens de rester pauvres, il faut leur offrir du travail. Je ne parle pas ici d'emplois en trompe-l'œil mais d'un travail qui a une véritable incidence économique, comme on l'a fait à Humboldt, où l'on trouve des usines liées au secteur agricole. Humboldt est une ville florissante.
Ce qu'il y a de bien à Humboldt, c'est leur éthique de travail. C'est une communauté catholique allemande qui a toujours été très prospère. Je suis convaincu que les gens sont passés à l'action bien avant que les choses se détériorent. Ils en ont fait quelque chose de spécial. Humboldt est un exemple de réel succès dans notre province.
Mme Mitchell : En discutant avec les citoyens des régions rurales, nous n'avons jamais constaté un manque d'éthique de travail ou un manque de volonté de travailler.
La pauvreté dans les régions rurales est moins bien connue que la pauvreté urbaine. Ce que je vois ce sont les communautés en perte de capacité économique. Il n'y a pas d'emplois facilement disponibles dans ces communautés. On n'a pas encouragé les personnes âgées, les communautés autochtones, les immigrants, les parents célibataires et ainsi de suite, à participer à l'économie en travaillant.
Nos recherches sont incomplètes. Très peu de recherche se fait sur la situation dans les régions rurales au Canada. Nous savons, par exemple, combien il y a de mères célibataires dans une province donnée, et combien vivent dans les régions urbaines et combien dans les régions rurales, mais c'est à peu près tout. La composante rurale de cette information nous échappe. Treize ou quatorze pour cent des Canadiens dans les régions rurales sont pauvres. Sont-ils capables de travailler? Faudrait-il trouver un moyen pour les encourager à gagner leur vie, afin d'échapper à la pauvreté? Je ne sais pas. Je ne sais pas ce qui est disponible et j'ignore si les programmes sociaux ont réussi à les aider. Je ne le sais pas parce que, à ma connaissance, personne ne s'est penché sur la question.
Quant à savoir si la possibilité de travailler serait la solution pour ceux qui en ont la capacité physique, ou si ces gens-là devraient déménager ailleurs, je n'ai aucune formule qui en tient compte. Tout ce que je sais, c'est qu'il n'y a aucune tendance qui semble réduire le niveau de pauvreté au Canada rural; la seule solution est de quitter ces régions.
Le sénateur Callbeck : Je viens d'une région rurale et ces dialogues m'intéressent. Vous avez dit que vous avez contacté à peu près 17 000 résidents des régions rurales. Cela s'est-il fait dans un an? Je vois dans votre mémoire qu'il y a eu 13 réunions. S'agit-il de la première année ou est-ce une activité annuelle?
Mme Mitchell : Ces dialogues ont lieu depuis la création du Secrétariat rural dans le cadre du Partenariat rural canadien, qui remonte à presque 10 ans. Bien que je n'y étais pas au début, je crois que le dialogue a commencé assez tôt.
Nous nous rendons dans une petite communauté de moins de 10 000 personnes et nous dialoguons avec un groupe de 20 à 30 personnes; il s'agit généralement de leaders locaux, de députés élus, d'intervenants, de fournisseurs de services, et de ceux qui, au sein de la communauté, ont un point de vue à exprimer. Ils se réunissent pour faire valoir leurs opinions, leurs priorités, et pour communiquer tout cela aux divers paliers de gouvernement. Cela nous a servi de guide dans la rétroaction que nous donnons au gouvernement fédéral et nous permet de faire comprendre aux autres ministères du fédéral le point de vue des citoyens de ces régions quant aux politiques, programmes et services qui leur sont offerts par leur gouvernement.
Le sénateur Callbeck : Est-ce que le même type de recommandations découle de chacune de ces réunions, peu importe la région?
Mme Mitchell : Le dialogue consiste surtout à définir le problème, à examiner les priorités et à discuter du rôle que doit jouer la communauté et ce que doit faire le gouvernement. Le gouvernement a-t-il un rôle à jouer pour faire avancer la communauté? Par exemple, dans une communauté, on pourrait dire que les règles et les exigences d'un programme particulier sont trop sévères et que les gens ont tout simplement abandonné. C'est le genre de rétroaction que nous avons parfois entendue. Nous ne demandons pas à ces communautés de créer une politique rurale lorsque nous participons à ces sessions.
Le sénateur Callbeck : Est-ce le seul contact que vous avez avec la communauté?
Mme Mitchell : Nous avons la rencontre, les entrevues et la rétroaction. La rétroaction des sessions est ensuite communiquée aux participants. L'information est également affichée sur notre site web pour qu'ils puissent voir ce qu'on dit les autres participants.
Le sénateur Callbeck : Vous avez indiqué que lorsque le gouvernement conçoit une politique, vous jouez un rôle et tentez de cerner le problème du point de vue des communautés rurales. À quel moment prenez-vous part à la politique? Est-ce qu'on vient vous voir avec la politique? Qu'en est-il du processus?
Mme Mitchell : Ça dépend des domaines.
J'aimerais vous fournir quelques exemples. Statistique Canada a mentionné dès le départ qu'il voulait créer un partenariat avec les communautés puisqu'il avait déjà recueilli les données du recensement. Ces données pourraient permettre à la population rurale de comprendre ce qui se passe dans le Canada rural. Un partenariat s'est donc établi très tôt avec Statistique Canada. Sa politique consiste à appuyer le développement du Canada rural grâce à la transmission d'informations, ce qui est son métier. Pour ce qui est d'Infrastructure Canada, nous nous trouvons à notre troisième niveau d'infrastructure le plus élevé au niveau fédéral. Au premier niveau, il n'y avait pas d'objectif spécifique pour le Canada rural. Une partie importante du financement était injectée dans des projets d'envergure qui s'axaient surtout sur les plus grandes villes. Lors du deuxième programme d'infrastructure, nous avions travaillé avec ce groupe et mis de côté entre 15 à 20 p. 100 des fonds qui seraient destinés à l'infrastructure des plus petites communautés. Nous en sommes maintenant à la troisième étape et avons désormais un fond d'infrastructure pour les municipalités rurales, avec ses propres spécificités et approches. Par exemple, la communauté du Nunavut avait désespérément besoin de logements pour donner un sentiment de leadership et de propriété à la communauté. Bien que le transport et l'eau constituaient la partie la plus importante du programme d'infrastructure du Nunavut, nous avons pu également utiliser le fonds pour le logement. Nous avons pu travailler avec les personnes qui conçoivent les programmes d'infrastructure et écrivent des mémoires au Cabinet pour que les politiciens puissent prendre leurs décisions en fonction des intérêts ruraux. Ils peuvent donc mieux comprendre la situation du Canada rural, avec ses obstacles et ses opportunités. Ces informations ont été utilisées à bon escient. À d'autres moments, lorsqu'un ministère propose quelque chose au Cabinet, le système gouvernemental fait en sorte qu'ils doivent partager ces renseignements entre les ministères, pour que personne ne soit laissé de côté et qu'on fasse quelque chose qu'on n'aurait peut-être pas fait autrement. Ainsi, les décisions politiques du Cabinet n'auraient pas bénéficié de tous les conseils. Parfois, il s'agit du premier avis que nous obtenons. De plus en plus, grâce à notre réseau de chercheurs et de planificateurs de politiques, nous pouvons leur fournir des informations, des connaissances et des pratiques qui leur permettront, lorsqu'on leur demandera de prendre part aux politiques de leur ministère, de le faire en pleine connaissance de la situation du Canada rural. Nous faisons du progrès et évoluons avec le temps. Nous avons de meilleurs outils, mais avons-nous atteint notre plein potentiel? Pas encore.
Le sénateur Callbeck : Avez-vous travaillé avec Santé Canada? Un rapport a paru le mois dernier indiquant que les Canadiens vivant en milieu rural n'étaient pas en aussi bonne santé que les Canadiens vivant en milieu urbain.
Mme Mitchell : Oui. Santé Canada a été un des premiers ministères fédéraux d'envergure à mettre sur pied un Secrétariat sur la santé rurale, pour étudier de plus près les composantes de la santé rurale. Les choses ont changé depuis mais la connaissance et la compréhension de la santé demeurent toujours. Santé Canada était un des bailleurs de fonds de cette étude.
Grâce à Santé Canada, nous avons pu observer les distinctions entre le Canada rural et le Canada urbain. Ainsi, au Canada rural, les taux de mortalité et de suicide sont plus élevés et certains problèmes de santé, tels que le diabète et les maladies reliées au tabagisme, sont plus nombreux. Santé Canada nous a permis de réfléchir à ces différences pour qu'on en discute dans notre réseau pendant que le ministère travaille avec ses homologues provinciaux pour créer des services de prévention. Le gouvernement s'est avéré un partenaire déterminé à comprendre les différences entre le Canada rural et le Canada urbain.
Le sénateur Peterson : Je remercie nos témoins d'avoir bien voulu être des nôtres ce soir. Je viens de la Saskatchewan où il existe de nombreuses petites villes et de nombreux petits villages de 100 à 400 habitants. Je les qualifierais de « communautés rurales » de la Saskatchewan. Leur viabilité et leur succès dépendaient des silos à céréale, de la gare, de l'école, de la poste et de la population agricole environnante. On a démoli les silos à céréale, déplacé la poste, regroupé les écoles et la population agricole diminue. Essayer de remédier à la situation sera extrêmement difficile. Vous avez demandé : « Qu'est-ce qui amène une communauté à prospérer alors qu'une autre périclite? » Celles qui prospèrent et peuvent se maintenir sont celles qui ont l'hôpital, l'école regroupé et une composante de loisirs. J'ai une résidence d'été sur le lac Diefenbaker dans le petit village d'Elbow qui compte une population de 300 habitants. Le village survit parce que sa population triple en été, grâce à un terrain de golf, etc. Ces gens ont tout fait par eux-mêmes. Ils ont mis sur pied un comité de tourisme où travaillent des bénévoles, avec peu ou pas d'argent ou d'aide du gouvernement. Toutefois, inévitablement, ils s'épuisent, faute de nouveaux pour prendre le relais. C'est une direction qu'il conviendrait d'explorer, me semble-t-il, si vous cherchez quoi faire et à quoi donner la priorité pour essayer de maintenir les communautés qui restent.
Je comprends que l'éducation ne garde pas les habitants dans les petites communautés. Ce serait plutôt un billet pour s'en aller et trouver un emploi ailleurs. Mieux vaut donc ne pas multiplier les problèmes et être judicieux dans les programmes mis en place. Je remarque que le Secrétariat rural a débuté en 1998 et qu'il vous reste un an et demi d'existence. Mènerez-vous votre tâche à bien? Aurez-vous besoin de plus de financement?
Mme Mitchell : D'une façon ou d'une autre, ce ne sera pas ma décision. Nous avons obtenu notre deuxième enveloppe de cinq ans et fait certains progrès. Nous avons instillé un certain nombre d'éléments différents mais n'avons jamais été conçus comme un service mettant en place des programmes importants. Notre succès ne repose pas sur de grands programmes mais sur la création de l'information et la sensibilisation. Je suis entourée d'un groupe de personnes passionnées et fières qui travaillent fort. Je pense que nous défendrons avec tous les arguments possibles l'idée qu'il reste beaucoup de pain sur la planche. L'art du possible indiquerait qu'il y a avantage à retirer de la maturité acquise par le Secrétariat devant venir en aide au Canada rural. Savoir si nous aurons gain de cause, c'est une autre question. Ce sera au gouvernement alors au pouvoir de décider s'il préfère une autre approche.
Pour les toutes petites communautés de 100 ou 400 habitants, il est plus difficile de trouver des façons de se diversifier. Les bénévoles avancent en âge et commencent à se fatiguer, parce que ce sont les mêmes personnes, année après année, en l'absence de nouveaux venus qui pourraient prendre le relais. L'OCDE a étudié les possibilités de succès de ces petites communautés si elles se tournent vers l'extérieur. L'OCDE parle de « territorialité ». J'ai un exemple de cela en Colombie-Britannique. La Sunshine Coast est émaillée de charmants villages au bord de l'eau. Je me souviens m'y être rendue pour des foires d'information où le gouvernement fédéral exposait la gamme de ses services pour les entreprises, etc. À cette occasion, j'ai constaté qu'il y avait trois kiosques de tourisme représentant des communautés à 20 milles de distance les unes des autres. Elles avaient le sentiment d'être en concurrence. Et pourtant, elles s'y étaient prises de telle façon que, quand je suis montée là-bas pour prendre des vacances, je n'y ai pas passé la nuit; j'ai traversé la région en voiture, mais ne m'y suis pas arrêtée, il n'y avait pas assez de choses à faire, malgré l'eau, les chemins de randonnée et toutes sortes de possibilités. Tant que les communautés ne prendront pas conscience du fait que 300 ou 400 personnes ne constituent pas un bassin suffisant pour être viable à long terme, elles ne feront pas le point sur ce qui existe autour d'elles et qui pourrait constituer une option. La force d'Humboldt, par exemple, est l'esprit de collaboration qui y règne, au lieu d'une concurrence entre les entreprises existantes. Mais c'est une idée difficile à propager au Canada, où prime l'individualisme. Peut-être l'esprit des Canadiens-français s'y prête-t-il mieux; en tout cas, nous constatons plus de succès de ce type au Québec, où l'on semble être capable d'envisager la région dans son ensemble, de déterminer quels sont ses atouts puis de faire bénéficier chacun de la richesse. On semble mieux travailler de concert.
Pour de petites communautés, les recherches indiquent que c'est peut-être la seule chose susceptible de fonctionner. En tout cas, Mme Burton nous fait penser à Morden-Winkler, où un hôpital est partagé. Peut-être n'est-ce pas l'idéal : certaines personnes doivent se rendre un peu plus loin; chacun préférerait l'avoir dans sa propre communauté; mais si ce n'est pas viable, si l'on ne peut pas amener des médecins et des infirmières à rester dans la communauté, la solution de rechange est peut-être le partage ou alors un recours à des technologies novatrices pour augmenter ce qui, sinon, ne serait pas disponible.
Le sénateur Peterson : Les petites communautés se serrent les coudes. Où est la personne chargée du développement économique à Outlook? Probablement là où elle est le moins utile; mais il existe l'assiette fiscale qui permettrait de payer son salaire. Il en va sans doute de même à Humboldt qui dispose probablement d'une personne salariée chargée du développement économique et en mesure de s'en occuper. Les autres communautés que vous essayez de maintenir ont besoin de cette aide. Il nous faut trouver des façons d'aider les bénévoles à s'aider eux-mêmes, s'ils sont prêts à le faire, et c'est bien le cas. Il faut faire quelque chose, sinon ces communautés vont disparaître aussi; les bénévoles finissent par s'user et il ne reste plus personne.
La présidente : La région d'où je viens, Lethbridge, en Alberta, est entourée de toutes petites villes, dans une région agricole. Le maire et le conseil municipal en ont fait quelque chose qui est presque une communauté régionale; quand ils se réunissent, notamment pour parler d'enjeux économiques, ils font venir les plus petites communautés et cela a changé les choses, indubitablement.
Le sénateur Gustafson : J'en suis arrivé à la conclusion qu'on s'attelle à une énorme tâche. Prenez les niveaux de pauvreté. Où cela commence-t-il? Cela dépend des gens. Peut-être mon idée de la pauvreté est-elle différente de celle du sénateur Tkachuk. Quelle tranche d'âge en souffre le plus?
Mme Mitchell : Le seuil de pauvreté dépend de ce que l'on prend en compte. Faut-il compter les revenus? Les actifs? Quand les prendre en compte? Quand ne pas les prendre en compte? Les mesures dont vous a parlé M. Bollman, le seuil de faible revenu et certaines des autres, dépendent de ce que l'on met dans le panier. Si l'on prend en compte seulement l'alimentation, l'habillement et le logement, on obtient une réponse. Si l'on prend en compte le transport dans les régions rurales, cela augmente de façon substantielle le coût de la vie, du fait de l'absence de transports en commun, de taxis, du type de choses qui existent dans les villes canadiennes. Par contre, le logement est plus abordable que dans bien des zones métropolitaines. Qu'est-ce qu'il faut inclure?
Quant aux tranches d'âge, je dirais que la pauvreté les frappe toutes. Il reste des enfants qui vivent dans la pauvreté; les chiffres montrent qu'elle frappe les jeunes mères célibataires et les personnes handicapées de tous les âges; et il reste des personnes âgées qui n'ont jamais eu de lien avec le marché du travail et de moyens de se constituer une retraite, elles aussi se retrouvant sous le seuil de pauvreté.
Je dirais que toute tranche d'âge étant restée en marge de l'activité économique est susceptible de vivre avec des revenus faibles ou insuffisants — quelle que soit la mesure choisie pour déterminer le seuil de pauvreté.
Le sénateur Gustafson : Un travail effectué par les services de recherche du Parlement indique que le revenu agricole net moyen de 2005 risque d'être inférieur de 26 p. 100 à celui de 2004. Cette prévision a diminué de 74 p. 100 en 2006.
Il y a eu quatre suicides dans la région où j'habite, liés, dans chaque cas, à la situation désespérée d'une personne qui vivait bien il y a dix ans, qui avait une propriété qui valait des milliers de dollars, il y a dix ans. Aujourd'hui, la valeur des terrains a chuté, ce qui a des répercussions dramatiques sur les familles d'exploitants agricoles.
Par contre, si je parle à quelqu'un d'autre en Alberta, je risque de m'entendre dire qu'il n'y a pas de problème. Si vous avez la chance d'être propriétaire de terres entre Calgary et Edmonton, c'est un corridor où elles valent 250 000 $ le quart de section ou plus. À Yorkton, en Saskatchewan, par contre, des terres qui se vendaient autrefois entre 70 000 $ et 100 000 $ le quart de section se vendent maintenant en moyenne 27 000 $ par quart de section.
Cela a eu des répercussions marquées sur les exploitations agricoles et je suis convaincu que Mme Burton, de Melville, fera écho à mes propos. Je suis allé au bureau du ministre de l'Agriculture, à Regina, pour lui demander si tel était le cas partout dans la province ou si cela frappait seulement le sud. Il m'a répondu que c'était partout dans la province.
Tel n'est pas le cas en Alberta. En fait, en Alberta, le problème est différent. On assiste à une surenchère du prix des terrains. J'attends d'ailleurs le jour où les gens viendront chez nous en Saskatchewan acheter du terrain au quart du prix. La surenchère de l'Alberta sera peut-être un énorme avantage pour la Saskatchewan. Ce n'est pas encore le cas, mais, avec un peu de chance, cela viendra. Il y a différentes zones de pauvreté et différentes raisons à la pauvreté.
On a parlé des petites villes. Il me semble qu'il y a des petites villes qui deviennent des quartiers défavorisés, avec de vieilles maisons où s'installent des gens qui n'ont pas de bons emplois. À l'opposé, il y a des petites villes comme celle où j'habite, qui bénéficient de la proximité de Weyburn ou d'Estevan où il y a un champ de pétrole. Dans ce cas, la modicité du logement constitue un avantage et les gens qui s'installent ont les moyens de réaménager un peu les logements.
Mme Mitchell : Dans nos dialogues, ce que j'entends souvent répéter est que la situation de chaque groupe est unique en son genre. Et c'est bien le cas. C'est d'ailleurs un problème pour nous, dans la mesure où il est difficile de partir d'un point commun. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons décidé qu'il faut vraiment fournir des informations aux gens, afin qu'ils puissent comprendre leur dynamique, leurs forces et leurs différences ou points communs avec d'autres.
Les habitants des régions rurales, leurs leaders et les chercheurs sont unanimes : la seule solution est de laisser les personnes concernées décider elles-mêmes quoi faire de leur futur. Il leur fallait effectuer leur propre recensement, pour lequel ils n'avaient probablement pas les moyens, ou acheter des données de Statistique Canada, ce qu'ils ne pouvaient pas se permettre et ce qui, d'ailleurs, était de peu d'utilité. Tout ce dont les gens des régions rurales disposaient, c'étaient d'anecdotes illustrant leur situation.
C'est pourquoi nous avons travaillé avec les provinces, les territoires et les parties prenantes, pour saisir les données des deux derniers recensements de Statistique Canada et les réunir dans cette base de données. Les renseignements permettent à une petite ville, aussi longtemps qu'elle compte plus de 250 habitants, de se rapporter à 20 indicateurs différents et aux changements qu'ils ont subis ou non au cours des deux derniers recensements, bientôt au cours des trois derniers. Les données montrent combien de gens sont partis et dans quelles tranches d'âge. Elles indiquent s'il existe une base d'information et de fabrication. Elles permettent de savoir s'il existe des entrepreneurs ou si la ville dépend d'une industrie unique, ce qui peut la rendre plus vulnérable. Dans ce cas, les gens peuvent se demander s'il ne conviendrait pas d'avoir un plan stratégique pour renverser la situation, si cela ne serait pas quelque chose d'important.
L'adaptation des habitants de petites villes prospères qui dépendent de la pêche, de la foresterie et de l'agriculture est souvent particulièrement difficile. Dans ces domaines, les efforts déployés pour augmenter la productivité et connaître le succès au Canada et sur la scène internationale se sont traduits par des suppressions d'emplois et d'emplois bien payés. De plus, il n'est pas toujours facile de trouver des solutions de rechange. Nous encourageons les petites villes qui cherchent à s'assurer un avenir à faire le point sur la situation, avant de décider, à partir des faits, s'il existe une option susceptible de leur permettre d'aller de l'avant.
Le sénateur Gustafson : Nombreux sont les habitants des petites villes qui font 20 ou 30 kilomètres chaque jour pour se rendre au travail. On ne leur permet pas pour autant de déduire l'amortissement de leur vieux camion ou du véhicule utilisé pour aller au travail, ni l'essence. Un agriculteur peut le faire, mais pas les habitants des petites villes. On pourrait aider ces personnes pour couvrir leurs frais de déplacement, quand ils habitent dans de plus petits villages. Je ne sais pas si c'est quelque chose que vous avez été en mesure de souligner. Par exemple, pendant longtemps, les mécaniciens n'ont pas été en mesure de déduire l'amortissement de leurs outils. Est-ce que cela a changé? Ce que je voulais dire, c'est qu'il existe des mesures d'assistance que le gouvernement pourrait adopter dans ce type de situations.
Mme Mitchell : Ce que vous dites me rappelle les changements introduits dans l'un des derniers budgets, afin d'essayer d'encourager l'apprentissage dans toutes les industries qui existent dans les petites villes. Effectivement, je pense qu'il existe des mécanismes qui méritent d'être étudiés. Les personnes avec qui nous dialoguons nous mentionnent souvent ce type d'obstacles, avec les mesures qui leur faciliteraient les choses et qui méritent d'être suggérées au gouvernement. Au gouvernement ensuite de décider si ce serait dans l'intérêt du public; pour ma part, je n'ai pas d'opinion en la matière.
Le sénateur Tkachuk : Le sénateur Peterson parlait des petites villes. Nous venons de la même province, si bien que je constate la même chose. Toutefois, c'est un domaine où je suis optimiste. Tout change. Rien ne reste. Ce qui est important c'est de s'adapter au changement et de trouver des façons d'aider les gens à s'adapter au changement. Changer est particulièrement difficile, notamment quand on a un certain âge et un ou deux enfants adolescents.
Quelqu'un a parlé d'éducation. Je constate quant à moi quelques éléments encourageants. Vous avez parlé de l'éducation comme d'une façon de quitter les petites villes. C'est aussi une façon d'y revenir. Les gens qui se réinstallent dans des communautés rurales sont ceux ayant fait des études poussées, ceux qui travaillent dans le secteur de la haute technologie ou de l'édition.
Je voyage régulièrement avec un ingénieur-conseil qui travaille partout dans le monde et vit à Carrot River ou quelque part dans ce genre. Il monte dans sa voiture à l'aéroport de Saskatoon et rentre chez lui parce que c'est là qu'il préfère vivre. Rien ne l'y contraint. Il pourrait très bien vivre à Paris, à Toronto ou à peu près n'importe où. Mais sa femme vient de la Saskatchewan et s'y plaît.
Je suis témoin de situations de ce genre et j'en retire une bonne dose d'optimisme en ce qui concerne le Canada rural. C'est un bel endroit, où les gens souhaiteront vivre, aussi longtemps qu'on en préservera les attraits.
Le gouvernement dispose de tout un attirail de mesures pour rendre l'adaptation au changement moins douloureuse : le système fiscal, le système d'éducation et la mobilité.
Le leader municipal qui s'en prend à un ministère gouvernemental pour assurer la prospérité de la collectivité a son rôle à jouer, j'en conviens. Mais cela se produira naturellement, parce que les leaders surgissent là où on les attend le moins et font changer les choses. Nous ne pouvons pas légiférer ce type d'initiative. Elle intervient ou pas.
Votre organisme s'efforce-t-il de mettre l'accent sur les collectivités qui s'en tirent bien et sur la façon dont d'autres collectivités pourraient s'en inspirer? C'est à mon sens important, du moins pour nous. Peut-être devrais-je dire pour moi. Mais j'espère que c'est important pour nous tous, autant que nous sommes.
Mme Mitchell : Comme vous, j'ai bon espoir. L'esprit d'entreprise souffle sur le Canada rural. Soixante pour cent des petites entreprises canadiennes sont dans des communautés rurales, parce que les gens ont trouvé moyen d'utiliser leurs études ou la situation pour faire preuve d'un bel esprit d'entreprise. C'est très positif.
Les gouvernements ont en outre pris en compte les percées susceptibles d'entraîner des changements et des adaptations : la bande large et l'accès à la technologie, par exemple. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais, dans nos bulletins pour les petites villes, nous nous sommes penchés sur l'adoption de la technologie par les Canadiens vivant en milieu rural et je dirais qu'ils font du rattrapage. En ce qui concerne les agriculteurs, que les gens n'imaginent peut-être pas utilisant la technologie, ils y ont de plus en plus souvent recours. Plus nous leurs donnons d'outils, plus ils sont susceptibles de les utiliser, parce que c'est à leur avantage.
Dans mon groupe, nous nous sommes penchés sur les outils que nous étions susceptibles de fournir par nous-mêmes aux habitants des communautés rurales. Nous avons exploré une série de techniques susceptibles d'être utilisées par les communautés pour souder les gens, établir une vision pour leur communauté, lancer le processus de recherche d'une solution, adapter et reconnaître la nécessité de changer si elles veulent avoir un avenir, bref, identifier divers éléments.
Nous avons mis sur pied notre programme de modèles pour essayer d'indiquer ce qui peut réussir : travailler au niveau de la communauté pour apporter un changement; savoir si cela concerne les pères, les mères et les jeunes enfants et s'il faut développer cette capacité pour faire partie de l'éducation des enfants; parfois, utiliser les outils pour savoir ce que peut faire la communauté pour attirer de nouveaux immigrants ou de nouvelles entreprises.
Il ne suffit pas de vouloir. Les communautés doivent prendre certaines mesures, voir quel climat stimulerait la création d'entreprises. C'est l'avantage d'une communauté œuvrant de concert, par opposition à un organisme qui prête de l'argent à de petites entreprises pour favoriser leur simple expansion.
Le gouvernement a créé des relais importants, comme le mouvement coopératif ou la SADC, qui prête de l'argent en milieu rural et le rend disponible. Existe-t-il d'autres formes d'assistance? Je dirais que oui, et qu'il convient de cerner le meilleur usage possible des investissements.
Le sénateur Callbeck : Vous avez parlé du programme de modèles que vous avez mis en place dans 200 communautés. Vous avez parlé d'efforts conjoints du système éducatif et des entreprises pour que les jeunes restent dans la communauté. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la question?
Mme Mitchell : Il s'agissait de Maisons familiales rurales et de quelque chose que nous avons observé à Granite, une région d'exploitation laitière du Québec. Les exploitants agricoles se faisaient vieux et peu de jeunes avaient l'intention de se lancer dans le domaine. Il y avait des jeunes, mais ils finissaient leurs études secondaires et partaient pour ne pas revenir. Ceux qui restaient, étaient, pour reprendre la terminologie employée par les jeunes ruraux canadiens eux- mêmes, des perdants.
C'est à la communauté de reconnaître qu'elle dispose d'un atout et de décider comment l'exploiter. Dans ce cas, la communauté a décidé qu'il lui fallait une autre génération d'exploitants de fermes laitières et a constaté qu'une bonne part des jeunes qui restaient n'avaient pas fini leurs études secondaires. Elle s'est ensuite efforcée d'imaginer des façons de former ces jeunes pour qu'ils deviennent de bons exploitants agricoles. Elle voulait les former à une bonne gestion des affaires, moderne et respectueuse de l'environnement. Elle voulait exploiter leur esprit d'entreprise et les encourager. S'il est possible de produire du sirop d'érable dans la région, on peut envisager de faire de l'acériculture un petit à-côté ou l'exploitation d'un créneau, parce qu'il faut un savoir-faire pour ce type de choses.
La communauté a mis sur pied un programme de formation professionnelle et de pensionnat qui avait fait ses preuves en France. Il a fallu une participation à tous les niveaux : la communauté, pour définir les besoins; le gouvernement provincial, puisqu'il s'agissait d'un programme d'études; les jeunes, qui étaient appelés à participer; et enfin quelqu'un pour mener le projet à bien et le faire progresser.
Nous y avons vu un modèle de réussite pour une communauté. Mais ces réussites ne semblent pas documentées; si vous demandez pourquoi cela a fonctionné, les gens ne le savent pas; ils savent simplement que cela a fonctionné.
Dans le cadre de notre programme, nous avons demandé aux gens qui connaissaient bien le modèle de l'appliquer dans deux ou trois autres collectivités canadiennes. Ils ont accepté. Nous leur avons fourni les fonds à cet effet, mais dans l'optique d'un programme de participation locale à la recherche. Il s'agissait de lancer le projet et d'encourager les jeunes à faire leurs études et leur formation professionnelle, qu'il s'agisse d'agriculture ou d'autre chose, mais aussi de documenter ce que le projet apportait à la collectivité, aux différentes parties, aux instigateurs du projet, au gouvernement fédéral, qui le finançait, ainsi qu'à tous les autres partenaires.
Curieusement, nous constatons que les parties prenantes ont des définitions différentes du succès, mais que chaque définition se défend en soi. Une collectivité peut se féliciter d'avoir gardé ses jeunes. Une autre, d'avoir gardé des exploitants agricoles de seconde génération. Certaines collectivités remarquent l'émergence de nouvelles entreprises. Les filles qui sont restées s'étaient mariées. Il y avait toutes sortes d'avantages sociaux économiques, mais définis selon des termes spécifiques à chaque collectivité.
Quant à moi, j'y vois une utilisation judicieuse de l'argent du contribuable en faveur d'un programme ayant apporté des avantages à la collectivité et étoffé les résultats de recherche. Ce n'est pas la définition des autres parties prenantes; ni celle de l'instigateur du programme, qui se félicite d'être devenu un leader dans la collectivité, ce qui n'était pas le cas auparavant. Nous avons montré que nous avions des compétences que la collectivité ne reconnaissait pas auparavant, etc.
C'est un domaine où chacun définit différemment son succès. C'est pourquoi l'effort de collecte des données de recherche doit être participatif, pour documenter, quantifier et légitimer le type de mesures mises en œuvre pour venir en aide aux petites collectivités.
Le sénateur Callbeck : S'agit-il du Partenariat rural canadien?
Mme Mitchell : Oui, effectivement. C'est le Partenariat rural canadien qui a établi un mécanisme de financement et déterminé notre mandat. C'est ce qui définit notre mandat et notre financement au sein du secrétariat lui-même.
Le sénateur Callbeck : Le programme spécifique dont vous parlez entre-t-il dans le cadre de ce partenariat?
Mme Mitchell : Nous avons parrainé la mise en œuvre du programme en deux ou trois endroits, avec la participation du groupe situé à Granite.
Le sénateur Callbeck : À ce que je vois, la dernière annonce de ce Partenariat rural canadien remonte à novembre. Autrement dit, rien ne s'est fait cette année. Pourquoi? N'est-ce pas quelque chose que nous maintenons?
Mme Mitchell : Il s'agit de modèles pluriannuels. En moyenne, les modèles durent trois ans, afin de permettre le type d'expériences sur le terrain qui donnent de véritables résultats. Le financement s'étale sur une période de trois ans. Je pense que nous disposons de 21 modèles; nous n'avons pas de place pour en créer plus; je ne sais pas non plus à quelle échéance notre financement prendra fin.
Le sénateur Gustafson : Nous qui avons grandi dans des familles nombreuses, nous ne savions pas que nous étions pauvres. Nous pensions être bien nantis. Avez-vous des chiffres sur la cause de la désagrégation des familles et de la pauvreté?
Mme Mitchell : Non, je n'ai pas.
Le sénateur Gustafson : Cela doit entrer en ligne de compte.
Mme Mitchell : Nous n'avons pas effectué ce type d'études. Et nous n'avons pas entendu parler de recherches de ce type pour le Canada rural.
Le sénateur Gustafson : D'après les statistiques, 50 p. 100 des mariages se soldent par un divorce. Il y a donc désagrégation de la famille, avec ses conséquences. Il est plus abordable de vivre à deux que seul.
Le sénateur Mitchell : Cela augmentera le nombre des femmes vivant dans la pauvreté également.
Mme Mitchell : Il y a moins de femmes célibataires et d'hommes célibataires dans les campagnes canadiennes que dans les villes, mais je ne serais en peine de vous dire quels effets cela peut avoir sur les familles.
Le sénateur Mitchell : Comment pouvons-nous obtenir des rapports sur les projets qui fonctionnent? Pourrions-nous en obtenir afin de nous informer?
Mme Mitchell : Je peux vous donner les outils que nous allons déployer sur notre site web, ce sont des mécanismes qui permettent aux petites collectivités de faire participer leurs citoyens et de définir leur identité. Nos premiers modèles nous fournissent déjà des renseignements, mais je ne pourrais pas obtenir tous les renseignements de chaque modèle avant la fin de l'exercice financier en cours.
Le sénateur Mitchell : Nous pourrions les obtenir en janvier ou en février.
Mme Mitchell : Non, ce sera à la fin de l'exercice financier et il faudra ensuite que j'en fasse la synthèse, ce qui prendra du temps. Peut-être que trois mois plus tard, nous aurons un moyen de voir les résultats des modèles.
Le sénateur Mitchell : Je tiens beaucoup à voir cela. Ce serait parfait pour notre rapport. Nous pourrions vous aider à passer le message.
Le président : Je voudrais conclure avec une question que vous avez soulevée rapidement. Vous avez dit que la présence des institutions gouvernementales, qu'elles soient grandes ou petites, a de l'importance.
Je me souviens de Jack Pickersgill, et même si plusieurs personnes dans cette salle ne l'ont pas connu, elles en ont entendu parler, car c'était un personnage public extraordinaire à Ottawa. M. Pickersgill était un politicien originaire, je crois, du Manitoba qui s'est établi à Terre-Neuve, où il a mené une longue et fructueuse carrière.
Aux nouveaux parlementaires sur la Colline, il disait : « La chose la plus importante pour un parlementaire, c'est de s'assurer de garder le bureau de poste, quelle que soit où vous habitez, car c'est l'une des choses les plus importantes dans la vie quotidienne des gens de votre collectivité. »
Je crois bien qu'il pensait aux petites choses. Il parlait des Canadiens en région rurale qui avaient besoin de transport pour se rendre à la banque ou au bureau de poste. D'après lui, seul un politicien insensé pourrait permettre une telle situation. Il croyait que si cette situation existait, elle menacerait la sécurité des petites collectivités qui comptent sur ces services.
Ce message passe-t-il encore dans les régions rurales?
Mme Mitchell : C'est un sujet que nous soulevons toujours dans nos pourparlers. Nous savons que le fait de garder les écoles ouvertes est un défi. Nous avons suivi l'évolution des services postaux au cours des moratoires. Les écoles et les hôpitaux relèvent du mandat provincial, mais ce sont quand même des institutions gouvernementales, que les gens considèrent comme des temps essentiels à leur rentabilité.
Selon nous, si les gens voient les choses ainsi, alors leur point de vue est valide. Si la population est en décroissance et si les banques quittent les lieux parce qu'elles ne veulent plus offrir des services à ces petites collectivités, y a-t-il moyen de les remplacer? Y a-t-il de nouvelles caisses populaires? Est-ce qu'on offre les mêmes services de façon différente? Quelle est l'utilité de la technologie; est-elle utile pour les uns et pas pour les autres?
Je suis d'accord. Les citoyens en région rurale vous diront certainement quelles sont les institutions qui leur restent encore. Je n'ai pas de recommandation à faire à ce sujet. C'est le résultat de certaines décisions politiques que certaines personnes ont prises. Je peux seulement vous décrire la situation telle que je la vois.
Le président : Merci beaucoup. Vous nous avez montré tout un paysage ce soir. Certainement, tous les membres du comité voudront davantage de renseignements et je sais que nous pouvons compter sur vous. Je crois que cette rencontre ne sera pas notre dernière. Nous aurons une année très chargée. Nous aurons des choses à apprendre et nous aurons besoin de votre aide et de vos conseils pour réussir dans nos études.
La séance se poursuit à huis clos.