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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 19 - Témoignages du 7 mars 2007


TABER, ALBERTA, le mercredi 7 mars 2007

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 9 h 2, pour étudier, en vue d'en faire rapport, la question de la pauvreté rurale au Canada.

Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Bonjour à vous, honorables collègues, chers témoins et tous ceux qui ont bien voulu assister à cette séance ce matin.

Nous sommes ravis d'être à Taber. Notre comité a fait venir plusieurs fois des gens d'ici à Ottawa pour suivre l'évolution de la situation dans l'industrie de la betterave à sucre et dans la région. J'ai informé mes collègues que non seulement Taber est célèbre pour ses betteraves à sucre, mais aussi qu'elle est reconnue pour être la capitale canadienne du maïs, grâce à l'ensoleillement exceptionnel dont elle bénéficie. L'agriculture est très importante à Taber, comme partout ailleurs au Canada, du reste.

Nous savons et avons entendu que les agriculteurs éprouvent des difficultés ces derniers temps, qui donnent lieu à de graves problèmes de pauvreté dans beaucoup de collectivités rurales du pays. Comme nous l'avons appris il y a quelques semaines à Ottawa, de plus en plus de cultivateurs ont recours aux banques alimentaires rurales pour joindre les deux bouts. Cela n'a pas toujours été ainsi dans notre coin de pays.

Également, les agriculteurs utilisent les services d'aide téléphoniques pour évacuer les tensions et exprimer leur détresse face à leur niveau d'endettement élevé, à la volatilité des prix des produits de base et aux aléas climatiques dans notre région.

Ce matin, nous entendrons d'abord Laurence Nicholson, coprésident de Real Voice for Choice Alberta, qui est un groupe de bénévoles affirmant qu'il revient aux cultivateurs de décider de l'avenir de la Commission canadienne du blé. Nous entendrons ensuite Mark Fournier, directeur exécutif de l'Aide au développement des collectivités, région de Lethridge. Nous avons eu de très bons échanges avec les responsables de Community Futures qui sont venus nous parler à Ottawa pas plus tard que la semaine dernière. Nous ne les avions pas rencontrés depuis longtemps, et leur témoignage nous a redonné espoir. Enfin, nous écouterons Charles Moore, directeur régional de l'Alberta Association of Agricultural Societies.

Laurence Nicholson, coprésident, Real Voice for Choice Alberta : Je suis ravi d'être parmi vous ce matin. Je suis un agriculteur de la région de Medicine Hat-Seven Persons. J'ai travaillé pendant 30 ans pour l'Alberta Wheat Pool, où je me suis occupé des politiques agricoles et opérationnelles. L'ancienne subvention du Nid-de-Corbeau m'est familière, tout comme le débat qu'elle a suscité — j'étais en plein dedans. Pendant 22 ans, j'ai travaillé avec des membres de conseils d'administration et des dirigeants de l'industrie céréalière. Nous avons utilisé les 36 programmes de l'Institut international du Canada pour le grain sur le parcours que suivent les céréales, de la production jusqu'aux marchés internationaux, en passant par les silos.

J'ai aussi été directeur, pendant quatre ans, de l'Alberta Canola Producers Commission, de la Canadian Canola Growers Association et du Conseil canadien du canola. Je connais très bien le système de marché libre, également.

J'ai pris part au regroupement des silos-élévateurs dans l'Ouest canadien. Pendant le processus, nous en sommes venus à la conclusion que les grains devaient être nettoyés et consommés dans les Prairies, et c'est exactement ce que beaucoup font.

Pourquoi est-ce que nous, les producteurs, devons encore payer un tarif marchandises pour que les impuretés soient enlevées à Vancouver? C'est dommage que les sociétés céréalières fassent cela, mais je suppose qu'elles en ont le droit. L'autre question touche la perte de revenus des cultivateurs. L'hiver dernier, j'ai fait beaucoup d'analyses sur les coûts d'exploitation et de production agricoles au Brésil et en Argentine pour des entreprises établies dans l'Ouest canadien. Elles font des affaires dans ces pays pour la moitié de ce qu'il en coûte ici. Ces sociétés affirment qu'elles doivent demander plus à cause des coûts d'exploitation élevés au Canada.

Si l'on regarde le montant des subventions pour le blé de force roux de printemps sur les marchés internationaux et les renseignements tirés des discussions à l'Organisation mondiale du commerce, on constate que l'Australie verse une subvention d'environ 9 $ la tonne de blé et le Canada, de 25 $. Ces données datent de 2005, et le blé canadien est surtout visé par le PCSRA et le Programme d'assurance-récolte. Aux États-Unis, c'est 140 $ la tonne et en Europe, 170 $. On se fait autant avoir du côté de la production que du côté des prix de nos produits sur les marchés internationaux.

Les cultivateurs de l'Ouest canadien ne peuvent pas tolérer cela pendant longtemps. Nous avons besoin de l'intervention du gouvernement afin de mettre de l'ordre dans ce système et dans bien d'autres dossiers. L'affaire Monsanto et les 15 $ exigés pour la recherche sur du canola résistant au Roundup, par exemple; quand la recherche sera-t-elle payée? Est-ce que l'entreprise possède une vache à lait lui permettant de fouiller dans nos poches et d'obtenir trois boisseaux l'acre sans conséquence?

Regardons de plus près les coûts du transport, ferroviaire entre autres. À Dunmore, en Alberta, où j'envoie mes céréales, on ne fournit pas le wagon et on ne le remplit pas. On ne fait que le déposer à Vancouver et on ne le décharge pas; pourtant, on me demande 2 700 $ par wagon pour le transport. Ces coûts représentent plus d'un tiers de mon revenu total. Et la liste des problèmes est longue.

Aujourd'hui, ce qui importe, c'est la place de Real Voice for Choice par rapport à la Commission canadienne du blé. Notre organisation est composée de cultivateurs bénévoles de l'Ouest canadien, et j'en suis le coprésident pour l'Alberta. Nous avons beaucoup progressé ces trois derniers mois. Cela a pris de 70 à 90 p. 100 de mon temps environ. La semaine dernière, j'étais à Ottawa pour exercer des pressions sur le gouvernement. Les Conservateurs ont refusé de nous rencontrer — les bureaucrates ont accepté, mais pas le ministre. Ils n'avaient pas beaucoup de réponses à nous donner, cependant. Nous sommes un groupe à part, composé d'agriculteurs inquiets de l'Ouest. Nous ne sommes pas liés officiellement à une association agricole ou à un parti politique. Nous défendons le droit, pour les cultivateurs des Prairies, de prendre les décisions relatives au système de commercialisation de la Commission canadienne du blé, au moyen de plébiscites auprès des cultivateurs, au sens de l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé. Nous insistons pour que la question posée soit claire et juste, et pour que la liste des votants soit établie correctement. L'ensemble du processus comporte beaucoup de zones grises. Les questions ne sont pas aussi claires et précises qu'au Manitoba.

La Commission canadienne du blé est une organisation de commercialisation du blé et de l'orge destinés à l'alimentation humaine et à l'exportation, pour les agriculteurs des Prairies. Il y a aussi la Commission canadienne des grains. Beaucoup de gens confondent les deux, et le secrétaire parlementaire chargé de la Commission canadienne du blé l'a prouvé en attaquant Greg Arason la semaine dernière — et j'étais là — à propos de la vente de blé dur à l'Algérie. Le secrétaire parlementaire a parlé de grades, alors que ceux-ci relèvent de la Commission canadienne des grains, et non de la Commission canadienne du blé. Visiblement, M. Arason ne comprend pas le système.

Les sociétés céréalières se chargent du blé et de l'orge sur les marchés intérieurs. La Commission ne s'occupe pas du blé fourrager et du canola, ni de la graine de lin, de l'avoine et d'autres céréales destinés à la consommation nationale. La Commission canadienne du blé est la seule organisation de commercialisation à comptoir unique autorisée à mettre en marché le blé et l'orge des agriculteurs de l'Ouest canadien. Elle vend ce qui est destiné aux marchés intérieurs et à la consommation humaine, ainsi que tous ce qui est réservé pour les marchés d'exportation. À vrai dire, pas tout à fait. Les exportateurs agréés — et la plupart des sociétés céréalières le sont — peuvent acheter le blé à la Commission et l'écouler sur les marchés internationaux par la suite. Les ventes directes effectuées seulement par la Commission sont de l'ordre de 70 p. 100; les exportateurs agréés s'occupent du reste.

Le produit des ventes annuelles d'environ 3,7 milliards de dollars, moins les frais de la Commission canadienne du blé de 70 millions de dollars — ce qui représente environ 2 p. 100 —, revient aux agriculteurs des Prairies. Ceux-ci assument tous les coûts de la Commission canadienne du blé, ce qui veut dire que cette dernière est gérée efficacement par les cultivateurs de l'Ouest canadien. Le fait que les agriculteurs s'unissent pour commercialiser leurs produits, par l'intermédiaire d'une organisation, la Commission canadienne du blé, signifie que nous avons un pouvoir de commercialisation parce qu'il y a un vendeur et, espérons-le, une multitude d'acheteurs.

Pour moi, en tant qu'agriculteur, il y a toute une différence entre un vendeur et un spécialiste du marketing. La Commission canadienne du blé s'acquitte très bien de son travail de commercialisation et elle a recours à l'Institut international du Canada pour le grain, établi à Winnipeg, pour ce faire. La Commission fait appel à des meuniers et à des boulangers pour amener la qualité de la farine à la hauteur de ses spécifications.

La dernière fois que j'ai examiné cette question, je me suis concentré sur les raisons pour lesquelles elle ne fait pas la même chose pour d'autres produits. Elle travaille un peu sur l'orge de maltage, mais sous l'aspect de la fabrication de la bière. Elle a fait certaines choses pour le Conseil canadien du canola concernant la moulée afin de la rendre plus agréable au goût pour l'industrie porcine. Pourquoi n'a-t-elle rien fait au sujet des pois, des lentilles, du carthame et d'autres produits qui poussent ici au Canada? C'est la question que j'ai posée lorsque j'y suis allé. J'ai demandé « Avez- vous l'expertise ou le matériel pour le faire? » « Bien sûr, m'a-t-on répondu, mais nous n'avons reçu aucune demande ». N'importe qui peut vendre. En tant qu'agriculteurs, nous avons besoin d'un plus grand nombre de spécialistes de la commercialisation un peu partout dans le monde.

Ils peuvent négocier en tant que guichet unique et obtenir des primes pour le grain sur le marché international, ce qu'aucune autre compagnie céréalière ne peut faire. Ils peuvent négocier avec l'industrie céréalière toujours en tant que guichet unique, et ils le font pour l'affectation des wagons.

La Commission canadienne du blé affecte les wagons. Si vous prenez la recommandation du groupe de travail de M. Strahl sur la Commission canadienne du blé II, et tout notre goulot d'étranglement, et si vous voulez un monopole, le monopole ce sont les sociétés ferroviaires de l'Ouest canadien. Si vous contrôlez le transport du grain, vous contrôlez les ventes.

La Commission canadienne du blé a un siège social à Winnipeg et quelque 1 700 wagons, où un gestionnaire s'occupe à la fois du grain de la Commission canadienne du blé et du grain des compagnies céréalières sur la base d'un marché ouvert. Je peux vous assurer que certaines de ces installations disposent de 100 wagons, et les sociétés ferroviaires en prennent toujours parce qu'elles n'ont pas suffisamment de wagons vides. Si la compagnie céréalière obtient 50 wagons, et qu'elle a 100 commandes, et que 10 de ces commandes concernent du canola, qui est un grain du marché ouvert, je peux vous dire tout de suite que c'est le canola qui va être chargé en premier. Pourquoi? Parce que la compagnie céréalière doit payer des frais de surestaries si ce canola ne parvient pas à Vancouver. Si vous regardez ce que ferait la Commission canadienne du blé II, je peux vous en parler d'un point de vue opérationnel — elle va continuer à le faire. La Commission canadienne du blé jouera un rôle passif par rapport à ce programme et provoquera sa destruction.

Je pourrais vous parler d'un grand nombre d'aspects de cette question, mais je n'ose pas.

J'aimerais parler de l'argument concernant la souplesse de commercialisation des agriculteurs. Depuis 1998, la Commission canadienne du blé a changé du tout au tout sous la direction des administrateurs élus par les agriculteurs. Si vous regardez la Commission canadienne du blé aujourd'hui, nous avons une double commercialisation, en particulier dans le cas de l'orge. La Commission canadienne du blé, pour ce qui est du blé, offre toutes sortes de programmes, notamment des contrats à forfait, des contrats à terme sur écart, des contrats à variation quotidienne, des options de paiement anticipé et le régime de mise en commun.

En tant que producteur, je peux aller à la Bourse de Minneapolis ou de Chicago par l'entremise de la Commission canadienne du blé et protéger mon blé sur les marchés à terme. Je peux avoir des rachats garantis de la Commission canadienne du blé et vendre mon blé à n'importe qui et obtenir un permis d'exportation pour le faire. Dans les faits, vous avez une double commercialisation.

Si vous prenez la Commission canadienne du blé II que propose M. Strahl, vous n'avez qu'un seul système de commercialisation. C'est le marché ouvert, et non le double marché. Je pense que c'est un aspect important que les producteurs perdent de vue dans le présent plébiscite.

La commercialisation centrale de l'orge rapporte aux agriculteurs des Prairies quelque 60 millions de dollars en recettes supplémentaires chaque année. C'est principalement du côté du malt. Ici, à Taber, vous allez trouver le prix le plus élevé qui soit pour l'orge dans le monde, en raison de ce que l'on appelle le corridor d'alimentation.

Le gouvernement fédéral veut l'enlever aux agriculteurs en faveur de la commercialisation centrale de l'orge. En fait, l'objectif final du gouvernement fédéral est de démanteler la Commission canadienne du blé. Cela ne fait aucun doute dans mon esprit, tout particulièrement si vous tenez compte des tactiques obscures de M. Strahl.

J'étais à Saskatoon lors de cette réunion. Je n'assistais pas à la réunion, mais j'étais de l'autre côté de la rue. M. Strahl a choisi des producteurs qui en ont contre la Commission canadienne du blé pour cette première réunion. Il a ensuite choisi les membres de son groupe de travail, qui sont tous contre la Commission canadienne du blé, puis il a invité la Commission canadienne du blé à la table.

J'en ai parlé à mon administrateur au sein de la Commission canadienne du blé, tout comme notre groupe, et nous avons conseillé aux administrateurs de ne pas aller à la table, car ce serait l'équivalent de se jeter dans la fosse aux lions; ils n'y sont pas allés. Ils ont congédié M. Measner, qui faisait tout simplement son travail sous la direction du conseil d'administration, puis ils ont nommé quatre administrateurs choisis par le gouvernement et qui étaient contre la Commission canadienne du blé, afin d'éliminer le conseil d'administration tant de l'intérieur que de l'extérieur de l'organisation. À mon avis, c'est une vraie honte que dans un processus démocratique comme le nôtre, le ministre ait eu recours à ces tactiques pour détruire notre organisme central de commercialisation.

Je pourrais vous en dire beaucoup plus au sujet des enjeux, mais celui-ci m'est très cher et je dois avouer que nous, ainsi que mon groupe en Alberta — et nous sommes des rednecks de l'Alberta — c'est ainsi que l'on nous appelle —, nous avons recueilli 40 000 $ en argent des agriculteurs pour nous battre contre cela.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Nicholson. Je sais que cette question vous tient très à cœur, que c'est une question qui soulève des passions des deux côtés. Nous sommes heureux que vous soyez venus nous faire part de votre version des choses.

Mark Fournier, directeur exécutif, Aide au développement des collectivités, région de Lethbridge : Je suis impliqué dans le réseau de développement des collectivités depuis huit ans. J'ai commencé à Medicine Hat en tant qu'analyste commercial, puis je suis allé à Strathmore, toujours en tant qu'analyste commercial, et enfin à Lethbridge en tant que directeur général. Depuis huit ans, j'ai eu le privilège de travailler auprès de 30 différentes collectivités rurales. Je fais partie du conseil du Réseau de développement des collectivités, ce qui m'a permis de parler avec mes homologues et les membres de divers conseils d'administration afin de déterminer les principaux enjeux dans leurs régions.

En Alberta, on dénombre 27 bureaux d'aide au développement des collectivités. Nous sommes tous situés dans les régions rurales de l'Alberta, à l'exclusion des bureaux de Calgary et d'Edmonton.

Ayant travaillé auprès de 30 collectivités ces dernières années, j'ai relevé quelques tendances. Je suis ici pour vous parler d'une chose et je m'appuie sur cinq points.

Quand nous prenons des programmes conçus pour remettre aux gens des documents, ils ont toute une portée. J'ai constaté qu'ils ont une incidence sur les collectivités rurales. Un village de 300 ou 400 habitants a accès aux mêmes programmes que si vous êtes à Calgary, Edmonton, Toronto et Vancouver. C'est une très bonne chose. Malheureusement, les programmes conçus pour donner des coups de main ne sont pas autant de portée.

J'ai cinq exemples à vous soumettre. Je m'excuse de ne pas avoir apporté avec moi les documents. Je peux dactylographier mes notes et vous les faire parvenir par courriel à la fin de la réunion.

Les services axés sur la carrière et l'emploi tels que les programmes de recherche d'emploi, les programmes d'orientation professionnelle, mais le plus important, les programmes de formation sur le tas, et un éventail de programmes de formation à l'intention des jeunes ne sont pas offerts dans les petites collectivités.

Sur les personnes avec lesquelles nous avons eu le privilège de travailler au cours des dernières années, certaines ont accès à des véhicules, mais beaucoup n'ont pas cette chance. Notre bureau va se rendre dans les collectivités rurales et rencontrer individuellement les gens, mais ce ne sont pas tous les programmes qui vont faire cela.

J'ai travaillé avec des gens à la recherche d'un emploi qui ne savent pas comment préparer un CV, et j'ai rencontré de ces gens. Ils ne peuvent pas aller à Lethbridge ou Medicine Hat ou encore Calgary pour utiliser les programmes de formation.

Nous avons réalisé divers sondages sur les valeurs auprès des collectivités. Nous avons parlé aux gens des compétences non techniques. Nous examinons des programmes de développement économique, mais nous aimons voir au-delà de tout cela et tenir compte des programmes de viabilité des collectivités, des questions liées à la qualité de vie.

Un grand nombre de nos résidents ruraux ne peuvent se présenter quotidiennement, ou au moins hebdomadairement, pour recevoir des soins de santé de base sans essayer de se trouver quelqu'un pour les y conduire. Ils sont donc grandement désavantagés. Cela devient de plus en plus un problème étant donné que les membres de la génération du baby-boom vieillissent, quittent les villes et se retirent dans des régions rurales. Ils comptent sur un revenu fixe et de nombreuses personnes déménagent dans des villes ou des villages de plus petite taille parce que le coût de la vie y est nettement moindre; cependant, ces régions n'offrent pas les mêmes programmes que les grands centres.

Les installations récréatives sont en tête de liste dans les sondages sur les valeurs des collectivités et la viabilité des collectivités. Les jeunes dans ces régions se plaignent du manque d'accès aux centres récréatifs et du prix des frais d'utilisation. Malheureusement, ce sont des trous noirs où les administrations municipales engouffrent des fonds.

J'apprends que vous vous rendez à Picture Butte cet après-midi. Si vous en avez la chance, parlez à leur responsable de l'administration du coût de leur aréna, de leur piste de curling, de leur piscine. C'est très difficile de payer pour ces services. La plupart des municipalités vont essayer de récupérer le plus d'argent possible par le biais des frais d'utilisation, et réussir. Malheureusement, comme beaucoup de gens déménagent dans des centres plus gros, et quittent les régions rurales, cette base diminue, tout comme la disponibilité des centres récréatifs.

Ma dernière plainte a trait au manque d'intervention dans le cas de catastrophes économiques locales. Je ne parlerai pas de l'ESB. Je suis convaincu que vous en entendrez parler cet après-midi. J'ai eu le douteux honneur de commencer à travailler le jour même où l'ESB a frappé, le 21 mai 2003.

La présidente : Nous avons dû nous rencontrer ce jour-là.

M. Fournier : C'était intéressant. J'ai vu toute la ville s'immobiliser. Notre bureau était inondé d'appels de gens qui voulaient emprunter pour continuer en attendant, à s'inscrire pendant qu'ils le pouvaient. Au début, le gouvernement fédéral n'est pas véritablement intervenu. Avec le temps, je suis heureux de dire qu'effectivement des personnes sont venues et ont visité quelques parcs d'engraissement, mais initialement nous avons été abandonnés à notre sort. Peu après, Toronto a été privée d'électricité. Nous avons vu aussitôt une intervention. C'est quelque chose que nous aimerions prévenir à l'avenir.

Nous dépendons des marchés agricoles. Dès que le marché a le hoquet, c'est toute la collectivité qui s'en ressent. Nous devons tenir compte des régions rurales, des agriculteurs et des comtés à mesure que nous progressons.

Je n'aime pas donner de problèmes sans apporter de solutions. J'ai une petite solution.

Nous avons affaire à des programmes subventionnés par le fédéral ou les provinces pour ces questions relatives à la qualité de vie. Ces services sont offerts dans les plus grands centres, comme à Medicine Hat et Lethbridge, Red Deer, mais bien souvent ils ne le sont pas dans les collectivités environnantes. Des fonds supplémentaires permettraient à une ou deux personnes par programme de sortir. Par exemple, le programme Contact-Jeunesse offre des programmes de formation sur le tas à l'intention des jeunes des collectivités rurales un ou deux jours par semaine. Tout ce dont ils ont besoin pour que ce programme connaisse du succès, ce sont quelques dollars de plus pour couvrir les coûts de déplacement. Je suis convaincu que si le mandat stipulait que des services devaient être donnés aux collectivités rurales, quelle que soit leur taille, et que les frais de déplacement étaient couverts, les services seraient fournis.

La présidente : Monsieur Fournier, même s'il peut vous sembler que vous étiez seul au début de la crise de l'ESB, j'aimerais dire, pour le compte rendu, que dans toutes les années que j'ai été impliquée en politique, je n'ai jamais vu deux ministres, un fédéral, une provinciale, travailler avec autant d'acharnement et en très étroite collaboration que Lyle Vanclief et Shirley McLellan. En effet, ils ont collaboré avec leur partenaire américain. Vous n'avez pas vu ces choses. Nous le savons tous, ces jours ont été difficiles. Je leur donne le crédit de s'être retroussés les manches et d'avoir fait tout ce qui était en leur pouvoir dans ce qui a semblé être une crise extrêmement noire et impossible.

Grâce à la force des collectivités du sud-ouest de l'Alberta, nous nous en sommes sortis. Nous avons toujours tiré une leçon de cela; nous savons qu'il faut toujours être prêt à se battre.

Charles Moore, directeur régional, conseil d'administration, Alberta Association of Agricultural Societies : Merci beaucoup de nous avoir invités, et je remercie particulièrement Frank Mahovlich, mon héros d'enfance du temps des six équipes originales.

Le président : Vous auriez dû à venir à Warner hier.

M. Moore : Je m'appelle Charlie Moore, je suis un exploitant agricole et de ranch de la troisième génération au Ranch Moore, qui est situé près de Pine Lake en Alberta, soit à environ 36 milles au sud-est de Red Deer, et nous avons été fondés en 1893.

En tant que leader de la collectivité de la région de Pine Lake-Innisfail, je me suis occupé de beaucoup de choses depuis plusieurs années, notamment j'ai participé au mouvement de coopérative sur le gaz. Cette coopération permet de fournir des services de gaz naturel aux collectivités rurales de la province. Je fais également partie de l'Alberta Association of Agricultural Societies, laquelle fournit, d'une manière ou d'une autre, des services de récréation, de divertissements, d'éducation et de formation en leadership rural à l'intention des collectivités rurales éloignées ainsi que dans certains centres. L'AAAS est un mouvement qui a permis à des Albertains de toutes les régions de communiquer et de travailler ensemble pour l'intérêt commun. L'AAAS est l'organisme cadre qui chapeaute environ 360 sociétés membres réparties dans toute la province. Ces sociétés membres sont de toutes les tailles et sont présentes partout, qu'il s'agisse de petites collectivités éloignées ou de grands centres urbains, comme le Calgary Stampede et l'Edmonton exhibition.

En tant qu'agriculteur, je voudrais vous parler du prix des produits de base qui a chuté dans l'industrie du grain de l'Ouest du Canada, ainsi que de l'ESB, qui a causé bien du trouble à notre secteur de l'élevage bovin. Les discussions sur le commerce mondial, dans leur forme actuelle, ne sont pas la réponse. Nous réalisons que les Européens et les Américains ne vont pas résoudre nos problèmes. Nous avons besoin d'une solution canadienne. Il est possible d'en arriver à une solution, mais il faut mettre en place de nouvelles lois qui constituent un marché intérieur en visant 10 à 15 p. 100 de contenus en biogaz dans l'essence et le diesel produits et mis en marché au Canada. Deuxièmement, nous avons besoin d'une loi pour instituer un climat commercial où les bénéfices de l'industrie seront répartis entre les producteurs, un prix plancher pour le grain. L'un ne va pas sans l'autre; sinon, les grandes multinationales construiraient des usines, produiraient de manière concurrentielle du carburant tarifé, obtiendraient des marges de profit énormes avec des employés bien payés, au détriment des producteurs. Cette industrie pourrait prendre nos surplus et nos grains de qualité moins bonne et nous pourrions nous concentrer sur la mise en marché des grains de qualité supérieure à prix élevé sur le marché mondial.

Je vais maintenant vous parler à titre de membre de la coopérative. Au début des années 1970, nous, les résidents des collectivités rurales de l'Alberta, avons aidé le premier ministre Lougheed à réaliser son rêve et à respecter sa promesse électorale, soit de fournir des services de gaz naturel aux agriculteurs et à tous les résidents des collectivités rurales de la province. Je pourrais vous parler aussi du service Internet à haute vitesse, que nous voulons offrir à tous ces gens. Nous avons l'intention d'utiliser le principe de la coopérative, c'est-à-dire un prix unique pour tout le monde, afin de mettre un terme à l'écrémage effectué par les fournisseurs de gros. En utilisant l'Internet sans fil, ou WiMAX, et un système numérique élaboré d'après un programme qui est utilisé en Corée du Sud, il est possible, avec un ordinateur portable, de faire une consultation avec un médecin, même pour les gens situés dans les régions éloignées de la province.

Ma première mission aujourd'hui consiste à parler au nom de l'AAAS. Je suis ici pour vous présenter le point de vue de nos membres sur la manière de repeupler l'Ouest et de retrouver la prospérité dans les régions rurales de l'Alberta.

Nous avons appuyé très activement des initiatives rurales entreprises par notre gouvernement provincial depuis quelques années et nous estimons que notre organisation peut jouer un grand rôle dans la réussite de ces initiatives. Nous avons des organisations membres dans toutes les régions de la province prêtes à mettre la main à la pâte pour stopper l'exode urbain. Les sociétés qui vivent de l'agriculture pourraient jouer un rôle important en fournissant des services nécessaires pour repeupler les collectivités rurales de la province.

Nous estimons que nos gouvernements doivent mettre en place de nouvelles initiatives afin d'accomplir des changements importants dans ce domaine. Nos chefs doivent se mettre à l'action et entreprendre des choses, plutôt que de réagir. Un leader communautaire avisé m'a déjà dit qu'être un bon leader, c'est comme construire une clôture. Vous devez mettre les poteaux dans les coins où vous voulez que la clôture passe et vous devez prendre de l'avance sur les ouvriers. Si vous restez trop près des ouvriers, ils vous donneront des conseils sur l'emplacement des poteaux; si vous êtes trop loin, trop en avance, ils vous perdront de vue puis ils arrêteront de vous suivre.

Le président : Merci, et avant que l'on procède aux questions, je voudrais vous présenter les sénateurs.

Le vice-président de notre comité est le sénateur Gustafson, qui vient de la Saskatchewan. À côté du sénateur Gustafson se trouve quelqu'un de connu qui a commencé sa carrière près de Timmins, dans le nord de l'Ontario, le sénateur Frank Mahovlich. Je n'ai pas besoin de vous dire que le sénateur Tommy Banks vient d'Edmonton. Il a été assez bon pour venir à nos audiences alors qu'il était dans le Sud. Le sénateur Terry Mercer vient de la Nouvelle- Écosse. Le sénateur Peterson vient de la Saskatchewan également.

Le sénateur Mercer : J'aimerais vous remercier tous les trois d'être venus nous entretenir de sujets parfois controversés. Vous avez tous présenté des solutions. Il est facile d'identifier les problèmes. Nous avons besoin de solutions.

Monsieur Nicholson, vous avez parlé de pénurie de wagons-trémies. S'agit-il d'une pénurie de wagons-trémies ou d'une mauvaise gestion de la répartition des wagons-trémies?

M. Nicholson : Je viens juste de vivre une grève du CN, qui a causé un manque important.

Si l'on tient compte du mouvement du grain, dans le cas du CN et du CP, le grain est payé à un taux compensatoire, mais si l'on passe à d'autres biens, comme le soufre, le charbon et les conteneurs, ils sont payés à un prix un peu plus élevé. Le transport de la marchandise dont le prix est élevé a la priorité, et le grain est secondaire. Mais ce n'est que mon opinion.

Si l'on tient compte du nombre de wagons transportant du grain qui sont en arrêt sur les rails, surtout après avoir été déchargé dans les terminaux, on peut dire que la performance est très médiocre.

Lors de rencontres d'agriculteurs, des membres de la Commission canadienne du blé m'ont dit qu'ils pouvaient transporter et vendre 100 p. 100 du grain, mais qu'ils ne sont pas certains d'avoir un transport par train. Le transport par train est dans une position de pénurie.

Le sénateur Mercer : Y a-t-il assez de wagons?

M. Nicholson : Il y a assez de wagons, mais il n'y a pas assez d'efforts pour les faire bouger.

Le sénateur Mercer : Je suis désappointé, car je représente une province où l'on fabrique des wagons-trémies. J'aurais aimé repartir chez-nous avec une grosse commande.

Le sénateur Peterson : Monsieur Nicholson, nous avons entendu dire que les agriculteurs qui sont situés près de la frontière américaine sont davantage en faveur d'un système ouvert. Est-il possible que la Commission canadienne du blé continue et permette à ces personnes de ne pas participer?

M. Nicholson : Je ne crois pas. Si vous regardez ce qui s'est passé avec la Commission canadienne du blé au cours des dernières années, la Commission a participé à 11 poursuites antidumping intentées par les États-Unis. Cela a coûté aux producteurs environ 4,5 millions de dollars pour se défendre devant le tribunal mondial. Nous avons gagné toutes les causes.

Nous pouvons déplacer environ 10 p. 100 de notre production ici, et l'autre 90 p. 100 doit être transporté par navire ou passer par Thunder Bay ou Vancouver. La majorité du grain qui a été envoyé là-bas aujourd'hui a été transporté par wagons-trémies.

Si l'on ouvre la frontière et si l'on permet aux producteurs de pénétrer ce marché, ils vont venir au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta par camions. Ils vont faire la queue dans les établissements. Si j'étais un producteur américain, je serais très en colère de cela. Je crois que si la frontière était ouverte, elle serait refermée assez rapidement.

Nous pouvons cependant faire cela, mais dans une certaine limite. Lorsqu'on approvisionne un marché, il ne faut pas le détruire. Et lorsqu'on crée un excédent, on le détruit.

Si vous examinez la manière dont les agriculteurs commercialisent le grain, surtout dans le marché libre au Canada et aux États-Unis, 70 p. 100 du canola que nous produisons est vendu à la baisse. Ce n'est pas du bon marketing. Cela fait diminuer les prix plus que nécessaire.

La même chose se produit aux États-Unis, car ils évoluent aussi dans un marché libre. Nous avons besoin de tester ce marché, de l'approvisionner, mais pas de créer un excédent, sinon nous détruisons les prix.

Le sénateur Peterson : L'OMC ne semble pas fonctionner très bien. Elle n'a pas fait un très bon travail de négociation pour les producteurs agricoles canadiens. Devrions-nous nous concentrer davantage sur des accords bilatéraux?

M. Moore : Je crois que l'Organisation mondiale du commerce tient des pourparlers depuis que je suis petit. Je n'ai jamais vu de résultats favorables jusqu'à présent. Nous devons toutefois continuer de collaborer avec eux, car ils pourraient en ressortir quelque chose de positif un jour. Nous devons cependant nous concentrer un peu moins sur les discussions de l'OMC en vue d'obtenir une solution et commencer d'autres négociations et du travail sur le terrain afin de résoudre nos problèmes, dans notre pays.

Je voudrais maintenant parler de ma passion, les biocarburants, qui permettraient de créer un marché afin que nous ne nous inquiétions pas autant de l'exportation et que nous mettions l'accent sur un produit de première qualité. Nous mettons toujours notre produit sur le marché à un prix et à un moment où le reste du monde arrive avec un surplus de grain.

Nous pouvons éviter de faire cela en utilisant des outils de marketing adéquats, en mettant sur le marché un moins grand volume et en améliorant la qualité et la classe du produit, en offrant la meilleure qualité de blé au monde. Actuellement, nous n'obtenons pas un prix de première qualité. Nous obtenons la plupart du temps des prix de dumping à l'échelle mondiale.

Nous devrions nous concentrer sur une solution canadienne et sur un marché canadien.

Le sénateur Banks : Comment peut-on se concentrer sur un marché intérieur lorsque nous ne pouvons consommer plus de 20 p. 100 de ce que nous produisons?

M. Moore : C'est là qu'intervient l'industrie du biogaz. Elle consommerait une quantité énorme de grains.

Le sénateur Banks : Consommerait-elle les 80 p. 100 qui restent?

M. Moore : Elle pourrait consommer très facilement les 80 p. 100 qui restent. Tout ce que nous devons faire, c'est de mettre au point une loi qui rend son utilisation obligatoire. Le gouvernement pourrait légiférer son utilisation, ce qui a été fait aux États-Unis. C'est pourquoi l'orge a augmenté dans notre marché actuellement. Cela n'a rien à voir avec ce que nous avons fait. C'est le gouvernement américain qui a légiféré sur les biocarburants. Notre maïs va de l'autre côté de la frontière. Et avec le maïs qui s'en va, les producteurs d'ici, les parcs d'engraissement, et cetera, paient un prix plus élevé pour l'orge.

Le sénateur Banks : Parlez-vous de cultures différentes de ce que nous faisons actuellement?

M. Moore : Pas nécessairement.

Le sénateur Banks : L'on ne peut pas utiliser du blé pour produire de l'éthanol.

M. Moore : Nous pourrions utiliser le blé de mauvaise qualité, le blé de basse catégorie. L'éthanol et le biodiesel peuvent être produits à partir d'un grain de très mauvaise qualité. Cela permettrait à la fois d'éliminer cette camelote du marché et d'approvisionner l'industrie des biocarburants.

Le sénateur Banks : Peut-on faire des biocarburants à partir de la paille?

M. Moore : Oui, c'est possible. Et c'est là qu'il faut concentrer nos efforts et commencer à utiliser ce que nous avons ici, la majorité de ce que nous avons ici. Cela nous permettrait d'éviter de mettre sur le marché mondial une quantité énorme de grains dont personne ne veut.

Le sénateur Banks : Vous parlez du transport. Le grain ne se transporte pas bien. J'ai déjà été l'auteur d'un projet de loi qui aurait permis de rendre le transport du grain plus concurrentiel, en le faisant passer uniquement sur les principaux chemins de fer. Le CP et le CN n'acceptent pas de locomotives ou de matériel roulant sur leurs chemins de fer principaux, et cela vise aussi le grain. Les embranchements débouchent sur ces chemins de fer, mais personne ne peut y passer. Je vais peut-être proposer de nouveau ce projet de loi.

Pensez-vous que l'introduction de la concurrence pour l'utilisation des lignes principales actuellement sous-utilisées pour le transport du grain par d'autres transporteurs serait une bonne idée?

M. Nicholson : Oui. Vous revenez au rapport Estey et à sa 14e recommandation, qui a été retirée immédiatement par le gouvernement fédéral quand il a été soumis à la Chambre des communes.

Quand j'ai rencontré le juge Estey à Bow Island, et je l'ai rencontré à Regina à ce sujet, je l'ai félicité du travail qu'il avait accompli. Le rapport était sélectif et n'avait plus grand sens une fois les droits de circulation conjoints retirés. Oui, j'estime que nous avons besoin de droits de circulation conjoints au Canada.

Le sénateur Mahovlich : Vous avez parlé de frais d'utilisation pour les patinoires, les piscines. J'ai grandi dans le nord de l'Ontario où le Club Lions local commanditait la piscine. Le Club Rotary commanditait le base-ball. D'autres clubs commanditaient les équipes de hockey. Dites-vous que le gouvernement fédéral devrait intervenir?

M. Fournier : Oui, si vous regardez les tendances. Des organisations comme l'Elks Club, la Légion, les Moose, assistent à une diminution du nombre de leurs membres. Comme les membres plus anciens prennent leur retraite ou se retirent de ces organisations, le niveau de nouveaux adhérents n'est pas le même. À Coaldale, par exemple, le Kinsmen Club local abat un travail phénoménal pour appuyer cette communauté. Ce ne sont cependant pas toutes les communautés qui peuvent dire la même chose.

Le village de Nobleford compte 400 résidents. On n'y trouve pas autant de ces organisations. Tout ce qu'ils font, ils le font eux-mêmes. Ses résidents donnent énormément de leur temps et font du bénévolat. Il existe un fossé et quelqu'un doit le combler.

Le sénateur Mahovlich : Pouvez-vous me donner le pourcentage d'agriculteurs qui tiennent à conserver la Commission canadienne du blé?

M. Nicholson : Le Manitoba a tenu un plébiscite comportant deux questions claires, concises; 69,8 p. 100 de répondants se sont dits en faveur pour le blé et environ 63 p. 100 pour l'orge. C'était la question claire, concise.

J'ai tenu 18 réunions dans le sud de l'Alberta. J'en ai tenu une dans la région de Red Deer, à savoir la région de Chatney, qui était en faveur d'un conseil d'administration et d'un marché ouvert. Quand je suis allé à cette réunion, on m'avait prévenu que la région préconisait la commercialisation, ce qui était vrai.

Je dois dire, et je suis heureux de le faire, qu'à mon avis 97 p. 100 des agriculteurs dans l'Ouest canadien, y compris l'Alberta, ne connaissent pas et ne comprennent pas le système de marché ouvert, ni ne comprennent le système de la Commission canadienne du blé.

Dès le début des réunions, je demandais si quelqu'un pouvait me dire comment la Chine, le Japon et le Mexique, qui achètent 90 p. 100 de notre canola brut, l'achètent du Canada? Personne ne pouvait répondre à la question. À moins de pouvoir répondre à cette question et de comprendre le marché ouvert et le système de la Commission canadienne du blé, comment pouvez-vous voter de façon réaliste?

Le sénateur Gustafson : Je ne sais pas si je devrais me lancer là-dedans.

La présidente : Tout doux, sénateur Gustafson.

Le sénateur Gustafson : Votre idée est faite, monsieur Nicholson, et vous faites partie de la bureaucratie de la Commission canadienne du blé.

D'après ce que je sais de l'Alberta, un important pourcentage d'agriculteurs, d'exploitants de parcs d'engraissement, de producteurs d'orge, ont affirmé avec vigueur qu'ils veulent le choix.

J'ai livré du grain à 20 milles de la frontière; j'ai livré du canola à Velva, au Dakota du Nord; à ADM, Archer, Daniels Midland Company; et même à AGCO, Massey Ferguson, Heston, Gleaner, White. ADM possède 28 p. 100 d'AGCO. C'est une entreprise beaucoup plus grosse que le Saskatchewan Wheat Pool et ils se sont prononcés en faveur du choix. Je ne sais pas où vous prenez vos chiffres.

M. Nicholson : M. Strahl a tenu des consultations avec la Western Canadian Wheat Growers Association et la Western Barley Growers Association. L'ACAP n'a jamais été consultée. Wild Rose n'a jamais été consultée en Alberta. L'APAS, l'Agricultural Producers Association of Saskatchewan, et la SARM, la Saskatchewan Association of Rural Municipalities, n'ont pas été consultées. M. Strahl et son groupe de travail n'ont pas consulté la FCA, la Fédération canadienne de l'agriculture.

Je n'ai jamais travaillé pour la Commission canadienne du blé. Je suis un agriculteur. J'ai travaillé pour l'Alberta Wheat Pool pendant 30 ans, pas pour la Commission canadienne du blé. J'ai tenu des séances non seulement sur la Commission canadienne du blé, mais aussi sur la Bourse des marchandises de Winnipeg, la Commission canadienne des grains, le fret maritime, et toutes ces choses qui entrent en ligne de compte pour déterminer comment les producteurs peuvent réussir dans ce système. C'est sans conteste un système compliqué et complexe.

Le sénateur Gustafson : Quel pourcentage d'agriculteurs de l'Alberta veulent un choix? C'est un pourcentage élevé. Cela ne fait pas de doute. C'est dommage que nous ne recevions pas de gens de la Cattlemen's Association, des Barley Growers, d'AGCO, et cetera.

M. Nicholson : La Commission canadienne du blé ne peut pas demeurer rentable à long terme si elle doit commercialiser de nombreux produits. Il faudra avoir soit un marché ouvert ou un guichet unique.

Le sénateur Gustafson : Qu'y aurait-il de mal à prendre les grandes sociétés céréalières, à former une entreprise canadienne, à faire concurrence à Cargill? La Commission canadienne du blé vend beaucoup de céréales par le biais de Cargill. Quand elle le fait, elle devient un autre intermédiaire.

M. Nicholson : Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, les sociétés céréalières sont des exportateurs accrédités de la Commission canadienne du blé et peuvent vendre sur le marché international. Elles achètent le blé de la Commission. Les exportateurs accrédités vendent environ 30 p. 100 du blé de la Commission. J'ai travaillé pour une société céréalière pendant 30 ans et je sais que l'idée de fusionner les sociétés céréalières pour n'en former qu'une seule ne fonctionnerait pas.

Le sénateur Gustafson : Les temps changent et si l'agriculture ne connaît pas de changement, il n'y aura pas d'industrie au Canada.

Nous produisions habituellement environ 31 millions de tonnes de blé. Ce chiffre est tombé à environ 16 millions de tonnes. Ça baisse. Au train où vont les choses, la Commission canadienne du blé n'aura plus rien à vendre.

M. Nicholson : Cela est attribuable aux subventions européennes et américaines, pas à la Commission canadienne du blé.

Le sénateur Gustafson : Exactement. Nous devons nous occuper des subventions. J'ai dit à maintes reprises que nous avons cru nos bureaucrates qui nous disaient que nous amènerions les Européens à supprimer les subventions. Je m'y suis rendu à plusieurs reprises et je suis allé en Europe. Rien n'est plus loin de la vérité. Cela ne va pas arriver. Nous devons regarder l'économie mondiale et son effet sur le Canada, ou nous allons connaître de graves ennuis.

M. Moore : J'hésite à prendre la parole. Il vaut parfois mieux passer pour un fou que de supprimer tout doute en parlant. Je ne peux rester assis sans rien faire à écouter l'un des nôtres, M. Nicholson, nous dépeindre comme nous voient la plupart des gens, à savoir comme de vieux agriculteurs débiles en salopettes, casquette de chemin de fer sur la tête, mâchonnant un brin de foin et se plaignant de la chaleur.

Nous sommes très au fait de ce qui se passe. L'agriculteur moderne est informé. Qu'on soit en faveur du choix ou de la Commission canadienne du blé, nous devons nous rendre compte qu'il nous faut adopter une approche positive. Je ne vois rien de mal à essayer un double système, à défaut d'autre chose. Si la Commission canadienne du blé est aussi bonne que ceux qui y travaillent le disent, elle ne devrait pas avoir de problème à faire concurrence et à réussir. Faisons-en l'essai. Essayons l'autre façon et voyons si on peut en tirer quelque chose. Il est bien évident que nous ne performons pas bien actuellement.

Le sénateur Gustafson : Nous ne pouvons pas continuer ainsi.

La présidente : Merci beaucoup. La discussion a été très animée ce matin. Mes collègues le sont toujours.

Nous allons maintenant entendre les membres du second groupe. Nous recevons Victor Chrapko, président de l'Alberta Organic Producers Association, David Lauwen, président de l'Alberta Sugar Beet Growers, Jerry Zeinstra, vice-président des Potato Growers of Alberta, et Mark Miyanaga, directeur par mandat spécial des Potato Growers of Alberta.

Victor Chrapko, président, Alberta Organic Producers Association : Merci de cette occasion de comparaître devant vous.

La pauvreté au Canada rural n'est pas seulement monétaire. Elle est également d'ordre mental ou spirituel ou quelle que soit la façon dont vous voulez l'aborder.

Dans les deux pages que nous avons distribuées, nous avons essayé d'être brefs. Nous savons par expérience que nos exposés sont mis sur une étagère où ils accumulent la poussière. Je ne suis plus de la première jeunesse et mon postiche est de la couleur de la plupart des vôtres. J'ai fait un exposé ou deux par le passé. Je dois dire que nous sommes très déçus de ces comités ou ces commissions du gouvernement. Ils produisent de bons rapports qui sont mis sur des tablettes. J'espère, sénateur Fairbairn, que vous et votre comité pourrez trouver une façon de manœuvrer et de proposer une mesure législative.

La présidente : Je dois dire à ceux qui se trouvent à la table, et à ceux qui nous écoutent, l'une des premières choses que fait le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, qui est un très vieux comité. Nous ne sommes pas tous vieux, mais le comité s'assure dès le départ de convoquer les ministres concernés. Nous invitons les ministres et leurs fonctionnaires et leur expliquons clairement ce que nous faisons. Honnêtement, on nous a répondu de façon très collégiale et enthousiaste, notamment pour cette croisade. Personne d'autre ne l'a fait. Personne d'autre ne pense à le faire. Nous le faisons avec l'encouragement de toutes les parties, si cela peut vous rassurer. Nous ne nous livrerions pas à cet exercice si le report provisoire d'avant-Noël n'avait pas touché une corde sensible.

M. Chrapko : Cela semble être un bon départ. Les agriculteurs pratiquent l'agriculture depuis des siècles. Au Canada, quand la production alimentaire a commencé dans les Prairies au début du siècle, le gouvernement d'alors a adopté la Loi sur la destruction des mauvaises herbes en 1905 pour tenter de protéger l'agriculteur et veiller à assurer l'intégrité de l'approvisionnement en semences. C'est ce qu'il a fait. L'approvisionnement en semences a été surveillé pour assurer la qualité, la pureté et la disponibilité pour tous. Cela a changé au fil des ans. Pourquoi cherche-t-on maintenant à breveter cette forme de vie? À deux égards, c'est destructeur. Aucune forme de vie, végétale ou animale, ne devrait être « possédée » par un individu ou une entreprise. Cela élimine le droit et la faculté de l'agriculteur de fournir des aliments au royaume animal. Pour ces raisons, c'est destructeur pour l'agriculture. Il n'y a plus de loi pour protéger l'agriculteur.

Les prix des produits agricoles sont actuellement pratiquement au niveau qu'ils étaient dans les années 1930, au plus fort de la dépression. Les coûts de production ont tellement augmenté qu'il est impossible de faire concurrence aux fermes constituées en société. Par exemple, à la fin des années 1940 et au début des années 1950, une moissonneuse- batteuse coûtait environ 3 000 $. Les prix des produits agricoles sont demeurés au même niveau. Aujourd'hui, une moissonneuse-batteuse coûte 400 000 $. C'est dû, évidemment, à l'inflation mais où se trouve l'équilibre?

La pauvreté rurale est une réalité dans notre pays, qui est riche en pétrole, en industries et en ressources. Le nord de l'Alberta est l'une des régions les plus pauvres dans l'ensemble. Statistique Canada a montré que ces comparaisons sont vraies. Étant donné le cadre réglementaire pour les semences, le coût des machines et l'escalade des prix pour les terres, est-il surprenant que le taux de suicide en Alberta rurale atteigne des sommets?

Les prix pour les terres ne sont pas fondés sur la capacité de production, mais influencés par la nature des acheteurs. On achète les terres à des fins récréatives, pour des contrats d'utilisation des champs de pétrole et les acheteurs professionnels sont des médecins, des avocats, et cetera. L'argent de l'achat provient d'autres sources que l'activité agricole. Cette tendance semble peut-être bonne pour l'agriculteur qui prend sa retraite, mais il faut vendre environ 10 quarts de section de terrain au plus haut soumissionnaire pour acheter une maison de retraite. Cela n'incite pas à prendre sa retraite quand il faut autant de terre. Cette terre est hors de la portée du jeune agriculteur désireux de produire des aliments. Faut-il s'étonner que l'âge moyen des agriculteurs en Alberta soit 56 ans ou plus? Les jeunes familles qui pratiquent l'agriculture doivent trouver un emploi à l'extérieur de la ferme et un fort pourcentage d'exploitants et leurs conjoints travaillent à l'extérieur de la ferme pour maintenir un choix de vie et contribuer au PNB.

Nous, les agriculteurs, contribuons au développement de notre communauté. Nous payons le prix fort pour nos équipements. Nous encourageons les entreprises locales des petites villes et des villages. Nous payons des impôts; nous appuyons donc des institutions comme les écoles, les banques, les églises, et même les services médicaux. Nous travaillons bénévolement dans de nombreuses organisations pour aider nos jeunes. Nous élevons nos enfants pour en faire des adultes responsables. Les grandes entreprises agricoles ne soutiennent pas les communautés locales, et celles-ci périclitent. Tant que la société ne reconnaîtra pas l'importance de l'agriculture pour notre pays, les exploitants de fermes familiales auront une épée de Damoclès au-dessus de la tête.

Les accords de l'OMC ainsi que les barrières tarifaires et non tarifaires avantagent injustement les pays qui nous font concurrence. Les décisions que prend le gouvernement pour stimuler le développement agricole ne nous aident pas beaucoup, et nous ne recevons pas autant de subventions que nos concurrents.

Les programmes créés durant une crise, par exemple l'ESB, profitent aux grandes multinationales aux dépens des petits agriculteurs qui assument tous les coûts. La pression du gouvernement et les grands abattoirs écrasent inévitablement les agriculteurs qui tentent de développer des coopératives pour préserver l'industrie locale de conditionnement des viandes.

Nos grands-parents sont venus s'établir au Canada, plus particulièrement dans l'Ouest, afin que leur progéniture puisse posséder un lopin de terre, contribuer au PNB et avoir la chance d'adopter un mode de vie rural servant de modèle aux générations futures. La technologie chimique, les OGM, les additifs synthétiques, les brevets liés aux semences, le revenu non proportionnel aux dépenses ainsi que la faible reconnaissance de la société viennent compromettre ce mode de vie.

En conclusion, il faut légiférer les prix de la machinerie agricole, du carburant et des réparations ainsi que le coût des intrants. Nous avons besoin d'une loi qui établisse des prix-planchers reflétant les coûts de production ainsi qu'un rendement raisonnable pour payer les salaires et faire des investissements, et qui garantisse notre capacité à cultiver nos terres et à élever du bétail sans être menacés par les OGM, la biotechnologie, la nanotechnologie, et cetera. Si cela venait à se produire, l'agriculteur devrait recevoir une forme de compensation du responsable, c'est-à-dire du semencier, de l'entreprise, des exploitants, et cetera. En vertu de cette loi, les expériences menées sur les plantes et les animaux devraient être réalisées dans un institut de recherche public afin d'éviter que les résultats ne soient faussés.

Les agriculteurs biologiques d'Alberta vous remercient de l'attention et de l'intérêt que vous portez à ce dossier. Nous, les agriculteurs, aimerions être assurés de pouvoir encore pratiquer un métier de manière autosuffisante et durable. Nous demandons à ne plus être à la merci des grandes entreprises agricoles ni à être obligés d'abandonner nos terres pour vivre de l'assistance sociale.

David Lauwen, président, Alberta Sugar Beet Growers : Merci de nous donner cette occasion de comparaître devant votre comité.

En Alberta, il y a 250 cultivateurs qui produisent environ 37 000 acres de betteraves à sucre. Ce nombre a chuté de moitié au cours de la dernière décennie. La plupart des pays développés disposent d'une politique visant à protéger et à stimuler l'industrie sucrière. Outre les droits modestes imposés sur le sucre raffiné au Canada, nous travaillons uniquement sur le marché libre.

Nous avons pris part à un programme de stabilisation tripartite de 1986 à 1996. Nous avons choisi très tôt de ne compter que sur le produit des ventes à l'étranger. Depuis lors, il n'y a pas eu de programme axé sur les produits de base. Nous ne comptons que sur l'assurance-récolte et le PCSRA. Ce dernier ne permet pas de freiner la lente érosion des marges de production sur de nombreuses récoltes qu'on a observée récemment. Il sert plutôt à réduire le prix des produits de base et les coûts accrus des intrants.

Dans sa forme actuelle, le PCSRA semble dissuader les agriculteurs de diversifier leurs cultures, contrairement à ce que veulent les gouvernements. Il ne couvre pas certaines dépenses qui sont essentielles pour entreprendre cette diversification. À mon avis, le CSRN était mieux adapté pour les exploitations diversifiées. Je n'ai pas autant d'expérience que beaucoup d'entre vous, mais c'est mon opinion. Un programme général ne permet pas de faire face à toutes les situations, comme par exemple le problème d'irrigation dans cette région.

Si les prix des produits de base demeurent bas pendant plusieurs années, le PCSRA ne répond pas suffisamment aux besoins des agriculteurs. Par exemple, de 1998 à 2002, selon la moyenne olympique, nous avions un rendement moyen de 35,29 $ la tonne, soit 5,81 $ de moins que les coûts de production sur cinq ans, qui s'élevaient à 41,10 $ la tonne. Malgré tout, nous n'avons jamais demandé l'aide du gouvernement. C'est probablement pendant cette période que nous sommes passés de 500 à 250 agriculteurs.

Les producteurs de betteraves sucrières ont été exclus des paiements spéciaux dans le passé. Nous ne savons d'ailleurs pas pourquoi.

Le président : Ne vous lancez pas là-dedans. Rappelez-vous simplement que nous avons gagné.

M. Lauwen : Le paiement par acre qu'a annoncé le gouvernement est sans contredit la solution la plus facile et la plus rapide qui soit pour aider financièrement les producteurs, mais il ne tient pas compte de l'augmentation des coûts et de la productivité des fermes d'irrigation.

D'après mon expérience, les paiements fondés sur les ventes brutes ne semblent pas aider les gens qui en ont le plus besoin. Quand j'ai traversé une période difficile, mes ventes brutes étaient faibles et, par conséquent, l'aide financière que je recevais aussi. Vous connaissez ensuite quelques bonnes années puis, sans que vous ne vous y attendiez, vous recevez un gros chèque qui vous aurait été très utile quatre ans plus tôt, par exemple.

Nous ne faisons pas concurrence aux producteurs agricoles étrangers, mais plutôt à leur trésor, particulièrement dans les pays de l'Union européenne et aux États-Unis. Si les règles étaient les mêmes pour tout le monde, nos agriculteurs pourraient lutter à armes égales. Toutefois, avec toutes les subventions que ces pays distribuent, c'est pratiquement impossible.

L'industrie sucrière serait très florissante partout au pays si l'environnement était propice et si nous avions pu négocier des ententes qui nous auraient permis de limiter tous ces coûts. Je suis certain que cette industrie pourrait prospérer si l'on mettait en œuvre des mesures de protection.

À long terme, nous favorisons la réduction des subventions et des distorsions des marchés causées par l'intervention des gouvernements étrangers. Nous voulons le libre-échange, mais encore faut-il que ce soit vraiment du libre-échange. Il faut répondre à nos besoins à court terme pour contrer les effets de ces distorsions. On a entre autres envisagé d'adopter une loi canadienne sur l'agriculture jusqu'à ce que soient élaborées des stratégies à long terme, de prendre des initiatives en matière de biocarburants pour aider cette industrie à croître au Canada au lieu la laisser aux mains des autres pays, et de bonifier le PCSRA grâce à un programme semblable au CSRN en vue d'aider les exploitations les plus diversifiées.

Nous tenons à remercier les sénateurs pour le travail remarquable qu'ils ont accompli et le soutien qu'ils nous ont offert l'an dernier sur la question du sirop de betterave sucrière. Le gouvernement n'a pas encore rendu sa décision, mais nous vous savons gré des efforts que vous avez déployés dans ce dossier.

Jerry Zeinsra, vice-président, Potato Growers of Alberta : Je vous suis reconnaissant de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui devant votre comité.

L'association Potato Growers of Alberta a un directeur exécutif, compte un certain nombre de membres, et possède son propre bureau. Elle a aussi un conseil d'administration qui se réunit régulièrement. Une fois par année, nous tenons une réunion stratégique au cours de laquelle nous discutons d'objectifs, de communications, de productions commerciales, de relations et de leadership.

Nous avons environ 150 producteurs titulaires d'une licence et près de 50 000 acres de pommes de terre, dont 36 000 qui servent à la culture de pommes de terre destinées à la transformation, 12 500 aux pommes de terre de semence et 1 600 aux pommes de terre de consommation. Nous avons d'ailleurs encore beaucoup de chemin à faire à ce chapitre. Une grande quantité de pommes de terre en vente sur le marché canadien viennent de l'étranger. Il y a forcément quelque chose qui ne tourne pas rond. Je ne vais pas m'étendre là-dessus, mais je peux vous dire que ce sont des problèmes liés à la vente au détail.

Les usines de transformation du sud de l'Alberta envoient leurs produits bruts à des compagnies comme McCain Foods, Lamb Weston Inc., Maple Leaf Potatoes, Hostess Frito-Lay et Old Dutch Foods.

Au cours des dernières années, l'une des grandes préoccupations de l'industrie agricole, et nous en avons discuté avec les producteurs de pommes de terre, est sans conteste la salubrité des aliments et la traçabilité de nos produits.

Les États-Unis ont formé un groupe, le United Potato Growers of America, et ont demandé aux producteurs canadiens d'en faire autant. Nous avons donc créé le United Potato Growers of Canada. Nous essayons d'inciter les producteurs à ne pas se livrer à une surproduction pour stabiliser les prix et l'offre.

Nous avons un comité chargé de négocier des contrats et des prix au nom de tous les producteurs, ainsi qu'un comité de recherche, au sein duquel nous menons toutes sortes de projets visant à améliorer l'exploitation agricole et à mieux comprendre la commercialisation. Il y a aussi un comité de producteurs de semences. Une grande partie des semences est exportée aux États-Unis et au Mexique. Nous avons éprouvé quelques difficultés dans nos échanges avec les Mexicains. Nous nous sommes maintenant rapprochés d'eux et nous avons établi de nouvelles règles ensemble.

Nous avons un comité de l'électricité et de l'énergie. Ces dernières années, les prix de l'électricité et de l'énergie ont monté en flèche, ce qui a lourdement affecté les exploitations agricoles et les coûts de production. Nous avons un comité qui s'occupe de l'assurance-récolte, que nous souscrivons tous. Celle-ci assure la protection de notre revenu en cas de sinistre. Il y a aussi un comité chargé de la commercialisation.

Le sénateur Gustafson : Est-ce que les prix varient selon que vous cultivez des pommes de terre, des betteraves ou autre chose? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Zeinstra : Cela dépend du prix des terres, mais n'a pas vraiment à voir avec la production. Dans le sud de l'Alberta, il y a des terres sèches, des terres d'élevage et des pâturages. La plupart des cultures spéciales sont pratiquées sur des terres irriguées. À ce moment-là, oui, il y a une différence de prix.

Le sénateur Gustafson : Combien une bonne acre de pommes de terre vous coûte-t-elle?

M. Zeinstra : Dans le sud de l'Alberta, cela coûte 3 500 $ l'acre dans un champ irrigué par pivot, et ensuite cela peut varier de 2 000 à 3 500 $. Il y a des exceptions selon le lieu et la valeur de la production. Il y a d'autres facteurs.

Le sénateur Gustafson : Et les betteraves?

M. Lauwen : Nous sommes dans la même région; par conséquent, nous voulons les mêmes terres. On ne se fonde pas sur la valeur de la production. La terre qui offre le meilleur rendement se vend à près de 3 500 $ l'acre, alors que celle qui en donne le moins se vend 2 000 $. Même à ce prix, on ne peut pas continuer d'exploiter des terres peu productives. Les prix sont élevés; nous livrons concurrence aux producteurs de pommes de terre. Nous faisons également une rotation des cultures et nous travaillons ensemble.

Le sénateur Gustafson : Venez en Saskatchewan; avec cet argent, vous pourrez acheter la moitié de la province.

M. Chrapko : Le prix des terres varie en fonction de la proximité des grands centres. Cela dépend aussi combien un médecin ou un avocat est prêt à payer pour avoir une terre. Si vous me le permettez, j'aimerais vous raconter une anecdote très cocasse.

Un avocat de notre communauté se plaignait que sa ferme ne rapportait pas. Je lui ai alors dit que les affaires iraient beaucoup mieux s'il y avait moins d'imposteurs dans l'agriculture. Il ne comprenait pas ce que je lui disais. Je lui ai donc expliqué que les gens qui exploitent des terres alors qu'ils ont déjà une source de revenus sont des imposteurs car ils s'approprient notre gagne-pain. En plus, ces professionnels nous demandent un prix exorbitant pour leurs services et se servent de cet argent pour acheter nos terres. Je ne peux tout simplement pas rivaliser avec eux. J'ai terminé la conversation en lui disant que plutôt que de se plaindre, il devrait penser aux gens qui, comme moi, vivent uniquement de l'agriculture.

Le sénateur Gustafson : Vous avez parlé de vous rallier aux agriculteurs américains pour avoir un certain contrôle sur le marché nord-américain. Cela m'intéresse; dites-nous en un peu plus à ce sujet.

Mark Miyanaga, directeur par mandat spécial, Potato Growers of Alberta : Il y a environ deux ans, on a créé le United Potato Growers of America à cause de la faiblesse des prix des produits de base aux États-Unis. Les producteurs de l'Idaho et de l'État de Washington inondent continuellement le marché de pommes de terre pas chères. Des agriculteurs se sont donc réunis en grand nombre et ont décidé qu'il fallait intervenir, même s'ils avaient déjà essayé auparavant, en vain. Ils ont envisagé d'augmenter les prix, mais d'autres agriculteurs se mettraient alors à cultiver des pommes de terre, inonderaient le marché et feraient diminuer les prix. Au cours des trois dernières années, les agriculteurs se sont serré les coudes, et les prix se sont redressés.

Nous avons suivi le mouvement parce que nous exportons des semences en Idaho et dans l'État de Washington. Nous n'avions pas le choix si nous voulions qu'ils continuent à acheter nos semences. Il fallait prendre des mesures concrètes. Cela a porté fruit dans l'est du Canada. Les prix à l'Île-du-Prince-Édouard ont considérablement grimpé.

Le sénateur Peterson : Victor, pouvez-vous nous dire quel est l'avantage de cultiver des produits biologiques, si tant est qu'il y en ait un?

M. Chrapko : Sénateur Peterson, je ne vends que très peu, alors je ne saurais vous dire. L'un des avantages est, bien sûr, de pouvoir écouler son produit avant l'agriculteur d'à côté, étant donné que le public recherche des fruits et légumes qui ne sont pas bourrés de pesticides. Dans le fond, c'est le plus grand avantage.

Dans notre exploitation, je ne me soucie guère du prix que demandent les autres. Je regarde les prix au détail et puis j'ajoute 20 p. 100. C'est parfois en dessous du coût de production. La réalité, c'est qu'il faut rapidement écouler son produit car il est périssable, et on ne peut le congeler ni l'entreposer.

Le sénateur Mercer vient de Nouvelle-Écosse; je suis le premier pomiculteur commercial en Alberta.

Le sénateur Mercer : Nous ne voulons pas davantage de concurrence.

Le sénateur Peterson : Vos difficultés à accéder au marché américain l'an dernier étaient-elles liées aux droits de douane ou au contrôle de la qualité?

M. Lauwen : Notre produit était admis aux États-Unis. Leur loi autorisait ce produit à franchir la frontière. Du jour au lendemain, alors que nous détenions 0,1 p. 100 des parts du marché américain, ils ont décidé de créer des barrières douanières afin de bloquer les importations canadiennes.

Une fois aux États-Unis, le sirop de betteraves sucrières était transformé en sucre, qui n'était pas assujetti à leurs quotas. Les États-Unis ont un marché protégé, et chaque raffinerie a un quota précis. En cas de surproduction, elle doit entreposer les surplus. Toutefois, leurs quotas ne s'appliquaient pas au sirop de betteraves sucrières en provenance de Taber. Ils pouvaient donc vendre ce sucre en respectant leurs quotas de production nationale.

Le sénateur Peterson : En vertu de l'Accord de libre-échange, quel droit avaient-ils d'agir de la sorte? Chose certaine, ils ne supportaient pas la concurrence.

M. Lauwen : En effet. Ils avaient une production excédentaire et n'arrivaient même pas à écouler tous leurs stocks. Nous exportions notre sucre vers une sucrerie des États-Unis qui était de notre côté.

Les autres entreprises n'appréciaient pas du tout que du sucre arrive de l'étranger alors qu'elles n'arrivaient pas à écouler leurs propres stocks. Pourtant, nous respections la ligne tarifaire et nous n'avons contourné aucune règle. C'était un produit admis aux États-Unis. N'empêche que quelques personnes ont décidé qu'elles n'en voulaient plus et y ont mis un terme.

Le sénateur Peterson : C'est pareil pour le bois d'œuvre.

Le président : Nous étions tous très heureux de vous aider à faire échec aux manœuvres du lobby américain du sucre par les lettres au ton ferme que nous avons envoyées aux ministres du Commerce international et de l'Agriculture. Nous espérons que cela aura porté fruit.

M. Lauwen : Nous sommes très reconnaissants de l'intervention rapide du Sénat et de ses lettres de soutien.

Le sénateur Banks : La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, les États-Unis envisageaient d'imposer encore plus de restrictions sur le sirop. Ils en sont encore au stade des discussions, n'est-ce pas?

M. Lauwen : Ils menacent toujours de fermer la porte aux importations canadiennes. Je ne me souviens pas de l'année exacte, mais le Canada exportait 30 000 tonnes métriques de sucre sur le marché américain. Nos exportations ont pratiquement été réduites à néant depuis. On nous a imposé un contingent tarifaire de 9 600 tonnes métriques. Cela représente le tiers de ce que nous exportions auparavant.

Le sénateur Banks : Ces 9 600 tonnes sont exportées aux États-Unis, n'est-ce pas?

M. Lauwen : Oui.

Le sénateur Banks : La situation s'est nettement améliorée pour vous. Vous avez eu un tonnage record l'an dernier — un rendement à l'acre inégalé —, et vos produits se vendaient à des prix supérieurs aux coûts de production; ce qui n'était pas le cas de 1996 à 2002. Votre situation n'est donc pas si désespérée, n'est-ce pas?

M. Lauwen : Je n'irais pas jusqu'à dire que les affaires sont prospères, mais la situation est plus stable qu'elle ne l'était. Nous avons décroché un nouveau contrat en 2002, ce qui a poussé la compagnie à faire un meilleur travail.

Le sénateur Banks : La raffinerie de sucre Rogers est une bonne entreprise.

M. Lauwen : Oui.

Le sénateur Banks : Comment l'industrie de la pomme de terre se porte-t-elle?

M. Zeinstra : Si l'on remonte trois, quatre ou même cinq ans en arrière, il y avait une assez bonne marge de profit, mais depuis quatre à cinq ans, les coûts montent en flèche et le prix d'achat des terres ainsi que le loyer foncier augmentent. En réponse à la question précédente, sachez que je cultive les deux-tiers de ma terre.

Si vous deviez tout acheter aujourd'hui, ce ne serait pas différent des autres produits agricoles; l'exploitation ne serait pas rentable.

Le sénateur Banks : Vous ne pourriez pas acheter une nouvelle terre aujourd'hui.

M. Zeinstra : Non, je ne pourrais pas acheter toute la superficie nécessaire. Ce n'est pas comme la culture du grain. Il convient d'effectuer une rotation tous les trois ans, mais il est préférable de le faire tous les quatre ans. Il faut avoir une très grande superficie pour être en mesure de respecter son contrat.

Le sénateur Banks : Je vais poser la question du sénateur Peterson autrement. Obtenez-vous un prix élevé pour votre grain biologique? Si oui, qui sont les acheteurs et comment cela fonctionne-t-il?

M. Chrapko : Nous vendons notre grain sur le marché libre. C'est très intéressant car la plupart des acheteurs alignent leur prix sur ceux de la Commission canadienne du blé. Alors tous ceux qui critiquent la Commission, merci, mais non merci.

Quand j'ai vendu mon blé au Montana, croyez-moi, en moins de dix minutes, j'ai pu avoir l'autorisation de la Commission pour obtenir les numéros et les certificats requis. La Commission canadienne du blé n'empêcherait pas ce type de transaction, même si mon grain n'était pas biologique; c'est aussi simple que cela.

Oui, nous avons un bon prix. La dernière fois que j'ai perdu un marché, c'était l'an passé et c'est parce que je n'avais pas de blé à vendre, le prix le plus bas était 3 $ au-dessus du prix de la Commission. Il y a cinq ou six ans, j'obtenais 10,80 $ pour un boisseau.

Le sénateur Banks : De plus?

M. Chrapko : Cela aurait été 7 $ de plus que le prix. Il y aussi la valeur du dollar qui entre en ligne de compte lorsqu'on vend à l'étranger. À cet égard, je n'ai que des éloges à l'endroit de la Commission. Elle m'a fait gagner beaucoup de temps; je n'ai pas eu à chercher des marchés ni à débattre avec l'acheteur.

De toute évidence, les minoteries et les acheteurs vont essayer d'avoir le grain au plus bas prix possible. De mon côté, je vais tenter de le vendre au meilleur prix. Si la Commission canadienne du blé nous obligeait à respecter son prix, faute de quoi nous risquerions de ne pas trouver preneur pour notre blé, je n'aurais d'autre choix que de passer par elle. C'est pareil pour le grain et le blé.

L'an dernier, quand je suis allé vendre mon avoine — et l'avoine n'est pas couverte par la Commission canadienne du blé —, j'ai obtenu 1,92 $. La dame qui était là ne savait pas comment entrer l'information dans son ordinateur. C'était un vendredi, et comme je devais partir, je lui ai dit que je reviendrais signer les papiers le lundi suivant. Je suis revenu le mardi, et le prix était tombé à 1,88 $. Je venais de me faire avoir et je ne pouvais pas m'en remettre à la Commission. Je l'ai donc vendu à ce prix. Manifestement, c'est un marché en dents de scie.

J'ai livré mon avoine pour ce montant, 1,88 $, et il m'en restait encore. Quand j'ai demandé si je pouvais en livrer une quantité supplémentaire au même tarif, on m'a répondu que le prix avait chuté à 1,57 $ sur le marché au comptant. Heureusement que nous avons la Commission canadienne du blé!

Je suis retourné là-bas début septembre. Nous avions eu beaucoup de pluie, et notre avoine était destinée aux États- Unis. J'ai obtenu 2,19 $ le boisseau. J'en avais prévu un certain nombre, mais encore une fois, il m'est resté des surplus. J'ai demandé si on pouvait me les acheter au même prix, et on m'a répondu que non, car ce dernier était tombé à 1,38 $. Encore une fois, cela prouve que la Commission canadienne du blé a son utilité.

Quelqu'un pourrait-il me dire si la Commission canadienne du blé a déjà refusé un chèque sans provision?

Le sénateur Banks : Cargill ou Archer Daniels Midland ont-ils jamais refusé un chèque en raison d'une insuffisance de fonds?

M. Chrapko : Si je puis me permettre, sénateur, vous savez probablement que cet acheteur de pois du nord d'Edmonton me doit toujours plus de 40 000 $. Quelque chose cloche.

Le sénateur Mahovlich : Pour moi, la meilleure pomme de terre est une pomme de terre au four de l'Idaho.

M. Chrapko : Nous devons vous chasser de cette salle.

Le sénateur Mahovlich : Avez-vous déjà mis en marché des pommes de terre albertaines? Vous contentez-vous de les envoyer à une entreprise de transformation comme McCain? Fait-on la commercialisation de bonnes pommes de terre albertaines rôties?

M. Zeinstra : Oui.

Le sénateur Mahovlich : Y a-t-il un point de vente au détail quelque part en Ontario?

M. Zeinstra : Pas que je sache. On cultive beaucoup de pommes de terre en Ontario également.

Le sénateur Mahovlich : Oui, on en produit aussi de très bonnes à l'Île-du-Prince-Édouard. Il n'y a rien qui ressemble aux pommes de terre au four de l'Alberta, que vous emballez et mettez en marché, n'est-ce pas?

M. Zeinstra : Pas vraiment, non.

Le sénateur Mahovlich : On a évoqué l'OMC à quelques reprises aujourd'hui. Je pense que c'est le gouvernement Mulroney qui a signé cette entente.

Au cours des prochaines rondes de négociations, pourrons-nous faire quelque chose pour aider nos agriculteurs? Devons-nous les subventionner? Est-ce la réponse à ce que font les Européens et les Américains? Pouvons-nous obtenir une meilleure entente pour nos agriculteurs?

M. Chrapko : Vous me regardez, sénateur; j'aime bien votre attitude défensive de hockeyeur en ce qui concerne le cas des producteurs de pommes de terre. Personnellement, si je pouvais, j'éviterais complètement l'OMC; c'est une perte d'argent pour moi, contribuable. Ceux que nous envoyons là-bas ne font que trahir, pour ainsi dire, les agriculteurs.

Ce ne sont pas tous les pays qui se conforment à l'OMC. On nous rappelle constamment ce système de feux rouges, jaunes ou verts utilisé dans le cadre des programmes. Mais allons donc : il faut se rendre compte que peu importe les personnes qui prennent ces décisions ou écoutent l'avis des bureaucrates, ces programmes sont arrêtés avant même qu'on se rende aux rencontres de l'OMC. Les dés sont pipés d'avance.

Vendredi et samedi derniers, j'ai discuté avec des amis américains à Lincoln, au Nebraska. Ils obtiennent des subventions pouvant atteindre 100 $ l'acre. Après qu'ils se sont associés pour cultiver leur maïs, on leur a versé 40 $ l'acre; ils permettent donc à leur voisin de nourrir son bétail avec le maïs récolté. Et nous craignons d'accorder quelque chose aux agriculteurs canadiens?

Le sénateur Mahovlich : Nous sommes liés par l'ALENA. Vous avez parlé d'un problème avec les Mexicains. Est-ce qu'ils ne suivent pas les règles de l'ALENA?

M. Miyanaga : Lorsque nos problèmes avec eux ont commencé, ils étaient d'ordre sanitaire. Les Mexicains avaient modifié leurs règles concernant la propreté des pommes de terre qu'on leur expédiait. Ici, l'ACIA applique certains tests normalisés. Les Mexicains recourent à des critères moléculaires, et nos pommes de terre n'y correspondent pas. Ce n'était qu'une façon d'empêcher l'entrée de nos pommes de terre sur leur marché, parce qu'ils avaient enregistré un surplus cette année-là.

Lorsque nous avons demandé comment faire pour leur rendre la pareille, en bloquant, par exemple, l'entrée au Canada de tomates mexicaines, le gouvernement canadien a répondu qu'on ne procédait pas ainsi. Fin de la discussion. Nous avons été privés de ce marché pendant peut-être deux ans.

Le sénateur Mercer : J'aimerais parler des pommes de terre. Environ 75 p. 100 de votre production part vers les entreprises de transformation. En venant ici en automobile, ce matin, nous sommes passés devant l'usine McCain. Je vois la liste des autres transformateurs; que fait-on des pommes de terre dans ces usines?

M. Miyanaga : La plupart sont transformées en frites, et le reste, en produits dérivés : pommes de terre rissolées, en lanières ou en cubes.

Le sénateur Mercer : On ne produit pas de croustilles?

M. Miyanaga : Ce sont Old Dutch et Hostess Frito-Lay qui s'en chargent.

Le sénateur Mercer : Quel pourcentage des 75 p. 100 de pommes de terre transformées va chez Hostess et Old Dutch?

M. Miyanaga : Probablement 25 p. 100.

Le sénateur Mercer : Vous avez parlé du programme de sécurité alimentaire et l'avez relié au différend que nous avons connu avec le Mexique. L'ACIA a-t-elle établi des règlements trop stricts pour les pommes de terre?

M. Miyanaga : Je ne pense pas que les règlements posent problème. Notre province est si vaste, et nous avons du mal à accéder à l'ACIA. Nous exportons une grande quantité de pommes de terre de semence, et il n'y a que deux ou trois inspecteurs pour couvrir toute la province. Comme nos produits sont destinés à l'exportation, ces inspecteurs sont censés aller dans chaque ferme avec un programme d'inspection préalable permettant au fermier de prélever ses propres échantillons.

Le sénateur Mercer : Comment peut-on procéder à l'inspection préalable d'une culture qui est encore sous terre?

M. Miyanaga : Ils vous montrent comment faire. Nous procédons également à l'inspection préalable de nos récoltes alors qu'elles sont entreposées.

M. Chrapko : Madame la présidente, j'aimerais ajouter une remarque. J'espérais que quelqu'un aborde la question du brevetage des semences, qui s'applique aux pommes de terre. J'en ai glissé mot pendant mon exposé. Personne ne prête attention à la menace qui pèse sur nous.

J'ai parlé de la Loi sur les semences, qu'on a intégrée plus tard à la Loi sur les brevets. Ce qui s'est produit est effrayant. Il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'une situation de dépendance est en train de se créer. Je crois savoir que trois grandes entreprises de semences possèdent 80 p. 100 des brevets.

Je vais utiliser l'exemple du blé pour illustrer mes propos : nous ne pouvons vendre du blé qui ne figure plus sur la liste des variétés, même s'il est parfaitement bon. Il est illégal pour nous de cultiver et de vendre ce grain si le détenteur du brevet le retire de la liste. Si vous en faites la culture, le récoltez et le vendez, et qu'on le retire de la liste, vous avez un problème.

Comme elles possèdent tous les brevets, les entreprises peuvent retirer des attestations et introduire de nouvelles semences. Cela force les agriculteurs à utiliser leurs semences. Nous savons ce qui s'est produit avec le canola; il faut le leur revendre, et la spirale continue.

À ce que je sache, aucun autre produit au Canada ou aux États-Unis ne fait l'objet d'un brevet, qu'il s'agisse d'un véhicule ou autre. Une fois que vous l'avez acheté, il est à vous. Vous ne payez qu'une fois.

La question de la recherche s'impose. Si tous les agriculteurs payaient des taxes de 15 $ l'acre aux fins de la recherche, soit le prix fixé par Monsanto, nous aurions beaucoup d'argent pour la recherche publique. Les résultats ne seraient pas faussés, car un fonctionnaire n'aurait aucune raison de les trafiquer. C'est une discussion qui pourrait nous occuper toute la journée; je m'en tiendrai là.

Le sénateur Gustafson : Un de mes voisins est producteur biologique. Il loue 50 000 acres de terre. Il est revenu d'Europe, où il vendait un type spécial de blé dur pour les semences. Il en a obtenu plus de 12 $ le boisseau. Pour qu'il ait pu le faire, la Commission canadienne du blé doit bien accorder une certaine marge de manœuvre.

M. Chrapko : En effet. Comme je l'ai dit tout à l'heure, vous pourriez vendre n'importe quel blé à cette fin; mais s'il ne figure plus sur la liste, vous aurez des problèmes.

Le sénateur Gustafson : Ce jeune homme fait un malheur. Douze dollars le boisseau, ce n'est pas mal.

Hank G. Van Beers, préfet, 5e Division du district municipal de Taber, à titre personnel : Merci à vous, sénateur, et aux autres membres du comité, de vous être déplacés jusqu'à Taber. Nous vous souhaitons la bienvenue. Je vous prie de m'excuser de n'avoir pu me rendre à Lethbridge hier. Pour la première fois en six mois, la Commission canadienne du blé m'a permis de transporter quelques chargements de blé, et vous veniez en deuxième.

La présidente : Les priorités d'abord.

M. Van Beers : Nous nous sommes spécialisés, mondialisés, rationalisés et stabilisés; nous avons établi des règles du jeu équitables, mais au bout du compte, cela n'a pas changé grand-chose. Nous avons modifié notre angle d'approche. Le conseil du district de Taber se préoccupe du renouvellement et de la croissance future de l'Alberta rural; je suis certain que c'est également votre cas.

De nos jours, pour se lancer dans l'agriculture, un jeune fermier aura besoin d'un million de dollars ou plus, selon ce qu'il souhaite faire. L'été dernier, Taber a fait appel à un comptable pour cerner les difficultés auxquelles pourraient être confrontés les jeunes agriculteurs, et l'une des préoccupations concernait le financement stable pour démarrer.

J'achève ma carrière d'agriculteur. Certaines des plus grandes difficultés auxquelles j'ai fait face, comme beaucoup d'entre nous au début des années 1980, étaient d'ordre financier. Nous avons demandé aux comptables de trouver des idées pour garantir un financement stable aux jeunes gens intéressés à vivre de l'agriculture. Ils nous ont présenté des recommandations et des options. Fin janvier, nous avons assisté à un congrès de l'Agricultural Service Board of Alberta, et cette résolution a été adoptée à l'unanimité. Dans la plupart des recommandations, il était question de financement et de gains en capital.

Se constituer un inventaire et payer l'équipement est l'affaire de toute une vie. Quand un agriculteur prend sa retraite, il vend tout en un an, et les taxes sont payées. Il doit quand même continuer de vivre, mais les possibilités et les façons de réinvestir une partie de son argent sont réduites. Pourtant, je suis certain qu'il serait intéressé à soutenir un peu le secteur agricole. Il est possible de transférer des gains en capital à des membres de sa famille immédiate.

On a notamment proposé d'étendre ce droit à des personnes ne faisant pas partie de la famille immédiate si, grâce à cette vente, le fermier peut assurer des revenus à la génération suivante. Voilà l'une des recommandations.

L'autre recommandation consistait à prolonger l'application de la réserve pour gains en capital à 20 ans au lieu de 10. Je crois qu'en ce moment, la période est de 10 ans; si nous pouvions étaler cela sur 20 ans, ce serait utile également.

La troisième recommandation concerne la vente, par un agriculteur, d'un inventaire et d'un équipement imposables la même année. Si le propriétaire d'un troupeau de vaches vend son exploitation pour prendre sa retraite, c'est lui qui devrait assumer les taxes afférentes; je suis sûr que cela pourrait faciliter la tâche d'un jeune agriculteur qui démarre.

Nous sommes préoccupés par le manque de jeunes en mesure de se lancer dans l'agriculture ces temps-ci, et nous croyons que si le gouvernement pouvait envisager d'apporter certains de ces changements à la Loi sur les impôts, ce serait utile, et cela dynamiserait l'Alberta rural.

Je suis assez âgé pour être conscient que je ne sais pas tout. Je vous fais cette remarque au passage, parce qu'on a beaucoup parlé de cette question ce matin. J'ai cultivé de l'orge pendant 33 ans, mais je n'ai jamais eu besoin de la Commission canadienne du blé. À ce propos, le gouvernement pourrait tâcher de faire en sorte que cette dernière ne s'occupe plus de la commercialisation au Canada, mais seulement des marchés d'exportation. Si la CCB arrive à faire du bon travail de ce côté-là, nous pourrons revoir la question dans quelques années.

Merci de votre attention. Je sais que vous êtes forts occupés et que vous êtes impatients de vous y mettre.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Van Beers; nous sommes à l'écoute.

Je dois mentionner au comité que M. Van Beers est conseiller à la 5e Division du district municipal de Taber. Il est très présent sur les scènes publique et agricole. Lorsqu'il parle, nous prêtons attention.

Le sénateur Banks : M. Van Beers est préfet. Monsieur le maire.

M. Van Beers : C'est la première fois que j'entends cela.

Le sénateur Banks : Vous avez droit à ce titre.

M. Van Beers : Merci.

Le sénateur Banks : La seconde recommandation ne fait pas particulièrement référence aux terres agricoles. Vous êtes également de cet avis, n'est-ce pas?

M. Van Beers : En effet.

Le sénateur Banks : Il s'agirait de terres agricoles pour lesquelles les gains en capital seraient étalés sur 10 ans au lieu de 20.

M. Van Beers : Si nous sommes trop précis, les gens pourraient croire que nous nous concentrons trop là-dessus. C'était certainement ce que nous visions. En même temps, c'est quelqu'un d'autre qui devrait y voir. Il faut examiner la question d'un point de vue élargi.

Le sénateur Banks : Cette omission dans la seconde partie de la résolution était volontaire.

M. Van Beers : Je crois que oui. C'est une stratégie politique pour rallier davantage de gens.

Le sénateur Banks : Vous et moi avons dit plus tôt que l'agriculture est un bon moyen de gagner une petite fortune, pourvu qu'on commence avec une grande. Vous avez posé la question concrète suivante : si un jeune dispose d'un million de dollars, soit le prix pour se lancer en agriculture, pourquoi diable choisirait-il ce secteur? Il y a un millier d'autres carrières beaucoup plus faciles.

Cela nous amène à la question du mode de vie. J'ai vécu la pire journée de ma vie alors que je siégeais à ce comité, dont je suis maintenant le président, lorsque nous avons enfoncé le dernier clou dans le cercueil des mines de charbon du Cap-Breton. En effet, pendant de nombreuses années, le gouvernement canadien — peu importe le parti au pouvoir — avait subventionné ces mines. Mais on en était arrivés à un point où cela n'avait plus de sens. Sur le plan de la rentabilité, il n'y avait plus de lumière au bout du tunnel.

Au lieu de subventionner une industrie qui offrait au moins une lueur d'espoir de réussite, le gouvernement du Canada finançait, pour reprendre le terme que vous avez utilisé, un mode de vie.

Je ne suis pas sûr que ce soit toujours le rôle du gouvernement du Canada, peu importe sa couleur, de subventionner un mode de vie plutôt qu'une industrie qui a des chances de se relever ou de réussir.

Lorsque le projet de loi visant à faire fermer les mines de charbon du Cap-Breton a été adopté, les gens sont venus nous dire : « Nous faisons cela depuis 400 ans. Nous exploitions ces mines bien avant l'avènement du Canada. Lorsque celui-ci a eu besoin de nous pour les guerres, la révolution industrielle et le développement du pays en général, nos valeureux aïeuls étaient là et ils sont morts dans ces mines de charbon. Et maintenant, vous allez les fermer? »

En somme, il s'agissait de choisir entre subventionner un mode de vie ou un secteur d'activité. Certaines terres de la province font partie du triangle de Palliser, d'après le nom de celui qui les a explorées en venant ici pour la première fois. M. Palliser a vu qu'elles n'étaient pas propices à l'agriculture. Dans cette partie du monde, il y a beaucoup d'agriculture peu productive.

Lorsque nous parlons de subventions à l'agriculture et d'aide aux jeunes exploitants, particulièrement ceux dont la situation est précaire, nous retrouvons-nous à soutenir une entreprise qui en vaut la peine, ou un mode de vie?

Quel sens cela a-t-il pour le gouvernement du Canada d'encourager un mode de vie? De nos jours, nous ne prétendons pas qu'il doit y avoir un forgeron dans tous les villages, ni même, dans certains cas, qu'il faut qu'il y ait un village.

Vous souhaitiez intervenir?

M. Van Beers : On doit faire valoir l'aspect commercial de l'agriculture. Les producteurs de pommes de terre s'en sont chargés. Les cultivateurs de betteraves aussi, et cela ne s'arrête pas à Taber, mais les gens ne pourront plus le faire si vous leur mettez des bâtons dans les roues avec toutes sortes de règlements et restrictions.

La Commission canadienne du blé en est un parfait exemple. Si quelqu'un de Taber ou des environs, ou encore de la Saskatchewan, veut ouvrir une usine de transformation du blé dur, une usine de pâtes ou autre, croyez-le ou non, la CCB est la plus grande entrave à la réussite de cette exploitation. J'en suis fermement convaincu.

Tant que nous ne changerons pas ces règles, nous continuerons de soutenir un mode de vie. Nous devons nous jeter à l'eau et les modifier.

Sénateur Banks, vous avez soulevé la question des droits de circulation ferroviaire. Si j'ai les permis nécessaires, je peux conduire n'importe quel camion ou utiliser n'importe quel aéroport canadien. Mais même avec un permis approprié, je ne pourrais faire circuler un train. Allons donc; c'est ridicule.

Lorsqu'on en a eu fini avec le tarif du Nid-de-Corbeau, nous avons entendu toutes sortes de promesses quant à la façon dont l'Alberta rurale gagnerait en valeur ajoutée, en transformation secondaire et autres. Il devait y avoir de grands avantages. Mais le seul effet que cela a eu, c'est de ruiner carrément le Canada rural. Rien de ce qui était censé se produire n'est arrivé.

Je ne demande pas qu'on rétablisse le tarif du Nid-de-Corbeau, mais qu'on nous laisse au moins faire quelque chose de nos produits, leur ajouter de la valeur et les vendre où bon nous semble sans entrave. À notre avis, il existe différents moyens d'y parvenir.

Je considère l'industrie des biocarburants comme un débouché extraordinaire pour le Canada rural. Nous pourrions discuter de la méthode à adopter. Malgré certaines opinions selon lesquelles nous devrions éviter de trop recourir à la technologie pour améliorer les récoltes, si nous cultivons les bonnes variétés, ce serait grandement bénéfique pour l'ensemble de notre industrie énergétique.

Peu importe ce qu'on pense de la question du réchauffement climatique, qu'on soit David Suzuki ou pas — et je peux vous trouver des gens qui ont une autre opinion là-dessus —, ce qui fait consensus, c'est que nos sources d'énergie traditionnelles se tariront. Peu importe que cela ait lieu dans 50, 100 ou 500 ans, nous devons trouver des solutions de rechange. Si on nous permet d'utiliser la technologie, et si des personnes optimistes et novatrices prennent les choses en mains, tout est envisageable. Ce sera bon pour l'environnement. Si on ne nous restreint pas outre mesure, le secteur de l'agriculture peut réussir et prospérer. Nous paierons des impôts au lieu de recevoir des aides. Mais ne nous contraignez pas trop.

La présidente : Je dois vous appeler conseiller ou préfet?

M. Van Beers : Préfet.

Le sénateur Gustafson : J'aimerais savoir ce que vos avocats ou comptables vous ont dit au sujet du transfert intergénérationnel.

D'après ce que j'ai compris, si vos enfants sont agriculteurs, vous pourrez même effectuer un transfert à vos petits- enfants. Mais les récoltes qui sont engrangées ne sont pas transférables; il vous faudra payer des taxes là-dessus.

Qu'en est-il du bétail?

M. Van Beers : Vous paierez des taxes sur le bétail l'année où vous vous en départirez.

Le sénateur Gustafson : Ce serait un gros problème ici.

M. Van Beers : Certainement.

Le sénateur Banks : Ou l'année de votre décès.

Le sénateur Gustafson : Cela dépend des dispositions de votre testament.

Le sénateur Banks : Vous payez quand même des taxes sur votre bétail l'année de votre décès.

M. Van Beers : À moins que vous ne les emmeniez avec vous dans la tombe.

Le sénateur Banks : Il me semble voir leur fantôme.

Le sénateur Mercer : Ils ont dit que vous ne pouviez les emmener avec vous.

Le sénateur Gustafson : J'imagine que ça dépend de ce qui figure dans votre testament. Si vous léguez vos biens à votre femme et que vous mourez avant elle, elle pourrait recourir au transfert intergénérationnel.

M. Van Beers : Sans aucun doute.

Le sénateur Gustafson : J'ai vu beaucoup de bétail dans les environs. Cela représente beaucoup de taxes.

M. Van Beers : Si c'était structuré de manière à faciliter le transfert à la génération suivante, sans qu'il soit nécessaire de payer les taxes et de régler tout le reste. Il faut vivre quelque part. D'autres éléments empêchent la génération actuelle de financer la prochaine.

Le sénateur Gustafson : Vous avez une exonération de 500 000 $.

M. Van Beers : Oui, en effet. Si nous pouvions l'augmenter à 1 million, nous pourrions résoudre le problème. C'est une sérieuse préoccupation ici. Vous avez entendu parler du prix des terres. Il s'agissait évidemment de terres plus chères. La plupart sont vendues à un prix moindre. Pour se lancer en agriculture, il faut beaucoup de capitaux. La génération montante n'en a pas les moyens dans les circonstances actuelles. C'est le message que nous souhaitions vous communiquer aujourd'hui.

Le sénateur Peterson : En tant que petite entreprise, vous avez droit à une exonération de 500 000 $ en gains de capital.

M. Van Beers : Oui.

Le sénateur Peterson : Et vous demandez plus?

M. Van Beers : C'est bien cela.

Le sénateur Mercer : La municipalité a fait du bon travail. Qu'avez-vous fait depuis? Y a-t-on donné suite?

M. Van Beers : Nous l'avons présenté au congrès de l'Agricultural Service Board of Alberta, qui s'est tenu en janvier. Le rapport a été approuvé unanimement par cet organisme. Dans ce cas-ci, il sera transmis au gouvernement fédéral. Espérons qu'en cours de route, vous le verrez passer.

Le sénateur Mercer : À qui exactement? Le gouvernement fédéral, c'est vaste.

M. Van Beers : Au ministre des Finances, je crois.

Le sénateur Mercer : Est-ce que quelqu'un écrit une lettre pour dire : « Voilà ce que nous avons adopté »?

M. Van Beers : Peut-être nous y prenons-nous mal. Mais en dehors de cela, les Albertains de la campagne ont très peu d'occasions d'exprimer leurs préoccupations au gouvernement.

Le sénateur Mercer : Ce n'était pas une critique. Je tentais de déterminer où se trouve votre document, pour que nous sachions s'il est possible d'en assurer le suivi. Si nous recevons le ministre des Finances, nous saurons qu'il devra connaître ce rapport avant que nous ne lui en parlions.

M. Van Beers : Je n'occupe pas de poste de direction au sein de l'Agricultural Service Board, mais je vais tâcher de savoir où il est. J'en informerai le sénateur Fairbairn.

La présidente : Merci beaucoup, chers collègues. Et merci à vous, monsieur Van Beers. C'est toujours agréable de vous voir. C'est un dossier fort intéressant, que nous suivrons de près.

M. Van Beers : J'aimerais remercier les membres du comité d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui. Ce fut pour moi une matinée intéressante, même si nombre des questions abordées n'étaient pas nouvelles pour moi. Je suis heureux que vous soyez venus nous écouter.

La présidente : Ce fut un plaisir, chers collègues. C'est toujours agréable de venir à Taber. Merci aux témoins et à tous ceux qui nous ont écoutés de leur présence. Nous tiendrons d'autres séances à Taber et à Picture Butte, puis nous nous dirigerons vers la Saskatchewan.

La séance est levée.


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