Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense
Fascicule 9 - Témoignages du 1er février 2007 - Séance de l'après-midi
CALGARY, le jeudi 1er février 2007
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 13 h 20, pour étudier la politique canadienne en matière de sécurité nationale et en faire rapport.
Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je déclare ouverte la séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle Colin Kenny et je suis le président.
Avant d'entamer notre séance, j'aimerais vous présenter les membres du comité. Assis immédiatement à ma droite est le sénateur Michael Meighen, vice-président du comité. Il est avocat et membre des barreaux du Québec et de l'Ontario. Il est chancelier de l'University of King's College et ancien président du Festival de Stratford. Actuellement, il préside le Sous-comité des anciens combattants et il est membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, ainsi que du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.
À sa droite se trouve le sénateur Gerry St. Germain, de Colombie-Britannique. Il siège au Parlement depuis 1983, d'abord en tant que député, puis en tant que sénateur. Il est président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Il siège également au Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.
Le sénateur Wilfred Moore, de Halifax, est assis à côté du sénateur St. Germain. C'est un avocat qui a beaucoup travaillé dans le milieu communautaire et qui, pendant dix ans, a fait partie du conseil d'administration de l'université Saint Mary. Il est aussi membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.
À ma gauche, le sénateur Tommy Banks, de l'Alberta, est entré au Sénat après 50 ans de carrière dans l'industrie du spectacle. Il est président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.
Tout au bout de la table se trouve le sénateur Norman Atkins, de l'Ontario. Il est arrivé au Sénat fort de 27 années d'expérience dans le domaine des communications. Il a agi comme conseiller principal de l'ancien chef du Parti conservateur du Canada Robert Standfield, du premier ministre de l'Ontario William Davis et de l'ex-premier ministre du Canada Brian Mulroney.
Nous accueillons aujourd'hui le colonel Art Wriedt, commandant du 41e Groupe-brigade du Canada, le lieutenant- colonel Bruce Gilkes, commandant du King's Own Calgary Regiment, le lieutenant-colonel Tom Manley, commandant des Calgary Highlanders, le lieutenant-colonel Brian Doherty, commandant du 14e Bataillon des services, et le capitaine Karl Kalincak, capitaine-adjudant du 33e Escadron du génie.
Nous allons commencer par entendre le colonel Wriedt. Colonel, vous avez la parole.
Colonel Art Wriedt, commandant, 41e Groupe-brigade du Canada, Défense nationale : Honorables sénateurs, je vous remercie. Je vais commencer par faire remarquer que, comme l'ont déclaré le chef d'état-major de la Défense, le général Hillier, et le chef d'état-major de l'Armée de terre, le général Leslie, l'armée est en guerre, bien que ce ne soit pas dans le sens habituel du mot, comme, par exemple, durant la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, je crois savoir que les membres de votre comité se sont rendus en Afghanistan, de sorte qu'ils savent fort bien que, lorsqu'on parle à nos soldats là-bas, aux hommes et aux femmes, et à ceux qui sont rentrés au pays, ils vous diront très franchement que, lorsqu'on se trouve sous le tir de roquettes au beau milieu d'un village de huttes de terre, c'est la guerre.
La situation a été la source de très importantes préoccupations et de lourds préjudices pour l'armée en particulier, qui inclut tant la force de réserve que la force permanente. Le rythme des opérations auxquelles nous sommes confrontés actuellement impose des contraintes que très peu d'entre nous — ou, pour être tout à fait franc, aucun d'entre nous peut-être — n'a connu tout au long de sa carrière. Je me suis enrôlé dans la force de réserve en 1973, à Trail, en Colombie-Britannique, en tant que sapeur, et la situation actuelle ne ressemble en rien à ce que j'ai connu. Nous sommes en « terra incognita » et nous apprenons sur le tas. Heureusement que nous avons des gens brillants chez nous.
Manifestement, je m'intéresse plus particulièrement à la première réserve qui se trouve ici à Calgary, de même qu'à mes cinq unités d'Edmonton et à celle de Lethbridge. Il est clair qu'en tant que commandant d'un groupe-brigade, j'ai plus une vue d'ensemble, en ce sens que, comme commandant de formation, j'ai souvent l'occasion d'être en contact avec les commandants qui gèrent vraiment les troupes pour le compte du gouvernement du Canada et de la population canadienne. Comme je traite avec mes supérieurs à Edmonton, je dois me conformer à des directives quelque peu différentes des autres personnes qui m'accompagnent aujourd'hui. Toutefois, cela étant dit, comme elles sont ma première source de contact, elles forment mon équipe de commandement au sein du 41e Groupe-brigade du Canada. Je compte sur elles pour me tenir au courant des préoccupations et des problèmes auxquels elles sont confrontées tous les jours. Comme chacune d'entre elles a un travail à temps plein à l'extérieur de la Réserve, elles doivent accomplir ce travail en fonction de contraintes de temps habituellement lourdes qui sont uniques à la force de réserve.
Actuellement, le SOFT, ou Secteur de l'ouest de la Force terrestre, connaît une période de relative accalmie. Je dis « relative » parce que, même si actuellement nous ne nous trouvons pas en Afghanistan dans la partie où travaille une force opérationnelle — et que nous ne ferons même pas partie de la prochaine —, nous serons de service durant le premier semestre de 2008. Par conséquent, nous sommes en période intensive de planification et de préparation en vue de donner à nos réservistes la formation préalable au déploiement. De ce fait, parmi les problèmes qui me sont soumis par mes collègues et ceux que je peux observer moi-même durant mes déplacements au sein du groupe-brigade et qui m'empêchent de dormir la nuit, on note tout d'abord la dotation en effectifs de ce déploiement prévu au début de 2008 et jusqu'en 2009. Il y a beaucoup à faire pour préparer nos réservistes à répondre aux besoins de la force opérationnelle 3-09. Dans cette force, le 41e Groupe-brigade est le principal groupe de réservistes qui escortera toutes les troupes, si vous préférez, qui sont envoyées pour de la formation préalable au déploiement et pour l'intégration avec les homologues de la force permanente.
Compte tenu des besoins de la force 1-08, qui n'est pas encore terminée, et de la force 3-09, nous nous en sortons relativement bien pour gérer la réintégration des réservistes dans leurs unités de réserve lorsqu'ils reviennent d'Afghanistan où ils faisaient partie de la force opérationnelle 1-06.
Nos circonstances ici en Alberta sont uniques du fait que nous sommes un groupe-brigade compact et que, par conséquent, nous avons pu offrir du soutien à nos membres lorsqu'ils avaient besoin d'aide. À cet égard, je vous demanderais d'adresser vos questions à mes commandants qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, sont ceux qui rencontrent vraiment les troupes. Jusqu'ici, toutefois, nous réussissons fort bien à gérer la réintégration des troupes.
Par ailleurs, les circonstances d'un réserviste sont quelque peu différentes de celles d'un soldat de la force permanente. Ce dernier fait carrière dans l'armée, de sorte qu'il sera déployé cette année et redéployé dans deux ans là et au moment indiqués. La plupart des membres de la force de réserve sont des volontaires. Quand leur contrat de classe C prend fin et qu'ils réintègrent leur unité, c'est alors à eux qu'il appartient de décider s'ils souhaitent être déployés à nouveau. Donc, il existe au sein de notre groupe une dynamique un peu différente de celle à laquelle est soumis le membre de la force permanente, mais comme je l'ai dit, jusqu'ici, la réintégration se déroule fort bien chez nous.
Avec l'envoi éventuel de 150 à 220 réservistes pour la force opérationnelle 1-08, notre grande source de préoccupation est de trouver des troupes pour la force 3-09, surtout sur le plan du recrutement. Dans un sens général, en ce qui concerne les deux composantes que sont le recrutement et le traitement, il n'existe pas, globalement et stratégiquement, de plan. Nous le faisons tous dans le cadre du fonctionnement de nos unités et de celui du groupe- brigade, mais il n'y a pas en place de mécanisme comme tel, de sorte qu'il faut vraiment compter uniquement sur nos propres moyens pour recruter des soldats pour nos unités.
Une autre source de préoccupation est le modèle de financement de la Réserve. La planification au niveau des unités est fonction du nombre de soldats qui en sont membres, multiplié par le nombre de jours dans l'année, ce qui permet de faire une approximation du budget dont on a besoin. Le modèle de financement était une fonction de l'état-major assumée par l'armée il y a quelques années. Actuellement — et j'ai le même son de cloche de mes commandants —, je m'interroge sur la validité de ce modèle, étant donné tout d'abord le rythme opérationnel plus rapide et, ensuite, le fait qu'à mesure que nos soldats sont déployés, un certain pourcentage — surtout au sein du leadership — ira se joindre à la force permanente. Ma responsabilité en matière de recrutement s'en trouve donc accrue. Voilà qui me préoccupe au plus haut point.
Au-delà de ces préoccupations, le matériel nous cause des maux de tête, et il y des pénuries. Dans le système, le matériel est réservé à la force de réserve, mais il est regroupé dans ce que nous appelons le système de gestion de l'ensemble du parc de véhicules. C'est fort bien si vous êtes soldat à plein temps. Vous pouvez vous rendre à Wainwright pour suivre une formation de trois jours, puis rentrer chez vous. Malheureusement, notre formation à nous a toujours lieu le soir et les week-ends. Après avoir travaillé fort à recruter quelqu'un, à le persuader de se joindre par exemple au régiment blindé du colonel Gilkes, lorsqu'il découvre qu'il n'y a en réalité qu'un, deux, trois ou quatre véhicules plutôt que le nombre prévu selon notre doctrine de formation, nous avons de la difficulté à le garder parce que beaucoup de nos membres n'ont pas encore fait leur choix de carrière. Ils essaient de voir ce qu'est l'armée au juste, contrairement à celui qui s'enrôle dans la force permanente et qui souhaite y faire carrière. Cela aussi nous impose des contraintes.
Cela étant dit, comme je suis bon soldat malgré tout, je serai toujours aux prises avec des préoccupations et des problèmes, mais actuellement, dans l'ensemble, l'avenir de l'armée semble très prometteur. Nous avons des chefs incroyables. Le commandant de l'Armée de terre du CEMD et mon commandant régional sont des soldats de premier ordre, et nous sommes tous fiers de les suivre.
La population canadienne a son armée à coeur. Elle est au courant de ce que fait l'armée. Elle met peut-être en doute la politique. Toutefois, ce n'est pas mon cas. Je n'élabore pas de politique. J'en suis plutôt l'instrument. Cela étant dit, le public appuie nos troupes, ce qui nous réchauffe le cœur.
Dernier point, il est tout simplement incroyable de voir à quel point nos troupes sont motivées. Quand on va rencontrer les soldats, surtout moi, qui m'intéresse surtout aux membres de la force de réserve, on se rend compte à quel point ils sont dévoués. Ils suivent leur formation durant leurs heures libres, en soirée. Quand le civil rentre chez lui par un vendredi soir de tempête et s'installe pour suivre sur Sports Net un match entre les Calgary Flames et les Edmonton Oilers, mes soldats sont en train de se préparer à aller s'entraîner dehors, à moins 30 degrés.
C'est très bon pour nous actuellement.
Honorables sénateurs, je vous remercie. Je peux peut-être répondre maintenant à vos questions.
Le président : Il vaudrait peut-être mieux entendre toutes les déclarations d'affilée, après quoi nous passerons aux questions.
Lieutenant-colonel Bruce Gilkes, commandant, The King's Own Calgary Regiment, Défense nationale : Honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité à témoigner. J'ai le plaisir distinct d'être ici pour la seconde fois, puisque j'ai déjà témoigné devant votre comité en mars, il y a déjà de cela quelques années. Je suis venu vous parler de quelques points qu'a fait ressortir le colonel Wriedt et peut-être vous fournir des explications à leur sujet.
Tout d'abord, pour ce qui est des tâches et des opérations, nous avons, je suppose, subi une transformation par rapport à il y a quelques années. Dans le passé, nous étions un régiment de Cougar, c'est-à-dire de véhicules blindés à six roues, alors que nous sommes maintenant un régiment de reconnaissance qui utilise des G-wagen de Mercedes dont la tourelle se trouve sur le dessus. Nous jouons aussi désormais un rôle opérationnel, soit de fournir un peloton de défense et de sécurité durant les opérations et nous le faisons par rotation dans tous les secteurs de la force terrestre. Ainsi, une ou deux unités nous représentent dans chaque secteur et d'autres occupent des postes névralgiques. Les réservistes finissent donc par former à 100 p. 100, dans tous les secteurs, le peloton de défense et de sécurité qui se déploie ensuite dans des opérations et fait ce que nous sommes censés faire en temps de guerre, soit escorter les convois et les personnalités jusqu'à leur destination en les exposant au moins de danger possible. C'est là une des missions les plus dangereuses actuellement en Afghanistan. Toutefois, elle correspond à notre rôle et à notre formation, et nos soldats sont très fiers de s'en acquitter.
Je suis convaincu qu'à partir de maintenant, les réservistes des unités de blindés peuvent facilement répondre aux demandes de dotation de ces pelotons au moyen des méthodes courantes. Nous sommes suffisamment nombreux pour poursuivre ce travail.
En ce qui concerne les soldats de la force 1-06 qui rentrent d'Afghanistan cette année, après avoir été déployés durant le premier semestre de 2006, ils ont occupé divers postes à Kandahar. Comme je l'ai dit, j'avais 14 soldats qui rentraient. Plusieurs d'entre eux ont constamment été déployés, comme ils le disent, de l'autre côté du barbelé, à l'extérieur du camp de Kandahar. L'un d'entre eux a été la cible de plusieurs attentats-suicide, mais il n'a pas été blessé. Un autre a été légèrement blessé dans un accident. Il a été évacué en Allemagne et s'est par la suite complètement rétabli. Nous sommes très chanceux.
Nous avons effectivement constaté que la formation pour la force opérationnelle 1-06 comportait certaines lacunes, allant du manque complet de formation d'une personne qui a dû de toute urgence assumer un rôle au camp à toute la gamme de cours de formation pour ceux qui ont été déployés à l'extérieur du camp ou affectés à des tâches essentielles pour la mission. Depuis lors, la situation a été en grande partie redressée grâce à la mise en place d'un programme de formation complet.
La solution a toutefois un coût, parce que nous constatons maintenant que la formation préalable au déploiement à l'étranger du soldat sera désormais d'un an presque. Cela signifie que le soldat n'est pas disponible pour le travail ou quoi que ce soit pendant un peu moins de deux ans environ, période durant laquelle il suit la formation, est déployé, revient et accomplit toutes ses tâches. Une période aussi longue pose un double problème au réserviste : d'une part, il lui est difficile de conserver son emploi. En effet, il n'est pas facile de convaincre l'employeur de lui accorder un congé de deux ans. D'autre part, il ne faut pas oublier les difficultés que cela cause dans la famille parce qu'à moins que vous ne soyez, par exemple, de la région d'Edmonton, vous devez vous déplacer jusqu'à celle-ci pour la plus grande partie de votre formation, ce qui signifie que vous pourriez être loin de votre famille pendant deux ans, bien que certaines périodes de relâche soient prévues.
Nous avons aussi une dizaine de soldats qui se sont portés volontaires pour aller à l'étranger dans le cadre de la prochaine force opérationnelle prévue pour le dernier semestre de 2007, en tant qu'équipages de Leopard. C'est une des tâches que nous avons conservé de notre ancien rôle. Nous nous sommes effectivement transformés en régiment de reconnaissance, mais nous avons conservé entre autres des compétences et de l'équipement, ce qui nous permet à pied levé, comme c'est le cas actuellement, d'envoyer des soldats dépanner dans l'escadron de chars Leopard.
Ensuite, nous avons une douzaine à peu près de soldats de cette unité qui seront déployés au sein de la force opérationnelle 1-08. L'unité ne comporte que 110 soldats environ. Donc, si vous faites le compte, vous constaterez que presque chaque soldat sera avant bien longtemps décoré.
Par contre, le fait que l'on prévoit une participation accrue des réservistes nous préoccupe. Dans le passé, cependant, la contribution de notre unité aux opérations était habituellement de répondre à une forte demande initiale, suivie d'un déclin constant à mesure que chacun accomplissait sa mission et refusait de repartir en mission. Rien actuellement n'oblige les réservistes à repartir en mission. Nous devons miser sur notre seul leadership et charisme pour les convaincre. Nous faisons ce que nous pouvons au niveau de l'unité pour résoudre le problème et pour tenter de répondre aux besoins de l'armée. C'est difficile.
Nous avons aussi éprouvé des difficultés à suivre les soldats qui reviennent des opérations. Parce que nous n'avons pas de contacts quotidiens avec eux, que nos rencontres sont espacées, il est très difficile de faire la distinction entre, par exemple, le soldat qui a des troubles mentaux et qui s'isole et celui qui va bien, mais qui ne participe pas aux exercices régulièrement parce qu'il vient de se trouver un nouvel emploi. Nous comptons actuellement sur la seule diligence du leadership, du supérieur immédiat comme l'officier de peloton et l'adjudant de troupes, pour traiter de la situation.
Passons maintenant aux ressources. Ce serait vraiment merveilleux, en fait, si nous n'avions pas à expliquer l'état des finances, mais je suis effectivement convaincu que l'actuel modèle de financement annuel de la solde de la Réserve n'est pas efficace, pour plusieurs raisons. Comme l'a mentionné le colonel Wriedt, il ne tient pas compte des troupes déployées dans le cadre d'opérations. On dénombre effectivement tous ceux qui se sont inscrits dans la Réserve et qui prennent part aux exercices au manège militaire en établissant une moyenne sur plusieurs mois. Cependant, si vos gens se trouvent à l'étranger, ils reviendront et, l'année suivante, vous devrez vivre avec l'enveloppe de fonds calculée selon les effectifs de l'année précédente. Pourtant, nous aurons encore des réservistes supplémentaires qui seront déployés à l'étranger. Ce système ne tient pas compte non plus de la croissance, et il pénalise les unités qui grossissent, car on ne peut arrêter de les soutenir. Il faut, en somme, prendre la même boîte de soupe Campbell et y ajouter plus d'eau pour nourrir plus de personnes, en d'autres mots, étirer chaque dollar pour soutenir plus de troupes avec moins d'argent.
Enfin, tout au long de l'année, on nous a confié bien des tâches qui ne sont pas financées. Le recrutement en est une. Les relations avec la collectivité, avec les Canadiens, en sont une autre. Il n'y a pas de financement prévu pour ces tâches. Cependant, nous estimons que ce sont là des tâches névralgiques et nous nous en acquittons toujours. Elles se font, donc, au dépens de la formation, pour laquelle nous disposons du strict nécessaire de toute façon, et nous payons les soldats qui viennent suivre leur formation.
Comme toujours, les munitions sont un problème. Pour l'instant, notre arme principale est la mitrailleuse C-6 pour laquelle on nous attribue quelque 10 000 balles à des fins de formation chaque année. Or, simplement pour former le minimum de personnes pour qu'elles satisfassent à la norme minimale, il faut quelque 40 000 balles. Par conséquent, nous arrivons à faire le quart environ de ce que, en toute conscience, nous devrions faire en matière de formation.
Il y a aussi une importante pénurie de radios et de matériel de communication, et nous devons fréquemment louer des services de téléphonie par satellite ou des talkie-walkie commerciaux pour, durant les manœuvres, assurer notre sécurité et les communications tactiques. De toute évidence, la situation est moins qu'idéale. La pénurie la plus cruelle est le manque de radios à bord des véhicules.
Quoi qu'il en soit, la situation en ce qui concerne la plupart des autres pièces qui composent l'équipement du soldat, comme l'uniforme et le matériel qu'il porte sur lui, est excellente. Elle n'a jamais été meilleure. Cette année, pour la première fois durant une manoeuvre d'hiver, je n'ai pas eu froid. On fait donc bien certaines choses.
Nous sommes équipés des nouveaux G-wagen de Mercedes, qui sont d'excellents véhicules, surtout pour la formation. On nous en a attribués seize. En raison des exigences opérationnelles, nous disposons actuellement de huit d'entre eux et les autres font partie des stocks opérationnels.
Le problème le plus pressant est de loin le facteur temps. On nous alloue 37 1/2 jours environ par personne pour offrir toute la formation voulue à nos réservistes. Cela signifie concrètement que nous formons les sous-officiers de septembre à mai, à raison d'un weekend environ et d'un samedi par mois, et que des officiers doivent entrer le mercredi soir pour préparer les cours. Le temps accordé ne nous permet pas de fournir un niveau suffisamment élevé de formation, dans le cadre des méthodes actuelles, de sorte que nous ne pouvons pas réduire le temps de préparation d'un an requis pour les opérations. C'est impossible à faire au moyen des méthodes actuelles. Nous ne pouvons pas accroître le temps alloué aux réservistes. Il ne s'agit pas simplement d'un problème d'argent qui disparaîtrait si l'on en débloquait plus et si l'on prévoyait des journées supplémentaires, parce que le temps supplémentaire se fait au détriment des emplois des réservistes et du temps passé avec leurs familles, qui sont déjà taxés au maximum. Étant donné tous ces faits, la seule façon d'améliorer la formation est d'en accroître l'efficacité et d'utiliser plus judicieusement le temps et les ressources.
Dernier point dont j'aimerais vous parler, tout comme le colonel Wriedt, je ne me souviens pas, durant mes 23 années de carrière, d'avoir vu un leadership si bien branché sur les troupes et aussi attentif aux besoins de formation et aux besoins opérationnels de nos soldats.
Lieutenant-colonel Tom Manley, commandant, Calgary Highlanders, Défense nationale : Bonjour, messieurs, et merci de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
Comme vous le savez, les Calgary Highlanders sont un régiment d'infanterie de réserve basé ici, à Calgary. Nos effectifs sont constitués d'environ 230 réservistes. Chaque mois, on compte environ 165 membres, en moyenne, lors de nos rassemblements. Nous avons aussi un corps de cornemuses d'environ 30 membres. Tous sont des musiciens volontaires, sauf deux.
Aujourd'hui, je parlerai principalement des opérations en Afghanistan et de leur impact sur mes troupes et mon régiment dans son ensemble. Parmi mes soldats, 27 ont été déployés au sein de la Force opérationnelle 1-06, celle qui vient de revenir de l'Afghanistan. Un d'entre eux a été blessé en service, et un autre recevra la mention élogieuse du Chef d'état-major de la Défense pour son action au combat. Mes soldats ont pris part à toutes les facettes de l'opération en Afghanistan, que ce soit la sécurité du camp, les opérations de combat ou encore les convois de véhicules. Tout. On s'accorde à dire qu'ils se sont extrêmement bien comportés.
Tous mes soldats sont retournés chez eux et tous sont encore activement engagés dans le régiment et participent à nos rassemblements. Nous n'en avons perdu aucun par attrition. Le problème que nous avons avec certains soldats, c'est de les suivre de près. Nous travaillons à temps partiel, quelques heures seulement, mais je dois veiller à ce qu'ils soient dûment traités. C'est très difficile de le faire à temps partiel, non pas parce que je ne travaille pas assez, mais parce qu'ils ne viennent pas assez souvent au manège militaire. J'ignore ce qu'ils font lorsqu'ils ne sont pas là. Cela pose un problème.
Je tiens à dire qu'il y a eu un certain nombre de ratés administratifs, non seulement quand on a voulu les envoyer à Kandahar, mais aussi quand il a fallu les ramener au pays. Toutefois, ces problèmes étaient mineurs pour la plupart, et la chaîne de commandement de l'armée est en train de les régler. Il y aura toujours des problèmes, mais je crois que nous allons dans la bonne direction.
Je vais vous parler très brièvement de l'expérience d'un de mes caporaux; il ne pouvait pas s'inscrire à l'école lorsqu'il était dans le théâtre des opérations parce qu'il n'avait accès à aucun ordinateur. À son retour, il a présenté une demande d'admission au SAIT, le Southern Alberta Institute of Technology, mais il ne pouvait être admis parce que le nombre d'inscriptions était trop élevé. J'ai téléphoné au SAIT et, dans l'espace d'une journée, il était accepté. Voilà le genre d'appui que nous recevons de la communauté, et il s'agit d'un très bel exemple à suivre.
Mais revenons à aujourd'hui. Aujourd'hui, ou plutôt hier, lorsque j'étais au bureau, j'ai vérifié les chiffres et 90 soldats se sont portés volontaires pour la prochaine affectation en Afghanistan. À ma connaissance, c'est de loin le plus grand nombre de réservistes d'un régiment d'infanterie au Canada à se porter volontaires depuis probablement la Deuxième Guerre mondiale. Nous en sommes très fiers. C'est probablement environ 300 p. 100 de ce qu'un régiment d'infanterie normal serait en mesure de produire.
La mobilisation de troupes pour l'Afghanistan a fait augmenter considérablement notre recrutement et réduire notre attrition. En fait, de nombreuses personnes qui avaient quitté le régiment récemment sont revenues pour pouvoir partir en Afghanistan.
Or, cette situation crée un problème : avec tous ces gens qui partent, il en reste très peu ici. Il ne me restera pratiquement aucun sergent ni adjudant, et très peu de caporaux-chefs. Il sera donc très difficile d'entraîner mon régiment pour fournir une force de réserve à la prochaine opération, qui sera pour nous la Force opérationnelle 3-09. Honnêtement, nous ne savons pas comment régler le problème, et je travaille avec mon commandant pour essayer de trouver rapidement des solutions.
Nous sortons des sentiers battus. Personne n'a fait cela auparavant. Personne n'a jamais envoyé un régiment complet en opération, alors on s'attend à avoir des problèmes. La préparation des troupes sera difficile. Notre personnel est insuffisant pour effectuer les tâches administratives et les préparer. Notre personnel est insuffisant pour s'occuper des familles lorsque ces soldats sont au loin. Notre personnel est insuffisant pour s'occuper des soldats lorsqu'ils sont au loin. Évidemment, la réintégration de toutes ces personnes au sein du régiment et de la communauté sera aussi extrêmement difficile puisque je n'ai qu'un capitaine de la force régulière pour administrer tous ces gens.
Pour aggraver le problème, comme mon éminent collègue l'a mentionné, puisque mes effectifs à Calgary vont diminuer considérablement, mon budget diminuera en conséquence, et ce sera donc encore plus difficile de s'occuper de toutes ces personnes. Toutefois, comme je l'ai dit, nous cherchons une solution. Pour dire franchement, ce problème n'a pas encore été soumis à l'attention des échelons supérieurs. Nous cherchons encore des solutions à notre niveau. Je n'ai pas encore décidé d'un plan d'action que je pourrais soumettre à l'examen de ma chaîne de commandement, alors ce serait injuste de blâmer celle-ci puisque je n'ai même pas dit que nous avions un problème.
Pourquoi vous dire ceci? Il importe de comprendre, je crois, que nous nous trouvons devant un nouveau paradigme dans les réserves et la force régulière. Lorsque nous fixons les conditions de la réussite, nous avons la chance de voir un nombre jamais égalé auparavant de réservistes qui se portent volontaires pour participer à des opérations; comme nous risquons de connaître un problème sur le plan des ressources humaines, nous devons établir les conditions du succès partout au pays de manière à permettre le déploiement d'un nombre jamais égalé de réservistes.
Je suis très emballé. Je sais que la chaîne de commandement intègre des réservistes dans les opérations comme jamais auparavant, et il s'agit d'une occasion fantastique pour nous tous.
Lieutenant-colonel Brian Doherty, commandant, 14e Bataillon des services, Défense nationale : Sénateurs, bonjour. Le 14e Bataillon des services est une unité de soutien au combat. Pour ceux qui ne le savent pas, nous fournissons des techniciens de véhicules, des armuriers, des techniciens en approvisionnement, des cuisiniers, bref tous les services nécessaires pour assurer l'entraînement logistique et faire en sorte que l'armée et les armes de combat soient fonctionnelles sur le terrain.
Nous avons quelques préoccupations. Parmi les soldats qui faisaient partie de la dernière rotation, et qui sont revenus en août — et certains en octobre — certains ont pris part au programme de neuf mois, et non à celui de six mois, en particulier les techniciens en approvisionnement. Au cours des dernières années, environ 10 p. 100 des membres de notre bataillon auraient été déployés dans ces rôles. Nous sommes une petite unité. Nos rassemblements comptent entre 65 et 80 soldats, et nos cycles d'entraînement sont très longs. Cela signifie qu'il est difficile pour nous d'augmenter notre capacité pour répondre à certaines exigences des prochaines années, compte tenu des contraintes de temps. Même dans la force régulière, il faut un certain nombre d'années avant qu'un technicien de véhicules soit pleinement qualifié. C'est vrai aussi pour les armuriers et, dans une moindre mesure, les cuisiniers, les techniciens en approvisionnement, et cetera. Toutefois, si on transpose ces exigences de formation dans le monde de la réserve où, comme vous l'avez entendu, on n'a que de 39 jours par année et peut-être deux ou trois semaines durant l'été pour les cours de qualification, il me faut du temps pour produire un soldat qualifié qui pourra être déployé et employable au sein d'une force opérationnelle. À cet égard, nous croyons que les écoles doivent élaborer un programme qui réponde aux besoins des réservistes des SSC.
Les choses ont bougé dans ce sens et nous avons vu certains progrès en l'espace de 18 mois à deux ans. Toutefois, pour que nous puissions déployer le nombre de réservistes que la force régulière s'attend à recevoir, certaines mesures doivent être prises sur ce plan.
Concernant les pénuries de trousses, le colonel Gilkes a parlé d'entraînement mixte. Il a parlé d'escortes de convois. Permettez-moi de dire que nous sommes les personnes qu'il escorte habituellement et que, pour aller sur le théâtre, il nous faut aussi de l'équipement, comme des radios, pour que nous puissions nous joindre à son unité et mener des opérations conjointes. Ceci est un reflet des opérations quotidiennes que nous verrions si nos soldats se déploient en Afghanistan.
Le colonel Wriedt a parlé du recrutement. Le modèle de recrutement que nous avons à l'heure actuelle date des années 1950 et 1960. Essentiellement, le bataillon, le régiment, ou peu importe, désigne un capitaine et lui assigne peut- être quelques commis. Ensemble, ils vont penser à des attractions, à des événements qui vont attirer des gens au manège militaire. Avec les communications de masse et les techniques modernes de marketing d'aujourd'hui, cette approche est archaïque. Ce modèle ne nous permet pas d'attirer des soldats potentiels au manège militaire pour leur présenter les avantages que leur offrent les réserves. Comme nous dépendons des budgets de classe A, je compte environ 2 000 $ par mois, parmi ces fonds, qui sont consacrés à la formation. C'est bien peu, si l'on tient compte du type et du nombre de soldats que l'armée et les Forces canadiennes s'attendent que nous produisions.
Je vais m'arrêter ici. Mes collègues ont déjà touché à plusieurs aspects que je voulais faire valoir.
Capitaine Karl Kalincak, adjudant, 33e Escadron du génie, Défense nationale : Bonjour, sénateurs. Mon commandant, le major Darren McCrank, ne pouvait pas être ici cet après-midi parce qu'il était retenu par ses fonctions civiles.
Je suis membre du 33e Escadron du génie depuis huit ans. Au cours de cette période, mon unité a déployé 20 de ses membres à l'étranger. Trois membres ont été déployés à deux reprises, et cinq membres sont passés à la force régulière après leur déploiement.
J'aimerais vous faire part rapidement de quelques faits. Premièrement, il manque 200 soldats à la Force opérationnelle 1-07, qui se déploie présentement. Deuxièmement, le 41e Groupe-brigade du Canada a été chargé de fournir 75 soldats à la Force opérationnelle 1-08. En fait, ces chiffres continuent d'augmenter, comme vous l'avez entendu aujourd'hui.
Un réserviste qui se joint aux Forces canadiennes doit satisfaire aux mêmes critères d'admissibilité qu'une recrue de la force régulière. Il doit réussir un cours de qualification militaire de base, un cours de qualification de soldat puis une formation professionnelle complète. Ainsi, le réserviste qui se porte volontaire pour un déploiement à l'étranger est déjà dûment formé.
Mon commandant se préoccupe de l'intégration des réservistes dans la force totale et souhaite que l'on simplifie le système pour un réserviste qui se joint à une force opérationnelle. Je vais donner l'exemple du caporal Steven Booth. En fait, je me suis entretenu longuement avec lui à ce sujet. Le caporal Booth compte trois années de service dans la réserve. Il est en excellente forme physique et il a montré qu'il était un soldat compétent. En fait, il a fini premier aux parties 1 et 2 du NQ3. Cela en dit long sur ses aptitudes. Lorsqu'un appel aux armes a été lancé, il s'est immédiatement porté volontaire. Depuis ce temps, il a consacré beaucoup de temps et d'effort à se soumettre à une série d'étapes de sélection afin de participer à la Force opérationnelle 1-08. Il a fait une partie de cette préparation de lui-même, sans obtenir pleine compensation, et certains coûts ne lui seront pas remboursés. C'est ce qu'on appelle les préparatifs de départ. Les examens dentaires et médicaux, l'obtention du passeport, les épreuves de forme physique et les entrevues avec le travailleur social exigent que le réserviste s'absente de l'école ou du travail. On offre une certaine compensation pour le temps perdu, mais pas la même couverture que reçoit un soldat de la force régulière. Ce dernier reçoit sa solde intégrale lorsqu'il se soumet à ces préparatifs, et tous les coûts connexes sont assumés par les Forces canadiennes.
J'aimerais parler des soins dentaires. Le caporal Booth doit recevoir tous les soins dentaires dont il a besoin avant de se joindre à la Force opérationnelle 1-08. Il doit subir un examen dentaire et se soumettre à une radiographie péricoronaire et à des panorex. Comme il a toutes ses dents de sagesse, celles-ci doivent aussi être extraites Le plan d'assurance dentaire de la réserve couvre 90 p. 100 des coûts; il doit donc débourser 2 101,28 $, puis attendre de quatre à six semaines avant d'obtenir ce remboursement de 90 p. 100. Les prestations maximales qu'il peut demander par année s'élèvent à 1 250 $ seulement, alors s'il a besoin d'autres soins dentaires, il devra payer toute la facture.
Le frère du caporal Booth, le sapeur Cory Booth, s'est aussi porté volontaire. Il a déjà déboursé 400 $ en soins dentaires et s'attend à payer les mêmes coûts que son frère.
Je vais parler brièvement des soins médicaux. Le caporal Booth a un dossier médical, mais il doit prendre un rendez- vous médical pour confirmer son état de santé actuel et mettre son carnet de vaccination à jour. Il doit le faire durant les jours ouvrables, parce que les médecins ont des horaires de banquiers.
Pour ce qui est des photos de passeport, le caporal Booth obtiendra un remboursement pour le coût des six photos, mais pas pour le temps qu'il y aura consacré.
Parlons brièvement des tests de condition physique. Le caporal Booth doit se préparer pour le test d'aptitude physique au combat. Ce test consiste à marcher pendant 13 kilomètres avec un sac à dos, à transporter une charge sur l'épaule sur 100 mètres, puis à transporter l'équivalent d'une tranchée de six pieds de gravier fin d'un endroit à l'autre en utilisant une pelle. Lorsqu'il s'entraîne en vue de ce test, le caporal est couvert par son régime d'assurance médicale civile, mais il ne sera pas rémunéré pendant l'entraînement, seulement pendant qu'il subit le test en question.
Pour résumer, ce ne sont que quelques obstacles qu'un réserviste doit surmonter avant de se joindre à une unité de la force régulière en vue d'un déploiement. Dans un concept de force totale, tous les soldats doivent se soumettre aux préparatifs de départ avant un déploiement. Comme les Forces canadiennes doivent augmenter le nombre de réservistes, ceux qui se portent volontaires pour un déploiement à l'étranger devraient recevoir un traitement égal à leurs homologues de la force régulière.
Le sénateur Banks : Les choses que nous entendons aujourd'hui sont différentes de ce que nous avons entendu auparavant, à d'autres endroits, mais d'une façon ou de l'autre, bon nombre de ces choses ont à voir avec la mise sur pied d'une force et l'équité envers les réservistes.
Notre comité est, à certains égards, ravi des mesures que le gouvernement a prises pour augmenter le nombre de réservistes et de militaires. Nous le réclamons depuis des années. Toutefois, nous sommes un peu déçus du temps qu'il faudra attendre.
Concernant la mise sur pied d'une force, nous avons porté une grande attention dans nos rapports précédents, dont vous êtes peut-être au courant, au recrutement et au traitement des réservistes, en particulier sur deux aspects : d'abord, la réintégration, qui est un sujet relativement nouveau et dont vous avez déjà parlé; deuxièmement, la protection des emplois. Vous avez mentionné qu'il est difficile de demander à un employeur, dans les circonstances actuelles, d'accorder un congé de deux ans à son employé pour qu'il aille se battre pour son pays. Au Canada, on se demande depuis des années si le type de protection d'emplois qui existe ailleurs, notamment aux États-Unis, pourrait s'appliquer au Canada et lequel des deux tranchants de l'épée devrait prévaloir et serait bénéfique pour les réserves. Colonel Wriedt, je vais vous demander ce que vous en pensez, parce que vous connaissez probablement les vues de vos collègues à ce sujet.
Nous avons dit qu'il y avait un troisième tranchant à l'épée : les gens à qui on demande de se battre pour leur pays devraient avoir une protection d'emploi. Toutefois, nous apportons un autre bémol, que le comité a mentionné par le passé et que vous ne connaissez peut-être pas très bien : si vous prenez les fonds publics pour former un soldat de manière à ce qu'il soit aussi compétent et préparé au combat qu'un membre de la force régulière, que vous assumez le coût de cette formation et que la loi lui assure la protection de son emploi, en guise de compensation, un réserviste qui a reçu cette formation devra partir en mission lorsqu'on lui demande.
Dans ce contexte, qu'avez-vous d'autre à dire sur la protection d'emploi, sur ce bémol et sur la façon dont ces choses affecteront le recrutement des réservistes et la mise sur pied d'une force en général?
Col Wriedt : Sénateur, avant d'être membre de la 41e Brigade, j'ai participé à un programme d'échange de deux ans avec l'armée des États-Unis, pendant lequel j'ai enseigné au collège d'état-major et de commandement. J'ai vu l'autre côté de la médaille ou l'autre tranchant de l'épée; en effet, durant une période de déploiement très intense, beaucoup de soldats américains seront envoyés à leur premier déploiement et la plupart de leurs employeurs les appuieront. Les problèmes commencent lorsqu'il s'agit d'un deuxième déploiement, et ces réservistes sont déployés pour des périodes de deux ans.
Comme le colonel Gilkes l'a mentionné, les déploiements commencent à se poursuivre au-delà d'un an, ce qui a toujours été la durée approximative à laquelle les réservistes canadiens ont appris à s'attendre. Nous nous apprêtons maintenant à entreprendre des déploiements plus longs parce que nous sommes dans une situation de grande intensité en Afghanistan, et si vos soldats sortent du périmètre, à juste titre, la chaîne de commandement veut avoir l'assurance que ces soldats ont toutes les capacités de leurs homologues de la force régulière, et on le comprend. Cette décision est stratégique, et je crois que l'état-major de l'armée, les Forces canadiennes et le gouvernement doivent examiner en profondeur ce qu'implique notre situation actuelle. Les choses fonctionnent-elles aussi bien qu'elles le devraient, ou devrions-nous assurer la protection des emplois?
Je n'ai pas vraiment de réponse à cette question parce que la dynamique au Canada est différente de celle que l'on observe de l'autre côté de la frontière, où le service militaire reçoit beaucoup plus de visibilité qu'au Canada, même si les Canadiens devraient être fiers de leur histoire, en sachant que des milliers de soldats ont répondu à l'appel et sont allés se battre en Europe à plusieurs occasions.
Je ne sais pas s'il existe une solution miracle, mais je crois qu'on était en train de soupeser les deux options de protection d'emploi. Cela n'a pas été fait, et pour l'instant, je n'ai certainement pas un personnel suffisant pour entreprendre des études de cette nature.
En ce qui a trait au concept de compensation, si nous allons dans ce sens, je dirais en tant que commandant de brigade qu'on modifierait radicalement les conditions d'emploi d'un réserviste.
Encore une fois, je ne sais pas vraiment ce qu'implique pareille orientation. Je ne sais vraiment pas. Je ne sais pas non plus si j'ai répondu à votre question, mais j'ignore ce qui arriverait.
Le sénateur Banks : Supposons que je suis monsieur tout le monde et que je vous pose une question directe : pourquoi devrions-nous dépenser des milliers de dollars pour former un conducteur de char, un opérateur radio ou un fantassin, pour qu'il ait cette qualification, s'il ne fait pas ce travail lorsqu'il est appelé? La question est crue, et nous ne l'avons jamais posée de cette façon, mais comment y répondriez-vous?
Col Wriedt : Il s'agit d'une question valable parce que les Canadiens la posent souvent. Je me fais poser cette question dans mon milieu de travail civil.
Tout d'abord, avant de dire ce que je vais dire, un grand nombre de Canadiens doivent apprendre rapidement ce que sont les militaires et le monde que nous avons autour de nous, et à quel point il a changé au cours de la dernière décennie, mais je compare cela à une police d'assurance-vie. Que ce soit une assurance pour une durée déterminée ou pour la vie entière, ou une combinaison des deux, nous pouvons débattre de ces nuances pendant longtemps. Cela étant dit, tout le monde a une police d'assurance-vie parce que, quand les coups durs arrivent, vous devez pouvoir faire face aux pires scénarios. Nous, les militaires, nous sommes votre police d'assurance en cas des pires scénarios.
Le sénateur Banks : C'est la raison pour laquelle notre comité revendique depuis longtemps que l'on bonifie la compensation, les efforts de recrutement et tous ces éléments, parce que nous en sommes venus à nous rendre compte — avec un peu d'aide — de l'importance de ces questions.
Col Wriedt : Puis-je demander à mes collègues d'exprimer leurs points de vue?
Le président : J'aurais d'abord un commentaire, si vous me le permettez. Il ne fait aucun doute que les forces armées constituent une police d'assurance pour le Canada. C'est l'un des aspects fondamentaux, mais il y a encore une partie de la question à laquelle vous n'avez pas répondu en discutant avec vos collègues. Vous avez indiqué que vos collègues vous avaient posé la même question : Pourquoi devrions-nous payer des gens pour apprendre un métier et acquérir des compétences s'ils ne vont pas en mission? Ce n'est pas une très bonne police d'assurance, si le service n'est pas rendu. Si vous avez une réclamation d'assurance à faire, vous vous attendez à ce qu'un expert en sinistre vienne le lendemain et vous offre le service. Que répondez-vous à cette question?
Col Wriedt : Je suis d'accord. Je pourrais me défiler d'une certaine façon en répondant que lorsque je porte l'uniforme, je représente le gouvernement du Canada et la Loi sur la défense nationale, et qu'il existe actuellement deux formules de service. Il y a l'obligation limitée de service et l'obligation illimitée de service. Si vous devenez membres des forces régulières, votre obligation de service est illimitée et lorsqu'on vous dit que vous partez en mission, vous partez. Pour nous, dans la réserve, nos conditions d'emploi sont fondées sur une responsabilité limitée et le déploiement n'est obligatoire qu'après la signature d'un contrat à long terme en tant que membre de la catégorie A.
Le président : Vous décrivez la situation telle qu'on la connaît déjà, mais le sénateur Bank vous a proposé un ensemble différent de modalités et de conditions d'emploi en vous demandant si vous croyiez que cela pouvait être une bonne idée.
Col Wriedt : Selon moi, cela pose certains problèmes.
Le président : Nous sommes justement ici pour apprendre.
Col Wingert : Mais ceci étant dit, je peux également faire valoir à monsieur tout le monde que 99 p. 100 des réservistes que l'on appelle à 3 heures du matin parce qu'une rivière déborde vont enfiler leur équipement et se retrouver dans la boue et sous la pluie pour faire leur travail.
Lcol Gilkes : Il y a un autre tranchant à votre épée. Je suis propriétaire d'une petite entreprise qui compte une dizaine d'employés, dont environ le tiers sont des réservistes. En pareil cas, si ces employés sont obligés de partir en mission sans qu'il n'y ait compensation, mon entreprise va se retrouver perdante. Comme il s'agit de haute technologie, j'ai pris grand soin de sélectionner des personnes capables d'accomplir ces tâches en mon absence. Ils ne travaillent pas au pic et à la pelle, si vous voyez ce que je veux dire. C'est un peu cela aussi l'envers de la médaille. Quelle que soit la tournure des événements, il y a toujours quelqu'un qui en souffre.
Le sénateur Banks : Il va de soi qu'un tel plan devrait s'appuyer sur une étude très approfondie et que, comme aux États-Unis, la taille de l'effectif serait un facteur déterminant.
Je voulais seulement vous exposer la piste qui a guidé notre réflexion. Nous sommes prêts à garantir votre emploi, mais vous devrez en contrepartie accepter d'aller n'importe où. De nouvelles règles s'appliqueraient. La nature du contrat serait modifiée. Je prévois que cela influerait — et c'est un peu à ce sujet que je voulais vous entendre — sur la quantité de gens qui se porteraient volontaires pour joindre les rangs de la réserve.
Le président : Nous nous efforçons de susciter un dialogue de manière à pouvoir apprendre des choses et mieux comprendre les avantages et les inconvénients; il ne sert à rien pour nous de siéger en comité fermé pour simplement lancer quelques brillantes idées. C'est pourquoi nous voulons parler aux intervenants et leur poser ces questions. C'est pour nous un processus d'apprentissage. Si vous pouviez répondre en pensant à cet objectif de nous aider à mieux comprendre la situation, nous vous en serions reconnaissants.
Lcol Manley : Il y a des fois où je voudrais bien qu'on dise à ma femme que je suis obligé de partir; cela m'éviterait beaucoup d'ennuis à la maison.
Pour ma part, je me demande s'il est vraiment nécessaire d'obliger les gens à partir. Je me pose cette question uniquement à la lumière de l'expérience que j'ai vécue avec mon commandement au cours des deux dernières années. Nous avons réussi à recruter un grand nombre de réservistes, 90 pour le prochain contingent, soit près de la moitié de mon effectif; en fait, plus de la moitié de mon effectif. Je crois que notre réussite était notamment attribuable aux conditions que nous avons établies pour permettre un déploiement efficace des soldats. De fait, si la moitié seulement de l'ensemble des réservistes étaient prêts à accepter un déploiement, nous n'aurions probablement pas de problème de ressources humaines.
Le président : Sauf le respect que je vous dois, votre régiment n'est pas comme les autres.
Lcol Manley : J'aimerais bien croire qu'il en est ainsi, mais puis-je vous dire qu'au départ nous étions tout à fait conformes à la norme.
Lcol Doherty : Je pense que c'est un peu paradoxal, mais à mesure qu'une mission se concrétise et prend de l'importance, il se crée un réel intérêt au sein des forces régulières et de la réserve. Ainsi, les demandes de renseignements en vue d'un recrutement ont augmenté. Nous disposons des mécanismes nécessaires pour intégrer ces candidats et les former. Manifestement, l'intérêt est à la hausse. En effet, contrairement à ce qu'on pourrait croire, au fil de l'évolution de la mission, ce sont des candidats différents qui vont se manifester, mais je ne pense pas que le nombre de personnes intéressées va diminuer. En fait, j'estime que, dans certains cas, on peut aller chercher ces gens qui vont considérer l'opération comme un défi beaucoup plus stimulant pour eux.
Le sénateur Banks : Il est possible que d'autres sénateurs aient des questions à ce sujet. J'en aurais une dernière à vous poser avant de leur laisser la parole. Certains d'entre vous avez parlé des opérateurs radio. Nous avons entendu certains soldats de la réserve qui ont travaillé là-bas dans différents contextes comme spécialistes en communications nous dire que l'équipement qu'ils utilisaient à Kandahar n'avait rien à voir avec celui pour lequel ils avaient été formés.
Je vais d'abord poser une question au colonel Gilkes. Je ne savais pas que votre régiment en était venu à faire de la reconnaissance, mais vous offrez de la formation sur les G-Wagen. J'ose espérer que vos soldats ne vont pas conduire de tels blindés pour l'accompagnement des convois d'aide à Kandahar. N'est-il pas plus probable qu'ils conduisent un RG3?
Lcol Gilkes : Oui, vous avez raison.
Le sénateur Banks : Offrez-vous de la formation sur cet équipement?
Lcol Gilkes : Oui, durant l'entraînement pour la préparation aux missions outre-mer.
Le sénateur Banks : À Wainwright?
Lcol Gilkes : À Wainwright ou à Edmonton, ou n'importe où ailleurs. L'important c'est que pour la majorité de nos équipements, même s'il existe certaines différences, la formation dispensée est utile, pour autant que les similitudes soient suffisantes. On note des différences pour des composantes comme l'équipement de communication pour lequel il importe d'offrir un entraînement sur du matériel le plus semblable possible à celui qui sera utilisé sur le terrain, vu que son fonctionnement est complexe. Il faut apprendre rapidement, car plus la formation est longue, moins de temps on a pour faire ce travail et acquérir d'autres compétences durant l'entraînement préparatoire. Par ailleurs, étant donné l'importance bien évidente de l'adresse au tir, nous essayons d'offrir l'entraînement sur des systèmes d'armement se rapprochant le plus possible de ceux qui sont utilisés en mission.
Le sénateur Banks : Le système canon d'un véhicule Nyala est assez différent de celui d'un G-Wagen.
Lcol Gilkes : Tout à fait. C'est l'un des aspects qu'il faut apprendre à maîtriser rapidement et de nombreuses heures d'entraînement sont prévues pour s'assurer que les soldats sont en mesure de bien se servir de ce véhicule.
Ceci étant dit, un de nos soldats a appris à conduire un véhicule Nyala sur place à Kandahar. Lorsque le Nyala est arrivé là-bas, il a cessé de conduire les G-Wagen et pris un cours accéléré pour devenir conducteur de Nyala.
Le sénateur Banks : J'espère que c'est l'un des excellents soldats qui nous ont servi de chauffeurs.
Le président : Je crois qu'il faut compter environ cinq jours d'entraînement pour opérer la transition, lorsque ces véhicules arrivent.
Lcol Gilkes : C'est l'avantage que procure la formation des réservistes ici même au Canada : on réduit le temps requis pour l'entraînement préparatoire et le temps qui doit être consacré à la formation sur place.
Le président : Je pense que certains véhicules Nyala seront déployés au Canada une fois que les besoins auront été comblés en Afghanistan, de telle sorte que les soldats pourront apprendre à les conduire ici même, plutôt qu'au cours de leur première semaine de mission.
Lcol Gilkes : Voilà 60 ans que les blindés agissent de la sorte. Il y avait un groupe élite déployé en Europe, ou quelque part outre-mer, qui se servait d'un tel type de tank, alors qu'on en utilisait un autre pour l'entraînement en Angleterre, et voilà qu'un troisième modèle de tank entrait en fonction. Il n'y a rien d'inhabituel là-dedans et nous avons réussi à tirer notre épingle du jeu depuis bien des années, dans le même genre de situations.
Le sénateur Meighen : En toute honnêteté, je trouve vos propos d'aujourd'hui généralement très encourageants. Je fais partie de ce comité depuis assez longtemps pour me rappeler avoir entendu dire à Vancouver qu'on n'avait pas suffisamment d'argent pour payer ceux d'entre nous qui étaient sous les drapeaux.
J'étais en Bosnie en 1994. Nous y étions tous les deux, le président et moi, l'année où ceux qui arrivaient là-bas devaient échanger leur casque avec ceux qui partaient.
Le président : Et certains n'étaient pas de la bonne taille.
Le sénateur Meighen : Il y en a qui ont la tête plus enflée que d'autres. À bien des égards, les choses se sont améliorées, même s'il y a encore des correctifs à apporter. Quoi qu'il en soit, je me réjouis de vous entendre dire ici qu'il y a de l'intérêt pour la réserve et que vous avez pu obtenir du soutien, des vêtements et d'autres équipements.
Ceci étant dit, pouvons-nous maintenant parler de l'entraînement? Deux points ont été soulevés et l'un d'entre vous — vous m'excuserez de ne pas me rappeler lequel — a fait valoir qu'il était important d'accroître l'efficience de l'entraînement. Un autre a parlé de l'établissement d'un mécanisme national de recrutement. Pourriez-vous nous fournir de plus amples détails à ce sujet?
Col Wriedt : Sénateur, je définis toujours le recrutement en fonction de deux composantes. Il faut d'abord attirer des recrues : nos recruteurs entrent en contact avec les gens dans l'espoir de les intéresser à ce que nous faisons. La seconde composante est le traitement : il s'agit de remplir toutes les formalités administratives requises pour qu'un soldat puisse être assermenté au sein des Forces canadiennes. Au début des années 1990, nous avons adopté un système de recrutement unifié. Autrement dit, c'est le système de recrutement des Forces canadiennes qui a pris en charge toutes les activités de traitement. Malheureusement, aucun plan n'a alors été établi pour déterminer qui serait responsable des campagnes de recrutement pour attirer des candidats.
Les agents du système de recrutement des Forces canadiennes ne chôment pas : ils travaillent pour l'armée, l'aviation canadienne et la marine, ainsi que la milice, la réserve, la réserve de l'armée, la réserve des communications, la réserve de la marine, la réserve de l'aviation, la réserve des services de santé — autant de contingents distincts qui ont tous des besoins concurrents.
À l'heure actuelle, le 41e Groupe-brigade occupe le haut du pavé ici à Calgary, mais il y a des moments dans l'année où le CRFC s'emploie en priorité à trouver des recrues ou des élèves-officiers qui sont envoyés au Collège militaire Royal. À d'autres périodes de l'année, on cherche plutôt des pilotes. Nous nous retrouvons donc à faire du recrutement direct, parce que personne d'autre n'en fait pour la réserve. Les commandants doivent donc utiliser les fonds de la catégorie A pour recruter en fonction des besoins de leurs unités respectives.
Le sénateur Meighen : Ils font donc le nécessaire pour attirer des candidats.
Col Wriedt : Ils établissent des contacts et essaient de trouver des recrues. S'ils disposent de personnel formé à cette fin, ils effectuent également une partie du traitement. Une certaine proportion de mon effectif est affectée aux activités de traitement. Il faut bien comprendre que le jeune qui veut intégrer les forces régulières s'est généralement déjà renseigné et est à la recherche d'une possibilité de carrière. Au sein de la réserve, nous avons parfois affaire à des gens qui veulent simplement essayer quelque chose de différent. Autrement dit, ce sont des personnes qui se cherchent encore. Nous espérons pouvoir leur offrir la possibilité d'acquérir un certain leadership et un peu de discipline tout en s'assurant un certain revenu.
Le sénateur Meighen : Colonel, c'est vous, je crois, qui avez parlé de l'efficience de l'entraînement. Quels sont les gains que vous souhaiteriez voir réaliser à ce chapitre? Par exemple, voilà bien des années qu'on nous fait valoir que le traitement des demandes est interminable et a souvent pour effet de dissuader les candidats qui n'obtiennent pas de nouvelles assez rapidement.
Col Wriedt : Je peux vous dire que pour les Forces canadiennes, le fait d'avoir des gens en mission produit des résultats étonnants du point de vue des systèmes. Des obstacles qui se dressaient encore il y a deux ou trois ans disparaissent comme par enchantement. Ceci étant dit, mon commandant est un homme très direct. Il souligne que parmi tous les critères applicables pour l'intégration d'un soldat, que ce soit dans les forces régulières ou la réserve, il n'y en a qu'un certain nombre sur lesquels il exerce un contrôle. Certains éléments relèvent des Anciens combattants; d'autres sont contrôlés par le Conseil du Trésor; il s'agit donc de combiner et de synchroniser toutes ces interventions de manière à ce que tous soient sur la même longueur d'ondes. Je suis persuadé que c'est une question à laquelle s'intéresse la chaîne de commandement.
Lorsque j'ai parlé d'efficience de l'entraînement, je voulais dire qu'il faut offrir la formation au niveau de nos unités de la manière la plus efficace possible, compte tenu des contraintes de temps, d'argent et d'équipement. Ces messieurs pourront peut-être pousser l'analyse un peu plus loin. Dans le cadre de notre système d'entraînement, ce sont les cours de formation professionnelle qui nous préoccupent quelque peu. Pour certains cours destinés aux réservistes, il est, je n'irais pas jusqu'à dire impossible, mais très difficile d'inscrire des participants. Je pense par exemple au cours de caporal-chef pour un soldat d'infanterie, mais peut-être que le lieutenant-colonel Manley pourra mieux vous en parler. Combien de temps faut-il à un soldat se situant au niveau de qualification de base pour acquérir les compétences nécessaires pour diriger des troupes au combat?
Lieutenant-colonel Tom Manley, commandant, Calgary Highlanders : Je dirais que si vous suivez la formation à titre de réserviste à temps partiel, il vous faudrait deux années pour terminer le cours. Il faut ajouter deux autres années pour pouvoir s'y inscrire parce que le nombre de places est limité.
Le sénateur Meighen : Pour quelle raison, dites-vous?
Lcol Manley : Il y a un nombre limité de places pour ces cours.
Le sénateur Meighen : Probablement parce qu'il y a un nombre limité d'instructeurs.
Lcol Manley : Selon toute probabilité, c'est effectivement sans doute la cause profonde.
Le sénateur Meighen : Le colonel Gilkes est celui qui a parlé du mécanisme national.
Lcol Gilkes : Je n'ai rien dit au sujet d'un mécanisme national. J'ai soulevé la question de l'efficience de l'entraînement.
Le sénateur Meighen : Je croyais que c'était le colonel Gilkes qui avait fait référence à un mécanisme national pour l'entraînement.
Lcol Gilkes : Quant à l'efficience de la formation, je crois qu'il y a actuellement certains chevauchements. Il y a ainsi un système scolaire qui forme les soldats au niveau de qualification de base. Puis au sein de leur unité, ils reçoivent une formation annuelle. Ils prennent différents cours de plus ou moins longue durée, puis suivent un entraînement ensemble. Ils travaillent en équipes. Ensuite, durant la période d'entraînement préparatoire, il y a également de la formation collective et individuelle. Le fait demeure qu'il y a encore certains chevauchements et qu'il pourrait être possible de réaliser des gains d'efficience à ce chapitre.
Il y a aussi des choses que nous faisons sur une base annuelle mais qui, à mon avis, pourraient être réalisées tous les deux ou trois ans ou je ne sais quand; de toute façon, ce n'est pas nécessairement à moi de changer les choses. Je tente de réduire les chevauchements au sein de mon unité en m'assurant que la formation que je donne n'empiète pas sur celle des autres. Pour l'instant, je pense que c'est la meilleure façon pour moi d'assurer son efficacité.
Le sénateur Meighen : Qui a parlé du mécanisme de recrutement national mis en place?
Col Wriedt : C'est moi, monsieur. En ce moment, nous recrutons aux niveaux de l'unité et de la brigade car c'est absolument nécessaire, mais à ma connaissance, on n'a pas élaboré de plan de recrutement précis visant à favoriser l'enrôlement des réservistes. Certes, il y a d'excellentes publicités, mais je crains que les Canadiens ne soient pas autant sensibilisés à la carrière militaire qu'on peut le voir de l'autre côté de la frontière, où il y a la garde nationale, la réserve et l'armée active. Les publicités présentent l'armée sans faire de distinctions.
Le sénateur Meighen : On expose la carrière militaire dans son ensemble afin que les gens s'y intéressent et s'orientent ensuite vers une profession en particulier. À votre avis, cela décourage-t-il les gens de s'enrôler dans la Réserve?
Col Wriedt : Je ne pourrai pas vous répondre tant qu'on n'aura pas mené une étude détaillée pour déterminer quels sont les effets de proposer aux gens une carrière à temps plein par rapport à une activité professionnelle à temps partiel.
Le sénateur Meighen : Y a-t-il d'autres commentaires? Capitaine Kalincak, vous avez parlé du caporal Booth et de toutes les difficultés auxquelles il a été confronté.
Capt Kalincak : Ces difficultés sont survenues quand il s'est joint à la Force opérationnelle 1-08, et non au moment de son recrutement. Il avait passé toutes les étapes du processus de recrutement avec succès, tout comme son frère d'ailleurs.
Le sénateur Meighen : Vous dites donc qu'il aurait dû être traité comme un membre de la Force régulière dès son embauche, n'est-ce pas?
Capt Kalincak : Exactement. Il s'était porté volontaire, comme tous les autres membres de la brigade. Tous avaient levé la main et manifesté leur désir de joindre les rangs de la Force opérationnelle 1-08. Lorsqu'ils sont mobilisés, les réservistes doivent s'absenter du travail ou de l'école. Il arrive même qu'ils doivent abandonner leurs études. Actuellement, certains réservistes ne peuvent assister aux cours du semestre de printemps car ils devront être disponibles à compter du 1er ou du 2 avril. Autrement dit, le réserviste a abandonné ses études pour se joindre à la Force opérationnelle 1-08.
Le sénateur Meighen : J'aimerais revenir sur la mise en garde qu'a fait le sénateur Banks. Qu'arrive-t-il si, à la dernière minute, le réserviste se désengage? Allons-nous le payer après coup? S'il participe à la mission, le rembourserons-nous au même titre qu'un membre régulier?
Capt Kalincak : Tout d'abord, comme nous sommes une petite unité, nous connaissons très bien nos membres. Sachez que lorsqu'un réserviste s'engage comme volontaire, il est d'abord interviewé par son commandant de troupe, qui le connaît très bien, tout comme il connaît son parcours académique et ses antécédents. Ils discutent de plusieurs choses, notamment des problèmes immédiats qui pourraient pousser le membre à renoncer à son engagement. Ensuite, le membre s'entretient avec le commandant. Après ces deux entrevues, nous commençons à remplir les papiers et à faire tout le nécessaire pour lui permettre de joindre la Force opérationnelle 1-08.
Le sénateur Meighen : Il est peu probable qu'une personne se désengage à la dernière minute, n'est-ce pas?
Capt Kalincak : En effet, c'est très rare. Il peut arriver qu'une personne fasse défection parce que le GAD la déclare inapte à participer au déploiement pour quelque raison que ce soit.
Le sénateur Meighen : À cause de problèmes familiaux ou d'ennuis de santé?
Capt Kalincak : Il y a toutes sortes de raisons, qui figurent d'ailleurs sur une longue liste remise à chaque personne se préparant à joindre la Force opérationnelle 1-08.
Lcol Gilkes : J'aimerais maintenant vous présenter un autre point de vue concernant le réserviste apte à partir en mission. En tant que réservistes, ce qui nous caractérise, c'est que nous travaillons à temps partiel. Par contre, après avoir reçu tout l'entraînement nécessaire et répondu à toutes les obligations et exigences liées au déploiement, nous sommes en fait des membres de la Force régulière, mais sans le salaire qui l'accompagne. Malheureusement, compte tenu de toutes les responsabilités inhérentes au poste, le salaire qu'on nous verse et les avantages qu'on nous offre ne sont pas suffisants pour inciter une personne dans la vingtaine ou occupant déjà un emploi à servir dans la Réserve.
Toutefois, il semblerait que nous en ayons pour notre argent puisque l'un des plus importants éléments du budget de la défense est consacré à la rémunération et aux avantages. Certes, nous dépensons beaucoup d'argent en formant deux fois plus de volontaires, mais malgré tout, cela ne représente qu'une fraction de ce que coûtent l'entraînement et le déploiement d'une personne à temps plein.
Nous n'avons pas de chiffres précis, mais nous avons affaire à des gens qui travaillent à temps partiel, occupent un autre emploi ou étudient, et se porteront volontaires à l'occasion pour faire ce que le Canada leur demandera. Comme tenu de toute la responsabilité que cela implique ainsi que du salaire et des avantages que nous recevons, c'est difficile d'attirer des recrues.
Le colonel Wriedt a parlé de la déconsidération des soldats de la Garde nationale américaine. Tenter de réintégrer son poste ou informer son employeur que l'on est réserviste n'est pas chose facile. Les employeurs ne veulent pas de réservistes à cause de la protection d'emploi et toutes les complications que cela entraîne. C'était juste un point de vue différent.
Personnellement, je me situe au milieu. Je veux me rendre utile et je vais probablement partir pour l'Afghanistan dans trois ans parce qu'actuellement, ce n'est pas le meilleur moment dans ma vie pour participer à une telle mission, notamment à cause de mon entreprise familiale. Néanmoins, je veux apporter ma contribution et je vais le faire dans quelques années.
Le sénateur Meighen : C'est très bien. Je pense que c'est vous, colonel Manley, qui avez parlé de réintégration. D'autres peuvent aussi l'avoir fait. J'ai été fort encouragé d'apprendre que le processus semble aller bon train. Je n'ai entendu personne dire que certains soldats éprouvaient des difficultés à se réintégrer, mais j'ai cru comprendre qu'on les perdait souvent de vue. J'aurais pensé que s'ils voulaient continuer à servir dans la Réserve et à participer aux parades militaires, ils devaient vous donner leur adresse, ne serait-ce que pour recevoir leur chèque de paye. Pourquoi en perdez-vous la trace? Abandonnent-ils la Réserve à leur retour?
Lcol Manley : D'après mon expérience, non. Il n'y a pas eu d'attrition chez nos anciens combattants, ce qui est très bien. Je pense que lorsqu'ils reviennent en tant que réservistes, ils veulent réintégrer leur poste à leur rythme, d'une manière qui leur convient.
Quand je dis que nous en perdons beaucoup de vue, je dois ajouter qu'il est très difficile pour nous de savoir s'ils souffrent, par exemple, d'un quelconque stress post-traumatique parce que nous ne les voyons que quelques heures par semaine. Chaque fois, ils vont bien et ne laissent paraître aucun trouble. Par contre, nous ne savons pas comment ils se portent le reste de la semaine, et c'est ce qui m'inquiète, plus que le fait de ne pas savoir où ils se trouvent physiquement.
Le sénateur Meighen : Disposez-vous d'un programme qui permet à la famille des soldats, particulièrement au conjoint, de communiquer avec vous en cas de problèmes? Certains pourraient ne pas savoir quoi faire et vouloir vous parler.
Lcol Manley : Non, rien d'officiel n'a été mis en place à cet effet. Récemment, nous avons eu des cas de traumatisme, pas chez nos anciens combattants, mais chez des membres du régiment. Ces derniers ont pu parler à leur sergent par l'entremise de la chaîne de commandement, et cela a été utile.
À la même période l'an dernier, un de nos soldats s'est suicidé et tout le régiment s'est mobilisé pour retrouver son corps puis s'occuper de la situation. Cela a occasionné d'autres problèmes. Deux des soldats ayant découvert le corps ont eu du mal à s'en remettre. Comme on ne voit pas ces personnes assez souvent, il nous est très difficile de déceler de tels troubles. Pardonnez-moi, pour revenir à votre question, non, nous n'avons pas de système officiel, mais les soldats connaissent leur chaîne de commandement et, dans le cas dont je vous ai parlé, ils se sont prévalus de leur droit d'appeler leur sergent, leur superviseur immédiat.
Le sénateur Meighen : Peut-être que la Force régulière de l'armée devrait rester en contact avec ses membres. Ce que je veux dire, c'est que lorsqu'ils reviennent de mission, ils partent et on ne les revoit plus.
Lcol Manley : C'est un véritable problème. Ce qui m'a le plus dérangé, c'est que lorsque l'armée a organisé cette parade très médiatisée à Edmonton marquant le retour de troupes d'Afghanistan, aucun de mes soldats n'a été invité. Évidemment, nous avons fait notre propre parade. C'est un peu paradoxal et c'est un problème qui n'est pas facile à régler. Nous voulons célébrer le retour des soldats parce qu'ils font partie de notre famille. Toutefois, à l'occasion de cette parade, à laquelle on m'avait convié, j'aurais bien aimé qu'on précise que le PPCLI n'était pas le seul dans cette mission. Je suis moi-même un ancien membre du PPCLI et il me semble que cela aurait été la moindre des choses que de mentionner qu'il s'agissait d'un effort collectif et de remercier tous les régiments de leur contribution. Je suis désolé, mais cette fois-là, je n'ai pas du tout senti qu'on nous était reconnaissant.
Le sénateur Banks : Y a-t-il un centre de ressources pour les familles à Calgary?
Col Wriedt : Oui. Il est situé au quartier général de ma brigade, à Currie.
Le président : On a justement soulevé cette question lorsque nous étions à Edmonton. En fait, on s'inquiétait de la situation que vous venez tout juste de décrire. On avait l'impression de travailler très fort pour demeurer en contact avec les membres et voir à ce qu'ils aillent bien, alors qu'en fait, on a fait bien peu pour la Réserve. À mon avis, il s'agit d'un problème auquel il faut accorder la priorité.
Lcol Manley : Comme je l'ai dit plus tôt, cela me préoccupe beaucoup, surtout si l'on déploie 90 autres personnes. J'ai déjà de la difficulté à demeurer en contact avec les 27 qui viennent de revenir. Ajoutez-en 90, et c'est très difficile pour un seul capitaine travaillant à temps plein de s'occuper du régiment.
Le président : Juste avant de céder la parole au sénateur Atkins, qui est le suivant sur la liste...Vous avez parlé du déploiement de 90 soldats et des différents problèmes et complications que cela occasionnerait. Pour quelle raison vous ne déployez pas deux groupes de 45, l'un à la suite de l'autre, au lieu de 90 à la fois?
Lcol Manley : Je crois que c'est probablement attribuable à une mauvaise planification du commandant.
Le président : Je ne m'attendais pas à ça. Au fil de cette discussion, on aurait dit que de nombreux problèmes seraient atténués si on laissait les gens partir lorsqu'ils le veulent.
Lcol Manley : En fait, je peux vous l'expliquer. Ce qui me préoccupe beaucoup, comme vous l'avez souligné plus tôt, c'est que nous allons déployer 90 soldats. The Calgary Highlanders est un régiment extraordinaire, c'est pourquoi nous pouvons envoyer 90 membres. Par contre, cela n'explique pas ce nombre important. Pendant deux ans, nous n'avons rien fait d'autre que de nous préparer pour cette mission. Notre plan de formation ciblait exclusivement les compétences individuelles et l'expérience collective dont nous avions besoin pour mener à bien nos opérations en Afghanistan. À l'occasion de chaque parade, cérémonie ou dîner régimentaire, nous rappelions à nos membres que nous étions là pour former un corps d'armée prêt à se battre. Notre régiment s'est employé à préparer chacun de ses soldats à la guerre. Cela a eu pour effet d'encourager plus de gens à partir en mission.
Nous avons également travaillé sur un concept consistant à déployer une compagnie d'infanterie efficace au combat. De nombreuses raisons nous empêchent de le faire, et je ne porte aucun jugement, mais le fait que les soldats pouvaient combattre et réussir ensemble a été pour eux un élément de motivation puissant. Par contre, les conditions ne sont pas réunies cette fois-ci pour plusieurs motifs valables. Je ne vais pas m'étendre sur le sujet, mais cela a été un énorme facteur de motivation.
Toutefois, maintenant nous avons atteint une masse critique de gens qui veulent participer. Notre régiment a toujours fonctionné ainsi et défendu cette idée; c'est pourquoi il y a autant de gens qui partent. Je pense que cette masse critique sert à motiver les soldats, et c'est ce qui explique qu'on déploie 90 membres en même temps. À mon avis, il s'agit d'un bon investissement, malgré tout ce que cela implique.
Le sénateur Atkins : Les régiments de Terre-Neuve et Hamilton en ont d'ailleurs tiré une leçon. Je suppose qu'il y a une certaine forme d'intégration, une fois qu'ils sont là-bas, pour limiter les pertes le plus possible en cas de combat.
Je voudrais vous demander autre chose au sujet des 90 hommes et femmes de votre régiment qui sont déployés. D'après ce qu'on entend partout au pays, votre régime est unique. Parmi ces 90 membres, savez-vous si certains ne devraient pas partir?
Lcol Manley : Pour l'instant, il y a 90 volontaires. Nous n'avons pas mené de processus de sélection approfondi pour déterminer si certains n'étaient pas prêts. C'est une question dont j'ai discuté avec le commandant et il devrait également être en mesure de la régler. Nous nous inquiétons du fait que cela vide le régiment et que, par conséquent, notre capacité à déployer des troupes à l'avenir s'en trouvera réduite. Maintenant, étant donné que nous nous retrouvons avec autant de gens motivés, qu'arriverait-t-il si nous les empêchions de partir. Quel message leur enverrions-nous? C'est en partie ma faute car, évidemment, c'est nous qui avons généré cette situation, qui avons créé ce problème. Chose certaine, nous n'avions pas prévu qu'il serait d'une aussi grande importance.
Le sénateur Atkins : Si je comprends bien, l'armée voudrait peut-être, 500 des 2 000 réservistes. Vous parlez de 15 à 20 p. 100 de votre propre régiment. C'est vraiment quelque chose. Vous méritez des félicitations pour le fait de pouvoir le faire.
Sur un autre sujet, de ceux qui sont toujours utiles à toutes les occasions, parlons du traitement. Combien de temps s'écoule entre le moment où vous recevez une demande de renseignements et une demande de service dans la réserve et celui de la confirmation des réservistes? Est-ce que c'est mieux qu'avant? Je suppose devoir poser cette question, parce que c'est un problème depuis quelques années.
Lcol Doherty : Il y a, en gros, deux pistes : les anciens membres de l'armée, des gens qui ont servi dans une unité ou dans l'armée d'une façon ou d'une autre dans le passé. À cause de tout le suivi du parcours qu'il faut faire, généralement, ils rassemblent leurs anciens titres de compétence, bien que cela aussi puisse être assez long. Dans bien des cas, certains de ces gens sont partis parce qu'ils avaient, disons, un problème médical qui pourrait encore être un obstacle.
D'un autre côté, si nous avons, disons, un jeune homme ou une jeune femme civil ou qui vient de terminer ses études secondaires, les délais peuvent être aussi courts que six semaines, du moment que tout est dans l'ordre. Nous avons reçu des gens comme ça.
D'ailleurs, mon recruteur de Classe A, qui est en fonction deux fois par semaine, essaie de se concentrer sur des candidats différents à des moments différents de l'année pour faire concorder les calendriers de formation. Il fera entrer ces jeunes-là dans les programmes de formation pendant l'été. Plus tard dans l'année, il pourrait chercher des gens qui réintègrent l'armée, et il se concentrera sur les demandes d'ex-militaires.
Autrement dit, nous avons affaire à deux types de population. Il est certain qu'on a constaté des améliorations du côté civil. Nous avons encore des problèmes à rengager d'anciens militaires, que nous devrions vraiment faire un effort pour réintégrer. Je suis sûr que nos supérieurs le savent. De fait, notre bureau chef m'a fait remarquer ce problème. Ils ont hoché le menton et affirmé qu'ils comprennent que c'est un problème, mais cela ne relève pas nécessairement des compétences de l'armée à elle seule, sur ce plan.
Le sénateur Atkins : Eh bien, ce devait être ma question suivante. La mutation d'un soldat régulier dans la réserve : quel genre de paperasserie cela entend-t-il, et vice versa?
Lcol Doherty : Tout dépend du point où il en est sa carrière. Par exemple, la semaine dernière, justement, j'ai eu un adjudant-maître de la force régulière, de l'état-major du colonel Wriedt, qui prenait sa retraite de la force régulière. Il a été immédiatement muté à la force de réserve, sans accroc.
Le sénateur Atkins : Cela peut se faire?
Lcol Doherty : Oui, cela peut se faire. Dans le cadre du processus de libération, ils doivent être informés de cette possibilité, et ils peuvent tout simplement passer directement à l'autre service. C'est tout à fait sans accroc. Si pour une raison ou une autre, ils ne le font pas, ce qui arrive le plus souvent, alors on repart de zéro. Là, il faut plusieurs mois, près d'un an, et même 18 mois dans certains cas, pour passer tout le processus. Nous l'avons fait remarquer aux gens du recrutement. De fait, lors de la dernière conférence des commandants, nous avons reçu un représentant de la cellule de recrutement de la force régulière locale, ici, à Calgary, qui nous a dit qu'ils essayaient de régler le problème en allant au module de sortie, aux modules de A&D d'Edmonton pour s'assurer que les gens qui quittaient la force régulière étaient au courant de ces possibilités, et pour que la paperasserie soit faite au bon moment pour qu'ils n'aient pas à repartir de zéro.
Pour ce qui est des mutations des forces de réserve à la force régulière, justement, l'un de mes soldats qui est revenu de l'Afghanistan s'est immédiatement fait muter dans la force régulière. J'en ai généralement deux, peut-être trois par année. Ils ont passé deux, des fois trois, ou même quatre ans dans la réserve, ont atteint le grade de caporal, ont passé leur NQ3 ou NQ5, ce qui veut généralement dire qu'ils sont des participants assez dévoués aux défilés et qu'ils ont fait tout ce qu'ils ont pu pour suivre tous les cours offerts pour arriver à ce point-là. Ce sont généralement mes meilleurs éléments, et j'en perds plusieurs par année qui vont dans la force régulière, ce qui est tout à fait correct.
Je pense qu'en plus de cela, je devrais ajouter que ce n'est que maintenant, du point de vue du recrutement, que les gens de la force régulière commencent à comprendre, particulièrement dans le monde de l'ADS, c'est le nombre de gens de métier partiellement formés ou parfaitement orientés qui sont maintenant dans les rangs de la force régulière qui sont venus de la force de réserve. Ces réservistes ont fait ce choix parce qu'ils se sont habitués au mode de vie et ils ont compris qu'ils l'aimaient. Quand on est un apprenti au SAIT ou ailleurs, la vie se passe largement à essayer d'avoir son ticket, et cetera. Quand on entre dans la force de réserve, on a peu l'occasion de goûter à ce mode de vie. On fournit des gens formés à la force régulière, alors pour ce qui est des mutations, ils se font généralement assez facilement.
Des questions se posent parfois au sujet des quotas, à cause du fait que les cours ne se donnent pas nécessairement pendant les 18 mois suivants, mais ils doivent attendre jusqu'à ce qu'ils puissent intégrer le programme de formation, et ils ont généralement tendance à s'accrocher à leur mutation jusqu'à ce que ce soit possible. Par exemple, le caporal Barnes a dû attendre quelque chose comme un an. Cela a été en partie pendant qu'il était employé, en attendant qu'une place se fasse dans la formation du côté régulier.
Le sénateur Atkins : Colonel Wriedt, on lit que vous n'avez pas de problème d'attrition. C'est unique aussi, parce que ce n'est pas ce que nous entendons généralement où nous allons.
Col Wriedt : En fait, nous avons un problème d'attrition. Nous perdons généralement 17 p. 100 de nos effectifs chaque année.
Je viens de lancer un programme dans cette brigade, pour concentrer nos efforts d'attraction sur la synchronisation entre toutes les unités de la brigade parce que, jusqu'à maintenant, toutes les unités fonctionnaient chacune de son côté, sans coordination globale. Je vais toutes les rassembler en ma qualité de commandant de brigade, pour aider les gens du recrutement.
Actuellement, avec l'attraction et le traitement du recrutement, le niveau de l'effectif se maintient à l'horizontale. Nous avons notre taux d'attrition normal, soit environ 140 à 170 soldats par année. Bon nombre d'entre eux sont partis travailler dans les sables bitumineux. La compétition est très dure avec les réalités actuelles du milieu des affaires, ici, en Alberta. Deuxièmement, et c'est une autre chose qui me tient éveillé la nuit à m'inquiéter, ce sont toutes les mutations entre éléments que nous pourrions avoir quand les soldats choisissent d'aller dans la force régulière. Ils emportent cette mutation entre éléments avec eux. Par exemple, au sujet du colonel Manley, un grand nombre de ses sous-officiers et officiers supérieurs reviendront au régiment parce qu'ils ont des carrières dont ils ont pris un congé sabbatique, mais ce sont le jeune soldat, le jeune tireur, le caporal, le cavalier, le sapeur, qui diront « Eh bien, j'aime bien. Je vais me faire muter au premier régiment du génie de combat ou pour devenir 1PP ». Ce sont eux que nous perdons. Nous ne savons pas où cela va mener, parce qu'il n'y a pas de tradition étayée par des statistiques, ou d'idée de ce que ce sera. Pour répondre à votre question, oui, nous avons de l'attrition. Nous essayons d'y réagir.
Le sénateur Atkins : On dirait que vous vous y arrivez très bien. Ceci m'amène à une autre question, et peut-être y avez-vous déjà répondu en partie. C'est l'effet sur les instructeurs et les sous-officiers dans le système. Est-ce que vous arrivez à les garder, ou avez-vous le même problème que l'armée régulière, qu'un grand nombre de ces gens en arrivent au point où ils veulent prendre leur retraite?
Col Wriedt : Il n'y a pas de modèle quant au cheminement de personnes différentes. Ce qu'on constate généralement, avec le réserviste pur, c'est que quand il atteint le grade de caporal, de caporal chef, ou dans le cas d'un sergent ou d'un officier, un lieutenant, un capitaine, des choses commencent à se passer en même temps dans sa carrière. Autrement dit, il commence à être chargé de plus de responsabilités dans sa carrière civile. De plus, un certain pourcentage d'entre eux se marient. Ils ont maintenant de jeunes familles. Ce que vous constaterez, de temps à autre, c'est qu'un certain pourcentage de réservistes partent pendant une certaine période pour poursuivre une carrière civile et fonder leur famille. Dans bien des cas, un lieutenant ou un capitaine, un caporal chef ou un sergent, réintégrera un jour la réserve parce qu'il aime cela.
Col Doherty : Si je peux ajouter quelque chose, ceci décrit exactement ma carrière. J'ai pris quatre années de congé, potentiellement de la réserve. J'avais trois jeunes enfants. C'est qu'après trois ou quatre mois de fins de semaine consécutives d'entraînement, ou à suivre une formation de recrue, en tant qu'officier de cours ou que jeune lieutenant, ma femme a décidé que je devrais arrêter quelques années, mais vous pouvez voir que je suis revenu.
Le sénateur Atkins : Je pourrais poser la question au colonel Manley. Avec la quantité de roulement ou de mouvement dans votre régiment, avez-vous un problème à garder vos sous-officiers et instructeurs? Ils veulent faire partie du changement de garde.
Col Manley : Notre préoccupation immédiate, c'est que nous aurons deux adjudants, un sergent et quatre caporaux chefs qui vont rester derrière. C'est un problème. Cependant, l'avantage, c'est que quand ce groupe reviendra, j'aurai un régiment hautement compétent. Ces gens-là auront déjà fait l'expérience d'une mission. Le problème, ce sera de le garder. Ce que je crois, c'est que mieux nous les gérons et nous gérons leur famille en leur absence, plus nous aurons de chance de les garder.
Le sénateur Atkins : Quand ces soldats reviennent, ils ont de l'expérience, ils ont été en mission en Afghanistan, comment s'intègrent-ils avec les autres soldats? Est-ce qu'ils sont utiles? Comment sont-ils traités à leur retour, comme des vétérans?
Col Manley : Bien sûr, chaque soldat qui n'y est pas allé a du mal à accepter qu'il n'y va pas, et il admire les anciens combattants parce qu'ils ont vécu une expérience que tout soldat veut vivre.
Le sénateur Atkins : Je m'interroge sur la situation inverse.
Col Manley : Ce que pensent les vétérans de la façon dont on les traite?
Le sénateur Atkins : Ou comment ils traitent...
Col Manley : ... comment ils traitent les autres? Je pense que la plupart ont eu un moment dans leur vie où ils ont compris que c'est une mission à laquelle ils ne pourront pas participer, et il pourront faire partie de la prochaine. Je pense qu'ils comprennent que tout le monde ne peut pas être de toutes les missions. Il n'y a pas eu beaucoup d'animosité sur ce plan.
En fait, une chose que nous faisons, en reconnaissant que ce pourrait être un problème, c'est que nous faisons les vétérans parler aux soldats qui vont partir en mission — de fait, à tous nos soldats, et ils disent « écoutez, quand j'étais là-bas, voici ce qui est arrivé, cet équipement-ci était bon, celui-là ne l'était pas. Achetez ceci, n'achetez pas cela ». Les petites choses dont les soldats s'inquiètent. Cela aide tout le monde à se sentir partie de la même famille encore.
Le sénateur Atkins : Donc, c'est du mentorat?
Col Manley : Oui, c'est un excellent terme pour décrire cela.
Col Wriedt : De la perspective du leadership, et c'est l'énigme qui s'est posée pour moi, et qui se pose à tous les commandants, c'est qu'il y aura un certain pourcentage de soldats qui peuvent être déployés. Il y a aussi un certain pourcentage de soldats, à tout moment, qui ne peuvent être déployés à cause de la famille, de la carrière, ce genre de choses, mais c'est quand on se retrouve au manège militaire qu'on forme une équipe déterminée à ce que tout s'imbrique bien. Si on n'a pas des gens des manèges militaires qui peuvent assurer le bon fonctionnement de l'organisation, alors c'est un échec collectif. Comme une équipe de hockey, une équipe de baseball, on a besoin de tout le monde; tous les matelots sur le pont, si on veut.
Le sénateur Moore : À propos d'une question qu'a posée le sénateur Atkins, comment les réservistes sont-ils traités et reçus par les membres de l'armée régulière sur le terrain des missions? Est-ce qu'ils sont considérés comme des égaux? Est-ce qu'ils sont jugés inférieurs? Est-ce qu'ils s'intègrent bien sur le terrain, dans les situations de combat?
Lcol Manley : Je pense que les soldats, quand ils arrivent, passent par deux ou trois phases différentes. Ils sont souvent considérés comme des citoyens de deuxième classe, mais d'après ce que j'entends de mes soldats, il se passe très peu de temps avant que tout le monde comprenne qu'ils sont capables et qu'ils veulent être là. De fait, le colonel Hope, qui a commandé les derniers bataillons, m'a dit qu'il aimerait bien avoir toute une compagnie de Highlanders de Calgary parce que ce sont des soldats motivés. Ils veulent être là. Ce ne sont pas des gens qui se retrouvent là parce qu'ils y sont obligés. Ils quittent leur foyer, leur emploi pour y aller, alors ils sont vraiment motivés pour être sur place et ils travaillent fort. Ils veulent gagner le respect de leurs camarades de la force régulière. Sur le théâtre opérationnel, surtout pour les soldats qui ont été intégrés dans les compagnies de combat qui étaient sur le terrain, il n'y a pas de différence. Mes soldats ont fait face aux mêmes dangers, ont gagné le même respect et sont décorés pour leurs efforts, alors non, je ne pense pas qu'il y ait de problème.
Le sénateur Moore : Je ne voulais pas laisser entendre qu'il pouvait y avoir un problème. Je voulais seulement savoir, quand les soldats sont revenus, le débreffage, comment ils ont été reçus?
Lcol Manley : Nous les avons débreffés, et ils ont été très bien accueillis. Comme dans n'importe quelle toute grosse unité de la force régulière, chaque fois qu'on va là-bas, il faut gagner le respect des autres. Une fois que c'est fait, ils sont très bien reçus.
Le sénateur Moore : Est-ce que quelqu'un d'autre veut essayer de répondre?
Lcol Manley : En fait, dans la situation actuelle de la force régulière, et c'est probablement là où la force de réserve tire profit de l'expérience de la force régulière, à l'époque où on était en ancienne Yougoslavie, des bataillons entiers allaient là-bas. Maintenant, c'est une force opérationnelle, et c'est une organisation composite d'éléments de tous les coins du pays, de la force régulière et de la force de réserve. Le commandant du groupe opérationnel, le commandant de compagnie, les commandants d'escadrons, ils savent qu'ils ont un temps limité pour rassembler l'équipe et l'amener à bien collaborer. Les différences s'estompent généralement très vite, parce qu'ils devront tous compter les uns sur les autres quand les balles commenceront à siffler.
Le sénateur Moore : Exactement.
Lcol Doherty : Je voudrais ajouter à cela mon expérience avec les soldats lors du dernier changement de garde. Il y a eu un soldat qui a éprouvé un problème avec un sous-officier particulier, c'était un cas isolé, mais dans l'ensemble, ils ont tous été respectés; ils ont tous bien collaboré. Il a vraiment été intéressant de voir avec quelle rapidité les impératifs de la tâche à accomplir l'ont emporté sur toute autre préoccupation, parce que ces gens de la force régulière devaient compter sur le gars d'à côté qui était de la force régulière ou de la force de réserve, mais il avait sa place, et c'est lui qui devait vous donner l'élément particulier d'équipement qu'il vous fallait. Peu importe d'où il venait. Il était là, et il travaillait pour vous.
Le sénateur Moore : Colonel Wriedt, vous avez parlé du traitement. Nous avons eu des témoins qui nous ont dit que les Forces canadiennes avaient l'intention de mieux recruter, plus recruter, tant pour la force régulière que la force de réserve. Et puis vous dites que cela peut prendre de six semaines à 18 mois. Pourquoi cela? Voilà des jeunes hommes et des jeunes femmes qui veulent s'engager. Pourquoi cela prendrait-il si longtemps? Est-ce qu'il faut plus de recruteurs? Quel est le processus?
Lcol Wriedt : Actuellement, le système de recrutement est en train de subir de grands changements dans la manière dont il fonctionne parce que, pendant des années, il était fondé sur la prémisse du maintien d'une force stable. Maintenant, nous sommes en situation de croissance, alors il faut changer le mode de fonctionnement.
Dans le cas du réserviste, si on a un candidat admissible qui se présente, il est en bonne forme physique, il n'a aucun problème avec la loi ou autre, le processus est assez rapide.
Le sénateur Moore : Rapide, c'est quoi? Est-ce que c'est six semaines?
Col Wriedt : Comme le dit le colonel Doherty, six semaines n'est pas déraisonnable.
Lcol Doherty : Ils ont déjà été plus rapides, de plusieurs semaines.
Col Wriedt : S'il y a un problème, comme l'emploi de substances prohibées, par exemple, il n'y a pas de limite. Ce peut être très compliqué et chronophage. Il en est de même si la recrue a un problème physique. Bien des jeunes d'aujourd'hui, par exemple, ont des problèmes dentaires. Et cela pose des difficultés. Les troubles médicaux peuvent avoir une incidence mais, en général, si on a un candidat admissible, on peut l'intégrer très rapidement. Quand les gens disent « Eh bien, c'est vrai qu'il faut du temps dans le cas d'un candidat qui n'est pas nécessairement admissible et ne peut pas passer rapidement », ma réponse, c'est « N'oubliez pas ceci. Nous allons mettre entre les mains de ces gens des armes chargées, et la vie de leurs compatriotes pourrait dépendre de ce qu'ils font ou ne font pas en situation de combat, alors la mise est très, très élevée, en notre ère ».
Le sénateur Moore : Je n'avais jamais pensé qu'une dent de sagesse pouvait causer un problème. Je n'avais jamais pensé qu'un plombage peut retarder l'entrée dans la réserve ou la force régulière d'une personne athlétique.
Col Wriedt : Si un soldat est en déploiement pour longtemps dans la province de Panjwayi, qu'il se retrouve soudainement avec un abcès et il n'y a pas d'hélivac pour venir le chercher, on se retrouve avec un soldat incapable de fonctionner et il en faut un autre pour s'occuper de lui en préparation pour le système d'extraction, pour commencer à l'évacuer, parce qu'il se retrouve avec le visage boursoufflé, il a une infection, et cetera.
Le sénateur Moore : Mais il y a des hôpitaux. J'en ai visités. Je trouve seulement que ces délais sont très longs. Excusez-moi, colonel Doherty, vous alliez dire quelque chose?
Lcol Doherty : J'ai seulement un autre commentaire au sujet du processus de recrutement. Du côté de la force régulière, ces gens-là sont généralement assez motivés pour s'assurer que tous leurs papiers, certificats de naissance, relevés de notes et tout le reste est en ordre. Ils arrivent avec ces documents. Quand il s'agit du réserviste, là où la situation est inversée, c'est qu'il explore ses choix, il peut n'être pas nécessairement aussi diligent que quelqu'un qui envisage une carrière complète et dit, d'accord, il me faut mon relevé de notes la semaine prochaine.
Le sénateur Moore : Les relevés de notes de l'école secondaire, l'université?
Lcol Doherty : Les notes, tout. Quand je parle avec mes recruteurs de Classe A, ils disent qu'ils peuvent passer deux à trois semaines, et des fois même un mois à essayer de rassembler la trousse de documents, rien que pour l'ouverture officielle du dossier, alors nous ne sommes pas nécessairement les seuls coupables sur ce plan. De fait, les recruteurs de mon unité, c'est la plus grande partie de leur travail, l'attraction, et de s'assurer que le candidat arrive au centre de recrutement avec tous les documents dont il a besoin. Nous leur tenons la main. Ils ne viennent pas nécessairement bien préparés. Bon nombre d'entre eux sont seulement en réflexion. Ce n'est pas un choix de carrière en tant que tel, alors le point de mire est légèrement différent.
Le président : Messieurs, cela a été un après-midi très constructif pour nous. Je ne voudrais pas que vous partiez sans vous avoir exprimé l'admiration et le respect que nous avons tous pour le travail que vous et vos gens faites. Nous vous considérons comme l'épine dorsale du système de sécurité du Canada. Nous reconnaissons l'importance qu'ont les citoyens soldats pour la sécurité du Canada, et nous apprécions beaucoup la manière dont vous le faites. De fait, nous sommes parfois ébahis que vous arriviez à tout gérer cela, et je soupçonne très fort que la règle des 37 heures et demie de travail ne s'applique à aucun de vous qui êtes devant moi.
Je vous serais très reconnaissant de transmettre à vos régiments nos meilleurs vœux, notre respect, les remerciements du Parlement du Canada, et que vous leur disiez que nous sommes venus ici parce que nous voulions entendre exprimer leurs points de vue; nous voulions connaître leurs problèmes, de leurs préoccupations, ce qui va bien et ce qui va moins bien. Il est très important pour nous d'avoir ces échanges. Nous aimerions trouver des moyens de le faire plus souvent, mais ce genre de dialogue est nécessaire. C'est un processus d'apprentissage important pour nous tandis que nous avançons, déterminés à recommander des politiques au gouvernement.
Merci pour votre patriotisme. Merci pour ce que vous faites pour le Canada. Nous vous en sommes très reconnaissants.
La séance est levée.